Anthologie de Texte de Jose Antonio Primo de Rivera en Français
Anthologie de Texte de Jose Antonio Primo de Rivera en Français
Anthologie de Texte de Jose Antonio Primo de Rivera en Français
PRIMO DE RIVERA
(ANTHOLOGIE)
MADRID - MCMXLVII
A Pilar
Primo de Rivera
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION.
NOTE DE TRADUCTEUR.
Nº des extraits
L
'auteur de cette Anthologie a écrit comme préface de son oeuvre une
admirable introduction qui sera lue avec profit par ceux qui
connaissent l'espagnol. Mais cette version est faite pour ceux qui ne
lisent pas cette langue, pour ceux pour qui José Antonio Primo de
Rivera est seulement un nom, un nom qu'ils confondent parfois avec
celui de son père le général Primo de Rivera ou qui leur est même complètement
inconnu.
L'introduction originale était écrite pour le peuple espagnol, pour qui José
Antonio est un nom courant et dont le portrait, exposé partout dans le pays, est
aussi familier que celui du général Franco lui-même. Il vaut mieux donc, semble-
t-il, ne pas traduire l'introduction de M. Torrente dont beaucoup serait perdu
pour le lecteur français, et la remplacer par cette étude. En l'écrivant, le
traducteur s'est gardé de toute ambition de faire un essai littéraire, encore moins
a-t-il cherché à formuler un jugement sur José Antonio comme figure historique
ou politique. Il s'est seulement efforcé de présenter l'ensemble des faits qui
'permettront au lecteur de suivre le cours de cette Anthologie sans se perdre
dans le labyrinthe des questions de détail et d'apprécier mieux les doctrines de
José Antonio grâce à une connaissance plus complète du milieu dans lequel
elles furent exprimées et d'où elles surgirent. Nous prions donc ceux qui sont
bien au courant de l'histoire politique de l'Espagne de nous excuser de la
répétition de faits qui leur sont familiers.
On peut tracer de la façon suivante un schéma de l'histoire d'Espagne de ces
trente dernières années. Pendant la Grande Guerre de 1914-1918, l'Espagne
était neutre. Elle n'avait pas d'intérêts directs engagés. Elle était encore faible et
déprimée après la perte en 1898 de ses dernières possessions transocéaniques
de Cuba et des Philippines. Il y avait des groupes pro-alliés et des groupes
germanophiles dans le pays, mais il n'était pas question d'entrer en guerre. La
situation intérieure de l'Espagne continuait à décliner. En 1923, le pays semblait
glisser à une ruine imminente et le roi Alphonse XIII chargeait le général Primo
de Rivera, investi de pouvoirs dictatoriaux, de le ressaisir.
Sa dictature, douce et patriarcale, restaura la paix et stabilisa l'économie de la
nation. Dans le domaine matériel —routes, chemins de fer, travaux publics,
etc.— il accomplit des merveilles et atteignit des résultats analogues à ceux qu'à
peu près a la même époque les visiteurs de l'Italie reconnaissaient
universellement dans les premières années du gouvernement de Mussolini.
L'efficacité, l'honnêteté administratives et la probité remplacèrent l'ancienne
corruption.
Cependant, un régime quel qu'il soit, résiste ou tombe pour d'autres causes
que des manifestations extérieures de ce genre. Chacun peut juger la Dictature
par lui-même. On trouvera dans ce livre comment José Antonio, le fils du
Dictateur, un fils entièrement dévoué à son père, la jugeait. Nous rappellerons
simplement que José Antonio ne fut qu'un simple membre de l'«Union patriotique»
du Général.
Après la chute du général Primo de Rivera en 1930, la situation redevint
confuse et très agitée. Le républicanisme était répandu et, le 14 avril 1931, le roi
Alphonse pensa qu'il était de son devoir de quitter l'Espagne —il ne dit pas
d'abdiquer— afin d'éviter la guerre civile et une effusion de sang. Le roi et la
famille royale quittèrent alors l'Espagne et les Républicains prirent le pouvoir
sans aucune résistance.
Ce 14 avril 1931 est une date importante et on doit la tenir soigneusement à
l'esprit pour comprendre un grand nombre d'extraits de ce livre et plus
généralement une grande partie de la pensée de José Antonio. Il y a deux
grands points dans cet ordre d'idées qui doivent être mis en évidence.
Premièrement, la Monarchie n'était pas tombée «constitutionnellement» pour ainsi
dire, à la suite d'une victoire du parti républicain à des élections générales où le
problème Monarchie ou République était posé au corps électoral. Ce qui est sûr,
c'est qu'on célébra des élections municipales et que beaucoup de candidats, en
fait, professaient des opinions républicaines. Les premiers résultats des
élections à des fonctions administratives locales donnèrent la majorité à Madrid
et dans certaines autres grandes villes à des conseillers qui adhéraient aux
groupes républicains. Le Roi laissa l'Espagne aussitôt sans même attendre la fin
des résultats qui donnèrent une grande majorité aux conseillers monarchistes
dans l'ensemble du pays. L'Espagne se trouva ainsi dans une situation
certainement sans précédent dans l'histoire des monarchies: un roi abandonnait
son royaume au cours d'une consultation électorale qui manquait, de base pour
exprimer la volonté du peuple et qui, en fait, donnait la majorité à ses partisans.
Le second fait concernant le 14 avril 1921, un fait que José Antonio rappelle
continuellement, est la «alegría» comme il l'appelle (le coeur léger, la gaité, la
bonne humeur) du pays dans son ensemble. Pour les vrais monarchistes, c'était
un jour de deuil et de douleur, aggravé par un grand nombre de démonstrations
républicaines de caractère extrémiste. Pour les purs Républicains, c'était un jour
de triomphe violent et même déchaîné. Mais José Antonio —le fait est clair— ne
parle pas de ce dernier, mais de l'air joyeux d'anticipation qui était généralement
répandu dans les masses, même parmi beaucoup de gens qui étaient
personnellement peinés de voir la chute de la Monarchie. La date du 14 avril
1931 donnait au peuple espagnol l'espoir- que «sa révolution» venait enfin d'être
menée à bonne fin et que cette révolution menait à la justice sociale, Ces belles
espérances ne se réalisèrent pas.
Ce n'est pas ici le lieu de juger la République, mais simplement de faire son
histoire. Celle-ci se divise en trois phases: 1° ) d'avril 1931 à novembre 1933. Le
désappointement se vît bientôt, les nouveaux hommes d'Etat gâchèrent leurs
chances, les lois contre la religion commencèrent à irriter l'Eglise et les
travailleurs n'obtinrent pas leur justice sociale. L'Espagne commença à glisser de
nouveau sur la pente. 2º) de novembre 1933 à janvier 1936. En 1933, les partis
républicains de droite prirent le pouvoir après des élections où, en beaucoup
d'endroits, 40 pour 100 seulement du corps électoral votèrent; cette période
réactionnaire fut également stérile, mais, en outre, marquée par les plus graves
événements: le soulèvement armé des séparatistes en Catalogne le 6 octobre
1934 combiné avec la révolution communiste dans les Asturies, Azaña, Ministre
de la Guerre dans le 'premier gouvernement républicain et plus tard le leader du
Front Populaire, participa criminellement à ces révoltes. Ce gouvernement
gaspilla également ses chances et le mécontentement augmenta, mettant en
effervescence le sentiment révolutionnaire. 3°) La dernière phase commença
avec les élections de février 1936. Le Front Populaire, bien qu'il n'ait eu que la
minorité des voix, mais en s'aidant d'une falsification massive des résultats et
d'une violence absolue, prit le pouvoir. Azaña dirigea le gouvernement pour la
seconde fois comme José Antonio l'avait prophétisé dans un passage frappant
(Extrait 165). Les persécutions religieuses, la tyrannie et les discordes de toutes
sortes éclatèrent à la fois: les églises, les établissements publics et les bureaux
des journaux furent brutes, pris d'assaut et pillés chaque jour; l'assassinat
devint un fait courant, la disette s'étendit, l'ordre public cessa d'exister. Les
gauches extrémistes proclamèrent ouvertement l'imminence de la révolution
soviétique qui devait être un fait accompli pour la fin du mois de juillet. Le 12
juillet, cependant, Calvo Sotelo, le chef da l'opposition au Parlement, qui avait été
menacé de mort dans les couloirs après les discours où il exposait la tyrannie du
régime, fut enlevé par des policiers, sur l'ordre du gouvernement, et tué.
Son corps fut retrouvé à la porte du cimetière le lendemain matin. Ce fut
l'étincelle qui mit le feu au pays. Quatre Jours après, la Légion du Maroc se
souleva contre le gouvernement de Madrid, une tentative d'assassinat de Franco
à Ténériffe ayant échoué, celui-ci s'envola pour l'Afrique du Nord à bord d'un
petit avion anglais laissé volontairement sans garde par le capitaine Pollard V.
C. qui agissait selon les instructions de Douglas Jerrold. Le 18 juillet 1936, le
Mouvement national espagnol se déclencha, devançant de dix jours la révolution
communiste dont les plans étaient maintenant mûrs.
Le reste de l'histoire de la République est l'histoire de la guerre civile
espagnole qui se termina par la victoire nationaliste le 1er avril 1939.
Un gouvernement fantôme subsista, soutenu par la fraction de la réserve d'or
espagnole qui n'avait pas été envoyée en Russie, mais toute prétention à la
légitimité qu'avait encore cette organisation, qui se basait sur les élections
douteuses de 1936, cessa finalement le 6 juillet 1947 quand le référendum
national espagnol sur la loi de succession donna une sanction «démocratique» au
régime de Franco et à la constitution de l'Espagne comme royaume catholique
social où Franco, chef national incontesté («chef populaire») devra être remplacé
dans l'avenir soit par un roi, soit par un régent, au cas où il n'y aurait pas à ce
moment de candidat convenable de sang royal.
Il est intéressant de noter que ce référendum, qui se déroula sans le plus
léger incident d'aucune sorte, dans le calme le plus parfait et la bonne humeur,
donna un vote favorable qui atteignit approximativement plus de 80 pour 100 du
total des électeurs, dépassant amplement, dans chaque province sans exception,
la somme des votes obtenus en 1936 non seulement par le Front Populaire mais
par tous les partis réunis.
Telle est l'esquisse de l'histoire de cette Espagne où José Antonio Primo de
Rivera passa sa courte vie. Il naquit à Madrid en 1903. C'était l'aîné des enfants
du général Primo de Rivera. Sa famille est une vieille famille andalouse de Jerez
de la Frontera. Les autres enfants étaient deux garçons, Miguel et Fernando, et
deux filles, Carmen et Pilar. Miguel, qui ne fut pas condamné à mort à Alicante
en 1936, a servi l'Espagne depuis la guerre comme Ministre de l'Agriculture et il
est actuellement (1947) maire de Jerez, Fernando fut tué par les marxistes à
Madrid, avant même que José Antonio eût écrit son testament. Carmen est
mariée et vit à l'écart. Pilar, à qui ce livre est dédié, est et a toujours été la
Déléguée Nationale de la Section Féminine de la Phalange. Son activité dans
deux sens est devenue particulièrement fameuse: l'éducation de la femme
espagnole au Château de la Mota, à Médina del Campo, et les efforts fructueux
qu'elle a faits avec cette Section pour faire revivre et développer les vastes
ressources du traditionnel folklore espagnol. Un petit exemple de celles-ci a été
donné las des représentations à Welsh Eiseddford, en 1947, des choeurs et des
ballets espagnols qui obtinrent un si remarquable succès en Angleterre.
José Antonio fit des études de droit et il se fît inscrire au barreau au début de
1923. Récemment un ouvrage espagnol sur la philosophie du droit (1) analysait
sa pensée juridique et le décrivait comme un homme qui aurait
incontestablement acquis une grande renommée de juriste s'il avait vécu à une
époque ou son génie n'aurait pas été appelé à se mêler à la politique. Et, en
vérité, même dans ses écrits et ses discours, quand il traite de sujets politiques,
on voit qu'il va au-delà des formes qui obsèdent tous les politiciens et la plupart
des hommes d'Etat et qu'il saisit l'essence des choses ou la métaphysique, les
principes immuables qui se manifestent dans les différents domaines
contingents et aux différents niveaux de la hiérarchie universelle. A côté de cette
familiarité avec la perspective métaphysique, qui ne doit pas être confondue avec
la philosophie elle-même, limitée a un certain point de vue, il faudrait noter aussi
comment José Antonio, même dans le domaine politique, envisage, la théorie
cyclique dans une forme microcosmique et comment il prévoyait le cataclysme
qui peut ou ne peut pas être vaincu quand il arrive: (c'est-à-dire l'invasion
barbare qui aujourd'hui n'est pas tant imminente qu'en voie même de
réalisation). Même dans la période d'obscurité (bolchevisme), il peut voir les
germes latents d'une nouvelle ère que la mission de l'Espagne est de nourrir
pour le monde dans le nouveau cycle à venir.
Mais bientôt il se trouva entraîné hors de la vie intellectuelle qu'il aimait, dans
la mêlée et l'ardeur i des luttes politiques qu'il n'aimait pas autant. Etre le fils
d'un dictateur constitue un grand handicap pour un avocat en pleine ascension.
Un jour, un client s'approcha de lui et lui suggéra que son influence personnelle
pouvait avoir un effet favorable sur le tribunal. Dans sa réponse, qui existe
encore, José Antonio interdit au client d'entrer dans son bureau et le menaça
nettement de le jeter en bas de l'escalier s'il se présentait chez lui avec de
semblables points de vue. Il serait agréable de s'arrêter de s'arrêter plusieurs
épisodes non politiques de sa vie et de citer des exemples de son esprit, de sa
générosité, de son charme, de son caractère entier d'homme, mais pour ces
détails il faudrait une biographie. Or, nous n'avons de place ici que pour parler
de la Phalange, de son fondateur et de la façon dont il vivifia celle-ci par sa
propre mort.
José Antonio a connu Mussolini et comme beaucoup d'autres a été
profondément impressionné par ce remarquable génie. Au commencement de
1933, son esprit paraît s'être arrêté pendant quelque temps sur la notion d'un
fascisme espagnol. Il écrivit même un article pour un journal qu'il avait le projet
de faire, «El Fascio», dont le directeur était un Journaliste conservateur dont la
conception du fascisme était inexacte. Le journal ne naquit jamais. L'idée n'était
pas mûre et aurait certainement échoué dans la pratique. Le véritable Espagnol
refuse sciemment de suivie un modèle étranger; l'influence et les méthodes
françaises, introduites sous les Bourbons, ont été uniformément désastreuses
et, avec les souvenirs de Charles V et du Grand Capitaine, les Espagnols
auraient probablement été moins accessibles à l'influence italienne qu'à aucune
autre. D'autre part, la conception espagnole de la vie est profondément
théologique, tandis que le fascisme, en dehors de son oeuvre originale de la
restauration de l'ordre à la place du chaos (oeuvre purement nationaliste et non
doctrinale) était une manifestation politique et pour cela d'un niveau hiérarchique
inférieur. Sur le plan sociologique aussi, l'idée nationale-syndicaliste espagnole
est très différente du corporatisme italien, comme les passages de ce livre sur
cette question le montrent. Et métaphysiquement, on peut difficilement trouver
un contraste plus frappant que ceux existant entre les principes de la Phalange
exposés dans les extraits 7, 19, 19, 59 et 62 entre autres et la fameuse doctrine
fasciste. «Tous dans l'Etat, tous pour l'Etat; personne hors de l'Etat, personne
contre l'Etat». Même si dans la pratique les attitudes qui découlent de ces
principes peuvent de temps en temps coïncider, le point de vue est radicalement
différent et l'espagnol est évidemment attaché aux principes ne la catégorie la
plus haute. Enfin, il y avait un élément romantique considérable dans le
mouvement italien (tandis que le national-socialisme germanique, dans sa forme
extérieure pure, était, profondément imprégné de romantisme, un élément
essentiel de l'esprit germanique). Au contraire, José Antonio était un
antiromantique intransigeant. Pour le reste, le lecteur doit se rapporter au texte.
Il verra que les observations de José Antonio sur le fascisme, dont beaucoup
sont extraites de ses lettres à Luca de Tena, furent faites bien avant la fondation
de la Phalange.
Cet événement eut lieu le 29 octobre 1933 à la réunion qui se tint au Théâtre
de la Comédie à Madrid. Il ressort de l'ensemble du discours et même des
extraits cités ici (qui, au fond, reproduisent presque intégralement celui-ci) que
José Antonio exposait une doctrine compréhensive qui s'était longuement
élaborée dans son esprit, il n'y a pas de tâtonnements avec les idées et rien de
vague, tout est clair, aigu et décisif comme sa propre intelligence.
