Gestion Et Pilotage Des Stocks Outils Analytiques Et Méthodologies D'optimisation (Extrait)

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MICHEL

AGNÈS
FENDER GORGE

GESTION
ET PILOTAGE
DES STOCKS
Outils analytiques
et méthodologies
d’optimisation

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Éditorial : Guillaume Clapeau et Yaël Aouizrat Bourcet
Fabrication : Nelly Roushdi Nabih
Couverture : Studio Dunod
Mise en page : Lumina Datamatics

© Dunod, 2022
11 rue Paul Bert, 92240 Malakoff
ISBN 978‑2-10‑083185-2
www.dunod.com

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Je dédie ce livre à Yves Dallery, Professeur à l’École Centrale et Associé à
Diagma, qui nous a quitté en mars dernier et avec lequel j’ai eu
de longs échanges qui ont nourri certains chapitres de ce livre.
Je remercie une fois de plus mon épouse, Lydie, pour sa patience
et son soutien.
Michel Fender

Merci à Michel Fender de m’avoir offert cette belle opportunité de


collaborer avec lui sur cet ouvrage.
Je remercie également tous mes proches pour leurs encouragements
et leur soutien.
Agnès Gorge

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Introduction

Les stocks prennent place au sein des chaînes logistiques appelées communément
les supply chains. Ils y occupent une place privilégiée et paradoxale. En effet, le but
d’une supply chain, c’est de mettre en relation une source d’approvisionnement
amont et un destinataire aval qui prend souvent la forme d’un client, et ce, dans
une logique de flux. Et l’un des enjeux de cette relation, c’est la mise à disposition
d’un produit, dans un délai souvent le plus court possible. Il y a donc un double
objectif de disponibilité du produit et d’accélération de la mise à disposition de ce
produit. Or, les stocks jalonnent les supply chains de bout en bout, ce qui se traduit
par une contradiction fondamentale : le stock est contraire aux flux en s’opposant
à l’écoulement des produits.
Appréhender la notion de stock ne procède pas d’une approche intuitive
immédiate. Le stock résulte d’un double flux amont et aval qui répond à des
problématiques très différentes. Les deux premières questions essentielles
consistent à identifier :
•  les variables de contrôle, c’est-à-dire comprendre les mécanismes des variables
qui influencent l’une des trois composantes clés d’une supply chain que sont le
flux amont, le stock et le flux aval, et comment ces variables interagissent les
unes avec les autres ;
•  les acteurs qui conditionnent par leurs décisions la valeur et le comportement
de ces variables et impactent donc le niveau des stocks.
Au-delà de cette première contradiction intrinsèque, la mobilisation du concept
de valeur nous apporte un éclairage complémentaire. Le stock a été considéré
historiquement comme une valeur positive, depuis la nuit des temps. Être capable
de stocker les grains, l’eau, les produits de subsistance alimentaire a été une
découverte majeure liée à l’agriculture néolithique. Elle a permis de faire face à
un décalage temporel intrinsèque à l’agriculture sédentaire relatif à des récoltes
saisonnières (le supply [flux amont] est saisonnier), alors que la consommation est
lissée dans le temps (la demande [flux aval] est constante). Le  déploiement de
l’agriculture sédentaire a été lui-même à l’origine, entre autres, de la civilisation
néolithique. Dès lors s’est ancrée au plus profond de nos cerveaux l’idée que le
stock fait partie de la panoplie de survie de l’espèce humaine et s’est accompagnée
de la peur de manquer.

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Gestion et pilotage des stocks

