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L’intelligence artificielle en entreprise

Stratégies, gouvernances et challenges de la data


intelligence

Octobre 2018

Le Cigref est un réseau de grandes entreprises et d’administrations publiques qui a pour


mission de développer la capacité de ses membres à intégrer et maîtriser le numérique. Par la
qualité de sa réflexion et la représentativité de ses membres, il est un élément fédérateur et
acteur important de la société numérique.

Association loi 1901 créée en 1970, le Cigref n’exerce aucune activité lucrative. Il regroupe à
ce jour près de 150 grandes entreprises et administrations publiques françaises dans tous les
secteurs d’activité. Sa gouvernance est assurée par 15 administrateurs, élus en Assemblée
générale. Son activité est animée par une équipe de 10 permanents.

Droit de propriété intellectuelle

Toutes les publications du Cigref sont mises gratuitement à la disposition du plus grand nombre
mais restent protégées par les lois en vigueur sur la propriété intellectuelle. Est autorisée la copie
du titre et d’extraits de 500 caractères, suivis chacun de la mention « Source : » assortie de l’url
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L’intelligence artificielle en entreprise
Stratégies, gouvernances et challenges de la data intelligence

Préface
Pendant une année, le Cercle IA du Cigref s’est réuni pour faire le point sur la montée en puissance
de l’Intelligence Artificielle (IA) dans les entreprises, et sa problématique. A travers des
présentations et des échanges passionnants, nous avons constaté le début d’une accélération des
usages de l’IA, l’augmentation des enjeux et une sensibilisation au plus haut niveau.

Afin que l’entreprise en bénéficie des potentialités de l’IA, la Direction des Systèmes
d’Information (DSI) a un rôle clé car elle doit d’une part garantir la cohérence, la sécurité, la
compréhension et la qualité de toutes les données de l’entreprise, et d’autre part permettre
l’intégration des nouvelles technologies associées. La capacité de la DSI à remplir cette mission
et à mettre à disposition les datas de façon performante permet à l’entreprise de saisir les
opportunités de l’IA qui sont souvent liées au Big Data. Pour ce faire, la proximité avec les métiers
est essentielle et doit permettre de choisir les cas d’usages les plus pertinents, de saisir les
corrélations et de gérer des projets de façon souple et innovatrice tout en conservant les
cohérences, les visions à long terme et les perspectives d’industrialisation.

Aussi, la gouvernance des actions sur l’IA, fortement corrélée avec la gouvernance Data et la
gouvernance numérique, est un élément clé de la construction de la dynamique sur les sujets
d’IA. Les échanges entre les participants du cercle ont montré que les organisations se cherchent
et qu’il n’y pas de recette unique, compte tenu de la diversité des entreprises (secteur, taille,
culture, maturité et personnalités en présence). Néanmoins, la proximité Métier-DSI, les cultures
agiles et collaboratives, l’esprit entrepreneurial, l’appel à l’imagination et le droit à l’échec sont
revenus en permanence comme facteurs de succès, avec en particulier la création d’équipes
pluridisciplinaires, de data lab, de fab lab ou autres plateaux collaboratifs…

Devant l’accélération de l’utilisation des datas et de l’IA et les transformations qu’elle engendre,
la DSI peut être accompagnatrice, enabler, garante, fertilisatrice, inspiratrice.

C’est à la direction métier de dresser la feuille de route des objectifs, de s’impliquer dans les
priorités et de faire évoluer sa vision de la valeur pour le client … en écoutant le client qui, au
final, valide les besoins qui le concernent. La DSI apporte son expertise technique pour proposer
les meilleurs choix et les faire évoluer au bon rythme. Les régulateurs deviennent aussi un acteur
clé : ils donnent le cadre et les limites qui doivent être intégrés « by design », car les questions
éthiques couvent sous les dimensions technologiques et métiers.

L’IA dessine les contours de ce que l’on pourra appeler "l'entreprise augmentée". Elle offre des
possibilités d’optimisation de processus et de ressources, d’offre de nouveaux services et
d’évolution des relations. L’IA au service de l’intelligence humaine est finalement un outil de
transformation qui s’inscrit dans toutes les dimensions de l’entreprise.

Xavier de Broca, DSI BPI France, co-Président du Cercle IA (2017/2018)

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L’intelligence artificielle en entreprise
Stratégies, gouvernances et challenges de la data intelligence

SYNTHÈSE
Le Cercle IA 2018 poursuit les réflexions menées en 2017 sur « Les enjeux de mise en œuvre
opérationnelle de l’IA dans les grandes entreprises », qui faisaient état des premières
expérimentations et initiatives menées autour de l’IA dans les entreprises. Ce rapport interrogeait
également les futurs possibles, en termes de modèles d’affaires, autour des interactions entre
agents intelligents et les modes de collaboration avec l’écosystème en IA, en particulier avec la
recherche.

L’objectif du Cercle IA du Cigref est de suivre l’évolution et les impacts de l‘implémentation de


l’IA dans les entreprises, d’un point de vue organisationnel, technique et humain. Le présent
rapport propose une analyse des avancées en termes de stratégie autour de l’IA, d’adaptation
du SI et des modèles d’organisation et de gouvernance de la data intelligence. L’analyse se
veut pragmatique. Elle repose exclusivement sur les retours d’expérience des membres du Cigref
et permet d’appréhender le développement de l’IA en entreprise à partir de la gouvernance du SI
et de la gouvernance des données. En effet, l’émergence de l’IA dans les entreprises résulte de
leur transformation numérique avancée et du succès de leur organisation « data-centric ».

Une stratégie IA qui commence à se structurer sous différentes formes


On constate qu’une réflexion stratégique est en train de se coordonner dans les entreprises, soit
de manière verticale, soit de manière horizontale, ou bien encore de manière agile. La
sensibilisation et l’implication des COMEX est la pierre angulaire de l’élaboration de la stratégie
globale autour de l’IA. Mais ce n’est pas toujours la première étape. Certaines stratégies se
construisent d’abord en bottom-up, visant plutôt un pilotage par les métiers en collaboration plus
ou moins étroite avec la DSI, un mode de fonctionnement agile, avec des équipes autonomes et
pluridisciplinaires, et une culture de l’expérimentation. C’est ainsi que les entreprises
détecteront les compétences et les appétences en interne, qui pourront aussi être stimulées par
divers moyens comme des challenges IA, des ateliers et conférences dédiés à l’IA. Les entreprises
participantes souhaitent en effet ré-internaliser certaines compétences et moyens techniques
(plateforme de données, datalab dédié à la conception d’algorithmes d’IA, lien avec
l’industrialisation…) pour maîtriser davantage les solutions d’IA tout en étant à la recherche de
partenaires pour les expertises et la création de dynamiques.

La gouvernance de la data intelligence


La data intelligence recouvre à la fois les dimensions big data, analytics, machine learning,
statistiques et plus globalement data science. C’est dans cet environnement que l’intelligence
artificielle prend toute sa valeur, l’IA étant souvent complémentaire au Big Data. Là où les
technologies de Big Data permettent de connaître, c’est-à-dire de tirer des connaissances à partir
de la corrélation de données et d’informations, l’IA permet, quant à elle, de comprendre des
situations pour ensuite résoudre un problème, traiter une question complexe, proposer des

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Stratégies, gouvernances et challenges de la data intelligence

hypothèses, voire prendre des décisions, grâce à diverses techniques d’apprentissage


(supervisées, non-supervisées, par renforcement). Cette notion de data intelligence est
représentative de la transformation hybride que les entreprises traversent, permettant de gérer
à la fois le legacy et la création de nouveaux systèmes, les uns pouvant interagir avec les autres.

De nombreux challenges sont à relever !


L’intégration de systèmes d’IA dans les entreprises pose plusieurs challenges :
• Coordonner et structurer les initiatives autour de l’IA, pour les développer, leur donner
davantage de visibilité et en augmenter la valeur (avec notamment une « fertilisation
croisée » des projets) ; :
• Prendre en compte le besoin de réconcilier les cultures métiers ;
• Sensibiliser les équipes et directions aux enjeux et possibilités réelles de l’IA. La
compréhension des grandes familles de pièges de l’IA (dérive, biais, surapprentissage) est
essentielle pour les métiers. Cette acculturation de l’entreprise pourra aider à démystifier
l’IA et à en faciliter l’appropriation ;
• Construire des architectures adaptées au temps réel et les faire évoluer ;
• Equilibrer les budgets dédiés à l’IA. Pour l’instant, les efforts semblent plutôt se concentrer
sur des domaines spécifiques comme la construction de datalab, la mise en place de projets
et les chatbots ;
• Sensibiliser le Comex aux enjeux de transformation intra-entreprise (incidences sur la
transformation des emplois et les compétences nécessaires de demain) et dans la relation
avec le client ;
• Mobiliser les talents.

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Stratégies, gouvernances et challenges de la data intelligence

REMERCIEMENTS
Nos remerciements vont à Xavier de Broca, DSI BPI France et Konstantinos Voyiatzis, DSI Edenred qui ont
piloté cette réflexion, ainsi qu’à tous les participants du Cercle IA du Cigref (ouvert à quelques extérieurs) :

Membres du groupe de travail

AIME Pierre Sodexo JACOB Jocelyn SACEM


AMOURIAUX Jean-Bernard Caisse des dépôts LAMBERT Jean-Christophe Société Générale
ANSELLEM Daniel Ministère de l’intérieur LANGLOIS Julie Bensoussan avocats
ANTERION Frédéric Saint-Gobain / Brainnov LAUNOIS Christelle Société Générale
BOISARD Anne-Sophie Chanel LEMAIRE Jérôme Ministère des armées
BRUNIAS Romain Saint-Gobain LONCELLE Jérôme Klesia
COTTIN Bernard Caisse des Dépôts MASSON Bertrand Airbus
CHALENDARD Danielle Orange MARSIT Nadhem Essilor
DE GALZAIN Charles Nexity MICHON Franck EDF
DEBICHE Chabane La Banque Postale MONZIES Emmanuel Groupe PSA
DECLERCK Brigitte Agirc Arrco PAYSAN-TEBOUL Laeticia Orange
DESFORGES Jean-Baptiste Axa Group PERRIN Nicolas Banque de France
DRIHEN Thomas Axa Group PESTEL Matthieu Engie
EL FALLAH Amal Lip6 PRISER Josué EDF
FAR Fatima Essilor RAFFAËLLI Jean-Luc Groupe La Poste
FEUGAS Michel Ap-Hp RICHARD Philippe Caisse des Dépôts
FONTENEAU Hervé Pôle emploi RIDEAU Stéphane Pôle emploi
FOUQUIAU Christelle Société Générale SERVANT François-Paul Renault
FRAVAL Yann Société Générale STEPHKOV Natacha Essilor
GAUDIN Emmanuel Lagardère SUBRENAT François Région Île-de-France
GEORGES Bernard Société Générale SUTTER Frédéric Airbus
GIRARD Sylvain Hager Group TOURKI Yousra Air France KLM
GUEYDAN Jérôme Orange WASSONG David Generali
HOMPS Gaëlle Pôle emploi

Un immense merci aux intervenants des entreprises membres qui nous ont permis d’enrichir considérablement
ces réflexions :
ATGIE Franck – Enedis GNANOU Marc – Caisse des Dépôts
BENAMEUR Nabil – Orange GUEYDAN Jérôme – Orange
BENTFATMA Wail – Air France KLM KAUFFMANN Bruno – Orange
CHABROL Paul-Henri – AXA Group SANANIKONE Thao – Caisse des Dépôts
FONTENEAU Hervé – Pôle emploi RIDEAU Stéphane – Pôle emploi

Ce livrable a été rédigé par Flora Fischer, Chargée de mission au Cigref, avec la participation de Xavier
de Broca.

