Le Rorschach en Clinique de L'enfant Et de L'adolescent. Approche Psychanalytique-2015
Le Rorschach en Clinique de L'enfant Et de L'adolescent. Approche Psychanalytique-2015
Le Rorschach en Clinique de L'enfant Et de L'adolescent. Approche Psychanalytique-2015
Sommaire
PRÉSENTATION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . V
AVANT-PROPOS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . VII
BIBLIOGRAPHIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 367
Présentation
C
Psychologie clinique et Psychopathologie, ainsi qu’aux praticiens
(psychologues cliniciens, psychologues scolaires) intervenant dans
le champ de la psychopathologie de l’enfant et de l’adolescent et
se propose de constituer une référence pour la pratique de cette
épreuve.
Il vise à présenter les bases de la pratique de l’épreuve du Rorschach
en clinique et en psychopathologie de l’enfant, tant du point de vue
méthodologique que du point de vue de l’interprétation clinique.
Résolument inscrit dans la perspective ouverte par les fondateurs d’une
approche psychanalytique des épreuves projectives, et du Rorschach en
particulier (D. Lagache, D. Anzieu, N. Rausch de Traubenberg), et nourri
des apports fondamentaux des travaux de C. Chabert, cet ouvrage envisage
l’épreuve de Rorschach comme un « dispositif à symboliser », c’est-à-dire
comme une situation mettant à l’épreuve les processus de symbolisation de
l’enfant dans leur mise en œuvre, leur déploiement et leurs avatars.
Cette approche permet de proposer des repères pour une lecture des
productions de l’enfant au Rorschach, tout à la fois inscrits dans la
perspective du développement psychoaffectif de l’enfant et de l’adolescent
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
T
Elle représente, en quelque sorte, le paradigme des outils du
psychologue, elle est sollicitée tout autant par la littérature que
par la publicité pour signifier l’accès possible à une part cachée
de l’individu et, de ce fait, pour définir le commerce singulier
qu’entretient le psychologue avec cette terra incognita que représente
l’Inconscient.
Avec ses dix cartes1 , composées de taches d’encre organisées autour d’un
axe symétrique par la technique du plié/déplié, l’épreuve de Rorschach porte
en elle cette part de mystère et de fascination propre à définir la complexité
de la psyché humaine.
Avec ses dix cartes, et sa consigne qui mobilise l’imaginer, véritable
invitation au voyage dans le monde de la création et de la créativité, l’épreuve
de Rorschach propose un espace de rencontre privilégié dans la clinique de
l’enfant et de l’adolescent.
Mais pourquoi, dans ce contexte, un nouvel ouvrage traitant de la pratique
de l’épreuve de Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent ? Quelle
est la nécessité d’un tel projet au regard de la littérature disponible en langue
française ?
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En outre, quelle est la légitimité d’un ouvrage portant sur une épreuve
dont on pourra fêter bientôt le quatre-vingt-dixième anniversaire de la
publication (Rorschach, 1921) et qui a largement fait ses preuves depuis lors
dans la pratique des psychologues, aussi bien en France que dans de multiples
pays du monde ? En d’autres termes, pour reprendre une interrogation qui
m’est largement adressée par des non-spécialistes de l’épreuve, y-a-t-il encore
1. Dans le champ de la clinique de l’enfant et de l’adolescent, et au regard des écueils rencontrés dans
la pratique clinique, je préfère l’utilisation du terme de carte à celui de planche, dans la mesure de
l’ambiguïté de ce dernier substantif : le terme de planche, de par la polysémie qu’il recèle, entretient
parfois une confusion dans la situation de passation de l’épreuve, confusion qui tend à brouiller la
nécessaire ambiguïté de la situation et qui rend difficile l’interprétation clinique des productions.
VIII Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent
1. S. Lebovici & M. Soulé (1970), R. Misès (1990), D. Marcelli (2009), B. Golse (1994, 1999) pour
ne citer que quelques-uns des principaux auteurs à partir desquels se sont construites les références
qui constituent le fondement théorique et clinique de cet ouvrage.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent IX
Le sens de cet ouvrage tient donc dans cette double confrontation des
avancées psychopathologiques et méthodologiques en clinique de l’enfant
et de l’adolescent.
Mais cet ouvrage est, avant tout peut-être, un ouvrage de praticien, à
destination des futurs praticiens et des praticiens de la psychologie clinique :
inscrit dans une position de psychologue clinicien, praticien de l’épreuve de
Rorschach (et d’autres épreuves cliniques et projectives), position éclairée
par les apports de la recherche actuelle, il se veut résolument orienté sur
les enjeux de la rencontre clinique, médiatisée par l’épreuve projective de
Rorschach.
Les champs dans lesquels se trouve sollicitée la pratique de l’épreuve de
Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent sont vastes et variés :
consultation en psychiatrie infanto-juvénile ou en pédiatrie, indication de
prise en charge psychothérapique, consultation en psychologie scolaire,
consultation et/ou expertise judiciaire dans le domaine de la protection des
mineurs, des enjeux des séparations parentales ou de la délinquance des
mineurs...
La diversité de ces champs de pratique de l’épreuve projective pour le
psychologue justifie la nécessité d’un outil privilégié, qui se propose comme
unificateur de la pratique du psychologue1 , point de repère méthodologique
pour une pratique suffisamment dégagée des enjeux contre-transférentiels
auxquels donne nécessairement lieu le choix de l’épreuve par le psychologue.
Rorschach et médiation
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1. En écho aux propositions lumineuses de D. Lagache sur l’unité de la psychologie (Lagache, 1949).
X Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent
1. Peut-être convient-il plutôt de parler de lecture clinique du matériel recueilli, afin de se prémunir
d’un nouveau risque de confusion : si le modèle de la théorie psychanalytique viendra éclairer tout
à la fois les enjeux du dispositif de l’épreuve de Rorschach et ceux des données cliniques qui s’y
attachent, il ne saurait être question de recourir au modèle de l’interprétation dans le transfert qui
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent XI
spécifie la pratique analytique, mais d’entendre le discours produit sur l’arrière-plan des modalités
transféro-contre-transfiérentielles engagées dans la situation projective.
XII Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent
1. Voir à ce sujet, en particulier, les travaux de S. Bourgès (1973) ou, plus récemment, de R. Debray
(1998), ou de C. Arbisio (2004) et de M. Emmanuelli (2004).
2. Il conviendra de discuter plus précisément, particulièrement avec les travaux de M. Boekholt
(1996), la question de l’âge à partir duquel la passation du Rorschach peut être proposée.
CHAPITRE
1
L’épreuve de Rorschach
Sommaire
J
traité de manière très documentée en particulier par E. Bohm
(1951). Je rappelle simplement que le contexte de l’émergence de la
psychanalyse, comme pratique et comme corpus théorique, consti-
tue le fond sur lequel s’élabore le Psychodiagnostic d’H. Rorschach
au début du XXe siècle. Si l’on ne peut ignorer l’influence de la pensée
psychanalytique sur la mise en œuvre de l’outil clinique du Psychodiagnostic,
ainsi que le montre J. Ellenberger (1954), il convient de rappeler que la
démarche d’H. Rorschach suivra davantage la voie de la caractérologie, et
s’appuiera de manière extrêmement rigoureuse sur une démarche empirique.
Le Psychodiagnostic est considéré par son concepteur non seulement
comme une épreuve d’imagination (Rorschach, 1921, p. 3), mais également
comme une épreuve qui met en jeu la perception et l’idée et implique un
travail d’association : H. Rorschach s’appuie alors sur les travaux d’E. Bleuler
(il cite le Lehrbuch der Psychiatrie 1 d’E. Bleuler publié en 1916) pour définir
les trois termes qui fondent la perception :
« Dans la perception interviennent donc les trois processus de la sensation,
du souvenir et de l’association. » (Rorschach, 1921, p. 3).
Ainsi, dans les attendus même de la méthode, H. Rorschach indique de
quelle manière la dimension de la sollicitation cognitive de l’épreuve a partie
liée avec l’engagement du sujet dans son histoire, et la manière dont il va se
trouver affecté par le stimulus qui lui est proposé.
Peut-être convient-il d’ajouter également deux points d’ancrage de la
méthode d’interprétation libre de taches fortuites dans le champ de l’imaginaire
et des dispositifs de symbolisation, dont la pratique de l’épreuve de Rorschach
auprès d’enfants et d’adolescents ne peut faire l’économie :
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et V. Van Gogh, les considérant dans une parenté avec elle-même dans leur
qualité d’être « sensoriels1 ».
1. D.S.M. : Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, publié par l’Association
Américaine de Psychiatrie.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 9
Je l’ai dit, mon projet est ici celui de l’inscription de la pratique de l’épreuve
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1. En ce sens, cet ouvrage est un prolongement, et un déploiement, d’un certain nombre d’hypothèses
défendues dans le cadre d’un ouvrage collectif : P. ROMAN & Coll., Projection et symbolisation chez
l’enfant, Lyon, P.U.L. 1997.
10 L’épreuve de Rorschach
1. Signalons ici la parution récente (2014) d’un numéro d’hommage de la revue Psychologie clinique
et projective (Erès), en particulier consacré aux apports de N. Rausch de Traubenberg, sous le
titre : Aux fondements psychanalytiques des méthodes projectives. Les travaux contenus dans cette
publication apportent un éclairage précieux sur l’inscription de la pratique des épreuves projectives
dans l’épistémologie psychanalytique.
2. Les propositions méthodologiques de J. Exner, aux États-Unis, reprises de manière prophylactique
dans la formation des étudiants en particulier en France, contient à mon sens ce risque : traduire
la vie psychique d’un sujet en données statistiques, par ailleurs fort savamment construites... dans
la tenue à distance de l’engagement dans la rencontre. Les données recueillies – et le cas échéant,
transmises à des tiers – comportent alors essentiellement une dimension technique, en appui d’une
définition elle aussi statistique d’une symptomatologie psychopathologique (D.S.M.).
3. Voir infra : Méthodologie de l’épreuve de Rorschach en clinique de l’enfance et de l’adolescence,
p. 13.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 11
non consultants).
Le recueil de plusieurs centaines de protocoles de Rorschach d’enfants et
d’adolescents, garçons et filles âgés de 3 à 19 ans, avec parfois des situations
de re-test, sur une période de près de trente ans, autorise un regard large et
diversifié sur les différentes formes d’expression clinique face à l’épreuve.
CHAPITRE
2
Méthodologie de l’épreuve
de Rorschach en clinique
de l’enfant
et de l’adolescent
Sommaire
L
de l’épreuve de Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent
à partir des différents points de vue qui concourent à en fonder
la pertinence. J’ai annoncé, en introduction de cet ouvrage,
l’importance que j’attache à la définition de la méthodologie
et à sa discussion, pour ce qui nous intéresse ici, des dispositifs cliniques. En
effet, si la méthode permet de mettre en œuvre les conditions d’observabilité
de la clinique (à partir des contraintes contenues dans le dispositif même,
dans sa dimension technique, voire technicienne), la méthodologie, quant
à elle, dans sa dimension méta, vient interroger les écarts et les tensions au
cœur desquels se situe la méthode : écart et tension entre la méthode et la
(les) théorie(s) qui la sous-tendent, écart et tension entre la méthode et la
(les) clinique(s) à la rencontre de laquelle celle-ci se confronte.
J’ai eu l’occasion de défendre (Roman, 1997), et je reviendrai sur ce point,
la manière dont la rencontre avec l’épreuve de Rorschach mobilise l’activité
de symbolisation du sujet mais, au-delà, mobilise l’histoire du déploiement
de ses processus de symbolisation.
Voici le point-pivot des propositions méthodologiques que je présenterai
dans le présent chapitre, en appui sur une conception, largement partagée
pour ce qui concerne le champ de la pratique clinique (et en référence
au modèle de la cure analytique), de la fonction de butée du dispositif : le
dispositif vient se proposer dans sa résistance aux manifestations de la psyché,
résistance que l’on va pouvoir aborder à partir de trois axes principaux :
– celui de la répétition,
– celui de l’affect,
– celui de la négativité.
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
Avec D.-W. Winnicott (1971), le jeu prend une place centrale, tout
particulièrement dans le champ de la clinique de l’enfant – et, par
extension, dans celui de la clinique de l’adolescent – particulièrement
lorsque l’on aborde la question de la place des dispositifs d’investigation
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
1. Le terme de désir est ici à entendre dans son acceptation la plus primaire, comme traduisant une
tension en direction de l’objet.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 19
1. La question de la consigne est, à mon sens, une question extrêmement sensible dans ce qu’elle
engage de l’épreuve de la symbolisation. Nous y reviendrons dans la prochaine partie, consacrée aux
propositions de méthode.
20 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
➤ Jeu et objet
Dans la rencontre avec la planche de l’épreuve de Rorschach, se trouve ainsi
mise en jeu la manière dont le sujet va être en mesure de répéter quelque
chose de l’expérience du lien à l’objet.
Dans cette perspective, il me semble que l’on peut, à la suite des travaux
de D.-W. Winnicott (1971), décrire en trois temps distincts l’histoire de
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 21
➤ Le modèle du rêve
1. Le développement de ce point de vue sera présenté dans la prochaine partie : Rorschach et travail
de symbolisation, p. 27.
26 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
imparfaite pour qu’elle facilite une capacité de mise en images dont le travail
du rêve constitue le modèle, D. Lagache ouvre une double perspective : celle
du rêve, bien sûr, dans la liaison avec le rêve de cadre et l’écran blanc du
rêve, tel que B. Lewin (1972) a pu en proposer l’élaboration, et celle de la
transitionnalité, au travers de l’investissement du critère d’indécidabilité de
la qualité du stimulus, transitionnalité que C. Chabert (1997) invitera à
considérer comme fondement de la rencontre proposée avec la médiation
de l’épreuve de Rorschach
➤ Régression et projection
1. La définition des différents critères permettant le repérage de ces indices traversera les
développements des second et troisième chapitres.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 29
1. Sur un plan strictement expérimental, il n’est qu’à faire le constat de l’extrême diversité des
réponses produites par les enfants et les adolescents face aux planches de l’épreuve de Rorschach
pour confirmer cette fonction d’indéfinie transformation. A contrario, la clinique nous permet de
considérer l’incapacité de l’enfant ou de l’adolescent à se saisir de cette fonction du matériel comme
un signe concourant aux indices mobilisés dans la discussion clinique et psychopathologique.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 31
1. Pour s’en tenir, à ce stade de notre développement, à la consigne originale élaborée par H. Rorschach
qui accompagne la présentation successive des dix planches : « qu‘est-ce que cela pourrait être ? ».
32 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
➤ Cadre et symbolisation
1. Voici la définition que je propose de l’enveloppe maternelle primitive (Roman, 1996) : « l’enveloppe
maternelle primitive consisterait dans l’intériorisation des qualités des premières rencontres avec la mère-
environnement, rencontres qui se constituent comme siège des premières émergences de la symbolisation ».
J’ai, à différentes reprises, eu l’occasion de soutenir que le premier dispositif à symboliser de l’enfant,
est le corps de la mère. Dans cette lignée, l’enveloppe maternelle primitive représenterait ces premières
expériences du fond sur lequel se sont développés les mouvements de transformation des éprouvés
primaires sur le plan de la sensorialité : support des premières représentations accompagnant le
processus de mise en image de ces éprouvés, l’enveloppe maternelle primitive soutient les procédures
d’auto-information du sujet, mouvement participant de l’élaboration du Moi-peau.
34 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
Propositions de méthode
➤ Le matériel de l’épreuve
Comme toute épreuve projective, le matériel de l’épreuve de Rorschach
peut être présenté selon deux axes :
• le premier concerne la sollicitation manifeste de la planche et se réfère aux
caractéristiques objectivables de chacune des dix planches ;
• le second concerne la sollicitation latente de la planche et aussi le registre
d’appel implicite contenu dans le matériel projectif.
Les sollicitations manifestes
L’épreuve de Rorschach est ainsi composée de dix planches, que je préfère
nommer cartes dans l’échange avec l’enfant ou l’adolescent1, spécifiées par
les conditions de leur réalisation : taches d’encre disposées sur une feuille,
pliée puis dépliée, se voyant donc organisée sous le primat de la symétrie
(ligne du pliage), symétrie par ailleurs nécessairement imparfaite. Parmi les
dix planches :
• cinq d’entre elles sont réalisées dans des couleurs achromatiques,
s’échelonnant du gris le plus clair au noir le plus profond (ce sont
les planches I, IV, V, VI et VII) ; ces planches sont souvent nommées les
planches noires ;
• deux d’entre elles jouent sur le contraste entre le rouge et le noir, sans
occulter la place des dégradés du gris au noir (planches II et III) ;
l’appellation de ces planches est généralement celle de planches rouges ;
• trois d’entre elles, qui sont les trois dernières dans l’ordre institué de la
passation, se présentent dans des couleurs chromatiques (planches VIII,
IX et X) ; ces planches sont identifiées comme les planches pastel de
l’épreuve.
Par ailleurs, certaines des planches sont marquées par leur caractère
compact ou fermé (I, IV, V, VI, IX), d’autres par leur caractère bilatéral
ou ouvert (II, III, VII, IX, VIII). L’axe de symétrie, qui organise chacune
1. Voir la discussion terminologique à ce sujet, dans les toutes premières pages de l’avant-propos.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 39
1. Pour élargir la présentation des sollicitations latentes, on peut se référer, en particulier, à deux
ouvrages qui font état de leurs propositions à cet égard, celui de D. Anzieu et C. Chabert (1983) et
celui de N. Rausch de Traubenberg (1977).
40 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
La planche I
C’est la planche qui, par définition, introduit l’épreuve et qui, à ce titre, sera éminemment porteuse des enjeux
liés à la rencontre avec l’inconnu, l’imprévisible voire l’étrangeté. Face à cette planche, l’enfant ou l’adolescent
aura donc à trouver un aménagement face à cette situation nouvelle et il en témoignera au travers des réponses
(ou des non-réponses) et/ou des différentes manifestations non-verbales qui les accompagnent. Par ailleurs, au
regard des critères formels qui définissent cette planche (son aspect sombre, massif et relativement uniforme,
et ses découpes aigues, particulièrement dans le blanc), cette planche mobilise la référence à une figure
prégénitale, potentiellement menaçante voire persécutrice. Son caractère unitaire appelle une traduction dans
une forme synthétique ; à ce titre, l’impossibilité pour l’enfant ou l’adolescent d’une proposition synthétique
face à cette planche interroge quant à la mise en jeu de ses potentialités adaptatives.
La planche II
C’est la première de la série des deux planches rouge et noir. Sa bilatéralité marquée invite à l’exploration
des relations spéculaires, organisées autour d’une vacance centrale appelant la dimension de l’incomplétude.
Les enjeux liés à la castration, dans un registre primaire, avec la question de l’intégrité, ou dans un registre
secondaire, avec la question de l’incomplétude sexuée, se trouvent particulièrement activés par la participation
de la couleur rouge. En filigrane, se profile l’appel à la construction d’une représentation qui fait référence à
l’image du corps, en appui sur les deux grands détails noirs bilatéraux.
La planche III
Cette planche possède à coup sûr une place à part parmi l’ensemble des dix planches. Seconde planche rouge
et noir, organisée de manière explicite sur un mode bilatéral, mais ici sur un mode davantage discontinu, elle
mobilise, de manière quasi-évidente, une figuration humaine. Cet appel à la projection d’une figure humaine
entière, le cas échéant investie d’une dimension vitale avec la proposition d’une kinesthésie, vient cependant
buter sur l’ambiguïté qui affecte le stimulus quant aux éléments susceptibles de figurer une appartenance
sexuée, du fait de la présence conjointe d’une forme arrondie, située sur le milieu de la partie médiane noire,
évoquant une poitrine féminine d’une part, et d’un appendice, dans la partie inférieure, support possible de la
figuration d’un sexe masculin. On le comprend, l’enjeu consistera, sur ce plan, pour l’enfant ou l’adolescent
confronté à la planche, à pouvoir mettre en œuvre des stratégies défensives et adaptatives au service d’une
déconflictualisation de cette coexistence bisexuée. Par ailleurs, la participation des deux parties rouges de la
planche, qui sont ici, à la différence de la planche II, clairement détachées de la partie noire principale, invite
à un travail de liaison des différents éléments, dans la construction d’une cohérence.
La planche IV
Après les deux planches rouge et noir, la planche IV confronte à nouveau le sujet à une planche compacte,
sombre et massive. La présence d’un appendice central inférieur particulièrement développé confère à cette
planche son caractère habituellement nommé autour du phallique. À ce titre, la planche IV est considérée
comme celle de la sollicitation à l’égard du masculin et, par extension, du paternel, au travers de la nécessité
de se situer face à un stimulus qui engage le rapport à la puissance. La dramatisation introduite par l’aspect
sombre et massif, colore les mouvements appelés chez l’enfant ou l’adolescent plus particulièrement dans le
registre des angoisses de castration, mais aussi dans le registre d’angoisses plus archaïques (angoisses dépressives,
ou angoisses de persécution en particulier).
La planche V
Cette planche, qui reprend les tonalités sensorielles de la précédente, est organisée, au plan formel, sur un
mode tout à fait différent : elle est sans doute celle qui se présente dans l’équilibre le mieux assuré entre unité et
bilatéralité, ces caractéristiques lui valant le label de planche de l’identité. En effet, face à une telle évidence de
la sollicitation à une figuration unitaire, intègre et vivante, on peut s’attendre à ce que l’enfant ou l’adolescent
ait à mettre en jeu ses propres modèles de structuration identitaire au travers du compromis que représente la
réponse projective. Au regard de la tonalité sensorielle de la planche (le noir sombre du stimulus, mais aussi le
blanc qui l’entoure dont la prégnance est particulière du fait du rassemblement du stimulus au centre de la
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 41
planche), elle mobilise également les affects dépressifs et, partant, au travers des réponses fournies, la qualité
des solutions mise en jeu par le sujet, dans le contexte de l’accès à une identité séparée. On peut noter par
ailleurs que cette planche se présente comme un support pour les mécanismes de dégagement, faisant suite à
plusieurs planches (immédiatement suite à la planche IV, mais aussi aux deux planches rouges) dont l’impact
affectif comprend souvent une part dysphorique.
La planche VI
La construction formelle de la planche met l’accent sur la dimension de la bisexualité : une partie supérieure en
plein, de forme ouvertement phallique, et une forme inférieure en creux, se situant dans un registre d’accueil de
par le déploiement de la tache sur la planche et l’ouverture de celle-ci dans la partie la plus basse. La dimension
d’accueil de la partie inférieure se trouve renforcée par un aspect sensoriel de la planche, lié à l’estompage.
