Traumatisme HypnoseHugan Philippe Memoire DU Hypnotherapie

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demander son accord à l'auteur avant de
diffuser ce document.
Philippe HUGAN
Université de Bourgogne
U.F.R. Sciences Humaines et Sociales

DIPLOME UNIVERSITAIRE « HYPNOTHÉRAPIE »

Traumatisme et Hypnose ?

Chroniques thérapeutiques d'une survivante

Dirigé par Antoine BIOY,


MCU - HDR
Université de Bourgogne

Juin 2013
Mes remerciements s'adressent à :

Antoine Bioy et l'équipe d'intervenants du D.U. « Hypnothérapie », pour la


richesse, la rigueur et la créativité des interventions. Ils ont su me
communiquer un intérêt croissant pour cette approche thérapeutique.

Mes collègues du D.U. avec qui les partages ont souvent été drôles et
chaleureux.

Marie-Liesse Perrotin, psychologue et thérapeute avisée qui supervise


depuis des années ma pratique avec perspicacité, souplesse et générosité.

L'institution qui m’emploie et m’a accordé des disponibilités pour mener à


bien cette formation. Mes collègues en son sein.

Les enfants, adolescents et adultes que je rencontre dans ma pratique


clinique : ils ont accepté de bon gré mes pas hésitants avec cette nouvelle
technique. Madame D évidemment, à propos de laquelle je reviendrai tout au
long de ce mémoire.
SOMMAIRE

INTRODUCTION 2

PARTIE UNE. REVUE THEORIQUE


1.1 La notion de traumatisme psychique 4
1.2 Eléments historiques et nosographiques 6
1.3 Aspects cliniques et thérapeutiques
a. Clinique du syndrome psychotraumatique 8
b. Aspects thérapeutiques 9
c. En bref, d’autres dispositifs thérapeutiques 12
1.4 Hypnose et traumatisme, présentation de la problématique
a. A propos de l’hypnose, très bref historique 13
b. Comment définir l'hypnose ? 14
c. Hypnose, dissociation, traumatisme 15
d. Formulation de la problématique 16

PARTIE DEUX. CLINIQUE


2.1 Eléments de méthodologie
a. Contexte 18
b. Rencontre avec Madame D 19
c. Récit de (sur)vie 20
2.2 Eléments cliniques
a. Synthèse de l’accompagnement thérapeutique 21
b. Introduction de l’hypnose (avec séance vidéo) 23

PARTIE TROIS. DISCUSSION


3.1 À propos de la question diagnostique 27
3.2 De l’intérêt de l’hypnose dans l’abord du traumatisme 29
3.3 Introduction de l’hypnose : des apports 31
3.4 Limites et perspectives thérapeutiques 33

CONCLUSION 36

BIBLIOGRAPHIE 38

POSTFACE 42

RESUME
INTRODUCTION

Jeune adulte, j’ai découvert l’hypnose au détour d’ouvrages traitant de


développement personnel1. J’étais intrigué par ces méthodes et les potentialités
qu’elles supposaient chez tout individu. Puis, lors d’un séjour de vacances,
quelle ne fut ma surprise d’applaudir un ami qui, muni d’un balai, chantait en
public sous les suggestions appuyées d’un hypnotiseur !

Je laissai là quelques années mes étonnements pour me consacrer à des


études de gestion et à mon premier métier en ressources humaines dans le
secteur industriel. Dépité par ce monde où les enjeux de pouvoirs se disputent
aux techniques d’influence et de manipulation d’autrui en vue de parvenir à des
fins financières, je décidai une reconversion et optai pour un parcours
universitaire en psychologie à Paris VIII Vincennes - Saint-Denis.

S’il ne fut pas question d’hypnose les trois années conduisant à la licence,
je rencontrai la psychanalyse au gré d’une cure, d’expériences associatives et de
stages. Je forgeai également mes premiers outils cliniques, d’inspiration
psychodynamique, en validant en 2002 un diplôme universitaire (D.U.) organisé
à Dijon par Jacky Rigaux et Hervé Bénony intitulé « Psychopathologie des
situations de crise – Processus et changement ». Je fus alors marqué par la
rencontre et la supervision attentive de François Auger, psychologue et
psychanalyste.

Mes théories et approches psychothérapeutiques furent rudement mises


en tension lors des trois années de maîtrise et de D.E.S.S. par Tobie Nathan,
chef de file d’un courant d’ethnopsychiatrie2, qui dirigeait alors la filière de
psychologie clinique et pathologique à Saint-Denis. L’enseignement de Jean-Luc
Swertvaegher, auteur avec T. Nathan de Sortir d’une secte3 sur les
psychothérapies à médiation corporelle me passionna d’autant plus qu’il me fit

1
Par exemple Enseignement de l’hypnotisme par l’image (1910, Editions Idégraf, 1985) de Jean Filiatre ou La suggestion mentale
(1988, Editions Idégraf) du Dr Julien Ochorowicz.
2
Pour faire très court, l’ethnopsychiatrie telle que l’a formulée Tobie Nathan (cf. notamment 1994, L’influence qui guérit, Paris,
Poches Odile Jacob et 2001, Nous ne sommes pas seuls au monde, Paris, Les empêcheurs de tourner en rond / Le Seuil)
s’intéresse au dispositif thérapeutique, à savoir les objets et théories du thérapeute et aux attachements du patient, à savoir les
objets et les êtres du monde de ce dernier.
3
NATHAN T., SWERTVAEGHER J.-L. (2003), Sortir d’une secte, Paris, Les empêcheurs de tourner en rond / Le Seuil.
2
découvrir la somme de Bertrand Méheust Somnambulisme et médiumnité.4 Je fis
au centre Georges Devereux, espace de consultation ethnopsychiatrique, la
rencontre d’Isabelle Stengers. Philosophe belge, elle s’est beaucoup intéressée
aux rapports entre l’hypnose, la psychanalyse et la science. Elle a dans cet
esprit rédigé plusieurs ouvrages, notamment avec le psychiatre et psychanalyste
Léon Chertok. Celui-ci a réintroduit l’hypnothérapie en France dans la seconde
moitié du XXème siècle et lui a redonné quelques lettres de noblesse5.
Egalement, à Dijon, j’eus l’occasion en 2006 de rencontrer François Roustang à
l’occasion de la sortie de son ouvrage Savoir attendre pour que la vie change.6 Je
fus interpellé par son aisance autour du thème Psychanalyse et Hypnose.

Les années passent, j’exerce différents emplois de psychologue clinicien


au sein d’un Conseil Général dans les champs de la dépendance et de la
protection de l’enfance. Amené à accompagner des enfants et des adultes, je
cherche les moyens de développer de nouvelles approches psychothérapiques.
J’entends alors parler de l’ouverture à Dijon du D.U. « Hypnothérapie » : une
association de psychologues invite Antoine Bioy à présenter la formation à ses
membres. C’est décidé, en 2012 j’entame la formation !

Un nouveau champ de possibles s’offre à moi, l’occasion d’interroger ma


pratique, celle notamment de l’accompagnement de personnes frappées par de
graves événements de vie. Ce sera la porte7 d’entrée de ce mémoire, déterminer
l’intérêt d’introduire l’hypnose dans l’accompagnement thérapeutique d’une
femme victime de multiples traumatismes.

4
MEHEUST B. (1999), Somnambulisme et médiumnité Tome 1 Le défi du magnétisme, Le Plessis-Robinson, Institut Synthélabo pour
le progrès de la connaissance.
5
Lire par exemple de CHERTOK L. ET STENGERS I. (1989), Le cœur et la raison - L'hypnose en question, de Lavoisier à Lacan, Paris,
Editions Payot et (1990), L’hypnose – Blessure narcissique, Le Plessis-Robinson, Institut Synthélabo pour le progrès de la
connaissance, 1999.
6
ROUSTANG F. (2006), Savoir attendre pour que la vie change, Paris, Odile Jacob.
7
En clin d’oeil à L’hypnose ou les portes de la guérison de Jean-Marc Benhaiem avec François Roustang (2012), Paris, Odile Jacob.
3
PARTIE UNE. REVUE THEORIQUE

1.1 La notion de traumatisme psychique

Etymologiquement, la notion de traumatisme désigne une blessure avec


effraction et connote la soudaineté de l’accident, la violence du choc, l’effraction
dans l’organisme et le bouleversement consécutif. Le concept de traumatisme
psychique est une extension de cette notion et les éléments d’observation du
plan somatique sont transposés de manière métaphorique dans le registre
psychologique : le psychisme peut lui aussi être percé et blessé par des
événements extérieurs. Le mot « traumatisme » est utilisé de plusieurs façons –
pour indiquer un événement unique, ou une accumulation d’événements, ou
encore pour décrire l’expérience subjective de cet événement (la réaction à celui-
ci), ou bien encore pour décrire les séquelles de cet événement.

Dans les Etudes sur l’hystérie de Sigmund Freud et Joseph Breuer8, le


traumatisme psychique désigne le choc psychique, l’effraction de l’enveloppe
psychique et le bouleversement énergétique durable. Réponse donnée par
l’individu à un événement dont le caractère est violent, soudain et exceptionnel,
le traumatisme implique presque toujours une menace vitale : la peur de
mourir. L’événement traumatique entraîne un tel effet de surprise chez
l’individu que, non préparé, il se trouve dans l’incapacité de se défendre.
L’événement perce le processus filtrant et anéantit tout déni temporaire ou toute
possibilité de réparer les dégâts. L’appareil psychique, autre métaphore
freudienne, est débordé par une sorte de stimulation qu’il ne peut comprendre
ou contrôler. Le traumatisme psychique et son souvenir agissent alors à la
manière d’un « corps étranger » et continuent à jouer un rôle actif, longtemps
après l’incident douloureux. En 1920 dans « Au-delà du principe de plaisir »,
Freud propose une « spéculation psychanalytique » concernant la genèse du
traumatisme. Il décrit l’effraction psychique comme effraction d’un système
protecteur, le « pare-excitations », qui constitue le système défensif du Moi vis-à-
vis des excitations externes violentes.9

8
FREUD S., BREUER J. (1895), Etudes sur l’hystérie, Paris, PUF, 1996.
9
FREUD S. (1920) « Au-delà du principe de plaisir », Œuvres Complètes, Psychanalyse, Vol. XV, Paris, PUF, 1996, pp. 277-338.
4
Rappelons les théories centrales ayant jalonné les conceptualisations du
père fondateur de la psychanalyse. Entre 1895 et 1897, la théorie de la
séduction attribue au souvenir de scènes réelles de séduction le rôle
déterminant dans l’étiologie des névroses. Le point de vue change lorsque Freud
découvre que les scènes de séduction sont parfois le produit de reconstructions
fantasmatiques, découverte corrélative de la sexualité infantile. Le rôle tenu par
les événements extérieurs n’est plus aussi important qu’auparavant puisque
l’impact traumatisant des événements peut dériver des fantasmes et des
excitations qu’ils provoquent. C’est la théorie du complexe d’Œdipe, point
nodal du modèle psychanalytique. Le fantasme oedipien prend ainsi la place de
la séduction.

Cependant, Freud a maintenu sa classification des névroses en trois


grandes catégories : les psychonévroses dues à la perpétuation d’un conflit
intra-psychique empruntant le canal des mécanismes de défense, les névroses
actuelles dues à un conflit intra-psychique et exprimées biologiquement,
directement, et les névroses traumatiques, déterminées par une étiologie qui
vient du dehors et exprimées par le syndrome de répétition.

