École Pratique D'études Bibliques. Revue Biblique. 1892. Volume 20.
École Pratique D'études Bibliques. Revue Biblique. 1892. Volume 20.
École Pratique D'études Bibliques. Revue Biblique. 1892. Volume 20.
INTERNATIONALE
Typographie Firmin-Didot et C". — Paris.
NOUVELLE SERIE HUITIEME ANNEE TOME AIII
REVUE BIBLIQUE
INTERNATIONALE
PUBLIEE PAR
PARIS
LIBRAIRIE VICTOR LECOFFRE
J. GABALDA ET C^^
RUE BONAPARTE. 90
1911
OCT 1 7 1959
LES ODES DE SALOMON
TEXTE [suite et fin) (1).
XXI
'
J'ai levé les bras en haut, vers la grâce du Seigneur, car il a
rejeté mes chaînes loin de moi; mon protecteur m'a élevé vers sa
grâce et vers son salut.
'J'ai dépouillé l'obscurité et revêtu la lumière; ^ mes membres ont
été (réunis) à mon âme sans éprouver ni douleur, ni angoisse, ni
même soutfrance.
* Surtout la science du Seigneur m'a servi d'auxiliaire, ainsi que
sa communion incorruptible.
dans sa lumière, j'ai marché devant lui,'' et je
^J'ai été exalté
suis arrivé près lui, en le louant et en le glorifiant.' Mon cœur a
de
débordé; il a envahi ma bouche, il a jailli sur mes lèvres; l'exulta-
tion du Seigneur s'est accrue sur mon visage, ainsi que sa louange. —
Alléluia !
(1) Depuis la publication de la |»reinière partie de ma traduction (/?. B., octobre l'JlO).
j'ai eu connaissance des articles ou notes de Barnes [Journal of theological studies,
juillet 1910), F. Schulthess (S.). Gunkel (G.) et Gressmann [Zeitschrift fur die. neutes-
fcnuenUiche Wissenschoft, juillet 1910) et de la traduction de Ungnad et Staerk [Die
Oden Salomos : Bonn, 1910) (U.J. J'indiquerai plus tard quelles corrections m'a suggérées,
pour cette première partie, l'utilisation de ces travaux. Aucune d'elles n'égale en importance
la traduction proposée par M-' Batilfol de l'incompréhensilile passage (Ode ux, v. 8) :
« comme un homme » ; il faut comprendre : « elle enfanta un semblant d'homme par la vo-
lonté (de Dieu); elle enfanta en ostension ». lûv*a*.L répond aux mots grecs àvàSsi^i;,
:
àîiôSsi?!;, êvoeili;, OiioTjTiwat;, itSsiYtia. 11 pourrait bien avoir ici le sens d' « épiphanie ».
gneur, mais )Njju-.io traduit également sjvectk;. Le sens serait que le psalmiste. en véri-
table gnostique, a été préservé de la mort par sa gnose et son union mystique avec Dieu
(y.otvwvta àçQapTÔç).
v. 5. j'ai marché, ms. : J'ai agi. Mais Schulthess remarque avec raison que .jl». n'a pas
de sens absolu ; il corrige :
lvj^.
7. débordé, dans le sens de ps. xlv, v. 1. C'est le même mot. Sa louange, ou : sa gloire.
Il n'est pas aisé de décider entre ces deux sens.
6 REVUE BIBLIQUE.
1 C'est lui qui me fait descendre des hauteurs et me fait monter des
bas lieux; - c'est lui aussi qui rassemble ce qui est au milieu, et me le
lance. C'est lui qui a dispersé mes ennemis et mes adversaires; ^ c'est
^
lui qui m'a donné pouvoir sur les liens pour que je les délie; ^ c'est
lui qui a meurtri par mes mains le dragon aux sept tètes, et il m'a
fait fouler aux pieds ses racines, pour que je dctruise sa semence.
corps; 1" ils devinrent solides et tu leur as donné les énergies vitales.
XXII. — Cette ode offre d'assez graves difficultés. Le texte copte est très utile à con-
sulter. En général il présente de meilleures leçons, et surtout il fournit quel([ues mots de
1 original grec. On peut conseiller létude de cette ode aux critiques qui sont portés à
exagérer la valeur de la version svriaijue.
Des hauteurs: jajoute les points du jiluriel j>ar analogie avec les autres mots: la
V. 1.
syntaxe adoptée est celle du Copte.
V. 2. Très obscur. Le ms. porte et c'est lui qui rassemble les choses qui sont au mi- :
lieu, et il me les jette. Copte c'est lui qui a porté lu les choses qui se trouvaient au mi-
:
lieu, et qui ma instruit. Partant de cette version, R. H. corrige p>cîo en )»>o, correction
assez plausible. G. croit (jue le copte a fait un premier contresens en lisant xata-pît : dortbin
tràgt, au lieu de xa^a-pe'. . il ]iurifie; le mystérieux ^^î© du syriatpie = 7:pogi>.).et [lot que
le copte aurait mal traduit encore : il m'instruit. G. traduit lensemble : der das Mit-
tlere reinigt. wrft es mir zu : Celui qui puritie ce qui est au milieu, me le lance. « Ce
qui est au milieu )>, c'est le monde présent, selon la terminologie gnostique, et quant au
nettoyage du monde, ce serait le partage du bon et du mauvais. Tout cela est ingénieux,
mais purement problématique et . à dire vrai, assez peu plausible. Mieux vaut avouer
qu'on ne comprend pas.
V. 3. mes adversaires ; àvTiô-.y.ot (d'après le C".
V. 4. pouvoir : élovdîa ^d'après le C).
V. 5. meurtri : Le verbe syriaque .qi..rf> a plus fréquemment le sens de vaincre, détruire.
Mais le copte fournit le mot grec Tra-câffffciv, frapper. — Tu m'as fait fouler aux pieds, litt. :
V. 7. Litt. : son venin mauvais. Mais le copte porte : reiienuin eiiis qui dicit mahtm.
Qui dicit a disparu du texte syriaque, mais doit y être suppléé.
Les fidèles; litt. ceux qui croient en toi: mais le Copte donne
: -ittoi.
V. 8. Tu les as choisis. Copte : délivrés ;
glose. Il n'est question, on le voit, que de la
résurrection des justes. Tout ce passage est inspiré, parfois littéralement, du ch. 37
dEzéchiel.
V. 9. le monde qui t'appartient: litt. : Ton monde. Gr. : alwv (d'après le C).
V. 10. Litt. : ils devinrent non ébranlés, c'est-à-dire qu'ils acquirent de la stabilité dès
que l'enveloppe du corps les maintint.
.
XXIII
*
La joie est aux saints, et qui la revêtira, si ce nest eux seule-
ment? - La grâce est aux élus, et qui la prendra, si ce n'est ceux qui se
confient en elle dès le principe? ^L'amour est aux élus, et qui le
tion de sa science
"'Et sa pensée fut comme une lettre, sa volonté descendit du Très-
Haut; elle fut envoyée comme une flèche d'un arc, tiré avec force.
''Beaucoup de mains se sont précipitées vers la lettre, pour la ravir.
Les énergies vitales, syr. : des secours pour la vie: x^as de sens. Corri^^er jLojV^i^ en
}iQj, i\>o = Èvîpvr.ia;; ce mot du texte original se trouve dans la version copte.
V. 11. Immortelle était ta route. Le grec portait sans doute £v à;.6ap7Îa f,v ooo; aov. La
suite est des plus obscures, aussi bien dans le copte que dans le syriaque. Avec Schulthess
je maintiens la ponctuation du copte et je traduis Trpôaw-ov (jov ^30,^3) par ta personne, :
Pour la corruption (sans doute =î; sSôpav', c'est-à-dire pour la mort. D'immortel il est
:
devenu mortel.
Il y a. dans ce passage, une allusion évidente à la préexistence et a la Rédemption. On
remarquera que cette rédemidion a une valeur cosmologique. Il est impossible de ne pas
comparer la lin de l'ode xxii avec II Petr. 11-13; le parallélisme est presque parfait.
v. 12. .\u lieu de is-ooio, lire : 100,0.
XXIII. — Cette ode est d'une intelligence difficile, tant à cause de l'obscurité du symbo-
lisme, qu'à cause du style lui-même. Le traduction des vv. 10-15 est,de ce chef, assez
problématicjue. car le genre des mots h roue « et « lettre » étant le même en syriaque, il
est impossible du régime, et de décider auquel de ces
de discerner avec certitude le sujet
mots se rapportent les suffixes pronominaux.
La roue pourrait bien être un tourbillon de vent. Le rapprochement suggéré par Flem-
ming 'Ps. Lxx\Ti, 19) çtovrj tt,; p?ovr^; oou Iv Tpo-/âi est ingénieux. Une tempête accom-
:
pagnée d'orage [on sait que dans le langage biblique le tonnerre est la voix de Dieu) accom-
plirait bien les ravages indiqués dans notre texte : renverser tous les obstacles, combler
le lit des rivières, déraciner les arbres. Le signe apparaissant sur la roue, c'est-à-dire sur
le tourbillon, c'est le Seigneur lui-même, peut-être les bras étendus sur la croix (v. ode
ïLU, 2 et xxvn, 2 et aussi xxix, 7 et ixxix, 6j qui vient procéder au jugement messia-
iiique.
8 REVUE BIBLIQUE.
lettre, ceux qui l'avaient vue, pour savoir où elle demeurait et qui la
sommet la tète qui fut dévoilée, le Fils véritable (issu) du Père Très-
Haut ;*" il hérita de l'univers et il le reçut, et le plan de beaucoup
Fils et de l'Esprit Saint, pour régner dans les siècles des siècles. —
Alléluia !
XXIV
^La colombe vola sur le Messie, car il était pour elle sa tète, et
V. 15. les régions : mieux : tous les peuples, sans cloute ïbvr,.
V. 18. On attendrait : car tous les apostats qui s'étaient révoltés s'enfuirent.
XXIV. — V. 1. car il était pour elle sa tète; cet apparent co(i-à-ràne a une valeur mys-
tique.
T. 3 et 4. el ils furent cachés. C'est la traduction littérale de la leçon du ms. La cor-
rection suggérée par RU. : les ajjîmes qui sont cachés, est plausible, mais la construction
est bien défectueuse, comme l'a remarqué Scliulthess. Je préférerais peut-être : t ^ . m i/o :
les abîmes s'ouvrirent et ravages qu'on a décrits plus haut}, et ils ré-
considérèrent (les
clamèrent leur nourriture avec lardeur de femmes qui enfantent. La nourriture qu'ils ré-
clament en vain, c'est le Seigneur qui leur échappe par la résurrection je le crois du moins. ;
LES ODES DE SALOMON. 9
vie. ^D'entre eux fut détruit tout ce qui était défaillant, parce qu'il
n'était pas possible de donner une parole pour qu'ils subsistent, ^ et
le Seigneur a détruit les pensées de tous ceux auprès desquels n'était
XXV
Ue me suis échappé de mes chaînes et j'ai fui vers toi, ô mon Dieu,
"'
car tu as été ma main droite, mon salut et mon aide ;
•"'
tu as con-
tenu ceux qui se dressaient contre moi '^
et ils ont disparu, car, ton
visage était avec moi et ta grâce me sauvait.
^Or j'étais méprisé et réprouvé aux yeux de beaucoup, et j'étais à
leurs yeux comme du plomb; '^mais il me vint d'auprès de toi de
la force et du secours. 'Tu m'as placé des candélabres à ma droite
et à ma gauclie, et pour qu'il n'y ait rien en moi qui soit sans
M. Gressmanii propose une autre conjecture : Au lieu de ^^c»j il lit ^^^^x^ et corrige le
reste du verset en ^ooiii-. ^o, y^i '= w; to-jç Hîo-jç]. Dans ce cas la correction o.m-^i/;
s'impose, et le sens serait : - les abîmes jusque-là cachés s'ouvrirent; ils engloutirent le
Seigneur comnie (s'ils engloutissaient) ceux qui leur appartiennent ». La restitution est
hardie, mais le sens ainsi obtenu est boiteux : il serait téméraire de l'adopter.
Enfin, au lieu de ^o^ on pourrait lire ^>Nn, et le sens serait beaucoup meilleur : « ils
Les abîmes s'ouvrirent et ils (c'est-à-dire les méchants, probablement les mauvais
anges, dont il est question dans le reste de l'ode) furent engloutis;
Ils crièrent vers le Seigneur comme celles qui enfantent
Et il ne leur fut pas donné de nourriture,
Parce que c'était leur condamnation;
Ensuite ils lurent précipités dans les abîmes, par la submersion du Seigneur (c'est-à-
Le sens général de l'ode est mystérieux. Nous ne sommes pas accoutumés à ce rappro-
chement entre la colombe. qui fait entendre sa voix au baptême du Christ et la descente
aux enfers. Les textes du Descen.siis ad iiiferos signalés par Harris semblent pourtant
concluants.
