Les Biotechnologies Rouges

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Biotechnologies et applications

Cours Dr BAGRE Issa

Biotechnologies rouges et ses applications

INTRODUCTION

Soigner le cancer grâce aux protéines produites dans du lait de lapin, faire
pousser un maïs qui génère son propre pesticide, remplacer les cellules du
cœur détruites lors d'un infarctus, produire des raisins et des agrumes sans
pépins, faciliter l'extraction de métaux en utilisant des bactéries, ce sont
quelques-unes des futures ou actuelles applications des biotechnologies…

La biotechnologie est un domaine clairement multidisciplinaire


impliquant la biochimie, la biologie moléculaire, la génétique,
l'immunologie, la microbiologie, la pharmacologie, la fermentation,
l'agriculture, pour ne citer que quelques-uns. Chacun des domaines
contributifs apporte son propre vocabulaire spécial et les normes de
nomenclature et les difficultés considérables de communication.

Les biotechnologies recouvrent l’ensemble des techniques qui utilisent les


ressources d'organismes vivants (tissus, cellules, protéines …) ou de leurs
composants (gènes, enzymes …), recombinés ou non, pour produire du
savoir, des biens ou des "bioservices" (fourniture de services basés sur les
biotechnologies comme la production de protéines, d'animaux
transgéniques)

On les restreint souvent à tort au génie génétique (modification des


génotypes par transgenèse, qui consiste à introduire des gènes dans des
cellules, pour qu'elles acquièrent de nouvelles propriétés provenant d'une
espèce différente) et aux différentes technologies issues de la transgenèse,
permettant notamment de décrypter ou de modifier le patrimoine
génétique des espèces (cas des OGM). Les transformations génétiques
d'organismes unicellulaires ou de virus sont relativement simples. Par
contre, les techniques sont beaucoup plus complexes pour les cellules
animales et végétales.

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1/ Les différents types de Biotechnologie

Les biotechnologiques peuvent se classer en 5 catégories : rouge,


blanche, verte, bleu et jaune.

- La biotechnologie rouge concerne les procédés médicaux comme la


conception d'organismes pour produire des antibiotiques ou le
développement de thérapies géniques à travers les manipulations du
génome (matériel génétique d'une espèce).

- La biotechnologie blanche (également appelée biotechnologie grise)


est relative aux process industriels, comme les développements
d'organismes vivants destinés à la réalisation de production chimiques.
Elle est généralement moins consommatrice de ressources que les
procédés industriels traditionnels.

- La biotechnologie verte désigne les applications à l'agriculture : c'est


le cas du développement de plants transgéniques pouvant croître dans des
conditions environnementales particulières, avec la présence ou l'absence
de certains produis chimiques.

- La biotechnologie bleue, repose sur l'exploitation des ressources


maritimes pour créer des produits et des applications d'intérêt industriel.
Compte tenu du fait que la mer présente la plus grande biodiversité, il
existe potentiellement une vaste gamme de secteurs pour bénéficier de
l'utilisation de ce type de biotechnologie.

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- La biotechnologie jaune, comprend toutes les applications de la
biotechnologie directement liées à l'environnement. Ces applications
peuvent être divisées en deux branches principales: l'entretien de la
biodiversité et l'élimination des contaminants.

La bioinformatique concerne, elle, une recherche multidisciplinaire


(impliquant biologistes, informaticiens, mathématiciens et physiciens)
destinée à résoudre un problème scientifique posé par la biologie. La
bioinformatique décrit les applications résultant de ces recherches
(analyse du génome, modélisation moléculaire, analyse d'image,
séquençage du génome…).

Les nano-biotechnologies utilisent des organismes vivant à taille nano


microscopique : des micromoteurs peuvent ainsi utiliser des bactéries
mobiles qui se déplacent en rampant, pour faire tourner un rotor
mécanique.

2/ La biotechnologie rouge

La biotechnologie rouge concerne les domaines de la santé, du


médicament, du diagnostic, de l'ingénierie tissulaire ainsi que le
développement de procédés génétiques ou moléculaires ayant une finalité
thérapeutique. La biotechnologie rouge comprend la production de
vaccins et d'antibiotiques, le développement de nouveaux médicaments,
les techniques de diagnostic moléculaire, les thérapies de régénération et
le développement du génie génétique pour guérir les maladies par la
manipulation génétique.

C'est dans cette catégorie que les efforts les plus importants ont été
entrepris. On estime que depuis 2010, 80% des nouveaux médicaments
sont issus, directement ou indirectement, des biotechnologies modernes,
ce qui explique l'engouement des industriels et des financiers, en
particulier aux États-Unis. C'est aussi dans cette catégorie que les
biotechnologies utilisant les cellules souches embryonnaires, les
techniques du clonage et les outils de diagnostic génétique posent de
redoutables questions d'éthique et imposent des limites d'emploi.

