7 Troubles Du Neurodeveloppement Deficience Intellectuelle
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Hélène Geurts, Romina Rinaldi,
Alexandra Franquet et Marie-Claire Haelewyck
Résumé
Le soutien à l’autodétermination des personnes présentant une déficience
intellectuelle constitue un enjeu majeur au cœur des pratiques d’accompagne-
ment. Toutefois, si tous s’accordent sur l’importance de promouvoir ce droit
en contexte inclusif, des interrogations demeurent quant aux moyens à utiliser
pour contribuer effectivement à l’épanouissement personnel. À la lumière
du modèle fonctionnel de l’autodétermination, notre article vise à dresser le
portrait de défis posés par le changement de paradigme en vigueur et par la
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est intéressant de revenir sur les termes employés pour parler de la
déficience intellectuelle et de réfléchir sur leurs implications dans les
pratiques quotidiennes.
Aussi, si nous reprenons quelques exemples replacés sur une ligne du
temps, nous retrouvons initialement le terme d’« oligophrénie » qui a
laissé progressivement place à celui d’idiotie (Inserm, 2016). « Idiot »,
voilà un terme qui, désormais, se voit utilisé à tout autre escient. Citons
néanmoins les propos initiaux d’Esquirol, célèbre psychiatre français,
qui sépare la notion d’idiotie de celle de démence et émet l’explication
suivante : « L’homme en démence est privé des biens dont il jouissait
autrefois. C’est un riche devenu pauvre. L’idiot a toujours été dans
l’infortune et la misère. L’état de l’homme en démence peut varier ;
celui de l’idiot est toujours le même. Celui-ci a beaucoup des traits de
l’enfance. Celui-là conserve beaucoup de la physionomie de l’homme
fait » (Esquirol, 1838, p. 285). Ces quelques phrases sont particulière-
ment révélatrices de la vision portée sur la différence au cours de cette
époque. Ici, le regard est exclusivement porté sur le défaut incurable
d’intelligence (Salbreux et Misès, 2005). Aussi, au-delà du fait que ces
termes soient lourds de sens, notons l’attention exclusivement accordée
à la conservation quasi irréfutable d’un statut juvénile tout au long
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quotient intellectuel inférieur à la norme. De fait, il importe désormais
également d’intégrer les conséquences au quotidien de la situation
vécue (Inserm, 2016). Évidemment, l’évolution de terminologie s’avère
constante. Aussi, la cim-11, qui entrera en vigueur en janvier 2022,
introduirait le vocable « troubles du développement intellectuel » (Reed
et coll., 2013) démontrant une évolution toujours en cours.
Mais qu’entend-on désormais par déficience intellectuelle ? Tel que
précédemment introduit, nous passons d’une vision centrée sur la
pathologie à une conception axée sur la compréhension du fonc-
tionnement humain, en soulignant les interactions constantes des
caractéristiques personnelles avec les facteurs environnementaux. De
manière plus opérationnelle, selon le dsm-5 notamment, le diagnostic
repose sur trois critères : un déficit des fonctions intellectuelles ; un
déficit du fonctionnement adaptatif ; l’apparition de ces difficultés
au cours du développement jusqu’à l’âge adulte. Toutefois, selon le
modèle de l’aaidd (2002 ; cité par Inserm, 2016), l’intelligence et le
comportement adaptatif n’offrent qu’une compréhension très limitée
du fonctionnement global (figure 1). À ce titre, le cadre conceptuel du
fonctionnement humain comporte cinq dimensions que sont les capa-
cités intellectuelles, le comportement adaptatif, la santé, la participation
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Figure 1. Modèle du fonctionnement humain de l’aaidd
(d’après le comité ad hoc de l’aaidd sur la terminologie
et la classification, 2014, p. 14 ; cité par Inserm, 2016, p. 126)
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est bon pour l’autre au profit d’une posture de compagnon qui accepte
de coconstruire avec l’autre. En outre, nous tenons à préciser que la
personne n’est pas au cœur de l’accompagnement, tel un objet de soins
à scruter sous tous ses détails. A contrario, nous laissons cette posi-
tion au projet qui est discuté en partenariat – et non plus en « pater-
nariat » (Panet-Raymond et Bourque, 1991 ; cité par Ninacs, 2008) – de
sorte à promouvoir la qualité de vie au sein des pratiques respectives et
intégrées. Toutefois, cette évolution peut s’avérer anxiogène dans une
société « hypersécuritariste » où il importe de minimiser les risques
et les dangers. De fait, dans ce contexte teinté de craintes, il devient
particulièrement complexe de promouvoir le droit à l’autonomie car
il est fréquemment associé à une prise de risques.
