Diagnostic D'une Dysphonie Cours

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DIAGNOSTIC D’UNE DYSPHONIE

1. INTRODUCTION

Les dysphonies ou enrouements comprennent toutes les altérations du son laryngé,


intermittentes ou permanentes, portant sur une ou plusieurs des caractéristiques physiques de la
voix : intensité, hauteur, timbre.

On parle d'aphonie lorsqu'il y a disparition du son laryngé ; seule la voix chuchotée est possible.
On parle de dysphonie lorsque la voix est altérée sur un de ses paramètres sans disparaître
complètement. Il peut s'agir d'altération de l'intensité (trop faible ou trop forte), d'altération de la
hauteur (trop aiguë, trop grave), d'altération du timbre (voix rauque, soufflée, bitonale, etc.). Le
patient présente aussi souvent des sensations subjectives désagréables en rapport avec l'émission
sonore. Il peut s'agir de picotements, de brûlures au niveau de la gorge, parfois au niveau du cou. Ces
dysesthésies entraînent souvent un tic de raclement que le patient met sur le compte de "mucosités"
qu'il cherche à rejeter. Il existe fréquemment une fatigabilité à l'effort vocal et des troubles
respiratoires allant parfois jusqu'à une sensation de dyspnée modérée.

La phonation correspond à l’ensemble des mécanismes physiologiques et neurophysiologiques qui


aboutissent à la production des sons du langage (respiration, fonctionnement laryngé, articulation).

L’articulation est l’ensemble des mouvements des “organes de la parole” ou articulateurs


(essentiellement le voile du palais, la langue, les lèvres), qui modifient la forme de cavités supra
laryngées (ou résonateurs ou cavités de résonance) en déterminant des strictions de localisations
différentes. Le son (ou le souffle) d’origine laryngo-respiratoire peut ainsi être modifié pour que
soient réalisés les différents sons du langage ou phonèmes.

La parole est l’acte concrètement réalisé (par l’individu), la manifestation physique et


physiologique des données abstraites que sont le langage et la langue ; elle correspond à la “mise en
œuvre” du code. La parole est une réalisation acoustique programmée dans un but de
communication, alors que la voix est le support acoustique de la parole.

Le diagnostic étiologique des dysphonies repose principalement sur l'examen des cordes vocales
(laryngoscopie).

Chez l'adulte, surtout alcoolo-tabagique, l'étiologie la plus redoutée est le cancer du larynx.

2. RAPPELS ANATOMIQUES

3. PHYSIOPATHOLOGIE

On reconnait au larynx 3 fonctions essentielles:

• une fonction phonatoire par l'émission des sons,

• une fonction de protection des voies aériennes inférieures lors de la déglutition,


• enfin un rôle actif dans la respiration.

La voix est un son produit par les cordes vocales sous l’influence de l’air expiré. Trois mécanismes
synergiques concourent à l'émission de la voix : la soufflerie pulmonaire, le vibrateur laryngé, les
résonateurs supra-laryngés.

Le mécanisme respiratoire fournit l'énergie indispensable à la vibration des cordes vocales, tandis
que les cavités supra-laryngées et pharyngo-buccales jouent le rôle de résonateurs. Les cordes
vocales transforment donc l'énergie pulmonaire en son "laryngé". Puis les résonateurs interviennent
pour filtrer ce son et le transformer suivant le filtrage utilisé en son du langage comme les voyelles
ou certaines consonnes.

Le contrôle de l'intensité et de la hauteur de la voix est central. Les afférences sont sensitives et
plus particulièrement proprioceptives mais aussi auditives (boucle audio-phonatoire). Les efférences
contrôlent la motricité des différents systèmes musculaires thoraco-abdominal, thoraco-laryngé et
vélo-pharyngé.

En résumé, le larynx émet un son primaire dont l'énergie est déterminée par la soufflerie
pulmonaire et la qualité par les cavités de résonance.