\.\V. — V. 2. Lire wu.j.jiQ_.j avec le copte. Au lieu de pLoîas» lire pusîaB Nj/o.
V. .3. tu as contenu : xwXCsiv (d'ai)rés le Copte).
V. 4. ils ont disparu; litt. : ils n'ont plus été vus : o^y^n >io (Schulthess d'après le Co[>te).
moi les vêtements de peau. '^Or ta droite m"a élevé et a chassé loin
de moi la maladie. "^^'Je suis devenu robuste par ta vérité et saint par
ta justice, et tous ceux qui étaient contre moi ont fui loin de moi;
" [et je fus du Seigneur (j'appartins au Seigneur?) au nom du Sei-
gneurj i^et je fus justifié par sa suavité, et son repos (est) pour les
'^Qui écrit les cantiques du Seigneur, ou qui les lit? '^ou qui peut
s'instruire du sakit, pour que son âme soit sauvée? '*^ou qui peut se
reposer sur le Très-Haut, en sorte qu'il parle par sa bouche?
'^Qui peut expliquer les miracles du Seigneur? ^-car celui qui les
expliquerait cesserait (d'exister), et deviendrait Celui qui est expli-
qué.
''Or il suffit de savoir et de se tenir en repos icar les chantres se
Y. 8. couvert : a-/.tnâ^v.'^ , fourni jmr le copie. — Les vèlenienls de peau : lire jjlx:»;
V. 10. dans ta ou ])ar ta vérité ^.îvjlj, avec le C. — Justice : oixatoaûvr,, fourni par le
justifié par ta suavité (le copte donne un dérivé de xpT'i<'TÔ;), et ton repos [est] pour les
.siècles des siècles ».
XXVI. — ^. 2. Plus exaclemenl : est dirigé vers lui.
V. 3. On peut traduire aussi : ne se tairont ]>as, et en lisant oi>..,i-» au lieu de ov-..oj :
les cantiques ne cesseront i>as, dans son repos. Ce rejtos est ici le « royaume ».
tiennent en repos .
l' comme le couis d'eau qui a une source abondante
et coule au bénéfice de ceux qui le cherchent. — Alléluia
XXVII
dressé. — Alléluia!
XXVIII
Comme les ailes des colombes (sont sur leurs petits et le bec de
leurs petits vers leurs becs, -^
ainsi sont les ailes de lEsprit sur mon
cœur.- Mon cœur se réjouit et tressaille, comme un enfant qui tres-
j'ai été haï. '• Ils m'ont entouré comme des chiens enragés, ceux qui
ai consacrées) pour le Seigneur, ou peut-être j'ai sacrifié au Seigneur. C'est même ce der-
nier sens que suggère le i>arallélisme de Iode 42, t. 1. Le texte me j-arait ici meilleur.
que j'étais plus ancien que leur mémoire ^'' en vain ils se ruèrent ;
XXIX
Le Seigneur est mon espoir, je ne serai pas confondu de son fait,
1
c'est lui le Seigneur. 'Il m'a montré son signe et m'a conduit dans sa
lumière et il m'a donné le sceptre de sa puissance '^pour que je sou-
;
mette les pensées des nations, pour humilier la vigueur des forts,
pour faire la guerre par sa parole, et remporter la victoire par sa
force. ^"Le Seigneur par sa parole a jeté à terre mon ennemi, et il
devint comme la paille qu'emporte le vent. '^ J'ai rendu gloire au
ïrès-IIaut parce qu'il a magnifié son serviteur, et le fils de sa servante.
— Alléluia!
XXX
^ Remplissez-vous des eaux de la source vivante du Seigneur, car
elle est ouverte pour vous. -Venez, vous tous les altérés, prenez la
V. 16 et 17. Le texte est en mauvais état. En marge, nous trouvons ^.m^i qui corres-
d'une interprétation docète. C'est un rappel de l'Ode xi\, v. 8 « elle enfanta un semblant :
d'homme. Il conlirme pleinement la traduction proposée par M-' Batiffol ; il en est peut-être
de même de l'ensendjle de l'ode, s'il s'agit de la passion du Christ que personnifie Salomon.
XXIX. — V. 1-3. « Majesté », « bonté », « miséricorde », « grandeur de beauté = [leYa-
signe (mal placé) qui dislingue le substantif du verbe. — v. 11. Le serviteur dont il est ici
XXXI
ne fusse en rien leur débiteur. ^Pour moi, jai été patient, je me suis
tu et j'ai gardé le silence, comme si je n'étais pas ému par eux.
'Mais je me suis dressé, inébranlable comme un rocher solide, qui est
battu par les vagues et résiste. ^^ J'ai souffert leur méchanceté par
humilité pour sauver mon peuple, et l'acquérir en héritage, pour ne
'-^
pas annihiler les promesses faites aux patriarches, que j'avais promises
pour le salut de leur race. Alléluia — I
XXX. — V. 5. du cœur du Seigneur elle tire son nom. Telle est la traduction littérale.
Elle n'est guère satisfaisante. On pourrait ponctuer après oi.a\ : ^ elle sort des lè\res du
Seigneur et de son cœur, car le Seigneur est son noui ». Le sens n'est pas meilleur: ov^ol»
U'r^t jiourrait être une interpolation, en forme d'oraison jaculatoire, comme linutile ^-^.ioj
XXXI. — V. 1. Au lieu de Jlq^^-^, lire )lq^^^ RH., F. G. S.^. — b'. .<>,Njot. serait,
d'après Gunkel, une forme passi\e a\ec le sufl". 3^ pers. fém. sing.
V. .3. son nom. C'est le nom du Très-Haut, nommé au vers et suivant: peut-être y a-t-il
eu interversion des deux lignes.
V. à. leur personne. Le texte j'orte : sa personne; mais la correction de Gunkel est
certaine.
V. 6. la joie. Peut-être faut-il lire )iov-, liberté, au lieu de |lo^.
V. 7. quand je me tins debout, c'est-à-dire quand je comparus en jugement.
REVLE BIBLIOL'E.
XXXII
XXXIII
vous la grâce de Dieu; par mes soins vous serez sauvés, et vous devien-
drez bienheureux!
l'J
Votre juge, revêtent ne seront pas maltrai-
c'est moi; ceux qui me
tés, mais ils posséderont le monde nouveau, l'immortel. " Mes élus
marchent en moi; et je ferai connaître mes voies à ceux qui me
cherchent, et je leur donnerai confiance en mon nom. Alléluia! —
XXXII. — V. 2. qui procède d'elle-même. RH. iiidii[iie le grec aOTosy/;;. La naliire di\iiie
XXXIII. — V. 1. re\ètu. Le texte porte lu^^ji, abandonné. Par analogie a\ec xxii, 11,
V. 4. La fin n'est pas satisfaisante. Par analogie a\ec d'autres passages, je lirais : « et il
leur ai>|>arut comme le chef (la tète) » jjuj ^.i ^oi^ w)-.l/. On aura d'abord transcrit Iè.^
l>our 1^;, puis changé yooi:^. en [i. pour éviter tout ensemble un non-sens et un blas-
phème.
V. 6. Lire ^l, a\ec F., plutôt (jne ^l, \i\ez.
V. 11. On traduirait mieux : ô mes élus, marchez eu moi. car Qjîi.O) = ils ont marché.
Rien n'empêche d ailleurs de conjecturer ^oai^ow : marcheront; le texte est assez négligem-
ment coiiié en cet endroit, comme la déjà remarqué S.
LES ODES DE SALOMON. l!i
XXXIV
n'y est discordant. 'Pareil à ce qui est en bas est ce qui est en haut,
car tout est en haut: il n'y a rien en bas; si ce n'est une apparence
jDour ceux en qui ne réside pas la science. ^ La grâce a été révélée
pour notre salut. Croyez, et vivez, et soyez sauvés! — Alléluia.
XXXV
* La rosée du Seianeur ma ombrag-é paisiblement; "un nuage de
paix ii a dressé au-dessus de ma tête, qui m'a préservé en tout temps,
•^et devint pour moi le salut.
XXXIV. — V. 4. vérité. Le texte porte : beauté, ijiii n'a guère de sens. Il sullit de
corriger y^^^six en |;;ji. — -,;s'^-â,
douteux, hésitant: mais ici idutôt : discordant, iî-Ja-
ÇUVOv.
V. 5. si ce n'est ce qui narait. C'est-a-dire : i>our le gnostique, il n'y a que du beau, du
vrai et du bien: mais celui qui ne possède pas la gnose j'ercoit dans le monde ^et parti-
culièrement dans l'humanité du Christ, dans sa Passion du mau\ais, de l'inférieur: pure
apparence qui ne trompe pas un esprit averti.
XXXV. — V. 1. La rosée. Il s'agit ici d'un nuage de rosée, comme le )irou\e le v. 2. —
Paisiblement; littéral. : en repos, -l; àvirxjTtv.
V. 3. Au lieu de |
'"j ^a- : lire |j.i5îa3o.
V. 4. yoovJ.io est incompréhensible si l'on ne songe 1)35 à un texte grec. Ta T.i-j-oi i-jt-.a^r,
xaî £(îa).£-j6r/ xai i;r,/6îv è* xjtwv. etc.. Ces deux derniers mots seraient au pluriel, jiarce
qu'ils se rapportent à tœ TrivTa, tandis que les verbes qui précèdent seraient au singulier
en vertu des lois grammaire; de la le traducteur syriaque aurait copié ser\ilement.
comme il arrive fréquemment.
Une odeur nauséabonde, ^.-jo au lieu de )-l^>o. brillante conjecture de Gunkel, au
lieu de : et le jugement. Mais elle n'est peut-être pas nécessaire. Il suflirait de lire |_i-»>
au lieu de |_l,;o : « la fumée du jugement '. (-.po; ooa,^!!^ ofl're un sens acceptable :
' dans le précepte du Seigneur-i-. Mais le mot est rare dans cette acception, et il détonne
ici. .Je corrigerais ©oo^t^va^ : iv '/ôyto toO y.-j'J.o-j, expression consacrée, et bien en situa-
tion.
v. h. Au lieu de « fondation ". Gunkel croit à un original grec xpijîtt;, mur protecteur,
c'est-à-dire mur épais qui procure de l'ombre; la métaphore se conçoit en Orient.
V. 7. je fus doté de sa consécration : àvTïÀagov zf,; TïXîtûcîw; aÙTo-j. Le sens ne me
16 REVUE BIBLIQUE.
XXXYI
XXXVII
parait pas douteux. Il est consacré avant d'offrir le sacrifice : « J'étendis mes mains ».
On remarquera (jue ce sacrifice, qui est celui de la croix, coïncide, comme en d'autres
endroits des odes avec l'ascension-résurrection. Docétisme itrobable.
XXXVI. — V. 1. Tous les \erbes jusqu'à la dernière phrase du v. 5 exclusivement son!
au féminin. Le sujet est donc 1' « Esprit », féminin en syriatiue. — Gunkel ])ense «[ue u se
reposer » é(iuivaut au grec y.aOiîJedTat.
v. 2. Le syriaque porte : de ses cantiques. Sui\ant Gunkel le texte grec avait èv xaTa-
ffxeuîi Twv 'i'aîjjLtôv ([ue le traducteur aura faussement paraplirasé : ses psaumes, au lieu
20; Hermas, Sim., Les puissants sont les mêmes «jue ceux (jui louent, el
ix, 4. s.) (G.).
sont tout proches du Seigneur (v. (i). Conception familière aux écrits plus réfcents de
r.\ncien Testament et aux a|)ocaly[)ses.
V. 6. l'un de ses ]iroches, ou l'un de ceux «pii sont présents de\ant lui.
V. 8. ma présence fut dans la paix, c'est-à-dire «juand je m'approciiai, je fus accueilli
:
pacifiquement.
Providence; littéralement : gouvernement, olxovo(j.{a.
LES ODES DE SALOMOX. il
XXXVllI
les crevasses, et m'a sauvé des rochers et des ravins; "elle me devint
un port de salut et me plaça sur les bras de la vie immortelle.
^Elle marcha à mes côtés pour me rassurer et ne me laissa pas
errer, parce qu'elle est la vérité; ^je n'encourus pas de péril, parce
qu'elle marchait à mes
aucunement, parce que jo
côtés. "^Je n'errai
lui obéissais, car l'erreur fuyait loin d'elle et ne lui résistait pas.
