Le Deleveraging Au Coeur de La Crise Financière

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UNIVERSITE MONTESQUIEU BORDEAUX IV MEMOIRE DE RECHERCHE- MASTER II ECONOMIE ET FINANCE INTERNATIONALES


ANNEE ACADEMIQUE 2008-2009

Alain Djilne DIOP Sous la Direction du Professeur Dominique LACOUE-LABARTHE

UNIVERSITE MONTESQUIEU BORDEAUX IV MEMOIRE DE RECHERCHE- MASTER II ECONOMIE ET FINANCE INTERNATIONALES


ANNEE ACADEMIQUE 2008-2009

Alain Djilne DIOP Sous la Direction du Professeur Dominique LACOUE-LABARTHE

Remerciements
Je tiens tout dabord remercier Monsieur Dominique Lacoue-Labarthe, mon directeur de mmoire pour sa disponibilit et ses conseils aviss. Jassocie ces remerciements toute lquipe pdagogique du Master II Recherche Economie et Finance Internationales. Je remercie aussi mes proches : Jean-Pierre LOPY, pour son grand cur, sa clairvoyance et ses conseils judicieux, son pouse Catherine ainsi que toute sa famille ; Alain Toulza, mon parrain, qui je dois plus que le prnom, ainsi que son pouse Martine ; Mes surs, Martine, Batrice et Myriam, lloignement, loin de distendre nos liens les a raffermis ; Mes parents Suzanne et Laurent, deux curs vaillants et aimants.

Sommaire

Introduction gnrale6

I) Aux sources du recours immodr au levier, de la sous-capitalisation et de la fragilisation des bilans.12

1) Facteurs Macroconomiques12

2) Facteurs Microconomiques14

II) Du deleveraging des acteurs du march du crdit structur au deleveraging systmique.

1) Le prlude du deleveraging : des fortes dprciations la crise de liquidit..45

2) Premire phase du deleveraging, en rponse la dgradation des bilans des acteurs du march du crdit structur...59 3) Deuxime phase du deleveraging : la crise de liquidit sur le march montaire et ses consquences systmiques66

Conclusion 81

Annexes82

Bibliographie84

Table des Matires91

Introduction gnrale La dclaration retentissante dAlan Greenspan qui qualifie ds le printemps 2008, la crise financire actuelle comme la plus grave quait connue le monde depuis 1945, laisse bon nombre dobservateurs perplexes. Au-del du fait que cette perplexit ait pu tre suscite par la crdibilit corne de lauteur de cette dclaration, suspect tort ou raison davoir aliment par une politique montaire juge laxiste, la bulle immobilire, nous pouvons avancer au moins deux raisons qui font quau moment o cette dclaration a t faite, elle ait pu tre considre comme infonde par certains qui pronostiquaient une sortie de crise dans les mois qui ont suivi les tensions de lt 2007, forts de lexprience des pisodes des attentats du 11 septembre ou lclatement de la bulle technologique en 2001. Dune part, du fait de la taille relativement faible du march des prts subprimes, modeste compartiment du march du crdit hypothcaire Amricain do est partie la crise, il apparaissait beaucoup peu probable que son effondrement puisse constituer une menace srieuse pour le systme financier et encore moins pour lconomie relle. Dautre part, le dynamisme non encore dmenti des Economies Emergentes cette poque, entretenait lide dun dcouplage de ces dernires qui serait salutaire et permettrait denrayer le risque dune rcession mondiale. La suite des vnements va tour tour invalider ces hypothses. Le premier argument nest plus valable ds lors que la crise financire sexporte au-del du champ rduit du march des prts subprimes pour gagner lensemble des marchs financiers aussi bien le march des capitaux travers leffondrement des cours boursiers que le march montaire au sein duquel les primes de risque explosent. Le second argument lui aussi devient irrecevable, partir de lt 2008, avec lentre en crise des Economies Emergentes jusque l pargnes, ruinant du coup, tout espoir de dcouplage de ces Economies. Ds lors, la dclaration de Greenspan qui aurait pu paratre certains, emphatique au printemps 2008, est quelques mois plus tard perue comme restituant la pleine mesure de la dimension de cette crise qui dun point de vue historique, na dgale que celle de la grande dpression de 1929. Pour comprendre les facteurs lorigine de cette crise, il est utile de contourner lcueil dans lequel sont tombs ceux qui soutenaient que la taille modeste du march des subprimes, excluait que son effondrement puisse remettre en cause, la stabilit du systme financier.

Cette ide qui nest pas sans fondement, aurait sans doute t vrifie si la cause premire de la crise financire internationale tait rechercher dans leffondrement du march des subprimes. Leur erreur tient au fait que, ce que les dfenseurs de cet argument ont considr comme la cause ntait en ralit et plus modestement quun dclencheur, les vraies causes puisquil y en a plusieurs, sont rechercher ailleurs. La multiplication des dfauts de paiements sur les crdits subprimes suite au durcissement de la politique montaire partir de 2004, fait subir de lourdes pertes aux tablissements de crdit qui avaient consenti ces prts. Cependant ces pertes loin dtre cantonnes dans les bilans des tablissements qui dtenaient des crances subprimes vont se diffuser lchelle du systme financier par le biais de la titrisation dont a fait lobjet, une grande partie de ces crdits. La titrisation, innovation financire majeure qui a vu le jour au dbut des annes 70 et dont lusage sest rpandu partir des annes 90, permet la banque, une fois avoir initi les crdits de pouvoir ensuite les sortir de lactif de son bilan pour les transformer en produits structurs qui se comportent comme des titres obligataires ngociables sur les marchs. Linvestisseur qui achte ces produits titriss est rmunr partir des intrts rgulirement verss par lemprunteur initial sa banque. Ce faisant, la valeur de ces produits structurs est troitement lie la qualit des actifs sous-jacents, les prts initiaux auxquels ils sont adosss. A partir du moment o la qualit des actifs sous-jacents se dgrade suite la multiplication des dfauts de paiement, il sensuit une dgradation de la valeur des produits structurs qui ont t labors partir de ces crdits. La titrisation laquelle ont eu massivement recours les banques sinscrivait dans le droit fil du nouveau modle de rfrence de lactivit bancaire, le modle originate-to-distribute. Ce nouveau modle obit une logique simple mais la mise en uvre complexe : initier le crdit puis transfrer vers le march, le risque qui lui est attach. Ce modle est en nette rupture avec le modle traditionnel de lactivit bancaire, originate-to-hold sous lequel, la banque suite linitiation du prt en assumait le risque en le conservant jusqu sa maturit lactif du bilan. Etant amene conserver cet actif et sexposer un risque de crdit jusqu la maturit du prt, la banque sous le modle traditionnel slectionnait les emprunteurs avec le plus grand soin afin de rduire au mieux le risque de crdit. Sous le modle originate-to-distribute, lincitation dtenir des actifs en procdant au suivi et la slection des emprunteurs disparat, le profit bancaire nest plus li la slection et au suivi des emprunteurs qui fondent la qualit des actifs bancaires, il est dsormais li au volume de crdits et leur qualit a tendance tre relgue au second plan par la banque dsormais mancipe par le march du risque de crdit.

La titrisation donne ainsi la banque lopportunit de se jouer de la rglementation prudentielle qui en exigeant delle de dtenir un minimum de fonds pour un volume donn de crdits accords vise limiter le levier dendettement dont lusage excessif pourrait mettre en pril la solvabilit des banques. Le levier dendettement reprsente le rapport entre le montant total des actifs et le montant des fonds propres. A partir du moment o la rentabilit conomique dune banque c'est--dire le rapport entre son profit net et ses actifs est suprieur au taux dintrt quelle paye sur sa dette, le levier dendettement accroit la rentabilit financire mesure par le rapport entre le profit net et les fonds propres de la banque. La titrisation permet aux banques daugmenter considrablement leur effet de levier car pour un montant de fonds propres donn, la banque peut autant quelle le souhaite accorder des crdits du moment quils sont sortis du bilan et sur la base de cette mme fraction du capital, multiplier linfini la distribution de crdits l o en labsence de titrisation, cette base de fonds propres aurait t immobilise pour garantir un crdit jusqu sa maturit. La titrisation qui reprsente pour les banques une source de revenus lucrative favorise lexpansion du crdit dans un contexte macroconomique extrmement favorable. La politique montaire du moins jusquen 2004, est trs accommodante ; linflation est basse malgr labondance de liquidits et une faible volatilit rgne sur les marchs financiers. Lexpansion du crdit alimente la hausse du prix des actifs qui elle-mme vient entretenir la demande de crdit. A ce titre, le fonctionnement du march des subprimes reprsente un exemple loquent du lien troit entre lexpansion du crdit et la hausse du prix des actifs. Les crdits subprimes taient destins aux mnages les plus modestes disposant de peu voire pas de garanties qui puissent justifier un accs au crdit, le logement pour lequel ils sollicitent un crdit devient ds lors, le seul collatral dont ils disposent. Leur relation avec le prteur repose ainsi sur un pari audacieux qui mise sur la constante progression de la valeur du logement. Le mnage demeure solvable et peut mme contracter davantage de crdits tant que cela est justifi par lapprciation de son patrimoine. La hausse du prix des logements a gonfl la bulle immobilire sur le march hypothcaire Amricain, mesure que la croissance du crdit tait acclre par la titrisation. Cette hausse du prix des actifs alimente par labondance des liquidits entrane leffondrement des primes de risque qui pousse les tablissements financiers, notamment les plus friands de rendement des prises de risque leves combines un usage excessif du levier. Lorsque la politique montaire se fait un peu moins accommodante partir de 2004, on assiste la multiplication des dfauts de paiements qui se traduisent par des saisies importantes de logements qui sont solds par les institutions de crdit afin de recouvrer leurs crances.

Leffondrement des prix de limmobilier qui rsulte de ces ventes de logements saisis, accentue la multiplication de dfauts de paiements de mnages initialement solvables mais qui voient la valeur de leur patrimoine se dprcier fortement. La chute de la qualit des crdits se transmet quasi-instantanment aux bilans des banques qui dtenaient lactif de leurs bilans des produits structurs adosss ces crdits hypothcaires. Ces produits dont la complexit et lopacit ont t accrues au cours de cette priode, deviennent illiquides et leur valorisation au prix du march entrane de fortes dprciations, enregistres par les banques qui ont investi dans ces titres. La rvaluation subite et brutale des risques longtemps sous-valus, par les agences de notation notamment, qui se sont montrs complaisantes et laxistes dans lvaluation du risque, exacerbe la dfiance sur les marchs et plonge ces derniers dans une profonde crise de liquidit. Cette crise de liquidit affecte les bilans bancaires tant lactif quau passif. A lactif du bilan, les banques sont confrontes la faible liquidit de march des produits structurs. La liquidit de march dsigne la relative facilit avec laquelle, on peut se dessaisir rapidement dun actif sans que la valeur de ce dernier ne soit altre. Les produits structurs dont la valeur chute fortement mesure que les agents se mettent liquider des actifs qui ne trouvent plus preneurs car les investisseurs manifestent dsormais une forte aversion au risque et se rabattent vers les actifs de qualit, srs et trs liquides ; les obligations dEtat en particulier, marquant un mouvement gnral de repli vers la qualit (flight-to-quality). Au passif, les bilans bancaires sont soumis des tensions tant au niveau des fonds propres valoriss au prix du march qui se contractent en absorbant les pertes, quau niveau de la dette court terme dont le renouvellement est compromis par la dfiance qui rgne sur le march montaire et qui se traduit par une rtention des liquidits en rponse la monte du risque de contrepartie. Le march montaire dsigne le march ou schangent des instruments de dette court terme, dont la maturit est infrieure un an (march interbancaire, march du repo.) La taille des bilans bancaires a fortement augment, durant la priode de hausse du prix des actifs rpercute par la valorisation aux prix du march (mark to market). Cette forte hausse du prix des actifs a invit les banques augmenter de manire considrable leur effet de levier. Lorsque le retournement des marchs samorce partir de lt 2007, les bilans bancaires se contractent sous leffet des fortes dprciations enregistres par la comptabilisation en valeur de march qui introduit ainsi un biais procyclique important qui dstabilise les marchs et amplifie les mouvements baissiers comme haussiers. Les lourdes pertes enregistres par les institutions financires viennent en diminution des fonds propres valorises au prix du march. Cette contraction des fonds propres alors que le niveau de lendettement est inchang entrane une augmentation du levier.

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La rduction de leffet de levier devient ds lors pour les institutions financires, un impratif dans la mesure o le niveau dsormais faible de leurs fonds propres ne justifie plus leurs expositions. Pour maintenir leur solvabilit et rduire leur levier, les institutions financires procdent massivement au deleveraging. Le deleveraging dsigne la rduction de leffet de levier. Il peut prendre deux modalits, le deleveraging par liquidations dactifs ou le deleveraging par recapitalisation. Le deleveraging par liquidations dactifs consiste pour une banque dont le levier explose suite la contraction de ses fonds propres, liquider des actifs figurant dans son bilan, gnralement les plus liquides dentre eux pour recueillir des liquidits sur le march afin de rduire son endettement. Le deleveraging par recapitalisation quant lui consiste pour la banque au renflouement de ses fonds propres par des injections de capital. Le deleveraging par liquidations dactifs fut de loin le plus rpandu durant cette crise. Contrairement la recapitalisation, le deleveraging par liquidations dactifs entrane la contraction de la taille des bilans et la baisse du prix des actifs et en ce sens il est potentiellement dflationniste. Quand nous parlerons de deleveraging sans prciser, cest ce dernier que nous ferons allusion. Le deleveraging a t le principal symptme de la crise de liquidit et sest voulu tre un remde pour prvenir une crise de solvabilit imminente. En effet, chaque fois que les banques ont t confrontes un problme de liquidit sur le march montaire o laccs aux liquidits leur a t refus, elles ont liquid des actifs pour restaurer leurs ratios de solvabilit en rduisant leur levier et donc leurs engagements. Le deleveraging partir du moment o il a pris une tournure systmique suite la faillite de Lehman Brothers, sest effectu dans les conditions extrmes dune liquidit de march mise rude preuve, puis aggrave par un deleveraging qui se rvle moins mme de tenir ses promesses quant la restauration des ratios de solvabilit. Ds lors, le deleveraging nest gure plus quun sdatif, la recapitalisation tant le vrai remde contre le risque dinsolvabilit. A mesure que limpratif du deleveraging sest pos au plus grand nombre dacteurs, il sest rvl moins efficace pour rtablir les ratios de solvabilit et a mme eu des effets dstabilisants en affaiblissant la liquidit de march. Ds lors, par quels mcanismes, la crise de liquidit qui a initialement contraint au deleveraging les seuls acteurs du march du crdit structur sest dans un second temps propag au sein du march montaire entranant un deleveraging systmique, se rvlant moins mme de prvenir le risque dinsolvabilit et aggravant de surcrot le risque dilliquidit de march ?

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Nous allons dans un premier temps, voir comment les profondes mutations du systme financier sous limpulsion de linnovation financire ont conduit la monte des vulnrabilits et de la fragilisation des bilans puis nous serons amens dans un second, voir comment ces vulnrabilits ont soumis les banques limpratif du deleveraging, qui non seulement na pas permis une hausse significative des ratios de solvabilit mais a de surcrot, conduit laggravation de la crise de liquidit.

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I)

Aux sources du recours immodr au levier, de la sous-capitalisation et de la fragilisation des bilans.

1) Facteurs Macroconomiques Au lendemain de lclatement de la bulle des valeurs technologiques en 2001, lactivisme des banques centrales cre les conditions dune politique montaire particulirement accommodante en vue de contenir les effets rcessifs que pourrait occasionner leffondrement de ces valeurs. En outre, les excdents commerciaux des pays mergents, tant donn la faiblesse des systmes financiers de ces pays sont essentiellement recycls sur les marchs financiers des pays dvelopps. La conjonction de ces deux phnomnes entrane une abondance de liquidits. Nous distinguerons deux types de facteurs qui ont aliment cette abondance de liquidits sur les marchs financiers des pays dvelopps : des facteurs endognes et des facteurs exognes. 1.1) Facteurs exognes Ces facteurs exognes sont essentiellement lis la monte des dsquilibres financiers internationaux. Ces dsquilibres mettent aux prises deux rgions du globe, dune part, les Etats-Unis, dont la balance courante affiche des dficits importants qui par le pass nont jamais connu une telle ampleur et de lautre ct du Pacifique, le Japon, les pays mergents dAsie et dans une moindre mesure les pays exportateurs de ptrole dont les excdents courants nont cess de crotre quasi symtriquement avec les dficits Amricains. Face labondance de lpargne domestique de ces pays, du fait de leurs excdents commerciaux levs et du sous-dveloppement de leurs marchs financiers incapables de recycler cette pargne, les banques locales ont montr une faible capacit absorber cette dernire. Les pays mergents, faute de systmes financiers efficaces, vont exporter leurs excs dpargne vers les Etats-Unis en particulier, alimentant ainsi lexcs de liquidits sur les marchs financiers Amricains.

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1.2) Facteurs endognes Pour stimuler lconomie Amricaine suite aux vnements du 11 septembre et lclatement de la bulle des valeurs technologiques, les autorits montaires Amricaines vont mener une politique montaire trs accommodante (cf. Graphique1).

Graphique 1 : Evolution des taux rels 2 ans et des taux directeur (fonds fdraux) Source : Fisher (2008) Le Fed a entam ds 2001, un cycle de baisse de son taux directeur (fed funds rate). Entre 2001 et 2004, le taux directeur de la Fed est pass de 6,5% 1%. Avant le relvement des taux partir de 2004, les taux dintrt rels taient ngatifs. Il est aussi important de relever un autre fait marquant durant cette priode : le faible niveau de linflation. Malgr labondance de liquidits sur le march et la politique montaire accommodante de la Fed, linflation est basse et faiblement volatile. Deux facteurs ont t avancs pour expliquer cette baisse gnralise de linflation qui parat paradoxale dans un contexte dabondance des liquidits : dune part, le renforcement de la crdibilit des politiques anti-inflationnistes menes par des banques centrales dont lindpendance a t renforce et dautre part et surtout, le rle des pays mergents dans lconomie mondialise a conduit exercer une pression la baisse sur le niveau gnral des prix. La stabilit de linflation saccompagne dune croissance leve et stable, conjoncture trs favorable qualifie de great moderation 1.
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Buiter (2007)

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La politique montaire accommodante de la Fed, associe un taux dinflation faible cre des conditions trs favorables lendettement des agents. Labondance de liquidits entrane lcrasement des primes de risque et laugmentation du prix des actifs. Lample liquidit de march en exerant une pression la hausse sur le prix des actifs, entrane une baisse du rendement autrement dit de la prime de risque. Dans leur qute de rendement (search for yield), les investisseurs sont amens acqurir des actifs de plus en plus risqus, entranant ainsi une baisse gnralise de laversion au risque. La faiblesse des taux dintrt a stimul le march de limmobilier ainsi que les oprations effet de levier menes en particulier par les hedge funds et les fonds de private equity. Dans cet environnement trs favorable de faiblesse des taux dintrt et des primes de risque, le crdit est abondant et bon march. Les agents profitant de cette aubaine augmentent considrablement leur levier dendettement. Cette hausse du levier sera particulirement marque auprs des institutions financires, laquelle ces derniers vont associer une prise de risque excessive.