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Introduction
L’intelligence artificielle en entreprise
Stratégies, gouvernances et challenges de la data intelligence

Table des matières


Introduction ................................................................................................ 8
1. Contexte : la dynamique de l’IA en entreprise .............................................. 10
1.1. Des champs d’application très protéiformes .............................................. 10
1.2. La réalité « hybride » des cas d’usages en IA ............................................. 13
1.3. Gérer les effets d’annonces .................................................................. 15
1.4. Les principaux défis à relever ............................................................... 15
Budget & ressources ..................................................................... 15
Organisation et écosystème ............................................................ 16
Aspects techniques ...................................................................... 16
Ressources Humaines .................................................................... 18
2. Gouvernance de la data intelligence ........................................................... 18
2.1. Prérequis à la gouvernance de la data intelligence ..................................... 19
2.2. Identifier les compétences en interne ..................................................... 20
Anticiper dès à présent les enjeux de compétences et de formation .......... 20
Créer des impulsions et détecter les ressources en interne ...................... 21
2.3. Choix d’organisation de l’entreprise autour de l’IA ..................................... 22
2.4. Pilotage de la stratégie en IA dans les entreprises ...................................... 24
2.5. Impact sur les métiers ........................................................................ 24
2.6. Rôle et impulsion de la DSI : DSI fertiliseur et catalyseur de l’IA ? ................... 26
La DSI, un enabler de l’IA .............................................................. 26
Rôle et atout de la DSI .................................................................. 26
3. Le SI augmenté : Perspectives d’évolution du SI intégrant l’IA .......................... 29
3.1. Qu’est-ce que le « SI augmenté » ? ......................................................... 29
3.2. Vers des architectures ouvertes et interactives pour intégrer la data intelligence 31
3.3. Outils et compétences IA : externalisation ou internalisation ? ....................... 33
3.4. Agents conversationnels & Natural langage processing ................................. 35
Les sources de valeurs de l’interface conversationnelle .......................... 35
Architecture : de quoi est fait un chatbot ? ......................................... 35
Les challenges ............................................................................ 36
3.5. L’industrialisation des programmes IA ..................................................... 37
Conclusion ................................................................................................ 38

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Introduction
L’intelligence artificielle en entreprise
Stratégies, gouvernances et challenges de la data intelligence

Sommaire des retours d’expérience


des entreprises
Définition de l’intelligence artificielle (IA) – Orange ...................................................... 9
Enjeux de l’IA pour l’automobile : application à la maintenance prédictive - Groupe PSA ..... 10
Les cas d’usage de l’IA au sein de la SACEM .............................................................. 11
L’intelligence artificielle au service de l’emploi – Pôle emploi ....................................... 13
Diversité des cas d’usage utilisant l’IA - Orange ......................................................... 17
La Data Science - ENGIE ...................................................................................... 20
Impliquer les collaborateurs et stimuler l’intérêt en interne avec un Challenge IA - ICDC ...... 21
Exemple d’organisation pour fertiliser les projets en IA - Enedis ..................................... 23
Stratégie d'implémentation et de coordination de l’IA avec le Programme IA d’Air France KLM 25
Structuration de la gouvernance de l’IA - Orange........................................................ 25
Quelques risques liés à l’apprentissage et les moyens d’y répondre – Orange...................... 28
Impact de l’IA sur l’architecture du SI – Groupe LA POSTE ............................................. 31
L’open innovation à Pôle emploi ............................................................................ 32
De l’« IA métier » à l’« IA métier entraînée » - Orange................................................. 34
Cas d’usage hybride entre système expert et Natural Langage Processing - HAGER Group ..... 36
Cas d’usage de Natural Langage Processing à destination des fournisseurs dans le cadre des
achats responsables – Saint-Gobain ......................................................................... 37

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Introduction
L’intelligence artificielle en entreprise
Stratégies, gouvernances et challenges de la data intelligence

Introduction
L’intelligence artificielle (IA) est devenue un terme galvaudé, dont on ne mesure plus la
véritable valeur et qui peut engendrer des craintes. En cause certainement, sa
surmédiatisation et les effets d’annonce qui se succèdent continuellement. Sous le vocable
d’intelligence artificielle se trouvent pourtant de nombreuses avancées scientifiques et
techniques récentes qui irriguent et remodèlent peu à peu de nombreux pans de la vie
économique et sociale. Née il y a plus d’un demi-siècle, l’IA est passée dans une phase
d’accélération, de la discipline scientifique à l’application opérationnelle, et peu à peu,
d’un enjeu théorique à un enjeu civilisationnel et géostratégique.

L’entreprise numérique poursuit sa transformation grâce à une convergence inédite,


combinant la puissance de calcul, la miniaturisation, la puissance de stockage et la puissance
des réseaux. Cette confluence est à l’origine des percées significatives des data sciences et
du deep learning, considérés comme les moteurs du développement exponentiel de l’IA.

C’est donc dans cette imbrication qu’il faut penser et suivre l’impact de l‘IA dans
l’entreprise. Grâce à cette convergence, l’IA exprime pleinement ses potentiels à travers
diverses fonctionnalités : elle optimise les processus existants, automatise (le traitement de
data mining par exemple), permet le pilotage assisté (ou augmenté), détecte, prédit, et
interagit de plus en plus « naturellement » avec l’homme, grâce aux évolutions du
traitement automatique du langage naturel. Sa valeur ajoutée se trouve aujourd’hui
principalement dans ses capacités de détection, de prédiction et d’interaction avec
l’homme.

La réalité de l’IA dans l’entreprise ne se réduit pas à une simple optimisation de processus :
elle introduit de nouveaux schémas organisationnels, de nouveaux modes de travail, de
nouveaux services, d’autres manières de penser les interactions avec les clients et donc un
renouveau des business models. Elle rebat ainsi les données concurrentielles, ouvrant des
opportunités pour les innovateurs. Par ailleurs, l’IA renouvelle certaines questions
géostratégiques, car ceux qui possèdent les données, mais aussi les compétences et les
technologies permettant de les traiter via la conception d’algorithmes d’intelligence
artificielle, ont entre leurs mains « l’une des clés du pouvoir de demain dans un monde
numérique » (Rapport Villani « Donner un sens à l’IA » – Mars 2018).

Le présent livrable est le fruit des réflexions des participants du Cercle IA du Cigref durant
l’année 2017/2018 et répond à la problématique suivante : quels sont les moyens
stratégiques, organisationnels et opérationnels pour répondre à l’arrivée et à l’usage de
plus en plus massif de systèmes d’intelligence artificielle dans l’entreprise ?

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Introduction
L’intelligence artificielle en entreprise
Stratégies, gouvernances et challenges de la data intelligence

Définition de l’intelligence artificielle (IA) – par Orange


L’IA est un ensemble de disciplines qui doivent être combinées pour créer des services
intelligents capables d’apprentissage, en mesure d’interagir et d’aider à la prise de
décision :
• Raisonnement et systèmes experts
• Ingénierie des connaissances
• Traitement et compréhension de la langue naturelle
• Apprentissage statistique (Machine Learning, dont le Deep Learning)
• Théorie des jeux
• Optimisation
• Simulation
• Traitement du signal, de l’image, etc.
L’utilisation de ces différentes briques techniques permet de créer des cas d’usage
métiers.
On a tendance à confondre l’IA avec l’apprentissage (Machine Learning et Deep Learning)
mais l’apprentissage n’est qu’une partie des disciplines liées à l’IA. En revanche, les
techniques d’apprentissage sont de plus en plus présentes dans les applications d’IA, du
fait de la disponibilité des données, des progrès en termes d’algorithmes et des avancées
sur les capacités de traitement.

Nabil Benameur – Responsable Data Intelligence & Algorithms


Technology & Global Innovation – Orange

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Contexte : la
dynamique de
l’IA en
L’intelligence artificielle en entreprise entreprise

Stratégies, gouvernances et challenges de la data intelligence

1. Contexte : la dynamique de l’IA


en entreprise
Depuis quelques années, l’IA s’immisce de plus en plus dans l’entreprise avec un champ
d’application très vaste, faisant appel notamment au machine learning (dont le deep
learning), et à ses sous-catégories (apprentissage supervisé, semi-supervisé, non-supervisé,
apprentissage par renforcement 1 …).

1.1. Des champs d’application très protéiformes

Les applications d’IA qui voient le jour dans les entreprises sont protéiformes, avec des
développements divers en fonction des secteurs d’activité et métiers à l’intérieur de
l’entreprise. De manière générale, la majorité des participants du Cercle IA témoignent d’un
foisonnement d’initiatives qui montre que la dynamique de l’IA est bien enclenchée dans
les entreprises.

Les cas d’usage les plus fréquents touchent à la lutte anti-fraude, l’assistance virtuelle ou
conversationnelle en back et/ou front office, le marketing prédictif, la détection de pannes,
de signaux faibles, ou encore les pare-feux intégrant l’IA (alertes sur la sécurité du SI ;
cyberattaques).

Enjeux de l’IA pour l’automobile : application à la maintenance prédictive -


Groupe PSA
Le monde automobile connaît une phase de transformation profonde sous l’effet de
l’utilisation de l’intelligence artificielle qui devient incontournable. Les enjeux
techniques se déplacent de la conception organique vers le software et une meilleure
exploitation des données associées.

Il s'agit d’un changement de paradigme pour les opérationnels, avec la prise en compte
de notions non seulement de "Big Data", de Machine Learning ou d'Intelligence Artificielle,
mais avant tout de "Good Data" sans quoi rien n'est possible.

Un cas d’application opérationnel à forte valeur ajoutée est la maintenance prédictive


sur le produit : les équipes d’experts PSA en Intelligence Artificielle ont mis en place du
Machine Learning pour détecter les pannes en préventif.

La première approche retenue utilise des réseaux de neurones en mode supervisé,


développés spécifiquement sur la base des données stockées dans l’infrastructure Big

1 La définition de ces termes est proposée dans le livrable « Gouvernance de L’IA dans les grandes
entreprises ; enjeux managériaux, juridiques et éthiques », Cigref – Bensoussan Avocats, 2016

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Contexte : la
dynamique de
l’IA en
L’intelligence artificielle en entreprise entreprise

Stratégies, gouvernances et challenges de la data intelligence

Data PSA. Sur la base des essais de roulage réalisés en interne, il s’agit d’apprendre à
reconnaitre les défauts déjà identifiés dans nos référentiels. Le défaut est annoté pour
identifier des « signaux faibles » anticipant un possible dysfonctionnement vu du client.

