CMR 40876
CMR 40876
CMR 40876
LE PREMIER MINISTRE,
CHEF DU GOUVERNEMENT,
VU la Constitution;
VU la loi n° 92/007 du 14 août 1992 portant Code du Travail, notamment en son article 60 ;
VU le décret n° 92/245 du 26 novembre 1992 portant organisation du Gouvernement, ensemble ses
modificatifs subséquents ;
VU le décret n° 92/089 du 4 mai 1992 précisant les attributions du Premier Ministre;
VU le décret n° 92/244 du 25 novembre 1992 portant nomination du Premier Ministre, Chef du
Gouvernement;
Sur avis de la Commission Nationale Consultative du Travail en sa séance du 31 mars 1993 ;
DÉCRETE:
Art. 1er.- Le présent décret fixe les conditions de fond et de forme applicables aux conventions
collectives de travail.
CHAPITRE 1
De l'objet et du champ d'application professionnel et territorial d’une convention collective
Art. 2.- (1) Conformément à l'article 52, alinéa (1) du Code du Travail ci-après désigné "le Code",
une convention collective a pour objet de régler les rapports professionnels entre les employeurs et
les travailleurs, soit d'une entreprise ou d'un groupe d'entreprises, soit d'une branche d’activités ou de
plusieurs branches d’activités réputés connexes entre elles.
(2) Pour la détermination des branches d’activités et des activités réputées connexes, le présent
décret se réfère à la législation et la réglementation en vigueur fixant la forme des syndicats
professionnels admis à la procédure d’enregistrement.
Art. 3.- (1) Lorsqu’une convention collective est conclue dans le cadre d’une entreprise ou d’un
groupe d’entreprises, son champ d’application territorial peut être national, interdépartemental ou
local. Elle est dite convention collective d’entreprise et ne peut, en aucun cas, faire l’objet d’une
extension à une entreprise non signataire.
(2) Lorsqu’une convention collective est conclue dans le cadre d’une ou de plusieurs branches
d’activités, son champ d’application doit obligatoirement couvrir l’ensemble du territoire. Elle est
alors dite convention collective nationale et peut faire l’objet de l’extension prévue au chapitre IX
avec les effets et sanctions définies à l’article 22.
(3) Lorsqu’une convention collective nationale a été conclue, il ne peut plus être négocié de
convention collective d’entreprise dans la même branche d’activité. Dans ce cas, seuls sont admis les
accords d’établissement aux conditions fixées par l’article 57 du Code.
CHAPITRE II
De la conclusion des conventions collectives
SECTION 1
Des dispositions communes à toutes les conventions collectives
Art. 4.- (1) Les représentants des organisations syndicales visées à l’article 52 du Code peuvent
contracter au nom de l’organisation qu’ils représentent en vertu:
a) soit des stipulations particulières ou statutaires de cette organisation;
b) soit d’une délibération spéciale de cette organisation;
c) ou de mandats écrits qui leur sont remis, individuellement, par la majorité des membres de cette
organisation.
(2) Les pouvoirs des représentants des organisations syndicales et les pouvoirs des employeurs pris
individuellement doivent être vérifiés avant l’ouverture des négociations.
Art. 5.- (1) Toute convention collective est conclue pour une durée indéterminée.
(2) Elle doit prévoir dans quelles formes et à quelle époque de son exécution elle pourra être
dénoncée au révisée.
(3) Elle doit préciser notamment la durée du préavis de dénonciation; faute d’une telle stipulation,
la durée de ce préavis est fixée à trois (3) mois.
Art. 6.- La convention collective est établie sur papier libre et doit être signée par chacun des
négociateurs.
