Cours Hist Soc M2
Cours Hist Soc M2
Cours Hist Soc M2
Plan :
1
-l’information économique : enquêtes, tableaux et statistiques sous
Colbert.
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- la Technoscience.
- l’industrialisation de la Culture.
2.1.3 Du Matériel à l’Immatériel
- du produit au flux informatif.
- de l’information matière première à l’information service.
- de la bibliothèque au centre de Documentation.
3. De la Post-Modernité à l’Hyper-Modernité
3
connaissances (durables et cumulables) destinée à l’apprenant.
- le concept de culture de l’information adapté au monde scolaire
trouve un terrain de développement dans les CDI, cette exception
française (le centre de documentation et d’information des
établissements scolaires qui a remplacé les bibliothèques scolaires).
3.2.3 Utopie mondialiste de l’Unesco
Au sommet mondial de la Société de l’information organisé par
l’Unesco à Genève en 2003 on annonçait la volonté « d’édifier :
- une société de l’information à dimension humaine, inclusive et
privilégiant le développement…
- dans laquelle chacun de nous ait la possibilité de créer, d’obtenir,
d’utiliser et de partager l’information et le savoir…
- dans laquelle les individus, les communautés et les peuples puissent
ainsi mettre en œuvre toutes leurs potentialités en favorisant leur
développement durable…
- ainsi qu’en respectant pleinement et en mettant en œuvre la
Déclaration universelle des Droits de l’Homme ».
3.3 Conflits
3.3.1 Société de l’Information ou Société du Document ?
- tout devient un document numérique.
- toute information, au sens le plus large, est inscriptible, donc devient
systématiquement un document.
- toute parole, expression, hésitation, publique ou privée, peut être
filmée, montrée, mémorisée et disponible pour une « éternité »
numérique.
3.3.2 Marchandisation et collectivisation des connaissances
- soumission du savant aux capitaux.
- disparition de l’auteur par la sémantisation des données.
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- une éducation mondialisée par les MOOC.
- Le triomphe des idéologies
- une vraie utopie propose un futur en s’opposant au
présent et non un présent fermant le futur (la mort de l’Histoire de
Fukuyama).
- on est passé à une idéologie libérale (mondialisation,
transparence) d’orientation américaine
- et techniciste admise par tous.
Conclusion
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HIST DE LA SOCIETE DU SAVOIR ET DE L’INFORMATION
STRATEGIQUE
6
spécialisation. L’encyclopédiste n’est pas le savant universel mais le sage
qui met de la raison dans la science en l’ordonnant à son propre
perfectionnement intérieur
L'encyclopédisme est ce qui fait le tour de ce qu’on doit avoir appris pour
avoir une culture générale. Cela renvoie à un savoir fini. C’est un projet
éducatif, et non un projet de recherche, un projet d’exposition du savoir,
et non un point de départ vers autre chose.
- les voyageurs font un rapport sur les nouveaux mondes
découverts.
- Les cabinets de curiosité
1.1.3 Relation au sens de « relier »
- Les catalogues
Dès que le document se rassemble en une documentation, dès qu’il
s’additionne en se refusant à être un conglomérat sans structure, dès
qu’il se veut mémoire utile et donc retrouvable, il induit la double
nécessité de l’inventaire et du classement qui se réalise dans le
catalogue. Ce terme, « composé de kata, de haut en bas et de legein
rassembler, dire, apparenté au latin legere (lire) » (Rey, 1995),
représente un objet multifonctionnel qui s’est adapté à des utilisateurs
différents : traditionnellement lié à la référence bibliographique, au
livre, dans le cadre savant des bibliothèques et dans le cadre marchand
de l’édition, il est aussi lié au monde des musées, dans une démarche
plus « monstrative », et ce depuis longtemps :
« Dès l’antiquité, on voit apparaitre des catalogues, listes descriptives
et ordonnées inventoriant les collections des bibliothèques. A
l’origine, ils servaient d’inventaire (avec un) classement par grands
thèmes » (Dussert-Carbone, 1991). Par exemple à Ninive, où l’on
trouve des catalogues thématiques qui esquissent un tableau du
monde, avec des termes génériques et spécifiques, représentant toutes
les réalités de l’univers, de la nature et de la culture, avec huit à dix
mille entrées (Schaer, 1996). C’est donc bien une relation, au sens de
liaison que le catalogue offre aux lettrés
Au Moyen Age, le catalogue est un manuscrit adoptant des
classements méthodiques, et l’imprimerie amène des catalogues
imprimés peu différents. On est toujours devant des catalogues
inventaires : à un livre correspond une seule notice. C’est à la fin du
XVIIe siècle, avec le catalogue de la Bibliothèque Bodléienne
(Oxford) qu’apparait le premier catalogue dictionnaire permettant de
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retrouver le livre par différents points d’accès : auteur, titre, sujet,
forme. La Révolution apporte son plein de rêves de catalogues et de
nouveautés Cabanis, en 1797, avançait le Projet d’une bibliothèque
universelle, universelle non parce qu’il y aura tous les livres mais
parce qu’elle permettra la saisie de la totalité des savoirs pour
permettre de choisir. Cela supposait des outils: inventaires selon la
matière et la chronologie, sélection des éléments nécessaires,
informations sur les nouveautés., comme un catalogue collectif unique
des richesses des bibliothèques françaises, jamais terminé. Les
catalogues sur fiches se développent alors, réservés à l’usage du
personnel Isabelle Dussert-Carbone évoque la phrase de Jules Cousin
dans De l’organisation et de l’administration des bibliothèques
publiques et privées,1882 :« un pareil catalogue n’est évidemment pas
maniable par le public, et il est toujours périlleux de le mettre à la
disposition du tout venant » (Dussert-Carbone & Cazabon, 1991)..Le
public, lui, consulte un registre par auteur.
La consultation du Centre National de Ressources Textuelles et
Lexicales fournit les indications suivantes : « Étymol. et Hist. Ca 1265
« liste indicative, énumération » (Brunet Latin, Trésor, éd. Chabaille,
166 d'apr. Delboulle ds Quem.). Empr. au b. lat. catalogus «
énumération, liste » attesté depuis le IV e s. (Ausone ds TLL s.v. , 590,
37) empr. au gr. κατάλογος « liste ».
Le même Centre donne ensuite la définition : « Liste, établie dans un
ordre donné, de noms de personnes ou de choses formant une
collection. Catalogue alphabétique, analytique, méthodique,
systématique d'une bibliothèque; catalogue de collection, de
manuscrits, de musée, de peintres; catalogue d'étoiles, d'exposition.
Alain Rey précise d’autre part: « le sens de liste indicative des pièces
composant une collection, énumération, a donné par extension et
spécialisation celui de « brochure présentant en détail les articles
proposés par un commerçant, un grand magasin… Il a également
donné le sens figuré de liste d’éditeur » (Rey, 1995)
Les synonymes d’après le Centre national de ressources textuelles et
lexicales sont nombreux : « Liste, répertoire , tableau, inventaire,
dénombrement, état, énumération, nomenclature, bibliographie,
recueil, table, rôle, revue, relevé, index, classement, arsenal,
ménologe, mémoire, martyrologe, livret, imprimé, guide, formulaire,
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fichier, collection, codex, canon, programme ». On peut noter que
cette profusion vient du XVIe siècle où l’on trouvait des « répertoires
appelés bibliotheca, catalogus, repertorium, inventarium, index ;
(Malclès ,1956).
[…] bibliographie apparaissant en 1633 avec Naudé »En phase avec une
orientation vers la recherche revendiquée par cet auteur “ Une
bibliothèque ne vaudrait qu’en considération du service et de l’utilité que
l’on peut en recevoir … Une bibliothèque n’est pas un simple dépôt, mais
un lieu de découverte ” (Châtelain, 1996).
- les classifications de l’arbre (de Savigny) à l’océan (métaphore
de Leibniz).
Après l’ordre matériel du quotidien de Ninive, l’orde intellectuel de
l’école d’Aristote et l’ordre divin du Moyen Age (Raban Maur, dans
De Rerum naturi, 842-847 décrit un monde qui part de Dieu, en
distinguant le divin, l’animé, l’inanimé, Vincent de Beauvais au
milieu du XIIIe, conçoit la connaissance comme le reflet de la
révélation en distinguant le Miroir naturel Dieu et sa création, organisé
selon les 6 jours de la création, le Miroir doctrinal de 6 disciplines et
le Miroir historial avec les 6 ages du monde, dela création du
monde.....à la christianisation des juifs d ’Espagne, Lulle, fin XIIIe,
début XIVe siècle présente une vision unitaire et hiérarchisée d’un
univers à l’image de Dieu sous la forme d’un arbre des sciences avec
18 racines, soit 9 principes divins qui régissent l’univers et 9
principes logiques qui régissent le connaître )
Avec l’humanisme apparaît la notion d’unité et de totalité avec
Christophe de Savigny qui édite en 1587 les tableaux accomplis de
tous les arts libéraux.
Il propose une vaste arborescence, où chaque discipline est à sa place
marquée au sein d’une hiérarchie. Chaque connaissance va dans une
case. Cette assignation d’une place s’appelle la collocatio, alors que la
disposition de façon logique des cases entre elles constitue l’
ordinatio.
On en vient à un ordre dit “ naturel ”, disciplinaire et chronologique
Pour Gabriel Naudé en 1627 le classement se fait par un ordre naturel
conjuguant disciplines et chronologie.
Au XVIIIe siècle on hésite entre 2 modèles d’ordre:
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- l’Encyclopédie de Diderot, qui a pourtant des visées
idéologiques, développe un ordre alphabétique analytique avec
beaucoup de renvois. Cela signifie qu’il n’y a pas de début ni de fin,
qu’on peut commencer la consultation par où on veut. Là encore cela
réfute les prétentions de De Rosnay qui voit dans l’hypertexte
informatique le premier moyen de lutter contre la lecture et la pensée
linéaires.
- l’Encyclopédie méthodique Panckoucke (1782-1836), elle,
choisit un ordre synthétique par grands traités spécialisés et grands
thèmes.
Au moment de la Révolution, Destutt de Tracy met en évidence les
liens des principes de classification avec les idéologies politiques:
Dans "sur un système méthodique bibliographique ” publié dans le
Moniteur universel en 1797, il dénonce la mainmise sur les esprits qui
est ainsi organisée: les bibliothèques, par leur classement sont des
ennemis de la République, car trop dépendante de l'ordre religieux. Il
réclame par exemple que la Théologie soit rejetée en fin de
classement.
- les renvois encyclopédiques et la naissance de l’hypertexte.
Gilles Blanchard et Mark Olsen (2002) soulignent les liens entre les
renvois dans les encyclopédies (alphabétiques) et l’hypertexte : « Dans
la mesure où l’Encyclopédie peut être considérée comme l’“ancêtre de
l’hypertexte”, la réflexion de Diderot et D’Alembert sur l’utilisation
de plusieurs structures d’organisation en interaction pourrait en ce
sens servir d’exemple à la conception moderne d’hypertextes. Dans
l’Encyclopédie, les renvois ne sont nullement placés au hasard comme
des références ponctuelles, mais s’inscrivent dans un plan d’ensemble
conçu comme tel par les auteurs ».
Diderot lui-même distinguait dans l’article « Encyclopédie » quatre
types de renvois : de choses (confirmation ou réfutation d’un article
par un autre), de mots (définition), « de l’homme de
génie », conduisant à de nouvelles vérités, ou à la perfection des arts
connus, et les renvois « satiriques ».Il y a débat sur leur utilisation
pour « faire passer » des propos très critiques pour le pouvoir et la
religion en les fragmentant, comme l’indique Mélançon (2002). Le fait
est signalé par Leggewie en 1990 « L’Encyclopédie a été une
“machine de guerre” s’attaquant aux préjugés et se servant d’un
système de renvois d’un article à un autre » (Leggewie, 1990, p.362),
nié par Schneiders (Schneiders, 1985, p.247-260) ou Ludwig (Ludwig,
1987, p.35-54) qui se refusent à parler de vrai système, mais eux
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même critiqués par Blanchard et Olsen (2002) travaillant sur la
version Web de l’Encyclopédie. Mélançon semble y voir surtout un
mythe. Pour notre part, nous serions pour élargir le champ, tenir
compte d’avis anciens : « On a mis sous les yeux du lecteur quelques
vérités religieuses, mais en indiquant des renvois on a eu l’art de
l’engager à chercher d’autres leçons dans des articles d’un genre
différent. Extraits des Mémoires pour servir à l’Histoire du
Jacobinisme par M. l’abbé Barruel (Lepan, 1819) et remonter à Bayle
(Bost, 2006) qui avait aussi « engagé un défi subtil avec la censure »
(Mori, 1999).
Rappelons que l’hypertexte dans une vision formelle (Rety, 2005) est
un procédé qui permet de tisser de manière constructive des relations
entre des idées, entre des unités de sens issues d’une écriture non-
séquentielle. Ce faisant, il est à considérer comme un ensemble de
fragments de textes de granularité variable et sémantiquement
interreliés. De fait, le « lien hypertexte » doit être pensé comme
métonymique à l’hypertexte. Cette non-séquentialité est décrite à la
fois comme la plus à même de correspondre aux associations
cognitives inhérentes au système mnémonique humain mais aussi
comme le fondement d’une écriture propre au numérique (Bush,
1945 ; Nelson, 1981). « La familiarité avec ces nouveaux instruments
permet de poser aux œuvres des questions inédites, suggère et rend
possibles des analyses auxquelles personne n’avait jamais songé
auparavant. C’est à travers ces pratiques que s’élaborent peu à peu des
nouveaux modes de lecture, de nouvelles compétences et de nouvelles
perceptions » (Heiden, Lafon, 2002, p.101). « Le regroupement [des]
informations diverses que l’ouvrage informatisé autorise maintenant
est de nature à mettre en lumière des décalages jusque-là peu visibles
entre ce qui est énoncé dans l’article et ce qu’il en est réellement du
mot ou du domaine dans l’ensemble de l’ouvrage » (Piguet, 2002,
p.123).
- les cartes du savoir.
Le système des renvois est lié à la visualisation de l’information.
« L’idée d’une organisation propre à l’Encyclopédie inspire la notion
de "cartographie ” de la connaissance qu’expose d’Alembert dans le
Discours préliminaire, cartographie qui suppose des points
remarquables à partir desquels on peut embrasser du regard et rendre
intelligibles une multiplicité d’objets » (Kintzler, 1996). « Diderot,
D’Alembert et leurs collaborateurs voulurent rapporter les articles à un
arbre des connaissances inspiré de celui de Francis Bacon et ils
conçurent un frontispice allégorique supposant une forte organicité
des domaines de la connaissance » (Mélançon, 2002). On « utilise
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ainsi les vertus de l’icône (de schéma de formulation en schéma de
construction en passant par l’organigramme et la carte pour rendre
« visible » un agencement … le savoir passe par le voir pour atteindre
le pouvoir » (Chante, 2012).