2) Facteurs Microconomiques En accordant des crdits puis en collectant des dpts, la banque assume le rle dintermdiation financire. Elle rend alors lconomie un service majeur : lapprovisionnement en liquidits. Cette fourniture de liquidits est rendue possible grce la transformation des actifs consistant financer les prts long terme donc illiquides, par des dpts exigibles court terme, trs liquides car tout moment convertibles en monnaie. Ce rle de transformation des actifs traditionnellement assign la banque, lexpose un risque dilliquidit quasi-permanent car sa principale source de financement (les dpts), est trs volatile en temps normal et trs incertaine, en cas extrme de rue des dposants. Pour maintenir cet quilibre prcaire qui consiste prter long terme et emprunter court terme, la banque est astreinte par le rgulateur dtenir un montant minimum de fonds propres ainsi que des actifs de qualit issus de la slection et du suivi des emprunteurs. Autrement dit, une double contrainte pse sur la banque : dune part, la limitation du levier financier, travers lexigence dun minimum de fonds propres et dautre part, la limitation du risque, par le truchement de la dtention dactifs de qualit.

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Grce linnovation financire les banques vont saffranchir de cette double contrainte avec lmergence dun nouveau modle sur lequel repose dsormais lactivit bancaire. Ce modle qualifi de modle originate to distribute consiste initier les crdits puis se dfaire du risque que cela comporte, en vendant les crdits initis des structures ad hoc charges de racheter les crdits et de procder leur titrisation. Elles transforment ainsi ces crdits en produits structurs ngociables sur les marchs. 2.1) Le modle originate-to-distribute

Ce modle qui repose sur linnovation financire majeure quest la titrisation, est dsign sous le nom du modle originate-to-distribute, par opposition au modle traditionnel de lactivit bancaire ou modle originate-to-hold, dont le principe consistait initier les crdits et en assumer le risque , en conservant les prts au bilan jusqu leur maturit. 2.1.1) Fonctionnement de la titrisation La titrisation est une innovation financire majeure qui a vu le jour au dbut des annes 70 mais ce nest quau dbut des annes 90, quelle prend de lampleur et transforme le modle traditionnel de lactivit bancaire. De linitiation des crdits leur transformation en titres puis leur dissmination sur les marchs financiers, la titrisation suit un processus complexe qui comprend essentiellement trois phases principales : pooling, offloading, et tranching2 . 2.1.1.1) Pooling Durant la premire phase dite de pooling, les prteurs initiaux vendent les crdits quils ont accords et qui figurent lactif de leurs bilans des banques dinvestissement. Ces prteurs initiaux sont essentiellement des acteurs du march du crdit hypothcaire notamment les banques commerciales et des institutions financires spcialises dans le crdit hypothcaire. La banque dinvestissement (ou arrangeur) aprs rachat du pool de crdits procde leur structuration de laquelle sont issues deux catgories de produits structurs : les mortgage-backed-securities (MBS) qui sont adosss des crdits hypothcaires de qualit voisine ; les asset-backed-securities (ABS) adosss des pools de crdits plus htrognes, composs de crdits aux mnages et aux entreprises.

La structuration gagne en complexit et en ampleur, de nouveaux produits titriss natront dun second chelon de titrisation, il sagit des collateralized debt obligations (CDOs) qui sont adosss aux ABS ainsi qu dautres crdits sous-jacents.
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Aglietta & Rigot (2009) ; Blundell-Wignall (2007b).

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Ces produits structurs (ABS, MBS, CDOs) sont sortis de lactif du bilan de la banque dinvestissement et cds des structures ad hoc encore appeles special purpose vehicles (SPV), cest la seconde phase dite offloading. 2.1.1.2) Offloading Les SPVs jouent un rle cl dans le processus de la titrisation un double titre : dune part, elles reprsentent une source de revenus pour la banque cdante dont elles rachtent les produits structurs et ce faisant permettent le renouvellement de la titrisation ; dautre part, en recueillant le hors-bilan des banques, elles en assument le risque et librent ces dernires des contraintes de la rgulation. Un examen plus en dtail de ces entits horsbilan sera effectu plus loin. 2.1.1.3) Tranching Cette phase ultime du processus de la titrisation est cruciale. Les produits titriss sous forme dobligations sont dcoups en tranches, en fonction des profils de risque des crdits constituant le pool. Les tranches sont disposes en forme de cascade, de la tranche la plus risque la tranche la mieux note. On distingue quatre paliers : la tranche la plus risque dite equity, la tranche mezzanine, la tranche senior en enfin, la tranche la plus sre jouissant de la meilleure notation dite tranche super senior. Cest au cours de cette phase ultime que les agences de notation entrent en scne, en attribuant des notes aux diffrentes tranches mises allant de la note BBB pour la tranche mezzanine, la note AAA, pour la tranche super senior. La tranche equity du fait de sa nature trs risque nest pas note et est gnralement conserve dans les bilans des SPV.

2.1.2) Intrts de la titrisation La logique qui sous-tend le modle originate-to-distribute est construite autour de la titrisation qui permet aux diffrents acteurs qui en sont lorigine de retirer les gains issus du processus de la titrisation, tout en se dfaussant du risque des crdits qui en font lobjet. Ce risque une fois fractionn, est dissmin sur les marchs financiers et est port par les investisseurs privs et institutionnels dsireux de se porter acqureurs de ces titres. Nous serons ici amens tudier les deux avantages principaux que prsente la titrisation pour les institutions financires. Dune part, elle permet de transfrer le risque et dautre part, elle constitue pour les banques, une source de revenus substancielle.

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2.1.2.1) La titrisation, facteur de transfert du risque Couderc (2008) voit dans le transfert du risque induit par la titrisation un avantage double. Dune part, la possibilit nouvelle que les intermdiaires financiers ont de se dfaire du risque de crdit, leur a permis une meilleure gestion de leur bilan ainsi que la diversification de leurs portefeuilles ; dautre part, le transfert du risque rend possible pour certains investisseurs, lexposition de nouveaux risques. Les investisseurs manifestant une aversion au risque, peuvent composer leurs portefeuilles dactifs partir de tranches dites senior, moins risques ; tandis que les investisseurs la recherche de promesses de rendement plus leves vont composer leurs portefeuilles partir des tranches basses plus risques (equity). La titrisation largit ainsi lventail des couples risque-rendement. Elle tend aussi le champ des actifs liquides en rendant ngociables et liquides, des actifs qui nagure furent illiquides et non ngociables, comme le fait remarquer Buiter (2007). Couderc (2008) considre que lapparition de nouvelles classes dactifs et la marchisation du risque de crdit contribuent la compltude et lefficience des marchs financiers. En rsum, la titrisation par le transfert du risque et par llargissement du champ des actifs liquides quelle induit, permet aux banques de jouir dune plus grande flexibilit dans la gestion actif/passif du bilan (assets liabilities management) et offre aux investisseurs des opportunits nouvelles dans le choix de composition de leurs portefeuilles dactifs. Lavantage que constitue le transfert du risque ne suffit pas lui seul, pour expliquer le succs du modle originate-to-distribute. De par les commissions quelle gnre au cours de ses diffrentes phases, la titrisation a constitu une source de revenus non ngligeable qui a profit tous les acteurs de la chane, des prteurs initiaux, aux arrangeurs puis aux vhicules dinvestissement, en passant par les agences de notation. 2.1.2.2) La rmunration des acteurs de la chane de titrisation Tout au long de la chane de la titrisation, les diffrents acteurs se rmunrent grce aux prlvements de commissions. Le SPV, la structure ad hoc mise en place par la banque dinvestissement, rachte auprs de cette dernire, un pool dABS et les revend aux investisseurs par tranches, lesquelles prsentent des profils de risque diffrents. Le but de cette opration est de dgager un profit appel excess spread. Lexcess spread reprsente la diffrence entre le rendement du pool dactifs et les commissions et intrts pays sur les tranches mises. Avec lexpansion du march hypothcaire Amricain, le compartiment subprimes de celui-ci notamment, les pools dactifs rachets par les SPVs auprs des banques dinvestissement taient essentiellement composs de produits structurs adosss des prts hypothcaires, plus communment appels RMBS (residential mortage backed securities).

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A partir dun pool de RMBS de notation moyenne BBB, par exemple ; le SPV doit procder au tranching, en dterminant la structuration des diffrentes tranches de risque du CDO, sachant que pour dgager un excess spread, la structure du CDO doit faire la part belle la tranche senior, moins coteuse pour le SPV en termes de versements dintrts que les tranches les plus risques (equity, mezzanine). De plus, la prpondrance de la tranche senior dans la structuration du CDO est lie au fait que certains investisseurs institutionnels ne sont pas autoriss dtenir des titres dont la notation ne serait pas investment grade, cest--dire suprieure ou gale la note BBB. Lquation qui se pose au SPV parat ds lors insoluble : comment partir dun pool de RMBS de notation moyenne BBB, mettre des tranches senior notes AAA et destines tre vendues cette catgorie dinvestisseurs cite plus haut ? Cest ce moment quinterviennent dautres acteurs-cl de la chane, les rehausseurs de crdit ou monolines3. En fournissant leur garantie au SPV et en permettant ce dernier dmettre des tranches super senior et senior, les monolines sengagent payer les intrts ds aux investisseurs en cas de dfaillance des emprunteurs initiaux. Grce au rehaussement de crdit, la tranche senior mise par le SPV peut atteindre jusqu 70% de lencours du pool. Plus cette tranche est paisse plus le SPV est assur de dgager un excess spread. En effet, le rendement des tranches senior (intrts verss par le SPV aux investisseurs de cette tranche) est infrieur au rendement du pool (intrts reus par le SPV en provenance des emprunteurs initiaux). Autrement dit, le SPV russit sa titrisation en dgageant un profit pur qui est gal la diffrence entre dune part, le rendement du pool et dautre part les commissions verses aux rehausseurs ainsi que les intrts verss aux investisseurs qui se portent acqureurs des tranches de CDO quelle met4. Ce systme de rmunration, au cours des tapes successives du processus de titrisation a reprsent une puissante incitation pour tous les acteurs de la chane et a confort le modle originate to distribute.

Traditionnellement, les socits de rehaussement de crdit ou monolines apportaient leur garantie aux missions obligataires ralises par les collectivits locales Amricaines. A partir de 1985, dans le but dtendre leur champ dactivit, certains monolines ont commenc sadonner des rehaussements de produits structurs mis par les SPVs. Source : Lautier & Simon (2008).
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Aglietta & Rigot (2009) ; Blundell-Wignall (2007b).

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La titrisation sest dveloppe une vitesse exponentielle ; lmission de produits structurs issus de la titrisation en Europe et aux Etats-Unis est passe de 500 milliards USD en 2000 2600 milliards USD en 20075 (Cf. Graphique 2). Cette expansion de la titrisation est alle de pair avec laccroissement du profit bancaire, lequel devient une fonction croissante du volume des crdits distribus6. Cest l une des mutations majeures introduite par le modle originate to distribute. Sous le modle traditionnel, lactivit bancaire consistait initier des crdits dont on assumait le risque jusqu leur maturit (originate to hold). Dans ces conditions, le profit de la banque et terme sa solvabilit dpendent de son aptitude grer les asymtries dinformations et lala moral qui naissent de ses relations avec lemprunteur. Pour prvenir le risque de crdit qui demeure jusqu lchance du prt, la banque procde la slection des emprunteurs (screening) et mne un travail de suivi (monitoring) suite loctroi du prt.

Graphique 2 : Emission de produits titriss (en milliards USD) en Europe et aux Etats-Unis, source : FMI (2008a), Global Financial Stability report

FMI (2008a) Aglietta & Rigot (2009)

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Lmergence du modle originate to distribute en saccompagnant de lexpansion de la titrisation modifie la nature de lactivit bancaire sous sa forme traditionnelle, en ce sens o elle mancipe la banque du risque de crdit. Ds lors, le profit bancaire ne se mesure plus laune de la qualit des crdits distribus mais davantage leur volume. La titrisation cre ainsi un effet dappel dair linitiation de crdits et invite la banque un usage massif de leffet de levier. 2.1.3) Interaction entre Titrisation et Effet de levier En exigeant de la banque quelle dtienne un montant minimum de fonds propres pour un volume donn de crdits consentis ; le rgulateur exerce ainsi un contrle sur le levier financier dont lusage excessif constitue une menace pour la banque. En sortant de lactif de leurs bilans les prts quelles accordent, les banques contournent allgrement la rglementation des fonds propres. En effet, pour un volume donn de fonds propres, la banque en recourant la titrisation, peut accrotre son activit autant que la demande de crdit lautorise7. La titrisation permet le renouvellement du crdit et donc laccroissement de leffet de levier. Cet accroissement du levier au sein de lindustrie bancaire sest aussi traduite par lmergence de nouveaux acteurs qui vont former ce que les spcialistes ne vont pas tarder qualifier de systme bancaire parallle ou systme financier fantme (shadow financial system). Ce concept sert dsigner essentiellement deux catgories dinstitutions financires qui font activement appel leffet de levier : il sagit dune part des SIV (Special investment vehicles), et dautre part des hedge funds. Si pour les premiers, la filiation avec la titrisation est facile tablir, il demeure que le lien entre titrisation et hedge funds parat moins intuitif. Ces derniers comme nous le verrons ont t des acteurs majeurs du march du crdit structur, les produits titriss leur ont offert de nouvelles opportunits pour satisfaire leur qute effrne de rendement.

Lubochinsky (2008)

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2.1.3.1) Les SIVs, le levier et la titrisation Ces entits hors-bilan (SIVs et conduits) jouent un rle important dans le processus de titrisation dans la mesure o, lactif de leurs bilans accueille les produits structurs. Elles ont pour particularit dtre faiblement capitalises, de plus elles ne reprsentent pas une personnalit morale8, contrairement aux banques. Si les conduits sont en gnral dtenus par la banque qui en est linitiatrice (sponsoring bank), les SIVs sont en gnral cds des investisseurs, qui compars aux conduits, ont davantage recours leffet de levier9. Les conduits procdent lmission de titres obligataires (commercial paper) dont le produit permet de financer lachat de produits structurs. Les conduits prsentent quatre caractristiques principales10 : la sponsoring bank dtient tout ou partie du capital du conduit ; le conduit tant par dfinition une structure dconsolide, il sensuit que les actifs requirent moins de fonds propres que sils avaient t conservs dans le bilan de la banque, do la sous-capitalisation de ces entits ; le pendant de cette sous-capitalisation est un usage trs lev de leffet de levier qui dans certains cas atteint 20 30 fois le montant des fonds propres ; ils sendettent court terme voire trs court terme do un refinancement trs assujetti au bon fonctionnement du march montaire.

Au cas o les conduits prouveraient des difficults se refinancer par lmission de papier commercial, les conduits peuvent bnficier de facilits de crdit de la part de la sponsoring bank qui en agissant ainsi prvient la faillite du conduit qui contraindrait la banque le reconsolider, tant donn que ces entits ne peuvent pas faire faillite compte tenu du fait quelles nont pas le statut juridique dune personnalit morale. Contrairement aux conduits, les SIVs du fait de labsence de sponsoring bank, peuvent tre vus comme des socits dinvestissement part entire. Ils lvent des capitaux auprs des tiers et financent leur levier en mettant du papier commercial adoss des actifs structurs, lasset backed commercial paper (ABCP) ; ainsi que par un endettement moyen terme11. Comme nous lvoquions tantt, les conduits et SIVs ont recours un mode de refinancement trs sensible aux conditions sur le march montaire.
8

Gorton & Souleles (2005) Jacquillat & Lvy-Garboua (2009) Idem BRI (2008a), The Joint Forum

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De ce point de vue les conduits sont mieux protgs que les SIV car leur sponsoring bank, assure jusqu hauteur de 100%, le renouvellement de leur dette court terme en leur ouvrant des lignes de crdit. Les lignes de crdit quun SIV peut activer en cas de difficult de refinancement ne couvrent qu concurrence de 5 10%, sa dette court terme contracte en temps normal sur le march montaire par lmission dABCP12. Do lintrt pour les SIV de disposer dactifs et de collatraux de qualit pour se mettre labri dun risque dilliquidit qui proviendrait de leur incapacit renouveler leur refinancement. Le SIV dispose son actif dune majorit de titres de qualit, la proportion de titres nots AAA est de prs de 70% (cf. Table1)

Table 1 : Structure moyenne du bilan dun SIV (en %), Source : FMI : 2008a, Global Financial Stability Report, partir donnes S&P, Moodys, Fitch

Lexpansion du march hypothcaire et le dveloppement de la titrisation vont entraner la multiplication des entits hors-bilan et laccroissement de leur taille. En 2007, on dnombrait pas moins de 28 vhicules dinvestissement (dont 10 cres en 2006) grant des actifs dun montant de 370 milliards USD. De mme, de nouvelles variantes dentits hors-bilan sont apparues, il sagit notamment des SIV-lites, qui prsentent des caractristiques communes avec les SIVs ceci prs que leur taille est plus rduite, leur levier est trs lev et leurs portefeuilles dactifs sont faiblement diversifis. En achetant des titres maturit longue figurant lactif de leurs bilans financs par de la dette court terme travers lmission de commercial paper, les SIVs effectuent de la transformation des chances traditionnellement dvolue aux banques.

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Mason (2008)

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La comparaison avec le systme bancaire ne sarrte pas l car compte tenu des faibles marges dgages par les SIVs issues de larbitrage entre le coupon reu sur les actifs long terme et les intrts pays sur la dette court terme, les SIVs nont dautre choix pour dgager des profits que de recourir massivement leffet de levier. En prsentant lextrme toutes les caractristiques des banques dans la transformation des chances sur laquelle nous reviendrons plus tard, et lusage du levier sans pouvoir tre juridiquement considres comme telles, ces entits hors-bilan forment ce que lon qualifie juste titre de systme bancaire parallle . La structure des bilans du systme bancaire parallle nous offre une belle illustration des mcanismes par lesquels le levier et la titrisation ont interagi la veille de la crise financire, en accroissant la vulnrabilit des SIVs. Une analyse de linteraction entre leffet de levier et la titrisation ne peut faire lconomie de la prise en compte dautres acteurs-cl du march du crdit structur : les hedge funds. 2.1.3.2) Les hedge funds, le levier et la titrisation Contrairement aux entits hors-bilan, les hedge funds ne sont pas une manation directe du processus de la titrisation. Nanmoins, en manifestant un apptit prononc pour les produits structurs dans le but dalimenter leur levier, les hedge funds sont devenus des acteurs majeurs du march du crdit structur, ils en assuraient la liquidit du moins jusqu lt 2007. a) Description sommaire des hedge funds Les hedge funds peuvent tre dfinis comme tant des fonds privs de placement collectif qui la diffrence des fonds dinvestissement traditionnels sont trs peu rglements. Cette faible rglementation leur permet dutiliser une large gamme de stratgies dinvestissement menes grce un recours intensif leffet de levier destin gnrer des taux de rendement levs. Cet effet de levier peut avoir plusieurs sources13 : la vente dcouvert (positions courtes), des prises de positions sur des produits drivs sur les marchs de gr gr, et la ngociation de lignes de crdit auprs des banques. Leffet de levier peut tre de lordre de 4 514 . Au cours des dernires annes, le secteur des hedge funds sest considrablement dvelopp.

