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Filire sciences de la terre et de lunivers (STU) Facult des Sciences de Rabat Semestre 3 Module M 12 tectonique

COURS DE TECTONIQUE ANALYTIQUE 2me partie LES DEFORMATIONS DUCTILES (Christian Hoepffner)

Pli anticlinal. Ordovicien de lAnti-Atlas (Foum Icht)

2 Avertissement Le texte qui suit est destin aux tudiants qui suivent le module M12. Il doit leur permettre de complter leurs notes. Il ne remplace videmment pas la prsence au cours. En particulier, les planches de figures ne sont pas reproduites, ni commentes ici.

Lectures conseilles : TECTONIQUE ; Mercier et Vergely. Editions Dunod, 1999 LES STRUCTURES TECTONIQUES. Gidon. Editions du BRGM, 1987 PRINCIPES DE TECTONIQUE ; Nicolas. Editions Masson, 1984 DEFORMATIONS DES MATERIAUX DE L ECORCE TERRESTRE, Mattauer, Editions Hermann, 1973. Sites Web consulter :

http://jfmoyen.free.fr/spip.php?article290 Cours en ligne, trs complet avec diaporamas.

INTRODUCTION
La tectonique est ltude de la dformation des roches qui constituent lcorce terrestre. Les roches dformes sont organises en structures (les plis, les failles, sont des structures tectoniques). La tectonique est aussi appele gologie structurale. Rappels Les gologues ont lhabitude de distinguer les dformations cassantes ou fragiles (failles) et les dformations souples ou ductiles (plis). Ces deux catgories de dformations ou de comportement des roches dpendent principalement des conditions physiques (temprature et pression) qui sexercent pendant la dformation. Elles dpendent aussi de la nature ptrographique, on distingue ainsi des roches comptentes et incomptentes. Les donnes de tectonique exprimentale (la mcanique des roches) expliquent bien ces diffrences de comportement. Les courbes contrainte/dformation (Fig. 1) montrent que laugmentation de la temprature et de la pression de confinement (donc de la profondeur dans lcorce) favorise la dformation ductile (le comportement plastique) et retarde la rupture. Les dformations sobservent principalement dans les chanes de montagnes, parties les plus dformes de lcorce terrestre situes dans les zones de convergence des plaques lithosphriques. La rpartition verticale des dformations correspond la notion de niveau structural (Fig.2). Dans la coupe thorique dune chane de montagne les failles apparaissent dans le niveau structural suprieur, la dformation se concentre le long de discontinuits. En rponse aux contraintes, lcorce a un comportement plutt cassant. En profondeur, les failles disparaissent progressivement, la dformation est continue ou ductile. Elle sexprime dabord par des plis dans le niveau structural moyen puis par un aplatissement de la roche qui acquiert une structure planaire : la schistosit et la foliation qui caractrisent le niveau structural infrieur. Objet du cours Les roches sont dformes depuis lchelle du minral (mm, ) jusqu celle du continent (nxkm), ces structures ncessitent lutilisation de moyens dobservation, microscope, cartes gologiques, photos ariennes, images satellitaires. Dans ce cours on sintressera aux structures ductiles directement observables lil nu par le gologue cest dire des structures de taille moyenne (mso structures) depuis lchantillon (cm) jusquau paysage (km) en passant par laffleurement (m, hm). Problmatique Une structure tectonique correspond une dformation finie. Lobjectif du gologue est de comprendre comment elle sest forme. Un travail danalyse et dinterprtation

4 doit permettre de proposer un modle possible expliquant le passage de ltat initial (non dform) ltat final (dformation actuellement observable). Mthodes Le but de cet enseignement est lacquisition de mthodes dtude des dformations (plus prcisment ici des dformations ductiles). Matrise des outils danalyse et de description. Cette analyse est surtout gomtrique, elle ncessite la matrise dune terminologie (pour la description) et des techniques de reprage et dorientation dans lespace (pour aboutir une image 3D des structures). Cest la tectonique analytique ou lanalyse structurale. Interprtation. Linterprtation des structures analyses consiste rechercher la direction des forces ou des contraintes - (dynamique), les conditions T et P, les mcanismes de dformation, la chronologie des dformations ou les diffrentes tapes de la dformation (cinmatique).

Linterprtation suppose la connaissance de donnes thoriques sur la dformation qui feront lobjet de la premire partie de ce cours.