Mais plus récemment, avec le développement des programmes d’excellence


industrielle portés par les grands groupes industriels, en particulier dans le secteur
automobile, le stock est l’une des cibles privilégiées de la chasse au gaspillage.
Le stock est perçu comme un pis-aller qui résulte d’un défaut d’excellence et d’une
faille dans le modèle de performance d’une supply chain. C’est l’ère du « juste-à-
temps » et des recommandations tendant au zéro stock comme objectif ultime.
L’idée sous-jacente est qu’il est possible de servir la demande à partir de sources
d’approvisionnement sans passer par la case stock. Comme nous le verrons, et ce,
dans la logique fondamentale supply chain qui sous-tend cet ouvrage, le stock est
à l’image du cholestérol : il y a à la fois du bon cholestérol qu’il est sain d’avoir et
du mauvais dont il est indispensable de se délester.
Pour compléter ce panorama des contradictions dont les stocks sont l’objet,
notons que les stocks ont, d’un point de vue financier, deux perspectives :
•  celle du cash représentée par l’argent immobilisé et qui constitue une contre-
opportunité a maxima d’investissement, d’innovation et/ou de capacité des
actifs industriels et logistiques par exemple, et a minima de placement financier ;
•  celle des coûts générés par la détention des stocks.
Là encore, flux et stocks s’opposent dans une double logique de performance
respective du compte d’exploitation et du bilan qui se complètent.
La perspective fondamentale de cet ouvrage est de réconcilier théorie et
pratique. Il est à l’image des profils des auteurs dont la conviction profonde est
que l’innovation, et plus généralement le progrès, s’appuient sur cette intégration
mutuelle et vertueuse de la théorie et de la pratique. Ce livre s’adresse à la double
communauté des professionnels du supply chain management et des acteurs du
monde académique que sont les enseignants chercheurs et leurs étudiants. Les stocks
font l’objet de recherches théoriques et ils se trouvent au cœur des objectifs de
performance d’une entreprise durable. Nous espérons que ce livre sera un levier
d’intégration entre ces deux communautés dans un souci de création de valeur.
Dès lors, le but de cet ouvrage est multiple :
•  faire comprendre les paradigmes sous-jacents aux stocks qui permettent
d’identifier le jeu des paradoxes évoqués sommairement ci-dessus ;
•  faire œuvre de pédagogie soutenue par notre expérience de terrain,
d’enseignement et de recherche pour introduire la richesse des différentes
perspectives qu’il est possible d’appliquer aux stocks ;
•  clarifier, sans simplifier à l’extrême, les méthodes de gestion des stocks ;
•  identifier les modélisations et les outils mathématiques associés utiles à la
gestion optimale des stocks, et comprendre dans quel contexte il est possible
de les mobiliser de manière pertinente ;
•  introduire les outils les plus adaptés au suivi et à la gestion des stocks, et ce dans
une logique opérationnelle d’implémentation de ces outils.

VI

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Introduction

Nos profils complémentaires répondent à ces différents objectifs. Nous avons


structuré cet ouvrage en quatre parties complémentaires :
•  la partie 1, composée de 4  chapitres, permettra de donner les principaux
éléments de terminologie et de définition associée, de positionner les différentes
problématiques et perspectives relatives aux stocks et introduira la notion de
doctrine de stock ;
•  la présentation des incontournables mathématiques et de modélisation fera
l’objet de la partie 2, structurée autour de 3 chapitres. Elle regroupera ce qu’il
nous semble essentiel d’acquérir comme connaissances et outils pratiques
applicables à la gestion des stocks ;
•  la modélisation d’un système de stock au niveau de la prise en compte de ces
multiples variables et de la définition d’un objectif de performance à atteindre
s’avère nécessaire, et ce, dans un environnement marqué par de nombreuses
incertitudes. Ce sera l’objet de la partie 3, organisée en 5 chapitres ;
•  comme nous en avons l’habitude, pour laisser la voix au terrain, la partie 4 sera
dédiée à des applications à des cas concrets avec une double perspective, soit en
lien avec des secteurs d’activité, soit avec des solutions logiciels dédiées ou ayant
des modules spécifiques à la gestion des stocks.
Enfin, un glossaire vous est proposé, ainsi qu’une bibliographie. Ces références
bibliographiques sont systématiquement citées dans le texte de l’ouvrage et les
parties de l’ouvrage concernées sont repérées.

VII

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Sommaire

Introduction V

Partie 1
Position et problématiques
des stocks dans les supply chains

Chapitre 1  ■ Stocks et flux : une relation indissociable


et stratégique au sein des supply chains 3

Chapitre 2  ■ Types et missions des stocks 15

Chapitre 3  ■  Dimension financière des stocks et trade-off37

Chapitre 4  ■ Doctrine de gestion de stock, perspective


organisationnelle et systèmes d’information53

Partie 2
Introduction aux outils mathématiques
et à la modélisation

Chapitre 5  ■  Introduction à la modélisation et panorama 79

Chapitre 6  ■  Les modèles de types déductifs85

Chapitre 7  ■  Les modèles de types inductifs101

IX

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Gestion et pilotage des stocks

