Turbulence
Turbulence
Turbulence
La turbulence est un phénomène présent de manière très facilement visible dans la nature :
● dans l'air : les rafales de vent, les mini tornades dans le désert, le panache de fumée des
grandes cheminées, turbulence atmosphérique (tourbillons de taille > 1000 km)...
● dans l'eau : les remous dans les rivières...
Il est également très présent dans les écoulements industriels :
● Dimensionnement de réseau : Lors du dimensionnement et de l'optimisation des réseaux de
distribution fluides (gaz, eau, pétrole...) la perte de charge des conduites doit être prise en
compte. Une modélisation sans prise en compte de la turbulence peut conduire à une forte
sous-estimation du frottement (voir l'abaque de Moody) et donc à une large sous-évaluation
de la puissance des pompes.
Une prise en compte relativement globale par simples corrélations pourra dans ce cas suffire.
● Echangeurs : Les échangeurs de chaleur des moteurs, des unités de production ont recours à
des fluides divers et de viscosité très différente (hydrogène, azote, air, sodium...), dans des
volumes plus ou moins confinés. Selon le cas, les écoulements peuvent être fortement
turbulents. Il est indispensable de prendre en compte cette caractéristique pour le calcul des
échanges thermiques (la turbulence les augmente en général, voir les corrélations de Nusselt
en convection forcée).
● aérodynamique externe des voitures et des camions
● sillage des avions
● aérodynamique interne dans les moteurs (combustion, etc.)
Les effets de la turbulence sont parfois positifs, parfois négatifs :
● effets positifs : l'augmentation du mélange permet d'améliorer la combustion par exemple,
d'améliorer la portance des avions, de réduire la température.
● effets négatifs : diffusion de la pollution.
Il suffit d’examiner n’importe quel illustration d’un turbulent, par exemple le jet de la figure
ci-dessous, pour constater l’omniprésence de tourbillons de différentes grosseurs dans le
fluide. Un écoulement turbulent est nécessairement rotationnel. Le rôle des tourbillons est
capital en turbulence.
1
La prise en compte de la turbulence est indispensable dans bon nombre d'applications
industrielles, même si elles ne nécessitent pas toutes le même niveau de précision pour la
modélisation sous-jacente.
I. Concepts généraux
I.1 Propriétés de la turbulence
Dans un écoulement turbulent, l’état d’un fluide en tout point x et à tout instant t, la vitesse
u(x, t) présente un caractère tourbillonnaire où la taille, la localisation et l’orientation des
tourbillons changent constamment. C’est pourquoi un régime turbulent est intrinsèquement un
phénomène aléatoire. Ces structures tourbillonnaires de tailles caractéristiques fort différentes,
imbriqués les uns dans les autres, et interagissant entre eux. Dans un écoulement turbulent, la
taille des tourbillons recouvre un large spectre d’échelles spatiales. Elle peut varier d’un
dixième de millimètre à plusieurs kilomètres en turbulence atmosphérique, et de quelques
micromètres à quelques dizaines de centimètres dans un écoulement autour d’une voiture ou
d’un avion.
Les écoulements turbulents se naissent lorsque la force motrice (ou la source d’énergie
cinétique) qui met le fluide en mouvement est relativement intense devant les forces de
viscosité que le fluide oppose pour se déplacer. La force motrice peut prendre plusieurs
formes :
● gradients de pression
2
● impulsion initiale pour les jets
● une force d’Archimède (de flottabilité) due à une différence de température dans le champ
de pesanteur.
La turbulence, dans un écoulement, revêt donc un caractère essentiellement aléatoire toujours
tridimensionnel. Elle se développe aux nombres de Reynolds relativement élevés et est une
propriété de l’écoulement et non pas du fluide comme l’est la viscosité par exemple.
L’écoulement moyen peut être bidimensionnel, voire monodimensionnel, mais il apparaît des
fluctuations de vitesse selon les trois directions.