^Or la vérité marcha dans la voie droite, '^et tout ce que je ne con-
naissais pas, elle me le montra tous les poisons de l'erreur et les :
^^
quet et leur donnent à boire leur vin enivrant, en sorte qu'ils
vomissent leur sagesse et leur conscience; ils leur font perdre la rai-
son. *+ puis les abandonnent; or ceux-ci courent ici et là, enragés et
nuisibles, car ils n'ont pas de cœur, et ils n'en cherchent même pas. »
'5 J'étais averti, aussi ne tombé-je pas entre les mains du séducteur;
V. 2. Corr. v^-_3^(.
V. 8. La lin n'a guère de sens. Le ms. veut dire : « ceux qui croient (fue la douceur est de
la mort » (?). On corrige 11.0..^^; en iioi.*-., terreur, horreur; le sens est un peu meilleur,
mais la construction est impossible. RH. traduit ^^:axo par « announce »; mais il faudrait
le pa'èl : y;imv>. Au lieu de ^v^jj», je lirais ,^-, .m->, les condamnés, les damnés :
licLsoj .-o) |LQi..^;o ^;« m -^» v.<^o,; )v.^o. Quoi qu'il en soit, le ms. est ici en mauvais état.
V. 9. le corrupteur de la corruption. S'il n'y avait pas de suffixe, on serait tenté de
corriger : le corrupteur et la corruption. G. propose la correction i
in-.s^ , dont je ne
saisis pas l'utilité. — Au lieu de ( et l'époux », il vaudrait mieux lire « pour l'époux »,
i< en l'honneur de l'époux », pis^-x; faute de quoi ce sujet reste sans verbe.
v. 13. leur vin enivrant: littéralement ; le vin de leur ivresse. Toute cette description
du V. 7 au V. 15, rappelle singulièrement la peinture que faisaient les Manichéens de la
situation des « iils ou princes des ténèbres ». quand ils eurent remporté la victoire sur
les bons éons et le premier homme; ces éléments ont d'ailleurs été empruntés par eux à
des systèmes gnostiques antérieurs.
V. 14. ^vxLâ, heureuse correction de RH.
v. 17. G. propose d'entendre o,^; \>o, dans le sens de -1 Sy (Néhémie, m, 4, 7, 8;, à
UEVLE BIBLIQUE 1911. — N. S., T. VIII. 2
18 REVUE BIBLIQUE.
et je me réjouis pour mon âme, parce que la vérité était venue avec
moi;^'^ or je fus affermi, je vécus et je fus sauvé. ''Mes fondations
furent placées par la main du Seigneur; car c'est bien lui qui m'a
planté :
'^ c'est lui qui a placé la racine, l'a arrosée, afifermie et
bénie, et ses fruits existent pour l'éternité. *^ Il l'a enfoncée. Ta fait
monter et croître; et l'a remplie (de sève , et elle est devenue grande.
~" Au Seigneur seul revient la gloire de sa plantation et de sa culture,
de ses soins et de la bénédiction de ses lèvres, 2' de la belle planta-
tion de sa droite, de la beauté de sa plantation et de la notification
de sa pensée. — Alléluia !
XXXIX
Semblable à de puissants cours d'eau est la force du Seigneur;
^
perdent leurs âmes. ^Car ils (les torrents; sont plus rapides et plus agiles
que l'éclair; mais ceux qui les traversent par la foi ne sont pas
ébranlés; ceux qui y marchent sans tache ne seront pas troublés,
"*
été fr lyé pour ceux qui passent après lui, pour ceux qui parfont le
côté de. èr:-. yt'.oy.. H es peut-être plus simple de corriger eu o,^\^, par la main du Sei-
gneur, ce ([ui s'accorde mieux a\ec les \ersets suivants.
XXXIX. — V. 2. Mol à mot : " portent leur tête en arrière », « tordent leur démarche «
(tiUibent .
exclu. Tous ces termes décrivent la position dun homme qui traverse une rivière au
courant impétueux. Un peu plus loin, il y a un signal pour indiquer le gué ce signal, :
c'est le Seigneur.
V. 8 et suiv. S. croit qu'il s'agit de la marche de J.-C. sur les eaux; c'est fort probable.
v. 9. solidement; c'est ainsi que je traduis lîjju; il serait possible que ce mot ait encore
un sens plus technique : il s'agit de planches assemblées et fixées qui forment une sorte
de pont.
v. 10. traces : litt. : talons.
XL
XLI
I
Qu'ils louent le Seigneur, tous ses enfants, et qu'elle les rassem-
ble, la vérité de sa foi, ~ et que ses enfants se manifestent à lui; c'est
pourquoi nous chanterons dans son amour. ^ Nous \dvons dans le Sei-
gneur par sa grâce, et nous recevons la vie par son Christ.
^Un grand jour, en effet, a lui pour nous, et admirable est celui qui
nous a donné de sa majesté. Réunissons-nous donc ensemble au nom
''
réservoir, bassin, et changer peut-être le suffixe en celui de la 3"= pers. masc. sing. <i Sou
flux est la vie iuiinortelle, et son réservoir est l'immortalité ». Ce sens est aussi plausible
que le premier.
XLI. — V. 1. Le second membre de phrase doit être corrigé. S. propose ^ops^ru ou o.oj,
qu'ils célèbrent ou magnifient la vérité de sa foi, mais le suffixe \ ne serait-il pas néces-
saire? Par analogie avec le v. 5, je préférerais lire ^; \sx.aua.
Le mot Parole, ici comme au v. 15, signifie évidemment Logos. Nous avons dans
T. 11.
cette ode, un beau dialogue spirituel entre les chrétiens et le Verbe Rédempteur.
20 REVUE BIBLIQUE.
sauve nos âmes, loin de leur nuire, ^^ Thomme qui s'est humilié et
a été exalté par sa justice, *^le Fils du Très-Haut est apparu dans la
perfection de son Père ;
^^ une lumière a lui du Verbe, qui était en
lui dès le Principe.
^^ Le véritable Messie est unique, et il a été désigné avant la créa-
tion du monde ^'pour sauver lésâmes à jamais- par la vérité de son
nom. Un cantique nouveau, de ceux qui l'aiment! — Alléluia!
XLII
pendu, sur la route, le Juste. ^ J'ai été sans utilité pour ceux qui ne
m'ont pas saisi, mais je suis auprès de ceux qui m'aiment. ^Ilssont
morts, tous mes persécuteurs, mais ils me prient, ceux qui croient en
moi, parce que je suis vivant.
•^Je suis ressuscité, et je suis avec eux et je parle par leur bouche;
"or ils ont méprisé ceux qui les persécutaient, '^
car j'ai jeté sur eux
le joug de mon amour. Comme le bras du fiancé sur sa fiancée,
''
^^ ainsi est mon joug sur ceux qui me connaissent, Comme la tente de '^
fiançailles qui est étendue chez le fiancé, ainsi est mon amour sur
ceux qui croient en moi.
12 Je n'ai pas été réprouvé, quand même j "ai semblé lètre; ^^ je nai
pas péri, bien qu'ils m'aient condamné. Le Schéol m'a vu et a
^^
été vaincu; '-'la mort m'a laissé retourner, et beaucoup avec moi.
'J'ai été pour elle fiel et vinaigre et je suis descendu avec elle,
autant qu'il y avait en lui (le Schéol) de profondeur. "^ Elle a détendu
les pieds et la tète, parce qu'elle n'a j)as pu supporter mon visage.
de Nj'^ol/, g. lit Na^l/ jiar analogie avec ode xxvii, v. 1. c^volI pourrait d'ailleurs signifier :
« j'ai sacrifié ».
V. 17. avec elle (la mort) ; en lui (le Schéol), mais corriger le suffixe : ou (S.).
V. 18. C'est la mort qui est sujet. Elle maintenait rigides les pieds et la tète du cadavre
(ou des cadavres); elle a drt les détendre, pour qu'ils puissent revivre; le regard du Sau-
veur la met en fuite. — a-a*/; lire ,>.aji(S.).
LES ODES DE SALOMON. 21
parlé avec des lèvres vivantes, -"^en sorte que ma parole ne fût pas
vaine. 2' Ils ont couru vers moi ceux qui étaient morts; ils ont crié et
dit « Aie pitié de nous, Fils de Dieu, et agis avec nous selon ta
:
que notre mort ne s'est pas approchée de toi. -^Soyons sauvés, nous
aussi avec toi, parce que tu es notre Sauveur. »
''
Pour moi. j'entendis
leur voi.x:, et je traçai mon nom sur leur tête; c'est pourquoi ils sont -''
ressuscité le premier, et d'ailleurs n'avait pas été réellement touché par la mort.
T. 22. Peut-être ;ooû., avec toi, serait-il mieux en situation que ^loi. (S.).
V. 23. notre mort qui nous a frappés, et nous domine. Ainsi le Seigneur ne
mort : la
serait pas réellement mort ? ]\'ouvelle paraphrase docéte de o mors, ero mors tua.
\. 25. je traçai mon nom. Le ms. porte i!o.iQjLj, peu lisiblement du reste. RH. conjec-
J. Labourt.
INTRODUCTION ET COMMENTAIRE
Le texte des Odes de Salomon, que Ion vient de lire dans la tra-
duction française de M. Labourt, appelle une introduction et un com-
mentaire historiques, que Ion me permettra de présenter ensemble
dans les pages qui vont suivre.
I. — Tradition du texte.
Lactance écrit :
Apud Solomonem ita scriptum est : Infirmatus est utérus virginis et accepit filium,
Solomoii in ode nndevicesima ita dicit : Inpmatxis est utérus virginis et accepit
filium, et gravata est et facta est in multa miseratione mater virgo (2).
^ VEsprit étendit ses ailes sur le sein de la Vierge, et elle conçut et enfanta, et elle
devint Mère Vierge avec beaucoup de miséricorde ;"' elle devint grosse et enfanta
un fils sans douleur. .
était dans son original grec perdu une œuvre gnostique, vraisem-
blablement égyptienne, de la seconde moitié du m" siècle. Le person-
nage qui porte le nom de « Pistis Sophia » y exprime ses sentiments
ou ;j.srâvc'.a'. aux différents degrés de son ascension hors du chaos. Le
avoir fait question pour l'auteur de la Pistis Sophia. MM. Ryle et James
avaient appelé lattention, en 1891, sur ces prétendues odes salomo-
niennes, estimant qu'elles n'avaient pas été composées par l'auteur de
la. Pistis Sophia, mais seulement citées par lui; ils publièrent une
olim per Solomonem in eius décima nona ode et dixit... » Suit une ode
qui n'est pas notre Ode xix. La troisième par saint Pierre « Tua vis lii- :
minis àzpcçr.TSj-Ev oliïn per Solomonem ineius woxîç ... » Suit notre Ode
VI, 7-17. La quatrième par saintThomas « Tua visluminisï-zzzr-.t-jzvi :
olim, per Solomonem filium David in eius woaTç... » Suit notre Ode xxv,
1-11. La cinquième enfin par saint Mathieu « Tua vis luminis ït.ç,z- :
zrr.i-jzvi olim in i)y^^ Solomonis... » Suit notre Ode xxii. 1-12 (i). Les
psaumes canoniques ne sont pas introduits différemment « Tua vis :
(1) H. E. Ryle et M. R. James, Psalms of the Pharisees commonly called ihe Psalms
of Solomon (Cambridge 1891), p. 155-160. Ces cinq odes avaient élé publiées antérieurement
par Woide, par Munter, par Ideler, par Ublemann, par Scliwartze et Pelermann. Ryle-
James, p. 155. On les a eues depuis dans l'édition de la Pisds Sophia par C.Scbmidt, A'o;;;/.sc/2-
fjnostische Schriften, t. I (Leipzig 1905), p. 73,75, 85, 97, 101.
(2) A. Harnack, Ueberdasgnos/ische Buch Pistis Sophia Le\piigl89V. p. 45.Bardenhe\ver,
Geschichte der alth. Litt., t. I « Im ersten und zweilen Bûche
Freiburg 1902), p. 328 :
werden fiinf sdlomonische Oden citiert, welche in den Augen des Verfassers dieselbe Digni-
tat besitzen wie die davidischen Psalraen ».
(3; Le mot f/.s, plus exacteraeal vis /«?/ii'/i('.s 'Liclitkraft), désigne un attribut divin.. Dieu
révélant sa vérité à ses prophètes.
(4j Ryle et James, p. 156-159. Harnack, P5a?//(6uc//, p. 3-5.