Sa théorie de l’après coup postule qu’un second événement révélateur du


premier démontre l’efficacité traumatique du premier événement : un
traumatisme en cache un autre. Ce qui rend traumatique le traumatisme c’est
le réchauffement, le réveil de traumatismes antérieurs non élaborés, non
dépassés, non intégrés, non symbolisés. Le risque de ce modèle classique de
l’après-coup serait de déconsidérer la valeur traumatique des événements
actuels. L’équipe de traumatologie de la Tavistock Clinic de Londres propose un
modèle de l’après-coup notablement différent qui ne disqualifie pas l’événement
actuel : celui-ci est relié au passé, mais il est bien traumatique en soi, sa valeur
traumatique n’est pas seulement le fait du poids traumatique des expériences
passées.10

10
GARLAND C. (1998), Comprendre le traumatisme – Une approche psychanalytique, Larmor-Plage, Editions du Hublot, 2001.
5
1.2 Eléments historiques et nosographiques

Les troubles traumatiques existent probablement depuis que l’humanité a


pu élaborer une certaine représentation de la mort. Dans ses Histoires vers 425
avant notre ère, Hérodote en décrit un premier cas : consécutivement à un choc
perceptif, un soldat devient subitement aveugle. A l’époque des guerres
napoléoniennes, le médecin aliéniste Philippe Pinel décrit les « pathologies liées
à l’effroi ». Un même sentiment traverse les personnes qui ont été effractées :
celui qui glace, qui fige, qui a l’odeur de la mort, c’est celui de l’effroi11.

Ce sentiment a été mis en relation avec le traumatisme psychique dès


l’introduction en 1884 du terme de névrose traumatique par Oppenheim et
Thomsen, psychiatres allemands qui décrivent un aspect particulier des
troubles névrotiques survenus à la suite d’accidents de chemin de fer,
caractérisés par la reviviscence diurne et nocturne de la catastrophe sous forme
de cauchemars12. Le clinicien et neurologue Jean-Martin Charcot dénommait
ces névroses “hystéro-neurasthénie traumatique” dans ses leçons du mardi,
mais certains de ses élèves dont Pierre Janet et Sigmund Freud reprendront ces
affections sous le terme névrose traumatique proposé par Oppenheim13.

Les deux guerres mondiales de 1914-1918 et 1939-1945 ont donné lieu


par la suite à la dénomination névrose de guerre (Crocq, op. cit. page 364). En
1915, Milian décrivait ces troubles sous le nom “d’hypnose des batailles” en
raison de l’altération de la notion du temps et de l’espace des combattants
immobiles et hébétés14. Après la seconde guerre mondiale, un syndrome des
survivants des camps d’extermination émerge ; il allie culpabilité d’avoir survécu
à l’horreur, une attitude de retrait silencieuse et une incapacité à raconter
l’indicible.

Dès 1980, le système international de classification des troubles mentaux


se voulant a-théorique et prétendant se dégager de l’hypothèse des névroses
traumatiques issues de la psychopathologie psychanalytique propose une
nouvelle appellation. Il a alors recours au concept de stress, critiqué entre

11
. Auteurs cités par Meriem Mahbouli, (2011), « Parer hypnotiquement aux traumas sexuels - L’apaisement après le tourment »,
Hypnose et thérapies brèves, n° 22, p. 42.
12
BARROIS C. (1988), Les névroses traumatiques, Paris, Dunod.
13
In CROCQ L. (1996), « Critique du concept d’état de stress post-traumatique », Perspectives Psy, Volume 35, n° 5, p. 364.
14
In JEHEL L., LOPEZ G. ET AL. (2006), Psycho-traumatologie – Evaluation, clinique, traitement, Paris, Dunod, p. XXII.
6
autres par Louis Crocq notamment de par sa connotation bio-physiologique et
son acception dans la conscience publique. La notion habituelle de « trouble »
aurait été plus appropriée. Les psychiatres américains distinguent dans leur
Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM III en 1980,
DSM IV en 1994, DSM V en mai 2013) une entité diagnostique originale, le post-
traumatic stress disorder (en abrégé PTSD), en français état de stress post-
traumatique (ESPT).15

Comme d’autres praticiens militaires, Louis Crocq16 préfère utiliser la


catégorie syndromes psychotraumatiques. Ceux-ci désignent l’ensemble des
états séquellaires consécutifs à un traumatisme psychique. Ils sont décrits
classiquement dans les suites d’une catastrophe collective (bombardements,
guerres, attentats, tremblements de terre, catastrophes naturelles ou
technologiques, déportations), mais certains événements de la vie quotidienne
(accidents, agressions) peuvent avoir à titre individuel une telle force de
désorganisation psychique qu’ils peuvent aussi être vécus par la victime comme
une véritable catastrophe.

La notion de traumatisme second développée par Claude Barrois mérite


d’être mentionnée. Elle correspond aux réactions de rejet, d’indifférence et
d’abandon dont sont paradoxalement victimes les sujets présentant un
syndrome psychotraumatique, déjà victimes et souvent survivants d’une
première catastrophe (individuelle ou collective). L’effet pathogène de ce rejet
social constitue le « traumatisme second »17.

Quant à Khadidja biznar-Chahraoui, elle intègre la notion de logique


traumatique pour appréhender les phénomènes de chronicité de la névrose
traumatique. Cette chronicité constitue un problème majeur poussant parfois
certains intervenants médicaux ou sociaux à rejeter violemment ces patients
assimilés « à des “simulateurs à la recherche d’une rente”, ou encore à des
“hypocondriaques à la pensée carencée” !.. »18 La logique traumatique renvoie
donc à une organisation pathologique durable où le sujet est pris dans un
système relationnel et interactif de type traumatique avec son environnement.

15
AMERICAN PSYCHIATRIC ASSOCIATION (1994), Mini DSM-IV – Critères diagnostic, Paris, Masson, 1996.
16
Lire par exemple de CROCQ L. (1997), « Stress, trauma et syndrome psychotraumatique », Soins psychiatriques, n° 188, pp. 7-13.
17
BARROIS C. (1998), « Le traumatisme second : le rôle aggravant des milieux socio-professionnel, familial, médical, dans l’évolution
du syndrome psychotraumatique », Ann. Méd.-Psychol., 156, n° 7, pp. 487-492.
18
BIZNAR-CHAHRAOUI K. (1996), « Aspects chroniques des névroses traumatiques, logique traumatique et relation à la médecine »,
Nervure, Tome IX, n° 4, p. 16.
7
1.3 Aspects cliniques et thérapeutiques

a. Clinique du syndrome psychotraumatique

J’emprunte ce tableau clinique du syndrome psychotraumatique à Louis Crocq19 :

A - L’événement traumatique
Violent et exceptionnel, reçu comme une rencontre réelle avec la mort
Vécu comme une crise : effroi, non-sens, impuissance, innommable
B – Le syndrome de répétition traumatique (SRT)
Ses modalités de manifestation :
Souvenir forcé
Reviviscences hallucinatoires
Cauchemars de répétition
Crises émotives, vécu “comme si…”
Conduites de répétition : agir comme si…
Tics et sursauts de répétition
Rumination mentale de répétition
Ses circonstances de survenue :
Spontanée
Provoquée par stimulus, réveil ou intoxication
Ses registres d’expression
Détresse
Orage neurovégétatif
Raidissement de l’attitude
C – Symptômes non spécifiques
Anxiété
Asthénie physique, psychique et sexuelle
Symptômes psychonévrotiques
Troubles psychosomatiques
Troubles des conduites
D - Une altération de la personnalité
Blocage de la fonction de filtration
Etat d’alerte
Sursaut à tout stimulus
Résistance à l’endormissement, réveils fréquents
Blocage de la fonction de présence
Réduction d’intérêt pour le loisir et le travail
Impression d’avenir bouché
Impression de détachement du monde
Blocage de la fonction d’affection
Sentiment de détachement d’autrui
E – Les troubles sont durables
F - Souffrance psychique et désocialisation variable

Evolution : chronique avec poussées aiguës possibles


Il existe un temps de latence entre l’événement et le syndrome.

19
CROCQ L. (1996, op. cit. p. 372).
8
Pendant la 1ère guerre mondiale, la compulsion de répétition était
apparue à Freud comme une manifestation de la pulsion de mort et des traces
qui la réactivent. Lors de ses discussions avec le psychiatre hongrois Sàndor
Ferenczi, Freud avait souligné une fonction de la compulsion de répétition,
inverse de l’actualisation de la pulsion de mort : celle d’une tentative désespérée
de guérison. Si une personne est préparée à une réaction de débordement à
risque traumatique, elle met en action un dispositif d’angoisse qui produit une
liaison des excitations et substitue l’angoisse à l’effroi. Lorsqu’une telle liaison
échoue à se produire, alors le recours à la compulsion de répétition survient à
titre de tentative de liaison substitutive.

Freud distinguait l’angoisse et l’effroi. Pour lui, si l’angoisse est


ressentie au niveau du moi comme attente d’un danger imminent, elle signe
l’absence d’entrée en trauma. Par contre, l’effroi traverse le sujet dépassé par la
menace irreprésentable à laquelle il n’est pas préparé et qui, par là même, le
frappe toujours par surprise. Selon Jacques Roisin20, l’effroi est une affection
toute particulière, celle d’un basculement dans l’anéantissement psychique. La
terreur surgit fréquemment comme prolongement immédiat de l’affect d’effroi.

Roisin (op. cit., p. 7) distingue trois temps de la réaction traumatique :


l’instant de la réalisation d’une menace vitale, le temps de l’effraction psychique
et le moment de la détresse dépassée, celle de l’expérience de l’anéantissement.
La clinique du trauma offre une dimension plus radicale de la mort, plus
obscure, moins propice à être offerte directement au témoignage. Celle du néant
que la personne traumatisée rencontre lorsqu’elle fait l’expérience de la
réduction à rien de ses objets vitaux et d’elle-même. La réaction traumatique
donne brutalement à éprouver la dimension la moins représentable de la mort.
Si la mort est perte de la vie (représentable), elle est aussi rencontre d’une
destruction totale, pour laquelle convient le terme d’anéantissement
(irreprésentable) (ibid., p. 23).

b. Aspects thérapeutiques

Dans son travail sur l’hystérie de conversion, Freud pratique l’hypnose


avec Breuer. Pensant que la conversion est liée à un traumatisme, il essaie
d’associer au souvenir une décharge émotionnelle des affects pathogènes. C’est
la technique cathartique. Le problème invoqué par Freud réside dans la
dissociation entre l’état de veille et l’état endormi qui renforcerait les

20
ROISIN J. (2010), De la survivance à la vie – Essai sur le traumatisme psychique et sa guérison, Paris, PUF, p. 24.
9
résistances du patient (s’opposant à l’accès de celui-ci à son inconscient).
Freud développe alors la méthode des associations libres, à la base de la cure
psychanalytique. Le sujet est allongé ce qui provoque une détente et une
régression. L’analyste essaie d’aller au-delà des résistances : « Là où est le ça
doit advenir le moi ». Neutralité (bienveillante), non interventionnisme,
abstinence (on ne dévoile rien de soi) sont les principes du psychanalyste.
Parfois, il propose une interprétation portant sur les résistances et le transfert,
à savoir l’actualisation dans le cadre de la cure psychanalytique de désirs
inconscients du patient.

Sàndor Ferenczi, reprenant à son compte en 1932 la théorie de la


séduction, a pu décrire comment la sexualité adulte (« le langage de la passion »)
faisait véritablement effraction dans le monde infantile (« le langage de la
tendresse »). Dans son article célèbre « Confusion de langue entre les adultes et
l’enfant »21, il parlait de l’attitude panique de l’enfant abusé face à son agresseur
produisant une sorte de paralysie psychique.