Ces arbres, inspirés des arbres de vie et arbres des vertus du Moyen
Age (Tesnière, 1996) et de l’arbre des sciences de Raymond Lulle ou
du tableau général de l’organisation encyclopédique du savoir de
Christophe de Savigny du XVIe siècle (Chatelain, 1996) constituent
une médiation qui « semblerait devenue une nécessité » (Chante,
2012). Et pourtant, le « réflexe » de s’y référer ne s’est pas encore
imposé. On peut s’étonner, comme Mélançon : « les versions
numériques disponibles pour l’instant posent cependant un problème
de taille à qui veut travailler sur les rubriques de l’Encyclopédie et
leur rapport à l’arbre des connaissances : aucune ne reproduit pour
l’instant cet arbre » (Mélançon, 2002).
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comme au Moyen Age). Si Rabelais pensait à un nouveau rapport au
monde permettant aux humbles d’accéder au savoir, Pierre Bayle revint
vite à une démocratisation sélective, méritocratique, car seule une minorité
est capable de comprendre les sens d’un ouvrage philosophique alors que le
peuple suit ses préjugés, et les encyclopédistes sont restés dans cette
optique. Si Voltaire écrit ” pourquoi ne pas daigner instruire nos ouvriers
comme nous instruisons nos lettrés ” (article Fraude du Dictionnaire
philosophique), il reconnaît aussi qu’il n’est pas nécessaire d’apprendre au
laboureur à lire et à écrire pour qu’il fasse son travail
La notion d’encyclopédisme (pas le terme, qui est postérieur) apparaît dans
l’antiquité, avec la réalisation par l’école d’Aristote d’un découpage des
disciplines en arborescence qui ordonne toutes la réalité du monde avec
l’objectif de favoriser le travail intellectuel impliquant le recours au livre et
tenant compte de la spécialisation des chercheurs.
Pline l’ancien semble hésiter entre compilation et ordre rigoureux. Dans
ses Histoires naturelles des milliers de fiches de lecture sont redistribuées
selon une classification générale du monde naturel.
Fin XIIIe, début XIV, Lulle prétend ordonner la totalité des objets de la
connaissance en un ensemble cohérent, parce qu’il considère que l’univers
est ordonné par une structure identique à celle des principes divins , en
forme de cercle ( d’où cette idée de cycle contenue dans l’encyclopédisme)
au départ. Mais à des fins pédagogiques il présente sa vision unitaire et
hiérarchisée sous la forme d’un arbre des sciences avec 18 racines, soit 9
principes divins qui régissent l’univers et 9 principes logiques qui
régissent le connaître
Chez Pierre de la Ramée la notion d’indivision du savoir s’efface devant
celle de la totalisation des connaissances. Il déplace l’encyclopédisme d’un
exercice spirituel vers l’ordre objectif de l’exposition doctrinale. Les
liaisons entre les sciences sont comprises sur le mode du lien logique
d’enchaînement plutôt que du lien moral de convergence.
L’encyclopédisme devient un inventaire raisonné des domaines de la
connaissance, une méthode qui énumère dans l’ordre, sans redites, sans
oublis, toutes les parties du savoir.
On se rapproche du terme avec Du Bellay qui ambitionne de “ fermer le
rond des sciences ”, mais c’est Guillaume Budé en 1522 qui introduisit en
français le mot encyclopédie dans Institution du Prince: “ La connaissance
du droit exige la connaissance de toutes les autres disciplines ... la
philosophie embrasse tout le cercle des disciplines qu’on appelle
encyclopédie ”
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En 1532 c'est la première occurrence du mot dans un texte imprimé:
Pantagruel où Rabelais parle d’un puits et abîme de l’encyclopédie =
savoir complet Mais attention,, il faut noter que le mot est ici tourné en
ridicule et que Rabelais se livre là surtout à une satire du pédantisme.
Dans la perspective humaniste, l’encyclopédie n’est pas une folle ambition
de totalisation de connaissances en folle prolifération, mais plutôt le désir
d’acquérir un savoir suffisamment complet ( voir Rabelais, Pic de la
Mirandole) pour que l’homme ne renonce à rien de sa faculté de raison et
suffisamment général pour éviter l’enfermement dans la spécialisation.
L’encyclopédiste n’est pas le savant universel mais le sage qui met de la
raison dans la science en l’ordonnant à son propre perfectionnement
intérieur
L'encyclopédisme est ce qui fait le tour de ce qu’on doit avoir appris pour
avoir une culture générale. Cela renvoie à un savoir fini. C’est un projet
éducatif, et non un projet de recherche, un projet d’exposition du savoir, et
non un point de départ vers autre chose. L’exposé des connaissances étant
lié à l’état des connaissances, l’encyclopédie proclame l’universel, mais
son universel.
Le choix d’un terme grec ( Enkuklios Paideia : qui fait le tour- instruction
donnée à l’enfant)est preuve d’un irrespect irreligieux et la fin d’une
organisation théologique du savoir.
Puis Bacon en 1623 annonce les idées très actuelles de flux et de système
en insistant sur le dynamisme: "ce n’est pas l ’agencement régulier qui
compte, mais l’image dynamique d’un organisme vivant parcouru d’une
sève qui irrigue l’ensemble et par laquelle les parties s’entretiennent d’un
suc commun ”. Il propose une classification des facultés et des sciences
que lui empruntera d’Alembert, conçue comme un arbre avec ses
branches.
En 1630 avec Alsted est édité le premier ouvrage intitulé Encyclopédia.
14
Descartes dans le Discours de la méthode 1637 pose une des
conséquences des dictionnaires et des encyclopédies, en se disant
favorable à une baisse de la mémoire, qui serait compensée par la
découverte d’ une solution au problème de conservation ( en fait, la
documentation).
Comenius de Pansophiae dans prodomus en 1639 indique qu’il peut y
avoir loin entre les intentions déjà citées et la réalité:
“ les encyclopédies que j’ai vu jusqu’à présent... m’ont paru ressembler
davantage à un tas de bois disposé avec beaucoup de soin et rangé avec
élégance qu’à un arbre s’élevant à partir de ses propres racines, se
déployant par la puissance d’une respiration naturelle en branchages et
frondaisons. ” .
Leibniz
Deux cent ans après l’invention de l’imprimerie, il est affolé par le nombre
d’ouvrages qui en découlent : “ Res plane infinita est ”. Il parle de torrent,
déluge, océan, chaos, labyrinthe, d’un retour à la barbarie. On peut avoir les
mêmes craintes face à l’explosion des publications du XXe siècle, au lieu
de s‘en féliciter, comme si le progrès ne pouvait naître que du quantitatif.
Il voit plus de connaissance dans la vie (domaine des techniques) que
dans les livres et souhaite qu’on enregistre et ordonne les richesses de
l’esprit.
Leibniz fait la découverte des liens entre les diverses disciplines, ou
thèmes: on a “ besoin de beaucoup de renvois, la plupart des choses
pouvant être regardées de plusieurs faces ”. Là encore, l’idée de
cadrage et de point de vue, que certains spécialistes de
Communication nous présentent comme neuve, se révèle très
classique.
Surtout, s’écartant de l’idée d’arborescence, il a proposé une autre
métaphore du savoir, celle de l’océan. Le savoir humain, c’est l’eau
des océans. On passe de l’un à l’autre, sans savoir à quel moment cela
change (qui peut dire le moment exact où l’on passe de l’océan indien
à l’océan Pacifique?).
De même, dans le champ des disciplines, il y a des livres qui sont
entre deux. La limite est floue, il y a une globalité, il y a un lien entre
tout.
De plus, dans les océans, il y a des îles, des points où le savoir se
concentre. Ces lieux semblent dispersés mais ils sont en fait reliés par
15
les océans ( par le fond des océans). Il en est de même pour la
connaissance qui est reliée par des réseaux invisibles. La encore,
l’idée est très moderne (les collèges invisibles) alors que la métaphore
de l’arbre s’ancre dans le passé (les racines).
- Pierre Bayle en 1697 dans son Dictionnaire historique et critique
constate la multitude effroyable des livres, comme Leibniz, puis
remarque qu’il y a beaucoup d’erreurs dans les livres et qu’il faut donc
les manier avec précaution
Pour lui, le dictionnaire doit présenter des choses et non des mots, et
constitue une oeuvre toujours provisoire (annonce de Wikipédia ?).
Au XVIIIe siècle on assiste à la rencontre de l’analyse cartésienne et
de la pensée anglaise. On veut systématiser la synthèse des
connaissances et réconcilier sciences et machines par la notion
d’utilitarisme.
On hésite entre deux modèles d’ordre:
- l’Encyclopédie Diderot (1748-1772), qui a pourtant des visées
idéologiques (favoriser la diffusion de la philosophie des
Lumières, par la critique des savoirs dans leur élaboration, leur
transmission et leur représentation, ainsi que la critique du langage,
des préjugés, des interdits de pensée, de l’autorité et du dogme),
développe un ordre alphabétique analytique avec beaucoup de renvois
(et la précision de la “ branche ” de savoir dont il relève. Cela signifie
qu’il n’y a pas de début ni de fin, qu’on peut commencer par où on
veut. Là encore cela réfute les prétentions de De Rosnay qui voit dans
l’hypertexte informatique le premier moyen de lutter contre la lecture
et la pensée linéaires.
On notera qu’il s’agit aussi d’une manoeuvre contre la censure, dont
se sont servis aussi Bayle et Voltaire, et sans doute d’un système
adapté à la multiplicité des collaborateurs ( 150)
- l’Encyclopédie méthodique Panckoucke (1782-1836) prend
elle un ordre synthétique par grands traités spécialisés et grands
thèmes.
A la Révolution les idéologues (tenant de la science de la genèse des
idées) critiquent la situation du livre et font des propositions.Cabanis,
en 1797, avance le Projet d’une bibliothèque universelle, universelle
non parce qu’il y aura tous les livres mais parce qu’elle permettra la
saisie de la totalité des savoirs pour permettre de choisir. Cela suppose
des outils: inventaires selon la matières et la chronologie, sélection
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des éléments nécessaires, informations sur les nouveautés. Certains
disent même que la bibliothèque est en fait une encyclopédie (car elle
fait un choix idéologique de présentation) et qu’elle est tournée vers
l’état. Elle n’est pas faite pour la créativité et n’est pas tournée vers le
futur.
- les mythes pédagogiques : Th. More et les Utopiens, Campanella
et les Solariens.
lien éducation-utopie , présent dès l’Utopia de l’inventeur du mot,
Thomas More, en 1515, puis dans la Cité du Soleil de Campanella
(1623) ou le Voyage en Icarie d’Étienne Cabet (1840). Dans Utopia,
l’auteur imagine des Utopiens qui vont suivre des conférences tous les
matins pour le seul plaisir de s’instruire ; les Solariens de Campanella
combinent l’idéal encyclopédique (tout le savoir possible est exposé
1
17
demande que l’on croie à un projet dont on ne tient pas tous les
éléments, un travail sur du virtuel (l’adulte que sera l’enfant que l’on
éduque), et qui conduit à rêver de choses meilleures, tant dans les
méthodes que dans les résultats (Drouin-Hans, 2004, Drouin-Hans
2001).
- les besoins d’outils pour des bibliothèques
efficaces Naudé,Morhof ,Leibniz.
