Étude Sur L'insertion Professionnelle Des Diplômés en Afrique Subsaharienne
Étude Sur L'insertion Professionnelle Des Diplômés en Afrique Subsaharienne
Étude Sur L'insertion Professionnelle Des Diplômés en Afrique Subsaharienne
Introduction. ...................................................................................................................................................... 4
II. Le suivi de l’insertion professionnelle des diplômés en Afrique fait l’objet d’une prise
de conscience qui tend à se développer à des rythmes différents selon les pays et les
types d’institution de formation ............................................................................................................. 10
III. Appréciation évaluative d’un outil de suivi des diplômés en Afrique sub-saharienne..
..................................................................................................................................................................... 14
4. Mettre en place un système d’incitation des diplômés et des employeurs afin de les
impliquer dans ce suivi .............................................................................................................................. 25
II. Les collaborations entre entreprises et institutions de formation dans les pays
développés ...................................................................................................................................................... 41
2
III. L’appréciation évaluative de la collaboration secteur privé / monde universitaire
pour répondre aux besoins en compétences et améliorer la professionnalisation des
diplômés en Afrique sub saharienne .................................................................................................... 43
V. Recommandations ............................................................................................................................... 46
Conclusion……………………………………………………………………………………………………………….51
3
Le Ministère des Affaires Etrangères (MAE) a lancé le 1er Septembre 2011 un FSP
mobilisateur visant à développer les compétences professionnelles supérieures de
niveau intermédiaire (bac + 2 et 3) dans les pays du Maghreb et d’Afrique sub-
saharienne. Ce FSP doit permettre « d’améliorer la professionnalisation de la formation
initiale supérieure et aider les diplômés à développer leurs compétences
professionnelles en liaison avec les besoins des entreprises au Maghreb et en Afrique
subsaharienne ».
C’est dans ce cadre que le MAE a chargé France Expertise Internationale (FEI) de la mise
en œuvre et de la gestion du FSP Mobilisateur. FEI a confié à l’Institut d’Afrique (IA) la
réalisation de cette étude dans les pays d’Afrique sub-saharienne1.
1Mauritanie, Sénégal, Mali, Niger, Tchad, Cameroun, Togo, Bénin, Côte-d’Ivoire, Ghana, Guinée-Conakry,
Burkina Faso
4
PARTIE I :
LE SUIVI DE L’INSERTION PROFESSIONNELLE DES DIPLOMES
5
La connaissance des voies empruntées par les diplômés pour accéder à leur premier
emploi est nécessaire pour apprécier la mesure dans laquelle les formations, et donc les
diplômes qui sanctionnent ces formations, correspondent aux besoins du marché du
travail. Les situations varient selon les pays. En France comme dans la plupart des pays
du Nord, ce suivi est réglementé, alors que dans les pays d’Afrique sub-saharienne
concernés par le FSP, la prise de conscience de son importance est récente. Il n’existe
donc pas toujours de normes régissant les enquêtes et l’analyse de leurs résultats.
Les outils de mesure de l’insertion des diplômés, en France comme dans la plupart
des pays développés, s’attachent à l’appréciation des conditions de l’insertion.
Quatre indicateurs sont utilisés : le taux d'insertion, la part d'emplois de niveau cadre
ou professions intermédiaires, la part d'emplois stables et la part d'emplois à temps
plein par domaine (Droit-Economie-Gestion, Lettres-Langues-Arts, Sciences
humaines et sociales, Sciences, Technologies et Santé) et par discipline. Le
questionnaire comporte aussi trois questions sur les dates-clefs de l’entrée dans la vie
professionnelle : la date de début de l’emploi occupé, et les dates de début et de fin du
premier emploi si le diplômé a changé de poste.
6
La collecte des données est réalisée par les universités dans le respect des
dispositions contenues dans une charte qui vise à garantir l’homogénéité des
résultats. Cette charte a été élaborée par le MESR avec la Conférence des Présidents
d’Université (CPU), le Centre d’Etudes et de Recherche sur les Emplois et les
Qualifications (CEREQ) et la Délégation Interministérielle à l’Orientation (DIO).
l’INSEE
Elle mène régulièrement des enquêtes nationales sur l’entrée dans la vie adulte
(EVA) des jeunes diplômés dont l’objectif est d’évaluer le lien entre leur parcours
scolaire et leur insertion professionnelle. Les questions posées portent sur les
études suivies ou le motif d'arrêt des études (niveau atteint, problèmes
administratifs ou financiers), la situation professionnelle (statut d'emploi,
qualification, durée du temps de travail, taille de l'entreprise, chômage…) et les
conditions de vie (type d'habitation, ressources, vie sociale, difficultés
rencontrées).
7
3. L’Observatoire de la Vie Etudiante (OVE)
Il a également généralisé un dispositif de suivi de l’insertion auprès des diplômés
de l’Université de Provence en Licence professionnelle, DUT ou Master depuis
20052.
Il existe aussi des mesures de satisfaction des employeurs comme le dispositif initié
par COMUTEC à Compiègne3qui ne concerne que les étudiants de l’Université de
Technologie de Compiègne mais qui tend à être repris par de nombreux autres
établissements d’enseignement. Il existe d’autres dispositifs informels de ce type,
développés par des écoles de commerce ou d’ingénieur.
A titre d’exemple, on peut citer le cas d’une des grandes écoles françaises les plus
prestigieuses comme l’Ecole Polytechnique. L’école dispose d’une Fondation, la
2 La méthodologie de recueil de ces enquêtes est la suivante: enquête postale par questionnaire adressée à
l’adresse des parents du diplômé, complétée par des relances téléphoniques. Le recueil d’enquête
proprement dit s’étale sur cinq mois (de décembre à avril). Enquête reconduite annuellement
interrogeant les diplômés le 1er décembre de chaque année, soit 30 mois après l’obtention du diplôme. La
totalité des diplômés de DUT, Licence professionnelle et Master disposant d’une adresse fixe en France et
n’ayant pas repris d’inscription à l’Université de Provence l’année suivant l’obtention de leur diplôme est
interrogée. Les thématiques de l’enquête concernent la situation au 1er décembre (en études/en
emploi/en recherche d’emploi/ en inactivité) – Les types de poursuites d’études – Les caractéristiques de
l’emploi (statut, contrat, employeur, secteur d’activité, salaire, quotité travaillée, fonction occupée) –
L’appréciation de la formation suivie à l’université de Provence.