Ferenczi est un des premiers psychanalystes à avoir critiqué le dispositif


thérapeutique de Freud. Il rencontre Freud en 1908, devient un de ses
analysants, puis son élève et disciple, enfin son rival. Il développe des
conceptions autour du traumatisme22 – il a pris en charge pendant deux années
des traumatisés de guerre – et les concepts d’introjection ou d’identification à
l’agresseur. Très attaché à la pratique, il est connu pour les modifications du
dispositif psychanalytique. Il réfléchit au cadre convenant le mieux au patient
en intégrant dans cette compréhension les aspects relationnels et notamment
l’analyse du contre-transfert, à savoir l’ensemble des réactions inconscientes
de l’analyste à la personne de l’analysé et plus particulièrement au transfert de
celui-ci.

Dans L’influence qui guérit, Tobie Nathan distingue deux types de


traumatismes (op. cit. p. 270) : on peut soit être confronté à une situation dans
laquelle les défenses disponibles ne sont pas suffisantes pour endiguer l’afflux
pulsionnel, ou bien être soumis à une entreprise délibérée de destruction de
l’enveloppe, par rupture de liens permanents entre les faits psychiques et les

21
FERENCZI S. (1932), « Confusion de langue entre les adultes et l’enfant », Psychanalyse IV, Œuvres complètes, 1927-1933, Paris,
Editions Payot, 1982, pp. 125-135.
22
FERENCZI S. (1932), « Réflexions sur le traumatisme », Psychanalyse IV, Œuvres Complètes, 1927-1933, Paris, Editions Payot,
1982, pp. 139-147.
10
univers référentiels. La torture ressortirait de ce second cas de figure selon
Françoise Sironi23 puisque l’effet recherché est de produire intentionnellement
un traumatisme.

Dans le champ du traumatisme intentionnel (celui de la torture


notamment), Sironi propose de travailler comme le faisaient les premiers
psychanalystes, Freud, Ferenczi ou Imre Hermann au début de la psychanalyse.
Parce que l’atteinte de la capacité de penser est centrale sous la torture, la
thérapie des victimes doit être menée sur un mode intellectuel. Par la restitution
du travail de la pensée, on peut agir selon Sironi efficacement sur l’effraction
psychique. « Retrouver la théorie du tortionnaire, la livrer, la discuter ou la
construire ensemble, c’est mener la thérapie sur un mode pédagogique, ou
intellectuel. » (Op. cit. p. 191)

Sironi ne partage pas l’idée communément admise par certains


thérapeutes selon laquelle l’abréaction (décharge émotionnelle par laquelle un
sujet se libère de l’affect attaché au souvenir d’un événement traumatique, lui
permettant ainsi de ne pas devenir ou rester pathogène) serait un procédé
incontournable dans les thérapies avec les patients traumatisés. Elle le juge
même dangereux et anti-thérapeutique quand il est appliqué de manière
intentionnelle à ces patients. « Le risque que prend le thérapeute qui favorise
l’abréaction est de déclencher, du même coup, la frayeur (contrainte à « parler »,
comme lors d’interrogatoires), produisant et renforçant alors d’inlassables
répétitions iatrogènes, pour le coup. » (Ibid. p. 192)

Dans son approche psychanalytique de la résolution du trauma


Jacques Roisin propose un travail de reconstruction psychique visant « à
permettre à la personne en trauma un positionnement différent de la
survivance, c’est-à-dire de l’installation de l’expérience d’anéantissement que
l’événement traumatique avait provoquée. » (Op. cit. p. 145) Il s’agit de
confrontation à l’anéantissement et d’exploitation des ressources de vie
(« ressourcement »).

Cet auteur interroge la spécificité du traumatisme psychique lorsque


celui-ci fait suite à une situation de violence subie. Comment nommer la

23
SIRONI F. (1999), Bourreaux et victimes – Psychologie de la torture, Paris, Editions Odile Jacob.
11
dimension du traumatisme psychique de l’agressé en ce qu’elle diffère de celle
de l’accidenté ? « C’est la rencontre d’une déshumanisation qui produit le vif de
la situation potentiellement traumatogène de l’agressé. L’objet vital qui se trouve
détruit suite à un acte intentionnel de violence est la foi en l’humanité des
hommes, en sa capacité humanisante. » (Ibid. p. 174) L’anéantissement
traumatique qui se produit chez celui qui ne parvient pas à intégrer cette
expérience désespérante détruit le sentiment d’appartenance à la communauté
humaine, c’est la restauration de celui-ci (« la reliance ») que doit viser le travail
analytique. Roisin propose deux voies thérapeutiques pour favoriser la reliance :
. un travail psychanalytique (avec ou sans catharsis),
. l’insertion des victimes dans un groupe de travail (groupe de parole, de
rencontre, groupe thérapeutique, d’entraide, etc.) avec l’objectif de réinsertion
du « déshumanisé » au sein de la communauté humaine.

c. En bref, d’autres dispositifs thérapeutiques

Citons très brièvement pour conclure ce paragraphe quelques dispositifs


visant à prendre en compte et soulager les pathologies traumatiques.

Suite à l’attentat dans le RER à la station Saint-Michel en 1995 ont été


créées en France les Cellule d’urgence médicopsychologique. Elles visent à
gérer une crise (explosion, accident, incendie, attentats, etc.), identifier les
difficultés et donner des soins immédiats et précoces.

Elles peuvent aussi déboucher sur des pratiques de débriefing, rangées


par François Lebigot dans les soins post-immédiats24. Ces rencontres avec des
professionnels de la santé s’apparentent à des actions thérapeutiques et
prennent plusieurs formes : débriefing collectif, débriefing individuel, groupe de
parole et entretien individuel.

Des consultations spécialisées pour les victimes de violences sont


régulièrement organisées, par exemple à Dijon25, à Lyon26, encore à Londres27…
Elles conjuguent différentes techniques, des thérapies brèves à visée cathartique

24
LEBIGOT F. (2005), Traiter les traumatismes psychiques – Clinique et prise en charge, Paris, Dunod, 2011, p. 137.
25
CHAHRAOUI K., BESSE P. (2000), « La consultation psychologique spécialisée pour les victimes de traumatismes psychiques », Ann.
Méd.-Psychol., 158, n° 5, pp. 379-384.
26
DALIGAND L. (1997), « La thérapie des victimes au risque de la violence », Les cahiers de l’Actif, N° 248/249, pp. 77-84.
27
GARLAND C. (1998), Comprendre le traumatisme – Une approche psychanalytique, Larmor-Plage, Editions du Hublot, 2001.
12
et de mise en sens aux psychothérapies d’inspiration psychanalytique à plus ou
moins long terme.

Soulignons que le traitement des états traumatiques est complexe et


nécessite des abords diversifiés. La combinaison des différents traitements entre
eux (pharmacologiques, psychosociaux, psychothérapiques…) conduit à un
résultat thérapeutique supérieur à l’utilisation d’une technique unique. La prise
en charge se réfère à différents registres de compréhension du trouble et
nécessite une approche clinique multidimensionnelle, basée sur une écoute
empathique et sur l’utilisation de moyens biologiques et de techniques
psychothérapiques spécifiques28.

1.4 Hypnose et traumatisme – Présentation de la problématique

a. A propos de l’hypnose, très bref historique

En tant qu’état dissociatif, l’hypnose existe depuis les premières


civilisations. Souvent associée à des pratiques magiques ou ésotériques, elle
devient objet d’étude scientifique avec le médecin Franz-Anton Mesmer au
XVIIIème siècle avec la théorie du “magnétisme animal” puis acquiert un statut
thérapeutique avec le chirurgien écossais James Braid à qui revient la paternité
du terme “hypnotisme”, du grec “hypnos” : sommeil. La pratique de la
suggestion d’Ambroise Liébeault et d’Hippolyte Bernheim avec l’école de Nancy,
le lien établi par Jean-Martin Charcot entre l’hypnose et l’hystérie, la thèse de
Pierre Janet sur “l’automatisme psychologique” en 1889 mettant en évidence un
processus dissociatif où des éléments inconscients occupent le champ du
conscient, consacrent la portée de l’hypnose29.

Comme nous l’avons déjà mentionné, l’œuvre du père de la psychanalyse


Sigmund Freud (1856 – 1939) fut influencée par l’hypnose. N’en déplaise aux
historiens officiels de la métapsychologie, Freud n’abandonnera pas l’étude de
l’hypnose et la pratiquera au moins jusqu’en 1924. A la fin de sa vie, il souligne
l’importance de l’hypnose dans la construction théorique de la psychanalyse et

28
FERRERI M. (1996), « Névrose traumatique ou état de stress post-traumatique : repères cliniques et aspects thérapeutiques »,
L’Encéphale, Sp. VII, p.13.
29
BIOY A., MERCADIE L. (2012), Cours de D.U. « Hypnothérapie » - Techniques et méthode hypnotique, Université de Bourgogne.
13
admet qu’un pratique à visée psychothérapeutique requiert l’utilisation de la
suggestion30.

Après une période de pratique silencieuse dans la première partie du


XXème siècle, l'hypnose connaît un regain d'intérêt grâce notamment au
psychiatre américain Milton Hyland Erickson (1901-1980) qui renouvelle
l'hypnose clinique et thérapeutique et lègue le courant de “l'hypnose
ericksonnienne”. En France, depuis une quarantaine d'années, l'hypnose sort
de l'ornière dans laquelle certains tenants de la psychanalyse l'avaient
cantonnée grâce au psychiatre et psychanalyste Léon Chertok31, au philosophe
François Roustang32 toujours en activité et à une nouvelle école dynamique de
psychologues et hypnothérapeutes comme Didier Michaux et Antoine Bioy33.

b. Comment définir l'hypnose ?

Parmi de nombreuses définitions de l'hypnose, il m'a semblé que celle


proposée par Antoine Bioy, Chantal Wood et Isabelle Célestin-Lhopiteau est la
plus simple et la plus complète :

« Etat de fonctionnement psychologique par lequel un sujet, en


relation avec un praticien, expérimente un champ de conscience élargi. »34

Pour Milton H. Erickson, l’état hypnotique est un état de conscience


particulier qui privilégie le fonctionnement inconscient par rapport au
fonctionnement conscient35. L’hypnose s’accompagne donc de phénomènes
utilisables à des fins thérapeutiques, puisant dans un inconscient qui est à
considérer désormais comme un réservoir de ressources partiellement
inexploitées.

