Fiche TD 5 Sources Internes
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Année 2023-2024
I – DOCUMENTS :
II – EXERCICE :
A lire :
- Art. 61 :
disposition législative porte
Les lois organiques, avant leur atteinte aux droits et libertés que la
promulgation, les propositions de Constitution garantit, le Conseil
loi mentionnées à l'article 11 avant constitutionnel peut être saisi de
qu'elles ne soient soumises au cette question sur renvoi du
référendum, et les règlements des Conseil d'État ou de la Cour de
assemblées parlementaires, avant cassation qui se prononce dans un
leur mise en application, doivent délai déterminé.
être soumis au Conseil Une loi organique détermine les
Constitutionnel qui se prononce conditions d'application du présent
sur leur conformité à la article.
Constitution. - Art. 62 :
Aux mêmes fins, les lois peuvent
être déférées au Conseil Une disposition déclarée
Constitutionnel, avant leur inconstitutionnelle sur le
promulgation, par le Président de fondement de l'article 61 ne peut
la République, le Premier Ministre, être promulguée ni mise en
le Président de l'Assemblée application.
Nationale, le Président du Sénat ou Une disposition déclarée
soixante députés ou soixante inconstitutionnelle sur le
sénateurs. fondement de l'article 61-1 est
Dans les cas prévus aux deux abrogée à compter de la
alinéas précédents, le Conseil publication de la décision du
Constitutionnel doit statuer dans le Conseil constitutionnel ou d'une
délai d'un mois. Toutefois, à la date ultérieure fixée par cette
demande du Gouvernement, s'il y a décision. Le Conseil constitutionnel
urgence, ce délai est ramené à huit détermine les conditions et limites
jours. dans lesquelles les effets que la
Dans ces mêmes cas, la saisine du disposition a produits sont
Conseil Constitutionnel suspend le susceptibles d'être remis en cause.
délai de promulgation.
Les décisions du Conseil
Constitutionnel ne sont
- Art. 61-1 : susceptibles d'aucun recours. Elles
s'imposent aux pouvoirs publics et
Lorsque, à l'occasion d'une à toutes les autorités
instance en cours devant une administratives et juridictionnelles.
juridiction, il est soutenu qu'une
1°) d'annuler le décret n° 2006-993 du 1er août 2006 relatif aux lacs de
montagne pris pour l'application de l'article L. 145-1 du code de
l'urbanisme ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 12 000 euros
au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
[…]
DECIDE:
--------------
(…) Sur le moyen tiré de ce que l'art. 36 de la loi du 28 févr. 1934, en vertu
duquel ont été pris les décrets des 4 avr. et 10 mai 1934, serait contraire aux
lois constitutionnelles :
*1* Considérant qu'en l'état actuel du droit public français, ce moyen n'est
pas de nature à être discuté devant le Conseil d'État statuant au contentieux
(…)
Par sa décision n° 2013-314 P QPC application des actes pris par les
du 4 avril 2013, le Conseil institutions de l'Union européenne
constitutionnel a, pour la première ». Par ces dispositions, le
fois, saisi la Cour de justice de constituant a spécialement entendu
l'Union européenne d'une question lever les obstacles constitutionnels
préjudicielle. s'opposant à l'adoption des
Le Conseil constitutionnel avait été dispositions législatives découlant
saisi le 27 février 2013 par la Cour nécessairement de la décision-
de cassation d'une question cadre du 13 juin 2002 relative au
prioritaire de constitutionnalité mandat d'arrêt européen. Par suite,
(QPC) posée par M. Jeremy F. lorsqu'il est saisi de dispositions
relative à la conformité aux droits législatives relatives au MAE, il
et libertés que la Constitution appartient au Conseil
garantit du quatrième alinéa de constitutionnel de contrôler la
l'article 695-46 du code de conformité à la Constitution des
procédure pénale (CPP). seules dispositions législatives qui
procèdent de l'exercice, par le
L'article 695-46 du CPP porte sur législateur, de la marge
le mandat d'arrêt européen (MAE) d'appréciation que prévoit l'article
institué par la décision-cadre du 34 du Traité sur l'Union
Conseil de l'Union européenne du européenne.
