Denis Willame - Tendinopathies Du Poignet Et de La Main
Denis Willame - Tendinopathies Du Poignet Et de La Main
Denis Willame - Tendinopathies Du Poignet Et de La Main
Denis Willame
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INFORMATIONS CLEFS
−− Les tendinopathies du poignet et de la main sont des pathologies plus ou
moins fréquentes selon le(s) tendon(s) considéré(s). Les plus fréquentes
sont la ténosynovite des fléchisseurs des doigts et la ténosynovite du pre-
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mier compartiment des extenseurs de De Quervain.
−− Les causes peuvent être multiples. Hors pathologie inflammatoire, les
causes les plus fréquentes sont mécaniques.
−− Le traitement de première ligne est toujours médical, la chirurgie n’étant 2
réservée qu’aux échecs de celui-ci.
−− Le traitement de base comporte anti-inflammatoires, repos relatif et mo-
dification éventuelle de l’activité causale, orthèse et glace. L’intérêt de la 3
kinésithérapie n’est pas systématique.
−− Les infiltrations de corticoïdes, toujours possibles en cas d’échec du trai- 4
tement de première ligne, peuvent présenter certaines complications
(rupture tendineuse, atrophie cutanée et graisseuse, dépigmentation).
−− Le point commun au traitement chirurgical de toutes ces tendinopathies
est un geste de ténolyse.
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ORTHOPÉDIE ET TRAUMATOLOGIE PRATIQUES
collagène (1) (principalement de type 1, sauf à la jonction myotendineuse où l’on −− mécaniques (conflit répété/surcharge/surutilisation/traumatisme direct) ;
retrouve principalement du type 2), entourées de ténocytes et de protéoglycans −− pathologies inflammatoires (PR, rhumatismes microcristallins, etc.) ;
(decorine, aggrecan). Les faisceaux tendineux (2) sont engainés par l’endotenon
−− pathologies systémiques (diabète, dysthyroïdies, amyloïdoses, etc.) ;
(3), contenant vaisseaux, nerfs et lymphatiques. L’ensemble du tendon est entou-
−− toxiques (médicaments, etc.).
ré par le péritendon, constitué d’une couche profonde, l’épitendon (4) ou épité-
non, et d’une couche externe, le paratendon ou paraténon, parfois remplacé par
une membrane synoviale. L’eau représente 60 % de la masse du tendon. TÉNOSYNOVITE STÉNOSANTE AU NIVEAU DE
La vascularisation d’un muscle et celle de son tendon ont la même origine. Elle
LA POULIE A1 OU DOIGT À RESSAUT
est terminale entre ces deux structures. Des anastomoses existent entre le ré- Il s’agit de la pathologie tendineuse la plus fréquemment rencontrée. Elle touche
seau vasculaire de l’enthèse et le réseau périosté. préférentiellement les femmes. Sa prévalence est de 2 à 3 % dans la population
générale, mais est plus élevée chez les diabétiques ou en cas de polyarthrite rhu-
On trouve enfin des récepteurs sensitifs et proprioceptifs dans et à la surface du
matoïde. Signalons une concomitance (>60 %) fréquente démontrée avec la pré-
tendon, la concentration de ceux-ci étant maximale au voisinage de la jonction
sence d’un syndrome du canal carpien (clinique ou électromyographique).
myotendineuse.
D’un point de vue mécanique, le tendon est viscoélastique : plus l’étirement est
grand, moins il se déforme et plus grande est la restitution d’énergie.
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−− un flessum interphalangien proximal. décrites depuis plusieurs années sans, à ce jour, montrer de manière évidente
Un nodule douloureux, mobile en flexion-extension du rayon est souvent palpé une réelle supériorité.
en regard de A1.
Le diagnostic est quasi exclusivement clinique. En cas de doute ou afin de bilanter TÉNOSYNOVITE DE DE QUERVAIN
un éventuel kyste de la poulie A1, une échographie peut être réalisée.
