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Texte 8 : E. Hirsch (ss la dir.

) Pandémie 2020 Ethique Société Politique, Editions du cerf,


2020

Enjeux éthiques liés à la pandémie


chez les malades porteurs de cancer

François Blot

Résumé, L'examen des enjeux éthiques riés à ra pandémie


chez res
'ttalades atteints de cance.r a fait émerger re conflit na à" io pri"*i-
':ence stratégique accordée à la prise en charge'd'une maladie grave
.'i contagieuse, mqis espérons-re temporaire, iur une pathorogie"chro-
tique, mais aussi les dilemmes liés à-la notion de « tri-» et la
rZsisiance
.'i des tentations uniquement utilitaristes, étrangères
à nos valeiis du
: r) ll1.

Je ne.dis point qu'il faut supprimer toute violence,


ce qut serait souhaitable, mais utopique.
Je dis qu'il faut refuser toute légitimàtion de la violence
ÿ,compris si cette légitimatioi lui vientl d,rn" ruison
d'Etat absolue.

A. Camus, Combat,lg49

En quelques sema^ines, la pandémie Covid_I9 s,est répandue


,::S le monde, indifférente aux frontières et aux constructions
- *,aines. chaque pays a lu déferler une vague qui a conduit
-:s les hôpitaux, les services d'urgence et de ré"anirnation,
parfois
.-,'qu'a! décès, plusieurs centaines de milliers de personnâr.
si t.
:.:s a fraqgé aveuglément des populations entières, il s,est
abattu
- :c plus d'agressivité encore sur les plus r,ulnérabies. parmi eux,
' ! Drrsolloos âgées et celles atteintes de maladies chroniques, dont
. --3I1C€T.
sans doute le fracas entre une maladie contagieuse brutale,
--e"'tant sur des temps courts un nombre élevé dJ personnes, et
-: maladie immémoriale comme le cancer est-il exemplaire de ce
- -.r s'est passé de façon plus générale. un sentiment territle
est venu
- - esprit de beaucoup d'entre nous, qui devions tout ensemble
-. :ndre soin des patients
.':-du infectés, faiie face au risque àe flu*
vers la
réanimation et à la permanence de la malàdie cancé-
-- -'se. immanente
épée de Damocrès: celui de ra «mise en.àr.rr-
96 I LA MÉDECINE, LE SOIN ET L'ACCOMPAGNEMENT

rence», de la confrontation des priorités, des choix inéluctables...


Comme si douleurs et souffrances devaient entrer, entre elles, en
compétition. La violence de la situation était bien 1à, pourtant,
injonctions et postures prenant souvent le pas sur la réflexion,
ffit-elle conduite dans l'urgence, autour des enjeux éthiques.
Alors il a fallu gérer cette violence et, sans être trop dupes, maintenir
à flot la barque des principes.

La vIoTBNCE coNDUrr-ELLE oBLTGAToTREMENT À »rs


CHOIX SACRIFICIELS ?

