Guillaume De-Tyr Chroniques
Guillaume De-Tyr Chroniques
Guillaume De-Tyr Chroniques
DES MÉMOIRES
À L’HISTOIRE DE FRANCE.
IMPRIMERIE DE A. BELIN.
IOLLECTION
DES MÉMOIRES
RELATIFS
À L'HISTOIRE DE FRANCE,
DEPUIS LA FONDATION DE LA MONARCHIE FRANCAISE JUSQU’AU 13° SIÈCLE ;
Par M. GUIZOT,
PROFESSEUR D'HISTOIRE MODERNE A L’ACADEMIE DE PARIS.
A PARIS,
CHEZ J.-L.-J. BRIÈRE, LIBRAIRE,
RUE SAINT-ANDRÉ=-DES-ARTS, N°. 68.
1824.
HISTOIRE
DES
FAITS ET GESTES
DANS LES RÉGIONS D'OUTRE-MER ,
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NOTICE
SUR GUILLAUME,
ARCHEVÊQUE DE TYR.
PRÉFACE
DE
GUILLAUME DE TYR.
DES CROISADES.
RS SR PS A RS À A USRS A SAS AR A A A A A SA AA A A A A
LIVRE PREMIER.
1 En 638. — ? En 628.
HISTOIRE DES CROISADES; LIV. L. 5
nombre infini de possessions, afin que ceux qui se-
raient chargés du service du temple eussent toutes les
ressources convenables pour conserver à perpétuité
les toitures dans le même état, pour renouveler tout
ce qui viendrait à vieillir, et pour entretenir les lu-
minaires. Presque tout le monde sait quelle est la
forme de ce temple, on connaît l'élégance du tra-
vail, en sorte qu’il n’est pas nécessaire que j'en parle
en détail. On trouve encore dans cet édifice , intérieu-
rement et au dehors, des monumens très-anciens, en
lettres de l’idiome arabe, à la facon des mosaïques,
et l’on croit que ces monumens remontent à l'époque
de la construction : ils font connaître avec certitude
quel en fut l’auteur, quelles sommes on y dépensa,
en quelle année commenca le travail et en quelle
année il fut terminé.
La ville agréable et spécialement consacrée à Dieu
se trouvant ainsi, en expiation de nos péchés, sou-
mise à la domination des infidèles, subit pendant
quatre cent quatre-vingt-dix ans le joug d’une injuste
servitude, et fut travaillée de souffrances continuel-
les, cependant avec de grandes vicissitudes. Elle
changea fréquemment de maîtres, par suite de l’ex-
trême mobilité des événemens; suivant es disposi-
tions de chacun d'eux, elle eut quelquefois des in-
tervalles lucides, d’autres fois des jours chargés de
nuages, et, comme un malade, elle était oppressée ou
respirait plus librement, selon l’état du temps. Il
était impossible qu’elle se relevât jamais compléte-
ment, tant qu'elle avait à gémir sous la domination
violente des princes infidèles et d’un peuple qui n’a-
vait pas de Dieu.
6 GUILLAUME DE TYR.
La nation du Seigneur recouvra cependant la tran-
quillité du vivant de cet homme admirable et digne
de louanges, Haroun, surnommé Raschid, qui gou-
verna tout l'Orient’, dont aujourd’hui encore tout
l'Orient admire la libéralité, l'extrême douceur, les
mœurs singulièrement recommandables, et qu'il célè-
bre par des éloges immortels. Ces bons traitemens
étaient dus à l'intervention d'un homme très-pieux
et d'immortelle mémoire, l'empereur Charles. Ces
deux souverains s’adressaient mutuellement de fré-
quens messages ;ils vécurent constamment en bonne
intelligence, et consolidèrent leur amitié par un
traité admirable. Cette faveur de leur prince fut pour
les habitans de Jérusalem une source de grandes
consolations, si bien qu'on eût dit qu'ils vivaient sous
la domination de l’empereur Charles, plus que sous
celle de leur souverain. Voici ce qu’on lit dans la vie
glorieuse de cet homme” : « Il fut lié d’une amitié si
« intime avec Haroun, roi des Perses, qui gouver-
« nait tout l'Orient, à l'exception de l'Inde, que ce-
« lui-ci préférait ses bonnes grâces à la bienveillance
« de tous les rois et princes du monde, et le jugeait
« seul digne de ses respects et des actes de sa muni-
« ficence. Aussi, lorsque les ambassadeurs que Char-
«les avait envoyés avec des présens au sépulcre
« très-sacré de Notre-Seigneur et Sauveur, et au lieu
« même de la résurrection, furent arrivés chez Haroun,
«et lui eurent fait part du desir de leur maître, non
« seulement il permit de faire ce qu'on lui deman-
« dait, mais même il voulut que le lieu sacré, ber-
® De Van 786 à l’an 809.