Un écoulement turbulent est fortement instationnaire. Pour ce type d’écoulement le régime
permanent n’existe pas. On ne peut constater, dans certains cas, qu’un régime permanent en
moyenne, encore appelé : pseudo-permanent dans lequel les trajectoires s’enchevêtrent. En
effet, l’observation d’un tel écoulement montre que si, dans l’ensemble ou en moyenne, les
particules fluides s’écoulent bien dans une direction donnée, en tout point, quel que soit le
temps "macroscopique", la vitesse observée à cette échelle n’est en fait qu’une vitesse
moyenne. L’observation à une échelle de temps plus réduite fait apparaître un mouvement
désordonné des particules de fluide. A partir de ce constat, pour les écoulements pseudo-
permanents, Reynolds (1883) a proposé de décomposer la vitesse de chacune de ces particules
en une vitesse moyenne U et une vitesse aléatoire u (voir figure ci-dessous) dont la
moyenne faite sur un temps suffisamment long est nulle. On a :
U U u
Il est impossible de dupliquer la vitesse d’une réalisation de l’écoulement à une autre. Ainsi,
un même écoulement turbulent réaliser deux fois en laboratoire, avec le même montage
expérimental et dans des conditions identiques ne donnera pas lieu exactement aux mêmes
mesures, au même endroit et au même instant après le début de l’expérience.
3
I.2 Transition du laminaire au turbulent
Reynolds a mise en évidence simplement la turbulence en réalisant l’expérience reportée sur
la figure ci dessous : il s’agit d’injecter dans un écoulement dans un tube cylindrique un filet
d’encre colorée. Pour de faibles débits, on constate que le filet d’encre coloré reste stable au
centre du tube et ne se mélange pas à l’eau environnante. L’écoulement se fait donc de façon
parfaitement définie, avec des filets de fluide qui glissent les uns sur les autres sans se
mélanger. On dit que l’écoulement est laminaire.
Lorsque le débit augmente, on constate que le filet coloré se met à osciller et s’élargit. Le
régime est dit alors intermédiaire.
Enfin, pour des débits encore plus élevés, après une longueur assez faible, le filet coloré se
transforme en tourbillons de plus en plus gros et finit par se mélanger complètement avec
l’eau claire. On dit que le régime est turbulent. Dans ce type les trajectoires sont erratiques, ce
qui conduit à une dispersion rapide de l’encre et la formation de structures sous forme de
volutes, appelées tourbillons.
4
Reynolds a d'abord pensé qu'il devait exister une vitesse critique au-delà de laquelle le régime
devenait turbulent. En fait il a réalisé que la grandeur qui caractérise l'écoulement est un
nombre sans dimension, qu'on appelle le nombre de Reynolds :
DU
Re
fi x ,t
N
1
f x , t lim (1)
N N i 1
5
Cette moyenne est aussi appelée moyenne de Reynolds. La fluctuation f' pour une
réalisation particulière est l’écart à cette moyenne.
Lors d’une expérience, on s’assure que la valeur moyenne est calculé sur un ensemble assez
grand pour que la moyenne ne dépend pas de N (ex : on compare les moyennes obtenues
avec N 10 000 et N 20 000 réalisations).
Assez souvent, on peut réaliser l'hypothèse que l'opérateur de moyenne statistique est
équivalent à un opérateur de moyenne temporelle : c'est l'hypothèse d'ergodicité. Il est
nécessaire que l'intervalle d'intégration soit supérieur à l'échelle de temps caractéristique en
dessous de laquelle les phénomènes sont corrélés (durée de vie des tourbillons). De plus,
l'intervalle d'intégration ne peut être pris arbitrairement grand si l'écoulement n'est pas
stationnaire (il faut éviter d'inclure dans les opérations de moyennes des variations liées à des
changements de régime macroscopiques).
f x lim
1
T T 0 f x ,t dt
T
De même, lorsque l'écoulement est homogène (ou a une direction d'homogénéité) il est
possible de remplacer la moyenne statistique par une moyenne spatiale. Le volume
d'intégration doit être supérieur à celui des structures cohérentes
f t lim
1
f x , t d
Il n'est pas, en général, nécessaire de spécifier précisément quelle moyenne est utilisée
puisque la résolution de l’équation de Navier Stokes moyennée produit directement des
variables "moyennes" qui, dans un nombre de cas assez important, peuvent satisfaire
l'ingénieur. Néanmoins, il convient d'être conscient qu'il s'agit de valeurs moyennes
statistiques et qu'elles ne peuvent donc généralement pas rendre compte des extrema très
locaux ou très transitoires, quels que soient le raffinement du maillage et la modélisation
employée. Pour obtenir de telles informations, il est nécessaire d'abandonner l'approche par
"moyenne" (ou Reynolds Averaged). On se tourne alors, selon le domaine d'application et les
besoins et les ressources, vers des simulations numériques directes (Direct Numerical
Simulation) ou vers la simulation des grandes échelles (Large Eddy Simulation).