Mais si la doctrine parut sortir toute armée comme Pallas Athénée de la tête de
Zeus, sa transformation en un mouvement pratique fut autre chose et la
Phalange, une fois fondée, manquait cependant d'une partie essentielle,
l'élément syndical qui devait livrer bataille à la fois physiquement et
métaphysiquement, dans l'âme des masses ouvrières, à l'idée marxiste. Cet
élément, dont l'incorporation compléta le mouvement, se joignit à celui-ci le 13
février 1934, quand la Phalange et la J. 0. N. S. (2) se fondirent en un seul
corps. De la J. 0. N. S., il faut dire quelques mots.
Au début de 1931, des doctrines et des idées semblables, bien qu'exprimées
de façon différente, et adressées plus particulièrement aux masses laborieuses,
avaient pris forme. En février 1931, avant même la chute de la monarchie,
Ramiro Ledesma Ramos avait publié son Appel à la Jeunesse. Un mois plus
tard, il publia la premier numéro de son journal «Conquista del Estado». A
Valladolid, au mois d'août de la même année, Onésimo Redondo fonda les
Conseils castillans d'action hispanique et le journal «Libertad». En novembre
1932, les deux forces s'unirent et choisirent comme emblème le joug et les
flèches (tirés des armoiries d'Isabelle la Catholique) et comme drapeau la
bannière rouge et noire du Syndicat national. C'était la naissance de la J 0. N. S
qui s'intégra en 1934 à la Phalange espagnole des J 0. N. S. sous la direction
suprême de Jasé Antonio.
Il y avait encore une autre force vitale dans le pays, le Traditionalisme vivant
représenté par les Requetés, mais ceux-ci étaient restés loin du tumulte de la
politique parlementaire et ils entretenaient leurs grandes traditions carlistes pour
le jour où ils pourraient coiffer la «boina» rouge une fois encore, et sortir de leur
forteresse de Navarre pour aller combattre pour Dieu, le Roi et la Patrie. Leur
jour vint le 18 juillet 1936. Le 20 juillet, il y eut environ 20.006 hommes armés et
disciplinés sur le champ de bataille aux ordres du général Mola et ils conquirent
le Nord pour le soulèvement national. Ce troisième grand élément fut incorporé
au Mouvement par le général Franco le 19 avril 1937. Mais tout cela ne se
profilait pas encore dans l'avenir et ne touche pas directement la vie de José
Antonio. Nous n'avons pas l'espace suffisant pour parler davantage des deux
grands «Jonsistes» Ledesma et Redondo, sauf pour dire qu'ils donnèrent tous
deux leur vie pour le Mouvement aussi vaillamment que leur chef, le premier
après une tragique défection suivie d'une réconciliation et d'une réparation où il
subit la mort et la mutilation des mains de la populace marxiste, le second après
une carrière immaculée de loyaux services où il mourut en combattant un ennemi
supérieur en nombre, au cours d'une embuscade, comme chef des Phalanges du
front de Castille aux premiers jours de la guerre civile.
Il faut parler un peu de José Antonio membre du Parlement. Rien ne pouvait
être plus étranger à son tempérament et à ses désirs personnels qu'une telle
occupation, comme le montrent tous les jugements qu'il porte sur le système
parlementaire «inorganique», sur son déroulement faux et ses futilités. Les
circonstances cependant le forcèrent à s'en servir an, profit de la cause qu'il
représentait. Sa première candidature fut posée à une élection partielle en 1931,
peu de temps après l'avènement de la République. Son seul objet était alors de
défendre la mémoire de feu son père, qui avait été calomnié dans tous les sens
(cf. l'extrait 148). C'était une circonscription de Madrid où José Antonio se
présenta comme candidat du bloc des droites. De violentes grèves et des conflits
sociaux avaient déjà éclaté et les premiers incendies d'églises avaient eu lieu le
10 mai. L'adversaire de José Antonio, le candidat des gauches, obtint le double
des suffrages de celui-ci, mais il faut noter que José Antonio eut 29.000 voix
d'électeurs qui le considéraient simplement comme le fils du dictateur défunt et
calomnié.
Il entra effectivement au Parlement deux ans plus tard. Un mois après la
fondation de la Phalange, en novembre 1933, à la fin de la première législature
de deux ans de la République, il fut élu comme député indépendant de la
province de Cadix. Le lecteur verra assez clairement ce qu'il pensait au système
en général et des Cortès espagnoles de cette époque. Cependant sa présence au
Parlement rendait un grand service o la Phalange qu'il était bon de défendre
contre des accusations fausses (et parfois criminelles) et des représentations
malveillantes en se servant de la publicité du Parlement pour déjouer la
conspiration générale du silence et encore plus pour diffuser ses propres
doctrines qui furent fréquemment adoptées, en partie, bien qu'ils ne le
reconnussent pas, par des politiciens de divers partis, y compris même par
Prieto (Extraits 265-267). Mais il serait fort inexact d'imaginer qu'il se servit
uniquement du Parlement pour des fins négatives et destructives; il parla
fréquemment d'importantes questions de l'Etat qui n'avaient pas de liens directs
avec la Phalange ou avec ses doctrines et ses discours, modèles d'habilité
politique et de dignité, se détachaient comme des joyaux au milieu de la masse
de stériles bavardages qui l'entouraient généralement dans les débats
parlementaires.
Fidèle au principe de la Phalange de défendre le bien être national contre les
intérêts particuliers de classe, il refusa de soutenir le projet d'établir une
raffinerie de sucre dans sa propre circonscription parce que cela aurait nui aux
légitimes intérêts d'autres provinces de la nation. Aux élections qui donnèrent le
pouvoir au Front Populaire, ce refus cause la défection de beaucoup d'électeurs
de droite qui l'avaient aidé auparavant à entrer aux Cortès. Leur politique à
courte vue et leur attitude égoïste lui coûtèrent son siège, c'était peu; mais avec
ce siège s'en alla l'immunité parlementaire et la perte de celle-ci entraîna dans
les faits la perte de sa vie.
Avec l'arrivée au pouvoir du Front Populaire commença une persécution de la
Phalange plus féroce encore que par le passé. Elle causa, beaucoup de meurtres
et d'emprisonnements, de fermetures de sections et de suppressions de
journaux. José Antonio lui-même fut arrêté sous une inculpation fallacieuse, en
mars 1936, et fut gardé en prison jusqu'à sa mort sous un prétexte ou sous un
autre. Tout ce que nous axions de lui, de mars 1936 à sa mort, consiste en écrits
qu'il a réussi d'une manière quelconque à expédier secrètement de sa prison. Ce
sont d'abord les feuillets de commentaires des affaires courantes et ses
instructions pour le Mouvement qu'il écrivit dans ce qu'il appelait les «horribles
cachots souterrains» du quartier général de la Police de Sûreté à Madrid («La
Russie a été le réel soutien du Front Populaire par le truchement du parti
communiste. Elle a dirigé celui-ci par ses ordres et par son or. La Russie a gagné
les élections»). Puis ses lettres avec hommes de l'Armée espagnole écrites de la
Prison Modèle de Madrid. Viennent ensuite trois circulaires d'instructions aux
chefs nationaux et locaux de la Phalange, d'une pensée prudente, les mettant en
garde solennellement contre certains pièges et certaines erreurs, spécialement
contre le danger de s'engager dans une révolte militaire prématurée ou mal
préparée. La dernière de celles-ci donnait des instructions minutieuses sur ce
que la Phalange devait faire en cas de soulèvement, au reçu d'ordres de lui seul
et il donnait comme mot d'ordre «Covadonga», le nom du défilé montagneux
consacré à la Sainte Vierge où le Goth Pelayo commença la première reconquête
de l'Espagne pour la Chrétienté, il y a plus de 1.200 ans. Les deux premières
sont datées de la prison de Madrid du 12 mai et du 24 juin. La troisième est
datée du 29 juin et n'indique pas de lieu d'origine. Ses dernières lignes disent
que les instructions doivent être considérées comme annulées le 19 juillet à
moins d'être formellement renouvelées.
Mais le 29 juin, il était déjà à Alicante où il avait été transféré le 6 juin. Il avait
réussi à envoyer encore une lettre datée également du 29 juin de la prison
provinciale d'Alicante, une lettre de louange et d'encouragement à ses
camarades des lignes du front de Madrid.
A Alicante, on le garda complètement «incomunicado» (au secret), a la seule
exception de l'interview donnée au journaliste Jay Allen du «News Chronicle» de
Londres, dont le récit fut publié dans ce journal le 24 octobre 1936. José Antonio
cite cette interview dans son testament, où il parle de la visite «d'un journaliste
américain». Les lecteurs du «News Chronicle» se rappelleront l'ardente sympathie
pour les rouges de ce journal, mais un examen de cet article montrera
l'impression étonnante produite sur le journaliste par José Antonio dont les
paroles ont été sans doute rapportées exactement. En particulier le fragment de
conversation suivant est digne d'être cité (3).
Allen écrit: «Ses yeux étaient fixés sur moi. Il voulait avoir des nouvelles, il
brûlait d'avoir des nouvelles. Que pouvais-je lui dire? Les gardes rouges de
service se tenaient près de nous. Il me devança en disant:
JOSE ANTONIO.— Mais que se passe-t-il maintenant? Je ne sais rien.
ALLEN.—Je suis sûr que ces amis ne m'ont pas amené ici pour vous donner
des informations, mais je vous poserai des questions hypothétiques auxquelles
vous pourrez répondre ou non.
JOSE ANTONIO.—Très bien.
ALLEN. —Que penseriez-vous si je vous disais que mon opinion est que le
mouvement au général Franco a abandonné sa direction première, quelle qu'elle
fût, et que maintenant c'est simplement la vieille Espagne qui combat pour ses
privilèges perdus?
JOSE ANTONIO.—Je ne sais rien, mais je ne crois pas que ce soit vrai. Si cela
était, ce serait mal.
ALLEN.—Et si je vous disais que vos hommes sont en train de se battre pour
les grands propriétaires (landlords)?
JOSE ANTONIO.—Je vous dirais qu'ils ne le font pas.
JOSE ANTONIO (continuant).—Vous souvenez-vous de ma position et de mes
discours aux Cortès? Vous savez que j'ai dit que si après octobre 1934 la droite
continuait sa politique négative de répression, Azaña reviendrait au pouvoir très
vite. La même chose se produirait maintenant. Si tout ce qu'ils font est de
retarder l'heure, ils se trompent. Ils ne seront pas capables de diriger l'Espagne
si c'est tout ce qu'ils font. J'étais pour quelque chose de différent, pour quelque
chose de positif.
Vous avez lu le programme de notre national-syndicalisme, la réforme agraire
et tous nos projets. J'étais sincère. J'aurais pu devenir communiste et acquérir la
popularité.
.................................................................................................................................
JOSE ANTONIO.— Je sais que si le mouvement triomphe et qu'il est purement
réactionnaire, je m'en retirerai avec la Phalange et j'irai dans cette prison ou
dans une autre au bout de quelques mois.
(«Il semblait plein d'une extraordinaire confiance», écrit Allen, qui ajoute: «0ui,
c'était un magnifique bluff!»)
ALLEN (aux gardes rouges).—Qu'allez vous faire de lui?
LES GARDES.—Il y aura un procès (ils se regardaient l'un l'autre).
Allen conclut: «Je ne peux imaginer une voie ou une circonstance qui puissent
sauver ce jeune homme. Sa situation est très grave, La seule chose que je puisse
faire est de ne pas la rendre pire.»
Deux écrits restent: son dernier Manifeste et son Testament. Tous deux se
trouvent intégralement dans ce livre et ne demandent pas de commentaires sauf
sur un point de détail.
Pourquoi fut-il envoyé à Alicante? Dans son Testament, il fait d'obscures
allusions —les seules notes vagues perceptibles dans son style cristallin—. On
élabora beaucoup de plans pour le délivrer: les uns complètement irréfléchis
comme la belle idée d'envoyer le gigantesque pugiliste, Paulino Uzcudun, le
bûcheron basque, à Alicante pour défoncer la prison par la force, d'autres
purement extravagants et un ou deux qui auraient pu avoir du succès sans une
reconnaissance fortuite. Mais Alicante n'était pas primitivement le lieu où l'on
avait l'intention de l'envoyer. Si le premier plan avait été suivi son sauvetage
aurait pu s'exécuter selon toute vraisemblance. On sait que les plans furent
changés au dernier moment et José Antonio put croire qu'on avait donné l'ordre
de rendre sa mort certaine, En fait, il y a des raisons de penser que le
fonctionnaire gouvernemental qui fit le changement procéda ainsi dans la
pensés honnête de rendre un sauvetage moins improbable et rien de plus. Les
deux sont morts maintenant et il n'y a rien à dire de plus. Mais cela peut servir à
expliquer ce curieux passage de son Testament.
Ce livre est une anthologie de sa pensée et non un ouvrage biographique,
encore moins un panégyrique. Ce n'est pas l'endroit de parler de la manière dont
il affronta la mort nous donnons plus loin les faits nus.
Il fut jugé te 19 novembre avec son frère Miguel et sa belle-soeur Margot.
Il se défendit et les défendit lui-même, calme et impassible, dans un plaidoyer
que le journal rouge «El Día» d'Alicante décrit comme un «chef-d'oeuvre
d'éloquence du barreau que le public écouta avec la plus grande attention et un
intérêt manifeste». A la fin de celui-ci, les journalistes eurent une courte
conversation avec lui et le même journal cite les dernières paroles qu'il prononça
en public:
«Vous voyez maintenant qu'un abîme idéologique ne nous sépare pas; si nous,
hommes, nous nous étions mieux connus les uns les autres et si nous nous
étions parlé, nous aurions compris que ces abîmes que nous pensions voir ne
sont que de petites vallées.» Puis vinrent les heures d'attente du verdict et
finalement la sentence.
Il arriva que par un hasard surprenant, un prisonnier était un prêtre que José
Antonio eut l'autorisation d'approcher. Il put se confesser à celui-ci. A l'aube du
20 novembre, il dit adieu à son frère et fut conduit dans une cour pour être
fusillé. En une anticipation prophétique de la future plénitude du mouvement
qu'il avait créé, il prit place en face des fusils avec deux Phalangistes d'un côté
et deux Requetés de l'autre. Il poussa un cri vigoureux: «Arriba España» et baisa
humblement le crucifix. Un moment après son corps était mort.
Ce corps repose maintenant dans une tombe devant le maître-autel de la
Basilique de l'Escorial où il fut accompagné par des milliers d'Espagnols qui
d'Alicante transportèrent le cercueil à pied.
Franco a dit: «Espagnols: José Antonio est mort, disent les crieurs de
journaux. José Antonio vit, déclare la Phalange. Qu'est-ce que la mort et qu'est-ce
que la vie?
«La vie est l'immortalité... Le grain n'est pas perdu, mais jour par jour il se
renouvelle avec une vigueur et une fraîcheur nouvelles. C'est la vie aujourd'hui
pour José Antonio.»
_______________________
(1) «Horizontes del pensamiento jurídico», par Luis Legaz y Lacambra, Professeur
de Philosophie du Droit à l'Université de Santiago (Bosch Barcelone, 1947).
(2) Voir le Glossaire.
(3) Le texte peut ne pas concorder mot pour mot avec celui du journal, car il a été
traduit des textes espagnols qui avaient été faits en hâte sur le champ de
bataille, mais le sens est le même.
SONNET A JOSÉ ANTONI0
DIONISIO RIDRUEJO
NOTE DU TRADUCTEUR
On a fait une traduction aussi fidèle que possible à l'esprit et même, autant
que cela se pouvait, au style. La numération des extraits correspond à celle de
l'édition espagnole originale, avec les exceptions notées en concordance. En une
douzaine de cas environ, on a pensé qu'une substitution était bonne: on a voulu
remplacer des extraits qui n'avaient un grand intérêt et une grande importance
que pour les Espagnols par d'autres d'une pensée à peu près identique
présentant un plus grand intérêt pour les lecteurs de langue française. De plus,
trois ou quatre textes d'un sens dépassé aujourd'hui ont été remplacés par
d'autres dont l'application est moins universelle ou moins générale. Dans ce
travail, on a pris soin de s'immiscer le moins possible dans le développement
logique de la pensée qui a dirigé l'auteur de l'anthologie dans sa sélection et
dans la disposition des textes. Une ou deux références omises dans l'édition
espagnole ont été insérées, chaque référence a été donnée intégralement et
datée au lieu de n'être désignée que par des initiales comme dans l'édition
espagnole, et occasionnellement un ou deux mots supplémentaires ou une
pensée originale ont été ajoutes au texte où l'on a inclus une citation donnée
quand il a semblé nécessaire de le faire pour rendre le texte plus clair au lecteur
de langue française.
Le dernier Manifeste de José Antonio, écrit la veille du Soulèvement national,
et son Testament, écrit trente-six heures avant sa mort ont été ajoutés en
supplément.
Madrid, 1950.