122Renseigner
Information et renseignement
- l’information géographique de L’antiquité à l’époque moderne
l’information militaire. A époque moderne
Début XIXe Clausewitz « Le terme « renseignement » désigne
l’ensemble des connaissances relatives à l’ennemi et à son pays, et
par conséquent le fondement sur lequel s’érigent nos propres idées et
nos actes
Il insiste beaucoup sur la notion de traitement « si tous les manuels
nous enseignent qu’il ne faut se fier qu’aux informations certaines et
ne jamais se départir d’une défiance générale, c’est un conseil
purement livresque qui appartient à cette sorte de sagesse où se
réfugient, faute de mieux les écrivassiers auteurs de systèmes et de
manuels. Les nouvelles qui vous parviennent en temps de guerre
sont en grande partie contradictoires, et fausses pour une plus grande
part encore » « Parfois en se contredisant, elles (les informations)
2
18
données fournies par les phénomènes du monde réel…la situation
réelle fournit des éléments d’information sur ce que l’on peut
prévoir, sur l’inconnu qui reste à découvrir. Chacune des deux
parties tachera de prévoir l’action de l’autre en tirant ses conclusions
du caractère, des institutions, de la situation et des conditions où se
trouve l’adversaire, et y accordera la sienne propre en se servant des
lois du calcul des probabilités. 3
Clausewitz p. 49
3
4 Face aux enthousiasmes de J. de Rosnay,on peut citer P Lévy , Qu’est-ce que le
virtuel ?, Paris : La Découverte, 1998, qui rappelle qu’il existe des « hypertextes
traditionnels comme une salle de dictionnaires et d’encyclopédies » ou remonter beaucoup
plus loin avec Vandenhorpe Christian Du papyrus à l’hypertexte: essai sur les
mutations du texte et de la lecture Paris : La Découverte 1999
5 Fin XIXe Dictionnaire Littré IDÉOLOGIE. 1° Science des idées considérées en elles-
mêmes, c'est-à-dire comme phénomènes de l'esprit humain; 2° en un sens plus restreint,
science qui traite de la formation des idées, Sur les idéologues, voir S. Moravia Il
tramonto dell’illuminismo , Bari, Latzerza, 1968
M. Regaldo Matériaux pour une bibliographie de l’Idéologie et des Idéologues,
R.A.L.F., n°1, janv.-fev. et n° 2 et 3 , mars-juin 1970
Gusdorf Georges Les Sciences humaines et la Pensée occidentale : vol VIII, la conscience
révolutionnaire ; les Idéologues, Paris, Payot, 1978
F Azouzi (dir) L’institution de la raison :la révolution culturelle des Idéologues Paris, ed
de l’EHESS, Vrin 1992
Su la mobilisation des savants de l’An II, voir Guedj D. La Révolution des savants,
Découvertes Gallimard, 1988
6 On est au début de « l’organisation administrative ( qui) se met en place au XIXe
siècle », permise par le fait que « la Révolution française met à la disposition de l’Etat
19
théorie du signe, une « science des idées » , de la genèse de idées
7
sur la relation de leur théorie avec l’institution scolaire, c’est à dire sur
un sujet, l’éducation, en phase avec les débats de son époque de
création ( post 68).En revisitant son travail, nous avons constaté que
l’approche qu’il avait faite pouvait être mise en phase avec le nouveau
contexte en cours , la société de l’information et ses évolutions vers la
société de la connaissance et la culture de l’information, preuve de la
les biens du clergé, ceux des émigrés et des sociétés savantes » mais qui va buter « sur
la masse des collections accumulées » Couzinet Viviane et Fabre Isabelle « Désir,
curiosité, culture informationnelle : l’organisation des savoirs au cœur de l’histoire
des idées » The Canadian Journal of Information and Library Science/ La Revue
canadienne des sciences de l’information et de bibliothéconomie 32, n° 3-4 2008
7 Destutt de Tracy, « Mémoire sur la faculté de penser », in Mémoires de
l’Institut national, t. I, thermidor an VI (1798)
Qu'entendait donc D. de Tracy par l'idéologie? Dans son premier Mémoire, il
montrait que la connaissance de la génération de nos idées est le fondement
de la grammaire, de la logique, de l'instruction et de l'éducation, de la morale
et de la politique. Puis, critiquant la formule « analyse des sensations et des
idées », les mots « métaphysique » et « psychologie », il proposait de désigner
la science dont s'occupait spécialement la seconde classe par le mot idéologie,
traduction littérale de science des idées. Ainsi, disait-il, on indiquerait qu'on
cherche la connaissance de l'homme, uniquement dans l'analyse de ses
facultés, et que l'on consent à ignorer tout ce qu'elle ne nous découvre pas. Et
il ajoutait qu'en composant la première section d'analystes et de
physiologistes, on avait voulu faire examiner ces facultés sous tous les
rapports, ce qui se fût mieux réalisé encore, s'il y avait eu avec eux des
grammairiens ( mémoire de l’Institut national,Sc.mor et pol.,I, P 287,323
sqq)
8 Hordé T. « Les idéologues: théorie du signe, sciences et enseignement »
Langages, Mars 1977 n°45 pp. 42-66
20
richesse de leurs propositions, qui ont eu comme défaut principal de 9
9 Second « défaut » : ils peuvent être reconnus comme les porte-parole d’une
frange libérale de la bourgeoisie collaborant au pouvoir d’Etat après
Thermidor et jusque sous le Consulat » (Hordé p43) et « sont intervenus dans
la préparation du coup d’Etat de Brumaire...(recherchant) un Etat fort...pour
stabiliser les rapports entre les individus » (Hordé p 64). Ce terme de
bourgeois et cette participation les ont déprécié dans le contexte post 68,
faisant oublier qu’ils se sont opposés aux formes répressives de la Terreur de
Robespierre ou de l’Empire ( S Moravia, 1968, PP445 et suivantes)
10 dans son ouvrage Vers la société post-industrielle
21
une excellente méthode et une liberté entière est dans le
commencement d’une ère nouvelle de l’histoire » 11
L’éducation , avec des différences selon les niveaux du public ,est une
pièce maîtresse dans le projet des Idéologues, ce qui les opposent aux
encyclopédistes qui ne passent pas par les écoles en estimant que « ce
n’est point avec le secours d’un maître qu’on peut étudier mais avec
beaucoup de méditation et de travail » 13
13 d’Alembert 1755
22
efficaces, fixation des principes et formation lente d’une compétence
Il y a une volonté d’éducation globale, d’une collectivité dont les
limites sont indéfinies, pouvant aller jusqu’à l’humanité entière mais
en fait limitée à la classe savante , c'est-à-dire un idéal proche de celui
14
Pratique documentaire
23
lisibilité constituaient un enjeu politique déterminant, tout comme
celle de l’Internet avec l’information aujourd’hui
Finalité pratique
16 Le 3 brumaire an III sont décrétées les Ecoles Normales, qui sont ouvertes
le 1er pluviose ( 30/10 / 1794)
17 Hordé P 43
24
Voici comment Cabanis justifie l'avant-dernière proposition : « L'utilité des
langues modernes doit être considérée sous deux rapports très divers, mais très
étendus l'un et l'autre. Le premier embrasse tout ce qu'elles ont de relatif à
l'étude même de l'entendement humain et des modifications que ses procédés
ou leurs signes éprouvent de la part des circonstances locales et politiques.
Sous ce rapport, les langues modernes entrent dans les éléments de la véritable
métaphysique, mais uniquement comme les langues anciennes dont elles ne
diffèrent point en cela. Le second rapport est fondé sur les connaissances qui se
puisent dans leurs écrits, sur les relations commerciales dont elles peuvent
devenir le moyen, sur les voyages savants ou diplomatiques qu'on ne saurait
entreprendre sans leur secours, sur les échanges de lumières et de richesses qui
doivent eu résulter; c'est le côté par lequel l'étude des langues vivantes est de
l'application pratique la plus vaste, de l'utilité la plus immédiate et la plus
sensible. »
Ainsi la Science est, et doit être utile Pour les idéologues « l’expansion des
connaissances, élément des sciences et outil du changement de l’économie.
serait le moyen de régler les échanges sociaux. Le rôle assigné à
l’enseignement est celui de l’application ( industrie, agriculture, commerce,
guerre...) » .
20
25
On n’est pas loin du concept de la “ Technology ” qui comprend la Science
appliquée, la recherche industrielle et les activités de développement à visée
civile et militaire, et qui protège ses connaissances par le secret ou le brevet et
inscrit leur exploitation dans une perspective marchande., opposée à l’open
science, la République des sciences qui se place dans une dimension publique,
et incite les chercheurs à communiquer sur leurs résultats qui doivent être mis
gratuitement et librement à disposition de la communauté toute entière et du
public
On est dans l’idée d’ un bien marchand. La science n’échappe donc pas aux
lois du marché, même si les destinateurs et les destinataires y voient plutôt un
bien scientifique et culturel
22
26
normale une langue universelle établie par un congrès de philosophes ( mais
24 25
non d’une langue de savants qui séparerait l’élaboration des sciences et leur
enseignement). Mais elle ne pourrait être créée et adoptée qu’une fois l’Europe
établie en république 26
support
Les cours de l’EN est publié sous la forme d’un journal des séances des EN .
Avec trois fonctions : Renforcer la transmission du savoir par la parole, la
remplacer, pour « les élèves qui n’ont pu assister au cours dans un
amphithéatre trop exigu » (P 17), et permettre la surveillance par les membres
de la Convention 29
27
Importance du fait social:
des circonstances ” 31
28
L’élémentation des sciences doit faire sauter les blocages, permettre la
32
29
d’égalités face à l’information, au savoir et à la connaissance.
Diversité et abondance serait facteur d’émancipation
Lakanal : “ On a dit qu’il n’était pas possible que les élèves puissent
apprendre ni les instituteurs enseigner tant de choses à la fois. Je
commence par déclarer que ces objets sont d’une nécessité absolue,
car il est évident qu’il faut que les enfants connaissent leurs droits,
30
leurs devoirs, la constitution de leur pays, leur langue, les règles du
calcul. Il est évident qu’il faut qu’ils sachent assez de physique pour
n’être plus ni trompés ni effrayés sur les phénomènes de la nature.
31
- on retrouve les privilèges d’une intelligence savante, qui
constitue une caste qui se réserve le pouvoir, comme la noblesse avait
construit ses privilèges sur la possession de la terre.
-une nouvelle caste s’est créée, ceux qui ont le pouvoir d’agir sur les
TIC.
-on a accès à des millions d’ouvrages, masse qui ne peut que nous
stupéfier, mais qui se révèle inutile puisque nous n’avons pas
augmenté notre vitesse de lecture. Certes on fait maintenant lire les
documents par les machines, pour nous fournir ce qui nous intéresse.
Mais lire des milliers de résumés et d’extraits produit plutôt de
l’uniformité, puisque la machine ne nous signale que ce que nous
avons décidé un jour, pas ce qui est le plus intéressant.
32
-on ne cesse de se plaindre du manque d’interdisciplinarité.
Les idéologues ont donc perçu avec acuité que les techniques
bibliothécaires de l’organisation, de la gestion des livres, de leur
diffusion et de leur accessibilité et de leur lisibilité constituaient en fait
un enjeu politique déterminant, tout comme celle de l’Internet
aujourd’hui. Il y a deux siècles, tout a été imaginé. Mais non mis en
place. C’est sans doute pour cela que les théoriciens du signe ont été
oubliés.
33
La conception mécaniste correspond à une explication du complexe par le simple, par le décomposable,
par une réduction 36des phénomènes à un ensemble d’événements élémentaires. Il y a juxtaposition
d’éléments simples. Le déterminisme régissant les faits serait essentiellement de type logique ;=
réductionnisme,= analytisme .
La méthode analytique cartésienne repose sur:
- diviser le problème à résoudre en autant de parties que
l’intelligence peut traiter. Ainsi en physique, « connaître l’objet revient à le décomposer en ses éléments
simples et à caractériser chacun de ces éléments par leur situation dans l’espace, leurs qualités physiques,
chimiques et les lois générales qui les régissent.
- intégrer tous les paramètres
- ordonner les problèmes du plus simple au plus complexe et les
traiter successivement par ordre de difficultés croissant
( en pensant que les objets et les lois sont indépendantes de l’observateur et du contexte d’observation).
34
exclue. L’idéal est d’atteindre une expression mathématique des comportements
humains.
Voir Connaissance scientifique et géographie (extraits) epigeo.voila.net/science.htm
( attention le site est « engagé » et ne voit s’uene science possile, l’expérimentale):
La science repose sur un certain nombre d'axiomes qui doivent être respectés pour
pouvoir qualifier de science une discipline quelconque. On peut distingue huit axiomes
qui définissent la science dont
1 - Il n'y a pas de science sans différenciation et sans comparaison. Mais pour
comparer, encore faut-il mesurer, d'où la nécessité de la quantification. Celle-ci
constitue une étape nécessaire dès que les outils méthodologiques et de mesure le
permettent si bien qu'elle se développe souvent en seconde phase après la phase de
qualification qui est souvent longue, et dès que les outils le permettent.
Mesure, Comparaison et Différenciation, constituent ainsi les maîtres-mots de la
connaissance scientifique.
2 - Il n'y a pas de science sans expérimentation et vérification. Or, pour pouvoir
expérimenter, il faut mesurer et mesurer avec précision les éléments et les relations en
jeu. Si pour les sciences dures, le laboratoire constitue le moyen de l'expérimentation,
pour les sciences sociales et humaines le test et l'outil statistiques vont constituer le
moyen indiqué de cette expérimentation. C'est l'outil statistique qui va nous permettre
de tester la véracité des hypothèses de travail, de pouvoir les confirmer comme des lois
ou les infirmer et les modifier »
6 - La science débouche sur le général et le nomothétique. Il n'y a de science que du
général si bien qu'on peut découvrir des lois de fonctionnement des faits
indépendamment des particularités de chacun qui continuent à agir.
7 - La prévisibilité: Une dimension importante de la connaissance scientifique est sa
généralité, donc sa validité dans le espace et dans le temps. Ce second volet nous permet
de prévoir le futur même en intégrant un risque plus ou moins élevé. Cette prévisibilité
est la seule qui nous permet de maîtrise le futur, de programmer, de planifier sur la base
des lois mises en oeuvre et découvertes dans le passé ou le présent avec l'hypothèse bien
sûr que ce qui est valable maintenant restera aussi valable dans le futur du moins proche
ou moyen. La prévisibilité s'appuie donc sur la validité des lois et des connaissances
actuelles.
- imitation de ces lois dans les sciences humaines qui conduit à voir
la loi prendre le pas sur la morale,
35
l’orientation naturaliste qui « emprunte aux sciences de la
nature ses préoccupations d’objectivité et de reproductibilité, en
s’inspirant soit de la physique, soit de la biologie. On ne retient des
créations de l’homme que ce qui peut être ramené à des déterminants
matériels, observables et mesurables. Toute notion de valeur et
d’intentionnalité est exclue. L’idéal est d’atteindre une expression
mathématique des comportements humains » (Chante, 2008) . On est 37
- imitation de ces lois dans les sciences humaines qui conduit à voirla
loi prendre le pas sur la morale,
On a l’habitude de rapprocher, voire de mêler morale et éthique, soit
deux termes qui ont une même étymologie: ethos en grec, mores en
latin, ce sont nos mœurs , nos façons de vivre et d’agir. Ce sont donc
des traductions l’une de l’autre, le terme grec relevant sans doute
plus du langage savant .Mais l’on a aussi installé des différences
fondamentales : « Voilà donc que l’Ethique, c’est à dire une typologie
des modes d’existence immanents, remplace la Morale, qui rapporte
toujours l’existence à des valeurs transcendantes...A l’opposition des
valeurs (Bien- Mal) se substitue la différence qualitative des modes
d’existence (bon- mauvais) » ( Deleuze, 1981). L’éthique concerne
37
36
des valeurs relatives à un individu, une société, un groupe, elle est
toujours particulière. La morale porte sur des valeurs absolues et donc
universelles s’agit par l’obéissance (morale) ou la raison (éthique) de
régler notre vie et nos actions pour une vie plus heureuse. La morale
répond à “ que dois-je faire? ” et tend vers la vertu, voire la sainteté,
l’éthique à “ comment vivre (pour être heureux)? ” et tend vers le
bonheur et la sagesse. La morale commande, l’éthique recommande
( Comte Sponville, 1991) ( Conche, 2003)
-la déontologie remplace l’éthique Bentham contre Kant
le monde devenir certain et contraint
Au XIXe siècle, le progrès des transports fait qu'on passe de la
journée à l'heure pour les mesurer. Le voyage, expédition de plusieurs
jours, tend à être supplanté par le simple déplacement 4 . Ainsi
la première conséquence du progrès des transports est curieusement
de réduire les voyages, de démythifier l'aventure.
37
l'approche descriptive, introduit la statistique devenant indice de rigueur
scientifique, dans une tendance nomothétique ( qui établit des lois
générales à partir d’une expérimentation)
L’ auteur en admet l'aridité et reconnaît qu'il a dû les réduire au strict
nécessaire,
En même temps il propose dans des manuels du secondaire des cartes
purement qualitatives .Les représentations statistiques, jugeait-il, « sont des
formes sensibles, des images qui non seulement attirent et fixent le regard,
mais permettent d'apercevoir et de comprendre tout un ensemble d'un coup
d'oeil et qui font sur l'esprit une impression plus vive, souvent même plus
profonde et plus durable que les chiffres » » (Levasseur, 1885).
N’est ce pas du qualitatif ? Mais un qualitatif de la perception
Fin XIX apparaît à l’opposé une géographie académique
Géo universitaire et scolaire, naturaliste, qui se donne pour objet l’étude des
rapports entre la nature et l’homme, Vidal de la Blache
met en avant les études régionales
Elle est idiographique centrée sur l'étude d'individus considérés de manière
isolée. Elle se complait à souligner l’originalité, des objets géographiques .
