Cours Agrophysiologie Des Stress 2023-2024
Cours Agrophysiologie Des Stress 2023-2024
Cours Agrophysiologie Des Stress 2023-2024
I. Stress hydrique
I.1. Importance de l’eau pour la plante
L’eau est un facteur essentiel à la production végétale. La richesse en eau des plantes est
variable selon les espèces, les organes et les milieux de vie. Les rôles multiples assurés par l’eau au
sein des plantes en font le premier facteur limitant leur fonctionnement. Outre son importance
constitutive des tissus, elle permet entre autres, le transport des substances nutritives, d’éléments
issus du métabolisme et des déchets. Elle joue le rôle de transporteur, de solvant, d’agent de
réactions chimiques et donne aux plantes leur turgescence. Cependant, l’eau en excès altère les
propriétés physiques, chimiques et biologiques du sol et gêne la plante en la privant d’aération, ce
qui limite son développement racinaire et favorise les maladies et les accidents végétatifs. De même
une insuffisance d’eau est nuisible car le déficit hydrique est l’un des éléments limitant la production
des cultures, surtout en période de croissance. La détermination des besoins en eau des cultures
dépend du climat, du sol, du type de culture (espèces et variétés) et des pratiques culturales.
I.2. Rôle de l’eau dans la plante
Tout comme l’organisme humain, la plante a besoin d’eau pour vivre. Cette dernière est
indispensable à la formation de la sève et participe ainsi aux phénomènes de circulation et donc à
l’apport de nutriments aux différents organes de la plante; elle participe également à des
phénomènes de régulations tel que la transpiration.
1
Ø Transporter des éléments essentiels
L’eau entre par la racine où elle se charge de tous les éléments dont la plante a besoin pour se
nourrir : du phosphore, du potassium, mais surtout de l’azote. L’eau est alors appelée «sève brute».
Elle emprunte un réseau appelé « xylème » qui lui permet d’être conduite jusqu’aux feuilles.
Une fois arrivée aux feuilles, l’eau libère les éléments dont elle s’est chargée. Une partie
reste dans les feuilles : l’autre en repart chargée de sucres. On l’appelle alors sève élaborée. Elle
passe par un autre réseau, appelé « phloème », qui va lui permettre de rejoindre les grains pour y
stocker les sucres transportés. Pour faire monter l’eau de bas en haut, la plante l’aspire très fort en
transpirant par les feuilles. Résultat, 98 % de l’eau captée dans le sol et transportée dans la plante
sera, ensuite libérée sous forme de vapeur d’eau dans l’atmosphère ; cela fait partie du cycle de
l’eau.
Ø Photosynthèse
L'énergie solaire est utilisée pour oxyder l'eau et réduire le gaz carbonique afin de synthétiser
des substances organiques (glucides). Ce phénomène a lieu dans les chloroplastes, un organite
spécifique des plantes, au niveau des membranes des thylacoïdes où se situent les photosystèmes I
et II et les cytochromes. Il faut six molécules de dioxyde de carbone et six molécules d'eau pour
synthétiser une molécule de glucose, relâchant six molécules de dioxygène, grâce à l'énergie
lumineuse.
6 CO2 + 6 H2O + énergie lumineuse → C6H12O6 (glucose) + 6 O2
Ø La turgescence
L’eau assure la turgescence, phénomène qui donne à la plante sa forme. En effet dans un tissu
bien hydraté les parois squelettiques des cellules sont soumises à une pression : la pression de
turgescence. Cette pression maintient la rigidité du tissu ; elle diminue lors d’une déshydratation.
La sécheresse peut induire une contrainte mécanique au niveau cellulaire. Les parois cellulosiques
des cellules sont rigides et, chez la grande majorité des plantes, ne suivent que partiellement les
diminutions de volume durant la déshydratation. Aussi, lorsque la déshydratation d’un tissu atteint
un seuil critique, le plasmalesme peut se décoller des parois cellulosiques : la cellule est alors
plasmolysée et la pression qu’elle exerce sur son cadre cellulosique est nulle. Dans cet état le
plasmalesme, et aussi les plasmodesmes qui relient les cellules d’un même tissu en elles, peuvent se
rompre : la déshydratation induit une contrainte mécanique.
2
entourée par un cadre cellulosique plus ou moins rigide, diminue aussi de volume (disparition de la
pression de turgescence) ; mais cette diminution est beaucoup plus faible que celle du volume
délimité par le plasmalesme (en noir ici).