3 COMUTEC, association créée en 1994 avec pour objectif de créer des plates-formes de rencontres entre
étudiants et entreprises afin de favoriser la recherche de stage et d'emploi, a ainsi récemment établi un
questionnaire de satisfaction à destination des entreprises. Ce questionnaire porte exclusivement sur les
étudiants de l’Université de Technologie de Compiègne (UTC) et évalue notamment les taux de réussite
des stages industriels, les projets de fin d'études, les taux d’embauches et les taux de départ en Volontariat
International en Entreprise.
8
Fondation X, dont l’article 1 des statuts précise : « La Fondation de l'École
Polytechnique a pour but d'aider à l'évolution de l'Enseignement à l'École
Polytechnique, de développer la recherche et le transfert des technologies avancées
vers l'industrie française, de concourir à la formation des Polytechniciens destinés à
faire toute ou partie de leur carrière dans les Entreprises Publiques ou Privées et
d'améliorer ainsi l'image nationale et internationale de l'École ». Fondation reconnue
d'utilité publique4, elle a été créée en 1987, avec une trentaine d'entreprises pour
faciliter l'adaptation de l'Ecole à une économie mondiale qui évolue. Ses objectifs sont
les suivants :
4 Le budget de la Fondation est de 3 millions d’euros par an qui comprend le financement de chaires (en
forte croissance).
9
II. Le suivi de l’insertion professionnelle des diplômés en Afrique fait
l’objet d’une prise de conscience qui tend à se développer à des
rythmes différents selon les pays et les types d’institution de
formation
Dans la plupart des pays d’Afrique analysés, la prise de conscience de l’utilité d’un
dispositif de suivi des diplômés de l’enseignement supérieur est récente.
5 120 enquêteurs préalablement formés disposant d’un guide d’entretien commun. Il existe également un
questionnaire qui peut être rempli en ligne sur le site du ministère.
6 Au Sénégal, la situation est préoccupante : il n’y a guère plus de 300.000 employés dans le secteur
moderne pour un pays de plus de 14 millions d’habitants. Plus de 100.000 diplômés sortent chaque année
des établissements d’enseignement supérieur quand le marché de l’emploi ne peut en absorber que
24.000
10
- En Guinée, l’Unesco considère que « l'enseignement primaire, qui bénéficie depuis
plusieurs années de l'appui technique et financier du projet NFQE, est le niveau
d'enseignement le plus avancé dans le domaine des statistiques scolaires(…). Bien que
limitée, cette structuration permet toutefois la production d'indicateurs cohérents. »
En revanche, « l'enseignement supérieur ne possède pas de collecte de données
systématique. Le processus en place est inorganisé ; par ailleurs, il n'existe
pratiquement aucun traitement analytique débouchant sur des publications
annuelles. » Il n’existe donc que très peu de dispositifs de suivi de l’insertion
professionnelle des diplômés. Aucun de ceux-ci n’est le fruit d’une initiative
ministérielle ou n’a été appliqué à toute une institution universitaire.
L’Agence Française de Développement, avec la Banque mondiale et dans le cadre
du Fond Commun de l’Education, a lancé une étude sur la traçabilité des diplômés
dont les travaux devraient commencer en janvier 2013 en Guinée. Cette étude,
couplée à une enquête de terrain exhaustive sur les besoins en compétences
professionnelles des entreprises, reprend la méthode déjà utilisée par la Banque
mondiale au Bénin. L’Ecole Nationale des Arts et Métiers ENAM de Conakry qui
forme des aides-ingénieurs de niveau bac+2 ou bac +3, a mis en place un dispositif
permettant de mesurer non pas le taux d’insertion de ses diplômés mais la
répartition de ceux qui occupent un emploi formel entre les principaux
employeurs du pays, qu’ils soient publics ou privés. L’Université La Source,
structure privée, vient d’acheter à la société sénégalaise Academy System un
logiciel de gestion de la scolarité afin de s’assurer la maîtrise du nombre d’inscrits
et de diplômés annuels. Ce dispositif, couplé au système de sécurisation de
l’émission des diplômes de l’Université actuellement à l’étude, devrait constituer,
selon la direction de l’établissement, un préalable à la mise en place d’un outil de
suivi des diplômés.
- Au Burkina Faso, les Universités n’ont pas mis en œuvre un suivi systématique de
l’insertion professionnelle des jeunes diplômés, faute de moyens face au nombre
élevé d’étudiants à suivre (plus de 65 000). La mise en place d’enquêtes
statistiques a été préférée à un suivi systématique. La dernière enquête statistique
11
(2010-2011) portait sur environ 700 étudiants7. En 2011, près de 22% des
étudiants, soit près de 14 000, étaient inscrits dans des établissements
d’enseignement supérieur privés, associatifs ou parapublics. On dénombre environ
61 établissements de ce type : sept universités, calquées sur le modèle français et
organisées selon le programme LMD, et 54 instituts ou écoles. Dans la plupart de
ces établissements, l’insertion est l’objectif principal affiché.
Les résultats sont très hétérogènes et chaque établissement a mis ou prévoit de
mettre en place des outils précis de suivi de l’insertion de leurs diplômés. Chaque
établissement s’est doté d’un questionnaire précis permettant de suivre les
étudiants dans leur insertion. L’Institut International d’Ingénierie de de l’Eau et de
l’Environnement (2iE) de Ouagadougou, constitue l’exemple d’un modèle
performant de suivi de l’insertion des diplômés. Le taux de réponse au
questionnaire d’insertion à 2iE est supérieur à 90%.
7 Cette étude permet de constater que le taux de placement ou d’insertion professionnelle est relativement
faible pour ces diplômés de l’enseignement supérieur. On compte en effet seulement 28% d’étudiants
insérés, tous diplômes confondus
8 Entre 5 et 10% des personnels disponibles sont affectés chaque année à des entreprises privées.
12
20% sont sans emploi après trois ans9. Le secteur moderne n’absorbe que 40% des
diplômés. Le problème social devient politique et il existe une association de
diplômés sans-emplois très active et qui fait entendre sa voix dans les media du
Ghana à l’occasion de chaque élection, dont la dernière élection présidentielle.
9 Une étude de 1996 du ministère de l’Education considérait que 71% des diplômés de l’échantillon
analysé, considéré comme représentatif, trouvaient un emploi dans les 5 mois qui suivaient leur sortie du
service national, 61% dans les « services officiels » et 3% dans les grandes sociétés. Mais la situation s’est
dégradée : une étude plus récente de l’Institut des Statistiques (ISSER) qui porte sur l’année 2011 indique
que 50% des diplômés devront attendre 2014 pour trouver un emploi.