La « ténovaginite sténosante du 1er compartiment des extenseurs » a initialement
Un traitement ad minima peut consister en une orthèse de repos (immobilisant été décrite par Tillaux (anatomiste et chirurgien parisien du 19e siècle) en 1882.
la MCP mais permettant la mobilisation IP) et des AINS. Les orthèses apporte- C’est toutefois Fritz De Quervain (chirurgien suisse à La-Chaux-de-Fonds puis suc-
raient une résolution des symptômes dans 40 à 87 % des cas. Ce traitement peut cesseur de Kocher à Berne), à la charnière des 19e et 20e siècles, qui rapporta
typiquement être appliqué, en première intention, dans les cas léger (pas de res- la première série clinique de cette pathologie et décrit le traitement chirurgical
saut ni blocage), d’apparition récente, où une activité causale inhabituelle peut consistant en l’ouverture de la gaine tendineuse.
être retrouvée et donc suspendue. Nous ne réservons personnellement aucune
place à la kinésithérapie dans le traitement de cette pathologie.
En cas d’échec du traitement médical, le traitement chirurgical est de mise. Il La ténosynovite de De Quervain est associée à la grossesse, la période post-par-
consiste en l’ouverture de la poulie A1. Le gold-standard reste la chirurgie ou- tum et l’allaitement, la prise d’inhibiteurs de l’aromatase (traitements adjuvants
verte. L’anesthésie locale est à préférer car elle permet une mobilisation active des cancers du sein hormonosensibles), aux activités nécessité des mouvements
per-opératoire en flexion-extension, pour confirmer la disparition du ressaut de déviation ulnaire répétée (travail avec marteau, tennis, port d’enfant, etc.).
après ouverture. L’incision peut être longitudinale ou suivre le pli palmaire distal.
Physiopathologiquement, c’est la friction entre les tendons (APL et EPB) et la
Le tissu cellulo-graisseux sous-cutané est écarté de manière à visualiser la poulie
gaine qui va induire des dommages de surface et donc engendrer une inflamma-
A1. En l’absence de dissection et d’identification claire des pédicules vasculo-ner-
tion, en particulier de la gaine qui présente alors un épaississement pouvant aller
veux digitaux, les gestes d’hémostase (coagulation) sont à éviter. Des techniques
jusqu’à 5 fois la normale. Ceci est favorisé par 2 variantes anatomiques fréquentes
percutanées de section à l’aiguille (avec ou sans contrôle échographique) sont
: la présence d’un septum divisant la première coulisse en 2 gaines distinctes pour
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ORTHOPÉDIE ET TRAUMATOLOGIE PRATIQUES
l’APL et l’EPB, présent chez environ 40 % de la population, et les multiples subdi- Les options thérapeutiques incluent les AINS (locaux et per os), les infiltrations,
visions du tendon de l’APL. les orthèses, la kinésithérapie et la chirurgie.
Les patients se plaignent typiquement de douleurs et d’une tuméfaction au ver- Différents types d’orthèse sont disponibles, le point commun étant une immobi-
sant dorso-radiale du poignet, exacerbées par la prise d’objet et la mobilisation lisation du poignet et de la base du pouce (IP libre).
du pouce. Cliniquement, on trouve une sensibilité à la palpation du trajet de la
Les infiltrations de corticoïdes ont un taux de succès rapporté de 60 à 100 %.
première coulisse des extenseurs, une douleur à la mobilisation de la colonne
Leur association à une orthèse et/ou de la kiné ne semble pas améliorer les ré-
du pouce, en particulier à l’abduction contre résistance et, éventuellement, une
sultats. Cependant, les complications locales (atrophie cutanée et sous-cutanée,
diminution de mobilité (en raison de la douleur).
dépigmentation de la peau) ne sont pas rares. De ce fait, notre utilisation de cette
Trois manœuvres de provocation de la douleur nous semblent utiles : modalité thérapeutique est exceptionnelle.
