25 Petites Pieces
25 Petites Pieces
25 Petites Pieces
25
PETITES PIÈCES
D’AUTEURS
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La représentation des pièces de théâtre est soumise à l’autorisation de l’auteur, de ses ayants droit
ou de ses ayants cause. Avant le début des répétitions, une demande d’autorisation devra être
déposée auprès de l’auteur, de son agent ou de la SACD.
Couverture : Concordance(s)
Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute
représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’au-
teur ou de ses ayants droit, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du
Code de la propriété intellectuelle.
Les pièces sont présentées selon l’annéee d’entrée de leur auteur au catalogue
de Théâtrales.
1
Karl Valentin
allemagne
LA SITUATION ACTUELLE
(Die jetzige Lage)
Traduit de l’allemand par Jean-Louis Besson et Jean Jourdheuil
PERSONNAGES
karlstadt
valentin
Nous avons respecté les tirets notés par Valentin à l’intérieur ou à la fin d’une
réplique. Ils indiquent un arrêt, une respiration dans la phrase et ne doivent pas
être confondus avec des points de suspension. (NdT)
La Situation actuelle a été diffusée en septembre 2007 sur France Culture, réalisation :
Jean Couturier, avec : Jean-Luc Debattice et Claude Giraud.
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11
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2
Yves Reynaud
france
LOUIS
PERSONNAGES
monsieur leloup
madame delafauré
michel, son petit-fils
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17
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3
Denise Bonal
france
PERSONNAGES
mère
père
eulalie
foule, hommes, femmes, enfant
Les Silences d’Eulalie a été diffusée en septembre 2007 sur France Culture, réalisation :
Jean Couturier, avec : Arnaud Bédouet, Émilie Blon-Metzinger, Philippe Bouvard,
Charlotte Corman, Leïla Ferault, Judith Morand, Marie-Céline Tuvache, Gaël Zaks.
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C’est le soir. Le père, la mère et leur fille Eulalie, assise entre eux deux, sur un
siège un peu plus haut, dînent en silence. Puis :
mère.– La semaine s’est bien passée ?
père.– Très bien. J’ai sans doute été éloquent : j’ai vendu toutes mes
parures de luxe.
mère.– C’est l’époque des mariages.
père.– Et la pièce unique que tu aimais tant a été enlevée sans mar-
chandages, par des étrangers.
mère.– De quelle origine ?
père.– D’un peu partout. Et ici ?
mère.– Comme pareil… comme presque pareil.
père.– Et ma belle Eulalie ? Est-elle toujours grande navigatrice en ver-
sions latines ? Et toujours amoureuse de J.-J. Rousseau ? (elle le regarde,
souriante. Puis elle se remet à manger) C’est la trigonométrie qui pèche
encore ? Veux-tu qu’on fasse appel à ton parrain si fort en maths ?
(silence) Tu es fâchée, Eulalie ? (la mère et Eulalie continuent à manger en
silence) Qu’est-ce qui se passe ? Pourquoi Eulalie ne parle pas ?
mère.– Ce n’est pas qu’elle ne parle pas, c’est qu’elle ne parle plus.
père.– Elle est aphone ?
mère.– Non, muette.
père.– C’est-à-dire ?
mère.– (regard vers Eulalie) Comme tu vois.
père.– Puisque toi tu parles, tu peux m’expliquer ?
mère.– Elle ne veut plus parler.
père.– Plus jamais ?
La mère a un geste d’ignorance.
29
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4
Yves Lebeau
france
J’AI FAIM
PERSONNAGES
LIEU
Paris. La nuit.
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La nuit. La rue. 1.
La nuit. La rue. 2.
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5
Daniel Besnehard
france
À Andrée et Françoise
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PERSONNAGES
l’auteur récalcitrant
le vieux brouillon de l’auteur récalcitrant
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l’auteur récalcitrant.–
Tu dois écrire, il a rappelé deux fois
Le livre anniversaire !
Je n’en ai rien à foutre !