13
III. Appréciation évaluative d’un outil de suivi des diplômés en
Afrique sub-saharienne
Le fossé entre les outils de suivi de l’insertion professionnelle des diplômés dans les
pays développés et en Afrique est encore important même si on peut espérer qu’il se
réduise. On peut analyser cette situation comme suit :
1. La pertinence d’un outil de suivi des diplômés ne fait pas débat. Les pays
d’Afrique sub-saharienne font face à une accélération du phénomène de « chômage
paradoxal » caractérisé par un nombre croissant de diplômés de l’enseignement
supérieur qui ne trouvent pas d’emplois correspondant à leurs formations alors
que les entreprises se plaignent de ne pas avoir localement, à disposition, les
compétences requises par leurs activités. Cette situation s’explique en grande
partie par les progrès de l’enseignement en Afrique : d’après les analyses de la
Banque Africaine de Développement, en 2030, 59 % des 20-24 ans auront reçu un
enseignement secondaire, contre 42 % actuellement. On aura donc, pour cette
tranche d’âge, 137 millions de jeunes diplômés du secondaire et 12 millions du
tertiaire.
Ce rythme de progression ne correspond pas à celui de la création d’emplois,
qu’il s’agisse d’emplois précaires ou d’emplois salariés. Selon les estimations de
l’Organisation internationale du Travail (OIT), de 2000 à 2008, quelque 73
millions d’emplois ont été créés en Afrique, mais seulement 16 millions pour les
15-24 ans.
La capacité d’emploi est simplement trop faible dans les secteurs privé et
public10. La fonction publique reste l’employeur principal du secteur moderne
mais il est et sera de moins en moins important11. Le secteur privé moderne ne
10 L’OIT estime que la population en âge de travailler a augmenté de 21 % (2.6 % par an) en Afrique sur
2000-07. Sur la même période, la croissance de l’emploi a augmenté encore plus, de 23 %, soit 2.9 % par
an. Cependant, en valeur absolue, alors que la population en âge de travailler a gonflé de 96 millions de
personnes, le nombre d’emplois ne s’est accru que de 63 millions.
11 Le Sondage mondial de Gallup indique que, dans les pays africains, l’État emploie actuellement quelque
14
peut absorber une population active toujours plus nombreuse. A titre
d’exemple, au Sénégal, d’après le FMI (2010), le volume d’emploi dans le secteur
formel a stagné ces 15 dernières années : le secteur informel reste le principal
créateur d’emplois. La Banque mondiale dans l’étude YEN/YIF (2009) et le
Rapport national sur la compétitivité du Sénégal (2011) considère que la part
du secteur informel dans les emplois créés se situe entre 80 et 97 % de la
totalité des emplois créés.
Faute de pouvoir, à court terme, modifier cette situation dans sa globalité, il est
nécessaire de contribuer à améliorer l’emploi des jeunes diplômés en travaillant
sur l’adéquation formation/emploi13. La porte d’entrée pour cette démarche
capitale est de connaitre les cursus professionnels des diplômés afin d’apprécier
la correspondance de leurs formations avec les besoins des employeurs.
2. L’efficacité de ces outils dans les pays de l’étude dépend des conditions de mise
en œuvre. La reproduction pure et simple des modèles employés en France et en
Europe ne semble pas possible car il existe des contraintes, notamment
matérielles, qui sont particulières à l’environnement :
tenu de la forte croissance de leur population, il faudrait que les pays de cette région créent 29 millions
d’emplois dans le secteur public, c’est-à-dire 1,9 million par an, pour que ces ratios restent inchangés
jusqu’en 2025, ce qui est improbable.
12 Le Sondage de Gallup réalisé en 2008 et 2010, montre que le profil professionnel des jeunes s’est
nettement dégradé sur cette période avec un recul significatif de la proportion de jeunes salariés parmi les
professions spécialisées et dans le secteur des services, les deux branches qui affichent les niveaux
d’études et de revenu les plus élevés.
13 Dans une enquête de 2011 menée par la Banque Africaine de Développement, auprès d’experts sur 36
pays d’Afrique à propos des principales difficultés rencontrées par les jeunes sur le marché du travail, 54
% estiment que le décalage entre ce que les demandeurs d’emploi ont à offrir et ce que les employeurs
recherchent constitue un obstacle majeur.
15
internet. En Afrique sub-saharienne, les taux de pénétration d’Internet et du
haut débit sont respectivement inférieurs à 7 et 1%. En Amérique latine et aux
Caraïbes, comme en Asie de l’Est et dans le Pacifique, le taux de pénétration
d’Internet tourne autour de 20 %14. Les tarifs de l’accès à Internet en Afrique
subsaharienne sont les plus coûteux au monde15. Mais la demande est immense
et le développement d’internet est inéluctable.
L’envoi de questionnaires par voie postale n’est pas une solution fiable : le
principe est celui de la boîte postale dont tous les jeunes ne disposent pas, la
distribution du courrier se fait plutôt par des sociétés privées de coursiers dont
le coût est élevé, qui ne couvrent pas tous les territoires et qui refusent en
général toute distribution à des particuliers.
14 En Afrique, l’accès à Internet se fait essentiellement par lignes commutées à bas débit. On trouve des
connexions haut débit plus rapides en Afrique du Sud, en Algérie, en Égypte et au Maroc – grâce aux lignes
d’abonnés numériques à débit asymétrique ADSL (Asymmetric Digital Subscriber Line).
15 L’Union internationale des télécommunications (UIT) et la Banque mondiale estiment qu’en moyenne, le
coût d’une connexion haut débit y est d’environ 100 USD pour 110 kilobits/seconde. En Europe et en Asie
centrale, le même type de connexion revient à 20 USD alors qu’en Amérique latine et aux Caraïbes, il
s’établit à 7 USD.
16 Echantillon de 807 diplômés, dont 740 ont été identifiés et 684 réellement enquêtés soit 85% de
l’échantillon total.
16
remise de leur diplôme. Ces questionnaires, à l’instar des outils de suivi réalisés
par la Fondation 2iE17, permettent de connaître la trajectoire professionnelle,
l’entreprise d’accueil et le niveau de rémunération de chaque étudiant. Cela
permet de recenser des informations telles que les coordonnées complètes de
l’entreprise (taille, secteur d’activité, lieu d’implantation), le ou les postes
occupés pendant la période (niveau de responsabilité, salaires, statut).