Partie 3
Les outils et modèles fondamentaux de
la gestion de stocks (les incontournables)

Chapitre 8  ■  La modélisation de stock111

Chapitre 9  ■  La prévision du supply/demand119

Chapitre 10  ■  Agrégation des produits et décisions associées131

Chapitre 11  ■ Systèmes classiques de gestion des stocks


dans un monde déterministe143

Chapitre 12  ■ Modèles classiques de gestion des stocks


dans un monde incertain169

Partie 4
A. Applications et témoignages métier

Frédéric Beltoise, directeur Supply Chain, Point P, Saint-Gobain


Distribution Bâtiment France 195

Saber Mahjoub, directeur de la transformation Supply Chain,


EssilorLuxottica199

Sophie Cebrian, responsable approvisionnement chez Maje 205

Hervé Faugère, directeur des achats, Canalisation Europe,


Saint-Gobain Pont-à-Mousson (PAM) 211

Jérôme Rio, directeur général Supply Chain, Andros 215

Marc Brunet de la Charie, appui technique au sein du Centre


de l’optimisation de la production et des marchés d’EDF 221

Omar El Idrissi, general manager d’AutoPlus/Maghreb Accessoires 231

Ilyas Rakhis, head of Industrial Supply Chain, OCP Group 237

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Sommaire

Partie 4
B. Applications et témoignages solutions

Dominique Bourgoin, fondatrice d’AZAP 243

Mathieu Linder, vice-président groupe Gestion produit,


Blue Yonder247

Arnaud Hédoux, directeur marketing et Julien von Seckendorff,


chef de produit, QAD DynaSys 253

Jean-Baptiste Clouard, CEO, Co-fondateur, Flowlity 259

Rémi Lequette, senior Principal value solution consultant,


Coupa Software 263

Conclusion 267

Glossaire 269

Bibliographie 273

XI

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Partie 1

Position et
problématiques
des stocks dans
les supply chains

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Chapitre 1

Stocks et flux : une


relation indissociable
et stratégique au sein
des supply chains

1.1  Notion fondamentale de point de


découplage dans les supply chains
Stocks et flux sont indissociablement liés. La figure 1.1 représente la problé-
matique qui relie les flux et les stocks en s’appuyant sur l’analogie de l’écou-
lement d’une rivière depuis sa source jusqu’au client final qui s’abreuve à son
eau. Ce schéma permet de visualiser que le niveau des stocks représenté par le
niveau de l’eau d’un lac dépend fondamentalement des débits du flux amont
et du flux aval. On peut associer au débit amont une loi d’approvisionne-
ment à partir de la source en considérant que cet approvisionnement est
contraint ou contrôlé, et au débit aval une loi de consommation qui dépend
des comportements des clients utilisateurs ou consommateurs de ce produit.
À ce stade élémentaire de la représentation de cette réalité, nous mobilisons
le terme de découplage utilisé précédemment, car le stock se situe à l’interface
de deux logiques qui répondent à des modalités « découplées ». Un stock peut
être appréhendé comme une variable d’ajustement entre supply et demand,
c’est-à-dire comme un moyen de coupler, de relier, de réconcilier, d’intégrer
ces deux flux obéissant à des logiques différentes. Tout le savoir-faire des pla-
nificateurs supply chain va consister à intégrer ces deux logiques par des pro-

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Position et problématiques des stocks dans les supply chains

cessus de planification collaborative, mais cela a des limites inhérentes à ces


logiques amont et aval et le stock a pour mission d’absorber ces différences
fondamentales.
L’objectif de cet ouvrage est de donner des clés rationnelles pour dimen-
sionner le niveau de stock optimal en fonction de la compréhension des flux
amont et aval. En clair, comme exposé ci-dessus en mettant en avant la notion
d’inducteurs actifs, le stock doit être le résultat d’une analyse et de décisions
volontaristes, et non le résultat du jeu de variables ni identifiées ni paramétrées.

Source

Flux
amo
nt

Niveau de stock
Flu
xa
val

Client

Figure 1.1 – Stock et flux/Niveau de stock et durée d’écoulement.