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Grâce aux outils du génie génétique et à la connaissance du génome
humain, on obtient de nombreuses informations permettant d'identifier
des cibles moléculaires nouvelles qui sont d'une grande importance dans
l'approche thérapeutique des pathologies humaines ou animales. On peut
estimer entre 5 000 et 10 000 le nombre de ces cibles potentielles, alors
que, aujourd'hui, seules moins de 500 d'entre elles sont exploitées.
Repérer dans cette abondance les plus pertinentes représente un véritable
défi.

C'est avec la production de molécules complexes, issues du vivant


(hormones, etc.), que les biotechnologies ont acquis leurs lettres de
noblesse. L'usine cellulaire, qu'elle soit bactérienne ou eucaryote, se
révèle d'une remarquable efficacité, capable de fabriquer, de manière plus
ou moins fidèle, des molécules ou des substances qu'aucun chimiste ne
pourrait synthétiser. De plus, les produits biotechnologiques sont,
généralement, beaucoup plus sûrs que les extraits d'organes humains ou
animaux qui peuvent être contaminés par des virus ou d'autres éléments.

3/ Les applications

Les biotechnologies appliquées à la santé (plus des trois quarts du chiffre


d'affaires du secteur) concernent la santé humaine et animale, que ce soit
pour la prévention, la thérapie ou le diagnostic. La production de
molécules pharmaceutiques par voie biotechnologique représente un
marché en pleine croissance, estimé aujourd'hui à 15% du marché des
médicaments.

La première molécule thérapeutique produite par un micro-organisme est


la pénicilline, sécrétée par la moisissure Penicillium notatum et
administrée pour la première fois en 1941 aux soldats anglais de la
seconde guerre mondiale. La première molécule thérapeutique issue d'un
micro-organisme génétiquement modifié fut l’insuline humaine, utilisée
pour traiter les personnes diabétiques, produite par la bactérie Escherichia
coli à partir de 1983. Encore actuellement, l'industrie pharmaceutique
emploie très souvent la bactérie Escherichia coli K 12 et la levure
Saccharomyces cerevisiae, cultivées en masse dans des bioréacteurs. Ces
microorganismes non pathogènes ne présentent pas de risques

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biologiques mais il convient d'évaluer les risques liés à leur éventuelle
modification génétique.

Parmi les nouvelles molécules thérapeutiques produites par des OGM, la


plus grande part (20%) est représentée par les anticorps monoclonaux
(ACm). Ces derniers sont utilisés pour diagnostiquer et traiter des
pathologies (le plus souvent des cancers). Chaque anticorps a la propriété
de se fixer spécifiquement à la surface des cellules et d'inhiber leur
prolifération ou de provoquer leur mort.

Les ACm sont également employés dans les nanomédicaments. Le


principe actif est protégé dans une nanocapsule portant à sa surface des
ACm se fixant sur la cellule cible, par exemple une cellule cancéreuse (cf.
Figure 2). Ces nanomédicaments permettent une personnalisation des
traitements en amenant le principe actif directement vers les cellules
cibles du patient. Ce ciblage augmente l'efficacité du principe actif et
diminue les effets secondaires en évitant de toucher les cellules saines.

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Quelques applications existantes ou en développement :

- Les médicaments et vaccins

Jusqu'ici, les médicaments (hors vaccins et sérums) ont été produits par
l'industrie chimique. Depuis les années 1980, les biotechnologies sont
utilisées pour produire des traitements impossibles ou trop coûteux à
obtenir par synthèse chimique. La première application a été la
production de vaccins et d'antibiotiques. Les biotechnologies permettent
par exemple de remplacer des produits extraits d'organes humains ou
animaux par des molécules produites par génie génétique.

Exemple : l'insuline produite par des bactéries et non plus extraite de


pancréas de porc, pour traiter le diabète.
( Les biomédicaments Production de médicaments à partir de la matière vivante : tissus, cellules, protéines. Les

plus courants : les insulines, l'érythropoïétine (EPO), -pour les anémies graves, en accompagnement notamment

des chimiothérapies-, les immunomodulateurs, et les antiTNF alpha dans les maladies auto-immunes du type

polyarthrite rhumatoïde.)

