Entrainement Au Brevet
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Collège Sainte-Geneviève
Session Octobre 2021
5 FRANÇAIS
Série Collège
Coefficient 2
15- Rédaction
20
5Michel Leiris (1901-1990) évoque son enfance dans L’âge d’homme, son premier récit autobiographique.
Agé de cinq ou six ans, je fus victime d’une agression. Je veux dire que je subis dans la
gorge une opération qui consista à m’enlever des végétations ; l’intervention eut lieu d’une
manière très brutale, sans que je fusse anesthésié. Mes parents avaient d’abord commis
10la faute de m’emmener chez le chirurgien sans me dire où ils me conduisaient. Si mes
souvenirs sont justes, je m’imaginais que nous allions au cirque ; j’étais donc très loin de
prévoir le tour sinistre que me réservaient le vieux médecin de la famille, qui assistait le
chirurgien, et ce dernier lui-même. Cela se déroula, point pour point, ainsi qu’un coup
monté et j’eus le sentiment qu’on m’avait attiré dans un abominable guet-apens. Voici
15comment les choses se passèrent : laissant mes parents dans le salon d’attente, le vieux
médecin m’amena jusqu’au chirurgien, qui se tenait dans une autre pièce en grande barbe
noire et blouse blanche (telle est, du moins, l’image d’ogre que j’en ai gardée) ; j’aperçus
des instruments tranchants et, sans doute, eus-je l’air effrayé car, me prenant sur ses
genoux, le vieux médecin dit pour me rassurer : « Viens, mon petit coco ! On va jouer à
20faire la cuisine. » A partir de ce moment je ne me souviens de rien, sinon de l’attaque
soudaine du chirurgien qui plongea un outil dans ma gorge, de la douleur que je ressentis
et du cri de bête qu’on éventre que je poussai. Ma mère, qui m’entendit d’à côté, fut
effarée. […]
Ce souvenir est, je crois, le plus pénible de mes souvenirs d’enfance. Non seulement je ne
25comprenais pas que l’on m’eût fait si mal, mais j’avais la notion d’une duperie, d’un piège,
d’une perfidie atroce de la part des adultes, qui ne m’avaient amadoué que pour se livrer
sur ma personne à la plus sauvage agression. Toute ma représentation de la vie en est
restée marquée : le monde, plein de chausse-trapes, n’est qu’une vaste prison ou salle de
chirurgie ; je ne suis sur terre que pour devenir chair à médecins, chair à canons, chair à
30cercueil ; comme la promesse fallacieuse de m’emmener au cirque ou de jouer à faire la
cuisine, tout ce qui peut m’arriver d’agréable en attendant n’est qu’un leurre, une façon de
me dorer la pilule pour me conduire plus sûrement à l’abattoir où, tôt ou tard, je dois être
mené.
REECRITURE
Réécrivez le passage ci-dessous en remplaçant le passé simple par le passé composé et en
35considérant que le narrateur est une jeune fille.
« Agé de cinq ou six ans, je fus victime d’une agression. Je veux dire que je subis dans la
gorge une opération qui consista à m’enlever des végétations ; l’intervention eut lieu d’une
manière très brutale, sans que je fusse anesthésié. »
DICTEE PREPAREE (préparation avec un membre de votre famille durant les
vacances ; dictée en classe dans la semaine de la rentrée)
Une des grandes énigmes de mes premières années fut le mécanisme de la descente des
5jouets de Noël à travers la cheminée. J'échafaudais des raisonnements très compliqués à
propos des jouets trop grands pour pouvoir logiquement passer dans la cheminée, le Père
Noël les ayant lâchés d'en haut. A propos d'une réduction de voilier qui m'avait été ainsi
donnée et qui, je l'ai su plus tard, était un cadeau d'un ami de mon frère aîné, je résolus la
question en admettant l'hypothèse suivante : puisque Dieu est tout-puissant, il crée les
10jouets sans qu'ils aient à passer à travers la cheminée. Cet émerveillement était un peu de
même nature que celui que me causait, chaque fois que je passais par cet endroit, la vue
d'un navire en bouteille à la devanture d'une boutique de mon quartier.
15
20SUJET 1 - A votre tour, racontez un souvenir d'enfance. Vous inclurez dans votre récit les
expressions suivantes : "Si mes souvenirs sont justes...", "J'eus le sentiment que..." et "Je
comprenais que..."
30SUJET 2 - Après avoir lu ce texte, la mère de Michel Leiris lui écrit une lettre dans laquelle
elle donne son point de vue sur ce souvenir commun et commente la manière dont son fils
l'a traité.