Le Capital Humain en Gestion Des Ressources Humaines
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Résumé
Cet article s’interroge sur la solidité du concept de capital humain aujourd’hui
utilisé en gestion des ressources humaines. Il prend pour point de départ le
paradoxe suivant: d’un côté, le grand succès que rencontre le concept de par
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Abstract
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Le capital humain en gestion des ressources
humaines : éclairages sur le succès d’un
concept
Le capital humain est devenu un concept central pour l’analyse des organisations
et la gestion des ressources humaines. Ce n’est pas le moindre des paradoxes
étant donné les limites importantes relatives à l’utilisation de ce dernier notamment
en gestion des ressources humaines. Nous montrons dans une première partie,
après avoir brièvement esquissé une genèse du concept de capital humain, que
la théorie du capital humain a fait l’objet de nombreuses critiques au sein des
sciences économiques et qu’en outre son application à la gestion des ressources
humaines se heurte à des difficultés importantes.
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théorie du capital humain en gestion des ressources humaines. Le marché du
travail fonctionnerait grâce à une convention de capital humain entendue comme
convention d’évaluation de la compétence des personnes dont l’objet est de fonder
la hiérarchie des salaires, sans laquelle employeurs et employés ne pourraient
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dernier n’est pas homogène au sein des nations de l’Union Européenne (Denny,
Hamon et Lydon, 2001).
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1.1.1. Définition
Le capital humain d’un individu se définit donc surtout par les connaissances et
compétences que ce dernier maîtrise. Ces connaissances et compétences se
sont accumulées tout au long de la scolarité, au cours des diverses formations
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Au sein de l’entreprise, le capital humain tisse des liens féconds tant avec le
capital organisationnel (compétences collectives, routines organisationnelles,
culture d’entreprise) qu’avec le capital relationnel (capital confiance auprès des
clients, fournisseurs et investisseurs) (Burlaud, 2000). Cette représentation est
d’ailleurs proche de celle proposée par Edvinson et Malone (1997) articulant les
notions de capital structurel, de capital clients et de capital humain. Cependant,
la littérature managériale et gestionnaire met en avant des représentations
différentes du capital humain. Dès lors, il convient d’en donner une typologie
aussi précise que possible.
1.1.2. Typologie
Si le capital humain se définit, au niveau d’une entreprise, par les connaissances
maîtrisées par un individu, force est de constater qu’il recouvre des catégories
représentant des enjeux différents pour les firmes en terme de contrôle.
Il est en effet possible de dresser une typologie du capital humain qui distingue
les catégories suivantes : capital humain général, capital humain spécifique à la
firme, capital humain spécifique à une tâche (Gibbons et Waldman, 2004 ; Hatch
et Dyer, 2004).
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Le capital humain en gestion des ressources
humaines : éclairages sur le succès d’un
concept
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Quant au capital humain spécifique à la firme, il correspond à des compétences
et des connaissances maîtrisées par un salarié basées sur un corpus de
connaissances et de connaissances collectives (capital organisationnel)
spécifique à une entreprise donnée. Le capital humain spécifique à la firme octroie
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sur un marché du travail concurrentiel dénué « d’imperfections ». On mesure
la fragilité du raisonnement néoclassique en terme de capital humain dès lors
que l’on prend conscience des nombreuses « imperfections » caractérisant le
fonctionnement du marché du travail.
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humaines : éclairages sur le succès d’un
concept
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de l’éducation sur la productivité des individus et par là même la pertinence de
la théorie du capital humain. Trois champs peuvent être identifiés : la théorie
sociologique de la sélection, la théorie du signal et la théorie des incitations
salariales.
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La théorie du signal (Spence, 1973) fournit quant à elle une critique plus nuancée
de la théorie du capital humain. Son postulat fondamental est l’incertitude à
laquelle l’employeur est confronté quant à la productivité d’un salarié. L’éducation,
et notamment la durée des études et le niveau des diplômes, est utilisée comme
un signal. Elle permet à l’entreprise de réduire l’asymétrie d’information à
laquelle elle est confrontée. Le signal fournit par l’éducation permettra à la firme
de sélectionner les collaborateurs les plus performants. Le niveau de formation
n’est pas le seul signal permettant de lever cette asymétrie d’information. Ainsi,
l’âge, le sexe, les emplois précédemment occupés constituent autant de signaux.