Passée la sidération première et l'adaptation en catastrophe à une


vague dont l'ampleur et la durée étaient inconnues, le temps est
venu des interrogations sur les sacrifices consentis pour endiguer
cette vague. Sacrifices sociétaux, restrictions de libertés imposées
plus que décidées en démocratie et, pour ce qui conceme les choix
de santé, mise entre parenthèses de nombreuses prises en charge, à
laquelle le cancer n'a pas échappé.
Car le Covid-l9 a conduit à relativiser, de façon plus ou moins
avouée et variable selon les endroits, d'autres urgences tout aussi
vitales (mais demeurées dans lo cône d'ombre des projecteurs)
comme le diagnostic ou le traitement du cancer. Ce ne fut d'ailleurs
pas l'apanage du cancer: maladies neurologiques, cardiaques, psy-
chiques, eurent droit à une même mise en coma artificiel... Les
chutes brutalçs de consultations pour AVC ou pour infarctus de
fevrier à awil çn attestent.
Et convenons-en, rien n'était alors plus normal que de porter
sinon toutes nos forces, du moins une large part, sur une déferlante
surgissant à vitesse exponentielle: face à une situation de cata-
strophe sanitaire, des moyens considérables durent être déployés.
Le 12 décembre 1969, soir de l'attentat de la Piazza Fontana à
Milan, l'oncle d'une amie est décédé d'une crise cardiaque à
laquelle il eût vraisemblablement survécu, dans l'attente d'une
ambulance qui n'arriva jamais: toutes convergeaient vers le lieu
de l'attentat...
Mais ce qui était recevable au plus fort de la montée épidémique
ne justiflait pas que l'on négligeât pour autant, dès le début et surtout
ensuite, 1' existence d' autres maladies qui, elles, ne proclamaient pas
un cessez-le-feu amiable... Or, ni au début ni les semaines passant,
les instances nationales ne s'organisèrent pour préserver une per-
lnanerrce de soins extra-Covid, et si elles le flrent, ce fut avec une
1
ENJEUx Érurquns rÉs À r,e pewpÉtr,tts I sz
discrétion forçant incontestablement le respect. Et pour cause: le
pouvoir se retrancha derrière l'expertise scientifrque (majoritaire-
ment infectiologues et épidémiologistes), se dédouanant d'une waie
réflexion systémique sur uoe veille sanitaire digne de ce nom et
soucieuse de toutes les souffrances. La fibre démocratique disparut
de I'ADN politique, et ni les prises de décision, ni au moins leurs
chemins décisionnels ne ârent l'objet de transparence. Ne parlons
pas des conséquences plus larges d'une statégie focalisée $Ir un
ennemi unique et source de tous nos maux, le coronavirus: autres
malades chroniques, personnos en précarité psychique ou sociaie,
etc.
Était-il plus digne de s'occuper en quasi-exclusivité de la pan-
démie, au risque de minimiser au nom de l'intérêt géneral d'autres
confrontations à la souffrance, aux peurs et à la mort ? Face à
l'absence du politique, les professionnels ont revu en urgence
leur organisation, et l'essentiel a été fait pour anticiper et limiter
les choix sacrificiels. Ce fut le cas dans les centres de lutte conte le
cancer. Dès le début de l'épidémie, une double contrainte s'imposa :
d'une part protéger les malades, immunodéprimés et fragilisés, du
risque d'infection, tout en prenant soin des «patients Covid»;
d'autre part réorganiser l'offre de soin de cancérologie afin de
limiter les reports de prise en charge. Ainsi, les comités ont-ils,
«organe par organe», opéré une hiérarchisation selon les urgences
de traitement, maintenant certains d'entre eux, en organisant d'au-
tres dans des centres partenaires, ou proposant des alternatives
thérapeutiques évitant la venue à l'hôpital, lorsqu'elles étaient pos-
sibles. Au plus fort de l'affiux de patients, une activité démultipliée
de télécousultation et de présence téléphonique 1 a maintenu un
niveau minimal d'activité et de lien avec les malades.
Pour autant, la question plus générale de l'équité d'accès aux
soins demeure. Nul ne peut nier la contrainte exercée sur un système
non extensible à l'inûni et dont le dimensionnement fait déjà l'objet
d'utre analyse a posteriori. Dans certains hôpitaux, la présence d'un
cancor est entrée dans les causes de non-admission en réanimation,
sans peut-être mesurer avec une rruance suffisante l'importante
hétérogénéité des pronostics. La hiérarchisation de la prise en
charge oncologique selon un niveau d'urgence estimé a pu conduire
à différer certains traitements, ou à la proposition de traitements

1. F. Scorrs, E. MINvTELLE, O. Mtp. et al., « A patient reported outcome


piatform, a useful tool to improve monitoring and effective management of
Covid-19-positive patients with cancer», Eur. J. Cancer, n" 132, 2020, p. l-4.
LA MÉDECINE, LE SOIN ET L'ACCOMPAGNE\1E\T

sous-optimaux 1. La venue aux urgences et à l'hôpital a été réduite


par les patients eux-mêmes, soucieux d'éviter le risque de conta-
mination et soumis à la double injonction de continuer à se soigner
tout en respectant le confinement; dans de nombreux cas, la crainte
du Covid-l9 a dépassé, de façon irrationnelle, celle d'un cancer
évolutifbien présent. . . Quant au primo-diagnostic, les témoignages
affluent de patients ayant d'abord reculé une demande de consulta-
tion ou la venue en cabinet de radiologie, de peur d'engorger un
système saturé, puis trouvant porte close lorsqu'il s'agissait de
réaliser les premiers oxamens... La crainte d'un rebond de la
crise sanitaire, sous une autre forme, est donc réelle.
C'est ici la question plus générale de la démocratie en santé, de la
démocratie tout court, qui estposée. Au-delà des mesures prises, ou
non, pour préserver l'équité d'accès aux soins, n'est-ce pas surtout
la question de la ffansparence et du dialogue avec la société qui est
soulevée ? En France, une association de patients a saisi le Conseil
d'Étatpour « inégalité d'accès aux soins hôspitaliers », estimant que
des critères transparents devaient être appliqués dans le choix
d'hospitaliser, ou non, les malades du Covid-l9, mais aussi quant
à l'accès au 15 et à I'hôpital, la gestion des soins palliatifs ou encore
les conditions de décès. La question de l'accès aux soins critiques,
largement citée dans la presse sous le terme terrible de « tri >>,
intervient ici.