PREMIERE PARTIE
DOCTRINE
I
5. Le jeu impassible des règles est toujours plus sûr que notre appréciation
personnelle. La balance pèse avec plus de précision que la main.
Conférence, "Droit et Politique", 11-11-35.
II
LE CONCEPT DE L'HOMME
(A)
6. Pour nous, l'individu est l'unité fondamentale, car tel est le sentiment de
l'Espagne, qui a toujours considéré l'homme comme porteur de valeurs
éternelles.
Discours, "L'Espagne et la Barbarie", Valladolid, 3-3-35.
8. L'individu est, par rapport à la personne, ce que le peuple est par rapport
à la société politique.
Essai sur le Nationalisme, Avril, 1934.
11. On n'est une «personne» qu'en tant qu'on est autre; c'est-à-dire un en
face des autres, créancier ou débiteur possible des autres, maître de positions
qui ne sont pas celles des autres. Ainsi la personnalité de l'homme n'est pas
déterminée de l'intérieur, en tant qu'agrégat de cellules, mais de l'extérieur, en
tant que possesseur de relations.
ibid.
12. Nul n'est jamais né membre d'un parti politique; mais nous naissons
tous membres d'une famille; nous sommes tous habitants d'une commune;
nous nous livrons tous à l'exercice de quelque forme de travail.
Discours, Madrid, 29-10-33.
13. Servir est le seul moyen d'atteindre la dignité humaine. Seul est, grand
celui qui s'astreint à jouer un rôle dans l'accomplissement d'un grand
dessein. Ce point essentiel, la grandeur de la fin à laquelle on aspire, est ce
que vous ne voulez pas prendre en considération.
2eme Lettre ouverte à Luca de Tena, "A B C", 23-3-33.
14. Le «señorito» est le successeur dégénéré du «seigneur», de l'«hidalgo», qui
a écrit, jusqu'à ces derniers temps, les plus belles pages de notre histoire. Le
seigneur était un seigneur parce qu'il était capable de «renoncer», c'est-à-dire
d'abandonner ses privilèges, ses 'commodités, et ses plaisirs en hommage à
une haute idée de servir. «Noblesse oblige», pensaient les seigneurs, les
hidalgos, c'est-à-dire noblesse «exige». Plus on est, plus on doit être capable de
renoncer à être. C'est pourquoi des rangs élevés de la noblesse sont issus, la
plupart des noms qui se sont illustrés par le sacrifice.
"Señoritismo", "F. E.", 21-1-34.
(B)
(C)
17. L'homme, dans la cité, on ne le voit, pour ainsi dire, pas. Il est toujours
caché derrière sa fonction, derrière son vêtement. A la ville, on voit le
commerçant, l'électricien, l'avocat. A la campagne, c'est toujours l'homme que
l'on voit.
18. Nous, qui venons de la ville, nous nous sentons toujours un peu
inférieurs devant eux (ceux de la campagne). Eux, ne nous découvrent pas, si
l'on peut dire, derrière nos vêtements.
Ibid.
(D)
19. Quand le monde est sortit de ses gonds, on ne peut y remédier par des
onguents techniques; il faut tout un ordre nouveau. Et cet ordre doit, une fois
de plus, jaillir de l'individu.
Discours, "L Espagne et la Barbarie , Valladolid, 3-3-35.
III
LA LIBERTÉ HUMAINE
21. L'homme doit être libre, mais il n'existe pas de liberté si ce n'est au sein
d'un ordre.
Conférence, ' L'Espagne et la barbarie", Valladolid, 3-3-35.
IV
22. La propriété est la projection directe de l'homme sur les choses qu'il
possède, c'est un attribut élémentaire de l'homme. Le capitalisme a, peu à
peu, substitué à cette propriété de l'homme, la propriété du capital,
instrument technique de domination économique.
Conférence, Madrid, 19-5-35
23. Le travail est une fonction humaine, de même que la propriété est un
attribut humain. Que peut-on vouloir dire par «harmoniser le capital et le
travail».
Conférence, "L Espagne et la barbarie", Valladolid, 3-3-35. H «f
V
CONCEPT DE LA VIE
26. Les positions spirituelles ainsi emportées par la lutte héroïque contre le
spontané sont celles qui s'impriment ensuite le plus profondément dans notre
être authentique.
Ibid.
27. Telle est, entre autres, la douce récompense que l'on obtient en
s'efforçant de devenir meilleur. Si l'on perd des joies élémentaires, on en
trouve au bout de la route, d'autres, si chères et si intenses, qu'elles finissent
par envahir le domaine des attachements anciens, déracinés dès le début de
l'entreprise dominante.
Ibid.
VI
LE PEUPLE
L'HISTOIRE
29. La vie de tous les peuples est une lutte tragique entre le spontané et
l'historique. Les peuples à l'état primitif savent percevoir quasi végétalement
les caractères de la terre. Quand ils dépassent l'état primitif, ils se rendent
compte que ce ne sont pas les caractères telluriques qui leur donnent leur
figure propre, mais leur mission qui, au sein de l'universel, les différencie des
autres peuples. Quand survient une époque de décadence de ce sentiment de
mission universelle, les séparatismes commencent à refleurir. Les hommes se
tournent de nouveau vers leur sol, leur musique, leur .terre, leur langue et de
nouveau se trouve en péril la glorieuse intégrité de l'Espagne d'autrefois.
Discours, Valladolid, 4-3-34.
30. Comme je l'ai dit au Théâtre de la Comédie (*), le sens tout entier de
l'Histoire et de la Politique est soumis à la loi de l'amour. Il suffit de
comprendre l'amour pour qu'il nous dise à chaque instant, sans besoin d'un
programme divisé en articles et paragraphes numérotés, l'heure où nous
devons nous embrasser et l'heure où nous devons, nous affronter.
Discours, Madrid, 2-2-36.
__________
(*) N. T.— II s'agit du discours prononcé au théâtre de la Comédie à Madrid, le 29 octobre
1933, à l'occasion de la fondation de la Phalange.
31. Que nous assistions présentement à la fin d'une ère, c'est un fait que
(personne à peine n'ose nier, à moins de motifs intéressés. Cette ère à l'agonie
a été brève et brillante. Sa naissance peut se placer dans la troisième décade
du XVIIIème siècle. Son dynamisme interne peut s'exprimer grosso modo par
un seul mot: l'optimisme. Le XIXème siècle, dominé par les ombres tutélaires
de Smith et de Rousseau, croyait en fait qu'en abandonnant les choses à
elles-mêmes, tout irait pour le mieux dans le domaine économique comme
dans le domaine politique.
"Tradition et Révolution", Août 1935.
32. Notre temps ne fait pas quartier. Notre destin est un destin de guerre qui
nous impose de n'épargner ni notre peau ni notre sang. Et par fidélité à ce
destin, nous allons de place en place, endurait l'humiliation de l'exhibition
publique, obligés d'exprimer à grands cris ce que nous «avons conçu dans
l'austérité du silence; supportant l'imbécillité de ceux qui ne nous
comprennent pas et l'antagonisme de ceux qui ne veulent pas nous
comprendre, et nous cassant les reins à jouer l'habituelle comédie destinée à
conquérir «l'opinion publique» comme si le peuple, qui peut brûler d'amour ou
de colère, était capable aussi d'avoir, collectivement, une opinion.
Hommage et reproche a Ortega y Gasset, 5-12-35.
34. Nous, les jeunes, qui sommes mus par des impulsions spirituelles, et
affranchis de l'égoïsme grossier des vieux «caciques» (*), nous aspirons à créer
une Espagne grande et juste, dans l'ordre et la foi.
"Arriba.", 7-11-35.
_________
(*) Le "cacique", instrument de la politique de l'ancien régime dans les campagnes, exerçait sur
les habitants des villages des pouvoirs tyranniques se basant sur la corruption, les prêts
usuraires.
PATRIE, PATRIOTISME
(A)
36. La Patrie est ce qui donne corps à un grand dessein collectif. Sans ce
dessein il n'y a pas de Patrie; sans l'existence de cette foi en un destin
commun, tout se résoud à la province natale, aux saveurs et aux couleurs
locales.
La cornemuse et la lyre, "F. E.", 11-1-34.
37. La Patrie est une unité totale où s'intègrent tous les individus et; toutes
les classes; la Patrie ne peut être le privilège de la classe la plus forte, ni du
parti le mieux organisé. La Patrie est une synthèse transcendante, une
synthèse indivisible, qui a des fins propres à accomplir.
Discours, Madrid, 29-10-33
39. La Patrie est l'unique destin collectif possible. Si nous voulons la réduire
à une échelle plus petite, à la maison, au terroir, il ne nous reste plus qu'une
relation quasiment physique; si nous retendons à l'Univers tout entier, nous
nous perdons dans un concept vague et insaisissable. La Patrie est justement
ce qui donne lieu, sur une base physique, à une différenciation de 'l'Universel.
La Patrie est précisément ce qui unit et différencie, dans l'ordre universel, le
destin de tout un peuple; elle est, comme nous l'avons toujours dit, une unité
de destin dans l'universel.
Conférence, Madrid, 9-4-35.
(B)
40. Nous voulons que la Patrie soit comprise comme une réalité harmonique
et indivisible supérieure aux luttes entre les individus, les classes, les partis
et les différences naturelles.
41. Une Patrie nette, légère, entreprenante, débarrassée du ridicule de
l'opérette et de beaucoup de croûte traditionnelle. Non une patrie, qu'on
exalte en de vulgaires effusions, mais une Patrie comprise et conçue comme
exécutrice d'un grand destin!
43. ... L'Espagne est quelque chose de plus qu'une forme constitutionnelle;
... l'Espagne est quelque chose de plus qu'une circonstance historique; ...
l'Espagne ne pourra jamais être ce qui s'oppose à l'unité de son territoire, pas
plus qu'à l'une quelconque de ses régions.
Cortès, 2-1-34.
44. L'Espagne n'est pas une vaine invocation, mais elle est l'expression
intégrale d'un contenu spirituel et humain: la patrie, le pain. et la justice.
45. L'Espagne, depuis qu'elle existe, est et sera toujours une oeuvre...
L'Espagne a sa raison d'être dans une mission à accomplir.. L'Espagne ne
peut s'abandonner à des périodes interminables d'oisiveté, de dispersion, de
carence de raisons de vivre.
Cortès, 25-1-35. 3
(D)
(E)
50. ... cette forme de patriotisme est plus difficile à sentir, mais c'est dans
cette difficulté que réside sa grandeur . Du fait même que le patriotisme de la
terre natale se sent sans effort, et avec une sensualité envenimée, c'est une
belle entreprise humaine que de s'en dégager et de le dominer par le
patriotisme de la dure mission de l'intelligence. Voici quelle sera la tache d'un
nouveau nationalisme: remplacer les tentatives velléitaires de combattre les
mouvements romantiques avec des armes romantiques, par une forcé capable
d'élever devant le débordement romantique des redoutes classiques fermes et
inexpugnables; fixer les bases du patriotisme non dans l'affectif, mais dans
l'intellectuel; faire du patriotisme non un vague sentiment qui se fane à la
moindre velléité, mais une vérité aussi immuable que les vérités
mathématiques. Le patriotisme n'en sera pas pour cela, nécessairement, un
simple produit de l'intelligence.
Essai sur le nationalisme, Avril, 1934.
IX
THEORIE DE LA NATION
52. Pour nous, la nation n'est pas simplement l'attraction de la terre qui
nous a vu naître, l'émotion directe et sentimentale que nous ressentons tous
au voisinage de notre terroir. La nation est une unité de destin dans
l'universel, c'est le rang auquel s'élève un peuple quand il accomplit un destin
universel dans l'Histoire.
Cortès, 4-1-34.
53. Les nations ne sont pas des «contrats» qui peuvent être résiliés par la
volonté de ceux qui les ont conclus; ce sont des «fondations» avec une
substance propre, qui ne dépend pas de la volonté de quelques-uns d'un
grand nombre.
L'ETAT
(A)
58. Nous voulons que l'Etat soit en tout temps un instrument au service
d'une destinée historique, au service d'une mission historique une et
indivisible. Nous estimons qu.e l'Etat se porte bien s'il a foi en ce destin
historique total et s'il considère le peuple comme une intégrale d'aspirations.
Car, pour nous, le peuple est une intégrale de destin, d'effort, de sacrifice et
de lutte, qui doit être considéré en bloc, qui s'avance dans l'Histoire en bloc, et
qui doit être servi en bloc.
Cortès. 19-12-33
60. Que veut-on dire par un Etat fort? Un Etat ne peut être fort que s'il sert
un grand destin, s'il se sent l'agent d'exécution du destin d'un peuple. Sinon,
il n'est que tyrannique.
Conférence, Madrid, 9-4-35.
61. ... seul peut être fort, sans être tyrannique, l'Etat qui sert une unité de
destin. C'est pour cela que l'Etat fort, serviteur de cette conscience d'Unité, est
la vraie garantie de la liberté de l'individu. En revanche, l'Etat qui ne se sent
pas serviteur d'une unité suprême craint constamment de passer pour
tyranique.
Conférence, "L'Espagne et la barbarie", Valladolid, 5-3-35.
63. Le point de vue qui oppose l'individu à l'Etat et qui considère leurs
souverainetés comme antagoniques, est faux.
Ce concept de souveraineté a coûté beaucoup de sang au monde, et, lui en
coûtera encore, par-ce que cette souveraineté est le principe qui légitime
n'importe quelle action de son exécutant par la seule raison qu'il est ce qu'il
est. Naturellement, en face du droit du souverain de faire ce qu'il veut,
l'individu proclame le sien de faire aussi ce qu'il veut... Le cas est donc
insoluble.
Conférence, "Etat, Individu, Liberté", 4-4-35.
LA POLITIQUE
(A)
65. Si une politique ne se montre pas exigeante dans ses principes —c'est-à-
dire, rigoureuse dans sa position intellectuelle—, elle n'est plus guère qu'un
vol pesant à la surface de la médiocrité.
Hommage et reproches à Ortega y Gasset, "Haz", 5-12-35.
(B)
66. La politique est, avant tout, temporelle. La politique est un jeu contre le
temps, où l'on n'a pas le droit d'être en retard. En politique, il faut arriver et
arriver à l'heure.
Ibid
67. ... Aucun régime ne peut se soutenir s'il ne réussit pas a enrôler la
génération qui est jeune au moment ou il naît, et pour enrôler la jeune
génération il faut trouver les paroles justes, il faut savoir formuler avec
justesse la conception idéologique du régime.
Cortès, 6-6 34.
69. Il faut croire en quelque chose. Est-on Jamais arrivé à quelque chose par
l'attitude libérale? Quant à moi, franchement, je ne connais de résultats
féconds que ceux de la politique de la foi, dans un sens ou dans un autre.
Quand un Etat se laisse gagner par la conviction que rien n'est bien ni mal, et
que seule lui incombe une mission de police, cet Etat est tué raide par le
premier souffle brûlant de foi qui s'élève. Il suffit de quelques élections
municipales.
Lettre ouverte à Luca de Tena, "ABC", 22-3-33.
70. Toute grande politique s'appuie sur la naissance d'une grande foi. Quand
l'homme politique se tourne vers le monde extérieur —vers le peuple, vers
l'histoire— sa fonction est religieuse et poétique. Les fils de communication
entre le chef et le peuple ne sont pas strictement mentaux, mais poétiques et
religieux. C'est précisément pour que le peuple ne se dilue pas et ne devienne
pas amorphe—pour qu'il ne se «dévertèbre» pas—qu'il faut que la masse suive
ses chefs comme des prophètes. Cette interpénétration de la masse et des
chefs se réalise par un processus semblable à celui de l'amour. De là,
l'imposante gravité du moment où l'on accepte une mission de
commandement-. Rien qu'en l'assumant, on contracte une responsabilité
immense et inéluctable, celle de révéler à un peuple —incapable en tant que
masse de le découvrir par lui-même— son authentique destin. Celui qui
frappe la première note de la mystérieuse musique de chaque époque n'a
plus, dès lors, le pouvoir de refuser de terminer la mélodie. Il porte déjà le
poids de l'illusion d'un peuple, et déjà s'ouvre la redoutable comptabilité de
l'administration des espoirs qu'il a fait naître. Quelle ne sera pas sa
responsabilité si, comme dans le poème de Browning, il entraîne au son de
ses pipeaux une foule infantile pour l'ensevelir sous la montagne dont on ne
revient pas!
Hommage et reproches à Ortega y Gasset, "Haz", 5-12-35.