24 REVUE BIBLIQUE.
La mention d'une ode xix qui nous manque a été pour M. Hari is un
trait de lumière. Il a conjecturé, en efifet, que les Odes de Salomon
étaient dans le recueil de l'auteur de la Pistis Sophia annexées aux
Psaumes de Salomon, lesquels sont au nombre de dix-huit l'ode xix :
était ainsi Fode i, qui justement fig-urait dans les pages qui manquent
en tête au ms. syriaque de Harris. M. Harnack souscrit pleinement à
la brillante conjecture de l'éditeur anglais (1).
Nous n'avons pas lieu d'insister davantage ici ce point est acquis, :
Toç axr/. ^p' soit 2100 stiques (2) pour les deux recueils ensemble (3).
M. Harris calcule que les dix-huit Psaumes de Salomonïoni 950 stiques i
restent 1150 stiques pour les Odes, « ce qui est suffisamment exact
pour vérifier que les odes nouvellement découvertes sont celles dont
parle Nicéphore (4).
En résumé, l'histoire littéraire des Odes de Saloinon, abstraction
faite du manuscrit syriaque (xvi° siècle) qui vient de nous en rendre
le texte, se réduit 1" au signalement qu'en donne, au ix* siècle, le pa-
psaumes et quatre cantiques, l'un celui de Moïse, les autres de Salomon et des prophètes.
Le cantique de Moïse s'enlend du Cavlemus Domino A'ExoiL xv, 1-21 ou de Deut. xxxii,
1-43 ; les cantiques des prophètes, du cantique d'Habacuc, d'Anne, d'Ézéchias, disaïe, de Da-
niel, qui nous servent encoreà l'office de Laudes. Mais « les autres de Salomon»? Rahmani
(p. 208) y voyait le psaume lxxi : Deus iudichnn tuum régi do. Dans le Journal oftheo-
logical studies, octobre 1910, p. 30-31, M. J.-H. Bernard propose d'y voir nos Odes de Sa-
lomon.
LES ODES DE SALOMON. 2o
vabç ï\j.z'.. Car tu es une lyre, une flûte, et un temple, pour moi (1). Cette
citation est introduite par quatrelignes où Clément exprime le sujet qui
prononce cette sentence, et qui n'est autre que le Christ Cehii qui : (f
que je puisse te louer dans tous les modes ». et encore vi, 1-2 1 :
donné ta communion, non pas que tu eusses besoin de nous, c'est nous
qui avions besoin de toi », et saint Irénée écrivant :
•
In quantum enim
(1 Clément. Protrept. l, 5, 2-3 édit. Staehlin, 1905, p. 61.
égale à celle des psaumes canoniques. Les Odes doivent cette consi-
dération à ce qu'elles portent le nom de Salomon. Rien dans la tradi-
tion du texte ne donne lieu de penser qu'elles aient porté un autre
nom, ou qu'elles n'en aient porté aucun. De plus, la Pistis Sophia, en
donnant à la première de nos Odes le nombre 19, atteste que les
Odes formaient pour lors avec les Psaumes de Salomon un seul et
unique recueil sous le nom de Salomon. Comme le remarque M. Har-
nack, il est sûr que les Psawnes de Salomon out eu leur tradition
propre et séparée, mais il est sûr que les Odes^ elles, n'ont jamais été
disjointes des Psaumes de Salomon (3).
On inférera de ce fait, avec M. Harnack, que les Psaumes de Salo-
mon ont préexisté aux Odes^ et que les Odes ont été attachées aux
Psaumes à un moment donné. Les Psaumes de Salomon ayant été
composés à l'époque de Pompée (4), —
la guerre de Pompée contre
les Juifs est de 63, Pompée meurt en V8, les Odes ont dû être com- —
posées entre l'an 50 avant notre ère et l'an 150 de notre ère.
(1) Cf. lusTiN. Dialog. xxii, 1 (éd. Archambault, 1909, t. I, p. 96) : où ôià tô èvôetiç elvat...
11 (p. 102) : oÛTi w; ÈvÔetiç... xxili, 2 (p. 104) : (fnXdtvOptoTrov xal îtpoyvtoaTTîv xal àvevSeii... Etc.
(2) Iren. Hoer. IV, 25. Harris, p. 81. Harnack, p. 8.
(2) Harris, p. 87-88. Voyez dans le même sens J. Halssleiter, « Der judenchrislliche
Character der Oden Salomos », Theologisches Literctlurblatt, 1910, n" 12, que je ne con-
nais que par ta mention qu'en fait F. Spitta, Zeitschrift fiir die neuf. Wissenschaft, 1910,
p. 193 et 290.
(3) Harnack, p. 74-75.
28 REVUE BIBLIQUE.
l'ode XLii, 1-3. On devra donc conclure que les Odes sont un recueil
juif, qui a été accru et interpolé par une main chrétienne (1).
Le cas des Odes de Salomon n'est pas en cela un cas isolé et extra-
ordinaire le fait est bien connu que les chrétiens ont dans l'intérêt
:
de leur foi retouché des écrits juifs, et le plus illustre exemple d'une
adaptation de ce genre est le cas du Testament des douze patriarches.
Or il est très remarquable, dans le cas du Testament des douze pa-
triarches, que les interpolations chrétiennes ont été délibérément
exécutées dans le style de la composition première (2). Et donc la cri-
tique doit consister à distinguer le texte juif des Odes de ses surcharges
chrétiennes, et. ce départ une fois fait, à caractériser la mentalité de
l'auteur juif et celle de l'auteur chrétien. C'est toute la thèse de
M. Harnack (3).
De l'étude du fond juif des Odes, on inférera que le temple de Jéru-
salem était debout encore quand elles furent composées, et comme
colores, les Odes I, V, xi-xvi. xviii. xx, xxi, xxvi, xxx, xxxii-xxxv, xxxvii, xxxviii, xl; —
3" Morceaux purement clirétiens, les Odes xixelxxvii; —
4° Morceaux problématiques,
les Odes m, vii-x, xvn, xxn-xxv, xxviii, xxix, xxxi, xxxti, xxxix. xli, xlii.
T. K. Cheyne, The Hibbert journal, octobre 1910, p. 210-211, souscrit à la théorie de
Harnack. Sans se prononcer sur le fond. W. E. Baunes critique ce niorcelage, dans The
journal of theological studies, XI (1910 p. 615-618.
.
Au contraire, M. Spitta le reprend à son compte et le précise, dans une étude Zum Vers-
(>
. . ,
taendnis der Oden Salomos «publiée par ]& Zeitschrift fur die neuf. Wissenschafi, 1910,
p. 193-203, 259-290.11 dresse un tableau comparatif (p. 289) des portions chrétiennes des
Odes selon Harnack et selon lui :
Harnack : Spitta :
m, 9. m, 2, 9,
VII. 4''-8, 14, 15, 18. VII, 2», 3, 5-9, 12, 14, 15, 18-24.
Yiii, 23-26.
IX, 2K IX 2".
X, (4-7j, 8. X, 4-8.
XVII, 10-15. XVII, 10", 11, 13", 14".
XIX, 1-10. XIX, 2-3", 6-10.
XXII, 5.
XXIII, 16, 19. XXIII, 15-17% 19.
XXIV, 1 XXIV, 1.
xxvu, I, 2.
XXVIII, 8-18
XXIX, 6, 7', (8?). XXIX, ô''-10".
que ceux que les Juifs espéraient. Il nous est présenté ensemble
avec le Père et l'Esprit; il a pour noms le Seigneur, le Logos, le Fils, le
Bien- Aimé ; il a été crucifié, il est descendu aux enfers, il est ressuscité.
(0 R- H. Strach\k, « The newlv discovered Odes of Salomon, and their bearing on the
», dans The Expositorij Times d'Edimbourg, octobre 1910,
probleni of the fourth Gospel
développe cette iiK^nie vue.
p. 7-14,
Harnack, p. 104-106, 110-112.
(2)
gelehrte Ânzeigen, 1910. septembre, p. 629-641.
(3) GoeUingische
et qui est aussi un nous, est l'âme sauvée parlant au nom de la collec-
tivité des fidèles, souvent aussi le Christ, car le fidèle a revêtu le
Christ, est incorporé au Christ. La pensée et la terminologie des Odes
sont apparentées au quatrième Évang-ile, et très vraisemblablement
dépendent de lui. Le gnosticisme n'apparaît pas ici aucun de ses :
nous découvrons le milieu où cette pensée s'est fait jour, et, du coup,
le milieu où le quatrième Évangile s'est produit. M, Wellhausen ne —
se rend pas à la théorie de Haniack sur la composition des Odes. Quand,
dit-il, on éliminerait des Odes les morceaux qui sont évidemment
(1) H. Corel, « Die Oden Salomos », Zeitschrift fur die neut. W. 1910, p. 291-328.
(2) Le même regret est exprimé par R, H. Charles, dans la Review oftheologij and phU-
losopky d'Edimbourg, octobre 1910, p. 222-223, qui propose une reconstitution strophique
de voue v.
32 REVLE BIBLIQUE.
Voici l'ode iv : « Nul ne traiiisférera ton lieu saint, ô mon Dieu, nul
ne le transférera... », que M. Harnack présente comme une chose pu-
rement juive, parce que ce « lieu saint » ne saurait être que le temple
de Jérusalem, auquel nul autre temple ne sera substitué, tel, par
exemple, le temple de Léontopolis. Nullement, répond M. Gunkel, car
cette ode ne renferme rien qui ne puisse aussi bien être attribué à un
chrétien. On interprétera donc les ^' 1-i dans la perspective des ^ 5-
14 le Seigneur a donné son cœur à ses fidèles, ils portent son sceau
:
1-4) juif, il détonne absolument sur tout le recueil. Est-il vraisemblable qu'un juif in-
diflerenl aux destinées d'Israël, à la Loi, aux sacrifices, ail soutenu une polémique si voilée
en faveur du temple de Jérusalem contre ceux de Léontopolis ou de Samarie i" »
M. Gunkel traduit ««d hat deii lempel mit forlgenommen, 7;apY;v£YX£ tôv vaév
(2) :
(p. 298). M. Flemming (p. 32) traduit o Er bat ailes... zum Tempel gebrachl ». M. Harris
:
traduit son syriaque « ... and it brougbt to the Temple ». M. Scbmidl (p. 85) traduit le
:
copie de la Pislis Sopliia « ... Und wandte sich gegen den Tempel «, et Ryle-James
:
xa vinèffTpeiJ^ev ÈTtl TÔv vaov. Nous nous en tiendrons, avec M. Labourt, au sens accepté par
Harris et Flemming.
LES ODES UE SALOMON. 33
tiés ». M.Gunkel ne doute pas qu'il ait fait partie d'une « société se-
crète d'initiés, pour laquelle il parle, et de laquelle il peut compter
être compris )). \e dit-il pas lui-même « Gardez mon secret, ô vous
:
qui êtes gardés parlai > vni, 11 ? Par là s'explique que la science
joue chez lui un si grand rôle, et que la connaissance soit le salut, et
que, suivant une remarque de M. Ilarnack, le problème du mal et
du péché existe à peine pour lui 2 .
(1) T. Zaiix, dans la Xcue kirchliche Zeilschrift, 1010, p. 667 et suiv. (cité par Ginkel
p. 291.
(2) GlNKEL, p. 320-322.
REVUE BIBLIQUE 1911. — N. S., T. Vlir. 3
34 REVUE BIBLIQUE.
De Gun-
la revue d'opinions qui précède, retenons d'abord, avec M.
kel, ceci au jugement d'orientahstes du métier (Wellhausen, Schul-
:
thess), les Odes de Salomon que nous avons en syriaque sont traduites
du grec, et elles ont été écrites d'original en g-rec. Elles sont plei-
nes de « biblismes », elles ne trahissent pas de (( sémitismes », selon
la distinction de M. Wellhausen.
Retenons ceci encore l'impression littéraire de tous les critiques
:
est que les Odes de Salomon, quoi qu'on pense de l'hypothèse de l'in-
terpolation, ont dans l'ensemble une homogénéité d'inspiration et d'é-
criture, dont on peut inférer l'unité d'auteur.
Ces deux présuppositions considérées comme acquises, on s'étonne
que l'attention des critiques n'ait pas été retenue par le litre du recueil.
Les Psaumes de Salomon pourraient s'appeler aussi bien Psaumes
de David ou porter n'importe quel nom de psalmiste, car leur contenu
n'a pas de rapport avec leur titre il n'en est pas de même des Odes
:
The Journal of theological s^uf/i'es. octobre l'.llO, p. l-3(. qui s'applique à démontrer que
les Odes sont « une collection d'hymnes où abondent les allusions au baptême et compara-
bles à l'hymne de saint Ephrem sur Epiphanie ». Le mot de baptême n'est pas prononcé,
1
mais cela tient a la disciplina arconil Les Odes ne seraient pas antérieures au milieu du
second siècle.
crut avoir, par analogie, des Odes de Salomon, qui contenaient des
psaumes ou cantiques prêtés à Salomon (1).
