Analyse Linéaire Mes Forêts Sont Des Bêtes
Analyse Linéaire Mes Forêts Sont Des Bêtes
Analyse Linéaire Mes Forêts Sont Des Bêtes
Expression de l’intime avec le déterminant possessif « mes », voix de la poétesse qui s’exprime.
Métaphore : la nature est animale, presque monstrueuse, vivace et dans l’attente comme le suggère la
subordonnée relative « qui attendent la nuit ». Les forêts semblent sortir d’un trop long sommeil, elles
guettent, tressaillent, s’agitent. Paysage extérieur mais également intérieur : il est de temps guérir les
blessures, « lécher le sang » comme pour nettoyer une plaie. Opposition entre l’allitération en [L] « lécher
le sang de leurs rêves » et l’allitération en [R] « gratter la terre gratter l’écorce » qui fait osciller ces «
forêts » entre douceur et détermination / puissance. Notion de verticalité et de progression vers le haut
avec la mention « des rêves » qui renvoie à l’enfouissement, aux profondeurs de l’être, puis la « terre »
pour ensuite atteindre « l’écorce » : gradation ascendante qui s’achève sur un point culminant : « les
lucioles » qui incarnent l’aérien, la légèreté mais aussi l’espoir avec la luminosité qui s’oppose au nom «
nuit » du premier vers. Les forêts évoquées par la poétesse sont vivantes, elles sont animales, pourvues
de griffes pour « gratter » mais également d’une bouche pour guérir les blessures ou « boire l’offrande »
vers 4. Elles prennent vie comme l’ultime espoir d’un apaisement à venir, « un lit rempli de lucioles ». Être
attentif à l’éveil de la nature c’est comprendre qu’Elle nous dépasse, nous guide, nous conduit vers un
monde meilleur mais l’éveil de cette nature, c’est aussi notre nature intérieure qui réclame l’apaisement,
le retour au calme, le repos : « se glisser dans un lit ».
Deuxième mouvement : des forêts oubliées mais présentes
Les trois dernières strophes suivent une progression précise : de la mort à la vie, de l’étouffement au souffle, les
forêts reprennent vie, étendent leurs racines jusqu’à nous. Ainsi, elles sont d’abord désignées comme « un dessin
de nature morte » pour s’opposer à aux « écrans » qui nous noient sous un flux d’images incessant. Cette
désignation met finalement en avant le calme et l’apaisement que la nature propose en totale opposition avec la
vie virtuelle. Ironie de la situation, les écrans servent de supports pour voir ce que le monde nous offre déjà. Voir
à travers l’écran n’est pas voir la réalité comme l’indique l’adverbe « jamais » dans « sans jamais les voir ».
L’isolement du GN « mes forêts » à la fin du vers 13 met en lumière le fossé qui sépare les hommes de la nature, de
leur vraie nature. Pourtant, ainsi placé en fin de vers, le GN est également mis en avant comme un indice de ce qui
devrait être au cœur de nos priorités. De plus, cette position met un terme à la reprise anaphorique de « mes
forêts » aux vers 1,6 et 17. Un tournant s’opère, un changement qui approche. La métaphore « chemin de chair et
marée de l’esprit » conjugue la puissance de la nature et progression de cette dernière jusqu’à l’homme. Le lexique
de l’être « chair » « esprit » souligne le lien qui nous unit aux forêts, un lien qui se déroule comme une racine
puissante et insubmersible malgré les « marées ». La force s’oppose une nouvelle fois à la douceur avec l’adverbe «
lentement » comme souvent dans les poèmes de Hélène Dorion, la nature s’impose par sa force, sa majesté mais
toujours avec douceur en respectant le cycle des saisons, en harmonie avec le temps qui passe bien loin du
comportement des hommes qui désirent tout, tout de suite, dans une société qui va trop vite, préférant «
facebookinstagramtwitter » au lieu d’ouvrir les yeux sur le monde qui les entoure. La poétesse montre clairement
la voie à prendre, le chemin qu’elle a choisi : ses « forêts sont des rivages accordés à mes pas », elle vit en harmonie
avec cette nature qui l’accueille et donc sa nature intérieure également. L’espace mentionné par les « rivages »
offre une perspective d’infini, un monde ouvert, sans limite. La nature est placée au centre de tout : elle est un
souffle, l’essence vitale comme le monde la subordonnée relative « où respire ma vie ».