Leçon 4

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Leçon 4

Les autres modes d’extinction de la créance

Partie 1
La compensation

La compensation ressemble à un mode simplifié de paiement. Lorsque deux


personnes sont réciproquement créancières l’une de l’autre, au lieu d’effectuer un
paiement, la compensation permet de ne pas l’effectuer. Elle se définit à l’article
1347 du Code civil comme l’extinction simultanée d’obligations réciproques entre
deux personnes

Celle-ci peut poser problème lorsque l’une des créances est douteuse.
Effectivement, la personne dont la créance est douteuse pourrait l’invoquer afin de
ne pas payer directement son créancier. C’est pour cette raison qu’elle était
d’ailleurs refusée au sein du droit romain.
Mais l’absence de compensation peut être injuste. Par exemple, Jacques (créancier)
doit 100€ à Julie (débiteur), mais Julie doit aussi 20€ à Jacques. Si Jacques est
insolvable, Julie ne pourra pas être payé. Mais Jacques pourra toujours agir contre
Julie pour récupérer ses 20€. Est ce que Julie pourra au moins récupérer les 20€
qui viennent d’être soustraits, dans l’impossibilité d’être payée autrement ? L’effet
de la compensation permettra à Julie de ne pas payer les 20€ qu’elle devait à
Jacques, et ne pourra demander que 80€ à celui-ci. Pour autant, cette situation
peut crée des déséquilibres si le débiteur disposait de plusieurs créanciers.

Mais il existe plusieurs conditions à la compensation :

Titre 1
La réciprocité

La réciprocité suppose la vérification de la qualité de créanciers par les deux


personnes liées. Dans certaines situations, cette opération peut être complexe : en
cas de représentation et en cas de masse de biens. En cas de masse de biens, qui
sont notamment formés après un mariage, si l’un des époux devient créancier d’un
tiers, et que ce tiers devient par la suite le créancier de l’autre époux. Ici, si
l’inexécution de l’obligation par l’un des époux est remarquée, alors l’autre époux
reste solidairement lié aux dettes de son conjoint, et pourra alors risquer la perte de
ses biens. Pour autant, même si cette forme de réciprocité existe, la Cour de
cassation refuse la compensation dans un arrêt de 2015 dans cette situation.

La réciprocité peut-elle se réaliser à plus de deux personnes ? La réforme de 2016


précise à l’article 1347 la nécessité de deux personnes. Mais cette délimitation pose
des problèmes en ce que :

● Avant 2016, la Cour de cassation l’admettait lors de contrats indivisibles.


● Lors de compensations multilatérales qui arrivent souvent dans le domaine
bancaire

Titre 2
La compensation des dettes non connexes

Cette compensation dispose de trois sources :

● Par principe, la loi


● Elle peut être conventionnelle
● Elle peut être judiciaire

Chapitre 1
La compensation légale

Section 1
Les conditions

I. Des créances certaines, liquides et exigibles

Ces conditions relèvent de la même idée selon laquelle la créance est


en état d’être payée. Mais si la créance est soumise à des conditions, la
compensation ne pourra néanmoins pas jouer.

La créance doit d’ailleurs être :

● Certaine, c’est-à-dire qu’elle n’est pas discutée et n’est pas affectée par
une condition suspensive
● Exigible, c’est-à-dire que l’exécution forcée de celle-ci peut être exigée à
cause d’un terme échu
● Liquide, c’est-à-dire que le montant de la créance peut être déterminée et
que la situation est mise au clair

Mais la question qui se pose est celle de l’exigibilité. Par exemple, si le débiteur paye
alors que sa créance n’est pas exigible (exemple : je paye mon loyer en avance),
alors celui-ci ne pourra pas obtenir la compensation, puisqu’en cas de terme
suspensif le débiteur devra tout de même payer lors de créances futures.

