Droit de L Union Europeenne 9782297078276
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Stéphane Leclerc
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Stéphane Leclerc
Droit
de
l'Union
européenne 6e
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Présentation
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6 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
Avertissement
Depuis l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, l’Union européenne s’est vue dotée d’une
personnalité juridique (TUE, art. 47) et a repris les compétences qui étaient auparavant dévo-
lues à la Communauté européenne. Cette substitution a eu pour conséquence que le droit
communautaire est devenu, depuis le 1er décembre 2009, le droit de l’Union. Néanmoins, le
terme « droit communautaire » sera tout de même utilisé dans le présent Mémentos lorsqu’il
cite une jurisprudence des juridictions de l’Union antérieure au Traité de Lisbonne.
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Plan de cours
Présentation 5
PARTIE 1
Les sources du droit de l’Union
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DE COURS A - L’adaptation des traités avec l’approbation des États membres 25
B - L’adaptation des traités sans l’approbation des États membres 26
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DE COURS
Chapitre 3 Le droit conventionnel 49
PLAN
1 Les accords conclus entre les États membres 53
A - Les accords entre États membres en application des traités
constitutifs 53
B - Les accords entre États membres en dehors des traités
constitutifs 55
2 Les accords conclus par les États membres avec des pays tiers ou
des organisations internationales 55
A - Les accords antérieurs à l’entrée en vigueur des traités ou
à l’adhésion à l’Union 55
B - Les accords postérieurs à l’entrée en vigueur des traités ou
à l’adhésion à l’Union 57
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DE COURS
PARTIE 2
Les caractères du droit de l’Union
Chapitre 6 La primauté 99
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DE COURS
Section 2 La primauté du droit de l’Union en France 104
1 Le droit de l’Union et la loi 105
A - La position du juge constitutionnel 105
B - La position du juge judiciaire 107
C - La position du juge administratif 108
2 Le droit de l’Union et la Constitution 109
A - La position du juge constitutionnel 109
1) Constitution et droit primaire 109
2) Constitution et droit dérivé 112
B - La position des juges ordinaires 113
PLAN
Section 1 L’obligation de coopération loyale des États membres 118
Section 2 L’autonomie institutionnelle et procédurale des États
membres 119
1 La reconnaissance du principe d’autonomie institutionnelle
et procédurale des États membres par le juge de l’Union 119
2 L’encadrement du principe d’autonomie procédurale des États
membres par le juge de l’Union 120
A - Le principe d’effectivité 121
B - Le principe d’équivalence 121
3 Le dépassement du principe d’autonomie procédurale des États
membres par le juge de l’Union 122
A - Le droit à une protection juridictionnelle effective 122
B - Le droit à une protection provisoire 123
C - L’obligation de soulever d’office les moyens tirés de la violation
du droit de l’Union 124
D - Le droit au remboursement des sommes perçues en violation
du droit de l’Union 125
E - Le droit à réparation en cas de violation du droit de l’Union 127
1) Le principe de la responsabilité 127
2) L’auteur et la nature de la violation 128
3) Les conditions de la responsabilité 129
a) La règle de droit de l’Union enfreinte doit avoir pour objet
de conférer des droits aux particuliers 129
b) La violation commise doit être suffisamment
caractérisée 129
c) La nécessité d’un lien de causalité direct entre la violation
de l’obligation qui incombe à l’État membre
et le dommage subi par les personnes lésées 130
4) Le délai de prescription de l’action en responsabilité 131
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DE COURS
PARTIE 3
Le contentieux du droit de l’Union
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DE COURS
1) La phase précontentieuse 157
2) La phase contentieuse 157
D - Les effets de l’arrêt en constatation de carence 158
4 Les recours en responsabilité 158
A - Le recours en responsabilité extracontractuelle 158
1) Les conditions de recevabilité du recours en responsabilité
extracontractuelle 159
a) Les parties 159
b) Le délai pour agir 160
2) La mise en œuvre de la responsabilité extracontractuelle 161
a) L’illégalité d’un comportement imputable aux institutions,
organes ou organismes de l’Union ou à leurs agents 162
b) La réalité d’un préjudice 162
c) Un lien de causalité entre le comportement allégué
PLAN
et le préjudice invoqué 163
B - Le recours en responsabilité contractuelle 164
Section 3 Le contrôle juridictionnel des États membres de l’Union 165
1 La notion de manquement 166
2 La qualité pour agir 168
3 La procédure de constatation de manquement 169
A - La phase précontentieuse 169
B - La phase contentieuse 170
4 Les effets de l’arrêt en constatation de manquement 171
A - L’exécution de l’arrêt en constatation de manquement 172
B - Les sanctions au manquement 172
1) La sanction en cas d’inexécution de l’arrêt en constatation
de manquement 172
2) La sanction en cas d’absence de communication des mesures
nationales de transposition d’une directive 176
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DE COURS B - L’interprétation des actes pris par les institutions, organes
et organismes de l’Union 190
C - L’appréciation de la validité des actes pris par les institutions,
organes et organismes de l’Union 192
3 L’étendue de la liberté du juge national dans l’utilisation
du renvoi préjudiciel 192
Section 2 Le jugement des questions préjudicielles par la Cour
de justice 194
1 Les procédures préjudicielles 194
A - La procédure préjudicielle standard 194
B - La procédure préjudicielle accélérée 196
C - La procédure préjudicielle d’urgence 196
2 Les effets des arrêts préjudiciels 197
PLAN
Bibliographie 203
Index 233
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Liste des principales abréviations
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PARTIE 1
Les sources
du droit
de l’Union
Chapitre 1 Le droit primaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
Chapitre 2 Le droit dérivé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
Chapitre 3 Le droit conventionnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
Chapitre 4 Le droit jurisprudentiel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
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CHAPITRE 1
Le droit primaire
Une fois défini le contenu du droit primaire (Section 1), on s’attachera ensuite à en
présenter les procédures de révision (Section 2).
Section 1
Le contenu du droit primaire
Le droit primaire comprend, outre les traités originaires, l’ensemble des traités et des
actes qui sont venus par la suite les modifier et les enrichir.
——
1. Le Traité instituant la Communauté européenne s’était lui-même substitué au Traité instituant la
Communauté économique européenne avec l’entrée en vigueur du Traité sur l’Union européenne le
1er novembre 1993 (TUE, art. G).
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20 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
autorité politique certaine, notamment vis-à-vis des institutions de l’Union2. Ainsi, le juge
de Luxembourg a eu l’occasion de préciser que les institutions de l’Union se devaient de
prendre en compte les déclarations annexées aux traités (Tribunal, 7 juin 2001,
Agrana Zucker und Stärke/Commission, T-187/99, EU:T:2001:149).
Les traités constitutifs sont autonomes les uns par rapport aux autres. Ce principe
d’autonomie, qui régit donc les relations entre les traités constitutifs, est posé, en ce
qui concerne le Traité CEEA, par l’article 106 bis, § 3, du Traité CEEA qui précise que
les dispositions du Traité UE et du Traité FUE ne dérogent pas aux stipulations du Traité
CEEA. S’agissant des relations entre le Traité UE et le Traité FUE, l’article 40, du Traité UE
pose, en substance, le même principe lorsqu’il mentionne que « la mise en œuvre de la
politique étrangère et de sécurité commune n’affecte pas l’application des procédures et
l’étendue respective des attributions des institutions prévues par les traités pour l’exer-
cice des compétences de l’Union visées aux articles 3 à 6, du Traité FUE. De même, la
mise en œuvre des politiques visées auxdits articles n’affecte pas l’application des procé-
dures et l’étendue respective des attributions des institutions prévues par les traités pour
l’exercice des compétences de l’Union au titre du présent chapitre ».
——
2. Ex. : Déclaration relative à l’abolition de la peine de mort (1997) ; Déclaration relative à la consolida-
tion des traités (1997) ; Déclaration relative à l’élargissement de l’UE (2001) ; Déclaration relative à
l’avenir de l’Union (2001) ; Déclaration sur la Charte des droits fondamentaux de l’UE (2007 ; Déclara-
tion relative à la primauté (2007) ; Déclaration sur la personnalité juridique de l’UE (2007).
3. JOCE 152, 13 juill. 1967, p. 2.
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CHAPITRE 1 – Le droit primaire 21
——
4. JOCE L 2, 2 janv. 1971, p. 1.
5. JOCE L 94, 28 avril 1970, p. 19.
6. JOCE L 278, 8 oct. 1976.
7. Voy. en dernier lieu, l’Acte relatif aux conditions d’adhésion à l’Union européenne de la République
de Croatie et aux adaptations du traité sur l’Union européenne, du traité sur le fonctionnement de
l’Union européenne et du traité instituant la Communauté européenne de l’énergie atomique, JOUE
L 112, 24 avril 2012, p. 21.
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22 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
Section 2
Les procédures de révision et d’adaptation
des traités
Le Traité de Lisbonne procède à la réécriture intégrale de l’article 48, du Traité UE et
réalise ainsi une refonte totale des procédures de révision des traités. Plus particulière-
ment, le paragraphe premier de cette disposition prévoit désormais que les traités
peuvent être modifiés conformément à une procédure de révision ordinaire ou à des
——
8. Voy. le présent ouvrage, p. 149.
9. Si l’article 267, du Traité FUE confère compétence à la Cour de justice de l’UE pour interpréter les
dispositions des traités sur lesquels l’Union repose, cette disposition ne lui offre pas en revanche la
possibilité d’en apprécier la validité. Voy. le présent ouvrage, p. 192.
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CHAPITRE 1 – Le droit primaire 23
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24 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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CHAPITRE 1 – Le droit primaire 25
adoptée. En l’absence d’opposition, le Conseil européen peut adopter une telle décision
(TUE, art. 48, § 7, al. 3). Cette institution statue alors à l’unanimité, après approbation
du Parlement européen, qui se prononce à la majorité des membres qui le composent
(TUE, art. 48, § 7, al. 4).
——
10. Si on met à part les exemples évoqués précédemment concernant les ressources propres et l’élection
du Parlement européen au suffrage universel direct (voy. le présent ouvrage, p. 21), le Conseil avait
déjà fait usage des potentialités identiques prévues par l’article 190, § 4, TCE pour adopter la décision
2002/772/CE, Euratom du 25 juin 2002 et du 23 septembre 2002 en vue de permettre l’élection au
suffrage universel direct du Parlement européen, conformément à des principes communs à tous les
États membres, qui avait été ensuite approuvée par l’ensemble des États membres avant d’être appli-
quée à compter des élections du Parlement européen de juin 2004 (JOCE L 283, 21 oct. 2002, p. 1).
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26 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
BIBLIOGRAPHIE
BIEBER R., « Les limites matérielles et formelles à la révision du Traité instituant la Commu-
nauté européenne », Rev. Marché commun UE, nº 367/1993, p. 343.
DA CRUZ VILAÇA J.-L., PIÇARRA N., « Y a-t-il des limites matérielles à la révision des Traités insti-
tuant les Communautés européennes », CDE, nº 1-2/1993, p. 3.
LOUIS J.-V., « Quelques considérations sur la révision des Traités instituant les Commu-
nautés », CDE, nº 5-6/1980, p. 553.
SCHWOB J., « Traités communautaires : sources et révision (Eur.) », Rép. eur. Dalloz (2018).
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CHAPITRE 2
Le droit dérivé
Le droit dérivé ou secondaire comprend l’ensemble des actes unilatéraux que les institu-
tions de l’Union sont habilitées à adopter en exécution et en application des traités. Les
traités leur attribuent en effet un véritable pouvoir normatif autonome afin qu’elles puis-
sent être à même de remplir les différentes missions qui leur sont dévolues et notam-
ment assurer le développement des politiques et actions internes et externes de l’Union
dans le respect des objectifs assignés par les traités.
Après avoir présenté une classification des actes de droit dérivé prévus par le Traité FUE
(Section 1), on évoquera ensuite la pratique institutionnelle qui a conduit les institutions
à générer d’autres actes unilatéraux (dits hors nomenclature) qui échappent à cette clas-
sification (Section 2).
Section 1
Les actes de droit dérivé prévus dans
la nomenclature du Traité FUE
Tout comme le prévoyait déjà les articles 249, du Traité CE et 161, du Traité CEEA avant
l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, l’article 288, du Traité FUE comporte une
nomenclature des actes de droit dérivé que les institutions de l’Union peuvent édicter
et définit également leur portée juridique. Plus particulièrement, la nomenclature
prévue à l’article 288, alinéa 1er, du Traité FUE mentionne que « pour exercer les compé-
tences de l’Union, les institutions adoptent des règlements, des directives, des décisions,
des recommandations et des avis ». On envisagera ces différents actes de droit dérivé en
distinguant les actes obligatoires, en ce sens qu’ils sont juridiquement contraignants, et
les actes non décisoires, c’est-à-dire des actes qui ne lient en rien leurs destinataires.
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28 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
manifestement contraire à leur libellé » (voy. not., CJCE, 24 nov. 2005, Deutsches
Milch-Kontor, C-136/04, EU:C:2005:716, point 32 ; CJCE, 2 avril 2009, Tyson
Parketthandel, C-134/08, EU:C:2009:229, point 16). Bien que chacun de ces trois
actes présente des spécificités, il n’en demeure pas moins qu’un régime juridique
commun leur est applicable.
——
1. Ex. : Pour réaliser la liberté d’établissement dans une activité déterminée, le Parlement européen et le
Conseil statuent par voie de directives (TFUE, art. 50, § 1er). Il en est de même lorsque ces deux insti-
tutions entendent réaliser la libération d’un service déterminé (TFUE, art. 59, § 1er).
2. Ex : TFUE, art. 48, 56, 77, 78 et 79.
3. Leclerc S., Mémentos – Les institutions de l’Union européenne, 7e éd., 2018, Gualino éditeur, spéc.
p. 71.
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CHAPITRE 2 – Le droit dérivé 29
3) La motivation de l’acte
L’article 296, alinéa 2, du Traité FUE pose une obligation générale de motivation des
actes juridiques qui doivent impérativement viser les propositions, initiatives, recomman-
dations, demandes ou avis prévus par les traités.
Cette obligation de motivation concerne tout acte produisant des effets juridiques
quelle que soit sa dénomination (CJCE, 1er oct. 2009, Commission/Conseil, C-370/07,
EU:C:2009:590, point 42). La Cour de justice considère que la motivation de l’acte doit
être adaptée à sa nature et faire « apparaître d’une façon claire et non équivoque les
raisons sur lesquelles l’acte est fondé » (CJCE, 9 juill. 1969, Italie/Commission, 1/69,
EU:C:1969:34, point 9), de manière à permettre aux intéressés de connaître et de
comprendre les justifications de la mesure prise à leur égard et au juge de Luxembourg
d’exercer son contrôle (CJCE, 24 oct. 2005, Italie/Commission, C-138/03, C-324/03 et
C-431/03, EU:C:2005:714, point 54 ; CJUE, 26 juin 2012, Pologne/Commission, C-
335/09 P, EU:C:2012:385, point 215 ; CJUE, 15 nov. 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-
Bas/Al-Aqsa, C-539/10 P et C-550/10 P, EU:C:2012:711, point 138).
Les exigences en matière de motivation varient en fonction des circonstances de
l’espèce, notamment du contenu de l’acte, du contexte de son adoption et de
l’ensemble des normes juridiques régissant la matière concernée. Le juge de Luxem-
bourg admet donc, dans certaines circonstances, une motivation sommaire (c’est-à-dire
sans qu’il soit exigé que la motivation spécifie la totalité des différents éléments de fait
ou de droit pertinents) à condition toutefois que les éléments essentiels du raisonne-
ment et l’objectif visé par l’auteur de l’acte soient suffisamment précisés (s’agissant de
décisions adressées à des entreprises voy., CJCE, 8 févr. 1966, Acciairie e ferriere
Pugliesi/Haute Autorité CECA, 8/65, EU:C:1966:5 ; s’agissant de décisions adressées
aux États membres voy., CJCE, 14 janv. 1981, Allemagne/Commission, 819/79, EU:
C:1981:2). De ce fait, tout défaut manifeste de motivation entraîne systématiquement
l’annulation des actes adoptés par les institutions, organes ou organismes de l’Union.
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30 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
qu’on dénomme plus communément les actes délégués, sont des actes de portée géné-
rale adoptés par la Commission européenne, sur habilitation expresse d’un acte législatif
et qui complètent ou modifient certains éléments non essentiels des actes législatifs
(TFUE, art. 290, § 1er). Les actes d’exécution (ou mesures d’exécution) sont arrêtés par
la Commission européenne lorsque des conditions uniformes d’exécution des actes juri-
diquement contraignants de l’Union sont nécessaires (TFUE, art. 291, § 2)4.
L’article 297, du Traité FUE, relatif à la publication et à la notification des actes, repose
également sur la différenciation entre les actes législatifs et les actes non législatifs.
Cette disposition prévoit en effet que :
– les actes législatifs adoptés conformément à la procédure législative ordinaire sont
signés par le président du Parlement européen et par le président du Conseil. En
revanche, les actes législatifs adoptés conformément à une procédure législative
spéciale sont signés par le président de l’institution qui les a adoptés. Tout acte
législatif est publié au Journal officiel de l’Union européenne et entre en vigueur à
la date qu’il fixe ou, à défaut, le 20e jour suivant sa publication (TFUE, art. 297,
§ 1er) ;
– les actes non législatifs adoptés sous la forme de règlements, de directives ou de
décisions, lorsque ces dernières n’indiquent pas de destinataire, sont signés par le
président de l’institution qui les a adoptés. Les règlements, les directives adressées
à tous les États membres ainsi que les décisions ne mentionnant pas de destinataires
spécifiques sont également publiés au Journal officiel de l’Union européenne et se
voient appliquer le même régime que précédemment s’agissant de leur entrée en
vigueur ;
– les autres directives (c’est-à-dire celles qui ne sont pas adressées à tous les États
membres) ainsi que les décisions qui désignent un ou plusieurs destinataires
doivent être notifiées à leurs destinataires et prennent effet par cette notification
(TFUE, art. 297, § 2). De tels actes non législatifs n’ont pas l’obligation d’être
publiés au Journal officiel de l’Union européenne, même s’il s’agit d’actes affectant
les droits et les intérêts de particuliers (CJCE, 18 févr. 1964, Internationale
Crediet– en Handelsvereniging « Rotterdam », 73/63 et 74/63, EU:C:1964:8).
Néanmoins, lorsque c’est le cas, l’institution n’est pas pour autant dispensée de
procéder à sa notification afin de rendre cet acte non législatif opposable et de
faire courir le délai de transposition s’il s’agit d’une directive (sur l’obligation de noti-
fication d’une décision individuelle publiée au Journal officiel de l’Union européenne
voy., CJCE, 14 juill. 1972, Geigy AG/Commission, 52/69, EU:C:1972:73).
La Cour de justice a pendant longtemps considéré qu’un acte de droit dérivé non publié
ou non notifié n’était pas illégal mais qu’il était alors inopposable à son ou à ses destina-
taires (CJCE, 25 janv. 1979, Racke, 98/78, EU:C:1979:14). La Cour de justice a dit pour
droit qu’un acte émanant des institutions ne sauraient être opposable aux justiciables
« avant que n’existe pour ceux-ci la possibilité d’en prendre connaissance » (CJCE,
25 janv. 1979, Racke, 98/78, EU:C:1979:14, point 15 ; CJUE, 12 mai 2011, Polska
Telefonia Cyfrowa, C-410/09, EU:C:2011:294, point 23). La Haute juridiction consi-
dère en effet que les irrégularités dans la procédure de publication ou de notification
——
4. Sur la question des actes délégués et des mesures d’exécution voy., Leclerc S., Mémentos – Les insti-
tutions de l’Union européenne, préc., spéc. p. 208.
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CHAPITRE 2 – Le droit dérivé 31
d’un acte lui sont extérieures et ne peuvent donc le vicier. De telles irrégularités ne
constituent pas dès lors une forme substantielle dont l’absence pourrait être sanc-
tionnée par un recours en annulation. Néanmoins, de telles irrégularités sont suscepti-
bles, dans certaines circonstances, de paralyser l’entrée en vigueur de l’acte et d’empê-
cher que le délai du recours en annulation commence à courir. Une telle question
devient cependant sans intérêt s’il est établi que le destinataire de l’acte a eu complète
connaissance du texte le concernant et qu’il a pu faire usage, dans les délais, de son
droit de recours (CJCE, 14 juill. 1972, Imperial Chemical Industries/Commission, 48/
69, EU:C:1972:70, points 36 et s.). Procédant par la suite à une évolution de sa jurispru-
dence, la Cour de justice a jugé que, dans certaines circonstances, l’absence de notifica-
tion d’une décision désignant un ou plusieurs destinataires spécifiques peut être consti-
tutive d’une violation des formes substantielles pouvant entraîner son annulation (CJCE,
8 juill. 1999, Hoechst/Commission, C-227/92 P, EU:C:1999:360, point 72).
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32 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
1) Les règlements
Le règlement constitue l’instrument le plus complet et le plus efficace des actes de droit
dérivé à la disposition des institutions de l’Union. Il représente donc aujourd’hui la prin-
cipale source de droit dérivé.
Avant l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, on distinguait, dans la pratique institu-
tionnelle, les règlements de base arrêtés par les institutions sur le fondement d’une
disposition du Traité CE, des règlements d’exécution adoptés pour mettre en œuvre et
en application les règlements de base. Cette pratique avait été entérinée par la Cour de
justice (CJCE, 17 déc. 1970, Köster et Berodt, 25/70, EU:C:1970:115) sous réserve que
le règlement d’exécution soit subordonné au règlement de base (CJCE, 10 mars 1971,
Deutsche Tradax, 38/70, EU:C:1971:24). La Cour de justice veillait tout particulière-
ment à ce que les règlements d’exécution ne portent pas atteinte aux principes et à
l’économie des règlements de base (CJCE, 13 juill. 1995, Parlement/Commission, C-
156/93, EU:C:1995:238). Le Traité de Lisbonne met un terme à cette distinction entre
règlement de base et règlement d’exécution dans la mesure où le Traité FUE opère
désormais une différenciation entre les actes législatifs, les actes non législatifs et les
mesures d’exécution5 : un règlement peut donc être soit un acte législatif, soit un acte
non législatif, c’est-à-dire un acte délégué (dans cette hypothèse, l’adjectif « délégué »
est inséré dans l’intitulé même du règlement qui se dénomme alors « règlement
——
5. Voy. le présent ouvrage, p. 29.
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CHAPITRE 2 – Le droit dérivé 33
délégué ») soit enfin une mesure d’exécution (dans une telle hypothèse, l’adjectif
« d’exécution » est inséré dans l’intitulé même du règlement qui se dénomme alors
« règlement d’exécution »).
L’article 288, alinéa 2, du Traité FUE dispose que « le règlement a une portée générale. Il
est obligatoire dans tous ses éléments et il est directement applicable dans tout État
membre »6.
——
6. Le règlement prévu par l’article 288, alinéa 2, du Traité FUE ne doit pas être confondu avec les règle-
ments intérieurs adoptés par les institutions de l’Union et les règlements de procédures arrêtés par les
juridictions de l’Union, voy. le présent ouvrage, p. 44.
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34 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
C:1979:32, point 9). La Cour de justice a précisé par ailleurs qu’un État membre devait
s’abstenir de tout acte susceptible de remettre en cause l’autorité du règlement, ce
dernier devant pouvoir déployer tous ses effets aussi longtemps que son illégalité n’a
pas été établie par le juge de l’Union (CJCE, 13 févr. 1979, Granaria, 101/78, EU:
C:1979:38, point 5). De plus, la Haute juridiction a indiqué que les réserves ou objec-
tions éventuelles formulées par un État membre lors de l’élaboration d’un règlement
ne le dispensent de son obligation d’appliquer ce règlement dans son intégralité. De
même, elle a souligné que « des difficultés d’application apparues au stade de l’exécu-
tion d’un acte communautaire ne sauraient permettre à un État membre de se dispenser
unilatéralement de l’observation de ses obligations » (CJCE, 7 févr. 1973, Commission/
Italie, 39/72, EU:C:1973:13, point 22). Un État membre ne pourrait pas davantage tirer
argument d’un élément quelconque de sa législation ou de sa pratique administrative
pour justifier le non-respect des obligations et délais résultant des règlements (CJCE,
17 mai 1972, Leonesio, 93/71, EU:C:1972:39, point 22). Le règlement est donc obli-
gatoire dans tous ses éléments.
——
7. Simon D., Le système juridique communautaire, 3e éd., 2001, PUF, spéc. p. 321.
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CHAPITRE 2 – Le droit dérivé 35
EU:C:2011:863, point 40). Dans un tel cas de figure, la Cour de justice estime que
l’intervention des autorités nationales ne peut se justifier que « dans la mesure néces-
saire à l’exécution » du règlement (CJCE, 11 févr. 1971, Norddeutsches Vieh-und
Fleischkontor, 39/70, EU:C:1971:16, point 4) et pour autant que cette reprise de
certains éléments d’un règlement dans une norme interne permette d’en faciliter l’appli-
cation. La Cour de justice veille par ailleurs à ce qu’une telle intervention des autorités
nationales ne puisse mettre en péril l’application uniforme des règlements sur
l’ensemble du territoire de l’Union (CJCE, 14 janv. 1993, Lante, C-190/91, EU:
C:1993:11, point 17).
En second lieu, le règlement constitue une source directe de droit. En effet, la Cour de
justice a admis que le règlement « produit des effets immédiats et est, comme tel, apte à
conférer aux particuliers des droits que les juridictions nationales ont l’obligation de
protéger » (CJCE, 14 déc. 1971, Politi, 43/71, EU:C:1971:122, point 9). Un règlement
peut donc être directement invoqué par un particulier à l’appui d’un recours devant le
juge national. Ce dernier aura alors l’obligation de protéger les droits que le particulier
tire du règlement.
2) Les directives
Aux termes de l’article 288, alinéa 3, du Traité FUE, « la directive lie tout État membre
destinataire quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la
compétence quant à la forme et aux moyens ».
Avant l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, la pratique institutionnelle amenait à
opérer une distinction entre les directives de base, adoptées directement par les institu-
tions de l’Union sur le fondement d’une disposition du Traité CE, et les directives d’exé-
cution permettant d’assurer l’application des directives de base. La Cour de justice avait
entériné cette pratique sous réserve qu’une directive d’exécution ne puisse déroger à
une directive de base (CJCE, 25 janv. 1994, Angelopharm, C-212/91, EU:C:1994:21).
Une fois encore, le Traité de Lisbonne met un terme à cette distinction dans la mesure où
le Traité FUE repose désormais sur la différenciation entre les actes législatifs, les actes
non législatifs et les mesures d’exécution8. Une fois encore, une directive peut donc
être soit un acte législatif, soit un acte non législatif, c’est-à-dire un acte délégué (dans
cette hypothèse, l’adjectif « déléguée » est insérée dans l’intitulé même de la directive
qui se dénomme alors « directive déléguée ») soit enfin une mesure d’exécution (dans
une telle hypothèse, l’adjectif « d’exécution » est inséré dans l’intitulé même de la direc-
tive qui se dénomme alors « directive d’exécution »). Par ailleurs, si l’ensemble des États
membres est nécessairement concerné par un acte législatif adopté sous la forme d’une
directive, un acte non législatif adopté sous cette même forme peut ne pas être adressé
à tous les États membres. D’ailleurs, dans cette seconde hypothèse, une telle directive
sera notifiée à son ou à ses destinataires et prendra effet par cette notification (TFUE,
art. 297, § 2, al. 3).
——
8. Voy. le présent ouvrage, p. 29.
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36 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
fonctionne en deux temps : tout d’abord, les institutions de l’Union définissent à travers
la directive un ou plusieurs objectifs à atteindre qui s’adressent aux États membres, puis
ces derniers déterminent en principe librement les modalités de mise en œuvre de ces
objectifs dans leur droit interne.
Ainsi, la directive créée une obligation absolue de résultat à la charge des États membres
destinataires tout en leur laissant, au moins en principe, le choix des formes et des
moyens pour atteindre l’objectif assigné. Cette intervention obligatoire des autorités
nationales pour définir la forme et les moyens de mise en œuvre de la directive dans
leur ordre juridique interne fait de cet acte de droit dérivé « un mode de législation ou
de réglementation indirecte » (CJCE, 29 juin 1993, Gouvernment of Gibraltar/
Conseil, C-298/89, EU:C:1993:267, point 16) auquel les institutions de l’Union recou-
rent principalement lorsqu’elles entendent rapprocher ou harmoniser les législations
nationales.
Même si la Cour de justice a été amenée à préciser que « la liberté laissée par
l’article 189 [TFUE, art. 288] aux États membres quant au choix des formes et des
moyens, en matière d’exécution des directives, laisse entière leur obligation de choisir
les formes et les moyens les plus appropriés en vue d’assurer l’effet utile des directives »
(CJCE, 8 avril 1976, Royer, 48/75, EU:C:1976:57, point 75), il n’en demeure pas moins
que cette liberté de choix laissée aux autorités nationales doit être relativisée. En effet,
certaines directives adoptées par les institutions sont des actes de plus en plus détaillés
dont les objectifs sont à ce point précisés que la marge d’appréciation laissée aux auto-
rités nationales quant aux choix des formes et des moyens est de plus en plus réduite
voire même inexistante. Cette pratique institutionnelle contestable, car s’écartant de la
lettre de l’article 288, alinéa 3, du Traité FUE, a pourtant été validée par la Cour de
justice qui considère « que la compétence laissée aux États membres, en ce qui concerne
la forme et les moyens des mesures à prendre par les instances nationales, est fonction
du résultat que le Conseil et la Commission entendent voir atteindre » (CJCE, 23 nov.
1977, Enka BV, 38/77, EU:C:1977:190, point 11). Une directive peut ainsi définir,
avec plus ou moins de minutie, la teneur du résultat escompté. Toutefois, le juge
de Luxembourg considère que l’intensité normative des directives est variable et fonction
de l’objectif à atteindre (CJCE, 18 juin 2002, Commission/France, C-60/01, EU:
C:2002:383, points 25 et s.) et que les obligations qui découlent d’une directive ne
s’épuisent pas dans sa transposition dans la mesure où cette dernière se doit d’être
adaptée par les autorités nationales aux nouvelles circonstances de fait (CJCE, 23 mars
2006, Commission/Autriche, C-209/04, EU:C:2006:195, point 43).
Étant donné que la directive ne lie que le ou les États membres destinataires, il apparaît
de prime abord que cet acte obligatoire n’est pas, à la différence du règlement, un acte
de portée générale mais un acte à caractère individuel. Toutefois, étant donné que les
directives ont généralement pour destinataire la totalité des États membres et qu’elles
ont donc vocation à produire des effets juridiques sur l’ensemble du territoire de l’UE,
le juge de l’Union a admis que les directives avaient elles aussi la qualité « d’acte à
portée générale » (voy. not., CJCE, 22 févr. 1984, Kloppenburg, 70/83, EU:
C:1984:71, point 11 ; CJCE, 29 juin 1993, Government of Gibraltar/Conseil, C-298/
89, EU:C:1993:267, point 16) procédant ainsi à un rapprochement partiel entre les
caractères juridiques de la directive et ceux du règlement. L’assimilation juridique entre
ces deux actes obligatoires n’est cependant pas totale. En effet, dans la mesure où la
directive requiert des mesures de transposition des autorités nationales, elle n’est pas
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CHAPITRE 2 – Le droit dérivé 37
——
9. Sur l’applicabilité directe des directives, voy. le présent ouvrage, p. 89.
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38 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
——
10. Ex. en France : les lois, les décrets, les ordonnances, les arrêtés...
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CHAPITRE 2 – Le droit dérivé 39
Les dispositions d’une directive doivent être transposées par les États membres « avec
une force contraignante incontestable, avec la spécificité, la précision et la clarté
requises afin que soit satisfaite l’exigence de sécurité juridique » (voy. not., CJCE,
17 sept. 1987, Commission/Pays-Bas, 291/84, EU:C:1987:366, point 15 ; CJCE,
27 févr. 2003, Commission/Belgique, C-415/01, EU:C:2003:118, point 21 ; CJCE,
13 mars 2008, Commission/Grèce, C-81/07, EU:C:2008:172, point 19 ; CJCE,
12 févr. 2009, Commission/Pologne, C-475/07, EU:C:2009:86, point 49). En effet,
« aussi longtemps que la directive n’est pas correctement transposée en droit national,
les justiciables n’ont pas été mis en mesure de connaître la plénitude de leurs droits ». La
Cour de justice estime donc que « seule une transposition correcte de la directive mettra
fin à cet état d’incertitude et ce n’est qu’au moment de cette transposition qu’est créée
la sécurité juridique nécessaire pour exiger des justiciables qu’ils fassent valoir leurs
droits » (CJCE, 25 juill. 1991, Emmott, C-208/90, EU:C:1991:333, points 21 et 22).
La Cour de Luxembourg a également précisé que lorsqu’une directive poursuit plusieurs
objectifs, la mesure de transposition adoptée par les autorités nationales doit respecter
l’équilibre entre les différents objectifs poursuivis par cette directive dans le respect du
principe de proportionnalité (CJCE, 8 mai 2008, Danske Svineproducenter, C-491/
06, EU:C:2008:263, point 31). En l’absence d’une transposition d’une directive dans
son ordre juridique national, un État membre ne peut opposer aux particuliers les limita-
tions qu’il serait en droit de leur imposer s’il avait transposé les dispositions de la direc-
tive en question (CJCE, 19 nov. 1991, Francovich et Bonifaci/Italie, C-6/90 et C-9/90,
EU:C:1991:428, point 21). Prenant appui sur cette jurisprudence constante de la Haute
juridiction (voy. not., CJCE, 30 mars 2006, Uudenkaupungin kaupunki, C-184/04,
EU:C:2006:214, point 28 ; CJCE, 12 févr. 2009, Cobelfret, C-138/07, EU:C:2009:82,
point 49), le Conseil d’État français a ainsi jugé que les autorités françaises ne pouvaient
se prévaloir, à l’encontre d’un particulier, des dispositions d’une directive qui n’ont pas
fait l’objet d’une transposition dans le droit interne (CE, sect., 23 juin 1995, Req.
nº 149226-155083-162001, SA Lilly France, FR:CESJS:1995:149226.19950623 ; CE,
20 nov. 2002, Req. nº 229017, Société Golden-Harvest-Zelder, FR:
CESSR:2002:229017.20021120).
Les États membres ont l’obligation de notifier à la Commission européenne, en sa
qualité de gardienne du droit de l’Union, toutes les mesures nationales de transposition
des directives qu’ils adoptent. Si, à l’expiration du délai prescrit, la Commission estime
que la transposition est inexistante, incorrecte (transposition partielle ou prévoyant des
dérogations ou exceptions non prévues par la directive) ou tardive (après l’expiration du
délai de transposition), elle peut alors introduire un recours en manquement devant la
Cour de justice (TFUE, art. 258 à 260). L’article 260, § 3, du Traité FUE, tel qu’introduit
par Traité de Lisbonne, apporte d’ailleurs une nouveauté en la matière. Lorsque la
Commission européenne saisit la Cour de justice d’un recours en vertu de l’article 258,
du Traité FUE (recours en manquement) à l’encontre d’un État membre pour manque-
ment à son obligation de communication des mesures nationales de transposition
d’une directive adoptée conformément à une procédure législative, elle peut alors, lors-
qu’elle le considère approprié, indiquer à la Cour le montant d’une somme forfaitaire ou
d’une astreinte à payer par cet État qu’elle estime adapté aux circonstances11.
——
11. Voy. le présent ouvrage, p. 176.
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40 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
3) Les décisions
Le Traité de Lisbonne modifie en substance la décision puisqu’il ne lui confère plus le
caractère exclusivement individuel qui caractérisait antérieurement cet acte obligatoire
de droit dérivé. En effet, l’article 288, alinéa 4, du Traité FUE dispose désormais que « la
décision est obligatoire dans tous ses éléments. Lorsqu’elle désigne des destinataires,
elle n’est obligatoire que pour ceux-ci »12. On doit déduire de cette nouvelle formulation
qu’il existe, comme auparavant, des décisions de portée individuelle mais également des
décisions, lorsqu’elles ne désignent pas de destinataires spécifiques, de portée générale.
Il ne s’agit pas, à proprement parler, d’une nouveauté mais plutôt d’une évolution qui
entérine et généralise l’usage d’un acte atypique auquel les institutions recouraient
parfois, en application du Traité CE, dénommé la décision « Beschlüß ».
——
12. En place et lieu de « la décision est obligatoire dans tous ses éléments pour les destinataires qu’elle
désigne » qu’on retrouvait auparavant à l’article 249, alinéa 4, Traité CE.
13. Ex. : Décision de la Commission européenne adressée à un État membre constatant l’incompatibilité
avec le marché intérieur d’une aide d’État au sens de l’article 107, § 1er, du Traité FUE et l’obligeant
à récupérer cette aide illégale (voy. à titre d’ex., décision (UE) 2019/421 de la Commission du 20 juin
2018 concernant l’aide d’État SA.44888 (2016/C ex 2016/NN) mise en exécution par le Luxembourg
en faveur d’Engie, JOUE L 78, 20 mars 2019, p.1) ; Décision de la Commission européenne adressée
à des entreprises autorisant une opération de concentration en application du règlement (CE)
nº 139/2004 (voy. à titre d’ex., décision de la Commission du 1er mars 2019 déclarant la compatibilité
avec le marché intérieur d’une concentration (Affaire M.9145 – Kongsberg Gruppen/Rolls-Royce
Commercial Marine) sur la base du règlement (CE) nº 139/2004 du Conseil, JOUE C 96, 13 mars
2019, p. 2).