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Cartapanis (2008) Idem

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Le nombre de hedge funds a t multipli par plus de douze depuis 1990 et les actifs sous gestion de lordre de 30 milliards USD en 1990 ont t multiplis par 65 en 2007, passant 200 milliards USD15. Les actifs grs par les hedge funds reprsentent peine 1% de lencours total des obligations et des actions dans le monde. Nanmoins, les hedge funds exercent une influence significative sur les marchs financiers. En effet, grce un effet de levier lev et leur hyperactivit sur les marchs financiers qui se traduit par la varit de leurs stratgies dinvestissement, les hedge funds sont lorigine de 30% du volume des transactions sur les actions aux Etats-Unis16. Ce rle croissant des hedge funds sur les marchs financiers a nourri un certain nombre dinterrogations lies la source potentielle de dstabilisation que comporte un levier excessif associ des investissements risqus. Les scandales financiers lis par exemple la quasi-faillite du fonds LTCM17 ou encore du fonds Amaranth en 2006, ont fini dasseoir sur la sellette, les hedge funds suspects dtre la courroie de transmission du risque systmique. Cependant, leur dcharge, un certain nombre darguments suggre quils contribuent la bonne marche des marchs financiers. En investissant dans des instruments financiers peu liquides et nouveaux, les hedge funds amliorent la liquidit des marchs et le processus de formation des prix 18. De mme, les hedge funds accroissent lefficience des marchs financiers, en effectuant des arbitrages sur les diffrences de prix entre titres similaires sur diffrents marchs19. La crise de 2007 a remis au got du jour les critiques adresses aux hedge funds qui se sont retrouvs au cur du march du crdit structur et ont pris part active dans les transactions portant sur les instruments de transfert du risque.

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Henry (2009) Ferguson & Laster (2007) Long Term Capital Management Weber (2007) Mustier & Dubois (2007)

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b) Le levier des hedge funds et les instruments de transfert du risque

b.1) Lapptit prononc des hedge funds pour les produits structurs haut rendement

La priode qui a prcd la crise, nous lavons vu, a t marque par des primes de risque faibles du fait de labondance de liquidits. Cette faiblesse des primes de risque a contrari les plans des investisseurs la recherche de hauts rendements. Ces investisseurs au premier rang desquels les hedge funds, vont voir en la titrisation une aubaine pour satisfaire cette qute de rendement (search for yield) avec une prfrence affiche pour les produits structurs les plus risqus20(cf. Table 2)

Table 2 : Expositions (% de lencours total) des Institutions Financires aux tranches de CDO Source : Blundell-Wignall (2007b)

A la veille de la crise financire, les hedge funds dtenaient prs de 47% de lencours total de CDO et prs de 80% de la tranche la plus risque, equity, qui offre par consquent le rendement le plus lev (cf. Table 2). Les produits structurs seront dans une large mesure utiliss par les hedge funds pour alimenter leur levier. En effet, ces produits structurs vont remplir loffice de collatraux, mis en garantie par les hedge funds auprs des banques dinvestissement qui excutent pour le compte de ces derniers, des activits de courtage et des oprations sur produits drivs ngocis de gr gr do le terme anglo-saxon de prime brokerage qui qualifie cette fonction de la banque dinvestissement. Les prime brokers21 jouent un rle essentiel au sein du systme financier international en tant que contreparties sur les marchs interbancaires et sur les marchs des drivs ngocis de gr gr, ils raffectent les risques et fournissent de la liquidit 22.
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Brunnermeier (2008) ; Weber (2007)

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Un cinquime des revenus des prime brokers provient des oprations effectues pour le compte des hedge funds. En finanant le levier de ces derniers, les prime brokers sexposent un risque de contrepartie qui est potentiellement source de risque systmique. La question du risque systmique inhrent aux relations entre les prime brokers et les hedge funds sera aborde ultrieurement. Les hedge funds aux avant-postes de la qute effrne de rendement sont lorigine dune forte demande de produits structurs, demande qui conforte la vitalit de la titrisation. Ils portent notamment leur intrt sur les tranches haut rendement les plus risques (equity et mezzanine) de sorte que les tranches rsiduelles, senior et super senior se retrouvent dans les bilans des SIV, conduits et autres investisseurs23. Cette prolifration des produits structurs labors avec une complexit de plus en plus grande, entrane paralllement le dveloppement des marchs des drivs de crdit, les credit default swaps (CDS) notamment, en vue de se prmunir contre lventuel risque de dfaut attach lacquisition de produits titriss. b.2) Les hedge funds et le march des CDS Les CDS sont des produits dassurance permettant de transfrer le risque de crdit dune contrepartie une autre. La contrepartie qui achte la protection (lassur) cherche se dfaire du risque de crdit sur une entit de rfrence (metteur obligataire). La contrepartie qui vend la protection (assureur) endosse le risque de crdit, en assurant lacheteur de CDS de lui rembourser les pertes quil viendrait subir, en cas de dfaillance de lentit de rfrence. En assumant le risque de crdit, le vendeur de CDS se rmunre au moyen dune prime priodique verse par lacheteur de CDS. Cette prime exprime en points de base sapplique sur le montant notionnel du swap, elle aussi appele spread du swap24. Les drivs de crdit et les CDS en particulier, prsentent un certain nombre davantages en termes defficacit et de rendement. Ils permettent de transfrer le risque de crdit, tout en conservant lactif sous-jacent dans le bilan.

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Avant la crise, on dnombrait cinq grands prime brokers sur la place de Wall Street : Goldman Sachs, Morgan Stanley, Lehman Brothers, Merrill Lynch et Bear Stearns. Les deux dernires banques suite leurs difficults ont t rachetes respectivement par Bank of America et JP Morgan. Lehman Brothers a connu un sort plus infortun que ces dernires et a t contrainte la faillite, le 15 septembre 2008. Goldman Sachs et Morgan Stanley, pour bnficier de certaines facilits de crdit de la Rserve fdrale, rserves aux banques de dpt ont largi leur champ dactivit et sont devenues des banques universelles.
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Weber (2007) BRI (2008a), The Joint Forum Ollon-Assouan (2004)

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De mme, les acheteurs de risque (vendeurs de protection via les CDS) amliorent la diversification de leurs portefeuilles et dans une certaine mesure se servent de ces drivs de crdit pour produire un effet de levier25. Les CDS vont connatre un essor fulgurant. Lencours notionnel de CDS est pass de 14 milliards USD fin 2005 prs de 58 000 milliards USD fin 200726. Le march des CDS doit pour une large part son essor, aux hedge funds qui vont largir le champ dutilisation des CDS des fins de spculation et darbitrage. Aussi, partir des CDS natra une nouvelle gnration de produits structurs, les CDO synthtiques trs priss par les hedge funds. Les CDS, supports des stratgies dinvestissement des hedge funds Les CDS qui sont initialement des produits dassurance seront dnaturs par les hedge funds qui verront dans cet instrument, un moyen daccrotre leur rendement,et ce faisant, ils vont grandement contribuer lessor de ce march en se portant la fois acqureurs et vendeurs de CDS (cf. Table 3).

Table 3 : Les positions sur le march des CDS (en % du total) Source, FMI (2008a), GFSR

Les hedge funds ont t lorigine de 28% et 31%, des achats et ventes de CDS, respectivement (cf. Table3). Il est aussi important de relever quentre 2004 et 2006, le poids des hedge funds dans le march des CDS a quasiment doubl (+106% pour la vente de CDS et +75%, dans lachat de CDS, alors que dans le mme temps, la part des autres acteurs du march des CDS tait en relatif dclin). Lhyperactivit des hedge funds sur le march des CDS sexplique par lusage que ces derniers en font des fins spculatives et darbitrage.

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Lubochinsky (2009) Idem

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La prime de CDS, comme nous lavons vu est dtermine par le risque de crdit par consquent, lvolution de cette prime reflte les fluctuations de la perception du risque par le march. Le supplment de rendement (points de base au-dessus du libor) offert par une obligation peut tre assimil une prime de CDS de maturit quivalente dans la mesure o, lune et lautre variable, expriment le risque de crdit dune contrepartie. Le lien entre titre obligataire et prime de CDS est tabli par Ollon-Assouan (2004). Bien que trs voisins, il ny a pas identit parfaite entre la prime de CDS et le spread de lobligation, communment appel base. Cette base fera lobjet dun arbitrage, de la part des hedge funds notamment. Selon que cette base, c'est--dire, la diffrence entre la prime de CDS et le spread de lobligation est positive ou ngative27, les hedge funds vont se porter vendeurs, respectivement acqureurs de CDS et vont adopter en consquence, une stratgie darbitrage. Si la base est ngative (prime CDS < spread), la stratgie darbitrage, consiste emprunter au taux libor, pour financer lachat dune obligation sur laquelle linvestisseur peroit le libor plus un spread. Pour se protger du risque de dfaut sur cette obligation, il achte un CDS et paie une prime. Au final, linvestisseur verse le libor sur son emprunt et une prime au vendeur de CDS, en revanche, il reoit sur son obligation le libor plus un spread. La base tant ngative linvestisseur ralise un profit, en empochant la diffrence entre le spread et la prime. Si la base est positive (prime CDS > spread), la stratgie darbitrage est oriente vers la vente de CDS, en vue dempocher la prime. Linvestisseur fait ainsi le pari que la dfaillance de lentit de rfrence dont la dette fait lobjet du CDS, est peu probable. Cette seconde forme darbitrage, qui offre un surcrot de rendement est plus risque car linvestisseur en vendant une protection sexpose un risque de contrepartie28. Outre ces stratgies darbitrage, les hedge funds adoptent dautres stratgies dites directionnelles qui sont purement spculatives29 ; il sagit alors danticiper une augmentation ou une diminution de la prime de CDS et de prendre des positions en consquence.

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Ollon-Assouan (2004) attribue le signe de la base des conditions structurelles et de march. Une base positive (prime CDS > spread obligataire) peut selon lauteur tre explique par la vigueur du march de la pension livre (repo) qui aurait tendance abaisser les spreads, ainsi que des facteurs conjoncturels qui entraneraient une forte demande de protection et le relvement des primes de CDS. Une base ngative (prime CDS < spread obligataire, par opposition est lie une hausse de loffre de protection, qui entrane la baisse des primes de CDS.
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Ollon-Assouan (2004) Idem

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29

Les CDS deviennent ainsi sous lactivisme des hedge funds, les supports de leurs stratgies dinvestissement. La dnaturation de ces instruments de transfert du risque ne sarrte pas l puisque les CDS seront incorpors dans la structuration des produits complexes et vont donner naissance une nouvelle gnration dactifs titriss, les CDO synthtiques. Les CDS, matire premire des CDO synthtiques trs priss par les hedge funds Les CDO que nous avons voqus plus haut sont totalement financs par les investisseurs qui en se portant acqureurs de tranches de CDO, permettaient aux investisseurs dacheter un pool dactifs. Les CDO synthtiques, par opposition aux CDO classiques sont partiellement financs (voire pas du tout) dans la mesure o une grande partie du transfert du risque vers les investisseurs se fait via les CDS. Linitiateur transfre le risque de crdit travers lachat de CDS auprs dune contrepartie, laquelle assure la tranche senior non finance. Ces investisseurs qui assument ce risque sans le financer, sont dtenteurs de CDO synthtiques dont le rendement est assimil la prime de CDS qui leur est verse par linitiateur. Selon Cousseran et Rahmouni (2005), lavantage des CDO synthtiques rside dans le fait quils permettent damples transferts de risque pour les banques cdantes, dans la mesure o le cot de ce transfert de risque (la prime verse) est infrieur la rmunration servie sur une tranche senior de notation AAA. Ces CDO permettent de rpliquer les performances dun CDO au moyen de la prime reue par le vendeur de CDS sans pour autant avoir le financer. Les hedge funds vont investir massivement dans ces titres, en vendant de la protection et en sexposant au risque de dfaut ventuel des dbiteurs de lentit assure. Par le truchement des hedge funds, lexpansion du march du crdit structur a accompagn quasi-symtriquement celle du march des drives de crdit. Les instruments de transfert du risque (produits titriss et drivs de crdit) reprsentent le pilier sur lequel repose le modle originate to distribute. Le succs rencontr par ces instruments a entran un important effet de levier car un risque transfr reprsentait une invitation quasi instantane de nouvelles prises de risque. Si le modle originate to distribute a constitu un facteur important pour expliquer laugmentation du levier dendettement, il ne suffit pas lui seul expliquer la fragilisation et la sous-capitalisation des bilans des tablissements financiers. Le recours important au financement de gros court terme sur le march montaire (wholesale funding) en rponse au dclin du financement traditionnel de dtail, constitue la seconde tendance de fonds dans laquelle se sont inscrites les institutions financires. Cette dpendance croissante au financement de gros sur le march montaire entrane une transformation excessive des chances.

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2.2)

La transformation excessive des chances : origines et ampleur

2.2.1) Causes structurelles du dveloppement du wholesale funding Jusquau dbut des annes 80, les dpts constituaient une source de financement bon march pour les banques, les banques Amricaines notamment grce la rglementation Q. La lgislation Amricaine interdisait aux banques de payer des intrts sur les dpts vue, et sous cette rglementation30, les taux dintrts qui pouvaient tre verss sur les dpts terme taient plafonns31. La rglementation Q se rvle contraignante pour les pargnants dans le contexte inflationniste des annes 70, qui rend ces derniers de plus en plus sensibles aux diffrentiels de rendement des actifs. Cette rglementation sera contourne au moyen de linnovation financire. Les dpts faiblement rmunrateurs seront convertis en actifs rendement lev. Aux Etats-Unis, le dsir de contourner cette rglementation se traduit par une innovation financire majeure, la cration des money market mutual funds (MMMF) ou fonds collectifs de march montaire. Ces fonds montaires proposent leurs clients des parts auxquels ils souscrivent pour des montants faibles et partir des capitaux collects, le fonds investit en titres court terme sur le march montaire. Les clients du fonds, dtenteurs de parts, peuvent les vendre en les utilisant comme moyen de paiement travers lmission de chques. Les parts dtenues par les clients du fonds montaire sont mobilisables tout moment, au mme titre que des dpts vue, ceci prs que contrairement ces derniers, ces parts rapportent lpargnant des intrts. Ainsi, les parts mises par les fonds de march montaire chappent la rglementation Q, compte tenu du fait quelles ne peuvent tre lgalement considres comme des dpts, ce faisant, elles rapportent leurs dtenteurs des taux plus levs que les taux perus sur les dpts bancaires terme32. Ces innovations financires conduisent les pargnants se rabattre vers de nouvelles formes dintermdiation financire plus rmunratrices et amorcent le dclin de la banque sous sa forme traditionnelle qui repose essentiellement sur la collecte de dpts.

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La rglementation Q a t abroge au dbut des annes 80 sous ladministration Reagan Mishkin, Bordes, Hautcoeur, Lacoue-Labarthe (2005) Idem

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En rponse au dclin relatif du financement de dtail par les dpts (retail funding), les banques vont privilgier un financement de gros (wholesale funding) sur le march montaire. Les dpts (core deposits)33 reprsentaient en 1980 prs de 70 % du passif total des tablissements financiers aux Etats-Unis, ils reprsentent actuellement un peu plus de 40% du passif total (Cf. Graphique 3). Dans le mme temps, lendettement court terme sur le march montaire gagne en importance ainsi quen tmoigne la forte progression du ratio entre la dette court terme et le total du passif.

Graphique 3 : Evolution de la structure du passif des bilans bancaires aux Etats-Unis source : FMI (2008b), Global Financial Stability report Les entits hors-bilan ne collectent pas de dpts et se financent quasi exclusivement sur le march montaire. Elles sont lexemple le plus loquent de cette mutation de lactivit bancaire de plus en plus dpendante des marchs financiers. Le financement de gros sur le march montaire a favoris laugmentation du levier dendettement des banques et de manire plus marquante, celui des entits hors-bilan. Le dveloppement de ce mode de financement sest rvl parfaitement en phase avec lesprit du modle originate to distribute (OTD).

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On prend ici en compte, les dpts vue et les dpts terme.

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Dune part, le modle OTD modifie lactif du bilan bancaire par la transformation de prts illiquides sortis du bilan, en produits structurs ngociables (ventuellement rachets par les banques et rintgrs au bilan pour doper les rendements) ; dautre part, le financement de gros sur le march montaire a modifi la structure du passif du bilan bancaire en rodant la part des dpts au profit de la dette court terme voire trs court terme, sans cesse renouvele. Le renouvellement permanent de cette dette court terme sur le march montaire rend ce mode de financement trs prcaire car en cas de tensions sur le march montaire, le refinancement sur ce march est remis en cause. Ces deux volutions majeures en transformant la structure du bilan tant lactif quau passif, ont favoris le glissement de lindustrie bancaire vers une hyperactivit sur les marchs financiers ainsi quen tmoigne le dveloppement du march du repo, segment important du march montaire.

2.2.2) Financement de gros sur le march montaire : cas du march du repo 2.2.2.1) Fonctionnement du march du repo Le repurchase agreement communment appel repo34 est une forme de prt collatralis . Lentit qui emprunte de largent en contractant un repo, vend en guise de garantie des titres au prteur. Lemprunteur sengage racheter ces titres la date fixe par le contrat, do le nom de repurchase agreement (accord de rachat). Par opposition, le reverse repo dsigne lacte inverse consistant prter de largent contre des titres reus sous forme de collatraux. Ces prts collatraliss seffectuent sur des chances courtes variant de trois mois un jour (quelquefois, un an). En contractant un repo, lemprunteur se refinance en vendant au prteur des titres un prix infrieur au prix de march. La diffrence entre le prix de march et le prix de vente reprsente une dcote appele haircut. La dcote sexprime en points de base du nominal et reprsente un cot support par les capitaux propres de lemprunteur35. La dcote est une garantie contre le risque ventuel de dprciation des titres mis en garantie. Si le contractant du repo se trouve dans limpossibilit de racheter ses titres la date fixe, le prteur peut alors dcider de vendre les titres sur le march, et donc la dprciation de la valeur de ces titres peut potentiellement tre pour le prteur, synonyme de pertes.