−− Manœuvre d’Eichhoff : très souvent confondue avec la suivante, elle consiste La chirurgie est à réservé uniquement aux cas d’échec du traitement médical. Elle
à fermer le poing sur le pouce fléchi dans la paume et réaliser passivement consiste en l’ouverture de la première coulisse par section du rétinaculum des
une déviation ulnaire du poignet. extenseurs (dorsalement pour minimiser le risque de subluxation secondaire des
−− Manœuvre de Finkelstein : le principe est identique mais c’est dans ce cas l’exami- tendons). L’incision peut être transverse (notre choix) ou longitudinale. Il est im-
nateur qui tient le pouce du patient dans sa main et réalise une déviation ulnaire. portant de repérer et dev protéger les branches terminales du nerf radial sensitif.
La présence d’un septum clivant en deux le compartiment doit impérativement
−− WHAT test : Wrist Hyperflexion an Abduction of the Thumb test, proposé par
être recherchée car une libération incomplète (typiquement de l’EPB) est source
Goubeau et al. (Bruges) en 2012. Il s’agit ici d’une testing actif. Le patient flé-
de persistance ou récidive de la pathologie.
chit son poignet et maintient le pouce en abduction et extension complète.
L’examinateur applique une pression croissante sur le pouce, à laquelle le pa- NB : un diagnostic différentiel possible est la styloïdite radiale, qui correspond
tient doit donc résister. La douleur à cette pression contre résistance positive à une enthésopathie du brachioradial. Dans ce cas, les manœuvres de testing
le test. Cette manœuvre, par son caractère dynamique, est également utile en de la première coulisse seront négatives. Radiologiquement, on peut retrouver
cas de persistance des symptômes après cure chirurgicale, selon les auteurs des signes d’enthésopathie au niveau de la styloïde radiale (calcification, arrache-
(qui présentent les résultats du test sur 100 patients atteints de ténosynovite ment osseux). Le traitement de choix est médical, symptomatique.
de De Quervain), car elle démasque une éventuelle instabilité dynamique des
tendons de la première coulisse.
Le diagnostic de la ténosynovite de De Quervain est avant tout clinique et aucun SYNDROME DU CROISEMENT OU DE L’INTERSECTION
examen paraclinique n’est indispensable au diagnostic. En cas de doute ou pour
Egalement appelé, de manière plus imagée, « aïe crépitant de Tillaux ».
exclure une autre pathologie, on peut envisager de réaliser :
Il s’agit d’une irritation par friction (péritendinite) des tendons du 2e comparti-
−− radiographie (recherche de pathologie osseuse/ostéoarticulaire comme rhi-
ment (ECRL et ECRB) au niveau de leur croisement avec les tendons du 1er com-
zarthrose) ;
partiment. La douleur se situe donc un peu en amont de la loge de De Quervain et
−− échographie ; est majorée par les mouvements de flexion-extension du poignet, en particulier
−− électromyographie (en cas de suspicion de syndrome de Wartemberg). en extension contre résistance. Un crepitus (ressemblant au bruit des pas dans
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Denis Willame Tendinopathies du poignet et de la main
la neige) audible ou palpable peut également survenir lors de ces mouvements. lum des extenseurs (appelée « tuck sign » par les Anglo-Saxons). On peut retrouver
de manière similaire une tuméfaction dorsale du poignet et de la main dans le syn-
Cette pathologie relativement rare est typiquement associée à la répétition de drome de Secretan, diagnostic différentiel rare mais à avoir à l’esprit. Il s’agit d’une
mouvements du poignet. Elle est ainsi typique des rameurs. automutilation par le patient dans le but d’obtenir un bénéfice direct (matériel,
Le traitement de base comporte AINS, repos relatif et attelle de repos. Les infil- invalidité, etc.). Dans ce cas, il existe toujours un contexte psychosocial particulier.
trations de corticoïdes peuvent être utiles en seconde ligne. Enfin, la chirurgie Le traitement initial de la ténosynovite du 4e compartiment est classique, incluant
est indiquée en cas d’échec (rare) des traitements médicaux et consiste en une
orthèse antalgique, glace et AINS. En cas d’échec, l’infiltration de corticoïdes peut
libération de la 2e coulisse avec ténolyse jusqu’au croisement.
s’envisager. En cas d’échec du traitement médical, le traitement chirurgical consis-
tera en une ténolyse et ténosynovectomie.
