Proces: La Repression Colonialiste en Anqola
Proces: La Repression Colonialiste en Anqola
Proces: La Repression Colonialiste en Anqola
LE
PROCES
DES·
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CINQUANTE
, A luanda clnouante
patriotes anqolals devant .
es [uqes portugais pour
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Le cr: -ie .de llberte.
EDITE A L'OCCASION DU- 3 AOUT 1960
JOURNEE DE SOLI DARITE
AVEC LES PEUPLES rr LES PATRIOTES
DES COLONIES PORTUGAISES
.EDITEURS RESPONSABLES :
1.IARCEL LEVAlJX, 89, rue de Hoigriee, Cheratte
JEAN GODIN, 104, rue du Centenaire, Chenee
JACQUES YERNA, 26, rue Simon Radoux, Liege
DAISY LENAERTS, 92, Avenue des Martyrs, F'Ier-on
2em• EDITION
Au Portugal, beaucoup de gens, surtout dans les milieux dirt-
geants, vantent les arguties des Uigistes portugais, comme si cela oon-
stituait un titre de gloire.
Au moment culminant de la crise de Goa, les colonialietes portuoon»
dont l'IngenieuT Cunha Leal, par exem.ple,ont propose de n3soudrecelle-
d d l'aide d'une legislation elaboreepar des experts en chicane juridique.
En ce qui. conceTnela question coloniate, l'esprit de chicane por-
tugais a consist6 Ii declarer, dans les lois de faQade telles que la Con-
stitution politique, que les Africains et Asiatiques des colonies portu-
gaises etaient: Portugais au meme titre que les indigenes du Portugal,
suggerant ainsi que les peuples coloniaux jouissaient des droits et Ziber-
tes constitutionnels comme le peuple portugais, sans aucune discrimi-
nation. Mais cet esprit de chicane est aIle plus loin: on a etabli toute
une serie de discriminations politiques, economiques,raciales, etc. au
moyen de Lois secondaiTes.Par l'action administTative quotidienne, on
a ouvert le champ illim,it6 des privileges aux entreprises portuqaises et
non-portugaises et Ii une m,inorit6 de colons, tandis qu'on retusost tota-
lement aux peuples coloniaux les libert6s fondamentales en les plon-
geant dans Penfer du travail force et dans Z'obscurantismemoyenageux.
La montee des nationaZismes afro-asiatiques et la pression de
l'opinion internationale ont force les legtstes portugais d camoufter Za
realit6 coloniale en tranjormant les colonies en «provinces ».
En exhibant pUbliquement les Zois fondamentales et les «provin-
ces» artificielles, les coZonialistes portugais nient cyniquement l'exis-
tence d'une politique coloniaZeportugaise en Afrique et en Asie: «Lie
PortuiJal ne possedeaucune colonie» - repetent-its partout.
Pour prevenir la rebellion popuZaire centre l'oppression et
l'exploitation, il y a « l'ordre fasciste» .vieux de trente ans : la dictature
sinistre d'une poignee d'exploiteuTs, la police secrete et ommipresente
dont les etfectsfs, reorutes d Za faveur de Zamisere imposee au peuple
portugais, sont des dizaines de jois supe1'ieursd ceu» des professeurs,
medecins et infirmieTs de tous les territoires sous domination portu-
gaise.
Les colonialistes portugais ont donne le nom de «paix Zusitanien-
ne» au silence trompeur de la Zutte popuZaire clandestine, d la pru-
dence detenninee par une police feroce et par la terreur permanente.
Ainsi est ne le mythe, asiquel seule les colonialistes portugais
feignent de croire, selon.Iequet «tout irait pOUTle mieux dans le meiZ-
leur des mondes portugais ».
Cependant, matqr« Ies conditions imposees dans nos pays, nos
peuples ont depuis toujours Zutte contre Z'oppression et Z'exploitation.
D' ume part, les intimes minorites d'Africains qui jouissent theorique-
ment des droits et libertes constitutionnels ont mene pendant des
dizaines d'annees une lutte reformiste dans des' associations reg10na-
les contraZeespar l'administration coloniale. D'autre pa1 t, lies grandes
o
LUCID LARA
[requentes revoltes, aussit6t etouffees par des massacres et par le mur
de silence dont le Portugal avait entoure ses coZonies. -
L'aggravation de l'oppression coloniale est venue dissiper defi-
nitivement les espoirs de succes de la lutte rejormiete d l'intel'ieur du-
cadre colonial et sans fondement dans les masses populaires. A cette
tatte, ayant un oaractere opportunsste, succeda irrevocablement la tat-
te revolutionnai1'e, visant directement d la liquidation complete du co-
lonialisme portugais, la substitution immediate et, inconditionnelle
dans nos pays de Ia souverainete de nos peuples a la souveratriete
portugaise.