AccÈs AUx sorNs cRrrreuEs: coMMENT coNTTNUER


À pnTvnÉGIER L,INDIVIDUALISATIoN DES DÉCISIoNS PACE
À ra pRBssroN urrLrrARISTE ? UNr rENSroN coNSTANTE

Autre dilemme propice aux choix sacrificiels - et certains soi-


gnants, en situation de tension extrême, ne purent y échapper
-:
l'accès aux soins critiques. Après la Chine et l'Italie, la France dut
faire face à la crainte de manque de lits, de ventilateurs,-bientôt de
médicaments et de personnels. Ainsi, la prise en charge des patients
de cancérologie a-t-elle été confrontée à un double défi: à lréchelle
individuelle, la mise en perspective du pronostic d'une pneumonie,
souvent fatale en cas de recours à la réanimation, avec celui, non
moins aléatoire, de la maladie cancéreuse; les principes éthiques de
bienfaisance, de non-malfaisance et d' autonomie apparaissaiènt, ic i,

1. K. IIrruoNEN, << The views of patients and the public shourd be included in
policy responses to Covid-l9 », 30 marc 2020, www.blogs.bmj.com.

."--,_
,
ENJEUX Érurquns rrÉs À ra pexpÉrrarc I ss

au premier plan 1 ; à une échelle plus collective, la repartition équi-


table de l'accès aux soins en contexte de tension, prenant en compte
des facteurs tels que l'âge ou, ici, le cancer; c,est, pour ce second
point, le principe de justice, au sens « distributif», qui est en jeu.
Nous verrons en fln de discussion l'apport d'une veille éthique
structurée pour pallier le risque d'isolèment des praticiens dâns
des décisions où la collégialité etait plus que jamais essentielle.
Les recommandations, nationales ou rêgionales, en population
générale ou pour des situations spécifiques comme les soins criti-
ques ou la cancérologie, ont eu pour fll rouge la mise en exergue du
principe de justice distributive2. Dans un monde plus que jamais
contraint, l'épidémie Covid-l9 a rebattu les cartes, et l,enjeu
d'équité de l'accès aux soins fut placé au premier plan.
Pour autant, même en situation aiguë d'exigence collective de
solidarité, les équipes de réanimation dans leur majorité ont toujours
considéré que les piliers éthiques de respect de la dignité et d,au-
tonomie restaient centraux, et s'appliquaient à toute personne
malade. Il ne s'agit pas 1à d'une simple déclaration de (bonnes)
intentions: même au plus fort de la vague épidémique et selon les
premiers retours d'expérience d'un certain nombre de structures
régionales, la menace d'un << triage » a conduit à transférer des
malades, parfois d'une région à une arltre, à pousser les murs
(notre réanimation est passée de douze à vingt-hüt lits en trois
jours), afln que chaque cas soit examiné en collégialité, à l,aune
prééminente du bénéfrce individuel. Si, dans les pays anglo-saxons,
la conception utilitariste est un étroit Rubicon aisément franchi au
motif du bénéflce du plus grand nombre - et l'épidémie Covid a
fourni de parfaits exemples de pragmatisme fondé sur l'argorithme 3
-, nos réanimateurs ont su privilégier l'approche « déontologiste »
chère à notre culture du soin. L'exigence de justice a été considérée

1,I !. Bpaucualrp, J. F. CHtroRrss, Zes principes de l'éthique bioméclicale


(19"19), Paris, Les Beiles Lenres, 2008.
2. CourrÉ coNSULrArrF NATToNAL o'ÉlHrgur, «Covid-19. Enjeux éthiques
face à une pandémie », 13 mars 2020, www.ccne-ethique.fr; REA-ARS-COÿD,
«
\egogmlndations régionales covlD-19. Décision à'admission des parienrs en
unités de réanimation et unités de soins critiques dans un contexte d'èpidémie à
Covid-19», 17 mars 2020, www.ilede&ance.ars.sante.fr ; CorrlrrÉ É.r.urqur
qFAR, «A propos des décisions médicales d'admission des patients en unité
de soins critiques en contexte pandémique : quelques repères éthiques »»,26 mars
2020.
J. D. B wurrr, B. Lo, « A framework for rationing ventilators and critical care
beds during the COVID-l9 pandemic >», JAMA, 21 mars 2020, d,oi: 10.1001/
jama.2020.5046.
lOO I LA MÉDECINE, LE SOIN ET L'ACCOMPAGNEMENT

