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Prenez-en de la graine !

La graine, organe végétal donnant naissance à Chez les Angiospermes, les ovules sont enclos
une nouvelle plante, est constituée de trois dans un ovaire qui les protège. Chez les
structures : Gymnospermes, au contraire, les ovules et les
graines qui en résultent sont à nu. Seuls les

l’embryon, ébauche de la nouvelle plante ; Angiospermes vont produire des fruits, qui sont
issus du développement de l’ovaire.

les tissus nourriciers, stockant des nutri-
ments pour le développement ultérieur de l’em-
bryon ;


les téguments, entourant et protégeant l’in-
térieur de la graine (l’embryon et les tissus nour-
riciers).

Gauche : vue schématique de l’anatomie d’une fleur de solanacée.


© Valentin Joly
Droite : structure schématique d’une pêche (fruit d’un angiosperme).
© LadyofHats (Wikimedia Commons)

En fournissant nourriture et habitat aux


La graine d’avocat contient en son sein un petit avocatier !
animaux, les plantes à graines sont d’une impor-
© LadyofHats (Wikimedia Commons)
tance cruciale pour la biodiversité sur notre
planète.
La fécondation d’un ovule végétal par un
grain de pollen produit une nouvelle graine,
initialement immature. Cette petite graine
fragile va se développer pour devenir une
graine mature, beaucoup plus résistante aux
contraintes imposées par son environnement.
Elle va aussi tout mettre en œuvre pour que
l’embryon qu’elle contient puisse grandir de
manière optimale au moment où elle germera. Le saviez-vous ?
Les plantes à graines se répartissent en deux Il existe une variabilité extraordinaire de
tailles et de formes de graines. Les deux
groupes : les Angiospermes, ou plantes à fleurs, championnes sont la graine de coco de
et les Gymnospermes, qui comprennent mer (Lodoicea maldivica) qui peut peser
jusqu’à 20 kg et la graine de l’orchidée
notamment les conifères et le ginkgo. Goodyera repens qui ne pèse que
quelques microgrammes !
Que caches-tu, petite graine ?
Chez les Angiospermes, la fécondation entraîne le On distingue trois types de graines d’Angios-
développement de l’embryon (le bébé-plante) et permes en fonction de la structure stockant les
de l’albumen. L’albumen est un tissu transitoire réserves. Si les réserves sont accumulées dans :
qui, lorsqu’il n’est pas digéré par les autres tissus,
accumule des réserves nutritives. 
l’albumen, la graine est dite albuminée (blé, riz,
maïs, café, tomate) ;
L’embryon développe un suspenseur, qui lui 
les cotylédons de l’embryon, elle est dite exal-
permet de s’ancrer dans la graine, et se divise en buminée (pois, haricot, soja, arabette, ...) ;
de nombreuses cellules. Il produit peu à peu les 
le nucelle, un tissu de la plante mère, il s’agit
ébauches des organes de la future plante adulte d’une graine à périsperme (poivre, amarante, ...).
(cotylédons, hypocotyle et radicule). Parallèle-
ment, l’albumen se développe et occupe de plus
en plus d’espace.

Schémas de graines matures stockant les réserves de manières différentes.


© Olivier Coen

Après la fécondation, les téguments se déve-


loppent, se rigidifient et protègent l’intérieur de la
graine des contraintes mécaniques extérieures, des
rayons UV ainsi que des bactéries ou des champi-
gnons. Ils constituent parfois un espace de transit
des nutriments vers l’embryon ou l’albumen.

Un ovule mature (A) d’Arabidopsis thaliana est fécondé et devient une graine.
Le saviez-vous ?
La graine est représentée aux stades globulaire (B), cœur (C) et cotylédons (D). * Dans la noix de coco, l’albumen est
© Olivier Coen constitué de deux parties : l’albumen
solide (la chair de coco) et l’albumen
liquide (l’eau de coco).

* On fabrique la farine blanche du


blé à partir de l’albumen qu’on a séparé
du germe (l’embryon) et du son (qui com-
prend les téguments ainsi qu'une partie du
fruit).
Maman, comment les plantes
font des bébés ?
Si certaines plantes se multiplient parfois en
produisant des clones d’elles-mêmes (marcottage,
bouturage, etc.), toutes ont en commun d’utiliser
la reproduction sexuée pour perpétuer efficace-
ment et disperser leur espèce.