3. L’efficience de ces suivis, en Afrique, n’est pas optimale. Dans le cadre des
Universités, les outils peuvent difficilement être assez individualisés pour
permettre autre chose qu’une approche statistique et les résultats obtenus après
un processus long ne permettent pas de réaction rapide. Dans tous les cas, compte
tenu des contraintes inhérentes à l’environnement, le rapport coût/efficacité des
enquêtes est défavorable. Ces outils sont cependant indispensables et doivent être
améliorés et multipliés. Pour l’instant les études satisfaisantes de panels qui
suivent les individus au fil du temps et procurent des données sur l’impact à long
terme de l’évaluation et sur la dynamique de la mobilité entre les différents
segments du marché du travail sont encore rares. Lorsque des enquêtes sur la
population active existent, elles sont souvent obsolètes (car elles datent de plus de
cinq ans) et ne contiennent pas de données correctement désagrégées (par âge,
sexe, lieu). Les instituts de formation privés ou associatifs dont le périmètre est
plus limité que celui des universités sont efficaces dans la mise en œuvre de leurs
outils de suivi. Leur efficience n’est pas toujours optimale et varie beaucoup entre
les instituts18.
17La qualité du suivi des diplômés par la fondation 2iE a notamment été saluée lors de l’accréditation de
l’établissement par la CTI et fait partie intégrante des conditions d’obtention de la certification de qualité
ISO 9001_2000.
18 La multiplication des « écoles champignons » spécialisées dans des formations supposées porteuses
d’emploi fait peser une menace sur la crédibilité des outils de suivi de l’employabilité. Il n’existe pas de
contrôle qualité et l’on peut parfois douter des programmes mis en œuvre.
17
des moyens nécessaires à leur mise en œuvre comme le montre le cas du Ghana.
Cependant les prises de conscience observées au Cameroun, au Bénin et aussi au
Ghana permettent de penser que les efforts encore timides vers la mise en place
d’un suivi des diplômés pourra se développer avec peut être un concours actif des
entreprises qui ont de plus en plus besoin de se rapprocher des universités.
5. L’impact de ces outils est avéré dans les pays développés. Il le sera en Afrique dès
qu’ils seront mis en œuvre. D’ores et déjà dans tous les pays cibles de l’étude, les
enquêtes réalisées généralement par les agences de coopération ont permis d’avoir
une meilleure appréciation de la professionnalisation des diplômes. Elles
permettent progressivement de prendre la mesure de la place de l’emploi informel
et de son rôle social. Les autorités ont pris conscience de l’enjeu politique que
représente l’emploi des jeunes en général et des diplômés en particulier.
On peut considérer que l’impact principal de ces enquêtes a été jusqu’à présent
indirect. Elles ont provoqué une prise de conscience de leur utilité et de la
nécessité de les développer et de les améliorer. Elles ont permis de développer
la connaissance. A titre d’exemple, au niveau universitaire, la proportion de
diplômés en lettres, sciences humaines et sciences sociales, est plus élevée que
celle de toutes les autres régions, et le plus faible pourcentage d’ingénieurs pose
les jalons de modifications importantes et nécessaires dans le secteur de
l’enseignement. Ainsi 2 % seulement des étudiants sont inscrits dans une filière
agricole, alors que l’agriculture constitue incontestablement un avantage
comparatif pour l’Afrique. Les études dans les domaines techniques coûtent
cher et demandent un savoir rare. Les pouvoirs publics doivent donc coopérer
avec le secteur privé pour offrir un enseignement technique et professionnel de
qualité, au niveau secondaire et supérieur.
18
IV. Les constats concernant le suivi de la professionnalisation des
diplômés de l’enseignement supérieur en Afrique sub-saharienne
La situation n’est pas linéaire et varie beaucoup d’un pays à l’autre. En règle
générale on peut tout de même dire que :
2. Les outils utilisés dans les pays développés sont transposables mais
doivent être adaptés aux contraintes de la sous-région
Les principes des outils utilisés dans les pays développés pour suivre l’insertion
des diplômés dans leur vie professionnelle peuvent en principe être utilisés dans
19
les pays d’Afrique sub-saharienne. Il faut simplement tenir compte des contraintes
locales et du fait que les diplômés peuvent ne pas comprendre l’intérêt de
participer à la vie des instituts de formation après être entrés dans la vie
professionnelle.
3. Les enseignements tirés des analyses faites à partir des suivis réalisés
sont d’un apport essentiel pour l’orientation des curricula
Les enquêtes, les travaux d’analyse, les projets des agences de coopération sur le
suivi de la vie professionnelle des diplômés ont été riches d’enseignements. Ces
recherches n’en sont qu’à leur début et leur inéluctable développement va
permettre d’affiner les analyses et de contribuer à l’adéquation emploi/formation
des diplômés.
Il y a d’ores et déjà une réelle prise de conscience généralisée du dérapage des
formations diplômantes vers un accroissement toujours plus important des filières
administratives, juridiques, économiques au détriment des filières techniques. Le
potentiel d’emploi se trouve pourtant dans le développement de savoir-faire
technique assez pratique pour répondre aux besoins de qualification des
entreprises.
20
D’après une grande société de recrutement interrogée dans le cadre d’une enquête
de la Banque Africaine de Développement19, l’agro-alimentaire est l’un des rares
secteurs pour lesquels il est quasiment impossible de trouver des candidats pour
des postes de management de haut niveau. C’est pourtant dans ce secteur que les
possibilités de développement sont parmi les plus importantes du continent. Avec
seulement 2% des étudiants du supérieur diplômés dans ce secteur, le risque est
réel de voir ce secteur échapper aux Africains. Compte tenu de l’importance des
industries extractives dans de nombreux pays africains, la pénurie de diplômés
disponibles pour travailler dans ce secteur est tout aussi frappante.
o Une part trop importante des formations consacrée aux métiers du tertiaire
(services) au détriment des formations techniques
D’après une enquête sur l’emploi des jeunes réalisée en 2012 par la BAD auprès
des agences africaines de recrutement et de travail temporaire, les secteurs où il
est le plus difficile de trouver des candidats dotés d’une formation supérieure
sont ceux requérant des qualifications techniques spécifiques, telles que les
industries extractives, la logistique, la chimie et l’industrie pharmaceutique, les
activités manufacturières en général et l’agro-alimentaire.