13 juin 2002. La loi du 9 mars 2004
a inséré dans le code de procédure Dans sa décision n° 2013-314 P
pénale les règles relatives à ce QPC du 4 avril 2013, le Conseil
mandat. L'article 695-46 prévoit constitutionnel a relevé que la
qu'après la remise d'une personne décision-cadre du 13 juin 2002 ne
à un autre État membre de l'Union comporte pas de dispositions
européenne en application d'un relatives à un recours contre la
MAE, la chambre de l'instruction décision prise par l'autorité
statue dans un délai de trente judiciaire d'extension des effets
jours, « sans recours », sur une d'un MAE. La décision-cadre ne
demande aux fins soit d'étendre les précise pas davantage si cette
effets de ce mandat à d'autres décision de l'autorité judiciaire est
infractions, soit d'autoriser la provisoire ou définitive. Le Conseil
remise de la personne à un État n'était ainsi pas à même de tirer les
tiers. conséquences de l'article 88-2 dans
la mesure où il ne peut déterminer
Le requérant soutenait que si les dispositions de l'article 695-
l'absence de recours contre la 46 du CPP qui prévoient que la
décision de la chambre de chambre de l'instruction « statue
l'instruction porte notamment sans recours » sont une application
atteinte au droit à un recours nécessaire de l'obligation faite par
juridictionnel effectif. la décision-cadre de prendre cette
Cette QPC s'inscrivait dans le décision au plus tard trente jours
cadre particulier de l'article 88-2 après réception de la demande.
de la Constitution qui dispose : « La Cour de justice de l'Union
La loi fixe les règles relatives au européenne est seule compétente
mandat d'arrêt européen en
pour se prononcer à titre l'autorisation de la remise de la
préjudiciel sur l'interprétation des personne à un État tiers. La Cour a
dispositions de la décision-cadre. seulement posé que la décision
Aussi, afin d'être en mesure définitive doit être adoptée dans les
d'exercer son contrôle de délais visés à l'article 17 de la
constitutionnalité de l'article 695- décision-cadre, c'est-à-dire au plus
46 du CPP, le Conseil tard dans les 90 jours.
constitutionnel a-t-il saisi la Cour Au regard de cette interprétation,
de justice de l'Union européenne le Conseil constitutionnel a pu
(CJUE) de la question de savoir si déduire, dans sa décision n° 2013-
les articles 27 et 28 de la décision- 314 QPC du 14 juin 2013, qu'en
cadre du 13 juin 2002 relative au prévoyant que la décision de la
mandat d'arrêt européen, doivent chambre de l'instruction est rendue
être interprétés comme s'opposant « sans recours », le quatrième
à ce que les États membres alinéa de l'article 695-46 du CPP ne
prévoient un recours contre la découle pas nécessairement des
décision de l'autorité judiciaire qui actes pris par les institutions de
statue, dans un délai de trente l'Union européenne relatifs au
jours à compter de la réception de mandat d'arrêt européen. Il
la demande, soit afin de donner son appartenait ainsi au Conseil
consentement pour qu'une constitutionnel, saisi sur le
personne soit poursuivie, fondement de l'article 61-1 de la
condamnée ou détenue en vue de Constitution, de contrôler la
l'exécution d'une peine ou d'une conformité de cette disposition aux
mesure de sûreté privatives de droits et libertés que la
liberté, pour une infraction Constitution garantit.
commise avant sa remise en
exécution d'un mandat d'arrêt Le Conseil a jugé qu'en privant les
européen, autre que celle qui a parties de la possibilité de former
motivé sa remise, soit pour la un recours en cassation contre
remise d'une personne à un État l'arrêt de la chambre de
membre autre que l'État membre l'instruction statuant sur la
d'exécution, en vertu d'un mandat demande mentionnée ci-dessus, les
d'arrêt européen émis pour une dispositions contestées de l'article
infraction commise avant sa 695-46 du CPP apportent une
remise. restriction injustifiée au droit à
exercer un recours juridictionnel
Par un arrêt du 30 mai 2013, la effectif. Par suite, le Conseil a jugé
CJUE a précisé l'interprétation de les mots « sans recours » figurant
la décision-cadre du 13 juin 2002 au quatrième alinéa de l'article
relative au mandat d'arrêt 695-46 du CPP contraires à la
européen. Elle a jugé que cette Constitution. Cette déclaration
décision-cadre ne s'oppose pas à ce d'inconstitutionnalité, qui prend
que les États membres prévoient effet à compter de la publication de
un recours suspendant l'exécution la décision du Conseil, est
de la décision de l'autorité applicable à tous les pourvois en
judiciaire qui statue, dans un délai cassation en cours à cette date.