1 LES

DONNEES THEORIQUES NECESSAIRES A LETUDE DE LA DEFORMATION DUCTILE.

1.1 Notion de dformation (Fig. 3) La dformation est la rponse des roches soumises des forces. Une dformation peut se dcomposer en : Translation Rotation Distorsion La distorsion (strain) ou changement de forme est le composant qui intresse le plus le gologue, cest la dformation proprement dite. Elle peut tre discontinue ou continue (cassante ou ductile), homogne ou htrogne (Fig. 4). La distinction entre ces diffrents types de distorsion est relative, elle dpend de la taille des structures que lon observe (chelle dobservation).

5 1.2 Mesure, quantification de la dformation. Quantifier une dformation revient comparer ltat initial (avant dformation) ltat final (dform). Deux paramtres sont gnralement pris en compte. La variation de longueur ou extension (ou longation): = l1 l0 / l0 La dformation angulaire ou cisaillement . Cest langle que font deux droites initialement orthogonales. Le cisaillement est donn par la formule = tan 1.3 Lellipsode de dformation La dformation homogne dun objet initial circulaire (2D) ou sphrique (3D) donne une ellipse ou un ellipsode. Dans ltat dform on dfinit une direction dallongement X (grand axe de lellipsode), une direction de raccourcissement Z (petit axe de lellipsode), une direction intermdiaire Y, selon laquelle il peut y avoir allongement, raccourcissement, pas de dformation. Ces trois axes perpendiculaires entre eux dfinissent lellipsode de dformation. Les deux types de dformation homogne (Fig. 5) Deux processus peuvent tre envisags pour dformer un objet dont la forme initiale est simple : une sphre ou un cube. Dformation coaxiale (cisaillement pur, pure shear). Au cours de la dformation progressive les axes X Y Z gardent la mme orientation. Lobjet est cras . Dformation rotationnelle (cisaillement simple, simple shear). Les axes X et Z changent dorientation, ils subissent une rotation progressive. Lobjet est cisaill . Classification des ellipsodes de dformation. La dtermination de lellipsode (mesure et orientation) est un des objectifs de lanalyse structurale. Il faut disposer dobjets dforms dont on connat la forme initiale : galets, fossiles, grains dtritiques, etcOn mesure les rapports axiaux de lellipsode X/Y et Y/Z et on les reporte dans le diagramme de Flinn. Le calcul du paramtre de forme K = X/Y 1/Y/Z 1 caractrise trois grands types de dformations reprsents par les trois domaines du diagramme : aplatissement (flattening), constriction (constriction), dformation plane (plane strain) (Fig.6). On dfinit donc deux grands types de roches dformes de faon ductile : les roches surtout tires ou allonges : tectonites L et les roches surtout aplaties : tectonites S et la combinaison des 2 types de structures : tectonites L+S.

2 LES MARQUEURS DE LA DEFORMATION DUCTILE.

2.1 Les marqueurs de laplatissement : schistosit et foliation. La schistosit (cleavage) est une structure planaire dorigine tectonique. Elle exprime laplatissement de la roche qui se dbite en feuillets parallles dont lorientation est gnralement diffrente du litage initial comme la stratification. Selon lintensit de la dformation on distingue plusieurs types de schistosits reconnaissables lil nu sur laffleurement et lchantillon mais surtout au microscope (Fig.7). La schistosit espace (spaced cleavage) ou schistosit de fracture. Les surfaces de schistosit sont irrgulires, espaces de quelques mm voire quelques cm. Deux plans S sparent une zone nomme microliton o la roche nest pas (ou trs peu) dforme. La schistosit de crnulation est une schistosit espace, lintrieur des microlitons le litage est dform en microplis. La schistosit continue (continous cleavage, slaty cleavage) ou schistosit de flux ou encore schistosit ardoisire. Les surfaces de schistosit sont rgulires, lespace entre deux plans est infrieur au mm et nest en gnral plus visible lil nu, il correspond la taille moyenne des grains constituant la roche (quelques ). La schistosit de flux apparat avec le mtamorphisme. La foliation (shistosity, foliation) est une schistosit continue, les feuillets ont une composition minralogique diffrente, les minraux mtamorphiques sont visibles lil nu, la roche est rubane. La schistosit permet de connatre la position du plan daplatissement : dfini par les axes X et Y de lellipsode. Cest donc un marqueur important dans lanalyse de la dformation ductile. 2.2 Les marqueurs de lallongement : linations. Les linations sont des structures linaires imprimes dans la roche, surtout visibles lchelle de laffleurement et de lchantillon (Fig.8). La lination dintersection rsulte de lintersection de deux surfaces, en gnral la stratification S0 et la schistosit S1. La lination de microplissement correspond aux axes de microplis dformant une surface de stratification ou le plus souvent une schistosit antrieure au microplissement. Elle est souvent associe la schistosit de crnulation. La lination minrale correspond des minraux aligns suivant une direction prfrentielle, soit des minraux mtamorphiques noforms, soit des minraux anciens rorients. La lination dallongement ou dtirement (stretching) correspond des objets (galets, fossiles, minraux, etc) tirs de faon continue ou discontinue (fragments aligns). Le boudinage correspond au dcoupage rgulier de bancs rsistants entours dune matrice plus ductile. Les baguettes parallles dfinissent la lination de boudinage, ltirement ductile puis la rupture des baguettes dfinit la direction dallongement.