L’absence d’accolement des cordes est responsable d’une fuite d’air à ce niveau et ainsi d’une
voix soufflée même si la muqueuse est normale. De même des anomalies de la muqueuse (lésion,
rigidité, cicatrice, inflammation) entraînent une voix rauque en rapport avec les anomalies vibratoires
de la muqueuse même si les mouvements des cordes sont normaux.

4. DIAGNOSTIC POSITIF

4.1. Interrogatoire

L'interrogatoire est indispensable. Il précise :

* le terrain :

- l'âge du patient.

- la notion de profession exposée (surmenage vocal chez les chanteurs, les avocats, marchands
ambulants, forrains, talibés apprenant le coran,...).

- un milieu professionnel bruyant.

- l'intoxication alcoolique et/ou tabagique chronique.

- les antécédents d'intervention laryngée, thyroïdienne ou thoracique.

* la dysphonie :

- son mode de survenue.

- sa durée : supérieure à 3 semaines, elle impose un examen laryngoscopique.

- ses signes d'accompagnement : fièvre, dyspnée, rhinopharyngite, otalgie réflexe, …


4.2. Examen ORL

L'examen ORL oriente, seul, le diagnostic étiologique, grâce à la laryngoscopie.

4.2.1. Laryngoscopie :

* La laryngoscopie répond à deux questions essentielles :

- existe-t-il, ou non, une anomalie organique laryngée ? Aspect de la muqueuse laryngée, existence
d'un processus tumoral.

- existe-t-il, ou non, un dysfonctionnement de la cinétique laryngée ? Etude de la mobilité des cordes


vocales et des aryténoïdes durant la phonation.

* Elle est d'abord indirecte, réalisée en consultation à l'aide de miroirs laryngés.

* La laryngoscopie peut être aidée chez certains patients aux réflexes nauséeux marqués ou, chez
l'enfant, par une fibrolaryngoscopie au fauteuil.

* Mais souvent, en cas d'atteinte organique, seule une laryngoscopie directe, réalisée au bloc
opératoire, sous neuro-analgésie, apporte le diagnostic de certitude, car elle permet d'effectuer des
prélèvements biopsiques.

4.2.2. Examen ORL complet :

L'examen ORL complet sera systématique avec, en particulier, la palpation de la glande thyroïde et
des aires ganglionnaires.

4.2.3. Examen phoniatrique :

En présence d'une dysphonie fonctionnelle, un examen phoniatrique approfondi avec étude


stroboscopique des cordes vocales, analyse fréquentielle de la voix et vérification des synergies
pneumo-phonatoires est très utile.

L'ensemble de ce bilan permettra de faire un diagnostic étiologique.

5. DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL

- Hypophonie (voix faible) des insuffisances respiratoires avec baisse du débit d’air.

- Rhinolalie fermée (obstruction nasale ou du cavum): rhinite, polypose nasosinusienne, hypertrophie


des végétations adénoïdes, tumeur du voile, du cavum.

- Rhinolalie ouverte (incontinence du voile du palais) : fente vélo-palatine, exérèse vélaire excessive
(chir ronflement), paralysie vélaire.

- « Voix pharyngée » : cancer de l’oropharynx, phlegmons amygdaliens et pharyngés, hypertrophie


amygdalienne.

- Dysarthrie des troubles neurologiques de l’articulation de la parole (SLA notamment).

6. DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE
6.1. Les troubles vocaux aigus

Il s'agit souvent d'un début brutal avec une aphonie, qui en l'espace de quelques jours, se
transforme en dysphonie plus ou moins importante.

6.1.1. Les laryngites aiguës

Elles sont l'étiologie la plus fréquente. La laryngite aiguë apparaît le plus souvent en période
hivernale à l'occasion d'un "froid". Elle est parfois déclenchée par un épisode important de
surmenage vocal et survient plus volontiers chez la femme en période pré-menstruelle. Les signes
d'accompagnement sont le plus souvent discrets: catarrhe rhino-pharyngé, fébricule, toux
d'irritation.