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En France, le repo peut tre assimil la pension livre qui en est une technique voisine. Brunnermeier, Pedersen (2008)

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Cest pour prvenir ce risque que le prteur applique une dcote plus ou moins leve selon le risque attach aux titres mis en garantie. A lchance, outre le rachat de ses titres, lemprunteur verse au prteur des intrts. Ce mode de financement sur le march du repo entre en concurrence avec le mode de prt non collatralis , sur le march interbancaire notamment. Ce mode de financement rencontre un succs grandissant auprs des institutions financires, dune part parce quil est moins onreux et dautre part et surtout, il permet aux tablissements financiers de mener des activits de march et dexercer un effet de levier important. 2.2.2.2) Interaction entre repo et effet de levier Le repo est un instrument trs utilis par les institutions financires pour financer des activits spculatives sur le march des titres. En effet, dans le cadre dun repo, les fonds obtenus permettent de financer des positions longues (spculer la hausse) sur des titres, et inversement, un reverse repo permet dobtenir des titres, pour prendre sur le march des positions courtes (spculer la baisse)36. a) Repos et prise de positions longues

Les fonds obtenus partir dun repo, permettent de financer lacquisition de titres, qui leur tour peuvent tre mis en garantie, pour lever des fonds dans le cadre dune nouvelle opration de repo, et ainsi de suite Ces transactions de repo renouveles et superposes accroissent leffet de levier de lentit aussi longtemps que cette dernire a suffisamment de fonds propres pour faire face la dcote impose par le prteur. Plus cette dcote est faible, plus le levier est potentiellement important. b) Reverse repos et prise de positions courtes

La prise de position courte ou vente dcouvert est une opration que linvestisseur ralise quand il anticipe la baisse du prix dun titre. Linvestisseur emprunte le titre un courtier (gnralement le prime broker) puis il vend le titre dont il nest que le propritaire temporaire et sengage le restituer ultrieurement. A lchance, linvestisseur rachte le titre pour le restituer au courtier. Il ralise un profit si comme il lavait anticip le prix du titre baisse, son gain reprsente alors la diffrence entre le prix de vente moins le prix dachat et les commissions verses au prime broker.

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BRI (1999)

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Pour fournir ce service leurs clients et leur permettre de mener des oprations de ventes dcouvert (short selling), il suffit alors aux prime brokers de contracter des reverse repos. c) Repos et augmentation de leffet de levier

Les prime brokers ont jou un rle de premier plan au sein du march du repo pour le financement de leur levier et aussi pour le compte de leurs clients, les hedge funds. Les prime brokers se sont livrs une concurrence accrue pour fournir leurs services aux hedge funds contre lesquels ils rcoltent des commissions substantielles. Cette forte concurrence entre prime brokers va se traduire par des dcotes (haircuts) de plus en plus faibles et cette situation facilite le financement des activits de march des hedge funds qui peuvent sans difficult alimenter et accrotre leur levier37. Les prime brokers disposent de deux principaux modes de financement court terme : lemprunt non collatralis travers lmission de papier commercial ou sur le march interbancaire ou lemprunt collatralis ou garanti sur le march du repo comme nous venons de le voir. Si lactivisme des prime brokers sur le march du repo se justifie par les services de courtage fournis leurs clients, il apparat aussi que lessentiel de leur dette court terme est finance partir de repos. Adrian & Shin (2007) vont plus loin, leur tude rvle que lexpansion des bilans des banques dinvestissement qui tiennent le rle de prime brokers seffectue essentiellement travers des oprations de repo. Autrement dit, le levier des prime brokers est quasi exclusivement financ partir de repos do une corrlation forte et positive entre les fluctuations de la taille de leurs bilans et le volume de repos contracts qui figurent au passif de leurs bilans38. Les repos sont un vecteur, entre autres, de la procyclicit du levier. Dans un contexte o les bilans sont valus en valeur de march (mark to market), lapprciation du prix des actifs encourage les banques sendetter davantage sur le march du repo et augmenter ainsi leur levier39.

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Brunnermeier & Pedersen (2008)

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Le levier (L), nous le savons , est le rapport entre le montant des actifs (A) et le montant des fonds propres (K) ; L = A/K. Or nous le savons K, reprsente la diffrence entre le montant des actifs, et la dette totale (D), donc K = A D, or le repos sont inclus dans D. Si le volume de repos augmente, toutes choses gales par ailleurs, D augmente et K c'est--dire (A-D) baisse. La baisse de K, le dnominateur, entrane ainsi une augmentation de leffet de levier. Par consquent, laugmentation du volume de repos entrane toutes choses gales par ailleurs, laugmentation du levier.
39

Adrian & Shin (2008a)

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En largissant le spectre des actifs ngociables, la titrisation a dans une certaine mesure, favoris le dynamisme du marche du repo. Les produits titriss sont de plus en plus prsents en guise de garantie, pour lever des fonds dans des oprations de repos40. Concrtement ce dynamisme sest traduit depuis 2000 par un doublement de la taille du march du repo, lencours brut atteignant fin 2007 plus de 10 000 milliards USD aux EtatsUnis41. La dpendance croissante du systme bancaire, les banques dinvestissement en particulier, ce mode de financement, soulve un certain nombre de questions. Sil est vrai que le financement au moyen de repos minimise le risque de contrepartie grce la fourniture de titres sous forme de garanties , il nen reste pas moins que ces oprations comportent un risque de march li la volatilit potentielle laquelle peuvent tre soumis les titres apports en garantie. Cette situation rend le march du repo trs sensible la volatilit de march. De mme, en supplantant le financement de dtail (retail funding) et mme le financement interbancaire, le financement au moyen de repos pose la question cruciale de la transformation excessive des chances.

2.2.3) La transformation excessive des chances (maturity mismatch) Selon Goodhart (2008), la liquidit dune banque peut tre apprhende sous deux aspects : le premier est li la transformation des chances , c'est--dire lcart des maturits entre les passifs et les actifs dune banque, le second aspect repose sur la liquidit des actifs de la banque, c'est--dire la facilit et la rapidit avec lesquelles, ces actifs peuvent tre cds sans perte significative de valeur quelque soit la situation du march. Plus prcisment, la transformation des chances dsigne pour Goodhart (2008), le dlai durant lequel la banque peut rester en mesure dhonorer ses engagements si toutefois la liquidit du march interbancaire (ou montaire) venait sasscher brutalement. La transformation des chances ainsi dfinie, apparait ds lors intimement lie la liquidit des actifs. Lauteur marie ainsi les deux aspects de la liquidit bancaire : plus les actifs dune banque sont liquides et cessibles tout moment prix ferme, moins elle a se soucier de la transformation de ses chances puisquelle peut compenser les retraits de passifs par le produit des cessions dactifs .

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Adrian & Fleming (2005) Hrdahl & King (2008)

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Autrement dit, une banque qui nest pas assure de dtenir en quantit suffisante des actifs liquides voire trs liquides, en vue de prserver sa solvabilit en cas de tensions au passif de son bilan (retraits de dpts, dprciation des fonds propres), agit imprudemment en aggravant la transformation de ses chances par un endettement excessif sur le march interbancaire et montaire dont le renouvellement est plus quhypothtique si le march montaire est sous tension. Lmergence du modle OTD a renforc la dgradation de la transformation des chances par la sortie de lactif de prts illiquides, transforms en produits structurs dont la liquidit a t mise mal, au lendemain de la crise de lt 2007 sur le march du crdit structur, nous y reviendrons. De mme, le dclin relatif des dpts qui a conduit une modification de la structure du bilan bancaire, a contribu une transformation des chances de plus en plus audacieuse. Le financement de dtail qui se rarfie va pousser les tablissements de crdit lui substituer le financement de gros sur le march montaire. Les prts long terme se financent de moins en moins par les dpts et davantage partir des emprunts court terme sur le march montaire. Si ces deux sources de financement sont par nature volatiles, il nen demeure pas moins que le financement de gros sur le march montaire reste un mode de financement plus incertain que le financement par les dpts dont la prennit est indirectement prserve par les garanties des pouvoirs publics visant prvenir une rue des dposants qui mettrait en pril la solvabilit des banques. Par consquent, la question de la transformation des chances pour les banques dont le financement repose fortement sur le march montaire se pose avec une plus grande acuit que par le pass du fait de la prcarit de ce mode de financement, en ce sens o le renouvellement trs frquent quil requiert peut tre remis en question en cas de tensions sur le march montaire. Les banques dinvestissement et les SIV prsentent des bilans particulirement exposs cette transformation excessive des chances.

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2.2.3.1) La transformation des chances des banques Les banques dinvestissement se financent quasi-exclusivement sur les marchs. Elles ne peuvent pas collecter des dpts auprs du public. Cette caractristique les rend particulirement dpendantes du march montaire, le march du repo en particulier.

Table 4 : Prsentation schmatique du bilan dune banque dinvestissement ( prime broker) Source : Adrian, Shin (2007)

En recourant massivement la dette court terme non collatralis (interbancaire, papier commercial) ou collatralis (repo), les banques dinvestissement prsentent un levier nettement suprieur celui des banques commerciales et sont plus vulnrables que ces dernires au niveau de la transformation des chances. Les bilans des banques dinvestissement essentiellement valoriss au prix du march, sont de taille et de structure trs fluctuantes ; nanmoins nous pouvons avancer certains ordres de grandeur42 pour rendre compte de la structure du passif dune banque dinvestissement. Les capitaux propres prsentent une fraction faible du passif prs de 4 5%, soit un levier trs significatif oscillant autour de 20 25. La dette long terme reprsente une part ngligeable du passif dont prs de 90% est constitu de la dette court terme do une transformation excessive des chances qui rend les bilans des banques dinvestissement trs fragiles. Lexemple le plus emblmatique de cette transformation des chances est sans doute celui de la banque Britannique Northern Rock dont la dette maturit de moins de 3 mois reprsentait fin 2006 prs de 33% du passif alors que les actifs les plus liquides de la banque dont la maturit tait de moins de trois mois ne reprsentait que 8% de la taille du bilan, soit un gap de liquidit considrable43. Cette transformation excessive des chances a plac la banque dans une situation dlicate partir du moment o elle sest retrouve dans lincapacit de renouveler sa dette court terme sur le march montaire.
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Ces ordres de grandeur sont fournis par Adrian, Shin (2007) sur la base de la structure du bilan de la banque dinvestissement Lehman Brothers.
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Artus (2009)

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Une telle dpendance, vis--vis du march montaire, le march du repo en particulier expose les banques un risque de liquidit de financement. La liquidit de financement dsigne laptitude se refinancer sur les marchs. Cette liquidit de financement peut tre compromise en cas de tensions sur le march du repo et plus largement sur le march montaire. 2.2.3.2) La transformation des chances des SIVs Les SIVs sont exposs au mme titre que les banques dinvestissement la transformation des chances. Les actifs du SIV sont majoritairement constitus dABS et dautres produits structurs (cf. Table 1 p. 22), long terme et par nature peu liquides. Ces actifs sont financs grce lmission de papier commercial court terme adoss des actifs structurs, il sagit de lAsset backed commercial paper (ABCP). LABCP dont la maturit moyenne est de 90 jours44 nest pas le seul mode de financement des SIV, ils se financent aussi partir de la dette moyen terme sur le march montaire Cette transformation des chances gnre par les SIVs est trs critique dans la mesure o, elle est en partie troitement lie au bon fonctionnement du march du crdit structur. La dtrioration de la qualit des actifs du bilan en particulier les ABS, place les SIV dans une position dlicate qui peut se traduire par lincapacit renouveler lmission dABCP, compte tenu de la dgradation du sous-jacent. Le gap de maturit (la diffrence entre lchance moyenne des actifs et lchance moyenne des passifs) des SIV est de lordre de 2 5ans45. Dans ces conditions, en labsence de renouvellement de sa dette court terme, le SIV se retrouve rapidement en situation dinsolvabilit, leurs actifs tant nous lavons vu, faiblement liquides. Les profondes mutations de la banque dcrites jusque l, ont pour dnominateur commun une forte prgnance des oprations de march dans lactivit bancaire. Cet ancrage de la banque dans les marchs financiers qui a modifi la structure du bilan bancaire lactif et encore davantage au niveau du passif, trouve sa meilleure illustration dans lascension des banques dinvestissement (prime broker dealers) mesure que dclinait la forme traditionnelle de lactivit bancaire. Cet ancrage est aussi confirm et confort par lmergence dun systme financier parallle, qualifi aussi par certains de systme financier fantme bien que trs tangible car compos notamment des hedge funds, extrmement prsents sur les marchs et des entits hors

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Brunnermeier (2008)

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Mason (2008)

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bilan : les SIV et conduits dont les bilans ont dupliqu lextrme, les dsquilibres structurels de bilan dcrits plus haut. La banque nagure, jouissait de par sa base de dpts dun matelas de scurit sauf cas extrme et prvenait le risque de crdit par une slection soigne de ses actifs qui fondait par l mme la qualit de ces derniers. Sous le modle OTD, elle est soumise plus que par le pass la volatilit des marchs financiers qui peut potentiellement branler la structure dsormais fragile du bilan bancaire. La banque traditionnellement expose au risque de crdit doit prsent assumer en sus, le risque de march. Pour se prmunir de ce nouveau risque inhrent au changement du modle dactivit, de nouveaux standards de gestion du risque de march seront labors linstar de la value-atrisk (VaR).

2.3)

Les nouveaux standards de la gestion du risque : cas de la Value-at-Risk (VaR)

En 1996, le comit de Ble a dict de nouvelles de nouvelles rgles visant tendre la surveillance des risques, au risque de march notamment. Pour mesurer leur risque de march, les banques ont le choix entre deux approches : une mesure standard normative et une autre reposant sur lutilisation de modles internes soumis au rgulateur46. De nombreuses banques vont privilgier lutilisation de modles internes, linstar de la Value-at-Risk (VaR). 2.3.1) La VaR : principes gnraux La VaR se dfinit comme la perte potentielle maximale conscutive une volution dfavorable des prix de march dans un intervalle de temps spcifi et un seuil de confiance donn47. La VaR propose une dfinition probabiliste de limpact sur la valeur du portefeuille, de variations alatoires des facteurs de risque sur un intervalle de temps donn en indiquant la probabilit que la perte ralise soit suprieure la VaR48

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Dumontier, Dupr (2005) Lvy-Rueff (2005) Crouhy (2008)

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Encadr 1 : Dtermination paramtrique de la Value-at-Risk (VaR) Soit V, la valeur de march linstant t ; R, le rendement sur un horizon H ; dsigne lesprance de rendement et R*, le pire rendement attendu au seuil de confiance c (95 ou 99%), tel que : V* = V (1 + R*) V* reprsente la valeur de march de la position la plus dfavorable attendue au seuil de confiance c, sur lintervalle H. La Value-at-Risk note VaR(H, c) dsigne la perte maximale potentielle au seuil c et sur lhorizon H ; qui est gale la diffrence entre la valeur de march espre du portefeuille (E(V)) et sa valeur la plus dfavorable (V*) : VaR (H,c) = E(V) - V* VaR (H,c) = V (1 + ) V (1 + R*)

Dans sa spcification non paramtrique, la VaR est obtenue empiriquement partir des performances passes du portefeuille. Par exemple, pour obtenir la VaR un seuil de confiance de 99%, on prend le revenu moyen issu des activits de trading sur une priode donne auquel on additionne la perte maximale enregistre par le dernier centile dans la distribution des revenus sur cette priode. La mthode paramtrique du calcul de la VaR repose sur lhypothse de la distribution normale des rendements du portefeuille, elle estime deux paramtres : , lesprance de rendement, et , lcart-type. La distribution des rendements suivant une loi normale, R* scrit aussi : , reprsente le quantile de la loi normale un seuil de confiance donn. Si le seuil de confiance est fix 99%, la loi normale centre rduite tablit 2,33, la valeur de , tel que 99% des observations sont comprises entre 2,33 fois et -2,33 fois lcart-type. En remplaant, lexpression (2), dans la formulation de la VaR donne par (1), on obtient :

Source : Crouhy, Galai, Mark (2006) ; Dietsch, Petey (2003)

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Le calcul de la VaR peut seffectuer selon trois mthodes principales : la mthode paramtrique, la mthode non paramtrique et la mthode de Monte-Carlo (cf. Encadr1). La VaR sest impose comme tant un outil indispensable dans les prises de dcisions stratgiques de la plupart des institutions financires, en particulier pour les banques dinvestissement dont lactivit comporte un risque de march significatif. En effet, la VaR va jouer le rle de baromtre qui va permettre aux banques dajuster leur risque par rapport lenvironnement du march. Ds lors, un lien troit quasi-linaire stablit entre la VaR et leffet de levier.

2.3.2) Interaction entre la VaR et leffet de levier La VaR calcule par les banques dinvestissement dtermine pour une large part les fluctuations frquentes de la taille de leurs bilans et donc, leur levier49. Les banques dinvestissement ajustent leurs expositions de telle sorte que la VaR totale de lensemble de leurs oprations de march est couverte par leurs fonds propres. Autrement dit, les positions de la banque dinvestissement sont prises de faon ce que leur VaR cumule puisse tre absorbe par leurs fonds propres et ce faisant, nous observons une relation inverse entre la VaR et le levier50. Si on dsigne par V, la VaR par unit montaire dactifs dtenus par la banque, la VaR totale est donne par V que multiplie A, la valeur montaire des actifs. Si la VaR totale sajuste par rapport aux capitaux propres (K), comme nous venons de le dire, alors il vient, la relation suivante : K = V*A or, le levier (L) est le rapport entre le montant des actifs et les fonds propres : L = A /K L= A/ V*A On en dduit la relation inverse suivante entre la VaR et leffet de levier : L = 1/V

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Adrian & Shin (2008b) Greenlaw et al. (2008) ; Adrian & Shin (2008b)

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Quand la mesure du risque est faible, le levier a tendance augmenter. La priode qui a prcd la crise financire, nous lavons vu, a t caractrise par des primes de risque faibles et une volatilit basse, qui ont incit un recours excessif au levier dendettement. En effet, la rduction de la VaR du fait de la faible volatilit des marchs, libre du capital supplmentaire et pousse les institutions financires augmenter leur levier et dtenir des actifs plus risqus.51 Dans cet environnement de faible volatilit, les banques dinvestissement, paradoxalement ont vu leurs VaRs augmenter. En effet, laugmentation de la VaR moyenne des banques dinvestissement nest pas due une apprciation de la mesure du risque qui dclinait plutt comme nous lavons vu, mais davantage un accroissement de la taille des bilans des banques dinvestissement, laugmentation du levier et la multiplication des positions risques sous leffet permissif dune faible mesure du risque. Laugmentation du ratio moyen VaR/Fonds propres des banques dinvestissement (cf. Graphique 4) montre que la prise de risque de ces dernires a augment plus vite que leur capacit faire face aux pertes auxquelles cette prise de risque accrue les expose.

Graphique 4: Evolution de la VaR moyenne et du ratio VaR/FP des banques dinvestissement Amricaines source : FMI (2007), Global Financial Stability report

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FMI (2007)

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Depuis sa diffusion dans lindustrie bancaire il y a de cela prs de 10 ans, la VaR sest globalement rvle fiable. Cependant, en priode de fortes tensions sur les marchs financiers, la VaR devient inadapte pour mesurer le risque ; le risque de liquidit, partie intgrante du risque de march nest pas traite de manire satisfaisante par la VaR52. En priode de fortes tensions sur les marchs financiers suivies dune crise de liquidit, les pertes excdent frquemment les VaR publies par les institutions financires. Bien que les VaR augmentent en pareille priode en rponse la forte volatilit des marchs elles rendent trs imparfaitement compte du risque de march et constituent de surcrot, un potentiel vecteur de risque systmique dans la mesure o les institutions financires face laugmentation de la VaR manifestent une certaine aversion au risque et liquident massivement et simultanment leurs positions. Le modle originate-to-distribute en simposant comme le nouveau paradigme de lactivit bancaire a accru les vulnrabilits des institutions financires. Au chapitre de ces vulnrabilits figure au premier rang, un recours immodr au levier notamment de la part des banques dinvestissement et du systme bancaire parallle.