La démarche sera complétée par un mode non supervisé qui permettra de détecter
d’éventuels nouveaux défauts. Ces paramètres sont ensuite intégrés dans les calculateurs
embarqués (exemple moteur) pour monitorer les indicateurs en temps réel. L’objectif est
d’une part de permettre aux analystes dans le réseau d’identifier beaucoup plus
rapidement les causes de pannes, et d’autre part d’améliorer la robustesse et la durabilité
de la conception.

Yves Français - Innovation Project Manager


Matthieu Donain - AI Research engineer, Head of OpenLab AI
Guillaume Gruel - Head of Engineering & Quality Data Service
Groupe PSA

La majorité des entreprises ont effectué des phases d’expérimentation centrées sur le
machine learning et les nouvelles interfaces conversationnelles. Il faut noter que la logique
de Proof of Concept (POC) est omniprésente, à la fois côté métier et côté DSI, et portera
tant sur l’efficacité opérationnelle que sur la connaissance client.

La logique d’«IA appliquée » ou d’AI as a service, qui consiste à prendre des solutions à
l’externe puis à les implémenter sur les SI, reste très prégnante dans de nombreux cas
d’usage et permet notamment de répondre rapidement à des problèmes métiers identifiés.
L’un des enjeux récurrents est de renforcer l’automatisation de certains processus pour les
optimiser, ce qui constitue un gain de temps et surtout une meilleure efficacité dans un
contexte « big data », comme en témoigne la SACEM.

Les cas d’usage de l’IA au sein de la SACEM


La SACEM, Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique, a pour mission
essentielle de collecter les droits d’auteur en France et de les redistribuer aux créateurs
français et du monde entier. La SACEM fait face à une multiplication des données en
provenance notamment des nouvelles plateformes numériques de la musique - Spotify,
Apple, Google, Deezer … - qui croissent de manière exponentielle. Un des enjeux est de
pouvoir identifier de la manière la plus automatisée possible, les œuvres utilisées sur ces
plateformes, et ainsi de mieux garantir le respect des droits d’auteur et de pouvoir
rétribuer le créateur de la musique au plus juste. Pour cela, nos principaux cas d’usage
faisant intervenir de l’intelligence artificielle et plus précisément du Machine Learning
sont les suivants :
• Le premier cas d’usage concerne l’augmentation du taux d’identification des œuvres
de manière syntaxique :

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Contexte : la
dynamique de
l’IA en
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Stratégies, gouvernances et challenges de la data intelligence

Nous avons étudié comment en introduisant plusieurs combinaisons d’algorithme de


recherche syntaxique à partir des données déclarées par ces plateformes, nous
pouvions augmenter le taux d’identification automatique des œuvres. Nous nous
sommes appuyés sur des données d’entraînement représentant un échantillon
représentatif des œuvres, puis avons défini un ensemble de variables correspondant
aux différents types d’algorithmes syntaxiques utilisés. Nous avons fait tourner le
modèle d’apprentissage en vue de déterminer le meilleur taux d’identification
possible au regard de la combinaison de ces différents algorithmes. Par ailleurs, nous
espérons également lancer une expérimentation pour capitaliser sur notre
identification manuelle afin d’entrainer un réseau de neurones à apprendre le type
d’erreurs de saisie habituellement faites et à les corriger automatiquement.

• Le second cas d’usage concerne l’augmentation du taux d’identification des œuvres


basé sur la détection musicale :
Nous rencontrons des problématiques lorsque des tubes sur les plateformes sont des
remix, des reprises, ou tellement déformés que des applications telles que Shazam
ne savent pas les reconnaître, car il n’existe pas dans les bases d’enregistrement
exact de cette interprétation. Pour cela nous testons actuellement deux approches.
La première consiste en l’apprentissage d’une représentation de l’œuvre qui
pourrait se baser sur le dictionnaire musical de la SACEM qui recense plus de 750 000
thèmes musicaux. La seconde vise à entrainer un réseau de neurones à reconnaitre
ce qui fonde la similarité entre deux reprises musicales, de façon à représenter
chaque version sous une forme (fingerprint) qui puisse être facilement et
rapidement comparée à celle des originaux connus.

A noter que nous regardons également deux autres cas d’usage non directement liés à
l’identifications des œuvres :
• Segmentation de nos sociétaires :
Afin de mieux comprendre la population des sociétaires que nous servons, nous avons
utilisé des algorithmes de machine learning non supervisés, afin d’identifier des
clusters cohérents et pouvoir apporter des réponses plus ciblées à leurs besoins
spécifiques.
• Prédiction de la répartition des droits :
Des premières études ont été menées pour prédire la répartition des droits d’auteur
de nos sociétaires dans une logique de nouveaux services ou si nous rencontrions des
problèmes sur notre SI. Les études ont été menées avec différents niveaux de
granularité sur les données et ont clairement montré une justesse de la prévision
accrue par rapport au modèle de régression linéaire précédent.

En termes d’organisation, nous sommes à ce stade plutôt dans l’expérimentation et la


recherche que dans une vraie phase d’industrialisation autour de l’IA. Nous sommes

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composés de petites équipes au sein de la DSI et devons faire appel soit à des stagiaires,
soit des thésards, soit des cabinets spécialisés pour nous accompagner dans la démarche.
Dans une refonte plus profonde de notre SI et la mise en place d’une plateforme au cœur
de l’industrie de la musique, qui sera à terme APIsée et ouverte vers l’extérieur, une
réflexion sera organisée afin de déterminer comment introduire l’intelligence artificielle
de manière plus profonde au sein du SI et de l’entreprise au sens large.

Xavier Costaz - Directeur de Projet Programmes transverses et innovation


Guillaume Doras – Chargé de recherche
Frédéric Falkoff – Responsable domaine Data, Web et Ressources
Jocelyn Jacob – Responsable domaine SI Clients
SACEM

1.2. La réalité « hybride » des cas d’usages en IA

Les avancées se situent surtout sur l’utilisation des systèmes de machine learning et plus
généralement de la data intelligence, qui s’inscrit pleinement dans la continuité des
programmes de transformation numérique. Ce terme « data intelligence » regroupe à la fois
les techniques de big data, d’analytics, de machine learning, et de statistiques. Les
entreprises sont donc, dans la plupart des cas, dans une approche hybride de l’intelligence
artificielle, car différentes techniques et processus s’interconnectent. Par ailleurs, c’est
souvent la combinaison de technologies et de compétences qui crée de la valeur. Tout cela
correspond à la réalité des cas d’usage actuels. Mettre du machine learning dans tous les
processus n’est évidemment pas toujours pertinent. Pour générer des modèles prédictifs,
l’usage du machine learning est certes pertinent, mais pour faire des corrélations basiques
de données, l’usage de modèles statistiques suffit amplement. L’IA s’inscrit davantage dans
une continuité que dans une rupture. Cette transformation autour de l’IA peut être qualifié
« d’hybride » car elle suppose une interconnectivité dynamique entre le legacy et
l’intégration de nouveaux systèmes.

L’intelligence artificielle au service de l’emploi – Pôle emploi


Premier acteur du marché du travail en France avec 54 000 collaborateurs, plus de 1 000
agences et relais de proximité, ainsi qu’un réseau de partenaires sur l’ensemble du
territoire, Pôle emploi œuvre au quotidien pour faciliter le retour à l’emploi des
demandeurs et offrir aux entreprises des réponses adaptées à leurs besoins de
recrutement.

Pour soutenir son offre de service personnalisée et relever les défis majeurs que posent
notamment le rythme toujours plus rapide des mutations économiques et sociales, Pôle

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l’IA en
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Stratégies, gouvernances et challenges de la data intelligence

emploi accélère sa transformation digitale, notamment en s’appuyant sur les disciplines


de l’intelligence artificielle.

Pôle emploi dispose d’un socle de données conséquent (chiffres clés 2016 : 8,5 millions
d’inscriptions de demandeurs d’emploi, 403 000 entreprises utilisatrices de nos services,
4 millions de parcours vers le retour à l’emploi, 7,4 millions d’offres d’emploi publiées
sur pole-emploi.fr). C’est sur ce socle que Pôle emploi s’est appuyé pour créer de
nouveaux « smart services », à base d’IA. Une vingtaine de produits exploitant les
algorithmes prédictifs, le Machine Learning, le Deep Learning ou encore l’analyse
sémantique sont aujourd’hui en production ou en cours d’expérimentation.

Ces services, destinés aux conseillers de Pôle emploi, permettent :


1) Aux demandeurs d’emploi d’élargir considérablement leur périmètre de recherche :
Exemple avec le cas d’usage « Parcours gagnant », combinaison d’algorithmes prédictifs.
En s’appuyant sur notre connaissance des parcours professionnels, un premier algorithme
prédit les perspectives de retour à l’emploi sous 6 mois, pour un métier et un bassin
géographique donné. Dans un objectif d’éclairages complémentaires, plusieurs
alternatives peuvent être proposées, en s’appuyant sur d’autres « services » d’IA. Par
exemple :
• Vue Métier : un algorithme « métiers proches » s’inspire des candidatures observées
pour des profils similaires, pour proposer des parcours alternatifs présentant de
meilleures perspectives de retour à l’emploi.
• Vue Compétence : un algorithme « Galaxie des Métiers » rapproche les compétences
/métiers et propose des métiers mettant en jeu tout ou partie des compétences
détenues par le demandeur d’emploi, toujours dans un objectif de proposer des
parcours alternatifs présentant de meilleures perspectives de retour à l’emploi. Il
recommande également les meilleures formations si des compétences sont à
renforcer.
2) Aux entreprises d’améliorer la recherche de candidat :
Exemple du cas d’usage « attractivité des offres ».
En s’appuyant sur notre connaissance du marché et à l’instar de l’exemple ci-dessus, un
premier algorithme prédit les perspectives de succès d’une offre d’emploi.
Dans un objectif d’éclairages complémentaires, plusieurs alternatives peuvent être
proposées aux recruteurs, en affinant certains critères de l’offre (zone géographique,
nature de contrat, durée de travail …) dans un objectif d’amélioration de l’attractivité
de l’offre.

Hervé Fonteneau, Manager SI Risque & Prévention des fraudes – DSI Pôle emploi

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1.3. Gérer les effets d’annonces

Cette vague de l’IA manque pourtant encore de reconnaissance et de soutien du top


management, pour ne pas dire d’une gouvernance assumée. En cause peut-être, la
surmédiatisation de l’IA et de ses effets plus ou moins fantasmés, mais aussi la vague des
chatbots dont les résultats opérationnels ne sont pas à la hauteur des attentes. La vague
médiatique autour des chatbots est pourtant loin de représenter la réalité de ce qu’est l’IA
dans l’entreprise aujourd’hui : tout d’abord, même si les entreprises font des POC sur des
chatbots, la majorité d’entre elles s’accordent sur le fait que ce n’est qu’une partie
primaire de l’IA, « encore peu intelligente » car elle repose en grande partie sur des moteurs
de règles ou des mapping basiques. En revanche, des avancées importantes concernent le
domaine de la recherche sur la reconnaissance vocale et la compréhension du langage, mais
cela ne s’est pas encore traduit opérationnellement, et les applications actuelles restent
encore très limitées. Néanmoins, les entreprises se préparent dès aujourd’hui à ce type de
révolution et anticipent les transformations possibles concernant les interactions avec les
clients.