* Dans la Wie de Charlemagne par Eginhard, page 139.
HISTOIRE DES CROISADES; LIV. I. 7
« ceau du salut, füt placé sous l'autorité de Charles :
« lorsque les ambassadeurs repartirent, Haroun leur
« adjoignit les siens, et envoya à Charles de super-
« bes présens en vêtemens, en aromates et en toutes
«les richesses que produit la terre de l'Orient. Peu
« d'années avant , il Jui avait envoyé un éléphant, que
« Charles lui avait demandé, le seul qu'il eût en ce
« moment. »
Charles consolait fréquemment par ses largesses et
par ses œuvres pieuses non seulement ceux des fidèles
qui vivaient à Jérusalem sous la domination des infi-
dèles, mais encore ceux qui, en Égypte et en Afrique,
étaient soumis aux impies Sarrasins. On lit dans sa vie
le passage suivant : « Plein de zèle pour le soulagement
« des pauvres, il prenait soin de répandre ses libérali-
« tés, que les Grecs ont appelées tacsporiys (aumônes),
« non seulement dans sa patrie et dans son royaume ,
« mais encore au-delà des mers, en Syrie, en Égypte,
«en Afrique, à Jérusalem, à Alexandrie, à Car-
« thage ; partout où il parvenait à découvrir des Chré-
«lens vivant dans la pauvreté , il prenait compassion
« de leurs maux, et leur envoyait souvent de l’ar-
« gent. Il recherchait l'amitié des rois d'outre-mer,
« surtout dans l’intention que les Chrétiens soumis
« à leur domination pussent obtenir quelque soula-
« gement et quelques secours”. »
Ceux qui desireront connaître avec plus de détail
tout ce que la ville de Dieu et la contrée environ-
nante eurent à souffrir durant cette période intermé-
diaire , et par suite des nombreuses vicissitudes de
1 Osée, chap. 4, v. 9.
2 Ev. sel. S. Math. chap. 10, v. 8.
3 Genèse, chap. 6, v. rr.
HISTOIRE DES CROISADES: LIV. I. 23
LIVRE SECOND.
RS A RS A
LIVRE TROISIÈME.
LIVRE QUATRIÈME.
:
292 GUILTAUME DE TYR.
: Rien n’est plus incertain que la question de savoir quelle est la ri-
vière désignée sous le nom d’Ægyptus ;elle est déja mentionnée dans la
Genèse comme formant la limite méridionale de la terre promise. Dieu
dit à Abraham : « Je donnerai ce pays à votre race depuis le fleuve
« d'Égypte jusqu’au grand fleuve d’Euphrate. » (Gerèse, ch. 16, v. 18.)
La plupart des savans ont pensé que ce nom désignait le Nil; d’autres,
notamment Bachiène , dans sa Description historique et géographique
de la Palestine ancienne et moderne (tom. 1, part. 1, À 80), croient
qu’il s’agit d’une petite rivière qui se jette dans la mer près de la ville
de Rhinocolura, et qui portait le nom d'Ægyptus, parce qu’elle coule
en eflet sur la frontière d'Égypte. Cette dernière opinion paraît d’accord
avec le texte de Guillaume de Tyr, qui donne à l'Ægyptus le nom de
rivus, et le place non loin de Gaza.