Cet opérateur de moyenne vérifie les propriétés suivantes :
f g f g
f f est une constante
f f
f g f g
f f
xi xi
f f
t t
6
Remarque
De part la définition de l'opérateur de moyenne on a : f ' 0 .
La moyenne d’ensemble d’un produit peut se décomposer en deux termes :
f . g f .g f '. g'
● Navier-Stokes
forces appliquées
forces
d 'inertie
U i U i 1 P 2U i
U j (3)
t x x x x
instationn aire j i j j
convectif pression visqueux
U U j ij 2U i
ij i et
x j xi x j x j x j
U i U i ui
et
P P p
On rencontre le plus souvent, dans cette équation d'évolution les phénomènes élémentaires
suivants :
● Le transport le long des lignes de courant du champ de vitesse, c'est-à-dire l'advection
7
● La diffusion locale caractérisée par des paramètres associés au fluide, comme la viscosité et
la conductivité
● Des phénomènes de production ou de destruction. Un exemple est l'effet Joule dans les
fluides visqueux, qui correspond à la transformation d'énergie cinétique et chaleur, qui
représente un terme de destruction pour l'énergie cinétique et un terme de production pour la
chaleur.
Dans le paragraphe suivant, on décrit la démarche d'obtention des équations moyennées et les
modèles de turbulence associées.
U i ui
0 et 0 (4)
xi xi
La partie moyenne et la partie fluctuante vérifie toutes les deux l’équation de continuité.
U i U i u 1 P 2U i
U j uj i (5)
t x j x j xi x j x j
ui ui u j
La condition d'incompressibilité sur les fluctuations implique que u j .
x j x j
Finalement les équations moyennées s'écrivent :
U i U i 1 P 1 U i
U j ui u j (6)
t x j xi x j x j
On voit donc que sous cette forme les équations du champ moyen de vitesse sont différentes
des équations instantanées puisqu'apparait dans ces équations un nouveau terme lié à l'effet du
champ fluctuant. On peut assimiler l'effet du mouvement fluctuant à une loi de comportement
non newtonienne.
Les grandeurs Rij ui u j sont homogènes à des contraintes et sont appelées les
contraintes de Reynolds. Elles traduisent le transport de la quantité de mouvement par les
fluctuations turbulentes : ui est la quantité de mouvement par unité de volume transporté
par la composante turbulente u j .
u1 u1 u1 u 2 u1 u3
Rij u1 u2 u2 u2 u 2 u3
u1 u3 u 2 u3 u3 u3
8
Ce tenseur introduit donc 6 inconnues supplémentaires. On a donc un problème de fermeture.
Le rôle des modèles de turbulence sera donc de fournir des lois phénoménologiques
(algébriques ou différentielles) pour fermer le problème.