Graphique 5 : Evolution du levier dendettement des grands groupes bancaires Source: FSA(2009)

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Bervas (2006)

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Le levier dendettement des grands groupes bancaires a fluctu entre 20 et 40 au cours de la dcennie coule (cf. graphique 5). Leffet de levier excessif constitue un facteur crucial pour comprendre lampleur et la svrit de la crise financire internationale53. Le recours excessif leffet de levier a entran dans son sillage dautres drives dans la pratique de lactivit bancaire qui leur tour, constituent autant de facteurs de vulnrabilit : lexpansion sans prcdent de taille des bilans bancaires qui ont cr plus vite que lconomie relle ; lexpansion de la titrisation et la prolifration des produits structurs rendus de plus en plus complexes pour doper les rendements dinvestisseurs friands dactifs risqus dans un environnement de faiblesse des primes de risque ; les dpts dclinant, le financement du secteur bancaire soriente vers le financement de gros sur le march montaire avec pour consquence, la modification de la structure du passif bancaire et laggravation de la transformation des chances ; et enfin des bilans sous-capitaliss, compte tenu du fait que les pertes auxquelles sexposent les banques en accroissant la taille du bilan et la prise de risque ne peuvent tre absorbes par les capitaux propres. Confrontes aux lourdes pertes subies directement ou indirectement suite lclatement de la crise, les institutions financires pour y faire face nauront dautre choix que de se dsendetter massivement, en vendant ou plus justement en bradant leurs actifs les plus liquides pour prserver une solvabilit dsormais menace. Les fonds propres des institutions financires valoriss au prix du march se dprcient fortement, ce qui entrane mcaniquement une hausse du levier. Pour maintenir leurs fonds propres en adquation avec la rglementation, les banques vont ds lors semployer rduire leur levier en liquidant leurs actifs, elles procdent ainsi au deleveraging. Le deleveraging est proccupant un double titre : dune part, le risque systmique quil comporte, aggrave lchelle du systme financier la crise de liquidit et dautre part, le deleveraging saccompagne dune contraction des bilans bancaires qui peut conduire une restriction des crdits (credit crunch) aux effets rcessifs pour lconomie relle.

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Hildebrand (2008)

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II)

Du deleveraging des acteurs du march du crdit structur au deleveraging systmique

1) Le prlude du deleveraging : des fortes dprciations la crise de liquidit Lmergence du modle originate-to-distribute, comme nous lavons largement vu, repose sur linnovation financire majeure que constitue la titrisation. Lexpansion de la titrisation a entran une forte augmentation du volume des crdits distribus du fait du relchement des conditions dattribution des prts. Cette abondance de crdits va notamment profiter au march hypothcaire Amricain, en particulier le secteur des crdits subprime accords aux mnages les moins solvables. Ds 2006, on observe la multiplication des taux de dfaut sur les crdits subprimes. Les produits structurs adosss aux prts subprimes se dgradent et les institutions financires qui dtenaient ce type de produit enregistrent les premires pertes, acclres par la valorisation de ces produits au prix du march (mark to market) do le rle crucial jou par la comptabilit en valeur de march dans lampleur des pertes subies. La crise franchit rapidement le secteur du march hypothcaire et devient au sens large une crise de liquidit qui frappe le systme financier dans son ensemble et menace la solvabilit des institutions financires quelles vont tenter de prserver en procdant au deleveraging. 1.1) Lclatement de la crise Entre 2001 et 2006, les prts subprime ont t multiplis par 7 passant de 94 685 milliards USD54. Ces crdits subprime seront massivement rachets puis titriss par les banques dinvestissement et les government sponsored entities (GSE) tels que Freddie Mac ou Fannie Mae. La dgradation continue de la qualit des crdits subprime conjugue un durcissement de la politique montaire55, entrane une hausse du taux de dfaut qui passe de 2,6%, mi-2005 13% fin 200656. La hausse des taux de dfaut entrane la chute des prix de limmobilier qui entrane de manire rtroactive la hausse des taux de dfaut, tant donn que lexpansion des crdits subrpime reposait essentiellement sur laugmentation de la valeur du bien immobilier, qui remplissait alors loffice de collatral. Le mcanisme est le suivant : la hausse du prix des logements assurait la croissance des crdits hypothcaires laquelle entretenait en retour la hausse des prix de limmobilier et alimentait la bulle immobilire.

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Artus et al. (2008) Entre 2004 et 2006, le taux de la Fed passe de 1% 5,25%. Klein (2008)

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Ce lien troit entre les crdits et la valeur des logements explique la rapidit avec laquelle la chute des prix de limmobilier sest traduite par une forte augmentation des taux de dfaut et sest accentue avec les saisies des biens immobiliers des mnages en dfaut de paiement. Les ABS adosss aux crdits subprime ne vont pas tarder surragir la hausse des dfauts de paiement. Cest travers la chute de lindice ABX ds fvrier 2007 que la hausse des dfauts de paiement sur les prts subprime a t suivie dune dgradation de la valeur des produits structurs (ABS et RMBS). Lindice ABX introduit sur le march en 2006 est constitu dun panier de 20 ABS et exprime le prix de ce panier dABS qui vaut 100, diminu dune prime de CDS exprime en points de base qui reprsente le prix de lassurance contre une dgradation des ABS57. A mesure que le besoin de sassurer contre le risque sur les acteurs du march du crdit structur grandissait, on a observ une augmentation de la prime de CDS qui a dgrad la valeur de lindice ABX. Par exemple, lorsque le prix de lassurance (prime de CDS) permettant de toucher maturit 100% du prix initial du panier dABS reprsente 5%, alors la valeur de lindice ABX est de 95, autrement dit, si le dtenteur dABS achte une protection et sen acquitte en payant une prime de 5%, il peroit 95% de la valeur de la valeur du panier dABS. Ces indices sont calculs pour chaque tranche investment grade cest dire de BBB AAA. Lindice ABX BBB 07-0158 qui stablissait prs de 100 lors de son lancement en janvier 2007, chute brutalement 72 fin fvrier (cf. Graphique 5) La multiplication des dfauts pousse les investisseurs se protger contre le risque de crdit ce qui entrane un renchrissement du cot de lassurance et une explosion des primes de CDS et leffondrement de lindice ABX. Jusquen mi-2007, seule la tranche BBB est attaque et poursuit son effondrement. Lindice ABX BBB 07-01 stablit mi-2007 prs de 50 soit une dprciation de moiti de la valeur du panier dABS depuis le dbut de 2007 (cf. Graphique 5). Les conditions saggravent brutalement en juillet 2007 lorsque les tranches suprieures AA voire AAA sont attaques suite une dcision des agences de notation le 12 juillet, de revoir la baisse la notation des tranches59. Les indices ABX AA 07-01 et ABX AAA 07-01 chutent brutalement tandis que lindice ABX BBB 07-01 poursuit sa baisse vertigineuse. Lt 2007 marque ainsi le dbut de la crise qui soumet les marchs financiers une forte volatilit et fait subir de lourdes pertes aux institutions financires.
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Jorion (2008) ; Gorton (2008)

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BBB fait rfrence la notation du panier dABS, et 07-01, renvoie lanne et au semestre au cours desquels, lmission sest effectue.
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Jorion (2008)

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Graphique 6 : Evolution de lindice ABX Source: Brunnermeier (2008)

1.2) Les pertes et dprciations subies par les institutions financires A partir de lt 2007, les banques et les autres institutions financires qui ont pris part active au sein du march du crdit structur subissent deux catgories de pertes : dans un premier temps, les pertes directes lies aux crdits hypothcaires non encore titriss sont supportes par les initiateurs du crdit, dans un second temps, les pertes lies aux dprciations dactifs des produits structurs valoriss au prix du march (mark-to-market losses). 1.2.1) Les pertes directes lies aux crdits hypothcaires Les banques commerciales initiatrices du crdit ont t particulirement exposes aux crdits subprimes, hauteur 40% des expositions totales des institutions financires Amricaines. Les pertes directes totales des institutions financires sont estimes en octobre 2008 425 milliards USD en incluant les pertes sur les crdits hypothcaires autre que subprime (Alt- A, prime, crdits immobiliers non rsidentiels) ainsi que les crdits la consommation et aux entreprises60 (Cf. Annexe 1 p. 82).

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FMI (2008b) GFSR, p.15

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Ces estimations sont trs en de des pertes directes effectivement enregistres qui slevaient fin septembre 760 milliards USD61. Les pertes des institutions de crdit initialement enregistres uniquement sur les expositions subprime se rpandent aux autres types de crdits hypothcaires : les crdits Alt-A et prime. La solvabilit des dbiteurs prime et Alt-A, en principe plus satisfaisante que celle des emprunteurs subprime ne va pas rsister longtemps la forte chute des prix de limmobilier conjugue moyen terme aux effets dvastateurs dun accroissement du chmage qui pourrait ruiner leur solvabilit dj fragile et par ce biais entraner des pertes de second tour pour le systme bancaire. Les dprciations dactifs qui gangrnent les bilans bancaires npargnent pas les crances que le systme bancaire dtient sur les entreprises (corporate loans) et les fonds de private equity (leveraged loans), crances qui taient ensuite titrises au mme titre que les crdits hypothcaires. Leffondrement de lindice ABX et par suite, celui des produits structurs, rend dsormais la titrisation suspecte et rduit considrablement, la demande de produits structurs qui suscitaient dans un pass rcent, lengouement des investisseurs. La titrisation, tombe en disgrce, les banques se voient ds lors contraintes de conserver dans leurs bilans, ces crances exposes de fortes dprciations, compte tenu des menaces qui psent sur la solvabilit des dbiteurs. Aux pertes directes enregistres par les institutions financires, sajoutent les dprciations lies la dgradation de la valeur de march des produits structurs.

1.2.2) Les pertes lies la valorisation aux prix du march (mark-to-market losses) Si les pertes directes lies aux crdits subprime et autres crances hypothcaires ont t essentiellement supportes par le secteur bancaire ; les pertes lies aux dprciations dactifs valoriss au prix du march frappent plus largement les institutions financires, dont lactif du bilan contenait des produits structurs. Les tentatives destimations des pertes lies la dprciation de la valeur de march des actifs aboutissent des rsultats avec des carts importants. Le FMI (2008b) estime 980 milliards USD, les pertes lies aux dprciations dactifs, dont 54% sont imputes au secteur bancaire. Les estimations de la Banque dAngleterre (BoE (2008)), plus pessimistes parviennent un chiffre de 2800 milliards USD (Cf. Annexe 1 P. 82) dont 1577 milliards USD, pour les USA. Les produits structurs on t sanctionns doublement. La premire sanction comme nous lavons vu, est ne de la multiplication des dfauts de paiement sur les crdits subprime, dfauts de paiement qui se sont ensuite gnraliss au sein du march hypothcaire suite leffondrement du collatral : la valeur du logement.

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FMI (2008b) GFSR, p.15

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Ces dfauts de paiements ont t naturellement suivis dune dgradation de la valeur des produits structurs qui taient adosss aux crdits hypothcaires. La seconde sanction a t inflige par les marchs, elle sest rvle sans appel, brutal et disproportionne. Elle sest traduite, nous lavons vu par la chute libre de lindice ABX qui a surragi la dgradation des actifs sous-jacents. La dgradation de la note des rehausseurs de crdit, les monolines, a sans nul doute jou un rle important dans lemballement de la chute de lindice ABX. Les monolines, forts dune note AAA, indice de la fiabilit de leur garantie, ont tendu leurs activits de rehaussement de crdit aux produits structurs issus de la titrisation. Ds le dbut de 2008, il paraissait de plus en plus probable que les monolines faiblement capitaliss, prouveraient de grandes difficults pour assumer leur fonction dassureur face la multiplication et laccentuation des pertes sur les produits structurs auxquels ils avaient apport leur garantie. Ds lors, la note AAA des monolines ne parat plus justifie, elle est revue la baisse ds janvier 2008 par les agences de notation. Cette dgradation de la note des monolines, sera lourde de consquences. Elle a trois effets immdiats62 : le premier fut la rduction de lactivit des monolines car la dgradation de leurs notes rduit la capacit quils ont vendre de nouvelles garanties ; le second, bien plus dvastateur, a t laccentuation des pertes sur tous les produits structurs qui avaient reu lonction des monolines ; tous les produits structurs qui ont fait lobjet de la garantie des rehausseurs de crdit ont vu leur valeur et leur note se dgrader impliquant pour les investisseurs, la constitution de nouvelles provisions qui taient voues se matrialiser en pertes ; le troisime, dans la mme veine que le second a t damener certains investisseurs institutionnels des ventes forces dactifs. Ces derniers suite la dgradation se sont retrouvs avec des titres la notation infrieure la note BBB qui constitue la plus basse note investment grade, en-dessous de laquelle, ils ntaient pas autoriss dtenir des actifs vu le risque trop grand que ces derniers prsenteraient. Si la dgradation des notes sur les produits structurs a acclr leur dprciation, la comptabilit en juste valeur (fair value acounting) en tenant compte de la valeur de march dont la fiabilit tait mise mal par des conditions extrmes dilliquidit a constitu le principal vecteur qui a conduit la dtrioration des bilans bancaires.

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Lautier & Simon (2008)

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1.3) Le rle de la comptabilit en valeur de march Les nouvelles normes IFRS adoptes ds 2005 par les banques Europennes exigent de ces dernires quelles valuent leurs bilans la valeur de march dont on suppute quelle incarne le mieux la juste valeur (cf. Encadr 2). Les produits structurs figurant lactif des bilans bancaires nchappent pas cette rgle, ils font lobjet dune valorisation au prix du march au mme titre que les autres actifs de la banque. La surraction du march voque plus haut qui a conduit leffondrement de la valeur des produits structurs amne le constat suivant : dans le contexte de tensions extrmes des marchs financiers avec en toile de fond, une crise de liquidit svre, force est de constater que la valeur de march de ces produits structurs na pas reflt leur juste valeur. En termes plus techniques, la valeur de march des produits structurs sest retrouve bien en-de, de leur valeur fondamentale obtenue en actualisant les flux de revenus futurs que ces produits auraient gnrs63. La valeur de march de ces produits structurs, compter de lclatement de la crise a t en ralit une fausse juste valeur dont ptiront lourdement les bilans bancaires. Lilliquidit de ces produits structurs a t prcipite par lopacit et la complexit de ces produits entretenues tout au long du processus de la titrisation. Ds lors, le dclin de la titrisation remet en cause le modle originate to distribute et interroge le devenir des instruments de transfert du risque.

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FMI (2008a), GFSR, p.65

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Encadr 2 : La comptabilit en juste valeur (fair value accounting) : Dfinition et Principes Lessor des marchs financiers au cours des vingt dernires annes sous limpulsion de linnovation financire a entran lapparition dinstruments financiers de plus en plus complexes. Les rgles comptables traditionnelles reposant sur le principe de la valorisation aux cots historiques se sont avres inadaptes pour rendre compte de cette nouvelle ralit et restituer avec la plus grande fidlit, la situation financire des entreprises en gnral et des banques en particulier. Pour y remdier, lIASB (International Accounting Standards Board) va dicter des normes internationales, dites normes IAS/IFRS (International Accounting standards/ International Financial Accounting Standards) qui sappliquent toutes les socits Europennes cotes depuis le 1er janvier 2005. Ces nouvelles normes comptables viennent appuyer la nouvelle rglementation prudentielle de Ble II. En effet, cest sur la base de linformation produite par la comptabilit que lon value si les ratios de solvabilit de la banque sont en conformit avec les recommandations de Ble. Pour une rgulation efficace, la comptabilit doit donc fournir une information fiable qui colle au plus prs de la ralit du moment do le concept de juste valeur (fair value). La norme IAS 39 dfinit ainsi la juste valeur : le montant pour lequel un actif peut tre chang, ou un passif teint, entre parties bien informes, consentantes et agissant dans des conditions de concurrence normale . Autrement dit, la valeur de lactif doit tre dduite des prix contre lesquels lactif est habituellement chang notamment sur les marchs financiers. La meilleure estimation de la juste valeur est ainsi donne par la valeur de march (market value). Cependant, la notion de juste valeur est plus large que la valeur de march, puisque la norme admet que la juste valeur puisse tre estime laide de modles internes (mark to model) en labsence de prix de march de rfrence (Dumontier, Dupr, (2005)). Les normes Amricaines dites US GAAP, dans le mme esprit que les normes IFRS, consacrent la comptabilit en juste valeur. Dans un cadre comptable comme dans lautre, la valorisation en cots historiques na pas totalement disparu car pour une certaine classe dactifs, lvaluation en juste valeur peuttre inopportune. Le mode de valorisation est dtermin partir des caractristiques des actifs financiers et des intentions qui motivent sa dtention (Source, FMI, (2008b)).

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Les instruments financiers comptabiliss en juste valeur regroupent les actifs dtenus des fins spculatives (held for trading financial assets), des drivs, des actifs disponibles la vente, et enfin des actifs valus en juste valeur sur option. Lvaluation en cots historiques concerne essentiellement les actifs dtenus jusqu leur chance (held to maturity).

1.4) Promesses non tenues du transfert du risque et remise en cause du modle OTD Le modle OTD comme nous lavons vu, repose sur un principe fondamental : le transfert du risque de crdit. Ce principe est en rupture avec le rle traditionnel de la fonction bancaire qui consiste conserver jusqu leur chance souvent longue, les prts consentis aux agents et collecter les dpts de ces derniers. Le glissement de lactivit bancaire vers les oprations de march est la rponse de la banque une concurrence accrue dans la collecte de lpargne des agents et dans le dveloppement de produits plus attractifs pour les investisseurs. Lactivit bancaire se modifie, elle initie toujours le crdit mais en transmet aussitt le risque au march en ayant recours aux deux principaux instruments du transfert du risque : la titrisation des actifs et les drivs de crdit. Le transfert du risque, principe sur lequel repose le modle OTD avait vocation fractionner le risque puis le dissminer au sein du march. Les diffrentes fractions du risque ainsi hrites de la banque devaient ainsi choir aux diffrents acteurs du march qui seraient en mesure de lendosser. La crise de march du crdit structur qui constitue le premier test grandeur nature , auquel il a t soumis, a montr que le transfert du risque de crdit fut en ralit un double leurre. 1.4.1) Le transfert du risque de crdit : un double leurre Le premier leurre a t de faire croire que les instruments de transfert du risque allaient favoriser la dispersion du risque. Ces risques en ralit se sont concentrs. En particulier dans les bilans des hedge funds qui ont investi dans les produits structurs avec une prdilection pour les tranches de CDO les plus risques (cf. Table 2 p. 25) ainsi que dans les CDS (cf. Table 3 p. 27). Ce premier leurre trouve son explication dans le second. Le second leurre, dans la mme veine que le prcdent a t le postulat selon lequel, cest ceux qui taient en mesure de porter le risque que ce dernier allait choir, autrement dit, ceux qui taient en capacit dassumer ce risque.