En première approche, le niveau des stocks en volume peut se mesurer des


deux manières suivantes :
• La couverture du stock évaluée comme le ratio (Stock/Consommation
sur 1 an) × 365 jours (nous laissons pour plus tard les détails du calcul
comptable). Imaginons l’exemple simple d’une couverture de 45 jours (ou
un mois et demi). Ce chiffre signifie que si le flux amont est stoppé à
cause d’un fait exceptionnel (inondation de l’usine du fournisseur, feu,
grève…), le stock permettra de couvrir les besoins de consommation aval
pendant 45  jours. Les professionnels métiers supply chains utilisent pré-
férentiellement cet indicateur, car il évalue le niveau de service qu’il est
possible de délivrer.
Il est très intéressant de noter que ce chiffre de 45 jours correspond aussi
en réalité au temps d’écoulement du produit le long de la chaîne bout-
en-bout de la source à l’utilisateur final, si l’on fait abstraction des délais
d’écoulement amont et aval et si l’on applique la règle du FIFO (First In
First Out) au niveau du stock qui signifie que l’on respecte l’ordre chro-
nologique d’entrée et de sortie dans le stock. Par conséquent, il y a un
lien indissociable entre la durée d’écoulement d’un flux et le niveau des

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Chapitre 1 – Stocks et flux : une relation indissociable et stratégique au sein des supply chains

stocks. Plus le niveau des stocks est élevé, plus le délai d’écoulement sera
long entre le supply side et le demand side.
• La rotation des stocks est l’inverse mathématique de la couverture. Dans
l’exemple précédent, la rotation arrondie est de 365/45 = 8, ce qui signi-
fie que le stock tourne 8 fois dans l’année, c’est-à-dire de manière imagée
que le lac se régénère 8 fois dans l’année. Comme nous le verrons plus en
détail ultérieurement, cet indicateur est surtout utilisé par les financiers
qui appliquent une approche du type retour sur investissement, le stock
étant un actif cyclique au niveau du bilan de l’entreprise.

1.1.1  Place des stocks dans la configuration


stratégique des supply chains
Une supply chain est composée d’un ensemble d’acteurs réalisant des transfor-
mations industrielles et logistiques au sein d’entités opérationnelles grâce à
des moyens et des ressources. Les flux sont en quelque sorte des connecteurs
entre ces acteurs et prennent la forme de flux physiques, financiers et d’infor-
mation. Les stocks se répartissent tout au long d’une supply chain donnée.
Une supply chain est donc représentée par un triplet (acteurs, flux et stocks).
Les stocks et les flux sont les composantes indissociables d’une supply
chain comme le montre la figure 1.2.

Supply chain externe amont Supply chain interne Supply chain externe aval

Fournisseur Fournisseur Canal de distribuon 1


Rang 2 Rang 1 Stock Stock Clients
Stock
(Maères (Produits B2B2C
(WIP)
premières) finis)
Canal de distribuon 2
Fournisseur Fournisseur Achat Producon Ventes Clients
Rang 2 Rang 1
B2B2C

Producon Producon Post Canal de distribuon 3


Fournisseur Fournisseur Étape 1 Manufact. Clients
Étape 2
Rang 2 Rang 1 B2B2C

Stock

Figure 1.2 – Positionnement des stocks dans les supply chains.

Il est utile de distinguer trois composantes supply chain dont l’intégration


permet de relier une source d’approvisionnement à un client final au sein de
ce que l’on appelle une supply chain end-to-end (bout-en-bout) :
• La supply chain interne couvre toutes les opérations relatives aux achats
et aux approvisionnements, à la production et à la vente. Il se peut que cer-
taines de ces opérations, en particulier au niveau industriel (sous-traitants

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Position et problématiques des stocks dans les supply chains