de trente jours à compter de la
réception de la demande, afin de La décision du 4 avril 2013 de
donner son consentement soit pour renvoi d'une question préjudicielle
l'extension des effets du mandat à à la CJUE ne modifie pas l'état du
d'autres infractions, soit pour droit et la primauté de la
Constitution dans l'ordre interne Conseil constitutionnel a donné une
(n° 2004-505 DC du 19 novembre preuve supplémentaire de sa
2004). C'est pour exercer son volonté de dialogue des juges en
contrôle de conformité de la loi à la saisissant la Cour de justice de
Constitution que le Conseil l'Union européenne, dans le cadre
constitutionnel a saisi la CJUE. de son office de juge
Celle-ci est en effet compétente constitutionnel, d'une première
pour fixer l'interprétation du droit question préjudicielle. Ce dialogue
de l'Union et le Conseil n'avait pas est aujourd'hui mutuellement
à se substituer à elle en ce fécond comme l'a montré la
domaine. De même, cette décision jurisprudence dite économie
ne revient pas sur l'office du juge numérique (n° 2004-496 DC du 10
constitutionnel distinct de l'office juin 2004) ou la décision Melki de
du juge administratif ou judiciaire la CJUE du 10 juin 2010 jugeant la
qui est juge conventionnel. Cette QPC conforme au droit de l'Union
distinction issue de la dans les mêmes conditions que
jurisprudence dite IVG (n° 74-54 celles énoncées par le Conseil
DC du 15 janvier 1975) a été constitutionnel (n° 2010-605 DC du
reprise par le Parlement lors de la 12 mai 2010).
réforme de la question prioritaire
de constitutionnalité.
Avec la décision n° 2013-314 QPC
du 4 avril 2013 (M. Jeremy F.), le
Art. 13 :
Art. 19 :
Les actes du Président de la République autres que ceux prévus aux articles
8 (1er alinéa), 11, 12, 16, 18, 54, 56 et 61 sont contresignés par le Premier
Ministre et, le cas échéant, par les ministres responsables.
Art. 21 :
Art. 22 :
Les actes du Premier Ministre sont contresignés, le cas échéant, par les
ministres chargés de leur exécution.
Art. 37 :
Les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont un caractère
réglementaire.
Les textes de forme législative intervenus en ces matières peuvent être
modifiés par décrets pris après avis du Conseil d'Etat. Ceux de ces textes qui
interviendraient après l'entrée en vigueur de la présente Constitution ne
pourront être modifiés par décret que si le Conseil Constitutionnel a déclaré
qu'ils ont un caractère réglementaire en vertu de l'alinéa précédent.
Art. 38 :
Article 34 :
La loi fixe les règles concernant :
- les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux
citoyens pour l'exercice des libertés publiques; la liberté, le pluralisme et
l'indépendance des médias; les sujétions imposées par la Défense
Nationale aux citoyens en leur personne et en leurs biens;
- la nationalité, l'état et la capacité des personnes, les régimes
matrimoniaux, les successions et libéralités ;
- la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur
sont applicables ; la procédure pénale ; l'amnistie ; la création de
nouveaux ordres de juridiction et le statut des magistrats ;
- l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des
impositions de toutes natures ; le régime d'émission de la monnaie.
La loi fixe également les règles concernant :
- le régime électoral des assemblées parlementaires, des
assemblées locales et des instances représentatives des Français établis
hors de France ainsi que les conditions d'exercice des mandats électoraux
et des fonctions électives des membres des assemblées délibérantes des
collectivités territoriales ;
- la création de catégories d'établissements publics ;
- les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires civils et
militaires de l'Etat
- les nationalisations d'entreprises et les transferts de propriété
d'entreprises du secteur public au secteur privé.
La loi détermine les principes fondamentaux :
- de l'organisation générale de la Défense Nationale ;
- de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs
compétences et de leurs ressources ;
- de l'enseignement ;
- de la préservation de l'environnement ;
- du régime de la propriété, des droits réels et des obligations
civiles et commerciales ;
- du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale.
Les lois de finances déterminent les ressources et les charges de l'État dans
les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique.
Les lois de financement de la sécurité sociale déterminent les conditions
générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de
recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les
réserves prévues par une loi organique.
Des lois de programmation déterminent les objectifs de l'action de l'État.