1.4. Les principaux défis à relever

La réalité de cette transformation hybride que vit l’entreprise remet en lumière certaines
problématiques d’ordre organisationnels, techniques et de ressources notamment.

Budget & ressources

Même si de nombreux projets sont déjà lancés dans les entreprises, tant en interne qu’en
externe, les investissements ne suivent pas toujours : l’IT a besoin de ressources notamment
pour constituer des équipes conséquentes de data scientists, former et internaliser les
compétences du futur, créer des data lake pour expérimenter des systèmes de machine
learning ou encore pour acquérir des données en dehors des frontières de l’entreprise. C’est
une condition nécessaire à la qualité des données et des modèles qui sont des prérequis
essentiels à l’utilisation de l’IA dans l’entreprise.

Souvent les seules ressources consacrées à l’IA sont dédiées au datalab, ou encore aux
chatbots ; mais cela n’est pas suffisant, car l’IA irrigue toute l’entreprise. Il faut dès lors
identifier la valeur de l’IA au sens large. La DSI a souvent un rôle clé dans cette
transformation (en partenariat étroit avec les métiers : mise à disposition des datas,
sécurité, suivi de l’évolution rapide des outils, optimisation en matière d’utilisation de
prestations externes, non dispersion, cohérence et exploitation du SI…). Elle doit pouvoir
piloter l’intégration de l’IA dans l’entreprise à partir de son SI, de manière à la fois
stratégique et opérationnelle, et être le référent support au business. Son positionnement

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transverse peut permettre d’exploiter les corrélations entre les métiers indépendamment
de leur concurrence.

La question du budget rejoint la question de l’organisation et de la gouvernance traitée ci-


après. Il est nécessaire d’affecter un budget dédié à l’IA pour éviter le risque de la dilution
des initiatives dans ce domaine.

Organisation et écosystème

Les problématiques organisationnelles rattachées à l’IA s’expriment à plusieurs niveaux :


collaboration et modes de travail, ressources, et prospective stratégique notamment. Nous
constatons en effet qu’il y a encore trop de directions cloisonnées et une vraie
problématique de transversalité dans les grandes entreprises : les informaticiens et les
statisticiens par exemple ne travaillent pas suffisamment ensemble ; il peut y avoir une
lutte de pouvoir entre les deux. Or, dans cette transformation hybride, faisant appel à tous
les savoir-faire de l’entreprise, la collaboration transversale devient une question de survie.

Une autre question connexe se pose : comment avancer de façon homogène dans toute
l’entreprise sachant qu’il y a une différence de maturité entre les départements ? La
coordination d’un projet en IA nécessite de prendre en compte cette difficulté via, par
exemple, la mise en place de comités chargés de la coordination des projets dédiés à l’IA.

Par ailleurs, il y a un manque d’utilisation des ressources existantes en externe et de


recherche de partenariats durables : capter le savoir-faire qui sort des laboratoires de
recherche, et de l’open source constitue un enjeu de taille. Sur ce dernier point, il faut
noter que, de plus en plus, les grandes entreprises cherchent des alternatives type open
source pour se départir de leur dépendance à certains éditeurs de solutions 2. Enfin, la
compréhension du marché et de l’IA devient dès lors un élément essentiel pour maîtriser
le paysage des solutions et des acteurs, mais aussi pour mener une bonne prospective
stratégique. Cette connaissance du marché doit aussi permettre d’ouvrir le champ des
possibles en termes d’open source, et de valorisation des acteurs français.

Aspects techniques

Plusieurs enjeux se posent concernant l’impact de l’IA sur les aspects techniques :
• L’arrivée en masse du temps réel oblige à avoir des architectures adaptées, telle
que l’architecture événementielle par exemple. De même, l’apprentissage fait par
machine learning dans les métiers doit pouvoir être récupéré et exploité par des
plateformes techniques opérées par l’IT.

2 Cf. Rapport Cigref « L’open source, une alternative aux grands fournisseurs » (à paraître en
décembre 2018)

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• Les travaux sur la sémantique (la reconnaissance du langage naturel) et le machine


learning posent des défis de taille. Il faut par exemple anticiper le passage de l’aide
à la décision à l’autonomie de la décision, même si pour l’instant il y a peu
d’algorithmes qui prennent des décisions sans supervision. Il existe néanmoins quelques
cas simples, où la décision à prendre est sans impact, et où la totalité de la chaîne a
été automatisée. C’est le cas par exemple de la publicité « programmatique ».
• Si d’ici quelques années les clients sont assistés par des agents/assistants virtuels
personnalisés, il faudra que l’entreprise reste connectée avec eux, d’autant plus que
ces assistants seront pour beaucoup issus des géants américains. L’entreprise devra
donc dialoguer avec ces assistants et se démarquer de ses concurrents. Selon Christelle
Launois (Société Générale), il est urgent de penser l’interaction via ces assistants
personnalisés de manière empathique et se poser dès maintenant la question suivante :

comment modéliser l’empathie dans les SI afin de mieux connaître le client et lui
proposer des réponses plus pertinentes ? Cela pose de nombreuses questions sur
l’interaction homme-machine qu’il faut modéliser, mais aussi sur l’éthique : comment
doit se comporter l’agent ? Comment garantir sa neutralité et évaluer les critères de
ses réponses et recommandations données aux clients ? Comment gérer la question de
la responsabilité du conseil donné par une IA ?

Diversité des cas d’usage utilisant l’IA - chez Orange


Associée au Big Data, l'intelligence artificielle constitue aujourd'hui un puissant levier
pour le groupe Orange, permettant à la fois de repenser la relation client mais également
d'optimiser et d'automatiser la gestion de nos réseaux, d'améliorer l'expérience client et
d’accroitre l’efficacité opérationnelle.

Le caractère polyvalent des technologies d’IA nous a ainsi permis de développer et


d’appliquer avec succès des cas d’usage dans des domaines très variés : marketing,
interactions clients, détection de fraude, sécurité, gestion et supervision du réseau et
des plateformes…

Orange développe et assemble également des produits et des services à base d’IA autour
des technologies du traitement de langage naturel, du dialogue et des agents
conversationnels, de la reconnaissance de formes ou de l'analyses prédictive. Combinés
ensemble, ils permettent en particulier de répondre aux cas d’usage émergeant des
traitements des interactions clients ou d’indexation de textes et documents :
classification de mails, regroupement thématique de verbatims, détection d’intention
dans les dialogues, indexation de données audiovisuelles, etc.

À titre d’exemple, la transcription voix-texte (speech to text) et la compréhension du


langage ont récemment fait des progrès considérables, permettant ainsi de proposer des

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« agents conversationnels » à nos clients, pour exprimer plus facilement et plus


naturellement leurs difficultés ou leurs besoins.

De nombreux progrès restent cependant à faire car la bonne compréhension des demandes
clients ne suffit en général pas à rendre « intelligent » un chatbot : il faut également que
le chatbot soit capable de trouver, voire d’assembler, la bonne réponse et de compléter
au fil du temps sa capacité de réponse selon les différents cas rencontrés. Les « moteurs
de réponse » sont aujourd’hui le plus souvent limités à une sélection de réponses
préalablement préparées, par exemple en parcourant des arbres de dialogue faits à la
main ou en réutilisant des foires aux questions, ce qui peut suffire lorsque le périmètre
des réponses est structurellement limité (recherche de références dans un catalogue, par
exemple) mais qui montre rapidement ses limites pour des conversations plus
« ouvertes ». Il y a donc un véritable enjeu pour automatiser la construction de moteurs
de conversation (compréhension + réponse) ainsi qu’un fort besoin d’outillage pour
l’analyse et le diagnostic du fonctionnement des chatbots.

Jérôme Gueydan - VP Data Intelligence Enablers & Software Environments


Technology & Global Innovation - Orange

Ressources Humaines

La recherche de talents et la formation dans les domaines liés à l’IA deviennent des enjeux
urgents pour l’entreprise. Il faut anticiper les futurs besoins en compétences sur l’IA et
commencer à sensibiliser les collaborateurs, et surtout les rendre curieux, via des
hackathons par exemple. Ce point est développé plus spécifiquement dans les parties 2.2 et
3.3. de ce livrable.
La guerre des talents est une réalité dans ce domaine performant et évolutif et les grands
leaders américains l’ont compris depuis longtemps.

2. Gouvernance de la data intelligence


La data intelligence suppose une gouvernance adaptée. La data intelligence est un terme
qui englobe plusieurs dimensions : big data, analytics, machine learning, statistiques et plus
globalement tout ce qui relève de la data science. C’est dans cet environnement que
l’intelligence artificielle peut se développer et prendre toute sa valeur.

De nombreux travaux ont été menés sur la gouvernance et la valorisation des données dans
l’entreprise (notamment au sein du Cigref), mais lorsque les données entrent dans des
systèmes plus ou moins automatisés et apprenants, capables de déduction, de
recommandation, de diagnostic voire de prédiction, la gouvernance devra prendre en
compte l’évolution plus spécifique et multiscalaire de la data intelligence.

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2.1. Prérequis à la gouvernance de la data intelligence

L’essor de l’IA dans l’entreprise va de pair avec l’essor des data sciences et nécessite un
environnement solide autour de la donnée. La mise en place de data lake 3 ou datamart 4
est considéré comme un prérequis nécessaire à l’exploration des usages autour de l’IA. Mais
il n’est pas seulement question d’un désilotage technique, il s’agit également d’un
désilotage des métiers et des usages. L’outillage autour des données est également essentiel
pour permettre aux data scientists de développer des algorithmes, notamment en open
source. La facilité de mise à disposition des datas et leur intelligibilité sont des facteurs de
performance.

Les principaux prérequis à la gouvernance de la data intelligence définis par les participants
du Cercle IA sont :
• La gouvernance des données (cf. Rapport Cigref sur la « Valorisation des données »
2016. Notamment son point « 4. Quelle gouvernance pour valoriser les données ? »)
• La communication, la sensibilisation et la prise de conscience en interne : certains
participants ont évoqué la pratique du « gaming » dans leurs entreprises, c’est-à-dire
de jeux destinés à sensibiliser en interne les collaborateurs et les directions sur les
enjeux et l’utilité de l’IA
• Le bénéfice du support de la Direction Générale
• L’alignement sur la stratégie globale de l’entreprise
• Un partenariat métiers-DSI débouchant souvent sur des équipes projet mixtes
• Le repérage des talents en interne, la stimulation des équipes via des challenges IA
• Le développement d’un centre de compétences dédié à la data intelligence.
Concernant l’alignement stratégique de la gouvernance de l’IA, il est à noter que même si
le niveau de maturité varie en fonction des secteurs d’activité, la réflexion stratégique est
transverse à tous les domaines : l’IA sert une stratégie d’optimisation des processus grâce à
l’automatisation ou encore le développement d’analyses prédictives (maintenance, fraudes,
perte de clientèle), et de personnalisation des services.