Oui, toi, tu lui as promis
Un texte inédit pour célébrer la collection
Encore un piège
Écrire pourquoi ?
Pour signifier par sa propre vitalité inspirée, la solidité, la justesse,
la vitalité de cette édition
Il a accueilli une douzaine de pièces,
C’est un éditeur, mon éditeur !
Fidèle, il t’a soutenu au fil des vingt années
Proclamer que « ça respire encore » et l’écrire
Mentir
Une courte fiction pour participer à la fête éditoriale
Une pièce courte, une pièce inutile
Il faut écrire !
Quoi ?
N’importe quoi !
le vieux brouillon.–
Cela se joue entre souvenir et rêve, angoisse et sommeil, coma et vie. Ici, les
sons, les souvenirs se bousculent.
Durant quelques secondes, une furtive lueur sur un lit d’hôpital. Marie, une
femme de cinquante ans, s’assied au chevet de sa mère Louise.
m
Marie, c’est moi
l
Quatre minutes, c’est trop dur, mon coco
l’auteur récalcitrant.–
Elles sont parties
De pièces éditées dans la collection que je dois honorer,
63
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6
Philippe Minyana
france
DISPARITIONS
solveig
jimmy colon
carlito
madame anselme
valérie
esther
vieillard
vieille femme
vieil homme
rosita
madame wang
alfredo
l’ami d’alfredo
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Chez Solveig
Dans la pièce principale, un vieillard assis tousse parfois, hoche la tête de temps
en temps. Jimmy Colon, mari de Solveig, également assis, dort. Carlito
contemple madame Anselme, sa maîtresse. Madame Anselme a une petite
quinte de toux.
carlito.– (il désigne Jimmy) Il dort
Plus ou moins off, dans la pièce attenante, Solveig et son amie Valérie, pâle
jeune homme habillé en dame.
valérie.– Ici c’est bien Solveig (c’est clair) et c’est grand (petite pause)
Moi je n’habite avec personne j’ai essayé d’habiter avec quelqu’un fina-
lement je n’habite avec personne
Solveig jette un œil sur Jimmy endormi.
solveig.– (à Valérie) C’était avec Schwartz
Dans la pièce principale, madame Anselme, seconde petite quinte de toux.
madame anselme.– (à Carlito) Arrêtez de me regarder tout le temps
Plus ou moins off, dans la pièce attenante.
valérie.– (elle crie) schwartz est un porc
Dans la pièce principale.
carlito.– (à madame Anselme) J’aime bien vous regarder tout le temps
Solveig, intrusion dans la pièce principale.
solveig.– (à Carlito) Ne posez pas le verre sur la table Carlito (tous en
apnée) Posez le verre sur le sous-verre Carlito
Plus ou moins off, dans la pièce attenante, Valérie et Solveig.
valérie.– Ce que tu es bien ici ma Solveig
solveig.– Alors comme ça tu vis seule ma Valérie
valérie.– Oui ma Solveig
solveig.– J’ai beaucoup d’affection pour Jimmy Colon
valérie.– Avec Schwartz ça s’est soldé par un échec
Solveig, seconde intrusion dans la pièce principale.
solveig.– (elle crie) allez réveille-toi jimmy colon
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7
Christian Rullier
france
SI D’AVENTURE…
PERSONNAGES
DÉCOR
1.
Fred est seul dans sa chambre, occupé à préparer sa valise, une très grande
valise noire ouverte sur son lit. Il s’approche d’un mur et hésite devant
plusieurs posters de stars du hard rock, du cinéma et de la religion : Janis Joplin,
Jim Morrison, Jimi Hendrix, James Dean et Jésus-Christ… Il se décide pour
une petite affiche de Kurt Cobain, en noir et blanc. Il la décroche et la roule
lentement en retournant vers sa valise.
Sa mère, Séréna, apparaît dans l’encadrement de la porte.
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8
Roland Fichet
france
NOIRES
PERSONNAGES
des hommes
Les hommes, aimantés par les corps de Stella et d’Irène, circulent autour
d’elles, jouent toutes les figures de l’approche.