HISTOIRE DES CROISADES ; LIV. V. 235
7
LIVRE CINQUIÈME.
l'un des chefs, plus grand et plus sage que les autres,
qui s'était toujours montré l'ami des Chrétiens, n'eût
obtenu , contre l’avis de plusieurs autres, que l'exé-
cution de ce projet fût remise de huit jours , 1l est hors
de doute que, dans le cours dela même nuit, toute la
multitude des fidèles eût succombé sous les coups
d'hommes armés de javelots, exécuteurs aveugles de
cet horrible décret. On avait cependant consenti à ce
délai de huit jours, pour voir si dans l'intervalle le
siége ne serait pas levé; l’on avait décidé que, si nos
armées persistaient dans leur entreprise, la résolution
arrêtée serait aussitôt mise à exécution, et que, dans
le cas contraire, on ferait grâce de la vie à tous ces
malheureux, déja condamnés. Le délai fatal devait
expirer cette nuit même, et les ordres avaient été déjà
donnés secrètement pour qu’on eût à exécuter la
sentence dans le coûrant de cette nuit, lorsque Boé-
mond et Émir-Feir convinrent d'accomplir en même
temps le projet qu'ils méditaient depuis long-temps,
et qui fut en effet exécuté, avec l’aide du Seigneur.
Il résulta de cette rencontre que lorsque nos troupes
commencèrent d'occuper la ville et d’y exciter quel-
que tumulte , les principaux habitans en eurent d’a-
bord moins d'inquiétude, et crurent dans le premier
moment que ce n'était rien autre chose que le mas-
sacre des Chrétiens, leurs concitoyens. Lorsqu'on
eut ainsi pénétré de vive force de tous les côtés de la
place, on trouva dans les maisons des fidèles un grand
nombre d’ennemis, qui s'y étaient rendus en secret
pour les massacrer à l’improviste, conformément aux
ordres qu'ils avaient recus.
Vers la neuvième heure du soir des hérauts furent
279 GUILLAUME DE TYR.
envoyés de toutes parts dans le camp des assiégeans,
pour donner l’ordre à toute la cavalerie de prendre
les armes et de se préparer à suivre les chefs, sans le
moindre retard. Le peuple ignorait complétement ce
mystère, qui même n'avait été révélé qu'à un petit
nombre des plus grands seigneurs. Tous les cavaliers
étant donc sortis du camp, en conformité des sages
avis d'Émir-Feir, et chacun suivant les bannières de son
prince, on feignit de partir pour une expédition,
afin d'attendre le moment où la nuit aurait étendu sur
la terre ses voiles épais, et à la faveur de l'obscurité,
on rentra alors au camp, dans le plus grand silence.
Émir-Feir, cet homme de Dieu, qui rendait en ce
moment un si important service à nos armées, avait
un frère utérin, dont les dispositions et les sentimens
étaient complétement différens : comme il ne comp-
tait nullement sur sa fidélité, il me lui avait point com-
muniqué son secret, et le tenant pour suspect, il
s'était constamment caché de lui, dans toutes les dé-
marches qu'il avait faites. Cemême jour , et tandis que
notre cavalerie sortait du camp, vers la neuvième
heure, les deux frères se promenaient ensemble sur
les remparts; ils regardaient dans notre camp, à
travers les ouvertures, et voyaient les mouvemens de
nos troupes qui se mettaient en marche pour sortir.
L’ainé desirait vivement connaître les pensées de son
frère cadet, et savoir quelles étaient ses dispositions
présentes. II lui adressa donc la parole en ces termes :
« Mon frère, j'ai vraiment compassion de ce peuple
« qui se montre fidèle à la croyance que nous profes-
« sons et pour qui l’on prépare à l’improviste une si
=< cruelle fin. Il ignore ce que le jour de demain lui ré-
HISTOIRE DES CROISADES; LIV. V. 279
« serve, il sort en toute confiance et semble ne rien
« craindre, comme si toutes choses étaient pour lui
« en sûreté. Certes, s'il savait les embüches qu’on lui
« tend et la ruine qui le menace de si près , il pren-
« drait sans doute d’autres précautions. » Son frère
lui répondit alors : « Votre sollicitude est insensée , et
« cette compassion que vous éprouvez est un senti-
« ment tout-à-fait aveugle. Plût à Dieu qu'ils eussent
« tous succombé déjà sous les glaives des Turcs! De-
« puis le jour qu'ils sont arrivés dans ce pays, notre
« condition n’a fait qu'empirer : il est presque im-
« possible qu'il nous arrive par eux autant de bien
« qu'il nous est déjà survenu de mal à leur occasion. »
