Algernon
Algernon
Algernon
31 mai. — Le Dr Strauss trouve que je travaille trop. Le Dr Nemur dit que j'essaie de faire
tenir en quelques semaines une vie entière de recherches et de pensées. Je sais que je devrais
me reposer, mais je suis poussé par quelque chose d'intérieur qui ne veut pas me laisser
arrêter. Il faut que je trouve la raison de la brusque régression d'Algernon. Il faut que je
sache si et quand cela m'arrivera.
LETTRE AU Dr STRAUSS (copie)
Cher Dr Strauss,
Je vous envoie sous pli séparé un exemplaire de mon rapport intitulé: "L'effet Algernon-
Gordon : Etude de la structure et des fonctions de l'intelligence accrue." Vous me feriez
plaisir en le lisant et en le faisant publier.
Comme vous le voyez, mes expériences sont terminées. J'ai fait figurer dans mon rapport
toutes mes formules ainsi que, en annexe, l'analyse mathématique. Il est évident que tout
ceci devrait faire l'objet de vérifications pratiques.
Etant donné leur importance pour vous et pour le Dr Nemur (et, est-il besoin de le dire, pour
moi aussi ?) j'ai vérifié et revérifié mes résultats une douzaine de fois dans l'espoir de
découvrir une erreur. Je regrette de devoir dire que les résultats sont valables. Toutefois,
dans l'intérêt de la science, j'ai plaisir à apporter ma petite contribution aux connaissances
sur les fonctions de l'esprit humain et les lois régissant l'augmentation artificielle de
l'intelligence.
Je me rappelle vous avoir entendu dire un jour que l'échec d'une expérience ou la preuve de
l'inexactitude d'une théorie étaient aussi importants pour l'avancement du savoir que pouvait
l'être un succès. Je sais maintenant que cela est vrai. Je regrette toutefois que ma propre
contribution en ce domaine doive être édifiée sur les cendres des travaux de deux hommes
que je tiens en si haute estime.
Salutations distinguées,
Charles GORDON.
Pièce jointe : rapport.
5 Juin. — II ne faut pas que je me laisse émouvoir. Les faits et les résultats de mes
expériences sont clairs et les aspects les plus sensationnels de ma rapide ascension ne
peuvent dissimuler que la multiplication par trois de l'intelligence, grâce à la technique
chirurgicale mise au point par les Drs Strauss et Nemur, doit être considérée comme non
applicable pratiquement (à l'heure actuelle) en vue de l'augmentation de l'intelligence
humaine.
En examinant les données recueillies au sujet d'Algernon, je vois que, bien que
physiquement encore dans son enfance, elle est revenue en arrière mentalement. Son activité
motrice est atteinte; on constate une réduction générale de l'activité glandulaire et une perte
accélérée de la coordination.
On relève également de fortes indications d'amnésie progressive.
Comme on le verra dans mon rapport, ces effets et d'autres syndromes de dégradation
physique et mentale peuvent être prédits avec des résultats statistiquement significatifs par
l'application de ma formule.
Le stimulant chirurgical auquel nous avons tous deux été soumis a déterminé une
intensification et une accélération de tous les processus mentaux. L'évolution imprévue, que
j'ai pris la liberté de nommer l'Effet Algernon-Gordon, est l'extension logique de toute la
stimulation de l'intelligence. L'hypothèse prouvée ici doit être exprimée de façon simple
dans les termes suivants : l'intelligence artificiellement augmentée se dégrade à une vitesse
directement proportionnelle à l'augmentation en cause.
J'ai l'impression que ceci est en soi, une importante découverte.
Aussi longtemps que je pourrai écrire, je continuerai d'enregistrer mes pensées dans ces
comptes rendus. C'est l'un de mes rares plaisirs. Cependant, d'après toutes les indications,
ma dégradation mentale sera très rapide.