Enfin, dans Qu’est-ce que l’hypnose ?, François Roustang s’interroge sur


la visée et le but de l’hypnothérapie : « On peut le dire d’un mot : répondre à la

30
BIOY A. (2008), « Sigmund Freud et l’hypnose : une histoire complexe », Perspectives Psy, Volume 47, pp. 171-184.
31
CHERTOK L. (1979), L'hypnose entre la psychanalyse et la biologie - Le non-savoir des psy, Paris, Odile Jacob, 2006, ou CHERTOK
L. ET STENGERS I. (1989), Le cœur et la raison - L'hypnose en question, de Lavoisier à Lacan, Paris, Editions Payot.
32
Lire par exemple de ROUSTANG F. (2000), La fin de la plainte, Paris, Odile Jacob Poches, 2001 ou (1996), Comment faire rire un
paranoïaque ?, Paris, Editions Odile Jacob.
33
BIOY A., MICHAUX D. (Sous la direction de, 2007), Traité d'hypnothérapie - Fondements, méthodes, applications, Paris, Dunod.
34
BIOY A., CELESTIN-LHOPITEAU I., WOOD C. (2010), L’Aide-mémoire d’Hypnose, Paris, Dunod, p. 7.
35
HALEY J. (1973), Un thérapeute hors du commun, Milton H. Erickson, Paris, Epi, 1984.
14
demande de la personne que nous recevons pour lui permettre de modifier le
rapport à son monde. »36

c. Hypnose, dissociation, traumatisme

La dissociation est le principe même de l’hypnose : être à la fois ici et


ailleurs, dans le présent et dans un souvenir, en train de percevoir une douleur
et sa respiration, ou de se positionner à la fois comme acteur et spectateur de sa
propre expérience (à la fois vivre l’expérience de la catalepsie d’un bras tout en
observant le phénomène). Un enfant occupé à jouer ou en train de “rêvasser” est
un enfant dissocié.

A noter que la dissociation dont il est question en hypnose n’est pas


pathologique à la différence du terme « dissociation » désignant parfois une
caractéristique psychopathologique (dans la schizophrénie ou les troubles
dissociatifs du DSM par exemple). En hypnose, la dissociation correspond à un
nouvel équilibre psychique du sujet qui perçoit alors son univers de façon
différente (Bioy et coll., 2010, op. cit. p. 7).

L’hypnose en tant qu’état dissociatif est donc un phénomène naturel


qui intervient au quotidien. Nous faisons tous l’expérience de “partir dans nos
pensées”, les yeux dans le vague, dans la lune et de prendre conscience de cet
état quand nous le quittons. De mêmes moments hypnotiques interviennent lors
d’une conférence, d’une discussion, devant un film ou en conduisant une
voiture.

De nombreux auteurs37 considèrent que ce même phénomène entre en


jeu en situation de déséquilibre, d’agression, de situation accidentelle, de
catastrophe voire de destruction.

Janet38, Freud et Breuer (1895, op. cit.) étudiaient la triade “hypnose-


dissociation-trauma”. Ils pensaient qu’au moment de l’agression, le sujet, dans
un état hypnoïde, vivait un traumatisme qui ne s’exprimerait pas dans la
mémoire lors du retour de la conscience. Freud préfèrera s’intéresser en quoi le

36
ROUSTANG F. (1994), Qu’est-ce que l’hypnose ?, Paris, Les Editions de Minuit, p. 179.
37
COTTENCIN O., VAIVA G., DUCROCQ F., GOUDEMAND M. (2002), « Hypnose et traumatisme psychique - Aspects cliniques », Stress et
Trauma, 2 (3), pp. 163-168.
38
JANET P. (1889), L’automatisme psychologique, Paris, Editions Odile Jacob, 1998.
15
traumatisme, ou un fantasme, a-t-il été traumatique pour le patient. Janet
maintiendra sa position sur l’hypnose, non seulement dans la genèse mais
encore dans le soin du psychotraumatisme.

Selon Cottencin et coll. (op. cit.), la « clinique hypnotique » du


traumatisme pose la question du vécu du trauma par le patient. L’état
dissociatif serait essentiellement un moyen de défense non spécifique du
psychisme devant une agression quelle qu’elle soit, qu’il parvienne ou non à
aider le patient. Or, la dissociation, si elle peut faire partie du problème, peut
déjà faire partie de la solution.

d. Formulation de la problématique

Les états traumatiques relèvent de deux catégories : le troubles aigus qui


sont les réactions immédiates et post-immédiates aux événements choquants.
Les psychothérapeutes sont peu appelés à rencontrer les personnes affectées
par ces stress aigus, sauf dans le cadre de CUMP (cellule d’urgence
médicopsychologique) ou lors de pratiques de débriefing. La seconde catégorie
relève d’états post-traumatiques constitués, ressortant eux de désordres
psychiques à évolution chronique.

Cette seconde catégorie, à laquelle j’attribuerai le nom générique de


syndrome psychotraumatique, est particulièrement difficile à prendre en charge
avec des méthodes psychothérapiques à dominante verbale et mentale.
Différentes études montrent par ailleurs que l’hypnose s’est avérée efficace dans
le traitement des névroses de guerre, partant, dans les pathologies
traumatiques39.

Dans ma fonction de psychologue à l’ASE (aide sociale à l’enfance), je suis


amené à accompagner des personnes confrontées à des parcours
particulièrement chaotiques. Le fonctionnement de certaines d’entre elles
semble ressortir du syndrome psychotraumatique.

39
BOURGEOIS P, (2003), Thérapie brève de l’ESPT – Rôle et spécificité de l’hypnose, Stress et trauma, 3 (4), p. 225.
16
Je souhaite dans ce travail étudier la possibilité d’introduire l’hypnose
dans l’accompagnement thérapeutique au long cours d’une patiente
traumatisée chronique.

Ensuite, je m’attacherai à déterminer les apports et les limites de


l’hypnose dans l’abord de ce type de pathologie.

Enfin, je chercherai à discuter en quoi l’installation d’un lieu de


sécurité, une “safe place”, pourrait aider cette patiente à se dégager du
syndrome psychotraumatique.

17
PARTIE DEUX. CLINIQUE

2.1 Eléments de méthodologie

a. Contexte

Au sein d’un Conseil Général, mes fonctions relèvent essentiellement du


domaine de la protection de l’enfance. Psychologue au service de l’aide sociale à
l’enfance (ASE), dans une agence territorialisée, je suis amené à rencontrer pour
des évaluations, des soutiens ponctuels ou des suivis thérapeutiques des
enfants, des adolescents ou des adultes. Les entretiens peuvent être individuels
ou familiaux. Dans cette dernière forme ils incluent des parents ou des
assistants familiaux si l’enfant fait l’objet d’un placement familial.
Les motifs conduisant à une mesure de protection de l’enfance couvrent
un large spectre : d’une indisponibilité temporaire à s’occuper de ses enfants à
des situations de danger et de maltraitances avérées en passant par des besoins
de conseils éducatifs, des négligences, des carences éducatives et affectives, des
violences physiques et psychologiques ou des agressions sexuelles intra ou
extra-familiales.
Selon les besoins de la famille évalués par les services sociaux, médicaux
et/ou scolaires, selon la position des parents et les signes présentés par les
enfants, des mesures administratives - contractualisées avec les parents, ou
judiciaires - ordonnées par le juge des enfants, sont mises en œuvre40.
Citons parmi les mesures administratives contractualisée entre les
parents et l’autorité exécutive - Président du Conseil Général la plupart du
temps - l’A.E.D. (aide éducative à domicile) ou l’A.P. (accueil provisoire, l’enfant
est placé avec l’assentiment de ses parents au sein d’une famille d’accueil ou en
établissement).
Parmi les mesures judiciaires ordonnées par le juge des enfants, citons
l’A.E. (assistance éducative) à savoir le placement des enfants en famille
d’accueil ou en établissement avec ou sans l’assentiment des parents et le PAD
(placement à domicile), mesure récente consistant à maintenir un enfant au
domicile de ses parents avec un étayage socio-éducatif conséquent. Les mesures

40
L’article L. 112-3 du code d’action sociale et des familles et l’article 375 du code civil fondent le cadre juridique et les politiques de
protection de l’enfance qui en découlent.
18
administratives ou judiciaires sont suivies par les travailleurs sociaux du
Conseil Général, éducateurs spécialisés ou assistants sociaux, appelés
“référents” socio-éducatifs, ou ceux d’associations médico-sociales.

b. Rencontre avec Madame D

Il y a un peu plus de cinq ans, j’ai été sollicité pour rencontrer la mère de
quatre enfants placés judiciairement au sein de familles d’accueil.41 Depuis trois
années que la mesure d’assistance éducative (AE) avait été ordonnée par le juge
des enfants, celle-ci voyait ses enfants uniquement au sein d’un dispositif
appelé “visites médiatisées” : les rencontres se déroulent en « lieu neutre » dans
une salle aménagée au Conseil Général et sont accompagnées par une
éducatrice et médiatisées par une psychologue.
Le placement partait d’observations et de signalements des services
sociaux et médicaux. La décision était notamment fondée sur les
« dysfonctionnements importants du couple parental et l’incapacité des parents
à assumer dans de bonnes conditions l’éducation de leurs enfants. » Madame D
venait de se faire agresser à son domicile par son propre mari, le père des
enfants. Celui-ci sera condamné à une peine de trois années d’incarcération
pour « agression sexuelle commise en réunion », administration de substances
nuisibles et menaces de mort. L’âge des enfants à l’époque du placement allait
de un à neuf ans.
Des expertises psychiatrique et psychologique ayant été ordonnées,
Madame rebondit sur certaines préconisations et entama des démarches d’aide
psychologique : elle fut suivie deux ans par une psychologue à l’hôpital dans le
cadre d’une consultation spécialisée en traumatologie, un an auprès d’un
confrère de l’école des parents et trois mois par une psychologue d’un
organisme de réinsertion.
Témoins des manifestations d’angoisse et de souffrance de Madame D et
observant leurs effets négatifs, les intervenants en charge des visites
médiatisées et l’éducateur référent suggérèrent au juge des enfants une
réduction de la fréquence de ces rencontres. Madame D exprima alors son
incompréhension auprès de la psychologue médiatisant les visites et lui
demanda la possibilité de rencontrer un psychologue ASE pour mieux

41
Afin de respecter l’anonymat, j’appellerai cette patiente Madame D et je veillerai à rester flou sur les éléments temporels et
géographiques. Madame D a accepté le principe de cette recherche ainsi que la vidéographie d’une séance d’hypnose qui sera
présentée lors de la soutenance de ce mémoire. Qu’elle en soit à nouveau remerciée ici.
19
comprendre ce qui lui était demandé par le juge afin de « ne pas perturber » ses
enfants lors de ces visites médiatisées.

C’est dans ce contexte que je fus amené à rencontrer une première fois
Madame D. Voici sa question telle qu’elle me l’a formulée lors de ce premier
rendez-vous : « J’aimerais que mes enfants aillent mieux avant et après les
visites. Comment je fais moi, qu’est-ce que je dois faire ? »
Nous avons convenu de nous rencontrer régulièrement, tous les mois
d’abord, puis tous les quinze jours, dans le cadre d’un accompagnement qui prit
assez vite une allure thérapeutique.

c. Récit de (sur)vie

Dernière d’une fratrie de 9 enfants, Madame D n’était pas “attendue” par


ses parents. Sa mère réalisa sa grossesse par le biais de son médecin traitant
une semaine avant l’accouchement. Six mois plus tôt, ses parents avaient été
frappés par le décès accidentel et tragique d’un de leurs enfants. Ils en avaient
auparavant perdu deux autres. Madame D pense que sa mère était déprimée au
moment de sa naissance.
Suite à des conflits conjugaux et à des négligences parentales, Madame D
est placée, petite, en foyer. Elle rentre certains week-ends puis les soirs chez ses
parents et subi rapidement des mauvais traitements, des pressions, puis des
agressions sexuelles de la part de son père. Madame D, adolescente, rejoindra
un internat éducatif. Elle y restera jusqu’à ses 21 ans et y validera un BEP et
un brevet professionnel.
Sa jeunesse est émaillée de décès brutaux. Lorsqu’elle est âgée de 10 ans,
un de ses frères aîné, son préféré, est assassiné. Vers 17 ans, coup sur coup,
une amie d’internat est retrouvée morte suite à une fugue. La sœur de la victime
se suicide sous les yeux de Mme D. Peu de temps après encore, une amie de
foyer décède du V.I.H. Enfin, son fiancé se noie accidentellement peu après
s’être disputé avec elle.
Le ressenti de culpabilité est énorme car Mme D estime être en partie
responsable de chacun des décès. Afin de ne pas prêter au fantasme ou à la
fabulation, la patiente m’apporte coupures de presses et comptes-rendus
d’audiences pour accréditer ses dires et honorer la confiance qu’elle souhaite
m’inspirer.