A l’inverse, 70% des diplômés en Afrique sont issus de formations en sciences
humaines et littérature20. Ils fournissent le gros des troupes de chômeurs car la
fonction publique n’est pas en mesure d’absorber un nombre toujours
grandissant de diplômés dans ces disciplines. En Afrique, certains pays comme
l’Ethiopie ont donc pris le chemin de réformes radicales de leurs systèmes
d’enseignement sur ce simple constat21. Cette approche dirigiste peut paraître
très contraignante mais il est nécessaire de mieux orienter les étudiants, de
sorte qu’ils se dirigent vers l’emploi dans le secteur privé et qu’ils se détournent
pays vers les filières scientifiques et technologiques, au détriment des sciences humaines et de la
littérature (70/30). Le choix de cette stratégie repose sur le fait que les diplômés en médecine, ingénierie
et technologie en général bénéficient de meilleures opportunités d’emploi dans le pays et à l’étranger que
les diplômés en sciences sociales et, dans une certaine mesure, en sciences naturelles (CEA-ONU, 2011).
21
des filières traditionnellement prisées pour entrer dans la fonction publique, à
savoir les arts, les sciences humaines et sociales.
22Attanasio et al. Education Choices in Mexico: Using a Structural Model and a Randomized
Experiment to evaluate Progresa (07/009)
22
V. Recommandations concernant le suivi de la professionnalisation
des diplômés
Même s’il n’est pas réaliste d’imposer un cadre contraignant sur ces études, il est
nécessaire de mettre en place un mécanisme régional qui fournirait à tous les
établissements une trame commune, modulable qui assurerait au minimum une
base méthodologique à tous les établissements publics et privés.
23
C’est au plan régional qu’il serait efficace et efficient de mettre en place les
systèmes d’évaluation et d’assurance qualité des instruments de mesure et
d’analyse qui placeront l’insertion professionnelle et l’adéquation entre emploi et
formation au cœur des critères à remplir. Les formations techniques
professionnelles de niveau intermédiaires nécessitent en effet une masse critique
d’étudiants tous les ans pour avoir une justification économique. Dans la plupart
des secteurs à l’exception de la banque, des NITC, et du tourisme, les formations
techniques, au plan national, ne peuvent réunir assez d’étudiants régulièrement et
sur la longue période pour justifier leur mise en œuvre. C’est en revanche tout à
fait possible au plan régional.
La mise en place d’un tel système régional, dans le cadre du présent FSP pose
problème car le champ géographique assigné touche toutes les organisations
régionales, UEMOA, CEMAC et même CEDEAO avec le Ghana mais pas tous les pays.
Pourtant la légitimité, l’autorité d’une Organisation Régionale semble
indispensable pour donner de bonnes bases à ces outils de mesure de l’insertion
des diplômés.
Sous réserve d’études plus poussées, il semble concevable de créer une structure
régionale qui n’ait pas un caractère régional statutaire mais développe des
relations de tous types avec ces institutions. Il faudra définir une approche
permettant en parallèle une sensibilisation et un appui aux initiatives nationales
pour qu’elles acquièrent et développent les compétences qui permettront une plus
grande efficience de la structure régionale.
24
4. Mettre en place un système d’incitation des diplômés et des
employeurs afin de les impliquer dans ce suivi
Des solutions sont envisageables si l’on veut bien admettre que les contreparties
tant pour les diplômés que les entreprises, peuvent ne pas être d’ordre financier.
Une phase de sensibilisation sera nécessaire pour convaincre les acteurs du
bienfondé de leur implication. Les diplômés doivent entrer sur le marché du travail
et les entreprises, surtout dans le contexte de préférence nationale qui commence
à se développer, ont tout intérêt à disposer de compétences locales pour leurs
activités.
25
VI. Outils
La mise en œuvre des recommandations passe par deux outils distincts mais
complémentaires : l’établissement de « règles du jeu » acceptées par tous les acteurs
pour la collecte et le traitement des informations par l’établissement de chartes
nationales et la création d’un « observatoire » au plan régional qui serait un lieu
d’échanges réunissant toutes les parties concernées et dont l’animation serait assurée
par une équipe réduite de spécialistes à même de traduire les idées et informations
en plans d’action.
Cette charte pourrait s’inspirer de celle qui a été élaborée par le ministère de
l’enseignement supérieur et de la recherche (MESR) en France en collaboration
avec les universités et autres centres concernés dans le cadre d’un comité de
pilotage et d’un groupe de travail technique auquel participent des représentants
des filières de formations. Les dispositions de la charte imposent un ensemble de
règles méthodologiques communes à l’ensemble des universités : une définition
homogène du champ, une date d’observation unique (1er décembre), un tronc
commun de questions à inclure dans le questionnaire d’enquête de l’université,
une période de collecte fixée, allant du 1er décembre au 31 mars de l’année
suivante. Les universités transmettent les données qu’elles ont collectées au MESR
qui en assure l’exploitation.
26
2. L’Observatoire régional de la professionnalisation des diplômes
23Le cadre de l’OCDE dont le Club du Sahel était une composante offrait un cadre de concertation
approprié et une garantie non écrite d’indépendance facilitée par le nombre d’intervenants.
27
être compris s’il produit des résultats. L’exemple du REAO a montré que c’était
possible.
Le processus de départ du REAO qui pourrait être repris, a consisté à réaliser des
« survols » des conditions d’intervention des entreprises du secteur moderne dans
des pays choisis d’Afrique de l’Ouest. Une synthèse des observations a été réalisée
puis diffusée auprès des Etats, des organisations régionales, des entreprises et
organisations représentatives du secteur privé en Afrique de l’Ouest. Ces
observations ont été discutées dans le cadre du Club du Sahel de l’OCDE avec les
agences de coopération bilatérales et multinationales concernées par le
développement du secteur privé.
28
PARITE II :
L’APPRECIATION DES BESOINS DES ENTREPRISES
EN COMPETENCES PROFESSIONNELLES SUPERIEURES
29
L’étude sur les besoins en compétences professionnelles supérieures des entreprises,
nécessite :
La problématique de l’emploi des jeunes en Afrique est bien connue. Les pays de cette
région de l’Afrique subsaharienne, malgré une croissance moyenne de 5% 24, font face à
une situation paradoxale : un nombre croissant de diplômés de l’enseignement
supérieur trouve très difficilement un emploi correspondant à ses qualifications alors
que les entreprises ne trouvent pas aisément les compétences professionnelles dont
elles ont besoin.