La bisexualité constitue donc la sollicitation latente majeure de la planche et elle interroge les organisateurs
inconscients de la bisexualité de l’enfant ou de l’adolescent. Sans doute cette planche se trouve-t-elle être
la plus sensible aux enjeux liés au développement psychoaffectif : en effet, selon le temps de sa maturation
psychique, l’enfant ou l’adolescent se trouvera plus ou moins en mesure de jouer avec la bisexualité et de
construire, au travers de la réponse, des solutions pour la contenir. Il s’agira donc d’être attentif aux stratégies
déployées par le sujet au regard du stade de développement psychoaffectif dans lequel il s’inscrit.
La planche VII
La structuration de cette planche autour d’une grande lacune centrale, ouverte dans sa partie supérieure,
confère à cette planche une référence éminemment féminine et, par extension, maternelle. Les potentialités
de l’enfant ou de l’adolescent à circonscrire cette lacune centrale dans une forme contenante se trouvent
tout particulièrement mises à l’épreuve. On sera attentif à la manière dont l’enfant ou l’adolescent sera en
mesure de construire le rapport figure/fond face à cette planche, et au fait que la construction de ce rapport
figure/fond témoigne des premiers organisateurs du processus de symbolisation.
La planche VIII
Avec la planche VIII, se trouve inaugurée la série des trois planches dites pastel, en référence aux couleurs
douces et plus ou moins estompées qui concourent à leur qualité sensorielle. Face à ces trois planches, les
réactions affectives sont tout spécialement mobilisées. Cette première planche de la série invite à la construction
d’une représentation en appui sur l’aspect composite quoique relativement compact de la planche. On peut
considérer que se trouve engagé ici, pour l’enfant ou l’adolescent dans sa rencontre avec la planche, un
double travail de lien qui concerne d’une part les liaisons intrapsychiques (coexistence de différents éléments,
hétérogènes dans leur qualité formelle ou leur variation sensorielle) et d’autre part les liens intersubjectifs, dans
la mesure de l’appel à la relation porté par la couleur pastel. La partie (bi-latérale) du stimulus, banalement
interprétée sous la forme d’un animal, se constitue bien souvent en organisateur de ces opérations sous le
signe du lien.
La planche IX
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
À la différence de la précédente, cette planche confronte à une forme de complexité, du fait de l’interpénétration
des trois parties qui la composent. Une lacune centrale, ambiguë, puisque davantage translucide que blanche
du fait des traces de couleur qui s’attardent entre les différents éléments du stimulus, contribue à l’appel à la
régression (à un monde peu organisé, peu différencié, a minima chaotique...), appel paradigmatique de cette
planche, avec la mobilisation de fantasmes intra-utérins (on peut penser aux fantasmes de peau commune
décrits par D. Anzieu comme concourant à la constitution du Moi-peau). Dans ce sens, on comprend que le
registre prégénital se trouve tout particulièrement en jeu dans la rencontre de cette planche.
La planche X
On peut la décrire, dans un premier temps et au regard de son positionnement dans l’histoire de la passation,
comme la planche de la séparation : avec la planche X, se clôt l’aventure projective et, avec elle, un mode
singulier de mobilisation de la vie psychique placé sous le signe du regard... sous le regard du psychologue.
Cet enjeu de la séparation se trouve, d’une certaine manière, figuré par le stimulus qui constitue cette dernière
planche : taches dispersées sur le fond blanc de la planche, ici particulièrement invité dans sa qualité de fond
unificateur : ainsi, la réponse de l’enfant ou de l’adolescent va-t-elle s’élaborer sous le primat de la séparation
ou de la rupture ? En d’autres termes, comment, au regard du registre d’angoisses appelées par cette planche,
le sujet va-t-il être en mesure de proposer une représentation suffisamment cohérente, dont les contours
pourront être suffisamment fiables, stables, afin de garantir une intégrité de la représentation ?
42 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
1. ...Ce qui est souvent le cas de la proposition de dessiner faite à des pré-adolescents, à moins que
l’on ait recours à une épreuve graphique structurée, et faisant explicitement appel à un travail sur
l’imaginaire, telle l’épreuve de l’A.T. 9 (voir à ce sujet : Durand G., L’exploration de l’imaginaire,
1988).
44 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
1. C’est particulièrement dans ce contexte que la proposition d’une passation de deux épreuves
projectives, l’épreuve de Rorschach et le T.A.T., prend tout son sens. En outre, l’épreuve du T.A.T.
est une épreuve qui, par son caractère figuratif, exclut a priori, dans une première confrontation, la
dimension de l’étrangeté : à ce titre, le matériel constitue un support précieux au regard du vacillement
adolescent. À partir de là, il est sans doute inutile de rappeler le caractère complémentaire de l’épreuve
de Rorschach, comme épreuve structurale, et de l’épreuve du T.A.T., comme épreuve thématique.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 45
1. La proposition de l’épreuve de Rorschach dans le cadre d’un bilan associant épreuves cognitives et
épreuves projectives se trouve particulièrement prise dans le risque d’une mobilisation de l’enfant
dans le registre de la réussite et de la performance.
48 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
sous-tendant un début et une fin (« ...dix cartes, les unes après les autres... »)
et dans une double référence à l’objet de la réalité externe (« ...dix cartes
(...) qu’est-ce que cela pourrait être... ») et aux objets internes, impliqués
dans le travail de l’imaginaire, au travers de la mention d’un conditionnel
ouvrant un certain nombre de possibles (« ...je vais te demander de dire,
pour chacune d’elles, qu’est-ce que cela pourrait être... »).
Il n’est souvent pas inutile de compléter la consigne d’une précision sur
la liberté, certes limitée par les censures plus ou moins conscientes qui
organisent la vie psychique de l’enfant ou de l’adolescent, qui préside à la
production des réponses : celle-ci est souvent nommée en faisant référence à
l’absence de normes de réponses (« il n’y a ni bonne ni mauvaise réponse »).
Selon les situations, et en particulier au regard de ce que le psychologue aura
pu entendre des mobilisations défensives de l’enfant ou de l’adolescent dans
le temps d’entretien préalable, cette indication sera donnée d’emblée, ou
introduite en fonction des réactions du sujet face aux planches et à ce qu’il
construit de l’attente que le psychologue peut avoir à son égard : apparaît ici,
en filigrane, la nécessité de se déprendre d’une situation à tonalité normative
(implicitement référée à la situation scolaire), dans laquelle l’enfant ou
l’adolescent chercherait, dans un registre non exempt de séduction, à offrir
au psychologue les réponses que celui-ci s’attendrait à entendre...
Ajoutons enfin que la situation projective, initiée par la présentation
de la planche de Rorschach accompagnée de la consigne, ouvre un espace
imaginaire pour l’enfant ou l’adolescent dont on ne peut a priori définir le
terme au plan temporel : le temps de présentation des planches n’est pas
codifié, et il convient de transmettre au sujet cette information centrale afin
de donner toute sa place et tout son sens au déploiement de l’imaginaire.
C’est habituellement à l’occasion de la présentation de la première planche, et
de l’interrogation plus ou moins explicitée par l’enfant ou l’adolescent sur le
temps pendant lequel il peut/doit conserver la planche, que le psychologue
sera conduit à indiquer au sujet que c’est à lui d’imprimer sa propre
organisation temporelle à la passation. Sans doute cet élément singulier du
dispositif de passation contribue-t-il à une possible appropriation par l’enfant
ou l’adolescent de la situation projective, et soutient-il un investissement
transitionnel de l’épreuve. On peut considérer en effet que l’expérience du
trouvé-créé initiée par la situation projective, si elle concerne avant tout
le lien complexe qui s’établit entre un trouvé au-dehors avec la planche
et le créé au-dedans avec l’image mentale, ne peut faire l’économie d’une
pré-inscription dans le dispositif même de l’épreuve. Entre les planches,
dont la qualité, la singularité et l’ordonnancement échappent au sujet (le
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 49
1. Si les planches sont présentées, de manière standardisée, en position droite, l’enfant ou l’adolescent
a toute latitude, dans son exploration du matériel (et de son monde interne) pour imprimer des
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mouvements de renversement de planche. On notera que le terme de renversement est ici préféré à
celui de retournement, pour rendre compte de la rotation des planches réalisée par le sujet : le terme
de retournement sera réservé à une modalité spécifique de traitement de la planche par l’enfant ou
l’adolescent qui consiste à procéder à un retournement recto/verso de la planche afin de prendre
connaissance des inscriptions portées au dos des planches ; cette curiosité mobilise deux aspects
particuliers dans la saisie du matériel : celui de la numérotation des planches, qui permet de fonder
une position de contrôle sur le matériel, la situation projective et... le psychologue, et celui de la
signature des planches, autour de laquelle pourront s’exprimer les interrogations sur l’origine du
matériel projectif.
2. Il est intéressant de rappeler ici les consignes respectives proposées par D. Anzieu (1983) : « Ce
qu’on vous demande de dire “c’est” tout ce qu’on pourrait voir » et par C. Chabert (1997) : « Je vais vous
montrer dix planches et vous me direz tout ce à quoi elles vous font penser, ce que vous pouvez imaginer à
partir de ces planches. »
3. La question de la non-omission, associée à la libre-association, est explicitement mentionnée dans
la consigne de D. Anzieu et dans celle de C. Chabert : elle ne me paraît pas nécessairement pertinente
dans le cadre de la clinique de l’enfant et de l’adolescent, à l’égard desquels il me paraît prudent de
proposer la plus large ouverture de la sollicitation au travers de la consigne.
50 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
qu’il revêt dans le champ qui nous intéresse, à la fois sur le plan des
engagements transférentiels et moteurs1 .
En contrepoint, il convient de souligner une définition de la posture du
psychologue dans la situation de la passation : si la référence à la « neutralité
bienveillante » peut permettre de signifier la qualité de l’engagement du
psychologue dans la passation de l’épreuve projective de Rorschach, celle-ci
n’épuise pas l’investissement d’une attention et d’une préoccupation du
psychologue à l’égard de l’enfant ou de l’adolescent. Celles-ci pourront être
signifiées selon différentes modalités au fil de la passation, par la voie de
relances en appui sur une répétition de la consigne, ou par la proposition
d’un renversement de planches en mesure de soutenir la production verbale
de l’enfant ou de l’adolescent face à la planche. Une telle intervention peut
s’avérer précieuse afin de tenter de lever des inhibitions massives que l’on
observe parfois chez certains enfants ou adolescents, essentiellement lorsqu’il
s’agit d’inhibitions de type névrotique.
Les temps de la passation
La passation de l’épreuve de Rorschach est classiquement scandée en trois
temps distincts : celui de la présentation des planches, successivement et de
manière ordonnée, celui de l’enquête et, enfin, celui de l’épreuve des choix.
On pourrait y adjoindre un quatrième temps, celui de la transmission, de la
part du psychologue, de sa compréhension du fonctionnement psychique
de l’enfant ou de l’adolescent, transmission souvent nommée « restitution »,
dont il sera question à la fin du présent développement.
• Le temps de la présentation des planches constitue le temps à proprement
parler de la passation de l’épreuve. Il s’agit pour l’enfant ou l’adolescent,
en appui sur la consigne énoncée en début d’épreuve et, le cas échéant,
reprise au fil de celle-ci afin de soutenir le travail de mise en représentation
ouvert par la consigne, de prendre le risque d’une double rencontre,
médiatisée dans la relation transférentielle avec le psychologue : rencontre
de l’inconnu et de l’étrange, de l’Unheimlich de ces planches sans forme
précise (« formes fortuites » indiquait H. Rorschach), et celle de son
monde interne, tel qu’il se trouve sollicité à son insu par le matériel
1. Il importe bien sûr que le psychologue conserve trace de la sollicitation qu’il adresse à l’enfant ou
l’adolescent dans le cadre de l’enquête des limites afin de confronter la verbalisation de l’enfant à la
sollicitation initiale.
2. Une variante de l’épreuve des choix est proposée et/ou rapportée par M. Ravit (2002), variante
dont on peut mesurer la pertinence dans la pratique de l’épreuve de Rorschach auprès d’enfants
ou d’adolescents : elle consiste à demander au sujet de déterminer la planche qui serait pour lui la
planche-maman d’une part, et la planche-papa d’autre part ou, d’après M. Ravit, « deux planches qui
pourraient représenter quelque chose de paternel et deux planches qui pourraient représenter quelque
chose de maternel » (p. 35) : on peut reconnaître que ce dispositif permet d’interroger, de manière
explicite, les fondements identificatoires de l’enfant ou de l’adolescent.
54 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
➤ La saisie du protocole
Une bonne partie de l’enjeu de la pratique de l‘épreuve de Rorschach tient,
au-delà du respect d’un certain nombre de prescriptions liées à la passation,
dans l’attention mobilisée par le psychologue pour la transcription de la
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1. Sans aller jusqu’à contraindre à l’arrêt de l’épreuve dans la mesure du sentiment que ces mouvements
pouvaient être suffisamment contenus dans le cadre de la relation clinique, les manifestations affectives
de Jérémie, âgé de 5 ans et 6 mois, face aux planches de l’épreuve de Rorschach peuvent témoigner
de ce type de difficultés : en effet, aux planches II et III, après la proposition à chacune de ces
planches d’une réponse de monstre (à la planche II : « un monstre » et à la planche III « un monstre
avec des dents »), Jérémie mime, avec force grimaces, expressives d’une angoisse insoutenable, ces
représentations, manifestement affecté par la rencontre (terrifiante ?) de ces représentations. Tout se
passe ici comme si Jérémie se trouvait, dans une situation d’effacement de la frontière entre réalité et
imaginaire, envahi par le stimulus de la planche... et inquiété par lui dans son identité...
56 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
1. Au fil de la pratique le psychologue construit ses propres repères d’abréviation, dans une perspective
d’efficacité, afin d’être en mesure de saisir l’essentiel de la verbalisation...
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 57
➤ La transmission ou synthèse
➤ La réponse au Rorschach
La définition que l’on peut donner de la réponse au Rorschach possède une
dimension tautologique, puisque l’on considère comme « réponse » toute
entité du discours du sujet, suffisamment délimitée dans la dynamique de
l’expression verbale et qui pourra faire l’objet d’une quadruple cotation :
1. Au plan de la localisation de la réponse où il s’agit de pouvoir identifier
clairement quelle part du stimulus, que représente la tache de la planche
de Rorschach, se trouve être le support de la réponse ?
2. Au plan du déterminant de la réponse qui renvoie à la qualité particulière
du stimulus engagée dans la réponse ;
3. Au plan du contenu de la réponse ou, plus précisément, de la classe de
représentation à laquelle appartient la réponse au regard d’une liste
pré-établie ;
4. Au plan du caractère banal ou non de la réponse, caractéristique qui peut
être déterminée en fonction de repères établis à partir de recherches sur
des populations non-consultantes1 ..
A contrario, toute verbalisation ne pouvant répondre aux quatre critères
précédemment énoncés ne sera pas considérée comme une réponse : dans le
projet de la lecture clinique du protocole, le psychologue ne peut cependant
en aucune manière se satisfaire d’une telle restriction du corpus recueilli dans
la rencontre avec les planches de l’épreuve de Rorschach. Il veillera ainsi à
donner toute sa place aux données que l’on dit non cotables du protocole
de verbalisation de l’enfant ou de l’adolescent (exclamations, remarques sur
le matériel, éprouvé subjectif, critiques, nomination des couleurs et/ou des
différents éléments constitutifs des planches, manifestations de chocs...), en
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1. Ce sont à ce jour les travaux de J. Blomart (1998) qui apportent les éléments les plus actuels pour
l’analyse des banalités dans les protocoles d’enfants et d’adolescents, ainsi que ceux de C. Azoulay &
Coll (2007) pour les adolescents (voir infra, synthèse 5).
2. Les travaux de C. Rebourg (2007), représentent, sur ce point, un apport indéniable ; s’ils
concernent, à ce jour, exclusivement la clinique adulte, ils méritent toutefois d’être entendus comme
un enrichissement majeur dans la prise en compte de la dynamique psychique à l’œuvre dans la
production des réponses. Ces travaux constituent une forme de prolongement de travaux plus anciens,
consacrés à l’analyse des modalités discursives de la réponse au Rorschach, dans une approche marquée
par les apports de la psycholinguistique (Cosnier, 1969).
62 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
➤ Présentation du protocole
Le protocole de Rorschach se présente comme la succession de la verbalisation
de l’enfant ou de l’adolescent telle qu’elle se déploie au fil des planches. Au
sein de cette verbalisation, sont identifiées les réponses au sens Rorschach de
l’utilisation de ce terme (voir supra), numérotées en continu de la première
à la dernière planche.
Pour des raisons de commodité dans la perspective du traitement du
protocole, il est proposé d’adopter une présentation du protocole en trois
colonnes1, présentation qui correspond au canevas à partir duquel la
verbalisation de l’enfant ou de l’adolescent pourra être recueillie dans le
temps de la passation :
• La première colonne porte le recueil du corpus de verbalisation, elle est
précédée de la mention de la planche considérée et du temps pendant
lequel l’enfant ou l’adolescent se tient face à la planche2 ;
• La seconde colonne permet, au regard des réponses énoncées lors de la
passation, de porter mention des éléments recueillis à l’enquête (précisions
sur la réponse, inflexion de celles-ci, ajouts de nouvelles réponses) ;
• La troisième colonne est réservée à la cotation de chacune des réponses,
ainsi qu’aux commentaires qui peuvent les accompagner (référence aux
tendances3 qui émergent de la lecture clinique des réponses, hypothèses
de compréhension du processus en jeu dans la production de la réponse
1. Voir en p. 67 et suivantes un exemple de présentation d’un protocole, ici celui d’un enfant de
9 ans et 9 mois.
2. Le temps total indiqué en fin de protocole comprend le temps strictement consacré à la passation
de l’épreuve, le temps de l’enquête, qui est souvent plus important que celui de la passation, n’est pas
pris en compte dans le temps de la passation.
3. On nomme tendance au Rorschach la présence d’un critère de cotation pour lequel un doute
empêche de le considérer comme partie prenante de la cotation. Exemple, planche V, Romain,
12 ans : « un papillon de nuit », enquête : « c’est la forme, les papillons de nuit ont des ailes plus longues,
elles leur servent de gouvernail la nuit ». Dans cette réponse, le caractère sombre de la planche n’est pas
explicitement nommé pour expliciter le choix du « papillon de nuit », alors même que la référence
à la nuit est énoncée de manière prégnante ; une cotation de la prise en compte de la couleur
achromatique (G FC’ A Ban) pourrait apparaître comme une extrapolation au-delà du discours du
pré-adolescent. On pourra préférer une cotation du type : G F+ A Ban > FC’.
64 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
lorsque celui-ci n’apparaît pas dans une telle évidence qu’il peut se trouver
inclus dans la cotation...).
pour la planche interprétée après une rotation d’un quart de tour sur
la gauche ;
▼ pour la planche interprétée après une rotation d’un demi-tour.
Modèle de psychogramme
Nom : Sexe : Age : Date :
Prénom :
R: Refus :
G: } F: }F% H: }
Gz : } Hd : }H%
Gbl : }G% F+ : }
G Conf: } F+/- : } F+ % (H) :
G Cont: } (Hd) :
F- :
(G) : A: }
K: Ad : } A%
D: }D% Adev :
kp : (A)
Do : kan :
Ddo : kob : Scène :
kex :
Anat :
FC : Sexe :
Dd : CF : Sang :
Ddi : C:
Dde : Bot :
FC’ : Elem :
Dbl : C’F : Frag :
C’ : Obj :
Ddbl : Pays :
Cn Géo :
Type d’appréhension Art :
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G%: FE : Sci :
D%: EF : Symb :
Dd % : E: Arch :
Dbl % : Abstr :
FClob : Divers :
Succession : ClobF :
Clob : Ban :
F+ % élargi : Ang % :
!
C: Pl + :
TRI : Pl h- :
! !
k/ E :
RC % :
66 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
11 (L. 0 :10) Ça... je sais pas D1, D7, D8, D9, D6, D4
des petits monstres...
X 0:00:35 DD kan (A)
qui viennent un peu par-
tout... voilà.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 67
Psychogramme résumé
Temps total : Temps/ réponse : Temps latence moyen :
R = 11
4. 25’ 0. 26’ 0. 02’
G:7 F:7 F% : 63 H:2
D:2 F+ : 5 F+% : 71 Hd : 1
DD : 1 F- : 2 Anat : 1
D/Dbl : 1 H% : 27
K:2
G% : 63 kan : 1 A:4
D% : 37 A% : 37
FE : 1 (A) : 1
Bot : 1
ΣC:0 Arch : 1
RC% : 27 Ban : 5
Ang% : 18
ne fait que repasser, sur le mode de la spirale, sur les traces des registres
précédents pour en reformuler l’économie.
La mise en œuvre de l’hypothèse qui sous-tend la pratique d’une épreuve
projective considérée comme un « dispositif à symboliser » consistera alors
à repérer, au décours des productions projectives, la manière dont elles
témoignent de ce travail de transformation pulsionnelle, en mettant l’accent
sur les va-et-vient qui animent la vie psychique dans les différents temps de
son élaboration.
1. On peut se référer à la manière dont V. Shentoub (1990) propose d’utiliser le terme de dégagement
pour qualifier, face à l’épreuve projective du T.A .T, les modalités selon lesquelles un sujet se trouve
en mesure de construire, dans le récit, une issue à la situation nécessairement conflictuelle à laquelle
confronte chacune des planches de l’épreuve.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 75
1. Clinique de la passation
Conditions générales de la consultation ;
Mode d’engagement transférentiel ;
Qualité d’investissement de l’épreuve ;
Climat de la rencontre.
2. Les processus de pensée
Mode d’investissement du langage ;
Déploiement de la pensée (continuité/discontinuité) ;
Registre de la symbolisation ;
Qualité du discours et de l’appréhension du matériel de l’épreuve ;
Adéquation des expressions de l’enfant ou de l’adolescent aux éléments
de la réalité externe.
3. Le traitement des conflits
Registre des angoisses ;
Forme des stratégies défensives ;
Mode de relation d’objet ;
Construction identitaire ;
Repères identificatoires.
4. Synthèse et perspectives cliniques
Principaux éléments concourant à situer le registre du fonctionnement
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
1. Pour un développement sur ce point, et une discussion sur les rapports entre projection, création et
symbolisation, voir P. Roman (2001), « Des enveloppes psychiques aux enveloppes projectives: travail
de la symbolisation et paradoxe de la négativité », Psychologie clinique et projective.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 79
1. La référence à l’ouvrage d’A. Green (Le travail du négatif, 1993) est ici implicite, et elle traverse
l’ensemble des propositions évoquées dans le présent texte : la perspective de définition des figures du
80 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
négatif permet de contenir les différentes modalités de mise en jeu de la négativité dans les expressions
projectives.