J'ai déjà commencé à constater des signes d'instabilité émotionnelle et de perte de mémoire,
premiers symptômes d'épuisement.
10 juin. — La dégradation continue. Je suis devenu distrait. Algernon est morte il y a trois
jours. La dissection a montré que mes prévisions étaient justes. Son cerveau avait perdu du
poids, il s'était produit un nivellement général des circonvolutions cérébrales et les fissures
étaient devenues plus profondes et plus larges.
J'imagine que la même chose est en train de m'arriver ou m'arrivera bientôt.
Maintenant que c'est un fait certain, je ne veux pas que cela arrive.
J'ai mis Algernon dans une boîte à fromage et je l'ai enterrée dans la cour. J'ai pleuré.
15 juin. — Le Dr Strauss est revenu me voir. Je n'ai pas voulu lui ouvrir et je lui ai dit de
s'en aller; je veux qu'on me laisse tranquille. Je suis devenu susceptible et irritable. Je sens
l'obscurité qui se referme sur moi. Il m'est difficile de rejeter des idées de suicide. Je ne
cesse de me dire combien sera important ce journal introspectif.
C'est une étrange sensation de prendre un livre qu'on a lu et qui vous a plu quelques mois
seulement auparavant et de découvrir qu'on ne s'en souvient pas. Je me rappelle combien je
tenais John Milton pour un grand poète, mais quand j'ai pris le Paradis perdu, je n'ai pas pu
le comprendre. Cela m'a mis dans une telle colère que j'ai jeté le livre à travers la pièce.
Il faut que j'essaie de m'accrocher, de retenir une partie de ce que j'ai appris. Oh! mon Dieu,
ne me reprenez pas tout !
19 juin. — Parfois, la nuit. Je me lève pour aller me promener. La nuit dernière, je ne
pouvais plus me rappeler où j'habitais. Un policeman m'a ramené. J'ai l'étrange sensation
que tout cela m'est déjà arrivé — il y a très longtemps. Je ne cesse de me dire que je suis la
seule personne au monde qui puisse décrire ce qui m'arrive.
11 juin. — Pourquoi ne puis-je me souvenir ? Il faut que je lutte. Je reste au lit pendant des
jours et je ne sais qui je suis ni où je me trouve. Puis tout me revient dans un éclair. Accès
d'amnésie. Symptômes de sénilité — seconde enfance. Je les vois arriver. C'est d'une
logique si cruelle. J'ai appris tant de choses et si vite! Maintenant mon esprit se dégrade
rapidement. Mais je ne permettrai pas que cela m'arrive. Je vais lutter. Je ne peux
m'empêcher de me rappeler le garçon du restaurant, son expression vide, son sourire
stupide, les gens qui riaient de lui. Non — par pitié — pas cela de nouveau...
22 juin. — Je suis en train d'oublier des choses que j'ai apprises récemment. Il semble que
ce soit le processus habituel : les dernières choses apprises sont les premières oubliées. Au
fait, est-ce bien ainsi que cela se passe ? Je ferais mieux de revoir dans le livre... J'ai relu
mon exposé sur l'Effet Algernon-Cordon et j'ai l'étrange impression qu'il a été écrit par
quelqu'un d'autre. Il y a des passages que je ne suis même pas capable de comprendre.
Mon activité motrice est atteinte. Je trébuche constamment sur des choses et il me devient
de plus en plus difficile de taper à la machine.
.
23 juin. — J'ai complètement abandonné la machine à écrire. Ma coordination est mauvaise.
Je sens que mes mouvements deviennent de plus en plus lents. J'ai eu un choc terrible
aujourd'hui. J'ai pris un article que j'utilisais dans mes recherches : " Ueber psycbishe
Ganzheit " de Krueger, pour voir si cela pourrait m'aider à comprendre ce que j'avais fait.
J'ai d'abord pensé à une défaillance de ma vue. Puis j'ai compris que je ne pouvais plus lire
l'allemand. J'ai fait des essais avec d'autres langues. Toutes parties !
