Nouvelles Marie France Lemieux Est 2010 06 15 PDF
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Projet de voyage
Bourse du Collège des Présidents 2010-2011
Ordre des Architectes du Québec
Cette réflexion sur ce qu’est un milieu de vie (et plus précisément une garderie) adapté aux besoins des
poupons et des enfants d’âge préscolaire (0-5 ans), constitue le cœur de ce projet de voyage. Celui-ci
s’inscrit en fait dans le prolongement de mes travaux de recherche-création réalisés depuis la dernière
année, via mon projet de fin d’études à la maîtrise professionnelle en architecture (M.Arch.) à l’Université
Laval. Le voyage vise alors à poursuivre cette réflexion de façon concrète, afin de proposer des solutions
innovantes qui amélioreraient la qualité architecturale des garderies québécoises, et par extension,
d’autres lieux d’accueil de la petite enfance. Un dialogue constant entre les notions théoriques de
l’architecture pour enfants et la pratique professionnelle concrète guidera ces études. Il s’agit d’un côté de
comprendre les fondements d’une telle architecture par le biais de rencontres avec des professionnels
éminents dans le domaine, ou encore en effectuant des stages sous leur supervision. De l’autre côté, la
visite attentive et l’analyse expérientielle de divers milieux pour enfants permettra de faire le lien tangible
entre la théorie, la conception, et l’élément construit qui influence le développement du tout-petit.
L’objectif principal est d’acquérir les bases d’une expertise dans le domaine de l’architecture pour la petite
enfance dans le but de les diffuser et les développer au Québec. Pour espérer un certain renouveau dans
la place qu’on accorde aux enfants dans nos bâtiments, voire nos villes, il est essentiel d’aborder le sujet
d’un angle nouveau à l’aide de modèles internationaux : il s’agit de dépasser les modèles d’architecture
fonctionnelle et d’images préconçues pour l’enfant, pour concevoir un univers « où l’imaginaire peut se
réaliser » (De la Salle, 1982; p.36). Le cas de l’Europe est de ceux qui peuvent nous en apprendre le plus sur
la façon de considérer, dans l’élaboration d’un projet architectural et même à travers normes et
programmes gouvernementaux, ce que sont réellement et fondamentalement les enfants.
2. Mise en c ontexte
Au Québec, près de 60% des enfants québécois âgés de moins de cinq ans fréquentent les services de
garde éducatifs sur une base régulière, soit cinq fois par semaine à raison de huit à neuf heures par jour
De plus, selon l’étude Grandir en qualité 2003 du Gouvernement du Québec (2003a et 2003b), la qualité
éducative des milieux de garde est affectée négativement par l’environnement physique. Des quatre
aspects évalués, seule la « structuration des lieux » obtient un score général qualifié de faible à passable.
Ces études prouvent qu’un problème existe vraiment quant à l’architecture des garderies au Québec : le
potentiel d’innovation est grand.
Par conséquent, le voyage offre l’opportunité de se détacher du modèle standardisé des garderies
québécoises et de la vision des divers environnements pour enfants qui l’accompagne, en s’inspirant de
modèles internationaux (garderies, écoles, terrains de jeu, etc.), dans lesquels le « jeu », cœur de
l’apprentissage du jeune enfant, devient le moteur de l’architecture : dans cette optique, la Hollande,
l’Angleterre et la France sont les choix de destinations les plus pertinents (voir la section 5).
3.1 – Le jeu comme processus d’apprentissage actif & l’imaginaire comme réalité
L’enfant apprend en interagissant avec son environnement physique et humain.
Jusqu’à l’âge de six ans, l’enfant apprendrait uniquement à travers l’expérience,
en « faisant », et ce, via le jeu : « le jeu constitue pour lui le moyen par excellence
d’explorer le monde, de le comprendre, de l’imaginer, de le modifier et de le
maîtriser. À ce titre, le jeu doit être considéré comme l’outil principal par lequel
l’enfant s’exprime, apprend et se développe » (MFA, 2007; p.20).