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1.
Début de la nuit. Deux jeunes femmes noires. Deux copines. L’une, Stella, à
Brazzaville, capitale du Congo, l’autre, Irène, à Kinshasa, capitale de la Répu-
blique démocratique du Congo. Les deux capitales ne sont séparées que par le
fleuve qui porte le même nom que ces deux pays. Les deux copines se téléphonent.
Leurs photos s’affichent sur leurs téléphones portables. Elles sont l’une et
l’autre devant une porte d’hôtel ou de boîte de nuit. Dans les vitres leurs reflets.
Les accompagnent ainsi par intermittence leur ombre, leur double. Des hommes
passent, les regardent, les abordent. Toujours aux aguets, Irène entend des
bruits, des voix.
(À Brazzaville, sur le bord du fleuve Congo, des chauffeurs de taxi achètent de
l’essence de contrebande à des piroguiers. Les pirogues vont et viennent entre
Kinshasa et Brazzaville. À Kinshasa, des échauffourées, des coups de feu, des
éclats lumineux.)
irène.– Tranquille, tu parles ! Quoi t’es tranquille, t’es pas tranquille
un poil, tu bouges à mort, toujours quand je me pointe t’es pas là, tu
vas où ?
stella.– Au village.
irène.– Écoute.
stella.– Rien de drôle, un enterrement.
Un homme se campe devant Irène.
irène.– Casse-toi, je téléphone.
Tu espères quelque chose de quelqu’un là-bas ? De la viande ? Des médi-
caments ?
stella.– À l’enterrement de Rachel Bibigouolo, voilà où…
Stella observe le manège d’un homme qui la détaille des pieds à la tête.
irène.– Rachel Bibigouolo, Rachel Bibigouolo… attends que je me sou-
vienne…
C’est qui ?
stella.– La plus vieille putain du pays.
irène.– Écoute.
stella.– Elle est née dans la forêt, morte dans la rue, tuée par son fils.
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9
Michel Azama
france
IMBROGLIO
PERSONNAGES
Un atelier de peintre.
Il est là. On sonne. Il ouvre.
Elle entre.
Ils se regardent longuement. Sans bouger.
Visages indéchiffrables.
1.
elle.– Finalement
lui.– Oui
elle.– Je me doutais…
lui.– Que j’étais un jeune homme
elle.– Oui
lui.– Ponctuel
elle.– Oui
lui.– Bien sous tous rapports…
elle.– Je vous en prie ne…
lui.– Mais noir et homo
Elle hausse les épaules. Il sourit.
Temps.
2.
123
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10
Françoise Pillet
france
DE LA PIZZA SAUVAGE
Dialogue avec un singe
et 24 personnages fictifs
PERSONNAGE
alfred, le singe
juliette, lycéenne
une brebis
un troupeau de brebis
romain, lycéen
le berger
une lectrice de balzac
les enfants de l’école
mademoiselle la maîtresse
anaïs, neuf ans
marie-luce et henry, soixante-douze et soixante-seize ans
jacky, le patron du café
madame bertrant
le monsieur, un client du café
nicolas et adeline, futurs mariés
un autre client du café
et
patrick, rinette, pierrot, mireille, jacques, milou et jeannot, qui
passent…
Vêtu d’un ciré jaune, Rico relève le volet de son camion à pizzas.
Alfred, son singe, saute de branche en branche dans le grand platane de la place.
rico.– Oh, Alfred, c’est gymnastique matinale ? Tu veux faire la une
des journaux ?
« … et à force de sauter sur des branches rendues glissantes par la pluie,
Alfred, le singe du vendeur de pizzas, a atterri sur la tête d’un passant. »
Une portière claque.
– …
– Bonjour Juliette, la forme ?
– …
– Non, sans blague, il pleut ?
– …
– Oui, à la pêche aux gros. Mon ciré, c’est une fleur de pissenlit dans un
champ de souris grises. Plus gai que ton K-way camouflage.