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Dans la poursuite du précédent raisonnement, il apparaît qu’au fil des
décennies, nous avons expérimenté un modèle médical du handicap
comme modèle de référence, suivi d’un modèle social pour aboutir
à la promotion des droits (Boucher et coll., 2015 ; Tremblay, 2011).
À leur tour, Fontana-Lana, Brüger et Hauenstein (2017) identifient
trois paradigmes historiques en vigueur.
Le premier, l’exclusion, est caractérisé par une marginalisation du
handicap. L’histoire démontre de tristes exemples d’une volonté d’éra-
diquer la différence. Le deuxième, la prise en charge, prône sous des
élans de charité notamment, l’offre de services dans une perspective
de normalisation, de valorisation des rôles sociaux. Dans ce contexte,
en 1948, la Déclaration universelle des droits de l’homme (art. 25)
considère la personne présentant une invalidité comme un être dont
il importe d’assurer la sécurité. En outre, selon Winance, suite à l’avè-
nement de l’État-Providence et conformément à la priorité accordée
à s’intégrer dans le marché de l’emploi, tout dysfonctionnement doit
être pallié. À ce titre, ce n’est pas la norme sociale qui est interrogée. A
contrario, l’individu doit s’adapter pour participer à la vie en société.
« La personne handicapée retrouve sa place dans la société lorsqu’elle est
devenue “même” » (Winance, 2004, p. 206). Le troisième paradigme,
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et l’acceptation des personnes handicapées comme faisant partie de la
diversité humaine, l’accessibilité, le respect de la dignité intrinsèque,
de l’autonomie individuelle, y compris la liberté de faire ses propres
choix, et de l’indépendance des personnes (art. 3). Le soutien et la
promotion de l’autodétermination à des fins inclusives apparaissent
comme des défis.
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par Inserm, 2016).
Toutefois, si la majorité s’accorde sur le bien-fondé de pouvoir « faire
seul » et « décider seul », de nombreux professionnels affirment leurs
difficultés à opérationnaliser la notion d’autodétermination, et ce d’au-
tant plus auprès d’une population qui a longtemps été marginalisée,
faiblement sollicitée et très peu outillée pour donner son avis (Belle-
feuille et Labbé, 2016 ; Lee, Wehmeyer et Shogren, 2015). De fait, si
nous nous accordons tous sur l’importance de renforcer le partenariat,
de céder la parole aux personnes en situation de handicap, comment
procédons-nous concrètement ? Quelles pratiques pouvons-nous mettre
en place au quotidien pour assurer un soutien de qualité ? Comment
développer des occasions de participation dans des milieux où existent
de nombreuses règles pour encadrer la vie sociale ? Comment donnons-
nous un espace pour s’exprimer librement si le public que nous accom-
pagnons n’est pas perçu comme en mesure de le faire ?
Voilà autant d’exemples de questions auxquelles nous sommes fréquem-
ment confrontés. Il serait illusoire et mensonger de répondre par
une solution miracle, applicable à chacun à l’image d’une prescrip-
tion médicale. Une telle démarche irait à l’encontre même de notre
partie introductive qui met en évidence l’importance d’individualiser
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libre arbitre. Si l’usage géopolitique du terme, en référence au principe
d’autogouvernance, a été initialement plus fréquemment mis en valeur,
aujourd’hui, la perspective individuelle est de plus en plus sur le devant
de la scène (Shogren et coll., 2015 ; Wehmeyer, 1998).