Ce paradoxe s’explique par le fait que, dans les années qui ont suivi les indépendances, le
débouché naturel des diplômés était l’administration25. Les plans d’ajustement
structurel successifs, en réduisant les marges de manœuvre financières des Etats, ont
fortement tari l’offre d’emploi par le secteur public. C’est donc de plus en plus, en
principe, le secteur privé structuré qui aurait dû offrir des débouchés aux diplômés de
l’enseignement supérieur.
Ces débouchés demeurent cependant limités car le secteur moderne ne s’est pas
développé au rythme souhaité et n’occupe toujours qu’une part minime de l’emploi des
populations actives dans les économies d’Afrique sub-saharienne. Les autorités des pays
d’Afrique sont confrontées à un dilemme : le vaste secteur informel souffre de sa très
faible productivité et de ses très bas niveaux de salaires, mais absorbe tous ceux qui ne
garantie d’emploi.
30
peuvent pas trouver des emplois de bonne qualité ailleurs, et il procure des moyens de
subsistance à la grande majorité des jeunes26.
L’administration reste un employeur majeur dans les pays étudiés et de fait, est le
débouché préféré des étudiants. C’est ainsi que si l’on considère les proportions des
diplômes universitaires par discipline en Afrique entre 2008 et 2010, les résultats sont
les suivants :
(dont 3% TIC)
La très grande majorité des diplômes (70%) sont attribués dans des disciplines qui sont
celles qui ouvrent, en principe, les portes de l’administration. En réalité l’administration
ne peut absorber un tel nombre de diplômés et les taux de chômage varient selon la
matière étudiée. Les diplômés de domaines techniques, comme l’ingénierie ou les
technologies de l’information, trouvent plus facilement un emploi que ceux issus de
filières littéraires ou des sciences sociales27.
Les formations doivent adapter leurs offres aux besoins du marché. Or l’insatisfaction
des entreprises démontre que des efforts peuvent encore être accomplis pour atteindre
ce résultat28. A titre d’exemple, il est frappant de constater que seulement 2 % des
26 « L’activité informelle et le chômage résultent tous deux d’un mode de développement qui ne parvient pas à
produire assez d’emplois de bonne qualité pour tous. Ce phénomène est accentué par l’incapacité des secteurs
privé et public de faire face à la croissance rapide de la population en général et de la population active, et il
est aggravé par la discrimination et la ségrégation qui s’exercent sur le marché entre hommes et femmes,
entre catégories sociales et entre types d’emplois » (Jütting et Huitfeldt, 2009).
27 D’après les agences africaines de recrutement et de travail temporaire, les secteurs où il est le plus
difficile de trouver des candidats dotés d’une formation supérieure sont ceux requérant des qualifications
techniques spécifiques, telles que les industries extractives, la logistique, la chimie et l’industrie
pharmaceutique, les activités manufacturières en général et l’agro-alimentaire.
28 La banque, l’éducation, le commerce et les technologies de l’information et des communications (TIC)
sont les domaines dans lesquels on a le moins de problèmes à trouver des candidats. Les secteurs de la
31
étudiants ont choisi de se spécialiser dans l’agriculture, cette discipline occupe le même
rang parmi les diplômés d’Afrique et d’Europe, bien que l’agriculture contribue à
hauteur de 13 % au PIB en Afrique, contre 1.4 % en Europe.
banque et des TIC, en particulier, affichent une croissance rapide, ce qui suggère que l’enseignement
supérieur répond bien aux besoins du secteur dans ces domaines.
29 La hausse du nombre de diplômés du supérieur se fait souvent aux dépens de la qualité de
l’enseignement, puisque les dépenses par étudiant diminuent dans toute l’Afrique. En dix ans (1999 à
2009), le nombre de diplômés de l’enseignement supérieur dans les pays d’Afrique subsaharienne à faible
revenu a quasiment triplé (passant de 1.6 million à 4.9 millions). Ce chiffre devrait atteindre 9.6 millions
en 2020.
32
I. Les collaborations entre les établissements d’enseignement
supérieur et les entreprises dans les pays d’Afrique sub-saharienne
Les situations sont diverses mais d’une manière générale le dialogue entre le milieu
universitaire et les représentants du secteur privé, entreprises ou organisations
intermédiaires (OI) est encore peu développé. Une méconnaissance réciproque et
l’absence d’habitudes de travail en commun sont deux facteurs qui tendent à
entretenir un sentiment de défiance mutuelle. Pourtant l’appréciation des besoins en
compétences des entreprises passe par un rapprochement entre les entreprises et les
établissements de formation.
S’ajoutent à ces facteurs d’évolution des attitudes, les conséquences des politiques de
préférence nationale souvent très contraignantes qui imposent aux sociétés l’emploi
de compétences locales.
- Le Bénin est un bon exemple d’un pays où le secteur « formel » est très limité. On
constate une quasi absence d’industries, peu de grandes entreprises
internationales et un tissu économique largement dominé par l’informel 30. Les
perspectives d’évolution sont minces du fait de l’importance du commerce
informel transfrontalier avec le Nigeria31 et d’un environnement des affaires très
peu propice à l’investissement. Cependant, sous les auspices de l’UEMOA s’est
tenue, en décembre 2008, une réunion de concertation des acteurs de
l’enseignement supérieur avec les acteurs économiques. Cette réunion a débouché
30 Le secteur informel au Bénin est considérable du fait du commerce développé avec le Nigeria voisin.
Dans ce pays, pendant que la fonction publique offre à peine 29 400 emplois (soit 9 % des actifs occupés),
et que le secteur privé moderne procure environ 34 400 emplois(soit 11 %), le secteur informel occupe le
devant de la scène avec à peu près 269 800 emplois (soit 80 %) parmi lesquels la seule ville de Cotonou
représente 206 160 emplois. (John Igue LARES 2008).
31 On appelle communément le Bénin, l’Etat Entrepôt selon une formule du Professeur Igue.
33
sur une convention qui parle « d’adéquation emploi/formation, d’implication des
milieux socio-professionnels à la réalisation d’études d’opportunité, d’ouverture de
filières et de la rédaction de curricula » et même « d’offres de stages en
entreprise ». Un décret en ce sens est en cours de validation.
34
l’appui de la coopération française se développe avec la Faculté des Sciences et
Techniques.
35
les attentes en termes de compétences, de métiers nouveaux et de niveau de
qualifications et de traduire ces attentes en cursus de formations. Les résultats
en termes d’insertion sont probants.