1. On parle parfois de vide intermaculaire, dans une formulation sans doute abusive, en ce qu’elle
préfigure a priori le registre dans lequel le blanc est investi...
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 81
– La cotation en Dbl, pour une réponse qui s’appuie sur une découpe
centrée sur une partie blanche significative de la tache1 ;
Louisa, 7 ans, planche II
« Un gros trou » (dans le blanc central).
Félix, 17 ans et 10 mois, planche II
« Vous voulez que je vois quoi ? on dirait une toupie comme ça, comme
ça on dirait un missile. »
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– La cotation en Ddbl, pour une réponse qui s’appuie sur une découpe
centrée sur une partie blanche marginale de la tache.
Amel, 12 ans et 9 mois, planche IX
« Un nez » (dans le petit détail blanc intermaculaire dans le détail axial).
Ces cotations reposent sur une lecture que l’on pourrait qualifier de
statique du mode d’appréhension du blanc comme entité en soi. Elles
1. Une liste des découpes reconnues comme détails significatifs, dans le blanc ou dans d’autres
parties du stimulus, a été établie sur des critères statistiques et fait référence pour la détermination
des Dbl versus Ddbl, de même que pour la détermination des D versus Dd. Voir à ce sujet D. Anzieu,
C. Chabert, 1983, et la Synthèse 3, p. 96.
82 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
L’effet de blanc peut être repéré ici dans l’évocation implicite d’un en-creux
de la représentation, manifestement porté par le détail blanc central, à l’égard
duquel ce pré-adolescent tente de proposer une forme de continuité, à partir
de la restauration de sa fonction de contenance (il s’agit de mettre « quelque
chose dedans », pour reprendre la formulation d’Abdel). Pour d’autres, ce
seront les manifestations de rupture qui accompagneront l’appréhension du
blanc...
Au-delà d’une approche phénoménologique de la place de l’appréhension
du blanc dans les productions projectives, il convient d’aborder la valeur
clinique de celle-ci au regard des modes d’expression à partir desquels ils
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
(G, D, Dd), dans la place respective qu’ils occupent et dans leur succession
au fil du protocole ? De quelle manière ces modes d’appréhension, au-delà
de ce qu’ils témoignent d’un type de découpe retenue par l’enfant ou
l’adolescent, peuvent-ils être envisagés du point de vue de la dynamique
de la construction des réponses ? Comment peut-on définir une histoire
des configurations de découpe du stimulus au regard du développement de
l’enfant et de l’adolescent ?
Les réponses globales
En premier lieu, l’approche des différentes formes de réponses globales (G)
permettra de situer la qualité de la démarche visant à la découpe du stimulus,
support de la mise en représentation. On distingue classiquement quatre
formes principales d’appréhension globale de la planche :
88 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
– Les réponses globales élaborées, dont la particularité a été relevée par S. Beck
(1961) font l’objet d’une cotation particulière au sein des réponses globales :
Gz. Je retiendrai seulement ici la spécification de ces réponses élaborées, qui
reposent sur l’association entre plusieurs éléments du stimulus, identifiés
comme tels, afin de produire une réponse globale, sans reprendre les
propositions de S. Beck de définir différents degrés d’élaboration2 afin de
ne pas alourdir les propositions de cotation.
Ces réponses n’apparaissent que de manière assez exceptionnelle chez les
jeunes enfants.
Maryline (6 ans) tente une telle organisation de la réponse à la
planche III :
« Des oiseaux qui sont à la recherche d’un masque et ils l’ont trouvé...
avec un nœud-papillon au milieu », enquête : « là, la fesse des oiseaux,
un vrai nœud-papillon (D3) et là des chauves-souris (D2) ».
– Planche VIII : « on aurait dit des personnes (D1) qui taillent un arbre
pour faire une drôle de forme et en dessous de cet arbre il y a des personnes
qui font un pique-nique »,
– Planche IX : « on aurait dit... deux dragons qui se crachent du feu, là
(D3)... et en bas ça serait comme une sorte d’arène où ils sont les deux
dessus », enquête : « leur grand cou (dans D3), et leur corps (D1) ».
On peut ainsi considérer que la valeur des réponses globales élaborées n’est
pas univoque. En effet, tantôt celles-ci renvoient à une tentative d’organiser
le monde, afin de mieux pouvoir se le représenter (on peut ici se référer à
la proposition de Sami-Ali selon laquelle : « la projection est un mode de
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– Les réponses globales vagues ou impressionnistes, par contraste avec les réponses
globales élaborées, se caractérisent par la fragilité de la définition de leur
ancrage formel sur le stimulus de la planche. Souvent associées à une
forme indécise ou à une approche sensorielle du stimulus, ces réponses
témoignent davantage d’un climat que d’une véritable structuration de la
tache. D’une certaine manière, ces réponses vagues ou impressionnistes
marquent une forme de retrait dans le monde imaginaire, au détriment
d’une saisie du stimulus qui repose sur une élaboration de ses différentes
composantes. Ainsi, ces réponses vagues ou impressionnistes témoignent-
elles d’une approche éminemment affective de la tache, dans des inflexions
que l’on peut néanmoins discriminer :
• Les réponses globales vagues mettent en jeu une mise à distance à l’égard
du travail représentatif, elles font l’économie d’une maîtrise perceptive de
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 93
dessin, c’est bon » (enquête : « le dessin d’un bébé qui a fait n’importe
quoi »), ou Virginie, 7 ans et 2 mois, planche VIII : « un arc-en-ciel »
(enquête : « plein de couleurs »). Pour Raphaëlle, 14 ans et 1 mois, la
réponse globale impressionniste semble avoir une fonction proche de
celle de la réponse globale vague évoquée précédemment, celle de tenir
à distance les émergences anxiogènes liées à la couleur : à la planche
IX : « un coucher de soleil » (enquête : « qui se reflète dans l’eau... le
soleil)... tout comme pour Thierry, 18 ans : à la planche II, il propose
une première de ces réponses, prise dans une tension implicite entre un
traitement formel (« concret ») du stimulus et l’évocation d’un éprouvé
de l’ordre de l’intime, après un temps de latence d’une minute : « ça me
dit pas grand chose... je verrais surtout un... une sorte de décoration des
94 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
aborigènes qu’on pourrait faire sur la figure, un rituel, une sorte de rituel
que les aborigènes feraient... c’est ce que je verrais de plus concret... vous
voulez des choses concrètes ? », puis à la planche X : « feu d’artifice... un
feu d’artifice ouais... une sorte de... plus complet, un big-bang de la terre,
tout plein de couleurs ».
1. Une liste pour la cotation des réponses de grand détail est disponible dans l’ouvrage de N. Rausch
de Traubenberg : La pratique du Rorschach (P.U.F, 1970), une autre est proposée par J. Blomart
(1998), enfin, les travaux de M. Emmanuelli et C. Azoulay (2009) conduisent à reconsidérer la liste
des grands détails pour les adolescents. Une liste est proposée dans la synthèse présentée ci-après.
96 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
Planche I
D1 : saillie médiane (« pinces »)
D2 : détail latéral (droit, gauche ou les deux)
D3 : détail médian inférieur (bas de la partie axiale)
D4 : ensemble de la partie axiale (G – D2)
D5 : détail médian supérieur (haut de la partie axiale)
D7 : bord supérieur de D2
D8 : extrémité latérale de D2
Planche II
D1 : détail latéral (un seul)
D6 : des deux détails latéraux (ensemble du noir)
D2 : rouge supérieur (l’un, ou les deux)
D3 : rouge inférieur
D4 : partie supérieure médiane de D6
Dbl 5 : lacune centrale
Planche III
D1 : ensemble du noir
D2 : rouge supérieur (l’un, ou les deux)
D3 : rouge médian
D4 : détail inférieur médian (limité aux parties les plus foncées, sans la jonction grise)
D7 : ensemble du détail inférieur (y compris le gris central)
D5 : partie inférieure latérale de D1 (« jambe »)
D6 : partie supérieure latérale de D1 (« tête »)
D9 : détail latéral de D1 (« bonhomme »)
Planche IV
D1 : détail axial inférieur
D2 : détail latéral (extrémité)
D6 : détail latéral entier (« botte »)
D3 : détail supérieur médian (« tête »)
D4 : détail latéral supérieur (« bras »)
D5 : ensemble de la partie axiale
Planche V
D1 : détail latéral à l’extrémité (« tête de crocodile »)
D2 : détail médian supérieur, l’un ou les deux (« oreilles de lapin »)
D3 : détail médian inférieur, l’un ou les deux (« patte »)
D4 : détail latéral entier (« aile de papillon »)
D6 : ensemble du détail médian supérieur
D7 : détail axial entier
D9 : ensemble du détail médian inférieur
Planche VI
D1 : ensemble de la partie inférieure de la planche
D2 : détail axial supérieur (D5 – D12)
D3 : partie supérieure médiane (« tête de chat avec les moustaches »)
D4 : détail latéral inférieur (1/2 de D2)
D5 : ensemble du détail axial
D6 : saillies de la partie supérieure médiane (« ailes »)
D8 : détail supérieur entier (G – D1)
D9 : détail latéral inférieur
D12 : détail axial inférieur (D5 – D2)
Planche VII
D1 : détail du tiers supérieur
D2 : détail des deux tiers supérieurs
D3 : détail du tiers médian
D4 : détail du tiers inférieur
D5 : saillie supérieure dans D1
Dbl7 : lacune centrale
Planche VIII
D1 : détail latéral (« animal »)
D2 : détail inférieur médian (rose-orange)
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Planche IX
D1 : détail latéral intermédiaire, l’un ou les deux (vert)
D3 : détail supérieur, l’un ou les deux (orange)
D4 : détail latéral inférieur dans D6 (rose)
D5 : ensemble du détail axial
D6 : détail inférieur (rose)
D7 : projections supérieures dans D3 (brun-orange)
Dbl8 : lacune centrale
D12 : détail latéral supérieur et médian (orange et vert)
98 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
Planche X
D1 : détail latéral bleu
D2 : détail jaune médian
D3 : détail rouge médian (« cerises »)
D4 : détail vert latéral inférieur (« hippocampes »)
D5 : détail vert médian inférieur (« tête de lapin »)
D6 : détail bleu médian (« soutien-gorge »)
D7 : détail gris-brun latéral (« insecte »)
D8 : détail gris latéral supérieur
D9 : détail rose latéral, l’un ou les deux
D10 : détail vert inférieur entier
D11 : détail gris supérieur entier
D12 : détail vert latéral supérieur
D13 : détail brun-rouge latéral inférieur
D14 : détail gris médian (D11 – D8)
D15 : détail jaune latéral
D16 : détail associant D2+D3+D4+D6+D9+D11 (« visage d’une personne »)
– Les réponses de grand détail unitaire (D) reposent sur l’appréhension d’une
seule de ces parties identifiées comme significatives pour une telle cotation.
La définition et la description des planches de l’épreuve de Rorschach
mettent en évidence que toutes les planches ne proposent pas la même
disponibilité pour la mise en œuvre d’une découpe en grand détail unitaire :
les planches caractérisées par la bilatéralité (II, III, VII, VIII et X) seront, on
le comprend, davantage accessibles à une telle découpe, alors que les planches
caractérisées par leur dimension compacte nécessiteront un engagement plus
marqué en vue de la découpe en grand détail.
La saisie du stimulus dans une découpe limitée apparaît comme le fruit
d’une démarche qui repose sur la capacité de l’enfant ou de l’adolescent
d’opérer une discrimination perceptive et de prendre appui sur elle pour
l’interprétation du stimulus : cette opération requiert d’être en mesure, afin
de privilégier une partie du stimulus, d’absentifier les parties non retenues
pour cette découpe. Dans cette perspective, la proposition d’une réponse
en appui sur un grand détail unitaire rend compte de la mise en œuvre
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 99
Il n’est pas rare, par ailleurs, que ces réponses de grand détail combiné
mettent en jeu une découpe de grand détail (D) et une découpe de grand
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 101
détail blanc (Dbl)1 , réponses que l’on pourra identifier par une cotation
DDbl (ou D/Dbl). Le blanc est alors convoqué le plus souvent dans une
figure de fusion-forme-fond.
Comme pour Norredine, 11 ans et 5 mois, à la planche II : « une fusée »
(enquête : « la fusée avec le feu qui sort de la fusée » : Dbl + D 3).
Dans d’autres configurations, le choix d’une association entre une découpe
de grand détail et un détail blanc contribue à une mise en perspective, dans
une actualisation d’un fond sur lequel se découpe une forme.
Ainsi, Vivien, 13 ans et 2 mois, propose-t-il, à la planche III : « ou encore
un col avec un nœud-papillon », réponse qui prend en compte outre le
détail rouge central (D3) le fond blanc sur lequel celui-ci se déploie.
De la même manière, un certain nombre de réponses qui impliquent
le fond de la planche en le convoquant plus ou moins explicitement,
particulièrement à la planche X dont on connaît la dimension éminemment
dispersée du stimulus, se construisent comme des réponses de grand détail
combiné associant le blanc de la planche, dans des configurations soit
architecturales soit de représentation humaine :
Fabrice, 13 ans et 8 mois : « là en bas, on dirait un pont-levis (D8),
ensuite une cour intérieure (Dbl central)... ça fait penser à un château, oui,
vite fait... les remparts (D9), la citadelle (D12)... contre une roche, sinon ils
seraient pas aussi inclinés les remparts ».
Amélie, 16 ans et 2 mois : (elle rit à la présentation de la planche) «alors
là je vois un homme avec les jambes, le corps et la tête » (enquête : « les
jambes, les bras, la tête » : D10 + D1 + D3).
Si la prise en compte du blanc peut assurer une fonction unificatrice au
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
1. Nous ne reviendrons pas ici sur la présentation spécifique des réponses proposées dans les grands
ou petits détails blancs, qui ont fait l’objet d’une discussion détaillée dans le développement consacré
à la différenciation forme-fond, p. 81.
102 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
de la représentation.
Il semble assez clair dans ces deux réponses que la sollicitation phallique
du détail inférieur de la planche IV d’une part, le détail supérieur de la
planche VI, dont la parure apporte un élément d’excitation supplémentaire
d’autre part, dans un contexte où l’adolescent s’est trouvé en difficulté
pour proposer une réponse humaine à la planche III (déconflictualisation
impossible de la sollicitation bi-sexuelle de la planche ?), confronte Germain
à une situation extrêmement périlleuse. La seule issue semble pour lui le
recours à un processus de censure qui conduit à la production d’une réponse
globale amputée. Notons que pour chacune de ces réponses, Germain est
en mesure de proposer une représentation, approximative et/ou dénigrée,
de la petite partie du stimulus non interprétée.
108 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
Dd : réponse de petit détail (toute découpe non identifiée comme un grand détail)
Dde : découpe correspondant à un petit détail de bordure (petit détail extérieur)
Ddi : découpe correspondant à un petit détail au cœur du stimulus (petit détail intérieur)
Ddbl : toute découpe dans le blanc de la planche autre que les réponses de grand détail blanc
D/Ddbl : réponse proposée à partir de l’association d’un grand détail et d’un petit détail blanc
Ddo : petit détail oligophrène, résultant d’une censure représentative (seule une part d’une représentation
entière banale, appréhendée habituellement en réponse de grand détail, est proposée)
1. Cf. Synthèse 3 p. 96 consacrée à la détermination des réponses de grand détail, par planche.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 111
1. Malik (10 ans et 1 mois), à la planche III : « on dirait deux personnes là, qui touchent quelque
chose » (enquête : « (...) elles ont deux seaux ») ; cette réponse sera cotée G K H Ban, la référence au
déterminant formel n’apparaît pas dans la cotation, alors même qu’il est nécessairement impliqué
dans l’élaboration de la représentation des « personnes », conditionnant dans un second temps la
projection du mouvement.
2. Noémie (7 ans), à la planche VIII : « là il y a du feu... » (enquête : mentionne le D1) ; cette réponse
sera cotée D CF Elem, la couleur s’avérant décisive dans la production de la réponse, au détriment
de la forme qui, elle, n’apparaît que de manière très secondaire... Juliette (16 ans et 9 mois), à la
planche II : V. « un volcan » (enquête : « ici le haut du volcan – D3 – mais on voit bien l’intérieur de la
terre – Dbl + D2 – mais c’est surtout le haut, la couleur qui fait penser à un volcan » ; cette réponse sera
cotée Gbl CF Pays, afin de rendre compte de la primauté de la prise en compte de la couleur sur la
forme dans le processus de production de la réponse.
3. Brice (6 ans et 4 mois), à la planche IX : « un arbre » (enquête : « la terre – D6 –, le bois – Daxial
- les feuilles vertes – D1 – et les branches marron – D3) ; cette réponse sera cotée G FC Bot. Le
déterminant formel est privilégié dans la mesure des éléments apportés par l’enfant à l’enquête quant
à la construction formelle de la réponse au regard de la correspondance ; le déterminant sensoriel, ici
la couleur, intervient comme second déterminant, dans la mesure du lien explicite proposé entre les
éléments constitutifs de l’arbre et les couleurs de la planche. Flora (13 ans et 1mois), à la planche II :
« un hérisson mort » (enquête : « ça a un trou, c’est gros, c’est noir ») ; cette réponse sera cotée D/Dbl FC’
Adev. De la même manière que pour la réponse précédente, le déterminant formel semble organiser la
représentation, qui se trouve affectée secondairement par la référence à la couleur noire du stimulus.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 113
approche du matériel est avant tout sensorielle, dominée par ce que l’on
appelle des nominations-couleur (dont on pourrait ici discuter la pertinence
au regard de l’inadéquation entre le stimulus noir et gris et la référence à la
couleur marron...). Cette approche tente timidement de faire émerger une
forme (« un dessin ») sans que celle-ci ne puisse être définie au-delà d’une
référence à la classe de contenu à laquelle renvoie le signifiant « dessin ».
En contrepoint, on peut considérer les réponses proposées par Brice
(6 ans et 4 mois) aux deux mêmes planches :
– Planche I : « Une abeille... je voulais dire un papillon mais je me suis
trompé » (enquête : « je croyais c’était pas une abeille... avec pas de petits
trucs blancs... moi je sais pas comment ça s’appelle ») ;
114 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
Les réponses proposées par Brice à ces deux premières planches montrent
bien comment peut s’élaborer la production d’une réponse dominée par un
déterminant formel (planche I, avec les tâtonnements liés à la construction
des limites du stimulus, en particulier autour de la prise en compte des
parties blanches de la planche...) et tenter de s’articuler déterminant formel et
déterminant sensoriel (planche II) autour de la projection d’un mouvement
sur la planche.
On comprend bien alors l’importance que revêt l’articulation entre
différents modes de détermination des réponses, c’est-à-dire entre différents
modes de mobilisation de l’enfant ou de l’adolescent face aux planches. Si la
dimension de l’ancrage formel garantit une forme d’accès à une organisation
structurée de la représentation, la mobilisation de ce seul ancrage formel
traduirait une rigidification dans l’appréhension du monde, au détriment
de l’expression affective portée par la dimension sensorielle du stimulus.
Nous aurons à envisager, dans le développement consacré aux détermi-
nants sensoriels des réponses, la manière dont la participation formelle se
trouve en mesure de contribuer, à des degrés variés, à une forme de plasticité
dans la construction des représentations.
La qualité formelle de la réponse et la banalité
L’enjeu principal dans la prise en compte du déterminant formel, au-
delà de la reconnaissance de sa participation propre dans le processus de
production de la réponse, tient dans la prise en compte de la qualité des
réponses formelles : celles-ci auront en effet, dans le système inauguré par
H. Rorschach, à être identifiées dans leur valence positive (cotée F+) ou
négative (cotée F-), voire incertaine (cotée F±). La distinction des réponses
formelles selon leur qualité constitue un exercice périlleux, dans la mesure de
la complexité de la définition même de la « bonne forme1 », définition dont
il convient de signaler d’emblée qu’elle ne devrait en aucun cas recouvrir
un élément sous-tendu par un jugement de la valeur des réponses formelles.
On envisagera d’ailleurs le sens que peut revêtir la répartition des réponses
Planche Banalité
I G : chauve-souris – papillon
G : masque*
III G : personnage
D3 : papillon – nœud-papillon
IV —
V G : papillon – chauve-souris
VI G : peau d’animal
VII —
IX —
X D1 : araignée, crabe
D/Dbl (ou Gbl) : tête humaine*
1. On nomme refus la situation dans laquelle un sujet se montre dans l’incapacité de proposer une
réponse face à une planche. Ce terme de refus, malgré sa connotation péjorative, voire caractérielle, est à
entendre dans une acceptation neutre, comme la marque du non-aboutissement du processus de mise
en représentation face à la planche, comme une forme d’empêchement du processus de symbolisation,
dont il convient d’interroger le sens dans le contexte général de la production projective.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 119
On peut noter que parmi ces réponses cotées en F-, se trouvent un certain
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
déplumée » (enquête : « on l’a tué parce que son nez il était trop grand »,
réponse cotée D F- Ad).
1. Il convient ici de rendre attentif le lecteur que la cotation en F± ne peut en aucun cas constituer
une cotation par défaut dans le cas où le psychologue se trouverait en perplexité quant au choix d’une
cotation F+ ou F- ; cette cotation a son propre rationnel qu’il convient de prendre en compte.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 121
en effet, le sujet affecte à la planche une qualité dont elle est à coup sûr
dépourvue, celle d’un mouvement engageant une représentation. À ce titre,
on considère que la réponse kinesthésique témoigne d’une modalité élaborée
d’investissement du processus représentatif, dans la mesure où elle rend
compte de la capacité de l’enfant ou de l’adolescent à mobiliser ses objets
internes pour proposer, au travers de la réponse projective, une figuration
de leur nature et de leur qualité. On envisagera toutefois la spécificité des
différentes formes expressives de la kinesthésie dans les protocoles d’enfant
ou d’adolescent, en appui sur une différenciation des types de kinesthésies,
et en fonction de l’âge auquel elles émergent parmi les productions.
La kinesthésie d’attitude (que l’on peut coter KAtt) peut être décrite comme
une première forme de répression du mouvement, au sens où la charge
pulsionnelle ne peut trouver à se déployer dans une représentation de
relation :
Jean-Bertrand (17 ans et 5 mois), à la planche VII : « Ben (il rit) on
dirait deux... deux bonhommes qui se regardent... qui sont tournés vers là
avec le corps... mais qui se regardent, avec une espèce de plume, un bonnet »
(enquête : « on dirait la tête à Peter-Pan, plus le corps d’une femme, avec
une jupe », réponse cotée G KAtt H). La réponse de Jean-Bertrand face à
la planche, si elle témoigne d’une tentative de construction de la relation à
un autre différencié vient buter, comme nous en informe l’enquête, dans
ce temps singulier de l’adolescence, à une difficile conflictualisation de la
rencontre de la bisexualité.