A ces paroles, Émir-Feir qui avait déjà mis en question
sil ne communiquerait pas ses desseins à son frère,
s'éloigna de lui comme d’une peste, l'ame remplie
d'horreur et l’accablant d’exécration dans le fond de
son cœur; et bientôt, pour ne pas trouver en lui un
obstacle à l'œuvre qu'ilavait entreprise pour le Christ,
il songea aux moyens de lui donner la mort, préfé-
rant Je salut général des fidèles aux sentimens de la
fraternité,
Pendant ce temps Boémond , respirant à peine et
plein d'angoisse , de peur qu'au moment d'accomplir
ses projets, le moindre délai ne devint funeste à leur
exécution, visitait successivement tous les princes,
les invitait par les plus vives instances à se tenir tout
prêts, et lui-même portait à la main une échelle faite
avec art en corde de chanvre, dont l'extrémité infé-
rieure était garnie de crochets ferrés, tandis que la
partie supérieure devait être fortement attachée sur
les revêtemens des remparts. On était au milieu de la
2860 GUILLAUME DE TY£.
nuit ;un calme profond régnait dans la ville; les c1-
toyens puisaient de nouvelles forces dans le sommeil,
et y trouvaient un soulagement à leurs veilles et à leurs
longues fatigues. Boémond envoie alors à son ami un
fidèle interprète qui lui était entièrement dévoué,
avec ordre d'aller en toute hâte lui demander s’il veut
que son maître s’avance à la tête de sa troupe. Le mes-
sager arrive au pied des remparts, et trouve Émir-Feir
veillant , à l'abri d’une des ouvertures; il lui répète les
paroles de son seigneur , et l’autre lui répond aussitôt :
« Assieds-to1, et tais-to1, jusqu’à ce que le préposé
«aux veilles, qui s’'avance avec une escorte nom-
« breuseet des lampes éclatantes, ait passé au-delà
« de ce poste. » En effet, indépendamment des gar-
diens qui étaient chargés de veiller à la sûreté de
chaque tour,il y avait encore à Antioche un magistrat
supérieur, qui, trois ou quatre fois pendant la nuit,
faisait tout le tour des remparts avec une nombreuse
escorte , et précédé de torches ardentes, afin de ré-
primander ou de punir, selon qu'ils l’auraient mérité,
ceux qu'il rencontrerait succombant au sommeil ou
négligens dans leur service. Celui qui était chargé de
cette surveillance ayant passé à la tour d'Émir-Feir,
et l'ayant trouvé occupé à veiller, donna des éloges à
son activité, et poursuivit son chemin. Émir-Feir,
croyant alors que le moment favorable était arrivé,
appela l'interprète qui était au pied des remparts, et
lui dit : « Cours vite, et va dire à ton maître qu'il se
« hâte d'arriver avec une troupe d'hommes choisis. »
Le messager retourna aussitôt auprès de Boémond
qui était tout prêt:1l fitavertir tous les autres princes
qui avaient fait aussi leurs dispositions, et chacun se
HISTOIRE DES CROISADES; LIV. V. 281
AA A A A A A PS
LIVRE SIXIÈME.
a5
294 GUILLAUME DE TYR.
avec ardeur ; le peuple imprudent se précipitait dans
le plus grand désordre, son impatience même était
un obstacle à la retraite; ils s'empéchaient les uns
les autres de passer ;deux cents hommes environ fu-
rent misérablement perdus en cette occasion, les uns
étouffés dans la presse, d’autres blessés'et quelques-
uns faits prisonniers.
Cet échec de l’homme qu'on regardait comme le
principal chef des armées Chrétiennes redoubla l’ar-
deur des Tures: ils en vinrent bientôt à descendre par
la porte de la citadelle supérieure, et suivant ensuite
des chemins raccourcis, qu'eux seuls connaissaient ,
ils entrèrent dans la ville, tombèrent à l'improviste
sur nos soldats, et en tuèrent un assez grand nombre
qui périrent, sans même se défendre, sous leurs
flèches ou sous le glaive. Lorsque les nôtres se met-
taient à leur poursuite, ils remontaient aussitôt sur
la montagne et se retiraient dans la citadelle , en pre-
nant d’autres chemins que celui de la colline que
leurs troupes avaient occupée, et où elles avaient for-
üfié leur position. Comme ces incursions se renou-
velaient fréquemment, et faisaient périr beaucoup
de monde dans la ville même, les princes se rassem-
blèrent pour chercher les moyens de remédier à ce
mal. En vertu de la résolution arrêtée dans le con-
seil, Boémond et le comte de Toulouse firent creuser
un fossé extrêmement profond et d’une largeur pro-
portionnée, entre la partie supérieure de la ville et
le penchant de la montagne, afin d’opposer un obs-
tacle aux irruptions des Turcs, et d’assurer ainsi le
repos des habitans de la ville. Voulant encore ren-
forcer ce point de résistance, ils firent élever une re-
HISTOIRE DES CROISADES: LIV. VI. 209
doute en avant du fossé, et les légions y travaillèrent
avec autant d’ardeur que de dévouement, comme à
un ouvrage qui intéressait le salut de tous.