10 juin. — Une semaine passée sans m'être risqué à reprendre la plume. Le temps s'écoule
comme du sable entre mes doigts. La plupart des livres que j'ai sont trop difficiles pour moi
maintenant. Il me font mettre en colère parce que je les lisais et les comprenais il y a
seulement quelques semaines.
Je me répète sans cesse que je dois continuer à rédiger ces comptes rendus, car il faut que
quelqu'un sache ce qui m'arrive. Mais il me devient de plus en plus difficile de former les
mots et de me rappeler comment ils s'orthographient. Maintenant je suis forcé de chercher
les mots les plus simples dans le dictionnaire et cela m'énerve.
Le Dr Strauss vient presque chaque jour, mais je lui ai dit que je ne voulais voir personne. Il
se sent coupable. Tous les autres aussi. Mais je ne blâme personne. Je savais ce qui risquait
d'arriver. Mais comme cela fait mal!
7 juillet. — Je ne sais où a fui la semaine. Aujourd'hui c'est dimanche je le sais parce que je
peux voir par ma fenêtre les gens qui vont à l'église. Je crois que je suis resté au lit toute la
semaine mais je me rappelle que Mrs Flynn m'a apporté plusieurs fois à manger. Je n'arrête
pas de me dire qu'il faut que je fasse quelque chose mais j'oublie ou bien c'est simplement
qu'il est plus facile de ne pas faire ce que je dis que je vais faire.
Je pense beaucoup à ma mère et à mon père ces jours-ci. J'ai trouvé une photo d'eux avec
moi prise sur une plage. Mon père a un gros ballon sous le bras et ma mère me tient par la
main. Je ne me les rappelle pas comme ils sont sur la photo. Tout ce que je me rappelle c'est
mon père ivre la plupart du temps et se disputant avec maman au sujet d'argent.
Il ne se rasait pas souvent et ça grattait quand il m'embrassait. Ma mère disait qu'il était mort
mais mon cousin Miltie disait qu'il avait entendu sa mère et son père dire que papa était
parti avec une autre femme. Quand j'ai questionné ma mère elle m'a giflé et a dit que mon
père était mort. Je ne pense pas avoir jamais trouvé où était la vérité mais ça m'est égal. (Il
disait qu'il allait m'emmener voir des vaches dans une ferme, mais il ne l'a jamais fait. Il ne
tenait jamais ses promesses...)
10 juillet, — Ma propriétaire Mrs Flynn se fait beaucoup de souci pour moi. Elle dit que la
façon dont je reste là toute la journée sans rien faire ça lui rappelle son fils avant qu'elle le
mette à la porte de chez elle. Elle dit qu'elle n'aime pu les fainéants. Si je suis malade ça se
comprend mais si je fainéante c'est autre chose et elle ne veut pas de ça. Je lui ai dit qu'il me
semblait que j'étais malade.
J'essaie de lire un peu tous les jours, surtout des histoires, mais je suis parfois obligé de lire
plusieurs fois la même chose parce que je ne comprends pas. Et il est difficile d'écrire. Je
sais qu'il faudrait que je vérifie tous les mots dans le dictionnaire mais c'est difficile et je
suis toujours si fatigué.
J'ai eu l'idée de n'employer que les mots faciles au lieu de ceux qui sont longs et difficiles.
Ça me fait gagner du temps. Je mets des fleurs sur la tombe d'Algernon environ une fois par
semaine. Mrs Flynn pense que je suis fou de mettre des fleurs sur la tombe d'une souris mais
je lui ai dit qu'Algernon n'était pas une souris comme les autres.
14 juillet. — C'est encore dimanche. Je n'ai plus rien pour m'occuper maintenant parce que
ma télévision est cassée et je n'ai pas d'argent pour la faire réparer. (Je crois que ce mois-ci
j'ai perdu mon chèque de paie du labo. Je ne me rappelle plus.)