Les orientations pluriannuelles des finances publiques sont définies par des
lois de programmation. Elles s'inscrivent dans l'objectif d'équilibre des
comptes des administrations publiques.
Les dispositions du présent article pourront être précisées et complétées par
une loi organique.
[…]
35
s'affirme, dès l'abord, la vainqueur ou par la force des
différence entre le problème des circonstances. Elles posaient au
« principes généraux » en droit juge un problème capital :
public et en droit privé : M. Jean applications d'une conception
Boulanger, dans la remarquable renouvelée de l'homme et du
étude qu'il vient de consacrer à pouvoir, ou exceptions provisoires
ce second aspect de la question, à des principes traditionnels
relève très justement que c'est toujours on vigueur, tel était le
dans le Code civil que le juge dilemme. Ainsi posé, il ne
judiciaire doit chercher, avant permettait plus au juge de s'en
tout, les principes ; le juge tenir à une affirmation implicite ;
administratif, lui, ne pouvait les pour sauver l'éthique contestée, il
chercher que dans, une certaine était indispensable de l'affirmer
représentation des rapports entre avec netteté, et de lui donner ses
l'homme et le pouvoir, qu'il titres. Et la même nécessité
trouvait dans son esprit et dans devait s'imposer lorsque la
sa conscience, et qui définissait, à Libération allait, à son tour,
ses yeux, et sur ce terrain, le susciter certaines attitudes
Juste ; cette représentation, difficilement conciliables avec les
d'ailleurs, il ne prétendait principes traditionnels.
nullement la créer ; à vrai dire, et Continuité de la philosophie
jusqu'à ces toutes dernières politique, ou rupture, et départ
années, il ne prenait même pas la vers de nouveaux horizons
peine de l'expliciter, tant elle lui idéologiques ? Tel était l'enjeu du
paraissait aller de soi, et débat. Parce qu'il choisissait,
répondre au sentiment général. d'instinct, la continuité de la
Le recours pour excès de pouvoir conception libérale qu'impliquait
avec ses divers développements, - toute son oeuvre, le juge devait
détournement de pouvoir, trouver le procédé technique lui
contrôle de l'exactitude des permettant de l'assurer : ce fut le
motifs - le droit de la recours explicite aux « principes
responsabilité de la puissance généraux du droit », jusque-là
publique, sont nés et se sont sous-entendus, devenus soudain
développés à partir de quelques des pièces essentielles dans les
grandes notions d'éthique sociale constructions de la jurisprudence.
et de philosophie politique, De plus en plus fréquemment, les
évidentes aux yeux des juges. arrêts allaient fonder sur eux
Laferrière, dans l'Introduction leurs solutions. Si l'on analyse les
déjà citée, note incidemment que décisions où ce procédé est
la base des solutions utilisé, à la lumière des
jurisprudentielles est, lorsque les conclusions des commissaires du
textes font défaut, dans « les Gouvernement, et aussi des
principes traditionnels, écrits ou Etudes et Documents où le
non écrits, qui sont en quelque Conseil d'Etat a livré quelques
sorte inhérents à notre droit aspects essentiels de sa pensée,
public et administratif ». (…) Vint on est amené à donner, de cette
le régime de Vichy, et, avec lui, pensée, les formules suivantes :
un certain nombre de réformes 1° Il existe un corps de principes
qui s'inscrivaient à l'opposé de généraux du droit public
ces principes, dictées par le français ; les arrêts invoquent
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parfois nommément l'un ou comportent les prescriptions d'un
l'autre ; plus souvent, ils se texte formel », règles « à la fois
référent aux « principes généraux obligatoires et imprécises » les
du droit », pris dans leur principes ne peuvent passer dans
ensemble. 2° Ces principes ont le droit positif que moyennant
valeur de droit positif ; ils ont, au l'effort du juge pour « en
minimum, « force législative » ; et déterminer les modalités
le juge est tenu d'en assurer le d'application ». Quels sont, au
respect, en sanctionnant leur fait, ceux qui ont bénéficié de
violation, comme il le fait pour la cette insertion, par l'autorité du
loi écrite. 3° Le fondement de juge, dans le droit positif ? Il
l'autorité ainsi reconnue, aux semble d'ores et déjà qu'on
principes ne se trouve pas dans puisse les ramener à quatre