3 « Un lac de données (en anglais data lake) est une méthode de stockage des données utilisée par le
big data (mégadonnées en français). Ces données sont gardées dans leurs formats originaux ou sont
très peu transformées. Le principe est d'avoir dans un lieu des données de natures différentes » (source
Wikipedia)
4 « Le datamart est un ensemble de données ciblées, organisées, regroupées et agrégées pour répondre
à un besoin spécifique à un métier ou un domaine donné. Il est donc destiné à être interrogé sur un
panel de données restreint à son domaine fonctionnel, selon des paramètres qui auront été définis à
l’avance lors de sa conception » (source Wikipedia)

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2.2. Identifier les compétences en interne

Anticiper dès à présent les enjeux de compétences


et de formation

L’un des enjeux majeurs de la data intelligence se situe au niveau de la constitution des
équipes futures, rejoignant les dynamiques d’agilité et permettant d’allier les bonnes
compétences le temps d’un projet. La DSI a également un rôle à jouer dans cette
organisation propre à la data intelligence : elle peut notamment prôner la création d’un
centre sur la Data Science rattaché à la DSI. Cela permettrait ainsi une posture transverse
et assurerait le rapprochement indispensable des métiers avec la DSI.

La Data Science - chez ENGIE


Chez ENGIE, tout commence en 2015 : « Analytics », « Intelligence Artificielle », « Data
science » ou encore « transformation digitale » sont sur toutes les lèvres. Le Groupe ne
pouvait pas passer à côté de ce qui devenait une tendance majeure. Mais comment un
groupe comme ENGIE peut-il se familiariser et apprivoiser le sujet de la data science ?
Comment développer des compétences dans le domaine ? Comment identifier des profils ?
Quelle stratégie choisir ?
Traditionnellement, trois choix sont possibles : le recrutement de nouveaux profils, le
recours à des compétences externes ou la formation de collaborateurs. Chez ENGIE, nous
avons choisi d’emprunter une quatrième voie : faire le pari que sur 150 000
collaborateurs, dont beaucoup d’ingénieurs, nous avions des data scientists de métier ou
passionnés disposés à mettre leur talent au profit de cas d’usage métiers d’ENGIE.
Dans l’environnement des data scientists, les challenges sont monnaie courante : l’idée
était d’organiser le même type de compétition en interne du Groupe. Nous avons ainsi
construit un dispositif de compétitions de data science internes, façon Kaggle (du nom de
la plateforme officielle de compétitions de data science), répondant à un double
objectif : 1) travailler concrètement sur des cas d’usage métiers de ENGIE et 2) identifier
et accompagner les futurs data scientists du Groupe.
Ainsi sont nés les « Data Science Challenges » : une plateforme interne de compétition en
ligne de data science qui fait se rencontrer des cas d’usage déposés par les métiers et des
data scientists du Groupe déterminés à les résoudre. Les challenges concernent
aujourd’hui des domaines très variés : la production d’énergies renouvelables, le
marketing & sales, l’efficacité énergétique, le trading ou encore l’informatique. En trois
ans, plusieurs dizaines de sujets ont été qualifiés et une dizaine de challenges de data
science ont été lancés sur la plateforme, le tout de manière internalisée et sécurisée.
Aujourd'hui, le succès de cette initiative se mesure selon plusieurs aspects : plus de 700
inscrits sur la plateforme, dont un cœur actif de 70 collaborateurs, plus de 20 BUs
concernées, et pas moins de 3 500 modèles de résolution déposés. L’engouement et

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Stratégies, gouvernances et challenges de la data intelligence

l’expertise croissante des équipes d’ENGIE sur la data science est un autre marqueur fort
du succès de cette initiative.
Et pour soutenir plus globalement la démarche, une « Tribu des data scientists » a été
créée en 2016 avec l’appui de la DSI et de la DRH du Groupe. Il s’agit d’une ressource
transverse au Groupe, agile et collaborative. Des data scientists issus d’entités diverses
y sont réunis pour démystifier et faire avancer la data science chez ENGIE, expérimenter
un nouveau mode de management collaboratif et promouvoir un esprit communautaire
malgré l’éloignement géographique, et partager les meilleures pratiques en matière de
data science.

Matthieu Pestel, CEO Global Business Support - ENGIE IT

Créer des impulsions et détecter les ressources en


interne

Afin de créer de l’appétence en interne, il est essentiel de générer des impulsions en


poussant l’utilisation du datalab pour l’IA (voire de Fab Lab) ou en montant des challenges
internes sur l’IA. Une communication interne à l’entreprise est souhaitable pour
accompagner (et dynamiser sans craintes) cette transformation.

Impliquer les collaborateurs et stimuler l’intérêt en interne


avec un « Challenge IA » - à l’ICDC (Informatique Caisse des Dépôts)
La Caisse des Dépôts a pour ligne directrice l’intensification de l’usage des données tous
azimuts afin de développer peu à peu une grande diversité de cas d’usage sur l’IA. La
problématique de départ était de trouver le moyen d’acculturer rapidement les
collaborateurs à la data et d’impliquer les développeurs aux enjeux et outils d’IA.
Un Challenge IA a été lancé en juin 2017, avec pour objectifs de :
• Pouvoir lancer en interne des applications rapidement, pour répondre au besoin
client
• Identifier les appétences IA en interne et monter en compétences rapidement sur
ces nouvelles technologies
• Utiliser la plateforme big data.
Une communauté IT s’est constituée pour le challenge. L’organisation de cet événement
était l’œuvre de la communauté data science. Cela a permis de fédérer des compétences
autour de ces « tribus ». 50 personnes se sont lancées (sur 700 collaborateurs à
ICDC) pour proposer des projets métiers.

Marc Gnanou, Directeur de l'Innovation - Informatique Caisse des Dépôts


Thao Sananikone, Chief Data Officer - Caisse des Dépôts

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2.3. Choix d’organisation de l’entreprise autour de l’IA

Différentes méthodes ou choix d’organisation peuvent être mis en œuvre pour faciliter
l’adoption de l’IA dans l’entreprise :
• La mise en place d’un programme numérique, ou même d’un programme numérique
IA spécifique, qui réfléchit à la gouvernance IA. Parfois ce programme numérique
rassemble plusieurs entités de l’entreprise (par exemple DSI et Direction du marketing
digital), parfois il est rattaché directement à la DSI qui rapporte au COMEX.
• L’organisation pourra s’enrichir d’une communauté d’experts et d’un comité business
pour comprendre les enjeux métiers. L’animation des métiers pourra passer par des
workshops et la mise en œuvre d’un POC par ligne business.
• Certaines entreprises préfèrent laisser foisonner les initiatives dans les métiers et les
filiales (allant de pair avec une culture d’indépendance, et une volonté de
décentralisation) tout en mettant en place des gouvernances globales pour effectuer
le suivi. On observe par exemple une demande des métiers de reprendre la main sur
certains domaines, touchant notamment à la relation client.
• D’autres entités pourront être créées : par exemple un data innovation lab en dehors
de la DSI (ou en partenariat), orienté sur la donnée et ses usages, permettant de créer
des outils pour les vendre aux entités, ou encore un pôle data analytics pour centraliser
les initiatives. Il faut dans tous les cas, une structure ou une instance pour répondre
au foisonnement de l’IA mais aussi à la communication entre les différentes entités
qui contribuent mutuellement à ce foisonnement.
• L’entreprise doit pouvoir créer des écosystèmes pour décider la valeur ajoutée à
« faire » ou à « faire faire » : la question du « make or buy » se pose alors. Certaines
entreprises ne souhaitent pas faire le choix d’un seul éditeur ; elles préfèrent prendre
les « best of breed », c’est-à-dire de se donner la possibilité d’intégrer des logiciels de
différents éditeurs afin de choisir les solutions les plus adaptées.
• L’entreprise ne pourra pas se passer d’une politique robuste autour de la sécurité et de
l’usage des données et de leur conformité (voir le livrable Cigref – Afai – TECH IN France
« Entreprises : les clés d’une application réussie du GDPR »). Les cyberattaques
reposant sur des systèmes de machine learning (via des logiciels d’intrusion par
exemple) détectant automatiquement les failles de sécurité, alertent tout
particulièrement sur l’évolution des techniques de hacking.

Certains challenges ou interrogations se posent néanmoins dans cette ré-organisation :


• Un challenge se pose au niveau de l’industrialisation des projets, afin de passer à
l’exploitation. En effet, de nombreuses expérimentations autour de l’IA restent au
stade de POC sans aboutir (cf. chap. 3.5).

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• Beaucoup de cas d’IA nécessitent de désiloter les données pour faire émerger les cas
d’usage, et d’avoir déjà une bonne gouvernance autour de la donnée.
• Certaines entreprises sont partagées sur les nouveaux modèles de partenariat autour
de l’IA, non pas sur les coûts financiers, mais sur les aspects plus qualitatifs de la
relation, des transferts de savoir et de données, et de l’apport de valeur mutuel.

Pour résumer, si l’entreprise s’est déjà donnée les moyens de constituer un socle big data,
qu’elle a élaboré en amont un programme sur les données qui arrive à maturité, qu’elle a
enclenché les processus de montée en compétences des équipes et d’ouverture vers
l’écosystème, sans oublier l’acculturation des équipes et du top management, alors la
gouvernance de la data intelligence semble être naturellement enclenchée. Elle nécessite
une évolution permanente en matière de pilotage, de répartition des rôles, de maîtrise des
risques et de coordination des métiers.

Exemple d’organisation pour fertiliser les projets en IA - chez Enedis


Enedis a posé les briques de la gouvernance de ses données : il a inventorié ses données,
mis en place des instances de gouvernance, défini les rôles et responsabilités, nommé des
propriétaires de données. Enedis s’est également doté d’équipes d’experts qui maitrisent
les outils et les algorithmes des approches « data driven », dont l’IA.
En termes d’urbanisme, Enedis a fait le choix de mutualiser les données à valeur (dans un
socle) et de décentraliser les usages (dans des laboratoires de données et des produits
industriels). Cette infrastructure permet, tant aux experts de la donnée qu’aux projets
SI, d’exploiter les données en s’appuyant sur un écosystème de technologies Hadoop et
Teradata. L’infrastructure héberge actuellement plus d’une vingtaine de laboratoires de
données. Le socle est constitué d’un data lake, de banques de données, d’outils et de
savoir-faire.
Sur cette plateforme, un projet est constitué d’une équipe mixte rassemblant les
expériences et assets de chaque entité (DSI, Programme numérique et métiers de
l’entreprise). Le projet bénéficie d’outils en place, d’expertises sur les sciences de la
donnée et d’un accès simple aux données. Dans sa phase de POC, le projet expérimente
directement dans un contexte industriel ; ainsi il n’y pas de rupture dure pour passer en
phase de déploiement. En comparaison à un projet mettant en place sa propre
plateforme, le délai de mise en place est réduit par un facteur deux et l’investissement
est diminué.
Franck Atgie, Responsable du Pôle Données chez ENEDIS

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2.4. Pilotage de la stratégie en IA dans les entreprises

La stratégie d’IA se retrouve logiquement dans les directions Stratégie, mais elle irrigue
davantage de Directions. Pour certaines entreprises, l’IA, auparavant portée au niveau de
la Direction Stratégie, est désormais au niveau de la DSI. Certains participants soulignent le
caractère capital du support de leur Direction Générale pour mettre en place une
gouvernance de l’IA. Si la Direction Générale est sensibilisée au fait qu’il faille transformer
le SI de l’entreprise, construire un data lake, outiller les équipes et les former afin de
développer l’IA, alors les moyens et les budgets suivront. On constate en effet que la
dynamique autour de l’IA est souvent très bien enclenchée lorsqu’il y a déjà eu en amont
des programmes d’acculturation au Big Data visant à susciter l’intérêt des métiers.