Cet observatoire fait appel aux données issues de l’enquête auprès des étudiants
en terme d’insertion, mais également à deux autres questionnaires. Le premier
vise à mesurer le niveau de satisfaction des entreprises ayant eu recours aux
diplômés de 2iE et surtout de recueillir leurs suggestions concernant les futures
compétences attendues. Le second est un sondage qui cible plus
36
particulièrement les diplômés de plus de cinq ans d’expérience, pour retracer
leur parcours professionnel et en tirer des enseignements pratiques pour les
étudiants. Il se veut aussi être un outil de prospective, afin de permettre
l’analyse des évolutions des compétences et des nouveaux métiers à prendre en
considération pour faire évoluer la formation dispensée à 2iE.
- La Guinée est un pays dont le potentiel économique est considérable, avec des
ressources minières et agricoles importantes mais qui reste un Etat fragile. La
diminution des recrutements au sein de la fonction publique, l’explosion du
nombre d’étudiants au sein du système d’enseignement supérieur (+448% entre
2003 et 2010)35 et les besoins croissants en ressources humaines qualifiées des
sociétés étrangères, notamment minières, installées récemment dans le pays sont
les éléments les plus notables de la situation de la Guinée aujourd’hui. Les plus
hautes autorités gouvernementales font désormais de la recherche d’une meilleure
adéquation entre les besoins des acteurs économiques et l’offre de formation une
priorité.
Le modèle le plus développé est celui de l’ENAM, l’Ecole Nationale des Arts et
Métiers qui forme des diplômés de niveau bac+2/3 dans les domaines de la
maintenance industrielle, du génie électrique, et du génie mécanique. Les aides-
ingénieurs diplômés de cet établissement proposent des profils très demandés par
les entreprises du secteur. Le projet du ministère de l’Emploi, de l’Enseignement
Technique et de la Formation Professionnelle, soutenu aussi bien par la CNTG36
que par la CPEG37 et la Chambre des Mines, est de reproduire ce modèle en créant
huit Ecoles Régionales des Arts et Métiers, le nouveau modèle de gouvernance mis
en place par le Ministère leur permettant de proposer des formations
correspondant aux besoins de l’économie locale.
- Le Ghana, bien que très différent de ces pays d’Afrique francophone présente au
moins une similitude : la découverte récente de pétrole et de gaz au large des côtes
a incité les autorités à lancer une politique ambitieuse de préférence nationale
comme l’a fait la Guinée avec son code minier. La mise en œuvre de cette politique,
37
du « local content » nécessitera, entre autres, une forte implication du secteur privé
au stade de la formation et du contenu des formations. En effet, il n’existe pour
l’instant que très peu de formations techniques spécifiques au pétrole et au gaz au
Ghana. Le pétrole découvert au large des côtes du Ghana est « en eaux profondes ».
Les techniques mises en œuvre sont particulières. Pour les enseigner, les
institutions d’enseignement et de formation doivent connaitre ces spécificités,
disposer de professeurs compétents dans ces matières et apprécier au mieux les
besoins des employeurs. Les équipements techniques nécessaires au suivi par les
étudiants de cours pratiques sont très coûteux et les établissements ne peuvent
supporter seuls le coût de leur installation. Des modes novateurs de partenariats
entre entreprises et centres d’enseignement (alternance, formation ouverte et à
distance) sont encore à mettre au point.
38
entreprises acceptent de prendre sur les chantiers, pour une durée de 3 à 6
mois, des professeurs qui seront ainsi familiarisés avec ces techniques. Leur
enseignement sera ainsi mieux adapté car la formation théorique sera renforcée
par une expérience pratique.
Sans aller aussi loin que KNUST38, les autres institutions de formation s’efforcent
d’instaurer des contacts directs avec les entreprises pour mieux apprécier leurs
besoins et essayer de les satisfaire. Les établissements privés ont des postes
réservés aux entreprises dans leurs organes de gestion et de décision.
Ce n’est pas encore le cas pour les écoles polytechniques qui, par définition,
assurent la formation du niveau intermédiaire, le « middle management », qui est
d’une importance cruciale pour les entreprises. Pour l’instant ces écoles régionales
forment en majorité des gestionnaires. Le nombre de femmes diplômées ne cesse
d’augmenter mais elles sont très minoritaires dans les options scientifiques
(environ 3%).
Les écoles polytechniques sont financées en majorité par l’Etat et sont sous le
contrôle d’organismes publics. Seules les représentations officielles du secteur
privé que sont le GEA39 et l’AGI40 ont généralement un siège au Conseil au même
titre que le représentant des syndicats des salariés et plus précisément des
enseignants et des « alumni ». De fait la collaboration entre les écoles
polytechniques et les entreprises reste un « mirage » malgré les demandes de
39
rapprochement régulièrement adressées par les plus hautes autorités du pays qui
ne souhaitent pas que ces écoles concurrencent l’enseignement supérieur mais
qu’elles se consacrent à un rôle de plus en plus important dans le contexte des
années pétrole et du « local content ». Le défi est considérable : parvenir à l’horizon
2020 à un encadrement à 90% national dans les entreprises de la filière pétrole et
gaz. Cet objectif est réaliste pour des entreprises en aval de l’exploration et de
l’exploitation, dans la maintenance et le transport par exemple. Pour que
l’ensemble de la filière puisse atteindre cet objectif, il faudra que les techniciens de
tous niveaux soient formés à ces techniques de pointe. Le personnel technique
d’encadrement est pour l’instant composé à plus de 90% d’expatriés mais la
KNUST a mis au point un enseignement « industrie pétrolière » qui devrait
permettre aux nationaux de travailler dans ce domaine.
40
II. Les collaborations entre entreprises et institutions de formation
dans les pays développés
Cette démarche est commune à toutes les sociétés importantes et, sauf dans les
secteurs où il existe une très importante tension sur le marché du travail,
l’initiative appartient globalement aux établissements d’enseignement.
Certains établissements ont un niveau encore plus poussé de collaboration avec les
entreprises : c’est le cas de la plupart des IUT, IAE et des écoles d’ingénieur. L'IUT
d'Evry a ainsi fait le choix de faire appel, pour de nombreux cours pratiques, à des
salariés du privé ou à des chefs d’entreprise, et ce notamment dans les filières
techniques de Commercialisation et Gestion des Entreprises et des
Administrations. C’est le cas à des degrés divers, de la plupart des IUT en France.
Certaines, comme l’IUT de Lyon font toutes leurs formations en alternance. Il s’agit
d’élargir l’horizon des débouchés des étudiants en leur donnant plus facilement
accès à un réseau de futurs recruteurs, et aussi d’améliorer la pertinence et
l’adaptabilité des enseignements proposés grâce à la vision actualisée du marché
du travail qu’ont les intervenants et formateurs salariés du privé. Le contenu des
formations est alors plus pratique et professionnel.