La reproduction sexuée consiste en la féconda-


tion d’un gamète femelle par un gamète mâle.
Cette fécondation produit un nouvel individu  au
patrimoine génétique original, en tant que
A : Dessin schématique d’une fleur montrant les organes reproducteurs
combinaison des génomes de ses deux parents. femelle (l’ovaire) et mâle (l’étamine). © LadyofHats (Wikimedia Commons)
B : Tubes polliniques se frayant un chemin jusqu’aux ovules. © Huck et al., 2013.
Chez les plantes à graines, les gamètes femelles C : Tube pollinique (TP, en fausse couleur) parvenu à la porte d’entrée
sont contenus dans les ovules et les gamètes de l’ovule, le micropyle (M) ; microscopie électronique à balayage.
© Shih-Yun Lin et al., 2014.
mâles dans les grains de pollen.
Parvenu au micropyle d’un ovule, le tube polli-
nique explose et libère deux noyaux sperma-
tiques dans le sac embryonnaire. Un noyau entre
dans l'oosphère et forme l’embryon, qui
deviendra le bébé-plante. L’autre pénètre dans la
cellule centrale pour produire l’albumen, qui
constitue souvent la réserve de nutriments de la
graine. La production d’une graine résulte donc
d’une double fécondation chez les Angios-
Grains de pollen de diverses espèces végétales (dont tournesol et ricin)
observés en microscopie électronique à balayage (fausses couleurs). permes.
© Dartmouth Electron Microscope Facility (Wikimedia Commons)

Chez les Angiospermes, les organes reproduc-


teurs sont les étamines et le pistil. Les étamines
portent les anthères, sacs qui produisent puis
libèrent de nombreux grains de pollen. En préli-
minaire de la fécondation, des grains de pollen
doivent être déposés sur le stigmate, en haut d’un
pistil. Chaque grain de pollen développe alors un
tube pollinique qui se fraie un chemin à travers le
Le sac embryonnaire d’un ovule d’Arabidopsis thaliana est fécondé
style puis l’ovaire. par un tube pollinique. Adapté de Huck et al., 2013
Des graines qui dorment
et qui germent
Alors que la graine termine son développement et Lorsque la dormance est levée et que les condi-
arrive à maturité, elle contient de moins en moins tions sont bonnes, la graine germe. La radicule
d’eau et d’oxygène. Son métabolisme s’arrête perce d’abord les téguments pour chercher de
alors presque totalement  et la graine entre dans l’eau, puis émergent les cotylédons. Les réserves
un état dormant. Le développement de l’embryon nutritives de la graine sont peu à peu consommées.
est suspendu et ne reprendra que lorsque les Lorsque la plante produit enfin de vraies feuilles,
conditions extérieures seront jugées adéquates elle est autosuffisante énergétiquement grâce à la
par la graine. photosynthèse.

Les exigences en humidité, température ou lumi-


nosité pour la germination varient selon l’espèce.
Pour autant, de bonnes conditions extérieures ne
sont pas toujours suffisantes. Il est souvent néces-
saire de passer une première barrière physiolo-
gique : la dormance.

Phases successives de germination d’une graine de pois.


(www.grainesgermees.com)

En retardant le moment de la germination, la


dormance autorise les graines à voyager et à
«  choisir  » l’endroit où elles germeront, ce qui
permet la colonisation de nouveaux espaces.
Une fois la dormance levée, la graine germe lorsque les conditions
extérieures sont favorables (présence d’eau en particulier). © Olivier Coen

Les processus permettant de lever la dormance Le saviez-vous ?


sont variables : passage par l’obscurité ou par un * Les graines de certains palétuviers sont
dites vivipares : elles germent directement
lieu sec, transit dans le tube digestif d’un animal, sur l’arbre, puis tombent et se dispersent
etc. Souvent, dans les régions tempérées, la dans la mangrove.
dormance peut être levée après une période de * Le record de longévité d’une graine en
froid suffisamment longue, signe que l’hiver est dormance est détenu par le palmier dattier
(Phoenix dactylifera), dont les graines
terminé et que le printemps pointe le bout de son contiennent très peu d'eau : des chercheurs
nez ! ont réussi à faire germer une graine âgée
d'environ 2000 ans !
Des graines ? Miam !
Les graines contiennent les protéines, lipides, Les graines germées ont généralement de meil-
sucres, minéraux et autres nutriments nécessaires leures qualités nutritionnelles que les graines
au développement ultérieur de l’embryon. Elles sèches : elles contiennent davantage de molécules
tiennent une part importante dans notre alimenta- assimilables par notre organisme et moins de
tion car tous ces nutriments sont essentiels pour facteurs pouvant interférer avec l’absorption des
notre métabolisme. En France, nous consommons nutriments. L’inconvénient est qu’elles sont aussi
en moyenne près de 30g de céréales (blé, riz, maïs, propices au développement de bactéries patho-
orge, etc.) et de leurs produits dérivés (farine, pain, gènes.
pâtes, bière, etc.) par jour et par personne.