Elle éprouve une ou deux années de « répit » jusqu’à la rencontre de


Monsieur P, avec qui elle se marie rapidement et dont elle aura quatre enfants.
20
Les deux années précédant le placement, la situation conjugale et familiale s’est
considérablement détériorée. Madame avait noué une relation proche avec la
fille d’une voisine de village. Sur la base d’arguments insolites exprimés aux
assises, celle-ci tenta à deux reprises de donner la mort à Madame D en
l’empoisonnant, ce qui valu l’hospitalisation de la victime et l’incarcération de la
coupable.

Un mois après cette dernière tentative de meurtre, Madame D subissait


l’agression sexuelle commise en réunion par son mari ce qui entérinait le
placement judicaire de leurs enfants et redoublait les effets du traumatisme
psychique.

2.2 Eléments cliniques

Il est difficile de retracer en quelques lignes plusieurs années de


rencontres à visée thérapeutique. L’objet de ce mémoire n’étant pas
d’approfondir le déroulé des entretiens et les observations cliniques, qui sont
illustrées par une séance vidéo, je vais tâcher d’identifier les faits marquants qui
m’ont amené après cinq années d’accompagnement à proposer à Madame D
d’intégrer des techniques hypnotiques dans le cadre du suivi.

a. Synthèse de l’accompagnement thérapeutique

Quand je rencontre pour la première fois Madame D, elle fait partie de ces
personnes blessées, sur le qui-vive, dont la posture vigile et défiante impose tout
à la fois un cadre rigoureux et un apprentissage de la confiance. L’angoisse, les
mouvements dépressifs sont toujours présents, labiles cependant. Madame D
témoigne aussi de vivacité, de curiosité, d’envie de plaire et de se faire
remarquer, enfin d’une force de vie et de survie peu commune.
Au vu de l’ampleur de la souffrance exprimée par Madame D et de son
besoin d’étayage, nous adopterons au terme d’une année un rythme de deux
entretiens par mois. Progressivement, elle pourra aborder le récit de son histoire
et la vision de sa vie.
Un an après le début du suivi, Madame D subit des examens médicaux
qui révèlent de multiples pathologies : tumeur cancéreuse, fibrome intra-utérin
et malformations cardiaques notamment. S’ensuivront depuis lors des
investigations et interventions chirurgicales qui ne laissent pas de répit à
Madame D. Malgré les pronostics pessimistes, elle parvient à ce jour à assumer
ses responsabilités et obligations, notamment parentales. Autant que faire se
21
peut, je reste en contact avec les praticiens pour articuler au mieux
l’accompagnement thérapeutique.
Durant ces années, Madame D est régulièrement assaillie d’envies
suicidaires dont elle me fait part. Elle envisage de “partir” de façon plus ou
moins programmée, avec prévision de date, de moyens. Elle réchappe à
quelques tentatives de suicide. Je suis alors attentif aux sentiments qui peuvent
s’emparer de moi, notamment la peur, le découragement ou l’impuissance. Je
reste également sensible et mobilisé par la force que je sens habiter Madame D.
Bénéficiant d’une supervision individuelle, je peux réfléchir au sens des paroles
échangées, à la circulation de la pensée, aux mouvements transférentiels et
contre-transférentiels, ainsi qu’à la stratégie thérapeutique.
Madame D a changé à cinq reprises de lieu d’habitation depuis que je la
connais sans compter divers hébergements liés à des projets de réinsertion. Elle
habite désormais à trois cents kilomètres de la ville où je la rencontre. Elle s’y
déplace environ deux fois par mois pour rencontrer ses enfants et moi-même.
Nous alternons désormais un entretien téléphonique et un entretien au bureau.
Les rencontres avec ses enfants se déroulent mieux et, même si une levée
de placement n’a pu être envisagée, Madame D a regagné des droits, notamment
celui de les accueillir en hébergement de temps en temps. L’aîné est aujourd’hui
majeur et s’implique dans un projet professionnel ce qui était une gageure. Sa
mère semble avoir su lui transmettre des valeurs positives.

Madame D est divorcée du père de ses enfants. Celui-ci a recouvré sa


liberté et rencontre ses enfants dans le cadre de visites médiatisées. Il apparaît
parfois menaçant pour l’équilibre de ceux-ci.
Remariée avec un ami, Madame D s’en est séparée quelques mois plus
tard. Sa vie sociale semble plus stable qu’auparavant même si cela reste fragile
et qu’il lui est difficile de croire en la fiabilité d’une relation. En effet, sa
trajectoire de vie, jalonnée d’événements traumatisants depuis sa naissance
pourrait-on dire jusqu’au placement de ses enfants, est toujours fracturée par
des violences et des agressions.

En six ans en effet, Madame D a fait l’objet d’une dizaine d’agressions


dont la moitié à caractère sexuel commises par des hommes rencontrés au gré
de son nomadisme géographique, lors de stages ou dans le cadre de ses soins.
La dernière agression sexuelle en date, récente, serait le fait d’une connaissance
de son ex-mari, rencontré au cours de son incarcération. A noter que Madame D
tient à me transmettre des éléments écrits accréditant ses thèses.

22
Ces répétitions notables constituent une des limites du travail verbal et de
co-construction de sens réalisé avec Madame D et ont suscité mon souhait
d’introduire une approche psychocorporelle comme l’hypnose. Je lui en ai fait la
proposition peu après le début du D.U. « Hypnothérapie ». La patiente se
représentant l’hypnose comme un « état second, comme si on pouvait causer en
dormant », je précise qu’en état hypnotique on ne perd pas le contrôle de soi.
Aussi me donne t-elle son accord de principe.

b. Introduction de l’hypnose

Premier entretien avec hypnose

Après avoir proposé à Madame D de porter attention au bureau, aux


objets, aux lumières et couleurs présentes42, je réalise une induction classique
expérimentée en formation43 (« VAKOG » ; porter attention aux sens visuel,
auditif, kinesthésique, olfactif, gustatif, à sa respiration, laisser venir les
images). Je suggère ensuite à Madame D d’imaginer un lieu agréable. Elle
imagine un lit, un polochon et une peluche.

Second entretien avec hypnose, un mois plus tard

Madame D accepte l'idée d'un extrait vidéo en vue de la recherche et de la


soutenance du mémoire. Au préalable, elle me fait le récit de deux cauchemars
dans lesquels elle est actrice : l’un de vol, l’autre de meurtre.

Je propose une induction type « VAKOG » puis suggère l’expérience


hypnotique "3 D" présentée lors du D.U. par Philip Zindel44. Une fois l’état
hypnotique installé, il s’agit de suggérer au patient de préciser ce qu’il aimerait
avoir autour de lui (à droite, gauche, derrière, devant, en-dessous, au-dessus),
ce peut être une personne, un animal, un objet, un végétal, une chose.... Je
reviendrai sur cette expérience dans la troisième partie du mémoire (point 3.3).
Voici quelques extraits de verbalisation sous hypnose :

42
Comme l’a illustré Brigitte Lutz (2013), Cours de D.U. « Hypnothérapie », Les troubles anxio-dépressifs et l’ESPT, et Supervision,
Université de Bourgogne.
43
BIOY A., MERCADIÉ L. (2012, op. cit.)
44
ZINDEL P. (2013) Cours de D.U. « Hypnothérapie », Les états dissociatifs, Université de Bourgogne.
23
[A droite Madame souhaiterait avoir] « la mer, froide, verte et grise, avec un
phare au milieu et puis des vagues qui viennent taper…
[A gauche] La montagne. Pourquoi ne pas se faire rencontrer deux opposés.
Elle est blanche, froide. Quand on est au sommet, elle nous donne
toujours des visions nouvelles. On a toujours l'impression de la
redécouvrir.
[Derrière vous ?] Ma jeunesse... de ma naissance à maintenant. Comme si
on tournait le dos à quelque chose, à quoi, à qui ?
[En dessous de vous ?] Le vide. J'ai l'impression de tomber dans un tunnel.
Et que je pousse un grand cri. Et dans un autre sens, je me dis que
quand j'arriverai en bas, et ben j'aurais plus de soucis. Tout ce qui
m'aura pourri la vie ça sera terminé.
[Devant vous ?] La mort. Je pense que s'il y a une personne avec qui je ne
gagnerai pas mon combat ce sera avec elle. Pas que j'en ai peur, mais
dans un sens quand je dis ça, ça me procure un sentiment de bien-être.
Au moins je serai tranquille. Ca me procure un sentiment de paix. Une
paix intérieure que je recherche. Dans un autre sens, j'ai pas le droit, vis-
à-vis de mes enfants.
[Au dessus de vous ?] Rien, rien. Surtout pas un ange.
[Pourriez-vous décrire ce rien ?]
Des fois j'ai l'impression que quoi que je fasse... Le ciel, le temps, les nuages
? J'arrive pas à définir comment est le rien. J'aimerais trouver cette paix
au fond de moi. Parce que c'est vraiment pénible d'être comme je suis,
aussi bien pour moi que pour les autres. Je ne sais pas où aller, ce que
je veux faire, c'est toujours l'inconnu. Donc vous voyez, rien.
[Imaginez maintenant que vous êtes au centre de cette espace, de ces six
éléments qui sont des ressources, que vous pouvez utiliser comme des
ressources.]
Les utiliser comment ? La mer ? La montagne, c'est froid et au sommet c'est
l'inconnu, le mystère. Le passé, je vois pas trop à quoi il peut me servir,
hormis à me donner des cauchemars, quelque chose qu'on a pas envie
toujours de revivre. Ensuite la mort, elle vous attend. Le vide, comme un
entonnoir et en dessous on va tomber donc savoir si on sera mort ou pas
c'est une autre question. Ensuite rien au dessus de votre tête. Le seul
point positif qu'il peut y avoir c'est la mer, la montagne. »

Troisième entretien avec hypnose, un mois plus tard

Je propose une expérience visant à faciliter un choix d’orientation


professionnelle et aider Madame D à se donner une indication sensorielle. La
séance semble appréciée à ceci près qu’elle craint de s’endormir : « Des fois j’ai
l'impression d'être fatiguée, de m'endormir. Si jamais tu dors, ça ne va pas ! »

Un mois plus tard, Madame D ne souhaite pas de séance avec hypnose.


Suite au dernier entretien, elle s’est s’assoupie dans un train sur le chemin du
retour. Elle aurait alors été victime d’une tentative d’agression. « Ce côté-là est
effrayant car j’estime que je n’ai pas le droit de me détendre », commente-t-elle.

24
Un mois après, entretien filmé (vidéo)

Je propose l’installation d'un « lieu de sécurité » (« safe place »).45 Il s’agit,


après une induction hypnotique, de suggérer au patient une promenade vers un
lieu dans lequel il puisse ressentir sûreté, sécurité, protection. Cf. vidéo.