M. Harnack et M. Gunkel mieux encore se sont attachés à décrire la
mentalité de l'auteur de nos Odes. M. Gunkel lui découvre la conscience
d'un inspiré et l'habitude d'exprimer à maintes reprises cette cons-
cience. Supposé que le poète ait débité ces élévations en présence de
la communauté dont il était membre, il apparaît comme celui qui
prie pour les autres, il dit « Nous », il dit « Vous ». L'impression la
plus nette qu'il donne de son rùle est dans l'ode xxix (8-11 où il 1,
nalité qui domine n'est autre que le personnage supposé du roi Salo-
mon, tel que le fait s'exprimer déjà l'auteur du livre de la Sagesse
(\ii-ix) : « Dieu des pères, Seigneur de miséricorde, qui as fait l'uni-
Toutefois le Salomon qui parle dans nos Odes n'est pas tant le Sa-
lomon historique, le roi terrestre, celui qui parle dans la Sagesse, ou
dans ou encore dans le Cantique des cantiques et dans
les Proverbes,
VEcclésiaste , qu'un
—
Salomon inspiré qui est ici-bas au milieu des
saints, ses frères, mais qui en même temps est en haut, en Dieu,
glorifié et vivant, et qui en Dieu n'est plus seulement le roi, le saint,
mais fait figure du Christ. Le personnage est essentiellement allé-
gorique et typique.
Quelques citations feront mieux comprendre le personnage ainsi
(1) Se rappeler / Bois, iv, 32 (Sept. /// Rois, iv, 28; : Salomon prononça trois mille
proverbes ou maximes « et ses cantiques furent au nombre de cinq raille » (xat fiuav wôal
aÙToy 7Tcvray.'.(T/J).'.a'.).
mis en scène par Fauteur de nos odes. Voici, par exemple, Y Ode i :
'
Le Seigneur est sur ma lête comme une couronne
et je ne serai pas sans lui.
2 Une vraie couronne a cté tressée pour moi,
et il a fait germer en moi tes rameaux.
3 Car il ne ressemble pas à une couronne desséchée qui ne germe pas.
Mais tu vis sur ma tête :
[la Majesté de Dieu, Dieu mêniei est sur le diadème de sa tète » (1).
•'
Je n'aurais pas su aimer le Seigneur, si lui-même ne m'avait aimé.
'
Qui peut en effet comprendre l'amour, sice n'est celui qui aime?
^ J'aime l'aimé, et mon âme l'aime.
" Où est son repos, là aussi je suis...
'" Qui adhère à celui qui ne meurt pas sera lui aussi immortel.
*' Et celui qui se complaît en la vie sera vivant.
(1) M. Harnack rapproche Isaie, xxviu, 5 : « Le Seigneur Sabaolh sera lacouronne d'es-
pérance, celle qui est tressée de gloire, pour ce qui restera du peuple. « Et encore Sagesse,
IV, 9 : « [La Sagesse] mettra sur ta télé une couronne de grâce, elle t'ornera d'un magni-
fique diadème. «
LES ODES DE SA[.OMO.N. 37
(1) Harnack. p. 40. sur les yl, 2, 3. note que « couper » peut s'entendre de la circonci-
sion, et qu'il s'agit de la circoncision spirituelle. Harris, p. 10-5. avait entrevu cette inter-
prétation.
38 REVUE BIBLIQUE.
'3 Et tout l'univers devint comme une relique de toi,
et un souvenir éternel de tes œuvres fldèles.
-^ Il est grand l'emplacement de ton paradis,
et il n'y a rien d'inutile, mais tout, est plein de fruits.
2' Gloire à toi, ô Dieu, délices du paradis pour toujours. Alléluia !
Cette ode est purement juive, dit M. Harnack. Disons plutôt que
dans cette ode le personnage qui parle Salomon symbole de la
est
conversion. Salomon a abandonné la « vanité », et ceci est une rémi-
niscence manifeste de YEcc/ésinste, et aussi peut-être de la Sagesse
(xiii, 1) : « Vains tous les hommes, qui sont dans l'ignorance de
Dieu ». Salomon est devenu riche par le don de Dieu. Viens à la
Sagesse de toute ton âme, dit Y Ecclésiastique, « suis ses traces,
cherche-la, et elle se fera connaître à toi..., à la fin tu trouveras son
repos... Tu t'en revêtiras comme d'une robe de gloire, et tu la met-
tras sur ta tête comme une couronne de joie » (1). Et ailleurs « Elle :
'
>'ul ne transférera ton lieu saint, ô mon Dieu ;
et ouvre tes sources opulentes qui nous font couler le lait et le miel.
11 Car il n'y a pas en toi de repentance. en sorte que tu te repentes de ce que
tu as promis.
'- La fin t'était révélée, et tout ce que tu as donné, tu l'as gracieusement
donné.
Ne les arrache pas et ne les reprends pas.
^* Car tout, en qualité de Dieu, t'était révélé, et était établi dès le principe
devant toi ;
(1} E. ScHiEREi!. Ceschichte des jiidisclien VoU.es. t. III ^ (1898), p. 97-100. O. Schmitz,
Die Opferanschauung des spneleren Judenlums (Tùbingen 1910), p. 119-120. Weluhaisen,
art. cil. p. 64'>.
(2) Comparer le temple intérieur, habitacle du Seigneur en chaque juste. BAn:i\h. Epislul.
\i, 15.
(3) Harris, p. 91. filant le traité Bcreshilh liabhah. Le passage des Pirké Àbotli, vi, 10
(éd. Créuance, 1910, p. 32\ que cite Harris.ilnd. n'a pas de rapport avec l'idée de pré-
existence.
LES ODES DE SALOMON. 41
œuvres de la lumière l » .
M. Gunkel (2) fait valoir que les y 1-i de Y Ode doivent être com-
pris dans le sentiment des ^" 5-1 i qui suivent et avec lesquels ils
font bloc (3i. Le Seigneur a donné à ses fidèles li sa loi? non son
« cœur » (5). Une heure de « foi » est plus précieuse que toute la vie.
Le fidèle se revêt de la « grâce ». Que le Seigneur donne aux fidèles sa
u rosée >», et« le lait et le miel ». Confiance, Dieu ne reprend pas ce qu'il
adonné : tout était établi « dès le principe ». Le don de Dieu est sans
repentance(6).Etainsi s'éclaire la pensée des^^l-4, ajouterai-je : le lieu
vira ce bien aux fidèles. Ce mysticisme n"a plus rien de Juif, le temple
historique n'a pas de place dans cette perspective 7i.
Secondement, après VOde iv, on met en ligne YOde vi, dont voici
le texte :
(1) Barnab. Epistul. XIX, 1 : oôbv oSî-jS'.v èttI tôv (by.'jii.ViO-/ tôtiov.
est contraintde dire que 5-14 n'ont aucune connexion avec les quatre versets précédents,
et suppose presque que nous avons la deux morceaux originairement indépendants.
(4) Le mot « lidèles » est aussi bien juif que chrétien. Harnack, p. 29. Le livre de la Sa-
cjesse (m, 9) en fait le synonyme d'élus : « Ses lidèles habiteront avec lui dans l'amour ».
(5) Le « cœur » de Dieu reparait dans 0(/. xvi, 20; xxvm, 18; xxx, 5. Le coeur » >< est en
Dieu l'intelligence, la science. C'est un biblisme. Voyez G. M. Hardy, art. « Heart », du
Dictionary of Christ and the Gospels, t. I (1906). p. 709-711.
(6)Rapprocher P5. cix, 4: « Le Seigneur a juré et il ne se repentira pas «.Cf. iJom. xi, 29.
(7) Retenons une observation de M.. Cheyne. Ode iv, 6, montre combien peu l'auteur est
attaché au temple historique. C'est, eu effet, une réminiscence de Ps. lxxxiii, « Mieux U :
vaut un jour dans tes parvis que mille ». Mais l'auteur substitue la foi aux parvis. The
Ribhert journal, octobre 1910, p. 210.
42 REVUE BIBLIQUE.
'* les âmes qui étaient prêtes à quitter "la vie], ils les ont arrachées à la mort ;
tout ce qui est étranger (3 Déjà dans VOde m, 6-7, on lisait « Où est
-. :
seau ». Inutile de chercher au mot b.-'z^y^vj. dans notre ode une signi-
fication gnostique, nous avons ici une comparaison physique. On lit
dans la Sagesse (vu, 25) que la sagesse pénètre tout à cause de sa
pureté, qu'elle est le souffle, Fhaleme (à-y.-ç) de la puissance de Dieu,
et le ruissellement limpide (à-ippc.a s'.X'.y.p'.vr.ç) de la gloire du Tout-
(«
l'univers, sont montées jusqu'au temple d'en haut, sinon ont soulevé
l'humanité jusqu'au temple d'en haut (i Ce qui importe, c'est que .
(oiwpyËJ dérivé d'un fleuve, comme une conduite d'eau qui arrose un jiaradis... Et voilà
que mon petit canal est devenu un fleuve, que mon fleuve est devenu une mer » (y.ai 6
7:oTa[xo'; p.ou ÈvévETo à; ôâ/aToav). Cf. Barnaiî. Epistul. i, 3 : « Je me réjouis d'autant plus
en l'espoir d'être sauvé, quand je vois en vous l'esprit qui s'est épanché sur vous de l'abon-
dance de la source du Seigneur {i7.y.z-/y\Lvio'j ành toO it),oyc<îou xïi; Tiriyrfi xupîo'j T:vîû|xa)-
ItSTL\. Dialog. lxix, 6 : («C'est une source d'eau vive {Tn;^r, -jôaTo; î;â)VTo;) que dans la terre
des gentils vide de la connaissance de Dieu le Christ a fait jaillir (àv£o),'ja£v) ». — Dans Ode
VI, 7, je ne vois pas une réminiscence d'Ézéchiel, xlvii. 1-12. Ce rapprochement indiqué par
RvLE- James, p. 160, est accepté par Gunrel, p. 297.
(4) ScHMiTz. p. 157, note chez Philon la distinction des deux temples, celui qui a été fait
de mains d'hommes, et l'autre, celui d'en haut, le vrai : tô (jlèv àvwTaTw :iat Ttpô; à),r,6£'.av
Upov ÔEoO,... T~o o£ /c'.pôxar.Tov. Philon. De spec. leg. i, 66 (éd. II, p. 222). Mais Maxgev, t.
Philon est d'un temps où le temple de Jérusalem est encore debout; puis, ce qu'il appelle
le temple d'en haut n'est que le monde, le cosmos, au sens stoïcien.
(5) Cf. Luc. X, 15 (Ëwî oypavoO {)'!;w6r,c7r,;, dépendant iïhale, xiv, 13, 15.
44 REVUE BIBLIQUE.
pas, avec M. Gunkel, que ces traits sont ceux sous lesquels, au second
siècle, on se représentait rétrospectivement l'histoire merveilleuse du
christianisme naissant. Je dirais que, dans sa foi, l'auteur de l'ode
prédisait que telle, enfin, serait la diffusion de la connaissance de
Dieu sur terre : elle joindrait la terre au ciel.
Heureux donc les ministres de cette eau vivante dont tous les
assoiffés de la terre ont bu
et ont été désaltérés. L'eau du torrent ne
sert pas à une ablution, elle sert de boisson on dira donc, avec :
[Luc. VII, 22), quand on lit dans notre ode que les ministres de cette
eau « » des hommes, ont « donne la
ont donné la lumière aux yeux
force à leur démarche », ont « redressé la volonté paralysée », ont
arraché à la mort des âmes prêtes à quitter la vie.
M. Harris (4) a dit très bien de l'auteurde cette Ode vi, qu'il estaussi
universaliste que saint Paul.11 s'exalte dans la pensée que tout l'univers
(1) loa. IV. 13. 14 : TÔ {iSwp ô ôwctw aùtû ^evififfeTai èv aÙTw KYiyYi iioaToç â)),0[j.£vo'j eï; Çwr;v
alwviov. Cette eau qui jaillit dans la vie éternelle est à comparer au torrent qui monte jus-
qu'au temple d'en haut.
(2) ScHMiDT, p. 85 : « Selig ([/.axàpiot) sind die Diener (ôtâxovot) jenes Trankes ».