La répression de la kinesthésie (que l’on peut noter comme une tendance
de la kinesthésie : > Krep), à proprement parler, se trouve quant à elle
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 125
pulsionnelle qui lui est attachée, vient parfois déborder les potentiels de
mise en représentation de l’adolescent.
Romain (14 ans et 11 mois), à la planche III
« ! Un singe qui se tape sur la tête (il rit) je verrais bien ça... oui c’est
ça (il retourne la planche) » (enquête : « ! les mains, les yeux », réponse
cotée G kan A).
Jean-Bertrand (17 ans et 5 mois)
« Là un espèce d’animaux de mer, là aussi un animaux de mer... et qui
se battent, par paire ou qui se rencontrent mais je crois plutôt qu’ils se
battent » (réponse cotée G kan A).
130 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
qui explose "! non je sais pas » (enquête : « le trou au milieu et le rouge
autour, les traits rouges qui partent dans tous les sens, le réservoir là dans
le blanc », réponse cotée D/Dbl kexC Géo).
ne puisse être mobilisé aux fins de border l’éprouvé affectif face à la planche.
La dimension de la saisie affective du stimulus dont rendent compte les
déterminants sensoriels peut être abordée selon trois polarités qui traversent
le développement psycho-affectif de l’enfant et de l’adolescent, sur son
double versant normal et pathologique :
• d’une part au regard d’un mode de saisie du matériel qui, dans les
premiers temps du développement, s’appuie de manière significative sur la
1. La spécificité de la sollicitation du rouge fera l’objet d’une discussion dans la partie consacrée aux
déterminants couleur.
134 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
dimension de l’éprouvé sensoriel ; on verra que chez le très jeune enfant (2–
4 ans), en particulier, cette modalité tend à dominer la verbalisation face
à la planche, sans nécessairement autoriser l’émergence de représentations
constituées en tant que telles (on peut penser que la verbalisation d’une
qualité de sensorialité de la planche renvoie au registre de la représentation-
chose, qui ne peut encore prendre forme de représentation-mot) :
Marwan (15 ans) qui, face à la planche II, énonce la réponse suivante :
« Je sais pas... çà me fait penser à la violence parce qu’il y a du sang
et c’est noir... et un petit peu de gentillesse le blanc » (enquête : « c’est
sombre, couleur du sang... en fait c’est dans une personne, c’est sombre,
la violence et un peu de gentil », réponse cotée Gbl CC’ Abstr.) ;
1. Les exemples proposés ici, à partir du déterminant couleur, peuvent bien sûr être extrapolés aux
autres déterminants sensoriels : estompage, couleur achromatique et clair-obscur.
136 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
• Les réponses proposées dans les parties rouges des planches (planches II
et III) renvoient, au regard de la charge attachée au contraste rouge/noir,
au maniement des motions pulsionnelles de l’enfant ou de l’adolescent ;
la qualité spécifique de l’excitation portée par la couleur rouge (cf. les
associations qui y sont attachées dans le registre de l’effraction du corps
avec le sang, ou dans le registre de la sexualité), contraint le sujet à prendre
position face à la mobilisation intime engagée par celle-ci ; à cet égard
on pourrait considérer que le mode de traitement des parties rouges des
planches engage plus spécifiquement le traitement du fond pulsionnel lié
aux excitations internes, qui se déploie de manière plus ou moins liée ;
Steve (9 ans et 9 mois), à la planche II
« Ben deux personnes un peu qui se battent... voilà » (enquête : « coup
de pied un peu qui fait gicler le sang... deux personnes avec un visage
rouge qui se tiennent les mains », réponse cotée G KC H)
Grégoire (17 ans et 5 mois)
« Deux pères Noël... oui c’est tout (...) » (enquête : « les mains (D7),
symétrique, bonnet rouge (D2) et barbe blanche (Dbl) et leur gros
ventre »
• Dans le cadre des estompages de textures (qui sont les plus fréquents,
voire les seuls observés, chez les enfants), se donnent à voir ce que
l’on pourrait nommer comme les précurseurs et/ou les organisateurs
du Moi-peau : ces réponses permettent de situer de quelle manière se
construit le Moi-peau, en appui sur les fantasmes de « peau commune »
et de « peau arrachée » (Anzieu, 1985) ; à ce titre, l’appel à l’estompage de
texture constitue l’un des indicateurs des enjeux propres à l’élaboration
des premières expériences de séparation, en lien avec les différents temps
qui, au fil du développement psychoaffectif, se trouvent émaillés par une
réactualisation de ces enjeux :
Oriane (10 ans), à la planche VI
« Euh... on dirait un animal bizarre avec des trucs au cou très long et des
petites ailes bizarres avant le cou et on voit un peu de son squelette et c’est
un peu gris clair... vous avez les réponses ? » (réponse cotée G FE A) ;
C’ : réponse de couleur achromatique pure (blanc, gris, noir), déterminée par la seule couleur achromatique
C’F : réponse déterminée par la couleur achromatique, et secondairement par la forme
FC’ : réponse déterminée par la forme, à laquelle se trouve secondairement associée la couleur achromatique
Clob : réponse de clair-obscur, déterminée par le seul aspect sombre et massif de la planche
ClobF : réponse déterminée par l’aspect sombre et massif de la planche et secondairement par la forme
FClob : réponse déterminée par la forme et secondairement par l’aspect sombre et massif de la planche
fait comme une étoile (D1) et là ça fait une forme de bâton, comme les
indiens ») ; la réponse est cotée Gz F- A/Obj.
➤ La participation du langage
Si la classification des représentations proposées par l’enfant ou l’adolescent
s’impose, dans la perspective d’une objectivation de l’ensemble des processus
qui concourent à la définition de la réponse au sens que H. Rorschach donne
à ce terme, il convient d’insister sur la nécessité d’une prise en compte de la
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
1. Cf. supra, le développement consacré à la qualité formelle des réponses, ainsi que la liste des
banalités proposée de manière usuelle.
150 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
1. Cf. supra : Le fil projectif : un modèle pour penser le travail de symbolisation dans l’expression
projective, p. 34.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 151
Autres représentations
Bot : tout élément végétal (arbre, fleur, légume ou fruit...)
Elem : eau, terre, air, feu
Frag : représentation dont la forme n’est pas a priori définie (rocher, nuage, tache...)
Obj : tout objet inanimé, mobile (y compris véhicules)
Pays : réponse construite à partir de différents éléments qui décrivent un paysage
Géo : élément géographique (côte, volcan...), ou tout ou partie de carte géographique
Art : production artistique (sculpture, tableau...)
Sci : objet attaché à une activité scientifique (éprouvette, tube à essai...)
Symb : symbole mathématique (chiffre), religieux (croix) ou autre
Arch : élément d’architecture (pont, maison, tour...)
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
1. La cotation Hdép (pour « humain déprécié ») est parfois utilisée ; elle a le mérite de rendre compte
d’une qualité particulière de représentation humaine, ni tout à fait vivant, ni pseudo-humain. La
réponse de Camille, 14 ans et 1 mois, à la planche III, en constitue un exemple : « euh... des survivants
blessés... » (enquête : « les humains avaient presque plus rien sur eux, bras coupé, manque une jambe
et plein de sang ») ; on conçoit ici l’importance de différencier la cotation d’une représentation
humaine intègre, d’une représentation mise à mal dans sa qualité d’enveloppe continue et investie
libidinalement).
152 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
➤ La persévération
La persévération est une forme particulière de répétition, portant sur le
contenu de la réponse. La simple répétition consiste dans la réitération d’une
réponse face à une planche.
On peut proposer comme exemple la séquence de réponses proposée par
Yves (8 ans et 8 mois), à la planche I :
« $ un papillon...% une chauve-souris... ▹ % un monstre... c’est tout... $
un papillon, oui ».
1. Le titre de ce développement reprend d’une part une expression utilisée par E. Bohm (1951) et
d’autre part le titre des deux ouvrages publiés sous la direction de F. Rossel & Coll. : Les phénomènes
particuliers au Rorschach – Une relecture pointilliste (2005) et Les phénomènes particuliers au Rorschach
– Une relecture pointilliste, vol. II (2012). Il est un clin d’œil à une approche originale de l’épreuve de
Rorschach, essentiellement centrée sur la clinique adulte, qui se propose de développer une attention
particulière à la qualité du discours.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 153
– Planche III : « la chauve-souris elle a un nez (D3) et des ailes et elle a des
yeux qui sont là (D2) et elle vole dans le ciel et elle fait des ronds dans le
ciel quand elle vole.. et voilà » (réponse cotée G kan A – Persévération) ;
– Planche VIII : « elle, elle est de toutes les couleurs, du rose, du orange,
du vert, et du vert, deux verts... elle a une bouche, la colonne vertébrale,
des bras... elle se pose sur l’arbre et puis elle vole dans le ciel, et après, elle
voit des amis et il lui dit : « viens dans l’arbre avec moi » et après elle fait
des ronds avec ses amis et après elle fait des carrés aussi avec ses amis »
(réponse cotée G kanC A – Persévération) ;
– Planche IX : « une chauve-souris aussi... elle est rose, vert, orange et du
bleu aussi, elle a un col vert... elle prend ses amis aussi et elle dit : « viens je
vais te montrer ma maman, ses cheveux aussi » et elle s’envole, elle fait des
ronds dans le ciel et des carrés aussi et à ses amis elle demande : « je te tape
pas »... elle demande : « est-ce que je t’ai tapé ? » et ses amis répondent :
« non je t’ai pas tapé » (réponse cotée G KanC A – Persévération).
explicite dans la verbalisation. Il semble à cet égard que l’on peut distinguer
deux configurations principales :
• d’une part, celle qui permet de penser que la référence à la symétrie, dans
le discours qui accompagne la réponse, soutient la production de celle-ci ;
apparaît ici la nécessité du recours à un étayage, tangible au plan perceptif
et repris dans le langage, afin de soutenir le travail de symbolisation dans
un contexte que l’on peut penser dominé par la fragilité du narcissisme,
a priori, ou a posteriori :
Reza (13 ans et 2 mois), à la planche III
« C’est le même dessin de chaque côté... un homme en train de verser
de l’eau... deux puisque c’est son double » (réponse cotée G K H Ban –
Symétrie) ;
Fatiha (9 ans et 1 mois), à la planche I
L. 0.25’ « Ah là ! (elle rit) ça a la forme d’un papillon... on dirait qu’on
a fait un bout avec ça et après on l’a plié et ça a fait les deux côtés
pareil...voilà » (réponse cotée G F+ A Ban – Symétrie).
« C’est encore symétrique... y’a des parties plus claires et d’autres plus
foncées... c’est symétrique et c’est symétrique, c’est tout » (refus) ;
Nils (15 ans et 5 mois), à la planche IV1
« $% Je sais pas... une ligne dans un ciel gris... un grand couloir » (réponse
cotée D/G FE Frag).
1. Après un refus aux trois premières planches, introduit de la manière suivante à la planche I (L.
0.30’) : « humm ! une tache de peinture faite sur un cahier puis refermé après avoir séché, réouvert et avoir
donné cette forme ».
156 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
Les références aux constructions, immeubles, espaces délimités (maison, pont, ville, terrain de football...)
Les références à tout ce qui contient, couvre ou enveloppe (sac, nappe, écran...)
Les références à des êtres possédant des qualités d’enveloppe particulière (poilu...), ainsi qu’un certain
Les références à des animaux possédant une structure protectrice (crabe, escargot, tortue...) ;
Les références aux ouvertures du corps ou à des actions entraînant une ouverture (anus, narine,
vomissement...)
Les références à des perceptions impliquant le franchissement des frontières (rayon X, robe transparente...)
Les références à des images insubstantielles, vagues dans leur délimitation (fantôme, ombre...)
Rappel
Les critères ci-dessus constituent le cadre général à partir duquel chaque clinicien est invité à établir sa
propre cotation
Une réponse est cotée B ou P lorsqu’un élément de celle-ci répond à l’un des critères ci-dessus ; si deux
éléments renvoyant à une cotation B d’une part et P d’autre part coexistent dans la réponse, la réponse
sera cotée BP
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 159
F+ % élargi : rapport, calculé en pourcentage, entre le nombre de réponses de bonne forme (F+), additionnées
des réponses de bonne forme associées à un déterminant kinesthésique ou sensoriel, et le nombre de réponses
formelles (F)
ΣC : somme des réponses couleur, calculé avec les pondérations suivantes en fonction de la participation de
la forme au déterminant couleur
ΣC = 1,5C + 1CF + 0,5FC1
T.R.I (Type de Résonance Intime) : K/C (le rapport est présenté comme tel, non réduit à sa résolution
décimale)
T.R.I introversif : K > C
T.R.I extratensif : K < C
T.R.I coarté :K = 0, C = 0
T.R.I coartatif :K = 1, C = 1
Formule complémentaire : Σ k / Σ E (à mettre en perspective avec le T.R.I)
RC % : rapport, calculé en pourcentage, des réponses cotées pour les trois planches pastel (VIII, IX et X) sur
l’ensemble des réponses proposées aux dix planches de l’épreuve (Σ R VIII + IX + X / R)
Contenus/Représentations
H % : rapport, calculé en pourcentage de réponses humaines sur l’ensemble des réponses cotées du protocole
(Σ H + Hd / R)
A % : rapport, calculé en pourcentage des réponses animales sur l’ensemble des réponses cotées du protocole
(Σ A+ Ad / R)
Ang % : rapport, calculé en pourcentage, des réponses de détail humain, d’anatomie, de sexe et de sang sur
l’ensemble des réponses cotées du protocole (Σ Hd + Anat + Sexe + Sang / R)
1. La somme des réponses d’estompage, pour le calcul de la formule complémentaire, se calcule selon
la même formule de pondération.
162 Méthodologie de l’épreuve de Rorschach
couleur (C) et, enfin, le rapport qui s’établit entre réponses couleur et
kinesthésie avec le T.R.I (Type de Résonance Intime).
Concernant le déterminant formel, trois niveaux seront envisagés :
1. En premier lieu la part des déterminants de forme pure, dans leurs
différentes qualités (F+, F-, F±) au regard de l’ensemble des réponses
(F %) ; ce pourcentage du F % constitue un indicateur de la manière
dont la production des réponses se trouve affectée par la saisie formelle
du stimulus,
2. En second lieu la part des réponses de bonne forme (F+) au regard de
l’ensemble des réponses de forme pure (F+ %) ; il s’agit ici d’appréhender
tout à la fois l’adéquation du rapport à la réalité et la qualité de l’inscription
socio-culturelle de l’enfant ou de l’adolescent,
3. En troisième lieu la prise en compte de la qualité formelle des réponses
associant un déterminant sensoriel et un déterminant formel (F+ % élargi),
qui permet de mesurer l’impact de la sensorialité sur la constitution de
bonnes formes, c’est-à-dire la manière dont l’engagement de l’affect
modifie la construction du stimulus dans sa qualité formelle.
L’approche des réponses couleur s’appuie sur deux indicateurs dont le
psychologue aura tout intérêt à croiser les expressions :
• En premier lieu, le calcul de la somme des réponses couleur du protocole
!
( C) selon une formule de pondération en fonction de la place de
la participation formelle dans les réponses couleur (voir la synthèse 8,
consacrée à ces aspects) ; cet indicateur permet de mesurer, à l’aune de
l’ensemble des réponses du protocole, la place spécifique des réponses
initiées par la couleur chromatique, réponses qui traduisent une forme
d’affectation particulière à l’égard du stimulus ;
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1. L’erreur serait en particulier de considérer que ce rapport K/C aurait à être réduit en une formule
décimale... ce qui compte, dans l’appréhension du T.R.I, c’est la manière dont chacune des polarités
contribue à la dynamique du fonctionnement psychique, et non pas une illusoire rationalité attachée
à une forme numérique.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 165
(kan, kex, kob) et les réponses déterminées par l’estompage. Cet indice
permet de figurer, dans un registre régressif au regard du T.R.I, les modalités
d’aménagement du sujet dans sa gestion du rapport à la réalité.
Les contenus qui font l’objet d’une attention particulière sont les contenus
humains et les contenus animaux.
On comprend aisément l’importance de la prise en compte des contenus
humains au regard du support identificatoire qu’ils autorisent de manière
privilégiée. Il conviendra cependant de différencier les contenus humains
à proprement parler, traduits en termes de pourcentage de l’ensemble des
réponses (H %), des contenus de pseudo-humains (différenciation H/(H)) ;
par ailleurs, une attention sera portée sur la qualité des réponses humaines au
plan de l’intégrité/la continuité de celles-ci. Ainsi, si le H % comprend sera
considéré comme le pourcentage de l’ensemble des réponses humaines au
regard de l’ensemble des réponses, on s’intéressera également au rapport qui
s’établit entre les réponses renvoyant à la représentation d’humains entiers (H)
et celles renvoyant à une partie du corps humain (Hd). La qualité formelle
attachée aux représentations humaines en général constituera également un
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1. Voir supra, dans le développement consacré à la qualité formelle des réponses, la référence à une
liste des banalités.
CHAPITRE
3
Expression projective
au Rorschach
et développement
psychoaffectif de l’enfant
et de l’adolescent
Sommaire
L
de présenter les principales problématiques et les observatoires à
même d’autoriser une lecture clinique des protocoles de Rorschach
de l’enfant et de l’adolescent, en mettant l’accent sur l’inscription
psychodynamique des expressions projectives, et d’autre part
d’aborder, dans une perspective développementale (ici bien sûr considérée
au sens du développement psychoaffectif), les formes expressives dont
témoignent les productions projectives en fonction de l’âge, de l’enfant
d’une part, de l’adolescent d’autre part.
1. D. et A. Anzieu (1998) proposent, quant à eux, que la première différenciation entre le monde
interne et la réalité externe passe par l’investissement de la paupière : celle-ci, dans sa capacité à établir
une frontière, au lieu du visuel, entre une intériorité et une extériorité, constituerait un premier
clivage organisateur, en deçà de l’expérience de la satisfaction orale, voire combinée à celle-ci.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 171
– Planche IV : « c’est un papillon... non, un géant tout tout noir, ses bottes
sont grises... ! si on met comme ça, c’est... » (réponses cotées G F+ A,
puis G FC’ (H)/Obj) ;
– Planche VIII : « un squelette, le cœur d’un squelette, les os d’un squelette »
(réponse cotée Gbl FC Anat) ;
– Planche X : « en haut, une Tour Eiffel (D11)... il y a plein de... on lance,
ça explose, c’est bleu, des petites bombes... il y a de toutes les couleurs »
(enquête : « une fête, des pétards, des couleurs », réponses cotées D F+
Arch, puis G kexF Frag)
4. Au plan des contenus, des représentations qui signent une tension au lieu
des enjeux de la différenciation, réponses magma, ou réponses qui mettent en
jeu la dimension de l’intériorité sur fond d’une dynamique dedans–dehors
problématique, dans une tonalité plus ou moins dysphorique.
Simon (3 ans et 9 mois), à la planche IX
« C’est des grabouillons, on dirait des grabouillons (retourne la planche)...
c’est magique, c’est rose maintenant, tu as vu ? » (enquête : « ah oui c’est
du caca (D6 + Daxial) les fesses elles sont là (D1) et là c’est l’enfant (D3),
non les WC (D1) et là c’est l’enfant (D3) il est un peu cassé l’enfant
(fait des bruitages) », réponse Refus (Cn), puis à l’enquête : R. Add. D/G
FC H).
des représentations qui, dans leur caractère érigé, soutiennent une position
phallique – narcissique :
– Planche VI : « !" L. 0.20’... un grand bâton au milieu, avec deux grandes
ailes, et une moustache comme les chats et un espèce de... » (réponses
cotées D F+ Obj, puis D F- Ad, puis Dd F+ Ad) ;
– Planche VII : « !" ça on dirait deux amoureux qui sont sur un papillon...
mais c’est des chiens avec des grandes oreilles et une petite queue »
(enquête : « les amoureux en haut, le papillon, il est énorme, un homme
et une femme... mais on dirait deux femmes qui ont l’air de se faire un
mimi... elles s’approchent », réponses cotée G F+ Scène, puis D F+ A) ;
– Planche VIII : « !" qu’est-ce que ça pourrait être ? un papillon en bas et
une bête qui lui a accroché la tête... il y a deux ours sur la main du gros
animal qui prend la tête avec ses pieds... les deux ours mettent les pieds
sur le papillon » (réponse cotée D/G kan A Ban) ;
– Planche IX : « !" c’est presque pareil que l’autre... espèce de bâton (D5)
avec deux ailes roses (D6), avec des cheval accrochés au bâton (D3)...
deux hommes (D3) en haut se tiennent avec des trucs jaunes » (enquête :
« des trucs en fer... des hommes, non des loups avec des grandes griffes
et une gueule et deux petits yeux blancs », réponses cotées G F- A, puis
D F+ H, avec une réponse additionnelle, R. Add. : D/Ddbl F- A).
déjà vu des dessins... les africains et les africaines sont à peu près comme
ça », réponse cotée G KC’ H Ban).
Cyrille (14 ans et 11 mois), à la planche III également :
« (prend la planche)... Alors là je vois... ça a un rapport avec mon métier...
je vois deux serveurs, avec un nœud-papillon rouge, et là c’est une chaîne
hi-fi, voilà » (enquête : « deux serveurs qui tiennent une chaîne hi-fi, deux
serveuses j’ai dit, non ? avec les seins ici, les jambes... », réponse cotée
G KC H Ban).
La réponse de cette jeune enfant que l’on peut référer, au regard de son âge,
à la période œdipienne, condense d’une certaine manière le marquage du
registre génital de l’organisation pulsionnelle : reconnaissance (ambiguë ?)
de la différence des sexes, avec une solution de compromis qui passe par la
coexistence de personnages du genre féminin et masculin dans la réponse,
identification des personnages comme référant à des figures parentales
(tentative de dégagement à l’égard de la confrontation à la bisexualité ?)
et, enfin, appel transférentiel à l’endroit du psychologue interrogé sur
l’emplacement de son lit ( !), dans une forme de transparence du message
œdipien...
Yvan (6 ans et 4 mois), à la planche III
« Deux dames, ils sont amoureux... parce qu’ils s’aiment bien » (enquête :
« parce qu’on dirait des cœurs – D3 – et on dirait aussi des petits singes
– D2 – et tellement il y a des singes ils sont amoureux », réponse cotée :
G F+ H Ban).
L’engagement libidinal est bien présent dans cette réponse, non exempt
d’une dimension narcissique qui soutient cet engagement.
1. Les grilles proposées par M. Boekholt retiennent différents registres de l’expression défensive :
recours à la motricité, à la relation avec le clinicien, à la réalité externe, à l’évitement, à l’affect, à
l’imaginaire et au fantasme, à l’objectivité et au contrôle... À la différence des grilles à destination
des adultes (Brelet & Chabert, 2004), celles-ci ne sont pas construites sur le fond d’un repérage
nosographique a priori.