Les linations minrales, dallongement et le boudinage donnent avec prcision la direction de laxe X de lellipsode.

3 LES PLIS (FOLDS).

Les plis sobservent toutes les chelles, pluri kilomtrique millimtrique. Ce sont les structures ductiles les plus spectaculaires. Dune manire trs gnrale, un pli rsulte de la torsion (courbure) dune surface initialement plane. 3.1 Gomtrie des plis, lments de description. 31.1 Anatomie dun pli (Fig. 9) La polarit des courbures permet de distinguer : antiforme et synforme. Si lge relatif des couches plisses est connu, on distingue anticlinal (anticline) et synclinal (syncline). Par rapport la courbure on distingue lintrados et lextrados du pli. Selon le degr de courbure on distingue des plis arrondis et des plis anguleux. La charnire (hinge) est la zone de courbure maximum Les flancs (limbs) sont situs de part et dautre de la charnire La ligne ou le point dinflexion correspond au passage entre antiforme et synforme. Le creux est le lieu daltitude minimum du pli, la crte le lieu daltitude maximum. Ces deux zones ne concident pas forcment avec les charnires. La surface axiale (ou plan axial [axial plane]) contient les charnires des couches embotes. Laxe (axis) est la ligne (droite), parallle la charnire. 31.2 Taille des plis. (Fig. 10) La taille des plis est mesure par la longueur donde ou la longueur donde et par lamplitude A du pli. Langle douverture ou angle entre les flancs permet de distinguer des plis ouverts, ferms, serrs, isoclinaux (Fig. 11). Dans une mme structure on distingue, selon leur taille, des plis de 1er ordre (grande structure) et des plis de 2me ordre (microplis, plis dentranement, plis parasites, drag folds). 31.3 Degr de symtrie. Le degr de symtrie permet de distinguer les plis symtriques dont les flancs ont la mme longueur et les plis dissymtriques o lon distingue un flanc long et un flanc court. Plis en S et en Z (voir Fig. 10).

8 31.4 Variation dpaisseur. La variation de lpaisseur des couches plisses mesure selon la perpendiculaire aux limites de couche permet de distinguer entre les plis isopaques et les plis anisopaques. 31.4 Orientation dans lespace. Pour orienter le pli dans lespace il est indispensable de mesurer le plan axial (direction et pendage) et laxe (direction et plongement) avec la boussole. Selon le pendage du plan axial et le plongement de laxe on distingue diffrents types de plis : droit, djet, dvers, couch, pli axe horizontal, vertical, etc (Fig. 12). 31.5 Plis et zone de cisaillement Lorsque les plis sont dissymtriques, on peut les associer des zones de cisaillements dont le sens de dplacement est dtermin par la forme en S ou en Z des plis. On dfinira ainsi le sens de dversement ou de chevauchement et le sens de dcrochement. 3.2 Les diffrents types de plis classs daprs leur mode de formation 32.1 Les plis par flexion-glissement (flexural folds). Ces plis apparaissent dans les niveaux structuraux suprieur et moyen de la chane de montagne. Les tempratures et la pression sont peu intenses. Selon leur nature lithologique les roches auront des comportements mcaniques diffrents. Les roches comptentes se dforment difficilement (grs, calcaires,), les roches incomptentes se dforment facilement (argiles, marnes,). Dans des roches comptentes, les plis sont isopaques (concentric folds). 321.1 Modle thorique (Fig. 13). Diffrence de longueur donde, en rapport avec lpaisseur des couches comptentes et le contraste de viscosit entre les couches. Phnomne de disharmonie. 321.2 La dformation interne dans un pli isopaque : mcanismes de dformation. Les mcanismes qui interviennent sont la flexion et le glissement banc sur banc. Deux modles simples illustrent ces mcanismes. Les plis dformation de charnire (Fig. 14). La distorsion est localise dans la charnire, elle est htrogne avec une extension dans lextrados et une compression dans lintrados (modle de la torsion dune barre rigide). Les microstructures associes peuvent tre : lextrados des fentes de tension ou des microfailles normales, lintrados des joints stylolithiques, des microplis ou des microfailles inverses.