– …
– Tu entends Alfred ? Cette demoiselle est prête à te recevoir dans ses
bras si tu glisses ! Prête à t’emporter avec elle pour te transformer en
singe savant.
– …
– Mais oui, je t’en prie, profite donc de ce toit. Un refuge pour le pro-
meneur solitaire, avec juste ce qu’il faut de chaleur grâce au four qui
rougeoie. Et si Rico se met à chanter l’Italie malgré la pluie qui s’affale
sur le monde, ta journée sera illuminée. (il chante)
Oh, padre mio,
qué bella rossa,
una vitalé,
qué caniculla…
– …
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Noëlle Renaude
france
LA BONNE DISTANCE
Cet homme est très pauvre, « je n’ai rien à bouffer », il n’a pas honte
d’être pauvre, ni qu’on ne voie tout de suite de lui que ça, qu’il est très
pauvre, cet homme, il n’a pas honte de dire « je n’ai rien à bouffer » car
sa pauvreté est si grande qu’il est incapable d’imaginer qu’il pourrait
faire autre chose que de montrer ce qu’il est, un homme très pauvre plus
pauvre que tous les pauvres, et de détacher de lui d’une manière natu-
relle ce type de phrase « je n’ai rien à bouffer », de dire « je n’ai rien à
bouffer » au milieu de ces gens qui en voient tant d’autres, mal arrangés
comme lui, fagotés de loques que seuls les très pauvres sont capables de
porter sans en rire, de confier de ce ton détaché si particulier à ceux qui
sont sûrs que ce qu’ils disent ne sera pas entendu, qu’ils soient trop en
avance sur leur temps, qu’ils parlent une langue maudite ou qu’ils
n’aient aucune conviction personnelle, personne ne les entend, « je n’ai
rien à bouffer », il sait, cet homme très pauvre que dire « je n’ai rien à
bouffer » ne changera pas sa route, ne lui donnera pas ce qui lui
manque, mais c’est symbolique et salvateur de pouvoir dire tout haut
avec un si grand calme « je n’ai rien à bouffer » à personne en particulier,
d’avoir encore le droit d’être là au milieu de ceux qui ont le droit eux
aussi de ne pas entendre, et de prononcer « je n’ai rien à bouffer », sans
la peur qu’un tel énoncé le couvre de ridicule ou déclenche l’hystérie,
s’il est là cet homme-là à avouer sans impudeur excessive son extrême
pauvreté qui lui fait déclarer au milieu de ceux qui ne l’écoutent même
plus « je n’ai rien à bouffer », c’est que des mots au moins il en a encore
pour un petit temps, si la bouffe ne se partage pas les mots eux se par-
tagent encore, c’est le seul bien qui lui reste, avec la liberté qu’il a de
trier les mots qui lui restent et d’élire ceux qu’il va dire, il a choisi de dire
cet homme-là « je n’ai rien à bouffer » et pas « j’ai plus rien à me foutre
aux pieds » par exemple, parce qu’aux pieds il n’a pas des chaussures de
pauvre, aux pieds il a du papier journal et des bouts de ficelle pour tout
faire tenir à peu près ensemble, c’est sûr qu’il a bien fait d’éliminer « j’ai
plus rien à me foutre aux pieds » vu que tout le monde le remarque,
qu’il n’a en effet plus rien à se foutre aux pieds, en dehors de ces trois-
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Sergi Belbel
espagne (catalogne)
ANNIVERSAIRE EN TOSCANE
(Aniversario en la Toscana)
Traduit de l’espagnol par Christilla Vasserot
PERSONNAGES
le mari
la femme
l’ami
l’amie
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Scène 1
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Gregory Motton
royaume-uni (angleterre)
LES PIRATES
(The Pirates)
Traduit de l’anglais par Nicole Brette
PERSONNAGES
capitaine
maître d’équipage
arnold
pirate
mrs. guston
amie
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Michel Marc Bouchard
canada (québec)
LES RÉCIFS
PERSONNAGES
le jeune homme
le vieil homme
géraldine
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Xavier Durringer
france
SOLITAIRE
À Didier B.