186 Expression projective au Rorschach et développement psychoaffectif
1. On pourra utilement se référer à la grille des procédés d’élaboration des récits établie par
M. Boekholt pour la pratique des épreuves thématiques afin d’enrichir la prise en compte de
l’expression des mécanismes de défense au Rorschach au regard des déploiements présentées par
l’auteure.
2. Cette conception rejoint les positions que l’on retrouve actuellement en clinique adulte, en
particulier avec la nouvelle grille de procédés de récits au TAT qui met l’accent sur la dimension
transnosographique des défenses (F. Brelet-Foulard & C. Chabert, 2003)
190 Expression projective au Rorschach et développement psychoaffectif
travail de représentation, quel que soit le niveau auquel se donne à voir cet
empêchement.
Les expressions de la motricité, dans leur logique défensive, peuvent
prendre différentes formes ; elles traduisent toutes, d’une manière ou d’une
autre, un échec (ou une quête ?) au regard de l’intégration pulsionnelle, et
d’une possible traduction au travers d’une réponse kinesthésique (mineure
ou humaine) de ce qui agite l’enfant. Ces manifestations, qui ne sont pas
sans rappeler les procédés de jeu identifiés par M. Boekholt (1993) dans
les épreuves de jeu (et l’épreuve du Scéno-test en particulier) autour des
procédés « hors-jeu » (HJ) peuvent prendre différentes formes expressives :
– Mise en cause de l’investissement de l’épreuve par une mobilisation
motrice qui conduit l’enfant ou l’adolescent à ne pas être en mesure de
s’inscrire dans une suffisante suspension de la motricité requise par la
passation (instabilité, motricité hors du dispositif de la passation voire hors
de la pièce où elle se déroule, rupture brutale de la passation par le fait d’une
action motrice, sollicitation de l’enfant ou de l’adolescent à quitter l’espace
de la passation pour se rendre aux toilettes par exemple...) :
Allan (5 ans et 4 mois), à la planche III
« Des gens... avec le truc au milieu qui tombe, comme ça (mime une
position d’instabilité, puis sort de la situation projective pour explorer
le bureau du psychologue pendant quelques minutes) » (réponse cotée
D F+ H Ban, puis D F± Obj > kob).
Dans cet exemple, on peut repérer la double place occupée par le recours
à la motricité d’une part (se cache derrière la planche, se met à distance)
et par l’inhibition ; il est intéressant de s’interroger sur la qualité du jeu
instauré par l’enfant, jeu de coucou-caché avec les planches, ici utilisées dans
un processus d’appropriation pré-transitionnel ?
– Accompagnement de la réponse par un mouvement mimant la réponse
proposée, dans le meilleur des cas en lien avec une kinesthésie exprimée
dans la verbalisation, ou comme alternative à celle-ci.
Jonas (9 ans), à la planche II
« !▹" (retourne la planche)!" L.0.25’... Deux hommes qui se tapent la
main comme ça, toc ! (mime le geste) »
Cette réponse, met en évidence de quelle manière la motricité est mobilisée,
dans un premier temps comme pré-condition du déploiement du processus
de symbolisation (renversements de planches), puis, dans un second temps
comme soutien à l’activité de symbolisation (mime de l’action représentée
et nommée au décours de la réponse).
Comme témoins de la mise en jeu de l’intégrité, il convient de situer
les expressions motrices qui, de manière radicale, mettent en question la
continuité même de la proposition de l’épreuve projective : motricité qui
traduit l’impossibilité pour l’enfant d’investir l’épreuve dans le continuum de
son déroulement et de l’histoire à laquelle elle invite, motricité signant une
rupture radicale se produisant en tout début de la passation ou au décours
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➤ L’imaginaire
la planche III, de manière tout à fait inadéquate et non justifiée par l’enfant
et, d’autre part, au travers de réponses « éléphant » qui semble, par un effet
de proximité et de glissement (la taille, la couleur, l’origine africaine...) venir
prendre la place de cet objet dont Oriane ne peut s’absenter ; à la planche I :
« éléphant ? (elle accroche la ficelle de l’hippopotame à la queue du chien en
peluche et demande de l’aide au psychologue)... un éléphant ? non y a la
trompe... les éléphants ont bien des trompes » (réponse cotée G F- A), puis
à la planche VII : « # trompes, des petits éléphants... normal y a sa trompe
ici » (réponse cotée G F- A – Confabulation).
– La référence à un imaginaire des contes pour les plus jeunes enfants, lié
à des productions culturelles plus actuelles pour les enfants plus grands et les
adolescents (jeux-vidéo, films, bande-dessinée et/ou mangas...) est proposée
194 Expression projective au Rorschach et développement psychoaffectif
réel et imaginaire. Cette dimension peut prendre une place centrale au regard
de l’enjeu que représente l’identification des points d’arrimage de l’adolescent
en mesure de lui permettre de dépasser cette période de bouleversements.
1. On notera ici la particularité, rare, d’une réponse déterminée par la couleur dans une planche
achromatique : ces réponses témoignent, selon certains auteurs (Lefebvre A ; et Dusaucy D., 2005),
d’une problématique liée à la perversion...
2. On peut à ce propos, et plus particulièrement au regard de la question du clivage à l’adolescence,
on peut se référer à un texte consacré à cette question : Roman P. (2000), « Clinique des
clivages à l’adolescence », Psychologie Clinique et Projective (6), ou à celui consacré aux expressions
psychosomatiques de l’enfant et au repérage des différentes formes d’empêchements à symboliser :
Roman P. (1997), « Troubles somatiques et catastrophes de symbolisation », Psychologie Clinique et
Projective (3).
196 Expression projective au Rorschach et développement psychoaffectif
➤ L’affect
alors là je sais pas du tout » (enquête : « une chaussure là, peut-être une
botte, des deux côtés... c’est tout ce que je vois », réponse cotée Refus
dans un premier temps, puis R. Add. Do F+ Obj)
Marwan (15 ans), à la planche II
« Je sais pas, ça ça me fait penser à la violence parce qu’il y a du sang et
c’est noir, et un petit peu la gentillesse le blanc » (« c’est sombre, couleur
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– La voie d’un marquage plus subtil de la place de l’affect qui peut se lire
au travers du mode d’investissement de la qualité sensorielle du stimulus, et
198 Expression projective au Rorschach et développement psychoaffectif
pour Félix d’une référence personnelle qui ouvre une expression dépressive
qui se poursuivra tout au long du protocole.
La mise en jeu de l’intégrité se trouve particulièrement interrogée dans les
situations où l’expression de l’affect semble échapper à tout projet de liaison :
le monde affectif de l’enfant ou de l’adolescent peut apparaître comme sans
objet, c’est-à-dire pris dans le défaut d’une inscription intersubjective (on
peut penser à l’image d’un environnement maternant qui ne serait pas, ou
n’aurait pas été, en mesure de refléter les états affectifs de l’enfant).
Au travers de la mobilisation défensive de l’affect, les enjeux liés à la
permanence dans les investissements peuvent être appréhendés en lien avec
la part d’instabilité contenue dans l’expression des affects : l’inadéquation
des affects en propose un modèle expressif tout à fait explicite, modèle
qui traduit bien les effets de distorsion auxquels le dispositif projectif,
comme dispositif à symboliser, peut confronter l’enfant ou l’adolescent. Il
s’agit là pour le sujet d’explorer des modalités de dégagement face aux effets
contrastés mobilisés par la rencontre du matériel : ces modalités d’affectation
du Moi, que l’on peut référer au champ des défenses paradoxales, visent
à garantir une continuité suffisante entre affect et représentation dans un
contexte d’insécurité des investissements. Dans ce contexte, la production
projective porte la trace de ces hiatus.
Au plan de l’expression défensive considérée sur le versant des empêche-
ments à jouer avec les représentations, il convient ici de signaler la place
singulière des stratégies de transformation des représentations : le modèle du
refoulement est ici spécialement convoqué, dans la mesure du détachement
qui s’y opère entre affect et représentation. Dans ce sens, on peut en effet
admettre que certaines formes d’émergence affective dans le discours de
l’enfant ou de l’adolescent face aux planches de l’épreuve de Rorschach
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➤ Le contrôle
➤ La construction de l’identité
La construction de l’identité de l’enfant, puis de l’adolescent, mobilise de
façon majeure le travail psychique de la séparation : ce travail se trouve
engagé à différents temps de la maturation de la vie psychique, de la première
séparation de la mère et de l’enfant dans l’expérience de la naissance,
aux nécessaires séparations et pertes qui émaillent la vie de l’individu.
L’ensemble des travaux de D.W. Winnicott, à la suite des travaux freudiens
et kleiniens, mais également les travaux de J. Lacan (1966), avec la notion
de « stade du miroir » en particulier, insistent sur les enjeux du processus de
séparation – différenciation qui sont au cœur de ce que l’on peut nommer,
à partir de là, le processus identitaire.
Dans ce sens, il importe de situer la manière dont les productions
projectives de l’enfant ou de l’adolescent témoignent du travail psychique de
la séparation, et de présenter les indices qui concourent à la prise en compte
de cet organisateur de la vie psychique qu’est l’identité. En filigrane, c’est
aussi la question des origines qui se trouve appelée, que l’on peut référer
tout particulièrement au fantasme de scène primitive. C’est dans ce contexte
que l’on peut entendre toutes les remarques ou questions formulées par
les enfants ou les adolescents sur l’origine du matériel (qui a fabriqué les
planches ? le psychologue est-il impliqué dans leur réalisation ?...) et/ou sur
la matière constitutive des planches, matière du support (est-ce du carton,
est-ce du plastique ?...) ou matière dont est composé le stimulus (encre ?
peinture ?...). Ces verbalisations viennent parler de la manière dont l’enfant
ou l’adolescent se trouve en mesure de se représenter l’origine du monde
extérieur et, partant, de se représenter sa propre origine et ce, en appui sur
le lien transférentiel.
1. Sur ce point, nous nous appuyons sur les propositions de J. Laplanche et J.B. Pontalis (1964) dans
leur texte princeps sur la question. Sur la traduction projective des fantasmes originaires, on peut se
référer à Roman P. (1995), « Scènes de l’originaire – De la position subjective dans l’élaboration du
scénario fantasmatique en méthode projective », Paris, Bulletin de Psychologie, XLVIII, 421, p. 661-666.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 205
1. On peut trouver le protocole dans son intégralité dans le développement suivant (cf. infra, p. 234).
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 207
la limite le dos d’une fourmi, avec le dos et les pinces tranchantes, d’une
fourmi ou d’une araignée...d’un insecte quoi, voire même d’un scarabée »
(enquête : « deux bras, tête, nez, menton et le sang qui gicle (D2, D3) »,
réponse cotée Gbl F- A).
1. Les planches de l’épreuve du TAT, planches figuratives, mettent en scène des personnages de sexe
et d’âge différent, autorisant ouvertement l’investissement d’une conflictualité : il n’en est pas de
même de l’épreuve de Rorschach dont la dimension non-figurative mobilise de façon exacerbée les
enjeux de séparation-individuation.
2. On entend, en filigrane, l’intérêt que représente le croisement des données recueillies en appui sur
plus d’une épreuve projective (cf. supra, p. XVI).
210 Expression projective au Rorschach et développement psychoaffectif
Enfin, le refus à la planche VI, dont le stimulus est perçu comme ne pouvant
être affecté par une forme, vient confirmer l’impossibilité de Pénélope à
jouer avec la bisexualité.
Sophie (10 ans et 7 mois) : les réponses à la planche I et III témoignent
d’un mode d’aménagement économique de la rencontre de la différence des
sexes :
– Planche I : « L. 1.10’... On dirait une statue, là des monsieurs... une dame,
il manque plus que la tête » (enquête : « une statue avec deux monsieurs,
les dames, là on dirait une robe (D4), là les jambes », réponses cotées
G F- Obj, puis D F+ H)
– Planche III : « On dirait des lapins... là des dames ou des monsieurs...
enfin, une dame et un monsieur, là un petit papillon, et là du feu »
(enquête : lapin (D2) les oreilles sont un peu trop longues, forme d’une
dame et d’un monsieur, ils font chauffer du feu, le feu, au centre, et
autour ce qui protège », réponses cotées D F- A, puis G F+ H Ban, puis
D F+ A Ban).
Bruno (14 ans et 9 mois) : Les réponses aux planches III, IV et VI seront
présentées ci-dessous :
– Planche III : « Deux personnes qui jouent à...s’envoyer une balle ou je
sais pas, y a le quiqui au milieu, en tout cas un noeud-papillon, ! ou de
l’autre côté, si j’ai le droit de tourner le truc on dirait deux personnes
qui ont le bras recourbé » (enquête : « tête, corps, ce serait même deux
femmes... et les jambes écartées, objet rond au milieu », réponses cotées
G K H Ban, puis D F+ Obj Ban, puis D F+ H).
– Planche IV : « Y a que des personnes ou quoi ? ou je suis fou ? On dirait
un extra-terrestre vu... d’en bas, on voit les pieds et une tout petite tête
en forme de V un peu...! sinon "! sinon dans l’autre sens on dirait
212 Expression projective au Rorschach et développement psychoaffectif
On l’a vu, la pratique du Rorschach peut être envisagée dès que l’enfant a
un accès suffisant au langage, et à la fonction de communication de celui-ci.
La dimension ludique de la proposition de l’épreuve apparaît au premier
plan (Boekholt, 1996), et s’appuie, en particulier, sur une manipulation des
planches, et sur une sollicitation du psychologue sur la nature et la qualité
de cet objet étrange proposé à l’enfant. Il ne faut pas cependant considérer
la pratique auprès de jeunes enfants au même titre que la pratique auprès
d’enfants résolument inscrits dans des compétences représentationnelles
avérées. Dans le même temps, on peut souligner l’intérêt de considérer les
expressions des jeunes enfants face à l’épreuve de Rorschach comme témoins
d’un temps singulier de la vie psychique et des processus qui y concourent...
et de rapporter certaines expressions dissonantes d’enfants plus âgés au regard
d’une forme de normativité, aux modalités de rencontre du jeune enfant
avec l’épreuve. En tout état de cause, la pratique de l’épreuve projective
auprès de jeunes enfants sera moins centrée sur les données formelles des
cotations (de fait, bien souvent peu de réponses peuvent faire l’objet d’une
cotation) que sur les mouvements qui sous-tendent les différentes formes
expressives de l’enfant.
➤ La référence au factuel
➤ La mobilisation sensorielle
Marron D1
II Cn
Dessin D3
Marron...
VI 1 D3 D F+ A
oiseau...petit oiseau.
(suite)
VIII Marron... c’est ça marron. Cn
➤ Le recours à la motricité
Une des formes de l’engagement du corps dans le cadre de la passation de
l’épreuve de Rorschach par de jeunes enfants est particulièrement repérable
au travers de l’investissement de la motricité. La motricité se trouve en effet
spécifiquement mobilisée sur le matériel, témoignant, ainsi que l’ont bien
mis en évidence P. Marty et M. Fain (1955) d’une forme d’expression dans
la réalité externe d’une « motricité pulsionnelle ». Celle-ci vient pallier la
capacité de l’enfant quant à une intériorisation de ces mouvements en forme
d’élaboration d’une relation d’objet au sein de laquelle peuvent prendre
place, sans danger, respectivement l’enfant et l’autre de la relation, ici le
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 223
On peut considérer, tout autant pour Rémy que pour Simon, que le
processus de mise en représentation est soutenu par une action portée sur
la planche. Le recours à la motricité dans l’actuel de la situation projective,
s’il traduit l’impossible investissement intériorisé du mouvement, n’en
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
représente pas moins une voie, un frayage possible. On notera par ailleurs
la prégnance que peut prendre l’appel énoncé par l’enfant au regard du
clinicien sur son engagement moteur, appel que l’on peut comprendre
comme une quête de soutien dans le regard maternel du clinicien, regard qui
actualise un fond maternel, miroir unificateur des mouvements psychiques
de l’enfant ;
• d’autre part, au travers de la gestion des kinesthésies dans le processus
de production de la réponse, qui, comme nous l’avons vu, témoignent
des potentiels de mobilisation des objets internes de l’enfant. En effet,
1. Rappelons que l’indice Mp (pour « mouvement des planches ») permet de repérer l’occurrence
des renversements de planche opérés par l’enfant (cf. supra, p. 64).
224 Expression projective au Rorschach et développement psychoaffectif
si les kinesthésies avérées sont assez rares chez les jeunes enfants, elles se
présentent dans des registres d’élaboration variés et rendent compte de la
qualité de la construction de l’objet interne. L’évaluation de leur qualité
sera bien sûr fonction du support représentatif à partir duquel elles se
déploient : qualité de la discrimination du stimulus, qualité formelle de
la réponse au regard de la découpe retenue.
Rémy (3 ans et 9 mois), à la planche IX
« Papillon encore » (enquête : « il vole, papillon de nuit », réponse cotée :
G kan A > C’ ?)
La kinesthésie animale intervient à l’enquête, en appui sur une représen-
tation dont l’ancrage perceptif est peu précisé. Cette forme de kinesthésie
peut être appréhendée comme un premier marquage d’un recours possible
aux objets internes de l’enfant et à leur mise en jeu.
Juliette (4 ans 6 mois), à la planche III
« Ça peut être des gens... avec... qui préparent du feu ici c’est encore
tout » (réponse cotée : G K H Ban).
(suite)
13 Des méchants (D9) qui tout ça (tous les D), ça
vont attaquer l’épée c’est l’oiseau qui a peur des
G K (H)
méchants (D3)
(R.Add : D F+ A)
Note : l’épreuve des choix n’a pas été possible à mettre en œuvre au regard de la difficulté d’un
investissement de la passation dans la durée de la part de Simon.
(suite)
VIII 0:00:40 14 Ça un petit rat D1 D F+ A Ban
15 Ça un papillon et ça D3
D F+ A
encore un rat
16 Et ça une chauve-souris D4 D F- A
—> FC’
17 Et ça encore un papillon, D5
D F+ A
il y en a deux papillons
sur six réponses...). On notera que les émergences persécutoires sont ici
également présentes, elles se proposent comme matrice d’une organisation
du monde, découpé en deux entités bien identifiées (planche IV, après une
première réponse « monstre » : « ... ça peut être un rat, des méchants... », ou
planche X : « un monsieur qui est très méchant... »). La dimension du jeu
domine (Juliette peut expliciter cette dimension, comme à l’enquête de la
planche IX : « il est méchant un peu ce papillon... »). Cette forme de clivage,
fondateur du développement psychoaffectif de l’enfant, se présente ici sous
la forme d’une trace non-désorganisatrice des avatars nécessaires du lien au
premier objet maternel.
C’est bien souvent à partir d’une interrogation sur les origines des planches
(cartes) de l’épreuve de Rorschach que s’engage la rencontre avec l’enfant dans
cette période dite œdipienne. Comme cela a été évoqué précédemment, on
peut considérer que cette interrogation sur les origines des planches a valeur
de mise au travail des théories sexuelles infantiles et, plus particulièrement,
des théories ayant trait à la scène primitive. Ces interrogations (ou simples
remarques) prennent deux voies principales :
– celle de la réalisation des planches (autour de la technique des taches
d’encre et du plié/déplié),
– celle de la consistance des planches, considérées en tant qu’objet à
manipuler.
On peut alors penser que cette entrée en matière dans l’épreuve,
par la voie de la qualité actuelle et historique du matériel de l’épreuve,
engage l’enfant dans une tentative de résolution de l’énigme des origines :
l’épreuve de Rorschach propose, au fond, à l’enfant, de remettre au travail
l’élaboration des théories sexuelles infantiles, en l’invitant à éprouver une
situation nouvelle... et étrange, dans le jeu transférentiel engagé avec le (la)
psychologue.
La période œdipienne peut être définie comme une période charnière dans le
maniement de l’imaginaire : en effet, c’est dans ce temps de la vie psychique
que va s’établir, de manière plus ou moins stable, la différenciation entre le
monde de la réalité externe et le monde de l’imaginaire. Ainsi l’enfant va-t-il
pouvoir progressivement mettre au service sa production imaginaire pour
donner sens au monde qui l’entoure. On le sait, dans la culture, c’est le sens
et la fonction des contes de fées, qui viennent proposer des figurations aux
angoisses et aux questionnements du jeune enfant : les fantasmes originaires
(fantasmes de scène primitive, fantasme de séduction, fantasme de castration)
vont y trouver une expression et des pistes d’élaboration.
Au fond, on peut considérer que l’épreuve de Rorschach, dans sa
proposition de mise en scène de l’imaginaire, va pouvoir occuper tout
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 231
1. Il faut rappeler ici, inlassablement, que l’épreuve de Rorschach ne peut être tenue pour une
épreuve isolée, et qu’elle s’inscrit dans une continuité, au sein d’un dispositif construit dans le cadre
de l’examen psychologique et qui comprend lui-même plus d’une épreuve... (cf. supra, Avant-propos,
p. XV et suivantes. Dans cette perspective, les épreuves thématiques (CAT, TAT...) sont bien
sûr précieuses en ce qu’elles interrogent de manière plus spécifique les grands organisateurs de la
conflictualité œdipienne.
232 Expression projective au Rorschach et développement psychoaffectif
Dans les deux cas, la référence à la génération est portée par le déploiement
de l’imaginaire de l’enfant, le cas échéant (cf. Gérard), dans une forme
d’échappée de l’imaginaire qui interroge la différenciation humain/non-
humain, dans le contexte d’un doute identitaire... et d’un appel au soutien
maternel.
L’un des enjeux principaux au plan du statut de l’objet dans ce temps de la vie
psychique tient à la possible élaboration de la position dépressive, fondement
de l’accès à la triangulation œdipienne : en effet, les travaux d’A. Green l’ont
bien montré, la survivance des investissements de l’enfant sous le primat de
la phase schizo-paranoïde obère la capacité de l’enfant à organiser la scène
œdipienne dans une souplesse suffisante au plan de l’articulation de la double
différenciation des sexes et des générations. A. Green (1973) nomme cet
aménagement particulier de la triangulation œdipienne la bi-triangulation :
celle-ci repose sur une partition qui ne s’appuie pas sur les critères de la
différence des sexes mais sur le maintien d’un clivage entre bon et mauvais
objet. Cette difficulté d’accès à l’ambivalence se lit au travers de certaines
réponses qui peinent à investir la conflictualité masculin/féminin, au profit
d’une partition des figurations.
Cette réponse condense les enjeux du temps œdipien : on voit ici que le
fond de différenciation ne se trouve pas suffisamment assuré (distinction
humain/non-humain) pour permettre une claire prise de position à l’égard
de la sollicitation bisexuelle de la planche (glissement de la référence à la
fée, figure pseudo-humaine du féminin à une figure animale de corbeau,
représentant du masculin). À cette ambiguïté, vient se surajouter la confusion
(le doute ?) entre l’investissement du singulier et du pluriel...