41
3. Les collaborations pédagogiques
Il existe un troisième niveau de collaboration entre le monde académique et les
entreprises : celui qui institutionnalise une véritable collaboration d’ordre
pédagogique.
Les Ecoles d’entreprises se développent de plus en plus dans une volonté des
entreprises d’élaborer et d’organiser elles-mêmes leurs cursus de formation.
Renault a ainsi récemment ouvert des centres de formation et, chaque année, la
société recrute environ 200 vendeurs pour son dispositif interne de formation en
alternance. Les recrutements s’effectuent sur la base d’un niveau de diplôme
Bac + 2 minimum. La formation dure dix mois et permet d’obtenir une certification
de vendeur agréé reconnue par l’ANFA41. Cette reconnaissance de la branche
professionnelle ouvre à un CDI dans une des concessions du réseau pour environ
85 % des étudiants ayant suivi la formation.
En réalité il est très difficile de concevoir un outil modèle qui soit commun aux
pays développés et aux pays d’Afrique sub-saharienne. Dans ces régions le poids
du secteur informel est considérable, les entreprises de taille appréciable sont en
nombre limité et elles ne peuvent absorber seules l’ensemble des diplômés.
42
III. L’appréciation évaluative de la collaboration secteur privé /
monde universitaire pour répondre aux besoins en compétences et
améliorer la professionnalisation des diplômés en Afrique sub
saharienne
43
4. L’impact est direct et indirect :
L’impact direct est la disposition locale de compétences ce qui permet l’emploi de
diplômés nationaux et limite les expatriés tout en réduisant les charges des
entreprises.
L’impact indirect est une meilleure compétitivité et une efficience accrue des
entreprises nationales, une augmentation des retombées locales pour les Etats
et un développement des compétences techniques des élites nationales. Au-delà
de l’emploi de compétences, le développement de partenariats entre Etats et
entreprises permettra de réduire les incompréhensions mutuelles et peut
contribuer à des changements nécessaires de l’environnement des affaires qui
est nécessaire au développement de l’entreprenariat et donc des emplois.
44
IV. Constats
2. Les incertitudes
o Les attentes des uns vis-à-vis des autres sont irréalistes : l’Université ne peut
seule résoudre le problème de l’adéquation des formations aux besoins des
entreprises ni résoudre une situation économique toujours difficile et les
entreprises n’ont pas systématiquement une vision précise de leurs besoins
qualitatifs et quantitatifs en compétences à long terme.
o Les entreprises du secteur moderne n’ont pas la capacité en termes d’emplois
créés pour justifier la création de formations supérieures même de niveau
intermédiaire dans chaque pays.
45
V.Recommandations
46
4. Inciter à la mise en place de structures de gestion des interfaces entre
établissements d’enseignement et entreprises dans le cadre de
« contrats de développement »
o Procéder par étapes en partant d’une simple indication des besoins par l’analyse
des projets en cours dans les secteurs clés de l’économie
o Participer à la mise à disposition des expertises pour la collecte, l’analyse et le
traitement des données
47
VI. Outils
1. La Communication
La transparence est devenue la règle et si tout ne peut être dit, il est possible de
communiquer sur les projets, les politiques dans les pays et la sous-région où
interviennent les entreprises. Les services économiques des ambassades disposent
de nombreuses informations dont la plupart ne sont pas confidentielles. La
publication d’une « lettre d’information » de ces postes axées sur la communication
des activités et projets des entreprises françaises en accord avec les entreprises
concernées, les agences de développement nationales, les structures nationales de
type « maisons de l’entreprise et guichet unique » serait un premier pas réalisable.
48
2. Aide à la conception de formations
L’outil le plus approprié pour aider à la conception de formation est celui que
constituent les nombreux partenariats entre universités, établissements de
formation français et leurs homologues africains. Nul n’est besoin de nouveaux
projets pour inciter les partenaires français à conseiller leurs homologues sur cet
aspect essentiel de la professionnalisation des diplômés et l’opportunité la mise en
place de formations diplômantes par exemple.
Le projet PAPESAC dans la zone CEMAC qui offre des services en renforcement des
capacités et appuis conseils dans des domaines variés dont entre autres,
l’ingénierie de formation pour « améliorer l’adéquation formation emploi par une
approche centrée sur les compétences », la professionnalisation des enseignants-
chercheurs « pour amener les enseignants à mieux comprendre les réalités de
l’environnement socioprofessionnel et préparer les étudiants à s’y insérer »
doivent être développés et multipliés dans d’autres régions que la CEMAC.
49
éducation, secteur minier, pétrolier etc.) ou privés mais assez importants pour
demander des autorisations et financements publics. Le traitement de ces
informations permettra de déduire au moins les compétences nécessaires
(qualitativement et quantitativement). Leur suivi permettra d’affiner les dates
de mise en œuvre. En général il s’écoule entre trois à cinq ans entre la date
d’entrée d’un projet et sa réalisation, un délai suffisant pour concevoir des
formations.
Pour être efficace et efficient un tel projet doit procéder par étapes par un choix
de secteurs limités et se faire au plan régional et si possible avec l’aval d’une
organisation régionale initié par le FSP pour avoir accès aux données. Les
compétences requises, tant qu’il ne s’agit pas de prospective, sont celles de
statisticiens avec un recours ponctuel à des experts sectoriels. La mise en place
peut être rapide pour faire un test en « retro planning » et avaliser la méthode.
50
CONCLUSION
Certaines réformes hâtent les évolutions comme les politiques de préférence nationale
qui rendent nécessaire la mise en place de formations au plan national et régional pour
répondre aux nouveaux impératifs en termes d’emploi local. Le Ghana comme la guinée
font encore figure de précurseurs mais il est probable que ces pays feront rapidement
des émules. Figurent encore des anomalies comme le faible nombre de diplômés dans
l’agriculture étant donné l’avantage comparatif dont dispose l’Afrique dans ce secteur et
son immense potentiel en termes de commercialisation à l’international de produits
agricoles transformés.
La démarche qui semble la plus adaptée est de privilégier une approche régionale car
une masse critique est nécessaire pour la justification économique de formations
supérieures. Plus encore l’adoption d’outils harmonisés, de concepts acceptés et agréés
par tous est nécessaire et l’approche régionale est alors la plus appropriée.
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