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1. Pêche à la mouche
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Koffi Kwahulé
côte d’ivoire et france
LES CRÉANCIERS
« En rentrant au vestiaire,
je pensais avoir gagné par K.-O.
C’est en arrivant à la conférence de presse
qu’on m’a dit :
“Mike, réveille-toi, tu as perdu.” »
Mike Tyson
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PERSONNAGES
badibadi
opolo
topitopi
Les Créanciers a été diffusée en septembre 2007 sur France Culture, réalisation : Jean
Couturier, avec : Diouc Koma, Ibrahima Koma, Juliette Roudet, Aïssatou Thiam.
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Badibadi entre, furieuse. Elle est enceinte et tient un fusil. Visiblement elle
poursuit quelqu’un qu’on imagine en train de se frayer un passage dans le
public. Badibadi tire un coup de feu dans le public.
badibadi.– … et puis quoi encore ! Coucher ! coucher ! coucher ! Vous
n’avez tous que ce mot-là à la bouche ! Dans mon état ? Ma parole, c’est
qu’il insiste ! Tu veux mon coup de fusil au cul ? Alors cesse de faire
baisser les yeux à mes oreilles avec ces mots qui… T’es sourd ou quoi ?
(nouveau coup de feu) Ce coup-ci t’as eu de la veine! Parce que la prochaine
fois, le gros sel, c’est entre les jambes que tu le prendras ! Ça arrachera ce
que ça arrachera, mais sûr que ça arrachera quelque chose. Au moins ça
te calmera les petits nerfs ! Espèce de créancier ! Créancier ! Si t’as des
comptes à régler avec Topitopi, tu viens quand Topitopi est là et tu règles
tes comptes avec Topitopi. Tu profites pas de quand je suis seule pour
venir me faire tes propositions de dessous la ceinture, et glisser tes mains
jusque-là où je n’ose y songer sans rougir. Sous prétexte que ! Attends un
peu qu’il revienne tantôt avec Opolo de leur combat de boxe et que je lui
raconte comment tes doigts ont essayé de conter plus que fleurette entre
mes cuisses ! Tu perds rien pour attendre. C’est à coups de poing qu’il te
découpera en petits morceaux quand je vais lui raconter ça ! À coups de
poing ! Je t’ai dit de foutre le camp de ma vue ! Ce coup-ci tu l’auras
voulu ! (nouveau coup de feu) Non mais, c’est quand même quelque chose !
Entre Opolo. Il fait penser à un entraîneur de boxe qui sort d’un combat. Il
fume un énorme cigare et tient à la main une bouteille de champagne.
opolo.– C’est quoi ce coup de feu, Badibadi ?
badibadi.– Le créancier !…
opolo.– Oh, encore celui-là ?
badibadi.– Ce coup-ci tu sais ce qu’il a osé me proposer ? Rien que d’y
penser… Dans mon état en plus ! Oh, il y a des gens avec n’importe quoi
dans la tête. « Écoutez, madame Topitopi, qu’il me dit, votre mari jamais
il arrivera à quelque chose. C’est un fainéant. Il est pas bien brave, votre
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Jean-Pierre Cannet
france
RAPT
PERSONNAGES
Par ordre d’entrée en scène
1.
tanguy, léon (père de Tanguy),
cagoule (yeux de loup, kalachnikov au poing),
le ministre, le chauffeur de taxi, jeanne, voix
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18
Daniel Keene
australie
QUELQUE PART
AU MILIEU DE LA NUIT
(Somewhere in the Middle of the Night)
Traduit de l’anglais (Australie) par Séverine Magois
PERSONNAGES
sylvie, la trentaine
agnès, la mère de Sylvie, la soixantaine
Quelque part au milieu de la nuit a été diffusée en septembre 2007 sur France
Culture, réalisation : Jean Couturier, avec : Francine Bergé, Benoît Marchand, Alice-
Yann Schmitz.
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1.
Soir.