Deux protocoles sont proposés pour rendre compte et illustrer de la
dynamique ouverte par le temps œdipien :
– celui de Susanna, 6 ans et 4 mois,
– celui de Brice, 6 ans et 4 mois.
234 Expression projective au Rorschach et développement psychoaffectif
6 et y a un papillon. D F+ A
(suite)
11 Y a... une fille qui est là c’est coupé (entre les D)
transformée en cheval... y couettes et bouche d’un
VII 0:00:40 en a deux de fille qui est cheval. G Cont F- A/ H
transformée en cheval et
qui est coupée...
(suite)
Ca pourrait être deux
garçons qui se tapent
qui sont avec du sang (?)
II 0:00:35 3 les mains... et puis c’est G KC H
je crois qu’ils se bagarrent.
tout (range les planches
obsessionnellement)
Ça ressemble à des
femmes... des femmes...
je voyais des nénés et puis
III 0:00:35 4 deux femmes... (grimace) D F+ H Ban
c’est tout.
après je sais pas... deux
femmes, ça ressemble
parce que ça a des grandes
pattes (D1) et une grande
IV 0:00:25 5 À un... dinosaure queue (Dax) (?) méchante G F+ (A)
bête elle a l’air fâchée avec
ses trucs (D2).
ça ressemble beaucoup à
À un... papillon...
V 0:00:15 6 un papillon (?) parce qu’il G F+ A Ban
papillon.
y a pas de trucs blancs.
ça a des pattes (D9), des
VI 0:00:10 7 À un... chat. G F+ A
moustaches (dans D3)
> (Retourne la planche) il fait forcer et après
VII 0:00:25 8 G F+ Obj
Λ à une pince. « tac ».
Ça devient de plus en plus
têtes, pattes (D1), mur
dur,... à une... à des... souris,
VIII 0:00:40 9 (ensemble des D4, D2 et G kan A Ban
à des souris qui grimpent
D5).
sur les murs
terre (D6), le bois (Dax),
IX 0:00:10 10 Un arbre les feuilles (D1) et les G FC Bot
branches (D3)
Euh... des crabes... des
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La latence et la déconflictualisation
1. Les travaux de J.-Y. Chagnon (2009), inscrits dans le cadre du réseau international de recherche
« Méthodes projectives et psychanalyse » apportent une précieuse contribution à la compréhension
des enjeux actuels de la latence.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 239
chose ? (...) ».
1. On peut trouver le protocole dans son intégralité comme illustration des protocoles en période de
latence (cf. infra, p. 243).
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 241
C’est sans doute dans cette période de latence que peuvent se trouver
exacerbées les références à l’idéal, rejetons de la période phallique-narcissique
qui trouvent, dans ce temps de calme pulsionnel, une opportunité pour se
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c’est tout
(suite)
Pl.+ VII Parce que moi j’aime bien dialoguer et les enfants ils font comme moi.
Comme ça, j’aime pas les babouins ils se déguisent en monstre parce que
IV
Pl. - ça me fait peur.
I Non !
V Je déteste les chauves-souris.
l’épreuve des choix, nous informent que la rencontre avec les planches IV
(autour de la figure des « babouins ») et V (avec la représentation de la
chauve-souris) s’avère mobilisatrice d’une forte angoisse... dont l’expression
est retenue lors de la passation. Tout se passe comme si la confrontation aux
figures archaïques et/ou phalliques venait mettre à mal la construction de
représentations qui se présentent, par ailleurs de manière générale, sur un
mode idéalisé.
(suite)
8 On aurait dit deux assises, elles se regardent
femmes, noires, en train en face avec leur drôle
G Katt H
VII 0:00:30 se parler... rien d’autre de coiffure et elles sont
—> FC’
comme ça avec les coudes
en arrière.
Quand ils coupent les feuilles c’est comme s’ils arrachaient des membres
VIII
à l’arbre.
(« On aurait dit des personnes qui taillent un arbre pour faire une drôle
de forme et en dessous de cet arbre il y a des personnes qui font un
pique-nique ») procède d’un mouvement qui pourrait être identifié dans le
registre narcissique-phallique, mais qui se trouve tempéré par la verbalisation
de Manoël à l’épreuve des choix : « Quand ils coupent les feuilles c’est comme
s’ils arrachaient des membres à l’arbre »).
248 Expression projective au Rorschach et développement psychoaffectif
➤ L’image du corps
La remise en question des contours de l’enveloppe corporelle vient interroger
tout spécialement le rapport entretenu par les pré-adolescents avec la symétrie.
Rappelons ici la proposition de N. Rausch de Traubenberg (1994) selon
laquelle l’épreuve de Rorschach « teste une image du corps intégrée ».
Dans ce contexte, deux aspects principaux pourront être mis au travail qui,
chacun à leur manière, contribuent à spécifier les modalités de construction
de l’image du corps (unification et intégrité de l’image du corps) et de ses
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prolongements relationnels :
• Le maniement de la symétrie dans la double polarité que représentent
la possibilité de construction de réponses unitaires d’une part et
l’engagement d’un jeu avec le caractère bilatéral des planches d’autre
part ; l’attention portera tout à la fois sur la qualité des découpes retenues
par le pré-adolescent et sur sa capacité à instaurer une dynamique à partir
de la symétrie (redoublement des réponses, réponses reflets et miroirs,
réponses kinesthésiques et de relations...) :
Valérie (13 ans et 6 mois), à la planche VII
« Euh... euh... deux filles, deux jumelles, qui sont sculptées sur une pierre,
sur une balance » (enquête : « la pierre, ça fait une balance, et là les
252 Expression projective au Rorschach et développement psychoaffectif
jumelles elles sont identiques, sauf elles sont face à face », réponse cotée
G F+ H/Art).
L’appui sur la bilatéralité de la planche permet de construire une figure
de double, soutien d’une image du corps intégrée... qui échoue à se
trouver habitée libidinalement. Cet échec se trouve comme redoublé à
la planche VIII, où la couleur (et/ou l’aspect plus compact de la planche ?)
semble avoir un effet désorganisateur dans le projet de la construction de
l’image du corps : « on dirait un squelette... euh... et on dirait qu’il a des
pinces comme des crabes et puis on dirait aussi de chaque côté il y a un rat
qui monte de la terre jusqu’à la racine d’un arbre » ; enquête : « là on dirait
la colonne vertébrale (D axial), avec les côtes, je sais pas... non deux rats
parce qu’il y en a un de chaque côté », réponse cotée G kan A/Anat).
On notera, outre la référence au squelette qui signe une atteinte de
la qualité de l’enveloppe corporelle, la coexistence de représentations
anatomique et animale sans articulation très précise... et dans une tonalité a
minima persécutoire (destruction de l’intégrité ?).
Sarah (14 ans), paraît davantage en mesure de prendre appui sur la
bilatéralité de la planche VII, avec un jeu entre appréhension de la forme et
du fond de la planche :
« ! (fait le tour du blanc avec son doigt) Un champignon (Dbl)...
" une bouteille (Dbl)... avec deux dames, une là et une là, elles se
1. Les réponses « peaux » désignent, selon C. Chabert, des réponses qui mettent l’accent sur les
enveloppes : vêtements, enveloppes corporelles, fourrures... elles recouvrent pour une part les réponses
cotées « Barrière » par S. Fisher et S.E. Cleveland.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 253
➤ La dynamique activité/passivité
La dynamique activité/passivité, dont on connaît l’acuité dans le temps
de l’adolescence au regard de la charge traumatique des transformations
corporelles (cf. le vécu de l’adolescent d’être agi dans ces transformations,
qu’il ne peut que subir passivement) peut être appréhendée à partir de la
manière dont le sujet se saisit de la rencontre avec la planche et de l’impact
de celle-ci dans la construction des liens entre les représentations :
• On l’a dit, la proposition de l’épreuve projective de Rorschach peut être
vécue comme redoublement traumatique au regard de l’expérience de
la puberté. Des manifestations explicites d’un vécu de type persécutoire
peuvent être observées dans l’établissement de la relation avec le
psychologue :
Flora (13 ans et 1 mois), à l’issue de la planche IV
« Ça sert à quoi sans indiscrétion ? ». On entend, sous couvert d’une
formation réactionnelle, le vécu dysphorique attaché à la passation de
l’épreuve de Rorschach.
Mounir (14 ans), à la planche VII
« ! " Encore pire... je sais vraiment pas c’est quoi ça ».
Richard (14 ans et 8 mois), déjà évoqué pour la verbalisation qui émerge
à la présentation de la première planche :
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Le vécu persécutoire, porté par une figure humaine, est massif, et ne peut
ouvrir sur une voie de dégagement pour la jeune fille.
Eric (14 ans et 11 mois), à la planche VI
« L.0.10’... Un serpent qui s’est fait écraser (il rit) là il y le trait du serpent
(D axial) et là il s’est fait écraser (D1) » (enquête : « là il y a la roue qui est
passée (D1) et là aussi (D3) et ça fait... (bruitage), et là le trait, droit... »,
réponse cotée G F- Adev).
(suite)
5 avec une chauve-souris D1 y restait que ça, j’ai dit
(rit)...une chauve-souris à tous les trucs avec des ailes,
Gz FC A dev
sang c’est quoi au fait une chauve-souris plein de
sang
(suite)
15 (prend la planche) une D5 colonne vertébrale de
IX 0:00:40 colonne vertébrale... y a quelqu’un D F+ Anat
une colonne vertébrale
(suite)
3 ou encore un animal, buste d’un animal (girafe)
D F+ A
l’oreille, le museau
4 deux yeux (D2), un nez, un visage
II 0:01:40 une bouche, sinon je vois Gbl F+ Hd
pas
5 Là on dirait la forme d’un Dbl F+ A
insecte, là le centre (Dbl)
une mouche, des ailes, une
bestiole avec des ailes...
ou alors je dirais une per-
sonne qui se regarde dans
le miroir, le corps, la tête,
6 il serait assis sur quelque
chose et c’est son reflet
dans le miroir...en tout cas
deux personnes identiques
Gbl F+ H
—> Katt
7 (L: 0:00:30) J’aurais dit sorte de sourire (Bas Dbl)
III 0:00:55 une sorte de visage, deux G F- Hd
yeux (D3)
8 ou encore un col avec un D/Dbl F+ Obj
nœud-papillon Ban
9 ou encore deux personnes D F+ H Ban
10 C’aurait pu être une sorte visage, pieds, jambes, bras
IV 0:00:50 G F+ H
de personnage
11 ou alors deux bottes accro-
chées sur une sorte de D/G F+ Obj
pilier... c’est tout
12 Un insecte avec des (? E) je sais pas vraiment
V 0:00:30 antennes, des ailes... je G F+ A Ban
vois rien d’autre
13 Un bateau vu de face, le drapeau (D2)
pont, les voiles (Dax), le
bâtiment ce serait soit un
VI 0:01:00 bâtiment de guerre, soit G F+ Obj
un bâtiment de commerce,
un cargo ou encore un
porte-avion
14 sinon deux quais dans une vue en coupe
gare, c’est tout ce que je G F- Arch
vois
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 259
(suite)
14 Le reflet de quelqu’un
dans le miroir... deux per-
VII 0:01:25 Gbl F+ H
sonnes identiques c’est
tout ce que je vois.
15 Ou alors une sorte de
moule...un moule pour
faire fondre un... je vois Dbl F- Obj
pas vraiment, une sorte de
coque
16 Je dirais pour les per- verres (D4) comme le...
sonnages ce serait plutôt
deux bretonnes avec un G F- Obj
chapeau ou encore des
lunettes de soleil
17 Une coque de navire vu de face, assez bas, rond,
viking, je dirais plutôt que pas large
VIII 0:01:25 G F- Obj
ce serait un navire de com-
bat vu qu’il est assez profilé
18 Ou alors sinon une sorte je pense pas, après G F- Frag
de feu d’artifice réflexion —>kex ? FC ?
19 ou encore deux pompiers ombre (D1), jet d’eau
aspergeant je sais pas quoi, (D4) (E : Deux ani-
une sorte de mât, des maux ?) soit deux singes, G K H
ombres plus précisément soit une sorte de léopard
de pompier... c’est tout
20 (L: 0:00:10) (soupire) le moule d’un trophée
Ici on aurait dit un trophée
IX 0:01:00 Dbl F+ Obj
(Dbl)... sinon je vois pas
ce que ça pourrait être
21 Un feu d’artifice (D1) D kex Frag
X 0:00:25
—>FC ?
22 Ou encore une tour (D8 +
DD F+ Arch
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D9)
23 Ou une fusée (D8) c’est ou encore une tour de châ-
tout ce que je vois teau mystérieux avec yeux
et bouche (Dans Ddblk
D F+ Obj
central)
(R.Add : D/Ddbl F-
Arch)
Durée totale de la passation : 00:10:15
Pl + hésite entre VI, VIII, IV
VIII J’ai toujours aimé les vikings, bateau et contes (IV = botte de 7 lieues)
Pl- IX Elle n’a pas vraiment de sens.
260 Expression projective au Rorschach et développement psychoaffectif
➤ L’identité sexuée
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« (se cache un œil)... pareil une dame qui se regarde mais avec des
différentes positions » (enquête : « une tête qui se regarde dans un miroir »,
réponse cotée G F+ H).
1. Le protocole d’Amélie est présenté ci-dessous, dans son ensemble, comme illustration des protocoles
d’adolescents.
264 Expression projective au Rorschach et développement psychoaffectif
Si, dans un premier temps, le lien narcissique entre les deux femmes
semble être en mesure d’organiser une représentation de relations a priori
sereine (le lien de regard), celui-ci fait l’objet d’un glissement en direction
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 265
d’un lien dont l’on peut imaginer la teneur persécutoire... ouvrant sur une
expression agressive de la pulsion.
Cléopâtre (16 ans), aux planches IX et X, propose une séquence de
réponses qui figure la difficulté à se déprendre de modalités clivées de
saisie du monde environnant, au profit d’une dynamique relationnelle
suffisamment explicite.
Planche IX : « deux dragons (D3), c’est tout » (enquête : « ils sont rouges,
on dirait qu’ils jettent du feu », réponse cotée D K (H)/Elem > FC) ;
puis planche X
« (elle se rapproche de la planche) on dirait le diable (réponse D/Dbl),
avec deux taureaux (D8) en haut... des petits lutins sur les côtés (D1),
avec l’enfer en rouge (D9)» (enquête : « lutins, on dirait que c’est des
servants qui lui font de l’air avec des feuilles », réponse cotée D/Dbl FC
Scène).
La sollicitation sensorielle est massive, dans un contexte d’instabilité des
représentations : il semble qu’aucun support d’identification ne puisse se
trouver disponible pour assurer un jeu entre les polarités de l’investissement
pulsionnel. Sans doute la précision proposée à l’enquête et qui concerne les
« lutins » tente-t-elle de donner une issue, au-delà du risque du clivage. La
tentative de figurer le rafraîchissement d’une ambiance pulsionnelle aussi
brûlante augure favorablement d’une reprise active de la part de Cléopâtre,
face à un débordement pulsionnel qui semble, dans un premier temps, ne
pas pouvoir être jugulé.
La présentation des protocoles de Amélie (16 ans et 2 mois) et de Jean-
Bertrand (17 ans et 5 mois) permettra de préciser les principaux enjeux du
fonctionnement psychique et des expressions projectives dans le temps de
l’adolescence à proprement parler.
266 Expression projective au Rorschach et développement psychoaffectif
(suite)
9 (éloigne la planche) Là deux bébés, deux petits
c’est deux... deux bébés enfants, qui se regardent
ou deux bonhommes...
avec des cheveux qui
VII 0:00:55 font comme ça... qui D KAtt H
se regardent, qui se
bloquent... avec une main
aussi qui part en arrière
(D2)
Parce qu’il y a plein de couleurs et plein de... qui part dans tous les sens
X
Pl.+ (D1), vive, joyeuse, les autres sont tristes.
Parce que j’aime pas ces trucs rouges, ça va pas, on dirait du sang ou je
II
Pl. sais pas ce que c’est.
I Je sais pas je la trouve... en fait c’est ces trucs (Ddbl) j’aime pas ça.
(suite)
7 Je sais pas comment dire comme les trucs dans les
on dirait comme un signe églises ou les châteaux
de décoration dans les forts et tout (il raconte
monuments... comme une qu’avec son père quand il
VI 0:00:55 sorte d’étoile et un truc était petit, il visitait les G F+ Obj/Arch
en haut qui appartien- châteaux, les églises, tout
drait... comme un talis- ce qui est ancien)
man ou quelque chose
comme ça...
(suite)
11 Heu... (L:0:00:15) ben
je dirais qu’il y a deux...
deux côtés et qui sont
plein de... là y a un hip-
pocampe
X 0:01:10 un crabe là, là un espèce D9 G(bl) kan A
d’animaux de mer... et qui D7
se battent par paire ou deux serpents de mer (D4)
qui se rencontrent mais espèce de limace de mer
je crois plutôt qu’ils se (D13) corail vivant (D1)
battent tout dans l’eau
Pl + IV C’est celle qui a l’air le plus élaboré, qui pourrait inspirer le plus.
Elle est vite fait gore...deux lapins charcutés, j’aime pas les lapins morts
II
Pl- au marché.
Illustrations cliniques
Sommaire
C
centrées sur la pratique du Rorschach. Sans avoir l’ambition d’une
présentation exhaustive des modes d’expression de la clinique et de
la psychopathologie dans le temps de l’enfance et de l’adolescence,
il visera néanmoins à proposer une palette suffisamment large et
représentative des fonctionnements psychiques.
Le choix des cas présentés dans cette dernière partie de l’ouvrage répond
à une double exigence :
• d’une part, celle de s’inscrire dans une variété de situations en terme d’âge
et de problématique de fonctionnement psychique ;
• d’autre part, celle de permettre un éclairage clinique et psychopatho-
logique à partir de différentes formes de demande dans le cadre d’une
pratique de psychologue, en mettant plus particulièrement l’accent sur
les situations de l’enfance et de la période de latence.
Les protocoles de Rorschach présentés dans ce chapitre comportent, pour
l’essentiel, deux caractéristiques principales :
• Ils se trouvent inscrits, dans leur présentation même, dans la dynamique
de l’examen psychologique, et abordés comme l’un des éléments qui
concourt à l’appréhension du fonctionnement psychique de l’enfant ou
de l’adolescent ;
• Ils sont, pour la plupart, accompagnés du protocole d’une épreuve
thématique, dont la présentation et la discussion viendront en contrepoint
de la présentation et de la discussion du protocole de Rorschach.
Chacun des cas retenus fera l’objet d’une présentation dans un déroule-
ment similaire, qui s’inscrira dans le fil de la mise en œuvre de l’examen
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
1. Cette situation a été présentée comme illustration de la pratiques des épreuves projectives dans
l’examen psychologique dans l’ouvrage publié chez le même éditeur : Roman P. (2006), Les épreuves
projectives dans l’examen psychologique, Paris, Dunod. La présentation qui est proposée dans le présent
ouvrage se trouve centrée sur l’épreuve de Rorschach, dont l’analyse se trouve davantage approfondie ;
elle laisse de côté la présentation et la discussion des dessins réalisés par cet enfant, que l’on peut
retrouver dans l’ouvrage mentionné ci-dessus.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 277
Jérémie est rencontré pour un bilan psychologique qui s’inscrit dans une
inquiétude de ses parents au regard de son développement psychoaffectif, au
regard de l’évaluation de sa personnalité et de ce que l’on pourrait nommer
comme les différents empêchements à grandir dans lesquels il se trouve pris.
De fait, Jérémie bénéficie déjà d’un certain nombre de prises en charge de
rééducation, au regard de troubles sévères du langage, suite à un diagnostic
de dysphasie énoncé par l’équipe d’un centre de références pour ce type
de troubles. Jérémie est en effet engagé dans deux séances d’orthophonie
hebdomadaires, une séance de psychomotricité et une séance d’orthoptie.
Une des questions des parents de Jérémie qui, séparés, sont reçus dans deux
temps distincts, concerne la qualité de l’ancrage de Jérémie dans la réalité :
en effet, il est décrit comme ayant tendance à investir un monde qui lui
est propre, en se coupant de la relation aux autres. Il faut noter que les
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
3 et un papillon là (D3) D F+ A
(s’excite et/ou s’angoisse)
III ou
Parce que ça fait longtemps que j’ai pas vu comme ça.
II ?
Parce que je veux pas en voir comme ça, non c’est celle-là que je l’aime pas
IV
(III), j’ai peur qu’il me morde les doigts ça.
284 Illustrations cliniques
Psychogramme résumé
Temps total : Temps/ réponse : Temps latence moyen :
R=8
3. 45’ 0. 28’ 0. 00’
G% : 63 A:6
D% : 37 A% : 75
ΣC:0
T.R.I : 0/0
RC% : 25 Ban : 1
Ang% : 0
Et ben l’histoire que les poussins y mangent... de... des poussins et des
1 0:01:05
poulets qui peut manger... qui peut manger... des pâtes...
Alors... un lit avec deux... avec... deux garçons qui parlent à côté de ce
5 0:00:55
lit... à côté de le lit ici... à côté y a une lampe, après c’est tout.
6 0:00:45 Ben y a un nounours qui est dans une grotte avec son ours...
Alors un lapin qui est qui est sur son lit et qui, qui se éveille, dans cette
9 0:00:50
porte...
10 0:00:35 Un chien... qui... qui met... qui le met dans ses toi... dans les toilettes...
Christophe, 7 ans
Christophe est âgé de 7 ans, il est l’un des jumeaux dizygotes, aînés du couple
des parents. Lors de la première consultation, il est d’emblée identifié par
ses parents comme différent de son frère jumeau. Les deux parents semblent
en accord sur l’identification d’une souffrance chez leur enfant, souffrance
que sa mère tend à mettre en lien avec sa propre souffrance dépressive.
deux enfants en même temps, enfants dont les parents disent ensemble
qu’ils n’étaient pas attendus à ce moment-là.
La consultation ouvrira sur une proposition de bilan, en appui sur la
passation de l’épreuve de Rorschach et de l’épreuve du CAT, ainsi que sur
la production de dessins libres et d’un dessin à consigne, le D10. Il s’agit
de pouvoir affiner la compréhension de la dynamique du fonctionnement
psychique de Christophe, afin d’ouvrir des propositions d’accompagnement.