Cependant, l’éducation est perçue comme un signal de meilleure qualité. Dans
le cadre de cette approche, l’éducation en tant que telle n’a pas d’impact causal
sur la productivité, ce qui remet en question l’un des postulats essentiels de la
théorie du capital humain.
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Ainsi, pour Lazear (1981), il n’est pas besoin de recourir à l’hypothèse d’une
productivité croissante pour rendre compte de la corrélation entre ancienneté, et
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donc développement de l’expérience - une des dimensions du capital humain -
et salaires. Si l’on suppose que les salariés, dotés de la même productivité
« potentielle », sont susceptibles de fournir des efforts plus ou moins importants,
il en résulte que les collaborateurs fournissant peu d’effort auront une productivité
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Ces trois courants de recherche limitent la portée universelle prêtée par certains
auteurs à la théorie néoclassique du capital humain. Il n’est pas question ici
d’examiner la manière dont elle a répondu à ce type de critiques et les conclusions
sur la validité que l’on peut en retirer. Ce qui apparaît nettement, c’est que ces
limites ont ouvert la voie à une analyse critique sur la validité du concept en
tant que tel. Dès lors, qu’en est-il de sa pertinence en sciences de gestion et
notamment en gestion des ressources humaines ?
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Le capital humain en gestion des ressources
humaines : éclairages sur le succès d’un
concept
des individus et non pas de la firme. Ce point est essentiel et explique que
certains chercheurs (Davenport, 1999 ; Walker, 2001) se sont éloignés de la
représentation des collaborateurs de l’entreprise comme des actifs (« people as
assets »). En effet, considérer les salariés d’une entreprise comme des actifs
revient implicitement à supposer que l’entreprise détient des droits de propriété
sur ces derniers. A l’évidence une telle supposition est des plus contestables
et ce pour plusieurs raisons : d’une part, l’entreprise ne détient pas de droits
de propriété formels sur les salariés qu’elle emploie ; de l’autre, le déclin de la
loyauté et de l’attachement des salariés à leur entreprise remet en question la
« propriété » informelle, de nature affective, que la firme aurait sur ses salariés.
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Dès lors, les collaborateurs peuvent être considérés comme des propriétaires
de capital humain louant ce dernier au profit de l’entreprise. Pour Davenport
(1999), il faut aller plus loin et considérer les salariés d’une entreprise comme
des investisseurs en capital humain qui recherchent un retour sur investissement
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à l’entreprise, etc.
A mesure que le capital humain devient une ressource de plus en plus importante
pour la compétitivité de l’entreprise, les employés vont de plus en plus remettre
en question les règles de gouvernance actuelles qui accordent aux apporteurs de
capitaux financiers une place prédominante. Les apporteurs de capital humain,
à l’instar des apporteurs de capital financier, devraient bénéficier de droits de
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2. Le capital humain comme convention
En dépit de ses limites tant sur le plan de l’analyse économique que dans le
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La notion de capital humain apparaît ainsi comme convaincante dans les cercles
journalistiques et les milieux d’affaire. Elle bénéficie également d’un certain écho
au sein de la communauté universitaire en sciences de gestion même si elle est
en concurrence avec d’autres approches. Il convient donc de s’interroger sur les
raisons qui rendent compte de son succès alors même que ses fondations sont
fragiles. Le concept de capital humain peut être ainsi réinterprété à la lumière de
la théorie des conventions (Boltanski et Thévenot, 1991; Salais, 1989; Gomez,
1996).
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La convention fait sens dans la mesure où elle contribue à normer l’univers social.
En effet, grâce au sens qu’elle véhicule, elle pose des limites aux comportements
des agents. Autrement dit, le sens de la convention définit ce qui est compatible
avec elle et ce qui ne l’est pas. Ainsi, le comportement de l’agent, notamment
la manière dont il rationalise ses actes, se définit en fonction de la convention,
s’il l’a validée. Dans le cas contraire, il rationalisera ses actes par rapport à une
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négation de cette convention - une anticonvention29 - ou par rapport à une
convention alternative.