Une pièce vide dans un petit pavillon de banlieue.
Agnès se tient immobile au centre de la pièce.
Sylvie apparaît dans l’embrasure de la porte, un manteau et une écharpe pliés
sur son bras.
Elle observe sa mère, qui n’a pas conscience de sa présence.
Après une pause, doucement :
– Il est temps d’y aller.
Pause.
Maman ?
– Oui. Je sais.
– Notre train part dans une heure. Si on le rate, on n’aura pas notre
correspondance.
– Il fait très froid dehors ?
– J’ai ton manteau.
Pause.
– Les meubles, où est-ce qu’ils… qu’est-ce que tu en as fait ?
– Tu as vu le camion cet après-midi.
– Et il y avait deux hommes…
– Envoyés par l’œuvre de bienfaisance. Celle que tu m’as demandé
d’appeler.
Pause.
Maman ?
– Il fait presque nuit.
– Le bus va nous emmener à la gare. Ta valise est à côté dans le couloir.
J’ai ton manteau.
– C’est mon beau manteau ?
– Oui, ton plus beau manteau.
– Je me souviens d’avoir acheté ce manteau. Je n’avais pas vraiment de
quoi. La dame du magasin savait que je n’avais pas vraiment de quoi.
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19
Aziz Chouaki
algérie et france
LE TAMPON VERT
PERSONNAGES
zora, la vingtaine
anissa, la quarantaine
farida, la cinquantaine
Le Tampon vert est née d’une commande d’écriture de Culture commune, scène natio-
nale du bassin minier du Pas-de-Calais, à Loos-en-Gohelle, en 2001, et a été diffusée en
septembre 2007 sur France Culture, réalisation : Jean Couturier, avec : Fatima Aïbout,
Florence Le Corre, Régine Mondion, Zahia Saïd.
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Scène 1
Salon marocain, poufs, oreillers, petite table, grande bouteille de Pepsi. Côté
cour, un paravent. Entrent Zora et sa grande sœur Anissa, elles sont en noir.
Anissa passe derrière le paravent. Elle se déshabille et met une djellaba. Zora
fait valser ses souliers et passe derrière le paravent, elle en ressort avec juste un
large T-shirt américain, les jambes nues.
anissa.– Tu vas pas rester comme ça, Zora ? Je veux dire les jambes à
l’air ? N’importe qui peut débarquer chez nous, aujourd’hui, tu le sais
bien.
Comme si elle n’avait pas entendu, Zora se rue vers le frigo.
zora.– J’avais laissé un yaourt, là, ce matin. C’est toi qui l’as pris ?
anissa.– Un yaourt ? Mais j’en sais rien, moi. Peut-être, je sais pas…
zora.– Non, mais dis-moi vrai, je veux savoir.
anissa.– Attends, d’abord j’ai pas la tête à ça, s’il te plaît. Avec tout ce
qu’on s’est…
zora.– Ce yaourt, c’est toi ?
anissa.– Fous-moi la paix, Zora. Pourquoi ce yaourt, qu’est-ce qu’il a
de spécial, c’est grave ?
zora.– Très grave, Anissa. Je veux que tu me dises. Est-ce que c’est toi
qui l’as bouffé ce putain de yaourt ! ?
anissa.– Écoute, arrête Zora. Si tu veux, je descends tout de suite t’en
acheter, des yaourts, de la même marque, en plus.
zora.– Non, ça remplacera jamais l’autre. C’est lui que je rêvais de
bouffer pendant toute cette matinée de merde.
anissa.– Tu es vraiment chienne. La mort de papa, t’as pas honte, c’est
comme ça que tu en parles ?
zora.– (aparté) Vers seize ans dans le bus parking du château de La
Napoule Jacquot colonie de vacances des Houillères grand rouquin
musique de fanfare dehors le berlingot hop sauté son truc à Jacquot tout
poilu de saucisson et moi jusqu’au ciel ouverte à lui qui han encore han
et moi le Maroc qui explose dunes et plages dans ma tête les villes et les
yeux palmiers de maman dans le même ciel justement qui roule de ses
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Howard Barker
royaume-uni (angleterre)
1
IL FAUT MANGER
Traduit de l’anglais par Élisabeth Angel-Perez
PERSONNAGES
Il faut manger a été diffusée en septembre 2007 sur France Culture, réalisation : Jean
Couturier, avec : Jonathan Capdevielle, Roger Carel.
