leurs eſchappe, depuis qu’vne fois l’ont mis entre leurs ſerres. Et ſe couurent les teſtes aucunefois de bonnets à quattre gouttieres, ou braguettes : autres de bonnets à reuers[1], autres de mortiers, autres de caparaſſons mortifiez. Entrans en leur tapinaudiere nous diſt vn gueux de l’hoſtiere, auquel auons donné demy teſton : gens de bien Dieu vous doint de leans bien toſt en ſanté[2] ſortir : conſiderez bien le minois de ces vaillans pilliers, arboutans de iuſtice Grippeminaudiere. Et notez que ſi viuez encore ſix Olympiades & l’aage de deux chiens, vous verrez ces Chats-fourrez ſeigneurs de toute l’Europe & poſſeſſeurs pacifiques de tout le bien & dommaine qui eſt en icelle, ſi en leurs hoirs, par diuine punition, ſoubdain ne deporiſſoit le bien & reuenu par eux iniuſtement acquis : tenez-le d’vn gueux de bien[3]. Parmy eux regne la ſexte eſſence[4], moyennent laquelle ils grippent tout, deuorent tout, & conchient tout : ils brullent, eſclattent, decapitent, meurdriſſent, empriſonnent, ruinent & minent tout ſans diſcretion de bien & de mal. Car parmy eux vice eſt vertu appellee : meſchanceté eſt bonté ſurnommee : trahiſon a nom de feauté : larrecin eſt dict liberalité : pillerie eſt leur deuiſe, & par eux faicte, eſt trouuee bonne de tous humains, exceptez moy les heretiques, & le tout font auec ſouueraine & irrefragable authorité. Pour ſigne de mon pronoſtic aduiſerez que leans ſont les mangeoires au deſſus des raſteliers. De ce quelque iour vous ſouuienne. Et ſi iamais peſtes au monde, famine, ou guerres, vorages, catectiſmes, conflagrations, mal’heur aduiennent, ne les attribuez, ne les referez aux coniunctions des planettes malefiques, aux abus de la cour Romaine, ou tyrannie des Roys & Princes terriens, à l’impoſture
- ↑ Bonnets à reuers. Ms. : Bonnetz à treſues de cul.
- ↑ Santé. Ms. : Saulueté.
- ↑ Et bien. Lisez : de bien.
- ↑ Sexte eſſence. « Les chimistes jusqu’au temps de Rabelais n’avaient analysé la matière que jusqu’à la cinquième essence. Rabelais en imagine une sixième annexée aux gens de palais, et qui consiste à gripper, dévorer, etc. » (De Marsy)