cofllme « source inspiratrice des trois


comme un principe supprémentatre, lutres principes, fet non]
isoiée.du respect-de r'âütonomie, àâ'u 1...1 une ri".-.'*erieure et
bi.rrruisance et de la non_
malfaisance 1 ». Mais. ne pas réduire
la justice à << sa sig,ification
colrective er économique» résisàit-ii
a'r, iààriijiir."Lpidémie
f
déferlant sur la viile Était_ce
i;*" ;;
qu,ont seuls pu s,offrir
certains centres, un remgs épargnés par
taïugr" ààî Jàoeu" z
sans doute. Mais ce sont auisi rés.Ër*".
colrectivement mises en
æuvre, la réflexion co[égiale et anticipée,
veille éthique constantJ-qui ont già"ti l"
.t ru *ir"ï";i;".
d,une
fondamenraux du soin, ffit-ce ,u p".i*l.
,.rpË.1-à.i'!.io.ip..
tàr.làï. .àÀiààur"..
O.n ne saurait pour attantprétendre
que vague epidJÀque n,a
en rien affecté les critères- de réanimation. Ja
semaines, les données disponibl.r
îio. t*. ïîemières
ont montré tu gruuit{àlevée et
l'évolution prolongée et erratique-de ilaueint.
survivants étaient prus. souvert;"*L.,
coîiJ. ils'patients
sans ((comorbidité>>, en
bonne condition physique, ,u"J-*r"rsité d,intubation. Sur la
base de ces çonstatr, f., ,urr.tÈ.i.irqrres
du cancer durent être
mises en_perspective avec t, g*"iiê
durées prévisibres de réanimatioi
a. ia i;;;;;, et tes
àe réhabilitation: outre l,état
général et la présence de. p-athologies"t associées,
cancer et, surtout, la possibilité
l" prà"""ic du
ou non d'en suspenari^t anritolr"-
ment le traitement esfdevenue fondamentale
dans ra décision
- ----J d,en_
treprendre une réanimation longue
et complexe.
Mais plus que tout, r'érément essentier
, de ce chemin décisionnel
a été t'absence de critère necessaire
par exemple, bien q". aot *uinant
ei*ffiil;i;;Ëiü; isorée.
!'â9", dans ra capacité d,une
personne à supporter un traitement
lourd de ,err*rti"i,-";â:r.ri,
été considéré décisifpar lui-même.
remplacer le recueil d'éléments individuels,
À;;"
score combiné n,est venu
centré sur re bénéfice
escompté de la prise en soin, dans le
respect d. u uotonæ àuLua",
la préservation de son confort,
er,ât rant toute notion d,« utilité
sociale >>. "t "n

UNs vurxÉnen'rrÉ supprÉunNTArRE : L,TsoLEMENT

Le conflit entre exigences, collective sanitaire et indivi-


duelle d'humanité, s,feux
est incrrie :"rqr. àurs t, lrot.mrrt
patients. Les malades d'oncoro"gi";;; i_pore urr^
res conditions de visite

1 P' LE coz, petit traité (te ra tlécision médicare,paris, Éd. du seu,, 2007,p. 50.
ENJEUX Érutques lrÉs À le peN»ÉutB I tot

par le Covid-
restreintes de façon drastique. Les personnes atteintes
ren-
19 ont été touchées plus ôo"ore, du fait des mesures barrière
forcées jusque dans le quotidien du soin'
pour autant, en écho à résilience des malades face aux
1a
exigences sanitaires, les soignants ont partout rivalisé d'imagina-
En
tioi et d'initiatives pour réàuire au minimum cet isolement. jamais
cancérologie, l,enseinble des soignants, accoutumé mais
la
habitué à Ia vulnérabilité des malades, a partagé dans sa chair
frustration de ne pouvoir <<être aux petits soins»' Ainsi' les
équipes se sont oiganisées pour faciliter les échanges visuels
les
entrË patients et priches grâie aux tablettes présentes..dans
chamfres, mettre èn place des rendez-vous utilisant les téléphones
des patients ou ceux des soignants eux-mêmes, répondre
autant
q.r" à" b".oin aux appels des proches. Pour les palents en situation
f inhumanité affieu-
ôu"" ou paliiative, â fortiori en cas de décès,d'un
rant en peflnanence a exigé la défrnition compromis en
constantô tension entre exfuence sanitaire et humanité du soin.
L,interrogation ne sera jamàis levée de la pertinence réelle d'un
,igorir*Jfr,giéniste polssé à l'extrême face aux séquelles colla-
terales de la privation de deuils dignes" '