- La Médecine "prédictive"

Grâce à des tests génétiques, on espère pouvoir prévoir et surtout prévenir


l’apparition de certaines maladies. Dans ce cadre, une éthique et une
législation claire sont indispensables. Exemple : Les diagnostics pré-
symptomatiques pour les affections cérébrales héréditaires, le cancer du
sein…

- Le clonage

Le Clonage Thérapeutique : création, à partir de cellules, d'organes ou des


tissus humains à des fins thérapeutiques. Exemple : Dans le cas de
l'infarctus du myocarde, création de cellules musculaires cardiaques pour
remplacer les cellules du cœur détruites.

Le Clonage reproductif : la transgenèse associée au clonage permet


notamment de:

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- transférer aux animaux des gènes de résistance naturelle à des virus.

- créer des animaux "idéaux" pour les tests : la souris a été ainsi
essentielle pour la compréhension des affections du type de la "maladie
de la vache folle".

- Le séquençage du génome humain

Les techniques de séquençage de l'ADN sont de ces biotechnologies


rouges qui sont à l'origine d'une véritable révolution dans le secteur de la
médecine humaine. En effet, mieux comprendre la manière dont
s'organise l'information génétique a permis de faire un lien avec de
nombreuses pathologies. À tel point que les biomarqueurs génétiques, ces
signatures qui témoignent de l'activité d'une maladie au niveau des gènes,
semblent sur le point de devenir la clé d'une médecine personnalisée.

Grâce à lui, la connaissance de l'ADN permet de nouvelles méthodes de


diagnostic et de traitement de certaines maladies. Les principaux
débouchés sont:

- La thérapie génique : Utilisation d'un gène comme médicament ou


réparation des gènes, l'équivalent d'une microchirurgie génique.

Exemple : pour le cancer, renforcement de l’efficacité de


l’immunothérapie. L'intégration dans les cellules cancéreuses de gènes
stimule le système immunitaire qui peut alors détruire les tumeurs.

- La Protéomique : Connaître les séquences des gènes humains aide à


cerner l'identité des protéines fabriquées par l'organisme. Ces protéines
sont des "cibles" pour les médicaments, dont les molécules interagissent
avec elles pour activer ou bloquer son fonctionnement.

- La pharmacogénomique : elle étudie l'Interaction entre l'hérédité


génétique d'un individu et la réponse de son corps aux médicaments.
L'objectif: trouver le moyen d'administrer le bon médicament à la bonne
personne, au bon moment. Exemple de l'Herceptin : médicament
spécialement formulé pour les cancers du sein des patientes dont les
tumeurs avaient une quantité très élevée d'une protéine, le HER2. Le
médicament n'a pas d'effet si la quantité est normale. Ici, la

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pharmacogénétique permet de savoir à l'avance si l'on doit appliquer le
traitement ou si le génome de la personne en question n'est pas approprié.
(Mob : les matériaux d'origine biologique Ce sont des substances ou molécules fabriquées naturellement ou par

un procédé biologique. L'origine peut-être bactérienne, végétale ou animale. Ces matériaux peuvent être : - des

fibres (soie d'araignée, collagène, cellulose bactérienne pour les pansements, la peau artificielle ou les implants) -

des gels (latex, polysaccharides pour les lentilles ophtalmiques, les pansements, la peau artificielle) - des matériaux

"massifs" (corail, nacre, céramiques pour des prothèses, des substituts osseux) )

- Les biotechnologies de la santé pour diagnostiquer

Au-delà de soigner les malades, les biotechnologies promettent également


de pouvoir mieux diagnostiquer les maladies, à l'aide de puces à ADN
(dans le domaine de la cancérologie, elles permettent de réaliser des
typages tumoraux) , par exemple ou encore de biocapteurs.

4/ Les risques liés aux Biotechnologies

Les risques professionnels associés à ces nouvelles technologies sont


semblables à ceux que l’on retrouve habituellement dans les différents
secteurs d’activité concernés. Il s’agit notamment de risques biologiques,
chimiques, mécaniques, électriques, d’incendie-explosion... S'ajoutent des
risques spécifiques aux biotechnologies tels que la construction
d'organismes génétiquement modifiés (OGM) et l'usage de bioréacteurs
nécessaires à la multiplication des micro-organismes.

En effet, il peut s'avérer nécessaire de modifier génétiquement un


organisme (cf. Figure 1) afin d'améliorer son rendement ou de lui faire
produire une molécule qu'il ne synthétisait pas naturellement. Cet
organisme est choisi en fonction de nombreux critères, notamment son
innocuité, la connaissance parfaite de son génome et des protéines qu'il
est capable de synthétiser, la possibilité de le cultiver en masse et ses
capacités à sécréter la molécule dans le milieu extérieur (limitant ainsi les
étapes de purification).