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CHAPITRE 2 – Le droit dérivé 41
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42 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
A - Les recommandations
La recommandation constitue une invitation à agir ou à adopter un certain comporte-
ment. Elle peut donc se définir comme un instrument d’orientation des comportements
et des législations nationales sans pour autant fixer d’obligation légale. En définitive, la
recommandation ne diffère de la directive que par l’absence de portée obligatoire. À ce
titre, les recommandations constituent « une source indirecte du rapprochement des
législations nationales »14.
Selon l’article 292, du Traité FUE, les recommandations peuvent être adoptées par le
Conseil, la Commission européenne ou encore la Banque centrale européenne. Plus
particulièrement, cette disposition prévoit que « le Conseil adopte des recommanda-
tions » sans plus de précisions. Ainsi, sur la base d’une conclusion du Conseil européen,
le Conseil adopte une recommandation fixant les grandes orientations des politiques
économiques des États membres et de l’Union (TFUE, art. 121, § 2). De même, le
Conseil adopte, sur proposition de la Commission, des recommandations, en vue de
contribuer à la réalisation des objectifs de l’Union en matière d’éducation, de formation
professionnelle, de jeunesse et de sport (TFUE, art. 165, § 4). L’article 292, du Traité FUE
mentionne également que « la Commission, ainsi que la Banque centrale européenne
dans les cas spécifiques prévus par les traités, adoptent des recommandations ». Ainsi,
la Commission européenne a par exemple la faculté d’adresser aux États membres inté-
ressés des recommandations nécessaires à la libéralisation des services (TFUE, art. 60,
al. 2). De même, lorsqu’il y a lieu de craindre que l’établissement ou la modification
d’une disposition législative, réglementaire ou administrative d’un État membre
provoque une distorsion de concurrence sur le marché intérieur, la Commission euro-
péenne peut alors recommander à cet État membre les mesures appropriées pour
éviter la distorsion en cause (TFUE, art. 117, § 1er). Enfin, et sur recommandation
——
14. Soldatos P., Vandersanden G., « La recommandation, source indirecte des législations nationales dans
le cadre de la CEE », in Les instruments du rapprochement des législations dans le cadre de la CEE,
1976, Éd. de l’Université de Bruxelles, spéc. p. 95.
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CHAPITRE 2 – Le droit dérivé 43
B - Les avis
Lorsqu’une institution ou un organe de l’Union émet un avis, ce dernier constitue, quant
à lui, l’expression de son opinion sur une situation donnée. La Commission européenne
recourt notamment à cet acte non obligatoire lorsqu’elle entend donner son point de
vue sur une question spécifique aux personnes morales ou aux États membres ou
encore lorsqu’elle souhaite se prononcer sur la conformité de pratiques ou de réglemen-
tations nationales au regard du droit de l’Union. Ainsi, dans le domaine de la politique
économique et monétaire, si la Commission estime qu’il y a un déficit excessif dans un
État membre ou qu’un tel déficit risque de se produire, elle adresse alors un avis à l’État
membre en question (TFUE, art. 126, § 5).
——
15. Voy. le présent ouvrage, p. 165.
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44 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
Section 2
Les actes de droit dérivé hors nomenclature
La nomenclature visée à l’article 288, du Traité FUE est loin d’être exclusive. Tout
d’abord, le Traité FUE évoque parfois dans certaines de ses dispositions des actes à voca-
tion purement interne qui ne relèvent pas de cette nomenclature et dont la portée se
limite normalement à la sphère institutionnelle. Par ailleurs, la pratique institutionnelle
a progressivement généré certains actes unilatéraux qui ont pour caractéristique
commune de n’avoir jamais été prévus par l’article 288, du Traité FUE ni même d’ailleurs
par aucune autre du Traité FUE.
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CHAPITRE 2 – Le droit dérivé 45
——
16. Ex. : l’article 43, § 2, du Traité FUE prévoit que le Conseil et le Parlement européen établissent l’orga-
nisation commune des marchés agricoles ainsi que les autres dispositions nécessaires à la poursuite
des objectifs de la politique commune de l’agriculture et de la pêche après consultation du Comité
économique et social européen. L’article 182, § 4, du Traité FUE stipule que le Conseil arrête des
programmes spécifiques en matière de recherche et de développement technologique après consulta-
tion du Parlement européen et du Comité économique et social européen. L’article 192, § 1er, du
Traité FUE prévoit que le Parlement européen et le Conseil décident des actions à entreprendre par
l’Union en vue de réaliser les objectifs de la politique de l’environnement après consultation du
Comité économique et social européen et du Comité européen des régions.
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46 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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CHAPITRE 2 – Le droit dérivé 47
——
17. L’article 226, du Traité FUE modifie cette procédure puisqu’à compter de l’entrée en vigueur du Traité
de Lisbonne, les modalités d’exercice du droit d’enquête du Parlement européen sont déterminées par
le Parlement européen, statuant par voie de règlements de sa propre initiative conformément à une
procédure législative spéciale, après approbation du Conseil et de la Commission.
18. Parmi les déclarations communes, accords-cadres et accords interinstitutionnels les plus significatifs,
on peut citer : l’accord interinstitutionnel du 22 décembre 1998 sur les lignes directrices communes
relatives à la qualité rédactionnelle de la législation communautaire, JOCE C 73, 17 mars 1999 ;
l’accord interinstitutionnel du 25 mai 1999 relatif aux enquêtes internes effectuées par l’Office euro-
péen de lutte antifraude, JOCE L 136, 31 mai 1999, p. 15 ; la déclaration commune concernant le
règlement (CE) nº 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2001 relatif à l’accès
du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, JOCE L 173,
27 juin 2001, p. 5 ; l’accord interinstitutionnel du 28 novembre 2001 pour un recours plus structuré à
la technique de la refonte des actes juridiques, JOCE C 77, 28 mars 2002 ; l’accord interinstitutionnel
du 17 mai 2006 sur la discipline budgétaire et la bonne gestion financière, JOUE C 139, 14 juin
2006, p. 1 ; la déclaration commune sur les modalités pratiques de la procédure de codécision, JOUE
C 145 30 juin 2007, p. 5 ; l’accord interinstitutionnel du 13 avril 2016 entre le Parlement européen,
le Conseil de l’Union européenne et la Commission européenne « Mieux légiférer », JOUE L123,
12 mai 2016, p. 1.
19. Voy. la position du Conseil et de la Commission européenne, Question écrite nº 169/77 de M. Jens
Maigaard au Conseil : effet juridique des déclarations communes, JOCE C 259, 27 oct. 1977, p. 4 ;
Question écrite nº 170/77 de M. Jens Maigaard à la Commission : effet juridique des déclarations
communes, JOCE C 180, 28 juill. 1977, p. 18.
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48 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
ce dernier ayant des effets juridiques à l’égard des tiers (Tribunal, Ord., 17 janv. 2002,
Stauner e.a./Parlement et Commission, T-236/00, EU:T:2002:8).
Le Traité de Lisbonne entérine purement et simplement la pratique et la jurisprudence
antérieures puisque l’article 295, du Traité FUE prévoit désormais que « le Parlement
européen, le Conseil et la Commission procèdent à des consultations réciproques et
organisent d’un commun accord les modalités de leur coopération. À cet effet, ils
peuvent, dans le respect des traités, conclure des accords interinstitutionnels qui
peuvent revêtir un caractère contraignant ».
BIBLIOGRAPHIE
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DE SADELEER N., HACHEZ I., « Hiérarchie et typologie des actes juridiques de l’Union euro-
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MASCLET J.-C., « Règlement (Eur.) », Rép. eur. Dalloz (2011).
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RITLENG D., « La nouvelle typologie des actes de l’Union. Un premier bilan critique de son
application », in Dossier : « Les actes de l’Union », RTD eur., nº 1/2015, p. 7.
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CHAPITRE 3
Le droit conventionnel
Section 1
Les accords de l’Union européenne
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50 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
En premier lieu, l’Union européenne peut conclure des accords internationaux dans tous
les domaines où elle s’est vue expressément conférer une compétence externe par les
traités. Ainsi, dans le domaine de la PESC, l’article 37, du Traité UE prévoit que l’Union
peut conclure des accords avec un ou plusieurs États ou organisations internationales.
De même, plusieurs dispositions du Traité FUE confèrent également expressément
compétence à l’Union pour conclure des accords internationaux1.
En second lieu, l’Union européenne peut aussi, en dehors de ces clauses d’attribution
expresse de compétence externe, conclure des accords internationaux dans les
domaines pour lesquels elle dispose seulement d’une compétence interne dès lors que
la conclusion de tels accords est notamment prévue dans un acte juridique contraignant
de l’Union ou encore nécessaire pour réaliser un objectif poursuivi par les traités. Ce
dernier motif, fondé sur le principe du parallélisme des compétences internes et
externes, avait été dégagé par la Cour de justice à partir de sa célèbre jurisprudence A.
E.T.R. de mars 1971 (CJCE, 31 mars 1971, Commission/Conseil, 22/70, EU:C:1971:32,
points 17 et s.). Fondant son raisonnement sur la base de la théorie des compétences
implicites2, la Haute juridiction avait en effet admis dans cette jurisprudence que la
Communauté économique européenne était compétente, même en l’absence d’une
attribution explicite du Traité CEE, pour conclure des accords externes dans tous les
domaines où elle disposait d’une compétence interne en vue de réaliser un objectif
déterminé par le traité et où l’adoption d’un engagement international apparaît néces-
saire à la réalisation de cet objectif (pour une illustration voy. égal., CJCE, 26 avril 1977,
Projet d’accord relatif à l’institution d’un Fonds européen d’immobilisation de la
navigation intérieure, avis 1/76, EU:C:1977:63, point 3 ; CJCE, 19 mars 1993,
Convention nº 170 de l’OIT concernant la sécurité dans l’utilisation des produits
chimiques, avis 2/91, EU:C:1993:106, point 3)3. Ainsi, l’Union européenne dispose
d’une compétence externe implicite pour conclure des accords internationaux avec des
États tiers et des organisations internationales, sous réserve que les institutions de
l’Union aient déjà adopté des mesures internes, que la participation de l’Union à
l’accord soit nécessaire à la réalisation d’un des objectifs de l’Union et que l’accord lui-
même vise à régir des situations internes à l’Union. L’article 3, § 2, du Traité FUE, tel qu’il
résulte du Traité de Lisbonne, confirme d’ailleurs implicitement et conforte la théorie des
compétences implicites lorsqu’il précise que « l’Union dispose également d’une compé-
tence exclusive pour la conclusion d’un accord international lorsque cette conclusion [...]
est nécessaire pour lui permettre d’exercer sa compétence interne ». L’article 216,
§ 1er, du Traité FUE en fait également de même quand il mentionne que « l’Union peut
conclure un accord avec un ou plusieurs pays tiers ou organisations internationales [...]
lorsque la conclusion d’un accord [...] est nécessaire pour réaliser, dans le cadre des
——
1. Ex. : dans le domaine monétaire ou de change (TFUE, art. 219, § 1er et 3) ; dans le cadre de la poli-
tique commerciale commune (TFUE, art. 207, § 3) et des accords d’association (TFUE, art. 217) ; en
matière de recherche et de développement technologique (TFUE, art. 186), d’environnement (TFUE,
art. 191, § 4) et de coopération au développement (TFUE, art. 211).
2. Sur la question des compétences implicites voy., Leclerc S., Mémentos – Les institutions de l’Union
européenne, préc., spéc. p. 74.
3. La Cour de justice avait été amenée par la suite à nuancer quelque peu la portée de sa théorie des
compétences implicites (sur ce point voy. plus part., CJCE, 15 nov. 1994, Compétence de la
Communauté pour conclure des accords internationaux en matière de services et de protec-
tion de la propriété intellectuelle, avis 1/94, EU:C:1994:384).
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CHAPITRE 3 – Le droit conventionnel 51
politiques de l’Union, l’un des objectifs visés par les traités [...] ». Lorsque l’objet de
l’accord se cantonne aux domaines de compétences exclusives de l’Union4, cette
dernière conclut seule l’accord avec le ou les pays tiers ou encore avec la ou les autres
organisations internationales. En revanche, si l’objet de l’accord va au-delà des seules
compétences exclusives de l’Union et qu’on se situe dans un domaine de compétences
partagées5, cet accord est alors conclu conjointement par les États membres et l’Union
européenne. Il s’agit alors d’un accord mixte6.
Dès leur entrée en vigueur, les accords et traités internationaux conclus par l’Union font
partie intégrante de son ordre juridique (CJCE, 30 avril 1974, Haegeman, 181/73, EU:
C:1974:41, point 5 ; CJCE, 30 sept. 1987, Demirel, 12/86, EU:C:1987:400, point 7) et
lient tout autant les institutions de l’Union (CJCE, 5 oct. 1994, Allemagne/Conseil, C-
280/93, EU:C:1994:367, point 56)7 que les États membres (CJCE, 26 oct. 1982, Kupfer-
berg, 104/81, EU:C:1982:362, point 11) (TFUE, art. 216, § 2). La Cour de justice a par
ailleurs admis qu’il en était de même pour les accords mixtes. En revanche, un accord ou
traité international ne saurait être opposable aux justiciables tant qu’il n’a pas été publié.
En pratique, le Conseil adopte le plus souvent une décision de portée générale en
annexe de laquelle l’accord ou le traité international est reproduit. La Cour de justice a
précisé qu’un tel procédé ne pouvait pas s’apparenter à une procédure d’introduction/
transformation/réception des accords ou des traités internationaux dans l’ordre juridique
de l’Union.
Lorsque les accords externes entre l’Union européenne et un ou plusieurs pays tiers ou
organisations internationales instituent des organes de gestion8 et leur confèrent un
pouvoir de décision, les actes obligatoires unilatéraux pris par ces instances font, à
partir de leur entrée en vigueur, partie intégrante de l’ordre juridique de l’Union au
même titre que les accords ou traités eux-mêmes (CJCE, 14 oct. 1989, Grèce/Commis-
sion, 30/88, EU:C:1989:422, point 13 ; CJCE, 20 sept. 1990, Sevince, C-192/89, EU:
C:1990:322, point 9).
——
4. Sur la question des compétences exclusives voy. Leclerc S., Mémentos – Les institutions de l’Union
européenne, préc., spéc. p. 76.
5. Sur la question des compétences partagées voy. Leclerc S., Mémentos – Les institutions de l’Union
européenne, préc., spéc. p. 77.
6. Ex. : Accord euro-méditerranéen instituant une association entre la Communauté européenne et ses
États membres, d’une part, et la République libanaise, d’autre part (JOUE L 143, 30 mai 2006, p. 1) ;
Accord euro-méditerranéen établissant une association entre la Communauté européenne et ses
États membres, d’une part, et la République Algérienne démocratique et populaire, d’autre part
(JOUE L 265, 10 oct. 2005, p. 2) ; Accord de partenariat entre les membres du groupe des États
d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d’une part, et la Communauté européenne et ses États
membres, d’autre part, signé à Cotonou le 23 juin 2000 (JOCE L 317, 15 déc. 2000, p. 3).
7. Dès lors que l’accord international entre en vigueur, les institutions de l’Union ne peuvent plus appli-
quer les normes de droit dérivé contraires aux dispositions de cet accord.
8. Ex. : les accords d’association (TFUE, art. 217), les accords de coopération (TFUE, art. 218).
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52 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
Les accords externes conclus par l’Union européenne occupent un rang supérieur au
droit dérivé et inférieur au droit primaire dans la hiérarchie des normes de l’Union.
——
9. Sur la question des attributions consultatives de la Cour de justice voy., Leclerc S., Mémentos – Les
institutions de l’Union européenne, préc., spéc. p. 149.
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CHAPITRE 3 – Le droit conventionnel 53
Section 2
Les accords des États membres
——
10. Ex. : Convention de Bruxelles de 1968 concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions
en matière civile et commerciale, JOCE L 299, 31 déc. 1972, p. 32 ; Convention nº 90/436/CEE sur
l’élimination des doubles impositions en cas de correction des bénéfices d’entreprises associées, JOCE
L 225, 20 août 1990, p. 10.
11. Ex. : Convention de 1995 relative à la procédure simplifiée d’extradition, JOCE C 78, 30 mars 1995,
p. 2 ; Convention de 1995 portant création d’un office européen de police (dénommée Convention
Europol), JOCE C 316, 27 nov. 1995, p. 2 ; Convention de 1996 relative à l’extradition, JOCE C 313,
23 oct. 1996, p. 12 ; Convention de 1997 relative à la signification et à la notification des actes judi-
ciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale, JOCE C 261, 27 août 1997, p. 2 ; Conven-
tion de 1997 relative à la lutte contre la corruption, JOCE C 195, 25 juin 1997, p. 2 ; Convention de
1998 relative aux décisions de déchéance du permis de conduire, JOCE C 216, 10 juill. 1998, p. 1 ;
Convention de 2000 relative à l’entraide judiciaire en matière pénale entre les États membres de
l’Union européenne, JOCE C 197, 12 juill. 2000, p. 3.
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54 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
actes adoptés sur la base des titres V (PESC) et VI (CPJP) du Traité UE avant l’entrée en
vigueur du Traité de Lisbonne, que : « Les effets juridiques des actes des institutions,
organes et organismes de l’Union adoptés sur la base du Traité UE avant l’entrée en
vigueur du Traité de Lisbonne sont préservés aussi longtemps que ces actes n’auront
pas été abrogés, annulés ou modifiés en application des traités. Il en va de même des
conventions conclues entre les États membres sur la base du Traité sur
l’Union européenne ».
Le Traité FUE prévoit parfois que les représentants des gouvernements des États
membres arrêtent des décisions. Plus particulièrement, il appartient aux gouvernements
des États membres, agissant alors conjointement en qualité de représentants de la
collectivité des États membres, de désigner les membres du comité consultatif en
matière de transports (TFUE, art. 99), de nommer d’un commun accord pour six ans les
juges et avocats généraux de la Cour de justice (TUE, art. 19, § 2 ; TFUE, art. 253, al. 1er)
ainsi que les membres du Tribunal (TFUE, art. 254, al. 2) ou encore de fixer le siège des
institutions de l’Union (TFUE, art. 341)12. De telles « décisions » ne doivent pas être
confondues avec les actes de droit dérivé du même nom prévus par l’article 288,
alinéa 4, du Traité FUE dans la mesure où elles sont en fait de véritables accords en
forme simplifiée conclus entre les gouvernements des États membres au sein du
Conseil, certains d’entre eux ayant été soumis aux formalités d’approbation nationales13.
En pratique, ces actes conventionnels interétatiques, publiés au Journal officiel de
l’Union européenne, ont aujourd’hui un caractère exceptionnel. Ils échappent toutefois
à tout contrôle de légalité de la Cour de justice. En effet, la Haute juridiction a jugé en
substance que si le recours en annulation est ouvert à l’égard de toutes dispositions
prises par les institutions, organes et organismes de l’Union, quels qu’en soient la
nature, la forme ou le libellé, qui visent à produire des effets en droit, « les actes
adoptés par les représentants des États membres agissant non pas en qualité de
membres du Conseil, mais en qualité de représentants de leur gouvernement, et exer-
çant ainsi collectivement les compétences des États membres, ne sont pas soumis au
contrôle de légalité exercé par la Cour de justice » (CJCE, 30 juin 1993, Parlement/
Conseil et Commission, C-181/91 et C-248/91, EU:C:1993:271, point 12). De
même, s’ils sont également exempts d’un renvoi préjudiciel en appréciation de validité
devant la Cour puisque constituant « l’expression d’une action concertée des États en
tant que sujets de droit international et non des actes d’une institution »14, il semble
néanmoins qu’on pourrait parfaitement concevoir qu’un recours en manquement
puisse être engagé par la Commission européenne à l’encontre de l’ensemble des États
——
12. Marc Blanquet constate néanmoins que par le passé, les représentants des gouvernements des États
membres, réunis parfois au niveau des chefs d’État ou de gouvernement, avaient également recouru
de temps à autre à ce type d’actes « spontanément, en dehors même de toute mention des traités,
pour prendre les mesures requises par le bon développement des Communautés qui, compte tenu
du principe de la compétence d’attribution, ne pouvaient être adoptées par les institutions commu-
nautaires elles-mêmes ». Blanquet M., Droit général de l’Union européenne, 11e éd., 2018, Sirey,
spéc. point 701.
13. Ex. : Décision 76/787/CECA, CEE, CEEA des représentants des gouvernements des États membres
réunis au sein du Conseil du 20 septembre 1976 relative à l’Acte portant élection des représentants à
l’Assemblée au suffrage universel direct, JOCE L 278, 8 oct. 1976 p. 1.
14. Van Raepenbusch S., Droit institutionnel de l’Union européenne, 2e éd., 2016, Larcier, spéc. p. 430.
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CHAPITRE 3 – Le droit conventionnel 55
On opère une distinction selon que l’accord a été conclu avant ou après l’entrée en
vigueur des traités constitutifs ou l’adhésion à l’Union.
——
15. Sur ce point voy., Joliet R., Le droit institutionnel des Communautés européennes. Les institutions, Les
sources. Les rapports entre ordres juridiques, 1983, Faculté de Droit de Liège, spéc. p. 187 et s.
16. Ex. : Accord de Luxembourg de 1989 en matière de brevets communautaires, JOCE L 401, 30 déc.
1989, p. 1 ; Accord de Schengen de 1985 relatif à la suppression graduelle des contrôles aux fron-
tières communes, JOCE L 239, 22 sept. 2000, p. 13 ; Convention d’application de 1990 de l’Accord
de Schengen du 14 juin 1985, JOCE L 239, 22 sept. 2000, p. 19.
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56 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
part, et un ou plusieurs États tiers, d’autre part, ne sont pas affectés par les dispositions
des traités ». Selon la Cour de justice, cette disposition « a pour objet de préciser,
conformément aux principes du droit international, que l’application du traité n’affecte
pas l’engagement de l’État membre concerné de respecter les droits des États tiers résul-
tant d’une convention antérieure et d’observer ses obligations correspondantes » (CJCE,
14 oct. 1980, Burgoa, 812/79, EU:C:1980:231, point 8).
Si l’article 351, du Traité FUE permet aux États membres de respecter leurs obligations
résultant de conventions internationales antérieures aux traités ou à leur adhésion, il ne
les autorise pas pour autant à se prévaloir des droits découlant de telles conventions
pour se soustraire aux obligations que le droit de l’Union leur impose (CJCE, 2 août
1993, Levy, C-158/91, EU:C:1993:332, point 12 ; CJCE, 2 juill. 1996, Commission/
Luxembourg, C-473/93, EU:C:1996:263, point 40). Le juge de Luxembourg a égale-
ment précisé que cette disposition implique « l’obligation des institutions de la Commu-
nauté de ne pas entraver l’exécution des engagements des États membres découlant
d’une convention antérieure » (CJCE, 14 oct. 1980, Burgoa, 812/79, EU:C:1980:231,
point 9).
L’article 351, alinéa 1er, du Traité FUE n’a donc pas pour objet, ni même pour effet,
d’opérer un transfert automatique à l’Union européenne des engagements contractés
par les États membres antérieurement à l’entrée en vigueur des traités ou à leur adhé-
sion. La Cour de justice a toutefois considéré que l’Union pouvait, dans les domaines
où elle s’est vue conférer une compétence exclusive, être liée par des accords internatio-
naux conclus par les seuls États membres avant leur adhésion. Les droits et obligations
découlant d’accords internationaux antérieurs à l’adhésion ont donc parfois été trans-
férés à l’Union européenne mais seulement avec le consentement des États tiers. C’est
ainsi que la Cour de justice a admis en son temps que la Communauté économique
européenne était liée par les dispositions de l’Accord GATT de 1949 sans en être pour
autant partie contractante (CJCE, 12 déc. 1972, International Fruit Company e.a.,
21/72 à 24/72, EU:C:1972:115). La Haute juridiction a jugé qu’une convention interna-
tionale non ratifiée par la Communauté européenne peut néanmoins la lier et faire
partie des dispositions que cette juridiction peut interpréter, si dans le champ d’applica-
tion de cette convention, la Communauté « a assumé les compétences précédemment
exercées par les États membres » (voy. not., CJCE, 3 juin 2008, Intertanko e.a., C-308/
06, EU:C:2008:312, point 48 ; CJCE, 22 oct. 2009, Bogiatzi, C-301/08, EU:
C:2009:649, point 25 : à propos de la Convention de Varsovie pour l’unification des
certaines règles relatives au transport aérien international du 12 octobre 1929). Le juge
de Luxembourg a fait usage de cette jurisprudence au bénéfice de la Convention
de Bruxelles sur la nomenclature douanière du 15 décembre 1950 (CJCE, 19 nov.
1975, Douaneagent der Nederlandse Spoorwegen, 38/75, EU:C:1975:154). En
revanche, une telle transmission n’est pas envisageable dans les domaines dans lesquels
les États membres n’ont pas transféré leur compétence à l’Union européenne (CJCE,
14 juill. 1994, Peralta, C-379/92, EU:C:1994:296, point 16).
Si ces conventions ne sont pas compatibles avec les traités, l’article 351, alinéa 2, du
Traité FUE dispose que « le ou les États membres en cause recourent à tous les moyens
appropriés pour éliminer les incompatibilités constatées. En cas de besoin, les États
membres se prêtent une assistance mutuelle en vue d’arriver à cette fin et adoptent le
cas échéant une attitude commune ». La formulation de cette disposition est sans équi-
voque : si la révision d’un accord par voie de négociation diplomatique est impossible,
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CHAPITRE 3 – Le droit conventionnel 57
BIBLIOGRAPHIE
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CHAPITRE 4
Le droit jurisprudentiel
Le droit jurisprudentiel comprend les sources non écrites du droit de l’Union que sont la
jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (Section 1) et les principes
généraux du droit (Section 2).
Section 1
La jurisprudence de la Cour de justice
de l’Union européenne
——
1. Voy. le présent ouvrage, p. 183.
2. Selon l’expression de Boulouis J., Droit institutionnel de l’Union européenne, 6e éd., 1997, Montchres-
tien, spéc. p. 234.
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60 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
Cette mission créatrice de droit n’a été rendue possible que par le recours à des
méthodes d’interprétation du droit de l’Union particulièrement dynamiques. En effet,
et sans exclure le recours parfois à des méthodes classiques d’interprétation4, les juridic-
tions de l’Union n’hésitent pas à faire usage de techniques plus audacieuses et construc-
tives. Elles préfèrent en effet recourir à l’interprétation systématique du droit de l’Union
s’appuyant sur la place et la fonction de la disposition à interpréter dans le système
général des traités et dans l’ensemble de la réglementation en cause et, plus fréquem-
ment, à l’interprétation téléologique qui consiste à interpréter la disposition en cause à
la lumière de ses finalités (CJCE, 13 mars 1973, Mij PPW International NV, 61/72, EU:
C:1973:28) ou de ses objectifs (CJCE, 13 févr. 1969, Wilhelm e.a., 14/68, EU:
C:1969:4). Le juge de l’Union fait d’ailleurs le plus souvent une utilisation conjointe de
ces deux méthodes (pour une illustration voy., CJCE, 8 avril 1976, Defrenne/SABENA,
43/75, EU:C:1976:56)5.
Le droit de l’Union est donc, pour une large part, un droit prétorien. Cette situation
s’explique en grande partie par le fait que l’ordre juridique de l’Union est un système
de droit en voie de formation qui est sans cesse enrichi et consolidé par le biais de la
jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne. Ainsi, la reconnaissance de
l’effet direct du droit de l’Union6, de sa primauté7 ou encore du principe du parallélisme
des compétences internes et externes de l’Union européenne8 sont autant d’exemples
qui illustrent la volonté du juge de Luxembourg d’apporter sa contribution à la consoli-
dation et au développement de l’ordre juridique de l’Union.
——
3. Van Raepenbusch S., Droit institutionnel de l’Union européenne, préc., spéc. p. 510.
4. Comme not. l’interprétation littérale lorsque la disposition à interpréter est claire et sans équivoque.
5. Pour une illustration de l’utilisation faite par les avocats généraux des différentes méthodes d’inter-
prétation voy. not. les conclusions de l’avocat général Paolo Mengozzi présentées le 30 avril 2014,
Noorzia, C-338/13, EU:C:2014:288.
6. Voy. le présent ouvrage, p. 81.
7. Ibid., p. 99.
8. Ibid., p. 50.
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CHAPITRE 4 – Le droit jurisprudentiel 61
Section 2
Les principes généraux du droit
Les principes généraux du droit constituent aujourd’hui une source importante du droit
de l’Union. Il est vrai que le juge de Luxembourg fait un usage d’autant plus abondant
de ces règles de droit non écrites qu’il dispose d’une totale liberté pour aller glaner dans
les autres systèmes juridiques et en extraire les principes et les règles qu’il intègre dans
l’ordre juridique de l’Union en qualité de principes généraux du droit dont il assure la
protection. Puisque découlant directement du travail d’analyse et d’interprétation du
juge de Luxembourg, les principes généraux du droit représentent sans nul doute la
manifestation la plus aboutie de son œuvre prétorienne. Après avoir déterminé l’origine
et le contenu des principes généraux du droit, il conviendra d’en délimiter la portée.
Les sources d’inspiration des principes généraux du droit sont multiples. Certains d’entre
eux, auxquels les juridictions de l’Union se réfèrent, découlent de la nature même de
l’Union et de l’économie du système établi par les traités, d’autres sont communs aux
droits et systèmes juridiques des États membres, d’autres encore sont issus du droit
international public, d’autres enfin ont été érigés par le juge de l’Union en droits
fondamentaux.
——
9. Van Raepenbusch S., Droit institutionnel de l’Union européenne, préc., spéc. p. 506.
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62 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
d’établissement voy. not., CJCE, 21 juin 1974, Reyners, 2/74, EU:C:1974:68 ; s’agissant
de l’article 56, du Traité FUE relatif à la liberté de prestation des services voy. not., CJCE,
3 déc. 1974, Van Binsbergen, 33/74, EU:C:1974:131), l’interdiction des discrimina-
tions fondées sur la nationalité (CJCE, 12 juill. 1984, Prodest, 237/83, EU:C:1984:277)
ou sur le sexe (CJCE, 17 oct. 1995, Kalanke, C-450/93, EU:C:1995:322), le principe de
libre concurrence (CJCE, 25 oct. 1977, Metro/Commission, 26/76, EU:C:1977:167), le
principe de coopération loyale (CJCE, 13 déc. 1991, Commission/Italie, C-69/90, EU:
C:1991:478, point 11 ; CJCE, 8 févr. 1973, Commission/Italie, 30/72, EU:C:1973:16,
point 11), le principe de précaution (Tribunal, 26 nov. 2002, Artegodan e.a./
Commission, T-74/00, T-76/00, T-83/00, T-84/00, T-85/00, T-132/00, T-137/00 et T-
141/00, EU:T:2002:283, point 184), le principe d’égalité de traitement10 (CJUE,
12 mai 2011, Luxembourg/Parlement et Conseil, C-176/09, EU:C:2011:290,
point 31), le principe de l’interdiction de l’abus de droit selon lequel les justiciables ne
sauraient frauduleusement ou abusivement se prévaloir des normes du droit de l’Union
(CJUE, 26 févr. 2019, N Luxembourg 1 e.a., C-115/16, C-118/16, C-119/16 et C-299/
16, EU:C:2019:134, points 95 et s.) ou encore le principe de non-discrimination entre
opérateurs économiques de l’Union (CJCE, 19 oct. 1977, Moulins & Huileries
de Pont-à-Mousson e.a., 124/76 et 20/77, EU:C:1977:161, point 16) ou en fonction
de l’âge11 (CJUE, 19 janv. 2010, Kücükdeveci, C-555/07, EU:C:2010:21, point 21).
——
10. La Cour de justice a jugé que le droit de l’Union ne consacre pas pour autant un principe général
d’égalité de traitement des actionnaires en vertu duquel les actionnaires minoritaires sont protégés
par l’obligation de l’actionnaire dominant acquérant ou exerçant le contrôle d’une société d’offrir à
ceux-ci de racheter leurs actions aux mêmes conditions que celles convenues lors de l’acquisition
d’une participation dans cette société conférant ou renforçant le contrôle de l’actionnaire dominant
(CJCE, 15 oct. 2009, Audiolux e.a., C-101/08, EU:C:2009:626, point 52).
11. La Cour de justice a jugé que le droit de l’Union ne consacre pas un principe général de non-discrimi-
nation en raison de l’obésité, en tant que telle, en ce qui concerne l’emploi et le travail (CJUE, 18 déc.
2014, FOA, C-354/13, EU:C:2014:2463, point 40).
12. L’article 340, alinéa 2, du Traité FUE prévoit : « En matière de responsabilité non contractuelle, l’Union
doit réparer, conformément aux principes généraux communs aux droits des États membres, les
dommages causés par ses institutions ou par ses agents dans l’exercice de leurs fonctions », voy. le
présent ouvrage, p. 158.
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CHAPITRE 4 – Le droit jurisprudentiel 63
——
13. De toute façon, un tel objectif s’avérerait en pratique impossible à réaliser notamment dans le
contexte des élargissements successifs de l’UE.
14. Rideau J., Droit institutionnel de l’Union européenne, 6e éd., 2010, LGDJ, coll. Manuel, spéc. point
144.
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64 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
——
15. Ex. : le principe de non-discrimination en raison de la nationalité (TCEE, art. 6, al. 1er – TFUE, art. 18,
al. 1er), le principe de l’égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins
(TCEE, art. 119, § 1er – TFUE, art. 157, § 1er).
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CHAPITRE 4 – Le droit jurisprudentiel 65
que « le respect des droits fondamentaux fait partie intégrante des principes généraux
du droit dont la Cour de justice assure le respect » (CJCE, 12 nov. 1969, Stauder, 29/
69, EU:C:1969:57, point 7 ; CJCE, 17 déc. 1970, Internationale Handelsgesell-
schaft, 11/70, EU:C:1970:114, point 4 ; CJCE, 3 sept. 2008, Kadi et Al Barakaat
International Foundation/Conseil et Commission, C-402/05 P et C-415/05 P, EU:
C:2008:461, point 283 ; Tribunal, 7 déc. 2010, Fahas/Conseil, T-49/07, EU:
T:2010:499, point 45 ; CJUE, 29 sept. 2011, Elf Aquitaine/Commission, C-521/09 P,
EU:C:2011:620, point 112 ; 24 avril 2012, Kamberaj, C-571/10, EU:C:2012:233,
point 61). Elle indiquera par la suite dans son arrêt Nold de mai 1974 que « les instru-
ments internationaux concernant la protection des droits de l’homme, auxquels les
États membres ont coopéré ou adhéré, peuvent également fournir des indications dont
il convient de tenir compte dans le cadre du droit communautaire » (CJCE, 14 mai 1974,
Nold/Commission, 4/73, EU:C:1974:51, point 13) avant de préciser que « la Conven-
tion européenne des droits de l’homme revêt, à cet égard, une signification particu-
lière » (voy. not., CJCE, 15 mai 1986, Johnston, 222/84, EU:C:1986:206, point 18 ;
CJCE, 6 mars 2001, Connolly/Commission, C-274/99 P, EU:C:2001:127, point 37 ;
Tribunal, 7 déc. 2010, Fahas/Conseil, T-49/07, EU:T:2010:499, point 45).
Cette évolution jurisprudentielle s’explique principalement par le fait que certaines juri-
dictions nationales, et plus particulièrement la Cour constitutionnelle fédérale alle-
mande, avaient incité la Cour de justice à un tel développement. Il est vrai que la Cour
de Karlsruhe avait non seulement envisagé la possibilité de contrôler elle-même la vali-
dité des actes de droit dérivé dès lors qu’ils étaient susceptibles de porter atteinte aux
droits fondamentaux reconnus par la Loi fondamentale allemande (Cour constitution-
nelle fédérale (Bundesverfassungsgericht), 18 oct. 1967, RTD eur. 1968, p. 203)
mais également refusé de faire primer le droit communautaire sur la loi fondamentale
de 1949 en raison du fait que la Communauté économique européenne ne disposerait
pas d’un système de protection des droits de l’homme comparable à celui qui existait en
Allemagne (Cour constitutionnelle fédérale (Bundesverfassungsgericht, 2e ch.) du
29 mai 1974, RTD eur. 1975, p. 316). C’est donc par la technique des principes géné-
raux du droit que la Cour de justice a consacré l’existence et la protection des droits
fondamentaux dans l’ordre juridique de l’Union sans pour autant d’ailleurs définir le
contenu de ces droits. Le juge de l’Union a plus particulièrement érigé en principes
généraux du droit les droits fondamentaux qui présentent une certaine connexité et
compatibilité avec le droit de l’Union. Ces principes généraux du droit sont dégagés et
consacrés par le juge de Luxembourg soit à partir des traditions constitutionnelles
communes des États membres soit des conventions internationales, auxquelles les États
membres coopèrent ou adhèrent, et en particulier de la Convention européenne de
sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950
du Conseil de l’Europe16 (sur ce point voy. not., CJCE, 26 juin 2007, Ordre des
barreaux francophone et germanophone e.a., C-305/05, EU:C:2007:383,
point 29).
——
16. On constate d’ailleurs que la Cour de justice ne fait qu’un usage tout à fait exceptionnel aux conven-
tions internationales de protection des droits de l’homme autres que la Convention européenne des
droits de l’homme (pour une référence au Pacte international relatif aux droits civils et politiques
voy., CJCE, 17 févr. 1998, Grant, C-249/96, EU:C:1998:63, points 43 et s. ; pour une référence à la
Charte sociale européenne voy., CJCE, 2 févr. 1988, Blaizot, 24/86, EU:C:1988:43, point 17).