Selon Paul Ricœur (cité par Zielinski, 2009), une personne autodéter-
minée est donc sujet de ses paroles, de ses choix, de ses actes. Elle est
« capable », à même de dire « je peux ». Descartes affirme le cogito :
je pense, donc je suis. L’autodétermination témoigne d’un : je peux,
donc je suis. À ce titre, le slogan en vigueur dès les années 1990 aux
États-Unis stipule « nothing about us, without us » pour scander l’idée
selon laquelle aucune politique ne peut être décidée sans prendre en
considération l’avis des personnes concernées par les mesures prises
(Charlton, 1998). Promouvoir l’autodétermination des personnes en
situation de handicap renvoie donc au fait d’accepter la différence et
de s’engager en faveur de l’égalité des chances.
Au début du xxe siècle, la psychologie émerge en qualité de disci-
pline distincte de la philosophie et la notion d’autodétermination
y est cooptée (Shogren et coll., 2015). Plus récemment, l’American
Psychological Association Dictionary of Psychology (VandenBos, 2007,
p. 829) présente l’autodétermination sous un versant plus individuel.
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mes compétences. Ces propos corroborent la volonté de s’éloigner des
principes du déterminisme (Wehmeyer, 1992 ; 1996). Pour opération-
naliser ce premier modèle de l’autodétermination, Wehmeyer (1992)
identifie trois composantes constitutives : l’autonomie (agir selon ses
priorités et principes), l’auto-actualisation (le développement de ses
talents et potentialités), l’autorégulation (médiation cognitive ou auto-
contrôlée de son comportement). Toutefois, cette première définition
de l’autodétermination fait l’objet de critiques. Dois-je vraiment être
seul aux commandes ? Est-ce que je dois décider de tout et uniquement
tout(e) seul(e) ? Puis-je demander des conseils, du soutien face à une
situation perçue comme complexe, déroutante, nouvelle ? Ces interro-
gations mettent en garde face à une potentielle dérive de l’agentivité. En
effet, il ne s’agit pas d’attendre que la personne énonce ce qu’elle veut
faire ainsi que la méthodologie à employer pour parvenir à ses fins, en
toute indépendance. Pour étayer cette position, Le Bossé (2016), en
référence à une « hypothèse de carence » et donc à un manquement
par rapport à une norme, affirme que cette forme d’activation renforce
l’idée selon laquelle les problématiques rencontrées sont davantage le
fruit d’une incapacité à mobiliser les ressources nécessaires. Il rappelle
ensuite l’importance de promouvoir une position de médiateur, de
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démarches entreprises ont du sens pour la personne et ne relèvent
pas de l’intrusion ou de l’ingérence. Ce qui importe, c’est ma qualité
de vie et les moyens développés pour contribuer à mon épanouisse-
ment. Wehmeyer, Kelchner et Richards (1996) complètent ensuite
le modèle (figure 2) qui comprend désormais quatre composantes
fondamentales. Il est décrit comme fonctionnel, car l’autodétermina-
tion serait mieux définie lorsqu’elle est mise en lien avec le compor-
tement, considérée comme le résultat d’un apprentissage (Sands et
Wehmeyer, 1996). En outre, le modèle tient davantage compte de
la fonction que sert le comportement autodéterminé, et moins de la
motivation qui le sous-tend. La particularité de ce modèle est qu’il a
été scientifiquement validé auprès d’une population de 407 adultes
avec une déficience intellectuelle. Pendant plusieurs années, il a offert
une assise précieuse en vue de développer des interventions et des
activités d’apprentissage pour promouvoir le pouvoir au quotidien
(Shogren et coll., 2015, 2017a, 2017b ; Wehmeyer et Abery, 2013 ;
Wehmeyeret coll., 2003).
