Droit de La Famille - Cours 2021 - FINAL
Droit de La Famille - Cours 2021 - FINAL
Droit de La Famille - Cours 2021 - FINAL
DROIT DE LA FAMILLE
Laure MONTILLET – de SAINT-PERN
2020- 2021
INTRODUCTION
Qu’est-ce que la famille ? La famille. C’est une notion dont chacun connaît
intuitivement le contenu. Un père, une mère, des enfants. Deux pères, des
enfants. Deux mères, des enfants. Un seul parent, des enfants.
Ou encore une famille recomposée.
Des parents mariés, pacsés, ou en concubinage.
La famille présente aujourd’hui des formes multiples. Mais tout le monde
en a une, au moins ascendante. Des parents, des ascendants, des frères et
sœurs.
.
1
La famille est riche de situations et de liens. Et le droit de la famille est là
pour encadrer ces situations.
Dès lors, en droit, le lien familial peut être d’une double nature : il peut
résulter soit du mariage ou du pacs, soit de la filiation.
Le lien créé par le mariage est un lien d’alliance. Le lien de filiation est,
quant à lui, un lien de parenté. Nous reviendrons sur ces notions
ultérieurement.
1 B. BEIGNIER et J.-R. BINET, Droit des personnes et de la famille, LGDJ, coll. Cours, 4e éd, 2019, p. 366, n°635
.
2
Ainsi, le droit régit les liens de famille. Mais de quel type de règles s’agit-
il ?
Parce que nous sommes dans un pays de tradition civiliste – par opposition
aux pays de tradition de Common Law – les règles régissant le droit de la
famille figurent dans des textes de lois.
Tout particulièrement dans le Code civil mais aussi dans le Code de
l’Action Sociale et des Familles (CASF) par exemple ou encore dans le
Code de la Santé Publique (CSP), s’agissant des règles relatives à la
procréation médicalement assistée.
Le droit de la famille régit les liens entre les personnes mais également la
gestion des biens au sein de la famille, autrement dit au patrimoine de la
famille. C’est ce qu’on appelle : le droit patrimonial de la famille.
.
3
C’est cette partie du droit de la famille, le droit extra-patrimonial, qui fera
l’objet de ce cours. Le droit des régimes matrimoniaux et des successions
sera étudié en M1.
Mais, parce que les deux matières sont liées, il y aura parfois des aspects
de droit patrimonial de la famille qui seront abordés. Cela permettra de
comprendre la globalité de la discipline.
.
4
Enfin, avant d’aborder l’introduction de ce cours, quelques chiffres
concernant la famille.
- 740 000 naissances (13 000 de moins qu’en 2019/ contre 798 900 en
2015)
Ainsi, l’indicateur de fécondité est de 1,84 enfant par femme. Il diminue
depuis 6 ans, puisqu’il était près de 2,0 entre 2006 et 2014. Mais la France
demeure le pays le plus fécond d’Europe tout de même.
- 658 000 personnes sont décédées (7,3 % de plus qu’en 2019 – liées au
Covid)
Quels sont les liens que le droit reconnaît comme étant des liens
familiaux ?
La famille contemporaine est diverse et polymorphe : des familles fondées
sur le mariage, le pacs, le concubinage, unies, désunies, avec ou sans
enfants... C’est la raison pour laquelle il faut déterminer les liens que le
droit identifie comme fondateurs d’une « famille ».
S’agissant des liens reconnus par le droit, il faut distinguer – comme nous
l’avons indiqué – selon qu’il s’agit de liens fondés sur la parenté (A) ou de
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6
liens consacrés par la conclusion d’un mariage ou d’un pacs (B). Parfois,
ces liens sont purement factuels et découlent d’une cohabitation (C).
Le lien de filiation fonde la famille : c’est le lien qui relie l’enfant à ses
père et mère ou à l’un d’eux. En effet, l’enfant qui vient au monde a, en
principe, deux parents : un père et une mère.
Dès lors, l’enfant entre « dans la famille de chacun d’eux » (Art. 310 du
Code civil). L’enfant devient membres de deux groupes familiaux, de deux
branches familiales : celle de son père et celle de sa mère. L’enfant est
ainsi situé à l’égard de ses frères et sœurs, des grands-parents et ancêtres
plus lointains, des oncles et tantes et cousins…
.
7
De ce lien de filiation à l’égard des parents, il découle donc des liens de
parenté à l’égard des autres membres de la famille. Il y a des liens
d’ascendance (grands-parents et aïeuls) et des liens collatéraux (frères,
sœurs, oncles, tantes, cousins).
=> Les liens de filiation et donc de parenté ne reposent pas que sur la
génétique, comme nous pourrons l’observer. Le lien de filiation peut
également se fonder sur la volonté parentale : c’est le cas dans le cadre de
l’adoption ou de la procréation médicalement assistée avec tiers donneur.
1. Le lien matrimonial
Le lien matrimonial ou conjugal est celui qui unit les personnes mariées.
C’est le lien entre les époux. Le mariage est un acte juridique par lequel les
époux organisent leur communauté de vie et qui a pour effet de fonder une
famille3.
Cette fonction du mariage est inscrite à l’article 213 du Code civil : « les
époux assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille, ils
3 B. BEIGNIER et J.-R. BINET, Droit des personnes et de la famille, LGDJ, coll. Cours, 4e éd, 2019, p. 372, n°649
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8
pourvoient à l’éducation des enfants et préparent leur avenir ». C’est ici le
mariage qui fonde l’existence du groupe « famille ».
Mais a-t-il une vocation familiale comme le mariage ? Cela ne ressort pas
des textes du Code civil. Mais la Cour européenne des droits de l’homme a
une conception large de la vie familiale4. Elle n’exige pas un mariage ni
même un lien de droit entre les individus pour qu’il y ait une famille.
Aussi, il est certain qu’il y a une vie familiale au sein d’un couple pacsé.
4 CEDH, 24 juin 2010, Schalk et Kopf c. Autriche, n° 30141/04 (en pdf )
.
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De plus, le juge compétent pour les litiges liés au pacs est le juge aux
affaires familiales ( art. L. 213-3 du Code de l’Organisation Judiciaire), ce
qui illustre bien le fait que le pacs est un contrat d’union de couple, un
contrat à l’origine d’une famille.
Pour autant, il n’y a pas de lien d’alliance entre deux partenaires pacsés car
le lien juridique établi entre eux se limite aux deux intéressés. Autrement
dit, le Pacs ne fait pas naître de lien juridique entre les pacsés et leurs
beaux-parents ni avec les beaux-frères et belles-sœurs.
Il est d’ailleurs défini comme une « union de fait » dans l’article 515-8 du
Code civil. Il n’y a pas d’obligations légales entre les concubins.
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10
englober d’autres liens « familiaux » de fait lorsque les parties cohabitent
en dehors du mariage5 ».
La Cour européenne des droits de l’homme a également précisé que « la
relation [entre les membres] d’un couple homosexuel cohabitant de fait de
manière stable, relève de la notion de « vie familiale » au même titre que
celle d’un couple hétérosexuel se trouvant dans la même situation6 ».
5 CEDH, 24 juin 2010, Schalk et Kopf c. Autriche ; v. également CEDH, 18 déc. 1986, Johnston et autres c. Irlande,
n°9697/82 (lien)
6 Idem
7 CEDH, Moretti et Benedetti c. italie, 27 avr. 2010, n°16318/07 (lien); v. également CE, 24 mars 2004, n°249369
8 CEDH, 22 avr. 1997, X, Y et Z c. Royaume-Uni, n°7215/75 (lien) ; v. également CEDH, 15 mars 2012, Gas et
Dubois, n°25951/07 (lien)
.
11
la vie familiale, énoncé par l’Article 8 de la Convention européenne de
sauvergarde des droits de l'homme9.
L’on constate donc que si le lien privilégié pour fonder une famille était le
mariage, il en existe désormais d’autres. Preuve que la famille et le droit
qui lui est consacré évoluent en profondeur.
A. Le droit romain.
a. La famille
b. Le mariage et le divorce
Les unions hors mariage existaient mais étaient ignorées par le droit.
.
13
c. La filiation
B. L’Ancien Droit
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14
= c’est-à-dire la période avant la Révolution française
a. Le mariage et le divorce
b. La filiation
.
15
La filiation des enfants légitimes – c’est-à-dire nés lors du mariage –
pouvait être établie à l’égard de leur père au moyen de la présomption de
paternité. Le mari de la mère est présumé être le père de l’enfant.
Cette présomption pouvait toutefois être renversée.
C. Le droit intermédiaire
= Après la Révolution
a. Le mariage et le divorce
.
16
A l’époque révolutionnaire, le mariage fut laïcisé.
Jusque là, les consentements étaient échangés devant devant un prêtre. Il
fut décidé que les consentements seraient dorénavant échangés devant une
autorité civile.
b. La filiation
Le sort des enfants nés hors mariage fut amélioré : on leur accorda des
droits successoraux identiques à ceux dont bénéficiaient les enfants
légitimes. Sauf s’ils étaient adultérins.
.
17
Il faut ajouter que la filiation hors mariage ne pouvait être établie contre la
volonté du géniteur de l’enfant. Il n’y avait pas d’action en justice
possible.
D. Le Code civil
a. Le mariage et le divorce
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18
descendants. Ainsi qu’entre alliés en ligne directe. Le mariage est
également interdit entre collatéraux jusqu’au troisième degré. Il fut enfin
proscrit entre anciens beaux-frères et belles-sœurs.
Le concubinage fut ignoré par le Code civil. Son entrée dans le Code civil
date de 1999 (article 515-9).
b. La filiation
.
19
La présomption de paternité acquit, quant à elle, une portée qui ne lui avait
jamais été donnée. Il devint extrêmement difficile de la remettre en cause.
Même lorsqu’il était évident que le mari n’était pas le géniteur, le mari de
la mère demeurait donc souvent le père.
Le législateur avait estimé que l’important était la stabilité et la paix des
familles plutôt que la vérité biologique du lien de filiation.
a. Mariage et divorce
Par des lois de 1896, 1907, 1922 et 1933, on a supprimé l’autorisation des
parents pour le mariage des enfants majeurs. On supprime également la
formalité des « actes respectueux ».
Par des lois de 1907, 1938 et 1942, le législateur atténua l’inégalité entre le
mari et la femme.
Le devoir d’obéissance de la femme au mari fut supprimé, la capacité de la
femme mariée fut affirmée. Ses prérogatives patrimoniales furent étendues
.
20
Le divorce fut interdit à nouveau sous la Restauration par une loi de 1816.
ce n’est qu’en 1884 que la faculté de divorcer fut rétablie. Mais le divorce
ne peut toutefois pas être justifié par le consentement mutuel des conjoints.
Il devait être fondé sur des comportements fautifs, qui étaient susceptibles
d’être sévèrement sanctionnés.
b. Filiation
Le sort des enfants naturels fut amélioré par des lois de 1896, 1907 et
1912. Ils ont davantage de droits successoraux. Mais ils ne sont pas encore
à égalité avec les enfants légitimes.
.
21
Puis, en 1939, le législateur institua l’adoption plénière telle qu’on la
connaît. L’adoption rompt les liens existant entre l’adopté et sa famille
d’origine.
Fut créée également la légitimation adoptive : ouverte aux époux sans
enfants et qui leur permettrait de devenir les parents d’enfants de moins de
5 ans. L’adopté se trouvait alors dans la situation d’un enfant légitime. On
voit ici l’importance de la qualité d’enfant légitime.
1. De 1958 à 1998
a. Mariage et divorce
.
22
En 1974, l’âge de la majorité fut fixée à 18 ans. Tous les individus ayant
atteint cet âge eurent le droit de se marier sans demander le consentement
de leurs parents.
b. La filiation
En 1972, le législateur vota une grande loi d’égalité. Elle affirme l’égalité
entre les enfants légitimes et les enfants naturels. Désormais, que l’on soit
.
23
né de parents mariés ou non, on bénéficie des mêmes droits successoraux à
l’égard de ses parents.
De plus, la loi permit de remettre en cause la présomption de paternité
dans le cadre d’une action en recherche de paternité. C’était l’affirmation
de la primauté de la réalité génétique sur l’unité familiale fondée sur le
mariage.
.
24
Mais le législateur ne fixe pas le régime du concubinage, il se contente de
le définir.
.
25
filiation légitime et la filiation naturelle. Pour cela, le législateur bannit les
expressions « naturelle » et « légitime ». Désormais, il n’y a plus de
distinctions entre les filiations.
.
26
PARTIE I. LE COUPLE
En droit civil, la famille est fondée sur l’union d’un couple 10. Pendant
longtemps, seul le mariage permettait au couple d’accéder à une
reconnaissance officielle.
Si chacun sait de quoi il s’agit, il n’en est pas moins difficile de définir le
mariage.
Et cela, pour deux raisons :
- la première provient des différents aspects du mariage, aspects sociaux et
moraux qu’il est difficile d’insérer dans une définition juridique du
mariage.
- la seconde résulte du double sens du mot mariage qui désigne tantôt
l’acte instantané qui donne naissance à cet état, tantôt l’état lui-même,
continu.
Dans une autre perspective, le mariage ne serait qu’un contrat, fondé sur le
seul consentement des parties et ne produisant que les effets recherchés.
Au soutien de cette thèse, il est possible de relever la terminologie même
du Code civil : il y est dit que l’on « contracte » mariage : article 144, 146-
1 et 147
De plus, parmi les conditions de formation, le consentement est une
condition fondamentale. Comme pour tout contrat.