Chaque région est un être à part,.Vidal de la Blache, menait « une approche
qualitative, avare de chiffres, essentiellement narrative voire descriptive,
non éloignée, d’un guide ou d'un manuel de peinture, celle des paysages »
Ainsi dans Géographie Universelle A Colin, 1935): « Pourquoi…en
Toscane chaque mas s’enorgueillit il d’antiques cyprès, comme dans un
tableau du Quattrocento ? Malgré leur inutilité, le Toscan a voulu donner une
parure à sa terre et quasi composer le paysage où il peine…on croit apercevoir
comme un style local dans les aspects des ces campagnes humanisées qui
relèvent un peu de l’âme de leur peuple »
38
Tout entrepreneur peut accéder à un catalogue exhaustif des
technologies déjà conçues par les chercheurs, et ce catalogue est
réductible à de l’information. Tout le monde disposant des mêmes
informations, un avantage ne peut résulter que d’une pertinence
supérieure de la décision d’un entrepreneur, ou de l’incapacité des
concurrents à optimiser leur choix. Cela n’est pas très satisfaisant pour
les professionnels, car ce n’est pas en adéquation avec la réalité
observable .D’où une autre vision qui a été conçue, considérant
l’élaboration de technologie comme un procès interne à l’entreprise.
où les informations s’incorporent dans des ressources qu’elles
contribuent à spécifier. L’information est au coeur de l’innovation
technologique mais ne suffit pas à la résumer. Après leur première
mise en oeuvre, les innovations ont besoin de processus
d’apprentissage pour être maîtrisées, soit une production de
connaissances pratiques non consignées, engendrées par les unités
innovatrices elles mêmes
L’information est-elle un produit ou un service?
L’information est assimilable à un produit quand il y a simple transfert de
documentation, sans jugement de valeur, sans validation d’un ensemble que
l’on vend et que l’on acquiert. On vend de l’information-données, je dirais
presque « au poids » comme n’importe quel produit. Ce qui compte alors,
c’est d’organiser les réseaux de transport (On a parlé de transport par
“ paquets ”, de Transpac, avant les autoroutes de l’information) et de créer
des réflexes d’achat.
39
la volonté d’une classification universelle.
- la normalisation pour une information certifiée.
Dans un sens général, une norme est un état habituel, conforme à
la règle établie. Au sens social, c’est une règle de conduite en
société, précisant ce que l’individu peut ou ne peut pas faire.Elle
est liée à une notion de pouvoir, devant être soit imposée par un
pouvoir totalitaire, soit proposée à l’acceptation par la majorité
sociale.
On a noté que la norme s’établit quand il y a menace ( DONC
BESOIN DE RAMENER LA CONFIANCE)La première
description linguistique du sanscrit classique au IVe siècle av. JC
par le grammairien hindou PANI s'est faite au moment où
l’invasion des parlers populaires menaçait la langue savante qui du
coup avait besoin de se stabiliserUne norme est établie par un
consensus et approuvée par un organisme reconnu qui fournit, des
règles pour des activités ou leurs résultats, garantissant un niveau
d’ordre optimal. La normalisation s’est organisée d’abord sur des
bases nationales, d’où des différences entre les pays.
Il y a beaucoup d’organismes, à différents niveaux (national,
européen, mondial) , des sujets différents, d’où un manque de
cohésion. Et de nombreuses normes sont inachevées. Et sont elles
vraiment respectées?
Dans un sens général, une norme est un état habituel, conforme à
la règle établie. Au sens social, c’est une règle de conduite en
société, précisant ce que l’individu peut ou ne peut pas faire. Elle
est liée à une notion de pouvoir, devant être soit imposée par un
pouvoir totalitaire, soit proposée à l’acceptation par la majorité
sociale.
Les normes linguistiques représentent sans conteste l’argument en
faveur des normes. Comment se comprendre sans elles? Mais il
faut noter que le grammairien en indiquant le bon usage de la
parole, en rejetant ce qui est relâché , incorrect, impur, vulgaire ne
se contente pas de dire ce qu’est la langue, mais dit aussi ce que la
langue doit être ” ( TODOROV). Il privilégie certains usages, et
40
le bon usage est celui qui manifeste le plus d’ordre et de
rationalité, s’accorde aux habitudes générales, a une justification
logique a des racines dans l’Histoire longue
On peut penser que seule l’observation de conventions communes
permet les partages, les échanges cohérents. L’utilisateur y trouve
son avantage même si certaines conventions lui paraissent
ésotériques. La médiation des professionnels aide à déchiffrer ces
conventions qui existent dans tous les domaines.
On peut rappeler que la normalisation internationale commença dans
le domaine électronique avec la création en 1906 de la Commission
électronique internationale . Les premiers travaux dans d’autres
domaines, surtout dans l’ingénierie mécanique, furent entrepris par la
Fédération internationale des associations nationales de normalisation
créée en 1926, qui cessa ses activités en 1942.
Dans beaucoup de pays industrialisés, la normalisation se dote alors
d’une véritable organisation, avec une instance nationale structurée et
clairement mandatée. Aux Etats-Unis par exemple se crée en 1918
l’American Engineering Standards Committee qui va devenir
l’American Standards Association (ASA).
En France, par le décret du 10 juin 1918, le ministre Clémentel crée la
Commission permanente de standardisation (CPS). Mais celle-ci
cessera toute activité en 1924 en raison, entre autres, de la lourdeur de
son fonctionnement et de son caractère étatique trop rigide. Les
entreprises françaises voient en elle un cheval de Troie de l’Etat.
Certains hommes, comme Jean Tribot-Laspière membre de la CPS,
prendront conscience du retard de la France par rapport au reste du
monde qui commence à mettre en place un organisme international de
normalisation, et de l’enjeu que représente son absence sur la scène
mondiale. Il sera le fondateur et secrétaire général de l’Association
française de normalisation (AFNOR) le 22 juin 1926, juste à temps
pour participer à la création de l’International Standards Association
(ISA) en 1928 à Prague (les réunions ayant débuté en septembre
1926).
Parallèlement à la création de l’AFNOR, différents secteurs de
l’industrie française décident de mettre en place leur bureau de
normalisation, sans nécessairement s’affilier à l’AFNOR.
A partir d’une instruction ministérielle du 26 novembre 1928, le
système de normalisation français s’organise entre la Commission
permanente de standardisation (CPS), l’AFNOR et les Bureaux de
41
normalisation, qui interviennent de façon complémentaire et
entretiennent entre eux des relations structurées. En 1930 La CPS
devient Comité supérieur de la normalisation.
L’AFNORComposée d’une association créée en 1926, reconnue
d’utilité publique et placée sous la tutelle du ministère de
l’Industrie, elle compte environ 3000 entreprises adhérentes. Elle
anime le système central de normalisation composé de 31 bureaux
de normalisations sectoriels, des pouvoirs publics et de 20000
experts,et assure le pilotage et le contrôle de trois filiales chargées
de la certification, de la formation et de l'international
42
Au XIXe siècle Saint Simon (1760-1825) esquisse une encyclopédie
où il voudrait remplacer les “ savoirs de l’insurrection scientifique ”,
destructeurs et désorganisateurs, par une pensée et une pratique
positive.Puis ce sont les grands dictionnaires universels et le grandes
Encyclopédies, comme chez Larousse en 1866 Le Grand dictionnaire
universel et en 1898 Le Nouveau Larousse illustré.
Mais le rêve encyclopédique devient un enjeu politique. Chacune des
encyclopédies porte la trace de son age, de ses auteurs, de son pays .L’
Encyclopédia britannica présente une vision anglaise, puis
américaine, l’Encyclopédia italiana qui date de 1929-39 est
“ mussolinienne ”, l’encyclopédie soviétique est stalinienne.
Finalement aucune encyclopédie ne parvient à se dégager de son
contexte. Il faudrait les lire toutes pour avoir un vrai panorama.
Puis c’est le refus (la peur ?) de l’engagement qui conduit vers une
neutralité. Déjà le projet d’Encyclopédie française lancé par Berr et
Lucien Febvre en 1933 , puis repris de 1950 à 65 avcc l’intention de
ranimer le courage intellectuel, se veut tableau donc sans prospective.
Puis les oeuvres suivantes du XXe siècle ont une absence de projet
autre que descriptif. L’anonymat des auteurs prétend à la neutralité,
comme dans l’ Encyclopedia universalis dans les années 70. On veut
représenter la science qui parle, et non la critique de la science ce qui
affadit et banalise les oeuvres.
« L’époque contemporaine ne reconnaît pas volontiers qu’une
entreprise encyclopédique soit encore possible la numérisation rend
possible l’utopie encyclopédiste et démocratique que les Lumières
avaient inaugurée par l’Encyclopédie et sa diffusion éditoriale .
43
Mélançon B. Les défis de la publication sur le web: hyperlectures,
cybertextes et métaéditions, coordonné par J.M. Salaün et C.
Vandendorpe, Presses de l’ENSSIB, 2004
44
hindouism, jainism, bouddhism… avec une seule classe prévue pour le
christianisme.
45
l’environnement, des milieux universitaires Autrement dit tous et
n’importe qui, à condition d’être reconnu par ses pairs déjà en place.
Un prototype de gouvernance anonyme
problème leur multiplication.
Nous ne voulons pas parler de leur nombre, qui croît comme toutes les
créations techniques.
Mais de la multitude des organismes : il y a beaucoup d’organismes, à
différents niveaux ( national, européen, mondial) , des sujets
différents, d’où un manque de cohésion.
Par exemple dans l’édition on souffre, là comme ailleurs, de la
domination américaine, et même allemande et néerlandaise
Ainsi Eric Sutter fait remarquer “ on ignore ce que font les autres, y
compris dans leur propre famille ” Faisant le compte rendu de
l’ouvrage de Olivier BOUTOU Afnor 2005 qui rappelle la production
et la gestion des documents associés à l’assurance qualité dans le
cadre des normes ISO 9000, il note qu’elle ne “ fait pas le lien avec la
norme européenne NF EN 82045-1 Gestion des documents. Principes
et méthodes, ou entre cette gestion ( et en particulier celles
d’enregistrement) et le records Management ISO 15489 qui recouvre à
peu près la même problématique ”. Puis il continue , regrettant
l’absence de lien avec le FDX 50-185 Management de l’information
paru au début 2004, rédigé justement à la demande de la commission
Afnor Management de la qualité pour proposer une approche plus
globale de la problématique Information -documentation: il n’y a
“ aucun lien, ni avec le document, ni avec la démarche.
Il y a pléthore de secteurs de normalisation. Comment faire cohabiter
avec la commission des normes de micrographies et mémoires
optiques, celle sur le papier permanent ( des industriels de la
papeterie)...
Il faut faire avec les règles de facturation entre libraires et éditeurs, qui
imposent des normes à intégrer dans les logiciels de catalogage qui
éditent les bons de commande
Les normes pour l’échange international de documents dans
l’administration, le commerce, l’industrie vaudront pour les
bibliothèques.
Nos systèmes de translittération, très importants si l’on veut couvrir
les langues non latines, sont coincés entre l’essor de la numérisation
qui n’en tient aucun compte, la phonétisation (qui bénéficie des
46
recherches pour les synthèses vocales), les usages des organisations
internationales
problème d'efficacité:
Elles ne sont jamais complètes La démultiplication des nouveaux
documents pose des problèmes encore non résolus:
La littérature grise, les fichiers électroniques devenus bien souvent la
forme normale de publication de la recherche tendent à échapper aux
normes. On a bien un ISRN ( International Standard Recording
Number) en cours, demandant de larges concessions de la part des
spécialistes. Mais comment appliquer un ISSN ( International
Standard Serial Number).
Les images fixes ont des normes de catalogage non encore achevées
Les images animées ont les leur en cours de révision
les normes sont elles vraiment respectées? Par exemple dans les
thèses, combien n’adoptent pas les normes de plan décimal
3. De la Post-Modernité à l’Hyper-Modernité
47
connaissance devront devenir la structure centrale de la nouvelle
économie et d’une société s’appuyant sur l’information ».
Mais on a quelque peu oublié que le besoin d’un théorie de
l’information , dans cet axe d’une « information économique », avait
été posé dès 1967 par Henri GUITTON et son “ information 38
économique ” : 39
48
pensait dans les années soixante que la publicité pouvait tout faire
croire) à une information utile pour l’usager. le refus de
l’accumulation au profit d’un traitement intelligent ( qui est à la base
d’une vraie « Société de l’Information », qui doit être une société où
l’on saura utiliser les informations), et le lien avec l’éducation que la
France développa avec le Capes de Documentation et la notion de
culture de l’information . Ce texte ancien constitue en fait pour nous
40
40
49
diffusant mieux, en préparant les laboratoires à mieux la recevoir).
Alors que sous l’aspect “ économique ”, c’était une information
dépendant d’organismes privés, pour qui l’information est un produit
ou un facteur de production qui oriente le choix des entreprises, et qui
se place sur le versant de la demande d’information.
On aura besoin de beaucoup d'efforts pour adapter la notion d' I.S.T. à
la compétitivité, à la rentabilité. D'où d'autres propositions:
50
Il propose donc le terme d’ “ information professionnelle ”, en imitant
les secteurs de l’informatique et des télécommunications.
On peut essayer préciser cette information professionnelle. Ainsi pour
Pateyron (4), il y aurait trois types d’informations caractérisées par
leur types d’utilité :
- informations de fonctionnement : financières, comptables, relevés
clients, liste d’abonnements,...
- informations d’influence, relationnelle : publicité...
- informations d’anticipation, de changement, stratégique qui sert à
la réflexion. C’est elle qui est l’objet de la veille. Elle peut parfois se
trouver contenue dans une des deux précédentes.
Enfin, dans un effort pour réunifier les deux concepts de document et
d’information, et peut être de donner pleinement sa place à la
documentation dans les Sciences de l’Information et de la
Communication, on a vu apparaître le terme d’information
documentaire chez les professionnels.
C’est la dénomination préférée par Jakobiak à I.S.T., qui est une
formulation qu'il juge trop restrictive.
Pour lui, l'information documentaire est composée d’informations
fonctionnelles, d'informations stratégiques et de connaissances.
Elle recouvre les informations scientifiques, techniques,
technologiques, technico-économiques, et constitue une information
d’environnement et sécurité, réglementaire et juridique, qualitative et
générale (y compris les aspects communicationnels, de formation et
d’organisation indispensables pour une bonne maîtrise de l’ensemble)
D’une part, volonté du ministère de la Recherche
Dans ce cadre, on voit une Société de l’information non
réalisée, à atteindre, en apprenant aux entrepreneurs non
seulement à trouver l’information, mais surtout à s’en servir.