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66 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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CHAPITRE 4 – Le droit jurisprudentiel 67
——
17. Troisième considérant du préambule de l’Acte unique européen.
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68 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
——
18. Le Traité de Nice vient seulement complèter le mécanisme de sanction prévu à l’article 7, du Traité UE
en permettant au Conseil de prendre également des sanctions en cas de risque clair de violation grave
par un État membre des principes fondateurs sur lesquels repose l’UE.
19. Bull. UE, nº 12-2000, p. 183.
20. Leclerc S., Mémentos – Les institutions de l’Union européenne, préc., spéc. p. 43.
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CHAPITRE 4 – Le droit jurisprudentiel 69
public et de donner une base juridique aux articles faisant référence à ce texte dans le
nouveau Traité UE tel qu’il résulte du Traité de Lisbonne21.
Le Traité de Lisbonne ne reprend plus le texte intégral de la Charte des droits fondamen-
taux de l’UE dans le corps même des traités mais se limite seulement à affirmer, dans le
nouvel article 6, § 1er, du Traité UE, que « l’Union reconnaît les droits, les libertés et les
principes énoncés dans la Charte des droits fondamentaux du 7 décembre 2000, telle
qu’adaptée le 12 décembre 2007 à Strasbourg, laquelle a la même valeur juridique que
les traités ». Ainsi, la Charte des droits fondamentaux de l’UE se voit donc reconnaître
une valeur juridique identique à celle des traités (pour un rappel voy., CJUE, 26 sept.
2013, HK Danmark, C-476/11, EU:C:2013:590, point 19). Elle dispose donc, depuis
l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, du statut d’acte juridiquement contraignant.
Les dispositions de la Charte s’appliquent comme auparavant aux institutions, organes
et organismes de l’Union et aux États membres lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de
l’Union exception faite pour le Royaume-Uni et la Pologne. En effet, le protocole (nº 30)
relatif à l’application de la Charte des droits fondamentaux de l’UE à la Pologne et au
Royaume-Uni22 prévoit que « la Charte n’étend pas la faculté de la Cour de justice de
l’Union européenne, ou de toute juridiction de la Pologne ou du Royaume-Uni,
d’estimer que les lois, règlements ou dispositions, pratiques ou action administratives
de la Pologne ou du Royaume-Uni sont incompatibles avec les droits, les libertés et les
principes fondamentaux qu’elle réaffirme » (art. 1er § 1er) et « pour dissiper tout doute,
rien dans le titre IV de la Charte [Solidarité] ne crée des droits justiciables applicables à
la Pologne ou au Royaume-Uni, sauf dans la mesure où la Pologne ou le Royaume-Uni
a prévu de tels droits dans sa législation nationale » (art. 1er, § 2). Le protocole (nº 30)
ajoute enfin : « lorsqu’une disposition de la Charte fait référence aux législations et prati-
ques nationales, elle ne s’applique à la Pologne ou au Royaume-Uni que dans la mesure
où les droits et principes qu’elle contient sont reconnus dans la législation ou les prati-
ques de la Pologne ou du Royaume-Uni » (art. 2)23.
Il résulte, en substance, de la jurisprudence constante de la Cour que les droits fonda-
mentaux garantis dans l’ordre juridique de l’Union ont vocation à être appliqués dans
toutes les situations régies par le droit de l’Union, mais pas en dehors de telles situations
(voy. not., CJUE, 26 févr. 2013, Åkerberg Fransson, C-617/10, EU:C:2013:105,
point 19 ; CJUE, 27 mars 2014, Torralbo Marcos, C-265/13, EU:C:2014:187,
point 29). C’est dans cette mesure que la Cour a déjà rappelé qu’elle ne peut apprécier,
au regard de la Charte, une réglementation nationale qui ne se situe pas dans le cadre
du droit de l’Union (en ce sens voy., CJUE, Ord., 12 juill. 2012, Currà e.a., C-466/11,
EU:C:2012:465, point 26). En revanche, dès lors qu’une telle réglementation entre dans
le champ d’application de cet ordre juridique, la Cour, saisie à titre préjudiciel, doit
fournir tous les éléments d’interprétation nécessaires à l’appréciation, par la juridiction
nationale, de la conformité de cette réglementation avec les droits fondamentaux dont
elle assure le respect (à titre d’ex. voy. not., CJCE, 18 juin 1991, ERT/DEP, C-260/89,
EU:C:1991:254, point 42 ; CJCE, 29 mai 1997, Kremzow, C-299/95, EU:C:1997:254,
——
21. JOUE C 303, 14 déc. 2007, p. 1.
22. Voy. le protocole (nº 30) sur l’application de la Charte des droits fondamentaux de l’UE à la Pologne
et au Royaume-Uni.
23. Voy. égal., dans une moindre mesure, la déclaration (nº 53) de la République tchèque sur la Charte
des droits fondamentaux de l’UE.
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70 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
——
24. Selon la Cour de justice, cette notion de « mise en œuvre du droit de l’Union », au sens de l’article 51
de la Charte, impose l’existence d’un lien de rattachement d’un certain degré, dépassant le voisinage
des matières visées ou les incidences indirectes de l’une des matières sur l’autre (en ce sens voy.,
CJCE, 29 mai 1997, Kremzow, C-299/95, EU:C:1997:254, point 16 ; CJUE, 6 mars 2014, Siragusa,
C-206/13, EU:C:2014:126, point 24).
25. Sur l’invocabilité d’exclusion voy. le présent ouvrage, p. 90.
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CHAPITRE 4 – Le droit jurisprudentiel 71
la Conv. EDH (« À partir de l’âge nubile, l’homme et la femme ont le droit de se marier et
de fonder une famille selon les lois nationales régissant l’exercice de ce droit ») en ce
qu’il exclut une référence à l’homme et à la femme et justifie ainsi tout type de
mariage). Par ailleurs, la Charte des droits fondamentaux de l’UE gagne également
progressivement du terrain auprès de certaines juridictions suprêmes des États
membres. Ainsi, la Cour constitutionnelle fédérale autrichienne (Verfassungsgerichtshof)
a annoncé dans un communiqué en date du 4 mai 2012, suite à sa décision du 14 mars
2012 (U 466/11, EuGRZ 2012, s. 331) par laquelle elle décide d’étendre son contrôle de
constitutionnalité des lois autrichiennes aux dispositions de la Charte, que « dans les cas
où la législation de l’Union européenne joue un rôle, la Charte européenne des droits
fondamentaux doit être considérée comme étant au même niveau que la Constitution ».
Par conséquent, « si une décision de l’autorité administrative ne respecte pas un droit
garanti par la Charte européenne des droits fondamentaux, la Cour constitutionnelle
l’annulera, car elle sera anticonstitutionnelle », sans devoir consulter la Cour de justice,
a ajouté la Cour constitutionnelle en précisant que toute loi autrichienne qui ne respecte
pas cette Charte sera également considérée comme contraire à la Constitution. La
Charte des droits fondamentaux est maintenant prise en considération dans toutes les
affaires où l’Union dispose d’une législation claire et forte, en particulier dans les
domaines clés comme l’immigration, les demandes d’asile et la concurrence. En
revanche, le juge constitutionnel autrichien n’appliquera pas la Charte dans les
domaines où l’Union européenne ne légifère pas (sur les conséquences de cette prise
en compte de la Charte en droit autrichien voy., CJUE, 11 sept. 2014, A., C-112/13,
EU:C:2014:2195).
Le nouvel article 6, § 2, du Traité UE, tel qu’il résulte du Traité de Lisbonne, prévoit, tout
comme le planifiait déjà le Traité établissant une Constitution pour l’Europe (TC Eur.,
art. I-9, § 2), que « l’Union adhère à la Convention européenne de sauvegarde des
droits de l’homme et des libertés fondamentales ». Le libellé de cette disposition est
sans appel et ne laisse place à aucun élément d’opportunité : il ne s’agit pas pour
l’Union d’avoir la possibilité d’adhérer à la Conv. EDH mais, au contraire, d’avoir l’obliga-
tion d’y adhérer. Le Traité UE encadre strictement cette adhésion. Tout d’abord,
l’article 6, § 2, du Traité UE prend soin de préciser qu’une telle adhésion ne peut modi-
fier les compétences de l’Union telles qu’elles sont définies par les traités. Cette limite est
réitérée à l’article 2 du protocole (nº 8)26 : l’accord relatif à l’adhésion de l’Union à la
Conv. EDH doit garantir que cette adhésion « n’affecte ni les compétences de l’Union
ni les attributions de ses institutions ». L’article 1er de ce même protocole précise que
l’accord relatif à l’adhésion « doit refléter la nécessité de préserver les caractéristiques
spécifiques de l’Union et du droit de l’Union, notamment en ce qui concerne :
a) les modalités particulières de l’éventuelle participation de l’Union aux instances de
contrôle de la Convention européenne ;
b) les mécanismes nécessaires pour garantir que les recours formés par des États non-
membres et les recours individuels soient dirigés correctement contre les États
membres et/ou l’Union, selon le cas ».
——
26. Protocole (nº 8) relatif à l’article 6, § 2, du Traité UE sur l’adhésion de l’Union à la Convention euro-
péenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
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72 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
Par ailleurs, cet accord d’adhésion ne doit affecter ni l’article 344, du Traité FUE, aux
termes duquel « les États membres s’engagent à ne pas soumettre un différend relatif
à l’interprétation ou à l’application des traités à un mode de règlement autre que ceux
prévus par ceux-ci » (Protocole nº 8, art. 3) ni « la situation particulière des États
membres à l’égard de la Convention européenne, et notamment de ses protocoles, des
mesures prises par les États membres par dérogation à la Convention européenne,
conformément à son article 15, et des réserves à la Convention européenne formulées
par les États membres conformément à son article 57 ». Enfin, la déclaration ad article 6,
§ 2, du Traité UE27 précise que l’adhésion de l’Union à la Conv. EDH « devrait s’effectuer
selon des modalités permettant de préserver les spécificités de l’ordre juridique de
l’Union. Dans ce contexte, la Conférence constate l’existence d’un dialogue régulier
entre la Cour de justice de l’Union européenne et la Cour européenne des droits de
l’homme, dialogue qui pourra être renforcé lors de l’adhésion de l’Union à cette
Convention ».
En pratique, les pourparlers officiels sur l’adhésion de l’UE à la Conv. EDH ont débuté en
juillet 2010 suite à l’adoption d’une décision par le Conseil le 4 juin de la même année
autorisant l’ouverture des négociations relatives à l’accord d’adhésion et désignant la
Commission européenne en tant que négociateur. Le 5 avril 2013, les négociateurs
sont parvenus à un accord sur les projets d’instruments d’adhésion et ont convenu que
tous ces textes constituent un ensemble indissociable et indispensable pour permettre
l’adhésion de l’UE à la Conv. EDH. Le projet d’accord d’adhésion contient tout d’abord
un premier groupe de dispositions qui régit l’adhésion proprement dite de l’UE à la
Conv. EDH et introduit par ailleurs divers mécanismes procéduraux nécessaires pour
permettre une adhésion effective. Le projet d’accord englobe par ailleurs un second
groupe de dispositions, présentant un caractère purement technique, qui prévoit,
d’une part, les modifications et adaptations de cette Convention qui s’imposent au
regard du fait qu’elle a été rédigée pour s’appliquer aux États parties du Conseil de
l’Europe alors que l’Union n’est ni un État ni un membre de cette organisation interna-
tionale et, d’autre part, des dispositions relatives aux relations entre la Conv. EDH et
d’autres accords conclus au sein du Conseil de l’Europe et qui sont liés à cette Conven-
tion auxquelles viennent s’ajouter des clauses finales régissant notamment l’entrée en
vigueur de l’accord d’adhésion. Conformément à l’article 218, § 11, du Traité FUE28, la
Commission européenne a introduit une demande d’avis le 4 juillet 2013 auprès de la
Cour de justice afin qu’elle apprécie la compatibilité de ce projet d’accord d’adhésion
avec les traités avant sa conclusion, pour le Conseil de l’Europe, par le Comité des Minis-
tres et, pour l’Union européenne, par le Conseil après approbation du Parlement euro-
péen (TFUE, art. 218, § 6,). Prenant à contrepied les États membres et les autres institu-
tions de l’UE, la Cour de justice rend, à la surprise générale, un (second) avis négatif en
décembre 2014 sur ce projet d’accord d’adhésion (CJUE, 18 déc. 2014, Projet
d’accord international – Adhésion de l’Union européenne à la convention euro-
péenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales –
Compatibilité dudit projet avec les traités UE et FUE, avis 2/13, EU:C:2014:2454).
En effet, la Cour de justice identifie dans son avis 2/13 pas moins de sept
——
27. Déclaration ad article 6, § 2, du Traité UE.
28. Sur la question des attributions consultatives de la Cour de justice voy., Leclerc S., Mémentos – Les
institutions de l’Union européenne, préc., spéc. p. 149.
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CHAPITRE 4 – Le droit jurisprudentiel 73
——
29. Sur l’avis 2/13 voy. not., Simon D., « Deuxième (ou second et dernier ?) coup d’arrêt à l’adhésion de
l’Union à la CEDH : étrange avis 2/13 », Europe, nº 2/2015, étude nº 2 ; Jacqué J.-P., « CJUE – CEDH :
2-0 », Éditorial, RTD eur., nº 4/2014, p. 823 ; Dony M., « L’Union est-elle soluble dans la Convention
européenne des droits de l’homme », Éditorial, JDE, nº 216/2015 ; Popov A., « L’avis 2/13 de la CJUE
complique l’adhésion de l’Union européenne à la CEDH », La Revue des droits de l’homme [En
ligne], Actualités Droits-Libertés, mis en ligne le 24 février 2015, consulté le 2 juillet 2017 URL :
http://revdh.revues.org/1065 ; Labayle H., « La guerre des juges n’aura pas lieu. Tant mieux ? Libres
propos sur l’avis 2/13 de la Cour de justice relatif à l’adhésion de l’Union à la CEDH », Réseau univer-
sitaire européen – droit de l’Espace de liberté, sécurité et justice, mis en ligne le 22 décembre 2014,
consulté le 2 juillet 2017 : http://www.gdr-elsj.eu/2014/12/22/droits-fondamentaux/la-guerre-des-
juges-naura-pas-lieu-tant-mieux-libres-propos-sur-lavis-213-de-la-cour-de-justice-relatif-a-ladhesion-de-
lunion-a-la-cedh/#more-3660
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74 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
justice souligne que « l’Union est une Union de droit dans laquelle ses institutions sont
soumises au contrôle de la conformité de leurs actes, notamment, avec le Traité FUE et
les principes généraux du droit »). Cette assimilation conduit ainsi les principes généraux
du droit dégagés par le juge de Luxembourg à se positionner au sommet de l’ordre juri-
dique de l’Union au même rang que les traités constitutifs et ainsi à faire partie inté-
grante du droit primaire.
Existe-t-il pour autant une hiérarchie entre les principes généraux du droit et les disposi-
tions des traités ? Même si une telle situation ne peut avoir qu’un caractère exceptionnel
dans la mesure où la consécration d’un principe général du droit par le juge de Luxem-
bourg suppose l’absence de contradiction entre ce principe et les finalités et objectifs
poursuivis par les traités, il n’en demeure pas moins que la Cour de justice a déjà eu
l’occasion d’examiner cette question dans différentes affaires soumises à son apprécia-
tion. Toutefois, lorsque la Haute juridiction se livre à un tel examen, elle n’aborde pas
cette question à travers le prisme de la hiérarchie mais de la coexistence des droits.
Ainsi, la Cour de justice a été amenée, à la demande du juge autrichien, à se prononcer
sur un conflit entre la libre circulation des marchandises et la liberté d’expression et de
réunion dans son arrêt Schmidberger de juin 2003 (CJCE, 12 juin 2003, Schmidberger,
C-112/00, EU:C:2003:333). Plus particulièrement, il s’agissait pour le juge de Luxem-
bourg d’apprécier dans cette affaire si la liberté d’expression et de réunion, droit fonda-
mental consacré au rang de principe général du droit, pouvait contrevenir à la libre circu-
lation des marchandises telle que posée par le Traité FUE. La Cour de justice va établir les
conditions de leur compatibilité sans se prononcer pour autant sur leur place respective
dans la hiérarchie des normes. Après avoir rappelé que la protection des droits fonda-
mentaux « constitue un intérêt légitime de nature à justifier, en principe, une restriction
aux obligations imposées par le droit communautaire, même en vertu d’une liberté
fondamentale garantie par le traité telle que la libre circulation des marchandises »
(point 74), la Cour de justice constate que « les droits à la liberté d’expression et à la
liberté de réunion pacifique garantis par la Conv. EDH n’apparaissent pas non plus –
contrairement à d’autres droits fondamentaux consacrés par la même convention, tels
que le droit de toute personne à la vie ou l’interdiction de la torture ainsi que des
peines ou traitements inhumains ou dégradants, qui ne tolèrent aucune restriction –
comme des prérogatives absolues, mais doivent être pris en considération par rapport à
leur fonction dans la société. Des restrictions peuvent ainsi être apportées à l’exercice de
ces droits, pour autant que celles-ci répondent effectivement à des objectifs d’intérêt
général et ne constituent pas, compte tenu du but poursuivi par de telles restrictions,
une intervention démesurée et intolérable qui porterait atteinte à la substance même
des droits » (point 80). Selon la Cour, « il convient de mettre en balance les intérêts en
présence et de déterminer, eu égard à l’ensemble des circonstances de chaque cas
d’espèce, si un juste équilibre a été respecté entre ces intérêts » (point 81). En l’espèce,
la Cour de justice juge que les restrictions apportées aux échanges intra-UE sont propor-
tionnées au regard du but légitime poursuivi, à savoir en l’espèce la protection des droits
fondamentaux (point 93). Dans le même ordre d’idée, la Cour de justice a également
examiné les relations entre la libre prestation de services et la dignité humaine en
matière de « jouer à tuer » des personnes et jugé que le droit de l’Union « ne s’oppose
pas à ce qu’une activité économique consistant en l’exploitation commerciale de jeux de
simulation d’actes homicides fasse l’objet d’une mesure nationale d’interdiction adoptée
pour des motifs de protection de l’ordre public en raison du fait que cette activité porte
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CHAPITRE 4 – Le droit jurisprudentiel 75
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76 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
DROIT PRIMAIRE
Traité UE du 7 février 1992
Traité FUE du 25 mars 1957
Traité CEEA du 25 mars 1957
Protocoles (37) et annexes (2) des traités
Principes généraux du droit (dont les droits fondamentaux)
Charte des droits fondamentaux de l’UE (TUE, art. 6 §1er)
DROIT CONVENTIONNEL
Les accords conclus par l’UE avec des États tiers ou des organisations internationales
Les accords conclus entre les États membres en application des traités constitutifs
DROIT DÉRIVÉ
{
{
Actes prévus dans Les règlements
la nomenclature Les décisions de portée générale Actes
de l’article 288, Les directives obligatoires
du TraitéTFUE Les décisions de portée individuelle
{
{
Actes Les recommandations et avis
hors Actes
Les actes atypiques non
nomenclature Les actes découlant de la pratique institution-
de l’article 288, Décisoires
du Traité FUE
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CHAPITRE 4 – Le droit jurisprudentiel 77
BIBLIOGRAPHIE
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PARTIE 2
Les caractères
du droit
de l’Union
Chapitre 5 L’applicabilité directe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81
Chapitre 6 La primauté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99
Chapitre 7 Les conséquences de l’applicabilité directe et de la primauté . . . 117
La question des rapports entre l’ordre juridique de l’Union et les ordres juridiques
nationaux est fondamentale dans la mesure où elle détermine l’autorité du droit
de l’Union dans les différents États membres. Les traités constitutifs n’apportant
pas de réponses à cette question, il est donc naturellement revenu à la Cour de
justice d’y pourvoir. C’est en se fondant sur la nature propre de l’ordre juridique
de l’Union et sur la nécessité de lui donner sa pleine efficacité que la Cour de
justice a rapidement mis en lumière à travers sa jurisprudence les caractères fonda-
mentaux du droit de l’Union, à savoir l’applicabilité directe et la primauté.
La Cour de justice rappellera solennellement l’importance de ces deux principes qui
garantissent une application uniforme et effective du droit de l’Union dans les
ordres juridiques internes des États membres dans son avis 1/91 relatif à l’accord
portant création de l’Espace économique européen de décembre 1991 : « le Traité
CEE, bien que conclu sous la forme d’un accord international, n’en constitue pas
moins la charte constitutionnelle d’une communauté de droit. Selon une jurispru-
dence constante de la Cour de justice, les traités communautaires ont instauré un
nouvel ordre juridique au profit duquel les États ont limité, dans des domaines de
plus en plus étendus, leurs droits souverains et dont les sujets sont non seulement
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80 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
les États membres, mais également leurs ressortissants. Les caractéristiques essen-
tielles de l’ordre juridique communautaire ainsi constitué sont, en particulier, sa
primauté par rapport aux droits des États membres ainsi que l’effet direct de
toute une série de dispositions applicables à leurs ressortissants et à eux-mêmes »
(CJCE, 14 déc. 1991, Projet d’accord portant sur la création de l’Espace
économique européen, avis 1/91, EU:C:1991:490, point 21 ; voy. égal., CJUE,
8 mars 2011, Projet d’accord – Création d’un système unifié de règlement
des litiges en matière de brevets – Juridiction du brevet européen et du
brevet communautaire – Compatibilité dudit projet avec les traités, avis 1/
09, EU:C:2011:123, point 65 ; CJUE, 18 déc. 2014, Projet d’accord interna-
tional – Adhésion de l’Union européenne à la convention européenne de
sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales – Compa-
tibilité dudit projet avec les traités UE et FUE, avis 2/13, EU:C:2014:2454,
point 157 ; CJUE, 28 avril 2015, Commission/Conseil, C-28/12, EU:C:2015:282,
point 39).
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CHAPITRE 5
L’applicabilité directe
L’applicabilité directe du droit de l’Union (on parle également d’effet direct du droit de
l’Union) signifie qu’une norme de l’Union peut créer, dans certaines circonstances et par
elle-même, des droits dans le chef des particuliers dont ils peuvent directement se préva-
loir dans les litiges qu’ils soumettent aux juridictions nationales qui ont l’obligation d’en
assurer la sauvegarde et le respect en laissant inappliquée, si besoin est, toute disposi-
tion nationale contraire, que celle-ci soit antérieure ou postérieure à la règle du droit
de l’Union. « En d’autres termes, l’effet direct d’une norme communautaire implique à
la fois la modification directe du patrimoine juridique des personnes physiques ou
morales par intégration immédiate de droits et/ou d’obligations issus de la norme
communautaire elle-même et l’attribution au justiciable de la faculté procédurale de
faire valoir ses droits issus du droit communautaire directement devant les tribunaux
internes »1.
On s’attachera dans un premier temps à poser le principe de l’applicabilité directe
(Section 1) avant d’envisager son application aux différentes sources du droit de
l’Union (Section 2).
Section 1
Le principe de l’applicabilité directe
1• LA CONSÉCRATION DU PRINCIPE
Traditionnellement, les traités et accords internationaux ne génèrent d’effets juridiques
qu’à l’égard des seuls États qui y sont parties et ne sont donc pas directement applica-
bles au profit de leurs ressortissants.
S’agissant de la Communauté économique européenne, le Traité CEE ne conférait
expressément un effet direct qu’aux seuls règlements adoptés par les institutions
(TCEE, art. 189)2. Cette absence de clause générale sur l’effet direct du droit commu-
nautaire ne va pas empêcher la Cour de justice de se prononcer pour l’applicabilité
——
1. Simon D., Invocabilité du droit communautaire, Le Lamy Procédures communautaires, janv. 2005,
étude 210, spéc. point 210-10.
2. Voy. le présent ouvrage, p. 88.
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82 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
directe de principe du droit communautaire dans son célèbre arrêt Van Gend en Loos de
février 1963 bouleversant du même coup les solutions traditionnellement admises par le
droit international (CJCE, 5 févr. 1963, Van Gend en Loos, 26/62, EU:C:1963:1).
La Cour de justice profite en effet d’une question préjudicielle du juge administratif
néerlandais pour affirmer que « le droit communautaire [...] de même qu’il crée des
charges dans le chef des particuliers, est aussi destiné à engendrer des droits qui
entrent dans leur patrimoine juridique ». Le juge de Luxembourg considère en effet que
le Traité CEE « constitue plus qu’un accord qui ne créerait que des obligations mutuelles
entre les États contractants » et qu’il concerne également directement les ressortissants
des États membres qui sont donc de ce fait des sujets à part entière de l’ordre juridique
communautaire. Le raisonnement de la Cour de justice repose sur plusieurs arguments
qui découlent, selon elle, de « l’esprit, l’économie et les termes » du Traité CEE. Ainsi,
elle estime que ce traité, dont l’objectif « est d’instituer un marché commun dont le
fonctionnement concerne directement les justiciables de la Communauté », a créé des
organes dotés de compétences dont l’exercice affecte aussi bien les États membres que
leurs citoyens. Elle considère également que le préambule du Traité CEE vise, au-delà
des gouvernements, les peuples européens qui sont d’ailleurs directement associés au
fonctionnement de la Communauté et à l’élaboration du droit communautaire au
travers du Parlement européen et du Conseil économique et social. Enfin, elle termine
sa démonstration juridique en rappelant que le renvoi préjudiciel, prévu désormais par
l’article 267, du Traité FUE, n’a de raison d’être dans l’économie du traité qu’en raison
du fait que le droit communautaire est susceptible d’être invoqué par les particuliers
devant le juge national, juge de l’Union de droit commun3. C’est en se fondant sur ces
différents éléments que la Cour conclut que « la Communauté constitue un nouvel
ordre juridique de droit international, au profit duquel les États ont limité, bien que
dans des domaines restreints, leurs droits souverains, et dont les sujets sont non seule-
ment les États membres mais également leurs ressortissants » et que « partant, le droit
communautaire, indépendamment de la législation des États membres, de même qu’il
crée des charges dans le chef des particuliers, est aussi destiné à engendrer des droits
qui entrent dans leur patrimoine juridique ». En précisant enfin que les droits ainsi créés
au profit des particuliers « naissent non seulement lorsqu’une attribution explicite en est
faite par le traité, mais aussi en raison d’obligations que le traité impose d’une manière
bien définie tant aux particuliers qu’aux États membres et aux institutions communau-
taires », la Haute juridiction souligne que les particuliers sont en droit d’invoquer l’appli-
cabilité directe du droit communautaire devant le juge national même lorsqu’ils n’en
sont pas explicitement les destinataires.
——
3. Voy. le présent ouvrage, p. 183.
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CHAPITRE 5 – L’applicabilité directe 83
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84 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
confère des droits subjectifs aux particuliers4. Ainsi, le juge de l’Union peut parfaitement
admettre l’applicabilité directe d’une disposition et donc la possibilité pour les particu-
liers de s’en prévaloir devant le juge national alors même qu’elle désigne seulement les
États membres comme sujets d’une obligation de s’abstenir5.
Dans la mesure où la condition de clarté recoupe très largement celle de précision, le
juge de l’Union se limite le plus souvent à exiger que les dispositions en cause « appa-
raissent, du point de vue de leur contenu, inconditionnelles et suffisamment précises »
pour qu’elles bénéficient de l’applicabilité directe (CJCE, 26 févr. 1986, Marshall, 152/
84, EU:C:1986:84, point 46 ; CJCE, 5 oct. 2004, Pfeiffer e.a., C-397/01 à 403/01, EU:
C:2004:584, point 109). Une disposition de droit de l’Union satisfait à la condition de
précision lorsqu’elle énonce une obligation en des termes non équivoques (voy. not.,
CJCE, 4 déc. 1986, Federatie Nederlandse Vakbeweging, 71/85, EU:C:1986:465,
point 18) et répond à la condition d’inconditionnalité lorsqu’elle énonce une obligation
qui n’est assortie d’aucune condition ni subordonnée, dans son exécution ou dans ses
effets, à l’intervention d’aucun acte soit des institutions de l’Union, soit encore des
États membres (voy. not., CJUE, 15 mai 2014, Almos Agrárkülkereskedelmi, C-337/
13, EU:C:2014:328, point 32 ). En définitive, l’applicabilité directe d’une norme de
l’Union n’est donc ni générale ni automatique mais dépend exclusivement de son
contenu.
La Cour de justice a toutefois apporté certains assouplissements à ces conditions.
Tout d’abord, la Cour de justice considère que l’absence de précision d’une norme de
l’Union ne fait pas obstacle à son effet direct dès lors qu’elle est susceptible de faire
l’objet d’une clarification par la voie d’une interprétation juridictionnelle soit du juge
de Luxembourg soit du juge national (CJCE, 4 avril 1968, Fink-Frucht GmbH, 27/67,
EU:C:1968:22). D’autre part, l’existence d’un terme à l’entrée en vigueur d’une norme
de l’Union n’est pas de nature à affecter son inconditionnalité. Le juge de Luxembourg
estime simplement que la norme de l’Union ne produira d’effet direct qu’à l’expiration
du délai. Enfin, l’absence d’intervention complémentaire des autorités nationales ou
européennes n’interdit pas que l’application de la disposition de l’Union requière de
leur part des compléments ultérieurs mais implique seulement pour le juge de Luxem-
bourg que les autorités nationales ou européennes à qui il appartiendra de prendre les
mesures d’exécution ne jouissent d’aucun pouvoir discrétionnaire pour prendre de telles
dispositions (CJCE, 16 juin 1966, Lütticke, 57/65, EU:C:1966:34 ; CJCE, 3 févr. 1976,
Manghera e.a., 59/75, EU:C:1976:14, point 16). Ainsi, la Cour de justice a jugé dans
son arrêt Iannelli/Meroni de mars 1977 que l’article 107, § 1er, du Traité FUE qui prévoit
que les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État sont incompati-
bles avec le marché intérieur n’est pas une disposition d’applicabilité directe en raison du
fait que cette disposition accorde « à la Commission un large pouvoir d’appréciation et
au Conseil un pouvoir étendu en vue d’admettre des aides d’État par dérogation à
——
4. Une telle condition pourra, par contre, être prise en compte par le juge national en application des
règles procédurales applicables afin de déterminer l’intérêt à agir du particulier qui invoque l’effet
direct d’une disposition du droit de l’Union dans le contentieux qu’il lui soumet.
5. Ex. : l’article 30, du Traité FUE qui interdit entre les États membres les droits de douane à l’importation
et à l’exportation ainsi que toute taxe d’effet équivalent. Les articles 34 et 35, du Traité FUE qui inter-
disent entre les États membres les restrictions quantitatives à l’importation et à l’exportation ainsi que
toute mesure d’effet équivalent.
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CHAPITRE 5 – L’applicabilité directe 85
——
6. On entend par « invocabilité » d’une norme de l’Union, sa capacité à être invoquée par un particulier
à l’appui d’un recours interne devant le juge national.
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86 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
entreprise et litige vertical en cas de discrimination dans une administration, l’État agis-
sant alors en qualité d’employeur) et revendiquer directement le bénéfice de
l’article 157, du Traité FUE dans le contentieux qui l’oppose à son employeur devant ce
juge interne. Un particulier est donc en droit de revendiquer le bénéfice des normes
d’effet direct complet dans tout type de litige, y compris ceux qu’ils rencontrent avec
les autres particuliers.
Section 2
L’applicabilité directe des différentes
sources de droit de l’Union
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CHAPITRE 5 – L’applicabilité directe 87
– l’article 157, du Traité FUE qui prohibe les discriminations entre travailleurs masculins
et travailleurs féminins en matière de rémunération (CJCE, 8 avril 1976, Defrenne/
SABENA, 43/75, EU:C:1976:56, point 40).
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88 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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CHAPITRE 5 – L’applicabilité directe 89
le cadre d’un procès civil intenté par un opérateur économique à l’encontre d’un opéra-
teur concurrent (CJCE, 17 sept. 2002, Muñoz et Superior Fruiticola, C-253/00, EU:
C:2002:497, point 32). Cependant, lorsque l’application effective d’une disposition
d’un règlement est subordonnée à l’intervention normative complémentaire de la
Commission européenne en application de l’article 290, § 1er, du Traité FUE, c’est-à-
dire lorsqu’on est en présence d’un règlement adopté par le Parlement européen et le
Conseil qui nécessite un (voire plusieurs) règlement délégué de la Commission
européenne7, la Cour de justice considère alors que l’absence d’une telle intervention
complémentaire, nécessaire à la mise en œuvre du règlement dans l’ordre juridique
interne, interdit à un particulier de s’en prévaloir directement devant le juge national.
Cette évolution jurisprudentielle, qui a pris corps à compter de l’arrêt Monte Arcosu de
janvier 2001 (CJCE, 11 janv. 2001, Monte Arcosu, C-403/98, EU:C:2001:6, point 28),
peut nous amener à nous demander, tout comme Denys Simon l’observe, « s’il n’est pas
dans l’intention du juge communautaire de remettre en cause discrètement l’automati-
cité de l’effet direct des règlements, au moins dans le cas où les mesures complémen-
taires conditionnent l’applicabilité du règlement »8 (pour une autre application voy.,
CJCE, 24 juin 2004, Handlbauer, C-278/02, EU:C:2004:388, point 26).
——
7. Sur la question des actes délégués voy., Leclerc S., Mémentos – Les institutions de l’Union euro-
péenne, préc., spéc. p. 208.
8. Simon D., Invocabilité du droit communautaire, préc., spéc. point 210-45.
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90 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
Dans tous les cas où une directive est correctement mise en œuvre, ses effets atteignent
les particuliers par l’intermédiaire des seules mesures nationales d’exécution prises par
l’État membre concerné. En revanche, des problèmes particuliers se posent au cas où
un État membre n’a pas correctement exécuté une directive et, plus spécialement, dans
le cas où les dispositions d’une directive sont restées inexécutées à l’expiration du délai
de transposition fixé pour sa mise en œuvre. « Ce n’est que dans le cas où un État
membre n’a pas correctement exécuté une directive à l’expiration du délai fixé pour sa
mise en œuvre que, selon la jurisprudence de la Cour, les particuliers peuvent, sous
certaines conditions, faire valoir devant les juridictions nationales des droits qu’ils tirent
directement des dispositions de cette directive » (CJCE, 3 déc. 1993, Suffritti e.a., C-
140/91, 141/91, C-278/91 et C-279/91, EU:C:1992:492, point 13).
Ainsi, la Cour de justice ne conteste donc pas l’absence, en principe, d’effet direct de la
directive qui ne déploie ses effets qu’à travers les mesures nationales de transposition
adoptées par les États membres. Néanmoins, dès lors qu’un État membre n’a pas trans-
posé une directive ou qu’il l’a incorrectement transposé, les particuliers sont alors fondés
à en invoquer le bénéfice à l’appui d’un recours interne devant les juridictions nationales
à l’encontre de l’État défaillant et sous réserve que les dispositions de la directive en
question apparaissent, du point de vue de leur contenu, inconditionnelles et suffisam-
ment précises (sur ce point voy. not., CJCE, 11 juill. 2002, Marks & Spencer, C-62/00,
EU:C:2002:435, point 25 ; CJCE, 12 févr. 2009, Cobelfret, C-138/07, EU:C:2009:82,
point 58 ; CJUE, 3 mars 2011, Auto Nikolovi, C-203/10, EU:C:2011:118, point 61 ;
CJUE, 24 nov. 2011, ASNEF et FECEMD, C-468/10 et C-469/10, EU:C:2011:777,
point 51 ; CJUE, 15 mai 2014, Almos Agrárkülkereskedelmi, C-337/13, EU:
C:2014:328, point 31 ; CJUE, 6 oct. 2015, T-Mobile Czech Republic et Vodafone
Czech Republic, C-508/14, EU:C:2015:657, point 52). Ainsi, toutes les directives ne
sont donc pas automatiquement d’applicabilité directe ni même d’ailleurs l’intégralité
d’une directive. Selon Marc Blanquet, « l’effet direct n’est pas une qualité substantielle
de la directive, mais une “garantie minimale” [...]. C’est le défaut d’exécution de la
directive [...] qui fonde [...] le pouvoir et le devoir du juge interne de l’appliquer directe-
ment à l’encontre de l’État défaillant et constitue ainsi une condition nécessaire, qui
s’ajoute au caractère inconditionnel et suffisamment précis de ses termes. La probléma-
tique même de l’invocabilité présuppose donc ici, contrairement à ce qu’il en est pour le
règlement, un contexte juridique particulier, c’est-à-dire en réalité “pathologique” »9.
L’effet direct d’une directive « ne saurait servir de justification à un État membre pour
se dispenser de prendre, en temps utile, des mesures d’application adéquates à l’objet
de chaque directive » (CJCE, 6 mai 1980, Commission/Belgique, 102/79, EU:
C:1980:120, point 12). Autrement dit, l’éventuelle applicabilité directe des dispositions
d’une directive ne dispense pas pour autant l’État défaillant d’en assurer la transposition.