Tout juste sortie de cette transe hypnotique, Madame D relate un épisode


survenu lors d’une hospitalisation post-traumatique. Je l’appellerai “Rencontre
avec des morts”. Voici les échanges retranscrits grâce à l’enregistrement vidéo :

Mme D - Vous savez, on parle de rêve mais, est-ce que je vous ai déjà causé
de mon séjour à l'hôpital, ce qui s'était passé avec Mademoiselle T [suite
à la tentative d’assassinat dont avait été victime Mme D], mon réveil et
tout ? […] Je vous avais dis que j'avais vu, que j'avais pensé que je
dansais avec les morts ? Que j'avais été comme aspirée par un entonnoir
? Parce que si vous voulez, ça va peut-être vous paraître bizarre, mais
pendant cette période-là, à plusieurs reprises, mon cœur il battait
tellement faiblement que... ils se demandaient euh... vous voyez donc,
y'a un moment vous voyez le médecin légiste était venu m'examiner...
Vous savez pour les besoins de l'enquête, pour les besoins de l'enquête,
à ce qu'il paraît ils envoient le médecin légiste, enfin bref... Et je ne sais
pas ce qui s'est passé mais à ce moment-là je me vois danser... je ne
sais pas où j'étais mais, enfin j'étais à l'hôpital mais, est-ce que j'étais
dans mon lit, enfin bref je ne sais pas...
- Vous ne savez pas...
- Au départ parce que, ça a duré un long moment, un très long moment. Ca
a bien duré une demi-heure parce que je sais qu'à un moment donné ça
a bougé... et si vous voulez ce qui est arrivé, j'étais mis comme sur un
espèce de brancard, ou un machin métallique, je peux pas vous dire ce
que c'est, et à ce moment-là j'étais, parce qu'à ce moment-là je ressentais
tout, mais j'étais, comment dire, j'avais du mal à mettre des noms sur ce
qui se passait. Alors vous voyez... arriver à identifier la... Et à ce
moment-là, euh, c'est paradoxal parce que à ce moment-là je me suis
vue, j'ai vu comme un espèce d'entonnoir, y'avait, un grand cône, comme
ça [élevant au ciel ses bras écartés], au dessus de ma tête, avec une
lumière, à chaque fois la lumière s'allumait, et donc je me suis vue,
aspirée, on aurait dis que y'avait un aspirateur en haut... et là, arrivée
en haut, y'avait une, euh, multitude de personnes qui étaient en train de
danser autour d'un feu, et c'était des personnes que je connaissais
qu'étaient décédées. Et donc ces personnes-là, une fois arrivée en haut,
elles m'ont pris, elles m'ont pris les mains, machiné, et hop, elles me
faisaient danser avec, et je dansais mais vous savez pas comme on
danse là mais je me voyais voler mais en me tenant les mains… Et vous
allez peut-être pas me croire mais alors ça m'a tellement effrayée, ...,

45
BIOY A., MERCADIÉ L. (2012, op. cit.).
25
Parce qu'à ce moment-là y'a eu un moment où y'a eu un déclic, je me
suis dis mais attends, t'es en train de danser avec des personnes qui
sont mortes, ça veut dire que t'es en train de mourir ?
- [...]
- Et euh, maintenant voilà, ça m'a... Et vous voyez, autant avant, avant cet
épisode-là, je, j'aurais fait des cacas nerveux excusez-moi l'expression
quasiment pour un oui un non, autant après, et j'étais rapace enfin
j'étais euh, autant après, ça a changé. Parce que je me suis dis que ça
servait à rien de se prendre la tête pour des clous...
- Oui d'accord, ça a permis de relativiser.
- Enfin, ça servait à rien, si parce que bon, c'était quand même, il y a eu
quand même du chemin depuis qu'on a travaillé mais bon, je veux dire,
par rapport à avant...
- Oui avant [...]
- Voilà, et donc, quand je me suis réveillée à ce moment-là, je me souviens,
je me rassois, le monsieur je me souviens il me dit "bonjour je suis
médecin légiste." Oh punaise, pschitt, je suis tombée dans les pommes,
la grosse mémère elle est tombée dans les pommes, et je me suis
retrouvée dans mon lit, quelques jours après, et y'avait les gendarmes à
mon chevet, ils venaient m'auditionner, alors...
- Et là, vous êtes tombée dans les pommes, avec le médecin légiste, avec ce
que vous veniez de vivre, avec ce, cette rencontre avec les morts, enfin
des morts... Finalement là vous avez eu une frayeur, une vraie frayeur !
- Ben attendez, sur le coup, est-ce que, vous savez c'était le contrecoup alors
je me suis toujours posée la question. Parce que déjà, pourquoi à ce
moment-là, alors que bon depuis un moment euh, ils se demandaient,
bon ils essayaient, parce que sur les rapports c'était marqué que mon
cœur battait très faiblement, à ce qu'il paraît à certains moments il
s'arrêtait un petit peu pour reprendre mais très faiblement après… Donc
est-ce qu'à un moment donné ils ont dû en déduire sûrement que, je sais
pas quoi ? Parce que entre temps y'avait quand même une grande
période, où je me rappelle que avant qu'il y ait ce fameux épisode-là, on
était, ben c'était le 2 et puis bon après, il y a fallu pas loin à peu près
une semaine pour euh, je sais pas trop, c'était un peu flou mais bon, là
j'ai été quand même plusieurs jours où euh, je peux pas vous dire
réellement ce qui s'est passé à telle heure, parce que, c'est le néant
total... Donc à ce moment-là je me réveille, je vois ça, j'entend "médecin
légiste", ah, je retombe dans les pommes parce que je me dis est-ce que
c'est vrai, ou est-ce que tu viens de rêver...
- Finalement est-ce que je suis vivante, ou morte...
- Voilà ! Et si vous voulez ça m’a fait tellement... je suis tombée, oui je suis
tombée dans les pommes !
- Vous vous êtes évanouie...
- Evanouie, et après je me suis retrouvée dans le lit, et y'avait donc des
gendarmes, qui attendaient pour m'auditionner. D'ailleurs ils m'ont dit,
"Tiens, vous vous réveillez !" Euh oui...
- Et ça faisait combien de temps que...
- Et ça faisait plusieurs jours...
- Ah plusieurs jours !
- Plusieurs jours, parce que eux ils comptaient m'auditionner le deux...

26
PARTIE TROIS. DISCUSSION

Les problématiques de Madame D rendent nécessaire un


accompagnement thérapeutique au long cours en articulation avec les suivis
sociaux et médicaux. La thérapie menée se fonde à la fois sur une perspective
psychodynamique – sensible au référentiel psychanalytique, et
ethnopsychiatrique, au sens ou Françoise Sironi en décline certaines
applications thérapeutiques46. Penser le cadre de travail, identifier les
mouvements transférentiels et contre-transférentiels, discuter les théories en
présence ont sans doute aidé Madame D à mieux appréhender sa situation, à
traverser les épreuves et à rester debout, malgré tout. Certaines conduites,
certains symptômes demeurent cependant, je pense par exemple au syndrome
de répétition traumatique et invalident les efforts de Madame D à sortir d’une
logique de survie pour entrer réellement dans la vie.

A la faveur de la formation D.U. « Hypnothérapie », l’introduction de


l’hypnose m’est apparue de nature à offrir de nouvelles perspectives dans cette
thérapie. Je voyais également dans cette approche psychocorporelle la
possibilité d’aider Madame D à “démentaliser” sa problématique, pour autant
qu’elle puisse entrer en sécurité dans ce nouvel espace.

3.1 A propos de la question diagnostique

Bien avant de connaître Madame D, j’avais été surpris d’entendre lors


d’une commission technique aide sociale à l’enfance47 les conclusions d’une
expertise psychologique ordonnée par le juge des enfants. L’expert mandaté
avait explicitement posé un diagnostic de « névrose histrionique ». C’était pour le
moins étonnant car cette entité n’existe pas en psychopathologie ! En toute
hypothèse, il faisait référence soit à une névrose hystérique (classification
psychanalytique), soit à une personnalité pathologique de type histrionique
(classification se voulant a-théorique de type DSM IV)48. Ce manque de rigueur
est dommageable car qu’il suivra le sujet pris aux rets du système de protection

46
Se reporter notamment à SIRONI F. (1999), Bourreaux et victimes – Psychologie de la torture, Paris, Editions Odile Jacob et (2007),
Psychopathologie des violences collectives, Paris, Odile Jacob.
47
Instance où sont examinées les mesures de protection de l’enfance en vue de formuler des propositions au magistrat.
48
Voir par exemple Marie-Christine Hardy-Baylé (1994), Le diagnostic en psychiatrie, Paris, Editions Nathan.
27
de l’enfance et qu’il passe à côté d’éléments bien plus prégnants et probants. Il
aurait été plus pertinent d’envisager la lignée “limite”49 chère à Jean Bergeret ou
bien la notion de « frontaliers » qu’interroge François Roustang50. Mais surtout,
nous pensons au syndrome psychotraumatique tellement plus conforme à la
réalité clinique de Madame D et offrant davantage de perspectives
thérapeutiques.
Il est regrettable que l’expert judiciaire en question n’ait pas pris appui
sur l’expertise psychiatrique demandée une année plus tôt dans le cadre de
l’affaire pénale qui opposait Madame D à son mari de l’époque. L’examen
concluait qu’il s’agissait « d’une jeune femme déprimée depuis la petite enfance
à ce jour, pour avoir subi depuis toute sa vie des actes criminels. » Qu’en dehors
de ces troubles dépressifs, Madame D présentait « une personnalité
normalement structurée, c’est-à-dire qu’elle ne présente aucun trouble ou
anomalie susceptible d’affecter son équilibre psychique ou intellectuel. » Qu’il
« existe un important traumatisme moral consécutif aux fait poursuivis. » Que
Madame D est « de plus, une jeune femme qui éprouve un sentiment de honte et
de culpabilité permanente, comme en éprouvent toutes les victimes qui ont subi
des traumatismes d’une extrême violence. » L’expert formulait « un pronostic
très réservé sur les conséquences des faits, car force est de constater que cette
jeune femme a été, de tout temps, martyrisée et maltraitée. » Il l’invitait à
poursuivre les soins auprès d’un confrère psychiatre mais également à engager
« un solide suivi de psychothérapie de soutien auprès d’un psychologue »,
préconisation dont s’est saisie Madame D.