Savoir prendre des décisions, savoir utiliser des modèles et pas
seulement savoir s’informer. Donc une culture d’élite, formant la
future aristocratie de ceux qui savent utiliser l’information pour
s’enrichir, manipuler, commander, et donc se réserver le pouvoir.
En France, à partir de 1990, le Ministère de la recherche a
lancé des démarches vers les entreprises, pour donner l’idée
qu’il fallait employer les pros, développer les actions de
51
recherche, former les patrons à l’IE. C'est-à-dire de former les
élites en place,
On en voit la continuité dans le Rapport de Nicolas Curien et
Pierre Alain Muet “ la société de l’information Conseil d’analyse
économique ” (Paris: La Documentation française 2004) insiste sur les
enjeux juridiques, les mesures incitatives à diffusion des TIC dans
l’OCDE, l’administration électronique, l’e-santé. Il annonce des
actions à mener pour:
le droit à l’information et à la connaissance
la promotion d’un accès universel à un coût abordable
la mise en place d’un environnement favorable
le développement de ressources humaines
la promotion de la diversité linguistique et de l’identité culturelle
le renforcement de la sécurité des réseaux de communication et
d’information
l’amélioration des accès au marché
la prise en compte des défis mondiaux
Avec trois objectifs: assurer à tous l’accès aux TIC
affirmer l’importance des TIC comme outil de
développement économique et social
instaurer confiance et sécurité dans l’ utilisation
des TIC
52
Il faut former à la veille et à l’IE , à l’aide de formations continues,
41
53
sinistre Le terme de risque qui était défini par la notion de danger,
implique actuellement l’intégration de la prévention ou de
l’indemnisation, soit deux éventualités de l’échec de l’entreprise : 42
54
chercheur qui sélectionne une série de revues à lire régulièrement pour se
tenir au courant, tous font de la veille sans le savoir.
Depuis l’Antiquité, commerçants et politiques ont cherché à se
renseigner. A ce titre, de missi dominici en intendants puis préfets, de
service de police en service d’espionnage, d’ambassadeurs et en consuls,
l’Etat a toujours organisé des structures de renseignement qui
nécessitaient de la veille. Et les études de marché ou de faisabilité sont
anciennes.
Simplement, notre époque croit toujours tout inventer, et reconnaît
comme début de la veille le moment ou le mot apparaît, associé à divers
adjectifs, où on théorise sur le sujet, et où il devient un élément de la
politique économique .
Elle relève d’un constat « les spécialistes ont coutume de dire que 90%,
voire 95 % de l’information recherchée et utile est en fait disponible »
(1)
Le terme de veille technologique apparaîtrait en France en 1979 dans un
rapport du BIPE (Bureau d’informations et de Prévisions Economiques):
« le décideurs publics et privés ne disposant pas d’un service de veille
technologique systématique sont à la merci de l’émergence d’innovations
non repérées » (2).
Il est concurrencé un temps par celui de vigilance, dont parle M. Oury,
(3) qui fait référence à la métis grecque, « ruse de l’intelligence »,
composée des aspects retors et conjecturaux propres à l’artisanat, la
navigation... (un bon navigateur n’est pas celui qui sait, mais qui a la
capacité de prévoir et de découvrir les pièges de la mer. Il faut de la
vivacité d’esprit combinée à l’habileté et la connivence avec le réel. La
métis lie, encercle, jamais ne va droit, ne connaît pas de frontière, elle
combine ruse et raison au nom de l’action pratique, tandis que Thémis, la
Science se rapporte à un ordre conçu comme déjà instauré et fixé (4).
Le concept de veille s’affirme à l’approche des années 90:
En mars 1988 Jacques Valade, ministre de la Recherche et de
l’Enseignement supérieur a créé un Comité d’Observation Stratégique de
l’Information Scientifique et Technique (IST) et de la Veille
Technologique avec 9 personnalités pour chacun des deux groupes.
En janvier 1989, l’Union des industries chimiques a consacré un atelier à
la veille technologique lors de sa journée d’étude dédiée aux Ressources
Technologiques et Ressources Humaines.
55
De Janvier à avril 1989 le Xe Plan a pris en compte l’ensemble « Veille
Technologique et Politique des Brevets » qui a constitué un groupe
intégré dans la sous commission Innovation et Recherche.
En novembre 1989 l’Université d’Aix-Marseille III a créé un DEA
« Information stratégique et technique. Veille scientifique et
technologique » (dir. Henri DOU)
Dans le même temps, nombreux articles dans Le Monde, Les Echos et
conférences ou tables rondes dans des congrès et colloques comme IDT
ou IDATE. Ainsi l’Etat, le monde industriel, l’université et les médias,
en action concertée, ont mis à la mode le concept.
Pourquoi cela se produit-il à ce moment?
- parce que la concurrence internationale s’accroît, devient plus
agressive. Il ne suffit plus de mieux connaître les clients que le
concurrent (marketing), mais lutter directement avec celui-ci, en menant
une guerre stratégique supposant du renseignement.
- parce que l’arrivée des nouvelles technologies provoque des
mutations extrêmement rapides et profondes dans les entreprises. Pour
rester compétitif, il faut prévoir, anticiper et donc être bien informé, tout
en gérant des masses importantes de données.
- parce que la réussite du Japon fondée sur la veille, sert d’exemple. :
Sa Constitution de 1868 annonçait “ nous irons chercher la connaissance
dans le monde entier afin de renforcer les fondements du pouvoir
impérial ” (cité par Rouarch)
Déjà en 91 selon Lainée 1,5 % du chiffre d’affaires du Japon concernait
la collecte d’informations, deux fois plus qu’aux USA .Le MITI,
Ministère du Commerce international et de l’Industrie est aidé par le
JETRO (Japan External Trade Organisation) présent dans 80 pays pour
recueillir des informations sur les produits, les prix..., le JISCT Japan
Information Center of Science and T, relevant directement du premier
ministre doit recueillir, exploiter, diffuser l’IST internationale. Il analyse
11000 revues dont 7000étrangères, 50000 brevets, 15000 rapports
produit 500000 résumés
- dans les années qui suivent, c’est l’effondrement du bloc
communiste qui marque l’avènement d’une nouvelle géographie
économique du monde. Les affrontements évoluent selon des logiques
complexes voire contradictoires.
56
La définition générale dans la norme expérimentale AFNOR XP X50-
053 (avril 1998) est: « une activité continue et en grande partie itérative
visant à une surveillance active de l’environnement pour en anticiper les
évolutions »
Mais il y a en fait différents types de veille :
Veille technologique
DOU(5): « c’est l’observation et l’analyse de l’évolution scientifique,
technique, technologique et des impacts économiques, actuels ou
potentiels, correspondants pour dégager les menaces et les opportunités
de développement d’une société soucieuse d’agir en tenant compte de
son environnement »
JAKOBIAK (6): « c’est l’observation et l’analyse de l’environnement
suivi de la diffusion bien ciblée des informations sélectionnées et
traitées, utiles à la prise de décision stratégique »
LESCA (7) ce sont « les efforts que l’entreprise consent à faire, les
moyens dont elle se dote et les dispositions qu’elle prend dans le but
d’être à l’affût et de déceler toutes les évolutions et toutes les nouveautés
qui se font jour dans les domaines des techniques et des technologies qui
la concernent actuellement ou sont susceptibles de la concerner dans le
futur ».
Veille concurrentielle
Elle est axée sur les concurrents actuels ou potentiels. « Elle permet de
pister les démarches actives, actions de développement, déploiement vers
d’autres secteurs et domaines d’activités, fausses pistes et leurres
destinés à égarer les curieux, intrusions diverses, dépôts de brevets,
travaux de recherche, et ceci de la part des concurrents directs ou
indirects. (Elle) permet souvent de détecter des savoir-faire de certains
confrères/concurrents....de connaître les techniques de vente et de
distribution des concurrents et leur politique de communication. » (8)
Elle entre en synergie avec les autres types de veille, voire s’y apparente.
Veille commerciale (= marketing)
Elle est axée sur l’évolution des besoins des clients, de leur relation avec
l’entreprise, de leur solvabilité. « Il faut étudier de façon permanente
l’amont et l’aval du marché » (9)
Elle « permet d’entraîner une synergie opérationnelle entre fonctions dan
l’entreprise... et d’éclairer la prise de décision dans un esprit de
57
pluridisciplinarité » (Rouach), excluant le cloisonnement des fonctions
dans l’entreprise.
La veille sociétale, environnementale, sociopolitique « consiste à
discerner parmi un certain nombre de changements (démographie, villes,
modes...) les grandes fractures qui s’opèrent dans la société et qui risque
de transformer ou de perturber l’entreprise et son environnement »
(Pateyron).
« Basée sur un travail d’intuition et d’un raisonnement empirique, et
reposant sur un réseau très large et hétérogène de personnes, elle
correspond à un repérage de signaux faibles. Elle permet de construire
une classification des tendances de fond ou superficielles. Certaines
entreprises forment des « chasseurs de tendances » ou « écumeurs » qui
détectent avec une curiosité insatiable lors de rencontres diverses les
nouveaux goûts des futurs consommateurs » (Rouach). Ce serait une
« veille branchée »
La veille juridique : relative à la législation et à la réglementation, elle
permet de pénétrer des marchés étrangers aux règles spécifiques.
La veille stratégique
C’est « la recherche de l’information grâce à une vigilance constante et
une surveillance de l’environnement pour des visées stratégiques (dans le
triptyque: réception-interprétation-action) ». (Pateyron)
C’est « le processus informationnel volontariste par lequel l’entreprise
recherche des informations à caractère anticipatif concernant l’évolution
de son environnement socio-économique dans le but de se créer des
opportunités et de réduire ses risques liés à l’incertitude. Parmi ces
informations figurent des signaux d’alerte précoce » (Lesca).
Finalement elle engloberait les différents types de veille existants.
On le voit, la veille est très diverse, elle concerne tout, au point qu’on
peut se dire qu’à coté des professionnels, grands connaisseurs des
sources d’information et des outils de recherche, la veille doit être une
attitude de tous les membres de l’entreprise.
Bibiographie
Baumard P. Stratégie et surveillance des environnements concurrentiels
Masson 1991
58
Briot Laurence Etes-vous de bons veilleurs? Archimag, Février 1996,
n°91, p.25-33
Castano Eric, Soury Marie-Pierre et Dou Henri La diffusion des
informations en veille technologique et son rôle dans la stratégie de
l’entreprise. Documentaliste- Sciences de l’information 1995, vol 32, n°
1, p 9-12
Desvals H. (éd.) et Dou H. (éd.) L’information scientifique, technique et
industrielle Ed Dunod, Paris 1992
Dou Henri Veille technologique et compétitivité Paris Dunod, 1995
Guerny (de) Jacques et Delbes Raymond Gestion concurrentielle:
pratique de la veille Paris, Delmas, 1993
Jakobiak F. Pratique de la veille technologique Paris : éd d’Organisation,
1990
Lainée F. La veille technologique: de l’amateurisme au
professionnalisme Paris, éd Eyrolles 1991
Martinet Bruno, Ribault Jean Michel La veille technologique,
concurrentielle et commerciale, éd d’Organisation 1989
Reyne M Le développement technologique de l’entreprise par la veille
technologique éd. Hermès 1990
Villain Jacques L’Entreprise aux aguets: information, surveillance de
l’environnement, propriété et protection industrielles, espionnage et
contre espionnage au service de la compétitivité, Masson, 1989
__________________________________________________
(1)Allain-Dupré, Patrice et Duhard Nathalie Les armes secrètes de la
décision: la gestion de l’information au service de la performance
économique, Paris : Gualino 1997
(2) BAYEN Marcel La veille technologique: élément clé du
développement des entreprises. Le bulletin de l’IDATE, veille
technologique et stratégique, 2ème trimestre 1989, n°36, p 11-26
(3)Oury J.M. Economie de la vigilance 1983,
(4) Detienne M. et Vernant J.P. Les ruses de l’intelligence. La métis des
Grecs Champs Flammarion 1974
(5) Dou H. « Intelligence sociale et veille technologique » Humanisme
& Entreprise, Août 1993, p. 53-94
59
(6) Jakobiak F Exemples commentés de veille technologique Paris, éd
d’Organisation, 1992
(7) Lesca Humbert Veille stratégique: concepts et démarche de mise en
place dans l’entreprise Paris ADBS 1997
(8) Rouarch Daniel, La veille technologique et l’intelligence
économique Paris : PUF 1996
(9)Pateyron Emmanuel La veille stratégique Paris : Economica 1998
Intelligence Economique :
Il s’agit d’un terme qui pose problème, car le mot « intelligence » est pris
soit dans son sens anglais de renseignement (CIA Central Intelligence
Agency, ou IS Intelligence Service, proches des RG Renseignement
Généraux), ce qui est le sens initial, et dans son sens français lié aux
activités cognitives (après tout, en France « on a des idées »!).
L’approche française était au d&but un contresens lié à de mauvaises
traductions, mais qui a été fécond en donnant une autre piste de
réflexion.
Pour l’AFDIE (Association française pour le développement de
l’Intelligence Economique) en 1996, c’est « une dynamique de
construction collective fondée sur la conviction et la responsabilité de
tous, qui consiste en l’appropriation de l’information en vue d’une
action économique, immédiate ou ultérieure. Fondée sur le principe de
coordination, elle s’accompagne d’une évolution profonde de la culture
d’entreprise et de la capacité de construire l’avenir face à des évènements
incertains. Enfin elle permet de tirer parti des avantages stratégiques pour
construire un avantage concurrentiel performant durable ».
C’est un mode de management systémique de la connaissance qui
permet de produire de l’information utile à la prise de décision.
Pour N. Moinet (1), l’Intelligence économique est une réponse
culturelle et opératoire aux problématiques de la globalisation et de la
société de l’information.
Ces notions génèrent pour les entreprises comme pour les Etats des
opportunités et des menaces qu’il faut identifier, qu’elles soient internes
ou externes, ainsi que les éléments à protéger, qui étant de plus en plus
immatériels, nécessitent des savoir-faire spécialisés. Les entreprises ont
pourtant des difficultés à s’approprier le concept et les pratiques de l’IE,
60
d’où le besoin d’une culture de l’information pour faire comprendre que
l’IE est un facteur clé pour la réussite des projets.
Les rapports avec la veille sont perçus de façon variable. Pour certains,
l’intelligence économique englobe tous les types de veille.
Pour d’autres, elle est une veille active, offensive, s’intégrant dans une
véritable guerre économique, et non passive, axée sur la collecte et le
traitement de l’information ouverte, c’est à dire publique. La veille active
vise l’information non encore diffusée, elle se mène de façon ciblée dans
le temps et l’espace, sur des circuits de décision bien définis, avec un
objectif opérationnel. On s’intéresse surtout aux sources informelles.