——
9. Blanquet M., Droit général de l’Union européenne, préc., spéc. point 968.
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CHAPITRE 5 – L’applicabilité directe 91
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92 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
——
10. Voy. la position identique du Conseil d’État français, le présent ouvrage, p. 39.
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CHAPITRE 5 – L’applicabilité directe 93
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94 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
l’effet direct vertical des directives »11. La Cour de justice a précisé par la suite la portée
de l’invocabilité des directives dans une telle hypothèse (voy. not., CJCE, 17 juill. 2008,
Arcor e.a., C-152/07 à C-154/07, EU:C:2008:426). Par ailleurs, et à l’occasion de litiges
portant sur l’application du principe de non-discrimination en fonction de l’âge, la Cour
de justice a jugé que l’absence d’effet direct d’une directive ne fait pas obstacle à l’exis-
tence d’une invocabilité d’interprétation conforme du droit national, les juridictions
nationales étant en effet « tenues de prendre en considération l’ensemble des règles
de ce droit et de faire application des méthodes d’interprétation reconnues par celui-ci
afin de l’interpréter, dans toute la mesure du possible, à la lumière du texte ainsi que de
la finalité de la directive en cause pour atteindre le résultat fixé par celle-ci et de se
conformer ainsi à l’article 288, troisième alinéa, du Traité FUE » (CJUE, 19 janv. 2010,
Kücükdeveci, C-555/07, EU:C:2010:21, point 48 ; CJUE, 24 janv. 2012, Dominguez,
C-282/10, EU:C:2012:33, point 24 ; CJUE, 19 avril 2016, Dansk Industri (DI), C-441/
14, EU:C:2016:278, point 31 ; CJUE, 7 juill. 2016, Ambisig, C-46/15, EU:C:2016:530,
point 24). En rappelant « que le principe de non-discrimination en fonction de l’âge
confère aux particuliers un droit subjectif invocable en tant que tel qui, même dans des
litiges entre particuliers, oblige les juridictions nationales à écarter l’application des
dispositions nationales non conformes audit principe » (sur ce point voy., CJUE,
15 janv. 2014, Association de médiation sociale, C-176/12, EU:C:2014:2, point
47 ; CJUE, 19 avril 2016, Dansk Industri (DI), C-441/14, EU:C:2016:278, point 36),
la Cour de justice admet ainsi la possibilité d’invocabilité couplée d’une directive et
d’un principe général du droit y compris dans un litige horizontal entre personnes
privées. On ne peut que se ranger sous l’observation de Denys Simon selon laquelle
« la technique de l’interprétation conforme joue à l’évidence le rôle de “palliatif” [...]
de l’absence d’effet direct horizontal, afin de garantir aux justiciables, quelle que soit la
nature du litige, la protection minimale des droits qu’ils tirent des directives »12.
——
11. Simon D., Europe, nº 3/2004, comm. nº 63, p. 12.
12. Simon D., Europe, nº 6/2016, comm. nº 186, p. 16.
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CHAPITRE 5 – L’applicabilité directe 95
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96 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
personnes physiques ou morales créent directement des droits et/ou des obligations au
bénéfice et/ou à la charge de leurs destinataires. Elles bénéficient donc, tout comme le
règlement, d’un effet direct complet étant donné que la modification du patrimoine juri-
dique de leurs destinataires qu’elle engendre doit pouvoir être invoquée dans tout type
de litige. La Cour de justice admet que les décisions adressées à des particuliers puissent
également créer des droits au profit des tiers dont ils pourront se prévaloir devant les
juridictions nationales notamment dans le domaine de la concurrence13. Les décisions
adressées aux États membres sont soumises au même régime que les directives en
matière d’applicabilité directe comme l’a démontré la Cour de justice à travers sa juris-
prudence (pour une illustration voy., CJCE, 6 oct. 1970, Grad, 9/70, EU:C:1970:78 ;
CJCE, 10 nov. 1992, Fleisch, C-156/91, EU:C:1992:423). Ainsi, tout comme les direc-
tives et sous réserve qu’elles satisfassent elles aussi aux critères d’inconditionnalité et de
précision, de telles décisions peuvent alors seulement être invoquées par un particulier
contre un État membre (effet direct limité).
S’agissant des décisions de portée générale, il conviendra de rechercher au cas par cas si
elles sont de nature ou non à créer des droits dans le patrimoine des particuliers. Si tel
est le cas, la jurisprudence de la Cour de justice relative aux directives devrait alors leur
être applicable. Ainsi, les dispositions de ces décisions, sans destinataire spécifique,
pourraient alors être directement invoquées par un particulier à l’encontre d’un État
défaillant à l’appui d’un recours interne sous réserve que de telles dispositions satisfas-
sent aux exigences de précision et d’inconditionnalité. En revanche, les décisions de
portée générale adressées aux seules institutions de l’Union devraient être dépourvues
d’un quelconque effet direct.
——
13. Ainsi, une entreprise qui s’estime victime d’un accord conclu entre ses concurrents peut directement
invoquer devant le juge national une décision de la Commission leur ordonnant de mettre fin à cet
accord contraire à l’article 101, du Traité FUE.
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CHAPITRE 5 – L’applicabilité directe 97
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98 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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CHAPITRE 6
La primauté
La primauté du droit de l’Union signifie que la norme de l’Union prend place dans l’ordre
juridique interne des États membres avec rang de priorité sur l’ensemble des normes
nationales. La conséquence est qu’en cas de conflit entre une norme de l’Union et une
norme nationale, l’application de la seconde devra être écartée au profit de la première.
Après avoir évoqué en premier lieu le rôle déterminant de la Cour de justice dans la
consécration du principe de primauté (Section 1), on abordera en second lieu la mise
en œuvre du principe de primauté par les juridictions françaises (Section 2).
Section 1
Le principe de la primauté
1• LA CONSÉCRATION DU PRINCIPE
En l’absence d’une clause générale de supériorité du droit communautaire sur les droits
nationaux dans les traités constitutifs ou tout du moins d’une disposition qui détermine-
rait le rapport hiérarchique entre le droit communautaire et les droits nationaux, c’est
donc la Cour de justice qui a solennellement posé le principe de la primauté du droit
communautaire sur celui des États membres dans son arrêt Costa/E.N.E.L. de juillet 1964
relatif à la nationalisation de l’électricité en Italie (CJCE, 15 juill. 1964, Costa/E.N.E.L., 6/
64, EU:C:1964:66) :
« [...] qu’à la différence des traités internationaux ordinaires, le Traité de la CEE a institué
un ordre juridique propre, intégré au système juridique des États membres lors de
l’entrée en vigueur du traité et qui s’impose à leurs juridictions ;
qu’en effet, en instituant une Communauté de durée illimitée, dotée d’institutions
propres, de la personnalité, de la capacité juridique, d’une capacité de représentation
internationale et plus particulièrement de pouvoirs réels issus d’une limitation de compé-
tence ou d’un transfert d’attributions des États à la Communauté, ceux-ci ont limité,
bien que dans des domaines restreints, leurs droits souverains et créé ainsi un corps de
droit applicable à leurs ressortissants et à eux-mêmes ;
attendu que cette intégration au droit de chaque pays membre de dispositions qui
proviennent de source communautaire, et plus généralement les termes et l’esprit du
traité, ont pour corollaire l’impossibilité pour les États de faire prévaloir, contre un
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100 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
ordre juridique accepté par eux sur une base de réciprocité, une mesure unilatérale ulté-
rieure qui ne saurait ainsi lui être opposable ;
que la force exécutive du droit communautaire ne saurait, en effet, varier d’un État à l’autre
à la faveur des législations internes ultérieures, sans mettre en péril la réalisation des buts
du traité visée à l’article 5 (2), ni provoquer une discrimination interdite par l’article 7 ;
que les obligations contractées dans le Traité instituant la Communauté ne seraient pas
inconditionnelles mais seulement éventuelles, si elles pouvaient être mises en cause par
les actes législatifs futurs des signataires ;
que, lorsque le droit d’agir unilatéralement est reconnu aux États, c’est en vertu d’une
clause spéciale précise (articles 15, 93-3, 223 à 225 par exemple) ;
que, d’autre part, les demandes de dérogation des États sont soumises à des procédures
d’autorisation (articles 8-4, 17-4, 25, 26, 73, 93-2, 3e alinéa, et 226 par exemple) qui
seraient sans objet s’ils avaient la possibilité de se soustraire à leurs obligations au
moyen d’une simple loi ;
attendu que la prééminence du droit communautaire est confirmée par l’article 189 aux
termes duquel les règlements ont valeur “obligatoire” et sont “directement applicables
dans tout État membre” ;
que cette disposition, qui n’est assortie d’aucune réserve, serait sans portée si un État
pouvait unilatéralement en annihiler les effets par un acte législatif opposable aux
textes communautaires ;
attendu qu’il résulte de l’ensemble de ces éléments, qu’issu d’une source autonome, le
droit né du traité ne pourrait donc, en raison de sa nature spécifique originale, se voir judi-
ciairement opposer un texte interne quel qu’il soit, sans perdre son caractère communau-
taire et sans que soit mise en cause la base juridique de la Communauté elle-même ;
que le transfert opéré par les États, de leur ordre juridique interne au profit de l’ordre juri-
dique communautaire, des droits et obligations correspondant aux dispositions du traité,
entraîne donc une limitation définitive de leurs droits souverains contre laquelle ne saurait
prévaloir un acte unilatéral ultérieur incompatible avec la notion de Communauté [...]. »
Le raisonnement de juge de Luxembourg repose sur un ensemble d’arguments complé-
mentaires d’ordre fonctionnel. Après avoir rappelé que l’ordre juridique communautaire
est « intégré au système juridique des États membres » et « s’impose à leurs juridic-
tions », la Cour de justice souligne que les États membres ont doté la Communauté
économique européenne « de pouvoirs réels issus d’une limitation de compétence ou
d’un transfert d’attributions des États à la Communauté », créant par là même « un
corps de droit applicable à leurs ressortissants et à eux-mêmes ». Ainsi, « les termes et
l’esprit du traité, ont pour corollaire l’impossibilité pour les États de faire prévaloir,
contre un ordre juridique accepté par eux sur une base de réciprocité, une mesure unila-
térale ultérieure qui ne saurait ainsi lui être opposable ». Puis la Cour de justice
démontre que ce sont en définitive les caractéristiques propres de l’ordre juridique
communautaire qui ordonnent de consacrer la primauté du droit communautaire sur
les droits nationaux, à savoir :
– l’applicabilité directe :
« [...] la prééminence du droit communautaire est confirmée par l’article 189 [TFUE,
art. 288] aux termes duquel les règlements ont valeur “obligatoire”et sont “directement
applicables dans tout État membre” ;
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CHAPITRE 6 – La primauté 101
Que cette disposition, qui n’est assortie d’aucune réserve, serait sans portée si un État
pouvait unilatéralement en annihiler les effets par un acte législatif opposable aux
textes communautaires » ;
– le transfert d’attributions des États membres :
« [...] le transfert opéré par les États, de leur ordre juridique interne au profit de l’ordre
juridique communautaire, des droits et obligations correspondant aux dispositions du
traité, entraîne donc une limitation définitive de leurs droits souverains contre laquelle
ne saurait prévaloir un acte unilatéral ultérieur incompatible avec la notion
de Communauté » ;
– l’unité de l’ordre juridique communautaire :
« [...] la force exécutive du droit communautaire ne saurait, en effet, varier d’un État à
l’autre à la faveur des législations internes ultérieures, sans mettre en péril la réalisation
des buts du traité visé à l’article 5 (2) [TUE, art. 4, § 3], ni provoquer une discrimination
interdite par l’article 7 [TFUE, art. 18] ».
La Cour de justice parachève sa démonstration en précisant « qu’il résulte de l’ensemble
de ces éléments, qu’issu d’une source autonome, le droit né du traité ne pourrait donc,
en raison de sa nature spécifique originale, se voir judiciairement opposer un texte
interne quel qu’il soit, sans perdre son caractère communautaire et sans que soit mise
en cause la base juridique de la Communauté elle-même ». La primauté est donc, selon
le juge Pierre Pescatore, « une condition existentielle » du droit de l’Union1.
2• LA PORTÉE DU PRINCIPE
La jurisprudence ultérieure de la Cour de justice est venue confirmer que le principe de
primauté a une portée absolue, c’est-à-dire que toutes les normes de l’Union à caractère
obligatoire prévalent sur l’ensemble des normes nationales.
——
1. Pescatore P., L’ordre juridique des Communautés européennes – Étude des sources du droit commu-
nautaire, 2006, Bruylant, spéc. p. 227.
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102 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
primauté vaut également au profit des actes hors nomenclature dès lors qu’ils génèrent
des effets juridiques obligatoires (CJCE, 31 mars 1971, Commission/Conseil, 22/70,
EU:C:1971:32). Enfin, les principes généraux du droit priment également sur le droit
des États membres à partir du moment où ces derniers agissent dans le champ d’appli-
cation du droit de l’Union (CJCE, 13 juill. 1989, Wachauf, 5/88, EU:C:1989:321 ; CJCE,
3 déc. 1998, Belgocodex, C-381/97, EU:C:1998:589). Ainsi, la primauté bénéficie donc
à l’ensemble des normes obligatoires de l’Union, qu’elles soient ou non d’applicabilité
directe. Finalement, les seules normes de l’Union qui sont exclues du bénéfice de la
primauté sont les normes dépourvues d’effet contraignant que sont notamment les
recommandations et les avis. Les juridictions nationales sont toutefois tenues de
prendre en considération de tels actes lorsqu’ils sont susceptibles d’éclairer l’inter-
prétation de dispositions obligatoires (CJCE, 13 déc. 1989, Grimaldi, C-322/88, EU:
C:1989:646, point 18).
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CHAPITRE 6 – La primauté 103
services de santé et aux formations de musique militaire (CJCE, 11 janv. 2000, Kreil, C-
285/98, EU:C:2000:2). En résumé, toutes les normes nationales sont donc assujetties à
la primauté.
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104 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
d’un ordre juridique national ou toute pratique, législative, administrative ou judiciaire, qui
aurait pour effet de diminuer l’efficacité du droit communautaire par le fait de refuser au
juge compétent pour appliquer ce droit, le pouvoir de faire, au moment même de cette
application, tout ce qui est nécessaire pour écarter les dispositions législatives nationales
formant éventuellement obstacle à la pleine efficacité des normes communautaires »
(point 22). Dès lors, « le juge national chargé d’appliquer, dans le cadre de sa compétence,
les dispositions du droit communautaire, a l’obligation d’assurer le plein effet de ces
normes en laissant au besoin inappliquée, de sa propre autorité, toute disposition
contraire de la législation nationale, même postérieure, sans qu’il ait à demander ou à
attendre l’élimination préalable de celle-ci par voie législative ou par tout autre procédé
constitutionnel » (point 24) (pour une confirmation voy. not., CJUE, 5 oct. 2010,
Elchinov, C-173/09, EU:C:2010:581, point 31 ; CJUE, 20 oct. 2011, Interedil, C-396/
09, EU:C:2011:671, point 38 ; CJUE, 18 juill. 2013, Consiglio nazionale dei geologi
et Autorità garante della concorrenza e del mercato, C-136/12, EU:C:2013:489,
point 33 ; CJUE, 6 juill. 2017, Glencore Agiculture Hungary, C-254/16, EU:
C:2017:522, point 35 ; CJUE, 6 mars 2018, SEGRO, C-52/16 et C-113/16, EU:
C:2018:157, point 46 ; CJUE, 4 déc. 2018, Minister for Justice and Equality et
Commissioner of An Garda Síochána, C-378/17, EU:C:2018:979, point 50).
Ainsi, le juge national a l’obligation d’écarter toute disposition nationale, même d’ordre
constitutionnel, qui serait susceptible de mettre en péril le plein effet du droit de l’Union.
Il se doit donc de garantir et d’assurer, à travers sa fonction juridictionnelle, l’application
pleine et entière du droit de l’Union.
La jurisprudence ultérieure de la Cour de justice a confirmé les conséquences de la
primauté pour l’ensemble des autorités nationales, y compris juridictionnelles. À chaque
fois qu’elle en a l’opportunité, la Cour rappelle, selon une formule rituelle, qu’« à défaut
de pouvoir procéder à une interprétation et à une application de réglementation nationale
conforme aux exigences du droit de l’Union, les juridictions nationales et les organes de
l’administration ont l’obligation d’appliquer intégralement le droit de l’Union et de
protéger les droits que celui-ci confère aux particuliers, en laissant au besoin inappliquée
toute disposition contraire de droit interne » (parmi une jurisprudence très abondante voy.
not., CJCE, 4 févr. 1988, Murphy e.a., 157/86, EU:C:1988:62, point 11 ; CJCE, 26 sept.
2000, Engelbrecht, C-262/97, EU:C:2000:492, point 40 ; CJCE, 22 juin 1989,
Costanzo/Comune di Milano, 103/88, EU:C:1989:256, point 33 ; CJCE, 11 janv.
2007, ITC, C-208/05, EU:C:2007:16, point 69 ; CJUE, 14 oct. 2010, Fuß, C-243/09, EU:
C:2010:609, point 63 ; CJUE, 25 nov. 2010, Fuß, C-429/09, EU:C:2010:717, point 40 ;
CJUE, 7 sept. 2017, H., C-174/16, EU:C:2017:637, point 70 ; CJUE, 21 nov. 2018,
Ayubi, C-713/17, EU:C:2018:929, point 40).
Section 2
La primauté du droit de l’Union en France
Comme l’observent fort justement Claude Blumann et Louis Dubouis, « la position du
juge national ne peut être parfaitement symétrique, voire identique, à celle du juge de
l’Union. Il lui faut en effet tenir compte de son propre environnement juridique, c’est-à-
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CHAPITRE 6 – La primauté 105
dire des textes et pratiques nationales qui fondent sa compétence et qui se prononcent
sur les conflits des systèmes juridiques »2. Ainsi en France3, si les juridictions ordinaires
n’ont jamais eu de difficultés particulières à faire primer le droit de l’Union sur les actes
administratifs ou réglementaires4, il en est par contre tout autrement dès lors que le droit
de l’Union a été confronté à la loi et à la Constitution.
——
2. Blumann C., Dubouis L., Droit institutionnel de l’Union européenne, 6e éd., 2016, LexisNexis, coll.
Manuel, spéc. point 1043.
3. Pour une analyse détaillée dans les autres États membres voy., Blumann C., Dubouis L., Droit institu-
tionnel de l’Union européenne, préc., point 1076 et s. ; Rideau J., Droit institutionnel de l’Union euro-
péenne, préc., point 718 et s. ; Jacque J.-P., Droit institutionnel de l’Union européenne, 9e éd., 2018,
Dalloz, point 999 et s. ; Blanquet M., Droit général de l’Union européenne, préc., point 858 et s.
4. Il pouvait difficilement en être autrement étant donné qu’en droit français, la hiérarchie des normes
prévoit la subordination des actes administratifs et réglementaires aux traités internationaux et aux
lois. Voy. not., CE, sect., 10 juill. 1970, Req. nº 76643, Syndicat national du commerce extérieur
des céréales (Synacomex), FR:CEORD:1970:76643.19700710 ; Cass. crim., 22 oct. 1970, Société
Les fils d’Henri Ramel : D. 1971, p. 221 ; CE, sect., 6 janv. 1997, Req. nº 163524, Société Euralair
international, FR:CESJS:1997:163524.19970106 : à propos de l’annulation d’un arrêté ministériel
incompatible avec un règlement ; CE, 28 avril 2006, Req. nº 242727, 243 359, 243385 et 243703,
Dellas e.a., FR:CESSR:2006:242727.20060428 : à propos de l’annulation d’un arrêté ministériel
incompatible avec une directive.
5. L’ensemble des décisions du Conseil constitutionnel sont disponibles sur le site : https://www.conseil-
constitutionnel.fr
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106 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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CHAPITRE 6 – La primauté 107
——
6. Blumann C., Dubouis L., Droit institutionnel de l’Union européenne, préc., spéc. point 1049.
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108 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
nº 246, p. 637 ; Cass. com., 5 mai 1987, SA des marchés et usines Auchan/Rudin
e.a. : Bull. civ. IV, nº 109, p. 84).
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CHAPITRE 6 – La primauté 109
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110 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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CHAPITRE 6 – La primauté 111
Le même schéma se présente un peu plus tard lors de la ratification du Traité d’Ams-
terdam. Le Conseil constitutionnel juge dans sa décision nº 97-394 DC du 31 décembre
1997 que la « communautarisation » partielle du 3e pilier dans les domaines de l’asile,
de l’immigration et du franchissement des frontières opérées par ce nouveau traité7
s’apparente à un transfert de compétences puisqu’intéressant directement l’exercice de
la souveraineté nationale (Cons. const., 31 déc. 1997, nº 97-394 DC, Traité
d’Amsterdam, FR:CC:1997:97.394.DC). Ainsi, la ratification du Traité d’Amsterdam
ne peut intervenir sans une révision préalable de la Constitution. Une fois de plus, la loi
constitutionnelle du 25 janvier 1999 se cantonne à constitutionnaliser le nouveau
transfert de compétence induit par cette communautarisation partielle du pilier III
(art. 88-2 al. 2).
La décision nº 2004-505 DC du 19 novembre 2004 relative au Traité établissant une
Constitution pour l’Europe marque indubitablement une étape décisive (Cons. const.,
19 nov. 2004, nº 2004-505 DC, Traité établissant une Constitution pour l’Europe,
FR:CC:2004:2004.505.DC). S’il constate une fois encore que l’autorisation de ratifier ce
traité exige une révision préalable de la Constitution en raison notamment du transfert à
l’Union de compétences inhérentes à l’exercice de la souveraineté nationale (contrôle
aux frontières, coopération judiciaire en matière civile et pénale...) (points 27 et 28) ou
des dispositions de ce traité qui confèrent aux parlements nationaux le pouvoir de
s’opposer à une révision simplifiée du traité (points 38 et 41) ou de veiller au respect du
principe de subsidiarité (point 39), le juge constitutionnel procède surtout dans cette
décision à l’intégration de l’ordre juridique de l’Union dans l’ordre juridique français ;
ordre juridique de l’Union qu’il reconnaît être distinct de l’ordre juridique international
(point 11). Si, de prime abord, on peut se réjouir d’une telle évolution, il convient
néanmoins de la relativiser. En effet, le Conseil constitutionnel prend soin de
démontrer et de préciser que la constitutionnalisation du droit de l’Union n’a pas pour
conséquence d’engendrer la supériorité de ce droit sur la Constitution française qui
demeure, malgré la consécration du principe de primauté du droit de l’Union par
l’article I-6 du Traité établissant une Constitution pour l’Europe, « au sommet de l’ordre
juridique interne » (point 10). La décision du 19 novembre 2004 a conduit à une
nouvelle révision constitutionnelle (L. const., 1er mars 2005).
Enfin, et dans la lignée de ses décisions de 1992, 1997 et 2004, le Conseil constitu-
tionnel juge dans sa décision nº 2007-560 DC du 20 décembre 2007, que le Traité
de Lisbonne est partiellement incompatible avec la Constitution et, qu’une fois de plus,
il est nécessaire de procéder à une révision constitutionnelle préalable à la ratification de
ce nouveau traité (Cons. const., 20 déc. 2007, nº 2007-560 DC, Traité de Lisbonne,
FR:CC:2007 :2007.560.DC). Le Conseil constitutionnel considère notamment que
certaines dispositions du Traité de Lisbonne transfèrent à l’Union des compétences
nouvelles inhérentes à l’exercice de la souveraineté nationale comme par exemple la
lutte contre le terrorisme et les activités connexes (TFUE, art. 75), le contrôle aux
frontières (TFUE, art. 77) ou encore la lutte contre la traite des êtres humains (TFUE,
art. 79) qui impliquent une révision préalable de la Constitution (point 18) tout comme
les nouvelles prérogatives reconnues aux parlements nationaux dans le cadre de
l’Union : « le droit reconnu au Parlement français de s’opposer à la soumission à la
——
7. Leclerc S., Mémentos – Les institutions de l’Union européenne, préc., spéc. p. 41.
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112 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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CHAPITRE 6 – La primauté 113
compétences définies par les traités que des droits fondamentaux garantis par l’article 6
du Traité sur l’Union européenne ». Si cette décision vient préciser le statut
constitutionnel du droit dérivé, elle ne remet par contre nullement en cause la
jurisprudence du Conseil constitutionnel selon laquelle il se refuse à reconnaître la
primauté du droit de l’Union sur la Constitution elle-même. Le Conseil constitutionnel a
d’ailleurs rappelé cette supériorité de la Constitution sur le droit de l’Union notamment
dans la décision nº 2006-540 DC du 27 juillet 2006 relative au droit d’auteur et droits
voisins dans la société de l’information en précisant que « la transposition d’une
directive ne saurait aller à l’encontre d’un principe inhérent à l’identité constitutionnelle
de la France, sauf à ce que le constituant y ait consenti » (Cons. const., 27 juill. 2006,
nº 2006-540 DC, Loi relative au droit d’auteur et aux droits voisins dans la société
de l’information, FR:CC:2006:2006.540.DC ; voy. égal., Cons. const., 17 déc. 2010,
nº 2010-79 QPC, Kamel D., FR:CC:2010:2010.79.QPC).
Même si le juge constitutionnel admet dans sa décision du 19 novembre 2004 la spéci-
ficité de l’ordre juridique de l’Union et son intégration à l’ordre juridique français, il n’en
demeure pas moins que le Conseil constitutionnel ne reconnaît qu’une valeur relative à
la primauté du droit de l’Union et qu’elle doit impérativement céder le pas devant les
impératifs constitutionnels (Cons. const., 19 nov. 2004, nº 2004-505 DC, Traité
établissant une Constitution pour l’Europe, FR:CC:2004:2004.505.DC). En
conséquence de quoi, la Constitution est, et demeure, la norme suprême de l’ordre
juridique français. On ne sera dès lors pas surpris que le Conseil d’État et la Cour de
cassation aient tous deux affirmer la supériorité de la Constitution sur le droit de l’Union.
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114 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
——
8. Voy. en ce sens, Simon D., Primauté du droit communautaire, Le Lamy Procédures communautaires,
Étude 215, janv. 2005, spéc. point 215-90.
9. Il ne semble pas en effet que la Cour de cassation incline encore en ce sens, notamment au regard
des positions exprimées par le Conseil constitutionnel sur les rapports entre le droit de l’Union et la
Constitution. Voy. paragraphe précédent.
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CHAPITRE 6 – La primauté 115
BIBLIOGRAPHIE
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116 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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CHAPITRE 7
Les conséquences
de l’applicabilité
directe
et de la primauté
——
1. Simon D., « Les exigences de la primauté du droit communautaire : continuité ou métamorphoses ? »,
in Mélanges Boulouis, 1991, Dalloz, p. 481.
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118 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
Section 1
L’obligation de coopération loyale des États
membres
L’obligation de coopération loyale des États membres résulte directement des traités
constitutifs. Plus particulièrement, cette obligation est posée, depuis l’entrée en vigueur
du Traité de Lisbonne, par l’article 4, § 3, du Traité UE : « Les États membres prennent
toute mesure générale ou particulière propre à assurer l’exécution des obligations
découlant des traités ou résultant des actes des institutions de l’Union. Les États
membres facilitent l’accomplissement par l’Union de sa mission et s’abstiennent de
toute mesure susceptible de mettre en péril la réalisation des objectifs de l’Union ».
L’article 4, § 3, du Traité UE pose donc une obligation générale de collaboration loyale,
de participation active et de bonne foi des États membres à la réalisation des objectifs de
l’Union. En effet, la formulation de cette disposition suppose que les États membres ont
non seulement l’obligation d’adopter les mesures prescrites par les traités ou par le droit
dérivé mais qu’ils sont également tenus d’intervenir spontanément si cela est nécessaire
et en dehors de toute sollicitation des institutions de l’Union.
La Cour de justice a développé une jurisprudence relativement abondante sur l’article 4,
§ 3, du Traité UE qui lui a permis d’en préciser non seulement les contours mais égale-
ment les conséquences. C’est notamment en vertu de cette disposition que les États
membres ont le droit et surtout l’obligation d’adopter les dispositions propres à assurer
l’effet utile du droit de l’Union (CJCE, 17 déc. 1970, Scheer, 30/70, EU:C:1970:117,
point 9). Il découle également de l’article 4, § 3, du Traité UE l’interdiction pour les
États membres d’introduire ou de maintenir en vigueur dans leur législation une disposi-
tion nationale susceptible d’aller à l’encontre de l’effet utile du droit de l’Union (CJCE,
16 nov. 1977, INNO/ATAB, 13/77, EU:C:1977:185, point 31 ; CJUE, 22 avril 2010,
Enosi Efopliston Aktoploïas e.a., C-122/09, EU:C:2010:222, point 17). Il en résulte
aussi que les États membres sont tenus de fournir à la Commission européenne une
information claire et précise lui permettant d’exercer sa fonction de gardienne de la
légalité conformément à l’article 17, § 1er, du Traité UE (CJCE, 25 mai 1982, Commis-
sion/Pays-Bas, 96/81, EU:C:1982:192, point 8) ou encore de répondre dans des délais
raisonnables à ses demandes de renseignements dans le cadre d’une enquête visant à
établir l’existence éventuelle d’une violation du droit de l’Union (CJCE, 24 juin 1992,
Commission/Grèce, C-137/91, EU:C:1992:272, point 6). Enfin, la Cour de justice
estime que « par application du principe de coopération énoncé à l’article 5 du traité
[TUE, art. 4, § 3], c’est aux juridictions nationales qu’est confié le soin d’assurer la protec-
tion juridique découlant, pour les justiciables, de l’effet direct des dispositions du droit
communautaire » (CJCE, 16 déc. 1976, Rewe, 33/76, EU:C:1976:188, point 5).
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CHAPITRE 7 – Les conséquences de l’applicabilité directe et de la primauté 119
Section 2
L’autonomie institutionnelle et procédurale
des États membres
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120 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
sauvegarde des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union. Le juge interne se
doit alors d’appliquer « parmi les divers procédés de l’ordre juridique interne, ceux qui
sont [les plus] appropriés pour sauvegarder les droits individuels conférés par le droit
communautaire » (CJCE, 4 avril 1968, Lück, 34/67, EU:C:1968:24).
Toutefois, la Cour de justice a très rapidement opéré une distinction entre l’autonomie
institutionnelle et l’autonomie procédurale des États membres afin de garantir l’effet
utile du droit de l’Union et d’assurer une protection efficace des droits que les particu-
liers tirent du droit de l’Union.
À compter des arrêts Rewe et Comet BV de décembre 1976 (CJCE, 16 déc. 1976, 33/76,
EU:C:1976:188 ; CJCE, 16 déc. 1976, Comet BV, 45/76, EU:C:1976:191), le juge
de Luxembourg va progressivement dégager et développer à travers sa jurisprudence
des principes destinés à encadrer les systèmes juridiques nationaux et plus particulière-
ment le principe d’autonomie procédurale des États membres.
Selon le juge de Luxembourg, le principe d’autonomie procédurale des États membres
est subordonné à une absence d’harmonisation de l’Union, c’est-à-dire seulement
quand le droit de l’Union n’a pas procédé à un aménagement des procédures nationales
applicables. La Cour de justice a rappelé solennellement cette règle dans son arrêt Deut-
sches Milchkontor de septembre 1983 : « Conformément aux principes généraux qui
sont la base du système institutionnel de la Communauté et qui régissent les relations
entre la Communauté et les États membres, il appartient aux États membres, en vertu
de l’article 5 du traité [TUE, art. 4, § 3], d’assurer sur leurs territoires l’exécution des
réglementations communautaires, notamment dans le cadre de la Politique agricole
commune. Pour autant que le droit communautaire, y compris les principes généraux
de celui-ci, ne comporte pas de règles communes à cet effet, les autorités nationales
procèdent, lors de cette exécution des réglementations communautaires, en suivant les
règles de forme et de fond de leur droit national, étant entendu, comme la Cour l’a déjà
dit dans son arrêt du 6 juin 1982 (Schlüter, 94/71, Recueil p. 307), que cette règle doit se
concilier avec la nécessité d’une application uniforme du droit communautaire,
nécessaire pour éviter un traitement inégal des opérateurs économiques » (CJCE,
21 sept. 1983, Deutsche Milchkontor GbmH e.a., 205/82 à 215/82, EU:
C:1983:233, point 17). De même, dans l’arrêt Jensen et Korn de mai 1998, la Cour de
justice a admis qu’en l’absence d’une harmonisation de l’Union des procédures
nationales en matière de compensation, un État membre peut valablement prévoir une
compensation entre un montant dû au titre d’une aide européenne et des arriérés de
créances publiques dès lors qu’une telle réglementation nationale n’entrave pas l’effet
utile du droit de l’Union (CJCE, 19 mai 1998, Jensen et Korn, C-132/95, EU:
C:1998:237, points 35 et s.).
Ainsi, les États membres ont donc toute latitude pour déterminer les autorités nationales
compétentes pour mettre en œuvre le droit de l’Union mais voient en revanche leur
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CHAPITRE 7 – Les conséquences de l’applicabilité directe et de la primauté 121
liberté limitée dès lors qu’il s’agit des modalités procédurales à appliquer. Cette limita-
tion de l’autonomie procédurale des États membres s’explique par la nécessité d’assurer
une application uniforme du droit de l’union et plus particulièrement par l’exigence que
les procédures définies par les États membres n’occasionnent pas de discriminations
entre les ressortissants des États membres. On peut ainsi en déduire que si l’autonomie
institutionnelle des États membres est absolue, l’autonomie procédurale qui leur est
reconnue est, en revanche, relative. On comprend dès lors pourquoi la Cour de justice,
tout en affirmant l’autonomie procédurale des États membres, a pris soin de l’encadrer
et de la limiter par l’intermédiaire de deux principes, à savoir celui d’effectivité et celui
d’équivalence.
A - Le principe d’effectivité
Le principe d’effectivité implique que la protection des justiciables soit « effective »
(CJCE, 9 juill. 1985, Bozzetti, 179/84, EU:C:1985:306, point 17). Il en résulte plus
particulièrement que les procédures des recours juridictionnels destinées à assurer la
sauvegarde du droit de l’Union ne peuvent pas être aménagées de manière à rendre
pratiquement impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits que les juridic-
tions nationales ont l’obligation de sauvegarder. La Cour de justice a ainsi jugé dans
son arrêt San Giorgio de novembre 1983 que si le droit de l’Union ne s’oppose pas à ce
que le droit national refuse la restitution intégrale de taxes indûment perçues lorsque
celles-ci sont de nature à entraîner un enrichissement sans cause des ayants droit confor-
mément à sa jurisprudence antérieure (CJCE, 27 févr. 1980, Just, 68/79, EU:C:1980:57,
point 26), en revanche « seraient incompatibles avec le droit communautaire toutes
modalités de preuve dont l’effet est de rendre pratiquement impossible ou excessive-
ment difficile l’obtention du remboursement de taxes perçues en violation du droit
communautaire » et ce, même si le remboursement d’impôts, droits ou taxes perçus en
violation du droit national est soumis au même régime de preuve. La Cour de justice
conclut qu’en l’espèce : « tel est le cas notamment de présomptions ou de règles de
preuves qui visent à rejeter sur le contribuable la charge d’établir que les taxes indûment
payées n’ont pas été répercutées sur d’autres sujets, ou de limitations particulières en ce
qui concerne la forme des preuves à rapporter, comme l’exclusion de tout mode de
preuve autre que la preuve documentaire » (CJCE, 9 nov. 1983, San Giorgio, 199/82,
EU:C:1983:318, point 14). La Cour a jugé par ailleurs que les législations nationales
relatives au calcul des intérêts octroyés lors de la restitution d’une taxe perçue en viola-
tion du droit de l’Union qui aboutissent à priver les assujettis d’une indemnisation
adéquate de la perte occasionnée par le paiement indu de cette taxe sont contraires au
droit de l’Union et plus particulièrement au principe d’effectivité (sur ce point voy. not.,
CJUE, 19 juill. 2012, Littlewoods Retail e.a., C-591/10, EU:C:2012:478, point 29 ;
CJUE, 18 avril 2013, Irimie, C-565/11, EU:C:2013:250, point 26).
B - Le principe d’équivalence
Le principe d’équivalence implique que les règles procédurales applicables aux recours
juridictionnels destinées à assurer la sauvegarde du droit de l’Union ne soient pas
moins favorables que celles qui s’appliquent à des recours similaires de droit interne. Le
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122 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
principe d’équivalence a donc pour conséquence que « tout type d’action prévu par le
droit national doit pouvoir être utilisé pour assurer le respect des règles communautaires
d’effet direct dans les mêmes conditions de recevabilité et de procédure que s’il s’agis-
sait d’assurer le respect du droit national » (CJCE, 7 juill. 1981, Rewe/Hauptzollamt
Kiel, 158/80, EU:C:1981:163, point 44). La Cour de justice a ainsi jugé qu’un État
membre méconnaissait le principe d’équivalence dès lors qu’une action en responsabi-
lité dirigée contre lui pour violation du droit de l’Union par une loi nationale est condi-
tionnée par l’épuisement préalable par le requérant de toutes les voies de recours
internes alors même qu’une telle obligation procédurale n’est pas applicable à une
action en responsabilité dirigée contre ce même État fondée sur la violation de la Consti-
tution par cette même loi (CJUE, 26 janv. 2010, Transportes Urbanos y Servicios
Generales, C-118/08, EU:C:2010:39, point 48).
Après avoir affirmé dans un premier temps que le traité « n’a pas entendu créer devant
les juridictions nationales, en vue du maintien du droit communautaire, des voies de
droit autres que celles établies par le droit national » (CJCE, 7 juill. 1981, Rewe/Haup-
tzollamt Kiel, 158/80, EU:C:1981:163, point 44), le juge de Luxembourg a parfois été
amené à écarter le principe de l’autonomie procédurale des États membres et à combler
les lacunes des systèmes juridiques nationaux en définissant lui-même certaines attribu-
tions du juge national.
——
2. Selon l’expression de l’avocat général Marco Darmon lors des conclusions présentées le 28 janvier
1984, Johnston, 222/84, Rec. 1984, p. 1654, spéc. p. 1656.