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La ralit a t tout autre. Ce sont moins ceux qui taient en mesure de porter le risque qui sen sont chargs comme ce fut annonc mais davantage ceux qui taient tout simplement dsireux de porter le risque quils en aient ou non la capacit et ce, dans le but de satisfaire leur qute effrne de rendement. Ces instruments de transfert du risque ont constitu une formidable aubaine pour ces investisseurs, en particulier les hedge funds qui ont volontiers endoss le risque en dtournant lusage de ces instruments des fins strictement spculatives faisant fi de la vocation initiale de ces instruments destins disperser le risque (titrisation) ou le cas chant prmunir du risque (CDS). La dnaturation des instruments de transfert du risque de crdit a eu pour principale consquence, leur concentration dans les bilans des investisseurs qui avaient la plus grande incitation se positionner sur ces produits dont la complexit grandissante quils contribuaient sciemment alimenter, augmentait les promesses de rendement. En somme, le transfert du risque a fait illusion en faisant croire quil suffisait de transfrer le risque dune entit vers le march, pour que par une formidable allocation au sein de celuici, le risque smiette et se disperse auprs du plus grand nombre dacteurs ayant la capacit de lassumer. La ralit de la crise a pris le contrepied de cette vue de lesprit. Ceux qui ont recherch activement porter le risque ne sont assurment pas ceux qui taient les mieux indiqus pour cela, en revanche, les acteurs qui de manire sculaire ont port ce risque pour le compte de lconomie sont prcisment ceux qui sen sont dfausss. Nous faisons bien sr allusion aux banques. Ce double leurre est le rsultat, entre autres, dasymtries dinformations secrtes tout au long du processus de titrisation.

1.4.2) Le processus de titrisation maill dasymtries dinformations Les diffrentes phases de la titrisation ont mis aux prises quatre principales catgories dacteurs : le cdant (la banque initiatrice des crdits), larrangeur (le SPV), les agences de notation et enfin en bout de chane, linvestisseur final. A chaque tape de la titrisation, au moins deux de ces acteurs entrent dans une relation dagence. La relation dagence telle que nous lenseigne la thorie conomique est caractrise par un accs ingalitaire linformation qui confre lacteur qui la dtient un avantage informationnel au dtriment de son vis- vis. La premire asymtrie dinformation mane de la relation entre le cdant et larrangeur. La banque initiatrice qui cde le pool de crdits, dispose sur ce dernier dun avantage informationnel.

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Comme nous le savons, le profit du cdant saccroit avec le volume des crdits vendus. En privilgiant le volume des crdits accords dans le but daccrotre son profit de par les gains substantiels quelle retire de cette vente, la banque cdante est amene relguer au second plan, la qualit des crdits. Elle nglige leur slection et leur suivi 64 qui viendraient rfrner la distribution du crdit et par ricochet rduire leurs profits. En sinscrivant dans la logique du modle OTD, la banque initiatrice des crdits qui tient le rle de lagent dans cette relation dagence qui la lie au SPV, le principal, est conduite dissimuler si ce nest dtruire de linformation relative aux crdits distribus. Buiter (2007) le fait remarquer juste titre, cette nouvelle relation dagence dilue lincitation de la banque se livrer une collecte dinformations qui peut tre coteuse. Cette information est importante dans la mesure o elle renseigne la banque sur la solvabilit des agents qui sollicitent des crdits. Et lauteur dajouter, quand bien mme elle slectionnerait les emprunteurs avec le plus grand soin, linformation nest pas la bonne place car le SPV qui hrite de ces crdits na pas accs cette information. La relation entre le SPV et les agences de notation a de mme t lorigine de nouvelles asymtries dinformation. Les agences de notation, comme nous lavons vu en premire partie, sont consultes par larrangeur pour la structuration et la division en tranches de produits. Cette consultation place lagence de notation dans une situation pour le moins, particulire, o elle se retrouve cliente de SPV dont elle value et note les produits do l'apparition dun conflit dintrts. Ces agences de notation65 tirent de cette activit une rmunration substantielle do la crainte de voir ces dernires manifester au SPV une certaine complaisance dans la notation des produits structurs de ces derniers. De plus, lagence de notation monnaye ses services de conseil son client quelle est charge de noter en indiquant au SPV la manire suivant laquelle, elle doit procder dans la structuration de ses produits de faon obtenir la note dsire. De mme, la complexit des produits structurs peut amener les agences de notation avoir recours aux modles de valorisation de leurs clients. Les agences de notation endossent une lourde responsabilit dans la crise pour avoir contribu la sous-estimation des risques66. En attribuant une notation leve des produits dont la qualit ne la justifiait pas, les agences de notation ont fauss la perception du risque et induit les investisseurs en erreur.

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Mishkin (2008)

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Trois grandes agences de notation (Moodys, Standards&Poors et Fitch) assurent elles seules lessentiel de la notation des instruments financiers. Traditionnellement, elles notaient la dette souveraine ainsi que les grandes entreprises prives. Avec lexpansion de la titrisation, elles vont tendre leur champ dactivit, en assumant la notation des produits financiers complexes.
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Fisher (2008)

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Lorsquelles se sont rendues compte de leur mprise non seulement, il tait trop tard mais en plus et surtout, cette dgradation soudaine des notes laquelle elles se sont livres pour rattraper les erreurs du pass a exacerb la crise de liquidit qui va frapper le march du crdit et entraner le dclin de la titrisation.

1.4.3) Le dclin de la titrisation au lendemain de lclatement de la crise Leffondrement de lindice ABX un rythme frntique partir de lt 2007 a port un rude coup lmission de produits structurs, savoir les ABS et surtout les CDOs. En 2007, lmission dABS aux Etats-Unis slevait prs de 510 milliards USD en 2008, ce volume stablissait 137 milliards USD soit une chute de 73%67(cf. Graphique 7).

Graphique 7 : Volume de lmission dABS aux Etats-Unis sur la priode 2001-2008 Source: SIFMA (2009)

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Securities Industry and Financial Markets Association (SIFMA) [2009]

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Graphique 8 : Volume de lmission trimestrielle de CDOs aux Etats-Unis( 2006-2008) Source: SIFMA (2009) Le dclin de lmission est de loin plus impressionnant pour les CDOs dont lmission a t quasiment gele du fait de la forte illiquidit dont ces produits complexes ont t frapps au lendemain de la crise. Entre 2007 et 2008, lmission de CDOs a chut de 88,4% passant de 482 milliards USD 57 milliards USD68 (cf. Graphique 8). Le dclin de la titrisation est venu aggraver les pertes dj lourdes du systme en rognant la profitabilit bancaire. En effet, les activits lies la titrisation constituaient pour les banques une source de revenus trs lucrative. Le potentiel de pertes quimpliquent ces produits structurs valoriss au prix du march et dont le dclin semble irrmdiable entrane la suspicion puis la dfiance des investisseurs lendroit de ces produits structurs : ceux qui en dtiennent par devers eux, cherchent sen dbarrasser tout prix cherchant dsesprment preneurs dans un march qui se disloque. Les bases de la liquidit du march sont sapes et ce qui sest rvle au monde au cours de lt 2007 comme tant la crise des subprimes devient une profonde crise de liquidit.

1.5) La crise de liquidit, annonciatrice du deleveraging Lexpansion de la titrisation comme nous lavons vu, a rendu les produits structurs de plus en plus complexes, notamment les CDOs. La complexit de ces produits les prdispose au risque de liquidit en cas de tensions extrmes sur le march qui se manifestent par une monte de lincertitude et de la dfiance. La mise lpreuve de la liquidit de ces produits au cours de lt 2007 sest traduite par le retrait massif des investisseurs du march du crdit structur.
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Securities Industry and Financial Markets Association (SIFMA) [2009]

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Leffritement brutal et sans appel de ce march a rendu impossible la dtermination dun prix de march pour ces produits devenant du coup, illiquides. Lilliquidit frappe dabord les produits les plus complexes au premier rang desquels, les CDOs tenus en grande suspicion par les investisseurs qui dans le doute sabstiennent de sengager dans des transactions dans lesquelles les CDOs sont impliqus. Dans lanalyse des facteurs qui ont conduit lilliquidit de march, Caruana & Kodres (2008) mettent en avant lasymtrie dinformation et le manque de transparence. En effet, ils partent du constat que les produits autour desquels rgnait la plus grande incertitude informationnelle ont t les plus illiquides. En outre, ces auteurs soulignent lexistence dun autre facteur qui selon eux aurait prcipit lilliquidit des produits structurs, il sagit du mode de ngociation auxquels taient soumis les produits structurs, celui du march de gr gr. Le march de gr gr (over the counter) par opposition au march organis, permet deffectuer des transactions bilatrales. Les rgles de fonctionnement des changes sont librement fixes par les deux parties prenantes sans linterposition dune chambre de compensation ou lintervention dune autorit de rgulation, ce qui cre une situation dans laquelle chaque partie est expose au risque de dfaut de sa contrepartie69. Les produits structurs issus de la titrisation, linstar des autres produits drivs qui schangent sur le march de gr gr ne sont pas standardiss car ils correspondent aux besoins spcifiques des oprateurs ; leur liquidit en est dautant plus rduite. En effet, durant la crise, les actifs changs sur des marchs organiss nont pas connu la forte baisse de liquidit observe pour les actifs schangeant sur le march de gr gr70. Le glissement de lactivit bancaire vers les oprations de march comme nous lavons vu, rend le bilan bancaire trs sensible la volatilit des marchs. La crise de liquidit qui se prcise partir de 2007, avec son corollaire de fortes dprciations, sest transmise aux bilans bancaires par le vecteur privilgi de la comptabilisation en valeur de march. Cette ide est restitue en ces termes par Allen, Carletti (2008b) : En priode de crise financire, linteraction entre les institutions et les marchs peut conduire des situations o les prix sur les marchs ne refltent plus les rendements venir, mais plutt le volume des liquidits dont disposent les acheteurs. Si lon recourt la comptabilisation en valeur de march, la volatilit des prix des actifs influe directement sur la valeur des actifs bancaires . La crise de liquidit affecte en premier lactif des bilans bancaires, travers la dprciation des produits structurs valoriss au prix du march.

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Jacquillat, Lvy-Garboua (2009) Caruana, Kodres (2008)

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Ces dprciations puis pertes viennent en diminution des fonds propres des banques qui doivent constituer des provisions. La capitalisation boursire des banques soumise la volatilit des marchs, se rduit. La situation financire des banques se dtriore mesure que la structure du bilan bancaire se fragilise. Le capital des banques qui dcline entrane mcaniquement une augmentation du levier financier et cette situation, dune part savre prjudiciable pour la profitabilit des banques et dautre part, les ratios de solvabilit (Fonds propres/Actifs) se dgradent et leur adquation avec la rglementation de Ble II est menace. Il samorce alors lchelle du systme financier au niveau du systme bancaire notamment, un processus de deleveraging qui consiste rduire le levier, en diminuant les actifs en procdant leur liquidation massive afin de recueillir des liquidits pour faire face aux engagements de la banque et restaurer lquilibre de la structure de leur bilan bancaire mise mal par la contraction des fonds propres et ramener les ratios de solvabilit des niveaux en conformit avec la rglementation de Ble II. Ces liquidations massives des actifs par les banques qui se plient ainsi limpratif du deleveraging exacerbent la crise de liquidit et dpriment davantage le prix des actifs. Les institutions qui procdent la liquidation massive de leurs actifs pour faire face leurs engagements et assainir leurs bilans, ont tendance entraner dans leur sillage dautres acteurs du march qui alarms par ce signal, dclenchent elles aussi des ventes prventives, qui retirent de la liquidit au march, au moment o il en a le plus besoin 71. Autrement dit, les acteurs du march, en semployant tous et en mme temps extraire des liquidits dans un march de moins en moins liquide, participent de concert laggravation de la crise de liquidit qui rend le deleveraging dautant plus douloureux. Cette ide est rsume ainsi par Praet, Herzberg (2008) : Lorsque les marchs deviennent illiquides, il devient plus difficile de sortir dune exposition ou de se couvrir. La liquidit de lactif ne dpend plus alors des caractristiques de lactif lui-mme mais plutt de lexistence chez les contrepartie fragilises, de positions substantielles qui doivent tre liquides . La liquidit de march qui dsigne la facult de se dessaisir avec une relative facilit dun actif sans que la valeur de ce dernier ne soit altre, est dans ces conditions fortement compromise. La monte de la dfiance dplace la crise de liquidit sur le march montaire, partir duquel se refinancent les institutions financires. Partant de l, la crise de liquidit qui sest dabord prsente sous la forme dune illiquidit de march qui frappe les produits structurs et entretenue par leur liquidation massive, prend ds lors quelle investit le march montaire, une nouvelle forme, lilliquidit de (re)financement. Lilliquidit de financement dsigne la difficult pour des contreparties solvables de se refinancer par le renouvellement de leur dette sur le march montaire notamment.
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Bervas (2006)

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Le deleveraging sest droul en deux phases : une premire phase au cours de laquelle ont recours ce phnomne, les seuls acteurs du march du crdit structur. Ces derniers dans le but d assainir lactif de leurs bilans et de rtablir leurs ratios de solvabilit accentuent le risque de liquidit de march saccompagnant dune monte de lincertitude laquelle dplace la crise de liquidit sur le march montaire, qui se manifeste par une hausse du risque de liquidit de financement et inaugure la seconde phase dun deleveraging, cette fois-ci systmique.

2) Premire phase du deleveraging, en rponse la dgradation du bilans des acteurs du march du crdit structur

Dans un environnement de valorisation au prix de march, les actifs bancaires sont trs sensibles la volatilit des marchs. Cette forte volatilit laquelle sont soumis les actifs branle lquilibre de la structure du bilan bancaire et son rtablissement appelle un certain nombre dajustements Adrian, Shin (2008b) rvlent que les fonds propres des banques (equity) reprsentent la variable conductrice dans les modifications de la structure du bilan, en dautres termes, les actifs de la banque sajustent aux fluctuations du capital de la banque. Les lourdes pertes enregistres par les banques ont t absorbes par leurs fonds propres, et ont conduit la sous-capitalisation de leurs bilans. Cette sous-capitalisation se traduit par une hausse du levier, qui rappelons-le, reprsente le rapport entre les actifs de la banque et le montant des fonds propres. Lendettement de la banque reste inchang alors que les fonds propres se dtriorent, la situation financire de la banque se dgrade.

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Encadr 3 : La mcanique de bilan du deleveraging

Considrons le bilan simplifi dune banque qui se prsente comme suit :

En effectuant le rapport entre le montant des actifs et le montant des fonds propres, on obtient pour cette banque un levier de 10. On suppose que suite une forte volatilit sur les marchs, les actifs bancaires perdent 5% de leur valeur. Le bilan, valoris au prix du march, se prsente dsormais comme suit :

Les actifs bancaires suite la forte volatilit sur les marchs se dprcient de 5 et les fonds propres sont rduits dautant. Le levier explose et slve dsormais 19 *95/5+. Pour rduire le levier et le ramener son niveau initial, deux possibilits se prsentent la banque : la recapitalisation (Cas 1) ou la liquidation dactifs (Cas 2) Cas 1 : Le deleveraging par recapitalisation Pour ramener le levier qui est dsormais de 19, 10, son niveau initial, il suffit de lever des fonds propres, hauteur des pertes subies. En injectant 5, de fonds propres, la banque rduit le levier qui repasse 10, et rtablit la taille initiale du bilan avant la dprciation des actifs bancaires Cas 2 : Le deleveraging par liquidation dactifs En labsence de recapitalisation, le deleveraging, passe par la liquidation dactifs en vue de rduire lendettement de la banque et de ramener le levier son niveau initial de 10.

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Ds lors, la question qui se pose est de savoir pour quel montant, la banque devrait liquider une partie de ses actifs pour rduire dautant son endettement et ramener son levier 10. Suite la dprciation des actifs, les actifs bancaires (A) slvent dsormais 95 et les fonds propres (K) 5, soit un levier (L) de 19. De combien faut-il rduire A, et par suite D, pour ramener L 10 sachant que L = A/K = A/(A-D) ? Nous savons que A se fixe dsormais 95 et que nous visons un L de 10, D est linconnu. On sait que L = A/(A-D) 10 = 95/(95-D) D = 45 Pour ramener son levier 10, la banque devra liquider des actifs pour un montant de 45, pour rduire dautant sa dette. Le bilan simplifi devient :

On remarque que le deleveraging, par liquidation dactifs restaure le levier de 10, en revanche, il a contract la taille du bilan de 50, contrairement au deleveraging, par recapitalisation, qui a ramen le levier et la taille du bilan leurs niveaux initiaux.

La rduction du levier ou deleveraging se rvle ds lors imprieuse pour maintenir la solvabilit de la banque. Ce deleveraging peut se prsenter sous deux aspects (cf. Encadr 3) : il peut prendre la forme dune recapitalisation consistant renflouer les fonds propres des banques ; laugmentation des fonds propres rduit le levier et renvoie leur niveaux initiaux, le levier, la taille du bilan et la structure fonds propres-dettes du passif ; il peut aussi prendre la forme la plus courante dune liquidation dactifs, dont la finalit est de recueillir des liquidits en vue de rduire les engagements de la banque. Ces deux formes de deleveraging dun point de vue arithmtique ont rigoureusement le mme impact sur le levier dendettement et sur la structure fonds propres-dettes du passif ; en revanche ils affectent diffremment la taille du bilan.

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En effet, le deleveraging par liquidation dactifs entrane une contraction des bilans en outre si cette liquidation deffectue lchelle du systme financier, elle contribue alimenter la baisse des cours et exacerbe les tensions auxquelles sont soumis les bilans bancaires. De plus, un deleveraging par liquidation dactifs est dautant moins efficace quil est men par le plus grand nombre dacteurs car leffondrement des prix des actifs est prcipit, ce qui contraint les institutions financires vendre encore plus dactifs parmi les plus liquides figurant leurs bilans, en vue de rduire leurs engagements et de rtablir un quilibre sain entre leurs capitaux propres et leur endettement. Le deleveraging par recapitalisation, par opposition au prcdent, ne rduit pas la taille des bilans et ne comporte pas le risque dflationniste du deleveraging par liquidations dactifs, ce qui le rend de loin prfrable ce dernier. Aux prmices de la crise, certains investisseurs institutionnels, les fonds souverains notamment, ont apport des capitaux et permis la recapitalisation de certaines banques en difficult. Cependant mesure que la crise sintensifiait, dabord en mars 2008 avec les difficults de Bear Stearns pour atteindre son paroxysme lautomne 2008 avec la faillite de Lehman Brothers, les apporteurs de fonds se sont fait de plus en plus rares et la liquidation massive dactifs sest prsent comme le seul mode de deleveraging qui soffrait aux banques. Aux pertes des banques sont venues sajouter dautres pertes lies la rintermdiation des vhicules dinvestissement hors-bilan dont les actifs allaient faire lobjet de liquidations massives.