(3) // Cor. III, 6; Rom. xv, 8. C'est l'acception des Septante. Hatch-Rgdpath. 303. Philon
qualifie les anges de uTroSiây.ovoi.
pour le maudire il ne pense qu'à l'eau vive qui désaltère les âmes,
:
celui « qui adhère à celui qui ne meurt pas sera lui aussi immortel ».
Ce langage est celui du Cantique des cantiques et de la Sagesse^ ai-je
dit, mais combien le symbolisme en est poussé loin, et combien net
nisé.
Sans doute, nous dira-t-on, mais le y 9 n'en est pas moins une
surcharge.
'
J'aime l'aimé, et mon àrae l'aime.
" Où est son repos, là aussi je suis,
'
et je ne serai pas un étranger,
(car il n'y a pas de haine auprès du Seigneur Très-Haut et miséricordieux).
* Je suis mêlé, car l'amant a trouvé celui qu'il aime,
^ parce que je l'o.imt', lui, le Fils, je dei tendrai /ils.
'" Oui, qui adhère à celui qui ne meurt pas sera lui aussi immortel.
" Et celui qui se complaît en la vie sera vivant.
'
Et je ne serai pas un étranger,
''
Parce que je l'aime, [lui, le Fils,) je deviendrai fils,
46 REVUE BIBLIQUE.
Ajoutez que les mots « hd le Fils » n'ont pas de sens, étant donné que
l'aimé ici est Dieu, le Seigneur, le Très-Haut. On pourrait les suppri-
mer comme une glose inintelligente (1). On aurait alors un texte tout
à fait plausible :
"
Et je ne serai pas un étranger,
* Parce que je l'aime, je deviendrai fils.
ceux qui ont des cantiques de la venue du Seigneur » [Marc, xi, 9-10?
Lîic. xiii, 35?), parce que « le Seigneur est proche » (5). Ces traits sont
chrétiens. —
Reste le morceau principal, ^" 3-18.
Le Seigneur s'est fait connaître au personnage qui parle il s'est :
(1) « Aber
Je suis heureux de voir que cette correction est proposée par Spitta, p. 270 :
fremdartig ist hier nur die den Sohn: (so auch Slaerk) ». Il
leicht auszulijsende Apposition
paru dans la Zeitschrifl fiir wissenschafttlche Théologie, 1910, que je n'ai pas à ma dis-
position.
(2) Sap. V, 5 : le juste est mis au rang des fils de Dieu (xais^oyiaôri hi uloï; 6£oO). Id. ii,
18 : le juste est fils de Dieu (ô ôixaioç utbç ôeoù). Id. ii, 13 : le juste s'appelle enfant du Sei-
gneur (TiaiSa xupîou éauTÔv ôvo[jLâÇ£t). Le juste est fils ou enfant de Dieu. Cf. Ode xiv, 1 :
« Comme les yeux du fils vers son père, ainsi mes yeux, o seigneur, sont sans cesse vers
toi. »
(3) M. Spitta rapproche Ode vu, l et Cantic. ii, 3-0. Et pour l'image de la « route », la
(( belle route », loa. xiv, 6 : I^m il\i.i r, ôSé:... oùSeî; sp'/^^*'- ^P^^î '^^^ iiatepa sî (xy) St' £[xoù.
(5) Didaché, x, 6 : èXÔÉtw X*P'? ''^^ TiapîXôixw ô xôffjxo; outoç. waavvà tû 6£o) AauîS. e'i ti;
àytô; ÈffTiv, èp^éffÔo). eï ti; oùv. sffTt, (iïxavostTw. (xapàv à6â. i.\x-f\-i. Cf. Apoc. xx, 20.
.
fait connaître par la science, qui lui a t-té communiquée en une théo-
phanie qu'il décrit ainsi :
'''
Le Seigaeur s'est fait connaître lui-même à moi libéralement* dans sa simplicité,
''"
car sa bonté a rapetissé sa grandeur.
''
Il est devenu comme moi
pour que Je le reçoiie.
*"
Par l'aspect il a été réputé semblable à moi
pour que je le revête.
'
Et je n'ai pas été effrayé en le voijant,
car ma miséricorde.
il est
**
Il est devenu comme ma nature
pour que je le comprenne
et comme ma figure
pour que Je ne me détourne pas de lui.
Pour M. Harnack, les y i''-8 sont chrétiens, car ils décrivent bel
et bien l'incarnation. C'est très exact. J'insisterai plus loin sur le
docétisme christologique qui s'y exprime. Mais les y i^-8 ne sont pas
les seuls versets chrétiens de YOde vu, et comme une enclave chré-
tienne dans une composition juive.
Car, si y i''-8 décrivent l'incarnation, les y li-iS s'appliquent à
les
décrire cette même manifestation de Dieu. Us sont donc chrétiens aussi.
'"Lui qui a créé la sagesse (3) est plus sage que ses créatures.
" Lui qui m'a créé, avant que je fusse, il savait ce que je ferais quand j'exis-
terais.
'- A cause de cela, il a eu pitié de moi dans sa grande miséricorde (4).
Et m'a accordé que je le prie
il
(1) Comparez Ode vin, 15-16 : « Je ne détourne pas mon visage de ceux qui sont à moi. »
Rapprochez loa. i, 11 : e'.: Ta to'.x v^î"'» ''•='• o- '-^'O- ^'J'à' oO -apÉXaoov. Pour M. Harnack, le
y 14 et le y 15 sont chrétiens.
(2) Je crois entendre ainsi : Dieu enfante la science ou gnose en tant qu'il la parle. Cf.
Eccli. XXIV, 3 (et 17'' : « Je suis la mère... de la science »'.
(3) Eccli. XXIV, 9 : Ttpô toC alôivo; à~' àpyf,; E/.t'.sÉv iaî, xaî £w; a'.ôJvo; oO ur, Èy./î-w. Avant
le temps, au commencement, il me créa, dit la Sagesse, et jusqu'à la fin du temps je ne
cesserai pas.
(4; Sap. XV, 1 : « Mais toi, ù notre D'ieu. tu es bon. vrai, magnifique, et tu gouvernes
tout avec miséricorde » '/.aH/.î'îi ô'.oi/.wv Tà:îivTa). Cf. Rom. i\, 15-16.
(5) Les mots « que je le prie » n'ont guère de sens. On attendrait plutôt « que je le
connaisse w.De même, « sacrifice » est inattendu. J'aimerais mieux « pensée » ou « cœur ».
48 REVUE BIBLIQUE.
^^ parce qu'il est incorruptible,
la plénitude des mondes et leur père (l,\
à ceux qui sont à lui. Elle est la route sur laquelle le prétendu
Salomon a marché, du principe jusqu'au terme. Dans VOde m. 9, il
disait « Parce que je l'aime, je deviendrai fils ». Ici il énonce que le
:
Fulle der Welten » par tô 7t/r,pwu.a lûiv xôofjiwv. Le mot :r).r,çw[j.a a son sens premier de
plénitude, infini, comme chez saint Paul {Ephes. i, 23; m, 19: Col. i, 19; n, 9); toutefois
saint Paul ne parle que de la plénitude de Dieu. Harris a compris comme si le texte vou-
lait dire t6 •jz/r.pwiia -rwv alwvtov, la plénitude des siècles, des temps, et celle leçon est très
séduisante. Cf. Toh. \ni, 6 •j-lùa'x-i tov fiaaiXÉa twv aitôvwv. / Tira, i, 17
: xài ^laù.zl :
« H a dirigé ma route ».
(3) Rapprochez Ode iv, S « Car ton sceau est connu », elc. Et encore Prov. iv, 18
: :
y 16 elle y 17.
(5) M. Spilta considère comme chrétiens les y 2'', 3, 5, 6. 7, 8. '.». 12, li, 15, 18, 19, 20,
21, 22, 23, 24. Qu'esl-ce qu'une interpolation alors?
LES ODES DE SALOMON. 49
'
Ouvrez, ouvrez vos cœurs à la joie du Seigneur,
- et qu'afflue votre amour du cœur à vos lèvres
'
pour produire des fruits pour le Seigaeur (une vie sainte',
et pour diminuer la sauvagerie à sa lumière.
* Levez-vous, redressez-vous,
vous qui autrefois avez été liurailiés!
' vous qui étiez dans le silence, parlez,
Alléluia !
est écrit : Éveille-toi, toi qui dors ; lève-toi d'entre les morts, et le
Christ t'illuminera » (Eph. v, li). Les commentateurs ont noté que ce
texte cité par saint Paul n'appartient pas à l'Ancien Testament, qu'on
ne le retrouve jusqu'ici dans aucun apocryphe, et que sans doute, à
en juger par à un hymne chrétien primitif (1).
le style, il doit être pris
(1) J. Weiss, Schi-iften des X. T., t. JI- (1908), p. 367. Le commentafeur (W. Lueken)
imagine un hymne destiné à être chanté pour le baptême.
(2) Phili. m, 1 ; IV, 4 ; / Thess. v, 16, etc.
(3) E. Prelschen, Antilegoniena (Giessen 1905), p. 27 : Muffxifiptov è[xôv t\i.o\ xaî toïç vilof;
TOÛ oiy.ou Ephes. m, 9 xoû jjiuffTïipioy -roO à7;oxexpu|j.|i.Evou aTcà twv avwvwv èv tû ôew.
(J.OÙ. Cf. :
Lactance a quelques lignes, où M. Harris signale une dépendance possible envers notre Ode
viu a ... Deo iubente ut quieti ac silentes arcanum eius in abdito atque intra nostram con-
:
scientiam teneamus... Abscondi enim tegique mysterium quam fidelissime oportet, maxime
a nobis, qui nomen fidei gerimus ». Lactant. Divin, inst. VII, 26, 8 (éd. Brandt, p. 667)-
LES ODES DE SALOMON. 51
les ^^ 23-26 : c'est toute ÏOde viii qui est chrétienne, encure que
d'un christianisme qu'il restera à définir.
i" Lexamen que nous venons de Odes m, vu. mu. où Ion faire des
dénonçait des interpolations chrétiennes évidentes, aura rais en lu-
mière, je l'espère, que ces trois O^es, d'abord, sont chrétiennes de
fond, et. en second lieu, qu'elles ne portent pas trace de surcharges
textuelles de seconde main. Ce que je dis des Odes m, ^^I, viii, je le
dirai des Odes xxxi, xli, xlii, dont M. Harnack Ij assimile le cas à
celui de rOf/e VII. En effet, s'agit-il de VOde xxxi, qui compte onze
versets, si les y 3-11 sont interpolés par une main chrétienne, comme
d'ailleurs les y 1-2 n'ont rien de spécifiquement juif, on ne peut
vraiment parler d'interpolation disons carrément, avec M. Gunkel. :
que cette Ode xxxi est toute chrétienne 2 N'hésitons pas à en dire .
autant des Odes xli et xlii. que M. Spitta lui-même (3) nous aban-
donne comme chrétiennes. Enlin ajoutons les Odes xix et xx^^I que
31. Harnack reconnaît comme l'œuvre de l'auteur chrétien. Ces con-
5 cela est arrivé par moi pour la gloire du Très-Haut et de Dieu mou Père.
^ Ils ont été rassemblés eu un seul groupe, les peuples qui étaient dispersés.
"
et j'ai été sans souillure dans mon amour,
pendant qu'on me louait dans les hauteurs;
des empreintes de lumières ont été placées sur leur cœur;
^^
ont marché dans ma vie, et ont été sauvés;
ils
Alléluia.
vérité vous délivrera ». Je suis devenu fort et robuste, j'ai fait captif
hommes] à moi » [loa. xu, 3-2). Cette conquête du monde n'est pas
nécessairement rétrospective, car on peut l'entendre commeà venir (3).
Tous les hommes seront rassemblés en un groupe notons l'universa- :
(1) Gunkel, p. 311. Harxack, p. 39 : o In dieser schwierigen Ode scheint der Dichter der
Prophet) im Namen des Messias zu sprechea ». Harkis, p. 103. croit aussi que le Christ
parle par la bouche de son prophète. Toutefois M. Harris incline à penser que les pre-
ici
Acla Pliilipoi. lli. Batufol. art. «Abercius», p. 62. à\i Dictionn.de Théologie de\xc\yT.
LES ODES UE SALOMON. 53
ma vie, ils sont sauvés, ils sont avec moi pour l'éternité : « Tu as à
Sardes quelques-uns qui n'ont pas souillé leurs vêtements : ceux-là mar-
cheront avec moi en vêtements blancs, parce qu'ils en sont dignes »,
*
J'ai été couronné par mon Dieu,
il est ma couronne vivante.
- J'ai été justiûé par mon Seigneur;
mon salut est incorruptible.