Malgré tout, le juge peut parfois créer un terme nommé le délai de grâce qui
permettra de reculer la date de paiement lorsque des dettes sont trop importantes.
Ce délai de grâce peut faire jouer la compensation (article 1347-3). Cette solution
peut s’expliquer en ce que le délai de grâce n’est pas un terme comme les autres, il
ne remet pas en cause l’exigibilité de la créance, il la recule seulement.

Il faut aussi prendre l’exemple de A, créancier de B mais sa créance est prescrite, A


ne pourra pas demander le paiement à B. Mais si plus tard, B devient créancier de A,
la compensation ne jouera pas avec la créance prescrite. Cette solution est rendue
pour protéger B, puisqu’une fois que le délai de prescription est demandé, alors A
ne pourra vraiment plus revenir sur sa créance du fait qu’elle est éteinte.

II. Des obligations fongibles

Les obligations fongibles se rapportent à des obligations qui portent sur des
sommes d’argent ou sur des choses de genre (exemple : du bois et du bois, de
l’essence et de l’essence). Une obligation fongible est donc une obligation dans
laquelle les objets sont les mêmes.
III. Les obstacles à la compensation

Ici, il faut citer certains exemples :

● Lorsque la créance a été saisie, la réciprocité est brisée, empêchant alors la


compensation
● Lorsque la créance fait l’objet d’une procédure collective
● Dans certains cas, lorsque la compensation nécessite le consentement du
créancier. Par exemple, lorsqu’un héritier est créancier de la succession en
vertu d’un prêt, mais qu’il doit également de l’argent au défunt, alors peut-il
faire jouer la compensation pour ne pas payer sa dette ? Ici, il n’est pas
possible d’invoquer la compensation en ce que la compensation des autres
créanciers et de la succession devra ici être autorisée.

Section 2
Les effets de la compensation

Il existe une alternative théorique pour fixer les effets de la compensation. On peut
estimer que la compensation joue automatiquement, c’est-à-dire de
plein droit dès que les conditions prévues sont réunies, elles pourra jouer même à
l’insu des concernés. La Cour de cassation a pu effectivement retenir cette
hypothèse.

La compensation peut également jouer lorsqu’elle est invoquée par l’une des
parties. Mais comment déterminer la date de l’extinction des obligations ?

I. La date de l’extinction

● Soit les obligations s’éteignent à la date ou la compensation est invoquée


● Soit les obligations s’éteignent à la date où les conditions de la
● Soit les obligations s’éteignent à la date où les conditions de la
compensation sont réunies. C’est d’ailleurs cette solution que retient la
Code civil

II. Portée de l’extinction

La compensation n’opère qu’à concurrence du montant le plus faible. Cette règle de


bon sens bénéficie d’une utilité pratique. De plus, l’extinction de l’obligation
bénéficie d’un avantage pour le créancier. Par exemple, A doit 100€ à B, mais dans
le patrimoine de A, il ne reste que 100 et, A est débitrice de pleins d’autres
personnes. B est alors en concurrence avec C, D et E pour les 100€ de A. Si la
compensation est invoquée par B, alors celui-ci sera libéré de sa dette envers A qui
ne devra plus le payer non plus. Mais si la compensation n’est pas demandée, alors
B devra alors demander le paiement à A, et devra toujours sa dette envers lui. Les
autres créanciers de A seront alors avantagés face à B, puisqu’en payant sa dette, la
patrimoine de A s’enrichira.

Chapitre 2
La compensation judiciaire

Depuis 2016, le juge peut faire jouer la compensation même si les conditions de
celle-ci ne sont pas remplies :

Article 1348 du Code civil : « La compensation peut être prononcée en


justice, même si l'une des obligations, quoique certaine, n'est pas encore
liquide ou exigible.
A moins qu'il n'en soit décidé autrement, la compensation produit alors ses
effets à la date de la décision. »

Cette compensation anticipée prend, en principe, effet lors de la


date de la décision du juge. Mais si le juge en décide autrement, alors elle pourra
être différée comme le prévoit l’article ci-dessus.
Chapitre 3
La compensation conventionnelle

L’article 1348-2 prévoit la compensation conventionnelle :

Article 1348-3 du Code civil : « Les parties peuvent librement convenir


d'éteindre toutes obligations réciproques, présentes ou futures, par une
compensation ; celle-ci prend effet à la date de leur accord ou, s'il s'agit
d'obligations futures, à celle de leur coexistence. »

Même si le texte n’invoque que la réciprocité, la fongibilité et le caractère certain de


la créance restent également exigés. Cette compensation anticipée est la même
que celle effectuée par le juge, mais prend effet à la date de la convention.