2.1) Le deleveraging, conscutif la reconsolidation des SIV Les SIV et conduits, nous le savons, ont jou un rle crucial dans le processus de titrisation. Lactif de leur bilan a t le rceptacle des produits structurs issus de la titrisation. Ces produits structurs rappellons-le, taient financs partir de lmission de papier commercial adoss aux actifs structurs, lasset backed commercial paper (ABCP). Leffondrement de la valeur des produits structurs, voire mme parfois leur illiquidit a conduit une rduction drastique de lmission dABCP. Les investisseurs taient de plus en plus rticents investir dans ce papier commercial, compte tenu de la dgradation des actifs sous-jacents. Aprs avoir atteint un pic de prs de 1200 milliards USD en juillet 2007, lmission mensuel dABCP se chiffrait, peine prs de 600 milliards USD72, en avril 2009 (cf. graphique 9).

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Securities Industry and Financial Markets Association (SIFMA) [2009]

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Graphique 9 : Emission mensuelle dABCP en milliards USD aux Etats-Unis (2005-2009) Source: SIFMA (2009)

Confronts de grandes difficults pour renouveler leur endettement court terme via lmission dABCP et dtenant des actifs illiquides, les SIVs deviennent insolvables. Ces entits hors-bilan ne pouvant pas faire faillite, elles vont faire lobjet de reconsolidations et leurs actifs seront rintermdis c'est--dire rappels dans les bilans des banques qui en ont t lorigine. Aucune disposition lgale ne contraint les banques rintermdier les actifs des entits hors-bilan quelles initient, nanmoins, pour ne pas tre victimes dun risque de rputation, elles nont dautre choix que de rappeler les actifs et les dettes des SIVs et conduits dans leurs bilans. Durant la crise financire, le secteur des SIVs a quasiment disparu. Entre dcembre 2007 et juin 2008, on dnombre la disparition de prs de 30 SIVs pour la plupart reconsolids, lguant leurs banques de tutelle, une dette de prs de 274 milliards USD73 et aggravant ainsi lexigence de deleveraging laquelle sont soumises les bilans de ces dernires. Au cours de sa premire phase, concernant les seuls acteurs du march du crdit structur le deleveraging par liquidations dactifs potentiellement dflationniste sera attnu par un deleveraging non dflationniste, par recapitalisation, qui a hlas t de courte dure et insuffisant rapport aux pertes subies.

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Gorton (2008)

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2.2) Un deleveraging par recapitalisation insuffisant et de courte dure Les fortes dprciations lactif du bilan des banques viennent en diminution de leurs fonds propres et entrane la sous-capitalisation des bilans bancaires. De plus, le dclin de la titrisation qui limite la possibilit de sortir les prts du bilan oblige les banques dtenir davantage de fonds propres. Sur les marchs des capitaux, la capitalisation boursire des grands groupes bancaires a t mise rude preuve, situation assimile par certains auteurs de rue sur le capital bancaire74. Ce dclin subite de la capitalisation boursire est compare une rue aux dpts, le rle des dposants tant ici tenu par les investisseurs qui vendent les actions des ces institutions financires. Pour restaurer leurs ratios de capital pour les raisons voques plus haut (cf. Encadr 3), la recapitalisation sera prfre au deleveraging par liquidations dactifs. Entre juillet 2007 et septembre 2008, les capitaux levs par les grands groupes bancaires slvent 430 milliards USD75. Dans un premier temps, ce sont essentiellement les fonds souverains 76 qui se sont manifests pour la recapitalisation des banques en difficult de juillet 2007 jusqu la fin 2007, ils ont t lorigine de 60% des capitaux apports aux banques77. Durant la premire moiti de 2008, les fonds souverains sont plus en retrait, contribuant trs peu la recapitalisation des banques. Entre janvier et juillet 2008, les fonds souverains ne participent qu hauteur de 7% de la somme de 300 milliards USD levs par les banques sur cette priode78. La recapitalisation des banques a t insuffisante et na pas de manire significative contribu au relvement des ratios de capital, hormis pour les grands groupes bancaires de la zone Euro qui durant la premire moiti de 2008 ont vu leurs ratios de solvabilit passer de 10,6% 11,3%79. A cette insuffisance de la recapitalisation sajoute partir de la seconde moiti de 2008, une rarfaction des apporteurs de fonds. Lintensification de la crise et sa propagation vers les pays mergents relativement pargns jusquau milieu de 2008 rendent caduque lventualit dun dcouplage des conomies mergentes.
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FMI (2008b) Idem Les fonds souverains sont des fonds dinvestissement publics aliments par lpargne nationale. FMI (2008b) Idem BCE (2008)

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Lentre en crise des pays mergents o sont domicilis la plupart des fonds souverains porte un coup de frein la recapitalisation des banques. En outre, les fortes tensions sur les marchs des capitaux se traduisent par une forte chute du prix des actions. La perspective dune augmentation des fonds propres travers lmission dactions nouvelles parat peu raliste parce que dune part, dans un contexte o les marchs financiers affichent une tendance baissire, le montant des capitaux qui peut tre potentiellement lev sera probablement trs en de des attentes des banques et dautre part, les investisseurs se montrent peu enclins investir dans des titres en chute libre. La dgradation de la situation sur le march des capitaux porte un coup darrt la recapitalisation et contrarie les plans de deleveraging des banques semployant restaurer leurs ratios de solvabilit. Ds lors, les banques doivent explorer de nouvelles pistes pour renforcer leurs fonds propres, parmi elles, la rtention des dividendes. Globalement, les banques sont rticentes quand il sagit de se livrer la rtention des dividendes car elle constitue gnralement un mauvais signal adress aux marchs, qui peuvent en retour, sanctionner les titres des institutions financires qui pratiqueraient pareille mesure. En outre, la baisse de la profitabilit bancaire rduit la possibilit de recourir la rtention des dividendes pour renflouer les fonds propres. Durant les neuf premiers mois de 2008, la rentabilit financire80 moyenne des grands groupes bancaires a fortement chut suite aux pertes enregistres. La rentabilit financire moyenne au cours des trois premiers trimestres de 2008 a chut 2%, alors quelle stablissait 13,4% en 200781. En rsum, la recapitalisation est apparue insuffisante, dune part et dautre part, elle fut brve du fait de lintensification de la crise et par suite, de la rarfaction des apporteurs de fonds. A lautomne 2008, la crise atteint son paroxysme suite la faillite de Lehman Brothers, lexigence du deleveraging se fait alors plus pressante. La faillite de Lehman exacerbe les tensions sur le march montaire ; dans limpossibilit de se refinancer, les institutions financires multiplient leurs liquidations dactifs pour honorer leurs engagements, le deleveraging change de nature et dampleur, il devient systmique.

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La rentabilit financire, encore appel RoE, (pour Return on Equity) est obtenue en effectuant le rapport entre le profit net aprs impt et les fonds propres.
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BCE (2008)

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3) Deuxime phase du deleveraging : la crise de liquidit sur le march montaire et ses consquences systmiques La faillite de Lehman Brothers a sans nul doute constitu le tournant de la crise. Cette faillite a eu pour consquence immdiate daccrotre la dfiance sur les marchs financiers, dfiance qui sest traduite par laugmentation considrable des primes de risque ou spreads sur le march montaire. Cette dfiance accrue svit sur tous les marchs financiers. Sur le march des CDS dans lequel Lehman Brothers tenait un rle essentiel, les primes de CDS ont connu un bond sans prcdent, refltant la hausse du risque de contrepartie. Sur le march interbancaire, on assiste littralement une rtention des liquidits qui a port les spreads interbancaires des sommets historiques. Sur le march montaire, particulirement celui du repo, les tensions se traduisent par une augmentation considrable des dcotes (haircuts) qui reflte la monte de la perception du risque de contrepartie. La dgradation de la qualit des collatraux fournis en garantie dclenchent instantanment des appels de marge adresss notamment aux hedge funds, clients des prime brokers, par lesquels ils se voient acculer au deleveraging. Lemballement des marchs financiers suite la faillite de Lehman, dans un contexte o lilliquidit de march se double dune illiquidit de financement qui svit sur le march montaire renforce lacuit de la crise de liquidit et annonce un deleveraging massif, dsordonn et systmique.

3.1) La faillite de Lehman Brothers et consquences sur le march des CDS Lehman Brothers, plus que toute autre banque, est lexemple loquent dune banque dont le bilan reflte les deux vulnrabilits principales, dcrites en premire partie et qui selon nous ont conduit la fragilisation des bilans bancaires : un usage immodr du levier et une transformation excessive des chances qui est la rsultante dun recours trs important lendettement court terme contract sur le march montaire. Le levier de Lehman Brothers la veille de la crise financire avoisinait 30 et plus de 50% de ses actifs taient financs par de la dette court terme82.

Lehman Brothers a survcu de justesse, aux tensions du printemps 2008 qui avaient conduit la reprise de Bear Stearns par la banque JP Morgan. Cet pisode qui aurait pu laisser penser que Lehman Brothers tait tire daffaire, ne fut avec le recul que le dbut dun sursis entretenu par un deleveraging combinant injections de capital et liquidations dactifs. Entre fin fvrier et fin mai 2008, le levier de Lehman est pass de 32,7 24,683, ce deleveraging a t insuffisant au regard de la suite des vnements.

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Zingales (2008) Idem

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Le 9 septembre 2008, un fonds souverain Coren du nom de Korea Devlopment Bank qui tait pressentie pour une prise de participation dans le capital de Lehman Brothers sest dsist. Le mme jour, laction de Lehman Brothers a chut de 45%84. Cette chute vertigineuse de laction et les doutes mis sur la viabilit de Lehman Brothers lui ont ferm laccs au march montaire, le dpt de bilan paraissait ds lors invitable. Du 12 au 14 septembre, les tentatives de rachat de ltablissement financier se soldent par un chec. Le 15 septembre, Lehman Brothers dont lendettement slevait cette date prs de 600 milliards USD85, demande bnficier de la protection du chapitre 11 de la loi Amricaine sur les faillites. Ce dpt de bilan eut de lourdes consquences sur le march des CDS sur lequel Lehman Brothers tait trs expos.

3.1.1) Le deleveraging des acteurs du march des CDS Les banques ont jou un rle important dans le march des CDS (cf. Table 3 p. 27), se portant la fois acqureurs et vendeurs de protection, des vises spculatives. En sinscrivant dans cette logique, Lehman Brothers a jou un rle important au sein du march du CDS. Son dpt de bilan a eu deux consquences immdiates86 : les contrats signs par la banque en tant que contrepartie ont t rsilis et les clauses de dfaut des CDS rfrencs sur Lehman Brothers ont t dclenches. Jacquillat & Simon (2008) soulignent que suite la faillite de Lehman Brothers, les institutions financires qui avaient vendu de la protection des contreparties de Lehman Brothers, ont d honorer leurs engagements et compenser du montant de la dvalorisation de la dette de Lehman, les pertes subies par les contreparties qui leur avaient achet de la protection. Cette tche sannonait ardue car la dvalorisation de la dette atteignait prs de 91% de la valeur nominale87. Les vendeurs de protection pour honorer leurs engagements procdent au deleveraging en liquidant massivement leurs actifs. Ce deleveraging prend une tournure systmique compte tenu de la forte exposition des institutions financires en tant que contreparties sur le march des CDS, les banques et les hedge funds notamment.

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Brunnermeier (2008) BRI (2008b) Idem Jacquillat & Simon (2008)

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La rvaluation du risque, le risque de contrepartie en particulier, accroit la demande de protection alors que dans le mme temps les vendeurs de protection face la multiplication des dfaillances se retirent en masse du march des CDS. Il sensuit une hausse sans prcdent des primes de CDS (cf. Graphique 10) et une forte corrlation entre le risque de crdit et le risque de liquidit, auquel sont exposs les vendeurs de protection qui liquident leurs actifs pour honorer leurs engagements. Aglietta (2005) analyse en ces termes, les tensions auxquelles sont soumis les vendeurs de protection : La liquidation prcipite des actifs par les assureurs en vue dhonorer leurs engagements renforce le mouvement baissier des marchs financiers. Comme les valuations du risque de crdit dans les modles qui dterminent les prix des CDS dpendent des cours boursiers des entreprises, la baisse de ceux-ci, augmente les spreads de CDS et donc la probabilit quun plus grand nombre dvnements de crdit se dclenche. Lorsque le probabilit de dfaut de lentit de rfrence augmente, les vendeurs de protection doivent couvrir le risque accru quils portent et donc vendre plus de titres et relancer le cercle vicieux .

Graphique 10: Evolution des primes de CDS sur les Institutions Financires Amricaines Source: Brunnermeier (2008)

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Londe de choc cr par la faillite de Lehman Brothers atteint rapidement, dautres acteurs importants du march des CDS, en particulier, AIG le premier assureur Amricain, qui dtient des positions importantes sur les CDS ce qui lui a valu dtre dclass par les principales agences de notations. Le 16 septembre, lendemain de la faillite de Lehman, le prix de laction AIG chute de plus de 90%88. Dans le but dviter que se reproduisent les tensions extrmes observes suite la faillite de Lehman Brothers, les autorits montaires et fdrales Amricaines vont rectifier le tir, en organisant un plan de sauvetage89 au profit dAIG. Le sauvetage dAIG par les pouvoirs publics a apais les proccupations lies aux tensions sur le march des CDS, nanmoins, la faillite de Lehman a entran une liquidation massive dactifs des investisseurs exposs aux titres de dette de Lehman.

3.1.2) Le deleveraging des contreparties de Lehman Brothers Nous distinguerons ici deux types de contreparties, dune part, les investisseurs qui ont achet des titres de la dette de Lehman Brothers et dautre part, les contreparties de Lehman dans le cadre des activits de prime brokerage, les hedge funds notamment qui ont mis en garantie des actifs auprs de Lehman. Lehman Brothers, entre autres mode de refinancement, mettait du papier commercial. Lattrait des investisseurs pour ces titres mis par la banque se justifiait par leur bonne notation et leur rendement lev par rapport aux obligations dEtat. Suite la faillite de Lehman, les investisseurs qui avaient acquis ces titres ont encouru de lourdes pertes90. Les services de prime brokerage fournis par Lehman Brothers aux hedge funds ont conduit ces derniers notamment dans le cadre des oprations de repo, mettre en garantie des titres auprs de la banque. Suite la faillite de Lehman, les hedge funds qui lui avaient fourni des srets nont pas pu rcuprer leurs titres. Ils se voient ainsi priver de titres qui auraient t mobiliss pour des oprations de repo futures, afin dalimenter leur levier. En somme, la faillite de Lehman a install une forte dfiance qui sest notamment traduite sur le march montaire par une rtention des liquidits, tant sur le march interbancaire que sur le march du repo. Les difficults croissantes prouves par les banques pour se refinancer entrane une dgradation de leur situation financire et perptuent un deleveraging qui seffectue dans des conditions de liquidit de plus en plus dgrades et se rvle moins mme de tenir ses promesses quant au rtablissement des ratios de solvabilit des banques.
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Brunnermeier (2008)

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Ce sauvetage a t coordonn par la Fed qui ds le 16 septembre accorde un prt de 85 milliards USD AIG. Cette aide est tendue 37 milliards USD en octobre puis 40, en novembre.
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Un fonds de placement montaire Amricain Reserve Primary Fund a pass en pertes 785 millions USD dobligations court et moyen terme mises par Lehman, qui vont entraner sa liquidation

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3.2) La dgradation des conditions sur le march montaire et implications sur le deleveraging Face aux difficults croissantes quelles rencontrent pour renouveler leur dette court terme, les banques liquident massivement leurs actifs en vue dobtenir des liquidits dont elles sont prives sur le march montaire. En agissant ainsi pour conjurer lilliquidit de financement laquelle elles sont confrontes, les banques aggravent lilliquidit de march par leurs liquidations massives qui entranent une chute des prix, laquelle appelle de nouvelles liquidations dactifs. Si comme nous venons de le voir lilliquidit de financement peut conduire lilliquidit de march, il est des cas o cette dernire peut rtroactivement rendre plus difficile le refinancement des banques. Dans le cadre de prt collatralis , typiquement lopration de repo, les fonds levs par la banque sont dautant plus levs que la dcote est faible. Si la liquidit de march est faible, la dcote aura tendance tre leve et rduira dautant les fonds effectivement reus par la banque. Dans les conditions de tensions extrmes au lendemain de la faillite de Lehman Brothers, lilliquidit de march et lilliquidit de financement deviennent ds lors trs imbriques. Les liquidits devenues rares sont geles par les banques qui en disposent, de peur den manquer au moment opportun et se retrouver prises au pige dans lengrenage de lilliquidit. Ces rtentions de liquidits entranent, entre autres, une explosion des taux interbancaires.

3.2.1) Hausse sans prcdent des taux interbancaires En temps normal, le spread entre le libor91 et le taux sans risque au jour le jour est trs faible. Entre dcembre 2001 et lt 2007, la veille de lclatement de la crise, le spread entre le libor et le taux au jour le jour stablissait en moyenne 11 points de base et prsentait un cart-type de 3,6 points de base, soit une trs faible volatilit92. Au lendemain de la faillite de Lehman, ce spread a culmin plus de 350 points de base (cf. Gaphique 11)

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le libor (London interbank offered rate) est le taux de rfrence court terme pour les oprations en dollars entre banques hors des Etats-Unis
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Taylor & Williams (2008)

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Graphique 11 :Evolution spreads interbancaires (LIBOR-OIS) Source: Financial Services Authority (2009)

Deux explications sont avances pour expliquer les motifs de cette rtention de liquidits qui a pouss la hausse les spreads interbancaires : dune part, les banques conservent des liquidits de prcaution en vue de pouvoir faire face aux chocs de liquidit auxquels elles se verraient confronter ; dautre part, lasschement des liquidits sur le march interbancaire est attribu par certains aux suspicions sur la solvabilit des banques. La probabilit accrue du risque de contrepartie a rendu les banques plus rticentes se prter des liquidits entre elles, chacune suspectant lautre de dtenir des actifs toxiques dans son bilan. Lanalyse de Michaud et Upper (2008) suggre que les proccupations lies au risque de crdit ont augment peu prs au mme moment que laugmentation des spreads sur le march interbancaire, nanmoins leurs tudes empiriques rvlent que le risque de contrepartie a un faible pouvoir explicatif sur les fluctuations quotidiennes de la prime de risque.