K
U j
K 1 P ui u j U i
Ui
ui u j
U i
t x j xi xk x j
(7)
2K U i U i
x j x j x j x j
U i ui
U k uk
U i ui
1 P p
2 U i ui (8)
t xk xi xk xk
ui
On fait la différence (8)-(5) en tenant compte de 0
xi
ui u
U k i
U i u k ui u k ui
1 p
2 ui (9)
t xk xk xk xi xk xk
u j
U k
u j
U j u k u j u k u j
1 p
2u j
(10)
t xk xk xk x j xk xk
On multipliant (9) par u j et (10) par ui et on somme les deux équations obtenues. En
regroupant certains termes, il vient :
ui u j ui u j U i U j ui u j u k u u
Uk uk u j u k ui uj i k
t xk xk xk xk xk
u j u k 1 p p 2 ui 2u j
ui uj ui u j ui
xk xi x j xk xk xk xk
Le passage à la moyenne dans cette équation fait disparaître les termes de la forme :
9
u j uk u j u k
ui ui 0
xk xk
On obtient alors une équation pour le moment d’ordre deux ( ui u j ) qui peut se mettre sous la
forme suivante :
ui u j ui u j U j U i ui u j u k 2 ui u j
U k
ui u k u j uk
t xk xk xk xk xk xk
(11)
1 p p u u j
ui uj 2 i
x j
xi xk xk
Cette équation est appelée équation de la tension de Reynolds ou équation de transport des
tensions de Reynolds. On a donc ici introduit six équations supplémentaires, cependant de
nouveaux termes apparaissent dans ces équations et le système n'est toujours pas fermé. . En
effet, L’équation (11) fait apparaître de nouvelles inconnues :
● corrélations triples : ui u j u k
p
● corrélation pression-vitesse : ui x
j
ui u j
● corrélation gradient de vitesse :
xk xk
Le problème de fermeture est alors repoussé et reste entier.
k k
U k P T D (12)
t xk
U i
● P ui u k appelé production turbulente. Il caractérise les échanges d'énergie par
xk
interaction avec le mouvement moyen (transfert d’énergie entre l’écoulement moyen et
turbulent. On a déjà rencontré ce terme avec le signe opposé dans l’équation cinétique
moyenne K , équation (7). Il représente de l'énergie cédée par le mouvement moyen au
mouvement turbulent, ce terme est positif.
1 ui ui u k 1 u k p
● T : Transport turbulent ou diffusion turbulente, ce terme est une
2 x k x k
redistribution de l’énergie du mouvement fluctuant.
2k
● D : Diffusion visqueuse de l'énergie cinétique turbulente par la viscosité, en
xk xk
général négligeable devant le précédent.
10
ui ui
● : dissipation de l'énergie turbulente sous forme de chaleur (transformée en
xk xk
chaleur). Ce terme constitue un puits dans l'équation (12) et conduit donc toujours à une
décroissance de l’énergie cinétique fluctuante.
L’équation (12) montre donc :
● que l’énergie turbulente est produite (dépens de l’écoulement moyen) dans les zones où il y
a un gradient de vitesse moyenne ;
k
● que cette énergie peut être transporté d’un point à l’autre ( terme T et le terme U k qui
xk
représente le transport par la vitesse moyenne) ;
● qu’elle est dissipé à cause de l’effet de viscosité (terme ).
11
U i U j
Rij ui u j t
x j xi
La quantité scalaire t est indépendante des propriétés du fluide, mais dépend en revanche
de l’écoulement et dépend également du point de mesure x et du temps de mesure t .
L’hypothèse t constante n’est en général pas correcte ; les transferts turbulents se font sur
de multiples échelles et ne sont pas locaux.
L’objet de la modélisation de la turbulence dans le cadre de l’hypothèse de Boussinesq est
d’obtenir une relation entre t ( x ,t ) et les autres inconnues du problème afin de fermer le
système d’équations à résoudre.
Par analogie avec la théorie cinétique des gaz, on va définir une longueur dite de mélange qui
sera l'équivalent du libre parcours moyen (distance parcourue par une molécule avant sa
prochaine interaction avec une autre molécule). On peut donc exprimer la fluctuation de
vitesse longitudinale par :
U
u U ( y lm ) U ( y) lm
y y
12
u v
et
uv u v
y y
2 U
t lm (13)
y
Le seul inconnu dans cette expression est paramètre lm , nommé longueur de mélange qui
dépend en général des coordonnées et caractérise l’échelle de la turbulence en un point donné.
Il existe un certain nombre de relations empiriques parmi lesquelles on peut citer :
Couche limite : lm y
où est la constante de Von karman et y la distance à la paroi
y
2
y
4
Tuyau rond (rayon R) : lm R 0 ,14 0 ,08 1 0 ,06 1
R R
où R est le rayon de la conduite et y la distance à la paroi
En résumé, les modèles de longueur de mélange demeurent relativement simples. Ils ne
nécessitent pas la solution d’équations différentielles additionnelles. De plus, en choisissant
judicieusement la longueur de mélange, ces modèles simulent assez bien des écoulements
monodimensionnels ou faiblement bidimensionnels tels le développement de couches limites
au voisinage de corps profilés. Mais l’inconvénient majeur de cette approche, quel est
largement empirique à cause de la définition de l’échelle de longueur et manque
d’universalité.