' J'ai été délivré de la vanité, et je ne suis pas un condamné.
'*
Mes liens ont été tranchés par ses mains.
J'ai pris un visage et l'apparence d'un personnage nouveau;
j'y suis entré et j'ai été sauvé.
* La pensée de la vérité m'a conduit.
et je suis allé derrière elle et je n'ai pas erré.
•^
Tous ceux qui m'ont vu ont été étonnés,
et je leur suis apparu comme un étranger;
''
et celui qui me connaissait
et le Seigûeur m'a éduqué en toute sa perfection;
il m'a honoré, dans sa suavité,
et il a élevé ma conscience jusqu'à la hauteur de sa vérité.
s A partir de ce point il m'a donné la route de ses préceptes.
J'ai ouvert des portes qui étaient fermées
" et j'ai brisé les verrous
de fer
devenu rouge et s'est liquéfié devant moi)
(or le fer est ;
(1) Apoc.m, 4. — Le y 7: «Jai été sans souillure dans mon amour, pendant qu'on me louait
dans les hauteurs », n'a guère de sens. Le contexte suggère Ils ont clé sans souillure
.•
dans mon amour. Comparer Ode xni, 3 « : Soyez sans tache en tout temps auprès de
lui ». On ne voit pas comment M. Harris pourrait défendre son interprétation : « In our
Ode Christ explains Ihat the réception of the Gentiles had not polluted Him ».
Le Salomon qui parle a été couronné par Dieu, justifié par le Sei-
gneur, délivré de la vanité, de prisonnier il est devenu libre, ses
liens ont été tranchés par les mains du Seigneur ces expressions des :
pelle Ode VII, 3. J'ai semé mes fruits dans les cœurs l'image évan- :
gélique du Semeur qui sème la parole de Dieu. Ceux que j'ai conquis
ainsi ont reçu ma bénédiction Dieu seul bénit. Ils vivent, ils sont
:
sauvés, ils sont rassemblés en l'être qui parle, ils sont des membres
et il est leur tête et ceci évoque l'image paulinienne du corps du
:
(Christ dont les fidèles sont les membres et le Christ la tête (2). M. Har-
(1) Glnkel, Pour M. G. le Christ a été dans la vanité quand il était homme-, sur
p. 307.
la croix, un condamné; puis il est délivre par Dieu, et couronné de la couronne de
il a été
vie. M. G. est obligé de dire que par « tous ceux qui m'ont vu », l'auteur désigne leséons.
(2) Rom. xu, 5; / Cor. xi, 3; xii, 27; Eph. iv, 20; v, 23. etc.
(3) Voyez Oile xvin, 7-8 « Tu accueilleras [les hommes] de partout, et tu garderas tous
:
est lui-même la porte du Père (aOrôc wv 6ypa toû iraipô;) par laquelle entrent Abraham,
Isaac, Jacob, les prophètes, les apôtres et l'Église.
LES ODES DE SALOMON. 55
drait d'une christologie docète les expressions comme celles-ci : " J'ai
* et afin qu'il n'arrivât rien d'inutile, elle ne demanda pas de sage-femme pour
l'assister;
Deux parties dans cette ode, y l-ô et 6-10. La seconde partie est,
dans les^' 6-8', une sorte de récit, d'une rédaction qui n'a pas d'ana-
logue dans le reste du recueil, et qu'il semble difficile de prendre
pour une ode. Les y 8'-10 ont au contraire une allure plus rythmique
qu'aucune autre portion de nos Odes. Je ne serais pas éloigné de
croireque M. Harnack a raison de voir dans cette Ode xix quelque
chose de composite.
Mais la première partie y l-.j est hien, quoi qu'on dise, dans le
style du reste du recueil. L'étonnante image des mamelles de Dieu,
nous l'avons rencontrée déjà dans ÏOde viii, 17 u Je les ai, dit le :
même réalité que symbolisait, dans ïOde vi, 7-11, le torrent d'eau
vive qui a désaltéré les assoiffés de la terre. Raison de plus pour rat-
tacher XIX aux autres odes du recueil (2). L'Of/eiv, 10, disait à
l'Oflfe
gneur ».
Le lait des mamelles du Père n'est pas le Fils le Fils est seulement :
la coupe où le lait a été versé par le saint Esprit. Dans le Fils est
donné au monde le mélange divin (3). Le monde ne l'a pas connu,
mais ceux qui le reçoivent pleinement sont à la droite de Dieu « A :
ma droite j'ai placé les élus », disait déjà l'Ode viii, 21. Le Père, l'Es-
prit, le Fils : VOdexix énonce les trois vocables, sans nous éclairer
sur la Trinité. L'Esprit saint sert d'intermédiaire entre le Père et le
monde : il mamelles du Père et verse au monde le lait. Le
trait les
Fils est, pourrait-on croire, subordonné à l'Esprit il est la coupe :
haben wir also ein von Anfang bis zum Ende chrislliche Ode, die unter die anderen einge-
itiengt ist. » L'Ode xix (y 1-5 au moins) lient aux autres odes par son symbolisme et sa
mjslique, loin d'y faire ligure exotique.
(3) M. Harris, p. 116 : It is conceivable Ihat the allusion in ilie Cup of Milk may
cover an early Milk-Eacharist ». Interprétation sans analogue; notre interprétation, au con-
traire, s'accorde avec / Pet. ii, 2-3.
LES ODES DE SALOMOX. o"
mot obscur est traduit with manij mercies par M. Harris, mit vielen
Gnaden par Flemming. Peut-être doit-on entendre La vierge pleine :
Et aller proplieta dicit honoriflcatum patrem : iVcçwc vocem illius audivimus neqiie
ohstetrix subit (1).
£'.fiav£pojÔr, £v cap/.î,
soixaitôOr, £v 7rv£iju.aTt,
iy.r^i^{)/bt\ £v sQvsffiv,
£7rt<7T£lj6vi £V X0CTU.CO,
La strophe que l'on peut restituer dans notre Ode xix, avec les
^ 8''-10, est dessinée sur le même modèle, avec pour sujet non le Christ,
mais la Vierge.
J'avoue être profondément étonné qu'aucun critique, jusqu'à ce
jour, n'ait bronché devant le ^- S'' et le ^- 9. M. Harris et M. Flemming
Acta aposlolorum npocrypha (éd. Lipsils-Bonnet), I (Leipzig 1891), p. 72. Les mots
(1)
loco descendit». La source de cette seconde citation est encore inconnue. — Les Actus Pétri
cum Simone remonlentau ii" siècle. — L'idée de faire intervenir une sage-femme est une
imagination aulidocète qui apparaît à la (in du ii" siècle. Elle est attestée par Clément. Al.
Stromat. vu, 16 (éd. Staehlin, p. 66;. On la retrouve dans le Protévangile de Jacques,
xviii-xx (éd. Michel, p. 37-43).
(2) J. Weiss, Schriften des X. 7"., t. II, p. 407 « Wir haben : liier ein Stùck Liturgie
vor uns; es gliedert sich in drei symmetrische Satzpaare... »
58 REVUE BIBLIQUE.
ment ». Et cette traduction met sur la voie du seul sens possible. Car
il est clair que, y puisse mettre, un homme
quelque volonté qu'il
n'enfante pasi La leçon syriaque est donc manifestement inepte.
L'énigme posée par cette ineptie se résout, semble-t-il, au mieux,
si l'on admet que la Vierge a enfanté un lils qui est « comme un
jeu ici que pour la volonté de Dieu. Cela suggère que peut-être le
grec original portait à/. hi/.r,'^.x-oç, en sous-entendant ou en restituant
6£2j. Nous savons que, au second siècle, certains entendaient du Verbe
a'.p.â-a)v ojoà à/, 6£Ar,;j.aT;c sapy/cç cjO£ kv. hùà,'^^-zç àvcpiç, xk'k kv, G£ou
-< f)thr,-^.oc-cz >> £Y£vvy;Oy; (^pour b;vr>rfir,axwi. Cette leçon, attestée par
TertulUen, par saint Irénée, par saint Justin, par le codex Veronensis
de l'ancienne Latine (2), a toutes les apparences d'une altération in-
troduite dans le texte original en vue d'en faire un argument sans
réplique contre l'erreur de ceux qui n'acceptaient pas la conception
virginale, les soi-disant Ebionites i3;.
Le sens que je viens de restituer au ^' S'' se trouve s'accorder
avec le sens du ^' 9 : u Elle l'enfanta en exemple, elle le posséda
en grande puissance L'enfantement virginal n'est pas un exemple
».
(1) Cf. Adxmantils, Dialog. v, 9 (^édit. Bakhlïzen, 1901, p. 191} : « Eliam nos contitemur
quia per Mariam natus est, sed noii de Maria. Sicut enim aqua per tistulani transit, nihil
e\ ea accipiens, lia eliam verbum Dei jjcr Mariam transiliim fecit. sed non de Maria aliquid
sumsit ». Id. 4 (p. 179) : « lon-r^n: id est putative dicimus eum assumsisse corpus, sicut et
angeli qui visi sunt Abrahae... » Cf. Iue\. Haer. I, 23, 1 : « [Simon magus] docuit semet-
ipsum esse, qui inter ludaeos quidem quasi Filius apparuerit, iu Sau)aria autem quasi Pater
descendeiit, in reliquis vero gentibus quasi Spiritus sanclus adventaverit. >> Le grec (con-
servé par Théodoret) porte : w; uiov çavriva-., ... tb; Traxâpa 7.aTî).r,/.y9£va'., ... w; lîveOfia âyiov
(3) Tertllliax. J)e carne Chrisli, 24 El non ex sanguine neque ex cnrnis et viri
: «
voluntate sed ex Deo natus esi Hebioni [Deus] respondit ». Cf. Id. 19. Iren. Haer. III, —
16, 2: 19, 2; 21, 5. — Ilstin. Dialog. Lxiu, 2, avec la note de M. Archambault, p. 296-
298.
LES ODES DE SALOMON. 59
^'"
(oç avôpojTTOv £Y£vvrj(7£v lie OeX-^ixatoç,
^ £Y£vvr,(j£v £V ôaoio)fAaTt,
IxTr^ffaxo £v ouvaixEi,
^'^'
'?i'^d'r:ri(JS'^ £v awTyjpt'a,
lcpuXa;£v £v EÙ'^pocuvvi
£cpav£pcua£v Iv ui.£YaXeiOTr|Ti.
Nous aurions là, surtout dans les ^8''-9, une formule docète d'une
rare netteté. Que l'on veuille bien rapprocher les f 4-8 de ÏOde vu,
et juger s'ils s'accordent à mon hypothèse : « Sa bonté a rapetissé
sa grandeur, devenu comme moi pour que je le reçoive, par
il est
l'aspect il a été réputé semblable à moi pour que je le revête..., il
est devenu comme ma nature pour que je le comprenne, et comme
ma figure pour que je ne me détourne pas de lui ». Cette christologie
est celle des docètes.
{A suivre.)
Pierre Batiffol.
(1) lusTm. Dialog. liv, 2 (p. 240) : oOz. è? âvQpojTro-j av:i^[i.7.-o;, à>.).' i/. tv^; io-j ôeoO ô-jvâ-
ou EN EST LA OLESTION DU RECENSEMENT
DE QITRIMLS?
La question soulevée par deux versets de saint Luc ii, 1-2) a déjà
fait couler beaucoup d'encre; mais elle est toujours agitée, et il faut
bien que cette Revue tienne ses lecteurs au courant des fluctuations de
la critique. Mon intention nest pas de la reprendre en entier; je
suppose que les termes de la discussion sont connus.
M. Loisy prend les choses de très haut « La façon dont le recense-
:
lée; d'ailleurs, d'après Luc lui-même, Jésus avait alors di\ ans. On voit
assez que loin de chercher à expliquer saint Luc, M. Loisy serait plutôt
porté à le tourner en ridicule. Disons, pour n'y plus revenir, que cet
exégète s'est fait une idée assez étrange, et même fausse, du monde
oriental. Saint Luc ne se serait pas inquiété de la difficulté qu'il y
aurait eu « pour la masse des Juifs à retrouver leur arbre généalogique,
le nom de l'ancêtre contemporain du fils d'Isaï, et la patrie de cet
que, et même
l'exposé, il a ramené le recensement dont parle saint
Luc à l'an 6 ou 5 avant J.-C.
Ce système, traité assez dédaigneusement par M. Schûrer (4), ne
pouvait qu'être accueilli avec sympathie par les écrivains catholiques.