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CHAPITRE 7 – Les conséquences de l’applicabilité directe et de la primauté 123
dans un État membre, l’accès à une profession salariée est subordonné à la possession
d’un diplôme national ou d’un diplôme étranger équivalent, la décision refusant au
ressortissant d’un autre État membre la reconnaissance de l’équivalence de son
diplôme délivré par l’État membre dont il est originaire doit être susceptible d’un
recours de nature juridictionnelle permettant d’en vérifier la légalité au regard du droit
de l’Union, et plus particulièrement de contrôler l’existence d’une éventuelle discrimina-
tion en raison de la nationalité, et les motifs qui sont à la base de cette décision de refus
doivent être portés à la connaissance de l’intéressé (CJCE, 15 oct. 1987, Unectef/
Heylens e.a., 222/86, EU:C:1987:442, point 17 : à propos de l’accès en France à la
profession d’entraîneur de football professionnel ; CJCE, 7 mai 1991, Vlassopoulou,
C-340/89, EU:C:1991:193, point 22 : à propos de l’accès en Allemagne à la profession
d’avocat). La Cour de justice précisera par ailleurs que le recours ouvert aux justiciables
doit être non seulement accessible et effectif mais également efficace.
Le droit à un recours effectif a été renforcé par son inscription à l’article 47 de la Charte
des droits fondamentaux de l’UE : « Toute personne dont les droits et libertés garantis
par le droit de l’Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal
dans le respect des conditions prévues au présent article ». On observera d’ailleurs que
la Cour de justice prend soin désormais de citer systématiquement cette disposition de la
Charte lorsqu’elle évoque le droit à une protection juridictionnelle effective dans sa juris-
prudence (pour une illustration voy., CJCE, 16 juill. 2009, Mono Car Styling, C-12/08,
EU:C:2009:466, point 47 ; CJUE, 19 juin 2019, RF/Commission, C-660/17 P, EU:
C:2019:509, point 55).
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124 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
des mesures provisoires non seulement dans l’hypothèse d’une violation alléguée du
droit de l’Union par des dispositions nationales incompatibles (comme c’était le cas
dans l’arrêt Factortame) mais également dans l’hypothèse de l’invalidité supposée
d’une disposition de l’Union elle-même : « la protection provisoire qui est assurée aux
justiciables devant les juridictions nationales par le droit communautaire ne saurait
varier, selon qu’ils contestent la compatibilité de dispositions de droit national avec le
droit communautaire ou la validité d’actes communautaires de droit dérivé, dès lors
que, dans les deux cas, la contestation est fondée sur le droit communautaire » (CJCE,
21 févr. 1991, Zuckerfabrik Süderdithmarschen AG et Zuckerfabrik Soest GmbH,
C-143/88 et C-92/89, EU:C:1991:65, point 20). Le juge de Luxembourg a par ailleurs
précisé dans cet arrêt les conditions dans lesquelles le juge national doit accorder le
sursis à exécution : « le sursis à l’exécution d’un acte national pris en exécution d’un
règlement communautaire ne peut être accordé par une juridiction nationale que si
cette juridiction a des doutes sérieux sur la validité de l’acte communautaire et que si,
pour le cas où la Cour ne serait pas déjà saisie de la question de validité de l’acte
contesté, elle la lui renvoie elle-même, que s’il y a urgence et que si le requérant est
menacé d’un préjudice grave et irréparable, et que si cette juridiction prend dûment en
compte l’intérêt de la Communauté » (point 33). L’arrêt Atlanta Fruchthandelsgesell-
schaft de novembre 1995 permettra enfin au juge de Luxembourg de préciser que le
juge national peut ordonner, hormis le sursis à exécution, des mesures provisoires posi-
tives comme, en l’espèce, l’injonction de délivrer des certificats d’importation supplé-
mentaires au profit des requérants (CJCE, 9 nov. 1995, Atlanta Fruchthandelsgesell-
schaft e.a., C-465/93, EU:C:1995:369, points 27 et 28).
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CHAPITRE 7 – Les conséquences de l’applicabilité directe et de la primauté 125
——
3. Simon D., Le système juridique communautaire, préc., spéc. p. 424-425.
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126 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
similaire pèse sur les autorités nationales lorsque le remboursement est fondé sur le droit
de l’Union (CJCE, 12 juin 1980, Express Dairy Foods, 130/79, EU:C:1980:155). Par
ailleurs, les modalités procédurales fixées par le droit national ne doivent pas avoir pour
effet de rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l’obtention du
remboursement de taxes nationales perçues en violation du droit de l’Union (principe
d’effectivité) (pour une illustration voy., CJCE, 16 déc. 1976, Rewe, 33/76, EU:
C:1976:188, point 5 ; CJCE, 9 nov. 1983, San Giorgio, 199/82, EU:C:1983:318,
point 4 ; CJCE, 24 sept. 2002, Grundig Italiana, C-255/00, EU:C:2002:525,
point 33 ; CJCE, 9 déc. 2003, Commission/Italie, C-129/00, EU:C:2003:656,
point 25). En dehors de ces deux modalités procédurales, la Cour de justice a jugé que
le droit de l’Union s’oppose à ce que des actions en remboursement de droits perçus en
violation d’une directive puissent être rejetées au motif que l’imposition de ces droits
résulte d’une erreur excusable des autorités de l’État membre pendant une longue
période sans que ni celles-ci ni les assujettis n’aient été conscients de leur illégalité
(CJCE, 2 déc. 1997, Fantask e.a., C-188/95, EU:C:1997:580). La Haute juridiction a
par ailleurs admis qu’un législateur national ne peut adopter, postérieurement à un
arrêt de la Cour dont il résulte qu’une législation déterminée est incompatible avec le
traité, de règles procédurales réduisant spécifiquement les possibilités d’agir en répéti-
tion de l’indu des taxes qui ont été indûment perçues en vertu de cette législation (sur
ce point voy. not., CJCE, 2 févr. 1988, Barra, 309/85, EU:C:1988:42). En revanche, et
conformément à une jurisprudence constante, le droit de l’Union ne fait pas obstacle à
ce qu’un système juridique national refuse la restitution de taxes indûment perçues dans
des conditions qui entraîneraient un enrichissement sans cause des ayants droit (sur ce
point voy. not., CJCE, 10 avril 2008, Marks & Spencer, C-309/06, EU:C:2008:211,
point 41). La protection des droits garantis en la matière par l’ordre juridique de
l’Union n’impose donc pas le remboursement des impôts, droits et taxes perçus en viola-
tion du droit de l’Union lorsqu’il est établi que la personne astreinte au paiement de ces
droits les a effectivement répercutés sur d’autres sujets, et notamment sur le consomma-
teur final (pour une illustration voy., CJUE, 6 sept. 2011, Lady & Kid e.a., C-398/09,
EU:C:2011:540, point 18 ; CJUE, 15 sept. 2011, Accor, C-310/09, EU:C:2011:581,
point 72). La Cour de justice a néanmoins jugé dernièrement que le contribuable, qui
a effectivement supporté la charge d’une taxe d’effet équivalent contraire au droit de
l’Union, doit pouvoir obtenir le remboursement des sommes qu’il a versées à ce titre,
même dans une situation où le mécanisme de paiement de la taxe a été conçu, dans la
législation nationale, de telle manière que cette taxe soit répercutée sur le consomma-
teur (CJUE, 1er mars 2018, Petrotel-Lukoil et Georgescu, C-76/17, EU:C:2018:139,
point 39). A contrario, lorsqu’un État membre prélève des taxes en violation du droit
de l’Union, les justiciables peuvent également avoir droit au remboursement non seule-
ment de l’impôt indûment perçu mais également des montants payés à cet État ou
retenus par ce dernier en rapport direct avec cet impôt. Cette restitution avec des inté-
rêts comprend notamment les pertes constituées par l’indisponibilité de sommes
d’argent à la suite de l’exigibilité prématurée de l’impôt (sur ce point voy. not., CJUE,
19 juill. 2012, Littlewoods Retail e.a., C-591/10, EU:C:2012:478, points 25 et 26 ;
CJUE, 15 oct. 2014, Nicula, C-331/13, EU:C:2014:2285, points 28 et 29). Dans la
même logique, lorsque des taxes ou des droits ont été perçus par un État membre en
application d’un règlement de l’Union, déclaré invalide ou annulé par le juge de
l’Union, les intéressés qui se sont acquittés des taxes ou des droits en question ont le
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CHAPITRE 7 – Les conséquences de l’applicabilité directe et de la primauté 127
——
4. La jurisprudence antérieure de la Cour de justice en matière de constatation de manquement laissait
en effet entrevoir l’émergence d’une telle responsabilité même si en tout état de cause le droit pour
les particuliers d’obtenir réparation du préjudice subi ne découle pas directement d’un arrêt en cons-
tatation de manquement. En effet, il appartient aux seuls États membres de prendre toutes les
mesures nécessaires pour se conformer à cet arrêt et notamment l’éventuelle réparation des effets illi-
cites.
Sur ce point voy. not., CJCE, 19 mars 1991, Commission/Belgique, C-249/88, EU:C:1991:121,
point 41 ; CJCE, 30 mai 1991, Commission/Allemagne, C-361/88, EU:C:1991:224, point 31.
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128 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
prescrit par la directive doit comporter l’attribution de droits au profit des particuliers ; le
contenu de ces droits doit être identifié sur la base des dispositions de la directive ; l’exis-
tence d’un lien de causalité entre la violation de l’obligation qui incombe à l’État et le
dommage subi par les personnes lésées par la violation (point 40). Le juge de Luxem-
bourg mentionne enfin que les conditions de mise en œuvre de la responsabilité des
États pour violation du droit de l’Union sont soumises, conformément à sa jurisprudence
constante, aux principes d’équivalence et d’effectivité (point 43).
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CHAPITRE 7 – Les conséquences de l’applicabilité directe et de la primauté 129
——
5. Plus précisément, il s’agissait de déterminer dans quelle mesure et dans quelles conditions un opéra-
teur économique pouvait obtenir réparation du préjudice subi du fait du manquement au droit de
l’Union imputable au législateur national.
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130 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
——
6. L’autonomie procédurale des États demeure toutefois bien encadrée car la Cour rappelle constam-
ment, à travers sa jurisprudence, que « les conditions de fond et de forme fixées par les diverses légis-
lations nationales en matière de réparation des dommages ne sauraient être moins favorables que
celles qui concernent les réclamations semblables de nature interne et ne sauraient être aménagées
de manière à rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l’obtention de la réparation ».
Voy. not., CJCE, 19 nov. 1991, Francovich et Bonifaci/Italie, C-6/90 et C-9/90, EU:C:1991:428,
point 43 ; CJCE, 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame e.a., C-46/93 et C-48/93, EU:
C:1996:79, point 83.
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CHAPITRE 7 – Les conséquences de l’applicabilité directe et de la primauté 131
du moment où la réparation pécuniaire est retenue par le juge national pour indemniser
le requérant du préjudice subi, une telle réparation pécuniaire « doit être adéquate en ce
sens qu’elle doit permettre de compenser intégralement les préjudices effectivement
subis » (CJCE, 2 août 1993, Marshall, C-271/91, EU:C:1993:335, point 26).
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132 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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PARTIE 3
Le contentieux
du droit
de l’Union
Chapitre 8 Le contentieux direct . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135
Chapitre 9 Le renvoi préjudiciel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183
Le contrôle juridictionnel opéré par les juridictions de l’Union s’exerce dans le cadre
d’un ensemble de voies de droit et de recours très diversifiés. Il comporte cepen-
dant deux grandes branches complémentaires qui contribuent à garantir toutes
deux le respect du droit de l’Union mais qui sont techniquement très différentes ;
la première se compose des recours directs devant le juge de Luxembourg et la
seconde repose sur une coopération entre les juges nationaux et la Cour de
justice de l’UE.
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CHAPITRE 8
Le contentieux direct
Section 1
La procédure devant les juridictions
de l’Union
La procédure applicable devant les juridictions de l’Union s’inspire de celle qui s’applique
devant le Conseil d’État français. Le protocole (nº 3) sur le Statut de la Cour de justice de
l’UE1, prévoit que la Cour de justice et le Tribunal sont régis par la même procédure
(Statut, Titre III : art. 19 à 46 et 53, al. 1er). Néanmoins, la procédure devant le Tribunal
est précisée et complétée, si besoin est, par son règlement de procédure afin de tenir
compte des spécificités de son organisation et de son fonctionnement (Statut, art. 53,
al. 2).
——
1. Voy. égal., Règlement (UE, Euratom) nº 741/2012 du Parlement européen et du Conseil du 11 août
2012 modifiant le protocole sur le statut de la Cour de justice de l’Union européenne et son annexe
I, JOUE L 228, 23 août 2012, p. 1 ; Règlement (UE, Euratom) 2015/2422 du Parlement européen et
du Conseil du 16 décembre 2015 modifiant le protocole nº 3 sur le statut de la Cour de justice de
l’Union européenne, JOUE L 341, 24 déc. 2015, p. 14 ; Règlement (UE, Euratom) 2016/1192 du Parle-
ment européen et du Conseil du 6 juillet 2016 relatif au transfert au Tribunal de la compétence pour
statuer, en première instance, sur les litiges entre l’Union européenne et ses agents, JOUE L 200,
26 juill. 2016, p. 137 ; Règlement (UE, Euratom) 2019/629 du Parlement européen et du Conseil du
17 avril 2019 modifiant le protocole no 3 sur le statut de la Cour de justice de l’Union européenne,
JOUE L 111, 24 avril 2019, p. 1.
Une version consolidée du protocole (nº 3) sur le Statut de la Cour de justice de l’UE est disponible sur
le site :
https://curia.europa.eu/jcms/upload/docs/application/pdf/2016-08/tra-doc-fr-div-c-0000-2016-
201606984-05_00.pdf
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136 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
——
2. Voy. égal. l’article 4 du règlement de procédure additionnel de la Cour du justice de janvier 2014,
JOUE L 32, 1er févr. 2014, p. 37, spéc. p. 39.
3. Voy. en dernier lieu, JOUE L 173, 26 juin 2013, p. 65.
4. Voy. en dernier lieu, JOUE L 173, 26 juin 2013, p. 66.
5. Cette demande ne peut être introduite par une institution de l’Union.
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 137
4• LE DÉROULEMENT DE LA PROCÉDURE
La procédure se décompose en deux phases bien distinctes qui précèdent le délibéré et
le prononcé de l’arrêt : l’une est écrite, l’autre orale6 (Statut, art. 20, al. 1er).
Toutefois, lorsque la Cour de justice ou le Tribunal sont manifestement incompétents
pour connaître d’un recours ou lorsque celui-ci est manifestement irrecevable7, ces
deux juridictions peuvent la déclarer irrecevable par voie d’ordonnance motivée (RP/CJ,
art. 53, § 2 ; RP/Trib., art. 208). Ces mêmes juridictions peuvent également, à tout
moment, d’office, les parties entendues, statuer par voie d’ordonnance motivée sur les
fins de non-recevoir d’ordre public ou constater que le recours est devenu sans objet et
qu’il n’y a plus lieu de statuer (RP/CJ, art. 149 et 150 ; RP/Trib., art. 129 et 131).
De plus, les présidents de la Cour de justice et du Tribunal peuvent statuer selon une
procédure sommaire dérogeant, autant que besoin est, aux règles traditionnelles de la
procédure sur des conclusions tendant soit à l’obtention d’un sursis à exécution (TFUE,
art. 278 ; TCEEA, art. 157), soit à l’application de mesures provisoires (TFUE, art. 279)
soit encore à la suspension de l’exécution forcée (TFUE, art. 299, al. 4 ; TCEEA, art. 164,
al. 3) (Statut, art. 39, al. 1er). L’ordonnance ainsi rendue n’a qu’un caractère provisoire et
ne préjuge en rien la décision de la juridiction de l’Union statuant au principal (Statut,
art. 39, al. 4).
——
6. Pour plus de détails sur le déroulement de la procédure on peut consulter : le règlement de procédure
de la Cour de justice, septembre 2012 (version consolidée) :
http://curia.europa.eu/jcms/upload/docs/application/pdf/2012-10/rp_fr.pdf
Le règlement de procédure additionnel de la Cour de justice, janvier 2014 :
http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2014:032:0037:0045:FR:PDF
Le règlement de procédure du Tribunal, mars 2015 (version consolidée) :
https://curia.europa.eu/jcms/upload/docs/application/pdf/2018-11/version_consolidee_rp_propre.pdf
7. Ou encore lorsqu’un recours devant le Tribunal est manifestement dépourvu de tout fondement en
droit.
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138 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
A - La phase écrite
La procédure écrite comprend la communication aux parties ainsi qu’aux institutions de
l’Union dont les décisions sont en cause, des requêtes, mémoires, défenses, observa-
tions et, éventuellement, des répliques présentées par les requérants. Elle comporte
également la communication de toutes les pièces et documents à l’appui ou de leurs
copies certifiées conformes (Statut, art. 20, al. 2). Les communications sont réalisées par
le greffier dans l’ordre et les délais déterminés par les règlements de procédure (Statut,
art. 20, al. 3). Lorsque cette phase de communication des écrits est achevée, le président
de la juridiction saisie fixe alors la date à laquelle le juge rapporteur présente un rapport
préalable. Ce rapport peut conduire cette juridiction à décider de l’ouverture d’instruc-
tions complémentaires. C’est également à ce stade de la procédure que la juridiction de
l’Union saisie peut décider de la jonction d’affaires dont l’objet est proche et qu’elle
prononce le renvoi de l’affaire devant une chambre composée de trois ou de cinq juges.
B - La phase orale
La procédure orale comprend la lecture du rapport présenté par le juge rapporteur,
l’audition des agents, conseils et avocats et des conclusions de l’avocat général, ainsi
que, s’il y a lieu, l’audition des témoins et experts (Statut, art. 20, al. 4).
Lorsqu’elle estime que l’affaire ne soulève aucune nouvelle question de droit, la juridic-
tion de l’Union peut décider, l’avocat général entendu, que l’affaire sera jugée sans
conclusions de l’avocat général (Statut, art. 20, al. 5).
C - L’intervention à l’instance
Les États membres et les institutions de l’Union peuvent intervenir dans un litige soumis
aux juridictions de l’Union sans avoir à justifier d’un intérêt à la solution du litige (Statut,
art. 40, al. 1er). Les organes et organismes de l’Union ainsi que les personnes physiques
ou morales peuvent également intervenir à l’instance s’ils justifient d’un intérêt à la solu-
tion d’un litige soumis à la juridiction de l’Union. Toutefois, les personnes physiques ou
morales ne peuvent intervenir dans les affaires entre États membres, entre institutions
ou entre États membres et institutions (Statut, art. 40, al. 2). Par ailleurs, les États tiers
parties à l’accord sur l’EEE ainsi que l’Autorité de surveillance AELE visée par cet accord
peuvent également intervenir aux litiges soumis aux juridictions de l’Union lorsque ceux-
ci concernent un des domaines d’application de l’accord sur l’EEE (Statut, art. 40, al. 3).
Les conclusions de la requête en intervention ne peuvent avoir d’autres objets que le
soutien des conclusions de l’une des parties au litige (Statut, art. 40, al. 4).
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 139
D - Les référés
Les articles 278 et 279, du Traité FUE confèrent compétence à la Cour de justice de l’UE
respectivement pour ordonner le sursis à exécution d’un acte contesté et pour prescrire
toute mesure provisoire nécessaire9. Ces deux dispositions, qui peuvent être utilisées par
les parties au litige pendant tout le déroulement de la procédure, sont reprises et
complétées par les règlements de procédure des deux juridictions de l’Union (RP/CJ,
art. 160 à 166 ; RP/Trib., art. 156 à 161). En pratique, le président de la Cour de justice,
ou du Tribunal statue lui-même sur ces demandes provisoires et accessoires ou défère la
décision à la juridiction.
Une demande de sursis à exécution d’un acte d’une institution au titre de l’article 278,
du Traité FUE n’est recevable devant une juridiction de l’Union que si le demandeur a
également attaqué cet acte dans un recours devant cette même juridiction. Une
demande de mesures provisoires n’est recevable au titre de l’article 279, du Traité FUE
que si elle émane d’une partie à une affaire dont la juridiction de l’Union est saisie et si
elle se réfère à ladite affaire. Les règlements de procédure exigent que les demandes de
mesures provisoires ou de sursis à exécution spécifient l’objet du litige, les circonstances
établissant l’urgence ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue
l’octroi de la mesure provisoire à laquelle elles concluent (RP/CJ, art. 160, § 3 ; RP/Trib.,
art. 156, § 4). À ces conditions posées par les règlements de procédure, la jurisprudence
a ajouté avec le temps la nécessité d’établir pour le demandeur l’existence d’un préju-
dice grave et irréparable (pour une illustration voy., Tribunal, Ord., 16 janv. 2004,
Arizona Chemical e.a./Commission, T-369/03 R, EU:T:2005:458) et la mise en
balance des intérêts en cause, à savoir ceux du demandeur à obtenir des mesures provi-
soires et ceux du défendeur ou de l’Union à rejeter de telles mesures (pour une applica-
tion voy. not., CJCE, Ord., 22 avril 1994, Commission/Belgique, C-87/94 R, EU:
C:1994:166). Le Tribunal a récemment assoupli la condition de l’urgence dans le cadre
d’une procédure en référé en jugeant que le caractère suffisamment manifeste et grave
des illégalités relevées à première vue par le soumissionnaire évincé dans le cadre d’une
procédure en matière de marchés publics justifie l’imposition de mesures provisoires
même si le préjudice qu’il invoque n’est pas irréparable (Tribunal, Ord., 6 sept. 2014,
——
8. TCEEA, art. 157.
9. La Cour de justice a rappelé que le juge des référés a bien l’opportunité, en application de l’article
279, du Traité FUE d’ordonner toutes les mesures provisoires qu’il juge utiles, y compris la possibilité,
dans le cadre d’une procédure en constatation de manquement, d’assortir des injonctions adressées à
un État membre d’astreintes en cas d’inexécution de ces mêmes injonctions (sur ce point voy., CJUE,
Ord., 20 nov. 2017, Commission/Pologne, C-441/17 R, EU:C:2017:877, points 96 à 100).
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140 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 141
onze juges sont présents et enfin les délibérations de la Cour siégeant en assemblée
plénière ne sont valables que si dix-sept juges sont présents (Statut, art. 17).
Chacun des juges présents au délibéré exprime son opinion en la motivant. Les votes
sont émis dans l’ordre inverse de l’ancienneté de fonctions. La décision de la Cour ou
du Tribunal est adoptée après discussion finale par la majorité des juges. Les arrêts sont
motivés et mentionnent les noms des juges qui ont délibéré (Statut, art. 36).
La Cour de justice et le Tribunal statuent sur les dépens dans l’arrêt ou l’ordonnance qui
met fin à l’instance (Statut, art. 38 ; RP/CJ, art. 137 ; RP/Trib., art. 133). En principe, toute
partie qui succombe est condamnée aux dépens. Si plusieurs parties succombent, la juri-
diction peut décider du partage des dépens (RP/CJ, art. 137 à 146 ; RP/Trib., art. 134 à
138). La juridiction de l’Union peut aussi répartir les dépens ou décider que chaque
partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou
plusieurs chefs ou encore pour des motifs exceptionnels. Enfin, la juridiction de l’Union
peut également condamner une partie, même gagnante, à rembourser à l’autre partie
les frais qu’elle lui a fait exposer et que la juridiction reconnaît comme frustratoires ou
vexatoires (RP/CJ, art. 139 ; RP/Trib., art. 135, § 2). Les États membres, les institutions
de l’Union, les États tiers parties à l’accord sur l’EEE ainsi que l’Autorité de surveillance
AELE visée par cet accord qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens
(RP/CJ, art. 140 ; RP/Trib., art. 138).
Les arrêts sont signés par le président et le greffier de la juridiction saisie. Ils sont rendus en
audience publique, les parties convoquées (Statut, art. 37 ; RP/CJ, art. 86 et 88, § 1er ; RP/
Trib., art. 116 et 118, § 1er). L’arrêt de la Cour de justice a force obligatoire à compter du
jour de son prononcé tout comme l’ordonnance a force obligatoire à compter du jour de sa
signification (RP/CJ, art. 91, § 1er et 2). Il en est de même pour ceux rendus par le Tribunal
sous réserve des dispositions de l’article 60 du Statut (RP/Trib., art. 121, § 1er et 2)10.
Les décisions de la Cour de justice et du Tribunal sont publiées dans l’ordre chronolo-
gique au Recueil de la jurisprudence de la Cour de justice et du Tribunal dans la partie I
pour les arrêts et ordonnances de la Cour de justice et dans la partie II pour les juge-
ments du Tribunal. Les décisions du Tribunal de la fonction publique de l’UE ont égale-
ment été publiées entre 2005 et 201611 dans l’ordre chronologique au Recueil de juris-
prudence – Fonction publique (RecFP)12.
——
10. Voy. le paragraphe 5 de la présente section.
11. Sur la suppression du Tribunal de la fonction publique de l’UE depuis le 1er septembre 2016 voy.,
Leclerc S., Mémentos – Les institutions de l’Union européenne, préc., spéc. p. 141-143.
12. Les arrêts et ordonnances de la Cour de justice, du Tribunal et du Tribunal de la fonction publique de
l’UE sont disponibles sur le site : http://curia.europa.eu/jcms/jcms/Jo2_7045/
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142 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
attaquée (Statut, art. 56, al. 1er ; RP/CJ, art. 167 à 190 bis). Ce pourvoi peut être formé
par toute partie ayant partiellement ou totalement succombé en ses conclusions. Les
parties qui interviennent dans le litige autres que les États membres et les institutions
de l’Union ne peuvent former un tel pourvoi que lorsque la décision du Tribunal les
affecte directement (Statut, art. 56, al. 2). Sauf dans les cas de litiges opposant l’Union
à ses agents, un pourvoi peut également être formé par les États membres et les institu-
tions de l’Union qui ne sont pas intervenus en première instance dans le litige devant le
Tribunal. Dans une telle hypothèse, ces États ou ces institutions sont dans une position
identique à celle d’États ou d’institutions qui seraient intervenus en première instance
(Statut, art. 56, al. 3). De plus, les demandes de sursis à exécution (TFUE, art. 278 ;
TCEEA, art. 157), de mesures provisoires (TFUE, art. 279) ou encore d’exécution forcée
(TFUE, art. 299, al. 4 ; TCEEA, art. 164, al. 3) sur lesquelles le Tribunal a statué en
première instance peuvent également faire l’objet d’un pourvoi devant la Cour de
justice par les parties à la procédure dans un délai de deux mois à compter de leur noti-
fication (Statut, art. 57, al. 2). Enfin, un pourvoi peut être formé devant la Cour de justice
contre les décisions du Tribunal rejetant une demande d’intervention, dans un délai de
deux semaines à compter de la notification de la décision de rejet, par toute personne
dont la demande a été rejetée (Statut, art. 57, al. 1er).
Le pourvoi devant la Cour de justice est limité aux seules questions de droit et la Haute
juridiction refuse systématiquement d’examiner les allégations visant à contester l’appré-
ciation des faits opérée par le Tribunal (pour un ex. voy. not., CJUE, 22 nov. 2012, E.ON
Energie/Commission, C-89/11 P, EU:C:2012:738, point 112). Il peut être fondé sur
des moyens tirés de l’incompétence du Tribunal (pour une illustration voy. not., CJCE,
Ord., 14 oct. 1999, Gluiber/Conseil et Commission, C-188/99 P, EU:C:1999:506,
point 15), d’irrégularités de procédure devant cette instance juridictionnelle portant
atteinte aux intérêts de la partie requérante (pour un ex. voy. not., CJCE, 15 juin 2000,
TEAM/Commission, C-13/99 P, EU:C:2000:329, point 36) ainsi que de la violation du
droit de l’Union par le Tribunal (pour une application voy. not., CJCE, 17 déc. 1992,
Moritz/Commission, C-68/91 P, EU:C:1992:531, points 20 à 26 et 37 à 40) (Statut,
art. 58, al. 1er). Un pourvoi ne peut porter uniquement sur la charge ou le montant des
dépens (voy. not., CJCE, Ord., 13 janv. 1995, Bonnamy/Conseil, C-264/94 P, EU:
C:1995:5, point 14) (Statut, art. 58, al. 2).
Le pourvoi n’a pas d’effet suspensif (Statut, art. 60, § 1er) mais la partie requérante peut
saisir la Cour de justice d’une demande de sursis à exécution (TFUE, art. 278) ou d’une
demande de mesures provisoires (TFUE, art. 279). Lorsque le pourvoi est fondé, la Cour
de justice annule la décision du Tribunal. Elle peut alors lui renvoyer l’affaire pour qu’il
statue (pour une application voy. not., CJCE, 20 nov. 1997, Commission/V., C-188/96
P, EU:C:1997:554, point 33) ou encore statuer elle-même définitivement sur le litige
lorsqu’elle estime qu’il est en état d’être jugé (Statut, art. 61, al. 1er) (pour une illustra-
tion voy. not., CJCE, 15 juin 1994, Commission/BASF e.a., C-137/92 P, EU:
C:1994:247, point 55). En cas de renvoi, le Tribunal est alors lié par les points de droit
tranchés par la décision de la Cour de justice (Statut, art. 61, al. 2). Lorsqu’un pourvoi
formé par un État membre ou une institution de l’Union qui ne sont pas intervenus au
litige devant le Tribunal est fondé, la Cour de justice peut, si elle l’estime nécessaire, indi-
quer ceux des effets de la décision annulée du Tribunal qui doivent être considérés
comme définitifs à l’égard des parties au litige (Statut, art. 61, al. 3).
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 143
Section 2
Le contrôle juridictionnel des institutions,
organes et organismes de l’Union
1• LE RECOURS EN ANNULATION
TFUE, art. 263
« La Cour de justice de l’Union européenne contrôle la légalité des actes législatifs, des actes du
Conseil, de la Commission et de la Banque centrale européenne, autres que les recommanda-
tions et les avis, et des actes du Parlement européen et du Conseil européen destinés à
produire des effets juridiques à l’égard des tiers. Elle contrôle aussi la légalité des actes des
organes ou organismes de l’Union destinés à produire des effets juridiques à l’égard des tiers.
À cet effet, la Cour est compétente pour se prononcer sur les recours pour incompétence,
violation des formes substantielles, violation des traités ou de toute règle de droit relative à
leur application, ou détournement de pouvoir, formés par un État membre, le Parlement euro-
péen, le Conseil ou la Commission.
La Cour de justice est compétente, dans les mêmes conditions, pour se prononcer sur les
recours formés par la Cour des comptes, par la Banque centrale européenne et par le Comité
des régions qui tendent à la sauvegarde des prérogatives de ceux-ci.
Toute personne physique ou morale peut former, dans les conditions prévues aux premier et
deuxième alinéas, un recours contre les actes dont elle est le destinataire ou qui la concernent
directement et individuellement, ainsi que contre les actes réglementaires qui la concernent
directement et qui ne comportent pas de mesures d’exécution.
Les actes créant les organes et organismes de l’Union peuvent prévoir des conditions et moda-
lités particulières concernant les recours formés par des personnes physiques ou morales contre
des actes de ces organes ou organismes destinés à produire des effets juridiques à leur égard.
Les recours prévus au présent article doivent être formés dans un délai de deux mois à compter,
suivant le cas, de la publication de l’acte, de sa notification au requérant ou, à défaut, du jour
où celui-ci en a eu connaissance. »
TFUE, art. 264
« Si le recours est fondé, la Cour de justice de l’Union européenne déclare nul et non avenu
l’acte contesté.
Toutefois, la Cour de justice indique, si elle l’estime nécessaire, ceux des effets de l’acte annulé
qui doivent être considérés comme définitifs. »
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144 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
autres que les recommandations et les avis, et des actes du Parlement européen destinés à
produire des effets juridiques vis-à-vis des tiers », semblant ainsi seulement exclure du
recours en annulation les recommandations et les avis. Néanmoins, le juge de Luxembourg
ne limitait pas pour autant sa compétence aux seuls actes obligatoires estimant que
« toutes les dispositions prises par les institutions qui visent à produire des effets de droit,
quelles qu’en soient la nature et la forme » pouvaient faire l’objet d’un recours en annula-
tion (CJCE, 31 mars 1971, Commission/Conseil, 22/70, EU:C:1971:32, points 41 et 42).
Pour se prononcer sur la recevabilité d’un recours, le juge de Luxembourg s’attachait donc
non à la dénomination formelle de l’acte mais à son contenu et à ses effets qu’il recherchait
au-delà de la seule qualification. Il avait ainsi reconnu la recevabilité de recours en annula-
tion dirigés contre un code de conduite de la Commission, une communication de la
Commission, une déclaration du porte-parole de la Commission ou encore des instructions
internes de services dans la mesure où ces actes, au-delà de leur dénomination et de leur
forme, avaient pour effet d’imposer de nouvelles obligations à leurs destinataires et de
modifier leurs situations juridiques (pour une application voy. not., CJCE, 13 nov. 1991,
France/Commission, C-303/90, EU:C:1991:424 ; CJCE, 20 mars 1997, France/Commis-
sion, C-57/95, EU:C:1997:164 ; CJUE, 26 janv. 2010, Internationaler Hilfsfonds/
Commission, C-362/08 P, EU:C:2010:40 ; Tribunal, Ord., 7 mars 2018, Fertisac/ECHA,
T-855/16, EU:T:2018:118). En revanche, la Cour de justice avait déclaré irrecevable les
recours en annulation formulés contre les actes dépourvus d’effets juridiques obligatoires
comme par exemple les actes préparatoires, les actes confirmatifs ou informatifs, une
pratique propre à une institution déterminée ou encore la décision de la Commission
d’introduire un recours en justice devant une juridiction d’un État tiers (pour une illustration
voy., CJUE, 9 sept. 2015, Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro/
Commission, C-506/13 P, EU:C:2015:562 : à propos d’une note de débit de la Commis-
sion européenne ; Tribunal, Ord., 14 sept. 2015, Slovénie/Commission, T-585/14, EU:
T:2015:662 : à propos de courriers émanant de la DG BUDG de la Commission euro-
péenne enjoignant la Slovénie à verser des sommes au budget de l’UE au titre des
ressources propres ; CJUE, 14 déc. 2016, SV Capital OÜ/ABE, C-577/15 P, EU:
C:2016:947 : à propos des décisions de l’autorité bancaire européenne (ABE) et de la
commission de recours des autorités européennes à l’encontre des autorités de surveillance
du secteur financier estonienne et finnoise ; Tribunal, 24 mars 2017, Estonie/Commis-
sion, T-117/15, EU:T:2017:217 : à propos d’un courrier de la Commission européenne
adressé à l’Estonie dans lequel l’institution mentionne qu’elle n’a pas lieu de modifier une
décision antérieure ; CJUE, 20 févr. 2018, Belgique/Commission, C-16/16 P, EU:
C:2018:079 : à propos d’une recommandation de la Commission européenne). Si le
Tribunal avait lui aussi contribué à définir la notion d’acte attaquable notamment en reje-
tant les recours en annulation dirigés contre une simple lettre informative, les actes décla-
ratoires ou confirmatifs, la réponse à une demande d’information, des lignes directrices
destinées à mettre en œuvre un programme de l’Union, les décisions du médiateur euro-
péen ou encore un avis de l’autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) au motif
que de tels actes ne produisent pas d’effets juridiques (pour une illustration voy. not.,
Tribunal, 10 avril 2003, Le Pen/Parlement, T-353/00, EU:T:2003:112 ; Tribunal, Ord.,
3 nov. 2008, Srinivasan/Médiateur, T-196/08, EU:T:2008:470 ; Tribunal, 17 juin 2008,
FMC Chemical/EFSA, T-312/06, EU:T:2007:67 ; Tribunal, 9 juin 2009, NDSHT/Commis-
sion, T-152/06, EU:T:2009:181 ; Tribunal, Ord., 20 juill. 2010, Perret/Commission, T-
186/10, EU:T:2010:314 ; Tribunal, 22 mai 2012, Sviluppo Globale/Commission, T-6/
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 145
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146 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
——
13. Les collectivités territoriales sont assimilées à des personnes physiques ou morales.
14. Ex. : Entreprises, organisations professionnelles, associations, collectivités territoriales...
15. Une personne physique ou morale pouvait ainsi introduire un recours en annulation à l’encontre d’une
décision individuelle, au sens de l’article 249, TCE dont elle était la destinataire et d’une décision qui,
bien que prise sous l’apparence d’un règlement ou d’une décision adressée à une autre personne, la
concernait directement et individuellement. Il s’agissait alors d’éviter que le choix de la forme d’un
règlement opéré par les institutions exclut le recours des particuliers contre un acte qui les concerne
directement et individuellement. Le juge communautaire recherchait donc, au-delà de la qualification
de l’acte, sa portée générale ou individuelle ainsi que les effets juridiques qu’il produisait. Le recours
contre un règlement était par conséquent recevable lorsqu’il constituait une décision déguisée, c’est-à-
dire lorsque le règlement n’avait pas de portée générale mais qu’il comportait au contraire plusieurs
décisions adaptées à des cas individuels. Un tel règlement devait s’analyser en un faisceau de décisions
individuelles et non pas comme une mesure de portée générale au sens de l’article 249, TCE (sur ce
point voy. not., CJCE, 21 janv. 1999, France/Comafrica e.a., C-73/97 P, EU:C:1999:13) ou encore lors-
qu’il était pour partie un acte de portée générale et de caractère normatif et pour l’autre un acte indivi-
duel concernant certaines personnes physiques ou morales déterminées (théorie de l’acte hybride)
(CJCE, 16 mai 1991, Extramet Industrie/Conseil, C-358/89, EU:C:1991:214).
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 147
personne physique ou morale ne peut former un recours en annulation que « contre les
actes dont elle est destinataire ou qui la concernent directement et individuellement,
ainsi que contre les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne
comportent pas de mesures d’exécution ».