les textes ; ils sont « applicables groupes principaux. On y
même en l'absence de textes » ; rencontre d'abord les principes
les arrêts et les conclusions sont traditionnels de la philosophie de
formels sur ce point ; il est 1789, séparation des pouvoirs,
curieux de remarquer, en ce sens, égalité des citoyens dans ses
que le Préambule de la diverses applications, libertés
Constitution de 1946, qui eût pu individuelles, y compris une
fournir aux solutions certaine marge de liberté
jurisprudentielles un fondement économique, respect des
écrit, ne semble avoir eu sur elles consciences qui donne son sens à
qu'une incidence très la laïcité de l'Etat, etc. Dans un
exceptionnelle. 4° Le juge ne crée second groupe figurent les
pas les principes ; il en parle principes que le juge
comme de règles objectives, dont administratif découvre dans le
il constate l'existence, et qui ne droit privé ou la procédure civile,
dépendent nullement de sa et qu'il dégage des textes pour les
volonté ; tout se passe comme s'il transposer à l'administration,
s'estimait lié par eux, au même parce qu'il les juge inhérents à
titre que par la loi. Telle semble tout ordre juridique : non-
être la pensée du Conseil d'Etat rétroactivité des règles de droit,
sur ces points essentiels. Mais, en responsabilité pour faute,
se croyant serviteur des autorité de la chose jugée,
principes, il en est, en fait, le nécessité d'une procédure
créateur. Plus exactement, c'est contradictoire avant toute
son action qui, dans la masse sanction, impartialité du juge à
complexe des éléments qui se l'égard de celui qui comparait
partagent la conscience devant lui, s'inscrivent dans ce
nationale, choisit ceux auxquels cadre. Dans les deux autres
va s'attacher la sanction que lui catégories on classerait
seul peut leur donner, et les fait volontiers, d'une part, un groupe
entrer, par là même, dans le droit de principes que le Conseil d'Etat
positif. De plus, la nature, déduit de ce que certains de ses
nécessairement abstraite et commissaires du Gouvernement
générale, du principe, impose au appellent « la nature des choses »
juge un effort pour en déterminer ; il y a une logique interne des
le contenu exact ; dépourvus « de institutions, il y a, d'autre part,
la rigidité et de la précision que des nécessités inhérentes à la vie
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en société, abstraction faite de cas pour certaines des autorités
toute préoccupation éthique : par issues de la Libération, ainsi
là s'expliquent le principe de la qu'en témoignent les tentatives
continuité du service public, le de nationalisation effectuées en
principe du pouvoir de 1945 par les procédés juridiques
réglementation reconnu au chef les plus divers, et les plus
de service, le principe d'une contestables, et surtout
légalité spéciale pour les « l'abondante jurisprudence
circonstances exceptionnelles », suscitée par l'épuration. Ce fut, et
etc. C'est la catégorie du « c'est encore, un arrêt récent vient
nécessaire » ; la dernière serait d'en témoigner, le cas pour les
celle du « juste » à l'état pur, si organismes professionnels,
l'on peut dire ; il est un certain comités d'organisation ou ordres :
nombre d'exigences éthiques que le Conseil d'Etat leur rappelle
le Conseil d'Etat, bien qu'elles ne qu'ils sont liés par l'éthique
découlent ni des principes de commune et le respect des
1789, ni des règles du droit privé, libertés primordiales. Ce dernier
érige en principes généraux : trait accuse encore la similitude
telle est l'affirmation implicite entre l'action de la Cour Suprême
selon laquelle l'Administration est et celle du Conseil d'Etat ; l'une
liée par la recherche de l'intérêt avait à maintenir, contre les
général ; telle est la règle de possibles divergences que la
loyauté qui fonde le contrôle de forme fédérale facilite, ce
l'exactitude des motifs : « minimum d'unité dans la
l'Administration ne doit pas conception du monde sans lequel
mentir ». Tout cela - l'essentiel du l'unité de l'Etat ne peut se
droit administratif - constitue maintenir ; mais, dans l'Etat
bien, si diffuse qu'elle puisse être, unitaire, l'affirmation d'un idéal
une conception de l'homme et du commun n'est pas moins
monde. Cette conception n'est nécessaire ; et si cet idéal n'a pas