(ALLAIN DUPRE et DUHARD).
Pour d’autres encore, « elle est une sorte de prolongement et
d’aboutissement de la démarche de veille » (Bloch)
Il nous semble qu’il s’agit de la partie comprenant la décision
stratégique qui est l’aboutissement d’une démarche de veille vraiment
stratégique. La veille est plus technique, plus affaire de spécialistes de la
recherche que de la décision, elle est nécessaire à l’intelligence
économique mais peut suffire dans certains cas.
61
d’Etats, ou d’acteurs de la société civile. Il faut aussi savoir développer
le lobbying.
Un rapport déterminant
C’est en 1994 que la France s’intéresse à la notion l’intelligence
économique avec le rapport MARTRE au Commissariat général au Plan
(2).
On s’inquiétait du retard de la France, qui serait dû à une méfiance
envers la gestion collective de l’information.
Selon ce rapport elle « peut être définie comme l’ensemble des actions
coordonnées de recherche, de traitement et de distribution en vue de son
exploitation, de l’information utile aux acteurs économiques. Ces
diverses actions sont menées légalement avec toutes les garanties de
protection nécessaires à la préservation du patrimoine de
l’entreprise...elle implique l’interaction entre tous les niveaux de
l’activité: depuis la base en passant par des niveaux intermédiaires
(interprofessionnels, locaux) jusqu’aux niveaux nationaux,
transnationaux ou internationaux ».
Le rapport Martre constatait un clivage politique et un sectarisme social
absence de consensus national
antagonisme culturels
corporatisme et élitisme
Réticences: à s’ouvrir à l’extérieur
ne pas avouer ses faiblesses
veut information gratuite
pense qu’elle est disponible si on cherche un peu
ne prévoit pas temps et argent pour recueil
s’estime trop spécifique
idée que celui qui détient l’information a le pouvoir et on fait de la
rétention
individualisme, suffisance
En 1995, sous le gouvernement Balladur, on note la création du Comité
pour la Compétitivité et la Sécurité économique. Mais sous le
gouvernement Juppé, on le place sous le contrôle du ministère de
l’économie, puis il est abandonné.
En 1998 L’Agence pour le Développement de l’Information
Technologique, ADIT, est chargée d’organiser une politique nationale.
Une cinquantaine d’ingénieurs se mettent à rassembler, analyser et traiter
un maximum d’informations du monde entier, proposant une banque de
données publique.
L’Etat a créé la Direction Centrale de la Sécurité publique, la Direction
de la Surveillance du Territoire (renseignement défensif, répression de
l’espionnage industriel), le Service de Prévention de la Corruption.
62
En 2003 Raffarin demande un rapport au député CARAYON, sur le
problème constaté que l’Intelligence Economique « n’occupait pas en
France une place digne des enjeux », se heurtant à « un manque de
motivation et de sensibilisation »: sur 1200 sociétés de plus de 200
employés sondées, 1/2 pratiquaient l’IE, mais moins d’1/3 y affectent un
budget et moins 1/10 disposaient d’un tableau de bord.
Le rapport confirme que sans doctrine préétablie, les chefs d’entreprise
ne savent pas réellement mettre en place un système de surveillance
efficace.
Il faudrait que l’Etat se dote d’une véritable définition du patrimoine
économique national et de tout ce qui peut servir aux intérêts
économiques du pays en vue de permettre aux entreprises de conquérir
des marchés extérieurs, de se protéger et d’étendre leur influence.
Il faut aussi intégrer la fonction d’IE dans le système éducatif et dans son
action publique.
Pour cela il existe une commission consultative pour l’enseignement et
recherche auprès du Haut responsable pour l’IE qui a défini 5 pôles:
Environnement international et compétitivité
Intelligence économique et organisation
Management de l’information et des connaissances
Protection et défense du patrimoine informationnel et des connaissances
Influence et contre-influence.
Des précautions à prendre
Il faut prendre garde aux erreurs stratégiques:
Jean Marie MESSIER, président de Vivendi Universel qui développait
une stratégie de conquête de l’Amérique, Michel BON qui défendait le
redéploiement de France Télécom, GIAT industries qui avait lancé une
politique de gestion des connaissances visant à améliorer l’efficacité du
groupe semblaient être des champions de l’IE, ayant envisagés le progrès
technique, l’évolution des marchés et la mondialisation en cours. Or ils
se sont lourdement trompés.
Jean Louis LEVET, président fondateur de l’AFDIE Association
Française pour le Développement de l’Intelligence Economique affirme
que « ces patrons n’avaient pas une vraie culture stratégique. Et moins on
en a, plus on est sensible aux modes» (3).
63
d’intelligence concurrentielle en entreprise, de chercheurs et de
consultants) : « Les informations circulant dans un réseau peuvent se
comparer aux fluides circulant dans une tuyauterie, (où) la nature des
fluides varie, les fluides subissent des transformations qui augmentent
leur valeur et les vannes du réseau représentent les acteurs opérant les
transformations » (4)
Sur le plan des postes dans l’entreprise il y aura distinction entre
plusieurs activités s’il y a des moyens: d’un coté le documentaliste :
accès à information et gestion de la documentation
De l’autre le responsable de la veille qui s’occupe aussi de récupérer
l’information informelle, et va peut être plus loin dans le traitement et la
diffusion
Pour Roger MOIROUD, président du SCIP-France (Society of
Competitive Intelligence Professionnals) il y a division du travail, le
responsable d’IE sélectionne dans ce que prépare le centre de
documentation et présente le résultat.
Pour DOU, ce responsable est indépendant du centre de documentation,
y fait seulement appel. Pour LUBKOV (5), il y a très peu de lien, car la
cellule de veille s’autodocumente. Elle est composée de scientifiques et
de commerciaux, avec, parfois un documentaliste.
On reproche au documentaliste de ne pas assez connaître le domaine
d’activité, on ne lui donne pas de rôle dans la collecte des sources
internes, on le laisse en dehors des sources informelles. Ne fait-on pas
erreur ? Et quand on lui reproche d’être trop éloigné des décideurs, il est
évident qu’il n’a pas choisi cette place.
Bibliographie
Achard Pierre Intelligence économique: mode d’emploi Paris : ADBS
1998
Besson Bernard et Possin Jean-Claude Du renseignement à l’intelligence
économique Paris : Dunod 1996
Besson Bernard et Possin Jean-Claude L’audit de l’intelligence
économique Paris : Dunod
Bloch Alain L’intelligence économique. Paris : Economica 1996
Jakobiak François L’intelligence économique en pratique éd
d’Organisation, 2e éd.2001
Martinet Bruno L’intelligence économique: nouveau concept ou dernier
avatar de la documentation dans les entreprises? Documentaliste-
Sciences de l’information 1993, vol 30, n° 6, p317-320
64
Martinet Bruno et Marti Yves Michel L’intelligence économique: les
yeux et les oreilles de l’entreprise Paris, éd. d’Organisation 1995
Oury J.M. Economie politique de la vigilance Calmann Lévy 1983
___________________________________________________
(1)Moinet N. n° thématique “ l’intelligence économique ” Revue
Marketing et Communication 3e trimestre 2006
(2) Martre Henri, Commissariat général au Plan Intelligence économique
et stratégie des entreprises Paris: La Documentation française 1994
(3)Levet Jean Louis (sous dir.) Intelligence économique et économie de
la connaissance Paris : Economica 2002
(4) Marti Y.M., « Comment déterminer la valeur de l’information? »in
Gérer l’information pour l’excellence de l’entreprise IDT 94, 11e
congrès Juin 1994
(5)Lubkov Michel « Comment organiser sa veille » Archimag, février
1995, n°81, p. 34-37
Lubkov Michel « Espionnage et renseignement économique » Archimag
n° 76 1994
IE et développement durable de l’information et de la
communication
Pour l’entreprise, à partir de la veille, l’information rentre dans une
démarche d’IE : comment se servir de l’information à des fins
stratégiques.
Une des difficultés récurrentes dans les dispositifs d’intelligence
économique se situe dans la collaboration entre les strates
hiérarchiques de l’entreprise, dans les processus de médiation entre les
besoins des dirigeants et la cellule de veille.
Différentes études (Pelletier et Cuenot, 2013) ont démontré que la
principale faille des entreprises réside non pas dans la protection de
son patrimoine matériel (lequel est d’ailleurs de plus en plus
immatériel) mais dans les risques relatifs au patrimoine humain.
L’homme et par là même les salariés d’une entreprise sont le talon
d’Achille de cette dernière, c’est régulièrement les fuites
d’informations sensibles causées par un employé qui finissent par
donner un avantage concurrentiel aux entreprises « adverses ». Cette
crainte ne facilite guère le partage de connaissances et de savoirs sur
l’entreprise. De fait, lors de l’élaboration d’un dispositif de veille,
l’équipe managériale reste sur ces gardes et ne révèle qu’une partie
des informations ou plus précisément de leurs intentions quant à la
surveillance de leur environnement. Or un dispositif d’intelligence
économique réussi consiste en « l’habilité à apprendre finement et
globalement un environnement complexe et à prendre la bonne
65
décision » (N. D’Almeida, 2001, p.50-51), mais ceci n’est possible
qu’à partir du moment où l’ensemble des acteurs est averti des
informations pertinentes à repérer, à analyser, à diffuser. Dans le cas
contraire, cela revient à mettre sous surveillance son environnement
sans savoir réellement sur quels éléments contextuels porter son
attention.
La suspicion et le manque de communication sont ainsi à l’origine de
moult échecs en Intelligence Economique. Situation de « double
bind » (Bateson & al., 1956) puisque nous avons d’un côté les
managers qui ne veulent pas divulguer toutes les informations auprès
de leurs subalternes par peur d’éventuelles fuites d’informations, et de
l’autre, les professionnels de la veille stratégique qui ne peuvent
conduire de manière efficiente la veille sans connaître et comprendre
les problématiques de leurs dirigeants. Comme le souligne Jakobiak
(2006), les dirigeants devraient prendre conscience du caractère
obligatoire de la culture partagée en entreprise. Ces propos rejoignent
ceux de Moinet (2011) qui pointe les limites des systèmes de
gouvernances des entreprises qui se fondent sur le modèle vertical, et
souligne la nécessité de passer d’une entreprise à la hiérarchie
verticale à une entreprise à la hiérarchie horizontale basée sur la
confiance et les réseaux. Ceci est interdépendant de la culture de
l’entreprise et de la volonté politique des dirigeants.
Au sein d’un dispositif d’intelligence économique, l’information doit
être perçue comme la source de la connaissance, cette dernière
permettant l’action. Pour être pertinente et mener aux « bonnes »
actions/décisions, l’information doit être comprise dans un cadre
systémique et être contextualisée. C’est cet écosystème informationnel
qui confère toute sa valeur à l’information, la rend utile pour des
pratiques et des stratégies d’entreprises durables.
La surveillance de l’environnement de l’entreprise est essentielle, le
veilleur tient donc une place centrale dans le dispositif d’Intelligence
Economique. Le veilleur n’est plus considéré comme un « exécutant »
agrégeant du contenu mais comme un manager de l’information, le
situant comme un cadre qui participe pleinement au pilotage
stratégique de l’entreprise.
Ce faisant, nous passons du domaine des pratiques informationnelles à
des pratiques communicationnelles, changement de facette qui
témoigne de l’unité du sujet dans la diversité des axes, et demande,
pour utiliser une autre image, un « passage de relais », entre membres
des SIC.
66
La culture de l’information, définie comme un concept à facettes,
permettant en tant qu’objet-frontière des pratiques d’inter, sinon de
trans-disciplinarité, est impliquée dans la notion de développement
durable, tant au niveau des grands organismes chargés d’initier des
changements de comportement au sein du contexte politico-
économique que dans les structures éducatives chargées de préparer
les esprits à ces changements.
Nous pensons qu’il ne faut pas se contenter d’impliquer les systèmes
d’information dan la démarche, mais d’appliquer le concept à
l’information elle même, tant au niveau pratique qu’au niveau
scientifique, afin de faciliter les recontextualisations, et toutes les
démarches heuristiques inhérentes à la science.
3.2.2 Culture de l’information : le versant éducatif
La culture de l’information a eu une connotation pédagogique
dès les origines. On l’a ainsi vu apparaître dans le manifeste
ABCD pour la culture de l’information (Documentaliste-sciences
de l’information, 1996, vol 33, n°4-5) où l’on constatait la
nécessité d’une sensibilisation des élèves, et demandait de
soutenir un programme de recherche, d’investigation et
d’expérimentation comprenant un programme de la 6eme à la
Terminale, avec une évaluation prévue, des formations
obligatoires dans le supérieur, dans les prépa aux grandes
écoles, des actions de formation continue, des formations pour
tous les enseignants et des produits pédagogiques multimédia.
On a eu dans ce cadre les Assises sur l’éducation à
l’information et à la documentation, clés pour la réussite de la
maternelle à l’université (Jussieu),précisant que la Société dite
de l’information impose d’évaluer, face aux nouvelles
technologies, le pratiques éducatives pour les intégrer dans les
programmes de formation, pour une éducation à l’information
plus large que l’apprentissage des techniques documentaires.
On doit donner l’aptitude à comprendre et maîtriser les
processus d’information
L’éducation à l’information devrait donner une culture à
l’information, former à la maitrise des concepts, savoirs et
usages.
Mais on peut aussi penser la culture à l’information comme
une nécessité dans l’entreprise, prenant le sens de culture
d’entreprise. Les travaux sur l’Intelligence Economique ont
67
montré que l’entreprise a besoin de se persuader que
l’information doit communiquer, ne doit pas être l’objet d’une
rétention que l’on croit déboucher sur un pouvoir, qu’elle doit
être utilisée .Les entreprises ont des difficultés à s’approprier
le concept et les pratiques de l’IE, d’où le besoin d’une culture
de l’information pour faire comprendre que l’IE est une
réponse culturelle et opératoire aux problématiques de la
globalisation et de la « société de l’information » ( Moinet
Nicolas,2006)
Mais cette technique « universelle » (est-ce vrai?) qui transporte de l’information peut soit
servir à un projet d’émancipation, soit creuser de nouvelles inégalités. On prétend qu’en
pilotant les systèmes d’information, ils deviennent facteurs de progrès, et qu’en ne les
pilotant pas ils sont facteurs d’inégalités.
On veut lutter contre la fracture culturelle en utilisant les possibilités des nouveaux services
pour élargir l’accès à l’information, à la connaissance et à la communication, au nom de
l’idée d’une culture universelle accessible et profitable pour tous. Internet serait un outil
neutre qui transcende les inégalités et crée des chances nouvelles d’égalités face à
l’information, au savoir et à la connaissance. Ce faisant, on donnerait une cohésion à la
société .