C'est l'examen laryngé, en laryngoscopie indirecte, qui permet d'affirmer le diagnostic


d'inflammation et de préciser la nature de la laryngite :

• La laryngite catarrhale, la plus simple, avec au départ une muqueuse laryngée rosée et quelques
vaisseaux dilatés puis secondairement des sécrétions muqueuses abondantes.

• La laryngite œdémateuse, plus sévère, avec œdème de la muqueuse laryngée expliquant l'aphonie
souvent complète.

• La laryngite croûteuse se caractérise par une muqueuse laryngée épaissie de façon diffuse,
inflammatoire, recouverte d'un enduit pultacé avec parfois de véritables croûtes verdâtres,
particulièrement au niveau de la commissure postérieure.

• Le coup de fouet laryngé est une forme qui doit être individualisée. Il apparaît brutalement souvent
au décours d'un effort vocal intense ou prolongé. A l'examen on retrouve un hématome sous-
muqueux unilatéral.

6.1.2. La paralysie récurrentielle brutale

Son début est analogue sur le plan symptomatique à celui de la laryngite aiguë. Il s'agit souvent
d'une aphonie, parfois accompagnée de quelques fausses routes alimentaires. La laryngoscopie
retrouve l'immobilité d'une des deux cordes vocales.

6.1.3. Les traumatismes laryngés

* Les traumatismes externes du cou fermés ou ouverts peuvent nécessiter un bilan endoscopique,
indépendamment de la dyspnée qui passe alors au premier plan. Il en va de même pour tout
enrouement secondaire à la chirurgie cervicale (thyroïde) ou cardio-pulmonaire (à gauche) en raison
des rapports du nerf récurrent, différents à droite et à gauche.

* Les traumatismes internes au cours d'une intubation trachéale offrent deux possibilités
prédominantes :

- traumatisme d'une corde vocale.

- luxation d'un aryténoïde.

6.1.4. L’aphonie psychogène


Elle survient le plus souvent, mais pas exclusivement, chez la femme et débute brutalement
souvent le matin au réveil. Il n'y a pas de contexte douloureux ou infectieux. La particularité est que
cette aphonie ne se transforme pas progressivement en dysphonie mais qu'elle persiste souvent
pendant plusieurs semaines ou même mois sous la forme d'une aphonie totale. La notion d'un
traumatisme psychologique et le comportement du patient orientent parfois le diagnostic. Dans ces
cas, il est classique de retrouver une toux sonore contrastant avec l'aphonie et démontrant la
normalité du vibrateur laryngé. A l'examen, les cordes vocales ne sont pas inflammatoires. En
phonation, elles ne viennent pas au contact malgré une mobilité parfaitement conservée. Dans
certains cas, il existe une hypertonie plus ou moins importante des bandes ventriculaires.

6.2. Les troubles vocaux chroniques

Lorsqu'une dysphonie dure plus de quinze à vingt jours, un examen spécialisé est absolument
nécessaire, notamment pour dépister un cancer débutant même s'il ne s'agit pas de la cause la plus
fréquente.

6.2.1. Le contexte

Le contexte d'apparition de la dysphonie doit être pris en compte. Par exemple, l'évolution à la
chronicité d'une dysphonie aiguë est plutôt suspecte tandis qu'une dysphonie remontant à l'enfance
est plutôt rassurante.

L'abus du tabac depuis de nombreuses années, la consommation excessive d'alcool doivent être
recherchés. On recherchera également la notion de travail ou de vie dans une atmosphère polluée,
notamment par les émanations chimiques.

Un contexte neurologique (atteinte motrice périphérique, atteinte des nerfs crâniens),


rhumatismal (spondylarthrite ankylosante, polychondrite atrophiante, maladie de système),
allergique ou traumatique (réanimation, anesthésie récente) doivent être recherchés.