9 Les plis dformation de flanc (Fig. 15). La distorsion est localise dans les flancs. Cest un cisaillement interne du banc qui se fait par glissement de surfaces les unes sur les autres (modle de la courbure dune pile de feuilles). Les microstructures associes sont des fentes en chelon dans les flancs, souvent sigmodes, la forme en S ou Z donne le sens du cisaillement interne. On peut aussi observer des plans de cisaillement de Riedel et des stries banc sur banc dans le cas dun empilement de couches les unes sur les autres.

Dans tous ces types de plis il y a coexistence dune dformation ductile qui donne le pli et de dformations cassantes (microfailles, fentes, etc). Cest la consquence de conditions physiques (T et P) correspondant aux niveaux structuraux suprieur de la chane. La dformation est dintensit modre, htrogne, et non pntrative.

32.2 Les plis anisopaques par aplatissement et / ou glissement (shear folds). Ces plis caractrisent le niveau structural infrieur de la chane de montagne. Ils apparaissent alors quelque soit la lithologie des roches dformes. Les niveaux structuraux infrieurs sont caractriss par des valeurs T et P de plus en plus fortes. La dformation est de plus en plus ductile et de plus en plus intense. Elle simprime dans la roche toutes les chelles, on dit quelle est pntrative. Le marqueur caractristique est la schistosit qui est lexpression de laplatissement des roches. La schistosit est associe aux plis, les 2 structures apparaissent en mme temps, on dit que les plis sont synschisteux. 322.1 Les plis par aplatissement. Laplatissement homogne ne donne pas de plis. Par contre il donne des plans de schistosit, parallles au plan daplatissement XY (Fig. 16). Laplatissement htrogne dans le plan XZ conduit lapparition de plis anisopaques synschisteux. Les plans de schistosit sont parallles au plan axial du pli (Fig. 17a). Laplatissement (rapport X/Z) peut varier dans le plan XY, on obtient alors des plis charnire courbe (plis en fourreau sheath folds) (Fig. 17b).

En gnral, laplatissement homogne ou htrogne se produit aprs un premier stade de flexion des niveaux comptents. La schistosit prend des dispositions diffrentes : en ventail dans les bancs comptents, parallle au plan axial dans les niveaux incomptents au dbut de la dformation (Fig. 18 a). Avec la gnralisation de laplatissement, la schistosit est pratiquement parallle au plan axial quelle que soit la lithologie (Fig. 18 b).

322.2 Les plis par glissement ou par cisaillement ductile (ou encore plis par coulement). Ces plis assez particuliers apparaissent par glissement le long de surfaces planes qui sont des plans de transport de la matire ou plans de cisaillement (plans C). Les

10 niveaux repres se dforment par simple translation, il ny a pas de raccourcissement comme dans le cas des plis isopaques forms par flexion ou des plis forms par aplatissement. Le modle analogique simple est un paquet de cartes glissant les unes sur les autres. On peut dfinir des axes cinmatiques : a : vecteur glissement dans le plan de cisaillement, c : perpendiculaire au plan C, b : perpendiculaire ac (Fig. 19). Un cisaillement homogne ne donne pas de plis. Par contre un glissement diffrentiel le long des plans de transport va engendrer des plis anisopaques dont la gomtrie est un peu particulire : lpaisseur mesure paralllement au plan axial est constante. Ce sont les plis semblables (similar folds). Si le cisaillement est htrogne dans le plan C, le niveau repre va donner des plis axes courbes (plis en fourreau) (Fig. 20).

Comme les plis par aplatissement, ces plis sont toujours synschisteux (schistosit continue, de flux ou foliation). Ils prsentent aussi une lination dtirement parallle la direction de transport ou de cisaillement, mais diffrente (un peu) de laxe X dallongement de lellipsode.