S’ajoute à cela la possibilité de divorcer par consentement mutuel sans
l’intervention d’un juge depuis 2016. Il n’y a plus qu’un enregistrement
par notaire de la convention de divorce. Cela renforce la dimension
12 B. BEIGNIER, J.-R. BINET, Droit des personnes et de la famille, LGDJ, Lextenso, 4e éd. 2019, p. 386, n°668
13 Digeste, 23, 2, 1 cité par P. OURLIAC et J. de MALAFOSSE, Histoire du droit privé, PUF, « Thémis », t. 3, La
Famille, spéc. 163
.
29
contractuelle du mariage : il est possible de le délier par la seule volonté
des époux. Non sans cadre, mais en tout cas sans cadre judiciaire.
Se marier est une liberté. On ne peut être forcé de se marier. C’est ce qu’on
appelle : la liberté matrimoniale (section 1).
Nous envisagerons ensuite la formation du mariage (section 2)
Puis les effets du mariage (section 3)
.
30
En d’autres termes, la liberté matrimoniale signifie que chacun est en
principe libre d’adhérer ou non à l’institution matrimoniale, et de choisir
son conjoint14.
.
33
C’est encore le Conseil constitutionnel qui affirmait, dans une décision du
13 août 1993, que « le principe de la liberté du mariage est une des
composantes de la liberté individuelle18 ». Ainsi, la liberté matrimoniale
est-elle une liberté fondamentale.
1. La liberté de se marier
4. Les fiançailles
.
35
Historiquement, elles s’accompagnent d’un serment, ou du versement
d’arrhes, ou encore d’échange d’anneaux. Il s’agit, à l’époque romaine ou
dans l’Ancien droit, d’un véritable engagement.
Les fiançailles créent une obligation de faire. Elles peuvent être résiliées
par consentement mutuel ainsi que pour une cause grave.
Aujourd’hui, en droit positif, les fiançailles sont une promesse. Mais elle
ne crée aucune obligation de mariage à l’égard des fiancés. Les fiançailles
ne sont d’ailleurs pas envisagées dans le Code civil.
.
36
b. Les effets des fiançailles
Par ailleurs, en cas de rupture des fiançailles – fautive ou non, toutes les
donations reçues au titre des fiançailles doivent être restituées.
Mais il y a une exception concernant ce que l’on appelle les « présents
d’usage ». C’est-à-dire des cadeaux de faible valeur qui ont été faits aux
22 Cass. 1Ère civ, 20 juin 1961, aff. La Rochefoucauld, Bull. Civ. I, n°326 ; D. 1961, jurispr. p. 641, note R. Savatier ;
JCPG 1961, II, 12352, concl. R. Lindon ; RTDCiv. 1961, p. 713, obs. R. Savatier.
.
38
Les conditions de fond du mariage sont politiques : elles reflètent les choix
d’une société donnée à un moment donné. Elles ont donc évolué avec le
temps et avec la société.
Même si elles ont disparues, il est important de les étudier pour bien
comprendre ce qu’est l’institution du mariage.
.
39
a. L’altérité sexuelle des époux
.
40
Des actions « coup de poing » ont également été menées. C’est le cas par
exemple de la fameuse affaire du « mariage de Bègles ». V. vidéo : ici et
ici.
Le maire de Bègles a célébré un mariage de deux hommes en 2004. Cette
célébration reposait sur une interprétation de l’article 144 du Code civil,
selon laquelle le texte ne comporterait qu’une exigence concernant l’âge
nubile des époux. Ce texte ne poserait pas de condition relative à l’altérité
sexuelle.
23 Cass. 1Ère civ. 13 mars 2007, n° 05-16627 : ici ; Bull. Civ. 2007, I, n°113, D. 2007, 1389, note Agostini ; JCP G.
2007, I, 170, n°1, Y. Favier ; RTDCiv. 2007, 315, obs. J. Hauser.
.
41
Dans un arrêt Chapin et Charpentier c/ France24, la Cour européenne des
droits de l’homme a jugé, dans cette même affaire, que la France avait
respecté les articles 8, 12 et 14 de la CEDH.
24 CEDH, 5ème section, 9 juin 2016, n° 40183/07, Chapin et Carpentier c. France : ici; Dr. Fam 2016, Alerte 61, obs.
J. Couard
25 Cons. Const. 28 janv. 2011, n°2010-92 QPC : ici ; Dr. Fam 2011, comm. 32, note Oeudraogo
.
42
législateur sur la prise en compte, en cette matière, de cette différence de
situation ».
=> Le Conseil constitutionnel renvoie la question au législateur.
b. L’examen prénuptial
Si la loi n’impose pas d’âge maximum pour se marier, elle impose un âge
minimum : l’âge nubile28 ou l’âge nuptial.
En principe, il est impossible de se marier avant l’âge de 18 ans. En effet,
l’article 144 du Code civil dispose ainsi que « le mariage ne peut être
contracté avant dix-huit ans révolus ».
27 B. BEIGNIER, J.-R. BINET, Droit des personnes et de la famille, 4e éd, LGDJ, Lextenso, 2019, p. 396, n°689
28 Adj. Du latin nubilis, tiré du verbe nubere : se marier
.
44
Par exception, le Procureur de la République du lieu de célébration du
mariage peut diminuer cet âge lorsqu’il existe des « motifs graves ». En
pratique, cette dispense peut intervenir lorsque la femme est enceinte par
exemple.
Si cette condition d’âge est remplie, il faut alors que les époux échangent
leurs consentements.
Le mariage étant un contrat, pour partie en tout cas, il est logique d’exiger
le consentement des époux.
L’article 146 du Code civil dispose qu’ « il n’y a pas de mariage lorsqu’il
n’y a pas de consentement ».
Le mariage se forme ainsi par l’accord de volontés des futurs conjoints.
Cette condition essentielle était déjà connue du droit romain puis du droit
canonique.
1. Existence du consentement
.
45
- le mariage posthume (b)
- le mariage simulé (c)
→ Le mineur
Le mariage du mineur doit faire l’objet de l’autorisation des parents ou de
certaines personnes qualifiées.
Le mineur doit recueillir le consentement de ses parents. S’ils sont en
désaccord, cela vaut acceptation.
Si l’un des parents est décédé, le consentement du parent survivant suffit.
Si les deux parents sont décédés, ce sont les ascendants les plus proches
qui doivent se prononcer, souvent ce sont les grands-parents.
Si tous les ascendants sont décédés, il faudra obtenir l’accord du conseil de
famille.
→ Majeurs protégés
Le mariage du majeur protégé pose la question de son aptitude à émettre
un consentement valable.
Dans un souci de préservation de ses intérêts, l’article 460 du Code civil
prévoyait donc que le majeur en curatelle devait obtenir le consentement
du curateur, ou à défaut celui du juge des tutelles.
Le majeur en tutelle devait obtenir le consentement du tuteur.
.
46
Depuis la loi du 23 mars 2019, ces exigences n’existent plus. Le majeur
sous tutelle ou sous curatelle peut se marier après avoir préalablement
informé son tuteur ou son curateur.
b. Le mariage posthume
Cette possibilité est utile lorsque le fiancé meurt peu de temps avant le
mariage par exemple. Cette possibilité est notamment utilisée pour le
mariage de policiers ou militaires décédés dans le cadre de leurs fonctions.
c. Le mariage simulé
.
47
Lorsque les époux ont consenti au mariage dans le but d’obtenir certains
de ses effets et non tous ceux qui sont prévus par la loi, on dit que le
mariage est simulé.
C’est le cas par exemple du mariage conclu uniquement dans le but
d’acquérir la nationalité française ou d’obtenir des avantages patrimoniaux
ou fiscaux.
Dans ce cas, le consentement à mariage n’existe pas. L’union matrimoniale
ne sert alors qu’à « atteindre un but étranger à l’union matrimoniale29 ».
Une action en nullité du mariage pourra être intentée, par exemple par le
ministère public. Le juge devra déterminer l’absence d’intention
matrimoniale.
2. Intégrité du consentement
a. l’erreur
.
49
→ l’erreur sur l’identité de la personne
L’erreur sur l’identité civile vise le cas où l’un des époux aurait utilisé un
faux état civil. Là encore, c’est plutôt rare.
Parce que les cas d’erreurs étaient très restreints, le législateur a introduit
l’erreur sur les qualités essentielles de la personne dans le Code civil en
1975.
Le législateur introduit donc, bien plus tard, en 1975, l’erreur sur les
qualités essentielles dans le Code civil dans l’alinéa 2 de l’article 180 :
« s’il y a eu erreur dans la personne ou sur les qualités essentielles de la
personne, l’autre époux peut demander la nullité du mariage ».
Le droit ne définit pas les qualités elles-même, il n’en donne pas une liste
précise. Les juges procèdent à une appréciation au cas par cas.
Le juge doit procéder à une appréciation à la fois subjective et objective,
en d’autres termes une appréciation à la fois in concreto et in abstracto.
- D’abord, il faut donc que la qualité invoquée soit considérée comme
essentielle d’une point de vue subjectif par l’époux qui se prétend victime
en faisant valoir ses convictions religieuses, sa sensibilité ou encore ses
opinions.
=> Ainsi l’époux qui invoque une erreur sur les qualité essentielles de son
conjoint devra démontrer non seulement que cette mauvaise perception de
la réalité portait bien sur une qualité qu’il considère, dans son for intérieur,
comme demeurant essentielle pour la vie conjugale.
Mais cela ne suffit pas. Il faudra encore démontrer qu’objectivement, en
l’état actuel des mœurs, l’absence de ladite qualité comporte bien une
incidence sur la vie matrimoniale.
Tel n’est pas le cas de nos jours pour une absence de virginité de l’un des
époux au jour du mariage.
De même, l’existence d’une relation avec une tierce personne avant le
mariage n’est pas constitutive d’une qualité essentielle33.
En revanche, il a été retenu une erreur sur les qualités essentielles lorsque
l’épouse très profondément religieuse découvre que son mari a été
précédemment marié, religieusement, et qu’il avait divorcé34.
33 Cass. 1Ère civ. 13 déc. 2005, n°02-21259, (Fiche TD 2, doc 1)
34 Cass. 1Ère civ. 2 déc. 1997 ; Dr. Fam. 1998, comm. 35, note Lécuyer ; RTDCiv. 1998, 654, obs. J. Hauser ;
Defrénois 1998, 1017, obs. J. Massip
.
53
A quel moment s’apprécie l’erreur ?
L’erreur s’apprécie au jour du mariage.
C’est à celui qui se prévaut de l’erreur de rapporter la preuve de cette
erreur.
b. la violence
L’article 180 alinéa 1er du code civil dispose que l’exercice d’une
contrainte sur les époux ou l’un d’eux constitue un cas de nullité du
mariage.
Le plus souvent, il s’agit d’une violence morale exercée par les membres
de la famille des futurs époux. Cela peut être une contrainte, appelée
« crainte révérencielle », c’est à dire que le futur époux se sent contraint de
se marier car il craint ses parents ou autres ascendants.
.
54
C. Les conditions morales et sociales
Afin d’éviter la bigamie, chacun des futurs époux doit remettre à l’officier
d’état civil une copie de son acte de naissance datant de moins de trois
mois pour vérifier qu’aucun mariage n’y est inscrit en marge.
Si, malgré ces précautions, une seconde union est contractée, celle-ci est
nulle.
L’interdiction de principe
36 Cass. 1Ère civ. 24 sept. 2002 , Bull. Civ. I, n°214, p. 165. ; JCP 2003, II, 10007, concl. Sainte-Rose, note A.
Devers ; D. 2003, somm. 1935, obs. J-J. Lemouland ; Defrénois 2002, 1467, obs. J. Massip.
37 Cass. 2Ème civ. 2 mai 2007, n°06-11418
.
56
La liberté matrimoniale permet de se marier avec qui l’on souhaite. Sauf
s’il y a un empêchement à mariage. L’inceste fait partie de ces
empêchements à mariage.
Sur le plan pénal, l’inceste est condamné aux articles 222-31-1 et 222-31-2
du Code Pénal.
Dans le Code civil, l’ « inceste » n’est pas mentionné en tant que tel mais
c’est bien de l’interdiction des mariages incestueux dont il est question
dans les articles 161 et suivants du Code civil.
38 A. Batteur, « L’interdit de l’inceste, principe fondateur du droit de la famille », RTDCiv. 2000, p. 759.
.
57
Cet interdit fondamental trouve sa transcription dans les articles 161 et
suivants du Code civil.
L’article 161 dispose que « En ligne directe, le mariage est prohibé entre
tous les ascendants et descendants et les alliés dans la même ligne. »
Les articles 162 et 163 posent la même interdiction entre frères et sœurs,
oncles, tantes, neveux…
S’il existe des causes graves, l’article 164 permet de lever l’interdiction de
mariage entre oncle, tante/ neveux et nièces, et entre alliés en ligne directe
lorsque la personne qui a créé l’alliance est décédée.
Signe que l’inceste n’est pas une question de lien génétique, les personnes
adoptées sont également concernées. Ainsi, l’enfant adopté plénièrement
est soumis aux mêmes interdictions.
En ce qui concerne l’adoption simple, les cas de mariage interdits sont
précisés dans l’article 166 du Code civil. Il s’agit d’empêcher l’enfant
.
58
adopté de se marier avec les membres proches qui composent la famille
adoptive.
Là encore, le Président de la République peut lever certains interdits à
mariage.
Cet interdit subsiste dans notre droit mais l’on a pu se demander si, au nom
des droits fondamentaux, l’interdit n’avait pas été remis en cause par la
jurisprudence.
→ Jurisprudence de la CEDH
39 CEDH, 13 septembre 2005, n°36536/02, B.L. c/ Royaume-Uni ; Dr. Fam. 2005, comm. 234, note A. Gouttenoire et
M. Lamarche ; RTD Civ. 2005, 735, obs. J.-P. Marguénaud ; RTD Civ. 2005, 758, obs. J. Hauser.
.