-- Le référent normatif
Le référent normatif indique le critère essentiel à travers lequel l’agent se reconnaît
à l’intérieur ou en dehors de la convention. Autrement dit, le référent normatif
identifie la valeur ou l’ensemble des valeurs qui constituent la convention. L’agent
est ainsi en mesure de se justifier, c’est-à-dire de se positionner par rapport à
la valeur que recèle la convention. Par exemple, si le référent normatif de la
convention A est la loyauté, l’individu peut justifier ses actes en fonction de cette
valeur - loyauté - ou en opposition à cette même valeur. On comprend dès lors
pourquoi la valeur en question contribue à normer le réel, c’est-à-dire à poser
une norme, un repère par rapport auquel les agents vont être en mesure de
justifier et de rationaliser leurs actes. Cependant, la convention ne se limite pas
simplement à un référent normatif, c’est-à-dire à une valeur. La convention offre
également aux agents une information sur leurs positions relatives au sein d’un
univers social donné. En d’autres termes, la convention définit une distinction
sociale entre les différentsacteurs.
-- La distinction
La convention apporte également une distinction entre ceux qui valident la
convention, c’est-à-dire entre ceux qui rationalisent leurs actions au regard de
cette dernière. Nous avons montré que la convention, étant donné le référent
normatif - valeur - qui y est afférent, avait pour principale caractéristique de normer
l’univers social. Elle est également en mesure de normer les positions ainsi que
29. C’est ainsi qu’il est possible d’analyser le comportement de conformisme et d’anticonformisme. L’anticonformiste qui ne valide pas
la convention A énonçant de se conformer à certaines règles se comporte en référence à la convention A puisque son comportement
est un conformisme au regard de l’anticonvention A.
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les comportements relatifs des individus qui la valident. En informant sur le rôle
des différentes catégories d’agents qui la valident et l’adoptent, elle opère une
distinction entre eux, elle renseigne sur leur hiérarchie, sur leur position sociale,
leur comportement normal, etc. La distinction permet de normer les relations
interindividuelles en définissant le rôle que chaque adopteur de la convention
doit tenir.
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deuxième caractéristique d’une convention, en indiquant la position sociale
d’autrui, renseigne l’agent sur le comportement normal de celui-ci, c’est-à-dire un
comportement conforme à la convention. La distinction contribue donc à limiter
l’information que l’agent doit traiter afin de prendre une décision.
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-- La sanction
La convention se caractérise également par un système de sanction. Cependant,
il convient de préciser ce que recouvre la notion de sanction de manière à être en
cohérence avec ce que nous avons développé jusqu’alors. En effet, nous avons
montré que la convention n’existait que dans la mesure où elle était validée
par les agents, c’est-à-dire acceptée par eux et non imposée par une autorité
supérieure. La sanction n’est donc pas un dispositif mis au point par une autorité
supérieure afin de punir les individus n’ayant pas respecté la convention ; elle
précise et définit, d’une part, les conditions selon lesquelles l’agent se maintien
dans la convention - sanction positive ; d’autre part, les conditions d’exclusion
de la convention - sanction négative. La sanction permet d’identifier les contours
de la convention.
Parmi tous ces procédés concrets, le contrat est bien évidemment primordial,
même s’il n’est pas l’unique procédé concret support de la convention. Cependant,
en se référant à une ou à des conventions, le contrat est contingent à la notion
de convention, ses modalités faisant référence à des normes, à des usages,
c’est-à-dire à des conventions. Ainsi, les notions de justice, de bon usage, de
réciprocité, de ponctualité - délais de livraison par exemple - sont établies en
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à la fois contingents aux conventions et vecteurs de convention en permettant
à la convention de se réaliser comme processus de transfert d’information,
c’est-à-dire comme vecteur de sens. En revanche, le rôle de la négociation
n’est pas comparable à celui qu’elle joue dans le mode d’interaction basé sur
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CONVENTION
C omment se pratiquent les contacts entre adopteurs d’ une convention : ils utilisent des supports matériels
On remarque que les supports matériels tacites ne laissent pas ou peu de place
à l’interprétation, puisqu’ils ne sont pas ambigus. C’est la raison pour laquelle la
négociation y tient une part peu importante. En revanche, les supports matériels
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explicites, étant donné leur plus grande ambiguïté, laissent une place plus
importante à la négociation.
