Eczémas

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Eczémas

Dr M. AZOUAOU, service de Dermatologie, CHU Mustapha - Université d’Alger

Généralités :
Dermatoses inflammatoires très fréquentes et prurigineuses.
Cliniquement on observe :
- Au début, il existe un érythème, parfois œdémateux.
- Puis surviennent des vésicules.
- Les vésicules se rompent en laissant place à des érosions et un
suintement.
- L’asséchement des sérosités va constituer des croutes.
- Plus tard, survient la desquamation (et en cas de chronicité, une
lichénification).
Histologiquement, c’est une dermatose inflammatoire, avec :
• Dans l’épiderme :
Exocytose : infiltrat de cellules mononucléées entre les
kératinocytes.
Spongiose : oedème dissociant les kératinocytes et aboutissant à la
formation de vésicules intraépidermiques.
• Dans le derme : œdème, infiltrat lymphocytaire.
En pratique, la biopsie cutanée est inutile au diagnostic.

Eczéma de contact
Définition :
Dermatose très fréquente.
L’eczéma de contact est dû due à une sensibilisation percutanée à des
molécules non tolérées ou allergènes, qui sont de petites molécules (haptènes)
présentes dans notre environnement.
Les eczémas de contact de cause professionnelle sont parmi les plus fréquentes
des maladies professionnelles.
Physiopathologie :

L’eczéma de contact est dû à une réaction d’hypersensibilité retardée à


médiation cellulaire,
déclenchée par le contact de la peau avec une substance exogène.
L’eczéma de contact évolue en deux phases : une phase de sensibilisation et
une phase de révélation.

Clinique :
Le diagnostic d’eczéma est clinique.
Les lésions sont très prurigineuses (+++).
L’eczéma dans sa forme aigue évolue en quatre phases successives, souvent
intriquées :
• phase érythémateuse : placard érythémateux ;
• phase vésiculeuse : vésicules remplies de liquide clair, celles-ci débordent
souvent la zone d’érythème donnant à la périphérie de l’éruption un aspect
mal limité à contours émiettés ;
• phase suintante : rupture des vésicules, spontanément ou après grattage ;
• phase croûteuse ou desquamative suivie d’une guérison sans cicatrice.

Formes cliniques :
- Eczéma chronique : plaques érythémato-squameuses.
- Eczéma lichénifié : plaques érythémateuses, épaissies, quadrillées.
- Eczéma infecté : écoulement purulent.

Diagnostic différentiel :
➢ Dermatite d’irritation :
Elle est fréquente sur les mains.
Elle est secondaire à des agressions physiques ou chimiques directes, qui ne
nécessitent pas l’intervention de mécanismes immunologiques spécifiques d’un
allergène.
➢ Dermatite (ou eczéma) atopique : Cf infra.
Diagnostic étiologique :

La recherche de l’allergène responsable est indispensable.


Elle repose sur :
• l’interrogatoire : faire préciser les activités ayant pu conduire à un contact
avec un allergène particulier 24 heures à quelques jours avant le début des
lésions : profession, jardinage, bricolage, menuiserie, peinture, application d’un
cosmétique ou d’un parfum. . .
• l’examen clinique : certaines localisations ont une valeur d’orientation.
• les tests épicutanés (ou patch tests) : Ils sont indispensables pour obtenir un
diagnostic de certitude de l’allergène en cause, dont l’éviction est primordiale.
Différents allergènes sont appliqués sous occlusion sur le dos pendant 48
heures. La lecture est faite à 48 heures.
On réalise habituellement la batterie standard européenne, qui comprend
les 27 substances les plus fréquemment en cause ou des tests avec les produits
utilisés par les malades.
➢ Les allergènes les plus fréquents sont les métaux, en particulier le nickel :
bijoux de fantaisie (boucles d’oreille +++) ou accessoires (montre,
boucle de ceinture, boutons de jeans).
➢ Allergènes professionnels : sels de chrome (ciment), cobalt (peinture,
émail), caoutchouc (gants, pneus), résines époxy (colle, vernis, peinture),
formaldéhyde (colle, textile).
➢ Médicaments topiques : néomycine, antiseptiques, sparadrap
(colophane), topiques antiprurigineux, baume du Pérou, AINS,
dermocorticoïdes…
➢ Cosmétiques : parfums, les conservateurs, les excipients, le vernis à
ongles, les déodorants, les shampooings, les laques, le baume du Pérou
(rouge à lèvres, crèmes), le paraphénylènediamine (teintures capillaires),
les lingettes. . .
➢ Produits vestimentaires : textiles ; cuir, colle et caoutchouc des
chaussures. . .
Traitement :

➢ Traitement symptomatique :
Il repose sur l’application de dermocorticoïdes de niveau d’activité forte à très
forte pendant 1 à 2 semaines.
Une corticothérapie générale est rarement utile.
Les antihistaminiques non sédatifs sont inutiles, les sédatifs peuvent aider à
calmer le prurit.
En cas d’impétiginisation, une antibiothérapie générale active sur les Gram +, il
faut éviter les antiseptiques et antibiotiques locaux.
➢ Éviction de l’allergène :
L’ubiquité de certains allergènes rend leur éviction difficile et explique la
chronicité de certains eczémas de contact.
Lorsque l’éviction de l’allergène est impossible, une protection vestimentaire
peut être nécessaire pour éviter le contact (gants, manches longues,
chaussures. . .).
Les eczémas de cause professionnelle justifient un arrêt de travail, la réalisation
de tests épicutanés, et peuvent conduire à une déclaration en maladie
professionnelle indemnisable.