59
Elle considère que l’intérêt de l’enfant, né du couple, risquait d’être
perturbé si le mariage de ses parents était impossible.
.
61
Ici, le fait que le mariage ait duré plus de vingt ans est pris en compte. La
nullité du mariage porterait atteinte au droit au respect de la vie privée de
l’épouse.
= l’écoulement du temps rend pérenne la situation en principe prohibée.
L’article 161 du Code civil en ressort particulièrement affaibli.
Quelques années plus tard, la Cour de cassation est saisie d’une affaire
similaire41. Mais elle rend une décision en sens contraire.
41 Cass. 1Ère civ. 8 déc. 2016, n°15-27201 : ici ; Dr. Fam. 2017, comm. 24, note J.-R. Binet ; Dr. Fam 2017, comm.
25, concl. L. Bernard de la Gatinais ; JCP G. 2017, 166, note J. Hauser ; JCP G 2017, 186, obs. M. Lamarche ; D.
2017, 1082, obs. J.-J. Lemouland et D. Vigneau ; D. 2017, 953, note F. Chénedé ; RTD Civ. 2017, 102, obs. J.
Hauser
.
62
La Cour de cassation rappelle la finalité de la règle prohibant le mariage
entre alliés. Ainsi, la règle « poursuit un but légitime en ce qu’elle vise à
sauvegarder l’intégrité de la famille et à préserver les enfants des
conséquences résultant d’une modification de la structure familiale ».
Puis, elle rappelle la place occupée par le contrôle de proportionnalité : « il
appartient toutefois au juge d’apprécier si, concrètement, dans l’affaire
qui lui est soumise, la mise en œuvre de ces dispositions ne porte pas
atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par la
Convention et que l’atteinte n’est pas disproportionnée au regard du but
légitime poursuivi ».
Enfin, elle considère qu’en l’espèce l’appréciation concrète a bien été
menée puisque l’arrêt d’appel relève que l’intéressée a vécu, « alors
qu’elle était mineure, durant neuf années, avec celui qu’elle a
ultérieurement épousé et qui représentait nécessairement pour elle, alors
qu’elle était enfant, une référence paternelle, au moins sur le plan
symbolique ».
=> La finalité de la règle qui consiste à empêcher les perturbations
généalogiques apparaît ici clairement.
La Cour souligne la durée de ce mariage (8 ans) et le fait qu’il n’y ait pas
d’enfant né de cette union. Par conséquent, il n’y avait pas d’atteinte au
droit au respect de la vie privée.
.
63
Maintenant que nous avons pu étudier les conditions de fond du mariage,
nous allons envisager les conditions de forme.
Certaines formalités doivent être accomplies par les futurs conjoints avant
la célébration du mariage (A). D’autres sont propres à la célébration, ce
qui fait du mariage un acte solennel (B).
.
64
Si le futur époux est placé sous tutelle ou curatelle, le tuteur ou curateur
doit être préalablement informé de son projet de mariage. Une justification
de cette information doit être fournie à l’officier d’état civil.
.
65
professions, domiciles et résidences des futurs époux, ainsi que le lieu où
le mariage va être célébré42 ».
A. Sanctions civiles
.
67
L’opposition est le droit par lequel des personnes désignées par la loi
indiquent aux époux et à l’officier d’état civil que le mariage qui va être
célébré est frappé d’un empêchement à mariage.
a. Conditions de l’opposition
Formes de l’opposition
.
68
Cette opposition à mariage doit comporter la signature du ou des
opposants, leur qualité, l’élection de domicile dans le le lieu où le mariage
devra être célébré, les motifs de l’opposition et le texte de loi sur lequel ils
sont fondés43.
L’officier d’état civil doit alors faire mention des actes d’opposition sur le
registre des mariages44.
b. Effets de l’opposition
Nullité relative
.
70
- Le premier : le vice du consentement d’un des époux (article 180 du
Code civil).
Dans ce cas, seul l’époux dont le consentement est vicié – par l’erreur ou
par la violence – peut demander la nullité du mariage.
Il dispose de cinq ans pour exercer l’action à compter du jour du mariage.
L’action est intransmissible aux héritiers.
Cette nullité relative peut être couverte par une confirmation, expresse ou
tacite.
La confirmation est expresse lorsque les époux ou les parents dont le
consentement était requis reconnaissent dans un acte postérieur au mariage
la validité de celui-ci.
La confirmation est tacite lorsque le comportement des époux ou des
parents dont le consentement était requis permet de constater qu’ils
reconnaissent la validité de l’union. C’est notamment le cas lorsqu’ils
.
71
laissent s’écouler cinq années après la célébration sans faire de
réclamation.
Nullité absolue
Il existe sept causes de nullité absolue : cinq portent sur le non-respect des
conditions de fond, deux sont relatives au non-respect des conditions de
forme.
Les cinq causes de nullité liées au non-respect des conditions de fond sont
prévues à l’article 184 du Code civil par renvoi aux textes qui les
contiennent :
- l’impuberté (art. 144)
- l’absence de consentement (art. 146)
- l’absence de l’époux lors du mariage (art. 146-1)
- la bigamie (art. 147)
- l’inceste (art. 161, 162, 163)
Pour tous ces cas, toute personne qui a un intérêt légitime à voir le mariage
annulé peut demander la nullité.
Cependant, afin de limiter les actions en nullité fondées sur un intérêt
purement moral, certains doivent justifier d’un intérêt « né et actuel » (art.
187).
Dès lors, il faut distinguer les personnes qui n’ont pas à justifier de cet
intérêt, et celles qui doivent en justifier.
Peuvent agir sans avoir à justifier d’un tel intérêt : les époux, le conjoint de
la personne qui se marie (dans le cas de la bigamie), les père et mère et les
ascendants et, enfin, le conseil de famille en l’absence d’ascendants.
L’action en nullité absolue se prescrit par trente ans. (art. 184 et 191 du
Code civil)
Toutefois, deux situations entraînent la disparition de la cause de la nullité
absolue :
.
73
- premièrement, le ministère public ne peut plus agir à la mort de l’un des
époux
- deuxièmement, si le mariage comporte un vice de forme et que les époux
jouissent de la possession d’état d’époux depuis la célébration, ils ne
peuvent pas en demander la nullité (art. 196)
b. Effets de la nullité
.
74
concubins sans appliquer les règles de liquidation-partage de la
communauté.
Enfin, au titre des effets patrimoniaux, les donations faites en
considération du mariage sont annulées : le conjoint survivant perd tous les
droits successoraux qu’il aurait pu avoir en cette qualité et doit tout
restituer.
.
75
Le mariage est putatif lorsque les époux ont pu valablement croire qu’ils
étaient mariés, et ce, malgré la cause de nullité qui affecte ce mariage
Fondé sur la croyance des époux, ce mariage est maintenu pour ce qui
concerne le passé, et annulé pour l’avenir.
Pour que le mariage soit considéré comme putatif, il faut que plusieurs
conditions soient remplies. Il faut que les époux se soient unis de bonne
foi, sur la base d’une erreur et n’avoir commis aucune fraude.
La jurisprudence admet l’erreur de fait comme l’erreur de droit : c’est-à-
dire qu’ils ont pu se tromper sur une des causes d’erreur de l’article 180,
ou bien par exemple sur des règles de droit applicable : l’un des époux
ignorait de bonne foi que la bigamie était interdite en France.
Il faut que les époux soient de bonne foi (art. 201), c’est-à-dire qu’ils
devaient ignorer l’erreur au moment du mariage.
Il faut également que l’un des époux - ou les deux - demande au juge de
déclarer le mariage comme putatif.
.
76
Les effets civils produits par le mariage avant la nullité perdurent à l’égard
de l’époux de bonne foi. Ex : l’épouse pourra continuer de porter le nom
du mari.
De même, l’époux de bonne foi pourra bénéficier de la qualité de conjoint
survivant au sens des articles L. 353-1 du Code de la sécurité sociale. A ce
titre, il pourra percevoir une pension de réversion. C’est la raison pour
laquelle de nombreuses caisses de retraite engagent des actions en nullité
de certains mariages.
B. Sanctions pénales
Tous ces devoirs sont complétés par des dispositions qui prévoient une
certaine indépendance des époux. Ainsi, les époux peuvent conclure seuls
des actes ayant pour objet l’entretien de la famille et l’éducation des
enfants.
Ils seront solidaires pour ces dépenses, c’est-à-dire que ls créanciers
pourront demander le paiement de la dette à l’un ou l’autre époux, peu
important quel époux a contracté la dette.
Ils ont le libre choix de leur professions. Ils peuvent librement disposer de
leur patrimoine – sauf s’il s’agit du logement de famille. Ils peuvent
chacun librement gérer leur compte en banque.
.
78
- un régime matrimonial – un contrat de mariage en d’autres termes. Ce
régime matrimonial peut être choisi par les époux. Ce régime matrimonial
organise la répartition du patrimoine entre les époux.
- un régime primaire impératif – qui s’applique à tous les époux, quel que
soit le régime matrimonial choisi. Les époux ne peuvent écarter aucune ds
règles du régime primaire impératif.
Ce régime primaire impératif fournit les règles de base de l’organisation
patrimoniale et familiale.
Nous envisagerons d’abord les effets personnels du mariage (§1) puis les
effets patrimoniaux (§2).
.
79
A. Intimité conjugale : les devoirs de communauté de vie et de fidélité
Vivre ensemble, c’est là l’essence du mariage. Même si, bien sûr, il y a des
exceptions en pratique. Mais, sur le plan des principes, se marier, c’est
vivre ensemble. Il y a donc obligation d’une communauté de toit (a) et
d’une communauté de lit (b).
a. La communauté de toit
L’article 215 alinéa 1er du Code civil énonce que « les époux s’obligent
mutuellement à une communauté de vie ».
L’alinéa 2 dispose que « La résidence de la famille est au lieu qu'ils
choisissent d'un commun accord. »
En d’autres termes, les époux sont censés vivre ensemble dans le même
logement, choisi par leurs soins. Cette communauté de vie implique donc
une communauté de toit.
.
80
Toutefois, l’article 108 du Code civil dispose que :
« Le mari et la femme peuvent avoir un domicile distinct sans qu'il soit pour autant porté
atteinte aux règles relatives à la communauté de la vie.
Toute notification faite à un époux, même séparé de corps, en matière d'état et de capacité des
personnes, doit également être adressée à son conjoint, sous peine de nullité. »
L’article 215 étant d’ordre public, il n’est pas possible d’y déroger dans
une convention entre époux. Une telle convention serait nulle en vertu de
l’article 6 du Code civil.
Néanmoins, lorsque les époux sont séparés, ils peuvent conclure un pacte
parental afin d’organiser l’exercice de l’autorité parentale à l’égard de
leurs enfants, pacte qui peut être ensuite homologué par le juge aux
affaires familiales.
Indirectement, l’homologation d’un tel pacte aboutit à la légitimation
judiciaire de l’organisation de la séparation par les époux.
.
81
b. La communauté de lit
Les époux doivent partager le même toit mais également le même lit. En
effet, le devoir de cohabitation implique le devoir conjugal, c’est-à-dire
l’obligation d’entretenir des relations sexuelles avec son conjoint.
Le refus opposé par un époux peut ainsi constituer une faute au sens de
l’article 242 du Code civil47. Mais, l’absence ou la limitation des relations
sexuelles n’est pas en soi une cause de divorce car elle peut trouver sa
source dans diverses origines48.
Si le refus peut constituer une faute, cause de divorce, cela ne signifie pas
qu’il est possible de contraindre son conjoint à des relations sexuelles.
Autrement dit, un rapport non consenti sera qualifié de viol, même entre
deux époux.
Ainsi, l’article 222-22 du Code pénal précise que « Le viol et les autres agressions
sexuelles sont constitués lorsqu'ils ont été imposés à la victime dans les circonstances prévues par
la présente section, quelle que soit la nature des relations existant entre l'agresseur et sa victime, y
compris s'ils sont unis par les liens du mariage. »
2. Devoir de fidélité
L’article 212 du Code civil prévoit que « Les époux se doivent mutuellement respect,
fidélité, secours, assistance. »
49Cass. Civ. 1Ère, 30 avr. 2014, n° 13-16.649 : fiche TD n° 2, document n°4 + fiche TD n°3, document n°4
.
83
Le devoir de fidélité est un devoir d’ordre public. On ne peut l’écarter dans
une convention.
1. Devoir d’assistance
2. Devoir de respect
Cet ajout a été proposé par Robert Badinter. Le respect est considéré
comme la « base d’une vie de couple harmonieuse et préalable
indispensable à la prévention des violences conjugales 55 ». Mais ce devoir
de respect n’existait-il pas déjà implicitement dans le Code civil ? N’était-
ce pas l’évidence de ne pas frapper ou dénigrer son conjoint ? Un texte
semblait nécessaire et cela ne s’est pas amélioré depuis, ce qui n’est pas
rassurant.
Les effets pécuniaires du mariage sont prévus par les règles du régime
primaire impératif, qui s’appliquent à tous les couples. C’est la base de
règles communes à tous les couples mariés.
.
88
1. Le devoir de secours et la contribution aux charges du mariage
a. Le devoir de secours
Le devoir de secours est affirmé par l’article 212 du Code civil. Il s’agit de
subvenir aux besoins matériels de son époux. Lorsque les époux vivent
ensemble, ce devoir ne se concrétise pas véritablement. Il est en quelque
sorte fondu dans la vie quotidienne.
.
89
La notion de « charges du mariage » n’est pas définie par le Code civil.
C’est la jurisprudence qui lui a donné un contenu progressivement.
Cette notion de « charges du mariage » désigne principalement les
dépenses nécessaires à la famille, comme par exemple le paiement du
loyer de l’habitation principale58.