Cet expert avait approché de près, sans poser de diagnostic précis


cependant, l’état caractérisant le fonctionnement psychique de Madame D.
Celui-ci entre effectivement dans la symptomatologie des états
psychotraumatiques à évolution chronique : syndrome de répétition centrée sur
les reviviscences à travers des cauchemars extrêmement agités, des images, des
ruminations, des comportements et pensées récurrents ; l’hypervigilance,
l’évitement ; le remaniement de la personnalité dans lequel dominent la
dépendance affective, les attitudes passives et infantiles, les revendications
caractérielles. Sans compter les symptômes non spécifiques comme les crises
d’angoisse, les mouvements dépressifs, les atteintes narcissiques…

49
BERGERET J., REID W. (1986), Narcissisme et états limites, Paris, Dunod, 2003.
50
ROUSTANG F. (1994), Qu’est-ce que l’hypnose ?, Paris, Les Editions de Minuit, p. 43 : « Les frontaliers » [...] « Traduction de
l’anglais borderline, utilisé pour désigner les borderline cases, les cas-limites » c’est-à-dire les personnes qui butent « sur le passage
à notre monde auquel ils n’ont pas accès. »
28
3.2 De l’intérêt de l’hypnose dans l’abord du traumatisme

Dans un premier temps, notons la similitude entre état hypnotique


(transe) et traumatisme51. La transe focalise l’attention du sujet sur un point. Le
trauma produit une focalisation sur l’événement, une sidération, un effroi. La
transe crée un état de “déréalisation”, une sorte de perte de repères, en
particulier du temps. Le trauma, de par l’effraction, entraîne une déréalisation
et souvent une perte de la notion du temps. La transe hypnotique peut faire
surgir des images, des sensations, des odeurs... Le trauma est porteur de “flash-
back” : retour en arrière avec images, sons, odeurs, sensations... La transe crée
un état de dissociation chez le sujet : sentiment d’être présent sans y être, de ne
plus sentir son corps. Le trauma crée une dissociation qui joue une fonction de
protection quasi spontanée (“comme dans un film”), une dépersonnalisation (“je
me suis vue”) mais secondairement l’impossibilité de réassocier l’événement et
la répétition interminable avec ses conséquences sur tous les secteurs de vie.
Rappelons que la dissociation est un phénomène par lequel une partie mentale
ou physique d’une personne fait l’expérience de fonctionner distinctement et
indépendamment d’une autre partie. « La dissociation apparaît ainsi comme
Janus, avec deux faces, l’une protectrice du sujet à court terme au moment de
l’événement, l’autre à moyen et long terme, génératrice d’un syndrome de
répétition mortifère52. »

Dans la trajectoire traumatique de Madame D, il paraît évident qu’un


phénomène de dissociation l’a préservée d’une hyperstimulation somatique et
émotionnelle de nature à anéantir une personne, « mourir d’effroi »53. Toutefois,
son hypervigilance ne la préserve pas, loin s’en faut, de graves agressions. Les
repères qui lui permettraient de discriminer ce qui relève du danger ou d’une
situation neutre sont pour l’heure bouleversés. Une partie d’elle-même a peur,
est terrifiée parfois, une autre partie reste à proximité de ce qui fait danger dans
la réalité (par exemple la relation avec le père des enfants de Madame D).

51 Corine Van Loey in BENHAIM J.-M. (Sous la direction de, 2005), L’hypnose aujourd’hui, Paris, In Press Editions, 2012,

p. 255 et 256.
52 Philippe Villien in MICHAUX D. (Sous la direction de, 2006), Hypnose et dissociation psychique, Paris, Editions imago,

p. 284.
53
PERREN-KLINGLER G. (2012), « Réassociations salutaires - Evolutions de la psychotraumatologie », Hypnose et thérapies brèves, n°
24, p. 45.
29
C’est lorsque le mécanisme de dissociation ne permet plus l’élaboration ou
la résolution du traumatisme et empêche son intégration avec toutes ses
composantes que le recours à l’hypnose présente un intérêt spécifique du point
de vue thérapeutique puisque l’une des manifestations de celle-ci est en effet
une forme de dissociation. « Mais c’est alors une dissociation qui se produit
dans un contexte contrôlé, rassurant, dans un cadre structuré avec une
composante relationnelle très intense permettant au sujet d’affronter “l’extrême
solitude face à la mort” ou “l’effroi”. »54 Philippe Bourgeois indique que la pierre
angulaire de ces traitements est l’alliance thérapeutique et la capacité du
thérapeute à tolérer d’éventuelles violentes manifestations émotionnelles (ibid.
p. 227).

Maximilien Bachelard définit l’alliance thérapeutique comme la


« réunion temporaire de deux êtres basée sur un engagement réciproque,
engagement qui implique donc le partage d’idées communes. »55 De même,
l’empathie est-elle une composante essentielle au travail thérapeutique avec
Madame D et à la mise en place de l’hypnose. Selon la thèse d’Antoine Bioy en
2005, la relation de type empathique caractérise la rencontre dans le traitement
hypnotique. Dans l’ouvrage réalisé avec Pascal-Henri Keller56, l’empathie est
ainsi définie : « 1/ une reconnaissance compréhensive de la souffrance décrite
par autrui, et 2/ un engagement transférentiel dans le projet commun
d’atténuation de cette souffrance. »

C’est ce qui prévaut au travail avec cette patiente et a permis la


réalisation de cette étude avec son accord et sa participation active, ce qui l’a
elle aussi placée en position de recherche. Madame D par exemple a discuté le
titre du mémoire et est à l’initiative du point d’interrogation qui suit
« Traumatisme et hypnose ? ». Selon elle, une formule sans interrogation aurait
entériné la pertinence de la technique hypnotique avant même d’en avoir validé
l’efficacité...

54
BOURGEOIS P. (2003), « Thérapie brève de l’ESPT - Rôle et spécificité de l’hypnose », Stress et Trauma, 3 (4), p. 226.
55
BACHELARD M. (2012), Cours de D.U. « Hypnothérapie », Alliance thérapeutique : historique, recherches et spécificités en hypnose,
Université de Bourgogne.
56
BIOY A., KELLER P.-H. (2009), Hypnose clinique et principe d’analogie - Fondements d’une pratique psychothérapeutique, Bruxelles,
Editions de Bœck Université, P. 152.
30
3.3 Introduction de l’hypnose : des apports

Si l’hypnose est considérée comme une thérapie de premier choix dans les
états traumatiques par nombre d’auteurs, déjà pour Pierre Janet (cours de P.
Zindel, ibid.), elle ne fait pas non plus l’unanimité comme le rappelle Bourgeois
(ibid., p. 225), notamment dans la croyance encore prégnante qu’elle agira par
abréaction ou catharsis.

Dans le travail avec Madame D, je me heurtais aux limites d’une visée de


co-construction de sens. En l’attente d’une bien hypothétique « résolution du
transfert »57, j’avais parfois l’impression de “tourner en rond”. Fort de ces
enseignements et d’une alliance thérapeutique solide, j’ai progressivement
introduit des techniques hypnotiques en m’étant au préalable assuré de son
accord de principe, dont il lui serait toujours possible de se démettre.

Je commençais aussi à comprendre que les traumas sont reliés les uns
aux autres, qu’ils se situent dans le présent et dans le passé. L’état traumatique
est un état de conscience séparé (“dissociation pathologique”) dont le moi
normal craint le retour. Cet état ignore le facteur temps : les choses passées
sont vécues comme si elles se passaient maintenant, oubliant la réalité actuelle.
Un fait passé qui n’est pas devenu souvenir ! (Zindel, ibid.) D’où l’importance du
corps, garant de l’ici et maintenant. L’hypnothérapie, comme certaines
approches corporelles, est susceptible de créer un espace de sécurité (notion de
« couveuse relationnelle » développée par Philip Zindel).

C’est pourquoi, après une première séance organisée autour d’un “lieu
agréable” (Bioy A., Mercadié L., op. cit.), j’ai proposé à Madame D l’expérience
« 3 D » illustrée en formation par Philip Zindel. Elle consiste à suggérer au
patient de placer tout autour de soi une personne, un animal, un objet, un
végétal, une chose… Madame D s’est ainsi trouvée au milieu d’un espace
composé sur les côtés de la mer et de la montagne, de sa jeunesse derrière, de
la mort devant, avec rien au dessus et le vide en dessous. Difficile pour elle de
percevoir ces éléments comme autant de ressources et de ressentir dans ce
nouvel espace un sentiment de sécurité. Madame éprouve cependant une

57
LAPLANCHE J., PONTALIS J.-B. (1967), Vocabulaire de la psychanalyse, Paris, PUF, 1997, p. 492.
31
sensation de détente ce qui l’amène à souhaiter renouveler l’expérience
hypnotique.

La troisième séance sera consacrée à mobiliser des sensations corporelles


afin d’aider Madame D à prendre une décision. L’objectif est atteint mais la
patiente ressent de la fatigue au cours de la transe et craint de s’endormir. Ceci
est incompatible avec la vigilance et le contrôle qu’elle souhaite conserver. Elle
pourra exprimer s’être assoupie dans un train après la séance et la frayeur
d’être agressée. Suite à cet épisode, elle préférera reporter une séance d’hypnose
programmée.

L’entretien suivant fera l’objet de la vidéo présentée lors de la soutenance


de ce mémoire. Cette séance d’hypnose me paraît très parlante pour illustrer les
caractéristiques actuelles du “lieu de sécurité” (“safe place”) de Madame D. Elle
se trouve en effet dans un ascenseur, non équipé de dispositif pour monter ou
descendre, dont l’unique porte est ouverte sur « les flammes de l’enfer ». Sa
façon métaphorisée d’être en sécurité peut-être : se tenir face à un danger,
clairement identifié, dont elle est a priori prémunie car elle ne lui tourne pas le
dos. Madame D circonscrit ainsi une situation menaçante tout en restant à
proximité, ce qui permet de la maîtriser, tout au moins de se donner l’illusion de
contrôle. Le danger est perçu mais une forme d’attraction attire la patiente vers
cette menace, confirmant qu’elle ne vaut rien et qu’elle va avoir ce qu’elle mérite.

Immédiatement après la transe hypnotique, Madame D relate un épisode


survenu en cours d’hospitalisation alors qu’elle venait d’être victime d’une
tentative d’assassinat. Manifestement, son état était dissociatif (voir paragraphe
1.4.c. de ce mémoire). Elle décrit très précisément les composantes d’un
traumatisme, la confrontation à la mort et aux morts, la sensation de
déréalisation, de dépersonnalisation, la perte des repères temporels… Edifiant !
Commentaire. Dans notre culture occidentale, la figure mythologique des
Gorgones incarne la rencontre avec la mort, également le mythe d’Orphée
revenant de l’enfer. Contaminée par le registre de la mort, le retour de
l’expérience traumatisante est parfois comparé à un retour de l’enfer ou du
royaume des morts. Certaines personnes victimes d’accidents ou d’agressions
apparaissent désormais aux yeux de leur entourage comme autant mortes que

32
vivantes. Elles sont qualifiées de morts-vivants, de revenants ou encore de
morts parmi les vivants.58

3.4 Limites et perspectives thérapeutiques

Certes, Madame D incarne la figure de la survivante décrite dans la


littérature traitant du traumatisme psychique. Dans ses travaux sur la
résilience - cette « capacité à réussir, à vivre, à se développer en dépit de
l’adversité », Boris Cyrulnik s’intéresse aux traumatismes et aux processus de
réparation qui sont autant de contraintes à la métamorphose59.

Le récit de la trajectoire de Madame D, étayé par diverses attestations et


articles de presse, ne suppose pas d’établir la matérialité des faits, de juger si le
fait énoncé est juste ou non, crédible ou pas. Comme l’écrit Isabelle Stengers,
« La technique n’a pas pour but de faire la différence entre fait et fiction, mais de
susciter une transformation. »60 C’est cette transformation qui est visée par une
approche perceptivo corporelle comme l’hypnose, non nécessairement centrée
sur la construction de sens : « En hypnose, la question du sens n’est pas un
prérequis au changement, contrairement à d’autres voies thérapeutiques,
comme la psychanalyse. Cela ne veut pas dire que cette question du sens ou
que la question de l’élaboration psychique soient considérées comme des
interdits, elles ne sont simplement pas des données incontournables dans les
prises en charge. »61

Que dire maintenant des effets de l’hypnose sur le fonctionnement


psychique de Madame D ? Un constat d’abord, l’approche hypnotique n’a
pour l’instant pas endigué la logique traumatique dans laquelle la patiente
semble rivée. Elle vient en effet suite à une nouvelle agression de traverser une
importante « crise »62.

