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    Celui Qui N'avait Jamais Vu La Mer Celui Qui N'avait Jamais Vu La Mer

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    Nantawat Boonchoo
    Le document décrit l'arrivée de la mer sur une plage de rochers, avec Daniel qui court devant les vagues pour échapper à l'avancée de l'eau.

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    184 Celui qui n'avait jamais vu la mer Celui qui n'avait jamais vu la mer 185

    plaine des roches blanches, le grand désert où bril- « Ram ! Ram ! »


    laient les mares d'eau cruelle. Les animaux marins et car c'était lui qui commandait la mer. SI
    les coquillages avaient disparu, ils s'étaient cachés Il fallait courir vite ! La mer voulait tout prendre, les
    dans les failles, sous les rideaux des algues. 67 rochers, les algues, et aussi celui qui courait devant
    Daniel se pencha en avant sur le rocher plat, et il mit elle. Parfois elle lançait un bras, à gauche, ou à droite,
    sa chemise sur sa tête, pour ne plus voir la lumière et le un long bras gris et taché d'écume qui coupait la route
    sel. Il resta longtemps immobile, la tête entre ses de Daniel. Il faisait un bond de côté, il cherchait un
    genoux, tandis que la danse brûlante passait et repas- passage au sommet des roches, et l'eau se retirait en
    sait sur le fond de la mer. 68 suçant les trous des crevasses. 52
    Puis le vent est venu, faible d'abord, qui marchait Daniel traversa plusieurs lacs déjà troubles, en
    avec peine dans l'air épais. Le vent grandit, le vent nageant. Il ne sentait plus la fatigue. Au contraire, il y
    froid sorti de l'horizon, et les mares d'eau de mer avait une sorte de joie en lui, comme si la mer, le vent
    frémissaient et changeaient de couleur. Le ciel eut des et le soleil avaient dissous le sel et l'avaient libéré. 53
    nuages, la lumière redevint cohérente. Daniel entendit La mer était belle ! Les gerbes blanches fusaient dans
    le grondement de la mer proche, les grandes vagues la lumière, très haut et très droit, puis retombaient en
    qui frappaient leurs ventres sur les rochers. Des gout- nuages de vapeur qui glissaient dans le vent. L'eau
    tes d'eau mouillèrent ses habits et il sortit de sa nouvelle emplissait les creux des roches, lavait la
    torpeur. ya croûte blanche, arrachait les touffes d'algues. Loin,
    La mer était là, déjà. Elle venait très vite, elle près des falaises, la route blanche de la plage brillait.
    entourait avec hâte les premiers rochers comme des Daniel pensait au naufrage de Sindbad, quand il avait
    îles, elle noyait les crevasses, elle glissait avec un bruit été porté par les vagues jusqu'à l'île du roi Mihrage, et
    de rivière en crue. Chaque fois qu'elle avait englouti un c'était tout à fait comme cela, maintenant. Il courait
    morceau de roche, il y avait un bruit sourd qui vite sur les rochers, ses pieds nus choisissaient les
    ébranlait le socle de la terre, et un rugissement dans meilleurs passages, sans même qu'il ait eu le temps d'y
    l'air. 50 penser. Sans doute il avait vécu ici depuis toujours, sur
    Daniel se leva d'un bond. Il se mit à courir vers le la plaine du fond de la mer, au milieu des naufrages et
    rivage sans s'arrêter. Maintenant il n'avait plus som- des tempêtes. 54
    meil, il ne craignait plus la lumière et le sel. Il sentait Il allait à la même vitesse que la mer, sans s'arrêter,
    une sorte de colère au fond de son corps, une force qu'il sans reprendre son souffle, écoutant le bruit des
    ne comprenait pas, comme s'il avait pu briser les vagues. Elles venaient de l'autre bout du monde,
    rochers et creuser les fissures, comme cela, d'un seul hautes, penchées en avant, portant l'écume, elles glis-
    coup de talon. Il courait au-devant de la mer, en saient sur les roches lisses et elles s'écrasaient dans les
    suivant la route du vent, et il entendait derrière lui le crevasses. 59
    rugissement des vagues. De temps en temps, il criait, Le soleil brillait de son éclat fixe, tout près de
    lui aussi, pour les imiter : l'horizon. C'était de lui que venait toute cette force, sa

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