Mais cette notion de « charges du mariage » recouvre également les
dépenses d’agrément : ainsi est-ce le cas de l’acquisition d’une résidence
secondaire59.
L’article 214 est d’ordre public, les époux ne peuvent y déroger. Mais, ils
peuvent en aménager la répartition dans leur contrat de mariage. A défaut,
l’article précise qu’ « ils y contribuent à proportion de leurs facultés
respectives ».
En cas d’inexécution de son obligation par l’un des époux, l’autre peut
saisir le juge aux affaires familiales pour qu’il détermine la contribution du
conjoint.
Il est possible qu’un des époux contribue aux charges au-delà de son
obligation légale. Tel est le cas pour les époux séparés de biens, lorsque
l’un d’eux participe à l’activité professionnelle de l’autre ou gère le
ménage de telle sorte qu’il lui procure des économies importantes.
Dans ce cas, l’époux qui s’est appauvri peut prétendre à une indemnité sur
le fondement de l’enrichissement injustifié. La solution est différente pour
les époux soumis au régime de communauté car les revenus du travail de
58 Cass. 1Ère civ. 7 nov. 1995, n°92-21276 , Bull. Civ. I ; n° 394, p. 275
59 Cass. 1Ère civ. 20 mai 1981, n°79-17171, Bull. Civ. I, n°176.
.
90
chacun enrichissent la communauté. Ce n’est qu’à l’issue du mariage que
le patrimoine de la communauté sera divisé en deux parts égales.
2. Le logement de famille
Ainsi, « Les époux ne peuvent l'un sans l'autre disposer des droits par
lesquels est assuré le logement de la famille, ni des meubles meublants
dont il est garni. Celui des deux qui n'a pas donné son consentement à
l'acte peut en demander l'annulation : l'action en nullité lui est ouverte
dans l'année à partir du jour où il a eu connaissance de l'acte, sans
pouvoir jamais être intentée plus d'un an après que le régime matrimonial
s'est dissous. »
Ainsi, il est impossible à l’un des époux de vendre, louer, ou constituer une
hypothèque sur le bien qui constitue le logement de famille, sans l’accord
de son conjoint. Et cela, même si l’époux est seul propriétaire du bien qui
constitue le logement de famille.
La même règle s’applique pour les meubles meublants du logement, c’est-
à-dire pour les meubles qui le garnissent.
Le conjoint qui n’a pas donné son consentement à l’acte de vente, bail,
etc.. pourra en demander la nullité dans le délai d’un an à compter du jour
.
91
où il a eu connaissance de cet acte et, au plus tard, un an après la
dissolution du régime matrimonial.
Bien que le mariage fonde une famille dans laquelle les époux ont des
devoirs réciproques, la loi leur garantit des libertés.
Ainsi, l’époux est libre de travailler, d’avoir son propre compte bancaire,
de gérer seul les biens mobiliers, ses propres biens et les besoins de sa
famille.
L’article 223 du Code civil prévoit que « chacun des époux peut librement
exercer une profession, percevoir ses gains et salaires et en disposer après
s’être acquitté des charges du mariage ».
Ainsi, l’épouse a vu consacrées son indépendance professionnelle et
financière.
La loi du 23 décembre 1985 a institué sur ce point une parfaite égalité
entre les deux époux.
.
92
Chacun des époux peut se faire ouvrir, sans le consentement de l'autre, tout
compte de dépôt et tout compte de titres en son nom personnel : « Chacun
des époux peut se faire ouvrir, sans le consentement de l'autre, tout compte de dépôt et tout compte
de titres en son nom personnel. »
L’alinéa 2 poursuit : « A l'égard du dépositaire, le déposant est toujours réputé, même après
la dissolution du mariage, avoir la libre disposition des fonds et des titres en dépôt. »
Cela signifie que le banquier n’a pas à demander à son client l’origine des
fonds pour s’assurer que ce dernier a bien le pouvoir d’en disposer 60. Sauf
cas de fraude, le banquier se trouve exempté de toute responsabilité envers
le conjoint de son client au cas où celui-ci déposerait des fonds qui ne
seraient pas à lui mais à l’autre époux.
2. L’indépendance de gestion
Chaque époux peut gérer, seul, les meubles, ses biens personnels et les
affaires ménagères.
a. Les meubles
Cela signifie que l’un des époux peut passer seul des actes sur les biens
meubles : il peut les vendre, les louer etc. même s’il n’en est pas le
propriétaire. C’est en raison de la présomption suivant laquelle « En fait de
meubles, la possession vaut titre ».
Le tiers de bonne foi qui contracte avec l’époux peut se fier à l’apparence
suivant laquelle l’époux a le pouvoir de passer un tel acte.
.
94
b. Biens personnels
c. L’indépendance ménagère
Chaque époux peut donc passer des contrats pour la vie courante de la
famille. Ce sont des dettes qui sont nécessaires à la vie de la famille :
électricité, chauffage, vêtements, frais de scolarité, hospitalisation…
En revanche, en sont exclues : les dépenses de loisirs dès lors qu’elles ont
un caractère anormal par rapport au train de vie du ménage, et les
opérations d’investissement.
.
95
Pour ces dépenses, les époux sont solidaires. Cela signifie que le créancier
peut poursuivre chacun des époux indifféremment pour se faire payer
l’intégralité de sa créance.
Toutefois il existe des exceptions à cette solidarité, qui sont envisagées aux
alinéas 2 et 3 de l’article 220 :
- al. 2 : « La solidarité n'a pas lieu, néanmoins, pour des dépenses manifestement excessives, eu
égard au train de vie du ménage, à l'utilité ou à l'inutilité de l'opération, à la bonne ou mauvaise foi
du tiers contractant. »
- al. 3 : « Elle n'a pas lieu non plus, s'ils n'ont été conclus du consentement des deux époux, pour
les achats à tempérament ni pour les emprunts à moins que ces derniers ne portent sur des sommes
modestes nécessaires aux besoins de la vie courante et que le montant cumulé de ces sommes, en
cas de pluralité d'emprunts, ne soit pas manifestement excessif eu égard au train de vie du
ménage. »
Pas de solidarité non plus pour les achats à tempérament : c’est-à-dire pour
les achats dont le paiement est échelonné dans le temps.
.
96
Mais cet alinéa 3 contient également une exception à l’exception, et donc
retour au principe. L’alinéa 3 nous dit : « s'ils n'ont été conclus du consentement des
deux époux »
Trois articles du Code civil prévoient des mesures pour trouver des
solutions dans les situations de crise que peut connaître la famille : art.
217, 219 et 220-1.
Ce pouvoir est plus important que celui conféré à l’article 217. Dans
l’article 217, il s’agit de passer outre une règle de cogestion. Dans l’article
219, l’époux se substitue à son conjoint.
.
98
Chapitre II - La désunion du couple marié : le divorce
Il faut distinguer entre les cas de divorces consentis (§1) et les divorces
subis (§2).
.
99
§1 Les divorces consentis
Deux de ces divorces sont fondés sur le consentement mutuel des deux
époux : le divorce par consentement mutuel sans juge (A) et le divorce par
consentement mutuel judiciaire (B) .
Le divorce accepté (C) repose sur un accord des époux sur le principe du
divorce mais pas sur les conséquences du divorce. Le juge arbitrera entre
les propositions de chacun des époux.
Le nouvel article 229 du Code civil dispose que « Les époux peuvent
consentir mutuellement à leur divorce par acte sous signature privée
contresigné par avocats, déposé au rang des minutes d'un notaire. »
Les articles 229-1 et suivants régissent ensuite les modalités de ce divorce.
.
100
Le Conseil constitutionnel a été saisi de la constitutionnalité de cette loi et
l’a déclarée conforme à la Constitution61.
.
102
juge dans les conditions prévues à l’article 388-1 et, surtout, qu’ils ne
souhaitent pas utiliser cette faculté d’être entendu par le juge
.
103
« L'acte sous signature privée contresigné par les avocats de chacune des parties ou par
l'avocat de toutes les parties fait foi de l'écriture et de la signature des parties, tant à leur
égard qu'à celui de leurs héritiers ou ayants cause.
La procédure de faux prévue par le code de procédure civile lui est applicable.
Cet acte est dispensé de toute mention manuscrite exigée par la loi. »
- Acte sous seing privé : l’acte sous seing privé est acte écrit rédigé par un
ou plusieurs particuliers et comportant la signature des parties. Par
exemple : contrat de bail, constat amiable suite à un accrochage de voiture.
L’acte sous seing privé fait foi entre les parties qui l’ont signé, et à l’égard
de leurs héritiers et ayant cause. Il peut être facilement contestable : en
effet, la personne à qui on l’oppose peut désavouer son écriture ou sa
signature.
L’Acte d'Avocat est donc un nouvel outil juridique souple qui peut être
utilisé dans toutes les situations dans lesquelles le recours à l'acte
authentique n’est pas obligatoire. Il allie souplesse et sécurité juridique,
une sécurité juridique que les actes sous seing privé ne garantissent pas.
Mais cet acte d’avocat ne suffit pas. Il faut encore l’enregistrer chez le
notaire
.
105
L’acte sous signature privée contresigné par avocat fait foi de l’écriture et
de la signature des parties. Mais il n’a pas date certaine. Cela signifie que
l’on pourrait encore en contester la date.
Il convient donc d’enregistrer cet acte au rang des minutes d’un notaire :
article 229-1 alinéa 2.
Le notaire doit seulement vérifier que le projet de convention n’a pas été
signé avant l’expiration du délai de réflexion prévu à l’article 229-4 du
Code civil (15 jours de réflexion à compter de la réception de la
convention).
Puis il procède à l’enregistrement de la convention. C’est à cette date que
l’acte acquiert date certaine.
.
106
Présence d’enfants mineurs issus du couple
Auparavant, le juge vérifiait que l’enfant allait pouvoir voir ses deux
parents régulièrement, que le montant de la pension alimentaire était
raisonnable et justifié… En d’autres termes, le juge vérifiait que l’intérêt
de l’enfant était protégé.
.
107
Ainsi, l’article 229-2 dispose que : « Les époux ne peuvent consentir
mutuellement à leur divorce par acte sous signature privée contresigné
par avocats lorsque :
1° Le mineur, informé par ses parents de son droit à être entendu par le
juge dans les conditions prévues à l’article 388-1, demande son audition
par le juge [...] »
L’enfant doit être informé qu’il peut être entendu par le juge. Pour s’en
assurer, il faut que l’enfant remplisse un formulaire attestant qu’il a été
informé de cette faculté d’être entendu par le juge et qu’il y renonce.
Ce choix politique est particulier. Dans d’autres Etats, le choix a été fait de
n’ouvrir le divorce extra-judiciaire aux seuls couples sans enfants 62. L’idée
est qu’un juge semble garantir davantage la protection de l’intérêt de
l’enfant. Mais ce n’est pas le choix du législateur français qui a souhaité
ouvrir la possibilité d’un divorce au plus grand nombre.
62 H. Fulchiron, « L’enfant dans le divorce sans juge », Dr. Fam. 2016, dossier 28.
.
108
Les effets du divorce entre les époux
Mais il convient alors que l’inscription du divorce sur l’acte d’état civil
soit réalisé au plus vite, pour éviter une période de transition incertaine.
.
109
B. Le divorce par consentement mutuel judiciaire
1. Conditions et procédures
Le divorce par consentement mutuel repose sur une concorde entre époux.
Il suppose, on l’a dit, un accord complet des époux : sur le principe du
divorce (ils veulent tous les deux divorcer) et sur les effets du divorce (la
répartition du patrimoine, le montant de la prestation compensatoire, la
résidence des enfants etc).
a. La requête en divorce
.
110
La demande en divorce par consentement mutuel est présentée au juge aux
affaires familiales par requête. Cette requête est l’acte introductif
d’instance. Elle est déposée au greffe du juge aux affaires familiales par le
ou les avocats des époux. Car dans la procédure judiciaire de divorce par
consentement mutuel, il est possible de recourir à un seul avocat commun
aux deux époux.
b. L’homologation de la convention
65 Pour quels motifs peut-il refuser ? Par exemple lorsque la résidence alternée des enfants est irréalisable, notamment
pour des raisons d’éloignement géographique. Ou encore la convention qui dispenserait un parent de toute
contribution à l’entretien ou à l’éducation de l’enfant. Ou encore, de l’époux qui abandonnerait de nombreux droits
à l’autre.
66 Art 232 du Code civil
.
112
La spécificité des divorces par consentement mutuel est que les effets du
divorce sont régis par la convention de divorce.
A défaut d’avoir prévu une date, l’article 262-1 du Code civil prévoit que
les effets interviendront à la date de l’homologation de la convention
réglant l’ensemble des conséquences du divorce.
C. Le divorce accepté
Le « divorce accepté » est le cas de divorce dans lequel les époux sont
d’accord sur le principe mais pas sur les effets du divorce. C’est la raison
pour laquelle il est classé parmi les divorces contentieux et non gracieux.
.
113
Le juge intervient pour trancher des désaccords, non pour entériner un
accord.
En vertu de l’article 233 alinéa 1er du Code civil, « le divorce peut être
demandé conjointement par les époux lorsqu’ils acceptent le principe de
la rupture du mariage sans considération des faits à l’origine de celle-ci »
Cela signifie que l’on ne prend pas en compte les raisons du divorce. Il
suffit que les époux souhaitent divorcer, peu en importe la raison.
.
114
Enfin à l’alinéa 4 : « L'acceptation n'est pas susceptible de rétractation,
même par la voie de l'appel. » Ici c’est l’importance du consentement qui
est signifiée : si l’on accepte le principe du consentement, on ne peut le
rétracter. Sauf évidemment, en cas de vice du consentement ou en cas
d’incapacité.
.