➤ Clinique de la passation
Christophe s’engage avec une certaine avidité dans la relation, laissant
émerger des affects massifs dans un registre de dépression : il dit par exemple
286 Illustrations cliniques
qu’il n’est « qu’un tas de ferraille », qu’il ne « sert à rien », qu’il est « démoli »
et il manifeste des préoccupations marquées pour la mort. Il indiquera
également être très intéressé par la préhistoire, par la vie des dinosaures...
Au plan du jeu transférentiel, la relation s’engage sur une demande d’aide
massive de la part de Christophe : en effet, l’enfant fait vivre au psychologue
le sentiment que lui seul peut l’aider, voire le sauver d’un mouvement
dépressif majeur.
La production projective est assez largement marquée par l’expression
dépressive... et par l’appel de Christophe à une aide : l’identification d’un
« tuteur » dans le détail axial de la planche X, dernière planche de l’épreuve
qui signe l’épreuve de la séparation, dans un contexte de dispersion du
stimulus, semble pouvoir rendre compte de la quête de Christophe. Il
n’est sans doute pas indifférent que cette réponse intervienne après une
confrontation difficile à la planche IX qui se solde par un refus. L’appel
au soutien dans le lien transférentiel est par ailleurs sans doute à mettre
en lien avec le fait que les figures parentales, particulièrement dans leur
émergence au CAT, s’avèrent peu en mesure de constituer un soutien pour
le narcissisme de l’enfant.
On notera enfin que les dessins libres réalisés par Christophe sont chargés
d’expressions de menace pour l’intégrité et de menace dans le lien : un
bestiaire angoissant, renvoyant à la préhistoire (des dinosaures), des situations
d’attaque marquées par une agressivité orale...
7 Là un nœud-papillon, D F+ A
un papillon,
un scarabée... une fourmi...
(suite)
non ! ou un bonhomme
10 et puis c’est tout... c’est G F+ H
tout bien fait (touche la > (H)
planche).
11 Une chauve-souris ça se G F+ A Ban
V 0 : 00 :35
voit très bien...
12 est-ce que c’est une vraie comme ça on croit que G F+ A Ban
chauve-souris ? c’est une mouette
un papillon, et voilà.
Je sais pas ce que ça peut
être... V on va la mettre à
13
VI 0:00:40 l’envers je sais pas... Λ une G F+ Obj
guitare ? c’est bon, juste
une guitare.
14 Une pince ? voilà, juste pince de crabe G F+ Ad
VII 0 : 00 :25
une pince.
Des... des... des pan-
thères... des panthères qui D1
15
VIII 0:00:35 montent... une flèche... D kan A Ban
des panthères ou une
lionne.
Ça ressemble à rien... à à des chevals là, des hippo-
IX 0:00:25 rien... ça ressemble à rien. campes (D3) Refus
R.Add : D F+ A
16 Elle est belle ! tuteur, un une pince dangereuse, un D F+ Obj
tuteur... sécateur
17 à des flocons de neige, R. Add : D F+ A D F+ Frag
18 des lions, D2 D FC A
X 0:01:00 19 à des taureaux, D7 D F- A
20 et là il y a des ponts ... V D6 - deux trucs qui tient D F- Arch
comme ça... Λ c’est tenu et qui sépare
par une ficelle.
Durée totale de la passation : 00:07:20
Pl + VIII Les couleurs, le guépard.
X Taureau, le bleu.
Pl - II Parce qu’ils saignent.
IV Parce qu’il est tout noir, il a une queue là.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 293
Psychogramme résumé
Temps total : Temps/ réponse : Temps latence moyen :
R = 20
7. 20’ 0. 22’ 0. 00’
Refus : IX
G : 12
F : 17 F% : 85 H:1
D:8 F+ : 11 F+% : 65 H% : 5
F- : 6
G% : 60 A : 13
Ad : 1
D% : 40 A% : 70
Σ C : 0,5
T.R.I : 0/0,5 Obj : 3
Frag : 1
RC% : 30 Arch : 1
Ban : 5
Ang% : 0
1 0:01:30 Ça peut faire... une poule... une maman poule qui avait trois petits fils et
qui... qui... qui allaient manger pour partir en voyage... la maman a fini
de préparer les bagages alors elle arrive et elle dit : « dépéchez-vous... les
enfants »... c’est avec quoi que c’est fait... de la peinture... la maman poule
elle est pas coloriée.
2 0:01:00 C’est... on dirait que c’était des gens qui combattaient pour la ficelle, non
qui faisaient du sport, tirer la ficelle le plus fort possible... y avait un ours
et un raton-laveur et un bébé raton-laveur...
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3 0:01:10 On dirait un roi, le roi, un roi, le roi des lions... ( ?) ben que c’est un roi...
là y a une souris...un roi... qui essaie d’attraper toutes les souris et il y arrive
pas alors il est en train de penser sur son fauteuil (Christophe regarde le
psychologue écrire).
4 0:01:00 C’est une biche, non un kangourou, avec un autre kangourou, la maman
kangourou elle saute et l’autre kangourou fait du vélo... et ils vont en
pique-nique parce qu’il y a un panier.
5 0:01:00 Deux bébés raton-laveur dort dans une chambre... ça peut faire que deux
ratons-laveurs dorment dans une chambre qu’une fille avait capturés...
6 0:00:40 Un loup avec un bébé loup il(s) dort, une maman et un papa dort dans
son terrier... le bébé loup est... réveillé.
294 Illustrations cliniques
(suite)
7 0:01:00 C’est un tigre qui attaque des singes, c’est joli dis donc, j’aimerais bien le
voir colorié... c’est un tigre qui attaque un singe, c’est un peu l’histoire que
le tigre voulait manger le singe.
8 0:00:45 Des singes qui regardent la télé...c’est-à-dire...et les deux singes se moquent
d’eux.
10 0:00:30 C’est un chien... une maman chien et un bébé chien qui s’amusent... dans
les toilettes...
Durée de la passation : 0 : 9 : 05
➤ Clinique de la passation
Laetitia s’investit avec plaisir dans la passation des épreuves et, de manière
générale, dans la relation duelle. Celle-ci semble non seulement la soutenir,
mais aussi la mobiliser dans une forme d’excitation sur laquelle il conviendra
de revenir. Le lien transférentiel autour des épreuves projectives se trouve
coloré alternativement, selon les moments, par une importante excitation
de Laetitia et par des mouvements de contrôle. L’excitation emprunte des
formes auto-érotiques : Laetitia s’agite, croise ses jambes, les décroise, met
sa main dans son entrejambe, puis se gratte d’autres parties du corps (le cou,
les pieds...).
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(suite)
Elle est pas à l’envers,
V je vois mieux on dirait
IV 0:00:35 8 qu’il a deux têtes celui-là... G F+ (H)
Λ un monstre, un drôle de
monstre.
VII 0:00:50 12 Une rivière de traviole. c’est toi qui l’a fait ? G F- Geo
15 Et un monstre. G F- (H)
voilà... je comprends un
peu rien mais je regarde
bien.
(suite)
20 V Ou un cerf magique (fait
tourner la planche sur elle- G F- A
même).
Pl + Je trouve que c’est la plus jolie, c’était le robot le plus... le plus joli, le plus
VIII
brillant.
Pl - IV
Psychogramme résumé
Temps total : 7. Temps/ réponse : Temps latence moyen :
R = 23
10’ 0. 19’ 0.00’
G : 19
GCont : 1 F : 23 F% : 100 H:0
D:3 F+ : 6 F+% : 26 Hd : 0
F- : 17
H% : 0
(H) : 4
G% : 63 A:6
D% : 37 A% : 75
ΣC:0
T.R.I : 0/0 Geo : 1
Bot : 1
RC% : 43 Frag : 1
Ban : 3
Ang% : 0
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 303
1 0:01:10 On peut faire : trois oiseaux qui déjeunent derrière eux il y a un coq ou
une poule et alors ils déjeunent tranquillement jusqu’à ce que la ponte
arriva ( ?) rien... et après ils retournèrent au lit.
2 0:01:25 Ah oui, trois ours, deux d’un côté et deux de l’autre... et y en avait deux
d’un côté qui tiraient et un de l’autre... qui va gagner ? les deux ours bien
sûr... et ils continuaient, ils continuaient jusqu’à... jusqu’à que... ? jusqu’à
ce que le grand dragon arrive ( ?) et alors ils s’enfuient vite pour aller se
cacher... parce que le dragon se réveille le soir.
3 0:01:15 C’est quoi ça c’est un lion ? dis donc ! alors il était une fois un violon...
un vieux lion qui était pas gentil du tout... sauf quand il voyait des souris
parce qu’il avait peur des souris... alors il se dit non ! un lion a pas peur
des souris ! alors il le mangea... et y a rien d’autre à dire.
4 0:01:40 Ah ben ça par contre... il y avait un maman kangourou avec son enfant
en vélo et son bébé dans la poche, elle avait un panier, un chapeau... et
elle sauta, elle sauta jusqu’à ce que le petit enfant ait mal... de pédaler...
alors elle rentra se coucher jusqu’à temps qu’un grand oiseau féroce arriva...
juste à temps les kangourous étaient en train de dormir.
5 0:00:55 Il y a deux petits ours dans leur lit, le papa et la maman ils sont pas là ils
sont en train de déjeuner... les petits ours sortent faire une balade tous seuls
et quand ils voient le grand méchant loup ils repartent vite dans leur lit.
6 0:01:00 C’est quoi ça c’est des ours ? il y avait deux ours dans une grotte, un petit
et un grand... il y en avait un qui dormait et l’autre qui essayait de se
décoincer parce qu’il était trop gros dans le trou... jusqu’à ce que le petit
ours sortit... plus que quatre.
7 0:00:55 Ouh là la... il y avait un singe qui se balançait de liane en liane jusqu’à
ce qu’un tigre arrive et lui sauta dessus... et voilà ( ?) le singe va se faire
dévorer.
8 0:00:50 Alors la grand-mère qui était morte était en photo, la maman, la tata, pépé
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9 0:01:05 Un petit lapin dans son lit se réveilla... il se dit mais c’est le jour alors je
vais aller déjeuner.
10 0:00:30 Oh des chiens... il y avait des chiens... alors sa maman tapa son petit chien
sur ses fesses et le petit chien dit « ouah » et la maman dit « c’est pas
bien » alors le p’tit chien alla se coucher et la maman aussi ( ?) qu’il fasse
pipi partout dans la maison.
Houria, 8 ans
Les deux parents sont présents lors du premier entretien. Houria est présentée
par eux comme une petite fille réservée, plutôt introvertie, qui ne pose pas
de difficultés particulières du point de vue de l’éducation : enfant unique
du couple parental, elle répond globalement aux attentes et aux exigences
que ses parents peuvent avoir à son égard, tant du point de vue de son
développement global que celui des relations au sein de la famille. Les parents
mettent en évidence le fait que Houria se montre une petite fille solitaire,
parfois repliée sur elle-même et, en tous les cas, en difficulté du point de vue
de sa vie sociale... mais sans que cela ne se traduise par une marginalisation
significative dans son environnement de vie (école, voisinage...). De fait,
la préoccupation s’avère principalement liée aux résultats scolaires et à la
perspective de la nécessité d’un redoublement au regard des performances
de Houria.
Dans le même temps, la situation familiale est présentée de manière
quelque peu dramatisée : la mère de Houria doit faire face à de graves
difficultés de santé, avec des hospitalisations répétées, tandis que son père
se décrit lui-même comme peu en mesure d’assurer la prise en charge de
sa fille au quotidien. Apparaît ainsi un contexte d’insécurité relationnelle
pour Houria, dans la double valence de l’inquiétude pour la santé de sa
mère et de l’expérience d’un appui précaire du point de vue paternel : des
solutions palliatives sont mises en place par la mère, non sans culpabilité, afin
de garantir une continuité suffisante de préoccupation à l’égard d’Houria
(mobilisation d’amis de la famille en particulier, le milieu familial se montrant
peu en mesure, pour des raisons diverses, de contribuer à l’accueil de Houria).
Un bilan psychologique, intégrant des épreuves d’évaluation des com-
pétences cognitives et du fonctionnement psychique, est mis en œuvre.
Seront ainsi proposées successivement à Houria le WISC-IV, l’épreuve de
Rorschach et du CAT.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 305
➤ Clinique de la passation
Notons enfin la présence d’un TRI coarté (0/0), qui rend compte de
la pauvreté de la dynamique du fonctionnement sur la double polarité de
l’intériorisation des investissements et d’un rapport sensible au monde qui
l’entoure.
(regarde ailleurs)
Je me rappelle plus des
autres
8 (E : ?) G F+/- A
(hoche de la tête)
(E : ?)
V 0:04:00 Je me rappelle plus du
nom.
( ?)
310 Illustrations cliniques
(suite)
C’est comme une araignée Une mygale (E : ?)
(E : ?) Elle est heu...(prend les
ça boit du sang... planches qui sont retour-
nées et cherche la planche
I). Elle est là. (E : ?)
(montre sur la planche I)
Ce trait, et pis ça les yeux.
IX 0:00:50
(suite)
Pl + X Parce que j’aime bien la couleur.
Psychogramme résumé
Temps total : Temps/ réponse : Temps latence moyen :
R = 18
12.35’ 01.16’ 0. 11’
G : 16
F: 18 F%:100 H:2
D:2 F+ : 10 F+% : 59 H% :
(H) : 2
F- : 7
F+/-: 1
G% : 89 A : 12
A%:
D% : 11
ΣC:0
T.R.I : 0/0 Bot : 1
Anat : 1
RC% : 28
Ban : 2
Ang% : 5.5
1 0 : 03 : 30 L. 1.15’ (?) L. 0.50 (?) J’arrive pas à trouver ! (?) L.0.50 (?) L.0.40’
2 0:02:10 C’est l’histoire de trois ours qui tiraient une corde avec son petit, et avec la
maman et le papa (?) L. 0.40’ (?) Ils tirent une corde ( ?) Après la corde
elle se déchire (regarde dans le vide) (?) Après ils ont plus de corde.
3 0:01:50 C’est l’histoire d’un lion qui est dans, sur le fauteuil... (?) (montre sur la
planche) Il y a une canne et derrière il y a une souris. (?) Ils regardent les
enfants (?) Ils sont... ils sont rendormis (?) Le lion.
4 0:02:00 La maman kangourou va pique-niquer avec ses deux enfants... Elle a pris
un chapeau et un sac (regarde le clinicien écrire et s’arrête) (?) Elle se
dépêche... le petit il a pris un ballon... (?) La petite fille kangourou elle,
elle est sur son vélo... Il se dépêche aussi... (?) dans la forêt, il y a déjà le
papa qui les attend.
312 Illustrations cliniques
(suite)
5 0:01:35 (sourit) C’est l’histoire d’une, de deux petits ours. (s’arrête pour laisser
écrire le clinicien)... ses parents ils sont pas dans le lit... les bébés ours, là
dans le berceau. (?) Heu point (?) Point (?) Fin.
6BM 0:01:45 L. 0.20 C’est... 0.15’ Houlà (en souriant)... C’est l’histoire de les ours. La
maman ours et les bébés ours, l’ours, ours. ils dormaient... et il dort dans
une grotte... il y a des feuilles et la maman elle dort, le bébé il est réveillé
(?) Le papa il est parti (?) Le bébé s’endort.
7BM 0:01:10 C’est l’histoire d’un tigre et un singe. Ils se bagarraient... le tigre il attaquait
le singe... et c’est dans la jungle... ... Après le singe il le griffe...et le tigre
aussi.... et c’est tout !
8BM 0:02:10 (rit) C’est l’histoire de quatre singes. Il y avait le papa et la copine de la
maman singe... Le bébé singe, non l’enfant singe... oui... ... il regarde la
maman... la maman, elle lui dit « va dans ta chambre »... et le papa singe,
le papa singe parlait avec heu la copine de maman singe... et la maman
singe est assise sur le fauteuil (?) Le, l’enfant singe il est parti se coucher.
(?) Ils parlent.
9 0:01:05 C’est l’histoire d’une petite, d’un petit lapin qui était dans son lit et il avait
peur du noir et sa maman laisse la porte ouverte. Et c’est tout ! (?) Après
elle dort, il dort.
Durée de la passation : 0 : 17 : 25
Pierre, 9 ans
Pierre est âgé de 9 ans lorsqu’il est rencontré pour un examen psychologique
particulièrement orienté sur bilan projectif (proposition de deux épreuves
projectives, le Rorschach et le TAT, dans le cadre de trois rencontres
comprenant un temps nécessaire de synthèse), à la demande conjointe du
médecin-psychiatre qui le reçoit ponctuellement avec ses parents en entretien,
et du médecin-pédiatre hospitalier qui suit l’enfant depuis plusieurs années.
➤ Clinique de la passation
Pierre se présente dans une difficulté à maintenir son attention dans la durée
de l’engagement relationnel dans le cadre de la consultation, particulièrement
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
dans le temps où ses parents sont présents avec lui. Il épuisera d’ailleurs le
stock de feuilles à disposition des enfants pour réaliser des avions en papier,
qu’il fera voler dans le bureau du psychologue en les poursuivant en courant
et en sautant.
Il semble assez patent que la situation d’entretien en présence des parents
mobilise chez l’enfant une excitation tout à fait particulière : tout se passe
alors comme si Pierre bénéficiait d’une scène sur laquelle il pouvait mettre en
jeu une souffrance, qui se traduit, en particulier, par une quête d’attention
à tout prix et permanente.
Dans la rencontre duelle, après un premier temps dans lequel Pierre tend
à éviter la rencontre, deux mouvements peuvent être identifiés :
314 Illustrations cliniques
d’espace pour autoriser un jeu entre les imagos : l’imago paternelle apparaît
floue, inquiétante (Rorschach, planche IV) voire interchangeable (TAT,
planche 7), l’imago maternelle dangereuse prise dans le risque de la dispari-
tion (prégnance de la thématique de la perte/disparition/atteinte maternelle
au TAT). En tout état de cause, il semble que la conflictualisation des
imagos parentales se trouve entravée par l’incertitude de leur construction.
Enfin, au plan des relations d’objet, il semble que le fonctionnement
psychique de Pierre voit alterner quête d’étayage et déni du lien, dans
une configuration que l’on peut situer dans un registre narcissique du lien
(idéalisation versus fécalisation).
(suite)
8 V. Ça ressemble à un arbre... Les feuilles, D1, l’herbe
à la suivante...(E ?)... n’im- (Dax. sup.) et là c’est le
VI 0:00:45 G F+ Bot
porte quoi, un arbre et à la tronc (Dax.).
suivante.
9 Ça ça ressemble à deux
VII 0:00:25 D F+ H
dames... à la suivante.
Pl - VII
X
320 Illustrations cliniques
Psychogramme résumé
Temps total : Temps/réponse : Temps latence moyen :
R = 14
7. 10’ 0. 31’ 0.00’
G:7
Gbl : 2 F : 13 F% : 93 H:5
D:3 F+ : 9 F+% : 64 H% : 36
D/Dbl : 1 F- : 4
A:5
G% : 54 CF : 1 A% : 50
D% : 23 (A) : 2
Bl % : 23 ΣC:1
T.R.I : 0/1 Obj : 1
Frag : 1
RC% : 36 Bot : 1
Ban : 5
Ang% : 0
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 321
1 0:01:00 C’est des vraies ? c’est qui qui les a fait... un garçon qui veut pas faire du violon et
qui dort, avec une feuille de papier... tenez, la deuxième ! (met la carte de visite
de son père sur le dessus des planches ... lit tout haut ce qui est écrit dessus)
2 0 : 01: 10 Ça je sais pas (E ?)... je sais pas... il y a un monsieur avec un cheval musclé, le
monsieur est musclé, y a une dame avec des livres, y a une dame avec un chapeau
comme ça, elle est contre l’arbre, y a une grosse maison... y a un deuxième cheval...
je peux dessiner sur les images, c’est gris, j’aime pas le gris
3 0:00:55 Un garçon qui est au coin... il est pied nu, ah si, il est avec des chaussures, il pleure
contre le mur... (mime) parce qu’il a une bosse, une grosse bosse qui fait toute la
planète, non quand même pas (mime les pleurs)
4 0:01:00 Des mariés (rit) V > < ( ?) ... des mariés et c’est fini... ils habitent dans une
maison et c’est fini (baille)
5 0:01:10 Ça c’est la mère qui regarde son enfant travailler... il est mort ( ?) tu le vois pas
couché sur la table, il a une grosse boule sur la tête... non ! c’est une plante et le
garçon il est parti et la mère elle est inquiète : « mon fils où il est passé ?! » (crie)
6BM 0:01:05 « Fiston où il est passé ? fiston où il est ? la dame de ménage, vous avez vu mon
fils ? » (mime des pleurs) ... il pleure le père, lui, avec la dame de ménage
7BM 0:01:00 c’est son père avec lui (lance la planche) ... c’est un monsieur qui fait son ménage,
c’est son père parce que sa mère est morte
8BM 0: 00 : 25 C’est une dame qui se fait attaquer... c’est des monsieurs qui tuent sa mère :
« maman, maman »
10 0:01:05 Il fait câlin à son père parce que sa mère est morte : « maman... » ( ?) elle est
morte de la peste quand Marie était née, celle qui a retiré la peste... c’était Marie
sa maman et Dieu son papa
11 0:01:15 Ça c’est quoi ? c’est un buffle qui a perdu sa maman... non c’est un scarabée qui a
perdu sa ma maman...
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
12 0:00:40 C’est un arbre qui a perdu sa maman, y a un cimetière ici (montre la barque, puis
mime les cris de l’arbre)...il s’est fait couper par un bûcheron parce qu’il criait trop
fort
13B 0:01:00 C’est un enfant qui est tout seul parce que sa maman est morte et son papa aussi...
(pleure) comment j’vais payer la maison ? comment j’vais manger ? y a pas de
poulet...
19 0:00:45 Ça c’est quoi ? un bateau qui a perdu sa maman, elle s’est effondrée au fond de la
mer
16 0 : 00: 25 Je la dessine ? c’est un enfant qui pleure à sa maman parce qu’elle est morte
Oriane, 10 ans
d’évaluation, davantage que d’aide, pour Oriane (de fait aucune aide ne
pourra s’engager pour elle du fait du refus de la proposition d’orientation
réalisée par le psychologue en direction d’une démarche psychothérapique).
Oriane est par ailleurs décrite comme une enfant proche des préoccupations
des adultes, tout à la fois dans une forme de dépendance à ceux-ci (elle n’a
pas d’amis de son âge, demande sans cesse de l’attention) et de maîtrise dans
le lien (elle sait ce que doivent faire les adultes).
L’évaluation clinique prendra appui sur la passation d’une épreuve
projective de dessin à consigne, le D10, et sur la passation de l’épreuve de
Rorschach.