nullement systématique, encore grand chose à redouter des
qu'elle se rattache à la tradition collectivités locales
libérale de la façon la plus étroite décentralisées, la menace peut
; elle a varié dans le temps, venir, aujourd'hui surtout, des
s'écartant notamment de collectivités professionnelles
l'orthodoxie du libéralisme organisées, voire des entreprises
économique qu'elle avait personnalisées dont l'idéologie
longtemps accepté. Dans sa technocratique risque d'être le
forme actuelle, la seule volonté climat naturel. Le Conseil d'Etat,
du juge en fait une éthique en comme la Cour Suprême, joue
quelque sorte officielle, dont nul ainsi, dans l'ensemble de la
dans l'Etat n'est présumé vouloir Nation, un rôle d'unificateur. Si
s'affranchir. Particulièrement donc on admet que l'un des traits
remarquable est, en ce sens, essentiels du gouvernement des
l'effort du juge pour soumettre à juges réside dans le pouvoir que
la règle les organismes neufs, peu ceux-ci s'attribuent de définir et
portés à la respecter, étant donné de maintenir une idéologie
le climat idéologique dans lequel nationale, et de préserver, en en
ils ont pris naissance. Passé le imposant le respect, les assises
régime de Vichy, ce fut encore le éthiques de l'unité de l'Etat, on
38
acceptera peut être, entre la volonté du législateur ; peut-être
juridiction constitutionnelle n'est-il pas, pour autant,
américaine et le haut tribunal totalement désarmé devant elle ;
administratif français, la peut-être peut-on, sans paradoxe,
possibilité d'un rapprochement. parler du caractère super-
législatif des principes généraux
II L'objection surgit d'elle-même : du droit public. Un point est
ce qui fonde l'efficacité de la Cour certain : (…) les conclusions des
suprême, ce qui a permis de commissaires du Gouvernement
parler de son gouvernement, c'est formulent l'idée que les principes
son autorité vis-à-vis de la loi : généraux jouissent, dans l'ordre
l'éthique qu'elle a développée en juridique, d'une prééminence
prenant prétexte de la naturelle » ; au moment même où
Constitution emprunte sa valeur ils rejettent tout contrôle de la loi
pratique à la primauté de la loi par le juge, les déclarent «
constitutionnelle sur la loi supérieurs aux lois ». Et cette
ordinaire ; la Cour gouverne intime conviction trouve, pour se
parce qu'elle peut imposer son manifester au plan du droit
éthique au législateur. Or, le positif, un certain nombre de
Conseil d'Etat est sans pouvoir à moyens. Il faut tout d'abord
l'égard des représentants de la réserver la part de
volonté nationale ; il suffit d'un l'interprétation ; lorsque le texte
texte de loi pour mettre en échec législatif l'autorise, ou même,
ses principes généraux. Il peut parfois, la tolère, c'est dans ses
bien affirmer que ceux-ci ont « principes généraux que le Conseil
valeur législative » : le d'Etat va chercher les éléments
gouvernement des juges ne de sa construction ; il semble
commence qu'avec la valeur exclure a priori l'idée qu'une
superlégislative de l'éthique des autre éthique ait pu inspirer le
juges. En France, le dernier mot texte ; il le réintroduit dans le
reste à la loi ; le rapprochement climat idéologique qui est, à ses
ébauché tourne court. Certes, yeux, sous-jacent à la vie publique
l'objection est de poids ; elle peut toute entière. L'exemple le plus
d'ailleurs se prévaloir des termes ancien, et l'un des plus fameux, à
employés par certains arrêts ceci près qu'il met en cause un
fidèles aux formules classiques du décret-loi et non une loi véritable,
primat de la loi ; et pourtant, en est sans doute dans l'audace
serrant de plus près l'analyse de avec laquelle le Conseil d'Etat a
la jurisprudence, on est conduit à réintégré d'autorité les décrets-
se demander si la conviction qui lois du 5 novembre et du 28
anime le Conseil d'Etat touchant décembre 1926, ouvrant un
le caractère fondamental des champ nouveau aux activités
principes ne se traduit pas, au économiques des communes,
plan du droit positif, à l'égard de dans les perspectives du
la loi elle-même, dans les cas, libéralisme traditionnel auquel il
tout au moins, où elle s'écarte de restait encore attaché. Il en est
ceux auxquels le juge attache un d'autres, plus récents, qui
prix particulier. Le juge n'a concernent des textes
évidemment pas le pouvoir de indiscutablement législatifs.