Dermatite (ou eczéma) atopique

Définition :
La DA est un des composants de la « maladie atopique » avec la conjonctivite
allergique, la rhinite allergique et l’asthme.
La dermatite atopique (DA), ou eczéma atopique, est une dermatose
inflammatoire chronique survenant chez des sujets génétiquement prédisposés
et favorisée par des facteurs d’environnement.
Le prurit est un signe cardinal de la DA.
La sécheresse cutanée (xérose) est également un élément majeur de la DA.
Diagnostic positif :
Le diagnostic de la DA est clinique. Aucun examen complémentaire n’est
nécessaire.
Les critères diagnostiques sont :
• le prurit (critère obligatoire) ;
• et au moins trois des critères suivants :
- début avant deux ans,
- antécédents de lésions des convexités,
- antécédents personnels d’asthme ou de rhinite allergique,
- peau sèche généralisée,
- lésions d’eczéma des plis.

Aspects cliniques :

➢ Nourrisson et jeune enfant (jusqu’à deux ans) :


Le prurit est souvent important et responsable de troubles du sommeil.
Les poussées sont faites de médaillons, mal limités, érythémateux, suintants
puis croûteux.
Elles atteignent de façon symétrique les zones convexes du visage et des
membres.
Sur le cuir chevelu il peut exister une atteinte inflammatoire avec des squames
jaunâtres et grasses (« croûtes de lait »).
➢ Enfant de plus de deux ans :
Les lésions sont plus souvent localisées :
- aux plis (coudes, creux poplités, cou et fissures sous-auriculaires) ;
- dans certaines zones : mains et poignets, chevilles, mamelons).
Se manifeste le plus souvent par un eczéma récidivant surinfecté.
Le caractère chronique des lésions et du grattage est responsable de la
lichénification et des excoriations.
Le prurit important est responsable de mauvais résultats scolaires.
Des poussées saisonnières se produisent avec le plus souvent une aggravation
en automne et hiver ; et une amélioration durant l’été.
Au visage, des lésions hypopigmentées, parfois rosées, finement squameuses
sont fréquemment observées en particulier l’été : « eczématides » ou « dartres
achromiantes » (pityriasis alba).
La xérose cutanée est quasi constante, plus marquée en hiver.
➢ Adolescent et adulte :
6 % des DA de l’enfant vont évoluer à l’âge adulte, un début tardif à l’âge
adulte est possible mais rare et doit faire éliminer une autre dermatose
prurigineuse : gale, eczéma de contact, lymphome cutané T. . .)
Elle garde en général le même aspect que chez l’enfant de plus de 2 ans.
Les autres formes possibles sont :
- prurigo (papules prurigineuses excoriées), prédominant aux membres ;
- une prédominance des lésions d’eczéma au visage et au cou ;
- une érythrodermie.

Évolution

➢ DA :
Chez le nourrisson, l’évolution est le plus souvent spontanément favorable avec
rémission complète survenant en quelques années dans la majorité des formes
légères à modérées de DA.
Les formes persistant dans l’enfance sont souvent le fait des formes modérées
à sévères de DA, plus fréquemment associées à un asthme.
La persistance à l’adolescence ou chez l’adulte jeune est rare mais possible.
➢ Autres manifestations atopiques :
- Allergie alimentaire : surtout chez le nourrisson et le petit enfant (lait,
arachide, poisson, soja et blé) ;
- manifestations respiratoires : plus fréquente en présence d’antécédents
atopiques familiaux au premier degré :
• asthme (30 % des enfants avec DA), ou équivalents (toux sèche nocturne,
gêne respiratoire avec sifflement expiratoire), survenant entre 2 à 6 ans ;
• rhinite, plus tardive.
Complications :

• Surinfections cutanées bactériennes (impétiginisation), virales (herpès).


• Dermatite (ou eczéma) de contact : émollients ou topiques contenant
des conservateurs très sensibilisants, des parfums, des antiseptiques ou
des antibiotiques locaux.
• Retard de croissance : rare, se voit surtout dans les DA graves, il se
corrige habituellement quand la DA est traitée efficacement, il doit faire
rechercher une allergie alimentaire associée.

Traitement :

➢ Conseils à donner :
- Habillement : éviter les textiles irritants (laine, synthétiques) ; préférer
coton et lin.
- Éviter l’exposition au tabac.
- Maintenir une température fraîche dans la chambre à coucher. Ne pas
trop se couvrir la nuit.
- Augmenter les applications d’émollients par temps froid et sec.
- Vacciner normalement.
- Bain court ou douche, avec une température tiède et des pains ou gels
sans savon.
➢ Dermocorticoïdes :
- Les dermocorticoïdes d’activité très forte sont contre-indiqués chez le
nourrisson et le jeune enfant ;
- Les dermocorticoïdes forts sont à réserver en cures courtes aux formes
très inflammatoires ou très lichénifiées des extrémités ;
- Les dermocorticoïdes modérés sont utilisés sur le visage, les paupières,
les plis et les zones génitales et chez le nourrisson ;
- Les dermocorticoïdes faibles n’ont pas d’intérêt.
• Les crèmes sont préférées sur les lésions suintantes et les plis ; les
pommades sur les lésions sèches, lichénifiées.
• Une seule application quotidienne est suffisante, jusqu’à amélioration
franche (généralement une à trois semaines).
➢ Émollients :
Ils sont utilisés dans le but de restaurer la fonction barrière de la peau et de
lutter contre la xérose cutanée.
Ils doivent être utilisés quotidiennement, en traitement d’entretien.

❖ Il n’y a pas de place pour la corticothérapie générale dans le traitement


de la DA.
❖ Quand confier en milieu hospitalier spécialisé ? :
✓ DA grave après échec au traitement adapté et bien conduit.
✓ Surinfection grave, en particulier herpétique.

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