➤ Clinique de la passation
Oriane se présente comme une petite fille très coquette, dans une féminité
déjà affirmée, moins d’ailleurs au plan des transformations physiologiques
de l’adolescence ou de la pré-adolescence, que d’une manière de s’habiller,
de se tenir et d’être en lien : elle oscille entre distance et séduction, dans
une forme de froideur affective. Oriane s’engage assez volontiers dans les
différentes épreuves proposées, tout en restant relativement « lisse » dans la
relation qui semble être vécue comme plutôt dangereuse. Elle a du mal à
partager les affects qui peuvent l’habiter et elle se trouve en difficulté pour
évoquer des éprouvés personnels. Lorsqu’ils émergent, il semble que cette
expression pourrait mettre en danger Oriane (dans ses relations à ses objets
d’attachement ? dans sa sécurité interne ?), et qu’alors Oriane tende à se
rétracter.
Oriane se montre en mesure de reconnaître ses difficultés scolaires, mais
elle se plaint surtout d’être seule et de s’ennuyer. Au fil des entretiens de
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
• Planche I : «(...) deux hommes mais collés avec des ailes, une de chaque
côté et des petits trous de chaque côté et les pieds collés, des têtes un
peu séparées des mains comme ça (mime) et c’est tout » ; on notera la
manière dont le redoublement autour de l’axe de symétrie ouvre sur une
impossible séparation (référence à des figures « collées », dans le contexte
d’une sensibilité au vide intermaculaire, et, enfin, l’insistance sur le lien
et la tentative de figurer la séparation ;
• Planche II : « (...) je dirais la tête à l’envers mais rouge (D3), des ailes
noires (D1), des petits pieds collés (...) » ; la représentation d’une tête,
qui sera à l’enquête identifiée comme « tête de monstre » bute sur la
mobilisation sensorielle et pulsionnelle de la planche, noire et rouge.
Dans ce contexte, l’issue que représente les « petits pieds collés » peut
326 Illustrations cliniques
1 J’en sais rien moi... (rit) J’ai dit avec une ceinture,
deux hommes... mais col- très clair, gris (Ddbl).
lés, avec des ailes, une de
chaque côté et des petits
I 0:01:00 bras de chaque côté et G FE H
les pieds collés, des têtes
un peu séparés des mains
comme ça (mime) et c’est
tout.
(suite)
7 V Λ Euh... je dirais une
chauve-souris (Rit) avec
V 0:01:10 G F+ A
des pattes très très très
larges, une tête bizarre
10 Euh ! Oh là là... y a la D1
moitié du visage à gauche
VII 0:01:30 D F+ Ad
qui est que de face et
l’autre partie pareil
15 et le squelette. D4 D F- Anat
(suite)
18 Euh... je dirais un ani-
mal bizarre, du bleu en
haut, vert, noir, orange,
blanc, un tout petit peu
de blanc... un animal
IX 0: 01: 25 G F± A
avec des cornes (D3) très
bizarres, de droite et de
gauche comme ça et ça je
pense que c’est le reste du
corps (G).
Psychogramme résumé
Temps total : Temps/ réponse : Temps latence moyen :
R = 21
11. 05’ 0. 33’ 0.00’
G:7
D : 10 F : 15 F% : 80 H:2
Dd : 2 F+ : 9 F+% : 60 Hd : 4
Dde : 1 F- : 5 H% : 29
Dbl : 1 F± : 1 (H) : 2
FE : 2 A:6
G% : 35 FC : 4 Ad : 3
D% : 50 A% : 43
Dd% : 15 Σ C : 1,5
Bl% : 5 T.R.I : 0/2 Anat : 2
Sex : 1
RC% : 33 Obj : 1
Ban : 3
Ang% : 33
Le temps de l’adolescence
Lucile est âgée de 12 ans et 6 mois au moment où elle est reçue en consultation
à la demande de ses deux parents, séparés, qui seront reçus successivement
(et présents ensemble lors de la séance de synthèse). Ces derniers se disent
interrogés par l’écart qui existe entre la vivacité et la maturité intellectuelles
de Lucile, sa curiosité, la diversité de ses intérêts culturels et sociaux d’une
part et la réussite scolaire moyenne qui est la sienne d’autre part. Pour
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 333
expliquer cet écart, les parents de Lucile proposent l’hypothèse que leur fille
puisse présenter un haut potentiel intellectuel.
➤ Clinique de la passation
Lucile s’engage volontiers dans les différentes épreuves qui lui sont proposées.
À l’égard de l’épreuve de Rorschach, elle montre une certaine retenue
pendant le temps de la passation : les réponses sont données de manière
quasi immédiate après la présentation des planches et témoignent d’une
bonne conscience interprétative. Si le rythme est soutenu, la qualité de la
verbalisation n’en souffre pas pour autant. Lucile présente une modalité un
peu rigide dans le maniement des planches : elle les prend en main, mais à
aucun moment ne les manipule (absence de toute démarche de renversement
de planche). Il est intéressant de constater un effet de familiarisation de
l’adolescente avec l’épreuve : en effet, le temps de l’enquête verra une
334 Illustrations cliniques
affectives dont dispose Lucile peut laisser augurer d’une bonne maturation...
à la condition que les réponses de l’environnement puissent présenter une
plasticité suffisante pour accompagner les aspirations de la pré-adolescente.
(suite)
4 Ça me fait penser à un... Un tapis comme une peau G F- Adev
tapis en forme de peau de de vache étendue ou un G F- Anat
5 vache étendue... crâne de bélier
ou a un crâne de bélier... (?) Alors le crâne, ça
serait ici... le nez avec les
cornes... et le tapis, ça
serait... tout.
( ?) Euh..., récemment,
IV 0:00:40
j’ai vu euh.. un... un motif
en forme de crâne de bélier
euh.. sur un joli tee-shirt
et ça m’a fait penser à ça,
et... chez une amie, il y a
un tapis en peau de vache.
( ?) Euh non, y aurait pas
d’autre chose, non...
(suite)
9 Une panthère qui donne Un léopard qui donne la D/Gbl kan A Ban
la main à un... dinosaure patte à un dinosaure pour
pour traverser un fossé traverser le fossé
(?) Ici on voit un léopard
(D1), on dirait qu’il donne
la main comme à un dino-
saure (D4) ici et le fossé,
il se trouve juste là..
VIII 0:00:30 (?) Euh.. Je sais pas , ça m’a
aussi fait pensé à chaque
jour, il faut que j’aille chez
mon père, chez ma mère
comme traverser quelque
chose un fossé. Ca me
fait aussi penser à mon
enfance et on a étudié les
dinosaures. Puis voilà.
Pl + I
IX
VI
Pl - VII
340 Illustrations cliniques
Psychogramme résumé
Temps total : Temps/ réponse : Temps latence moyen :
R = 11
4. 30’ 0. 27’ 0. 00’
G:8
F:4 F% : 36 H:3
Gbl: 2 F+ : 2 F+%: 50 H% : 27
D/Gbl: 1 F- : 2 (H): 1
FC’: 1
G% : 100 K: 3 A:3
Ad : 1
kan: 2 A%: 36
kob: 1
Adev : 1
Anat : 1
Pays : 1
Σ C : 0,5
T.R.I : 3 / 0,5 Ban : 2
RC% : 27
Ang% : 9
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 341
1 0:01:20 C’est un petit garçon qui a envie de jouer du violon et qui regarde un
violon qui est posé sur une table avec envie...puis il le trouve beau (?) Euh
il demanderait à son grand-père de lui apprendre à jouer du violon et plus
tard il serait violoniste professionnel dans un orchestre.
2 0:01:40 C’est une jeune journaliste, elle est partie dans un pays étranger et elle
s’est arrêtée devant une ferme où elle voit une famille pauvre avec une
femme enceinte et le père de cette famille qui laboure les champs pour
gagner de l’argent pour pouvoir nourrir son futur enfant et quand le bébé
sera né, ils pourront envisager de s’acheter de nouvelles terres.
3 0:01:20 C’est une adolescente de 13 ans qui revient de l’école et qui à la tête pleine
de pensées noires, elle se fait battre à la maison et elle pleure souvent le soir
avant de s’endormir... (?) Euh... elle irait à l’école, tout se passerait bien,
elle est très bonne pour les matières scolaires mais quand elle rentre à la
maison sa joie retombe tout de suite et elle doit faire ses devoirs, préparer
à manger, ranger la maison.
4 0:00:55 Ce serait une grande histoire d’amour entre un acteur et une actrice, ils
sont américains et américaines, ça fait depuis quelques mois qu’ils sont
ensemble mais cette jeune actrice se rend compte que son amoureux est
attiré par une autre femme et il va décider de la laisser pour cette autre
femme...Cette actrice américaine va avoir beaucoup de peine et elle va
tomber en dépression.
5 0:02:10 C’est une femme qui dormait tranquillement pendant la nuit et tout à
coup elle a entendu un bruit qui l’a réveillée en sursaut, elle est descendue,
elle a cherché dans toutes les pièces mais quand elle ouvre la porte de la
salle à manger elle voit que quelque chose est tombé euh...un pot de fleur
est tombé par terre alors qu’avant il était sur la table et elle pense que
quelqu’un est entré dans sa maison... (?) Euh elle serait paniquée et elle
appellerait son ami pour lui demander de se rendre chez elle pour voir ce
qui s’est passé et après elle appellerait la police parce que son ami lui à
conseillé de le faire... et après la police à enquêté chez elle.
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6BM 0:01:30 Euh...une femme de famille plutôt aisée avait perdu le soir de son rendez-
vous un médaillon, elle serait retournée dans la chambre d’hôtel, mais qui
serait à nouveau occupée par un homme inconnu... elle aurait cherché
dans les tiroirs mais se serait fait surprendre par cet homme inconnu et
aurait eu des problèmes car il l’a prise pour une voleuse et après il aurait
appelé la police et elle aurait dû aller devant le tribunal.
7BM 0:01:35 C’est une petite fille qui à toujours rêvé d’avoir un chat et sa mère à décidé
la veille d’aller lui en acheter un pour son anniversaire et depuis elle ne
peut plus s’en passer, elle passe toute sa journée avec lui en train de lui faire
des caresses et puis un jour, son chat disparaît et ne revient pas le soir à la
maison, la petite fille est très inquiète et très triste... Le lendemain, ils se
rendent comptent que c’est les voisins qui l’ont pris et ils ont déménagé...
342 Illustrations cliniques
(suite)
8BM 0:01:50 Euh... Ce serait pendant la guerre, une femme a vu son homme partir pour
aller combattre et quelques semaines après, elle apprend qu’il s’est blessé,
alors elle se rend à l’endroit où ils le soignent... Il s’est pris une balle dans le
ventre donc ils vont devoir ouvrir pour enlever cette balle et cette femme
est donc très triste qu’il se soit blessé et heureuse qu’il soit de retour...
Après la blessure guérirait et il n’aurait pas besoin de retourner à l’armée.
9 0:01:10 Deux sœurs très proches qui sont parties en vacances au bord de la mer
dans une petite région au sud de la France, elles sont plutôt riches donc du
coup elles ont pu s’acheter une maison au bord de la mer, et euh...chaque
jour elles prennent le temps d’aller à la plage pour ramasser des coquillages,
parler, se raconter des histoires, bronzer ou s’amuser dans l’eau et une de
ces deux sœurs est peintre et décide de peindre sa sœur devant les vagues.
10 0:01:20 Un vieux couple qui ont vécu de très très belles histoires euh...se retrouvent
maintenant sans la sœur de la femme du couple euh... le mari de cette
femme essaye de la soutenir le plus qu’il peut mais la femme est très triste
d’avoir perdu sa sœur et après ils iront à l’enterrement et après ce sera une
habitude d’aller chaque mois au cimetière pour aller voir la tombe de sa
sœur et ils vont vivre d’autres moments heureux.
11 0:00:55 Faut la prendre comme cela ?... Euh c’est dans un volcan, un peuple a
construit des ponts, des escaliers en pierre pour monter au sommet de
celui-ci et au sommet de celui-ci, il se trouve un dragon qui demande que
chaque année il y ait un sacrifice, et que si il y en a pas, il mange la plus
jeune fille de ce peuple.
13B 0:02:40 L. 0.10’. C’est un petit garçon qui déborde d’imagination euh... qui un jour
doit attendre sa maman qui est partie faire des commissions et euh... en
attendant sur le pas de la porte de sa maison, il pense à plein de choses,
pleins d’histoires qu’il pourrait raconter et écrire, dessiner....Plus tard, il
aimerait être un grand poète et sa mère n’est pas du tout d’accord avec ça,
elle est même contre à ce qu’il pense des poèmes ou à des histoires...Elle
veut qu’il se concentre à l’école, sur d’autres choses qu’elle trouve plus
importantes et elle ne comprend pas qu’il a juste besoin de soutien, d’amour
et d’un peu de compréhension... (?) Après sa mère reviendrait des courses,
il viendrait l’aider à ranger les courses et puis il irait au... village pour
s’acheter des nouvelles feuilles et nouveaux crayons avec l’argent qui reste
des courses pour peindre et dessiner des paysages.
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 343
(suite)
19 0:01:10 Ce serait un soir sur un bateau où plusieurs personnes dansent au son d’un
orchestre qui joue en live et puis tout le monde s’amuserait beaucoup
jusqu’à ce qu’il y ait une tempête et que le bateau se balance de gauche à
droite et que ça devienne quasiment insupportable de rester debout euh...
le lendemain la tempête s’est calmée, tout le monde est heureux, le bateau
est entier sans trop de dégâts et il s’arrêterait au port d’une ville.
16 0:01:40 Blanc ?!... (rire)... Euh... L. 0.10’. C’est un vieil homme, qui un jour
voulait aller peindre la neige, donc il part avec ses peintures et avec sa toile
blanche et son chevalet à la recherche d’un beau paysage...Ce monsieur,
il a pas beaucoup d’argent, il est pieds nus sur la neige, il commence à
trembler, il n’arrive pas à se réchauffer euh....il a une hypothermie, il a
tellement froid qu’il s’endort dans la neige et que c’est que quand un animal
avec sa truffe chaude vient lui lécher les joues qu’il reprend conscience
et qu’il rentre vite chez lui pour se réchauffer et se soigner avec sa toile à
moitié peinte... Un beau paysage avec de la neige.
Durée de la passation : 0 : 22 : 55
Rodolphe est reçu sur les conseils d’un médecin-psychiatre, dans le contexte
de troubles alimentaires sévères et d’un désengagement progressif à l’endroit
du scolaire. Il s’agit, du point de vue du médecin-psychiatre, inquiet de
l’évolution psychoaffective du pré-adolescent, de permettre une évaluation
de son fonctionnement psychique mais aussi une mobilisation de Rodolphe
autour d’une compréhension et d’une subjectivation de ses troubles.
Rodolphe bénéficie d’un suivi régulier de la part du médecin-psychiatre,
et d’un traitement anxiolytique qui semble le dégager de la part la plus
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
➤ Clinique de la passation
ce que l’on peut identifier comme une souffrance identitaire dans le temps
de l’adolescence.
L’appui relationnel est assez peu investi, si ce n’est sur un mode primaire
et non conflictualisé, dans la mesure du risque que semble représenter
la rencontre avec l’altérité. Il semble que l’analyse du T.R.I, à partir
des cotations des réponses à l’épreuve de Rorschach, donne la mesure
de ce risque. En effet, le T.R.I est coartatif, maintenant en tension les
pôles d’investissement de la réalité interne (K = 2) et de la réalité externe
(C = 1,5) : cependant, on peut également mesurer de quelle manière chacune
de ces polarités se trouve prise dans une forme d’envahissement signant
la porosité des enveloppes internes/externes. À partir de là, on comprend
que les mouvements identificatoires de Rodolphe se trouvent malmenés,
rendant problématique l’engagement dans une conflictualisation des liens :
l’investissement du lien à l’image maternelle semble être prévalent, la
rencontre avec les identifications masculines se trouvant évitées, au risque
de la violence de cette rencontre. Les positions transférentielles de Rodolphe
témoignent d’ailleurs de ce mouvement, dans la mesure où celles-ci voient
privilégier la figure du retrait, associée à une discrète disqualification du lien
au psychologue (disqualification que les positions parentales confirmeront
dans le temps terminal du bilan). La problématique œdipienne reste très en
retrait des investissements relationnels de Rodolphe et de ses constructions
imagoïques ; on peut penser que l’inquiétude massive suscitée par la
rencontre avec les changements corporels de l’adolescence vienne entraver
pour lui la possibilité de se construire dans le regard de l’autre.
Il apparaît que le mode de relation d’objet prévalent dans lequel se trouve
engagé Rodolphe est le mode de l’emprise (dont on peut trouver les marques
tant dans les symptômes somatiques que dans l’engagement de l’imaginaire
en place de lien), qui n’est pas sans évoquer le renoncement impossible à
une relation de type fusionnel.
(suite)
9 Une horreur...non ! Un Horreur... reproduction
hurleur de Tzeensch. asexuée par la bouche,
VI 0:01:15 G F- (H)
Hurleur créé par le Dieu
(Dieu du changement)
(suite)
VI Même raison.
Psychogramme résumé
Temps total : Temps/ réponse : Temps latence moyen :
R = 17
10. 25’ 0. 37’ 0. 06’
G : 11
Gbl : 6 F : 11 F% : 65 H:2
F+ : 3 F+% : 27
H% : 12
F- : 8 (H) : 8
(Hd) : 1
G% : 65
Bl % = Gbl% : 35 K:2
kan : 1 A:4
FC : 3 A% : 24
Σ C : 1,5 Obj : 1
Symb : 1
T.R.I : 2/1,5
RC% : 29
Ban : 0
Ang% : 0
Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 353
1 0:01:00 L.0.30’ Un enfant à qui on a forcé à faire du violon... parce qu’il dit
« pourquoi on m’a forcé à faire ça ? » ... et puis voilà... ça l’embête
quoi !
2 0:01:30 L. 0.30’ Ce que ça pourrait raconter là-dedans... déjà c’est pas très logique
parce que ça a l’air d’être le travail des champs et il y a une fille qui a
des livres... quelqu’un qui laboure les champs, qui punit un cheval et il y
a une fille qui l’approuve et l’autre qui détourne le regard... c’est bon.
3 0:01:00 L. 0.25’ Ben quelqu’un à qui il vient d’arriver quelque chose d’horrible...
qui vient de se rendre compte de quelque chose... c’est tout.
4 0:01:10 L. 0.30’ Boo... je sais pas... ça doit être un couple qui a pas le droit de
sortir ensemble et ils le font quand même... ils sont inquiets... ils font
quelque chose d’interdit...
5 0:00:40 Ben ça c’est quelqu’un qui vient de découvrir un meurtre dans une
chambre... avec une tête horrifiée (dit avec le ton de l’évidence).
6BM 0:00:45 Ben une mère et un fils qui attendent le père qui a eu un accident de
voiture et ils le savent pas, ils commencent à s’inquiéter.
7BM 0:00:35 Je sais pas... ça veut pas dire grand chose toutes ces images... ben un
complot... voilà...
8BM 0:00:55 (fait une moue du visage) Un enfant qui tourne... qui détourne les
yeux des médecins qui sont en train de soigner son père... des médecins
d’époque, qui font des saignées et tout...
sait pas ce qui est arrivé à son propriétaire... il vaut mieux sûrement ne
pas le savoir...
13B 0:00:45 L. 0.15’ Un enfant qui en a marre qui est en train de réfléchir.
qui intervient dans le fil d’une décision éducative paternelle vécue comme
vexatoire, voire blessante, pour Judith. On peut inscrire cette décision dans
le contexte de la réactivation des enjeux œdipiens dans le lien père-fille à
l’adolescence.
Il ressort par ailleurs que la consultation du médecin-psychiatre intervenue
à la suite de la tentative de suicide de Judith quelques mois auparavant
s’inscrit dans une longue histoire de consultations, depuis le temps de la
petite enfance de Judith. En effet, les parents de Judith situent la première
consultation dans un service de pédopsychiatrie pour sa fille à l’âge de deux
ans, qui correspond au temps de la naissance de son frère puîné.
➤ Clinique de la passation
Judith restera relativement réservée au cours de l’entretien et de la passation
des épreuves projectives, alors même qu’il semble qu’elle ait pu manifester
auprès du médecin-psychiatre un intérêt à l’idée de s’engager dans un
dispositif en mesure de soutenir une compréhension de son malaise persistant.
L’empathie à l’égard de la jeune fille s’avère difficile à mobiliser pour le
psychologue, un rapproché dans le lien trouvant néanmoins à se signifier au
décours de l’examen psychologique.
Judith se présente dans une posture que l’on peut comprendre comme
étant celle de l’observation, tout en ne pouvant être considérée comme en
retrait dans la relation clinique. Judith semble être sensible à éprouver la
qualité du lien à ceux qu’elle rencontre, ainsi que la fiabilité de ce lien.
À cet égard, Judith manifeste la fragilité des investissements relationnels,
qui semblent toujours être pris dans le risque, celui d’un rejet, celui d’une
indifférence... ou celui d’une rétorsion.
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
1. Seule l’épreuve de Rorschach fera l’objet d’une présentation et d’une discussion clinique.
356 Illustrations cliniques
(suite)
sa veste (D9)
ses bracelets (D1)
son soutien-gorge ( D6),
À une femme un peu
X 0:00:30 10 masque sur la tête (D8), Gbl F+ H
excentrique
collier (D3)
pantalon (D 10) et motifs
sur son pantalon (D2).
Parce que j’aimerais bien savoir voler et puis... et puis attra... attraper
Pl + I
quelque chose mais...
Parce que je sais pas j’aimerais bien être un peu excentrique de temps en
X
temps, pas toujours parce que je suis un peu timide.
Parce que ça représente un peu la guerre et j’aime pas... j’aime pas l’idée
Pl - II
que des innocents meurent pour leur pays.
Pareil les monstres dans les films ils tuent des innocents, ils font peur à
IV
des innocents...
Psychogramme résumé
Temps total : Temps/ réponse : Temps latence moyen :
R = 10
8. 10’ 0. 49’ 0. 23’
G:9
Gbl : 1 F:7 F% : 70 H:4
F+ : 5 F+% : 79 H% : 40
F± : 1 (H) : 2
F- : 1
K:1 A:1
G% : 90 A% : 10
Bl% = Gbl% : 10 FC : 1 Adev : 1
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
C’F : 1
Σ C : 0,5 Frag : 1
Pays : 2
T.R.I : 1/0,5
RC% : 30
Ban : 2
Ang% : 0
Bibliographie
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374 Le Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent
PRÉSENTATION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . V
AVANT-PROPOS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . VII
Rorschach et médiation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . IX
Propositions de méthode . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
La passation de l’épreuve de Rorschach en clinique de l’enfant et de l’adolescent 38
La cotation, clinique de la production projective . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
Le modèle de l’évaluation du fonctionnement psychique en clinique de l’enfant
et de l’adolescent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
BIBLIOGRAPHIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 367