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Lors de la construction d'OGM, le personnel des laboratoires de
recherche peut manipuler des organismes ou des cellules de diverses
origines, des fragments de génome, des virus modifiés ou non, ce qui
rend l'évaluation des risques biologiques particulièrement complexe.
Celle-ci doit être effectuée en équipe, associant les chercheurs et les
acteurs de la prévention des risques en entreprise. L'évaluation se fait
avant toute manipulation conduisant à modifier le génome d'un
organisme. En France, elle doit être rédigée et soumise au Haut Conseil
des biotechnologies (HCB), qui donne son avis sur les risques des
manipulations et les niveaux de confinement. Le ministère en charge de la
recherche reçoit l'avis du HCB et délivre les agréments nécessaires au
laboratoire.

L'évaluation des risques liés à la construction d’OGM se fait en analysant


chaque élément entrant dans sa fabrication:

• le gène d'intérêt (aussi appelé « insert », puisqu'on cherche à l'insérer


dans le génome de l'organisme hôte): le HCB distingue les inserts de type

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A, jugés non dangereux, des inserts de type B, présentant un danger (par
exemple, les gènes codant pour des protéines entraînant des cancers, pour
des toxines, des allergènes…);

• le vecteur: son danger dépend de sa nature initiale (virus du rhume,


virus de l'immunodéficience humaine, virus de bactérie, virus d'insecte,
plasmide…), de la façon dont il a été rendu inoffensif et de sa stabilité
dans la cellule cible;

• l'organisme donneur ou receveur du gène: le Code du travail et le HCB


attribuent un niveau de danger aux différents organismes pouvant être
utilisés.

De son côté, la production industrielle de microorganismes modifiés ou


non, se fait à l'aide de bioréacteurs de taille très variable selon les secteurs
(de 5 litres à 1 million de litres). Il s'agit d'enceintes closes sous pression
contrôlée, alimentées en milieu de culture et ensemencées par une souche
spécifique. Les paramètres physico-chimiques (température, pH,
aération…) sont régulièrement surveillés pour assurer le maintien des
conditions de culture optimale pour la production de la molécule d'intérêt.

L'évaluation des risques liés à l'usage d'un bio-réacteur doit tenir compte
de différents points:

• le danger des produits générés (molécule, gaz…),

• le niveau de pression du bioréacteur,

• les conditions d'ensemencement et de prélèvement,

• les conditions de nettoyage/désinfection,

• les procédures en cas de dysfonctionnement,

• les procédures de maintenance.

Au-delà de la construction d’OGM et de l’utilisation de bioréacteurs,


d’autres procédés propres à chaque secteur d’activité peuvent se révéler
problématiques pour la sécurité et la santé des salariés.

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CONCLUSION

La biotechnologie comme "l'utilisation de systèmes vivants et


d'organismes pour développer ou fabriquer des produits, ou toute
application technologique qui utilise des systèmes biologiques, des
organismes vivants ou des dérivés de ceux-ci, pour fabriquer ou modifier
des produits ou des procédés à usage spécifique" a développé de
nouveaux outils et produits, ceux-ci sont utiles dans la recherche,
l'agriculture, l'industrie et la clinique. Cependant, il existe quatre
principales préoccupations sociétales dans le domaine de la
biotechnologie :

1. Dommage à l'environnement - Cette préoccupation est peut-être la


plus citée par les opposants aux OGM. Il est très difficile de prédire ce
qui se passera dans un écosystème où un nouvel organisme a été
introduit, qu'il soit génétiquement modifié ou non.

2. Bioterrorisme - Les gouvernements craignent que les terroristes


utilisent la biotechnologie pour créer de nouveaux Superbugs, des virus
infectieux ou des toxines, pour lesquels nous n'avons pas de remède.

3. Sécurité de laboratoire / production - Il est difficile de se protéger si on


ne sait pas ce sur quoi on travaille. Certaines nouvelles technologies,
généralement non-biologiques telles que les nanoparticules, font des
lignes de production commerciales avant d'avoir été suffisamment testées
pour la sécurité. On s'inquiète également de la sécurité des techniciens
dans les laboratoires, même dans des conditions sécurisées, en travaillant
avec des organismes de virulence inconnue.

4. Questions éthiques - Outre le débat séculaire sur la question de savoir


si les gènes de clonage sont sacrilèges, d'innombrables questions éthiques
surviennent sur la pertinence des licences d'inventions génétiques et
d'autres problèmes de propriété intellectuelle. En outre, la construction de
gènes à partir de zéro (le premier gène artificiel a été synthétisé en 1970)
signifie que nous pourrions peut-être créer la vie à partir d'une soupe
chimique qui va certainement contre les croyances éthiques ou religieuses
d'un nombre important de personnes.

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