Mais la « société de l’information » pourrait être une société selon le modèle ancien
reposant sur une culture cultivée, qui doit simplement être présentée ( selon l’idée de
Malraux, qui ne croyait pas à l’éducation à l’art), ou dispensée au plus grand nombre pour
développer une société ouverte et permettre les promotions sociales soudant la société par un
intéressement aux valeurs dans une apologie de l’effort et de la sélection.
68
Ce besoin d’éducation est à la base de la création du Capes en 1989
69
On a donc vu le service devenir un centre ( plus valorisant), le terme
centre de documentation préféré à bibliothèque ( même s’il y a plutôt eu
une fusion (symbolisée par la création de la FADBEN en 1972 regroupant
Documentalistes et Bibliothécaires mais avec une priorité, le fait que le D
précède le B n’étant pas sémantiquement innocent), le mot information
amener une notion d’immédiateté et d’utilitéEn 1974 la France a doté son
système scolaire secondaire de Centres de Documentation et
d’Information dans une volonté de moderniser un service qui s’est encore
perfectionné en 1989 avec la création d’un Capes de Documentation
destiné à former et sélectionner les responsables du Centre, les
bibliothécaires documentalistes devenant des « professeurs
documentalistes ». Le CDI devenait un lieu de médiations complexes,
puisque des médiations éducatives se combinaient à la médiation
documentaire. En effet dans le CDI se combine des médiateurs techniques
(matériels), sociaux naturels (normes, valeurs) et humains, le
documentaliste jouant un rôle de veilleur, de transmetteur, « de
catalyseur, d’orienteur sur les chemins du savoir », (De Rosnay). En étant
au « centre », le CDI est médian, au milieu, au cœur de l’établissement
constituant par là un milieu rassurant: « La médiation apporte une
sécurité dans la mesure où elle permet par son effet contenant d’offrir une
enveloppe rassurante »(Ntsiba 2010) ; en se voulant moderne dans un
milieu scolaire, il devenait un médiateur vers les nouvelles technologies
(c’est par lui que sont entrés dans l’établissement les appareils pour
diapositives, le magnétoscope, la photocopieuse et les ordinateurs) et en
s’ouvrant vers le monde extérieur il est concerné par l’intermédiation
sociale type animation. Il convient de noter qu’en répondant à plusieurs
missions, le CDI s’affronte à diverses formes de mémoires (personnelle,
commune, historique, sociale, technique) sans en fixer vraiment les
définitions
70
d’utiliser et de partager l’information et le savoir…
- dans laquelle les individus, les communautés et les peuples puissent
ainsi mettre en œuvre toutes leurs potentialités en favorisant leur
développement durable…
- ainsi qu’en respectant pleinement et en mettant en œuvre la
Déclaration universelle des Droits de l’Homme ».
3.3 Trois conflits
3.3.1 Société de l’Information ou Société du Document ?
- tout devient un document numérique.
- toute information, au sens le plus large, est inscriptible, donc devient
systématiquement un document.
- toute parole, expression, hésitation, publique ou privée, peut être filmée,
montrée, mémorisée et disponible pour une « éternité » numérique.
Existe-t-il vraiment une société de l’information ? Une société
du numérique, certainement. Mais de l’information? Jean
MICHEL le pense, et la présente ainsi : «l’avènement du
multimédia et surtout le développement prodigieux des
réseaux électroniques conduisent à parler d’une véritable
société de l’information. Jamais, dans toute l’histoire de
l’humanité, l’information n’a été aussi présente dans toutes les
activités des individus et des groupes, jamais elle n’a été aussi
abondante et aussi aisément accessible. Et jamais l’information
n’a été à ce point facteur de transformation en profondeur de
nos mentalités et de nos pratiques ».
71
réformée, la santé préservée, l'industrie revigorée, l'instruction diffusée, les
charges publiques allégées, l'économie fortifiée » ). Mais cela devient la 45
72
adossée au marché de manière à favoriser la compétitivité des
entreprises et la croissance économique et ceux qui voient dans ce
processus un vecteur privilégié de la mondialisation libérale.
Ce qui est particulièrement en débat, ce sont la brevetabilité du
vivant, la question des logiciels libres ou la question des moyens
alloués à la recherche, et finalement le rapprochement de la science et
de l’industrie, avec un asservissement de la première à la seconde.
73
et qui protège ses connaissances par le secret ou le brevet et inscrit
leur exploitation dans une perspective marchande.
En fait il y a toujours eu de la marchandisation, même dans l’open
science, mais plutôt sur la diffusion et la mise en circulation des
inventions et non sur la production et l’exploitation.
La revue scientifique est composée d’un contenu et d’un support, renvoyant à un bien
culturel + un bien marchand. Elle n’échappe donc pas aux lois du marché, même si les
destinateurs et les destinataires y voient plutôt un bien scientifique et culturel.
Le lien du scientifique avec sa communauté repose sur le principe maussien du don- contre
don. Il échange son savoir (ses résultats) contre la reconnaissance et des récompenses
matérielles, et il y a réciprocité. La validation et la certification liées à une parution dans
une revue dépendent de pairs qui remplissent cette tâche de façon gracieuse. Le périodique
remplissait (et continue) une fonction sociale de légitimation.
Rappelons avec Pontille (2) les deux conceptions traditionnelles de l’échange académique:
l’une est fondée sur le don (reposant sur les principes de la reconnaissance interpersonnelle,
de la responsabilité morale, et de la rémunération monétaire jugée immorale) et l’autre
conçue comme un marché où règnent l’investissement de la crédibilité et l’accumulation du
capital. On va de plus en plus vers une obsession de la valorisation industrielle, vers un
besoin de passer de la découverte au produit. On hésite souvent à publier car cela rapporte
moins qu’un brevet, mais on le fait pour rester intéressant aux yeux des pairs et des futurs
clients. La signature scientifique est un régulateur social mais aussi un moteur de l’échange
et de l’accumulation des ressources (conversion des publications en prix, postes,
rémunérations, financements), voire un moyen pour restreindre l’accès au ressources (elle
établit la distinction entre le groupe des propriétaires et celui des travailleurs). Selon Pontille
les chercheurs sont des “ propriétaires privés en concurrence sur un marché académique régi
par une économie morale fondée sur le don ”.
74
Dans les relations entre laboratoires académiques et milieux industriels, il y a de plus en plus
hybridation et rapprochement ; La distinction entre bien commun et bien privé perd de sa
pertinence. Non seulement les activités se rapprochent, mais on utilise des infrastructures
communes et des technologies similaires. Les acteurs sont obligés de coopérer tout en étant
en situation de concurrence (exemple sur le génome).
Un vif débat se déroule entre les défenseurs d’une économie de la connaissance adossée au
marché de manière à favoriser la compétitivité des entreprises et la croissance économique
et ceux qui voient dans ce processus un vecteur privilégié de la mondialisation libérale.
Ce qui est particulièrement en débat, ce sont la brevetabilité du vivant, la question des
logiciels libres ou la question des moyens alloués à la recherche, et finalement le
rapprochement de la science et de l’industrie, avec un asservissement de la première à la
seconde.
L’union européenne s’est fixée comme objectif stratégique, lors du Conseil européen de
Lisbonne en mars 2000 de devenir “ l’économie de la connaissance la plus compétitive et la
plus dynamique du monde ” (3). Après les déboires de la “ nouvelle économie ”, ce terme
semble dessiner le nouvel horizon du capitalisme. On peut s’étonner: la connaissance, le
savoir, la recherche auraient-ils eu un rôle secondaire jusqu’alors? Seules les NTIC
permettraient la mobilisation de la connaissance?
Il est vrai que le développement de la connaissance depuis 2 siècles a permis des
transformations techniques et sociales majeures.
Mais ce qui change, c’est de soumettre entièrement la connaissance à la logique de l’ordre
capitaliste, d’inventer une « économie de la connaissance » qui est une soumission de la
connaissance à l’économie.
La création d’une économie de la connaissance suppose la transformation de celle ci en bien
marchand, mettant en place de nouveaux droits de la propriété intellectuelle
La connaissance peut être considérée comme une activité gratuite dans le sens d’une activité
non orientée a priori, désintéressée, sans programmation du résultat, échappant à l’ordre de
la science économique construite sur une rationalité instrumentale et sur des comportements
prévisibles. Elle relevait plutôt de la notion d’oeuvre au sens d’Hannah Arendt, ou de la
praxis (culture) qui se développe à l’insu de sa finalité, plutôt que de la fabrication de la
poiesis orientée vers une fin présente et plus proche de l’invention.
Elle n’est pas un bien libre naturel, comme l’air, car elle est constituée de découvertes qui
ont nécessité un travail, une activité de recherche et de pensée. Mais ce travail ne porte pas
sur la création de l’objet, mais sur sa compréhension. Le patrimoine génétique de l’humanité
préexiste gratuitement avant l’activité humaine qui cherche à le décoder.
La connaissance se distinguait de l’invention en ne pouvant pas être brevetée. Depuis Platon,
le savant se voulait dans un autre univers que le commerçant .Et la théorie économique néo-
classique défini les droits de propriété intellectuelle en accordant à l’inventeur un monopole
75
partiel et temporaire pour stimuler l’innovation et l’investissement en corrigeant donc cette
défaillance du marché.
Dans l’économie de la connaissance, le champ même de la connaissance, et non plus
l’activité de recherche doit être considéré comme produit par le travail et à ce titre
inappropriable (c’est un bien économique, produit par du travail humain, dont la rareté
justifie la valeur marchande)
La distinction entre connaissance et invention s’efface.
Créer de la rareté pour gagner plus suppose de mettre des droits d’entrée dans le champ
même de la connaissance, comme avant dans les inventions (brevets). Une régulation
s’impose. Une approche s’inspire des définitions de la Banque Mondiale qui place les
activités qui produisent des effets positifs transcendant les frontières et nécessitant une
concertation internationale dans cette notion de biens publics mondiaux. En partant de la
logique de l’intérêt, de la recherche de moyens incitatifs et des accords entre Etats, on
pousse les firmes à produire des biens publics mondiaux.
Pour cela, la connaissance doit passer d’un régime de possession (droits d’accès et d’usage)
à un régime de propriété qui permet d’aliéner un bien ou une ressource.
Aux USA, l’Arrêt Chakbarty de 1980 a sonné la fin de la distinction entre l’invention qui
relève du génie humain et la découverte qui est la connaissance d’un domaine qui existe
déjà.
Il a accordé une demande de brevet sur une bactérie déposée pour le compte de General
Electric. Cela a mis fin à distinction entre l’invention qui relève strictement du génie
humain et la découverte d’un domaine qui existe déjà.
La même année, le Bayh-Dole Act a permis aux inventions financées par des fonds de
recherche publics d’être transférées vers des applications industrielles et commerciales:
Universités et laboratoires publics peuvent désormais vendre sous forme de droits exclusifs
l’exploitation de brevets à des firmes privées. On ouvre les brevets à la recherche
fondamentale, ce qui donne un droit d’exploration plus qu’un droit d’exploitation. Le brevet
devient droit de propriété intellectuelle et octroi d’une part de marché.
Ce n’est plus un outil de développement du patrimoine scientifique mais un outil de
développement du patrimoine des investisseurs.
L’Union Européenne s’est convertie à ce régime des brevets en 1998: “ une matière
biologique...peut être l’objet d’une invention même lorsqu’elle préexistait à l’état naturel ”
76
« La société devient alors l’auxiliaire du marché .Travail, terre et monnaie sont des
marchandises. Mais des marchandises fictives, car on ne peut les traiter totalement ainsi sans
affecter l’être humain ». La connaissance est aussi une marchandise fictive dans mesure où
elle contribue à la construction de l’Humanité et qu’à ce titre elle sert de processus collectifs
d’apprentissage et de connaissance du patrimoine commun de l’Humanité.
Il faudrait protéger la connaissance. On pourrait poser des limites politiques à l’emprise du
marché. Mais on fait l’inverse.
77
rationalité aux institutions de la connaissance) des Universités Françaises et la récente
réforme L.M.D. une“ remise en cause du processus de transmission des connaissances au
profit de celui d’acquisition de compétences ”.
C’est un exemple de l’offensive du capital mondialisé qui tente d’introduire le principe de la
marchandisation de l’enseignement supérieur, avec le principe de concurrence entre
établissements ou la privatisation de tous les secteurs susceptibles de créer des profits.
L’évaluation scientométrique sera confiée à une Agence de la qualité de la recherche sous
l’auspice locale de personnalités de l’entreprise, qui répartira les crédits.
Les universités, lieux de production des connaissances, ne peuvent qu’être entraînées dans
l’économie de la connaissance.
A partir du moment où la connaissance est intégrée à l’économie comme une marchandise,
les universités, hauts lieux de création de connaissances, sont nécessairement prises dans ce
mouvement de marchandisation.
PARIS et GRANJON (1) critiquent le nouveau dogme évaluatif des Universités Françaises
et la récente réforme L.M.D.(Licence, Master, Doctorat) en y voyant une “ remise en cause
du processus de transmission des connaissances au profit de celui d’acquisition de
compétences ”.
C’est une déclinaison de l’offensive du capital mondialisé qui tente d’introduire le principe
de la marchandisation de l’enseignement supérieur (2), avec le principe de concurrence entre
établissements, la remise en cause du service public éducatif, la privatisation de tous les
secteurs susceptibles de créer des profits.
On avance que la commission européenne est influencée par l’Européen Round Table of
Industrialistes ( ERT, lobby patronal européen) qui lui fournit une large part de ses cadres
analytiques. Elle prévoit des directoires de gestionnaires nommés, et non élus, avec
beaucoup de patrons, une séparation chez les enseignants entre « un bas » de MCF et PAST
qui ne publient pas et qui aspirent à la survalorisation de leur tâches hors enseignement et
« un haut » de mandarins.
L’évaluation, scientométrique ou économétrique, sera confiée à une Agence de la qualité de
la recherche sous l’auspice locale de personnalités de l’entreprise, qui répartira les crédits.
Le dogme évaluatif apparaît comme un des principaux outils de normalisation dont se
servent abusivement les financeurs publics et privés de la recherche pour imposer une
nouvelle rationalité aux institutions de production, de diffusion et de transmission des
connaissances: on modélise alors les lieux de partage du savoir, on réalise des enquêtes
standardisées adressées à des échantillons au comportement soi-disant représentatif des pop
visées par les réformes, on met ce corpus de données sous traitement informatique, on
produit de indicateurs statistiques ...