71. La flamme d'une foi nouvelle s'est allumée en Europe et brûle déjà en
Espagne, d'une foi nouvelle qui reconnaît comme vérité première, dans l'ordre
terrestre et civique, qu'un peuple est une entité complète, indivisible et
vivante avec un destin propre à accomplir dans l'universel. Le bien-être de
chacun de ceux qui composent le peuple ne réside pas dans l'intérêt
individuel mais dans l'intérêt collectif que la communauté doit sentir comme
sien, jusqu'au bout, sans hésitation. Aucun intérêt particulier légitime n'est
étranger à l'intérêt de la communauté, et par conséquent il n'est permis à
personne d'ébranler les fondations de la communauté pour des raisons
d'intérêt particulier, de caprice intellectuel ou d'orgueil.
Nouvelle lumière en Espagne, Mai, 1934.
72. La tâche de notre temps est de rendre aux hommes l'ancienne saveur de
la règle et du pain, de leur faire sentir qu'il vaut mieux obéir à une règle que
de vivre sans frein, et que si l'on veut parfois se déchaîner il faut être sûr de
pouvoir retrouver un ancrage solide. Et, d'autre part, dans le domaine
économique, de remettre l'homme debout, les pieds sur la terre, de le relier
d'une manière plus profonde aux choses: au foyer où il vit, à l'ouvrage
quotidien de ses mains.
Tradition et Révolution, Août 1935.
(C)
73. L'homme c'est le système. Et cela est une des vérités profondes que le
fascisme à remises en valeur. Le XIXème siècle a gâché tout son temps à
inventer des machines à bien gouverner. Autant aurait valu essayer d'inventer
la machine à penser ou à aimer. Aucune chose authentique, éternelle et
difficile comme gouverner n'a jamais pu être faite à la machine; il a toujours
fallu avoir recours en dernière heure à l'unique appareil qui, depuis le
commencement du monde, est capable de diriger les hommes: à l'Homme,
c'est-à-dire au chef, au héros.
"L'homme est le système".
74. Quelle machine à gouverner, quel système de poids et de balances, de
conseils et d'assemblées pourra jamais remplacer cette image du Héros
devenu Père, veillant à la lueur d'une petite lampe éternelle sur le labeur et le
repos de son peuple?
Ibid
77. Mais au plus fort des invasions barbares, on a toujours sauvé les germes
des valeurs permanentes que contenait déjà le moyen-âge précédent. Les
barbares submergèrent le monde romain, mais leur sang neuf féconda une
fois de plus les idées du monde classique. De même plus tard, la structure du
Moyen-Age et de la Renaissance se forma sur les bases spirituelles déjà
posées par l'Antiquité.
Et dans la révolution russe, dans l'invasion des barbares à laquelle nous
assistons, se trouvent déjà cachés et jusqu'à présent niés les germes d'un
futur ordre meilleur. Notre devoir est de sauver ces germes. Notre volonté est
de les sauver. Voilà le vrai travail qui est réservé à l'Espagne et à notre
génération: passer de la rive d'un ordre économique et social qui s'écroule à la
rive fraîche et pleine de promesses de l'ordre de demain —mais sauter par un
effort de notre volonté, de notre impulsion et de notre clairvoyance..., et sauter
sans être emporté par le torrent de l'invasion barbare.
Discours, Madrid, 17-11-35.
THEORIE DE LA REVOLUTION
(A)
79. ... une société qui sait qu'elle doit se réformer, c'est qu'elle a conscience
de sa propre injustice, et une société qui se croit injuste n'est pas capable de
se défendre avec vigueur.
Cortès, 6-11-34.
(B)
80. Nul ne joue sa vie pour un bien matériel. Les biens matériels, quels qu'ils
soient, se placent toujours au-dessous du bien supérieur de la vie. Quand on
met en jeu une vie «agréable», quand on risque ses avantages matériels, c'est
qu'on se sent plein de ferveur mystique pour une religion, pour une patrie,
pour l'honneur ou le sens nouveau de lia société dans laquelle on vit.
Cortès, 6-11-34.
(C)
82. Le fait de tout laisser rouler, arrive ce qui arrive, est une attitude
caractéristique des époques fatiguées, dégénérées; laisser tout rouler est plus
facile que de recueillir les morceaux, les arranger, séparer ce qui est bon de ce
qui est périmé... La paresse ne serait-elle pas la muse de bien des
révolutions?
Tradition et Révolution, Août 1935.
(D)
83 ...Tout fait, tout régime historique qui s'impose par un acte de violence
peut s'envisager de deux façons: soit comme une collection d'anecdotes, de
dates locales et individuelles ou bien comme un phénomène entier, né d'un
point de vue total, dans l'ordre du destin propre que cet ordre historique
s'assigne à lui-même dans l'avenir.
Cortès, 6-6-34.
(E)
84. Une révolution est toujours, en principe, une chose anticlassique. Toute
révolution change le rythme, pour juste qu'il soit, de bien des unités
harmoniques. Mais une révolution une fois en marche n'a plus que deux
possibilités: ou elle inonde tout, ou on la canalise. Ce que l'on ne peut faire,
c'est l'éluder, faire comme si on l'ignorait.
La victoire sans ailes, "F E", 7-12-33.
86. Une révolution —si elle veut être féconde et ne pas se disperser en
émeutes éphémères— exige la conscience claire d'une norme nouvelle et une
volonté résolue pour l'appliquer.
Autour de la Révolution, "Haz", 12-10-33.
87. La révolution est nécessaire, non pas précisément quand le peuple est
corrompu, mais quand ses institutions, ses idées, ses goûts, ont abouti à la
stérilité ou sont sur le point de l'atteindre. A ce moment se produit la
dégénérescence historique. Non la mort par catastrophe, mais le lent noyage
dans une vie sans grâce ni espérance. Toutes les attitudes collectives naissent
chétives, comme les produits de reproducteurs épuisés. La vie de la
communauté s'aplatit, s'abêtit, se noie dans le mauvais goût et la médiocrité.
Il n'y a, pas de remèdes à cela, sinon par une coupure et un nouveau
commencement. Les sillons ont besoin de semence nouvelle, de semence
historique, parce que l'ancienne a épuisé sa fécondité.
Mais qui sera le semeur? Qui aura à choisir la semence et le moment
pour la lancer sur la terre? Voilà le difficile
Ibid.
88. Quiconque médite ces minutes est obligé de se poser cette question: «a la
fin d'une période historique stérile, quand un peuple —par sa propre faute ou
par celle d'autres— a laissé rouiller tous ses grands ressorts, comment peut-il
mener à bien, par lui-même, l'immense tâche de sa propre régénération?»...
Un peuple tombé est incapable de concevoir et d'appliquer la règle. En cela
consiste le désastre. Avoir en main les ressorts précis qu'il faut pour mener a
bien une révolution féconde, est un signe indubitable que la révolution n'est
pas nécessaire. Et, au contraire, avoir besoin de la révolution, c'est manquer
de la clarté et de l'impulsion nécessaires pour l'aimer et la réaliser. En un
mot, les peuples ne peuvent se sauver en masse par eux-mêmes parce que le
fait d'être apte à réaliser son salut prouve déjà que l'on est sauf.
Ibid
89. La masse d'un peuple qui a besoin d'une révolution ne peut pas faire la
révolution.
Ibid.
90. Les peuples n'ont jamais été mis en mouvement que par les poètes, et
malheur à celui qui ne sait pas élever en face de la poésie qui détruit la poésie
de l'espoir.
Discours, Madrid, 29-10-33.
(G)
91. Quiconque se lance dans l'entreprise d'une révolution prend par là même
l'engagement de la terminer, ce qu'il ne peut pas faire c'est l'escamoter.
Cortès, 25-1-35.
92. ... Malheur à ceux qui n'affrontent pas l'âpre torrent de la révolution —
aujourd'hui encore plus ou moins invisible— pour canaliser vers le bien toute
son impétuosité.
"F.E.", 7-12-33.
93. ... la révolution ne peut être sauvée que si elle trouve un homme que les
masses ne tardent jamais à traiter de «traître». Les masses, dans leur
inconscience ingénue, considèrent toujours comme tiède ce que font les chefs;
elles se croient toujours trahies. Il est vain de chercher à échapper à cette
réprobation en cédant de plus en plus à leurs cris. Il n'y a qu'une espèce
d'hommes qui échappe au châtiment que les masses infligent à ceux qu'elles
accusent de trahison; ce sont ceux qui ne se préoccupent pas d'être fidèles
aux petits côtés de la révolution, mais qui savent deviner son sens profond et
la libérer par des voies que, sans eux, la masse n'aurait même pas
soupconnées. Paradoxe sans doute, mais ces traîtres sont les seuls serviteurs
loyaux et efficaces de la destinée populaire.
"Arriba", 31-10-35.
98. ... Un régime révolutionnaire ne trouve sa justification que dans ses états
de service, dans ses états de service considérés sous l'angle historique et non
sous l'angle anecdotique et mesurés par la confrontation entre ce que se
proposait le régime révolutionnaire au jour de la rupture avec le régime
antérieur et ce qu'il laisse après lui à la fin de son cycle.
ibid.
XIII
LE COMMANDEMENT
99. La dignité de chef est la charge suprême, celle qui oblige à tous les
sacrifices —y compris la perte de l'intimité— celle qui exige la divination
quotidienne de choses non mesurables, avec l'angoissante responsabilité
d'œuvrer.
C'est pour cela qu'il faut, considérer cette dignité avec humilité, comme
un simple poste de combat que l'on ne peut déserter, quoi qu'il arrive, par
impatience, découragement ou lâcheté.
Discours de Valladolid, 21-1-35.
100. Le chef ne doit pas obéir au peuple, il doit le servir, ce qui est différent;
le servir, c'est orienter l'exercice du commandement vers le bien public et
l'obtenir même si le peuple lui-même le méconnaît; c'est-à-dire, que le chef
doit avant tout se sentir d'accord avec le destin historique du peuple, fut-ce
contre les impulsions de la masse.
Autour de la Révolution, 'Haz", 12-10-35.
101. Etre un chef, triompher, pour dire le lendemain à la masse: «C'est toi
qui commande et le suis là pour t'obéir» c'est se décharger lâchement du
fardeau du pouvoir.
Ibid.
(A)
104. Le libéralisme est, dans un sens, le régime sans foi, le régime qui
abandonne tout, jusqu'aux choses essentielles du destin de la Patrie, aux
hasards de la discussion. Pour le libéralisme, rien n'est absolument vérité ni
mensonge. La vérité est, dans tous les cas, ce que proclame le plus grand
nombre de votes. Peu importe au libéralisme qu'un peuple décide de se
suicider, pourvu que la proposition de suicide soit régulièrement soumise à la
procédure de la loi électorale.
... Et comme le fonctionnement de la loi électorale oblige à stimuler la
vie des partis en les excitant les uns contre les autres, le système libéral est le
système de la désunion perpétuelle, de l'absence permanente d'une foi
populaire en une communauté profonde de destin.
Nouvelle lumière en Espagne, Mai, 1934.
105. Le libéralisme se sert des idées pour nous exciter et nous diviser; le
socialisme creuse entre nous le fossé, plus profond encore, de la lutte
économique. Que fait-on, dans l'un et l'autre de des régimes, de l'unité de
destin, sans quoi aucun peuple n'est à proprement parler un peuple?
Ibid.
107. L'Etat libéral ne croit en rien, même pas en lui-même. Il assiste les bras
croisés à toutes sortes d'expériences, y compris celles destinées à le détruire
lui-même. Il lui suffit que tout se déroule suivant certaines procédures
réglementaires. Peut-on imaginer rien de plus stupide? Un Etat pour lequel
rien n'est vrai érige ce principe de scepticisme, et lui seul, en vérité absolue et
indiscutable. Il fait un dogme de l'antidogmatisme. D'où il s'ensuit que les
libéraux seraient prêts à se faire tuer pour soutenir qu'aucune idée ne vaut la
peine que les hommes s'entretuent.
1ère Lettre ouverte à Luca de Tena, "A B C", 22-3-33.
112. La Révolution trouve tout prêts les principes de Rousseau et les adopte.
La Constitution de 1789, celle de 1791, celle de 1793, celle de l'An III et celle
de l'An VIII formulent le principe de la souveraineté nationale à peu près avec
les mêmes mots que Rousseau: «Le principe de toute souveraineté réside
essentiellement dans la Nation. Aucune corporation, aucun individu, ne peut
exercer d'autorité qui n'émane d'elle expressément.» Mais ne croyez pas qu'on
établisse, aussitôt ces déclarations faites, le suffrage universel. Une seule de
ces Constitutions révolutionnaires françaises, celle de 1793, qui ne fut pas
appliquée, admet cette forme de suffrage. Les autres, non. Dans les autres, le
suffrage est restreint, et disparait même dans celle de l'An VIII. Mais le
principe est toujours formulé: «Toute souveraineté réside essentiellement dans
la Nation».
A vrai dire, il y a quelque chose dans les Constitutions révolutionnaires
qui ne se trouvait pas dans «Le Contrat social», c'est la Déclaration des Droits
de l'Homme. Je vous ai dit que Rousseau n'admettait pas que l'individu se
réservât le moindre pouvoir en face de cette volonté souveraine, de ce «je» tout
puissant, constitué par la volonté nationale. Rousseau ne l'admettait pas; les
Constitutions révolutionnaires l'admettent. Mais c'est Rousseau oui avait
raison. Avec le temps, le pouvoir des Assemblées devint si grand qu'en fait la
personnalité humaine disparut, et qu'il devint illusoire d'invoquer contre ce
pouvoir un droit quelconque que l'individu se serait réservé.
Conférence, Madrid, 9-4-35.
113. Comme l'Etat libéral était au service de cette doctrine, il cessa d'être le
maître résolu du destin de la Patrie pour devenir simple spectateur des luttes
électorales. Pour l'Etat libéral, l'important était avant tout qu'aux tables de
vote fussent assis un nombre d'hommes déterminé, que le scrutin fut ouvert a
neuf heures du matin et clos à quatre heures de l'après-midi, et que les urnes
ne fussent pas brisées... ce qui est pourtant, pour une urne, le plus beau des
destins! Ensuite de respecter tranquillement le vote sorti des urnes, comme si
ce résultat Était pour lui, Etat, sans importance.
C'est dire que les gouvernants libéraux ne croyaient même pas en leur
propre mission; ils ne croyaient pas qu'ils étaient là pour remplir le devoir de
la faire respecter, mais, bien au contraire, que quiconque était en opposition
avec eux et se proposait d'en finir avec l'Etat de gré ou de force, avait le même
droit de le proclamer et de le tenter, qu'eux, gardiens de l'Etat, d'organiser sa
défense.
De là est sorti le système démocratique qui est, en premier lieu, le plus
ruineux par le gaspillage des énergies. Un homme doué pour la haute fonction
de gouverner, la plus noble peut-être de toutes les fonctions humaines, doit
dédier 80, 90 ou 95 pour 100 de son énergie à établir des formules d'objection
ou de réclamation, à faire de la propagande électorale, à sommeiller dans les
fauteuils de la Chambre, à aduler les 'électeurs, à endurer leurs
impertinences, parce que c'est d'eux qu'il va recevoir le pouvoir; à supporter
humiliation et vexations de ceux qui précisément, en vertu du principe quasi-
divin du gouvernement, étaient appelés à lui obéir; et, après tout cela, s'il lui
reste quelques heures dans la matinée, ou quelques minutes dérobées à un
sommeil agité, c'est pendant ces courts instants que l'homme doué pour
gouverner doit penser sérieusement aux questions primordiales du
Gouvernement!
... Puis vint la perte d'unité spirituelle des peuples. Car le système
fonctionnant sur la base de la majorité, tout ce que l'on voulait obtenir devait
d'abord réunir la majorité des suffrages. Et, en les volant, au besoin, aux
autres partis. Et en n'hésitant pas d'ans ce but à les calomnier, à déverser sur
eux les pires injures, à altérer délibérément la vérité, sang négliger aucun
procédé de mensonge ou d'avilissement.
Ainsi, bien que la fraternité soit un des postulats inscrits par l'Etat
libéral sur les frontons de ses monuments, il n'y eut jamais de vie collective
où les hommes, ennemis les uns des autres et s'injuriant les uns les autres,
se soient sentis moins fraternels que dans la vie turbulente et odieuse de
l'Etat libéral.
Discours, Madrid, 29-10-33
(A)
(B)
(C)
CRITIQUE DU MARXISME
122. Peut-on concevoir une forme de vie plus atroce que celle d'un prolétaire
qui passe parfois vingt ans à fabriquer la même vis dans la même immense
galerie d'usine, sans jamais voir terminé l'appareil dont cette vis fait partie,
sans jamais avoir d'autre lien avec l'usine que la frigidité inhumaine de la
feuille de paye?
Tradition et Révolution, Août 1935.
123. Une figure, à la fois repoussante et fascinante, celle de Karl Marx, plane
sur ce spectacle de la crise du capitalisme. A l'heure actuelle, partout, les uns
se proclament marxistes, les autres antimarxistes. Je vous le demande, et
c'est un rigoureux examen de conscience que je formule: «Qu'est-ce que cela
veut dire: être antimarxiste?» Cela veut-il dire qu'on ne désire pas
l'accomplissement des prédictions de Karl Marx? Alors, nous sommes tous
d'accord. Cela veut-il dire que Karl Marx s'est trompé? Alors, ce sont ceux qui
l'accusent d'erreur qui se trompent.