J'ai des maux de tête terribles et l'aspirine ne me soulage pas beaucoup. Mrs Flynn sait que
je suis vraiment malade et elle est très ennuyée pour moi. C'est une femme merveilleuse
quand quelqu'un est malade.
22 juillet. — Mrs Flynn a fait venir un docteur pour m'examiner. Elle avait peur de me voir
mourir. J'ai dit au docteur que je n'étais pas très malade mais que j'oublie simplement les
choses. Il m'a demandé si j'avais des amis ou des parents et j'ai dit que non je n'en ai pas. Je
lui ai dit que j'avais un ami qui s'appelait Algernon, mais c'était une souris et nous faisions
des courses tous les deux. Il m'a regardé d'un drôle d'air comme s'il pensait que j'étais fou.
Il a eu un sourire quand je lui ai dit que j'avais été un génie, il me parlait comme si j'étais un
bébé tout en faisant des clins d'œil à Mrs Flynn. Je me suis mis en colère et je l'ai chassé
parce qu'il se moquait de moi comme ils le faisaient tous autrefois.
24 juin. —Je n'ai plus d'argent et Mrs Flynn dit qu'il faut que j'aille travailler quelque part
pour payer mon loyer parce que je ne l'ai pas payé depuis plus de deux mois. Je ne connais
pas d'autre travail que celui que je faisais à la Fabrique de Boites en Plastique Donnegan. Je
ne veux pal y retourner parce qu'ils me connaissaient tous quand j'étais intelligent et peut-
être qu'ils riront de moi. Mais je ne sais pas quoi faire d'autre pour avoir de l'argent.
25 Juillet. — Je regardais quelques-uns de mes comptes rendus et c'est très drôle, mais je ne
peux pas lire ce que j'écrivais. Je peux reconnaître quelques mots mais ils n'ont plus de sens
pour moi.
Miss Kinnian est venue à la porte mais je lui ai dit : allez-vous-en, je ne veux pas vous voir.
Elle a pleuré et j'ai pleuré aussi mais je ne voulais pas la laisser entrer parce que j'avais peur
qu'elle se mette à rire de moi. Je lui ai dit que je ne l'aimais plus. Je lui ai dit que je ne
voulais plus être intelligent. Ce n'est pas vrai. Je l'aime toujours et je veux toujours être
intelligent mais il fallait que je lui dise ça pour qu'elle s'en aille. Elle a donné de l'argent à
Mrs Flynn pour payer mon loyer. Je ne veux pas de ça. Il faut que je trouve du travail.
Par pitié... par pitié, faites que je sache toujours lire et écrire...
27 juillet. — Mr Donnegan a été très gentil quand je suis revenu le trouver pour lui
demander de me rendre mon travail de gardien. Pour commencer il s'est montré très
soupçonneux mais je lui ai dit ce qui m'arrivait et alors il a eu l'air triste et m'a mis sa main
sur l'épaule en disant Charlie Gordon tu as du cran.
Tout le monde m'a regardé quand je suis descendu et que j'ai commencé à travailler aux
toilettes en les nettoyant comme j'en avais l'habitude. Je me disais Charlie s'ils se moquent
de toi ne te mais pas en colère parce qu'ils ne sont pas si intéligens que tu croyais autrefois
qu'ils l'étaient. Et puis c'était tes amis et s'ils rient de toi ça veut rien dire parce qu'ils
t'aimaient aussi.
Un des nouveaux qui sont entrés après mon départ a fait une plaisanterie il a dit Charlie
parait que t'es un as comme on en voit au quitte ou double. Dis-moi quelque chose
d'intéligen. Ça m'a fait mal mais Joe Carp s'est approché et la empoigné par sa chemise et
lui a dit laisse le tranquille espèce de gros lourdau ou je te casse la figure. Je m'attendais pas
a ce que Joe prenne mon parti aussi je crois qu'il est vraiment mon ami.