Mais le texte prévoit aussi la possibilité d’éteindre des obligations futures par la
compensation. Ici, on parle de la création de la connexité entre les dettes qui
devienent donc connexes.
Titre 3
La compensation des dettes connexes

Chapitre 1
La notion de connexité

Le Code civil évoque la connexité, mais sans la définir clairement. La jurisprudence


établit généralement la connexité lorsque les
deux obligations dérivent d’un même rapport juridique. Cette notion peut s’illustrer à
travers :

● Un contrat, puisque les deux personnes sont créancières l’une de l’autre.


La compensation pourra ici opérer entre l’obligation de verser une somme
d’argent et l’obligation de verser des dommages et intérêts. La connexité
peut ici s’illustrer entre mon obligation de paiement et la créance de
dommages et intérêts que le vendeur me doit si il a mal exécuté son
obligation
● Des relations extra-contractuelles, en cas de dommages causés par
exemple. Mais lorsque je suis le créancier d’un contrat et débiteur d’une
autre obligation, la connexité est exclue

Chapitre 2
Les effets de la compensation

La compensation intervient même si l’une des obligation n’est pas liquide, ni


exigible. Celle-ci opère d’ailleurs à la date à laquelle l’une des obligations est
devenue exigible. La compensation des dettes connexes peut aussi intervenir la ou
la compensation légale ne le peut pas, en raison de son domaine plus large
(exemple : lors de procédures collectives, lors d’une cession de créance)
Partie 2
La confusion

Deux textes prévoient la confusion au sein du Code civil : le premier la décrit et le


second évoque ses effets particuliers

Article 1349 du Code civil : La confusion résulte de la réunion des qualités


de créancier et de débiteur d'une même obligation dans la même personne.
Elle éteint la créance et ses accessoires, sous réserve des droits acquis par ou
contre des tiers

Titre 1
Présentation
La confusion résulte de la réunion des qualités de créancier et de débiteur d’une
même obligation dans la même personne. Cette opération est possible dans trois
situations :

● Le décès, lorsqu’un débiteur est héritier du défunt (exemple : j’ai emprunté


de l’argent à ma maman). Ici, la confusion est présente lorsque la créance à
rembourser m’est attribuée lors de la succession. Le droit des successions
favorise d’ailleurs la confusion.

● En cas de fusion absorption entre personnes morales, ce procédé permet à


une société A d’absorber les droits et les dettes d’une société B, ce qui
permet à la société A de bénéficier de la confusion

● En cas de cession de créance avec un prix

Titre 2
Confusion et solidarité passive

Cette confusion peut arriver lorsque plusieurs débiteurs sont tenus solidairement,
confusion provoquant une extinction partielle de la dette. Par exemple, si deux co-
débiteurs sont tenus solidairement à 500€, la confusion permettra à l’un des co-
débiteurs A de se libérer de sa dette, du fait que la créance est atterrie dans son
patrimoine. L’autre co-débiteur B qui ne bénéfice pas de cette confusion pourra se
retourner contre le co-débiteur A, qui devient alors son créancier.
Partie 3
La prescription

Titre 1
Introduction

La prescription apparait au sein du Code civil et a dernièrement été réformée en


2008 en raison d’un manque de cohérence du droit de la prescription. Pour autant,
cette réforme n’a pas eu de grand succès. Le délai de prescription peut varier en
fonction de divers éléments, ce qui rend le droit de la prescription assez variable…

La prescription exctinctive se définit comme l’impossibilité pour une personne de se


prévaloir d’un droit après être restée inactive pendant une certaine durée. Ainsi, une
créance ne pourra pas être réclamée après l’extinction de son délai de prescription.