Ø Régulation de la température de la plante
La transpiration est définie comme l’émission d’eau à l’état de vapeur par le végétal dans
l’atmosphère non saturée en humidité. C’est le mécanisme essentiel permettant le maintien de
l’équilibre hydrique des végétaux car elle est responsable de la circulation de l’eau à l’intérieur de la
plante et des échanges entre le sol, la plante et l’atmosphère. La transpiration consomme 40 % de
l’énergie solaire captée par la plante. Outre son rôle essentiel dans l’ascension de la sève brute et le
contrôle de l’équilibre hydrique, elle contribue aussi aux mouvements de la sève élaborée et permet
d’abaisser la température des feuilles de quelques degrés par fortes chaleurs. Deux contraintes
opposées s’exercent sur la transpiration : celle de l’équilibre hydrique du végétal et celle de
l’approvisionnement carboné. En effet, si la transpiration met en mouvement le flux hydrique à
travers la plante, elle est aussi la cause des pertes d’eau. De plus, la source de carbone des végétaux
chlorophylliens, le dioxyde de carbone atmosphérique, pénètre dans les feuilles par les stomates
qui sont aussi le site de l’émission d’eau dans l’atmosphère
I.3. Facteurs qui régissent la consommation de l’eau par les cultures
Climat : La consommation d’eau des végétaux est sous l’étroite dépendance des conditions
climatique.
Sol : Intervient par sa réserve hydrique qui présente de grandes variations saisonnières.
Durant les périodes estivales, le sol connaît une phase de dessèchement. Durant la saison des pluies,
la réserve se reconstitue à partir des précipitations.
Espèce végétale : les mécanismes de transferts, de régulation de l’utilisation de l’eau par la
plante sont en fonction de sa physiologie, de sa morphologie et de sa dynamique de croissance. Les
caractères propres aux cultures (espèces, stades phénologiques, degré de couverture du sol) jouent
un rôle très important dans les modalités de consommation de l’eau.
Facteurs nutritionnels : Le potassium joue un rôle important dans la réduction des pertes
en eau par transpiration et augmente l’efficacité de son utilisation. Si la plante est pauvre en
potassium, la fermeture des stomates est « paresseuse » et il y a perte d’eau au moment où la plante
en a besoin. Les carences azotées se traduisent par une augmentation des résistances à l’absorption
de l’eau.
I.4. Effet du déficit hydrique sur les végétaux
Le stress hydrique est l'un des stress environnementaux les plus importants, affectant la
productivité agricole dans le monde. C'est un problème sérieux dans beaucoup d'environnements
arides et semi-arides, où les précipitations changent d'année en année et où les plantes sont
soumises à des périodes plus ou moins longues de déficit hydrique. Il existe de nombreuses
définitions du stress hydrique : En agriculture, il est défini comme un déficit marqué et ce compte
tenu des précipitations qui réduisent significativement les productions agricoles par rapport à la
normale pour une région de grande étendue. En effet, on assiste à un stress hydrique lorsque la
demande en eau dépasse la quantité disponible pendant une certaine période ou lorsque sa mauvaise
qualité en limite l'usage. Le stress hydrique entraîne une dégradation des ressources d'eau douce en
termes de quantité (surexploitation des eaux souterraines, rivières asséchées, etc.) et de qualité
(eutrophisation, pollution par la matière organique, intrusion saline, etc.). Le stress hydrique peut
se définir comme le rapport entre la quantité d'eau nécessaire à la croissance de la plante et la
quantité d'eau disponible dans son environnement, sachant que la réserve d'eau utile pour la plante
3
est la quantité d'eau du sol accessible par son système racinaire. La demande en eau de la plante est
quant à elle déterminée par le niveau de transpiration ou évapotranspiration, ce qui inclut les pertes
d'eau tant au niveau des feuilles qu'au niveau du sol. Le stress hydrique représente toute restriction
hydrique qui se traduit par une baisse de potentiel de la plante suite à une perturbation de son
activité physiologique provoquée par un déficit de consommation en eau et communément appelé
stress hydrique.
I.5. Causes du déficit hydrique chez les plantes
L’absorption de l’eau par les plantes peut être ralentie dans certaines circonstances avec pour
conséquences une évapotranspiration réduite et une production diminuée. L’absorption de l’eau
est réduite si :
ü la tension d’humidité du sol est forte (la tension de l’eau s’élève lorsque le sol est de plus
en plus sec).
ü la concentration saline de la solution du sol est trop élevée : la pression osmotique de la
solution du sol s’élève lorsque la teneur en sels solubles augmente. Le déficit hydrique chez
les plantes est causé soit par la perte excessive d’eau, soit par une absorption inadéquate,
ou par une combinaison des deux. La transpiration excessive est responsable du déficit
hydrique temporaire des plantes aux heures de midi. Cependant, une diminution de
l’absorption racinaire causée par une indisponibilité en eau dans le sol est responsable des
longues et sévères périodes de déficit hydrique dans la plante qui causent des réductions
importantes de la croissance des cultures.