et co-traitants) et logistique (prestataires logistiques et transporteurs) mais


aussi au niveau de certains achats, soient sous-traitées dans une logique
stratégique de make or buy. Quoi qu’il en soit, ce système opérationnel
interne est «  contrôlé  » par l’entreprise. Comme nous le verrons par la
suite, ce contrôle peut aussi s’exercer au niveau des stocks à l’interface
avec certains fournisseurs (notion de stocks avancés) et certains clients
(notion de différenciation retardée dans une logique de personnalisa-
tion du produit en fonction des attentes des clients). Dans une entreprise
industrielle dont la mission est de transformer et d’ajouter de la valeur, on
identifie la présence de :
–– stocks de matières premières, de composants, de sous-ensembles, de
produits finis, semi-finis, approvisionnés depuis des fournisseurs ;
–– stock d’encours (WIP) relatifs à des produits en cours de transforma-
tion qui sont localisés, soit dans des usines entre des machines, soit
entre des usines lorsque ces produits sont transportés d’un site à l’autre
avec par exemple une 1re étape de transformation en Asie du Sud-Est,
une 2e au Maroc et une 3e opération finale d’assemblage en Allemagne.
La notion de supply chain interne ne signifie donc pas une unité de lieu ;
–– stocks de produits finis qui correspondent à un stade d’achèvement de
transformation industrielle.
Ces trois natures de stock peuvent être positionnées à différents endroits
de la supply chain end-to-end en fonction de la stratégie d’implantation
géographique qui dépend souvent de l’accès à des ressources critiques
(matières premières, main-d’œuvre, énergie…), des conditions fiscales
pratiquées localement qui ont leur importance dans le coût de revient du
produit et de l’accès à des marchés pour stimuler les ventes.
• La supply chain externe amont est constituée de l’ensemble des fournis-
seurs de rang 1, rang 2, rang n… Ces fournisseurs produisent des stocks
depuis des matières premières «  natives  » ou des matières secondaires
issues de recyclage de produits en fin de vie jusqu’à des produits semi-
finis qu’ils vendent à des clients industriels selon un modèle B2B. Certains
de ces stocks sont dans les supply chains internes de ces fournisseurs et
d’autres sont à l’interface avec leurs clients comme mentionné ci-dessus.
• La supply chain externe aval est relative aux canaux de distribution
depuis un industriel fournisseur amont jusqu’au client final.
Il est clair que les frontières entre ces trois composantes ne sont pas
« franches » et que les modalités de répartition des activités et des responsa-
bilités entre les acteurs d’un réseau de valeur donné peuvent donner lieu à
des configurations (patterns) supply chain end-to-end diversifiées.

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Chapitre 1 – Stocks et flux : une relation indissociable et stratégique au sein des supply chains

Remarque : La localisation des stocks dans la supply chain ne présage pas de qui est
responsable de leur gestion. En clair, il faut différencier supply chain et supply chain
management comme nous le ferons par la suite. Un stock de consignation ou un stock
géré selon le processus de gestion partagée des approvisionnements correspondent
à des modes de gestion qui s’appliquent à différents types de supply chain.

1.2  Les inducteurs stratégiques des stocks


Nous considérons fondamentalement que les stocks résultent d’inducteurs.
Ces inducteurs sont de différente nature comme nous en discuterons tout au
long de cet ouvrage. Nous proposons de distinguer :
• Des inducteurs actifs sur lesquels une entreprise a le contrôle direct, qui
doivent procéder de choix volontaristes, formalisés et assumés, tels que :
–– des offres (configuration produit) et de système opérationnel (système
industriel), qui influencent la fragmentation, la nature, la localisa-
tion et le dimensionnement des stocks. Ces inducteurs se situent à un
niveau stratégique et sont détaillés dans ce qui suit ;
–– des règles de gestion qui conditionnent essentiellement le niveau des
stocks. Ces règles se situent à des niveaux de décision, soit tactiques en
particulier dans le cadre du processus S&OP (Sales & Operations Plan-
ning) en lien avec des règles du jeu du type trade-off résultant de prio-
risations stratégiques, soit opérationnels par exemple au moment de
l’ordonnancement de production en usine.

• Politique Make/Buy
• Offre produit
• Configuration • Criticité produit
Stratégie Stratégie • Sourcing
produit achat

Stratégie Stratégie
supply chain industrielle
• Stratégie de • Type de process
planification
• Automatisation
• Localisation
géographique • Technologies de
• Offre de service production

Figure 1.3 – Inducteurs actifs stratégiques des stocks.