Titre 2
Justification

La prescription en matière civile s’explique par deux raisons :

● Une situation ayant duré ne doit pas être remise en cause, comme une
forme de consolidation. Ce fondement s’explique aussi par l’idée de «
sanction » du créancier qui a laissé une telle inactivité durant trop
longtemps.
● En vertu de la pérennité de la preuve, puisque sans prescription, la preuve
d’un paiement devrait être gardée indéfiniment

Titre 3
Notion

La prescription exctinctive doit se distinguer de la forclusion. Ce mécanisme éteint


également par le temps un droit. Néanmoins, le régime de la forclusion est différent.
L’article 2200 prévoit à ce titre qu’un délai de forclusion ne peut pas être suspendu
par exemple.
Titre 4

Régime

Chapitre 1
L’écoulement d’un délai

Section 1
Dans le droit commun

I. Délai de droit commun

Le délai de droit commun est prévu à l’article 2224 du Code civil :

Article 2224 du Code civil : Les actions personnelles ou mobilières se


prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou
aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

D’après cet article, la prescription est acquise au bout de 5 ans, mais dans
certaines situations, le point de départ du délai de prescription peut être différé :

● Lors d’une condition suspensive


● Lors d’un terme suspensif
● En cas de personne incapable d’agir

II. Le délai butoir


Le problème de la prescription reste son point de départ, à partir de quand débute
le délai de prescription, et quand s’éteint-il ? Le Code civil prévoit notamment que le
report du point de départ de la prescription ne peut pas porter au delà de 20 ans à
partir de la naissance du droit. Ainsi, le délai butoir est assez incertain, puisque dans
tous les cas, l’action sera prescrite au bout de 20 ans.

Même lors de terme ou d’une condition suspensive, le délai butoir est écarté,
notamment du fait de certaines opérations prévues pour de longs délais (exemple :
un prêt de 50 ans)

Le seul cas qui pourrait venait appliquer le délai butoir de rapporte à la présence
d’un événement de force majeure

Section 2
Les exceptions

L’article 2224 prévoit qu’en cas d’action qui touche un immeuble, le délai de
prescription sera différent. D’autres exceptions sont prévues également dans le
Code de la consommation, notamment au détriment des professionnels

Section 3
Les aménagements conventionnels

Les parties peuvent prévoir et aménager la prescription. Pour autant, celle-ci ne doit
pas être inférieure à 1 an, ni supérieure à 10 ans. Certains aménagements ne sont
pour autant pas autorisés, surtout en ce qui concerne les salaires des travailleurs.
De plus, les parties peuvent ajouter des causes de suspension ou d’interruption, qui
viendront allonger le délai de prescription.

Mais dans l’hypothèse d’un délai de prescription légalement prévu, on ne sait pas
trop si les parties peuvent prévoir ou non ces causes…
Chapitre 2
Les perturbations

Qu’est ce qui fait qu’un délai de prescription ne pourra pas s’écouler de manière
régulière ?

Section 1
La suspension

La suspension correspond à un arrêt temporaire du délai de prescription, sans pour


autant effacer le délai déjà écoulé (exemple : je suis créancière d’une personne qui
devient mon époux. Ici, le délai de prescription ne pourra repartir qu’au moment
d’un divorce) Mais dans le cas particulier des créances périodiques qui
s’accumulent, la suspension est écartée (article 2235)

Section 2
L’interruption

Ici, le délai acquis sera supprimé et enclenchera un nouveau délai. Cette opération
est un véritable avantage pour le créancier, et celle-ci se produit notamment lorsque
le créancier a manifesté sa volonté d’être payé, par une demande en justice par
exemple.

Chapitre 3
Les effets de la prescription

La prescription est véritable moyen de défense pour le débiteur, en matière de


procédure civile, l’on parle d’une fin de non-recevoir. Mais même si l’obligation du
débiteur demeure, celui-ci peut aussi renoncer au délai de prescription.

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