Discours, Madrid, 19-5-35.
128. Si la révolution socialiste n'était pas autre chose que l'implantation d'un
nouvel ordre économique, nous ne serions pas effrayés. Mais la vérité est que
la révolution socialiste est quelque chose de beaucoup plus profond. C'est le
triomphe du sens matérialiste de la Vie et de l'Histoire. C'est la substitution
violente de l'irréligiosité à la Religion, le remplacement de la Patrie par la
classe, fermée et haineuse, le groupement, dies hommes par classes et non le
groupement .des hommes de toutes les classes au sein d'une Patrie commune
à tous; c'est la substitution à la liberté individuelle de la sujétion à un Etat de
fer qui non seulement réglemente notre travail comme dans une fourmilière,
mais encore et tout aussi implacablement notre repos. C'est tout cela. C'est le
déchaînement de tempête d'un ordre destructeur de la civilisation occidentale
et chrétienne c'est le signal de clôture d'une civilisation que nous, qui avons
été nourris de ses valeurs essentielles, nous nous refusons à croire caduque.
Discours, Madrid, 19-5-35.
LE LIBERALISME ESPAGNOL
(A)
130. On pourrait presque dire que le libéralisme hors de l'Espagne n'a jamais
été autre chose qu'un passe-temps intellectuel, une espèce de farce pour
périodes de facilité. La France, par exemple, qui a fait plus que n'importe quel
autre pays pour la mise en circulation du libéralisme, a toujours pris grand
soin de le mettre de côté quand les choses devenaient graves. En France, on
ne s'amuse pas avec la Police—d'origine napoléonienne—ni avec la loi —avec
guillotine et Guyane- à sa disposition— ni avec la Patrie —année
d'implacables Conseils de guerre. Le libéralisme permet les bavardages et
tolère les licences superficielles. Rien de plus.
"Liberté", Valladolid, 22-10-34.
(C)
134. Notre modeste économie est obérée par l'entretien d'une masse
insupportable de parasites; de banquiers qui s'enrichissent en prêtant à
intérêt élevé l'argent des autres; de propriétaires de terres immenses qui, sans
effort ni amour de la terre, touchent des fermages énormes; d'administrateurs
de grandes Compagnies dix fois mieux rétribués que ceux qui, par leur travail,
les font marcher; de porteurs d'actions libérées qui le plus souvent sont
rétribués à perpétuité et payés pour leurs intrigues; d'usuriers, d'agioteurs et
d'entremetteurs. Pour entretenir cette couche d'oisifs, qui n'ajoutent
absolument rien à l'effort des autres; les directeurs, industriels, commerçants,
travailleurs, pêcheurs, intellectuels, artisans et ouvriers, qui s'épuisent dans
un travail sans illusion, doivent encore racler leurs maigres moyens
d'existence. Aussi le niveau de la vie des classes productrices, classe moyenne
et classe populaire, est-il, en Espagne, déplorablement bas. Pour l'Espagne
l'excédent des propres produits est un problème parce que le peuple espagnol
est tellement exploité qu'il peut à peine consommer.
"Arriba", 16-1-36.
(D)
135. Combien de fois avez-vous entendu dire à des hommes de droite: «Nous
sommes dans une nouvelle époque, il nous faut un Etat fort... Il faut
harmoniser le capital et le travail... Nous devons trouver une forme de vie
corporative.» Je vous assure que tout cela ne veut rien dire, ce ne sont que
bulles d'air... Harmoniser le capital et le travail!... C'est comme si l'on disait je
vais m'harmoniser avec cette chaise.
Quand on parle d'harmoniser le capital et le travail, ce que l'on veut
faire, c'est continuer à entretenir une minorité de privilégiés sans valeur avec
le travail de tous, des patrons aussi bien que des ouvriers.
Conférence, Madrid, 9-4-35.
V
(A)
136. L'histoire de l'Etat corporatif, c'est aussi une bulle de savon. Mussolini,
qui a quelque idée de ce qu'est un Etat corporatif, a prononcé un discours, il y
a quelques mois, lors de l'installation des vingt-deux corporations, et il a dit:
«Ceci n'est rien de plus qu'un point de départ; ce n'est pas un point d'arrivée.»
L'organisation corporative, à l'heure actuelle, n'est pas autre chose,
approximativement, dans ses lignes générales, que ceci: les ouvriers forment
une grande fédération, les patrons (les donneurs de travail comme on les
appelle en Italie) en forment une autre et entre ces deux fédérations, l'Etat
constitue comme une espèce de liaison. Comme solution provisoire c'est bien.
Remarquez que c'est un schéma très semblable, à une échelle géante, à notre
système de Jurys mixtes. Ce système maintient en bon état, à l'heure
actuelle, les relations entre capital et travail, sur la base définie par l'économie
capitaliste. Mais la position de celui qui fournit le travail, et, la position de
celui, qui loue son travail pour vivre, restent les mêmes.
Conférence, Madrid, 9-4-35.
(B)
137. Les états totalitaires n'existent pas. Il y a des nations qui ont trouvé des
hommes de génie, qui se sont substitués à l'Etat. Mais cela est difficile à
imiter, et en Espagne, aujourd'hui, nous ne pouvons qu'attendre que surgisse
un tel génie. Exemples de ce qu'on nomme Etats totalitaires: l'Allemagne et
l'Italie. Mais notez que non seulement elles ne se ressemblent pas, mais
encore qu'elles sont radicalement opposées. Elles partent de points opposés.
L'Allemagne part de la puissance de foi d'un peuple en son instinct racial. Le
peuple allemand est au paroxysme de lui-même. L'Allemagne vit en état de
super-démocratie. Rome, au contraire, fait l'expérience d'un chef de génie et
d'esprit classique, qui veut donner forme à un peuple par en haut. Le
mouvement allemand est de type romantique; sa route est celle de toujours;
de là est déjà partie la Réforme, et même la Révolution française, car la
Déclaration des Droits de l'Homme est une copie calquée de la Constitution
américaine, fille de la pensée protestante allemande.
Conférence, "L'Espagne et la barbarie", 3-3-35.
139. «La nouvelle selon laquelle José Antonio Primo de Rivera, Chef de la
Phalange espagnole des J. 0. N. S-, se disposait à se rendre à un Congrès
international fasciste qui se tient à Montreux est totalement fausse. Le chef de
la Phalange fut invité à y assister mais refusa nettement cette invitation parce
qu'il pense que la caractère national du Mouvement qu'il dirige est contraire à
l'apparence même d'une direction internationale.
D'autre part, la Phalange Espagnole des J.O. N. S. n'est pas un
mouvement fasciste; elle a avec le fascisme certaines coïncidences sur des
points essentiels; mais elle affirme chaque jour davantage une personnalité
propre avec ses caractères particuliers et elle est sûre de trouver en suivant
cette voie ses possibilités les plus fécondes.»
Note rédigée par José Antonio et publiée dans la Presse espagnole !e 9 Décembre 1934.
141. NOUS NE SOMMES PAS DES IMITATEURS. On nous critique aussi et on nous
accuse d'employer des procédés et des doctrines d'autres pays en nous taxant
d'être des imitateurs et on nous appelle «fascistes».
A ceux qui disent cela, nous devons répondre que si l'on entend par
fascistes des hommes qui ont une foi et une croyance en eux-mêmes et une
foi et une croyance dans leur Patrie comme en quelque chose de supérieur a
la somme des individus, comme une entité ayant sa vie propre, indépendante
et ayant une entreprise universelle à accomplir, nous le sommes
effectivement. Mais nous repoussons ce qualificatif si l'on croit que pour être
fascistes le côté externe suffit avec les défilés, les uniformes, les cérémonies
spectaculaires plus ou moins décoratives. C'est pourquoi le salut de l'Espagne
est directement en nos mains, sans médiation des partis politiques, ni des
députés, ni de rien d'autre que notre effort et notre volonté.
Discours à Callosa de Segura (Alicante), 22-7.34.
142. Notre Mouvement est le cœur propre de l'Espagne, On nous dit que
nous sommes des imitateurs. Onésimo Redondo a déjà répondu à cela. On
nous dit que nous sommes des imitateurs parce que ce mouvement qui est
nôtre, ce mouvement de retour vers le coeur même de l'Espagne est un
mouvement qui s'est produit auparavant en d'autres lieux. L'Italie et
l'Allemagne sont revenues à elles-mêmes dans une attitude sans espoir pour
les mythes par lesquels on essaya de les rendre stériles; mais parce que l'Italie
et l'Allemagne sont revenues à elles-mêmes et se sont entièrement trouvées
elles-mêmes, dirons-nous que l'Espagne les imite en se cherchant? Ces pays
se sont retournés vers leur propre essence et, en faisant de même, l'essence
que nous trouverons sera la nôtre et non celle de l'Allemagne et de l'Italie.
C'est pourquoi... en faisant ce qu'ont fait les Italiens ou les Allemands, nous
serons plus Espagnols que nous ne l'avons jamais été.
... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ...
Enfin, on nous dit que nous n'avons pas de programme. Mais
connaissez-vous quelque chose de sérieux et de profond qu'on ait fait une fois
avec un programme? Quand avez-vous vu que ces choses décisives, que ces
choses éternelles que sont l'amour et la vie et la mort se fassent
conformément à un programme? Ce qu'il faut avoir est un sentiment absolu
de ce qu'on veut: un sentiment absolu de la Patrie, de la vie, de l'Histoire et ce
sentiment absolu, clair dans l'âme, nous dit en toute conjoncture ce que nous
devons faire et ce que nous devons préférer. Dans les meilleures époques on
n'a pas eu tant de cercles d'études ni tant de statistiques, ni de cens
électoraux, ni de programmes. En outre, si nous avions un programme
concret, nous serions un parti de plus et nous ressemblerions à nos propres
caricatures. Tous savent qu'ils mentent quand, ils disent de nous que nous
sommes une copie du fascisme italien que nous ne sommes pas catholiques
et que nous ne sommes pas espagnols, mais ceux qui le disent se hâtent
d'organiser de la main gauche une sorte de simulacre de notre mouvement.
Ainsi feront-ils un défilé à l'Escortai si nous en faisons un à Valladolid.
(Discours de proclamation de la Phalange Espagnole des
J. 0. N. S. au Théâtre Calderón de Valladolid, 4 mars 1934.)
(A)
144. L'Espagne, depuis longtemps, menait une vie plate, pauvre, triste,
écrasée entre deux dalles qu'elle n'avait pas encore réussi à briser: en haut, le
manque d'ambition historique, en bas l'absence totale de justice sociale. Le
manque d'ambition historique nous vient, depuis trente ou quarante ans, du
pessimisme causé par l'impossibilité de trouver un intérêt, qui nous lie tous
en un effort commun pour une même cause. L'absence de justice sociale vient
de ce que, si les horreurs de la grande Industrie qui a déchaîné sur le monde
une de ses plus grandes crises, nous ont été épargnées —(et nous ne
cesserons jamais d'en remercier le ciel)— la vie de nos campagnes, de nos
petites villes et de nos villages est restée inhumaine, indéfendable. nous
devons le reconnaître.
Cortès, 6-6-54.
146. ... Je ne dois pas, maintenant, parler au nom de la piété filiale. Je dois
parler comme membre d'une génération à qui il est échu de vivre après la
Dictature, et qui, bon gré mal gré, doit juger d'un œil serein, et si possible du
haut de l'Histoire, le phénomène historique et politique de la Dictature.
Cortès, 6-6-34.
(B)
153. La Monarchie espagnole avait été l'Instrument historique d'une des plus
grandes destinées universelles. Elle avait fondé et maintenu un Empire, et
cela simplement par le fait de sa vertu fondamentale: l'unité de
commandement. Sans unité de commandement, on n'arrive à rien. Mais la
Monarchie a cessé d'être l'unité de commandement depuis longtemps. Sous
Philippe III, déjà, le Roi ne commandait plus. Il restait le signe apparent, mais
l'exercice au pouvoir était tombé dans les mains d'hommes vigoureux, de
ministres: de Lerma, d'Olivares, d'Aranda, de Godoy. Quand vient Charles IV,
la Monarchie n'est plus qu'un simulacre sans substance. La Monarchie qui a
fait ses débuts dans les camps, s'est réfugiée aux Cortès. Le peuple espagnol
est implacablement réaliste. Il exige de ses saints patrons qu'ils lui donnent la
pluie quand elle fait défaut et s'ils ne la lui accordent pas, ils les tournent de
dos sur l'autel. Il n'a jamais compris ce simulacre de Monarchie sans pouvoir.
C'est pour cela que, le 14 avril 1931, le simulacre tomba de son trône, sans
même trouver pour le défendre un piquet le hallebardiers.
Discours, Madrid 19-5-35.
(C)
156. Il n'y a pas eu souvent de moment plus propice pour ouvrir un nouvel
et grand chapitre de l'histoire de la Patrie... Il n'y avait pas de ressentiments a
couver, de justices à exécuter, à peine quelques larmes à sécher. Un espoir
lumineux brillait, pour tout un peuple, vers l'avenir. Vous vous souvenez de
l'allégresse du 14 avril, et certainement beaucoup d'entre vous y ont pris part.
Comme toutes les allégresses populaires, elle était imprécise et ne percevait
pas ses propres raisons; mais elle recelait, au fond d'elle-même, comme tous
les mouvements populaires, des mobiles précis et profonds. L'allégresse du 14
avril, c'était la rencontre, une fois de plus, du peuple espagnol avec la vieille
nostalgie de sa révolution toujours pendante. Le peuple espagnol avait besoin
de sa révolution et il croyait l'avoir faite le 14 avril 1931. Il le croyait, et cette
date semblait lui promettre deux grandes choses, longuement convoitées: la
restauration d'une âme nationale commune l'établissement d'une vie
matérielle humaine pour tous les Espagnols.
Discours, Madrid, 19-5-35.
158. ... La révolution du 14 avril n'apportait rien moins que ceci, et c'était
son apport le plus profond et le plus intéressant: l'incorporation des
socialistes à une œuvre de gouvernement non exclusivement prolétarienne.
Cortès, 6-6-34.
(D)
165. ... C'est une pure perte de temps, pour un régime, que de vouloir établir
les responsabilités des régimes antérieurs.
Cortès, 6-6-34.
(E)
167 .... Le reproche politique que l'on peut faire à M. Azaña, l'accusation
vraiment grave que l'on a le droit de porter contre lui est la suivante: M. Azaña
a eu entre les mains une de ces possibilités qui s'offrent aux peuples une fois
tous les cinquante, soixante ou cent ans: M. Azaña aurait pu, tout
simplement, faire la résolution espagnole, l'inajournable, l'indispensable
révolution espagnole.
Cortès, 21-3-35
(F)
170. Sous ces expressions superficielles, droite, gauche, est caché quelque
chose de profond. On peut résumer ainsi l'essentiel de ces deux attitudes: la
droite estime que les buts généreux de l'Etat justifient n'importe quel sacrifice
individuel et que l'on doit subordonner n'importe quel intérêt personnel à
l'intérêt collectif. La gauche, au contraire, pose comme affirmation primordiale
celle de l'individu, à qui tout est subordonné. Son intérêt est la fin suprême,
et rien qui y attente n'est considéré comme licite.
Mais, d'après ces définitions, le communisme serait de droite? Car el
communisme subordonne tout à l'intérêt de l'Etat; en aucun pays, il n'existe
aussi peu de liberté qu'en Russie; en aucun, l'oppression n'est aussi
étouffante. Mais on sait que la fin dernière du communisme est une
organisation sans Etat ni classe, une anarchie égale et parfaite. Ainsi l'ont
proclamé les chefs communistes: après une dure étape de rigueur dictatoriale,
ce sera, ou à peu près, le régime du collectivisme anarchique.
Dans les époques grossières, comme celle que nous traversons, les
profils de ces d'eux constantes se brouillent. Ce qui explique que les ultra-
consérvateurs se sentent de gauche, c'est-à-dire, individualistes, quand il
s'agit de défendre leurs intérêts. Tant la droite que la gauche se mêlent et se
contredisent elles-mêmes parce qu'elles ont tourné le dos à l'esprit
fondamental de leurs données constantes.
"Etat, Individu, Liberté", 28-3-35.
174. (la droite et la gauche) couvrent leur insuffisance avec des mots. Les
uns invoquent la Patrie sans la ressentir ni la servir le moins du monde; les
autres voilent leur dédain, leur indifférence pour le problème profond de
l'homme, de formules qui ne sont que des manifestations verbales, sans
aucune signification.
Ibid.