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Position et problématiques des stocks dans les supply chains

• Des inducteurs passifs que l’entreprise subit. La rareté de certaines matières


premières, la volatilité des prix de celles-ci, les réglementations relatives au
stockage des matières dangereuses ou d’utilisation de certaines matières,
la volatilité de la demande et la disponibilité de l’offre au niveau des mar-
chés sont autant d’exemples de facteurs qui influencent la manière dont
les stocks doivent être gérés, qu’il s’agit donc d’identifier et de prendre en
compte mais sur lesquels l’entreprise n’a pas de contrôle.
Au niveau stratégique, comme nous l’avons formalisé (Fender, 2020), il
existe quatre configurations génériques supply chain end-to-end en fonction
du caractère global ou local de leurs composantes amont et aval. Les stocks
font partie intégrante de la conception de ces configurations qui doivent
donc être pensées dans un premier temps à un niveau stratégique.
• La stratégie produit constitue le cœur de l’offre de l’entreprise à ses
clients. Les deux questions majeures qui impactent les stocks sont :
–– Quelle diversité d’offres produits veut-on offrir à nos clients  ? La
réponse à cette question se mesure en nombre de références produits
(SKUs) et résulte d’un arbitrage entre standardisation et personnali-
sation. Cette question concerne aussi bien les composants ou sous-
ensembles achetés que les produits finis. Il n’est pas rare qu’il y ait
plus de SKUs amont que de SKUs aval, car les acheteurs et les concep-
tions de produits peuvent faire preuve de beaucoup de créativité ! Le
garde-fou est de mener une analyse de la valeur et de vérifier que la
diversité crée une valeur que le client est prêt à payer (Fender, 2020).
Dans la figure 1.4 relative à une entreprise industrielle dans le secteur
automobile, on constate que le stock des composants approvisionnés
comporte le plus grand nombre d’articles (part numbers) et de niveau
de stock en k€ que les produits finis dont la valeur est logiquement
supérieure en données relatives. Les produits semi-finis sont également
très représentés en nombre d’articles, ce qui paraît contraire à la notion
de création de diversité produits de l’amont vers l’aval.
–– Quelle configuration produit adopte-t-on  ? Cette question complexe
a des conséquences considérables sur les systèmes industriels et logis-
tiques et impactent de facto les stocks. Les approches historiques
de conception modulaire des produits par sous-ensembles non dif-
férenciés et les solutions CKD (Complete Knock Down), enrichies des
approches relatives à l’économie circulaire prenant en compte le recy-
clage des produits en fin de vie, influencent les méthodes de concep-
tion des nouveaux produits. Celles-ci sont couplées à la conception des
processus industriels. Ces phases amont conditionnent la nature et le

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Chapitre 1 – Stocks et flux : une relation indissociable et stratégique au sein des supply chains

dimensionnement des stocks. Il n’est pas si immédiat de prendre en


considération les décisions prises au niveau de la R&D et de l’ingénie-
rie sur les stocks, mais c’est cependant un lien majeur qui a été jusqu’à
présent peu travaillé. Le stock apparaît comme un facteur mineur par
rapport au coût de production. Nous y reviendrons lorsque la dimen-
sion financière sera abordée.

Components

Produits semi-finis

k€ (%)
# SKUs (%)
Produits de négoce

Produits finis

0% 10 % 20 % 30 % 40 % 50 %

Figure 1.4 – Répartition du niveau de stocks et du nombre


de références articles (secteur automobile).

• La stratégie achat adresse les questions clés suivantes :


–– Quelle politique Make or Buy ? Plusieurs facteurs interviennent dans la
décision de faire ou de faire faire c’est-à-dire d’acheter. Parmi ceux-ci,
on peut identifier :
▶▶ la notion de compétence clé (core) qu’il est essentiel de conserver
en interne ;
▶▶ le niveau de valeur ajoutée industrielle ;
▶▶ la criticité du produit ;
▶▶ l’existence d’un marché pour assurer un sourcing fiable et durable ;
▶▶ la contribution à l’image de marque de l’entreprise ;
▶▶ le savoir-faire concurrentiel existant ou non dans le marché ;
▶▶ l’impact d’un achat ou d’une sous-traitance sur à la fois le délai de
développement d’un nouveau produit (time-to-market) et de livrai-
son des produits dans un mode série (order-to-delivery lead-time) ;
▶▶ la contribution à la qualité du produit fini.