D’autres entreprises privilégient plutôt la piste d’un référent IA. Chez Renault par exemple,
un expert leader IA a été nommé : son rôle est d’orienter la recherche et l’innovation, d’être
en support des différents métiers de l’entreprise dans l’utilisation de l’IA, de les aider à se
doter des compétences nécessaires, et de construire avec eux des partenariats avec
l’extérieur. Pour ce faire, il s’appuie sur un réseau interne d’experts et de spécialistes.

D’autres organisations prennent le parti d’être pilotées par les métiers sur les projets IA.
Des prises de paroles sont organisées par les principaux porteurs de l’IA dans l’entreprise
(startups, métiers) pour que les collaborateurs des directions métiers s’approprient le sujet.

Dans d’autres cas, comme chez Orange par exemple, le focus est mis sur la création d’un
centre de compétences dédié à l’IA qui sera mutualisé avec celui déjà existant sur le big
data.

A l’heure actuelle, intégrer l’IA à la stratégie de l’entreprise nécessite de repenser les


stratégies métiers, mais aussi la cohérence globale de la gouvernance des données. La mise
à disposition d’une plateforme permettant de tester des applicatifs d’IA ou de concevoir des
algorithmes en interne dans l’entreprise fait partie des préconisations des entreprises
membres du Cercle IA.

2.5. Impact sur les métiers

La difficulté de l’animation de l’IA provient de sa transversalité et de son évolution forte à


l’intérieur d’entreprises où le digital est diversement organisé (présence ou non d’un Chief
Digital Officer, et définition de ses rôles ; présence ou non et positionnement d’un Chief
Data Officer ; proximité DSI-Métiers …).

L’impact de l’IA sur les métiers nécessite parfois de travailler sur une gouvernance propre.
Chez Air France KLM par exemple, un « chatbot board » métier a été créé pour assurer une
bonne coordination entre les métiers qui travaillent sur ce sujet (marketing, métiers du
servicing et de maintenance, métiers de l’aéroport qui sont en contact direct avec les clients

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Stratégies, gouvernances et challenges de la data intelligence

etc.). Ce board spécifique permet de suivre l’état d’avancement des différentes initiatives
tous les mois et de se coordonner pour être plus efficace.

Stratégie d'implémentation et de coordination de l’IA avec


le « Programme IA » d’Air France KLM
Un programme IA a été créé pour accélérer l’adoption de l’IA au sein d’Air France KLM.
L’ambition est de pouvoir proposer des services cognitifs aux clients et employés.
Le programme IA se structure autour de trois objectifs :
• Favoriser la prise de conscience autour des enjeux de l’IA grâce à des cas d’usage :
le programme IA est conduit par les aspects métiers et technologiques.
• Coordonner différents métiers autour d’initiatives similaires et aider à
l’accélération de l’intégration de l’IA dans nos métiers avec l’aide d’un écosystème
de partenaires et universités.
• Rendre l’IA « durable » : renforcer la capacité interne à produire et à accueillir
des services à base d’IA (mise en place de services et infrastructures, gouvernance,
compétences…).
Waïl Benfatma, Responsable du Programme IA
Isabel Gomez, IT Director, Operations Research
Air France KLM

En termes d’implication métiers dans la gouvernance, il semble essentiel de créer des points
de jonction entre le top management, le management intermédiaire et les métiers. Cela
peut se traduire par la création d’un comité spécial stratégique, orienté métier. Orange a
par exemple créé une entité au sein de la branche Corporate Innovation, dont l'une des
Directions a pour objectif de délivrer des briques techniques destinées à fournir des cas
d’usage métiers.

Structuration de la gouvernance de l’IA chez Orange


Pour structurer sa gouvernance autour de l’IA, Orange s’est fixé quatre axes :
• La forte implication du COMEX qui, au travers d’un comité dédié, oriente et pilote
la stratégie et la gouvernance globale du Groupe.
• La création d’un centre d’excellence sur le big data et les data sciences, avec un
recrutement récent d’experts en IA.
• Un accompagnement des Directions Métiers (BU) dans le traitement de données.
C’est un accompagnement du business par le business. Le co-développement d’une
cinquantaine de cas d’usage chaque année, de toutes tailles, avec les entités
métiers, permet de démontrer l’apport de valeur, de les convaincre d’investir sur
l’IA et de les inciter à devenir autonomes.
• La maîtrise de bout en bout des données, fortement tirée par l’entrée en vigueur du
GDPR, avec un espoir de contrôle automatique des flux.

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L’intelligence artificielle en entreprise intelligence

Stratégies, gouvernances et challenges de la data intelligence

2.6. Rôle et impulsion de la DSI : DSI fertiliseur et


catalyseur de l’IA ?

La DSI, un enabler de l’IA

Comme nous avons pu le voir dans les chapitres précédents, l’essor de l’IA dans l’entreprise
est une question de culture mais aussi d’organisation et de gouvernance. La DSI est un acteur
fondamental de la transformation liée à l’implémentation de l’IA. Elle mène un travail
crucial sur la convergence des infrastructures (data lake, technologies, données…) et sur
l’urbanisation et la qualité des datas, travail nécessaire à l’exploration et à la mise en œuvre
des solutions d’IA, et sur la sécurité de ces dispositifs.

La DSI assure déjà dans certaines entreprises le suivi et le pilotage des projets IA, grâce au
savoir-faire et aux compétences techniques qu’elle possède. Elle joue également un rôle de
partenaire et de coordinateur des différentes directions sur les sujets de l’IA (notamment
RH, marketing, digitale, finances …).

Rôle et atout de la DSI

L’IA est l’occasion pour la DSI d’être force de proposition sur de nombreux axes en utilisant
sa maîtrise et sa connaissance des datas :
• La DSI peut être un terrain d’expérimentation pour observer les impacts de l’IA sur les
métiers
• La DSI peut se positionner en support des métiers pour la relation client
• La DSI peut promouvoir les initiatives autour de deux axes : la visibilité (auprès du
COMEX notamment) et la convergence des infrastructures (data lake, technologies,
data…)
• L’atout de la DSI se caractérise par sa méthode, le suivi et le pilotage de projets,
notamment des projets « agiles ». La DSI peut ainsi valoriser ses compétences
techniques et méthodologiques (sélection et animation, appel à l’extérieur)
• L’objectif de la DSI doit être de donner de la cohérence, avoir des ROIs clairs sur ces
opérations pour optimiser l’enveloppe budgétaire des SI
• Il ne faut pas non plus négliger le fait que la DSI devient de plus en plus force de
proposition sur les sujets d’IA, en étant « offre de services » (cf. « Open Innovation » -
Rapport Cigref, 2017).
Pour résumer, le rôle de la DSI dans l’intégration de systèmes d’IA est avant tout de
rassembler les initiatives, les coordonner et d’en assurer la cohérence globale par rapport
à la stratégie de l’entreprise. La DSI revêt un rôle de catalyseur et de fertiliseur,
d’accélérateur et d’animateur d’une communauté.

Cigref © 2018 26
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Source : Cigref (2018)

Le schéma ci-dessus illustre les façons dont la DSI affirme sa capacité à :


• Être connectée à tous les acteurs de l’entreprise. Elle doit promouvoir les synergies, et
y donner de la cohérence à travers ses choix technologiques
• Sélectionner des partenaires crédibles et travailler avec son écosystème
• Continuer la transformation digitale au travers des APIs, des données, de la sécurité,
de la conformité (RGPD, éthique…)
• Anticiper et comprendre les transformations futures, tels que les systèmes multi-agents
(SMA) : les SMA vont permettre le passage de l’aide à la décision à la prise de décision
non-supervisée : comment anticiper cela, et comment garder néanmoins un certain
contrôle, un partage d’autorité entre IA et humain ?
• Anticiper les impacts sur les organisations, entre les entités business notamment
• Fédérer : la DSI sera un catalyseur de l’IA, en donnant des recommandations et conseils
pratiques sur l’IA. Pour cela il faudrait qu’elle s’appuie sur des équipes
pluridisciplinaires (Métier – SI – Stratégie) et sensibilise le management intermédiaire.

Il faudra également être en mesure de traiter tous les sujets RH et éthiques. Les
interrogations autour de la complémentarité, voire la substitution des métiers, et sur les
aspects « boîtes noires » du machine learning appellent à la plus grande vigilance :
• Il faut renforcer les relations avec les RH
• Faire un travail pédagogique autour de la compréhension de l’IA, et de sa sémantique :
quelle distinction entre l’automatisation et l’IA par exemple ?
• Monter une plateforme de monitoring pour évaluer les IA est une possibilité
• Pour éviter le phénomène de « boîte noire », la suppression aléatoire de variables
permet, dans certains cas, de mieux comprendre l’impact de celles-ci sur les résultats..
Cela joue par conséquent un rôle important dans « l’explicabilité » ou la «
soutenabilité » des boîtes noires

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• Ces boîtes noires ne doivent pas l’être pour au moins une équipe d’experts, dans la
structure, sous peine de ne pas être en mesure d’anticiper les impacts pour
l’entreprise.

Quelques risques liés à l’apprentissage et les moyens d’y répondre – chez Orange
Les questions « d’explicabilité », « d’auditabilité », de robustesse et d’équité autour des
algorithmes d’apprentissage sont aujourd’hui centrales. Au-delà des risques éthiques, on
pourrait définir trois risques opérationnels majeurs lié à l’apprentissage :
• Les biais - Si les modèles sont entraînés sans précaution sur des données du passé,
ils vont immanquablement reproduire les biais du passé, qu’ils soient évidents ou
non. Par exemple la représentativité hommes/femmes, l’inégalité salariale...
Prédire les profils métiers de demain à partir des données de la réalité des métiers
d’aujourd’hui requiert donc une expertise spécifique pour identifier et corriger ces
biais, au risque de perpétuer certaines injustices en matière d’équité.
• La dérive des données - L’environnement et les cibles d’apprentissage évoluent avec
le temps. Par exemple, les fraudeurs contournent en permanence les modèles
d’apprentissage de détection de fraude par la mise en pratique de comportements
totalement inédits. Il est donc nécessaire de créer des modèles robustes et résilients
à cette dérive, de les évaluer en permanence et de mettre à jour régulièrement les
modèles sur de nouvelles données.
• Le sur-apprentissage - Le risque est de trop coller aux données d’apprentissage
lorsque les modèles sont trop riches et de ne pas avoir des résultats pertinents. La
caractéristique principale du sur-apprentissage est d’assimiler le bruit (des données
parasites ou sans corrélation avec le problème) à des données pertinentes et
d’aboutir ainsi à des résultats incohérents (sans que cela ne se voit facilement).
Comment éviter les cas de sur-apprentissage :
• Il faut vérifier que ce que l’on fait à un sens, c’est-à-dire qu’on doit être capable
de l’expliquer
• Toujours réserver un bout de la base d’apprentissage comme base de test. Par
exemple, utiliser 70 % des données disponibles pour réaliser l’apprentissage et
réserver 30 % de données qu’on ne donne jamais à l’algorithme de modélisation.
Une fois l’apprentissage effectué (sur 70 % des données), vérifier la performance
du résultat sur la base de test (les 30 % restants). S’il y a une différence
significative de performance, il faut renouveler la modélisation.