Toutefois, dire que l’enfant existe par le jeu est une vision adulte des choses : «
l’enfant vit dans son imaginaire, car tout ça, pour lui, c’est très sérieux, ce n’est
pas ludique » (Wagner, in IEF, 1991; p.71). Le jeu est l’activité la plus sérieuse de
l’enfant, il vit selon sa propre logique et ses propres repères : ceux de son
imaginaire. Par conséquent, l’architecture pour petite enfance se doit de nourrir
le jeu en excitant l’imaginaire. La qualité symbolique de l’environnement permet
à l’enfant d’entrer dans un monde qui lui est spécifique : il s’agit d’un milieu qui
offre une foule d’opportunités de jeu, dans lequel chacun peut définir le mode
d’emploi des espaces, des équipements et d’autres détails architecturaux. La
notion de fonctions non prédéterminées induit des comportements de jeu
spontanés et non standardisés, satisfaisant ainsi les besoins de création,
d’appropriation et d’imagination. Figure 2 : Potentiels de jeu et
d’imaginaire du milieu (Hertzberger)
Figure 4 : Matériau, volume et structure au service d’une architecture multisensorielle (Beltzig, 2001; Canizares, 2007)
Figure 6 : Spécificité des lieux (vaste salle propice aux activités motrices; atmosphère douce et mobilier adapté pour les
jeux calmes) et flexibilité du milieu (lits escamotables). (Canizares, 2007; Beltzig, 2001; Lemieux)
Tous ces besoins sont uniques et variables dans le temps et selon l’individu, en fonction du rythme de
développement de chacun et de ses intérêts. C’est en réponses à ces besoins que l’architecture joue un
rôle important : il est possible de créer des espaces et ambiances, y compris des lieux sans détermination,
flexibles et appropriables, qui laissent le choix à l’enfant de satisfaire l’un ou l’autre de ses besoins,
comportements, expériences ou activités, indépendamment ou non d’un autre enfant.
Marie-Franc e Lemieux | Repenser l’architecture pour la petite enfance 4
Figure 7 : Repères d’intimité et de solitude, à l’écart du grand groupe (Dudek, Hertzberger, et NAVIR)
4. Le fil c onducteur
Le voyage est ainsi guidé par le désir de comprendre concrètement de quelle(s)
façon(s) le milieu physique contribue au développement global de l’enfant, dans
le but de faire valoir au sein de la société québécoise, l’importance d’une
architecture pour enfants adaptée. Pour ce faire, l’aspect expérientiel de
l’architecture est déterminant : c’est en constatant et démontrant l’expérience
que les tout-petits font d’un lieu qu’il est possible de prouver en quoi celui-ci est
stimulant et fondamentalement adapté à leurs besoins. Le voyage comprend
donc la visite attentive de divers lieux d’accueil de la petite enfance (garderies,
écoles primaires, terrains de jeu, centres d’activités, etc.) à travers quatre pays
européens innovateurs en matière d’architecture pour enfants. La visite
d’agences (bureau d’architectes, associations, consultants, etc.) me permettra
de plus d’établir une relation privilégiée avec des professionnels éminents du
domaine, à travers entretiens et peut-être même des stages, dans le but
d’arrimer « concepts théoriques » avec « pratique architecturale ». Figure 8 : Tree of Dreams
(Dudek, 2008; p.52)
5. Les d estinations
5.1 – Amsterdam • Hollande (Pays-Bas)
Les Pays-Bas (mais surtout la province de la Hollande) est le principal pays dont la qualité de l’architecture
pour enfants est des plus remarquables, dans laquelle ceux-ci ont un plaisir naturel à jouer, à travailler et/ou
à apprendre. Deux architectes importants ont grandement marqué cette pratique architecturale.