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Figure 2. Modèle fonctionnel de l’autodétermination
(d’après Wehmeyer, 1999)
Néanmoins, selon Shogren et coll. (2015, 2017a, 2017b), le dévelop-
pement récent et massif de la psychologie positive ainsi que l’attention
portée à la relation unissant la personne et son environnement nous
invitent à repenser la théorisation. Pour ce faire, les auteurs proposent
une extension de la théorie fonctionnelle, à savoir la Causal Agency
Theory où l’autodétermination est définie comme « une caractéristique
dispositionnelle qui se manifeste en agissant comme l’agent causal de sa
propre vie. Les personnes autodéterminées (agents causaux) agissent au
service d’objectifs librement choisis. La fonction d’autodétermination
des actions permet d’être l’agent causal de sa propre vie » (Shogren
et coll., 2015, p. 258). En d’autres termes, en qualité de caractéris-
tique dispositionnelle, l’autodétermination peut être mesurée, mais
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d’agir conformément à ses préférences et à ses intérêts. La personne est
à l’intention des décisions prises et des actions menées, sans influence
externe jugée indue. Pour ce faire, il importe de créer un climat favo-
rable à l’expression des envies et des attentes. Si je ne me sens pas libre
de m’exprimer, comment témoigner d’autonomie ? Par ailleurs, il peut
s’avérer d’autant plus complexe d’énoncer des objectifs, des volontés
quand, auparavant, cette sollicitation s’est montrée peu présente. Et si je
me trompe ? Et si on me répond que ce que je souhaite est irréalisable ?
Pour apporter quelques pistes de réflexion par rapport à ces interro-
gations, prenons le cadre de l’élaboration du projet individualisé. En
effet, le soutien à sa rédaction à l’aide de guides méthodologiques pensés
avec et pour des personnes présentant une déficience intellectuelle est
au cœur de notre travail quotidien de chercheurs. Nous associerons
les explications théoriques à des illustrations pratiques directement
inspirées de ce type d’ouvrage.
Les expériences scientifiques ont démontré l’importance d’instaurer un
climat de confiance, sécurisant pour offrir une place aux partages sur les
projets que la personne souhaite poursuivre. Pour ce faire, il est possible
d’énoncer le caractère confidentiel des échanges destinés à identifier des
volontés, des émotions rencontrées au sein du processus. Toutefois, le
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cadre doit être clair sur les objectifs associés à ces rencontres, la portée des
résultats issus des discussions et leur diffusion. Soulignons ensuite l’im-
portance d’établir des rendez-vous réguliers et un temps limité consacré
à ces réunions. En procédant de la sorte, il apparaît plus simple de se
rappeler les précédentes rencontres et de limiter le temps de concentration
susceptible d’instaurer une trop grande fatigue (Fontana-Lana et coll.,
2017). Finalement, il est possible qu’un espace de paroles libres laisse
place à des vœux initialement perçus comme inconcevables. Aussi, plutôt
que de balayer des ambitions d’un revers de main, sans même prendre
en considération les affects, tentons de mieux les comprendre, à l’aide de
supports adaptés. Que se cache-t-il véritablement derrière l’objectif qui
est confié ? Quelle représentation en a la personne elle-même ? Quelle
distance sépare la situation actuelle du but final énoncé ? Quels sont les
micro-défis permettant de rejoindre, progressivement, la finalité ?
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– Autorégulation : elle se réfère à un ensemble de stratégies et tactiques
agentiques (Shogren et coll., 2015, 2017a, 2017b), à un plan d’ac-
tion élaboré afin de parvenir à une solution aussi satisfaisante que
possible (VandeVonder et Haelewyck, 2009). Face à un objectif défini,
la personne examine donc la tâche, les ressources internes et externes
disponibles. Elle envisage ensuite les différentes options susceptibles
de l’amener vers la réussite. Elle organise les séquences d’actions ou de
décisions et les révise le cas échéant (Wehmeyer, 1996).
En référence aux travaux d’Agran (1997 cité par Inserm, 2016), les
comportements autorégulés renvoient à quatre types de stratégies
interdépendantes.
– Premièrement, les stratégies de résolution de problèmes et de prises
de décisions permettent d’identifier la problématique et les moyens
à utiliser pour parvenir à ses fins. J’ai envie d’inviter un ami à passer
l’après-midi chez moi. De quoi ai-je besoin pour atteindre cet objectif ?