Plus tard Frank Reilly est venu et m'a dit Charlie si y en a un qui t'embête ou qui se moque
de toi t'as qu'à nous appeler moi ou Joe et on se chargera de lui. J'ai dit merci Frank et il a
fallu que je fasse demi-tour et que j'entre au magasin pour qu'il me voie pas pleurer. C'est
bon d'avoir des amis.
28 juillet. — J'ai fait une chose idiote aujourd'hui j'ai oublié que j'étais plus dans la classe de
miss Kinnian au cour pour adultes comme dans le tant. Je suis entré et j'ai été m'assoir a ma
place au fond de la classe et elle m'a regardé drôlement et elle a dit Charles. Je me rapèle
pas l'avoir entendu m'apeler comme ça autrefois seulement Charlie alors j'ai dit bonjour
miss Kinnian je suis prêt pour ma lesson aujourdhui mai j'ai perdu le livre que j'avais. Elle
s'est mise a pleuré et elle est sortie de la classe en courant et tout le monde ma regardé et j'ai
vu que c'était pas les mêmes jens qu'avant.
Alor tout d'un cou je me suis souvenu de quelques choses sur l'opération et coman j'étais
devenu intélijan et j'ai dit bon san j'ai fait mon Charlie Gordon cette fois. Je suis parti avant
qu'elle rantre dans la classe.
C'est pour sa que je quitte New York pour de bon. Je veu plus qu'il m'arive rien comme sa.
Je veu pas que miss Kinnian me plaigne. Tout le monde me plain a l'usine et je veu pas de sa
non plus alor je vai dans un androit ou personne sait que Charlie Gordon a été un géni et que
maintenan il sait plus lire un livre ni écrire comme il faut.
J'emporte deus livres avec moi et même si je peu pas les lire j'essayerai et peutètre que
j'oublirai pas tout ce que jaurai apri. Si j'essaye vraiman fort peutètre que je serai un peu
plus intélijan qu'avant l'opération. J'ai ma patte de lappin et ma pièce porte boneur et
peutètre que sa maidera.
Si vous lisé ces lignes un jour miss Kinnian me plaigné pas je sui eureu d'avoir u une chance
d'ètre intélijan lorsque j'ai apri des tas de chose que je savai même pas qu'elles existait et je
suis contant d'avoir vu tou sa un petit moman. Je sais pas pourquoi je suis bête comme avant
ou ce que j'ai fait peutètre que c'est parce que j'essaye pas assé fort. Mais si j'essaye et si je
m'exerce très fort peutètre que je deviendré un peu plu intélijan et que je saurai ce que c'est
que tous ces mots. Je me rapèle un peu comme j'étai contant d'avoir ce livre bleu avec une
couverture déchiré quan je le lisai. C'est pour sa que je vai essayé de devenir intélijan pour
avoir ancor cette impression. Sa fait du bien de conaitre des choses et d'être intélijan. Je
voudrai avoir cette inpression, mintenan alor je massoirai et je lirai tou le tant. En toucas je
pari que je sui la première personne bête au monde a avoir trouvé quelque chose d'important
pour la cience. Je me rapèle que j'ai fait quelque chose mais je me rapèle pas quoi. Alor je
croi que je l'ai fait pour tou les jans bêtes comme moi.
Adieu miss Kinnian et Dr Strauss et toulemonde.
Et P.S. dite au Dr Nemur de ne pas être si mauvais quan les jans ri de lui, et il aura pluss
d'amis. C'est facil d'avoir des amis si on laisse les jans rire de soi. Je vai avoir des tas d'amis
la ou je vais allé.
P.P.S. S'il vouplai si vous ave l'ocazion metté des fleurs sur la tombe d'Algernon dans la
cour...
DES FLEURS POUR ALGERNON
Par Daniel Keyes