mettre directement en échec la S'agit-il d'interpréter l'article 2
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de l'ordonnance du 6 décembre doctrinal, l'autorité du principe
1943 en matière d'épuration ? On est sauvegardée ; au point de vue
connaît le texte : « La commission pragmatique, le champ
entend les personnes qui lui sont d'application de la loi sera
déférées », formule concise et mesuré aussi étroitement que
dont le moins qu'on puisse dire possible, en vertu de la maxime
est qu'elle n'accorde aux suspects d'après laquelle toute exception
qu'un minimum de garanties ; est d'interprétation stricte. Ce fut
mais il suffit au Conseil d'Etat l'attitude fréquemment adoptée à
qu'elle n'exclue pas toute l'égard des lois de Vichy (…). Le
possibilité de rattachement au procédé a survécu, dans certains
principe du respect des droits de cas, aux circonstances politiques
la défense : il va réintroduire au qui l'avaient suscité. Il arrive
profit des accusés toutes les même que le juge témoigne, à
garanties qu'exige l’éthique l'égard de la loi, d'une audace
traditionnelle. S'agit-il de plus grande encore lorsqu'elle
déterminer le climat juridique et heurte de front un principe qu'il
politique dans lequel vont se juge essentiel. On se souvient de
mouvoir des ordres l'étonnant arrêt du 17 févr. 1950,
professionnels ? Il suffit au Min. de l'Agriculture c/Dame
Conseil d'Etat que le législateur Lamotte (…) : en présence d'un
ait choisi, pour la désignation de texte législatif qui dispose que la
leurs dirigeants, le procédé de mesure visée par lui « ne
l'élection ; il se juge autorisé à peut .faire l'objet d'aucun recours
leur imposer toute l'idéologie administratif ou judiciaire », le
démocratique ; dès lors, la Conseil d'Etat affirme que cette
disposition d'un Code des devoirs disposition « n'a pas exclu le
professionnels interdisant tout recours pour excès de pouvoir
droit de libre critique, sera (...), qui est ouvert même sans
illégale : le législateur n'a pas pu, texte contre tout acte
avec l'élection, ne pas vouloir administratif, et qui a pour effet
introduire dans l'ordre les normes d'assurer, conformément aux
de liberté qui en sont principes généraux du droit, le
inséparables dans la démocratie respect de la légalité » ;
classique1. Mais enfin, quelque l'interprétation « minimisante »
constructives que soient ces et l'appréciation restrictive sont
interprétations, il est, des cas où poussées ici jusqu'au point où
le procédé s'avère inutilisable ; la elles aboutissent à effacer le
loi va contre les principes, et texte. Ce n'est pas seulement,
nulle exégèse ne peut voiler cette d'ailleurs, devant l'autorité des
contradiction. Le juge, principes généraux que le juge
cependant, n'estime pas la partie administratif tend à faire fléchir
perdue ; il lui resté un moyen les commandements du
ultime pour affirmer la primauté législateur : c'est aussi devant la
des principes, et maintenir à son nécessité. Entre la théorie des
affirmation des conséquences au circonstances exceptionnelles et
plan du droit positif. Ce moyen la montée des principes
consiste à entendre la loi comme généraux, il y a une évidente
une exception, qui laisse intacte parenté. Lorsque le juge
la règle générale ; au plan proclame, au vu des
40
circonstances, la légalité d'une rétablir les proportions exactes,
décision administrative et replacer la jurisprudence que
manifestement contraire à la l'on vient d'évoquer parmi la
règle écrite, il ne fait masse des arrêts qui ne font
qu'appliquer un principe général, qu'appliquer fidèlement la règle
celui qu'un de ses commissaires écrite. Enfin, il ne faut pas oublier
du Gouvernement formulait en que cette jurisprudence, en
ces termes : « Des circonstances pratique, a surtout reçu
exceptionnelles de temps et de application à l'égard de lois
lieu peuvent rendre légitimes des émanant soit d'un pouvoir
décisions qui, en période contesté, soit d'un pouvoir qui ne
normale, en vertu de la législation pouvait se réclamer
normale, ne le seraient pas » (…). expressément d'une origine
Mais ici, c'est le contenu même élective. « Le Conseil d’Etat
du principe qui tient en échec le pouvait, ou considérer les lois de
primat de la loi. Et comment ne Vichy comme instituant un
pas rattacher au « gouvernement régime nouveau dans notre droit
des juges » les décisions par public, ou les regarder au
lesquelles ceux-ci assignent des contraire comme des mesures
bornes à la légalité du législateur, apportant des dérogations aux
se réservant de définir eux- principes demeurés en vigueur,
mêmes les éléments de la légalité et, dans ce cas, annuler les
nouvelle qui régira les pouvoirs décisions prises en
élargis de l'Administration ? méconnaissance de ces principes
qui n'étaient pas fondées sur une
III Il serait fâcheux, pour la part disposition législative expresse,
de vérité que recèlent peut-être et interpréter restrictivement les
les analyses qui précédent, d'en lois édictées, en y voyant des
forcer les termes. Les tendances mesures d’exception ». D'autre
que l'on vient de révéler dans la part, il n'est d'action «
jurisprudence ne sauraient gouvernementale » que là où
inquiéter ni le législateur, ni le existent la rapidité et l'autorité.