RBTOUN SUR LA MISE EN PLACE D,UNE CELLULE


DE SOUTIEN Érulqun

Bienqu,anticipés,lesbouleversementsorganisationnelsont
touché dei secteuri entiers de l'hôpital: report d'activités, réorien-
tation de services vers l'accueil âe patients Covid, capacités de
réanimation multipliées... Des anesthésistes ont quitté les blocs
opératoires pour rênforcer l'équipe de réanimation, des unités
de
orit accueilli des patiants <<médicaux>>, des situations
"iir*gl"
palliatïes. Face à ces mutations, à la violence inhérente aux
àé.irioo, de transfert (ou non...) en secteur intensif, enfin au
per-
spectre de la pénurie de lits ou de médicaments, un soutien
des dilemmes éthi-
mettant l'écoute des équipes et la discussion
qrr"s s,"st avéré essentiel^à la survie de chacun et au respect des
fondamentaux du soin. Émanation du Comité d'éthique créé
en
2o!2t, une cellule opérationnelle de crise a été uéée, coÛlme
un c-entre de lutte
1. F. Bror et al., <<Quelle place pour un comité d'éthiquedans
conffe 1e çancer'/ po"ii". etËique incarnée >>, Bull Cancer' no 106' 2019'
p.1144-1151.
102 I LA MEDECINE, LE SOIN ET L'ACCOMPAGNEMENT

proposé par Io Comité consultatif national d'éthiquel. Douze


mernbres du bureau du Comité d'éthique se sont déployés dès
les premiers cas de Covid dans plusieurs instances de l'hôpital:
réunions quotidiennes avec les soignants (deux à trois membres du
Comité renforçaient le cercle de discussion, en plus des palliato-
logue, psychiatre et réanimateur déjà présents), RCP Covid faisant
émerger des dilemmes éthiques autour de l'engagement thérapeu-
tique... Enfin, les procédures de saisines enurgence, déjà enplace,
ont été étendues sur la base d'une astreinte 24 heures sur 24, sept
jours sur sept; chaque saisine (le plus souvent autour d'une déci-
sion de réanimation) faisait l'objet du déplacement de deux à trois
membres du comité eÿou de l'organisation (notamment en garde)
d'une conference téléphonique.
Les interventions de la cellule éthique ont tenté d'apporter la
collégialité nécessaire à des prises de décision aussi apaisées que
possible en temps de crise, quel que soit le degré d'urgence, per-
mettant de rappeler le nécessaire respect, pour chaque patient, de
son autonomie, des principes de dignité de lapersonne, et de devoir
d'inforrnation et de communication avec patient et proches. La
philosophie de cette cellule éthique a toujours été de se proposer
en soutien des équipes, et ûon de se substifuer aux processus
décisionnels en place. C'est bien un éclairage, sur demande des
praticiens, qui a été offert, et non une injonction morale sur ce qu'il
y avart lieu de faire ou non.
*

Le Covid-19 a été un révélateur puissant des rapports de notre


société à la médecine. Devenue un bien suprême, la santé promue au
rang de valeur a dépassé celles de justice ou de liberté. Une seule
pathologie, certes grave, a occulté pour un temps d'autres maladies
et révélé d'immsn5ss vulnérabilités. Le rapport de la société à la
recherche et à la science ne fut pas 1e moindre des enjeux mis à
mal... Face à ce tsunami submergeant nos valeurs, il resta néan-
moins possible aux hommes de bonne volonté de défendre les plus
précieux de nos principes éthiques.

l. CorrrnÉ coNsuLrArrF NATToNAL o'ÉTnrqun, «Covid-i9. Contribution du


Comité consultatif national d'éthique: enjeux éthiques face à une pandémie>>,
13 mars 2020, www.ccne-ethique.fr.
ENJEUx ÉrnrQuBs LtÉs À l'q'
peNoÉt'tm I lor

de notre Comité
Un rernerciement tout spécial aux membres
au plus fort de 1'épi-
d'éthique qui assurèrent unà veille constante
André Rieutord'
ieriË=ôrrî""t",r*;;-Viu"t, Nellv verottef Sarah Dumont' Anne
ir;1éti"'irpiene, NaÏttralie no*rnier-Bidoz'
De Jesus, Sarah prî"fw,-flot""t Cq*{onne! .C'p":T"^qui laldini'
n'oot
A;; Àii"a), ainsi-q";i'to"t"s les équipes soignantes
valeursacrée du prendre soin'
;il;.,1;;, p*ror, ât vue la
FRaNÇors Blor
Médecin réanimateur'
orésident du Comité d'éthique,
institut Gustave Roussy, Villeiuif'

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