D’abord, Herman Hertzberger a en quelque sorte révolutionné l’architecture des écoles préscolaires et
primaires, en instaurant une architecture de lieux communs. Il a ainsi développé plusieurs concepts tels la
« classe articulée », la « open school », ou la « learning street ». L’arrêt en Hollande permettra d’approfondir
Aldo Van Eyck a également accordé une grande importance aux enfants dans la ville d’Amsterdam, avec
ses 700 terrains de jeu. L’architecte y concevait des objets abstraits et multifonctionnels, démontrant
l’importance de la qualité symbolique des milieux pour enfants. La majorité de ces terrains de jeu n’existent
plus aujourd’hui, toutefois, il est certainement pertinent d’aller visiter ceux qui sont demeurés dans leur état
original. Van Eyck a de plus conçu d’autres lieux pour enfants, tel l’orphelinat municipal d’Amsterdam et la
maison Hubertus (concept de logements/garderie pour familles monoparentales), lesquels font preuve
d’une grande sensibilité face aux besoins des tout-petits.
Mark Dudek est l’une des figures marquantes du domaine : architecte, auteur et chercheur, il se spécialise
en environnements pour enfants. Il a produit plusieurs publications sur la conception de garderies et
d’écoles, a donné de nombreuses conférences, agit à titre de consultant auprès d’autres architectes pour
des projets d’écoles préscolaires et primaires, puis dirige des groupes de consultations dans ces écoles afin
Figure 11 : Divers environnements pour enfants, et Dudek lors d’une séance de consultation (Mark Dudek Associates,
Alsop Architects, et John McAslan + Partners)
6. Le ra p port final
L’objectif de ce voyage d’études consiste non seulement à acquérir les bases d’une expertise dans le
domaine de l’architecture pour petite enfance, mais surtout, à faire valoir ces acquis au Québec dans
l’espoir d’une certaine « réforme architecturale » des milieux de garde et autres environnements pour
enfants. Pour le plus grand impact possible, l’interaction avec les divers niveaux d’intervenants est
nécessaire : il s’agit de faire la diffusion des résultats de mon voyage auprès du Ministère de la famille et des
aînés, des directions de garderies, des municipalités, puis des architectes et autres professionnels impliqués
dans la conception de lieux pour enfants.
Le cœur du rapport final prendra ainsi la forme d’une (ou plusieurs) vidéo exposant les images, faits et
conclusions importantes du voyage : expériences des enfants observées lors de la visite de différents lieux
(interaction de l’enfant avec son environnement), entretiens avec les professionnels éminents, séances de
consultation participatives dans les écoles pour la conception de projet, etc. Cette vidéo sera diffusée
librement via un site Internet regroupant toutes les informations à retenir du voyage, et pourra également
être présentée officiellement dans un contexte académique (ex : cours universitaires) et professionnel (ex :
dans le cadre de formations et/ou de séances d’informations auprès des architectes en pratique privé –
concepteurs de lieux pour enfants – et publique – qui ont une influence sur l’établissement des normes de
ces milieux). De plus, par sa disponibilité sur un site Web, professeurs, administrateurs, architectes et autres
professionnels pourront même prendre l’initiative de diffuser cette vidéo dans d’autres contextes, sans
l’obligation de ma présence. Enfin, il s’agit probablement de la méthode la plus efficace pour sensibiliser
une population la plus large possible à l’importance d’une architecture adaptée pour enfants, en
démontrant concrètement ce dont il est question.
Enfin, c’est en partageant les connaissances le plus largement possible qu’on peut espérer à des résultats
concrets et ainsi développer de nouvelles façons de faire, dans ce domaine architectural au rôle parfois
sous-estimé.
La durée totale du voyage pourrait être plus longue, advenant des occasions de stages (voir section 5).
L’échéancier et le budget seraient alors révisés, selon les opportunités offertes et les rémunérations.
TOTAL = 7350$
BIBLIOGRAPHIE