La notion de profession à risque vocal doit être connue. En premier lieu, il s'agit des enseignants
surtout dans l'enseignement primaire ou les enseignants d'éducation physique et sportive ou encore
de musique. Il faut citer aussi les représentants, les comédiens, les chanteurs mais plus généralement
tous ceux qui ont à parler beaucoup ou dans un contexte acoustique difficile. On parle alors de
surmenage ou de malmenage vocal.

6.2.2. Les étiologies

La hantise doit être le cancer du larynx ou une lésion précancéreuse susceptible de se


transformer.

6.2.2.1. Les lésions bénignes des cordes vocales

On distingue les lésions acquises et les lésions congénitales.

6.2.2.1.1. Les lésions bénignes acquises

Les lésions bénignes acquises surviennent le plus souvent dans un contexte de surmenage vocal,
souvent au décours d'un épisode infectieux rhino-pharyngé:
- le nodule est la lésion le plus souvent rencontrée. Il correspond à un épaississement de la
muqueuse de recouvrement de la corde vocale au point de forçage maximal de l'ondulation
muqueuse, c'est-à-dire à l'union tiers antérieur / tiers moyen du bord libre. Il est en général bilatéral
et symétrique, responsable d'un défaut d'accolement des cordes en phonation qui réalise la classique
"glotte en sablier" avec fuite d'air. Les femmes sont presque exclusivement concernées ;

- le polype par contre intéresse plus particulièrement les hommes et sa survenue est souvent brutale
après un effort vocal intense. Il est presque toujours unilatéral, soit muqueux, soit angiomuqueux, de
volume variable en fonction de son ancienneté, en général situé dans le tiers antérieur de la corde
vocale ;

- les ectasies capillaires sont plus rares. Elles réalisent un réseau capillaire dilaté dans la muqueuse de
la face supérieure des cordes vocales, se pelotonnant parfois en de véritables micro-angiomes. A
l'effort vocal, ces capillaires se congestionnent et entraînent une dysphonie souvent importante qui
régresse au repos. Les femmes sont le plus souvent intéressées et ce sont parfois des
professionnelles de la voix.

- les granulomes sont des formations inflammatoires qui ne donnent vraiment de troubles
dysphoniques que lorsqu'ils sont volumineux et gênent l'occlusion cordale. Le plus souvent ils se
manifestent par une simple sensation de gêne pharyngée et sont découverts par l'examen laryngé
systématique. Néanmoins l'attention du médecin doit être attirée s'il s'agit d'un malade qui a subi
dans les mois précédents une intubation laryngo-trachéale et qu'il a présenté au décours de celle-ci
des douleurs dans la région laryngée et une dysphonie immédiate qui a ensuite régressé.

- La papillomatose laryngée

6.2.2.1.2. Les lésions bénignes congénitales

La notion d'ancienneté de la dysphonie qui remonte souvent à l'enfance et le caractère parfois


familial de celle-ci, doivent orienter vers ce diagnostic.

- Les kystes intra-cordaux développés dans le chorion sous-muqueux sont les plus fréquents. Il peut
s'agir de kystes épidermiques bilatéraux dans 50 % des cas. Le diagnostic n'est fréquemment que
suspecté, même au décours de l'examen spécialisé, et c'est le plus souvent à l'intervention sous
microscope que la preuve est apportée avec confirmation histopathologique.

- Le sulcus glottidis s'apparente aux kystes épidermiques. Il est presque toujours bilatéral et c'est lui
qui est responsable de la classique "glotte ovalaire". C'est un sillon plus ou moins large et déprimé
sur le bord de la corde vocale, responsable d'une importante fuite d'air en phonation entraînant une
voix tout à fait caractéristique, soufflée, désonorisée et assez haute, qui permet le diagnostic "à
l'oreille" pour le spécialiste qui en a l'habitude.

- Des micro-palmures muqueuses commissurales antérieures sont parfois découvertes aussi en


laryngoscopie en suspension, associées aux nodules dans 20 % des cas.