O'eet avec cet objectif qu'ont ete crees le P ARTI AFRICAIN
DE L'INDEPENDANCE (PAl) de la Guinee dite portugaise, le MOU-
VEMENT POPULAIRE DE LIBERATION DE L'ANGOLA (MPLA),
et aussi L'UNION DES POPULATIONS DE L'ANGOLA .(UPA).
Depuis des annees, le MPLA et le PAl s'engagent dans uneo
tutte ayant un caractere national populaire, d laquelle des millierS"
d'Africains participent sans distinction de statut politique et civil, d'ori-
gines ethmiquee, tribales ou religieuses. Les revendications des gran-
des massespaysannes et travailleuses (presque Za totaute de la popu-
lation de nos pays) ont ete et continueront d'etre le but essentiel duo
PAl et du MPLA.
Les conditions tres dures imposees par le coloniaU,smefasciste
portugais ont vite montre qu'il fallait renforcer l'action d l'inUrieur
de nos pays en s'appuyant sur l'action d l'ext6rieur. n Mait urgent de
denoncer le colonialisme portugais, de faire en sorte que sur chacun
de ses crimes tomblit au moins la sanction de l'opinion publique mon-
diale. O'est ainsi que, sous l'impulsion du PAl et du MPLA, une par-
tie importante des Africains residant d l'etranger constituerent le
MOUVEMENT ANTICOLONIALISTE (MAC) dont les objectifs prin-
cipaux etaient: les suivants : etudier les problemes souleves par la Isit-
te menee par les organisations patriotiques de nos pays; contribuer
dune orientation plus lucide de cette lutte, en tenant compte de
Z'evolution concrete de la politique internationale; traoailler pour l'uni-
te d'action des mouvements de liberation des colonies portugaises;
constituer POU1', les forces agissant d l'interieuT de nos pays des reser-
ves revow.tionnaires inepuisables afvn. d/ oter au colonialisme portugais
toute possibilite de mater la lutte liberatrice de nos peu.ples,
Pendant les- deux annees de son existence, le MAC f.it entendre
la voix de nos peuples lors de ditterentes rencontres africavnes et afro-
asiatiques et contribua d detruire les mensongesentretenus par la co-
lonialisme portugais.
Le MAC participa a la 2me Conferencedes PewplesAfricains, en.
tant que representant de ses rnemb1'esactifs , du PAl et du MPLA. Oet-
te participaiton fut un succes pour la lutte des peuples africain» sous
dornination portugaise.. Les forces revolutionnaires de toute I'Atrique
et une grande partie de l'opinion internationale furent suttisamment
vnformees des crimes du colonialisme portugais et de la lutte qui se de-
roule derriere Ie rideau de silence. L'isolement auqueZle Portugal avait
condamne pour longtemps nos peuples fut definitivement rompu. En.
presence des interesses, la Conference de/init la solidarite a/1-icaine Ii
l'egard de notre -lutte liberatrice. Elle adopta pour la premiere fois une
resolution .specialeet claire sur les colonies portugaises.
Un autre evenement important, succesdu MAC, a Me la constitu-
tion du, FRONT REVOLUTIONNAIRE AFRICAIN POUR L'INDE-
! '.
"
PENDANCE NATIONALE DES COLONIES PORTUGAISES (FRAIN)
forme par le PAl et le MPLA au sein duquel le MAC e'est dissous. Le
FRAIN est ouvert Ii toutes les organisations des colonies portugaises
qui lurtewt activement pour la liquidation du colonialisme.
Pour le bien de nos pewples , ta cause de la pa·ix mondiale et du
peuple portugais lui-meme, nos organisations accoraent une granae
importance Ii la. liquidation pacifique du colonialisme portugais.
Il est: certain que les colonialistes portugais s'entetent Ii mar-
cher contre le sens de l'histoire et se preparent Ii declench.er des
guerres ooloniales, Mais il est encore plus certain que nos peupZes
obtiendront une victoire totale sur le colonialisme portugais.
Nos peuples et leurs organisations politiques ne se dressent pas
centre te peuple portugais. Ils se dressent contre la domination colo-
niale portugaise.