(G)
175. Il est juste que les urnes ressemblent au tambour de la loterie. Qu'une
boule roule la première dans un trou, ou qu'un paquet de bulletins en écrase
un autre, cela se vaut. Ainsi en décide quelque démon chargé des hasards de
la loterie..., c'est-à-dire quelque esprit, bon ou mauvais, de justice, de
représailles ou d'hystérie. Pur hasard! Une bonne plaisanterie contre un
candidat peut, en dernière heure, le priver de la victoire. La démangeaison de
renverser un gouvernement qui l'irrite peut déterminer un peuple à détruire
mille choses.
"F. E.", 7-12-33.
176. Et il y a des gens qui croient qu'a ce tirage on n'a gagné rien moins que
la Contre-révolution., Et beaucoup sont très contents!
Une fois de plus, l'Espagne, cherche à cicatriser à faux, à fermer la plaie sans
que soit résolu le processus interne, en propres termes à tenir pour liquidée
une révolution quand la Révolution continue à vivre à l'intérieur, plus ou
moins bien couverte par la mince pellicule sortie des urnes.
ibid.
(H)
177. ... de l'école populiste, que voulez-vous espérer? L'école populiste est
comme une de ces grandes fabriques allemandes où l'on produit des «ersatz»
de presque toutes les choses authentiques. Que surgisse dans le monde, par
exemple, le phénomène socialiste, l'impulsion sanguinaire, violente et
authentique des masses socialistes, aussitôt l'école populiste, riche en fichiers
et en jeunes hommes avisés, pleins de sagesse et de courtoisie, mais qui
ressemblent étrangement à ceux que forment les écoles maçonniques les plus
raffinées, produit un «ersatz» du socialisme et organise une chose qui se
nomme démocratie chrétienne: en face de Maisons du Peuple, des Maisons du
Peuple, en face des fichiers, d'autres fichiers, en face des lois sociales,
d'autres lois sociales. On s'applique à écrire des mémoires sur la participation
aux bénéfices, sur les retraites ouvrières et mille autres jolies choses. Le
malheur est que les ouvriers authentiques n'entrent pas dans les cages
élégantes du populisme et ces cages élégantes n'arrivent pas à se réchauffer.
Que surgisse dans le monde le fascisme, avec sa valeur de lutte, de
soulèvement, de protestation de peuples opprimés contre l'adversité, son
cortège de martyrs et ses espoirs de gloire, et aussitôt le parti Populiste se lève
et part, mettons pour l'Escorial, pour que personne ne se sente visé, et
organise là un défilé de jeunes, avec drapeaux, voyages payés et tout ce qu'on
voudra, sauf la valeur juvénile, révolutionnaire et forte des jeunesses
fascistes.
Madrid, 19-5-35.
180. La paix et la sieste. Voilà tout ce que désire la plus grande partie de
cette Espagne qui vient, par sa Constitution, de renoncer à la guerre parce
qu'elle a, par dégénérescence, perdu le goût de l'héroïsme.
"Haz", I9-7-35.
(I)
184. Après tout, s'il n'arrivait, rien d'autre que l'écroulement de cette
baraque, dont nous avons tous prévu et désiré la fin, nous, n'aurions rien de
mieux à faire qu'à rester simples spectateurs. Mais ce n'est pas cela
seulement. A la veille de l'écroulement, nous nous demandons avec angoisse:
«Oui, mais après?»
ibid.
(J)
185. Le séparatisme local est le signe de la décadence et surgit au moment
même où l'on oublie que la Patrie n'est pas la sensation immédiate, physique,
que nous percevons en nous-mêmes dans notre spontanéité primitive.
Discours, Valladolid, 4-3-34.
188. Une région est majeure quand elle a acquis une conscience si forte de
son unité de destin dans l'ensemble de la patrie que le relâchement des liens
administratifs ne fait plus courir aucun danger à cette unité.
"L'Espagne est irrévocable", "F. E.", 19-7-34.
189. Tous ceux qui ont le sens de l'Espagne crient «Vive la Catalogne» et
vivent toutes les terres soeurs dans la mission admirable, éternelle et
glorieuse que nous ont léguées, avec le nom d'Espagne, des siècles d'effort.
Cortès, 4-1-34.
196. Le gouvernement sait parfaitement bien tous les appuis qu'il avait
autour de lui le 7 octobre. Je ne rappellerai pas une seconde fois que c'est
l'impulsion joyeuse use mes compagnons et adhérents qui se manifesta en
premier lieu à la Puerta del Sol, avec moi-même à leur tête. Mais j'ajoute que
c'était surtout pour crier au Gouvernement: «Vous êtes arrivés à une date
décisive, si décisive qu'elle peut avoir pour l'Espagne des conséquences
infinies.»
Ibid.
198. ... Cette veine militaire héroïque —celle de toujours— nous a sauvés. Il
faut lui rendre son ancienne prééminence.
Ibid.
199. Les hommes qui ont tenté de pénétrer dans les oeuvres vives de la
réalité espagnole pour la détruire ont joué de la Catalogne comme d'un pion
solide et sacrifié. Les chefs de la révolution désintegrante, suicidaire et stérile
que nous avons subie se sont servis des Catalans comme d'hommes de paille
et de victimes commodes, en utilisant la démence anachronique, sanglante,
burlesque d'une minorité locale imprégnée de sentiments particularistes
troubles et équivoques qui, dans les dernières heures oscillait entre la
spéculation imbécile ou haineuse et le crime de droit commun.
201. Ce sont toujours les occasions manquées qui ont ouvert le chemin aux
révolutions nationales. C'est parce qu'on a gâché Vittorio Veneto qu'a eu lieu
la marche sur Rome. La Révolution nationale, dans les rangs de laquelle le
m'enrôle, viendra peut-être de ce qu'on a gâche le 7 octobre.
Cortès, 6-11-34.
(L)
202. Dans la nuit d'avant-hier à hier ont été assassinés à Séville deux jeunes
phalangistes. Ils s'appelaient Eduardo Rivas et Jerónimo de la Rosa. Des «fils
à papa» fascistes? Non! L'un, un modeste peintre, l'autre étudiant en même
temps que petit employé des Chemins de fer... La Phalange a l'orgueil de
pouvoir affirmer qu'elle n'a jamais commencé les agressions. Un jour, un
ouvrier phalangiste est tué. Toute la ville proclame le parti communiste
auteur de l'attentat. Aucun centre communiste n'est fermé, aucune sanction
n'est imposée à un communiste connu... il ne se passe rien.
Mais, quelques jours plus tard, quand deux ou trois attaques contre
des phalangistes ont eu lieu, un certain nombre de communistes reçoivent
des coups de revolver à la porte de leur centre. Sans la moindre enquête, le
gouverneur de Séville met en prison, non les responsables présumés, mais
une quinzaine de dirigeants de la Phalange, leur impose à chacun une
amende de 5.000 pesetas et fait fermer tous les centres de la province.
En Espagne, à l'heure actuelle, un mouvement révolutionnaire s'agite,
un mouvement très menaçant, terriblement menaçant pour les
traditionalistes et pour vous autres aussi, libéraux bourgeois et républicains
de gauche.
J'ai là, monsieur le Ministre de l'intérieur, une publication non
clandestine. C'est un livre qui se nomme «Octobre» et que j'ai pu acheter en
payant le prix... A la page 100 de ce livre sont imprimées les conclusions de la
Fédération des Jeunesses socialistes. Je voudrais que M. le Président me
permette d'en l'ire trois ou quatre lignes, en tout cas pas plus d'une douzaine.
Les conclusions des Jeunesses socialistes sont l'es suivantes: «Pour la
bolchevisation du parti socialiste. Expulsion du réformisme. Elimination du
Centrisme des postes de direction. Abandon de la IIème Internationale. Pour la
transformation de la structure du parti» —écoutez bien ceci—, «dans un sens
centralisateur et avec un appareil illégal».
Ceci n'est pas écrit dans une publication clandestine. L'intention de
créer un appareil illégal par une association reconnue est formulée dans un
livre que tout le monde peut acheter pour trois pesetas.
Et ce qui s'agite, d'une façon toujours plus âpre, plus hostile, plus
brutale, derrière ces coalitions plus ou moins probables des socialistes et des
républicains de gauche, parlons clairement, c'est une dictature du type
asiatique, russe, qui n'a rien gardé de la sensibilité qui animait autrefois les
mouvements ouvriers.
ibid.
203. Tout cela contient la menace d'un sens de la vie asiatique, russe,
absolument opposé à l'idéal occidental, chrétien, espagnol.
Le mouvement russe n'a rien à voir avec le printemps sentimental des
mouvements ouvriers. Le communisme russe veut implanter la dictature du
prolétariat, mais par un certain nombre de dirigeants communistes à la tête
d'une puissante armée rouge. Et cette dictature nous fera vivre sur la base
suivante: plus de sentiment religieux, plus d'émotion patriotique, plus d'e
liberté individuelle, plus de foyer, plus de famille.
... Mais l'horreur de manger dans des réfectoires, de ne pas avoir de
foyer familial, d'être obligé de se divertir selon une certaine technique ou un
certain système; rien que cela fait dresser les cheveux sur la tête de n'importe
quel bourgeois ou de n'importe quel ouvrier espagnol.
Le régime russe en Espagne serait un enfer. Mais vous savez déjà par la
Théologie que l'Enfer lui-même n'est pas le mal absolu. Dans le même sens, le
régime russe n'est pas, non plus, le mal absolu. C'est, si j'ose dire, la version
infernale de l'aspiration à un monde meilleur.
204. Nous avons 700.000 ouvriers en chômage et pour remédier à ce fait qui
constitue en lui-même le démenti le plus cinglant de ce que nous prétendons
être la civilisation moderne et occidentale de l'Espagne; pour répondre à
l'accusation vivante de ces 700.000 affamés, voici la politique qu'on a
annoncée: la C.E.D.A. a rédigé un projet ou une proposition de loi, car elle
n'était pas au pouvoir à ce moment, pour attribuer 100 millions aux secours
de chômage, «Cent millions!», s'écrie le partie radical. Nous, nous élaborons
un projet attribuant 1.000 millions. Naturellement, ni 1.000, ni 100 millions
ne sont allés depuis aux secours de chômage.
En revanche, on nous donne l'espoir consolant que quelques édifices
publics plus ou moins nécessaires vont être élevés, pour apaiser les esprits.
En vérité, est-ce que le gouvernement croit que les successeurs
immédiats de ceux qui ont fait la révolution du 14 avril en proclamant qu'ils
allaient instaurer un ordre social nouveau —sentiment que partageaient
même les adversaires du sens politique du 14 avril— que ces hommes qui ont
promis une organisation nouvelle de l'économie vont se contenter de voir
élever quelques bâtiments publics et croire que cela résoud le problème
social? Que le Gouvernement comprenne qu'en vérité, cela n'est pas suffisant
pour justifier un système politique ni un régime.
Cortès, 25-1-35.
(N)
208. Une fois rompue toute possibilité de vie en commun, il faudra dissoudre
les Cortès. En quelques élections le pays sera livré a la bataille entre les deux
moitiés acharnées: la droite et la gauche. Qui l'emportera? Pour le savoir, il
faut examiner ce que sont, en Espagne, la gauche et la droite.
Lettre a un officier espagnol, 1935.
211. En ce sens, la victoire du Front Populaire n'est pas bonne pour nous.
Mais le triomphe de la droite n'a pas été meilleur. Nous serions arrivés à un
tel degré de dégradation utilitaire, que tout aurait tendu à étouffer
complètement les valeurs spirituelles et, ce qui est pire, à les travestir en pur
verbalisme, parodie et falsification. Ce processus de dégradation était déjà très
avancé à la veille des élections. Son triomphe, cette fois, eût été celui d'un
capitalisme cristallisé dans ses pires tendances. Spirituellement, la Phalange
aurait souffert davantage dans cette paix fangeuse que dans la guerre franche
et brutale aujourd'hui déclenchée.
"Dans la tempête", 1936.
213. Les cris, vous les avez entendus dans les rues; non seulement «Vive la
Russie» et «Russie, oui; Espagne, non!»; mais le honteux, le monstrueux cri de
«Mort à l'Espagne». Pour avoir crié «mort à l'Espagne», personne n'a été puni
jusqu'à présent, tandis qu'il y a des centaines de gens en prison pour avoir
crié «Vive l'Espagne!» ou «Espagne d'abord!». Si cette vérité, qui fait dresser les
cheveux sur la tête, n'était pas connue de tout le monde, on n'oserait pas
l'écrire, de peur de passer pour un menteur.
Ibid.
214. Les objectifs de la révolution sont bien clairs. Le groupement socialiste
de Madrid dans le programme officiel qu'il a rédigé, réclame pour les régions
et les colonies un droit illimité d'auto-détermination, y compris celui de se
prononcer pour l'indépendance.
Ibid.
(P)
216. L'armée est, avant tout, la sauvegarde de ce qui est permanent; c'est
pour cela qu'elle ne doit pas se mêler de luttes accidentelles. Mais quand c'est
le permanent même qui est en s péril, quand l'existence même de la Patrie est
en danger —(qui peut, par exemple, si les choses tournent mal, perdre son
unité)—, alors l'armée n'a plus qu'un remède: délibérer et prendre parti. Si
elle s'abstient, par une interprétation superficielle de son devoir, elle s'expose
à se trouver du jour au lendemain sans rien à servir. Devant tes écroulements
décisifs, l'Armée ne peut servir ce qui est permanent que d'une manière, en le
restaurant aussitôt par les armes.
Lettre à un officier espagnol, 1935.
219. Bon gré mal gré, soldats d'Espagne, l'armée qui, depuis quelques
années, est le seul gardien des traditions essentielles qui révèlent notre
existence historique, l'Armée va devoir assumer la charge de remplacer l'Etat,
qui a cessé d'exister.
Le destin de l'Espagne, une fois entre les mains de l'Armée, il y a deux
écueils à prévoir, deux écueils contraires, capables de faire échouer l'épreuve.
Ces deux écueils sont l'excès d'humilité et l'excès d'ambition.
1. Excès d'humilité.— Il est fort à craindre que l'Armée ne s'assigne à
elle-même le rôle, trop modeste, de simple agent d'exécution de la révolution
et s'empresse, aussitôt celle-ci réalisée, de déposer le pouvoir entre d'autres
mains. Dans ce cas, on peut prévoir deux solutions, qui seront des erreurs:
a) Un gouvernement de notables, c'est-à-dire, une réunion de
personnages éminents appelés en raison de leur réputation, sans souci des
principes politiques qu'ils professent. Cela frustrerait le pays de la magnifique
possibilité nationale du moment. Un Etat est plus que l'ensemble d'un certain
nombre d'organisations techniques, c'est plus qu'une bonne gérance, c'est
l'instrument historique du destin d'un peuple. On ne peut conduire un peuple
sans la claire conscience de son destin. Mais précisément, c'est
l'interprétation de ce destin et les chemins à suivre pour l'accomplir qui
constituent une position politique. L'équipe de personnages illustres appelée
au gouvernement, s'ils ne sont pas unis par une foi commune, ne constituera
bientôt qu'une gérance, plus ou moins bonne, qui languira sans susciter
autour d'elle aucune chaleur populaire.
b) Le gouvernement de concentration, ou réunion de représentants des
différents partis disposés à participer au gouvernement, cette solution
ajouterait à la stérilité interne spécifique de la solution précédente, celle de
n'être rien d'autre qu'une rechute dans la politique des partis, pour préciser,
des partis de droite, car il est bien évident que ceux de gauche ne vont pas
intervenir. C'est dire que ce qui aurait pu être le commencement d'une ère
nationale pleine de promesses se trouvera réduit, une fois de plus, au
triomphe d'une classe, d'un groupe, d'un intérêt partiel. voilà quels seraient
les dangers d'un excès d'humilité.
Mais le contraire est aussi à craindre. Nous allons, l'examiner.
2. Excès d'ambition.— Non, entendons-nous bien, d'ambition
personnelle des militaires, mais d'ambition historique, ceci arriverait si les
militaires, persuadés qu'il ne suffit pas d'une bonne gérance, mais qu'il est
nécessaire de susciter l'émotion d'une tâche collective, d'une interprétation
nationale du moment historique, cherchaient à la susciter par eux-mêmes.