Tout récemment, Madame D a accepté pour les besoins de l’étude un


entretien de recherche comprenant la question principale suivante : « Dans le

58
CROCQ L. (2002) « Persée, la méduse et l’effroi », Revue francophone du stress et du trauma, 2 (3), pp. 133-138.
59
CYRULNIK B. (2001), Les vilains petits canards, Paris, Odile Jacob, p. 147.
60
STENGERS I. (2002), L’hypnose entre magie et science. Paris, Les empêcheurs de penser en rond / Le seuil, p. 135.
61
BIOY A., KELLER P.-H. (2009), op. cit., p. 190.
62
En psychopathologie, le terme de crise renvoie à différentes manifestations psychopathologiques aiguës qui, selon les cas, selon le
modèle de classification ou le modèle théorique sous-jacent, s’insèrent ou non dans une personnalité pathologique. Cf. CHAHRAOUI
K., BESSE P. (2000), « Les dimensions de la crise en psychopathologie clinique », Perspectives Psy, vol. 39, n° 4, p. 333.
33
suivi thérapeutique, quels ont été les apports de l’introduction de l’hypnose ? »
Selon elle, les sensations liées à l’hypnose se produiraient non pas vraiment
pendant la séance, mais plutôt à retardement, une demie heure ou une heure
après. Elle ressent alors une somnolence, une sorte d’endormissement, comme
si elle était moins vigilante ce qui lui permet d’éliminer de la fatigue. Je lui
demande si cela lui procure du bien être. Oui, me répond-elle, « pendant ce
temps-là, cela me permet d’évacuer certaines choses qui sont en moi. Pendant
ce temps-là, je ne pense pas à mes soucis. » Elle attribue à son « subconscient
qui ferait blocage » le fait de n’être pas totalement détendue durant les séances.
« Un peu la peur, quelque chose au fond de moi qui est en alerte », ajoute-t-elle.
Globalement, Madame D pense que la méthode lui apporte de l’apaisement
même si ses angoisses restent fréquentes. Elle souhaite donc continuer et
approfondir les expériences hypnotiques. C’est au cours de cet entretien que
Madame D suggèrera une forme interrogative au titre de ce mémoire, une
manière peut-être de maîtriser le doute...

Quelles pourraient être les suites et les perspectives thérapeutiques ?

Dans un premier temps me semble-t-il, aider Madame D à construire un


lieu réellement sécure visant à créer ou renforcer un sentiment personnel de
sécurité bien dégradé. Des indicateurs de progression pourraient être établis.
L’objectif serait d’atteindre une sécurité interne lui permettant d’identifier à
l’extérieur ce qui est sécurisant et ce qui ne l’est pas. La transformation des
images produites quant à la constitution d’un lieu de sécurité pourrait
symboliser un indicateur de progression.

Le champ de l’hypnose offre tout un ensemble de techniques qu’il me


serait possible d’utiliser par la suite avec Madame D.

Je pense à celles enseignées par Philip Zindel comme la « transe modèle »


ou « l’introjection active du thérapeute » qui pourraient conforter la sérénité de
Madame D à entrer en état modifié de conscience.

Citons également l’EMDR (Eye Movement Desensitization and


Reprocessing, désensibilisation et reprogrammation par mouvement des yeux,
sensations kinesthésiques ou auditives) dont la parenté avec l’hypnose est
discutée et se pratique d’ailleurs sous hypnose dans certaines approches. Cette
technique paraît très efficace notamment dans le traitement des traumas isolés
ou clairement identifiés. Il serait possible d’adjoindre des thérapies de type
34
« états du moi » comme la « thérapie psychodynamique imaginative des
traumas » développée dans un texte récent par Luise Reddemann63.

Enfin, je voudrais terminer cette revue non exhaustive en citant les


méthodes de dissociation et de double-dissociation. Il s’agit de mettre en place
un dispositif de simple ou double dissociation pour que le souvenir traumatique
ne soit plus vécu par le sujet en tant qu’acteur, mais revu comme spectateur,
avec une distance semblable au visionnage d’un film au cinéma ou à la
télévision. Les stratégies sont alors multiples, directement sur la scène
traumatique, ou indirectement sur son historicité, son sens, ou sur les
ressources absentes au moment du trauma mais accessibles lors de cette
reprise du souvenir.64

Bref, que de possibles ouverts par ces approches !

63
REDDEMANN L. (2013), « Hypnothérapie et “Etats du moi” – Tous en scène », Hypnose et thérapies brèves, n° 28, pp. 20-28.
64
Développées par Brigitte Lutz dans ses cours (ibid.) ou par Philippe Villien in BIOY A., MICHAUX D. (2007, ibid., pp. 341-354.).
35
CONCLUSION

A partir d’un matériel clinique illustré par une vidéo, ce mémoire visait à
décrire et extraire les particularités de l’accompagnement thérapeutique de
personnes touchées de façon chronique par des événements traumatiques. De
manière générale, j’évite de concevoir un individu à partir d’une catégorie
psychopathologique préétablie. Toutefois, dans ces logiques de fonctionnement
si particulières, il m’a semblé judicieux d’identifier et d’établir la présence d’un
syndrome psychotraumatique.

Cette entité suffisamment large offre l’intérêt d’écarter d’autres catégories


bien inquiétantes dans le domaine juridico-social où j’évolue, l’aide sociale à
l’enfance. De plus, elle amène à évoquer la notion de dissociation psychique
susceptible d’abords thérapeutiques spécifiques, notamment par le biais de
l’hypnose.

A ce stade, un petit retour historique s’impose. Confronté à une grande


tension des patients et à la réactivation des traumas passés, le psychanalyste
Sàndor Ferenczi assouplit ses interventions thérapeutiques. Il émet des
suggestions en introduisant la relaxation. Il s’intéresse à ce que demande le
patient en essayant de ne pas frustrer sa demande, l’analyse devant fournir une
réponse positive aux besoins et aux désirs du patient en état de régression.
Dans son Journal clinique65 publié après sa mort, il décrira même une technique
unique en son genre, la psychanalyse mutuelle : il tente l’expérience d’alterner
des séances où il est en position d’analyste et des séances où il se place en
position de patient. Ferenczi paiera cher ces évolutions techniques : estimant
qu’elles sont dangereuses - la psychanalyse est alors en plein essor, Sigmund
Freud rompt avec son disciple. Pourtant, l’apport de Ferenczi est important pour
la clinique, il pose notamment le problème de la relation, du contre-transfert et
du dispositif thérapeutique.

L’hypnose telle qu’elle se pratique aujourd’hui est susceptible d’apporter


l’innovation requise par les difficultés des patients traumatisés. J’ai illustré le

65
FERENCZI S. (1932), Journal clinique, Paris, Payot, 1985.
36
fait qu’elle pouvait s’intégrer dans un accompagnement thérapeutique au long
cours et ouvrir d’autres perspectives, comme celles du corps, de la perception
ou de l’ici et maintenant.

Si cette méthode crée des ouvertures, beaucoup de questions restent en


suspens. Est-ce le maniement de la technique qui requerrait davantage de
savoir-faire ou la problématique de certains patients qui amènent à des limites
ou des déconvenues dans les prises en charge ? Il est difficile de répondre et si,
comme le suggère Barrois (1988, op. cit.), le travail décisif consiste à
accompagner le patient pour le ramener de l’extrême solitude aux portes de la
mort dans la communauté des vivants, il importe que le psychologue possède et
utilise des approches porteuses de changement. Il doit pour cela identifier et
activer les ressources du patient.

L’hypnothérapie me semble participer de cette dynamique car elle vise


essentiellement, c’est certainement un des points clés soulevés par Milton H.
Erickson, à mobiliser ces ressources : « Le thérapeute s’offre comme un
catalyseur, un “compagnon de route” cheminant aux côtés du patient vers ses
ressources intérieures et ses facultés inutilisées. »66

Fort de ces enseignements et enclin à poursuivre l’apprentissage, gageons


que j’emprunterai la voie ouverte par cette formation au plus grand bénéfice des
personnes accompagnées !

66Cité par Gérard Salem in SALEM G., BONVIN E. (2012), Soigner par l’hypnose, 5e édition, Issy-les-Moulineaux, Editions
Elsevier Masson, p. 65.
37
BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES

AMERICAN PSYCHIATRIC ASSOCIATION. (1994), Mini DSM-IV – Critères diagnostic,


Paris, Masson, 1996.

BARROIS C. (1988), Les névroses traumatiques, Paris, Dunod.

BENHAIM J.-M. (Sous la direction de, 2005), L'hypnose aujourd'hui, Paris, In


Press Editions, 2012.

BENHAIM J.-M., ROUSTANG F. (2012), L’hypnose ou les portes de la guérison, Paris,


Odile Jacob.

BERGERET J., REID W. (1986), Narcissisme et états limites, Paris, Dunod, 2003.

BIOY A., KELLER P.-H. (2009), Hypnose clinique et principe d'analogie -


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41
POSTFACE

“Un homme souhaite se faire initier.

Il frappe à la porte d’une cabane perdue en plein désert, l’antre de méditation

d’un vieux maître.

- Qui est-ce ? Demande une voix à l’intérieur.

- C’est moi, répond l’homme.

Plus aucun bruit, plus âme qui vive. L’homme attend, s’impatiente et s’en va.

Il revient à cette même cabane dix ans plus tard et frappe à nouveau à la porte.

- Qui est-ce ? Demande la même voix.

- C’est moi, répond l’homme, à nouveau.

Et, à nouveau, plus aucun bruit dans la cabane. L’homme attend quelques

heures, s’impatiente et s’en va, tout comme la première fois.

Dix ans ont encore passé. Il revient encore une fois à la même cabane.

- Qui est-ce ? Demande encore la même voix.

Et cette fois, l’homme répond :

- C’est toi !

Et la porte s’ouvre enfin.”

Histoire d’initiation attribuée tantôt à un maître chinois tantôt à un

maître soufi. Extrait de Tobie Nathan, « Eléments de psychothérapie »,

dans Psychothérapies67.

67NATHAN T. (1998), « Eléments de psychothérapie », in NATHAN T., BLANCHET A., IONESCU S., ZAJDE N., Psychothérapies,
Paris, Editions Odile Jacob, 1998, p. 63 et 64.
42
Philippe Hugan
29 rue des Epoutières
21240 Talant Université de Bourgogne
N° d'étudiant : 12045021 U.F.R. Sciences Humaines et Sociales

Mémoire de D.U. « Hypnothérapie » - Juin 2013

Sous la direction d'Antoine Bioy, MCU - HDR

RESUME

Traumatisme et hypnose ?
Chroniques thérapeutiques d’une survivante

Psychologue dans le domaine de la protection de l’enfance, je suis amené


à rencontrer des personnes dont le parcours de vie est jalonné de graves
événements. Certaines sont affectées par un syndrome psychotraumatique de
manière chronique.

Les accompagnements thérapeutiques de ces personnes font face à


maintes difficultés, entre autres des logiques de répétition délétères. Il convient
alors de penser sa pratique et de lui apporter les innovations techniques
nécessaires, au rang desquelles figure l’hypnose.

Dans cette étude, une vignette illustrera la complexité de


l’accompagnement d’une femme exposée depuis son enfance à de multiples
traumatismes.

S’il est possible dans un suivi thérapeutique au long cours d’introduire


des techniques hypnotiques, celles-ci se heurtent à certaines limites inhérentes
à la position du praticien et à celle du patient. Il n’en reste pas moins que
l’hypnose apporte des bénéfices et ouvre des perspectives pour autant de ne pas
perdre de vue qu’elle vise avant tout à catalyser les ressources du patient à
travers le vecteur du relationnel.

Mots-clés : dissociation psychique, hypnose, syndrome psychotraumatique,


traumatisme psychique

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