13
Pour laquelle on a simplement (voir équation (12)) :
k
P
t
Si l’écoulement est statistiquement stationnaire, on obtient un équilibre entre la production et
la dissipation avec :
P
dU k 2 dU
u1u 2 ck 2 u1u 2 c
dy dy
A partir de l’hypothèse de Boussinesq écrite sur R12 :
dU
u1u 2 t
dy
k2 k2
t c ou t C (14)
C s’appelle constante de Prandtl- Kolmogorov.
t l k 1/ 2
14
La viscosité turbulente est donnée par :
k2
t C
k k U i U j U i t k
k C k
2 3/ 2
U j t
t x j x xi x x
j j x j j x j x j l
k2
t C
C s’appelle constante de Prandtl- Kolmogorov, ce paramètre n’a guère de raisons d’être
constant. Dans le modèle k , on utilise cependant presque toujours la valeur : C 0 ,09 .
Equation pour k
Dans l’équation exacte de k , certains termes font intervenir des quantités autres que les
inconnues ( U i , P , k , ) :
à modéliser
à modéliser
à modéliser
k k U i 1 ui ui u j 1 u j p 2k
U j ui u j
t x j x j 2 x j x j x j x j
La modélisation de ces termes est nécessaire pour fermer les équations. La modélisation du
premier terme s’obtient en utilisant directement l’hypothèse de Boussinesq en retranchant la
trace du tenseur :
U i U i U j 2
k ij U i
ui u j t
x j x j xi 3
x j
1 ui ui u j k' u j 1
avec k' ui ui
2 x j x j 2
15
t k
k' u j
x j
Enfin on constate que les effets du troisième terme sont similaires à ceux du deuxième, ce qui
incite à modéliser globalement leurs effets en posant :
1 1 t k
ui ui u j u j p
x j 2 x j x j
k k U i U j U i t k 2
U j t k
t x j x j xi x j x j x j x j x j
L’équation pour
L'équation pour s'obtient en prenant le rotationnel des équations des fluctuations de vitesse
et ensuite en faisane la moyenne d'ensemble. La dérivation de cette équation est relativement
aisée mais les calculs restent fastidieux. On donne donc directement le résultat :
à modéliser
àmodéliser
à modéliser
U i ui u j u k u k u 2
U u k '
Uk 2 2 u i i
xk xk k
t xk x j x j xi x j x j xk xk
Le travail de modélisation à effectuer sur cette équation est assez conséquent et comporte de
nombreuses hypothèses plus ou moins justifiables. L’équation modèle la plus utilisée est de la
forme :
U i U j U i 2 t
U j C 1 C 2
t x j x j xi x j k k x j x j
U i
0
xi
U i U i 1 P U i U j 2 k
U j t
3 x
t x j xi x j x j xi i
16
k k U i U j U i t k 2k
U j t
t x j x j xi x j x j x j x j x j
U i U j U i 2 t
U j C 1 C 2
t x j x j xi x j k k x j x j
Les valeurs des 5 constantes ( C , C 1 , C 2 , k , ) sont déterminées en se référant à des
données expérimentales pour les écoulements simples (turbulence en décroissance libre,
écoulement en canal, …). Ces valeurs sont obtenues soit de façon directe, soit par une
procédure d’optimisation basée sur des comparaisons
Les résultats numériques sont également confrontés à des calculs analytiques pour des
configurations simples (couche limite sur une plaque plane, gradient inverse sur une plaque
plane,…).
Les valeurs les plus courantes sont :
C C 1 C 2 k
0,09 1,44 1,92 1 1,3
On peut présenter le modèle de Kolmogorov, basé sur l’analyse de Fourier, et conforter par
l’expérience, comme résultant des hypothèses suivantes :
● hypothèse 1 : l’énergie k est porté par les grandes tourbillons, qui ne "voient pas" l’effet de
la viscosité.