– Deuxièmement, les stratégies d’établissement et de planification des
objectifs consistent en la visualisation de l’ensemble des étapes à mener
à bien. Pour l’inviter, quelles sont les étapes à franchir ? Par exemple, je
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À nouveau, il apparaît intéressant de s’interroger sur ces expériences
inattendues. Quelles sont les conséquences actuelles ? Pourquoi est-ce
que je ne suis pas arrivé(e) à la finalité que je désirais ? Qu’est-ce que
je pourrais faire la prochaine fois pour éviter que cette difficulté ne se
reproduise ? Il est vivement conseillé à chacun d’offrir des moyens ad
hoc pour soutenir la réflexion, le plan d’actions sans influence externe
indue. Les expériences ont démontré l’intérêt d’offrir des supports
créatifs et personnalisés pour contribuer à visualiser les différentes
alternatives possibles ainsi que leurs résultats probables. Il est en effet
de notre ressort de mettre en garde face à certains écueils, aux consé-
quences susceptibles de se produire si un devoir n’est pas respecté.
Toutefois, le fait d’éviter le risque peut-il systématiquement, en toute
circonstance, l’emporter sur l’occasion de faire sa propre expérience ?
Adopter une posture de facilitateur, de médiateur tend à relever d’un
exercice d’équilibre parfois périlleux.
– Empowerment psychologique : selon Wehmeyer (1996), une personne
qui témoigne d’empowerment psychologique est convaincue qu’elle
exerce un contrôle sur les éléments qui sont importants pour elle (locus
of control). Elle pense aussi disposer des compétences nécessaires pour
pouvoir atteindre ses objectifs (auto-efficacité) et être en mesure de les
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suggère que « les expériences qui offrent des opportunités de développer
son contrôle perçu aideront les personnes à affronter le stress et à résoudre
des problèmes dans leur vie » (1990, p. 72-73).
– Autoréalisation : la personne développe une connaissance d’elle-
même, de ses difficultés, mais aussi de ses ressources (Wehmeyer, 1996).
Elle est capable de dresser son portrait de sorte, en étroite relation avec
les autres composantes de l’autodétermination, à exprimer ses préfé-
rences, à identifier les forces mobilisables et à croire en ses possibilités.
Cette promotion de l’autoréalisation nous rappelle, à nouveau, à quel
point il importe de s’éloigner d’une vision de la personne en situation
de handicap centrée uniquement sur ses écarts par rapport à la norme,
sur ses manquements, et ce y compris dans les écrits professionnels. Si
nous annoncions le changement de paradigme en vigueur, force est de
constater que les rapports d’évaluation publiés affirment que des efforts
doivent encore être entrepris pour répondre aux prescrits fixés par la
Convention relative aux droits des personnes handicapées (cdph).
Outre ces quatre composantes intrinsèquement associées (Inserm,
2016), dans la poursuite du raisonnement, le modèle de Wehmeyer
intègre une approche écologique, étroitement liée à l’environnement
quotidien. En effet, selon le modèle fonctionnel, trois facteurs sont
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l’autodétermination (Sands et Wehmeyer, 1996 ; Wehmeyer et coll.,
1996). Au-delà d’instaurer des environnements favorables, les études
encouragent le développement de stratégies d’apprentissage efficaces
pour être agent causal de sa vie (Shogren et coll., 2017b). Et nous, au
quotidien, que pouvons-nous mettre en place pour promouvoir l’au-
todétermination ? Comment nous assurons-nous de l’accessibilité de
nos démarches ? Comment prenons-nous en considération le compor-
tement non verbal pour appréhender un ressenti, voire un désaccord ?
Quelle place laisse-t-on à la personne en situation de handicap dans
les réflexions qui la concernent ? Et à ses proches ? Qui rédige le projet
de vie et selon quelles modalités ? En accordant une attention impor-
tante aux capacités à effectuer des activités de la vie quotidienne, nous
augmentons notre tendance à offrir des occasions contribuant effective-
ment au développement des compétences. Évidemment, il ne s’agit pas
de révolutionner les pratiques du tout au tout, du jour au lendemain.
L’autodétermination relève d’un processus qui se travaille, s’enrichit
avec le temps et en étroite collaboration avec la personne. Toutefois,
à la vue des défis qui traversent actuellement l’accompagnement, à
l’instar de McCallion et de Ferreti (2017), nous rappelons l’urgence
de sensibiliser l’environnement à cette complexité.
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