115
§2 Les divorces subis
Une fois étudiés les divorces consensuels, il reste encore deux cas de
divorces à envisager. Ce sont deux cas de divorces contentieux : le divorce
pour faute bien sûr et le divorce pour altération définitive du lien conjugal.
Avant 1975, le divorce pour faute était le seul cas de divorce ouvert.
Aujourd’hui, il subsiste toujours. Il est régi par les articles 242 et suivants
du Code civil.
Désormais, le divorce pour faute est choisi par l’un des époux lorsqu’il
souhaite que l’autre époux soit reconnu comme « coupable » de la fin de
leur union. En d’autres termes, c’est pour des raisons psychologiques qu’il
choisit le divorce pour faute.
.
116
Voyons en les conditions (1) puis les possibilités de réconciliation (2).
1. Conditions
Ainsi, la faute est constituée par la violation d’un ou plusieurs des devoirs
conjugaux.
La faute peut être prouvée par tout moyen. Mais la limite est que la preuve
ne doit pas être obtenu de façon illicite (vol par exemple) ou portant
atteinte au respect de la vie privée67.
67Cass. Civ. 1 ère , 17 juin 2009, n°07-21796 : Dans cet arrêt, la preuve de l’infidélité était rapportée par des sms. Mais
ces sms avaient été récupérés par fraude ou violence, ce qui rend le moyen de preuve irrecevable.
.
117
alternative : grave ou renouvelée, soit l’un soit l’autre. Grave, cela suffit.
Renouvelée, cela suffit.
Car il ne suffit pas que la violation soit grave ou renouvelée, il faut encore
qu’elle rende intolérable le maintien de la vie commune.
68 Cass. 1Ère civ. 15 avr. 2015, n°13-27898, Dr. Fam. 2015, comm. 114, note J.-R. Binet
69 CA Bordeaux, 6e ch. 7 juin 1994, Juris-Data n°1994-0403646
70 CA Nîmes, 2e ch. Sect. C, 21 mars 2007, RG n°05/03638, Juris-Data n°2007-332022 : « en l’état des mœurs et des
moyens de contraception existant dans la société française contemporaine, la conception d’un enfant par un couple
marié doit relever d’un choix conjoint et d’un projet commun » dès lors, « la conception d’un enfant à l’insu du
mari [ …] constitue de la part de l’épouse un manquement au devoir de loyauté que se doivent les époux, le mari
étant de surcroît réduit au simple rôle de géniteur. Ce fait constitue une violation grave des devoirs du mariage et
rend intolérable le maintien de la vie commune ».
71 CA Amiens, 27 juin 2013, n°12/02114 : Juris-Data n°2013-013500
.
118
b. Une violation des devoirs du mariage qui rend intolérable le maintien de
la vie commune
2. La réconciliation
72 Cass. 1Ère civ. 11 janv. 2005, Dr. Fam. 2005, 53, note V. Larribau-Terneyre ; Cass. 1Ère civ. 6 juill. 2005, n°04-
10081
.
119
Code civil précise que « Le maintien ou la reprise temporaire de la vie
commune ne sont pas considérés comme une réconciliation s'ils ne
résultent que de la nécessité ou d'un effort de conciliation ou des besoins
de l'éducation des enfants. » En d’autres termes, si la réconciliation est en
quelque sorte forcée, il ne s’agit pas d’une véritable réconciliation.
.
120
Le divorce pour altération définitive du lien conjugal est régi par les
articles 237 et suivants du Code civil. Avant la réforme de 2004, il
s’agissait du « divorce pour rupture de la vie commune ».
L’article 237 dispose que « le divorce peut être demandé par l’un des
époux lorsque le lien conjugal est définitivement altéré ». La demande n’a
pas à être conjointe, la volonté d’un seul des deux époux suffit à justifier la
demande en divorce.
Désormais, il suffit donc que le juge constate que les époux sont séparés
depuis un an à la date de la demande en divorce pour qu’il prononce le
divorce pour altération définitive du lien conjugal.
.
121
Ce constat suffit, c’est la raison pour laquelle on dit qu’il s’agit d’un
divorce objectif. Les époux sont séparés depuis un an, cela suffit. Le juge
n’a pas à apprécier les faits ou les sentiments, juste à constater une
séparation effective pendant une certaine durée.
De plus, cette condition d’une séparation durant une année est assez
souple. En effet, le juge ne peut pas relever d’office le fait que le délai
d’un an n’a pas été respecté73. Cela signifie que si le juge se rend compte
que les époux sont séparés depuis moins d’un an et que l’avocat de l’un
des époux ne le fait pas remarquer, le juge ne peut le faire remarquer non
plus. Il prononcera le divorce malgré tout.
Par ailleurs, il peut se présenter le cas où l’un des époux fait une demande
en divorce pour faute et que l’autre époux présente une demande
reconventionnelle en divorce pour altération définitive du lien conjugal.
Si le juge rejette la demande en divorce pour faute, il devra statuer sur la
demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal. Et, dans
cette hypothèse, le juge ne regardera pas nécessairement si la condition de
délai est respectée.
Dès lors, le divorce pour altération du lien conjugal pourra être imposé à
l’époux quitté. Cela a suscité des interrogations relatives à la conformité
du droit de l’époux défendeur de mener une vie familiale normale, garanti
par l’article 8 de la CEDH.
Dans l’ensemble, ces divorces produisent les mêmes effets : des effets
patrimoniaux et des effets personnels. Mais, parmi eux, il y a quelques
spécificités encore selon les cas de divorce.
74 Cass. 1Ère civ. 15 avr. 2015, n°13-27898, Dr. Fam. 2015, comm. 114, note J.-R. Binet ; V. Egéa, Dr. Fam. 2015,
chron. 3, spéc. n°16-17
.
123
Section 2 Les effets du divorce
A. Effets personnels
Dans les rapports personnels entre époux, le divorce met fin au mariage
dès que la convention de divorce acquiert force exécutoire ou que la
.
124
décision de divorce est passée en force de chose jugée (Art. 260 du Code
civil).
Entre époux, le divorce met fin à tous les devoirs, droits et obligations
réciproques. Après le divorce, chacun des époux retrouve sa liberté : il n’y
a plus de devoir de fidélité, ni de devoir d’assistance ou de respect.
.
125
l’accord de ce dernier. Ou encore si le juge l’y autorise à condition que
l’époux ait justifié d’un intérêt particulier pour lui ou pour ses enfants à
conserver le nom.
Chacun des parents conserve l’autorité parentale sur les enfants du couple.
Ils doivent décider ensemble en tant que parents pour tout ce qui concerne
les enfants.
La résidence des enfants sera fixée chez l’un ou l’autre des parents. Le
juge favorisera la résidence alternée pour s’assurer que les enfants voient
leurs deux parents régulièrement.
.
126
Mais le divorce ne produit pas que des effets personnels, il produit
également des effets patrimoniaux.
B. Effets patrimoniaux
La date des effets patrimoniaux est différente selon qu’il est question des
rapports entre les époux ou des relations entre ces derniers et les tiers.
En ce qui concerne les relations entre les époux quant à leurs biens, le
point de départ des effets du divorce n’est pas le même selon le cas de
divorce. Il faut distinguer le divorce par consentement mutuel des autres
cas de divorce.
.
127
Pour un divorce par consentement mutuel judiciaire, ce sera la date
de l’homologation de la convention par le juge.
Mais les époux peuvent décider d’une date à laquelle le divorce produira
ses effets. Ils peuvent décider que le divorce doit produire ses effets à la
date de la requête conjointe, donc de façon anticipée.
C’est ainsi que les créanciers sont informés du divorce de leur débiteur par
exemple.
.
128
2. Le contenu des effets patrimoniaux
Avec le divorce, les époux ne sont plus mariés. Dès lors, ils ne seront pas
« conjoint survivant » en cas de décès de l’autre, ils n’ont donc plus de
vocations successorale.
.
129
Pour ce qui est des donations, il faut distinguer entre les donations de biens
présents et les donations de biens à venir.
Pour les donations de biens présents, c’est-à-dire celles qui concernent les
biens dont le donateur disposait au moment de la libéralité, elles ne sont
pas remises en cause par le divorce.
Pour les donations de biens à venir, c’est-à-dire celles qui portent sur des
biens dont le donateur n’a pas encore la propriété, sont révoqués de plein
droit (=automatiquement) par le divorce.
En effet, les époux n’ont pas les mêmes revenus, le même patrimoine, etc.
Le divorce peut entraîner une baisse du niveau de vie pour l’un des époux.
C’est la raison pour laquelle le législateur a institué la prestation
.
130
compensatoire en 1975. Cette prestation compensatoire vise à rééquilibrer
pécuniairement la différence de niveau de vie qui est susceptible d’exister
entre les deux ex-époux après le divorce. Dans les termes de la loi, suivant
l’article 270 du Code civil, « L'un des époux peut être tenu de verser à
l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la
disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie
respectives ».
Cette disparité des niveaux de vie doit être la conséquence du divorce et
non pas d’autres événements75.
Le principe est que la prestation compensatoire peut être versée, quel que
soit le cas de divorce choisi.
75 Cass. 1Ère civ. 24 sept. 2014, n°13-20.695, Fiche TD n°4, document n°1
76 Art. 1076-1 du Code de procédure civile
.
131
Pour autant, elle est très pratiquée, et rares sont les divorces dans lesquels
une prestation compensatoire n’est pas demandée.
- la durée du mariage ;
- l'âge et l'état de santé des époux ;
- leur qualification et leur situation professionnelles ;
77 Cass. 1Ère civ. 8 juill. 2010, n°09-66186, Fiche TD n°4, document n°2
.
132
- les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux
pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il
faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au
détriment de la sienne ;
- le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en
revenu, après la liquidation du régime matrimonial ;
- leurs droits existants et prévisibles ;
- leur situation respective en matière de pensions de retraite en ayant
estimé, autant qu'il est possible, la diminution des droits à retraite qui
aura pu être causée, pour l'époux créancier de la prestation
compensatoire, par les circonstances visées au sixième alinéa. »
Chacun des époux va remplir une déclaration sur l’honneur et qui expose,
leurs ressources, revenus, patrimoine et conditions de vie (art. 272).
a. Données pécuniaires
.
133
fonder principalement sur les données pécuniaires pour évaluer le montant
de la prestation.
.
134
D’autres éléments qui ne sont pas purement de nature économique sont
pris en considération par le juge :
- la durée du mariage : le montant de la prestation compensatoire sera
moins élevé si le mariage a été de courte durée
- la santé des époux
- leur âge (et donc la possibilité de trouver/retrouver un emploi par
exemple)
- le choix professionnel qu’a fait l’un des époux pour élever les enfants :
en ce cas, l’époux qui a arrêté de travailler pendant de nombreuses années
ne retrouvera pas nécessairement un emploi rapidement et le montant de la
prestation compensatoire sera plus élevé en ce cas.
A quel moment doit-on évaluer la disparité des conditions de vie entre les
époux ?
L’article 271 prévoit dans son alinéa 1er que « la prestation compensatoire
est fixée […] en tenant compte de la situation au moment du divorce et de
l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ».
.
135
exemple si l’époux qui ne travaillait plus est susceptible de trouver un
emploi rapidement.
A l’inverse, le juge doit envisager si la situation du conjoint créancier ne
risque pas de s’aggraver (fin de droits de chômage, etc.)
La tâche du juge est donc très délicate. Il doit anticiper des modifications
futures dans les conditions de vie de chaque époux alors qu’il ne dispose
pas toujours des informations nécessaires pour réaliser cette projection
dans l’avenir.
Dans le divorce par consentement mutuel, ce sont les époux qui fixent le
montant de la prestation compensatoire dans la convention de divorce.
.
136
d’un capital ou d’une rente, ou encore avoir une nature mixte (rente et
capital).
La loi du 26 mai 2004 a voulu pacifier le divorce. Elle a fait en sorte que
les effets du divorce soient tous réglés en une fois. C’est la raison pour
laquelle la loi du 26 mai de 2004 a affirmé le principe du versement en
.
137
capital de la prestation compensatoire (a). En d’autres termes, le principe
est de verser la prestation compensatoire en une seule fois.
Le pouvoir du juge est donc très important puisqu’il décide librement quel
bien peut être attribué en propriété à l’autre époux.
.
138
Néanmoins, pour éviter les abus, la loi prévoit une limite au pouvoir du
juge. Ainsi, en ce qui concerne les biens reçus par donation ou succession
par l’époux, le juge doit recueillir le consentement de l’époux débiteur
pour pouvoir les attribuer à l’autre époux au titre de la prestation
compensatoire. Il semblerait que la nature familiale de ces biens justifie
une telle contrainte.
L’article 275 du Code civil prévoit qu’il est possible d’autoriser l’époux
débiteur de la prestation compensatoire a verser la prestation sous forme
de versements périodiques.
79 Cass. 1Ère cv. 28 mai 2014, n°13-15.760, Dr. Fam. Juill.- août 2014, comm. 107, note J.-R. Binet, Fiche TD n°4,
Document n°4
.
140
Afin de limiter dans le temps les effets du divorce, ces versements ne
peuvent se faire que dans la limite de 8 années consécutives.
.
141
Ainsi, l’alinéa 1er de l’article 276 prévoit que « A titre exceptionnel, le juge
peut, par décision spécialement motivée, lorsque l'âge ou l'état de santé du
créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins, fixer la prestation
compensatoire sous forme de rente viagère. Il prend en considération les
éléments d'appréciation prévus à l'article 271 ».
Il faut donc que l’âge ou l’état de santé du créancier justifie une telle
modalité de versement de la prestation compensatoire. En effet, viager
signifie que les versements s’effectueront jusqu’au décès du créancier.
Mais cette modalité est très rarement accordée par les juges aux affaires
familiales. Elle est, en effet, trop importante et le juge préférera fixer un
montant plus élevé de prestation compensatoire que de faire durer les
effets du divorce de façon indéterminée dans le temps.
