Lèyîz-m' plorer
Lèyîz-m' plorer est une complainte en langue wallonne écrite par Nicolas Defrêcheux en 1854, sur une mélodie d'Hippolyte Monpou.
Composition
[modifier | modifier le code]La chanson est composée en wallon de Liège, sur l'air de Gastibelza, l'homme à la carabine d'Hippolyte Monpou. D'abord publiée par le Journal de Liège dans son numéro du 23 juin 1854, elle obtient un succès immédiat. Entre 1854 et 1856, il s'écoula à Liège six tirages de 2 000 exemplaires d'un tiré à part[1].
Interprétations
[modifier | modifier le code]Lèyîz-m' plorer est la seule chanson en wallon interprétée par Édith Piaf, qui la qualifiée de « meilleure chanson qui ait jamais été écrite »[2].
Elle figure également sur les disques suivants :
- Gaston Bégon, Leyiz M'Plorez / Li P'Tit Banc / Mame ! / Vinez Wezene, Pathé
- Tohama, Leyiz M'Plorer / Li P'Tit Banc, 1968
- Emile Lambert, Les Pu spitants bokets d'Emile Lambert po l' millénaire di Lidge, Duchesne, 1980
- Chansons wallonnes, Blawete Records, 1996
- Jules Bastin, Airs folkloriques wallons, 1997
- Solia, Tous les parfums, 2021
Édition des paroles
[modifier | modifier le code]Les paroles de Lèyîz-m' plorer ont été reproduites et diffusées dans les recueils et anthologies suivants :
- Novel Pasqueys, Liège, [1854], pp. 1-2.
- Nicolas Defrêcheux, Œuvres poétiques wallonnes complètes, Liège, J. Gothier, 1877.
- Nicolas Defrêcheux, Ses Œuvres, Liège, A. Bénard, 1895.
- Nicolas Defrêcheux, Œuvres complètes (édition du Centenaire), Liège, 1925, pp. 27-28.
- Maurice Piron, Anthologie de la littérature dialectale de Wallonie, Liège, Mardaga, , 661 p. (ISBN 2-87009-556-2), p. 190-191.
- Nicolas Defrêcheux, Lèyîz nos-åmes bin tchôdes (wa), Bruxelles, éd. Fédération Wallonie-Bruxelles, Service général des Lettres et du Livre, coll. « Fureur de Lire », 2024, p. 17-18 (ISBN 978-2-39074-007-0).
Postérité
[modifier | modifier le code]Le responsable du Fonds Dialectal wallon du Musée de la Vie wallonne, Baptiste Frankinet, qualifie la composition de Lèyîz-m' plorer de « coup de tonnerre » : « pour la première fois, la langue wallonne n'est plus le véhicule d'anecdotes, de satires ou d'événements historiques, mais bien le véhicule de sentiments[3]. » Ce style est rapidement imité par d'autres auteurs, qui vont ainsi explorer les veines du lyrisme et du sentimentalisme. La mode est telle qu'elle suscite aussi des œuvres maladroites, que la critique classe sous le terme de lèyîz-m’ plorisme[4].
Le succès de Lèyîz-m' plorer a par ailleurs participé à l'émulation de laquelle est née la Société liégeoise de littérature wallonne[3],[5].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Maurice Piron, Anthologie de la littérature dialectale de Wallonie, Liège, Mardaga, , 661 p. (ISBN 2-87009-556-2), p. 189.
- Entretien dans Le Soir du 30 novembre 1962, cité dans Michel Francard, Wallon, picard, gaumais, champenois : Les langues régionales de la Wallonie, Bruxelles, De Boeck, , 213 p. (ISBN 978-2-8011-1736-1), p. 97 : « Quelle est la meilleure chanson qui ait jamais été écrite ? Quelques secondes de réflexion. Puis, les yeux au plafond : « À mon avis, c'est “Lèyi m' plorer”, chanson liégeoise qui, m'a-t-on dit, appartient au folklore et qui est un monument. Je l'ai chantée déjà, mais j'ai eu des difficultés pour la traduire. C'est tellement parfait d'ailleurs que c'est pratiquement intraduisible… Mais une chose est certaine, je vais la remettre à mon répertoire… C'est trop beau ! »
- Musée de la Vie wallonne, Qué novèle ? : Apprendre le wallon liégeois, t. 2 : Histoire et culture de la langue wallonne, Liège, Les éditions de la province de Liège, , 64 p. (ISBN 9782390102236), p. 48.
- Baptiste Frankinet, « Panorama de la littérature en langues régionales romanes de Wallonie », sur le portail Objectif plumes (page consultée le 29 octobre 2024) : « À l’imitation de Defrecheux, de nombreux auteurs se glissent dans le sentimentalisme, parfois avec succès, comme chez Joseph Vrindts ou Émile Wiket. Malheureusement, c’est souvent la face un peu larmoyante et plaintive de ce poème de Defrecheux qui inspire et beaucoup d’auteurs versent dans l’excès, créant un style que Maurice Piron nomme le lèyîz-m’ plorisme. »
- Martine Willems, « La langue et la littérature wallonnes des origines à nos jours », dans Bruno Demoulin (dir.), Histoire culturelle de la Wallonie, Bruxelles, Fonds Mercator, , p. 151 : « Mais c’est Nicolas Defrecheux qui porte le wallon à l’expression lyrique la plus délicate, quand est publiée en 1854 la chanson Lèyîz-m’ plorer (« Laissez-moi pleurer »), complainte d’un jeune homme qui dit son désespoir après la mort de celle qu’il aimait. Le succès populaire est fulgurant à travers toute la Wallonie. […] C’est à la suite de ce succès que fut créée la Société liégeoise de Littérature wallonne. »