TÉNOSYNOVITE DE L’EXTENSOR POLLICIS LONGUS
Tant la tendinite que la tendinose au niveau du 3e compartiment des extenseurs TÉNOSYNOVITE DU 5E COMPARTIMENT
sont rares. Elle est plus fréquente chez les batteurs. Elle est aussi plus fréquente Elle intéresse l’extensor digiti minimi. Elle est rare de manière isolée mais pos-
en cas de polyarthrite rhumatoïde et secondairement à une fracture peu dépla- sible. La présentation clinique et le schéma thérapeutique est classique.
cée du radius distal. Dans ce dernier cas, l’œdème local peut augmenter la pres-
sion dans le compartiment, induisant des phénomènes ischémiques intratendi-
neux et menant à la rupture du tendon. TÉNOSYNOVITE DE L’EXTENSOR CARPI ULNARIS
Les symptômes sont une douleur et une tuméfaction au niveau de la région du Elle constitue une des causes fréquentes de douleurs au versant ulnaire du poi-
tubercule de Lister, exacerbées par la mobilisation du pouce. Un crepitus est par- gnet. Le diagnostic différentiel doit être posé avec une lésion du complexe fibro-
fois palpable. cartilagineux triangulaire (TFCC).
Dû au haut risque de rupture tendineuse, le traitement est préférentiellement L’ECU est un déviteur ulnaire du poignet en pronation et un extenseur du poignet
chirurgical. Il consiste à une libération du 3e compartiment par ouverture du réti- en supination. Il joue également un rôle de stabilisateur de la radio-ulnaire dis-
naculum et transfert du tendon en sous-cutané. tale.
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ORTHOPÉDIE ET TRAUMATOLOGIE PRATIQUES
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Denis Willame Tendinopathies du poignet et de la main
RÉFÉRENCES
1. J. E. Adams & R. H. Habbu : « Tendinopathies of the hand and wrist » J Am
Acad Orthop Surg 2015;23 :741-750.
2. Yang et al. : « Tendon and ligament regeneration and repair : clinical rele-
vance and developmental paradigm » Birth Defects Res C Embryo Today
2013;99(3):203-222.
Figure 5 - Représentation schématique du trajet FCR et coupe transverse passant
par le trapèze
3. C. Fontiane, D. Le Nen, P. Liverneaux, E. Masmejean (sous dir.) « Cours euro-
Dans les PR, on peut retrouver à l’imagerie (RMN) une ténosynovite inflamma- péen de pathologie chirurgicale du membre supérieur et de la main – 2014 »
toire mais elle n’a habituellement pas de traduction clinique. Sauramps médical, 2014.
Les patients décrivent une douleur au versant radial de la face palmaire du poi- 4. J. F. Goubeau et al : « The wrist hyperflexion and abduction of the thumb
gnet, augmentée à la palpation et en flexion contrariée. Une tuméfaction peut (WHAT) test : a more specific and sensitive test to diagnose de Quervain teno-
aussi être présente. Une irritation de voisinage du rameau palmaire du nerf synovitis than the Eichhoff’s Test » J Hand Surg (Eur) 2014, Vol. 39E(3):286-292.
médian, qui se trouve au bord ulnaire du tendon, peut se manifester par des
dysesthésies au niveau de l’éminence thénar. Enfin, en cas de rupture fraîche, les 5. Maffulli, Renström & leadbetter (Ed.) : « Tendon injuries. Basic science and
symptômes sont une perte de force de flexion du poignet et, éventuellement, une clinical médicine » Springer 2005.
douleur au niveau du moignon tendineux proximal rétracté. Cette symptomatolo-
gie s’efface progressivement avec le temps.
Le traitement médical est symptomatique : atelle de repos, glace, AINS et, éven-
tuellement, physiothérapie. L’infiltration de corticoïde peut être discutée en 2e
ligne. Enfin, en cas d’échec, le traitement chirurgical est de mise, consistant en
une ténolyse avec résection de toute source de conflit (ostoéphytes) par abord
palmaire de type Henry. En cas de rupture tendineuse, le traitement chirurgical
est rarement indiqué. Certains recommandent une simple excision de la rupture
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