.
142
A. Les dommages et intérêts de l’article 266 du Code civil
L’article 266 prévoit que « des dommages et intérêts peuvent être accordés
à un époux en réparation des conséquences d'une particulière gravité qu'il
subit du fait de la dissolution du mariage soit lorsqu'il était défendeur à un
divorce prononcé pour altération définitive du lien conjugal et qu'il n'avait
lui-même formé aucune demande en divorce, soit lorsque le divorce est
prononcé aux torts exclusifs de son conjoint ».
.
143
Ces dommages et intérêts peuvent s’ajouter à l’attribution d’une prestation
compensatoire.
Dans ce cas, il ne faut pas que ce soit le divorce qui soit à l’origine du
préjudice subi. Sinon, on tombe dans le champ d’application de l’article
266.
Pour cela, les conditions de l’article 1240 doivent être réunies : une faute,
un dommage et un lien de causalité entre les deux.
.
144
Maintenant que nous avons envisagé les cas de divorces et les effets de ce
divorce, nous allons pouvoir passer à l’étude des autres modes de
conjugalité que le mariage.
.
145
TITRE II - LE PACS ET LE CONCUBINAGE
Chapitre 1 Le Pacs
.
146
tout. C’est une sorte de contrat spécial finalement. Un contrat qui a pour
objet l’organisation de la vie d’un couple, hétérosexuel ou homosexuel,
sans être pour autant un mariage.
Le Pacs est un contrat donc il doit répondre aux conditions de tout contrat
de droit commun (A). Il doit également répondre à des conditions
spécifiques (B).
80 Ph. Simler et P. Hilt
.
147
A. Conditions de droit commun
Certaines conditions sont spécifiques au Pacs. Ainsi, les articles 461 et 462
du Code civil prévoient les conditions auxquelles les majeurs sous tutelle
ou sous curatelle peuvent conclure une telle convention.
Par exemple, la personne sous tutelle est accompagnée de son tuteur pour
la signature du pacs.
.
149
Toujours en se référant au mariage, la loi impose la monogamie dans le
Pacs. Ainsi, il n’est pas possible de se pacser si l’on est déjà engagé dans
un pacs ou dans un mariage.
Néanmoins, une personne qui a conclu un pacs peut se marier. Soit avec
son partenaire soit avec un tiers. Ce qui met fin automatiquement au pacs,
nous le verrons plus tard.
Maintenant que nous avons envisagé les conditions de fond du Pacs, il faut
envisager ses conditions de forme.
Ce sont ici les articles 515-3 et 515-3-1 qui précisent les conditions de
forme du Pacs. Le Pacs nécessite un écrit (A) qui doit être enregistré (B).
A. Rédaction du pacte
1. Une convention
En vertu de l’article 515-3 du Code civil, les parties doivent rédiger une
convention de Pacs.
.
150
Celle-ci peut être passée sous la forme d’un acte sous seing privé, d’un
acte sous signature privée contresignée par un avocat, ou encore d’un acte
authentique.
B. Enregistrement du pacte
.
151
La formation du pacs ne donne pas lieu à une véritable cérémonie, à la
différence du mariage. Il s’agit ici seulement d’un enregistrement par
l’officier d’état civil.
L’officier d’état civil vérifie que les conditions de conclusion du Pacs sont
réunies. Il enregistre la déclaration des partenaires et fait procéder aux
formalités de publicité.
Il est ensuite adressé un avis aux officiers d’état civil des lieux de
naissance des partenaires afin qu’ils fassent mention du pacs en marge des
actes de naissance des partenaires.
En effet, la publicité du Pacs se fait sur les actes de naissance, tout comme
pour le mariage. Cette formalité est récente puisqu’elle a été introduite par
la loi du 23 juin 2006.
Comme tout contrat, le pacs peut être modifié en cours de vie commune.
.
152
Section 2 Les effets
Le Pacs a pour objet d’organiser la vie des partenaires. Il produit des effets
personnels (§1), pécuniaires (§2) et patrimoniaux (§3).
Il existe un lien juridique entre les partenaires qui forment un couple. Dès
lors, le pacs produit certains effets personnels.
L’article 515-4 alinéa 1er dispose que « les partenaires liés par un pacte
civil de solidarité s’engagent à une vie commune, ainsi qu’à une aide
matérielle et une assistance réciproques ».
Les partenaires ont une obligation de vie commune. Celle-ci a fait l’objet
d’une définition par le Conseil constitutionnel dans sa décision de 1999.
82 Cass. 1Ère civ. 8 mars 2017, n°16-18685, Fiche TD n° 5, doc. N° 3 ; A. Gouëzel, « Le Pacs sans couple, une
hérésie », D. 2017, p. 2038.
.
153
la Cour de cassation a validé un pacs entre deux personnes de 44 ans de
différence d’âge, qui estimaient avoir un lien de père et fils l’un avec
l’autre. Autrement dit, le pacs se mue ici en un simple contrat de
cohabitation là où il est censé être un contrat d’union conjugale.
83 TGI Lille, réf. 5 juin 2002, Dr. Fam. 2003, comm. 57, note Beignier ; D. 2003, 515, note X. Labbée ; RTDCiv.
2003, 270, obs. Hauser, Fiche TD n°5, doc. n°2
84 CA Montpellier, 4 janv. 2011, Dr. Fam. 2011, comm 89, note V. Larribau-Terneyre ; CA Rennes, 5 mai 2015, Dr.
Fam. 2015, comm. 140, note J.-R. Binet
.
154
Les effets pécuniaires du Pacs sont proches de certains effets du mariage.
L’article 515-4 du Code civil impose aux partenaires une aide matérielle
réciproque qui est proportionnelle aux facultés respectives des partenaires
à moins qu’ils n’en disposent autrement dans leur convention.
Cet article impose une solidarité entre partenaires pour certaines dettes :
« les dettes contractées par l'un d'eux pour les besoins de la vie
courante ». La solidarité ménagère des partenaires a donc un champ
d’application plus large que la solidarité des époux qui se limite aux dettes
relatives à l’entretien du ménage et à l’éducation des enfants. Autrement
dit, la notion de dettes pour les besoins de la vie courante est plus large que
.
155
celle de dettes relatives à l’entretien du ménage ou à l’éducation des
enfants.
Les exceptions à cette solidarité ménagère des époux sont les mêmes que
celles pour la solidarité ménagère des époux.
Le Pacs produit des effets pécuniaires mais aussi des effets patrimoniaux.
.
156
En cas de rupture, ils récupèrent la moitié de la valeur de ces biens.
Mais la liquidation de l’indivision est complexe et source de contentieux.
En tous les cas, les partenaires peuvent choisir une autre organisation de
leur patrimoine dans leur convention de pacs.
.
157
Seuls certains biens ne seront alors pas soumis à l’indivision : art 515-5-2,
par exemple, les biens à caractère personnel, les biens acquis par
succession, etc...
La dissolution du pacs est possible dans 4 cas prévus par la loi. Cette
dissolution est beaucoup moins contraignante que la dissolution du
mariage. (§1)
Cette dissolution entraîne des effets, qui sont prévus par la loi (à la
différence du concubinage par exemple) (§2).
Ces cas peuvent être regroupés en deux catégories : les cas de dissolution
volontaire (A) (dépendant soit de la volonté d’un partenaire soit des deux),
et les cas de dissolution due à un évènement extérieur (B).
.
158
A. La rupture volontaire
1. La rupture conjointe
2. La rupture unilatérale
La rupture peut également être unilatérale (art. 515-7 al. 3). Dans ce cas,
l’auteur de la rupture doit la signifier à son partenaire : par lettre
recommandée avec accusé de réception par exemple.
.
159
Il s’agit là d’une rupture décidée par un seul des partenaires, ce qui marque
bien la nature contractuelle du pacs. Il n’est pas possible de sortir aussi
simplement d’un mariage : il faut toujours divorcer, et donc au moins
recourir aux services d’un avocat ou se présenter devant le juge.
La rupture du pacs est tout de même plus encadrée que celle du
concubinage, puisque le pacs est un contrat auquel il faut mettre fin là où
le concubinage n’est qu’une situation de fait.
Puis ils font procéder aux formalités de publicité : il est fait mention en
marge de l’acte d’état civil des partenaires de la rupture du pacs
B. Décès ou mariage
.
160
Le pacte peut également prendre fin au décès ou au mariage de l’un des
partenaires (art. 515-7 al. 1).
1. Le mariage
Le Pacs est dissous au jour du mariage. L’officier d’état civil qui est chargé
d’inscrire la mention du mariage sur l’acte d’état civil du partenaire ou des
partenaires en informe immédiatement l’officier d’état civil du lieu
d’enregistrement du pacs ou le notaire qui a enregistré le pacs.
Cet officier d’état civil ou ce notaire enregistre la dissolution et en informe
les deux partenaires.
2. Le décès
.
161
Comme tout contrat conclu intuitu personae, le pacs prend fin avec le
décès de l’un des partenaires.
L’officier d’état civil qui est chargé d’inscrire la mention du décès sur
l’acte d’état civil du partenaire ou des partenaires en informe
immédiatement l’officier d’état civil du lieu d’enregistrement du pacs ou le
notaire qui a enregistré le pacs.
Cet officier d’état civil ou ce notaire enregistre la dissolution et en informe
le partenaire survivant.
Une fois envisagés les cas de dissolution, il faut encore en observer les
effets.
§2 Effets de la dissolution
B. Dommages et intérêts
L’article 515-7 al. 10 du Code civil prévoit que « A défaut d'accord, le
juge statue sur les conséquences patrimoniales de la rupture, sans
préjudice de la réparation du dommage éventuellement subi. »
C. Succession
.
164
Une fois envisagées les modalités et les effets du pacs, il convient
d’étudier la dernière forme d’union connue du droit français : l’union libre
ou concubinage.
Chapitre 2 Le concubinage
Après en avoir étudié les conditions (Section 1), nous verrons les effets
que cette situation de fait produit (Section 2) ainsi que la dissolution du
concubinage (Section 3).
.
165
Section 1 Les conditions du concubinage
L’article 515-8 du Code civil dispose que « le concubinage est une union
de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de
stabilité et de continuité entre deux personnes, de sexe différent ou de
même sexe, qui vivent en couple ».
Le concubinage est donc une « union de fait ». Cela signifie qu’il crée un
lien de fait entre les deux concubins, et non un lien de droit (comme le
mariage ou le pacs).
.
166
reconnaissait pas le concubinage homosexuel86. La loi a ainsi brisé la
jurisprudence.
Cette communauté de vie entre les concubins est sans doute l’élément
fondateur du concubinage car il s’agit là de l’imitation du mariage.
Puisqu’il s’agit d’un fait juridique, et non d’un acte juridique, la preuve du
concubinage est libre.
Cela signifie que l’on peut prouver le concubinage avec des factures
d’électricité, la mention des deux noms sur le bail locatif, sur les avis
d’imposition, etc.
Mais, pour autant, cette preuve n’est pas toujours facile à rapporter.
C’est la raison pour laquelle il est possible de faire établir par les mairie ou
commissariat un « certificat de concubinage ».
La délivrance de ce document est soumis à deux conditions : d’une part, il
faut que les concubins résident à la même adresse ; d’autre part, il faut que
deux témoins, sans lien de parenté entre eux, attestent de l’existence d’un
concubinage.
.
168
Si cette relation de concubinage est une relation de fait, quels effets
produit-elle ? Peut-on contraindre les concubins à certaines obligations ?
Ou sont-ils pleinement libres ?
Pour autant, s’il n’existe aucune règle légale, les concubins peuvent établir
une convention de concubinage dans laquelle ils décideront des droits et
obligations les concernant – dans la limite de l’ordre public évidemment.
.
169
§2. Rapports patrimoniaux
- Chaque concubin est propriétaire des biens qu’il acquiert. Si aucun d’eux
ne parvient à prouver la propriété d’un bien alors ce dernier est présumé
indivis entre les concubins. Si les concubins achètent ensemble un bien,
celui-ci est indivis à moins qu’il n’en soit stipulé autrement dans l’acte
d’acquisition.
.
170
Section 3 La fin du concubinage
Le principe est celui d’une rupture libre (A). Mais cela ne rend pas la
rupture plus simple. Celle-ci peut être conflictuelle. Les conséquences de
la rupture peuvent être délicates à régler (B). Et plus la vie en concubinage
a été longue plus la rupture sera compliquée car il faudra déterminer la
répartition de la propriété des biens, l’organisation de la vie des enfants,
etc. Pour le divorce, il y a une procédure à suivre qui encadre les
difficultés. Ici, la liberté peut se révéler coûteuse.
.
171
- une décision de se pacser ou de se marier
Cette rupture est totalement libre. Aucune forme n’est imposée. On peut
prévenir son concubin de la rupture de la façon que l’on souhaite. Il n’y a
aucun délai à respecter, il n’y a pas besoin d’un avocat, etc.
88 Cass. 1Ère civ, 3 janv. 2006, n°04-11016, inédit, Fiche TD n°5, doc. n°1
.
172
1. Sort des biens acquis durant le concubinage
La vie commune entre les concubins conduit souvent l’un des deux
concubins à collaborer à l’activité professionnelle de l’autre, lui permettant
ainsi de faire fructifier son entreprise.
.
173
participait le plus souvent à titre gratuit à l’activité de l’autre, ne peut
prétendre à rien : ni rémunération en retard, ni parts de société…
Cette société créée de fait est la société créée par des personnes sans s’en
rendre compte.
L’article 1832 du Code civil exige trois conditions pour créer une société :
des apports (c’est-à-dire du capital, des biens, ou du travail), une volonté
des associés de contribuer aux bénéfices et aux pertes, ainsi que l’affectio
societatis, c’est-à-dire la volonté de contribuer ensemble à une entreprise
commune.