I.6. Effets du déficit hydrique sur le végétal:
Outre son rôle dans la photosynthèse, dans le transport et l'accumulation des éléments
nutritifs ainsi que dans la division cellulaire et la régulation thermique, l'eau joue un rôle essentiel
dans la croissance et le développement des plantes cultivées. Un déficit hydrique se traduit par une
réduction de la croissance de la plante et/ou de sa production par rapport au potentiel du génotype.
Un déficit hydrique précoce affecte en parallèle la croissance des racines et des parties aériennes, le
développement des feuilles et des organes reproducteurs. Le stress hydrique affecte plusieurs
variables de fonctionnement de la plante, telles que la température foliaire, la conductance
stomatique, la photosynthèse et la surface foliaire. Une diminution de la teneur en eau de la plante
se traduit immédiatement par une réduction de la croissance en dimension avant même que la
photosynthèse ne soit affectée. A l'échelle annuelle, les conséquences d'une sécheresse dépendent
de sa période de démarrage (par rapport au stade cultural) et de sa durée d'action. Les effets
observés au champ le plus souvent sont :
ü une levée incomplète et irrégulière (en vagues) : défaut de peuplement plus grave pour les
cultures qui ne se ramifient pas (betterave, tournesol...), hétérogénéité dans les stades
phénologiques jusqu'à la récolte.
ü une implantation racinaire médiocre et superficielle : couverture du sol retardée, carences
précoces, sensibilité à la sécheresse de fin de cycle.
ü un défaut ou un retard de mise en solution des engrais (azotés) et des pertes par
volatilisation.
ü un défaut de prélèvement du nitrate dans les horizons superficiels, qui sont les plus
Concentrés et les plus sensibles à la sécheresse édaphique.
ü une réduction de la surface foliaire, de la biomasse aérienne et des organes fructifères, en
raison d'un défaut de transpiration et d'une carence azotée. Une sénescence accélérée et un défaut
4
de remplissage du grain ou une réduction de calibre des fruits. Des conséquences variables sur la
qualité du grain ou du fruit.
I.7. Mécanisme d’adaptation des plantes au stress hydrique
Pour lutter contre le manque d’eau, les plantes développent plusieurs stratégies adaptatives
qui varient en fonction de l’espèce et des conditions du milieu (Esquive, évitement et tolérance).
La résistance d’une plante à une contrainte hydrique peut être définie, du point de vue
physiologique, par sa capacité à survivre et à s’accroître et du point de vue agronomique, par
l’obtention d’un rendement plus élevé que celui des plantes sensibles. La résistance globale d’une
plante au stress hydrique apparaît comme le résultat de nombreuses modifications phénologiques,
anatomiques, morphologiques, physiologiques, biochimiques et moléculaires qui interagissent pour
permettre le maintien de la croissance, du développement et de la production.
Ø Adaptation phénologique
Pour éviter les périodes difficiles pour la croissance et le développement, certaines variétés
accomplissent leur cycle de développement avant l’installation du stress hydrique. La précocité
constitue donc un important mécanisme d’évitement au stress hydrique de fin de cycle. Dans ces
conditions, les paramètres phénologiques d’adaptation ou paramètres de précocité définissent le
calage du cycle vis-à-vis des contraintes environnementales. La précocité assure une meilleure
efficience de l’utilisation de l’eau. En effet, en produisant la biomasse la plus élevée, les génotypes
à croissance rapide et à maturité précoce utilisent mieux l’eau disponible et ils sont moins exposés
aux stress environnementaux que les génotypes tardifs.
Ø Adaptation morphologique
L’effet du stress hydrique peut se traduire, selon la stratégie adaptative de chaque espèce ou
génotype, par des modifications morphologiques pour augmenter l’absorption d’eau et pour
diminuer la transpiration et la compétition entre les organes pour les assimilas. Ces modifications
affectent la partie aérienne ou souterraine.