Les Turcs cependant, tant ceux qui occupaient la
citadelle que ceux qui étaient répandus tout autour
de la place, et qui allaient alors se réunir aux pre-
miers par la porte supérieure, continuaient à des-
cendre par des sentiers secrets, venaient livrer de
fréquens assauts devant la nouvelle redoute, et fai-
saient les plus grands efforts pour parvenir à la ren-
verser. Un jour un corps d’ennemis, plus nombreux
qu'à l'ordinaire, descendit également des lieux les
plus élevés de la montagne, et vint livrer sur le même
ouvrage une attaque si vigoureuse qu'il aurait in-
failliblement succombé si les princes chargés de la
défense de tous les autres postes, et le peuple dis-
persé dans les divers quartiers de la ville , ne fussent
arrivés en toute hâte. Boémond, Évrard de Puysaie,
Raoul de Fontenay, Reïbald Creton, Pierre, fils de
Gille, Albéric et Yvon, hommes vaillans et nobles,
qui s'étaient enfermés dans la redoute pour la dé-
fendre, se virent au moment d'être faits prisonniers :
mais le duc, le comte de Flandre, le prince de Nor-
mandie accoururent avec impétuosité, châtièrent l’in-
solence des Turcs, leur tuèrent un bon nombre
d'hommes , firent quelques prisonniers, chassèrent
tous les autres, non seulement des environs de la
redoute, mais encore de tous les quartiers de la ville,
les maltraitèrent beaucoup et les contraignirent enfin
à prendre la fuite en toute hâte : de retour auprès de
leur seigneur, les Turcs vantèrent la force de nos
troupes, et l'énergie admirable de leur courage; cou-
296 GUILLAUME DE TYR.
rage tel qu'en eux semblaient s’accomplir ces paroles
du prophète : « Votre pied sera teint dans le sang de
« vos ennemis, et la langue de vos chiens en sera
« aussi abreuvée * ; » et ceux-là même qui étaient les
persécuteurs du peuple fidèle, l'exaltaient par des
louanges infinies.
Après quatre journées de séjour dans les mon-
tagnes, Corbogath voyant qu'il ne pouvait réussir
dans ses projets, et que ses chevaux manquaient de
fourrage, fit lever de nouveau son camp, et se trans-
porta une seconde fois dans la plaine, avec toutes ses
légions. Il traversa le fleuve au gué inférieur, répartit
ses troupes à distances égales, disposa tous ses chefs
en cercle autour de la place et commença l’investisse-
ment. Le lendemain , quelques hommes de l’armée
turque se détachèrent de l’un des corps, et vinrent
provoquer les nôtres au combat ; ils descendirent
même de cheval et s’approchant des murailles pour
provoquer plus vivement nos soldats, ils se trouvè-
rent bientôt exposés aux plus grands dangers. Tan-
erède étant sorti par la porte de lorient, fondit sur
eux avec la plus grande impétuosité ; il en tua six,
avant qu'ils eussent pu avoir recours à l’agilité de
leurs chevaux, et mit tous les autres en fuite ; puis,
coupant la tête à ceux qui venaient de périr, il les
rapporta dans la ville pour donner quelque consola-
üon au peuple, plongé dans un sombre abattement,
depuis la mort de Roger de Barneville, qui était tombé
à peu près sur la même place.
Cependant le peuple Chrétien, qui quelques jours
auparavant assiégeait la ville, et s'en était enfin em-
1 Psaum. 67, v. 25.
HISTOIRE DES CROISADES; LIV. VI. 297
LIVRE SEPTIÈME.
20.
404 GUILLAUME DE TYR.
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LIVRE HUITIÈME.
DANS CE VOLUME.
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FIN DE LA TABLE.
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