Bruno Kauffmann – Artificial Intelligence Skill Center


Technology & Global Innovation - Orange

Cigref © 2018 28
Le SI augmenté
: Perspectives
d’évolution du
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3. Le SI augmenté : Perspectives
d’évolution du SI intégrant l’IA
3.1. Qu’est-ce que le « SI augmenté » ?

Le « SI augmenté » (terme proposé par le Cercle IA du Cigref) est un SI qui intègre des
fonctionnalités d’IA afin d‘améliorer les capacités et les performances du SI (sa supervision
et maintenance par exemple). Le SI augmenté apporte au SI classique les capacités de
prédiction, de description, de diagnostic/détection, de surveillance que permettent les
techniques de l’IA.

Ce SI augmenté intègre des applicatifs d’IA et interagit avec le legacy, que cela soit du côté
« SI utilisateur » ou « SI intra-DSI » :

Source : Cigref (2018)

Pour schématiser, un SI peut être représenté par des inputs, des outputs, et des traitements
entre les deux. L’augmentation du SI se ferait par une « boucle d’appel » à l’IA apportant
des algorithmes et éventuellement l’accès à de nouvelles données et connaissances
(opportunités des corrélations). Les données mêmes de l’application sont génératrices de
connaissance sur lesquelles les machines apprenantes font évoluer et progresser le SI.

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Le SI augmenté
: Perspectives
d’évolution du
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SI legacy et SI augmenté : quelle articulation ?

Ainsi, l’intégration de fonctionnalités d’IA dans le SI lui permet d’être moins redondant, et
de s’améliorer en pertinence grâce à une stratégie de small data, qui consiste à ne
transférer que les données utiles dans le SI augmenté. Il évolue dans un environnement
ouvert et plus interactif, notamment avec l’intégration du temps réel et les progrès de
compréhension du langage naturel. Cela exacerbe les sujets SI liés au data management,
à l’APIsation et à la plateformisation de l’entreprise.
L’approche du SI augmenté intra-DSI consiste à faire bénéficier le SI de toutes les techniques
d’IA pour améliorer les capacités et les performances du SI, et en particulier de la DSI dans
ses process (ITSM, SSI, pilotage des portefeuilles projet, …). Pour que le SI puisse bénéficier
de toutes ces techniques d’IA, il faudra :
• Avoir des architectures ouvertes et urbanisées
• Packager ces techniques pour les rendre accessibles partout dans le SI (même dans des
parties plus surprenantes comme la comptabilité)
• Construire des frameworks de connexion entre le legacy et les techniques d’IA.

L’articulation entre le SI legacy et le SI augmenté suppose de prendre en compte le modèle


historique du SI legacy qui s’est déjà étendu avec des applications qui se créent au fur et à
mesure en dehors. Il y a peut-être un modèle de croissance ultime du data lake qui
interrogera in fine la pérennité du SI legacy. Cela prendra du temps bien évidemment, mais
le mouvement est lancé car les entreprises souhaitent aller de plus en plus vers des

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Le SI augmenté
: Perspectives
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Stratégies, gouvernances et challenges de la data intelligence

applications et API ouvertes, et militent de plus en plus pour avoir des équipes
pluridisciplinaires plutôt que spécialisées. Cela témoigne aussi d’un basculement d’un
modèle « projet » à un modèle orienté « produit ».

3.2. Vers des architectures ouvertes et interactives pour


intégrer la data intelligence

L’impact de l’IA sur les architectures techniques pose plusieurs enjeux :


• Pour faire de la datascience, il faut déjà tout un environnement de data lake (voire de
datamart, c’est-à-dire de puits de données adhoc), ce qui pose la question du
désilotage des données. Mais il ne s’agit pas uniquement d’un désilotage purement
technique, il faut aussi réussir à désiloter les métiers, les usages, la gouvernance de la
donnée dans son ensemble (qui intègre la description de la donnée et sa qualité).
• Mais cet environnement de data lake n’est pas suffisant, il faut aussi tout l’outillage
nécessaire pour permettre aux data scientists de développer des algorithmes en open
source avec des espaces d’expérimentations dédiés : c’est la facilité d’usage par les
experts métiers qui fera avancer les choses en boucles itératives et réactives.

Impact de l’IA sur l’architecture du SI – Groupe LA POSTE


Les besoins fonctionnels
Nos usages et demandes fonctionnelles nécessitent de plus en plus un SI de Temps réel.
L’IA, dans sa dimension de décision, s’appuie sur des flux d’origines très diverses et de
plus en plus instantanés.
Par exemple, la détection de fraude nécessite souvent de travailler à la fois sur un
historique qui a été analysé de manière asynchrone, puis ensuite exposé en production,
pour agir de manière instantanée.

La transformation du SI
De facto, le temps réel doit rentrer dans le SI. Cette transformation est inéluctable.
Concrètement, en termes d’architecture SI, les filières de données chaudes et de données
froides sont amenées à se rapprocher, réunies par différents patterns, comme par
exemple celui dit d’« architecture réactive », utilisant massivement les événements, les
APIs et les micro-services.

Le croisement de SI
D’autre part, les structures « apprenantes » et celle de la « production » restent bien
distinctes en l’état de nos réflexions. Les processus de livraison des programmes
découverts en datascience et l’IA doivent être encadrés, notamment pour maîtriser
l’accountability demandée par le GDPR.
L’analyse, l’exploration et la création d’algorithmes d’IA étant séparées de la mise à
disposition de données et d’outils d’IA (cette séparation est mise en place pour des raisons

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juridiques entre autres), cela engendre une nécessaire cohabitation entre SI orienté IA et
SI Legacy.

L’IA peut être portée par plusieurs types de SI :


• Un SI classique et modernisé via des patterns facilitant l’accès de l’IA (accès
possiblement extérieur car l’IA ne sera pas qu’interne)
• Un SI moderne, s’appuyant sur un SI Legacy, via des structures d’exposition
(API/Bus/événement).

Quelle que soit la typologie des SI et le besoin de compartimentation, l’intermédiation et


l’exposition de service (interne et externe) sont fondamentales pour permettre le
déploiement de l’IA.

Jean-Luc Raffaëlli – Architecte d’Entreprise - Groupe La Poste

Les membres du Cercle IA ont formulé quelques recommandations permettant d’intégrer les
évolutions du SI avec l’IA :
• L’articulation des technologies d’IA entre elles nécessite de passer par des APIs : il faut
donc ouvrir le SI et le rendre accessible sous forme d’APIs. De la même façon, l’open
source devient incontournable et permet de travailler avec des technologies en
évolution rapide, qu’il faut changer fréquemment.
• Faire appel à l’open innovation : certains modèles d’open innovation reposent sur
l’utilisation de l’open source. Si les entreprises commencent à utiliser des APIs pour
ouvrir leurs services, cela n’est pas encore un mouvement général, car il faut mobiliser
de nombreuses ressources (data scientists, technologies…). Il est urgent de créer dès
maintenant une dynamique en contribuant par exemple davantage aux écosystèmes en
open source. Une conviction forte et partagée au sein des membres du Cercle IA est
que pour capter les expertises, il faut ouvrir davantage, contribuer plus à l’écosystème,
voire mettre des segments des SI en open source pour attirer les communautés externes
à développer à l’intérieur de ces modèles.
• Encapsuler les technologies externes pour en faire bénéficier les acteurs du SI.
• Ne pas sous-estimer les tests.
• Poursuivre le développement de la culture agile (importance de la formation et des
méthodes).
• Se préoccuper en continu des questions de conformité et d’éthique sur les données
(RGPD, Rapport de la CNIL sur les algorithmes)

L’open innovation à Pôle emploi


Nos démarches d’innovation collaboratives internes ou externes accélèrent le rythme de
conception et de production des services de Pôle emploi contribuant ainsi à une meilleure
adéquation aux besoins de l’écosystème. En favorisant les synergies et en renforçant
notre coopération avec l’ensemble des acteurs (méthode LAB – design thinking, FAB,

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écosystème startup), Pôle emploi démultiplie ses capacités créatives et propose des
services plus simples, intuitifs et centrés sur les usages.
L’innovation ouverte impose sur notre SI :
• Une ouverture des données : Pôle emploi a fait de l’ouverture de ses données un axe
stratégique prioritaire. L’accès simplifié à l’information, sur le marché du travail en
particulier, est en effet un facteur crucial pour faciliter la mobilité et l’évolution
professionnelle de chacun. Les données partagées incluent aussi à la fois les
informations diffusées par les demandeurs d’emploi (comme les CV) et les offres
d’emploi transmises à l’établissement. Pôle emploi rend ces données accessibles sur
son site institutionnel (www.pole-emploi.org) et via la plateforme numérique Emploi
Store Développeurs ;
• Une ouverture de notre plateforme d’IA : en complément de l’ouverture de données,
un projet d’ouverture des outils de fabrication d’IA est en cours (DATALAB) et
permettra d’accélérer la co-innovation avec l’écosystème des startups et le monde
académique.

Hervé Fonteneau, Manager SI Risque & Prévention des fraudes – DSI Pôle emploi

3.3. Outils et compétences IA : externalisation ou


internalisation ?

Le critère de choix d’outils d’IA doit être centré sur sa capacité d’intégration dans les
systèmes de l’entreprise : les outils doivent être intégrables sur toutes les chaînes de
production. Il faut avoir la capacité à calquer une brique technique sur toute la chaîne
opérationnelle.

Mais la question se pose de savoir jusqu’où investir dans la maîtrise technique des outils d’IA
versus l’achat d’outils « pré-packagés » par des éditeurs.

L’externalisation des compétences techniques comprend des risques notamment sur la


maîtrise de la sécurité, des savoir-faire mais aussi sur l’évaluation éthique. Intégrer une
brique fournie et maintenue par un tiers dans la chaîne opérationnelle pose le souci de voir
partir le savoir-faire métier, car en effet, même si les données appartiennent à l’entreprise,
les algorithmes et les modèles appartiennent en général aux fournisseurs. Ils peuvent donc
acquérir et consolider le savoir-faire métier de plusieurs entreprises clients pour le vendre
ensuite à des entreprises concurrentes ou l’exploiter eux-mêmes. Le vrai problème est dans
l’apprentissage : c’est dans ce que l’IA va progressivement apprendre que se (re)trouve le
savoir-faire métier. La dimension éthique pour les entreprises réside aussi en partie dans
leur capacité à s'approprier le développement de solutions et à traiter le plus en amont
possible les questions de traçabilité et d'explicabilité des algorithmes. La question

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d’acceptabilité des modèles est cruciale aujourd’hui. S’il est indispensable de faire appel à
l’expertise extérieure (dynamique évolutive, sujets très pointus, …), le contrôle est
indispensable et nécessite des expertises fortes (y compris juridiques).

Internaliser les outils d’IA demande en revanche des compétences, car il est rare de trouver
un outil open source sur étagère qui réponde complètement aux besoins de l’entreprise.
C’est en général une bonne base mais qui doit être adaptée à chaque contexte. Il faut faire
beaucoup d’assemblage et souvent un peu de développement, donc il faut avoir les
compétences en propre.