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évaluer, notamment en phase de recrutement, et de plus, évolutives. L’employé
peut tergiverser sur son implication dans la réalisation des objectifs de l’entreprise,
étant donné les incertitudes sur l’évolution de ses rémunérations ; l’effort produit,
c’est-à-dire la compétence réellement fournie à l’entreprise, est donc incertain.
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incertitude ; Elle fournit en effet aux agents économiques les repères sans lesquels
la prise de décision serait impossible. La convention de capital humain est ainsi
une convention d’évaluation de la compétence des personnes (Favarque, 2004)
dont l’objet est de fonder la hiérarchisation des salaires (Poulain, 2001). Comme
on l’a vu précédemment, cette convention se caractérise par un référent normatif,
une distinction et une sanction (Boltanski et Thévenot, 1991).
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de production des diplômes et l’expérience professionnelle sont reconnus par
les parties prenantes sur le marché du travail. Les salariés et les employeurs
agissent en fonction de ces deux parties constitutives du référent normatif de la
convention de capital humain.
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individus, qu’elles soient positives ou normatives, reposent sur des bonnes
raisons (Boudon, 1995) qui les rendent cohérentes avec le réel.
Pour ce faire, nous allons utiliser une typologie des raisons développée par le
philosophe Gibbard (1990). Cette typologie nous permettra d’esquisser une
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« Quand une personne appelle une chose - R - une raison pour faire X, elle
exprime son acceptation de normes qui disent de traiter R comme pesant en
faveur de X. »
30. La modélisation du contexte social par une ou un ensemble de conventions nous semble satisfaisante. En effet, les conventions,
en tant que systèmes de normes, définissent ce qui est optionnel, exigé ou interdit, c’est-à-dire le contexte social au sein duquel les
agents évoluent.
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Positives
Désirs C royances
N ormatives
R aisons
S ystème
de normes
Preuve C onvention
R éel
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Le système de normes - convention - a un impact sur les croyances de l’agent
dans la mesure où il pondère les raisons sur lesquelles s’appuie ce dernier
pour fonder ses croyances. Nous avons placé sur le schéma une double flèche
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exprime le fait qu’il agit que cela lui plaise ou non. Le devoir qui motive son
action est indépendant de ses préférences. Il peut même être en contradiction
avec elles. Simplement, les raisons qui motivent l’action ne sont pas du ressort
des préférences.
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Il arrive que le système de normes d’ordre supérieur soit compatible avec plusieurs
systèmes de normes d’ordre inférieur mutuellement incompatibles. Dans ce cas,
des croyances et des actes motivés par des raisons se référant à un système de
normes supérieur peuvent être incohérents.
La politesse peut être considérée comme une norme d’ordre supérieur compatible
avec différents systèmes de normes qui représentent des manières concrètes de
codifier la politesse. Bien entendu, ces différentes codifications de la politesse
sont susceptibles d’être contradictoires, alors qu’elles sont toutes compatibles
avec un système de normes d’ordre supérieur qui indique le respect de la
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politesse.
H1 : Les raisons sur lesquelles repose la convention de capital humain relèvent
des raisons indépendantes des préférences.
Les raisons à la base de la convention de capital humain justifient des croyances
normatives et positives structurantes pour le bon fonctionnement du marché du
travail. A ce titre nous formulons deux autres hypothèses.
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Le capital humain en gestion des ressources
humaines : éclairages sur le succès d’un
concept
Les trois hypothèses que nous avons formulées illustrent ce que d’aucuns
analysent comme la progression de la notion de « marchandisation » des rapports
salariaux. A une vision fondée sur les rapports de force et le conflit social est
en train de se substituer une représentation des relations sociales fondées sur
la logique marchande. Le marché du travail remplace ainsi progressivement le
conflit social comme institution de régulation des relations entre employeurs et
employés. Les raisons normatives et positives, socles de la convention de capital
humain, mettent en évidence la dimension cognitive des processus sociaux à
l’œuvre sur le marché du travail. Les marchés, et en particulier le marché du
travail, fonctionnent parce que les agents agissent en fonction de raisons qui
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non seulement donnent du sens à leurs actes, mais les justifient. Nous nous
inscrivons ainsi dans le tournant cognitif en économie (Orléan, 2002) qui plaide
pour l’ouverture de la théorie économique aux croyances et représentations
tant individuelles que collectives. La convention de capital humain, étant donné
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Conclusion
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