Gouvernement ; ce n'est pas au Gouverner, c'est agir dans et sur
plan constitutionnel que se situe le présent : or, l'action du Conseil
leur principal intérêt, c'est au d'Etat, tant que le Parlement ne
plan, plus serein, de la théorie consentira pas à s'intéresser à la
juridique. Ce n'est pas au plan réforme de compétence qui
constitutionnel ; pour que s'impose, conservera un
s'instaure un gouvernement des caractère rétrospectif qui
juges digne de ce nom, encore suffirait, à lui seul, à rassurer
faut-il que le juge veuille ceux que pourraient surprendre
gouverner, et qu'il en ait les ses audaces. Les arrêts les plus
moyens. Or, il est superflu de hardis, lorsqu'ils minimisent la
décerner au Conseil d'Etat un portée de lois déjà abrogées à la
brevet de civisme, et d'affirmer date à laquelle ils interviennent,
qu'il n'existe en son sein nulle ne font plus guère figure que de
volonté de renverser les pouvoirs censures platoniques. Encore ces
établis... D'ailleurs, toute analyse décisions ne seront-elles
implique un grossissement du exécutées que si l'Administration
phénomène analysé : il faut y consent ; son mauvais vouloir
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aboutit, trop souvent, malgré les sociale ; il est un effort pour
efforts du juge, à minimiser en assurer la relève de la Loi dans
pratique la portée de ses une fonction qu'elle remplit mal,
décisions. Au plan politique, il et qui doit être remplie. L'effort
serait donc absurde de est-il heureux ? N'y a-t-il pas,
surestimer les conséquences de dans les principes généraux, un
l'attitude qu'on vient d'analyser. élément d'incertitude grave, une
Au plan doctrinal, il en va tentation pour l'arbitraire du
autrement, et les perspectives juge ? N'y a-t-il pas plus de
s'ouvrent en foule : invitation à sécurité, plus de stabilité pour
réviser certaines affirmations l'individu dans le règne de la loi,
traditionnelles sur la hiérarchie même mal faite, que dans l'action
des sources en droit administratif du juge, même bienfaisante ? On
; rapprochement avec le droit en peut discuter ; le fait n'en
privé qui pose la question de demeure pas moins : dans bien
l'unité des principes du droit des cas, la suprême garantie de la
français par delà les divergences liberté des Français réside
du droit public et du droit privé ; aujourd'hui dans l'attachement de
plus généralement, rôle et nature leur juge administratif aux
des principes dans un système principes du libéralisme. « C'est
juridique, et qui ne voit les peu », dirait Martin. Mais
incidences de ces problèmes sur Pangloss, songeant qu'après tout
les grandes options doctrinales, la règle est morte, et que
positivisme ou droit naturel? De l'homme seul lui donne force et
façon plus immédiate, les vie, répondrait : « C'est
tendances jurisprudentielles beaucoup ».
analysées mettent en plein relief
l'une des règles fondamentales de
tout ordre juridique. Une des
fonctions essentielles du Droit est
de créer de la sécurité ; or, il
n'est pas de sécurité dans
l'instabilité. La loi écrite,
longtemps, a pu, par sa généralité
et sa permanence, assurer cette
fonction stabilisatrice. Mais la loi
mouvante, la loi particulière, la
loi mal faite des années que nous
vivons, la loi décevante qui est
trop souvent la nôtre, ne suffit
plus à créer la stabilité et la
certitude que la vie sociale attend
du Droit. Ce sont pourtant des
biens nécessaires. Le réflexe du
juge est de les chercher ailleurs,
dans une zone qui échappe à la
précarité, au règne du détail, au «
déclin du droit » ; le recours aux
principes généraux traduit sans
doute, avant tout, cette nécessité
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