ü Au niveau de la plante
La diminution de la surface foliaire des feuilles et du nombre de talles est considérée comme
une réponse ou adaptation au manque d’eau. La longueur des barbes est un paramètre
morphologique qui semble également étroitement lié à la tolérance au stress hydrique. La hauteur
de la plante apparaît comme un critère de sélection important particulièrement dans les zones
arides, ceci veut dire qu’une plante haute s’accompagne souvent d’un système racinaire profond ce
qui lui conférerait une capacité d’extraction de l’eau supérieure. Les plantes à enracinement
superficielle et peu dense souffrent plus du déficit hydrique que ceux à enracinement profond
ü Au niveau structurel
Une des principales modifications structurelles, observée sur des plantes ayant subi un
stress hydrique, concerne l’altération des propriétés physico-chimiques des parois cellulaires. Ces
changements peuvent être induits par des modifications au niveau des enzymes impliquées dans la
biosynthèse des monolignols ou dans leur assemblage dans la paroi. L’augmentation de l’expression
de ces gènes peut être reliée à l’arrêt de la croissance et à l’épaississement de la paroi. Un autre
composant majeur de la paroi correspond aux composés issus de la polymérisation des sucres
(cellulose et hémicellulose). Des changements structuraux au niveau du cytosquelette peuvent
également s’opérer. Certains auteurs ont aussi mis en évidence une diminution de l’expression de
deux gènes chez le soja, le premier codait pour une β-tubuline, une protéine impliquée dans les
phénomènes de croissance cellulaire et le second codait pour l’actine, une protéine impliquée dans
la structure du cytoplasme et dans l’orientation des organes.
5
Ø Adaptation physiologique
ü Capacité photosynthétique
La cinétique de la fluorescence chlorophyllienne est utilisée pour étudier les effets des stress
abiotiques sur le rendement de la photosynthèse et principalement sur l’activité des photosystèmes
PSII. Les investigations basées sur des évaluations de la fluorescence chlorophyllienne ont prouvé
que le PSII est tout à fait résistant au stress hydrique. Une grande partie du stress hydrique a été
attribuée pour diriger les effets de la déshydratation sur les réactions biochimiques de la
photosynthèse. Pendant que les teneurs en eau des feuilles diminuent, une diminution d'efficacité
photochimique de PSII et du transport d'électron se produit. Ceci peut être dû aux dommages des
centres de réaction de PSII, mais peut également être provoqué par la diminution de la capacité de
transport d'électron de PSII. La majeure partie de la variation de l'utilisation d'énergie pour la
photochimie pendant un stress hydrique peut être expliquée en termes de variation de l'efficacité
de la capture d’électron par les centres ouverts de PSII. La survie des plantes au manque d’eau est
en partie due à l'entretien de la capacité photosynthétique des feuilles, permettant le rétablissement
rapide des plantes suite à une période de stress hydrique.
ü Teneur en chlorophylle
Sous un stress hydrique, une diminution de la teneur en chlorophylle est remarquée. Pour
limiter les pertes en eau par évaporation et aussi l’augmentation de la résistance à l’entrée du CO2
atmosphérique nécessaire à la photosynthèse, l’économie de l’eau se traduit par une turgescence
relative moins affectée par le stress conduisant à une dilution de la chlorophylle. Le rapport
chlorophylle (a/b) est un bon indicateur du seuil de tolérance au stress hydrique. L’augmentation
de la teneur en proline foliaire sous l’effet du stress est suivie par un abaissement dans les teneurs
en pigments chlorophylliens totaux (Chlorophylles a et b). Une certaine proportionnalité, mais
inverse, entre les teneurs en proline accumulées et les teneurs en pigments chlorophylliens perdues.
Ainsi la variété qui accumule plus de proline est aussi celle qui connaît la plus forte diminution de
ses teneurs en pigments chlorophylliens et vice versa.
ü Régulation stomatique
La réduction de la perte en eau par la fermeture stomatique est un moyen d’adaptation des
plantes au stress hydrique. Cette diminution de la transpiration peut engendrer une réduction de la
photosynthèse. Ainsi, les génotypes qui ont la capacité photosynthétique intrinsèque la moins
affectée par le stress hydrique présentent une efficience de l’utilisation de l’eau
(photosynthèse/transpiration) plus élevée et une plus grande capacité de survie. L’augmentation
du nombre de stomates par unité de surface pourrait être un des facteurs de résistance au stress
hydrique chez les céréales si elle est accompagnée par une bonne activité physiologique.