Art. 7.- (1) Outre les indications relatives à son champ d’application professionnel et territorial,
au lieu et à la date de sa conclusion, à la désignation des parties contractantes, aux noms et qualité
des signataires, la convention collective doit obligatoirement compter des dispositions
concernant:
a) le libre exercice du droit syndical et la liberté d’opinion des travailleurs;
b) les conditions d’embauche et le licenciement des travailleurs, sans que les dispositions prévues
puissent porter atteinte au libre choix du syndicat par le travailleur;
c) la durée de la période d’essai, les conditions et la durée du préavis;
d) l’indemnité de licenciement;
e) la classification professionnelle et la grille de salaires y afférentes;
f) l’institution d’une commission paritaire de classement à laquelle sont soumises les contestations
individuelles sur la classification professionnelle des travailleurs qui n’auraient pu être réglées dans
le cadre de l’entreprise;
g) les modalités particulières concernant l’attribution du logement;
h) l’indemnité de déplacement;
i) les conditions particulières du travail: heures supplémentaires, travail de nuit, du dimanche et des
jours fériés, travail par roulement;
j) les majorations de congé pour l’ancienneté;
k) les voyages et les transports quand ceux-ci sont à la charge de l’employeur;
l) l’organisation et le fonctionnement de l’apprentissage et de la formation professionnelle dans le
cadre de la branche d’activité considérée;
m) la procédure de révision, de modification et de dénonciation de tout ou partie de la convention
collective.
(2) Elle peut également contenir, sans que cette énumération soit limitative, des dispositions
concernant:
a) la prime d’assiduité;
b) l’indemnité pour frais professionnels et assimilés;
c) la prime de panier pour les travailleurs devant prendre leur repas sur lieu du travail;
d) les majorations pour travaux pénibles, dangereux, insalubres, et en général, toutes dispositions
ayant pour but de régler ou d’améliorer les rapports professionnels entre les employeurs et les
travailleurs et non prévues par les lois et règlements en vigueur.
SECTION II
Des dispositions particulières aux conventions collectives nationales
Art. 8.- (1) La convention collective nationale est élaborée par une commission mixte composée,
en nombre égal, de représentants des employeurs et des travailleurs, nommés par arrêté du
Ministre chargé du travail, sur proposition des organisations syndicales les plus représentatives.
(2) Cette commission est constituée soit à la demande de l’une des organisations syndicales
d’employeurs ou de travailleurs intéressées, soit à l’initiative du Ministre chargé du travail.
(3) Lorsque dans la branche d’activité concernée par la convention collective, il n’existe pas
d’organisation syndicale d’employeurs ou qu’il n’existe qu’une ou plusieurs organisation(s)
syndicale(s) insuffisamment représentatives(s), la délégation patronale de la commission mixte
peut être constituée de représentants d’un groupement d’employeurs à condition que ceux-ci
utilisent ensemble au moins soixante pour cent (60%) de l’effectif des travailleurs employés dans
la branche. Aux fins de la conclusion et de l’exécution de la convention et les modifications
ultérieures, le groupement est alors investi des mêmes obligations, droits et prérogatives qu’une
organisation syndicale.
Art. 9.- Pour l’application des dispositions de l’article 8, le caractère représentatif d’une
organisation syndicale s’apprécie dans la branche d’activité concernée par la convention
collective, en fonction des critères définis à l’article 20 du Code.
Art. 10.- (1) La commission mixte est présidée par un représentant de l’Administration chargée du
Travail, désigné dans l’arrêté prévu à l’article 8.
(2) Le Président convoque la commission mixte et en conduit les travaux.
(3) Il assure, pour chaque séance, l’établissement d’un procès-verbal qu’il soumet à l’approbation des
membres de la commission à l’ouverture de la séance suivante.
CHAPITRE III
Des règles applicables au dépôt, à la publicité et aux conditions d’adhésion à une convention collective
SECTION 1
Du dépôt
Art. 11.- (1) La convention collective est déposée au greffe du tribunal de première instance du lieu
où elle a été conclue.
(2) Le dépôt est fait en quatre (4) exemplaires originaux, daté et signés, aux soins de la partie la plus
diligente et sans frais. Le greffier en chef du Tribunal délivre immédiatement récépissé du dépôt et
remet à la partie déposante un exemplaire original de la convention collective, revêtu de la mention
et de la date du dépôt.