On développe la croyance en l’objectivité de la quantification. On a recourt au
comparatisme international, à la pensée métrologique, au calcul économétrique et le
commanditaire utilise les résultats comme cadre normatif pour la définition des moyens, des
savoirs et des procédés à mettre en œuvre. Le mode d’évaluation pour décrire les Universités
peut donner lieu à des actes de domination:
78
- des grandes écoles sur les Universités
- de la vision économiste sur la vision humaniste ou civique de l’activité universitaire
- de la culture anglo-saxonne sur les autres cultures nationales
- de la dimension productive de l’universitaire sur sa dimension éducative et sociale
- des sciences dures sur les sciences humaines et sociales
Dans un autre domaine, l’universitaire doit devenir calculateur pour faire carrière : il choisit
ce qu’il dit et où il le dit pour faire ce qu’on attend de lui, pour se conformer aux desiderata
des “ tenants des positions hautes ” (Bourdieu).
« Il devient moins important d’être lu et compris que de voir son nom figurer dans un revue
de haut niveau... on publie beaucoup mais on lit peu »(3 )
La course à la réputation, la quête perpétuelle d’un surplus de publications est un mal qui ne
fait que croître
79
(4)Castel R. La gestion des risques. De l’anti-psychiatrie à l’après-psychanalyse Paris :
Minuit, 1981
80
scientifique « classique » s’articule généralement autour de trois
niveaux d’information interdépendants : la revue, les thèmes et les
articles, une « revue hypermédiatisée » propose un quatrième niveau
d’information qui s’intéresse aux concepts contenus dans les articles.
Notre attention, pour le présent article, se focalisera sur ce quatrième
niveau, appelé « nano-niveau », qui permet aux lecteurs d’avoir un
accès direct à l’univers conceptuel du domaine et ainsi d’augmenter
leurs compétences sémantiques. Comme le rapporte Umberto Eco
(1988) cette compétence sémantique peut être assimilée à une
connaissance encyclopédique laquelle rassemble les connaissances sur
le monde et les informations linguistiques. Ce niveau d’information
propose donc aux lecteurs une vision encyclopédique de la revue et du
domaine qu’elle recouvre.
De l’élément au grain
Ce nano-niveau se présente aux lecteurs sous la forme de « documents
recomposés » qui rassemblent les fragments d’information sur les
concepts issus de l’intelligence collective des auteurs de la revue. Ces
fragments correspondent à des unités de sens portant sur les concepts
et sont organisés selon leur nature et proposés selon cette mise en
scène au lecteur : définition, objectif, relation hiérarchique et
associative, citation, indices géographique et historique. Ces
documents recomposés fonctionnent selon le principe « d’extraction-
recomposition » et supposent une dé-composition du document
d’origine, une extraction des fragments d’information, en les
décontextualisant, pour donner l’occasion de les recomposer au sein
d’un nouveau document, en les recontextualisant.
La notion d’élémentation se retrouve dans les principes du balisage
sémantique par l’ASCC à travers la granularité de l’information, du
savoir à élémenter, à baliser. Il convient alors de s’interroger sur la
notion de brique d’informations, d’unité d’informations ou encore de
fragment d’information, soit en quelque sorte à la granularité des
fragments de textes à baliser. Le fragment balisé doit constituer une
unité de sens propre, qui n’a nul besoin de son contexte initial pour
être significatif. En d’autres termes, la granularité concerne le niveau
de détails d’un fragment d’information faisant sens pour un lecteur.
81
Le mythe est un récit (fictionnel) du passé, l’utopie un projet (idéaliste)
pour un futur, mais ils ont des liens étroits. « L’utopie possède un vaste
« arrière-pays » mythique que le lecteur tend à ignorer. Désireux de fonder
sur l’esprit utopique une stratégie de changement social, ce dernier en retient
ses aspects normatifs- le projet d’une société nouvelle- alors que l’écrivain
utopique lui-même s’appuie ouvertement sur le pouvoir du mythe »
(Reszler, 1980).
82
utopies visent au contraire à la bouleverser. Il y a un écart entre l’imaginaire
et le réel qui constitue une menace pour la stabilité et la permanence de ce
réel .Ce qui est irréalisable, c’est ce qui est jugé ainsi par le pouvoir en place
parce qu’il en à peur et le récuse .Du coup on peut s’interroger sur ce qu’on
nomme utopies actuellement : la plupart ne vont pas contre, elles prolongent,
renforcent, soutenues et poussées par le pouvoir en place et présentées
comme la suite logique et imminente de notre réel. Il en est ainsi de l’utopie
libérale, conçue au XVIIIe et transformée par les Etats Unis d’Amérique en
idéologie, , transformées en idéologie triomphante d’un libéralisme
économique (Fukuyama), et de l’ utopie techniciste devenue « le moteur de
toute croissance, une inéluctabilité que l’on peut appeler idéologie
technologique » dit Ellul qui y voit une simple « croyance en la Science
orientée vers la grandeur de la Nation par simple nécessité de continuer à
faire partie du peloton de tête » (Ellul). Finalement c’est la société de
l’information telle qu’elle est conçue par l’Unesco qui mérite encore le titre
d’utopie : en prônant le rôle des organismes internationaux, la diversité des
langues et des culture, la solidarité pour tous les rejetés, elle s’oppose à
l’idéologie techniciste de Google et à l’idéologie économique des Etas Unis.
- La réalisation (et donc la mort ?) des utopies grâce aux technologies
Depuis la création du web et de l’hypertexte, les pratiques info-
documentaires changent, innovent, mutent. Déjà le cyberespace, utopie
apparue dans la littérature de science-fiction de Gibson au début des années
80, est devenu conventionnel. Les métaphores spatiales sont remplacées par
les numéros de versions, comme pour les logiciels. Aujourd’hui, à l’heure où
l’on s’interroge pour savoir quand aura lieu la bascule entre l’espace du web
2.0 (celui des usages) et celui du web 3.0 (celui de la sémantique), nous
assistons en direct à la modification de la structure même du web
accompagnée de la multiplication de discours utopistes. De plus en plus
d’informations enrichissent ou polluent les documents : micro formats, tag
cloud, folksonomie, hashtags, annotations, commentaires... (Guillaud, 2008).
Mais le système ne fait, pour l’instant, que les visualiser. Tim Berners-Lee
nous fait rêver depuis quinze ans en annonçant que « le Web sémantique va
utiliser la structure pour donner du sens au contenu des pages Web, en créant
un environnement où les agents logiciels en parcourant les pages pourront
réaliser rapidement des tâches compliquées pour les utilisateurs » . On nous
47
83
- la bibliothèque universelle proposée par Google.
Au cœur des préoccupations des métiers du secteur de l’Information-
Documentation se trouvent l’information et son support, le document,
vecteurs principaux de la « société de l’information » évoluant vers la
« société de la connaissance ». Depuis la création du web et de l’hypertexte,
les pratiques info-documentaires changent, innovent, mutent. Déjà le
cyberespace, utopie apparue dans la littérature de science-fiction de Gibson
au début des années 80, est devenu conventionnel. Les métaphores spatiales
sont remplacées par les numéros de versions, comme pour les logiciels.
Aujourd’hui, à l’heure où l’on s’interroge pour savoir quand aura lieu la
bascule entre l’espace du web 2.0 (celui des usages) et celui du web 3.0
(celui de la sémantique), nous assistons en direct à la modification de la
structure même du web accompagnée de la multiplication de discours
utopistes. De plus en plus d’informations enrichissent ou polluent les
documents : micro formats, tag cloud, folksonomie, hashtags, annotations,
commentaires... (Guillaud, 2008). Mais le système ne fait, pour l’instant, que
les visualiser. Tim Berners-Lee nous fait rêver depuis quinze ans en
annonçant que « le Web sémantique va utiliser la structure pour donner du
sens au contenu des pages Web, en créant un environnement où les agents
logiciels en parcourant les pages pourront réaliser rapidement des tâches
compliquées pour les utilisateurs » . On nous parle d’utopies, mais
48
48 Berners-Lee Tim, Hendler James, Ora, Lassila, 2001, « The Semantic Web », [en ligne]
http://www.urfist.cict.fr/archive/lettres/lettre28/lettre28-22.html
84
post-historique, il n’y aura plus que l’entretien du musée de l’histoire de 49
49 Selon « Pierre Nora, l’historien français qui organisa les trois volumes intitulés Les
lieux de mémoire…nous nous exerçons à d’innombrables pratiques de conservation,
nous créons des collections, des musées, des bibliothèques, nous organisons des
enregistrements, des archives, des archives “mortes”; tout cela a le mérite sans doute
de donner des emplois à des historiens et des conservateurs, mais, en raison peut-
être de la profusion de ces documents, ne garantit aucunement une mémoire sociale
vive, permettant seulement (ce qui est certainement digne de mention) l’accès de
chercheurs actuels et futurs aux données d’un passé considéré comme mort »
Gagnebin,2008)
85
classique de récit. Ce mythe a paru pouvoir se réaliser dans le projet
Google exposé en 2001, les data centers de Google ou d’Amazon, ou
les projets Europeana et de la BNM de l’unesco ne sont pas sans
rappeler l’hyper livre unique et infini annoncé par Borges, contenant
l’ensemble des bibliothèques. Mais ce qui aurait dû nous plonger dans
l’euphorie (Mollier ,2003) a reçu alors un accueil très réservé
(Jeanneney, 2005) : les mythes ne sont sans doute pas faits pour être
« actualisés » selon le terme de Pierre Lévy.
86
bibliothèque 100% numérique américaine se trouve au Texas avec 50
des contenus sous forme de ebooks, des audio livres, des cours de
langue, des magazines, de formation en ligne…
Mais ce n’est pas une bibliosphère, c’est juste une évolution de
l’étagère (le livre) vers les espaces de lecture (bâtiment) et du contenu
(électronique et dispositifs de lecture). La « bibliosphère » , ce 3e âge
des bibliothèques selon Lorenzo Soccavo serait le prolongement de la
51
50 Voir http://bexarbibliotech.org/
51 Après la bibliothèque lieu+ livres et la bibliothèque hybride ( bibliothèque
traditionnelle+ offre numérique) (Soccavo ,2011)
52 Théorie envisagée par John von Neumann dans les années 1950 et
développée ensuite notamment par Ray Kurzweil (2005, p.10).
87
Le labo bnf a proposé par exemple en 2010 un dispositif alliant mur
tactile de sélection multimédias (qui permet de travailler à plusieurs,
de façon interactive, collaborative et intuitive. Des robots auxiliaires
apprenants ont été exposés au printemps 2013 à la BNF
(robot humanoïde Aria développé par la société Cybedroid en
partenariat avec le Labo bnf) pour évoluer et interagir avec des
humains et répondre à leurs questions sur des connaissances
spécifiques, propres à la bnf ), mur tactile qui permet de découvrir
autrement les collections de la Bibliothèque : accès à une sélection de
contenus (sites Internet, images, cartes, textes, vidéos, etc.), de les
afficher, de zoomer, de les déplacer, de les copier ou encore de les
annoter.
D’ici cinquante ans, on prétend réaliser la bibliothèque inside
53
88
2012) (Breslow, Pritchard , DeBoer , Stump , Ho et Seaton , 2013) ou
considère tous les étudiants comme identiques, toutes les conditions
comme identiques : l’éducation « calibre Harvard » sur un écran a-t-
elle encore quelque chose à voir avec l’éducation à Harvard ? Les
connaissances devenues numériques sont visiblement à compléter
par un humanisme numérique qui reste à construire.
Il s’agit d’un problème de fond : « Les utopies imaginent qu’il n’y a
aucun problème de motivation dans l’éducation ni de difficulté dans
les apprentissages .Or c’est justement la question de l’échec et de la
motivation qui taraude les enseignants du monde réel, et cette question
se trouve radicalement supprimée dans les utopies. C’est pourquoi les
utopies sont loin d’offrir des modèles à imiter, car si on voulait mettre
en application ce qui y est préconisé, on serait la plupart du temps plus
proche d’un lieu étouffant, uniformisé, sans imprévu… (ou même
parfois cruel) que d’un lieu désirable. » (Drouin Hans, 2011).
b) Le triomphe des idéologies
- une vraie utopie propose un futur en s’opposant au présent et non un
présent fermant le futur (la mort de l’Histoire de Fukuyama).
L’avènement de l’informatique ubiquitaire et symbiotique (De
Rosnay, 2009) de par ses aspects d’unification par la technologie
mondialisée, nous fait penser au célèbre (en son temps) article du
politologue américain Fukuyama « La Fin de l'histoire ? », dont le
propos (pourtant très contextualisé avec la chute du système
communiste) semble avoir gagné en actualité : « Il se peut bien que ce
à quoi nous assistons, ce ne soit pas seulement la fin de la guerre
froide mais la fin de l’histoire en tant que telle : le point final de
l’évolution idéologique de l’humanité et l’universalisation de la
démocratie libérale occidentale comme forme finale de
gouvernement humain […] il se produira des évènements, mais
c’est cet idéal qui gouvernera le monde réel à longue échéance. […]
La fin de l’histoire sera une période fort triste […] tout sera
remplacé par le calcul économique, la quête indéfinie des solutions
techniques, les préoccupations relatives à l’environnement et la
satisfaction de consommateurs sophistiqués. Dans l’ère post-
historique, il n’y aura plus que l’entretien du musée de l’histoire de 54
54 Selon « Pierre Nora, l’historien français qui organisa les trois volumes
intitulés Les lieux de mémoire…nous nous exerçons à d’innombrables
pratiques de conservation, nous créons des collections, des musées, des
bibliothèques, nous organisons des enregistrements, des archives, des
archives “mortes”; tout cela a le mérite sans doute de donner des emplois à
des historiens et des conservateurs, mais, en raison peut-être de la profusion
89
l’humanité » (Fukuyama, 1989). Cette idée de « fin » vient aussi de ce
que nous sommes dans ce règne du « trop », de la profusion, qui
concerne aussi le document, typique d’une société de la
consommation dont on peu craindre le suicide boulimique ( comme le
prédisait le film La Grande bouffe de Marco Ferreri). Et enfin, du fait
qu’il nous semble que de nombreuses utopies actuelles ne
correspondent plus aux « canons », aux définitions autrefois en
vigueur.
90
« rencontres et échanges généralisés entre cultures. (…)
L’interculturel est déjà un fait, qui ne fera que s’amplifier demain. ».
(Verbunt Gilles, 2001.) L’interculturalité est vue comme effort pour
créer un type de lien social susceptible de concilier la globalisation
avec le besoin de communautés à taille humaine. C’est une manière de
concilier l’universel et le particulier, le global et le local. Cette
conciliation pourrait être réalisé par une éducation qui pourrait entrer
dans la culture informationnelle (en apprenant à comprendre et à gérer
les différences, les contextes et les niveaux)
91
est à faire.
92