Dans le cadre de la société créée de fait, il faut qu’il déceler ces trois
éléments. Cela n’est pas toujours évident. L’intérêt est de permettre aux
personnes concernées d’être reconnues comme associés et donc de
partager les bénéfices et les pertes de la société entre elles.
.
174
En matière de concubinage, le concubin ayant travaillé sans rémunération
pourra faire valoir qu’il a fait un apport en industrie (= un apport en
travail) et tenter de recouvrer une somme équivalente à la rémunération
qu’il aurait dû recevoir.
Ce mécanisme est très intéressant mais il est peu évident d’en remplir les
conditions. En effet, la Cour de cassation est très rigoureuse quant à la
réunion des trois conditions de la société et retient donc peu souvent
l’existence d’une société créée de fait.
b. L’enrichissement injustifié
L’article 1303 du Code civil prévoit que « celui qui bénéficie d’un
enrichissement injustifié au détriment d’autrui doit, à celui qui s’est
appauvri, une indemnité égale à la moindre des deux valeurs de
l’enrichissement et de l’appauvrissement ».
.
175
Or, si le concubin a travaillé afin de bénéficier également de
l’enrichissement, on peut estimer que l’enrichissement est justifié. Ainsi,
l’article 1303-2 du Code civil prévoit que « il n’y a pas lieu à
indemnisation si l’appauvrissement procède d’un acte accompli par
l’appauvri en vue d’un profit personnel ».
.
176
Par conséquent, les concubins doivent anticiper cette situation en ayant
recours à des libéralités, c’est-à-dire à des donations ou à la rédaction d’un
testament instituant le concubin comme héritier.
.
177
PARTIE II – L’ENFANT
C’est en effet l’enfant qui lie les deux parents à jamais, même s’ils se
séparent. Réunissant les patrimoines génétiques des deux parents, c’est
l’enfant qui crée un lien génétique au sein de la famille. Si l’enfant n’est
pas génétiquement celui des deux parents, l’engagement parental auprès de
l’enfant constituera le lien familial.
C’est la raison pour laquelle nous allons l’étudier dans cette seconde partie
du cours.
.
178
Mais, du fait des progrès scientifiques, des techniques de procréation
médicalement assistée se sont développées, tels que la procréation
médicalement assistée avec tiers donneur. Comme son nom l’indique, un
tiers a donné ses gamètes (sperme ou ovules) pour qu’un enfant soit conçu.
Pour autant, le donneur n’est pas reconnu juridiquement comme parent de
l’enfant. Celui qui est reconnu comme le parent est celui qui aura exprimé
sa volonté de devenir parent : le mari, partenaire ou concubin de la mère,
ou bien la femme qui va porter l’enfant conçu avec des ovules d’une autre
femme. Demain, avec l’adoption de la loi de réforme de la bioéthique,
l’épouse, la partenaire ou la concubine de la mère pourra également établir
un lien de filiation avec l’enfant.
Ainsi, la filiation n’est plus liée à la procréation charnelle, elle s’en est
dissociée.
.
179
Il convient donc d’étudier, en premier lieu, l’établissement du lien de
filiation, qui repose principalement sur une conception de la filiation
fondée sur le lien génétique (Chapitre I) puis, en second lieu, nous
envisagerons plus spécifiquement l’étude de la filiation fondée sur la
volonté (chapitre II).
L’article 310-1 dispose que « La filiation est légalement établie, dans les conditions
prévues au chapitre II du présent titre, par l'effet de la loi, par la reconnaissance volontaire ou par
la possession d'état constatée par un acte de notoriété.
Elle peut aussi l'être par jugement dans les conditions prévues au chapitre III du présent titre. »
.
180
Dès lors, il y a trois modes d’établissement principaux : par l’effet de la loi
(§1), par une reconnaissance volontaire (§2), par la possession d’état (§3).
A. Filiation maternelle
Mater semper certa est : il s’agit là d’un adage qui signifie : la mère est
toujours certaine. L’idée est que la femme qui accouche est la mère de
l’enfant. Car si elle porte l’enfant, c’est que l’enfant est génétiquement le
sien.
En effet, les progrès médicaux ont permis qu’une femme bénéficie d’un
don d’ovules ou même d’un don d’embryon. Dans ce cas, l’enfant n’est
pas génétiquement le sien. Mais dans la mesure où elle a porté cet enfant
en son sein, le lien n’est plus strictement génétique, il est toutefois
biologique. Le droit se contente de cette réalité biologique pour conserver
la même règle : la femme qui accouche est la mère de l’enfant.
.
181
Les évolutions sociales ont également malmené ce principe : lorsqu’un
couple de femmes aura accès à la procréation médicalement assistée,
laquelle des deux femmes sera la mère ? Celle qui a accouché de l’enfant
ou celle qui a fourni ses ovules (dans le cas d’une insémination avec les
ovules de celle qui ne porte pas l’enfant) ? C’est toute la question, que
nous envisagerons dans la section consacrée à la procréation médicalement
assistée.
.
182
ensuite ce qui se passe lorsqu’elle n’est pas désignée dans l’acte de
naissance de l’enfant (2).
.
183
Parfois, il arrive que la mère ne souhaite pas donner son identité. Il n’est
alors par fait mention de son nom dans l’acte de naissance.
L’article 316 du Code civil lui permet d’établir sa maternité
ultérieurement, par le biais d’une reconnaissance de maternité.
Toutefois, la loi prévoit que l’enfant peut engager une action en recherche
de maternité en vertu de l’article 325 du Code civil, à la condition toutefois
qu’il n’ait pas été adopté.
.
184
amont (prénom, nom, âge, professions, raisons de l’abandon…). Si
l’enfant effectue des recherches, il pourra avoir accès à ces informations à
la condition que la mère ait donné son accord.
Il s’agit ici pour l’enfant de connaître ses origines, non pas d’établir sa
filiation.
Cette organisation a été validée par le CEDH dans un arrêt Odièvre du 13
février 200389. La Cour a reconnu l’équilibre recherché par le législateur
entre les droits de l’enfant à l’accès à ses origines et la liberté de la mère
de ne pas devenir mère.
De même, le Conseil constitutionnel a estimé que les dispositions de la loi
du 22 janvier 2002 étaient conformes à la Constitution90.
B. Filiation paternelle
1. Conditions de la présomption
89 CEDH, gr. ch. 13 févr. 2003, n°42326/98, Odièvre c. France ; JCP G, II, n°10049, note A. Gouttenoire- Cornut ;
JCP G 2003, I, 120, étude P. Malaurie ; Dr. Fam. 2003, comm. 58, note P. Murat ; chron. 14, note H. Gaumont-
Prat ; RTD Civ. 2003, p. 276, obs. Hauser et p. 375, obs. J.-P. Marguénaud.
En revanche, condamnation de l’Italie en raison de l’absence totale d’accès aux origines : CEDH, 25 sept. 2012,
n°33783/09, Godelli c. Italie
90 Cons. Const. , décision n°2012-248 QPC, 16 mai 2012
.
185
Pater is est quem nuptiae demonstrant = le père est celui que le
mariage désigne. Autrement dit, lorsque les parents sont mariés, le
père est le mari de la mère.
2. Exclusion de la présomption
.
187
a. En cas de procédure de divorce
3. Rétablissement de la présomption
.
188
Ainsi, « Si elle a été écartée en application de l’article 313, la
présomption de paternité se trouve rétablie de plein droit si l'enfant a la
possession d'état à l'égard du mari et s'il n'a pas une filiation paternelle
déjà établie à l'égard d'un tiers. »
Cette action est ouverte pendant les 10 années qui suivent la majorité de la
personne. La preuve pourra se faire par l’expertise biologique.
.
189
§2. Etablissement par la reconnaissance volontaire
Lorsque la filiation n’est pas établie par l’effet de la loi, la filiation peut
être établie par une reconnaissance de paternité ou de maternité.
Ainsi l’article 316 alinéa 1er du Code civil dispose que « Lorsque la
filiation n'est pas établie dans les conditions prévues à la section I du
présent chapitre, elle peut l'être par une reconnaissance de paternité ou de
maternité, faite avant ou après la naissance. ». Il s’agit donc d’un mode
subsidiaire d’établissement de la filiation.
A. Conditions de la reconnaissance
1. Conditions de fond
.
190
La reconnaissance est un acte juridique par lequel une personne déclare de
façon solennelle être l’auteur d’un enfant et, établit ainsi un lien de
filiation avec ce dernier.
2. Conditions de forme
a. L’acte de reconnaissance
L’article 316 alinéa 3 du Code civil prévoit que « Elle est faite dans l'acte
de naissance, par acte reçu par l'officier de l'état civil ou par tout autre
acte authentique. »
.
191
Si la reconnaissance est prénatale, elle sera faite directement auprès de
l’officier d’état civil ou du notaire, puisque par définition l’acte de
naissance n’existe pas encore.
La reconnaissance reçue par l’officier d’état civil est inscrite sur les
registres de l’état civil et mentionnée en marge de l’acte de naissance.
« L'acte de reconnaissance est établi sur déclaration de son auteur, qui justifie :
1° De son identité par un document officiel délivré par une autorité publique comportant son nom,
son prénom, sa date et son lieu de naissance, sa photographie et sa signature ainsi que
l'identification de l'autorité qui a délivré le document, la date et le lieu de délivrance ;
2° De son domicile ou de sa résidence par la production d'une pièce justificative datée de moins de
trois mois. Lorsqu'il n'est pas possible d'apporter la preuve d'un domicile ou d'une résidence et
lorsque la loi n'a pas fixé une commune de rattachement, l'auteur fournit une attestation d'élection
de domicile dans les conditions fixées à l'article L. 264-2 du code de l'action sociale et des
familles. »
.
192
c. La lutte contre les reconnaissances mensongères
S’il décide qu’elle ne peut pas être enregistrée, le Procureur fait opposition
à la reconnaissance conformément à l’article 316-2. Dans ce cas, l’auteur
de la reconnaissance devra faire une demande de mainlevée de
l’opposition devant le tribunal judiciaire (ancien Tribunal de Grande
Instance).
B. Effets de la reconnaissance
1. Un effet unilatéral
.
193
La reconnaissance est un acte unilatéral, c’est-à-dire un acte dans lequel
une seule personne s’engage. La reconnaissance ne concerne que celui qui
l’effectue.
L’officier d’état civil informe d’ailleurs le parent qui reconnaît l’enfant de
l’effet unilatéral de son acte, et ainsi du « caractère divisible du lien de
filiation ainsi établi92 ».
2. Un effet irrévocable
Une fois qu’une personne a reconnu un enfant, elle ne peut plus révoquer
son acte. Elle ne peut pas revenir en arrière.
3. Un effet absolu
.
195
La possession d’état va alors servir de preuve de la filiation : si la personne
s’occupe de l’enfant comme s’il s’agissait du sien, c’est bien la preuve
qu’il s’agit de son enfant ! Dès lors, la possession d’état constitue une
présomption simple de filiation. Reste à en déterminer l’existence.
Reprenons les.
.
196
A. Le Tractatus
2° Que ceux-ci ont, en cette qualité, pourvu à son éducation, à son entretien ou à son
installation ; »
B. La fama
.
197
C. Le nomen
=> Ces trois faits constitutifs de la possession d’état peuvent être prouvés
par tout moyen.
Il n’est pas nécessaire que les trois éléments soient réunis ensemble, deux
voire même un peuvent suffire93. Le juge dispose d’un pouvoir
d’appréciation souverain en la matière. C’est-à-dire que c’est lui qui
décidera si la possession d’état – et donc la filiation – sont établies.
Reprenons-les :
- La possession d’état doit être continue : cela signifie que possession
d’état doit s’être déroulée sur une période suffisamment longue pour être
probable et donc probante.
93 Cass. 1Ère civ. 5 juill. 1988, n°86-14 489, D. 1989, 398 : « la réunion de tous les éléments énumérés par l’article
311-2 du Code civil n’est pas nécessaire pour que la possession d’état puisse être considérée comme établie […] ; il
suffit, ainsi que le prévoit l’article 311-1 du même Code, qu’il y ait une réunion suffisante de faits qui indiquent le
rapport de filiation et de parenté entre un individu et la faille à laquelle il est dit appartenir »
.
198
Ni la loi ni la jurisprudence n’ont jamais fixé de durée à la possession
d’état. Tout dépend de l’espèce et l’appréciation est donc laissée aux juges
du fond.
- Elle doit également être paisible : cela signifie que la possession d’état ne
doit pas être viciée par la fraude ou la violence.
Ainsi, pendant une certaine période, il ne doit y avoir aucun acte visant à
empêcher le déroulement d’une vie de famille apparente entre l’enfant et
les personnes qui se comportent comme les parents. Par exemple, il ne
peut y avoir de possession d’état si le présumé parent a enlevé sa fille.
- Elle doit être publique : La possession d’état se matérialise par des actes
et comportements en public. S’ils sont cachés, il ne peut y avoir de
filiation durable.
- Elle doit être non-équivoque : aucun fait ne doit venir démentir le lien qui
unit la personne et la famille à laquelle on censés appartenir.
Pour cela, par exemple, il ne peut y avoir plusieurs possessions d’état en
même temps, en concurrence.
Cet acte contient une déclaration faite par trois témoins, parents ou non, et
fait mention des prénoms, nom, profession et domicile de la personne qui
se comporte comme le parent, et de ceux des père et mère ainsi que
d’autres renseignements.
L’acte de notoriété est ensuite signé par les témoins, et il est mentionné en
marge de l’acte de naissance de l’enfant.
.
200
Section 2 Les actions relatives à la filiation
Ces actions présentent des dispositions communes (§1) mais aussi des
règles qui leur sont particulières : celles relatives aux actions en recherche
(§2) ou en contestation (§3).