Graines de tournesol germées. © Wikimedia Commons

La germination est à la base de la fabrication de la


bière. Des graines (en général d’orge) sont mises à
Les graines, et principalement les céréales, tiennent une place prépondérante
dans notre alimentation. Données : FAO
tremper puis à germer plusieurs jours. Elles sont
ensuite chauffées à des températures allant de
Malgré leurs excellentes capacités nutritives, les 85°C (bière blonde) à 220°C (bière brune) puis
graines contiennent de nombreuses molécules débarrassées des radicules. Le malt obtenu est
complexes, faciles à stocker et à conserver, mais concassé, hydraté et chauffé afin de transformer
que notre corps a parfois des difficultés à digérer. l’amidon en sucres simples. Lors de la fermenta-
Durant la germination, beaucoup de ces composés tion, ces sucres serviront de substrat aux levures
complexes sont dissociés en des molécules plus pour produire de l’alcool.
simples. L’amidon est par exemple transformé en
sucres simples (glucose, maltose, etc.) grâce à des
enzymes particulières  : les amylases. Ces
ressources facilement utilisables sont essentielles
au développement rapide de l’embryon.

Malt d’orge en grain pour la bière. © Pierre-Alain Dorange (Wikimedia Commons)


Des gènes architectes
du développement
L’ADN est une molécule formée d’enchaînements
de nucléotides (bases A, T, C et G). Il contient des
séquences particulières, appelées gènes. Les gènes
constituent un plan de production des protéines,
lesquelles assurent le fonctionnement des cellules.

Deux fleurs d’Arabidopsis thaliana : à gauche une fleur « sauvage »


(non mutante) et à droite une fleur mutante agamous ! © Yumul et al., 2013

Les graines d’Arabidopsis sont brunes à cause des


tanins présents dans l’endothélium, couche
interne des téguments. Dans les graines des
Les gènes servent à produire des protéines. mutants du gène TT16, les cellules de l’endothé-
© Thomas Splettstoesser (Wikimedia Commons)
lium semblent avoir changé d’identité cellulaire  :
Certains gènes, appelés gènes homéotiques, sont elles n’ont plus leur forme normale et ne produisent
de vrais architectes du développement de la plante : plus de tanins. Les graines apparaissent jaunes.
ils déterminent l’identité cellulaire, c’est-à-dire si TT16 semble être un gène homéotique impliqué
une cellule sera plutôt une cellule de pétale ou de dans l’identité cellulaire des cellules de l’endothé-
feuille. Pour étudier la fonction d’un tel gène, on lium.
modifie en général sa séquence et on observe les
effets de cette mutation sur la morphologie de la
plante.

Certains mutants de gènes homéotiques


présentent des changements spectaculaires d’or- A : L’endothélium des graines mutantes tt16 ne produit plus de tanins.
B : L’endothélium est la couche interne des téguments. © Olivier Coen
ganisation des tissus. Par exemple, chez l’espèce
Arabidopsis thaliana, des mutants du gène floral Les tanins sont importants car ils protègent les
AGAMOUS produisent des pétales et des sépales à graines et interviennent dans la digestibilité des
la place des organes reproducteurs. L’étude des aliments. Nous cherchons donc à savoir quels sont
gènes homéotiques donne des informations les facteurs qui dictent l’identité des cellules
cruciales sur le développement des différents produisant des tanins dans les graines.
organes de la plante.
Étudions le gène
Le gène d’Arabidopsis thaliana TRANSPARENT TESTA Par ailleurs, le développement de la couche ii1’
16, ou TT16, a été nommé en référence à l'aspect de apparaît complètement décalé depuis la chalaze
ses mutants, lesquels présentent une enveloppe vers le micropyle dans les mutants tt16.
(ou testa) transparente au lieu d’être marron. Un autre phénotype visible dans les graines des
L’équipe « Développement des graines » de l’INRA mutants tt16 est la disparition, après la féconda-
de Versailles cherche à savoir dans quelle mesure tion, de la cuticule qui sépare normalement les
TT16 orchestre le développement des téguments téguments internes de l’albumen. Les cuticules
internes de la graine. sont des couches de lipides qui recouvrent et
isolent l’épiderme de nombreuses plantes. Elles
Pour comprendre sa fonction, nous étudions les permettent parfois de séparer des tissus distincts
phénotypes (ensemble des caractères obser- au sein d’une plante.
vables) des mutants du gène. Les mutants que
nous utilisons sont dits knock-out  : les mutations
bloquent la production des protéines en aval, ce
qui rend le gène non fonctionnel. Comparer la
morphologie de graines ayant ou n’ayant pas de
gène TT16 fonctionnel permettra de conclure sur
son rôle.