6.2.2.2. Les laryngites chroniques

Ce chapitre regroupe des lésions pour lesquelles le spectre de la dégénérescence cancéreuse doit
être toujours présent à l'esprit du clinicien. Il s'agit au départ de phénomènes inflammatoires
chroniques qui ont pour causes isolées ou intriquées, le malmenage vocal, le tabagisme, l'exposition
à des vapeurs toxiques ou des foyers infectieux rhino-sinusiens et pharyngés. Leur surveillance
régulière est absolument indispensable et nécessite la plupart du temps un pelage-biopsie de la
corde suspecte pour des examens anatomo-pathologiques sériés qui seuls permettront de
déterminer le degré de gravité de la lésion pour pouvoir choisir une attitude thérapeutique en
conséquence. Trois types principaux de lésions sont rencontrés :

- La laryngite chronique hypertrophique pseudo-myxomateuse ou œdème de Reinke : la voix est tout


à fait caractéristique : c'est la voix du "buveur de bière", rocailleuse, grave, peu timbrée, de faible
intensité chez l'homme qui est le plus fréquemment atteint ou bien la femme à qui l'on finira par dire
"monsieur" au téléphone, alors qu'au début la connotation un peu sensuelle de celle-ci pouvait être
plaisante. Les cordes vocales sont distendues par un œdème sous-muqueux développé sur leur face
supérieure. Cet œdème presque toujours bilatéral peut être volumineux, flottant en drapeau dans la
lumière glottique et parfois peut entraîner des accès dyspnéiques aigus lorsqu'il est aspiré vers la
sous-glotte. La dégénérescence maligne de cet œdème de Reinke est rare, bien que l'influence du
tabagisme soit déterminante dans le développement de cette lésion.

- La laryngite chronique hypertrophique diffuse : c'est la forme heureusement la plus banale et la


plus fréquente. La dysphonie chez ce fumeur aux voies aériennes supérieures et inférieures
encombrées, est d'abord épisodique, puis devient constante tout en restant variable. La dysphonie
en général plus marquée au réveil, s'améliore ensuite pour réapparaître en fin de journée. La
muqueuse des cordes vocales est épaissie et hypervascularisée, recouverte de sécrétions muqueuses
responsables d'un hemmage permanent. Sans surveillance et surtout sans traitement approprié,
cette forme de laryngite chronique évoluera fréquemment vers le 3e type de laryngite.

- La laryngite chronique dysplasique : c'est dans ce cadre de laryngite où il y a une transformation des
structures histologiques de la muqueuse que le risque de dégénérescence maligne est le plus grand.
Les aspects sont variés allant de la plaque de leucoplasie à la pachydermie blanche totale, au
papillome corné de l'adulte. L'important dans tous les cas est de faire un pelage-biopsie large pour
avoir un examen anatomo-pathologique sérié qui seul permettra de déterminer avec précision le
degré de gravité.

- A part, la tuberculose laryngée ou laryngite tuberculeuse qu’il faut avoir à l’esprit avec l’avènement
du VIH/SIDA. Le contexte est évocateur : notion de contage, fièvre vespéro-nocturne,
amaigrissement, toux, tuberculose pulmonaire.

6.2.2.3. Le cancer du larynx

C'est la préoccupation constante devant toute dysphonie chronique chez l'adulte de 40 à 50 ans
surtout s'il présente des facteurs prédisposants. L'enrouement de plus en plus marqué est le signe
d'appel majeur, il peut s'accompagner d'une otalgie réflexe assez évocatrice.

Les trois étages du larynx sont concernés, isolément au début ou en association par extension
plus tardivement, sus-glottique, glottique ou sous-glottique. Le plus "intéressant" est l'étage glottique
avec le néoplasme de la corde vocale car c'est celui qui donnera les signes vocaux d'appel les plus
précoces et par conséquent permettra d'entreprendre un traitement dans les meilleures conditions
avec de très grandes chances de guérison.
Le diagnostic à l'examen en laryngoscopie indirecte est en général facile, montrant une lésion
bourgeonnante et ulcérée entraînant une rigidité de la corde vocale plus ou moins importante selon
son extension en profondeur.