L’article 263, alinéa 4, du Traité FUE permet tout d’abord aux personnes physiques ou
morales d’introduire un recours en annulation à l’encontre de tout acte dont elles sont
destinataires ou qui les concernent directement et individuellement. On doit déduire de
cette formulation qu’une personne physique ou morale peut agir en annulation à
l’encontre d’une décision de portée individuelle dont elle est destinataire ou contre un
acte de portée générale qui la concerne directement et individuellement. Le juge de
l’Union considère qu’un requérant ordinaire est directement et individuellement
concerné par un acte s’il établit que la disposition litigieuse dont il demande l’annulation
« l’atteint en raison de certaines qualités qui lui sont particulières ou d’une situation de
fait qui le caractérise par rapport à toute autre personne et de ce fait l’individualise d’une
manière analogue à celle du destinataire » (parmi une jurisprudence abondante voy.
not., CJCE, 15 juill. 1963, Plaumann/Commission, 25/62, EU:C:1963:17 ; CJCE,
10 avril 2003, Commission/Nederlandse Antillen, C-142/00 P, EU:C:2003:217,
point 65 ; CJCE, 23 avril 2009, Sahlstedt e.a./Commission, C-362/06 P, EU:
C:2009:243, point 26 ; CJUE, 9 juin 2011, Comitato « Venezia vuole vivere » e.a./
Commission, C-71/09 P, C-73/09 P et C-76/09 P, EU:C:2011:368, point 52 ; CJUE,
24 nov. 2016, Ackermann Saatzucht e.a./Parlement et Conseil, C-408/15 P et C-
409/15 P, ECLI:EU:C:2016:893, point 30 ; Tribunal, Ord., 14 déc. 2017, PGNiG
Supply & Trading/Commission, T-849/16, EU:T:2017:924, point 37). L’article 263,
alinéa 4, du Traité FUE permet également aux personnes physiques ou morales d’intro-
duire un recours en annulation à l’encontre des actes réglementaires ne comportant pas
de mesures d’exécution (sur ce point voy. not., CJUE, 13 mars 2018, Industrias
Químicas del Vallés/Commission, C-244/16 P, EU:C:2018:177, point 39 ; CJUE,
18 oct. 2018, Internacional de Productos Metálicos/Commission, C-145/17 P, EU:
C:2018:839, point 32) et les concernant directement. Le Traité de Lisbonne ajoute
ainsi une nouvelle branche au recours en annulation introduit par des personnes physi-
ques et morales venant en assouplir les conditions de recevabilité. En effet, sans
soumettre la recevabilité des recours en annulation introduits par cette catégorie de
requérants à la condition relative à l’affectation individuelle, cette disposition leur ouvre
désormais l’opportunité d’un recours en annulation à l’égard des actes réglementaires
ne comportant pas de mesures d’exécution et les concernant directement. Le juge de
l’Union a précisé ultérieurement que « la notion d’“acte réglementaire” [visée à
l’article 263, alinéa 4, du Traité FUE] doit être comprise comme visant des actes de
portée générale à l’exception des actes législatifs », c’est-à-dire soit un acte adopté ni
selon la procédure législative ordinaire ni selon une procédure législative spéciale au
sens de l’article 289, § 1er à 3, du Traité FUE soit un acte non législatif de portée générale
(pour une illustration voy. not., CJUE, 3 oct. 2013, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./
Parlement et Conseil, C-583/11 P, EU:C:2013:625, point 60 ; pour une application
de la jurisprudence « Inuit » voy. not., Tribunal, 12 juin 2015, Plantavis et NEM/
Commission et EFSA, T-334/12, EU:T:2015:376, points 24 et s. ; Tribunal, 7 juill.
2015, Federcoopesca e.a./Commission, T-312/14, EU:T:2015:472, points 23 et s.).
Enfin, l’article 263, alinéa 5, du Traité FUE offre l’opportunité aux personnes physiques
ou morales d’agir en annulation contre les actes des organes et organismes de l’Union
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148 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
« destinés à produire des effets juridiques à leur égard » pour autant que les actes créant
ces organes et organismes aient prévu les conditions et modalités particulières concer-
nant de tels recours.
Les associations en charge de défendre des intérêts collectifs sont recevables à agir en
annulation dans trois hypothèses : lorsqu’elles représentent les intérêts de personnes
physiques ou morales qui, elles, seraient recevables à agir, ou lorsqu’elles sont individua-
lisées en raison de l’affectation de leurs intérêts propres en tant qu’association (notam-
ment lorsque l’acte dont elles demandent l’annulation affecte leurs positions de négo-
ciatrice), ou encore lorsqu’une disposition légale leur reconnaît expressément une série
de facultés à caractère procédural (pour une illustration voy., Tribunal, Ord., 30 sept.
1997, Federolio/Commission, T-122/96, EU:T:1997:142, point 60 ; Tribunal,
18 mars 2010, Forum 187/Commission, T-189/08, EU:T:2010:99, point 58).
Les personnes physiques ou morales constituent donc des requérants ordinaires puis-
qu’elles ne peuvent former de recours en annulation que sous réserve de justifier d’un
intérêt à agir, c’est-à-dire d’établir que l’acte en question affecte leur situation juridique
et leur cause un préjudice16.
1) L’incompétence
Même si l’incompétence est rarement retenue par le juge de l’Union, elle peut cepen-
dant revêtir de nombreuses formes :
– l’acte a été pris par une institution dans un domaine qui ne relève pas de la compé-
tence de l’Union (CJCE, 23 avril 1986, Parti écologiste “Les Verts”/Parlement,
294/83, EU:C:1986:166, points 45 et s. ; CJCE, 5 oct. 2000, Allemagne/Parle-
ment et Conseil, C-376/98, EU:C:2000:544, points 76 et s.) ;
——
16. L’intérêt à agir doit être né et actuel mais le juge de l’Union admet un intérêt à agir futur s’il est
certain et non hypothétique (sur ce point voy. not., Tribunal, 30 avril 1998, Cityflyer Express/Com-
mission, T-16/96, EU:T:1998:78).
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 149
– l’acte a été pris par une institution dans un domaine qui relève de la compétence
d’une autre institution (CJCE, 9 oct. 1990, France/Commission, C-366/88, EU:
C:1990:348, points 23 et 24) ;
– l’acte est pris par un membre d’une institution qui ne bénéficie pas d’une habilita-
tion ou d’une délégation régulière (CJCE, 23 sept. 1986, AKZO Chemie/Commis-
sion, 5/85, EU:C:1986:328, points 36 et 37) ;
– l’acte est pris par une institution incompétente ratione temporis17, loci18 ou
materiae19 (à titre d’ex. voy. not., Tribunal, 4 mars 2015, Royaume-Uni/BCE, T-
496/11, EU:T:2015:133, point 110 : dans lequel le Tribunal juge que la BCE est
incompétente pour imposer, au nom de l’Eurosystème, une exigence de
localisation au sein de la zone euro des contreparties centrales fournissant des
services de compensation de titres libellés en euros).
——
17. Si l’acte adopté par l’institution l’a été en dehors des limites de temps fixées pour l’exercice d’une
compétence déterminée.
18. Si l’acte adopté par l’institution produit ses effets en dehors du territoire sur lequel s’exerce sa compé-
tence.
19. Si l’acte adopté par l’institution l’a été en dehors des limites de son champ de compétences.
20. Voy. le présent ouvrage, p. 29.
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150 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
4) Le détournement de pouvoir
Selon une jurisprudence établie, un acte n’est entaché de détournement de pouvoir que
s’il apparaît avoir été pris « exclusivement, ou à tout le moins de manière déterminante,
à des fins autres que celles dont il est excipé ou dans le but d’éluder une procédure
spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l’espèce » (pour une
illustration voy. not., CJUE, 4 déc. 2013, Commission/Conseil, C-111/10, EU:
C:2013:785, point 80 ; CJUE, 4 déc. 2013, Commission/Conseil, C-118/10, EU:
C:2013:787, point 87 ; CJUE, 4 déc. 2013, Commission/Conseil, C-121/10, EU:
C:2013:784, point 81 ; CJUE, 5 mai 2015, Espagne/Parlement et Conseil, C-146/13,
EU:C:2015:298, point 56). Le détournement de pouvoir ne peut être présumé, le
requérant se doit donc d’apporter des indices objectifs, pertinents et concordants de
preuve à l’appui de ce moyen d’annulation (CJCE, 29 oct. 1976, Giuffrida/Conseil,
105/75, EU:C:1976:128). Selon le Tribunal, le détournement de pouvoir doit être
démontré « sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants » permettant d’éta-
blir avec certitude que l’acte litigieux visait un but autre que celui poursuivi par la régle-
mentation en cause (Tribunal, 27 juin 2001, Andres de Dios e.a./Conseil, T-166/99,
EU:T:2001:171, point 48 ; Tribunal, 16 oct. 2003, Co-Frutta/Commission, T-47/01,
EU:T:2003:272, point 72 ; Tribunal, 9 sept. 2009, Diputación Foral de Álava et
GobiernoVasco/Commission, T-227/01 à T-229/01, T-265/01, T-266/01 et T-270/01,
EU:T:2009:315, point 213).
Lorsque l’institution dispose d’un pouvoir (discrétionnaire) d’appréciation impliquant des
évaluations complexes d’ordre économique et social, le juge de Luxembourg se refuse à
contrôler l’opportunité de l’acte contesté. Il considère en effet qu’il ne peut pas substi-
tuer sa propre appréciation à celle de l’institution qui est l’auteur de l’acte en cause. Le
contrôle juridictionnel appliqué à l’exercice de ce pouvoir d’appréciation se cantonne
alors à un contrôle minimum, à savoir la vérification du respect des règles de procédure
et de motivation, le contrôle de l’exactitude matérielle des faits retenus et enfin
l’absence d’erreur de droit, d’erreur manifeste dans l’appréciation des faits ou de
détournement de pouvoir (pour une illustration voy., CJUE, 4 déc. 2013, Commission/
Conseil, C-118/10, EU:C:2013:787, point 104 ; CJUE, 4 déc. 2013, Commission/
Conseil, C-111/10, EU:C:2013:785, point 97 ; CJUE, 4 déc. 2013, Commission/
Conseil, C-121/10, EU:C:2013:784, point 98).
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 151
art. 263, al. 6). Compte tenu du fait que la détermination de délais de recours vise à
sauvegarder la sécurité juridique en évitant une remise en cause indéfinie des actes de
l’Union entraînant des effets de droit (sur ce point voy. not., CJCE, 12 oct. 1978,
Commission/Belgique, 156/77, EU:C:1978:180, point 20 ; CJCE, 22 oct. 2002,
National Farmers’Union, C-241/01, EU:C:2002:604, point 34), le juge de l’Union
considère que la date de publication, s’il y en a une, est le critère décisif pour déterminer
le point de départ du délai de recours. Ainsi, un requérant ne peut donc pas invoquer le
fait d’avoir pris connaissance de l’acte attaqué postérieurement à sa publication afin de
retarder ce point de départ (pour une illustration voy., CJCE, Ord., 25 nov. 2008, S.A.
BA.R./Commission, C-501/07 P, EU:C:2008:652, point 22 ; CJCE, Ord., 9 juill. 2009,
Fornaci Laterizi Danesi/Commission, C-498/08 P, EU:C:2009:447, point 37). Néan-
moins, « à défaut de publication ou de notification, il appartient à celui qui a connais-
sance de l’existence d’un acte qui le concerne d’en demander le texte intégral dans un
délai raisonnable, mais que, sous cette réserve, le délai de recours ne saurait courir qu’à
partir du moment où le tiers concerné a une connaissance exacte du contenu et des
motifs de l’acte en cause de manière à pouvoir faire fruit de son droit de recours »
(Tribunal, 7 mars 1995, Socurte e.a./Commission, T-432/93 à T-434/93, EU:
T:1995:43, point 49). Ainsi, le recours introduit après l’expiration du délai de deux
mois est, en principe, irrecevable quelle que soit la qualité du requérant. Le juge de
l’Union est habilité à examiner d’office le respect du délai de recours dans la mesure où
ce dernier est d’ordre public (pour une illustration voy., CJCE, 7 juill. 1971, Müllers/
Comité économique et social, 79/70, EU:C:1971:79, point 6 ; CJUE, 11 nov. 2010,
Transportes Evaristo Molina/Commission, C-36/09 P, EU:C:2010:670, point 33).
Toutefois, le juge de Luxembourg admet exceptionnellement qu’une erreur excusable
puisse justifier une dérogation aux règles régissant le délai du recours en annulation intro-
duit par les particuliers (Tribunal, Ord., 21 mars 2002, Laboratoire Monique Rémy/
Commission, T-218/01, EU:T:2002:86, point 30). Par ailleurs, l’article 45, alinéa 2 du
Statut permet également au juge de l’Union de déroger au délai de deux mois si le requé-
rant établit l’existence d’un cas fortuit ou de force majeure (Tribunal, 28 janv. 2009,
Centro Studi Manieri/Conseil, T-125/06, EU:T:2009:19, points 27 et 28).
Le fait de saisir le juge de l’Union d’un recours en annulation n’a pas d’effet suspensif
mais le requérant peut, par requête séparée, lui demander le sursis à exécution de
l’acte contesté conformément à l’article 278, du Traité FUE21.
——
21. Voy. le présent ouvrage, p. 139.
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152 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
——
22. Cette exigence de sécurité juridique avait d’ailleurs conduit le juge de Luxembourg à faire usage de
cette possibilité, au-delà des règlements, pour le budget communautaire (CJCE, 3 juill. 1986,
Conseil/Parlement, 34/86, EU:C:1986:291) puis pour les directives (CJCE, 7 juill. 1992, Parlement/-
Conseil, C-295/90, EU:C:1992:294).
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 153
T:1997:39, point 45). Par ailleurs, l’annulation d’un acte n’affecte pas nécessairement
les actes préparatoires (CJCE, 12 nov. 1998, Espagne/Commission, C-415/96, EU:
C:1998:533, point 32).
2• L’EXCEPTION D’ILLÉGALITÉ
TFUE, art. 277
« Nonobstant l’expiration du délai prévu à l’article 263, sixième alinéa, toute partie peut, à
l’occasion d’un litige mettant en cause un acte de portée générale adopté par une institution,
un organe ou un organisme de l’Union, se prévaloir des moyens prévus à l’article 263,
deuxième alinéa, pour invoquer devant la Cour de justice de l’Union européenne l’inapplicabi-
lité de cet acte. »
Cette procédure vient non seulement pallier le délai très bref du recours en annulation
des actes adoptés par les institutions, organes et organismes de l’Union mais également
compenser les conditions restrictives auxquelles sont soumises les personnes physiques
ou morales pour exercer un tel recours. Elle permet donc au juge de Luxembourg « de
protéger le justiciable contre l’application d’un [acte de portée générale] illégal, sans
que soit pour autant mis en cause [cet acte de portée générale] lui-même, devenu inat-
taquable par l’écoulement des délais » du recours en annulation (CJCE, 14 déc. 1962,
Wöhrmann/Commission, 31/62 et 33/62, EU:C:1962:49).
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154 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
L’exception d’illégalité peut être soulevée explicitement devant le juge de l’Union à tout
moment23, par toute partie, dès lors qu’elle invoque l’un des moyens d’annulation visés
par l’article 263, alinéa 2, du Traité FUE et qu’elle justifie, pour les personnes physiques
ou morales, d’un intérêt à agir en établissant que ses intérêts sont affectés par l’applica-
tion de l’acte dont elle demande l’inapplicabilité (CJCE, 18 mars 1980, Valsabbia e.a./
Commission, 154, 205, 206, 226 à 228, 263 et 264/78, 39, 31, 83 et 85/79, EU:
C:1980:81, point 9).
——
23. L’exception d’illégalité ne constitue pas un moyen d’ordre public voy., CJCE, 17 déc. 1959, Société
des fonderies de Pont-à-Mousson/Haute Autorité CECA, 14/59, EU:C:1959:31.
24. Voy. le présent ouvrage, p. 192.
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 155
à l’instance et ne peut donc pas être invoquée par des tiers (CJCE, 5 oct. 2000, Conseil/
Busacca e.a., C-434/98 P, EU:C:2000:546, point 26).
3• LE RECOURS EN CARENCE
TFUE, art. 265
« Dans le cas où, en violation des traités, le Parlement européen, le Conseil européen, le
Conseil, la Commission ou la Banque centrale européenne s’abstiennent de statuer, les États
membres et les autres institutions de l’Union peuvent saisir la Cour de justice de l’Union euro-
péenne en vue de faire constater cette violation. Le présent article s’applique, dans les mêmes
conditions, aux organes et organismes de l’Union qui s’abstiennent de statuer.
Ce recours n’est recevable que si l’institution, l’organe ou l’organisme en cause a été préalable-
ment invité à agir. Si, à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de cette invitation, l’ins-
titution, l’organe ou l’organisme n’a pas pris position, le recours peut être formé dans un
nouveau délai de deux mois.
Toute personne physique ou morale peut saisir la Cour dans les conditions fixées aux alinéas
précédents pour faire grief à l’une des institutions, ou à l’un des organes ou organismes de
l’Union d’avoir manqué de lui adresser un acte autre qu’une recommandation ou un avis. »
Le recours en carence vise à faire constater par le juge de Luxembourg l’illégalité d’une
abstention d’une institution, d’un organe ou d’un organisme de l’Union. Selon les
termes mêmes de la Cour de justice, l’intérêt de cette voie de recours consiste en ce
que « l’inaction illégale [d’une des institutions visées à l’article 265, alinéa 1er, du Traité
FUE] permet aux autres institutions et aux États membres ainsi que, dans certains cas,
aux particuliers de saisir la Cour afin que celle-ci déclare que l’abstention d’agir est
contraire au traité, dans la mesure où l’institution concernée n’a pas remédié à cette
abstention » (CJCE, 12 juill. 1987, Commission/Conseil, 383/87, EU:C:1988:388,
point 9 ; CJCE, 12 juill. 1988, Parlement/Conseil, 377/87, EU:C:1988:387, point 9).
A - La notion de carence
La carence peut se définir comme l’abstention, l’inaction illégale ou l’inertie fautive du
Parlement européen, du Conseil européen, du Conseil, de la Commission européenne,
de la Banque centrale européenne ou encore d’un organe ou d’un organisme de l’Union
d’adopter un acte alors même que les traités ou les actes pris en leur application les y
obligent (pour une illustration récente voy., Tribunal, 16 déc. 2015, Suède/Commis-
sion, T-521/14, EU:T:2015:976 : à propos d’un recours en carence introduit par la
Suède contre la Commission européenne pour avoir omis d’adopter dans les temps les
actes délégués prévus par un acte législatif). La Cour de justice a d’ailleurs précisé que la
carence, au sens de l’article 265, du Traité FUE, se caractérise bien par une abstention de
statuer ou de prendre position contraire au Traité FUE et non par l’adoption d’un acte
différent de celui qu’on aurait souhaité ou estimé nécessaire (CJUE, 19 nov. 2013,
Commission/Conseil, C-196/12, EU:C:2013:753, point 22 ; Tribunal, 16 déc. 2015,
Suède/Commission, T-521/14, EU:T:2015:976, point 33).
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156 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
Toutefois, la Cour de justice considère qu’il ne peut y avoir carence qu’à condition que
l’auteur présumé de cette carence soit tenu d’agir (c’est-à-dire qu’il ne dispose pas d’un
pouvoir discrétionnaire) (CJCE, 14 févr. 1989, Star Fruit/Commission, 247/87, EU:
C:1989:58) et que l’omission reprochée « porte sur des mesures dont la portée peut
être suffisamment définie pour qu’elles puissent être individualisées et faire l’objet
d’une exécution au sens de l’article 176 [TFUE, art. 265] du traité » (CJCE, 22 mai
1985, Parlement/Conseil, 13/83, EU:C:1985:220, point 37).
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 157
procurer un bénéfice personnel à la partie qui l’a intenté (sur ce point voy. not., CJCE,
7 juin 2007, Wunenburger/Commission, C-362/05 P, EU:C:2007:322, point 42).
C - La procédure en carence
Le recours en carence se décompose en deux phases : une phase précontentieuse et une
phase contentieuse. La première a pour objectif d’éviter la seconde.
1) La phase précontentieuse
L’article 265, alinéa 2, du Traité FUE subordonne la recevabilité du recours en carence à
l’accomplissement d’une phase précontentieuse préalable au cours de laquelle le requé-
rant invite l’institution, l’organe ou l’organisme de l’Union en cause à agir. L’invitation à
agir doit être motivée et comporter clairement les mesures que l’institution, l’organe ou
l’organisme est mis en demeure d’adopter puisqu’elle délimitera le cadre de l’éventuel et
ultérieur recours contentieux devant le juge de l’Union (CJCE, 6 mai 1986, Nuovo
Campsider/Commission, 25/85, EU:C:1986:195, point 8). L’article 265, du Traité FUE
ne fixe pas, par contre, de délai au requérant pour inviter l’institution sollicitée à agir.
Selon la Cour de justice, « les exigences de la sécurité juridique et de la continuité de
l’action communautaire [...] implique[nt] que l’exercice du droit de saisir la Commission
ne saurait être retardé indéfiniment. Que, si les justiciables sont ainsi tenus d’observer un
délai raisonnable en cas de silence de la Commission, il doit, à plus forte raison, en être
ainsi dès que la résolution de la Commission de s’abstenir est devenue manifeste »
(CJCE, 6 juill. 1971, Pays-Bas/Commission, 59/70, EU:C:1971:77, points 15, 18
et 19).
Si, à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de cette invitation à agir, l’institu-
tion, l’organe ou l’organisme sollicité n’a pas mis fin à la carence ou pris position sur la
demande qui lui a été adressée, la carence est alors réputée constituée et un recours
peut être formé devant le juge de l’Union dans un nouveau délai de deux mois. La
Cour de justice considère qu’une réponse d’attente, évasive ou dilatoire n’est pas consti-
tutive d’une prise de position (et ne met donc pas un terme à la carence) contrairement
au fait d’adopter la mesure demandée ou même une mesure différente de celle qui a été
sollicitée (CJCE, 18 oct. 1979, GEMA/Commission, 125/78, EU:C:1979:237, point 21 ;
CJCE, 5 déc. 1988, Irish Cement Ltd/Commission, 166/86 et 220/86, EU:C:1988:549,
point 17 ; Tribunal, 15 sept. 1998, Gestevisión Telecinco/Commission, T-95/96, EU:
T:1998:206, point 88 ; Tribunal, 7 mars 2002, Intervet International/Commission,
T-212/99, EU:T:2002:63, point 61 ; Tribunal, 16 déc. 2015, Suède/Commission, T-
521/14, EU:T:2015:976, point 42).
2) La phase contentieuse
Le recours devra être introduit par le même requérant que celui qui a présenté la
demande préalable et porter sur les mêmes mesures que celles ayant fait l’objet de l’invi-
tation à agir (CJCE, 15 juill. 1960, Chambre syndicale de la sidérurgie de l’est de la
France e.a./Haute Autorité CECA, 24/58 et 34/58, EU:C:1960:32). Si l’institution,
l’organe ou l’organisme de l’Union prend position après l’introduction du recours en
carence et avant le prononcé de l’arrêt, le recours devient alors sans objet (pour une
illustration voy., CJCE, 12 juill. 1988, Parlement/Conseil, 377/87, EU:C:1988:387). Le
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158 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
juge de Luxembourg rend alors une ordonnance de non-lieu à statuer. Cette solution
s’explique par le fait que l’article 265, du Traité FUE cherche moins à condamner à tout
prix les institutions, organes ou organismes de l’Union qu’à obtenir qu’elles mettent fin à
leur comportement irrégulier25.
——
25. Voy. en ce sens les conclusions de l’avocat général Jean Mischo présentées le 26 mai 1988, Parle-
ment/Conseil, 377/87, Rec. 1988, p. 4026, spéc. p. 4042, point 124.
26. TCEEA, art. 188.
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 159
La Cour de justice de l’UE a une compétence exclusive pour statuer sur les recours qui
tendraient à mettre en cause, directement ou indirectement, la responsabilité extracon-
tractuelle de l’Union (Tribunal, 13 déc. 1995, Vereniging van Exporteurs in Levende
Varkens e.a./Commission, T-481/93 et T-484/93, EU:T:1995:209, point 72).
La responsabilité non contractuelle de l’Union ne peut être engagée que pour les
dommages causés par les institutions et, par extension, par les organes et organismes
de l’Union (CJCE, 2 déc. 1992, SGEEM et Etroy/BEI, C-370/89, EU:C:1993:202,
point 16 : à propos d’un recours en indemnité dirigé contre la Banque européenne
d’investissement ; Tribunal, 29 avril 2015, Staelen/Médiateur, T-217/11, EU:
T:2015:238, point 55 : à propos d’un recours en indemnité dirigé contre le médiateur
européen) ou en raison des comportements de leurs agents dans l’exercice de leurs
fonctions. En revanche, l’Union ne peut être tenue responsable des dommages causés
aux personnes privées par les organismes des États membres ou leurs agents, y compris
lorsqu’ils agissent en violation du droit de l’Union. Dans une telle hypothèse, la question
de la réparation d’un préjudice doit être appréciée par les juridictions nationales et en
fonction du seul droit national de la responsabilité publique (CJCE, 13 févr. 1979,
Granaria, 101/78, EU:C:1979:38, point 14). Selon une jurisprudence constante de la
Cour de justice, l’action en indemnité au titre de l’article 268, du Traité FUE et de l’article
340, alinéa 2, du Traité FUE a été instituée comme une voie autonome ayant une fonc-
tion particulière dans le cadre du système des voies de recours (sur l’autonomie du
recours en responsabilité extracontractuelle par rapport au recours en annulation voy.,
CJCE, 2 déc. 1971, Zuckerfabrik Schöppenstedt/Conseil, 5/71, EU:C:1971:116,
point 3 ; sur l’autonomie du recours en responsabilité extracontractuelle par rapport
au recours en carence voy., CJCE, 28 avril 1971, Lütticke/Commission, 4/69, EU:
C:1971:40, point 6). Le juge de l’Union estime en effet que le recours en responsabilité
extracontractuelle doit être apprécié au regard de l’ensemble du système de protection
juridictionnelle des particuliers instauré par le traité. « Il en résulte que, lorsqu’une
personne s’estime lésée par l’application régulière d’une réglementation de l’Union
qu’elle considère comme illégale et que le fait générateur du dommage allégué est
ainsi exclusivement imputable à l’Union, la recevabilité d’un tel recours en indemnité
peut néanmoins se trouver subordonnée, dans certains cas, à l’épuisement des voies
de recours internes. Encore faut‑il pour qu’il en soit ainsi que ces voies de recours natio-
nales assurent d’une manière efficace la protection des droits des personnes concernées
et qu’elles soient susceptibles d’aboutir à la réparation du dommage allégué » (CJCE,
30 mai 1989, Roquette frères/Commission, 20/88, EU:C:1989:221, point 15 ;
Tribunal, 23 nov. 2004, Cantina sociale di Dolianova e.a./Commission, T-166/98,
EU:T:2004:337, point 115 ; Tribunal, 23 sept. 2015, Schroeder/Conseil et Commis-
sion, T-205/14, EU:T:2015:673, point 18).
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160 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
État, y compris les États tiers, ainsi que toute personne physique ou morale, quelle que
soit sa nationalité, peut former un recours sur le fondement de l’article 268, du Traité
FUE dès lors qu’elle estime avoir subi un préjudice l’affectant dans son patrimoine
propre du fait des activités de l’Union. Les associations et organisations professionnelles
ne peuvent donc pas introduire un recours sur le fondement de l’article 268, du Traité
FUE lorsque le préjudice affecte seulement leurs membres. Néanmoins, ces derniers ont
la possibilité de donner mandat à une association ou à une organisation professionnelle
pour les représenter. En résumé, un droit d’agir au titre de l’article 340, du Traité FUE
n’est reconnu aux associations et organisations professionnelles que dans la mesure où
« elles peuvent faire valoir en justice ou bien un intérêt propre distinct de celui de leurs
membres ou bien un droit à réparation qui leur a été cédé par d’autres personnes » (sur
ce point voy. not., Tribunal, 30 sept. 1998, Coldiretti e.a./Conseil et Commission, T-
149/96, EU:T:1998:228, point 57).
2. Le défendeur
L’action en responsabilité doit être dirigée contre l’institution27 ou, depuis l’entrée en
vigueur du Traité de Lisbonne, l’organe ou l’organisme de l’Union auteur du dommage
(CJCE, 13 nov. 1973, Werhahn Hansamühle e.a./Conseil, 63/72 à 69/72, EU:
C:1973:121) même si en fait c’est la responsabilité de l’Union qui est recherchée puisque
ses institutions, organes et organismes ne disposent pas de la personnalité juridique. La
Cour de justice n’avait toutefois pas attendu ce dernier traité en date pour interpréter
largement la notion d’institution puisqu’elle avait notamment jugé par le passé recevable
dans son arrêt SGEEM et Etroy/BEI de décembre 1992 le recours en responsabilité extra-
contractuelle introduit par une personne morale à l’encontre de la Banque européenne
d’investissement estimant que « le terme “institution” [...] ne doit pas être compris
comme visant les seules institutions de la Communauté [...] mais comme recouvrant
également, eu égard au système de responsabilité non contractuelle établi par le traité,
les organismes communautaires tels que la Banque » (CJCE, 2 déc. 1992, SGEEM et
Etroy/BEI, C-370/89, EU:C:1993:202, point 16). La responsabilité de l’Union peut égale-
ment être engagée si le fait dommageable est commis par un des agents de ces institu-
tions, organes et organismes dans l’exercice de ses fonctions. Le recours doit alors être
formé contre l’institution, l’organe ou l’organisme de l’Union dont il relève. L’Union peut,
le cas échéant, se retourner contre cet agent pour demander réparation du dommage subi
ou encore obtenir le remboursement des sommes versées au demandeur (action
récursoire).
——
27. En conférant rang d’institution de l’Union au Conseil européen (TUE, art. 17, § 1er), le Traité de Lisbonne
conduit à une évolution du contentieux de la responsabilité extracontractuelle. En effet, si le Tribunal a
été amené par le passé à juger que la responsabilité extracontractuelle ne pouvait être engagée lorsque
le dommage allégué par le requérant était le fait du Conseil européen (Tribunal, Ord., 17 déc. 2003,
Krikorian e.a./Parlement e.a., T-346/03, EU:T:2003:348, point 17), il devrait désormais en être tout
autrement dans la mesure où les dommages causés par cette institution ou par ses agents dans l’exer-
cice de leurs fonctions devraient entraîner, comme pour toutes les autres institutions de l’Union, l’enga-
gement de sa responsabilité extracontractuelle sur le fondement de l’article 340, du Traité FUE.
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 161
qui y donne lieu. Il résulte d’une jurisprudence constante des juridictions de l’Union que
le délai de prescription « ne saurait commencer à courir avant que ne soient réunies
toutes les conditions auxquelles se trouve subordonnée l’obligation de réparation et
notamment [...], s’agissant des cas où la responsabilité [...] trouve sa source dans un
acte normatif, ce délai de prescription ne saurait commencer à courir avant que les
effets dommageables de cet acte ne se soient produits » (CJCE, 27 janv. 1982,
Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, 256, 257, 265, 267/80, 5 et 51/81 et
282/82, EU:C:1987:87, point 10) « et partant, avant le moment où les intéressés ont
dû subir un préjudice certain » (CJCE, 17 juill. 2008, Commission/Cantina sociale di
Dolianova e.a., C-51/05 P, EU:C:2008:409, point 54 ; CJCE, 11 juin 2009, Transports
Schiocchet – Excursions/Commission, C-335/08 P, EU:C:2009:372, point 33).
La prescription est interrompue soit par la requête formée devant la Cour de justice, soit
par la demande préalable que la victime peut adresser à l’institution, l’organe ou l’orga-
nisme de l’Union auteur du dommage (sur ce point voy., Tribunal, 25 nov. 1998, Stef-
fens/Conseil et Commission, T-222/97, EU:T:1998:267, point 35). Dans ce dernier
cas, la requête doit être formée dans le délai de deux mois prévu dans le cadre du
recours en annulation à l’article 263, du Traité FUE et les dispositions de l’article 265,
alinéa 2, du Traité FUE relatif au recours en carence sont, le cas échéant, applicables.
——
28. Voy. le présent ouvrage, p. 127.
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162 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 163
C:1965:52 ; CJCE, 28 mai 1970, Richez-Parise e.a./Commission, 19, 20, 25, 30/69,
EU:C:1970:47, point 31), mais encore susceptible de donner lieu à une évaluation
(Tribunal, 16 janv. 1996, Candiotte/Conseil, T-108/94, EU:T:1994:247, point 7).
Toutefois, la Cour admet la réparation de dommages futurs, c’est-à-dire « imminents et
prévisibles avec une certitude suffisante » (CJCE, 14 janv. 1987, Zuckerfabrik Bedburg
e.a./Conseil et Commission, 281/84, EU:C:1987:3, point 14). Les dommages de
nature à engendrer une réparation ne peuvent en revanche pas être seulement proba-
bles voire purement hypothétiques (pour une illustration voy., Tribunal, 29 oct. 1998,
TEAM/Commission, T-13/96, EU:T:1997:87, point 76). Il appartient au demandeur
d’étayer ses allégations par des éléments concrets et objectifs de preuve qui permettent
au juge d’établir, outre l’existence, l’étendue du dommage (Tribunal, 28 avril 1998,
Dorsch Consult Ingenieurgesellschaft/Conseil et Commission, T-184/95, EU:
T:1998:74). Dans les domaines économiques où les institutions de l’Union disposent
d’un large pouvoir d’appréciation, le juge exige que le préjudice soit spécial (ce qui
signifie qu’il doit concerner, sinon une seule personne, du moins « un groupe restreint
et nettement délimité d’opérateurs économiques » : CJCE, 4 oct. 1979, Dumontier e.
a./Conseil, 64 et 113/76, 167 et 239/78, 27, 28 et 45/79, EU:C:1979:223, point 11)
et anormal (c’est-à-dire que « le dommage allégué par la requérante dépasse les limites
des risques économiques inhérents aux activités dans le secteur concerné » : Tribunal,
7 nov. 2012, Syndicat des thoniers méditerranéens e.a./Commission, T-574/08,
EU:T:2012:583, point 78).
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164 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
L’Union disposant de la personnalité juridique dans les États membres (TUE, art. 47), les
contrats passés avec ses cocontractants sont susceptibles de donner lieu à des différends
et d’engager sa responsabilité contractuelle. Toutefois, les différends qui peuvent subvenir
dans l’exécution d’un contrat ne relèvent pas automatiquement de la compétence des juri-
dictions de l’Union. En effet, en l’absence d’une clause compromissoire contenue dans le
contrat attribuant compétence à la Cour de justice de l’UE, les différends contractuels relè-
vent de la compétence du juge national (pour un rappel voy., CJUE, 18 avril 2013,
Commission/Systran et Systran Luxembourg, C-103/11 P, EU:C:2013:245, point 59).
Dans la pratique, on constate que seuls les contrats les plus importants sont dotés d’une
clause compromissoire et relèvent donc de la compétence du juge de Luxembourg alors
que les contrats moins importants sont laissés à la compétence de tribunaux arbitraux ou
de juridictions nationales (pour une application voy., Tribunal, 17 déc. 2010, Commis-
sion/Acentro Turismo, T-460/08, EU:T:2010:551 : dans lequel le Tribunal condamne un
cocontractant à verser des intérêts de retard à la Commission européenne pour défaut
d’exécution d’un contrat de prestation de services ; Tribunal, 13 juin 2012, Insula/
Commission, T-366/09, EU:T:2012:288 : dans lequel le Tribunal condamne un cocontrac-
tant à rembourser des sommes avancées ou versées à la Commission européenne pour
défaut d’exécution d’un contrat conclu dans le cadre du programme spécifique de
recherche « Énergie, environnement et développement durable »). L’article 340,
alinéa 1er, du Traité FUE prévoit que « la responsabilité contractuelle de l’Union est régie
par la loi applicable au contrat en cause ». La loi applicable au litige à laquelle les parties
se réfèrent et sur la base de laquelle sera établie une éventuelle responsabilité de l’Union
est le plus souvent une loi nationale (CJCE, 7 déc. 1976, Pellegrini e.a./Commission e.
a., 23/76, EU:C:1976:174 ; CJCE, 16 janv. 2001, Commission/TVR, C-40/98, EU:
C:2001:19) même si les cocontractants peuvent parfois assortir cette référence à la loi
nationale d’éventuelles dérogations (CJCE, 26 nov. 1985, Commission/CO.DE.MI., 318/
81, EU:C:1985:467). Ils peuvent également renvoyer aux principes généraux communs
——
29. TCEEA, art. 188.
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 165
aux droits des États membres (Tribunal, 16 nov. 2003, Masdar (UK)/Commission, T-333/
03, EU:T:2006:348 : dans lequel le Tribunal accueille, au titre des principes généraux
communs aux droits des États membres, les moyens tirés de l’enrichissement sans cause
et de la gestion d’affaires) voire même exceptionnellement pour certains contrats au droit
de l’Union lui-même (CJCE, 22 sept. 1983, Commission/Royale belge, 23/81, EU:
C:1983:239 : dans lequel la Cour de justice prend en compte le statut des fonctionnaires
de l’UE pour interpréter les obligations contractuelles souscrites par une compagnie
d’assurance).
Section 3
Le contrôle juridictionnel des États membres
de l’Union
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166 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
1• LA NOTION DE MANQUEMENT
Les articles 258 et suivants du Traité FUE visent de manière très générale tout manque-
ment d’un État membre « à une des obligations qui lui incombent en vertu des traités ».