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Un roi émacié est assis à une table vide. Un serviteur entre, qui apporte un
plat, une serviette et une cuiller.
serviteur.– Ragoût
(le Roi lève la tête…)
Ragoût
(il regarde…)
Ragoût
charles.– De quoi ?
serviteur.– De bœuf
charles.– Ragoût de bœuf ?
(il dévisage le Serviteur…)
Fumet sublime goûtez-le
Le Serviteur s’avance vers la table et place le plat à côté de lui. Il coince la ser-
viette dans son col…
serviteur.– Où dois-je goûter ?
charles.– Sur le bord, toujours le bord…
(le Serviteur plonge sa cuiller dans le plat, le goûte)
Et maintenant tournez le plat
(le Serviteur tourne le plat)
Merci
Encore une fois le bord
(le Serviteur plonge sa cuiller et goûte. Le Roi l’observe…)
Ça me fascine la façon dont vous abordez votre rôle de goûteur de nour-
riture empoisonnée j’ai une profonde admiration pour votre virtuosité
et pour la véhémence avec laquelle vous niez je sais que fut un temps
vous étiez acteur en fait je vous ai vu
serviteur.– (en avalant) Jamais
charles.– Jamais dites-vous mais je vous ai vu dans une comédie
serviteur.– (sourire) Votre Majesté peut conclure ce qu’elle veut de ma
manière de goûter sa nourriture je ne peux que dire
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Bruno Castan
france
PERSONNAGES
maurice
bougâ
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Introït
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Hanokh Levin
israël
LES NUMÉROS
( )
Traduit de l’hébreu par Laurence Sendrowicz
PERSONNAGES
enflée
l’infirmière
coincée
vrp
ouvrier
gominé
fardée
dévot
dévote
chauve
petite maigre
grosse boiteuse
alzheimer
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Françoise du Chaxel
france
CE MATIN, LA NEIGE
Ouvrir la fenêtre
Les yeux encore fermés sur les rêves du matin
Je ne pense qu’à une chose
Ouvrir la fenêtre
C’est l’hiver pourtant
Aucun bruit
Voilà c’est ça
Je n’entends aucun bruit
J’ouvre les yeux
Une drôle de lumière
Celle que renvoie la terre lorsque la neige la recouvre
Je connais cette lumière
Chez moi, là-bas, la neige est là dès novembre
On rentre dans la maison
On se fait son cocon de solitude en attendant le printemps
Les enfants l’attendent comme un premier cadeau de Noël
Ici tout est doux
L’hiver n’est pas l’hiver
La douceur de l’océan remonte la rivière
La voix chante, le vin est sucré
On se promène sans gants et sans écharpe à Noël au bord de la
Dordogne
Ici
La neige est une étrangère
Ils ne savent pas comment l’accueillir.
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Suzanne Lebeau
canada (québec)
LE GRILLON
L’angélus sonne
rappelle à l’enfant qu’il est temps de rentrer.
Midi
pense l’enfant
voilà pourquoi je suis seul.
Les adultes se sont éparpillés
dans les grandes salles à manger des fermes
qui bordent les champs.
Ils ont fui le soleil de midi
qui brûle les nuques
les bras
et fait couler la sueur des fronts penchés sur le blé.
Dans les grandes salles
il fait frais et sombre
et le bruit coule aussi fort que le vin qui est rouge et blanc
et que l’eau servie aux enfants.
Le petit garçon déteste le bruit.
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Sylvain Levey
france
Je le regrette.
J’ai pris ta main. J’ai osé.
La première fois.
Je le regrette.
Je le regrette.
Je le regrette.
Je le regrette.
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