(3) Dans les trois (3) jours suivant le dépôt, le greffier en chef donne notification au Ministre chargé
du travail, en joignant à cette notification un exemplaire original de la convention portant mention
de la date et de la qualité de la partie déposante.
Art. 12.- (1) La date du dépôt sert de point de départ du délai d’application de la convention, de la
modification ou révision, de la dénonciation de l’adhésion et du retrait de celle-ci.
(2) Sauf stipulation contraire des parties, une convention collective est applicable à compter du jour
qui suit son dépôt.
Art. 13.- Les modifications apportées à une convention collective doivent être déposées, notifiées et
publiées dans les mêmes conditions que la conclusion.
SECTION II
De la publicité de la convention collective
Art. 14.- La communication de la convention collective est donnée gratuitement aux personnes
intéressées dans les locaux du greffe du tribunal où cet instrument a été déposé. Des copies
certifiées conformes, sur papier libre, leur sont délivrées sur leur demande et à leurs frais.
Art. 15.- (1) Dans les établissements entrant dans le champ d’application d’une convention collective,
l’existence de celle-ci doit être portée à la connaissance des travailleurs lors de leur embauche.
(2) Un exemplaire du texte doit être remis aux délégués du personnel s’il en existe, ou dans le cas
contraire tenu à la disposition des travailleurs dans le local où s’effectue la paie.
SECTION III
Des conditions d’adhésion à une convention collective
Art. 16.- (1) Toute organisation syndicale de travailleurs ou d’employeurs ou tout employeur pris
individuellement, qui n’est pas partie à une convention collective, peut y adhérer ultérieurement à la
double condition suivante:
a) l’adhésion ne peut concerner qu’une convention dont le champ l’application professionnel est
inclus dans le secteur économique dont relève l’organisation syndicale ou l’employeur qui se propose
d’y adhérer;
b) la possibilité d’adhésion doit avoir été expressément stipulée à la convention collective concernée.
(2) Lorsqu’une convention collective prévoit une telle possibilité d’adhésion, elle doit préciser les
droits des parties adhérentes en matière de modification, de révision et de dénonciation ainsi que la
place qui leur est réservée dans les commissions ou organismes paritaires résultant de la convention.
(3) L’adhésion fait l’objet d’un acte écrit comportant la désignation de la ou des partie(s) adhérente(s),
les noms et qualités des signataires, l’indication du champ d’application professionnel et territorial
concerné par l’adhésion.
Cet acte est soumis au préalable à l’agrément du Ministre chargé du travail et, une fois cet agrément
dûment obtenu, aux formalités de dépôt et de notification prévues à l’article 11.
Art. 17.- La dénonciation d’une convention collective fait l’objet d’un acte signé par la ou les partie(s)
contractante(s) qui en prend ou en prennent l’initiative. Cet acte est soumis, tant en ce qui concerne
le dépôt que la notification, au Ministre chargé du travail, aux formalités prévues à l’article 11.
CHAPITRE IV
De l’extension d’une convention collective nationale
Art. 18.- (1) Les dispositions d’une convention collective nationale peuvent être rendues
obligatoires pour tous les employeurs et travailleurs compris dans son champ d’application
professionnel.
(2) Cet extension s’effectue conformément aux dispositions de l’article 53 du Code et après
accomplissement de la procédure de consultation prévue par le présent décret.
Art. 19.- (1) Lorsque l’extension d’une convention collective nationale est envisagée, le Ministre
chargé du travail fait publier dans le Journal Officiel et suivant la procédure d’urgence, un avis de
projet d’extension, auquel est joint le texte in extenso de la convention, si celle-ci n’a pas déjà fait
l’objet d’une publication conformément aux dispositions de l’article 52, alinéa (4) du Code.
(2) Cet avis est, d’autre part, affiché dans les bureaux des inspections du travail et de la prévoyance
sociale.