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Par contre, dautres tudes soutiennent que le risque de contrepartie a t dterminant dans la monte des spreads interbancaires.93 3.2.2) le deleveraging sur le march du repo Le march du repo constitue comme nous lavons vu, une source de financement vitale pour les institutions financires, les banques dinvestissement notamment. Dans leur activit de prime brokerage, les banques dinvestissement finanaient aussi les oprations effet de levier de leurs clients, les hedge funds notamment en mettant leur disposition des titres obtenus partir de reverse repos ; permettant ainsi ces derniers de mener des oprations de ventes dcouvert. Le financement sur le march du repo a t une mode de financement privilgi par les institutions financires, du fait notamment de son caractre faiblement onreux par rapport au march interbancaire, cela tient une raison simple : les titres apports par lemprunteur et mis en garantie auprs du prteur sont supposs rduire le risque de contrepartie car en cas de dfaillance de lemprunteur, ces titres deviennent la proprit du prteur. Ce risque de contrepartie dont semble tre prmuni le crancier sur le march du repo demeure sur le march interbancaire car les prts qui y sont consentis ne font pas lobjet de garanties, le cot du financement y est donc plus onreux car il rmunre en partie, le risque de contrepartie suppos faible sur le march du repo. Les tensions qui sabattent sur le march montaire partir de lt 2007 et qui sintensifient au cours de lautomne 2008, npargnent pas le march du repo. De plus ces tensions entranent une monte du risque de contrepartie qui se traduit par le relvement des haircuts. En priode de tensions, le risque de march et le risque de contrepartie sont trs lis. En effet, le risque de march qui saccroit avec la forte volatilit sur les marchs peut tre suivi de la dprciation des titres mis en garantie dans le cadre de lopration de repo. Ce risque de march peut vite se transformer en risque de contrepartie si le prteur napporte pas des garanties supplmentaires ou le cas chant du cash, pour compenser la perte de valeur des actifs initialement mis en gage. Le risque de contrepartie, ngligeable en temps normal sur le march du repo, devient un risque majeur en cas de fortes tensions sur les marchs dans la mesure o le prix des actifs mis en garantie, soumis la forte volatilit sur les marchs, risque dtre altr. Pour se prmunir contre le risque de contrepartie, les prteurs revoient la hausse la valeur des haircuts, qui rappelons le reprsentent des dcotes exprimes en points de base et appliques sur la valeur de march des titres mis en garantie.

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Taylor & Williams (2008)

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Table 5: Hausse des haircuts (%) appliqus par les prime brokers Source: FMI (2008b), GFSR Les tensions sur le march du repo ont considrablement rduit lventail des titres ligibles pour tre fournis comme garanties. Les produits structurs mme ceux, jouissant de la note AAA sont littralement disqualifis par les prime brokers qui ne veulent pas prendre le risque daccepter comme garanties des titres devenus illiquides. Entre Avril 2007 et Aot 2008, les haircuts appliqus tous les actifs font des bonds spectaculaires sauf pour les bons du Trsor Amricain dont les haircuts augmentent lgrement, ce qui montre la forte aversion pour le risque qui anime dsormais les prime brokers. Le march du repo est marqu par un repli vers la qualit (flight-to-quality) prononc. Les fluctuations du haircut dterminent largement le degr de financement disponible pour lemprunteur car la somme effectivement reue par lemprunteur est plus ou moins grande selon que le haircut est faible ou respectivement, lev. La hausse du haircut diminue le levier maximal que lemprunteur peur exercer au cours dune opration de repo94. Adrian, Shin (2008b) illustrent ce propos par lexemple suivant : si le haircut est fix 2%, lemprunteur obtient un montant de 98, en prsentant en garantie, un titre dont la valeur de march est de 100. Le titre dune valeur de 100 sorti du bilan gnre des fonds de 98, la dcote qui slve 2 doit tre prleve sur les fonds propres de lemprunteur.
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Adrian, Shin (2008b)

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Cette opration de repo a ainsi entran un effet de levier de 50, le rapport entre la valeur du titre (100) et la valeur de la dcote prleve sur les fonds propres (2). Supposons que le haircut passe de 2 4%. Le montant du haircut financ par les fonds propres nest plus de 2 mais de 4, le levier tombe 25. Laugmentation du haircut donne ainsi le signal du deleveraging. A partir de moment o les marchs deviennent illiquides, les prime brokers dune part exigent des garanties de trs bonne qualit dont la valeur nest pas sujette de fortes fluctuations et dautre part, ils relvent les haircuts. Le relvement des haircuts en rponse la faible liquidit de march et lincertitude sur les collatraux rend le financement des institutions plus difficile. En vue de dtenir des actifs de qualit qui seront accepts par les prime brokers comme garanties, les institutions financires suspendent leurs investissements sur les produits structurs et liquident les actifs risqus prsents dans leurs bilans. En rponse lilliquidit de financement auxquelles elles sont confrontes sur le march du repo, les institutions financires aggravent ainsi lilliquidit de march. Cette illiquidit de march se rpercute de nouveau sur des haircuts pousss la hausse et ainsi de suite. Suite aux tensions sur le march du repo, les transactions se sont fortement contractes. Le volume journalier moyen de lencours des contrats de repos et de reverse repos, passe de 6800 milliards USD 3900 milliards USD, entre 2007 et 2008, soit une baisse de 41,9%95 (Cf. Graphique 12).

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Securities Industry and Financial Markets Association (SIFMA) [2009]

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Graphique 12 : Volume de lmission journalire moyenne de repos et de reverse repos aux Etats-Unis( 2001-2008), Source: SIFMA (2009) La dtrioration des rapports entre les prime brokers et les hedge funds sintensifie, la multiplication des appels de marge entrane le deleveraging des hedge funds, lourd de consquences dun point de vue systmique.

3.2.3) le deleveraging des hedge funds Le levier des hedge funds est financ essentiellement, nous lavons vu par les prime brokers qui eux-mmes retirent une part substantielle de leurs revenus partir des services quils fournissent aux hedge funds. En se livrant une concurrence effrne, pour recueillir cette manne auprs des hedge funds, les prime brokers vont se montrer laxistes dans lexigence de garanties et rduire les dcotes appliques aux hedge funds, sans que ce relchement ne soit justifi par une diminution de la prise de risque des hedge funds, loin sen faut. Les hedge funds profitant de ce laxisme ont pris des positions de plus en plus risques, notamment en investissant dans les produits structurs et dans les drivs de crdit. Lclatement de la crise sur le march du crdit structur puis les tensions sur le march montaire qui atteignent leur point culminant au cours de lautomne 2008 suite la faillite de Lehman, dtriorent la situation financire des prime brokers. Leurs fortes expositions dans le march du crdit structur leur font subir de lourdes pertes. De mme, les tensions extrmes sur le march du repo dans lequel les prime brokers jouent un rle central rveillent les proccupations de ces derniers sur le risque de contrepartie considrable auxquels ils sont exposs vis--vis des hedge funds.

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Pour rduire ce risque de contrepartie, les prime brokers, comme nous lavons vu ont brutalement augment les dcotes et en rponse la dgradation des collatraux apports par les hedge funds lancent lendroit de ces derniers des appels de marge. Le divorce entre les prime brokers et le hedge funds est consomm Outre la pression exerce par les prime brokers, les hedge funds sont sur un autre front harcels, par les investisseurs qui leur ont confi leurs capitaux. Les investisseurs en retirant massivement leurs fonds aggravent les conditions financires des hedge funds. En somme, le hedge funds subissent un double supplice : dune part les appels de marge des prime brokers et dautre part, les retraits de fonds des investisseurs quils vont essayer de conjurer par un deleveraging important.

3.2.3.1) Le double supplice (appels de marge des prime brokers, retraits de fonds des investisseurs), signal du deleveraging des hedge funds

Les hedge funds dans le but dobtenir des liquidits pour financer leurs activits de march dposent sous forme de garanties des titres auprs des prime brokers, il sagit alors comme nous lavons voqu prcdemment, de prts collatraliss notamment au moyen doprations de repos. Ce mode de financement comporte en principe pour les prime brokers, un faible risque de contrepartie dans la mesure o il est accompagn de deux prcautions supplmentaires. Dune part, la pratique de la dcote (haircut) sur les titres dposs sous forme de garanties, et dautre part, lexigence faite lemprunteur dapporter des fonds ou titres supplmentaires si toutefois la valeur des titres dposs devient infrieure la somme emprunte (aprs prise en compte de la dcote). En invitant lemprunteur compenser la perte de valeur de ses titres, le prime broker procde ainsi un appel de marge. Les produits titriss acquis par les hedge funds sur le march du crdit structur et ces produits structurs ont t largement mobiliss dans le cadre des prts collatraliss. Leffondrement du prix des produits structurs partir de lt 2007 expose les hedge funds aux appels de marge de leurs prime brokers. Pour rpondre ces appels de marge qui se font de plus en plus pressants et nombreux, les hedge funds dans les conditions dune liquidit de march fortement dgrade sont contraints un deleveraging dautant plus douloureux que les liquidations dactifs quil implique concernent essentiellement leurs meilleurs actifs, c'est--dire leurs actifs les plus liquides.

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Ces liquidations massives acclrent lilliquidit sur le march des produits structurs, celui des CDOs, notamment. Ds juin 2007, deux hedge funds qui faisaient massivement appel leffet de levier propos par Bear Stearns ont du faire face de lourdes pertes sur leurs portefeuilles dABS pesant 20 milliards USD et en partie exposs des prts subprime. Les appels de marge de Bear Stearns ont entran la vente denviron 4 milliards USD, en une semaine, ce qui sur les difficults de valorisation des produits structurs et mis mal la confiance des agents dans les produits structurs96. Alors que la pression exerce par les appels de marge ne faiblit pas, les hedge funds doivent faire face sur un autre front leurs investisseurs qui demandent massivement retirer leurs fonds. Les difficults croissantes auxquelles les hedge funds sont confronts compromettent la capacit de ces derniers satisfaire les exigences de rendement de leurs clients. Ces derniers prennent acte de cette nouvelle donne et dcident de retirer leurs fonds. Cette dcision dgrade la situation financire dj proccupante des hedge funds. Pour stopper cette hmorragie, les hedge funds activent des clauses du contrat qui les lient leurs clients qui stipulent que les montants retirs au cours dun trimestre ne peuvent excder un plafond fix 10% des fonds apports97. Ces mesures auront un effet limit entre juin 2007 et aot 2008, prs de 62 faillites de hedge funds sont rpertories98. De plus les fonds propres dclinent de 29% entre avril 2008 et octobre 200899. Le double supplice auquel les hedge funds sont confronts rend inluctable le deleveraging massif des hedge funds.

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Praet, Herzberg (2007) FMI (2008b), GFSR, p.41 Idem FSA (2009)

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Graphique 13 : Evolution du levier de hedge funds Sept 2006-Oct 2008 Source: BCE (2008)

Le levier des hedge funds chute brutalement partir de lt 2007 (cf. Graphique 13). A partir de lautomne 2008, une majorit de hedge funds dclaraient avoir un levier qui se situait en-dessous de 1. Les hedge funds par leur deleveraging et par la multiplicit de leurs contreparties ont t de puissants vecteurs du risque systmique.

3.2.3.2) Risque de contrepartie et Risque systmique du deleveraging des hedge funds Le principal canal de transmission du risque systmique est lexposition au risque de contrepartie100. En finanant massivement le levier des hedge funds, les prime brokers se sont exposs un risque de contrepartie considrable. Le risque de contrepartie des prime brokers vis--vis des hedge funds a quatre sources principales101 : les prts de titres aux hedge funds qui permettent ces derniers deffectuer des ventes dcouvert (short selling), les reverse repos, les oprations sur drivs (CDS notamment) et les ouvertures de lignes de crdit.

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Hildebrand (2007) Blundell-Wignall (2007a)

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Fin 2007, lexposition des prime brokers vis-vis des hedge funds slevait 1300 milliards USD soit 33% de leur exposition totale102. A partir du moment o sont apparues les tensions sur les marchs financiers, les prime brokers eux-mmes soumis de fortes tensions cherchent rduire le risque de contrepartie en lanant des appels de marge. Les prime brokers par leurs appels de marge forcent ainsi les hedge funds liquider leurs actifs, il sensuit un deleveraging systmique qui exerce une pression la baisse des cours. Cette baisse est dautant plus importante que les positions sont concentres et les pertes lies la liquidation de ces positions se traduisent par une baisse significative de la liquidit103. Le dbouclement en chane des positions est le principal mcanisme qui permet de transfrer les risques dune institution financire une autre et donne naissance la crise systmique104. La forte prsence des hedge funds sur le march des CDS a aussi constitu une source supplmentaire de risque de contrepartie. En effet, les banques en transfrant le risque de crdit vers les hedge funds qui leur ont vendu des CDS, se sont exposs un nouveau risque de contrepartie. Lors de lachat de protection auprs dun hedge fund, la banque transforme le risque de crdit sur lemprunteur initial en un risque de contrepartie vis--vis du hedge fund105. Le risque de crdit que les institutions financires estimaient tort, avoir transfr au hedge funds sest en ralit transform en risque de contrepartie vis--vis de ces derniers, qui, pour honorer leurs engagements et compenser les pertes des contreparties qui ils avaient vendu de la protection sont de nouveau contraints au deleveraging. Ferguson & Laster (2007), distinguent deux autres canaux du risque systmique : la convergence des styles des hedge funds et la superposition du levier.

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Blundell-Wignall (2008) Cole et al. (2007)

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Cest prcisment le type denchanements qui stait produit avec la quasi-faillite de LTCM au cours de lautomne 98, le pire a t vit de justesse car en labsence de renflouement de hedge fund, ses 17 contreparties auraient perdu collectivement entre 3 et 5 milliards USD. (Ferguson, Laster (2007))
105

Cole et al. (2007)

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En effet, bon nombre de hedge funds ont choisi des modles et des styles de ngociation analogues, en allant tous dans le mme sens pour dnouer leurs positions, ils dstabilisent fortement le march et aggravent le risque de lilliquidit de march.

La superposition de leffet de levier par les hedge funds comporte de mme une source potentielle de risque systmique. Limportance de leffet de levier des hedge funds amplifie le mouvement baissier du march. Plus le levier est lev, plus sa diminution force entrane des ventes en dtresse dactifs (fire sales)

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Conclusion La crise financire, initialement qualifie de crise des subprimes en rfrence ce compartiment du march hypothcaire Amricain dans lequel elle a pris naissance, va rapidement prendre laspect dune profonde crise de liquidit qui rsulte de la dfiance gnralise qui rgne sur les marchs financiers. Cette dfiance gnralise a jou un rle prpondrant dans lampleur de la crise financire. La dfiance des agents a doublement aggrav la crise. Dune part, en introduisant une illiquidit de march dans la mesure o ses derniers se rabattent massivement sur les actifs hautement liquides (flight to quality) et sanctionnent les produits structurs dont la structure complexe, ne permet pas aux agents de savoir sils sont ou non adosss des actifs de qualit, il sensuit une liquidation massive et non discrimine de ces produits, rduits ainsi lilliquidit. Dautre part, on assiste une rtention des liquidits face la monte du risque de contrepartie et les agents par dfiance souvent injustifie privent de liquidits des agents solvables, entranant ainsi la monte de lilliquidit de financement. Autrement dit, chaque agent qui manifeste cette dfiance pour solutionner ou prvenir les chocs de liquidit qui se prsentent elle, entrane lchelle du systme financier, une aggravation de la crise de liquidit. Confrontes ces chocs de liquidits, les institutions financires vont procder un deleveraging massif qui se rvle contreproductif car voulant prvenir un risque dinsolvabilit leur chelle individuelle, elles aggravent une chelle systmique, le risque dilliquidit. La frontire entre le risque dinsolvabilit entre le risque dilliquidit, nous le voyons est tnue, toujours est-il quil est illusoire de penser que la question de la solvabilit des banques peut-tre rsolue en diffrant le traitement des problmatiques lies au risque dilliquidit, chantier encore en friche. La nouvelle rglementation de Ble est porteuse davances significatives sur le risque dinsolvabilit des banques mais pour ce qui est des questions affrentes la liquidit, mises en lumire par la crise, Ble II a rendu copie blanche ou presque !

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Annexe 1 : Estimation des pertes et dprciations dactifs

1) Les estimations du FMI

Les montants sont en milliards de dollars.

Annexe 1 (Suite)

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2) Les estimations de la Banque dAngleterre (Bank of England)

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Bibliographie
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Tables des Matires

Introduction gnrale.6 I) Aux sources du recours immodr au levier, de la sous-capitalisation et de la fragilisation des bilans12 1) Facteurs Macroconomiques12 1.1) Facteurs exognes12 1.2) Facteurs endognes13

2) Facteurs Microconomiques14 2.1) Le modle de loriginate-to-distribute............................................................................15 2.1.1) Fonctionnement de la titrisation15 2.1.1.1) Le pooling.15 2.1.1.2) Loffloading 16 2.1.1.3) Le tranching16 2.1.2) Intrts de la titrisation 16 2.1.2.1) La titrisation, facteur de transfert du risque17 2.1.2.2) La rmunration des acteurs de la chane de titrisation17 2.1.3) Interaction entre Titrisation et Effet de levier20 2.1.3.1) Les SIVs, le levier et la titrisation20 2.1.3.2) Les hedge funds, le levier et la titrisation.................23 a) Description sommaire des hedge funds23 b) Le levier des hedge funds et les instruments de transfert du risque25

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2.2) La transformation excessive des chances : origines et ampleur30 2.2.1) Causes structurelles du dveloppement du wholesale funding30 2.2.2) Financement de gros sur le march montaire : cas du march du repo 2.2.2.1) Fonctionnement du march du repo30 2.2.2.2) Interaction entre repo et effet de levier31 2.2.3) La transformation excessive des chances (maturity mismatch)35 2.2.3.1) La transformation des chances des banque37 2.2.3.2) La transformation des chances des SIVs38

2.3)

Les nouveaux standards de la gestion du risque : cas de la Value-at-Risk (VaR)39

2.3.1) La VaR : principes gnraux39 2.3.2) Interaction entre la VaR et leffet de levier41

II) Du deleveraging des acteurs du march du crdit structur au deleveraging systmique.45 1) Le prlude du deleveraging : des fortes dprciations la crise de liquidit45 1.1) Lclatement de la crise45 1.2) Les pertes et dprciations subies par les institutions financires 47 1.2.1) Les pertes directes lies aux crdits hypothcaires47 1.2.2) Les pertes lies la valorisation aux prix du march (mark-to-market losses)48 1.3) Le rle de la comptabilit en valeur de march50 1.4) Promesses non tenues du transfert du risque et remise en cause du modle OTD52 1.4.1) Le transfert du risque de crdit : un double leurre52 1.4.2) Le processus de titrisation maill dasymtries dinformations53

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1.4.3) Le dclin de la titrisation au lendemain de lclatement de la crise55 1.5) La crise de liquidit, annonciatrice du deleveraging56 2) Premire phase du deleveraging, en rponse la dgradation du bilans des acteurs du march du crdit structur59 2.1) Le deleveraging, conscutif la reconsolidation des SIV62 2.2) Un deleveraging par recapitalisation insuffisant et de courte dure64

3) Deuxime phase du deleveraging : la crise de liquidit sur le march montaire et ses consquences systmiques66 3.1) La faillite de Lehman Brothers et consquences sur le march des CDS66 3.1.1) Le deleveraging des acteurs du march des CDS67 3.1.2) Le deleveraging des contreparties de Lehman Brothers69 3.2) La dgradation des conditions sur le march montaire et implications sur le deleveraging70 3.2.1) Hausse sans prcdent des taux interbancaires70 3.2.2) le deleveraging sur le march du repo72. 3.2.3) le deleveraging des hedge funds75 3.2.3.1) Le double supplice, signal du deleveraging des hedge funds....................................76 3.2.3.2) Risque de contrepartie et Risque systmique du deleveraging des hedge fund78 Conclusion 81 Annexes ..82 Bibliographie 84

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