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Position et problématiques des stocks dans les supply chains

–– Quel sourcing au double sens du type de fournisseur et de la géogra-


phie  ? La sélection du sourcing a des conséquences significatives sur
différentes catégories de stocks étudiés par la suite (stock de sécurité et
stock de cycle).
–– Quelle criticité au niveau de la nature des produits achetés ? Certaines
matières premières peuvent faire l’objet de stocks stratégiques du fait
de la rareté ou de la forte criticité de ces matières.
• La stratégie industrielle : les technologies de production, le degré d’auto-
matisation, le type de process (matrice produit × process, Fender, 2020)
dépendent du positionnement marché (prix) des produits, de leur volume
et des facteurs de compétitivité recherchés (qualité, coût, délai…). Les
quatre processus industriels génériques (job shop, batch flow, assembly line
et continuous flow) conditionnent des niveaux de stock très variables.
• La stratégie supply chain et logistique : les piliers d’une stratégie supply
chain sont essentiellement les suivants et ils ont tous un impact majeur
sur les stocks :
–– le niveau de service que l’on veut offrir aux clients. Nous reviendrons
bien sûr en détail sur cet inducteur majeur du dimensionnement des
stocks ;
–– la localisation géographique des différentes infrastructures indus-
trielles et logistiques qui est à l’origine des configurations spatiales
évoquées ci-dessus. Comme nous l’étudierons plus en détail dans la
suite, les stocks prennent place au sein de réseaux de production et de
distribution multi-échelons ;
–– les stratégies de pilotage comme le montre la figure 1.5 et qui résultent
du modèle supply chain choisi.
Comme on le voit sur la figure 1.5, la confrontation de l’exigence des clients
en matière de délai depuis la prise de la commande jusqu’à la livraison et du
délai bout-en-bout des opérations depuis la conception du produit (enginee-
ring) jusqu’à sa distribution conduit à différentes stratégies de planification.
Ces stratégies génèrent des stocks qui constituent des points de découplage
entre une logique amont d’anticipation nourrie par des prévisions de consom-
mation et une logique aval exécutée en fonction de la connaissance des com-
mandes clients qui permet de réaliser les étapes aval. Ce point de découplage
correspond également au point de pénétration de la commande. Les stocks
constituent le résultat de cette anticipation. Plus le délai accordé par le client
est long, plus il est possible de positionner le stock en amont dont la nature
n’est donc pas la même et plus on peut retarder la différenciation du produit
en fonction des attentes des clients. Cette logique a permis de concevoir et de
systématiser le modèle de différenciation retardée représenté sur la figure 1.6.
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Chapitre 1 – Stocks et flux : une relation indissociable et stratégique au sein des supply chains

Délai bout-en-bout
Concepon Achat Producon Distribuon

Produit fini
Make-to-stock
(MTS)

Assembly/ Produit semi-fini


finishing-to-
order (ATS)
Maères premières

CLIENTS
/ composants
Make-to-order
(MTO)

Procurement-
to-order

Engineering-to-
order (ETO)

Acvités planifiées à parr de prévision


de la demande
Délai de livraison aux clients
Point de stock = Point de découplage

Figure 1.5 – Stratégie de planification supply chain et positionnement des stocks.

Opéraons planifiées à parr Opéraons exécutées sur


de prévisions de consommaon la base des commandes clients

Point de découplage

MAKE-TO-STOCK MAKE-TO-ORDER
Niveau de diversité

Commande
Concepon Appro Production Assemblage Livraison client
final

Objecfs coût et Stock Objecfs d’agilité et de


lean personnalisaon client

Point de découplage

MASS CUSTOMIZATION

Figure 1.6 – Modèle de différenciation retardée.

En amont de ces questions, nous considérons que doit être clarifiée la


discipline de valeur que l’entreprise va développer pour assurer son position-
nement stratégique et s’attacher à accroître son avantage concurrentiel. La
théorie et la pratique montrent qu’il existe trois voies d’affirmation de son
leadership comme le montre la figure 1.7.

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Position et problématiques des stocks dans les supply chains

PRODUIT
• Innovaon produit
• Évoluvité du produit
• Focalisaon sur la R&D

EXCELLENCE
OPÉRATIONNELLE EXPÉRIENCE CLIENT
• Baisse des coûts • Fidélisaon des clients
• Approches lean • Service client
• Simplificaon • Innovaon dans la relaon client

Figure 1.7 – Les 3 disciplines de valeur (adapté de Treacy, Wieserma, 1995).