Coupes longitudinales de graines montrant la morphologie des cellules


ainsi que les couches de cuticule (colorées ici en vert)
dans les graines sauvages et mutantes tt16. © Olivier Coen

Outre ces phénotypes liés aux téguments, nous


avons déjà montré que le gène TT16 était impliqué
dans la dégénérescence (mort cellulaire) du
nucelle après la fécondation de l’ovule. Nous
pensons que TT16 serait impliqué dans le dévelop-
Coupes longitudinales de graines montrant les parois des cellules de graines pement et le changement d’identité cellulaire des
sauvages et mutantes. © Olivier Coen
tissus entourant le sac embryonnaire, après que ce
Dans les graines mutantes tt16, les cellules de l’en- dernier a été fécondé. Nos recherches nous ont
dothélium et de sa couche adjacente, la couche amenés à aussi étudier certaines protéines
ii1’, sont moins gonflées et plus allongées que les dites « Polycomb », qui contrôlent de façon essen-
cellules des graines sauvages (non mutantes). tielle le passage crucial de l’état d’ovule à celui de
graine.
L’Institut Jean-Pierre Bourgin
 Quelques exemples parmi d’autres :
L'anneau de préprophase,
structure spécifique au règne
végétal, joue un rôle essentiel

© Inra, Catherine Rameau


lors de la division cellulaire
dans la stabilisation du plan
de division. Ce plan est impli-
qué dans l’organisation spa-
tiale des tissus de plantes.
© Inra, Martine Pastuglia
et David Bouchez

Une nouvelle hor-

© Inra, Olivier Loudet


mone végétale con-
trôle la ramification
chez les plantes :
la strigolactone.

Centre INRA de Versailles Grignon. © Inra, Jean Weber Un mécanisme simple d’incompatibilité entre individus pourrait expliquer l’ap-
parition naturelle de nouvelles espèces : démonstration chez la plante modèle
Arabidopsis thaliana.
Créé en 2001 sur le site INRA de Versailles, l’Institut
Jean-Pierre Bourgin (IJPB) regroupe plus de 350 Des découver tes majeures sont au crédit
personnes soit 29 équipes scientifiques et constitue d’équipes de l’IJPB.
un pôle de recherche de dimension européenne dans
Le Laboratoire d'Excellence Sciences des Plantes de
le domaine de la biologie végétale. L’IJPB couvre un
Saclay regroupe une cinquantaine d'équipes de
champ d'activité qui s'étend de travaux fondamen-
recherche spécialisées dans les sciences du végétal
taux sur le développement, la génétique et la physio- appartenant à 4 instituts de la région parisienne et
logie des plantes jusqu'à la recherche finalisée pour représente près de 700 personnes.
l’utilisation alimentaire et non-alimentaire des
produits végétaux, dans le cadre d’une agriculture
L’IJPB s’attache à faire découvrir au public le
durable.
monde de la recherche et à former de futurs
Ses recherches, fortement interdisciplinaires, scientifiques.
s’articulent autour de 5 pôles thématiques : Accueils à l’IJPB :

classes et groupes d’étudiants dans les laboratoires
 Structures cellulaires, signalisation et morphogénèse 
élèves de 3ème en stages de découverte
 Adaptation des plantes à l’environnement 
projets de classes de 3ème et de 2nde
 Dynamique et expression des génomes 
travaux d’élèves, ex : TPE de 1ère, TIPE de classes
 Reproduction et graines préparatoires.
 Paroi végétale : fonction et usage.
Environ 80 post-doctorants, doctorants et masters,
représentant une dizaine de nationalités, sont actuelle-
L’IJPB est membre fondateur du Laboratoire ment en formation ou participent aux avancées des
d’Excellence Sciences des Plantes de Saclay. recherches à l’IJPB.
L'INRA de Versailles est doté d'équipements très perfec-
tionnés permettant une étude très fine de la morpho-
logie ainsi que de la physiologie des tissus végétaux.

http://www-ijpb.versailles.inra.fr/

Des éléves de 3ème observent des échantillons végétaux à la loupe binoculaire


dans une serre de l'IJPB. © Inra, Corine Enard

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