L’accroissement de la densité stomatique peut augmenter l’assimilation nette du CO2 et diminuer
la perte en eau. En effet, un nombre élevé de stomates peut engendrer des stomates de petite taille
et à fermeture rapide. Les variétés ayant une conductance et une densité stomatique élevée sont
plus résistantes au stress hydrique en donnant le rendement en grains le plus satisfaisant. La
régulation de l'état hydrique des parties aériennes de la plante par la fermeture des stomates est
notamment déclenchée par un signal chimique racinaire, la molécule signal est une phytohormone,
l'acide abscissique (ABA), synthétisé par les racines soumises à un stress hydrique et qui est véhiculé
jusqu'aux feuilles par la sève brute. Cette régulation diffère d'ailleurs selon les espèces, leur capacité
à maintenir un état hydrique presque constant étant variable. Par exemple, elle est bonne chez le
maïs et le pois et moins chez le tournesol. Si la fermeture des stomates permet à la plante de réduire
la sortie d'eau, elle limite aussi l'entrée de CO2 et donc la photosynthèse et la production de
6
biomasse. L’ouverture et la fermeture des stomates sont contrôlées par la turgescence de leurs
cellules de garde. Cette dernière dépend de l’humidité du sol, de la température des feuilles, de
l’humidité de l’air, du rayonnement incident, du vent, de la concentration en CO2 de l’air et de la
chambre sous stomatique. La fermeture des stomates permet d’ajuster le débit transpiratoire au
débit liquide (comme une vanne) et donc finalement l’absorption (à l’échelle journalière), elle freine
ainsi la déshydratation. La résistance stomatique (ou son inverse la conductance) est reliée au
potentiel hydrique total de la feuille et variable selon l’espèce.
ü Ajustement osmotique
Le stress hydrique provoque la mise en place d’un état de régulation hydrique de la plante
qui se manifeste par la fermeture stomatique et par une régulation du potentiel osmotique.
L’ajustement osmotique est généralement considéré comme un élément important dans la tolérance
des plantes au stress hydrique. Cet ajustement implique l’accumulation, au niveau cellulaire, des
sucres, d’acides aminés (exemple : la proline), d’ions ou d’autres solutés compatibles (c’est-à-dire
non toxiques). L’accumulation d’osmolites permet de créer un influx d’eau dans la cellule ou tout
du moins d’éviter un flux, en augmentant la force de rétention des molécules d’eau. Le maintien de
cette quantité d’eau permet ainsi de conserver la turgescence nécessaire à la croissance des cellules.
Il semblerait que cette accumulation d’osmolites soit reliée au maintien de l’intégrité des protéines
et des membranes. Lors d’un stress hydrique l’accumulation d’osmolites semblerait aussi reliée à la
protection des cellules contre les espèces activées de l’oxygène. Cependant, une augmentation
d’osmolites n’est pas toujours reliée à une augmentation de la tolérance. Chez la plupart des
végétaux, les métabolites impliqués dans cet ajustement sont assez variés. Des études menées sur
l’osmorégulation indiquent que les acides aminés libres peuvent jouer un rôle significatif dans ce
processus. Parmi les acides aminés pouvant être accumulés, la proline représente l’une des
manifestations les plus remarquables des stress. Les sucres ont également été considérés par
plusieurs auteurs comme de bons osmorégulateurs pouvant jouer un rôle important dans
l’ajustement osmotique et l’adaptation des plantes au stress hydrique. Les composés inorganiques
peuvent aussi avoir un effet dans la régulation osmotique et dans la tolérance au stress hydrique. Il
semblerait même que ce type de molécule soit plus efficace que les composés organiques.
I.7. Mécanisme d’adaptation biochimique en condition de stress hydrique
Ø Accumulation de la proline en condition de stress hydrique
L’accumulation de la proline constitue aussi un véritable mécanisme de tolérance au stress
hydrique. Pour cette raison, certains auteurs ont proposé l’accumulation de la proline comme
technique de sélection. L’origine de la proline accumulée sous stress n’est pas totalement éclaircie.
Elle est soit synthétisée de nouveau à partir de l’acide glutamique (Glu) ou via l’ornisitole (Orn),
qui sont utilisés comme précurseurs. Les hydrates de carbone peuvent être des facteurs essentiels
dans l’accumulation de la proline, car la synthèse des protéines est liée automatiquement au
métabolisme des glucides et à la respiration (dans le cycle de Krebs) par l’intermédiaire l’α-
cétoglutarate qui forme le statut carbonique pour la synthèse de la proline. L’addition de l’ornithine
dans le milieu de culture augmente la source de la proline par l’intermédiaire de l’enzyme
ornithineamino-transferase. L’augmentation de la teneur en proline est directement reliée à
l’application du stress. En effet, lors de la phase de récupération juste après l’application du stress,
le contenu en proline diminue. L’ABA est nécessaire pour l’accumulation de la proline sous faible
potentiel.