Art. 20.- Dans le délai de trente (30) jours qui suit la date de publication de l’avis au Journal Officiel,
les organisations professionnelles et toutes personnes intéressées peuvent adresser au Ministre chargé
du travail leurs observations sur les dispositions de la convention dont l’extension est envisagée, et
leur avis sur l’opportunité de l’extension de tout ou partie des dispositions, en considération de la
situation de la branche d’activité concernée.
Art. 21.- Le projet de décret portant extension est soumis à l’avis de la Commission Nationale
Consultative du Travail accompagné de tous documents pertinents et, notamment, de la copie de
l’avis d’extension, ainsi que des observations qui auraient été formulées dans le délai prévu à l’article
20.
Art. 22.- Le retrait d’extension est soumis aux formalités de consultation prévues aux articles 19 et
20.
CHAPITRE V
Des effets et de l’exécution d’une convention collective
SECTION 1
Des effets
Art. 23.- (1) Sont soumis aux obligations d’une convention collective tous ceux qui l’ont signée à titre
personnel, ainsi que ceux qui sont ou deviennent membres des organisations signataires.
(2) Sont également soumis aux obligations d’une convention collective nationale, une fois qu’elle a
fait l’objet d’un décret d’extension, tous les employeurs et les travailleurs relevant de la ou des
branche(s) d’activité concernée(s) par l’extension.
(3) Lorsqu’un employeur est lié par les clauses d’une convention collective, ces clauses s’appliquent
aux contrats conclus avec lui.
(4) Dans tous les établissements, compris dans les champs d’application d’une convention collective,
les dispositions de cette convention s’imposent, sauf dispositions plus favorables, aux rapports nés
des contrats individuels de travail.
SECTION II
De l’exécution
Art. 24.- Les organisations syndicales de travailleurs et d’employeurs liées par une convention
collective sont tenues de s’abstenir de toute décision, action, attitude ou de tout comportement qui
soit de nature à en compromettre la loyale extension. Elles ne sont garantes de cette exécution que
dans la limite fixée par la convention.
Art. 25.- (1) Une organisation syndicale liée par une convention peut, en son nom propre, intenter
une action en dommages et intérêts contre tout autre syndicat ou groupement, ainsi que contre ses
propres membres ou toute autre personne, liés par la convention, qui en violeraient les dispositions
ou en entraveraient l’exécution.
(2) Une personne liée par une convention peut intenter une action en dommages et intérêts contre
toute personne physique ou morale, liée par la même convention, qui, à son égard, en violerait des
dispositions ou en entraverait l’exécution.
CHAPITRE VI
Des dispositions diverses et finales
Art. 26.- Lorsqu’une action née d’une convention collective est intentée par une personne physique
ou morale, toute organisation syndicale dont les membres sont liés par ladite convention peut, sauf
opposition de la personne physique ou morale qui intente cette action, intervenir à l’instance, à raison
de l’intérêt collectif que la solution du litige peut présenter pour ses membres.
Art. 27.- Les dispositions des articles 4, 5, 6, Il, 12, 13, 14, 15, 17, 23, alinéas (3) et (4), 24, 25 et 26
s’appliquent aux accords d’établissement prévu à l’article 57 du Code.
Art. 28.- Sont punis des amendes prévues à l’article 167 du Code, les auteurs d’infractions aux
dispositions des conventions collectives ayant fait l’objet d’un décret d’extension, matière de salaires,
primes, indemnités et de tous avantages évaluables en espèces, sans préjudice des redressements qui
doivent être intégralement effectués sur mise en demeure et dans les délais indiqués par l’inspecteur
du travail et de la prévoyance sociale du ressort.
Art. 29.- Sont abrogées toutes dispositions antérieures contraires au présent décret, notamment celle
du décret n075/50 du 22 janvier 1975.
Art. 30.- Le Ministre du Travail et de la Prévoyance Sociale est chargé de l’application du présent
décret qui sera enregistré, publié suivant la procédure d’urgence, puis inséré au Journal Officiel en
anglais et en français.
Yaoundé, le 15 juillet 1993
Le Premier Ministre,
Simon ACHIDI ACHU