C'est-à-dire si les militaires, auteurs et co-exécutants du coup d'Etat, se
proposaient de découvrir par eux-mêmes la doctrine et la route de l'Etat
nouveau. Pour une telle tentative, les militaires n'ont pas une formation
politique suffisante. Si je voulais essayer, comme tant d'autres, de flatter
l'armée, je lui attribuerais en bloc toutes les capacités. C'est parce que je sais
ce que représente l'Armée, et l'immense trésor de vertu silencieuse, héroïque,
intacte qu'elle renferme, qu'il me paraît indécent de l'aduler. Je pense, au
contraire, que c'est un acte de loyauté de mettre a son service un effort de
clairvoyance. C'est pour cela que je dis, comme je le pense: l'Armée, habituée
à considérer que la politique n'est pas sa mission, a, en politique, un angle de
vue étroit. Elle pèche par ingénuité quand il s'agit d'imposer des solutions
politiques. Son manque de fermeté doctrinale et de puissance dialectique fait
qu'elle n'attire pas longtemps le peuple, ni les jeunes. N'oublions pas le cas du
général Primo de Rivera: malgré son patriotisme, son courage et son
intelligence naturelle, il ne réussit pas à exciter un enthousiasme durable,
faute d'une vision suggestive de l'Histoire. L'Union patriotique, pauvre de
substance doctrinale, resta dans un vague plein de candeur et de bonnes
intentions.
Si la Providence met de nouveau entre vos mains, Officiers, le destin de
la Patrie, songez que vous seriez impardonnables de vous engager dans ce
chemin sans issue. N'oubliez pas que celui qui rompt les normes de l'Etat,
contracte par cela même l'obligation d'en édifier un nouveau, et non pas
seulement celle de rétablir uni, simple apparence d'ordre, et que l'édification
d'un état nouveau exige de lui un sens résolu et mûri de l'histoire et de la
politique, et non pas seulement une téméraire confiance en sa propre capacité
d'improvisation.
Lettre à un officier espagnol, 1935.
TROISIEME PARTIE
DIRECTIVES PRATIQUES
I
220. Nous avons passé quelques lustres à écouter des leçons de propagande
défaitiste et nous étions presque arrivés à perdre foi en nous-mêmes. Nous
n'étions plus que les héritiers d'une Espagne faible, détraquée, d'une Espagne
de carte postale; du Madrid du «Fornos» et du foyer d'Apollon, de journalistes
spadassins pendant que l'Espagne achevait de perdre son Empire. Nous nous
étions habitués à une vie médiocre et fanfaronne.
Cortès, 9-10-34.
222. ... quand nous, les hommes de notre génération, avons ouvert les yeux,
nous avons trouvé un monde moralement en ruines, un monde divisé à tous
les points de vue, et en ce qui nous touche de plus près, une Espagne
moralement déchue, une Espagne déchirée par toutes sortes de haines et de
luttes.
Discours, Madrid, 29-10-33.
223 ...une jeunesse qui, à l'heure actuelle, a quitté le cadre des partis
gouvernementaux et des partis d'opposition, et qui ne l'a pas quitté parce
qu'elle a la démangeaison de jouer les «fils à papa» fascistes. Rien n'est plus
loin de notre idée.
...notre génération, qui a peut-être devant elle trente ou quarante ans
de vie, ne se résigne pas à continuer à vivre écrasée entre l'absence d'audition
historique et le manque de justice sociale.
Cortès, 6-6-34.
224. Nous tous, qui nous sommes penchés sur le monde depuis des
catastrophes comme la Grande guerre, la crise mondiale, et des événements
comme la Dictature et la République espagnole, nous sentons en Espagne le
besoin latent, le besoin qui devient bous les jours plus urgent, d'une
révolution, et ce besoin est issu de deux veines: la justice sociale qu'il faudra
bien arriver à instaurer, et le sens profond de la tradition, moelle de l'esprit
espagnol, qui ne réside peut-être pas où bien des gens pensent, et qu'il est
nécessaire de rajeunir à tout prix.
Cortès, 3-7-34.
225. ... si une génération doit s'adonner à la politique, elle ne peut le faire
avec le répertoire d'une demi-douzaine de phrases qui ont déjà servi a
plusieurs autres.
Ibid.
228. Nous avons besoin de deux choses: d'une nation et d'une justice
sociale. Nous n'aurons pas de nation tant que chacun d'entre nous se
considérera comme porteur d'un intérêt particulier, d'un intérêt de groupe ou
de parti. Nous n'aurons pas de justice sociale tant que chacune des classes,
dans un régime de lutte, cherchera à imposer sa volonté aux autres. C'est
pour cela que ni le libéralisme, ni le socialisme ne peuvent nous donner ce qui
nous manque.
"Nouvelle lumière en Espagne" , Mar, 1934.
231. En face d'une volonté offensive décidée, une résistance froide et passive
ne suffit pas. A une foi, il faut opposer une autre foi. Même dans les époques
impériales, où il y a tant de choses qui valent la peine d'être conservées, la
volonté inerte de conservation ne suffit pas. Une nation est toujours une
oeuvre, et l'Espagne, particulièrement: ou exécutrice d'un destin dans
l'universel ou victime d'un processus rapide de désintégration.
"Avant les élections", "Arriba", 16-1-35.
234. (La mission de la jeunesse espagnole est)... bien claire: mener à bien par
elle-même l'édification d'une Espagne entière, harmonieuse. Par elle-même,
qui la sent et qui la comprend, sans intermédiaires ni dirigeants.
"La jeunesse sous les intempéries", "Arriba", 7-11-35.
238. ... Vous verrez comme nous referons la dignité de l'homme pour rebâtir
sur elle la dignité de toutes les institutions qui, ensemble, composent la
Patrie.
Discours, Madrid, 19-5-35.
II
L'INSTRUMENT DE LA REVOLUTION
239. ... avec une candeur risible, ils conseillaient comme remède le retour
pur et simple aux anciennes traditions, comme si la tradition était un «état» et
non un «processus», et comme si le miracle de marcher en arrière et de
retourner vers l'enfance était plus facile pour les peuples que pour les
hommes.
... Entre ces deux attitudes, nous fûmes quelques-uns à nous
demander si une synthèse ne pourrait pas être réalisée entre les deux choses:
d'un côté la révolution, non comme prétexte à laisser tout aller, mais comme
occasion chirurgicale de tout refaire d'une main ferme et guidée par une règle;
de l'autre, la tradition, non comme remède, mais comme base substantielle,
non avec l'idée de copier l'œuvre des grands ansêtres, mais dans l'esprit de
deviner ce qu'ils auraient fait à notre place.
"Tradition et Révolution", Août, 1935.
242. Nous nous sommes unis par en haut, en hommes nobles et généreux,
pour défendre la Patrie avec abnégation, non pour servir des intérêts
subalternes ou soutenir les particularismes qui unissent les partis de classe
sous le masque des grands principes. Car nous n'avons pas, nous, de bas
intérêts de classe à défendre, et ceux qui nous connaissent, ceux qui nous
regardent de près, en profondeur, le savent parfaitement. Nous nous sommes
unis par tout ce qui est grand et noble, et par nos émotions plus encore que
par nos intelligences. C'est le sang de nos morts qui nous a unis. C'est lui qui
a signé notre pacte.
F. E et J. 0 N S., "Fe", 22-2-34.
244. Notre mouvement... n'est pas une manière de penser, c'est une manière
d'être. nous ne devons pas nous proposer seulement la construction,
l'architecture politique. Nous devons adopter devant la vie toute entière, dans
chacun de nos actes, une attitude humaine, profonde, complète. Cette
attitude, c'est l'esprit de service et de sacrifice, le sens ascétique et militaire de
la vie.
Discours, Madrid, 29-10-33.
245. Ici personne n'est rien, sinon une pièce d'un tout, un soldat de l'oeuvre
qui est notre oeuvre et celle de l'Espagne.
Discours, Valladolid, 4-3-34.
247. Discipline, service, sont les mots qui flottent au-dessus de cette
génération dont l'aspiration profonde est de rendre impossible une nouvelle
attaque contre l'être sacré, éternel et indivisible, de l'Espagne.
"Arriba", 18-4-35.
249. La milice est une exigence, une nécessité inéluctable pour les hommes
et les peuples qui veulent assurer leur salut, un ordre irrésistible pour ceux
qui sentent que la Patrie et la continuité de son festin demandent en choeurs
passionnés, en vagues de voix impérieuses et impériales, leur encadrement
dans une force hiérarchisée et disciplinée, sous le commandement d'un chef,
en obéissance à une doctrine, pour la mise en oeuvre d'une seule tactique,
généreuse et héroïque.
Ibid.
250. Vous avec vécu, chaque jour, la vie tendue de la Phalange, vous êtes
arrivés à comprendre la vie avec une attitude complète, un sens total,
applicable aux grandes choses comme aux petites. Votre allure s'est faite sous
le signe hardi de la chemise bleue; vous avez acquis un vocabulaire typique.
"Haz", I9-7-35.
252. ... Et si, pour obtenir cela, il faut parfois recourir à la violence, nous
n'hésiterons pas à recourir à la violence. Je ne sais plus qui a dit —parlant
de «tout sauf la violence»— qu'au sommet de la hiérarchie des valeurs
morales, il y a l'amabilité — et que lorsqu'on insulte à nos sentiments
profonds, avant de réagir en hommes, nous avons d'abord l'obligation d'être
aimables. J'admets, oui, la dialectique comme premier instrument
communication. Mais quand on attaque la Justice et la Patrie, il n'y a pas
d'autre dialectique admissible que celle des poings et des armes.
Discours, Madrid, 29-10-33.
253. Tout système s'est implanté par la violence même le doux libéralisme...
La violence n'est pas condamnable systématiquement. Elle ne l'est que
lorsqu'on l'emploie contre la Justice. Même Saint Thomas, dans les cas
extrêmes, admet la rébellion contre le tyran. Si donc on emploie, la violence
contre une secte triomphante qui seine la discorde, nie la continuité
nationale, et obéit à des ordres venus de l'étranger (Internationale
d'Amsterdam, Maçonnerie, etc...) pourquoi dénigrer le système que cette
violence cherche a imposer?
"Pendant que l'Espagne fait la sieste", "Haz", 19-7-35.
254. Nous ne voulons pas végéter dans l'ordre ancien. Sous lui, l'Espagne a
souffert l'humiliation internationale, la dissension interne, le dégoût des
grandes entreprises, l'outragé, la saleté, les conditions de vie indignes
d'hommes qui sont celles de millions d'individus...
... Il faut mobiliser l'Espagne du haut en bas, la mettre sur le pied de
guerre. Elle doit s'organiser, tout de suite, et non rester au lit comme un
malade qui n'a pas envie de guérir, entre les onguents et les cataplasmes
d'une bonne administration.
Ibid.
255. ... nous, qui ne sommes ni de droite ni de gauche, qui savons que l'une
et l'autre de ces positions sont incomplètes, insuffisantes, mais qui n'ignorons
pas non plus que tout le matériel humain dont dispose l'Espagne est réparti
entre la droite et la gauche, et attend là, la voix du salut...
Discours, Madrid, 2-2-36.
256. ...les membres de cette jeunesse, dont je fais partie, considèrent non
seulement qu'une dictature de droite ou de gauche est une chose mauvaise,
mais encore qu'il est mauvais qu'il existe une position politique de droite et
une position politique de gauche.
Cortès, 19-12-33.
258. ...nous nous sentons, sinon l'avant-garde, du moins l'armée d'un ordre
nouveau qu'il faut que nous implantions en Espagne, je le dis et j'ajoute avec
ambition, d'un ordre nouveau que l'Espagne doit transmettre à l'Europe et au
monde.
Discours. "L'Espagne et la barbarie", Valladolid, 3-3-35.
261. ... bien des gens supposaient que nous étions venus au monde pour
jouer notre vie pour la défense de leur propre tranqu^lité, ils nous
reprochaient même dans certains journaux conservateurs de ne pas nous
livrer à l'assassinat, et imaginaient que nous jouions nos vies et celles de nos
jeunes camarades à seule fin que leur repos à eux ne fût pas troublé.
Cortès, 3-7-34.
265. Si nous nous sommes lancés à travers les campagnes et les villes
d'Espagne, avec beaucoup de travail et quelque danger —ceci n'importe
guère— pour prêcher la bonne nouvelle, c'est parce que, comme vous l'ont dit
tous les camarades qui ont parlé avant moi, nous sommes sans Espagne.
Nous avons une Espagne divisée par trois guerres de sécession: les
séparatismes locaux, la lutte entre les partis et la division des classes.
Discours, Valladolid, 4-3-34.
267. Depuis que l'on affirme que nous avons cessé d'exister, il n'y a pas un
seul aspect de la vie espagnole qui ne soit imprégné de notre présence. Je ne
parle pas de fascisme ou d'antifascisme. Je parle spécifiquement des idées et
du vocabulaire de la Phalange. Il suffirait de faire défiler devant vos mémoires
les mots employés dans les thèmes politiques jusqu'à il y a trois ans: «droite»,
«gauche», «hommes d'ordre», «démocratie», «réformes sociales»... Qui oserait
nier leur débilité? Et, même pour les mouvements qui ont accompli, en leur
temps, une mission considérable, pourrait-on énumérer sans retouche, leur
vieille liste: «religion», «patrie», «famille», «propriété»? Evidemment chacun de
ces thèmes continue à symboliser des valeurs humaines fondamentales, mais
delà on ne peut plus les proclamer ainsi. La lettre reste pleine de sens, mais la
musique a déplorablement vieille. La lutte politique a acquis un autre ton et
une autre profondeur. Ceux qui n'étaient pas du côté du marxisme se sont
enfin rendu compte qu'il faut le regarder en face, et creuser jusqu'à l'extrémité
de ses racines... plus simplement; que tout antidote contre le marxisme est
inefficace s'il ne part pas de la donnée suivante: le monde... assiste aux
ultimes moments de la fin d'une ère. Peut-être de l'ère du capitalisme libéral,
peut-être d'une autre plus ample, dont le capitalisme libéral n'est que la
dernière étape. Nous nous trouvons en face d'une imminente «invasion de
barbares», d'une de ces catastrophes historiques qui ont coutume d'annoncer
les ères nouvelles. Jamais la frivolité n'a été moins de saison. Jamais plus que
maintenant la vie n'a eu un sens religieux et militant. Les plaies de nos jours
refusent de se cicatriser à faux. Il faut appeler a notre secours les ultimes
réserves vitales, celles qui, dans les périodes ascendantes, ont réussi à bâtir
les nations. De là le mot «national» compris comme propagande d'une
mission, d'une tâche, et non comme programme commun de tous les partis.
Bien des gens, à l'heure actuelle, arborent le drapeau du nationalisme. Mais
les premiers qui ont prononcé ce mot «national» en politique active, avec ce
sens précis, poétique et combattant, ce sont les hommes de la Phalange
espagnole.
Et avec lui, toute une dialectique, toute une poétique et une austérité
rigide, faute surtout de renoncement. Au début, nous étions peu nombreux et
notre voix était faible. Jamais nous n'avons disposé de grands organes de
publicité. Nos manifestations, une presse en partie hostile, en partie méfiante,
n'en a jamais parlé qu'en sourdine. C'est sans doute par les voies
mystérieuses qu'emploient les idées religieuses que s'est propagée et diffusée
notre doctrine. A l'heure présente, il n'y a pas un seul homme politique
espagnol qui n'ait adopté plus ou moins ouvertement quelque point ou
quelque trait de notre vocabulaire.
Ibid.
268. Je suis stupéfait de voir que. au bout de trois ans, l'immense majorité
de nos compatriotes persiste à nous juger sans avoir, en aucune façon,
commencé à nous comprendre, voire sans avoir sollicité, ni accepté,
l'information la plus rudimentaire. Si la Phalange se consolide sous une forme
durable, je pense que tous ressentiront une véritable douleur en pensant à
tout le sang versé pour ne pas avoir voulu nous accorder quelque attention
impartiale entre la fureur d'une part et l'antipathie dé l'autre.
Testament de José Antonio.
269. Alors que bien des baudruches gonflées s'effondraient aux premiers
coups de l'adversité, la Phalange, persécutée et sans argent, est la seule qui
maintienne sa foi joyeuse en une renaissance de l'Espagne et son front
inébranlable en face des assassinats et des violences.
Manifeste cent dans la prison de la Sécurité Générale, 14-3-36.
270. Nous sommes entrés dans la lutte... pour qu'un Etat autoritaire projette
ses bienfaits de la même façon sur les puissants et sur les humbles.
Discours, Madrid, 29-10-33.
271. Pour tout ce qui n'est pas négation, lâche, notre effort, et sans lésiner!
Sous les plis de ce drapeau, oui, nous sommes prêts à nous enrôler —au
premier ou au dernier rang— dans un front national. Non pour triompher
dans quelques élections aux effets éphémères, mais dans un but de pérennité.
Il nous parait monstrueux que le sort de l'Espagne doive se jouer tous les
deux ans au hasard des urnes: que tous les deux ans s'engage la tragique
partie, dans laquelle, à coups de cris, de corruptions, de niaiseries et
d'injures, on risque tout ce qu'il y a de permanent en Espagne et on détruit la
concorde entre Espagnols. Pour une grande oeuvre collective, nous voulons
bien d'un front national. Pour un dimanche d'élections et quelques vaines,
déclarations, non! Cette conjoncture électorale ne représente rien d'autre pour
nous qu'une étape. Quand nous l'aurons parcourue avec succès, nous savons
que nous ne serons pas seuls pour tenter r'entreprise que j'ai définie dans ces
lignes. Mais seuls ou non, tant que Dieu nous en donnera la force, nous
poursuivrons notre chemin—sans orgueil ni faiblesse—avec l'âme tranquille
de l'artisan et du militant.