Ø Rôles des sucres solubles
7
Le potentiel osmotique peut être maintenu pour un stress hydrique de faible ou moyenne
intensité, par ajustement osmotique. Les sucres peuvent servir de composés solubles compatibles
pour cet ajustement osmotique, comme de nombreuses autres molécules (proline, glycine-bétaïne
ou pinitol). Lorsque la contrainte hydrique cesse, la feuille reconstitue les réserves d’amidon et si
une nouvelle contrainte hydrique intervient, le temps d’adaptation est plus court. En effet, les sucres
glucose, fructose et saccharose représentent des osmoticums beaucoup moins puissants que la
proline, ils participent eux aussi au maintien de la balance de la force osmotique. Par ailleurs, il a
été observé que sous stress hydrique, les réserves amylacées sont progressivement utilisées suite à
leur conversion rapide en saccharose qui pourra être associé à une inhibition de la synthèse de
l’amidon. Ainsi, les enzymes liés au métabolisme des sucres semblent avoir une importance majeure
dans la tolérance au stress hydrique. L’implication des sucres dans la tolérance au stress hydrique a
été mise en évidence par les corrélations observées entre le contenu en certains sucres et
l’acquisition de la tolérance. De nombreuses études ont mis en évidence l’accumulation de sucres
solubles lors de la dessiccation. Une idée principale en ressort, différents sucres solubles peuvent
être présents dans des tissus bien hydratés, mais le saccharose est préférentiellement accumulé dans
les tissus en déshydratation.
II. Salinité
II.1. Définition
La salinité́ des sols est caractérisée par une forte concentration de sels solubles. Les sols sont
classés comme salins quand la conductivité́ électrique d’un extrait de pâte saturée à 25°C (CEeps)
est égale ou supérieure à 4 dS/m ou plus, ce qui équivaut à environ 40 mM de NaCl et génère une
pression osmotique d’environ 0,2 MPa. C’est un facteur environnemental très important qui réduit
considérablement le rendement de la plupart des espèces cultivées.
Il est prouvé que la salinité́ est liée étroitement à la présence des cations Na+, Ca2+ et Mg2+,
tandis que le Cl-, le sulfate (SO 2-) et le bicarbonate (HCO -) sont des anions qui contribuent à la
4 3
salinité́ du sol. Toutefois, le NaCl est considéré́ comme le sel le plus important parce que le Na+ et
le Cl- sont toxiques pour les plantes quand ils sont accumulés à des fortes concentrations. En plus,
les concentrations élevées de Na+ dans la solution du sol entraîne une détérioration de la structure
du sol, ce qui exacerbe l’effet de la salinité́ en empêchant le drainage ainsi que la disponibilité́ de
l’eau sera affectée en rendant le sol sec. En présence de fortes concentrations de NaCl, la plupart
des plantes exclut le Na+ et le Cl- par les racines et l’eau sera captée par le sol. La salinité́ réduit les
rendements des cultures agricoles dans de nombreuses régions arides et semi- arides du monde où
la pluviométrie est insuffisante pour un lessivage des sels dans la zone racinaire.
La salinité naturelle ou primaire est la plus répandue, tandis que la salinité́ secondaire,
causée par l’érosion ou l’irrigation, ne cesse de croitre. En dehors de la salinité́ naturelle, une
proportion importante des terres agricoles cultivées est devenue saline à cause du défrichement ou
de l’irrigation, qui tous deux causent une augmentation de la concentration des sels dans la zone
racinaire et la nappe phréatique. Dans le monde, sur les 1500 millions d’hectares des terres agricoles
non irriguées, 32 millions d’hectares (2 %) sont affectés par la salinité́ secondaire à divers degrés.
Parmi les 230 millions d’hectares des terres irriguées, 45 millions d’hectares (20 %) sont affectés
par le sel. Les terres irriguées représentent seulement 15 % des terres cultivées, mais elles produisent
un tiers de l’alimentation mondiale.
8
Les sels sont communs et leur présence dans les sols est nécessaire, car beaucoup des sels
comme (les nitrates et le potassium) sont essentiels à la nutrition des plantes. Les sels ont pour
origine l’altération des minéraux, la fertilisation minérale, l’amendement des sols par (le gypse, les
composts et les fumiers) ou les apports d’irrigation.
II.2. Effets de la salinité sur la physiologie des plantes
Le milieu salin provoque de nombreux effets négatifs sur le comportement physiologique de
la plante, ce qui est dû au faible potentiel osmotique de la solution du sol (stress osmotique) et aux
effets des ions spécifiques (stress salin), à un déséquilibre nutritionnel ou une combinaison de ces
facteurs. Tous ces facteurs ont des effets négatifs sur la germination, la croissance et le
développement des activités physiologiques et biochimiques chez les plantes. En outre, la
sensibilité́ d’une espèce au sel varie au cours de son développement. Il est bien établi que le
comportement d’un végétal diffère suivant que la salinité́ du milieu extérieur est maintenue
constante, en continuelle augmentation ou fluctuante.