● hypothèse 2 : la viscosité n’influence que les plus petits tourbillons, responsables de la
majeure partie de la dissipation.
● hypothèse 1 : la puissance dissipée par les plus petits tourbillons doit provenir des plus
grands.
On déduit alors les échelles de longueur suivantes.
● L'échelle intégrale Lt caractérise la taille des plus grands tourbillons. Elle ne dépend pas
directement de la viscosité. Elle est liée :
► à l'énergie turbulente k , puisque les grandes structures portent l'essentiel de k .
► à la dissipation, puisque indique à quelle vitesse les grandes structures sont
détruites pour en former de plus petites (ce qui limite donc naturellement leur taille).
● L'échelle de Kolmogorov 0 caractérise la taille des plus petites structures. L'échelle de
Kolmogorov ne dépend pas directement de l'énergie k . Elle dépend :
17
► de la viscosité du fluide, puisqu'en dessous d'une certaine taille, la viscosité
transforme les structures en chaleur.
► de la dissipation.
Par analyse dimensionnelle, ces deux échelles s'écrivent :
1/ 4
k3/ 2 3
Lt et 0
Entre ces deux échelles, l'étendue du spectre est donnée par (on élimine ):
3/ 4
Lt k 1 / 2 Lt
Rt 3 / 4
0
k 1 / 2 Lt
Où Rt est le nombre de Reynolds turbulent définie par Rt
18
que toutes les échelles qui ont une taille inférieure à la taille locale de la maille sont
modélisées. Ainsi on appelle le modèle de turbulence le modèle "de sous-maille". Le nombre
de modèles de sous-maille développés depuis les années 70 est très important. Chaque modèle
a été développé et validé pour telle ou telle classe d'écoulement, avec chacun des
caractéristiques différentes en terme de coût de calcul, de robustesse (non explosion des
calculs), de précision (par rapport à des essais), de représentation physique des phénomènes,
d'universalité (précision sur plusieurs types d'écoulement).
On trouvera dans l'ouvrage de Pierre Sagaut [7] une description assez complète de l'ensemble
des modèles existants.
19
I. Equations de la couche limite turbulente
Nous partons de l’équation de quantité de mouvement aux valeurs moyennes suivant la
direction x ; elle s’écrit :
U U 1 P 1 U i
U V ui u j (1)
x y x x j x j
20
Une couche externe, représentant environ 80% de l’épaisseur totale , où le gradient
U
de vitesse est faible, et où la distribution de vitesse U ( y) n’est guère influencée par
y
les conditions à la paroi (elle dépend essentiellement du fluide et de l’écoulement extérieur).
Une couche interne très proche de la paroi, dont l’épaisseur est de l’ordre de 0,2
. A
l’inverse de la couche externe, l’écoulement dépend ici principalement des conditions à la
paroi (rugosité de la surface en particulier) ainsi bien évidemment que de la nature du fluide.
Dans cette zone, la loi de vitesse U ( y ) est dénommée loi de paroi.
Un examen attentif conduit encore à distinguer deux sous-couches dans cette couche interne.
Si l’on représente la loi de paroi en coordonnées linéaires, on ne voit rien, mais si on exécute
le tracé en coordonnées semi-logarithmiques on distingue nettement deux lois de vitesse,
l’une applicable très près de la surface, l’autre dans la partie externe de la couche interne
(figure ci dessus). Les régions correspondantes de l’écoulement sont appelées respectivement
« sous-couche visqueuse » et « zone logarithmique ».