Nos peuples et leurs organisations patriotiques luttent pour la
conquete du droit Ii l'autodetermination et -pour l'exercice eftectt] et
'Urgentde ce droit. Oe sont les peuples de I' Angola, du Cap Vert, de la
Guinee dite portugais8, du Mozambique et de B. Tome et Prince qui
doivent eux-memesdecider de leur sort et choisir la direction de leur
developpement en complete liberte et sans ingerence du Portugal ou
de tout autre pays.
Il est exact que nous avons aussi attire l'attention de Z'opinion
publique sur le sous-developpementdu Portugal qui amene ce pays It
prostituer ses colonies au profit des interets qui l'aident Ii maintenir
son empiTe. Oeci souligne le caractere immoral de la domination du
Portugal sur des territoires riches et aussi etendncsque la moitM de
l'Europe jusqu'aux frowtieres orientales de la Pologne. Mais en men-
tionnant le soue-deuelop-pement: flagrant de ce. pays qui ose justifier
la possess·iond'un Empire par une pretendue «mission civilisatrice»
nous n'entendons pas faire supposer que nos peuples accepteraient le
rem-placement du colonialisme portugais par celui d'un autre pay~, soit
qu'il intervienne directement, soit qu'i1 agisse par intermediaire d'Afri-
cains ou d'organisations africaimes,
Nous proclamons une fois de plus et categoriquement que nous
luttons pour la souverainete inalienable de nos peuples sur leurs pro-
pres pays et pour leur controte total sur leurs rich esses,dans le cadre
du processus general et democratique vers l'unite ajricaine.
Nos peuples luttent pour une independancereelle.
Euieles Ii Z'esprit de la charte de l'ONU et des resolutions dell
conferencesde Bandoung, du Caire, d'Accra et de Tunis, nos peuples
et leurs organisations patriotiques poursuivront et intensifieront leur
lutte pour la disparition complete du colonialisme portugais, pour
l'exercice ettectit et urgent du droit Ii l'autodetermination, pour l'in-
dependanceimmediate et inconditionnelle.
Mario de Andrade
"
Liste des inculpes
dans. les trois proci!s
I
II
III
RESOLUTION
SUR LES COLONIES PORTUGAISES
lYII1\TJSTERED'OUTRE-MER, Lisbonne.
GOUVERNEUR, GENERAL D'ANGOLA, Luanda.
TRIBUNAL MILITAIRE, Luanda.
Des mesures pratiques ont ete prises pour interdire aux .africains
ta possession de biens ruraux et urbains.
On peut affirmer que la presque totatite des paysans africains
travaille sur des terres dont Ie droit de possession ne leur est pas offL
ciellement reconnu. D'une part, la loi ne permet aux indigenes vivant
dans des organisations triba.les que l'usage et Ie benefice des terres
necessatres a leur etablissement et a leurs cultures et d'autre part elle
leur interdit tout droit de possession sur les proprietes rurales.
Sur les 25 millions d'hectares de I'atre cult.ivee de I'Angola, 2
'll1illions environ appartiennent a quelques milliers de colons. Plus de
4/5 des cultures de cafe - le produit agricole Ie plus riche du pays -
aont ega.lemerrt entre les mains des colons.
Bien que plus de 70 % de la production agricole de I'Angola pro-
'Vienne directement de l'agriculture indigEme - oil Ie travail f'errrlnln a
une place predorntnarrte, en vertu de la pratique genera.lisee du travail
force - le revenu du paysan r,.)ir de I'Angola est tres bas.
L' Administration coloniale contribue sciemment a rendre la vie
miserable au pays an par un certain nombre de mesures, notamment
par la fixation officielle a, de vils prix des produits de l'agriculture
indigene, la carence de la monnaie, la suppression theorique du com-
.merce decha.nge, Ie manque d'assistance technique effective, l'expul-
sion systematique des africains des terres les plus fertiles, la confis-
cation des outiIs agricoles par les autorites dans les frontreres de
l'Angola et du Mozambique, sous pretexte de non-payement de I'Impot
de souverainete.
L' Administration .coloniale portugaise utilise ega.lemerrt une serie
de mesures pratiques de corrtrole serre de I'economle de la paysannerie.
Le travail explotte du paysan africain prend des aspects de ser-
vitude, avec la pratique de la monoculture legalement irnposee.
Ep 1953plus de 570.000indigenes de l'Angola et du Mozambique
furent obliges de produire du coton, sur une etendue .de terres depas-
.:sant 320.000 hectares. Ces cultures obligatoires, non seulement eput-
.sent les sols afric'aIns mais reduisent encore davantage les cultures
~ivrieres dans nos pays deja atteints de sous-alimentation chronique;
-elles eleverrt exceptionnellement le cout de la vie dans ces regions et
:installent la faim la plus noire parmi les masses laborieuses.