Ø Sur la germination
La plupart des plantes sont plus sensibles à la salinité durant leurs phases de germination et
de levée. Parmi les causes de l'inhibition de la germination en présence de sel, la variation de
l’équilibre hormonal a été évoquée. D’autres travaux montrent que l’effet du stress salin sur la
germination peut être attribué soit à un effet osmotique et/ou une toxicité des ions spécifiques à
l’émergence de la radicule ou le développement des semis. Bien que les halophytes possèdent une
teneur très élevée en sel dans leurs tissus au stade adulte, leurs graines ne sont pas aussi tolérantes
au sel au stade germination. Le stade germination est souvent limité par la salinité du sol et se
montre le plus sensible que les autres stades.
Ø Sur la croissance et le développement
L’exposition des plantes au stress salin débute habituellement avec l’exposition des racines
à ce stress. Etant donné, que la salinité dans le sol affecte la disponibilité des éléments nutritifs et
de l’eau, en créant un stress osmotique, c’est la sécheresse physiologique, en provoquant la
réduction générale de la croissance et de la photosynthèse des plantes. Cependant, le phénomène
de l’inhibition de la croissance est due à deux raisons, tout d’abord, la présence de sel dans la
solution du sol qui réduit la capacité de la plante à absorbé l’eau, et cela conduit à une croissance
plus lente, par effet osmotique ou un déficit hydrique. Et à des quantités excessives de sel dans le
flux de transpiration qui endommagent les cellules foliaires responsables de la transpiration qui
réduit encore la croissance.
Des expériences ont confirmé que la salinité réduit la capacité́ des plantes à utiliser l’eau et
elle entraine une réduction du taux de croissance, ainsi que des changements dans les processus
métaboliques. Chez les plantes qui poussent dans des conditions salines, elles sont stressées
essentiellement de trois manières :
ü La réduction de leur potentiel hydrique dans la zone racinaire provoquant un déficit en eau ;
ü Une phytotoxicité́ de ces ions tels que le Na+ et le Cl- ;
ü Un déséquilibre des éléments nutritifs par la dépression dans l'absorption et/ou le transport.
La salinité affecte les plantes physiologiquement à bien des égards, leurs réponses varient
considérablement selon l’espèce, le stade de croissance et les conditions climatiques de la
culture.
9
Ø Sur la biochimie de la plante
La salinité réduit la vitesse de la photosynthèse suite à une diminution de la conduction
stomatique de CO2 . La diminution de la vitesse photosynthétique est due à plusieurs facteurs
comme la déshydratation des membranes cellulaires ce qui réduit leur perméabilité au CO2, la
toxicité du sel, la réduction de l'approvisionnement en CO2 à cause de la fermeture des stomates,
la sénescence accrue induite par la salinité et le changement dans l’activité des enzymes causé par
le changement dans la structure cytoplasmique.
Chez diverses espèces plus ou moins résistantes, un taux élevé des sucres totaux résultant du
blocage de la glycolyse ou du saccharose provenant d’une grande hydrolyse de l’amidon.
Une concentration élevée de Na+ dans le cytoplasme inhiberait ‘activité́ de nombreuses
enzymes et protéines, entraînant des dysfonctionnements de la cellule. De plus, comme la synthèse
de protéines nécessite une concentration élevée en K+ pour la fixation des ARNt aux ribosomes,
la traduction serait également affectée.
Ø sur la nutrition minérale des végétaux
Les effets nutritionnels de la salinité incluent les deux actions primaires du sel sur les plantes :
la toxicité directe due à lʼaccumulation excessive des ions dans les tissus et un déséquilibre
nutritionnel provoqué par lʼexcès de certains ions. Des concentrations salines trop fortes dans le
milieu provoquent une altération de la nutrition minérale des plantes.
L’absorption élevée du sel (NaCl) concourt avec l’absorption d’autres ions, en particulier des
ions K+, conduisant à la déficience en K+. L’augmentation de la salinité entraine l’augmentation des
niveaux de Na+, Ca2+et Cl- et la diminution des niveaux de K+, Mg2+ et le rapport K+/ Na+.
L’augmentation de Na+ et Cl- induit une diminution du contenu en Ca2+ hydrosoluble. Il existe une
relation positive entre la concentration de Na+ et Cl- et une relation négative entre celle de Na+et
K+ dans les plantes.
Lorsque la plante se trouve dans une situation de carence de K+, les flux de sève sont
perturbés, ce qui se traduit par une diminution prononcée de la vitesse de circulation de la sève
phloémienne. Les photoassimilats s’accumulent alors dans les feuilles. Des symptômes de chlorose
et de nécrose provenant de la photooxydation de l’appareil photosynthétique sont fréquemment
observés et résultent d’une augmentation de la production de superoxydes.