Il s’agit d’exercer son leadership de manière prioritaire sur l’un de ces trois
axes et de considérer un deuxième axe pour conforter sa position concur-
rentielle. La pire des situations est de se trouver au centre de gravité de ces
trois axes et par conséquent de diluer son positionnement et son avantage
concurrentiel. Les trois inducteurs actifs stratégiques identifiés préalablement
n’auront pas les mêmes effets en fonction de ce positionnement stratégique.
Le choix de la discipline de valeur n’est pas sans influence sur la relation aux
stocks et le tableau 1.1 formalise les principales caractéristiques et probléma-
tiques qui en découlent.

Tableau 1.1 – Problématiques des stocks en fonction de la discipline de valeur.

Discipline de valeur Problématiques stocks

Produit (innovation) Stocks obsolètes résultant des cycles de vie courts des
produits.
Stock de sécurité pour les composants critiques au
moment du lancement des nouveaux produits et
avant la phase de ramp up des volumes.

Client (expérience) Stock de sécurité pour éviter toute rupture et


maintenir le niveau élevé de service.
Système de gestion automatique du type VMI pour
routiniser les approvisionnements et les sécuriser.
Stock de consignation en fonction des conditions
commerciales et financières négociées.

Excellence opérationnelle (coût) Stock perçu comme une perte alors que le stock
de cycle en particulier permet d’optimiser les
tailles de lot et donc le coût total de production,
d’approvisionnement et de distribution.
Stock spéculatif pour bénéficier de remises
significatives à l’achat mais risque d’obsolescence.

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Chapitre 1 – Stocks et flux : une relation indissociable et stratégique au sein des supply chains

Résumé
Trois natures de stocks dans la supply chain interne
• Stock de matières premières.
• Stock d’encours (WIP).
• Stock de produits finis.
Auxquelles on ajoutera le stock de la supply chain externe (amont et aval).

Deux inducteurs stratégiques des stocks


• Inducteurs actifs :
–– configurations d’offre et de système opérationnel (ou industriel)  :
niveau stratégique ;
–– règles de gestion : niveau tactique.
• Inducteurs passifs :
–– rareté matières premières ;
–– volatilité prix ;
–– disponibilité offre ;
–– réglementations relatives à l’utilisation ou au stockage de certaines
matières premières.

De multiples configurations génériques supply chain


end-to-end, induites par quatre axes d’analyse
• Stratégie produit :
–– diversité produit : grand nombre de SKUs à gérer en stock ;
–– configuration produit  : impacte la nature et le positionnement des
stocks dans la supply chain.
• Stratégie achat :
–– politique Make Or Buy :
▶▶ choix du sourcing →  impacte par exemple le lead time, le coût de
commande… ;
▶▶ criticité des produits achetés →  nécessité de constituer un stock
stratégique.
• Stratégie industrielle :
–– quatre types génériques de processus industriels (job shop, batch flow,
assembly line et continuous flow) → conditionnent des niveaux de stock
très variables au sein des entités de production.

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Position et problématiques des stocks dans les supply chains

• Stratégie supply chain et logistique :


–– niveau de service à offrir au client ;
–– dimension géographique et réseaux multi-échelons avec cascade des
stocks ;
–– stratégie de planification qui résulte du modèle supply chain → permet
de décider où mettre les stocks en particulier au niveau des points de
découplage :
▶▶ Make-to-Stock (MTS) ;
▶▶ Assembly-to-Order (ATS) ;
▶▶ Make-to-Order (MTO) ;
▶▶ Purchase-to-Order (PTO) ;
▶▶ Engineering-to-Order (ETO).

 rois disciplines de valeur permettant de positionner


T
la nature de la criticité avec les stocks
• Produit.
• Expérience client.
• Expérience opérationnelle.

Questions clés à adresser


1.  Quel est votre modèle supply chain et votre stratégie de découplage ?
2.  Quel est votre positionnement stratégique (= disciplines de valeur) ?
3.  Avez-vous listé les inducteurs stratégiques actifs à l’origine des stocks ?
4.  Considérez-vous le stock comme une variable d’ajustement ou comme un
objectif ?
5.  Avez-vous identifié tous vos stocks ?
6.  Avez-vous identifié les facteurs influençant le niveau des stocks au niveau
des flux amont et des flux aval ?
7.  Avez-vous fait le lien entre la durée d’écoulement de vos flux et le niveau
de couverture des stocks en lien avec votre modèle supply chain ?

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