Certaines tumeurs de l'hypopharynx peuvent aussi avoir un retentissement vocal par


envahissement du mur laryngé, mais c'est en général à un stade avancé de la lésion et la dysphagie
est prédominante.

6.2.2.4. Les troubles de la mobilité des cordes vocales (atteintes de la dynamique laryngée)

- L’ankylose aryténoïdienne ou blocage de l’articulation crico-aryténoïdienne :

L'ankylose aryténoïdienne spontanée est exceptionnelle. Elle fait généralement suite à une luxation
traumatique de l’articulation crico-aryténoïdienne (intubation iatrogène, traumatisme cervical).

- Les paralysies laryngées :

Les paralysies laryngées sont unilatérales ou bilatérales par atteinte située soit sur le trajet du
pneumogastrique, soit sur le nerf récurrent. On retiendra surtout :

* la paralysie du pneumogastrique dans le cadre d'un tableau neurologique associant d'autres


atteintes des paires crâniennes groupées dans différents syndromes classiques ou dans celui de
l'évolution d'une myélite ascendante (sclérose en plaques, sclérose latérale amyotrophique).

* les diplégies laryngées par atteinte centrale ou radiculaire peuvent se faire en fermeture (syndrome
de Riegel avec dyspnée) ou en ouverture (syndrome de Ziemssen avec fausse route et aphonie).

* la paralysie récurrentielle unilatérale dont le mécanisme est évident après chirurgie thyroïdienne
ou thoracique. Sinon, la recherche d'une tumeur sur le trajet du récurrent conduit à explorer le
médiastin, les apex pulmonaires, l'œsophage, la thyroïde.

* la paralysie récurrentielle bilatérale est une catastrophe possible de la chirurgie thyroïdienne.


Après une période de dysphonie postopératoire, une période d'amélioration trompeuse précède
l'installation d'une dyspnée longtemps modérée mais invalidante. Cette évolution s'explique par la
position des cordes vocales qui finissent par se fixer en adduction.

- La dysphonie des maladies musculaires : voix soufflée et faible de la myasthénie (la dysphonie est
intermittente associée avec épisodes de ptosis et quelques troubles de la déglutition), voix faible
avec dysarthrie flasque dans les myopathies.

6.2.2.5. Les dysphonies à cordes vocales normales

- Les dysphonies dysfonctionnelles qui apparaissent à la suite d'un surmenage ou d'un malmenage
vocal. A un stade précoce, on n'observe pas de lésion de type nodulaire mais un défaut de fermeture
et parfois une hypotonie des cordes vocales expliquant la tonalité abaissée et le timbre voilé. Les
sujets se plaignent d'une fatigabilité vocale à l'effort, d'une diminution de l'étendue tonale et d'une
difficulté à élever l'intensité.

- Les dysphonies psychogènes (cf supra)


- Les dysphonies spasmodiques qui comportent une altération vocale tout à fait typique avec
apparition de spasmes vocaux pendant la parole. La voix est "coincée", de faible intensité, parfois
chevrotante. Cette dysphonie apparaît à tout âge mais surtout à l'âge adulte. Son étiologie est
discutée, neurogène pour certains, psychogénique pour d'autres.

7. Les moyens thérapeutiques

La lutte contre les facteurs favorisant l'apparition d'une dysphonie chronique de l'adulte et
l'entretenant ensuite, est certainement l'attitude la plus positive que l'on puisse avoir. Faire prendre
conscience au malade des risques qu'il court avec l'abus du tabac, l'aider à s'en passer, rechercher
des conditions de travail à risques (bruit, toxiques) et intervenir à ce niveau, lui faire comprendre que
ce moyen de communication qu'est la voix ne doit pas être surmené et qu'il doit au besoin se faire
aider par l'orthophoniste, sont des moyens simples auxquels tout médecin doit penser devant ce
type de patient.