Le stress salin impose un déficit hydrique qui mène à la formation des espèces réactives de
l’oxygène (ERO) provoquant un dysfonctionnement membranaire et la mort cellulaire suite au
dommage oxydatif des lipides, des protéines et des acides nucléiques. Puisque les concentrations
internes d’O2 sont élevées durant la photosynthèse, les chloroplastes sont sujets à générer les
espèces réactives de l’oxygène.
10
Les halophytes et les glycophytes, peuvent développer plusieurs mécanismes pour assurer
leur cycle de croissance et de développement. Certaines espèces utilisent le mécanisme d’exclusion
des sels en excès ou les compartimentent dans la vacuole. On peut distinguer deux comportements
des plantes vis-à-vis du sel : les includer et les excluder.
ü Excluder : Les plantes excluder sont généralement sensibles à la salinité et sont incapable
de contrôler le niveau de Na+ cytoplasmique. Cet ion est transporté dans le xylème, véhiculé vers
les feuilles par le courant de transpiration puis en partie ré-circule par le phloème pour être ramené
vers les racines ces espèces sensible contiennent donc Na+ dans les feuilles et un excès dans les
racines.
ü Includer : les plantes résistantes au NaCl, accumulant le Na+ dans les feuilles ou est
séquestré soit dans la vacuole de l’épiderme foliaire ou les limbes âges. Le sel est stocké dans les
vacuoles grâce à des systèmes de pompes moléculaires. Les vacuoles sont des compartiments
fermées au sein de la cellule, le sel est aussi isolé dans des constituants cellulaires vitaux ou excrété
par des glandes vers l’extérieur.
II.4. Mécanismes d’adaptations à la salinité
Ø Caractéristiques morphologiques et anatomiques
On peut résumer ces caractéristiques par ces points :
ü Une cuticule épaisse ;
ü Des stomates rares ;
ü Des cellules à grandes vacuoles pour favoriser le stockage de NaCl.
Une succulence des feuilles, qui deviennent épaisses ou cylindriques (Suaedea) ou de leurs tiges
dans le cas de l’espèce aphylle (Salicornia).
Ø Caractéristiques physiologiques
Pour qu’elles puissent absorber l’eau et continuer leurs fonctionnements vitaux, les
halophytes adoptent trois mécanismes essentiels :
ü Répartition et accumulation des ions dans la plante
Une forte capacité d’absorption et une accumulation préférentielle de Cl- et Na+ dans les
parties aériens surtouts les feuilles chez les halophytes. Ainsi, plus de 90% de Na+ sont accumulés
au niveau de la partie aérienne (80% dans les feuilles), qui a pour but d’élever le potentiel osmotique
qui peut dépasser 50 atm. Celui-ci contribue à maintenir le potentiel hydrique de la plante inférieur
à celui de la solution du sol.
ü Compartimentation vacuolaire
La compartimentation est la stratégie la plus efficace pour éviter la toxicité de Na+ sur des
sites métaboliques dans le cytoplasme. La plante utilise en effet le sel pour ajuster la pression
osmotique de ses cellules. Elle capte le sel qui parvient aux feuilles, au même titre que l'eau, par le
mouvement ascendant de la sève dans les vaisseaux. A l'intérieur des cellules, le sel est alors stocké
dans les vacuoles grâce à des systèmes de "pompes" moléculaires. Les vacuoles étant des
compartiments fermés au sein de la cellule; le sel est ainsi isolé dans des constituants cellulaires
vitaux.
II.5. Symbiose plante-champignons mycorhiziens et tolérance aux stress salin
La symbiose MA améliore le développement des plantes en condition de stress abiotiques
(salinité, sécheresse, température élevée) en impliquant des mécanismes physiologiques et
moléculaires peu connus. Le principal mécanisme consiste en l'amélioration de la nutrition
phosphatée de la plante hôte et en la modification de la balance K+/Na+. Cet effet positif conduit
11
à l’amélioration du statut nutritionnel (P, N, Mg et Ca) et d’ajustement osmotique de la plante par
l’accumulation des solutés compatibles. De plus, la symbiose MA améliore l’utilisation hydrique et
photosynthétique par la plante hôte. Elle augmente aussi l'activité́ des enzymes antioxydantes afin
de faire face aux ERO générées par la salinité́. Au niveau moléculaire, la symbiose MA régule
l'expression de certains gènes permettant aux plantes mycorhizées de maintenir le statut hydrique
de leurs tissus.
12