Le travail force
Le travail force est encore pratique dans les colonies portugaises.
;Ses causes sont multiples: la reduction demograpbique des popula-
-tione.consequence de Ia traite seculatre prattquee par les portugais.
la recherche de main-d'reuvre africaine a bon marche, la politique
portugaise de genocide, Ie retard economtque et les deficits de la ba-
lance commerciale et de payement du Portugal, la recherche de devi-
.ses pour subvenir a 1'installation massive de colons blancs.
Le systeme du travail force s'accompagne de methodes herltees
-de 1'esclavage. En realrte, les indigenes sont vendus par les autorttes
..administratives aux agriculteurs et aax compagnies europeennes qui
-developpent entre elles une apre concurrence dans la recherche de la
.mam-d'ceuvre.
11 y a quelques annees, I'Archeveque de Luanda, dans un memoi-
re confidentiel adresse au Gouverneur de l'Angola, rendait la pra-
-tique officielle du travail force responsable du peu de prog'res du
-christianisme parmi les masses angolaises. L' Archeveque revelatt dans
-ce document que les auto rites administratives vendaient chaque tra-
-vailleur force a un prix va.riant entre 1.000 et 1.200 escudos. Et celles-ci
se defendaient -de l'accusation de vendre les noirs, en affirmant
-quelles ne faisaient que les lauer.
Une telle corruption n'atteint pas seulement les autorrtes portu-
.gatses mais aussi, par leur intermedtatre, les chefs africains des villa-
;:ges, imposes par I'Administration coloniale.
La pratique du travail force entraine d'une marriere permanente
'Ia destruction de la vie economique africaine, la desintegratton de mil-
lions de familles africaines, la prostitution d'un nombre considerable
de femmes, la propagation de maladies venertennes, 1'abaissement du
-taux de na tal ite et 1'augmentation de la mortatite infantile, la reduc-
tion de la vie utile du travailleur, la liquidation de l'activite agricole
relativement « independ ante » de millions de paysans africains, la pra-
-tique par les colons, de l'appropriation des terres et des autres biens
-aban~onnes par les africains soumis au travail force .... etc.
Au Mozambique, il existe un trafic officiel annuel de plus de
400.000 Africains vers Ies mines de Rhodesie et de I'Afrique du Sud,
-dans le maintien duquel Ie Portugal est interesse, puisqu'tl constitue
Tune de's seules sources sures d'acquisition des devises necessatres a
J'acceleratton des travaux prepara.toires a 1'installation massive de
<colons portugais et qu'il peut pennettre dequtlibrer la balance de
-payements de cette colonie.
II faut voir dans la pratique du travail force la raison fondamen-
-tale d'un barbare massacre de plus de 1.000 noirs dans I'He de S. Tome,
en fevrier 1953.En effet la reduction de l'exportation de travailleurs for-
-ces de I'Angola, en direction de cet archipel et la hausse des prix du cafe
.alors existante, amenerent Ie gouvernement de S. Tome a imposer par
:les armes Ie regime de travail force aux natifs de 1'ile.
Ce merne type de colonialisme, pratique par un pays arr-iere,
savere incapable de faire face au grave probleme des famines cycliques
dans I'archipel du Cap Vert. Ces crises provoquent la mort de milliers
d'habitants, d'autres se voyant contraints dernigrer vers d'autres co-
lonies ou ils sont durement explortes. .
Un enseignement au rabais
Dt a.pr'es un accord stgrie, voici vingt ans, entre Ie Portugal et Ie
Saint Siege, les missions catnoliques detrennent Ie monopole de l'en-
.aeignemen t aux indigenes.
Quant a la nature et a la qua.lrte de 1'enseignement donne par
les missions catholiques, il suffit de retenir Ie passage suivant d'une
.recente circulaire confidentielle, eman ant de I'Administration Civile
de 1'Angola, laquelle fait Hat d'une depeche du SecrHaire general du
Gouvernement de la colonie: «Celui qui a affaire a I'Indigene eleve
.sous l'influence des missions protestantes, remarque une difference
:frappante avec ceux qui sont eleves par les missions catholiques : ceux-
la sont plus sociables, ont d'autres habitudes de travail, sont mieux
-culttves, du point de vue culturel et professionnel, sont mieux prepares
. -pour la vie pratique; ceux-ci sont plus -mystiques, plus genes, plus
Jlauvres, incontestablement plus portugais. »
Monsieur Ie President.
Chers Camarades delegues,
f.A.B.
ANYERSc