"Avant les élections", 1936.
274. Notre Phalange, porteuse d'une foi nouvelle, refera de l'Espagne une
nation et instaurera la justice sociale. Elle lui donnera le pain et la foi... Une
nourriture décente avec l'allégresse impériale ..
Nouvelle lumière en Espagne, mai, 1934.
275. Dieu veuille que son ardeur ingénue ne soit jamais employée qu'au
service de la grande Espagne dont rêve la Phalange.
Testament de José Antonio.
III
LA TACHE DE LA REVOLUTION
(A)
278. Notre sens intégral de la Patrie et de l'Etat qui doit la servir, exige:
Que tous les peuples d'Espagne, pour divers qu'ils soient, se sentent
harmonisés par une irrévocable unité de destin. Que les partis politiques
disparaissent. Personne n'est jamais né membre d'un parti politique; en
revanche, nous naissons tous membres d'une famille; nous sommes tous
habitants d'une commune; nous nous livrons tous à l'exercice d'un travail.
Donc, si telles sont nos unités naturelles, si la. famille, la commune et
la corporation sont , ce en quoi nous vivons réellement, en quoi avons-nous
besoin de l'instrument intermédiaire et pernicieux des partis politiques qui
pour nous unir en groupements artificiels commencent par nous désunir
dans nos réalités authentiques?
Nous voulons moins de grandes phrases libérales et plus de respect de
la liberté profonde de l'homme. Nous voulons que tous se sentent membres
d'une communauté sérieuse et complète, car les fonctions sont nombreuses:
les unes comportent le travail manuel, d'autres l'activité de l'esprit, quelques
unes un magistère des coutumes, du goût, du raffinement. Mais dans une
communauté comme celle que nous désirons, il faut qu'on sache dès
maintenant qu'il n'y aura ni invités ni fainéants.
Nous ne voulons pas qu'on vienne nous parler sans cesse de droite
individuels, si ces droits ne peuvent s'exercer dans la maison de ceux qui ont
faim. Ce que nous voulons, c'est qu'on donne à tout homme, à tout membre
de la communauté politique et par le fait même de l'être, une manière de
gagner par son travail une vie humaine, juste et digne.
Nous voulons que l'esprit religieux, clef des plus belles voûtes de notre
Histoire, soit respecté et protégé comme il le mérite, sans que pour cela l'Etat
s'immisce dans des fonctions qui ne lui sont pas propres, ou y participa —
comme il l'a fait parfois pour d'autres Intérêts que ceux de la vraie religion—
sauf s'il lui appartient en propre de le faire.
Nous voulons que l'Espagne recouvre résolument le sens universel de
sa culture et de son Histoire.
Discours, Madrid, 29-10-33.
279. ...nous voulons... que le mouvement présent et l'Etat qu'il crée soit un
instrument efficace, autoritaire, au service d'une unité indiscutable, de cette
unité permanente qui se nomme Patrie.
Ibid.
280. ...nous voulons que tous les peuples d'Espagne ressentent, non
seulement le patriotisme élémentaire qui provient de l'attraction de la terre,
mais le patriotisme de la mission, le patriotisme du transcendant, le
patriotisme de la grande Espagne.
Cortès, 4-1-34.
(B)
281. C'est là une grande et belle tâche pour ceux qui considèrent vraiment la
Patrie comme une œuvre: alléger la vie économique de la ventouse capitaliste,
appelée irrémédiablement, à éclater en communisme; dévier le courant des
bénéfices absorbés par le capitalisme parasitaire vers le réseau vivant des
producteurs authentiques, pour nourrir la petite propriété privée, libérer
vraiment l'individu, qui n'est pas libre tant qu'il a faim, et donner de la
substance économique aux vraies unités organiques: la famille, la commune,
avec son patriotisme communal reconstitué, et le syndicat, non plus simple
représentant de ceux qui doivent louer leur travail comme une marchandise,
mais bénéficiaire du travail obtenu par l'effort de ceux qui le constituent.
Manifeste, Avant !es élections, 16-1-36.
284. Les ouvriers sont le sang et la terre d'Espagne, Ils font partie de nous.
Ne les croyez pas ennemis bien qu'ils crient contre nous. Non, camarades!
Tous ceux qui vous regardent avec des yeux mauvais quand vous criez notre
journal, ou quand vous distribuez nos tracts, ne sont pas nos ennemis. Ils
sont une partie même de notre Phalange.
"Front Rouge", "Arriba", 16-5-35.
292. Selon notre plan..., qui va donner a l'ouvrier une part beaucoup plus
grande, et réserver au Syndicat ouvrier une participation directe dans les
fonctions de l'Etat, nous n'allons pas réaliser les progrès sociaux un par un,
comme qui fait des concessions successives dans un marchandage, mais bien
refaire la structure économique de haut en bas, d'une autre façon, sur des
bases nouvelles et en conséquence nous arriverons a un ordre social
beaucoup plus juste.
Cortés, 6-11-34.
(D)
294. Nous irons dans les campagnes et les villages d'Espagne pour
transformer en élan leur désespoir. Pour les incorporer à l'entreprise
commune. Pour changer en effort ce qui n'est aujourd'hui que la légitime
férocité d'animaux sauvages, reclus dans leurs terriers, sans aucun des
agréments et des joies de la vie humaine. C'est parmi les rochers et les
chemins escarpes qu'on trouve l'Espagne, notre Espagne. C'est la que nous la
trouverons pendant qu'au palais des Cortés quelques groupes politiques
séquestreront leur victoire sans ailes.
"F. E.", 7-12-33.
295. Avec une intelligente reforme agraire... et avec une reforme du crédit qui
arracherait les cultivateurs, les petits industriels et les petits commerçants
aux griffes dorées de l'usure bancaire, avec ces deux choses, on pourrait
assurer pour cinquante ans le bonheur du peuple espagnol.
Discours, Madrid, 19-5-15.
296. ... Deux choses manquent: une réforme du crédit, comme transition,
vers la nationalisation, et une réforme agraire qui délimiterait les zones
cultivables et les unités économiques de culture, qui y installerait
révolutionnairement le peuple des travailleurs et rendrait à la forêt et à
l'élevage les terres inaptes à la culture que grattent aujourd'hui des
multitudes de malheureux condamnés à la faim perpétuelle.
Manifeste, Avant les élections, 1936.
299. La Réforme agraire espagnole devra comprendre deux parties, sinon elle
ne sera qu'un remède partiel et probablement une aggravation des choses. En
premier lieu, elle exige une réorganisation, économique du sol espagnol. Le sol
espagnol n'est pas entièrement cultivable. Il y a des territoires immenses du
sol espagnol où être fermier ou petit propriétaire revient également à
perpétuer un misère dont ni les pères, ni les fils, ni les petits-fils ne pourront
jamais se tirer. Il y a des terres absolument pauvres auxquelles l'effort
ininterrompu de générations et de générations n'a jamais pu arracher plus de
trois ou quatre grains pour un. Tenir cloués à ces terres les habitants
espagnols, c'est les condamner pour toujours à une misère qui se transmettra
à leurs descendants.
Il faut commencer, en Espagne, par délimiter les zones habitables du
territoire national. Ces zones constituent une superficie qui n'excède peut-être
pas le quart du territoire et dans ces zones habitables il faut déterminer les
unités de culture. Il n'est question ni de grande, ni de petite propriété, mais
d'unités économiques de culture. Il y a des régions où la grande propriété est
indispensable —la grande propriété, non le grand propriétaire, ce qui est
autre chose— parce que seule la grande culture peut supporter les frais
nécessaires pour que l'exploitation soit bonne... Il y a des régions où la petite
propriété est un bon système de culture, il y a des régions où elle est
désastreuse.
Cortès, 22, 24-7-35.
301. Cela sera vraiment le retour à la terre, non dans le sens de l'Eglogue,
qui est celui de Rousseau, mais dans le sens des Géorgiques, qui est la
manière profonde, sévère et rituelle de comprendre la terre.
Discours, "L Espagne et la barbarie", Valladolid, 3-3-35.
(E)
302. Des lois qui s'imposent à tous avec la même rigueur, voilà ce qui nous
manque. Une extirpation implacable des mauvaises habitudes invétérées: la
recommandation, l'intrigue, l'influence. Une justice rapide et sûre, et si
parfois elle fléchit, que ce ne soit pas par lâcheté devant les puissants, mais
par clémence pour ceux qui ont été entraînés. Mais cette justice là, seul un
Etat sûr de sa propre raison d'être, peut la réaliser.
Manifeste. Avant les élections, 1936.
(F)
CONSIGNES TACTIQUES
305. Il faut espérer qu'il ne reste plus d'insensés pour vouloir encore laisser
passer une occasion historique (la dernière) au profit d'intérêts mesquins. Et
s'il y en avait, sur eux tomberait toute vôtre rigueur, toute notre rigueur. Le
pavillon du nationalisme n'est pas fait pour couvrir comme marchandise la
faim — car il y a des millions d'Espagnols qui souffrent de la faim et il est
urgent d'y porter remède. C'est pour cela qu'il faut lancer à toute vitesse la
grande tâche de la reconstruction nationale. Il faut que tous soient appelés,
avec ordre et méthode, à jouir de tout ce que l'Espagne produit et peut
produire. Cela impliquera des sacrifices pour ceux qui profitent aujourd'hui
de situations trop grandes dans la petite vie espagnole. Mais vous, trempés
par la religion du service et du sacrifice, et nous, qui avons volontairement
imposé à notre vie un sens ascétique et militaire, nous enseignerons à tous à
supporter les sacrifices avec le sourire, le sourire de ceux qui savent qu'au
prix de quelques renoncements matériels, ils sauvent l'ensemble des principes
éternels que l'Espagne, de par Sa mission universelle, a annoncés à la moitié
du monde.
306. Au cours des siècles qui virent mûrir l'effort qui allait aboutir à
l'Empire, on ne disait pas «Contre les Mores» mais «Saint Jacques et faisons
l'Espagne!», ce qui était un cri d'effort, d'offensive. Nous, disciples de cette
école, nous ne sommes pas enclins à crier «A bas ceci, à bas cela!». Nous
préférons crier «Debout! Debout, l'Espagne!»... L'Espagne une, grande, libre...
et non l'Espagne découragée et médiocre.
Manifeste, Avant les élections, 1936.
LE FAIT IMPERIAL OU LA DOCTRINE DU DERNIER MOT
307. Dans cette Espagne, qui n'a jamais été surindustrialisée, qui n'est pas
surpeuplée qui n'a pas souffert de la guerre, où nous avons la possibilité de
refaire un artisanat qui subsiste encore en grande partie où nous avons une
masse forte d'une trame solide, disciplinée et endurante, de petits
producteurs et de petits commerçants, où l'ensemble des valeurs spirituelles
est resté intact, dans cette Espagne, dis-je, qu'attendons-nous pour saisir
l'occasion, et quelque ambitieux que cela puisse paraître, pour nous mettre,
une fois de plus, à la tête de l'Europe? Oui, qu'attendons-nous?
Discours, Madrid, 9-4-35.
312. LA PATRIE.— Nous voulons qu'on nous rende la fierté joyeuse d'avoir une
patrie, une patrie exacte, légère, entreprenante, pure de tâches ridicules, de
traits d'opérettes et sans les souillures habituelles. Une patrie non pour la
vanter dans de grosses effusions, mais pour être comprise et sentie comme
l'instrument d'un grand destin.
Nous voulons une politique internationale qui se détermine à chaque
instant pour la guerre ou pour la paix, pour la neutralité ou la belligérance,
par la libre volonté de l'Espagne et non par soumission à une puissance
étrangère.
C'est pourquoi nous exigeons que notre armée et nos forces navales et
aériennes soient celles dont ont besoin l'indépendance de l'Espagne et la place
hiérarchique qui lui correspond dans le monde.
Nous voulons que l'éducation soit faite pour arriver à un esprit national
fort et uni et pour mettre dans l'âme des générations futures la joie et la fierté
de la patrie.
Nous voulons que la patrie s'entende comme une réalité harmonieuse et
indivisible, supérieure aux luttes des individus, des classes, des partis et des
différences naturelles.
Manifeste électoral, 12 janvier, 1936.
313. Nous cherchons une patrie pour l'Espagne, et quand nous l'aimerons,
l'Espagne retrouvera sa politique internationale, L'Espagne aura une politique
qui lui conseillera en certains cas la paix, peut-être, malheureusement, en
d'autres, la guerre, et en d'autres la neutralité, jamais par l'imposition d'une
puissance étrangère, mais bien par la volonté de l'Espagne.
Discours, à Saragosse, 26 janvier 1936.
VII
INVOCATION FINALE
Un groupe d'Espagnols, les uns soldats, les autres civils, ne veulent pas
assister a la dissolution totale de la Patrie, Ils se lèvent aujourd'hui contre un
gouvernement traître, inepte, cruel et injuste qui la conduit à la ruine.
Nous avons supporté cinq mois d'opprobre. Une espèce de bande
factieuse s'est rendue maîtresse du pouvoir. Depuis son avènement, il n'y a
plus une heure de tranquillité, un foyer respecté, un travail sûr, une vie
garantie. Tandis qu'une collection d'énergumènes, incapables de travailler,
vocifère à la Chambre, les maisons sont profanées par la Police (quand elles
ne sont pas incendiées par la tourbe), les églises saccagées, les gens de bien
emprisonnés par caprice pour un temps illimité; la loi use de deux poids
inégaux: l'un pour les hommes du Front Populaire, l'autre pour ceux qui n'y
militent pas; l'Armée, la Flotte, la Police, sont minées par des agents de
Moscou, ennemis jurés de la civilisation espagnole; une Presse indigne
empoisonne la conscience populaire et cultive les pires passions, de la haine à
l'impudeur; il n'y a pas un village, pas une maison qui ne soient convertis en
un enfer de rancœurs; on stimule les mouvements séparatistes; la faim
augmente et, pour que rien ne manque afin que le spectacle atteigne son
caractère le plus sombres, des agents du gouvernement, ont assassiné à
Madrid un illustre espagnol qui avait confiance dans l'honneur et la fonction
publique de ceux qui le conduisaient. La férocité canaille de ce dernier exploit
n'a pas d'égale dans l'Europe moderne et peut être confrontée avec les pages
les plus noires de la tchèka russe.
Tel est le spectacle de notre Patrie a l'heure juste où les circonstances du
monde l'appellent à accomplir de nouveau un grand destin. Les valeurs
fondamentales de la civilisation espagnole reprennent, après des siècles
d'éclipsé, leur antique autorité, tandis que d'autres peuples qui mirent leur foi
en un progrès matériel fictif voient minute par minute décliner leur étoile.
Devant notre vieille Espagne missionnaire et militaire, terrienne et maritime,
s'ouvrent des chemins splendides. C'est de nous, Espagnols, que dépendra le
fait de les parcourir, de ce que nous serons unis et en paix avec nos âmes et
nos corps tendus dans l'effort commun de faire une grande Patrie. Une grande
Patrie pour tous et rien pour un groupe de privilégiés. Une Patrie grande,
unie, libre, respectée et prospère. Pour lutter pour elle, nous rompons
aujourd'hui ouvertement avec les forces ennemies qui la tiennent prisonnière.
Notre rébellion est un acte de service à la cause espagnole.
Si nous aspirions à remplacer un parti par un autre, une tyrannie par
une autre, le courage —propre aux âmes pures— de risquer cette décision
suprême nous manquerait. Il n'y aurait pas non plus pour nous des hommes
portant les uniformes glorieux de l'Armée, de la Marine, de l'Aviation, de la
Garde civile, ils savent que leurs armes ne peuvent pas être employées au
service d'une bande, mais à celui du maintien de l'Espagne qui est ce qui est
en péril. Notre triomphe ne sera pas celui d'un groupe réactionnaire et ne
représentera pour le peuple la perte d'aucun avantage. Au contraire, notre
œuvre sera une œuvre nationale qui saura élever les conditions de vie du
peuple —vraiment épouvantables dans certaines régions— et le fera prendre
part à la fierté d'un grand destin recouvré.
Travailleurs, paysans, intellectuels, soldats, marins, gardiens de notre
Patrie, secouez la résignation devant le tableau de son écroulement et venez
avec nous pour l'Espagne une, grande et libre! Dieu nous aide; ¡Arriba
España!
Le dernier manifeste de José Antonio, 17-7-36.
TESTAMENT DE JOSÉ ANTONIO PRIMO DE RIVERA