.
201
A. L’action en justice
.
202
ou la date du titre qui établit la filiation (jour où la personne « a commencé
à jouir de l’état qui lui est contesté »)
Ce délai est le délai de droit commun. Certains délais spéciaux sont plus
courts (5 ans par exemple, que nous verrons plus tard).
- Indisponibilité de l’action
.
203
B. La preuve
Cela signifie que l’expertise génétique doit être ordonnée par le juge si elle
est demandée par le requérant.
95 Cass. 1Ère civ 28 mars 2000, n°98-12.806, Fiche TD n°8, doc. N°2.
.
204
Sauf « s’il existe un motif légitime de s’y opposer ».
Reste à déterminer quels sont ces motifs.
La jurisprudence a retenu que l’expertise génétique pouvait être refusée en
cas d’impossibilité matérielle : par exemple si l’on ne peut localiser le
défendeur96. Ou encore, lorsque l’action en contestation est irrecevable :
dans ce cas, il est impossible au juge d’ordonner une expertise génétique97.
Certains arrêts se fondent sur l’intérêt de l’enfant pour refuser l’expertise
génétique98.
Mais cela n’est pas sans conséquences : en cas de refus, le juge apprécie
les raisons du refus. Puis, le juge peut en tirer ou non les conséquences
juridiques. Ainsi, le juge peut établir le lien de parenté s’il existe d’autres
éléments de preuve99.
Pour que l’action soit possible, il faut qu’aucun titre (acte de naissance) ni
possession d’état n’existe à l’égard de l’enfant. Sinon, il doit procéder à
une action en contestation.
2. Effets
.
207
L’action a pour effet d’établir rétroactivement la filiation à l’égard de la
mère. L’enfant peut ainsi demander à celle-ci toutes les pensions
alimentaires qui auraient dû être versées depuis sa naissance.
.
208
L’action est exercée contre le père prétendu, ou contre ses héritiers s’il est
décédé.
En revanche, aucune action en recherche de paternité ne peut être engagée
contre un donneur de sperme en cas de procréation médicalement assistée
(Art. 311-19).
Cette action n’a pas pour objectif d’établir la filiation. Il s’agit d’une
action visant à constater l’existence de la possession d’état. Le juge la
constate et en décrit les effets.
.
209
Si l’action en recherche de maternité permet de combler un vide de
filiation, l’action en contestation vise à la remise en cause d’un lien de
filiation déjà établi.
.
210
Il conviendra ensuite d’envisager les effets de la contestation (B).
Nul, à l'exception du ministère public, ne peut contester la filiation lorsque la possession d'état
conforme au titre a duré au moins cinq ans depuis la naissance ou la reconnaissance, si elle a été
faite ultérieurement. »
.
212
termes, le parent ne se comporte pas comme tel aux yeux de l’enfant mais
également des tiers.
Parce que cette filiation est moins solide, l’article 334 prévoit un délai
d’action plus long : dix ans, conformément à l’article 321 du Code civil.
L’action peut être intentée par tout intéressé pendant les 10 ans qui suivent
la délivrance de l’acte de notoriété.
Le demandeur doit rapporter la preuve contraire, c’est à dire qu’il n’existe
pas de possession d’état ou bien que l’acte de notoriété est un faux.
.
213
Dans les deux cas, le jugement est déclaratif : le juge ne crée pas de droit,
il constate une situation préexistante. C’est pourquoi le lien de filiation est
anéanti rétroactivement.
Néanmoins, tout lien n’est pas définitivement rompu entre l’enfant et son
ex-parent ( art. 337). Le juge peut prononcer des modalités de relations
entre l’enfant et la personne qui l’élevait : par exemple un droit de visite. Il
s’agit là de préserver l’intérêt de l’enfant qui est de maintenir une relation
avec la personne qui l’a éduqué afin de ne pas rompre abruptement tous les
repères familiaux de l’enfant.
Tant qu’il s’agissait d’utiliser les gamètes des père et mère, le droit de la
filiation ne s’en voyait pas modifié. Mais dès lors que la procréation
médicalement assistée a eu recours à des tiers donneurs, tout a été
chamboulé. En effet, le père de l’enfant n’est pas le père génétique, c’est-
à-dire celui qui donne ses gamètes, mais celui qui porte le projet parental
.
214
avec la mère. Autrement dit, le père de l’enfant sera le mari, le partenaire
ou le concubin de la mère.
=> La PMA a mené à une dissociation entre procréation et filiation : la
filiation ne repose plus nécessairement sur le lien génétique.
Cette pratique est interdite par le droit français car elle porte atteinte au
principe d’indisponibilité de l’état civil (c’est-à-dire que l’identité d’une
personne ne peut faire l’objet d’un contrat ) et de dignité du corps humain
(on ne peut porter atteinte au corps humain – par exemple le soumettre en
esclavage).
Section 1 La PMA
.
216
§1. Conditions d’accès
.
217
Etudions donc les conditions de la PMA : les conditions relatives aux
techniques utilisées (A), au couple demandeur (B) et aux modalités
d’expression et de recueil du consentement des membres du couple (C).
1. En droit positif
.
218
L’insémination consiste à insérer les gamètes mâles du père ou du donneur
dans l’utérus de la mère. Ces gamètes iront féconder les ovules de la mère
dans son utérus.
Ces techniques peuvent être pratiquées avec les gamètes mâles et femelles
des membres du couple. C’est ce qu’on appelle la PMA endogène.
Mais elles peuvent être pratiquées avec les gamètes d’un tiers donneur,
évoqué plus haut : don de sperme, don d’ovules et même don d’embryon.
C’est ce qu’on appelle la PMA exogène.
1. En droit positif
.
219
Suivant l’article L. 2141-2 alinéa 2 du Code de la Santé Publique :
« L'homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer et consentir
préalablement au transfert des embryons ou à l'insémination. »
101 A propos du transfert d’embryons déjà conçus : CE, Ass., 31 mai 2016, n°396848.
.
220
- Est exigé un couple stable. Cette exigence est implicite. Avant la loi du 7
juillet 2011, seuls pouvaient avoir accès à la PMA : les couples mariés ou
les couples pouvant apporter la preuve d’une vie commune d’au moins
deux ans. Cela garantissait la stabilité du couple. Cette exigence n’existe
plus mais elle renseigne sur l’importance de stabilité du couple qui va
accueillir un enfant.
.
221
l’assistance médicale à la procréation sans son mari. Dès lors, le projet
parental demeure un projet de couple lorsque la femme est mariée.
L’ouverture de la PMA aux femmes seules vise à offrir la possibilité à ces
femmes de fonder une famille alors même qu’elles seraient célibataires.
- Il n’est plus fait mention d’un couple vivant. Mais il est indiqué à
l’alinéa 4 1° qu’il n’est pas possible de procéder à une insémination ou à
un transfert d’embryon si l’un des deux membres du couple est décédé.
- De même, il n’est plus fait mention d’un couple stable mais il est
indiqué à l’alinéa 4 2°, 3°, 4° et 5° qu’une procédure de divorce ou la
cessation de la vie commune empêchera toute insémination ou tout
transfert d’embryon.
1. En droit positif
.
222
L’article L. 2142-10 du Code de la Santé Publique dresse une liste très
longue d’entretiens préalables du couple avec les équipes médicales pour
bien comprendre ce dont il s’agit.
Ce consentement doit être donné par écrit et après un délai d’un mois à
l’issue du dernier entretien.
Ainsi, l’article 311-20 du Code civil dispose que « Les époux ou les concubins qui,
pour procréer, recourent à une assistance médicale nécessitant l'intervention d'un tiers donneur,
doivent préalablement donner, dans des conditions garantissant le secret, leur consentement à un
notaire, qui les informe des conséquences de leur acte au regard de la filiation. »
.
223
- L’article L. 2141-2 al. 3 du Code de la Santé Publique dispose que « Les
deux membres du couple ou la femme non mariée doivent consentir
préalablement à l’insémination artificielle ou au transfert des embryons. »
Le couple ou la femme non mariée doit donc accepter que soit procéder à
une insémination artificielle ou au transfert des embryons.
L’alinéa 3 poursuit :
« Le consentement est privé d’effet en cas de décès, d’introduction d’une demande en divorce ou
en séparation de corps, de signature d’une convention de divorce ou de séparation de corps par
consentement mutuel selon les modalités prévues à l’article 229-1 ou de cessation de la
communauté de vie, survenant avant la réalisation de l’assistance médicale à la procréation. Il est
également privé d’effet lorsque l’un des membres du couple le révoque, par écrit et avant la
réalisation de l’assistance médicale à la procréation, auprès du médecin chargé de mettre en œuvre
cette assistance »
.
224
Comme auparavant, le consentement du couple, ou de la femme seule, est
recueilli par un notaire. C’est ce consentement à la procréation
médicalement assistée qui permettra ensuite l’établissement de la filiation
à l’égard du parent non génétique de l’enfant.
.
225
1. En cas de recours à une technique endogène
.
226
Tout est fait pour que le droit désigne celui qui semble être le parent, peu
importe que la filiation corresponde à la réalité génétique ou non.
Mais, comme il ne s’agit pas d’une filiation comme les autres, certaines
dispositions y sont spécifiques. Ainsi, celui ou celle qui a consenti à la
PMA ne peut renoncer à sa filiation à l’égard de l’enfant (a). Ce n’est donc
pas la réalité génétique dont il est tenu compte ici mais de la volonté
initiale de recourir à la PMA. C’est ce que l’on perçoit également à travers
l’interdiction de la filiation à l’égard du donneur (b).
.
227
Aussi, non seulement la paternité lui est imposée mais en plus sa
responsabilité sera engagée, de sorte qu’il devra verser des dommages et
intérêts à l’enfant pour réparer le préjudice subi.
La filiation de l’enfant issu d’une PMA avec tiers donneur ne repose pas
sur la réalité génétique mais sur une fiction juridique : c’est-à-dire sur
l’apparence de parenté entre le parent et l’enfant.
.
228
De même, l’article 16-8 du Code civil prévoit que :
« Aucune information permettant d'identifier à la fois celui qui a fait don d'un élément ou d'un
produit de son corps et celui qui l'a reçu ne peut être divulguée. Le donneur ne peut connaître
l'identité du receveur ni le receveur celle du donneur.
En cas de nécessité thérapeutique, seuls les médecins du donneur et du receveur peuvent avoir
accès aux informations permettant l'identification de ceux-ci. »
.
229
B. Les difficultés liées à l’ouverture de la PMA aux couples de même
sexe et aux femmes seules
Toutes ces questions sont celles qui ont été soulevées dans le cadre de la
rédaction de la loi de réforme de la bioéthique.
.
230
ou non à l’enfant son mode de conception. Le mode d’établissement de
la filiation révèlerait le mode de conception.
Elle est établie, à l’égard de l’autre femme, par la reconnaissance conjointe prévue au
premier alinéa du présent article. Celle-ci est remise par l ’une des deux femmes ou, le cas
échéant, par la personne chargée de déclarer la naissance, à l ’officier de l’état civil qui
103 https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b3833_projet-loi
104Le projet de réforme de la bioéthique envisage de conserver cette règle dans le nouvel article 342-10 alinéa 2
.
232
C’est donc bien le consentement à la PMA qui préfigure la filiation et qui
empêche de se défausser. Celui qui donne son consentement à la PMA doit
ensuite assumer les conséquences de cet engagement auprès de l’enfant. Il
est donc impossible de contester cette filiation. Elle est comme figée.
.
233
Mais, l’une comme l’autre exception sont très rares. Donc la filiation à
l’égard de celui qui a porté le projet parental avec la mère est le plus
souvent établie à son égard, et ce, sans contestation possible.
Section 2 La GPA
La gestation pour autrui ou mère porteuse est une technique qui consiste à
faire porter un enfant par une autre femme que la mère. Cette tâche peut
être accomplie contre rémunération ou, pour le moins, contre
indemnisation.
.
234
En effet, l’article 16-5 du Code civil dispose que : « Les conventions ayant
pour effet de conférer une valeur patrimoniale au corps humain, à ses
éléments ou à ses produits sont nulles. »
Plus précisément encore, l’article 16-7 du Code civil dispose que « Toute
convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte
d'autrui est nulle. »
Pour autant, certains couples sont partis à l’étranger recourir à des mères
porteuses dans des Etats qui le permettaient. Une sorte de tourisme dans le
but de procréer.
Pour autant, l’enfant doit-il subir les conséquences des actes de ses
parents ? Doit-on interdire la transcription de cette filiation établie
valablement à l’étranger ?
.
236
1. L’interdiction de principe
a. Filiation paternelle
- Dans les arrêts du 3 juillet 2015 précités, la Cour de cassation avait admis
que la transcription à l’état civil français de la filiation paternelle de
l’enfant né d’une GPA était possible. Mais, elle n’était possible que parce
que le père était le père génétique de l’enfant.
La filiation génétique venait régulariser en quelque sorte le recours à la
GPA. C’est parce que le père et l’enfant ont un lien génétique que l’on ne
109 CEDH, 26 juin 2014, N°65192/11 et n°65941/11, Menesson c/France et Labassée c/ France
110 Cass. Ass. Plén. 3 juillet 2015, N°15-50002 et 14-21323
.
238
peut pas priver l’enfant de la transcription de cette filiation à l’état civil
français.
b. Filiation maternelle
=> Il semble donc que, désormais, il n’y ait plus d’obstacles de principe à
la transcription de la filiation paternelle ou maternelle de l’enfant né d’une
GPA. Pas d’obstacles de principe, cela signifie que dans certaines espèces
cette transcription ne sera pas possible en raison, par exemple, d’une
contrariété à l’intérêt supérieur de l’enfant.
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