La recherche aussi de causes locales favorisantes est importante, notamment le dépistage et le


traitement des affections chroniques des voies aériennes supérieures, rhino-sinusiennes et
pharyngées (allergie, RGO), qui jouent souvent un rôle dans l'apparition, l'entretien et l'aggravation
des dysphonies chroniques de l'adulte.

7.1. Les moyens médicaux

Ils sont en général suffisants dans les phénomènes dysphoniques aigus et sont souvent
nécessaires à titre d'appoint, dans les cas chroniques. Les anti-inflammatoires peuvent être utilisés,
principalement les stéroïdes. La voie veineuse n'est en général pas indispensable. Des antibiotiques
sont nécessaires en cas d'infection surtout ceux diffusant bien au niveau des muqueuses des voies
aériennes supérieures. Il est également possible de prescrire des fluidifiants et protecteurs des
muqueuses respiratoires. Par voie locale, les mêmes types de médicaments peuvent être prescrits
soit sous forme de pulvérisations ou spray, soit sous forme d'aérosols.

7.2. Les moyens chirurgicaux

7.2.1. Traitement des lésions bénignes

C'est un nouveau concept de chirurgie fonctionnelle, la phonochirurgie, qui a vu le jour ces vingt
dernières années à côté du traitement des lésions cancéreuses qui était la seule préoccupation des
laryngologistes. Le laser CO2 a été l'objet d'un grand engouement lors de son apparition pour le
traitement de ces lésions bénignes, mais s'il a encore quelques adeptes, la majorité des auteurs
reconnaît à présent la supériorité de la microchirurgie instrumentale qui est bien plus précise et donc
mieux adaptée à la taille souvent très petite des lésions à traiter.

7.2.2. Traitement des lésions malignes

Dans ce domaine aussi, les techniques ont beaucoup évolué, leur but étant autant que possible
de préserver une fonction vocale par la chirurgie partielle du larynx ou d'en recréer une autre par des
laryngectomies reconstructives. La voie œsophagienne n'est réservée qu'aux cas où la laryngectomie
totale ne peut être évitée. La radiothérapie a aussi des indications soit comme traitement isolé d'une
lésion cordale non fixée par exemple, soit comme adjuvant d'un traitement chirurgical quand il s'agit
d'une lésion étendue avec envahissement ganglionnaire cervical. Le laser CO2 enfin trouve ici de
meilleures indications que dans les lésions bénignes, soit dans le traitement des dysphasies
suspectes, soit dans la chirurgie de rattrapage des récidives.

7.3. La rééducation vocale

Le but de la rééducation vocale est d'améliorer les troubles vocaux par une thérapeutique
d'exercices. Cette rééducation est pratiquée par le médecin phoniatre ou l'orthophoniste ; sa durée
s'échelonne sur plusieurs mois au rythme d'une à deux fois par semaine. Elle est basée sur des
exercices corporels, respiratoires, vocaux, qui sont réalisés d'abord avec le rééducateur, puis par le
patient seul, de façon à modifier les habitudes vocales. Elle intervient soit seule lorsqu'il n'y a pas de
lésion laryngée ou, lorsqu'on pense que la lésion laryngée est secondaire au surmenage vocal et par
conséquent réversible ; soit en complément des autres thérapeutiques en particulier après la
microchirurgie laryngée.

8. CONCLUSION

Considérée comme un symptôme banal sans gravité, la dysphonie est souvent négligée, tout au
moins au début. En réalité, c’est peut – être le premier et le plus important des signes cliniques d’un
cancer du larynx.

Toute dysphonie qui dure plus de 2 à 3 semaines, chez un adulte, de surcroît alcoolo-tabagique, doit
faire craindre un cancer du larynx

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