Pour qu’un recours en manquement puisse être engagé à l’encontre d’un État membre,
il faut donc qu’il méconnaisse une norme obligatoire et contraignante de l’Union. Le
manquement peut donc découler de la violation d’obligations résultant de l’ensemble
des sources du droit de l’Union comme les traités (CJCE, 5 nov. 2002, Commission/
Danemark, C-467/98, EU:C:2002:625), les actes obligatoires de droit dérivé (CJCE,
13 juill. 2000, Commission/France, C-160/99, EU:C:2000:410 : à propos d’un règle-
ment ; CJCE, 28 nov. 2002, Commission/France, C-259/01, EU:C:2002:719 : à propos
d’une directive ; CJCE, 2 févr. 1988, Commission/Pays-Bas, 213/85, EU:C:1988:39 : à
propos d’une décision) ou encore les accords internationaux conclus par l’Union (CJCE,
26 oct. 1982, Kupferberg, 104/81, EU:C:1982:362)31.
En pratique, le manquement peut recouvrir des situations très diverses.
——
30. Cette compétence exclusive de la Cour n’interdit pas au Tribunal, en application de l’article 256, § 1er,
du Traité FUE, d’avoir à connaître d’un éventuel recours en annulation introduit par un État membre
sur le fondement de l’article 263, du Traité FUE et dirigé contre une décision de la Commission euro-
péenne relative à l’exécution d’un arrêt en constatation de manquement de la Haute juridiction. On
peut parfaitement envisager une telle hypothèse s’agissant d’une décision individuelle de la Commis-
sion portant demande de paiement d’une somme forfaitaire ou d’une astreinte à un État membre
condamné par la Cour de justice en application de l’article 260, § 2, du Traité FUE. Néanmoins, dans
l’exercice de cette compétence, le Tribunal ne saurait empiéter sur la compétence de la Cour de
justice et notamment se prononcer, dans le cadre d’un tel recours en annulation, sur une question,
relative à la méconnaissance par cet État membre des obligations qui lui incombent en vertu du
Traité FUE, qui n’aurait pas été préalablement tranchée par la Cour (pour une illustration voy.,
Tribunal, 29 mars 2011, Portugal/Commission, T-33/09, EU:T:2011:127, points 61 à 67).
31. Toute violation d’obligations résultant du droit de l’Union ne relève pas systèmatiquement du champ
d’application des articles 258 et suivants du Traité FUE. Ainsi, l’article 126, du Traité FUE relatif à la
lutte contre les déficits excessifs exclut à son paragraphe dix le recours en manquement dans la
mesure où il existe une procédure spécifique relevant de la compétence du Conseil et pouvant
aboutir à des sanctions à l’encontre de l’État membre concerné. De même, le Traité FUE prévoit, à
côté de la procédure générale, des procédures spécifiques et simplifiées qui dérogent aux règles de
droit commun comme par exemple en matière d’aides d’État (TFUE, art. 108, § 2), de sécurité natio-
nale (TFUE, art. 348, al. 2) ou encore d’achèvement du marché intérieur par voie d’harmonisation des
législations nationales (TFUE, art. 114, § 4 et 5).
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 167
Il peut tout d’abord consister dans une action positive d’un État membre comme par
exemple le maintien d’une norme nationale contraire aux obligations que lui impose le
droit de l’Union (CJCE, 11 mai 2000, Commission/France, C-296/98, EU:C:2000:227),
l’adoption d’un texte national contraire aux obligations que lui impose le droit de
l’Union (CJCE, 22 oct. 1998, Commission/France, C-184/96, EU:C:1998:495), l’adop-
tion d’un texte national ne répondant que partiellement aux obligations que lui impo-
sent le droit de l’Union (CJCE, 13 juill. 2000, Commission/France, C-160/99, EU:
C:2000:410) ou encore l’adoption d’un texte national comportant des conditions
supplémentaires à celles fixées par la norme de l’Union (CJCE, 5 mai 1993, Commis-
sion/France, C-246/91, EU:C:1993:174).
Le manquement peut également consister en une abstention, une omission ou une inac-
tion d’un État membre comme par exemple le défaut d’adoption d’un texte ou d’abro-
gation d’un texte contraire aux obligations que lui impose le droit de l’Union (CJCE,
13 avril 2000, Commission/Espagne, C-274/98, EU:C:2000:206), l’absence de dénon-
ciation ou de renégociation d’un accord conclu avec un pays tiers devenu incompatible
avec le droit de l’Union (CJCE, 4 juill. 2000, Commission/Portugal, C-62/98, EU:
C:2000:358), l’absence de poursuite et de répression à l’encontre des ressortissants
nationaux dont les agissements seraient contraires au droit de l’Union (CJCE, 1er févr.
2001, Commission/France, C-333/99, EU:C:2001:73 : à propos de l’absence d’un
mécanisme de sanctions administratives des dépassements de quotas par les pêcheurs
français) ou encore le fait de ne pas affecter suffisamment de personnel à la réalisation
de contrôles efficaces et effectifs prévus par une législation de l’Union (CJCE, 22 déc.
2008, Commission/Espagne, C-189/07, EU:C:2008:760 : à propos de contrôle en
matière de pêche ; CJCE, 23 avril 2009, Commission/Grèce, C-331/07, EU:
C:2009:247 : à propos de contrôles sanitaires).
En pratique, la quasi-totalité des recours en manquement sont relatifs au défaut de
transposition dans les délais des directives. Concrètement, ce manquement peut notam-
ment prendre la forme d’une absence de transposition, d’une transposition incomplète
ou incorrecte, d’un défaut de transmission des mesures nationales de transposition à la
Commission ou encore du maintien dans l’ordre juridique interne d’une norme natio-
nale incompatible avec les objectifs d’une directive (pour une illustration voy., CJUE,
27 oct. 2011, Commission/Pologne, C-362/10, EU:C:2011:703 ; CJUE, 29 juill. 2010,
Commission/France, C-35/10, EU:C:2010:464 : à propos d’un défaut de transposition
d’une directive dans le délai prescrit ; CJUE, 17 oct. 2011, Commission/Pologne, C-
311/10, EU:C:2011:702 : à propos d’une transposition incomplète d’une directive ;
CJUE, 26 janv. 2012, Commission/Slovénie, C-185/11, EU:C:2012:43 : à propos
d’une transposition non conforme d’une directive ; CJUE, 19 juill. 2010, Commission/
Belgique, C-6/10, EU:C:2010:462 : à propos d’un défaut de communication des
mesures nationales de transposition d’une directive).
Le manquement peut émaner de n’importe quel organe de l’État membre ou d’une
collectivité infraétatique comme par exemple une région autonome, une commune ou
un conseil de district urbain (pour une illustration voy., CJCE, 5 mai 1970, Commis-
sion/Belgique, 77/69, EU:C:1970:34, point 15 ; CJCE, 10 mars 1987, Commission/
Italie, 199/85, EU:C:1987:115, points 8 et 9 ; CJCE, 22 sept. 1988, Commission/
Irlande, 45/87, EU:C:1988:435, point 12). La Cour de justice considère que le manque-
ment peut même être le fait d’une société privée s’il existe des liens suffisamment étroits
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168 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
entre elle et l’État membre concerné (CJCE, 24 nov. 1982, Commission/Irlande, 249/
81, EU:C:1982:402).
Traditionnellement, la Cour de justice écarte systématiquement les faits justificatifs que
les États membres pourraient tirer des dispositions, pratiques ou situations de leur ordre
juridique interne pour justifier leur manquement. Quelles que soient les justifications
avancées par les États membres (CJCE, 8 juin 2000, Commission/France, C-46/99,
EU:C:2000:307 : difficultés soulevées par une directive au regard du droit national justi-
fiant une expertise approfondie de la part des autorités compétentes avant toute trans-
position de cette même directive ; CJCE, 9 déc. 2008, Commission/France, C-121/07,
EU:C:2008:695 : opposition d’une partie de l’opinion publique à l’exécution d’un acte
de l’Union ; CJCE, 16 juill. 2009, Commission/Pologne, C-165/08, EU:C:2009:473 :
allégation d’arguments d’ordre éthique ou religieux ; CJCE, 9 juill. 1998, Commission/
Belgique, C-323/97, EU:C:1998:347 : nécessité d’une révision constitutionnelle ; CJCE,
12 févr. 1998, Commission/France, C-144/97, EU:C:1998:60 : dissolution imprévue de
l’organe législatif), elles sont indifférentes à la constatation d’un manquement par la
Cour de justice et ne peuvent légitimer le non-respect par un État des obligations de
l’Union qui s’imposent à lui. De même, la Cour de justice considère qu’un État membre
ne peut invoquer l’absence de conséquences négatives d’un manquement pour s’exo-
nérer de sa responsabilité (pour une illustration voy., CJCE, 18 oct. 2007, Commission/
Danemark, C-19/05, EU:C:2007:606, point 35). Par ailleurs, un État membre ne peut
exciper du fait qu’un autre État méconnaît également les obligations que lui impose le
droit de l’Union pour se soustraire au respect de ses propres obligations car la Cour de
justice considère que l’exception de réciprocité est irrecevable en la matière (CJUE,
19 nov. 2009, Commission/Finlande, C-118/07, EU:C:2009:715, point 48). En défini-
tive, seule une impossibilité absolue d’exécuter convenablement une obligation qu’im-
pose le droit de l’Union peut être admise par la Cour de justice et à condition que l’État
membre défaillant ait collaboré de bonne foi avec la Commission européenne pour
surmonter les difficultés rencontrées conformément à l’obligation de coopération
loyale désormais posée par l’article 4, § 3, du Traité UE qui s’impose à lui (CJCE,
15 janv. 1986, Commission/Belgique, 52/84, EU:C:1986:3, points 14 et 16) (pour
une illustration des moyens de défense invoqués fréquemment par les États membres
poursuivis en manquement et systématiquement rejetés par la Cour de justice voy.
not., CJUE, 18 nov. 2010, Commission/Espagne, C-48/10, EU:C:2010:704).
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 169
du Traité UE étant donné les réticences qu’éprouvent, depuis toujours, les États
membres à faire usage de l’article 259, du Traité FUE32. La Commission peut tout
autant se saisir d’office d’une affaire de manquement comme agir sur la base de plaintes
des États membres ou de personnes physiques ou morales33.
A - La phase précontentieuse
Le recours en manquement comprend obligatoirement une phase précontentieuse au
cours de laquelle la Commission européenne va instruire l’affaire. Cette phase adminis-
trative incombe à la Commission que le recours soit envisagé par cette même institution
sur le fondement de l’article 258, du Traité FUE où qu’il soit introduit à l’initiative d’un ou
de plusieurs États membres sur la base de l’article 259, du Traité FUE. La Commission
adresse tout d’abord à l’État membre concerné une lettre de mise en demeure qui non
seulement délimite le manquement reproché à l’État mais l’invite également à présenter
dans un certain délai ses observations sur les griefs formulés par la Commission euro-
péenne. La Cour de justice considère que cette demande d’observations est « une
garantie essentielle voulue par le traité, son observation est une forme substantielle de
régularité de la procédure constatant un manquement d’un État membre » (sur ce point
voy. not., CJCE, 17 févr. 1970, Commission/Italie, 31/69, EU:C:1970:10, point 13 ;
CJUE, 4 sept. 2014, Commission/Allemagne, C-211/13, EU:C:2014:2148, point 22).
Selon la Cour de justice, la mise en demeure doit « donner l’occasion à l’État membre
——
32. En effet, on constate que les États membres sont quelque peu réticents à faire usage de l’article 259,
du Traité FUE de peur que l’État membre qu’il mettrait directement en cause n’en vienne lui aussi à
examiner de plus près le respect de leurs propres obligations. Finalement, la stratégie des États
membres consiste le plus souvent à adresser une plainte à la Commission européenne et à l’inviter à
mettre en œuvre elle-même la procédure.
33. Le recours en manquement n’étant pas ouvert aux particuliers, rien ne les empêche par contre
d’informer la Commission européenne des violations du droit de l’Union qui seraient le fait de leur
État d’origine ou de tout autre État membre de l’Union. Un formulaire de plainte est d’ailleurs dispo-
nible à cet effet pour les personnes physiques ou morales sur le site de la Commission européenne :
https://ec.europa.eu/assets/sg/report-a-breach/complaints_fr/index.html
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170 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
B - La phase contentieuse
La Commission européenne décide de l’opportunité d’introduire un recours. Elle n’a
donc pas l’obligation de saisir la Cour de justice, même si l’État membre destinataire de
l’avis motivé manque encore aux obligations que lui impose le droit de l’Union. Elle n’est
pas non plus soumise à un délai spécifique pour saisir la Cour de justice. Cette dernière a
toutefois précisé sur ce point que « dans certaines hypothèses, une durée excessive de la
procédure précontentieuse prévue par l’article 169 [TFUE, art. 258] est susceptible
d’augmenter, pour l’État mis en cause, la difficulté de réfuter les arguments de la
Commission et de violer ainsi les droits de la défense » (CJCE, 16 mai 1991,
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 171
Si la Cour de justice considère qu’un État membre a manqué aux obligations que lui
impose le droit de l’Union, elle rend alors un arrêt en constatation de manquement.
Cet arrêt n’a qu’un effet déclaratoire, en ce sens que la Cour de justice ne fait que cons-
tater que l’État concerné a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du droit
de l’Union. Elle ne peut donc ni le contraindre à adopter des mesures déterminées, ni le
condamner à des dommages et intérêts, ni même annuler ou déclarer invalides les
normes nationales qui seraient incompatibles avec le droit de l’Union (CJCE, 16 déc.
1960, Humblet, 6/60, EU:C:1960:48). Par contre, l’arrêt en constatation de manque-
ment a un effet erga omnes (autorité absolue de chose jugée) et peut être dès lors
invoqué par une personne physique ou morale en vue d’obtenir du juge national l’inap-
plication de toute norme nationale qui serait contraire au droit de l’Union.
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172 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
La Cour de justice refuse de limiter les effets dans le temps des arrêts en constatation de
manquement (pour une illustration voy., CJCE, 7 juin 2007, Commission/Grèce, C-
178/05, EU:C:2007:317, points 65 à 68 ; CJCE, 12 févr. 2009, Commission/Pologne,
C-475/07, EU:C:2009:86, points 60 à 63).
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 173
constatation de manquement pris à son encontre par la Cour de justice, elle peut alors
saisir à nouveau la Cour après avoir mis cet État en mesure de présenter ses
observations34. Dans un tel cas de figure, il incombe alors à la Commission d’indiquer à
la Cour le montant de la somme forfaitaire ou de l’astreinte à payer par l’État membre
concerné qu’elle estime adapté aux circonstances. Ainsi, la procédure prévue à
l’article 260, § 2, du Traité FUE doit donc être considérée, à l’instar du juge de l’Union,
comme une procédure judiciaire spéciale d’exécution des arrêts en constatation de
manquement, soit, en d’autres termes, comme une voie d’exécution (en ce sens voy.,
CJUE, 12 juill. 2005, Commission/France, C-304/02, EU:C:2005:444, point 92 ;
CJUE, 15 janv. 2014, Commission/Portugal, C-292/11 P, EU:C:2014:3, point 40).
À la suite de cette évolution induite du Traité de Maastricht, la Commission européenne
publie une première communication en juin 1996 concernant la mise en œuvre de
l’article 171 du Traité CEE35 (TCE, art. 228) puis une seconde en janvier 1997 relative à
la méthode de calcul des astreintes36. La Cour de justice n’est pas demeurée en reste
puisque la Haute juridiction rend trois arrêts significatifs sur l’article 228 du Traité
CE. Tout d’abord, la Cour, dans son arrêt Commission/Grèce de juillet 2000, condamne
pour la première fois un État membre sur le fondement de l’article 228 du Traité CE, en
l’occurrence la Grèce au paiement d’une astreinte de 20 000 € par jour de retard pour
inexécution d’un arrêt en manquement relatif au non-respect par cet État de deux direc-
tives en matière d’environnement. En outre, la Haute juridiction entérine également
dans cet arrêt les critères définis par la Commission européenne dans ses communica-
tions de 1996 et 1997 (CJCE, 4 juill. 2000, Commission/Grèce, C-387/97, EU:
C:2000:356). Ensuite, dans son arrêt Commission/Espagne de novembre 2003, la Cour
de justice insiste tout particulièrement sur le fait qu’elle entend se réserver une grande
latitude en ce qui concerne le montant des astreintes. Les propositions émises par la
Commission en la matière ne liant pas la Cour et ne constituant pour elle qu’une base
de référence utile37, il revient donc à la seule Cour de justice de fixer l’astreinte « de telle
sorte que celle-ci soit, d’une part, adaptée aux circonstances et, d’autre part, propor-
tionnée au manquement constaté ainsi qu’à la capacité de paiement de l’État membre
concerné »38 (CJCE, 25 nov. 2003, Commission/Espagne, C-278/01, EU:C:2003:635,
point 41 ; pour une application de l’autonomie de la Cour de justice quant au choix et
à la détermination du montant des sanctions pécuniaires au titre de l’article 260, § 2, du
——
34. Le Traité de Lisbonne supprime l’étape précontentieuse de l’avis motivé qui existait auparavant. La
procédure se trouve par conséquent accélérée en pratique, de sorte que, selon la Commission euro-
péenne, la durée moyenne de procédure devrait mécaniquement se voir réduite à une fourchette de
huit à dix-huit mois.
35. Communication du 5 juin 1996 concernant la mise en œuvre de l’article 171 du traité, JOCE C 242,
21 août 1996, p. 6.
36. Communication du 8 janvier 1997 – Méthode de calcul de l’astreinte prévue à l’article 171 du traité,
JOCE C 63, 28 févr. 1997, p. 2.
37. On en voudra pour seule preuve que la Cour de justice s’autorise à refuser une astreinte réclamée par
la Commission alors même que la Haute juridiction constate que l’État membre en cause n’a pas pris
toutes les mesures nécessaires. Pour une illustration voy., CJCE, 18 juill. 2006, Commission/Italie, C-
119/04, EU:C:2006:489.
38. En l’espèce, la Commission européenne proposait d’infliger à l’Espagne une astreinte de 45 600 € par
jour de retard en raison de l’inexécution de l’arrêt en manquement du 12 février 1998 relatif au non-
respect par l’Espagne d’une directive environnementale concernant la qualité des eaux de baignade.
La Cour de justice refuse de suivre la Commission et décide d’imposer à l’Espagne non pas une
astreinte journalière constante mais une astreinte annuelle dégressive.
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174 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
Traité FUE voy. not., CJCE, 9 déc. 2008, Commission/France, C-121/07, EU:
C:2008:695 ; CJCE, 7 juill. 2009, Commission/Grèce, C-369/07, EU:C:2009:428 ;
CJUE, 31 mars 2011, Commission/Grèce, C-407/09, EU:C:2011:196 ; CJUE, 17 nov.
2011, Commission/Italie, C-496/09, EU:C:2011:740). Enfin, dans son arrêt Commis-
sion/France de juillet 2005, la Cour de justice juge que les deux types de sanction pécu-
niaire qu’elle peut infliger en application de l’article 228 du Traité CE, à savoir l’astreinte
et la somme forfaitaire, peuvent, contrairement à la lettre de cette disposition, se
cumuler pour la même infraction et procède pour la première fois à un tel cumul
(CJCE, 12 juill. 2005, Commission/France, C-304/02, EU:C:2005:444). Pour inexécu-
tion de l’arrêt en manquement du 11 juin 1991 (nº C-64/88) dans lequel la Cour avait
constaté le non-respect de la réglementation de l’Union en matière de contrôle des acti-
vités de pêche, la France est ainsi le premier État de l’Union à être condamné au paie-
ment à la fois d’une somme forfaitaire de 20 000 000 € et d’une astreinte de
57 761 250 € pour chaque période de six mois de retard jusqu’à l’exécution de l’arrêt
de juin 1991.
C’est dans ce contexte que la Commission européenne avait adopté en décembre 2005
une communication relative à la mise en œuvre de l’article 228, § 2, du Traité CE (TFUE,
art. 260, § 2) se substituant aux communications de 1996 et 199739. Pour l’essentiel,
cette communication reprenait les éléments définis dans les deux communications anté-
rieures tout en tenant compte de la jurisprudence intervenue dans l’intervalle et détermi-
nait une nouvelle méthode de calcul des sanctions. Prenant acte de l’arrêt Commission/
Grèce de novembre 2018 (CJUE, 14 nov.2018, Commission/Grèce, C-93/17, EU:
C:2018:90340), la Commission a publié en février 2019 une nouvelle communication
qui vient modifier celle de 2005 en ce qui concerne la méthode de calcul des sommes
forfaitaires et des astreintes journalières qu’elle propose dans le cadre des procédures
d’infraction devant la Cour de justice de l’UE41.
En application de l’article 260, § 2, du Traité FUE, la Commission européenne, qui
dispose d’un pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne la saisine de la Cour de justice,
peut proposer à la Haute juridiction d’infliger à un État membre le paiement d’une
somme forfaitaire (pour pénaliser l’existence de l’infraction elle-même) et/ou d’une
astreinte journalière (pour pénaliser la poursuite de l’infraction postérieurement à
l’arrêt en constatation de manquement de la Cour de justice). L’approche générale
adoptée par la Commission européenne pour calculer ces sanctions financières est
désormais bien établie. La gardienne des traités applique depuis toujours une méthode
de calcul prenant en compte tout à la fois la capacité de paiement de l’État membre et
son poids institutionnel. Cette approche est appliquée au moyen de ce qu’on appelle le
« facteur « n ». À cela s’ajoute trois critères fondamentaux, à savoir la gravité de
——
39. Communication de la Commission du 9 décembre 2005 – Mise en œuvre de l’article 228 du Traité
CE, SEC (2005) 1658.
40. Dans lequel la Cour de justice abandonne le critère du nombre des voix dont les États membres
disposent au Conseil lorsqu’il délibére à la majorité qualifiée pour évaluer et calculer le montant des
sanctions pécuniaires en cas d’inexécution d’un arrêt en constatation de manquement. Cet abandon
s’explique par le fait que ce mécanisme de pondération des voix ne s’applique plus au Conseil depuis
le 1er avril 2017.
41. Communication de la Commission du 20 février 2019 – Modification de la méthode de calcul des
sommes forfaitaires et des astreintes journalières qu’elle propose dans le cadre des procédures
d’infraction devant la Cour de justice de l’UE, JOUE C 70, 25 févr. 2019, p. 1.
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 175
——
42. Il s’agit d’un facteur d’ajustement qui garantit que les montants proposés par la Commission demeu-
rent proportionnés, suffisamment dissuasifs et proches de ceux qui s’appliquaient jusqu’à présent.
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176 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
L’ensemble de ces montants sera révisé chaque année afin de prendre en compte
l’inflation.
Parmi les exemples les plus récents de sanctions pécuniaires prononcées au titre de
l’article 260, § 2, du Traité FUE, on peut notamment citer l’arrêt Commission/Grèce de
février 2018 (CJUE, 22 févr. 2018, Commission/Grèce, C-328/16, EU:C:2018:98)
dans lequel la Cour de justice condamne la Grèce à payer une astreinte semestrielle
dégressive de 3 276 000 € et une amende de 5 000 000 € pour inexécution de l’arrêt
en constatation de manquement du 24 juin 2004 (C-119/02) concernant l’application
incomplète en Grèce de la directive nº 91/271/CEE du Conseil relative au traitement
des eaux urbaines résiduaires. On peut également mentionner l’arrêt Commission/
Espagne de juillet 2018 (CJUE, 25 juill. 2018, Commission/Espagne, C-205/17, EU:
C:2018:606) dans lequel la Cour condamne l’Espagne à payer une somme forfaitaire
(amende) de 12 000 000 € et une astreinte semestrielle dégressive de 10 950 000 €
dans la mise en œuvre des mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt du 14 avril
2011, Commission/Espagne (C-343/10) concernant une fois de plus l’application
partielle en Espagne de la directive nº 91/271/CEE du Conseil relative au traitement des
eaux urbaines résiduaires.
Même si le droit de l’Union ne permet pas (encore) le recouvrement forcé des astreintes
et des amendes forfaitaires et qu’on ne peut en aucune manière assimiler ces astreintes
et amendes à des sanctions de caractère pénal puisqu’« infligée[s] pour peser sur un
comportement futur » (CJCE, 4 juill. 2000, Commission/Grèce, C-387/97, EU:
C:2000:356, point 41), il n’en demeure pas moins qu’on peut tirer un bilan plutôt
positif du mécanisme prévu à l’article 260, § 2, du Traité FUE. Il est en effet certain que
ce dispositif joue un rôle dissuasif indéniable et qu’il concourt assurément à des régula-
risations précipitées des États membres dès lors que la Commission européenne brandit
simplement la menace de faire usage de cette disposition à leur encontre.
——
43. Voy. la note de bas de page nº 34, le présent ouvrage, p. 173.
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 177
dans le même arrêt qui constate un manquement d’un État membre à son obligation de
communiquer des mesures de transposition d’une directive adoptée conformément à la
procédure législative. L’objectif de cette nouveauté est d’inciter plus fermement les États
membres à transposer les directives dans les délais fixés par le législateur et assurer ainsi
l’efficacité réelle de la législation de l’Union.
À la suite de cette innovation, la Commission a publié en janvier 2011 une communica-
tion à destination des États membres dans laquelle elle définit les modalités de mise en
œuvre de l’article 260, § 3, du Traité FUE44 et expose comment elle entend faire usage
de cette nouvelle disposition.
Tout d’abord, la Commission eurpoéenne rappelle que la détermination de la sanction
doit être guidée par l’objectif essentiel de cet instrument, à savoir assurer la transposi-
tion en temps voulu du droit de l’Union et prévenir la répétition de ce type d’infractions.
La Commission européenne estime que cette détermination doit se fonder sur trois
critères fondamentaux, à savoir la gravité de l’infraction, la durée de celle-ci et enfin la
nécessité d’assurer l’effet dissuasif de la sanction elle-même pour éviter les récidives.
Deuxièmement, les sanctions proposées à la Cour par la Commission doivent être prévi-
sibles pour les États membres et calculées selon une méthode qui respecte tout à la fois
le principe de proportionnalité et le principe d’égalité de traitement entre les États
membres. Il importe également de disposer d’une méthode claire et uniforme, puisque
la Commission devra justifier devant la Cour la détermination du montant proposé. Troi-
sièmement, du point de vue de l’efficacité de la sanction, il est important de fixer des
montants appropriés pour assurer son caractère dissuasif. L’infliction de sanctions pure-
ment symboliques ôterait à cet instrument tout effet utile et irait à l’encontre de
l’objectif d’assurer une transposition des directives dans les délais prescrits.
Puis, la Commission européenne précise les conditions d’engagement de la procédure
de l’article 260, § 3, du Traité FUE. Cette disposition conférant à la Commission un
large pouvoir discrétionnaire analogue à celui dont elle dispose dans le cadre de
l’article 258, du Traité FUE, cette institution entend recourir, par principe, à l’article 260,
§ 3, du Traité FUE dans toutes les affaires concernant les manquements visés par cette
disposition. La Commission considère en effet que l’importance de veiller à une transpo-
sition par les États membres dans les délais prescrits existe de manière égale pour toutes
les directives législatives, sans qu’il soit a priori nécessaire de faire une distinction entre
elles. Ainsi, la Commission fera usage de l’article 260, § 3, du Traité FUE tant dans
l’hypothèse de l’absence totale de communication des mesures nationales de transposi-
tion que dans celle d’une communication partielle de ces mêmes mesures. Conformé-
ment à la jurisprudence Commission/France de juillet 2005 (CJCE, 12 juill. 2005,
Commission/France, C-304/02, EU:C:2005:444), la Commission n’exclut pas la possibi-
lité de combiner les deux sanctions financières (astreinte et somme forfaitaire) si les
circonstances le justifient. Conformément à la logique inhérente aux deux types de sanc-
tions, la Commission, dans les affaires pendantes devant la Cour de justice où elle n’a
proposé qu’une astreinte, se désistera de son recours lorsque l’État membre procède à
la communication des mesures nationales de transposition requises pour mettre fin à
l’infraction. En revanche, dans les affaires pendantes dans lesquelles elle a également
——
44. Communication de la Commission du 12 janvier 2011 – Mise en œuvre de l’article 260, paragraphe 3,
TFUE, JOUE C 12, 15 janv. 2011, p. 1.
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178 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
proposé une somme forfaitaire, elle ne se désistera pas de la procédure, du seul fait de la
communication requise. Le montant de l’astreinte journalière et/ou de la somme forfai-
taire que la Commission propose en vertu de l’article 260, § 3, du Traité FUE est calculé
selon la même méthode établie par la Commission dans sa communication de 2019
pour les sanctions applicables en cas d’inexécution d’un arrêt en constatation de
manquement prévues à l’article 260, § 2, du Traité FUE45.
Enfin, et conformément à la lettre de l’article 260, § 3, du Traité FUE qui prévoit que
l’obligation de paiement de la sanction infligée « prend effet à la date fixée par la Cour
dans son arrêt », il appartient à la Cour de justice de fixer librement, comme date de
prise d’effet, soit le jour du prononcé soit un moment postérieur à celui-ci. Néanmoins,
la Commission européenne est d’avis qu’il serait plus approprié de fixer le jour du
prononcé de l’arrêt comme date à laquelle l’obligation de payer les sanctions infligées
prend effet. Il s’ensuit notamment que l’astreinte journalière devrait courir à compter
du jour du prononcé de l’arrêt.
S’il est encore un peu trop tôt pour tirer un véritable enseignement de la pratique de
l’article 260, § 3, du Traité FUE et de ses conséquences, il n’en demeure pas moins
qu’une telle disposition incite d’ores et déjà davantage les États membres à respecter
bien plus consciencieusement que par le passé les délais de transposition des directives
fixés par le législateur de l’Union (sur ce point voy., CJUE, Ord., 16 mars 2016,
Commission/Pologne, C-545/15, EU:C:2016:228 ; CJUE, Ord., 30 mars 2017,
Commission/Luxembourg, C-489/16, EU:C:2017:295).
——
45. Voy. le présent ouvrage, p. 174.
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 179
Le recours
Le recours Le recours de la fonction
en responsabilité
en annulation publique européenne
contractuelle
TFUE, art. 263 et 264 TFUE, art. 270
TFUE, art. 272 & 340
Le recours
Le recours
en constatation
Le recours en carence en responsabilité
de manquement
TFUE, art. 265 extracontractuelle
TFUE, art. 258, 259 et 260
TFUE, art. 268 et 340
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180 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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CHAPITRE 8 – Le contentieux direct 181
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Sur l’exception d’illégalité
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Sur les recours en responsabilité
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182 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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Sur les référés
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Sur le recours en manquement
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CHAPITRE 9
Le renvoi préjudiciel
TFUE, art. 267
« La Cour de justice de l’Union européenne est compétente pour statuer, à titre préjudiciel :
a) sur l’interprétation des traités ;
b) sur la validité et l’interprétation des actes pris par les institutions, organes ou organismes de
l’Union.
Lorsqu’une telle question est soulevée devant une juridiction d’un des États membres, cette
juridiction peut, si elle estime qu’une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son juge-
ment, demander à la Cour de statuer sur cette question.
Lorsqu’une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction natio-
nale dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un recours juridictionnel de droit interne,
cette juridiction est tenue de saisir la Cour.
Si une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale
concernant une personne détenue, la Cour statue dans les plus brefs délais. »
L’application matérielle et concrète du droit de l’Union dans les États membres relève, en
règle générale, des autorités nationales. Selon la Cour de justice, l’obligation d’assurer le
plein effet du droit de l’Union dans l’ensemble des ordres juridiques internes s’impose
« à toutes les autorités des États membres, y compris, dans le cadre de leurs compé-
tences, aux autorités juridictionnelles » (CJCE, 10 avril 1984, Von Colson et Kamann,
14/83, EU:C:1984:153, point 26 ; CJCE, 18 déc. 1997, Inter-Environnement
Wallonie, C-129/96, EU:C:1997:628, point 40 ; CJUE, 19 janv. 2010, Kücükdeveci,
C-555/07, EU:C:2010:21, point 47 ; CJUE, 21 oct. 2010, Accardo e.a., C-227/09, EU:
C:2010:624, point 49). Ceci explique que les juridictions nationales sont les juridictions
de droit commun de l’Union puisqu’elles sont appelées à se prononcer « en première
ligne »1 sur les questions d’interprétation et d’application du droit de l’Union à des cas
individuels.
Le juge national étant, selon l’expression même du Tribunal, le « juge communautaire
de droit commun » (Tribunal, 10 juill. 1990, Tetra Pak/Commission, T-51/89, EU:
T:1990:41, point 42), les rédacteurs des traités de Rome ont instauré un mécanisme
permettant d’assurer l’uniformité non seulement de l’interprétation du droit de l’Union
mais également de l’appréciation de la validité des actes émanant des institutions,
organes et organismes de l’Union, permettant ainsi une application homogène et
analogue du droit de l’Union dans l’ensemble des États membres. En effet, comment
concevoir que le droit de l’Union appliqué par le juge français soit différent de celui
qu’utilise le juge croate lorsque la même norme de l’Union est soulevée dans un litige
national par un de leurs ressortissants ?
La procédure prévue à l’article 267, du Traité FUE vise donc à assurer une interprétation
et une application uniforme du droit de l’Union dans l’ensemble des ordres juridiques
des États membres grâce à une collaboration entre le juge de Luxembourg et le juge
——
1. Selon l’expression de Van Raepenbusch S., Droit institutionnel de l’Union européenne, préc., spéc.
p. 583.
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184 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
national. Lorsque ce dernier, juge de l’Union de droit commun, est confronté, dans un
litige qui lui est soumis et sur lequel il doit statuer, à un problème touchant à l’inter-
prétation d’une norme de l’Union ou à l’appréciation de la validité d’un acte de droit
dérivé, il peut (voire doit) surseoir à statuer et poser à la Cour de justice une ou plusieurs
questions – dénommées questions préjudicielles – concernant soit l’interprétation de la
norme de l’Union susceptible d’être appliquée au contentieux qui est soumise à son
jugement, soit encore l’appréciation de sa validité. Dès que la Haute juridiction s’est
prononcée sur l’interprétation de la norme ou sur l’appréciation de sa validité – cette
réponse prend la forme d’un arrêt dénommé arrêt préjudiciel en interprétation ou arrêt
préjudiciel en appréciation de validité –, la procédure juridictionnelle interne reprend et
le juge national peut alors trancher le litige au fond conformément aux réponses appor-
tées par la Cour de justice. L’intervention de la Cour de justice constitue donc un inci-
dent du litige principal.
Le renvoi préjudiciel est donc une procédure non contentieuse reposant « sur un
dialogue de juge à juge » (CJUE, 15 janv. 2013, Križan e.a., C-416/10, EU:C:2013:8,
point 66), « un instrument de coopération entre la Cour et les juridictions nationales »
(CJUE, 11 sept. 2014, Gruslin, C-88/13, EU:C:2014:2205, point 27) qui permet au
juge de Luxembourg d’assurer, conformément à l’article 19, § 1er, du Traité UE, « le
respect du droit dans l’interprétation et l’application des traités ».
Avant d’évoquer le jugement des questions préjudicielles par la Cour de justice
(Section 2), on examinera au préalable le renvoi préjudiciel par les juridictions nationales
(Section 1).
Section 1
Le renvoi préjudiciel par les juridictions
nationales
——
2. Cette formulation exclut les juridictions des pays tiers et les juridictions internationales telles que la
Cour européenne des droits de l’homme mais inclut en revanche les juridictions des États membres
ayant pour ressort un pays et territoire à statut spécifique (CJCE, 12 déc. 1990, Kaefer et Procacci,
C-100/89 et C-101/89, EU:C:1990:456, point 10 : à propos de la compétence de la Cour de justice
pour statuer, à titre préjudiciel, sur une question préjudicielle posée par le tribunal administratif
de Papeete en Polynésie française).
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CHAPITRE 9 – Le renvoi préjudiciel 185
——
3. Van Raepenbusch S., Droit institutionnel de l’Union européenne, préc., spéc. p. 594.
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186 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
——
4. Si les arbitres sont dans l’impossibilité de poser des questions préjudicielles à la Cour de justice en
raison notamment du fait que les parties n’ont aucune obligation de confier leur litige à des arbitres
et alors même qu’ils excercent en pratique une fonction similaire à celle des juges, il en est tout autre-
ment pour le juge national qui peut être amené à prêter son concours aux arbitres ou encore à
contrôler les sentences que ces derniers prononcent. Ainsi, la Cour de justice a jugé qu’un juge
national se devait d’annuler une sentence arbitrale contraire au droit de l’Union (sur ce point voy.,
CJCE, 1er juin 1999, Eco Swiss, C-126/97, EU:C:1999:269).
5. Voy. le présent ouvrage, p. 196.
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CHAPITRE 9 – Le renvoi préjudiciel 187
——
6. Rideau J., Picod F., Code des procédures juridictionnelles de l’Union européenne, 2002, Paris, Litec,
spéc. p. 304.
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188 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
« 10. [...], il découle du rapport entre les alinéas 2 et 3 de l’article 177 [TFUE, art. 267]
que les juridictions visées par l’alinéa 3 jouissent du même pouvoir d’appréciation que
toutes les autres juridictions nationales en ce qui concerne le point de savoir si une déci-
sion sur un point de droit communautaire est nécessaire pour leur permettre de rendre
leur décision. Ces juridictions ne sont, dès lors, pas tenues de renvoyer une question
d’interprétation de droit communautaire soulevée devant elles si la question n’est pas
pertinente, c’est-à-dire dans le cas où la réponse à cette question, quelle qu’elle soit,
ne pourrait avoir aucune influence sur la solution du litige.