21
II.1.1 Région interne
III.1.1.1 Loi de vitesse dans la sous-couche laminaire
A proximité immédiate de la paroi, les fluctuations turbulentes u , v ainsi que U et V
doivent tendre vers zéro. Ce domaine, appelé sous couche visqueuse, est donc caractérisé par
l’effet des contraintes de cisaillement laminaire que l’on suppose constante dans toute
l’épaisseur de cette sous couche, et égale à la valeur P à la paroi. D’où :
U C y A, C est une constante (3)
P
uT (5)
U u y
T A
uT
U 0 si y 0 , donc A 0 , c'est-à-dire :
U u y
T
uT
22
2
U
l 2
l : longueur de mélange
y
Pour déterminer le profil des vitesses de la loi de paroi, Prandtl suppose qu’au voisinage de la
paroi la longueur de mélange est proportionnelle à la distance y et que le frottement ne peut
s’écarter notablement du frottement à la paroi :
l y P
: constante de Karman
2
U
d’où P 2 y2
y
U u U 1
soit T Ln y C1
y y uT
1 u
Afin d’introduire le nombre sans dimension y , on peut ajouter la constante log T ,
d’où l’équation qui conduit à la forme logarithmique de la loi de paroi :
U 1 u y
log T C 2
uT
Soit en introduisant les termes adimensionnels u , y :
1
u log y C 2
La loi de vitesse dans cette région est une loi logarithmique, justifiant la terminologie
employée. la validité de la loi logarithmique est limitée à la zone : 30 y 500 . Le palier
supérieur y 500 correspondant à y 0,2 .
On utilise aussi la forme (7), issue également de l’expérimentation :
23
Le raccordement de la loi linéaire valable dans la sous-couche visqueuse et du profil
logarithmique valable dans la partie supérieure de la couche interne se fait progressivement
dans une région tampon ("buffer layer") ; dans cette zone tampon 3 y 30 , le profil de
vitesse est donné par une relation implicite due à Spalding (1961) :
1 1 3
y u e B eu 1 u u u
2
2 6
La constante d’intégration B a une valeur comprise entre 5 et 5,2.
24
U Ue
2,5 log 1,341 cos( ) )
uT
Le fait que cette loi exprime la différence U Ue justifie l’appellation usuelle de loi de
vitesse déficitaire qui lui est attribuée.
Une loi classiquement utilisée pour une couche limite turbulente en présence de gradients de
pression est une loi en puissance de la forme :
1
U y n (9)
Ue
P
P C
uT et f 1
U e2
2
Soit en éliminant P :
uT Cf
(10)
Ue 2
Introduisons cette expression dans les différentes lois de paroi en puissance (8) et (9) :
u 8, 74 y 1 / 7
1
U
y n
U e
Développons (7) :
1/7
U Ue yu
. 8 ,74 T
U e uT
25
1/ 4
Soit C f 0 ,045 (11)
Ue
et pour n 7 :
0 ,0972 (13)
On démontre que l’équation intégrale de Von Karman conserve son expression dans le cadre
de la couche limite turbulente, les termes de fluctuation de vitesse apparaissant sous la forme
d’une différence pratiquement négligeable :
d U e2 * U e dU e C f
U e2
2
dx d
0 u 2 v 2 dy
d C f
dx 2
En intégrant de 0 à x :
1 / 5
U x
0 ,370 e (14)
x
26
Nombre de Reynolds local
d U e2 * U e dU e C f
U e2
2
ds d
0 u 2 v 2 dy
Les termes u 2 et v 2 étant du même ordre de grandeur, le dernier terme est négligeable par
rapport aux autres, réduisant ainsi l’équation intégrale à la même expression qu’en laminaire :
d dU e C f
H 2
ds U e ds 2
Pour plus de précision, on adoptera la relation de Ludwieg-Tillmann basée sur des résultats
expérimentaux en présence d’un gradient de pression non nul :
0 ,268
0 ,678 H Ue
C f 0 ,246.10 (16)
27
III.2 Profil de vitesse
L’influence du gradient de pression sur le profil de vitesse est très important comme le
montrent les mesures de Clauser (1954).
* dp
D (17)
P ds
* 1 U 1 H 1
0 1
Ue
dy
n1 H 1
(18)
1 U U n H 1
1
dy
(19)
0 Ue Ue n 1 n 2 H H 1
* n 2 2
H ou n (20)
n H 1
28
H 1
U y H 1 2
(22)
Ue H H 1
Quel que soit le profil de vitesse retenu, on démontre qu’il peut se mettre sous la forme :
H 1 1
G
H Cf (24)
2
Mode opératoire
A partir du point du transition, on connaît les valeurs de xT , * , et H . Partant de ces
valeurs, ont peut définir successivement :
29