L’avantage de l’utilisation de briques développées en interne et de l’assemblage de briques


open source est la facilité de propagation de ces outils en interne, car il n’y a notamment
pas de contraintes de paiement de licences, ni de risque de fuite du savoir-faire métier.

Sur le fond, c’est exactement comme une solution d’éditeur (qui n’est pas plus adaptée au
contexte d’entreprise), sauf que, dans le cas de solutions d’éditeur, c’est en général ce
dernier, ou un intégrateur, qui fait le travail d’adaptation et donc c’est lui qui doit disposer
des compétences nécessaires.

De l’« IA métier » à l’« IA métier entraînée » - Orange

L’un des axes de développement d’Orange en matière d’IA porte sur la constitution de
moteurs génériques et l’automatisation au maximum des briques développées afin de
pouvoir fournir aux métiers des IA déjà pré-entraînées et adaptées à leurs contextes.
Les métiers enrichissent ensuite ces briques d’IA pour obtenir des moteurs « entrainés »
et « réglés » qui intègrent du coup un savoir-faire et des connaissances métiers. De ce
fait, la maîtrise de cette chaîne représente un enjeu important. Le choix de solutions
internes et externes doit prendre en compte cet aspect et être examiné en fonction de
la criticité des savoir-faire et connaissances embarqués dans ces IAs.

Jérôme Gueydan, Nabil Benameur


Technology & Global Innovation - Orange

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3.4. Agents conversationnels & Natural langage


processing

Retour d’expérience et cas d’usage sur le traitement du langage naturel (Natural


Langage Processing ou NLP)

De nombreuses entreprises s’intéressent aux cas d’usages reposant sur les interfaces
conversationnelles ou le traitement automatique de langage naturel (Natural langage
processing ou NLP). Car force est de constater que nous entrons dans une ère où l’interface
numérique devient de plus en plus intuitive, au point de faire de la voix et du langage parlé
un nouveau canal d’engagement dans la relation client. Néanmoins, si les sources de valeurs
autour du NLP sont bien identifiées, il reste encore de nombreux challenges à relever.

Les sources de valeurs de l’interface


conversationnelle
Paul-Henri Chabrol, Digital Agency Manager chez Axa, lors de son témoignage au Cercle
IA, a exposé les différentes sources de valeurs des interfaces conversationnelles. Elles sont
de trois natures :
• La perception de marque : car elles permettent de parler aux clients avec une
interface simple, moderne, personnalisable, rapide.
• La productivité : les chatbots permettent d’automatiser les tâches récurrentes et
chronophages.
• L’expérience client : les progrès en langage naturel permettent de comprendre des
requêtes de plus en plus complexes. Un chatbot résout aujourd’hui parfaitement bien
un problème technique mais aura plus de difficultés à dialoguer directement avec une
personne.

Architecture : de quoi est fait un chatbot ?


Paul-Henri Chabrol définit les briques qui composent un bot à partir de trois dimensions :
• Les connectors : le canal sur lequel le chatbot sera disponible peut être une plateforme
de messagerie, une app, une enceinte connectée…
• La compréhension du langage naturel (speech to text …) capable de comprendre
l’intention et les différents paramètres d’une question. Il existe énormément de
solutions sur le marché ou en librairie open source. Selon les besoins et les
compétences, l’entreprise peut se tourner soit vers une logique de sourcing soit de
build.

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• La structuration du dialogue et intégration dans les APIs (partie métier) : il faut


intégrer les APIs dans les processus IT, passer du temps à construire les bonnes APIs et
boîtes de dialogue qui vont derrière.

Cas d’usage hybride entre système expert et Natural Langage Processing


HAGER GROUP
Hager Group, fournisseur de solutions et de services pour les installations électriques, a
mis en place un système semi-automatisé de devis commerciaux : les appels d’offres et
de demandes de devis sont très codifiés dans de nombreux pays, du fait des enjeux de
sécurité liés au domaine. Un cas d’usage hybride entre un système expert et une solution
de Natural Langage Processing supervisée permet d'automatiser l’identification du code
produit le plus probable. Cela donne de très bons résultats et permet l’optimisation du
travail des équipes devis, focalisées sur les projets à forte valeur. Pour l’instant, la base
d’apprentissage repose sur des jeux de données de quelques milliers de devis et de
demandes de devis, enrichis progressivement.
Sylvain Girard - Director - Center of Data Excellence - Hager Group

Les challenges
Les challenges propres aux techniques de Natural Langage Processing, se posent à différents
degrés selon Paul-Henri Chabrol :
• Design du produit : L’agent conversationnel est un nouveau canal d’engagement qui a
ses spécificités. Il faut donc penser son design, c’est-à-dire la manière dont il va
interagir avec une personne, avec des choix esthétiques, ergonomiques, éthiques que
les concepteurs devront traduire concrètement. L’identification de use case et
l’expérience utilisateur sont les principales difficultés à une conception optimale.
• Organisation agile : par définition, un projet de chatbot est un projet d’apprentissage,
très itératif, et ne peut se faire sans organisation agile. Le modèle en mode équipe
intégré, autonome, qui se focalise sur des uses cases et la valeur client, semble être un
bon modèle. Le ROI sur les chatbots aujourd’hui constitue encore un pari. Mais il faut
avoir des équipes qui y travaillent à long terme.
• Data privacy : si l’entreprise utilise les technologies NLP, qu’elle n’est pas on-premise,
et qu’elle repose sur des partenaires en mode Saas, la privacy devient un sujet critique.
Une gouvernance spécifique à la data privacy est nécessaire dans ce contexte.
• Maturité technologique : pour un système de NLP, comprendre deux intentions dans
une même phrase est un problème compliqué. Les plateformes NLP reconnaissent
toutes très bien les requêtes simples, mais pour des problèmes plus complexes (ce qui
est le cas de la majorité des requêtes clients), il y a un manque de maturité. Il s’agit
d’un apprentissage supervisé, et cela prend du temps, et suppose de savoir gérer les
attentes.
• L’industrialisation fiable des programmes et leur évolution agile.

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Cas d’usage de Natural Langage Processing à destination des fournisseurs dans le


cadre des achats responsables – SAINT-GOBAIN
Dans le cadre de notre politique d’achats responsables, Saint-Gobain s’est donné comme
objectif de détecter les fournisseurs qui ne seraient pas conformes à cette politique, ou
n’auraient pas des comportements responsables (environnement, droits sociaux, fair-play
financier…).
L’application TIGER (intégrant 300 000 fournisseurs actifs gérés dans une autre
application) interroge automatiquement le web sur plusieurs critères :
• Les noms des fournisseurs
• Le vocabulaire afférent (aux produits concernés notamment des matériaux comme
le bois, à l’environnement, etc.)
• L’analyse des textes recueillis par rapport aux problématiques visées (corruption,
droits sociaux, pollution…).
TIGER fournit une information interprétée et vérifiable, qu’on dépose à l’acheteur, ciblée
sur les marchés de sa compétence. Cela fonctionne bien avec un taux de pertinence assez
élevé. Le POC est passé à l’industrialisation.
Saint-Gobain a fait appel aux librairies Open Source. Il y a un nombre variable de langues
prises en compte car le NLP fonctionne sur les racines des mots, et cela marche pour de
très nombreuses langues y compris asiatiques.

Frédéric ANTERION, Directeur des Applications Groupe, SAINT-GOBAIN

3.5. L’industrialisation des programmes IA


Lorsque l’IA fait l’objet d’études, elle ne pose pas, ou peu, les questions d’automatisation
informatique, de temps de réponse, de sécurité ou de fiabilité de l’évolution.

Aujourd’hui, l’IA s’intègre de plus en plus au SI « live », aux interfaces utilisateurs ou aux
systèmes legacy. Une réflexion lourde est menée pour assurer un bon fonctionnement
continu, une facilité d’évolution performante et sûre. Là encore, les outils évoluent et les
questions d’ITSM (IT system management) et de DevOps permettent d’assurer une bonne
agilité. Un investissement important doit être fait dans ce domaine évolutif sous peine de
ne pas bénéficier des possibilités d’intégration au quotidien ou de prendre des risques en
matière de qualité client ou de sécurité de l’information.

Par ailleurs, l’urbanisation du SI (l’APIsation) est un facteur clé d‘intégration des


algorithmes d’IA dans les applications informatiques.

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Conclusion
L’intelligence artificielle en entreprise
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Conclusion
L’arrivée de l’intelligence artificielle et son intégration dans les systèmes de l’entreprise
reflète une maturité grandissante dans la plupart des grandes entreprises. Les usages autour
de l’IA s’intensifient et se diversifient.

De plus en plus d’entreprises s’organisent pour coordonner les initiatives et tirer les leçons
des cas d’usage métier qui voient le jour. La DSI a un rôle clé à jouer dans ce contexte :
tant du point de vue de la coordination et de la mise à disposition des données, de la
convergence des infrastructures, de la sensibilisation, de la culture agile, que de la sécurité
et de la conformité.

L’IA s’intègre dans une gouvernance plus spécialisée et complexe de la donnée : la data
intelligence. La réalité des cas d’usage témoigne de ce caractère hybride de l’IA dans
l’entreprise, laquelle côtoie et se nourrit d’autres domaines des data sciences (big data,
analytics, statistiques…).

La gouvernance de la data intelligence nécessite une évolution permanente en matière de


pilotage, de répartition des rôles, de maîtrise des risques, de recherches de compétences,
et de coordination des métiers. Elle nécessite également de mettre en place un « SI
augmenté », c’est-à-dire de penser une articulation moderne entre le SI legacy et un SI
moderne intégrant des fonctionnalités d’IA.

L’exploration de ces trois dimensions - stratégie, gouvernance, et impact de l’IA sur le SI -


permet d’établir un panorama actuel de l’IA dans l’entreprise au travers d’exemples et de
témoignages tangibles concernant l’impact de l’IA sur l’organisation, les métiers, et les SI.
En termes de recherches fondamentales, les avancées et les percées se succèdent,
aboutissant peu à peu à des applications opérationnelles. La veille, la vision et la prospective
stratégique sur ces sujets de recherches technologiques restent essentielles pour se préparer
aux disruptions majeures à venir.

Cigref © 2018 38
À PROPOS DU CIGREF
ACTEUR DE LA SOCIÉTÉ NUMÉRIQUE

Association des grandes entreprises et administrations publiques


françaises, le Cigref se donne pour mission de développer leur
capacité à intégrer et maitriser le numérique.

RÉSEAU DE GRANDES ENTREPRISES


Association loi 1901 créée en 1970, le Cigref n’exerce
aucune activité lucrative. En 2018, il regroupe près
de 150 grandes entreprises et organismes français
utilisateurs de systèmes numériques, dans tous les
secteurs d’activité.

ACTEUR DU NUMÉRIQUE
Par la qualité de sa réflexion et la représentativité de
ses membres, il est un élément fédérateur et acteur
important de la société numérique.

AU SERVICE DE SES MEMBRES


Sa gouvernance est assurée par 15 Administrateurs,
élus en Assemblée générale. Son activité est animée par
une équipe de 10 permanents.

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