11. Par contre, si elles constatent que le recours au droit communautaire est nécessaire
en vue d’aboutir à la solution d’un litige dont elles se trouvent saisies, l’article 177 [TFUE,
art. 267] leur impose l’obligation de saisir la Cour de justice de toute question d’inter-
prétation qui se pose.
[...]
13. [...] que si l’article 177, dernier alinéa, [TFUE, art. 267, al. 3] obligent sans aucune
restriction les juridictions nationales dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un
recours juridictionnel de droit interne à soumettre à la cour toute question d’inter-
prétation soulevée devant elles, l’autorité de l’interprétation donnée par celle-ci en
vertu de l’article 177 [TFUE, art. 267] peut cependant priver cette obligation de sa
cause et la vider ainsi de son contenu ; qu’il en est notamment ainsi quand la question
soulevée est matériellement identique à une question ayant déjà fait l’objet d’une déci-
sion à titre préjudiciel dans une espèce analogue7.
14. Le même effet, en ce qui concerne les limites de l’obligation formulée par
l’article 177 [TFUE, art. 267], alinéa 3, peut résulter d’une jurisprudence établie de la
Cour résolvant le point de droit en cause, quelle que soit la nature des procédures qui
ont donné lieu à cette jurisprudence, même à défaut d’une stricte identité des questions
en litige.
15. Il reste cependant entendu que, dans toutes ces hypothèses, les juridictions natio-
nales, y compris celles visées à l’article 3 de l’article 177 [TFUE, art. 267], conservent
l’entière liberté de saisir la Cour si elles l’estiment opportun.
16. Enfin, l’application correcte du droit communautaire peut s’imposer avec une
évidence telle qu’elle ne laisse place à aucun doute raisonnable sur la manière de
résoudre la question posée. Avant de conclure à l’existence d’une telle situation, la juri-
diction nationale doit être convaincue que la même évidence s’imposerait également
aux juridictions des autres États membres et à la Cour de justice. Ce n’est que si ces
conditions sont remplies que la juridiction nationale pourra s’abstenir de soumettre
cette question à la Cour et la résoudre sous sa propre responsabilité. [...] ».
Par conséquent, et sous réserve des exceptions résultant de la jurisprudence CILFIT
d’octobre 1982, une juridiction statuant en dernier ressort a l’obligation de saisir la
Cour de justice d’une question préjudicielle dans toutes les hypothèses où elle l’estime
utile et aucune règle nationale de nature législative ou jurisprudentielle ne saurait l’en
empêcher (CJUE, 22 juin 2010, Melki et Abdeli, C-188/10, EU:C:2010:363, point
53 ; CJUE, 5 avril 2016, PFE, C-689/13, EU:C:2016:199, point 34). La Cour de justice
a clarifié à travers sa jurisprudence cette notion de « juridiction statuant en dernier
——
7. Solution déjà retenue par la Cour de justice voy., CJCE, 27 mars 1963, Da Costa en Schaake e.a.,
28/62 à 30/62, EU:C:1963:6.
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CHAPITRE 9 – Le renvoi préjudiciel 189
ressort ». Ainsi que la Haute juridiction l’a souligné à plusieurs reprises, une juridiction
statuant en dernier ressort constitue « par définition la dernière instance devant laquelle
les particuliers peuvent faire valoir les droits que le droit de l’Union leur reconnaît. Les
juridictions statuant en dernier ressort sont chargées d’assurer à l’échelle nationale
l’interprétation uniforme des règles de droit » (en ce sens voy., CJCE, 30 sept. 2003,
Köbler, C-224/01, EU:C:2003:513, point 34 ; CJCE, 13 juin 2006, Traghetti del
Mediterraneo, C-173/03, EU:C:2006:391, point 31 ; CJUE, 15 mars 2017, Aquino,
C-3/16, EU:C:2017:209, point 34). La Cour de justice a par ailleurs précisé « qu’il appar-
tient aux seules juridictions nationales dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un
recours juridictionnel de droit interne d’apprécier, sous leur propre responsabilité et de
manière indépendante, si elles sont en présence d’un acte clair » dont la Cour de Luxem-
bourg déduit « qu’une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles
de recours juridictionnel de droit interne [...] n’est pas tenue de saisir la Cour au seul
motif qu’une juridiction nationale de rang inférieur a, dans une affaire semblable à
celle dont elle est saisie et portant sur exactement la même problématique, posé une
question préjudicielle à la Cour ni d’attendre la réponse apportée à cette question »
(CJUE, 9 sept. 2015, X., C-72/14 et C-197/14, EU:C:2015:564, points 59 et 63).
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190 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
de constater l’invalidité du même acte, si elle est soulevée devant une juridiction natio-
nale, soit également réservé à la Cour. [...]. »
La jurisprudence dégagée par la Cour à l’occasion de cet arrêt implique donc que le juge
national, quel qu’il soit, qui doute de la validité d’un acte émanant d’une institution,
d’un organe ou d’un organisme de l’Union doit opérer un renvoi préjudiciel. La Cour
de justice a rappelé dans son arrêt Gaston Schul Douane-expediteur de décembre 2005
que la règle, dégagée dans son arrêt Foto-Frost, selon laquelle les juridictions nationales
ne sont pas compétentes pour constater, elles-mêmes, l’invalidité des actes émanant des
institutions de l’Union ne peut faire l’objet d’aucun aménagement (CJCE, 6 déc. 2005,
Gaston Schul Douane-expediteur, C-461/03, EU:C:2005:742).
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CHAPITRE 9 – Le renvoi préjudiciel 191
——
8. La Cour de justice considère que ses propres arrêts peuvent faire l’objet d’une interprétation préjudi-
cielle. Pour une illustration voy., CJCE, 16 mars 1978, Bosch, 135/77, EU:C:1978:75, point 1.
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192 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
Le mécanisme de coopération instauré par l’article 267, du Traité FUE offre une grande
latitude au juge national qui est finalement maître du renvoi préjudiciel même si la Cour
de justice a posé certaines limites à cette liberté.
Le juge national est seul compétent pour décider d’un renvoi préjudiciel. La Cour estime
en effet qu’« il appartient à la juridiction nationale, en vertu de la séparation de compé-
tences sur laquelle est basé l’article 177 [TFUE, art. 267] du traité, d’apprécier dans
quelle mesure l’interprétation du droit communautaire lui est nécessaire pour son juge-
ment » (CJCE, 13 mars 1979, Peureux, 86/78, EU:C:1979:64, point 6). De fait, les
parties au litige ne peuvent pas adresser directement à la Cour de justice une telle
demande, ni en changer la teneur (sur ce point voy. not., CJUE, 21 déc. 2011, Danske
Svineproducenter, C-316/10, EU:C:2011:86, point 32), ni même obliger le juge
national à suspendre la procédure et à procéder à un renvoi préjudiciel. Le juge national
peut saisir la Cour d’office (CJCE, 6 oct. 1982, CILFIT e.a., 283/81, EU:C:1982:335,
point 9 ; CJUE, 15 janv. 2013, Križan e.a., C-416/10, EU:C:2013:8, point 65) ou à la
demande des parties qui ne peuvent toutefois pas l’y contraindre.
Le juge national peut décider de recourir au mécanisme du renvoi préjudiciel à tous les
stades de la procédure contentieuse nationale. La Cour estime en effet que « le choix,
par le juge national, du moment où il introduit un recours en vertu de l’article 177
[TFUE, art. 267] obéit à des considérations d’économie et d’utilité procédurales dont
l’appréciation appartient à ce juge » (CJCE, 10 mars 1981, Irish Creamery Milk
Suppliers Association e.a., 36/80 et 71/80, EU:C:1981:62, point 8). Il appartient
également au juge national de déterminer le contenu, les termes et l’ordre des questions
——
9. Rideau J., Droit institutionnel de l’Union européenne, préc., spéc. point 665.
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CHAPITRE 9 – Le renvoi préjudiciel 193
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194 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
Section 2
Le jugement des questions préjudicielles par
la Cour de justice
——
10. Décision 2008/79/CE, Euratom du Conseil du 20 décembre 2007 portant modification du protocole
sur le statut de la Cour de justice, JOUE L 24, 29 janv. 2008, p. 42.
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CHAPITRE 9 – Le renvoi préjudiciel 195
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196 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
la suite d’un arrêt rendu par la Cour de justice qui porte sur une question identique ou
similaire, soit en raison d’un désistement ou d’un accord amiable des parties au litige
principal, soit encore en raison d’un changement du cadre juridique de référence (sur
ce dernier point voy., CJUE, 9 déc. 2010, Fluxys, C-241/09, EU:C:2010:753). En
matière d’appréciation de validité, la Cour considère qu’elle n’a pas lieu de répondre à
une question portant sur la validité d’un acte émanant d’une institution lorsque cette
dernière a procédé à son annulation (CJCE, 5 oct. 2000, Imperial Tobacco e.a., C-74/
99, EU:C:2000:547).
La Cour ne peut apprécier dans le cadre d’un renvoi préjudiciel la compatibilité ou la
conformité du droit national avec le droit de l’Union (CJCE, Ord., 28 juin 2000,
Laguillaumie, C-116/00, EU:C:2000:350). Elle n’est pas non plus compétente pour
appliquer le droit de l’Union à une espèce donnée (elle doit dire le droit et non en faire
application) (CJCE, 10 mai 2001, Veedfald, C-203/99, EU:C:2001:258) ni même pour
interpréter le droit national et examiner son application au cas d’espèce (pour une
illustration voy., CJUE, 13 févr. 2014, Airport Shuttle Express e.a., C-162/12 et C-
163/12, EU:C:2014:74, point 29 ; CJUE, 13 févr. 2014, Crono Service e.a., C-419/12
et C-420/12, EU:C:2014:81, point 27). Enfin, il n’appartient pas à la Cour de justice
mais au juge national de se prononcer sur les dépens de la procédure préjudicielle (RP/
CJ, art. 102).
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CHAPITRE 9 – Le renvoi préjudiciel 197
renvoi à une telle procédure (RP/CJ, art. 107, § 3). La décision de soumettre un renvoi à
la procédure d’urgence est prise par la chambre désignée sur proposition du juge
rapporteur, l’avocat général entendu dont la composition est déterminée conformément
à l’article 28, § 2, du règlement de procédure de la Cour de justice (RP/CJ, art. 108,
§ 1er). Si le renvoi préjudiciel n’est pas soumis à la procédure d’urgence, la procédure se
poursuit alors conformément aux dispositions de l’article 23 du Statut (RP/CJ, art. 109,
§ 6). En revanche, si le renvoi préjudiciel est soumis à la procédure d’urgence, la Cour
fixe le délai pendant lequel les parties au litige et les autres intéressés visés à l’article 23
du Statut peuvent déposer des mémoires ou observations écrites. La Cour peut préciser
les points de droit sur lesquels ces mémoires ou observations écrites doivent porter et
peut fixer la longueur maximale de ces écrits (RP/CJ, art. 109, § 2). La date de l’audience
ainsi que les mémoires ou observations écrites signifiés sont alors communiqués aux
parties et intéressés (RP/CJ, art. 110, § 2 et 3). Dans les cas d’extrême urgence, la Cour
peut décider d’omettre la phase écrite de la procédure et se limiter à la phase orale (RP/
CJ, art. 111). La chambre à cinq juges désignée statue, l’avocat général entendu (RP/CJ,
art. 112) mais peut également décider de siéger à trois juges (RP/CJ, art. 113, § 1er) ou
encore de renvoyer l’affaire devant la Cour aux fins de son attribution à une formation
de jugement plus importante. La procédure d’urgence se poursuit devant la nouvelle
formation, le cas échéant après réouverture de la procédure orale (RP/CJ, art. 113, § 2)
(pour des ex. récents d’application de la procédure préjudicielle d’urgence voy., CJUE,
Ord., 10 avril 2018, CV, C-85/18 PPU, EU:C:2018:220 ; CJUE, Ord., 12 févr. 2019,
RH, C-8/19 PPU, EU:C:2019:110).
Depuis l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, cette procédure d’urgence s’applique
également lorsqu’une question préjudicielle est soulevée dans une affaire pendante
devant une juridiction nationale concernant une personne détenue. En effet,
l’article 267, alinéa 4, du Traité FUE, tel qu’introduit par le Traité de Lisbonne, prévoit
que, dans une telle hypothèse, « la Cour statue dans les plus brefs délais »11.
——
11. Pour une première évaluation de la procédure préjudicielle d’urgence voy., Cour de justice, « Rapport
sur la mise en œuvre de la procédure préjudicielle d’urgence par la Cour de justice », janvier 2012,
disponible sur le site : https://curia.europa.eu/jcms/upload/docs/application/pdf/2012-07/fr_rapport.pdf
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198 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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CHAPITRE 9 – Le renvoi préjudiciel 199
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200 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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CHAPITRE 9 – Le renvoi préjudiciel 201
Le renvoi préjudiciel
Litige
Personne morale / Personne physique
Juge national
(juge de droit commun de l’Union)
Cour de justice
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202 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
BIBLIOGRAPHIE
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Bibliographie
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204 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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SCHWARZE J., La naissance d’un ordre constitutionnel européen, 2001, Bruylant.
SCHWARZE J., Droit administratif européen, 2e éd., 2008, Bruylant.
SIMON D., Le système juridique communautaire, 3e éd., 2001, PUF.
TERPAN F., Droit et politique de l’Union européenne, 3e éd., 2018, Larcier.
VANDERSANDEN G., BARAV A., Contentieux communautaire, 1977, Bruylant.
VAN RAEPENBUSCH S., Droit institutionnel de l’Union européenne, 2e éd., 2016, Larcier.
WATHELET M., WILDEMEERSCH J., Contentieux européen, 2e éd., 2014, Larcier.
• Recueils de textes
BOUTAYEB C. (dir.), Les grands arrêts du droit de l’Union européenne. Droit institutionnel et matériel de
l’Union européenne, 1re éd., 2014, LGDJ-Lextenso.
DUBOUIS L., GUEYDAN C., Les grands textes du droit de l’Union européenne, 8e éd., 2010, Dalloz.
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BIBLIOGRAPHIE 205
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Table
de jurisprudence
(les chiffres en caractères gras renvoient aux numéros des pages où sont mentionnées les décisions citées)
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208 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
1960
10.5.1960, Allemagne/Haute Autorité CECA, 19/58, EU:C:1960:19 : 148
15.7.1960, Chambre syndicale de la sidérurgie de l’est de la France e.a./Haute Autorité CECA, 24/58
et 34/58, EU:C:1960:32 : 157
15.7.1960, Pays-Bas/Haute Autorité CECA, 25/59, EU:C:1960:34 : 166
15.7.1960, Comptoirs de vente du charbon de la Ruhr e.a./Haute Autorité CECA, 36/59 à 38/59 et
40/59, EU:C:1960:36 : 64
16.12.1960, Humblet, 6/60, EU:C:1960:48 : 171
1961
22.3.1961, SNUPAT/Haute Autorité CECA, 42/59 et 49/59, EU:C:1961:5 : 63
13.7.1961, Meroni e.a./Haute Autorité CECA, 14, 16, 17, 20, 24, 26 et 27/60 et 1/61, EU:
C:1961:16 : 163
19.12.1961, Commission/Italie, 7/61, EU:C:1961:31 : 170
1962
14.12.1962, Confédération nationale des producteurs de fruits et légumes e.a./Conseil, 16/62 et 17/
62, EU:C:1962:47 : 33, 40
14.12.1962, Fédération nationale de la boucherie en gros et du commerce en gros des viandes e.a./
Conseil, 19/62 à 22/62, EU:C:1962:48 : 40
14.12.1962, Wöhrmann/Commission, 31/62 et 33/62, EU:C:1962:49 : 153, 154
1963
5.2.1963, Van Gend en Loos, 26/62, EU:C:1963:1 : 82,87,89
27.3.1963, Da Costa en Schaake e.a., 28/62 à 30/62, EU:C:1963:6 : 188
15.7.1963, Plaumann/Commission, 25/62, EU:C:1963:17 : 147
5.12.1963, Usines Emile Henricot e.a./Haute Autorité CECA, 23/63, 24/63 et 52/63, EU:C:1963:52 :
41
1964
18.2.1964, Internationale Crediet – en Handelsvereniging « Rotterdam », 73/63 et 74/63, EU:
C:1964:8 : 30
19.3.1964, Unger, 75/63, EU:C:1964:19 : 61
9.6.1964, Bernusset/Commission, 94/63 et 96/63, EU:C:1964:41 : 44
15.7.1964, Costa/E.N.E.L., 6/64, EU:C:1964:66 : 87, 99
13.11.1964, Commission/Luxembourg et Belgique, 90/63 et 91/63, EU:C:1964:80 : 63
17.12.1964, Boursin/Haute Autorité CECA, 102/63, EU:C:1964:88 : 31
1965
21.1.1965, Merlini/Haute Autorité CECA, 108/63, EU:C:1965:4 : 140
2.6.1965, FERAM e.a./Haute Autorité CECA, 9 et 25/64, EU:C:1965:52 : 162
22.6.1965, Ord., San Michele/Haute Autorité CECA, 9/65, EU:C:1965:63 : 102
13.7.1965, Lemmerz-Werke/Haute Autorité CECA, 111/63, EU:C:1964:82 : 32
1966
8.2.1966, Acciairie e ferriere Pugliesi/Haute Autorité CECA, 8/65, EU:C:1966:5 : 29
16.6.1966, Lütticke, 57/65, EU:C:1966:34 : 84, 87
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TABLE DE JURISPRUDENCE 209
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210 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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TABLE DE JURISPRUDENCE 211
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212 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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TABLE DE JURISPRUDENCE 213
1984
22.2.1984, Kloppenburg, 70/83, EU:C:1984:71 : 36
10.4.1984, Von Colson et Kamann, 14/83, EU:C:1984:153 : 37, 183
10.7.1984, Kirk, 63/83, EU:C:1984:255 : 67
12.7.1984, Prodest, 237/83, EU:C:1984:277 : 62
1985
22.5.1985, Parlement/Conseil, 13/83, EU:C:1985:220 : 156
23.5.1985, Commission/Allemagne, 29/84, EU:C:1985:229 : 38
9.7.1985, Bozzetti, 179/84, EU:C:1985:306 : 121
3.10.1985, Commission/Tordeur e.a., 232/84, EU:C:1985:392 : 158
6.11.1985, Commission/Italie, 131/84, EU:C:1985:447 : 172
26.11.1985, Commission/CO.DE.MI., 318/81, EU:C:1985:467 : 164
1986
15.1.1986, Hurd, 44/84, EU:C:1986:2 : 55, 190
15.1.1986, Commission/Belgique, 52/84, EU:C:1986:3 : 168
26.2.1986, Marshall, 152/84, EU:C:1986:84 : 84, 93
5.3.1986, Ord., Wünsche, 69/85, EU:C:1986:104 : 192, 198
5.3.1986, Ord., Greis Unterweger, 318/85, EU:C:1986:106 : 186
23.4.1986, Parti écologiste « Les Verts »/Parlement, 294/83, EU:C:1986:166 : 22, 148
6.5.1986, Nuovo Campsider/Commission, 25/85, EU:C:1986:195 : 157
15.5.1986, Johnston, 222/84, EU:C:1986:206 : 65, 67, 122
3.7.1986, Conseil/Parlement, 34/86, EU:C:1986:291 : 152
23.9.1986, AKZO Chemie/Commission, 5/85, EU:C:1986:328 : 149
2.12.1986, Commission/Belgique, 239/85, EU:C:1986:457 : 38
4.12.1986, Federatie Nederlandse Vakbeweging, 71/85, EU:C:1986:465 : 84
1987
14.1.1987, Zuckerfabrik Bedburg e.a./Conseil et Commission, 281/84, EU:C:1987:3 : 163
4.2.1987, Bouteiller, 324/85, EU:C:1987:59 : 45
10.3.1987, Commission/Italie, 199/85, EU:C:1987:115 : 167
11.6.1987, Pretore di Salò/X., 14/86, EU:C:1987:275 : 92
12.7.1987, Commission/Conseil, 383/87, EU:C:1988:388 : 155
17.9.1987, Commission/Pays-Bas, 291/84, EU:C:1987:366 : 39
30.9.1987, Demirel, 12/86, EU:C:1987:400 : 51, 96
6.10.1987, Demouche e.a., 152/83, EU:C:1987:421 : 195
15.10.1987, Unectef/Heylens e.a., 222/86, EU:C:1987:442 : 123
22.10.1987, Foto-Frost, 314/85, EU:C:1987:452 : 189
29.10.1987, Zaera, 126/86, EU:C:1987:395 : 88
10.12.1987, Del Plato e.a./Commission, 181/86 à 184/86, EU:C:1987:543 : 154
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214 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
1988
2.2.1988, Commission/Pays-Bas, 213/85, EU:C:1988:39 : 166
2.2.1988, Barra, 309/85, EU:C:1988:42 : 126
2.2.1988, Blaizot, 24/86, EU:C:1988:43 : 65
23.2.1988, Royaume-Uni/Conseil, 68/86, EU:C:1988:85 : 44, 47, 149
24.2.1988, Commission/Belgique, 260/86, EU:C:1988:91 : 101
24.3.1988, Commission/Italie, 104/86, EU:C:1988:171 : 103
28.4.1988, LAISA e.a./Conseil, 31/86 et 35/86, EU:C:1988:211 : 19
29.6.1988, Deville, 240/87, EU:C:1988:349 : 125
30.6.1988, CIDA/Conseil, 297/86, EU:C:1988:351 : 45
12.7.1988, Parlement/Conseil, 377/87, EU:C:1988:387 : 155, 157
22.9.1988, Commission/Irlande, 45/87, EU:C:1988:435 : 167
27.9.1988, Ahlström Osakeyhtiö e.a./Commission, 89, 104, 114, 116, 117 et 125 à 129/85, EU:
C:1988:447 : 64
15.12.1988, Irish Cement Ltd/Commission, 166/86 et 220/86, EU:C:1988:549 : 157
1989
14.2.1989, Star Fruit/Commission, 247/87, EU:C:1989:58 : 156
18.5.1989, Commission/Allemagne, 249/86, EU:C:1989:204 : 67
30.5.1989, Roquette frères/Commission, 20/88, EU:C:1989:221 : 159
22.6.1989, Fediol/Commission, 70/87, EU:C:1989:254 : 97
22.6.1989, Costanzo/Comune di Milano, 103/88, EU:C:1989:256 : 91, 104
13.7.1989, Base e.a./Comune di Cinisello Balsamo, 380/87, EU:C:1989:318 : 102
13.7.1989, Wachauf, 5/88, EU:C:1989:321 : 66, 102
21.9.1989, Hoechst/Commission, 46/87 et 227/88, EU:C:1989:337 : 67
14.10.1989, Grèce/Commission, 30/88, EU:C:1989:422 : 52
21.11.1989, Usines coopératives de déshydratation du Vexin e.a./Commission, C-244/88, EU:
C:1989:588 : 33
13.12.1989, Grimaldi, C-322/88, EU:C:1989:646 : 43, 102, 191
1990
27.3.1990, Italie/Commission, C-10//88, EU:C:1990:135 : 63
19.6.1990, Factortame Ltd e.a., C-213/89, EU:C:1990:257 : 103, 123
12.7.1990, Foster e.a., C-188/89, EU:C:1990:313 : 91
20.9.1990, Sevince, C-192/89, EU:C:1990:322 : 52, 191
9.10.1990, France/Commission, C-366/88, EU:C:1990:348 : 149
11.10.1990, FUNOC/Commission, C-200/89, EU:C:1990:356 : 45
13.11.1990, Fedesa e.a., C-331/88, EU:C:1990:391 : 31
12.12.1990, Kaefer et Procacci, C-100/89 et C-101/89, EU:C:1990:456 : 184
1991
24.1.1991, Alsthom Atlantique, C-339/89, EU:C:1991:28 : 88
31.1.1991, Kziber, C-18/90, EU:C:1991:36 : 97
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TABLE DE JURISPRUDENCE 215
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216 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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TABLE DE JURISPRUDENCE 217
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218 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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TABLE DE JURISPRUDENCE 219
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220 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
2007
11.1.2007, ITC, C-208/05, EU:C:2007:16 : 104
18.1.2007, Brzezinski, C-313/05, EU:C:2007:33 : 200
25.1.2007, Robins e.a., C-278/05, EU:C:2007:56 : 130
17.4.2007, AGM-COS.MET, C-470/03, EU:C:2007:213 : 129
24.4.2007, Commission/Pays-Bas, C-523/04, EU:C:2007:244 : 57
7.6.2007, Commission/Grèce, C-178/05, EU:C:2007:317 : 172
7.6.2007, Wunenburger/Commission, C 362/05 P, EU:C:2007:322 : 157
26.6.2007, Ordre des barreaux francophone et germanophone e.a., C-305/05, EU:C:2007:383 : 65
18.7.2007, Commission/Allemagne, C-503/04, EU:C:2007:432 : 172
20.9.2007, Tum et Dari, C-16/05, EU:C:2007:530 : 97
18.10.2007, Commission/Danemark, C-19/05, EU:C:2007:606 : 168
18.12.2007, Laval un Partneri, C-341/05, EU:C:2007:809 : 66
2008
12.2.2008, Kempter, C-2/06, EU:C:2008:78 : 199
13.3.2008, Commission/Grèce, C-81/07, EU:C:2008:172 : 39
10.4.2008, Marks & Spencer, C-309/06, EU:C:2008:211 : 126
15.4.2008, Impact, C-268/06, EU:C:2008:223 : 91
8.5.2008, Danske Svineproducenter, C-491/06, EU:C:2008:263 : 39
3.6.2008, Intertanko e.a., C 308/06, EU:C:2008:312 : 56
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18.12.2008, Sopropé, C-349/07, EU:C:2008:746 : 70
22.12.2008, Commission/Espagne, C-189/07, EU:C:2008:760 : 167, 172
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2009
12.2.2009, Cobelfret, C-138/07, EU:C:2009:82 : 30, 90
12.2.2009, Commission/Pologne, C-475/07, EU:C:2009:86 : 39, 172
19.2.2009, Soyal et Savatli, C-228/06, EU:C:2009:101 : 52
3.3.2009, Commission/Autriche, C-205/06, EU:C:2009:118 : 57
3.3.2009, Commission/Suède, C-249/06, EU:C:2009:119 : 57
10.3.2009, Hartlauer, C-169/07, EU:C:2009:141 : 195
24.3.2009, Danske Slagterier, C-445/06, EU:C:2009:178 : 128, 131, 169
2.4.2009, Elshani, C-459/07, EU:C:2009:224 : 195
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TABLE DE JURISPRUDENCE 221
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222 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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TABLE DE JURISPRUDENCE 223
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224 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
10.4.2014, Emerging Markets Series of DFA Investment Trust Company, C-190/12, EU:C:2014:249 :
200
6.5.2014, Commission/Parlement et Conseil, C-43/12, EU:C:2014:298 : 152
8.5.2014, Pelckmans Turnhout, C-483/12, EU:C:2014:304 : 70
15.5.2014, Almos Agrárkülkereskedelmi, C-337/13, EU:C:2014:328 : 74, 90, 190
12.6.2014, Ascendi Beiras Litoral e Alta, Auto Estradas das Beiras Litoral e Alta, C-377/13, EU:
C:2014:1754 : 185
10.7.2014, Ogieriakhi, C-244/13, EU:C:2014:2068 : 130
3.9.2014, Commission/Espagne, C-127/12, EU:C:2014:2130 : 171
4.9.2014, Commission/Allemagne, C-211/13, EU:C:2014:2148 : 169
11.9.2014, Gruslin, C-88/13, EU:C:2014:2205 : 184
11.9.2014, A., C-112/13, EU:C:2014:2195 : 71
9.10.2014, TDC, C-222/13, EU:C:2014:2265 : 186
15.10.2014, Nicula, C-331/13, EU:C:2014:2285 : 125, 126
16.10.2014, Commission/Allemagne, C-100/13, EU:C:2014:2293 : 171
18.12.2014, Projet d’accord international – Adhésion de l’Union européenne à la convention euro-
péenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales – Compatibilité dudit
projet avec les traités UE et FUE, avis 2/13, EU:C:2014:2454 : 72, 73
18.12.2014, Schoenimport « Italmoda » Mariano Previti e.a., C 131/13, C 163/13 et C 164/13, EU:
C:2014:2455 : 92
18.12.2014, FOA, C-354/13, EU:C:2014:2463 : 62
18.12.2014, SETAR, C-551/13, EU:C:2014:2467 : 438
2015
13.1.2015, Conseil e.a./Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht, C-
401/12 P à C-403/12 P, EU:C:2015:4 : 97
5.2.2015, Nisttahuz Poclava, C-117/14, EU:C:2015:60 : 195
10.2.2015, Ord., Băbășan, C-305/14, EU:C:2015:97 : 70
24.2.2015, Grünewald, C-559/13, EU:C:2015:109 : 298
26.2.2015, Federconsorzi et Liquidazione giudiziale dei beni ceduti ai creditori della Federazione, C-
104/14, EU:C:2015:125 : 38
14.4.2015, Manea, C-76/14, EU:C:2015:216 : 199
16.4.2015, Parlement/Conseil, C-317/13 et C-679/13, EU:C:2015:2232014 : 29, 149
16.4.2015, Parlement/Conseil, C-540/13, EU:C:2015:224 : 149
23.4.2015, Ord., Commission/Vanbreda Risk & Benefits, C-35/15 P(R), EU:C:2015:275 : 140
28.4.2015, Commission/Conseil C-28/12, EU:C:2015:28 : 80, 149
5.5.2015, Espagne/Parlement et Conseil, C-146/13, EU:C:2015:298 : 150
21.5.2015, Verder LabTec, C-657/13, EU:C:2015:331 : 195
4.6.2015, Andechser Molkerei Scheitz/Commission, C 682/13 P, EU:C:2015:356 : 156
11.6.2015, Commission/Pologne, C-29/14, EU:C:2015:379 : 38
16.6.2015, Gauweiler e.a., C-62/14, EU:C:2015:400 : 186
16.7.2015, Commission/Rusal Armesal, C-21/14 P, EU:C:2015:494 : 97
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TABLE DE JURISPRUDENCE 225
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226 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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TABLE DE JURISPRUDENCE 227
1999
20.5.1999, H. & R. Ecroyd/Commission, T-220/97, EU:T:1999:106 : 199
8.7.1999, Ord., Area Cova e.a./Conseil, T-194/95, EU:T:1999:141 : 154
2000
27.1.2000, BEUC/Commission, T-256/97, EU:T:1999:15 : 52
24.10.2000, Fresh Marine/Commission, T-178/98, EU:T:2000:240 : 163
2001
20.3.2001, Cordis/Commission, T-18/99, EU:T:2001:95 : 97
7.6.2001, Agrana Zucker et Stärke, T-187/99, EU:T:2001:149 : 20
27.6.2001, Andres de Dios e.a./Conseil, T-166/99, EU:T:2001:171 : 150
2002
17.1.2002, Ord., Stauner e.a./Parlement et Commission, T-236/00, EU:T:2002:8 : 22, 48
7.3.2002, Intervet International/Commission, T 212/99, EU:T:2002:63 : 157
21.3.2002, Ord., Laboratoire Monique Rémy/Commission, T-218/01, EU:T:2002:86 : 151
26.11.2002, Artegodan e.a./Commission, T-74/00, T-76/00, T-83/00, T-84/00, T-85/00, T-132/00, T-
137/00 et T-141/00, EU:T:2002:283 : 62
2003
10.4.2003, Le Pen/Parlement, T-353/00, EU:T:2003:112 : 144
16.10.2003, Co-Frutta/Commission, T-47/01, EU:T:2003:272 : 150
16.11.2003, Masdar (UK)/Commission, T-333/03, EU:T:2006:348 : 165
17.12.2003, Ord., Krikorian e.a./Parlement e.a., T-346/03, EU:T:2003:348 : 160
2004
16.1.2004, Ord., Arizona Chemical e.a./Commission, T-369/03 R, EU:T:2005:458 : 139
23.11.2004, Cantina sociale di Dolianova e.a./Commission, T 166/98, EU:T:2004:337 : 159
2006
4.10.2006, Tillack/Commission, T-193/04, EU:T:2006:292 : 66
13.12.2006, Abad Pérez e.a./Conseil et Commission, T-304/01, EU:T:2006:389 : 163
2007
15.11.2007, Hongrie/Commission, T-310/06, EU:T:2007:343 : 75
2008
17.6.2008, FMC Chemical/EFSA, T-312/06, EU:T:2007:67 : 144
9.9.2008, MyTravel/Commission, T-212/03, EU:T:2008:315 : 162
24.9.2008, M./Médiateur, T-412/05, EU:T:2008:397 : 162
8.10.2008, Sogelma/AER, T-411/06, EU:T:2008:419 : 145
3.11.2008, Ord., Srinivasan/Médiateur, T-196/08, EU:T:2008:470 : 144, 152
2009
28.1.2009, Centro Studi Manieri/Conseil, T-125/06, EU:T:2009:19 : 151
9.6.2009, NDSHT/Commission, T-152/06, EU:T:2009:181 : 144
3.9.2009, Cheminova A/S e.a./Commission, T-326/07, EU:T:2009:299 : 63
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228 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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TABLE DE JURISPRUDENCE 229
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230 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
22.1.1982, Ass., no 11029-11050, Conseil régional de Paris de l’ordre des experts comptables et
comptables agréés e.a., FR:CEASS:1982:11029.19820122 : 108
28.9.1984, no 28467, Confédération nationale des sociétés de protection des animaux de France et
des pays d’expression française e.a., FR:CESSR:1984:28467.19840928 : 94
7.12.1984, no 41971-41972, Fédération française des sociétés de protection de la nature e.a., FR:
CESSR:1984:41971.19841207 : 95
3.2.1989, Ass., no 74052, Compagnie Alitalia, FR:CEASS:1989:74052.19890203 : 95
20.10.1989, Ass., no 108243, Nicolo, FR:CEASS:1989:108243.19891020 : 108
22.12.1989, Ass., no 86113, Cercle militaire mixte de la caserne Mortier, FR:
CESJS:1989:86113.19891222 : 95
24.9.1990, no 58657, Boisdet, FR:CESSR:1990:58657.19900924 : 109
28.2.1992, no 56776-56777, SA Rothmans International France et SA Philip Morris France, FR:
CEASS:1992:56776.19920228 : 95, 109
28.2.1992, Ass., no 87753, Société Arizona Tobacco Products et SA Philipp Morris France, FR:
CEASS:1992:87753.19920228 : 95
23.6.1995, Sect., no 149226-155083-162001, SA Lilly France, FR:CESJS:1995:149226.19950623 : 39
3.7.1996, Ass., no 169219, M. Koné, FR:CEASS:1996:169219.19960703 : 113
6.1.1997, Sect., no 163524, Société Euralair international, FR:CESJS:1997:163524.19970106 : 105
6.2.1998, Ass., no 138777-147424 e.a., Tête et Association de sauvegarde de l’Ouest lyonnais, FR:
CEASS:1998:138777.19980206 : 95
30.10.1998, Ass., no 200286-200287, Sarran et Levacher e.a., FR:CEASS:1998:200286.19981030 :
113
11.7.2001, Ass., no 219494-221021-221274-221275-221421, Fédération nationale des syndicats
d’exploitants agricoles e.a., FR:CEASS:2001:219494.20010711 : 75
3.12.2001, no 226514, Syndicat national de l’industrie pharmaceutique e.a., FR:CESSR:2001:
226514.20011203 : 75, 109, 114
10.1.2002, no 219138, Région Guadeloupe, FR:CESSR:2001:219138.20010110 : 109
20.11.2002, no 229017, Société Golden-Harvest-Zelder, FR:CESSR:2002:229017.20021120 : 39
5.1.2005, no 257341-257534, Mlle Deprez et Baillard, FR:CESSR:2005:257341.20050105 : 108
3.6.2005, no 281001, Olziibat, FR:CEORD:2005:281001.20050603 : 114
28.4.2006, no 242727, 243 359, 243385 et 243703, Dellas e.a., FR:CESSR:2006:242727.20060428 :
105
27.7.2006, no 281629, Association Avenir de la langue française, FR:CESSR:2006:281629.
20060727 : 114
8.2.2007, Ass., no 287110, Sté ARCELOR Atlantique et Lorraine e.a., FR:CEASS:2007:287110.
20070208 : 37, 108, 114
30.10.2009, Ass., no 298348, Mme Perreux, FR:CEASS:2009:298348.20091030 : 37, 95
21.3.2011, no 345978-346612, M. Jin et M. Thiero, FR:CESSR:2011:345978.20110321 : 95
Cour de cassation
22.10.1970, Ch. Crim., Société Les fils d’Henri Ramel : D. 1971, p. 221 : 105
24.5.1975, Ch. mixte, Administration des douanes/Société Cafés Jacques Vabre et SARL J. Weigel et
Cie : D. 1975, p. 497 : 107
1er.10.1979, Ch. Crim., Rosi di Montalera : Bulletin des arrêts de la Cour de cassation – chambre
criminelle, no 262, p. 705 : 107
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TABLE DE JURISPRUDENCE 231
5.5.1987, Ch. Civile, SA des marchés et usines Auchan/Rudin e.a. : Bulletin des arrêts de la Cour de
cassation – chambres civiles, 4e Partie, no 109, p. 84 : 108
3.6.1988, Ch. Crim., Klaus Barbie : Bulletin des arrêts de la Cour de cassation – chambre criminelle,
no 246, p. 637 : 107
2.6.2000, ass. plén., Pourvoi no 99-60.274, P. Fraisse : Bull. ass. plén., no 4/2000, p. 7 : 114
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Index
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234 MÉMENTOS – DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
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INDEX 235
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