Cependant M. le chanoine Valbuena n'en fait aucun usage dans sa
dissertation (1). Il a été discuté avec soin par MM. Grenfell et Hunt,
dont l'autorité en matière de papyrus est tout à fait au premier
rang- (2).
L'existence absolument certaine; on a de
du cycle de li ans est
nombreux exemples, de l'an 62 ap. J.-C. à l'an 202 (3). xMais de plus
on ne peut raisonnablement douter du recensement de l'an 20 ap.
J.-C. Même il y a de bonnes raisons de croire qu'il y eut un recense-
ment en Tan 10-9 av. J.-C. et un autre en 5 et 6 ap. J.-C, dans la '2V
et la 35" année d'Auguste.
Il y a plus il semble établi que le recensement de l'an 10-9 fut le
:
clusion vers laquelle convergent les données des deux côtés, c'est que
le cycle de quatorze ans a été institué par Auguste. Il est probable qu'il
savoir ce que les Syriens entendaient par leur propre ville. Il n'est pas
déraisonnable de supposer que l'organisation sociale étant différente,
le procédé de recensement fût différent (5).
D'ailleurs rien n'empêche de supposer que Joseph avait d'abord
habité Bethléem. Il s'agissait pour lui de faire constater sa présence à
Muséum (Kenyon, III, 124 ss.), de loi ap. J.-C. « Gabius Vibius Maximus, préfet d'Egypte,
:
[dit] Puisque le temps est venu du recensement maison par maison, il est nécessaire d'obliger
:
ceux qui, pour une cause quelconque, résident bors de leurs districts de retourner à leurs
propres domiciles afin qu'ils puissent se tenir à l'ordre régulier du recensement, et veiller
avec diligence à la culture de leurs lois. »
ou EN EST LA QLESTION DU RECENSEMENT DE nUlRINIUS? 63
son lieu d'origine, sauf à déclarer en mrme temps (\i\e son domicile
actuel était Nazareth.
L'analogie de l'Egypte n'est assurément pas à dédaigner, nous y —
reviendrons, — mais rien
de tout cela ne fait avancer la question de
Quirinius. Au contraire, si le recensement a eu lieu en l'an 8, nous
sommes assez loin de sa première légation qui n'a pu commencer
qu'après la mort d'Hérode, et même quelques mois après, au plus tôt
pendant l'été de l'an i av. J.-C.
On admet aujourd'hui assez généralement que P. Sulpicius Quirinius
a été deux fois gouverneur de Syrie, avec le titre officiel de legatiis
Aiigusti pro praetore Syi'iae. la Syrie étant une province impériale,
qu'Auguste faisait administrer directement par ses lésats.
La première légation ne peut pas. disions-nous, avoir eu lieu avant
l'été de l'an i av. J.-C. : elle ne peut s'être prolongée au delà de l'an 3
ap. J.-C, puisque L. Volusius Saturninus a été gouverneur en l'an i
ap. J.-C. Il est même plus vraisemblable que Quirinius n'avait plus le
titre officiel de gouverneur de Syrie en l'an 1 av. J.-C, au moment
où C César, petit-fils d'Auguste, fut envoyé en Orient.
La seconde légation de Quirinius commence en l'an G ap. J.-C
Rappelons, pour l'intelligence de ce qui va suivre, que cette se-
conde légation s'appuie uniquement sur l'autorité de Josèphe.
Personne jusquà ces derniers temps ne lavait mise en discussion.
C'est ce qu'a fait M. Zahn. et c'est à ce moment que la controverse a pris
un aspect nouveau. D'après ce savant (1). Quirinius n'a été qu'une fois
gouverneur de Syrie, et n'a fait le recensement qu'une fois, de l'au-
tomne de i av. J.-C à l'an 3 av. J.-C. Josèphe s'est donc trompé. Et
la preuve qu il s'est trompé, c'est qu'il répète deux fois les mêmes
faits, une fois après la mort d'Hérode. et une fois après le bannisse-
ment d'Archélaiis. C'est ainsi que le grand prêtre Joazar a été déposé
deux fois, par Archélaiis après la mort d'Hérode [Ant., XVII, xiii, 1),
et par Quirinius au temps du recensement de l'an G ap. J.-C Ant.,
XVIII, II. 1). Il y a eu deux soulèvements de Judas, l'un après la
mort d'Hérode [Ant., XVII, x, 5 et Bell., II, iv, 1). et l'autre à l'occa-
sion du recensement {Ant., XVIII. i, 1 et XX, v, 2, et Bell.^ III, xviii,
8; VII, VIII, 1\ Josèphe ayant confondu, c'est Luc qu'il faut suivre.
Encore est-il que Luc. d'après M. Zahn, a eu le tort de croire que
le recensement de Quirinius a précédé la mort d'Hérode. Son erreur,
moindre que celle de Josèphe. n'en serait pas moins fatale.
(1) Zahn, Die syriscke Stalthalterschaft und die Schatzunrj des Quirinius [Neue kivch-
liche ZeUschrifl, 1893. p. 633-654) et Einleitung in dos X. T., III, p. 395 s., 415 s.
64 REVUE BIBLIQUE.
pas nommés dans la Guerre (p. 316). Que fait-il de passages comme
Bell., llxviu 8 ou VII, vin, 1?
D'ailleurs M. Weber ne semble pas que Sabinus figure
se douter
seconde légation de Quirinius. Que Josèphe soit très mal informé sur
le règ-ne d'Archélaiis. cela saute aux yeux, puisqu'il n'en dit à peu
près rien. Mais cette réserve même autorise son affirmation quant à
Tannée où Quirinius fit le recensement, en Tan 6 ap. J.-C. au mo-
ment où Archélaùs fut envoyé en Gaule. Sur l'année du bannissement,
Josèphe coïncide avec Dion Cassius •2) il est donc bien informé quant
;
elles sont établies, loin de prouver qu'il n'y eut quun recensement,
qui aurait eu lieu une dizaine d'années plus tôt, supposent plutôt
qu'il y eut deux recensements, et que ce qui se passa lors du premier
fut ensuite assigné au second par suite dune méprise.
Cette modification admise, absolument impossible de mettre
il est
(le plus n'est pas pour faire reculer des critiques comme M. Spitta
qui donneraient sans hésiter la préférence à Luc. C'est ce que nous ne
pouvons faire, et il ne nous reste plus qu à insister sur la solution qui
nous parait le plus en harmonie avec l'ensemble des faits réunis jus-
qu'à ce jour.
y a deux points à traiter séparément 1" le recensement sous le
Il :
il) Dio\. LUI, 22. xal aOTàiv xà; àTîoyp*?*^ è^oiriffaTo. Ln., Ep. CXXXIV
.">
: Cum ille :
coiivenUim Narbone ageiet, census a Uibus Galliis, quae Caesar pater viceral, actus.
xàvTEùffîv s; tî tt.v 'Ioy,pîav àsî/.sTo, xal -/aTs-
(2) Dion cite à la note précédente continue
:
l'ail l 'i aj>. .I.-C, l'année même de la mort d'Auguste, nriuveau recen-
s(Mnen1 en <.aule '
1).
(i) Tac, .!/(/(.. I, 31 : Gcriiiaiiicum aiiendo Galliarurn cmsiiilum iiilciiUiiii ; cl. I. 33.
(2) Ant., XVU, 13, .5: âTrox'.jxriTÔu.îvô; ~t ~7. =v Ivoia •/.ai tov Ap7£)âou àTrooaxroiAsvù; oî/.ov.
avoir lieu en Palestine au temps du roi Hérode, rex socius qui levait
les impôts lui-même, sauf à payer, ce qui n'est pas prouvé, un — —
tribut à Auguste.
L'argument serait démonstratif si nous avions affaire à des catégo-
(1) LUI. 17. 7 : y.al àTCoypacçà; roioùvTa'. (les empereurs) /.al tov; [aèv %'x-'£i.i-o-ja\ xai s;
T^v i7i7:à&a xal È; tô povXs'JTixov.
(2) LU, 42, 1 : •/.ai [jisTà Taùta T'.[iriTEÛ5a<; aOv tû 'Ay^tTiTra â)./.a t£ Tiva oitôpôaxTe v.aî Trv
Po'u).iriv èlrjaffE. Cf. LIIL 1, 3 : xai Ta; àTToypcxsa; i^zzù.zat, xai iv aCi-aï; T^çôxpito; Trj: •^too'j-
ffta; £7t£xXy;6r,.
Dans mon enfance j ai entendu chanter à Autun une sorte de clianson historique; on
(4)
disait quand un décret de sa ioute-puissunce changea BUiracie en Augnstodunum.
:
(1) AiU.,W\, 9, 3 : Ta TEÔtXXa /«Xeirû; /.at To^to xf^; ÈTtiffToXïi; tô y.£:pdt)atov, oxi Ttâ),at -/fi(i')(j.£vo;
(2) Le Messianisme..., p. 14 s.
(3) Ant., XVII, 2, 4 : Tta.yxôi jow tou 'louSaiV.où pEëotKJaavTOî 6i' ôpy.wv r, |xy)v EÙvoy,o£iv
Kaîffapi xaî toI; pacrtAEw; nç,6i.y\maiv. Cf. Dittenberger, Orientis fjraeci inscr. sel., n» 532 :
'Ofjiv'jw îùvoT^CTEiv Kaiaapi... Le texte latin de ces sortes de serments était déjà connu.
70 REVUE BIBLIQUE.
tullien ait tenu en apparence si peu de compte des termes de saint Luc.
S'il s'est écarté de lui, c'est qu'il avait une source : Sed et census con-
stat actos sub Aiigusto nunc in Jiidaea per Sentium Salurniniim apiid
quos genus- ejus inquirere potuissent {2\ Les apologistes de saint Luc
ont essayé de réduire l'antinomie en supposant que Sentius Satur-
ninus avait agi comme commissaire de Quirinius. Il est vrai que les
légats pouvaient charger leurs procurateurs de faire le recensement
d'une région déterminée, mais Sentius Saturninus, personnage con-
sulaire, probablement ex-proconsul d'Afrique (3;, ne pouvait jouer
le rôle d'un procurateur aux ordres de Quirinius. Il faut simplement
(3) Il n'est pas nécessaire d'entendre avec le s\iiaque sinaïtii[ue » parce que tous deux
OL EN EST LA OUESTION DU RECENSEMEM ItK (M IHIMIS .'
:t
verneur de Syrie ».
ilaienl de lu famille de David »'. C est là une glo^e. Glose peul-elre aussi dans la leçou du
V. 3 ;chacun allait pour être recensé; rnèrne on quittait sa ville pour aller dans son lieu
•
propre pour y être recensé . Mais la traduction a le sens très juste en Syrie de la dis-
,
(XII. 5. 3) qu'il dompta les Homonades de Cilicie qui avaient tué leur roi Aniyntas. Dès
lors comment ne pas attribuer à Quirinius l'inscription de Tibur qui débute probablement
par une allusion à un roi?
qui avait procuré à Quirinius les honneurs du triomphe (cf. Dessai-, In.<;c...,n'' 'J18).
t «.xîoyjii^vaTo. Mêmes faits dans Bell., IL 2, 2.Deplus Ant.. XVII, 9, 4 et 5 et Bell., II, 2,
ou EN EST r.A QUESTION DU RECENSE.MK.M DE nUlHIMUs .'
73
4: Aat.,X\n. 10, 1-9 et Util.. H. 3. 1 . II. 5, 2. De ces textes M. Weber conclut à tort que
Sabinus était supérieur à Varus. Il était seulement indépemianl de lu! pour sa mission spé-
ciale.
prêtre par Hérode (2) vers l'an i av. J.-C, parce qu'il inspirait plus de
confiance au vieux despote que Matthias, impliqué dans les derniers
troubles. Il fut, d'après Josèphe, déposé par Archélaiis au début de
son règne, comme ayant trempé dans l'insurrection qui éclata contre
lui à la mort d'Hérode (3) Puis nous le retrouvons grand prêtre quand
.
est déposé par Quirinius à cause de l'opposition que lui fait la popu-
lace (3).
Tout cela est possible à la rigueur, mais vraiment ce n'est guère
vraisemblable. Quirinius, homme politique de grande envergure,
aurait sacrifié lâchement un docile personnage qui s'était fait l'instru-
ment de la politique romaine. Et comment ce Joazar, si conciliant,
aurait-il été mêlé à la première sédition? Tout s'expliquerait beau-
coup mieux s'il n'y avait eu qu'une déposition, la première. Lorsqu'on
exigea le serment à César vers l'an 7 av. J.-C, plus de six mille Pha-
risiens le refusèrent. Depuis lors l'agitation ne fit que grandir. Joazar
est nommé par Hérode pour soutenir le parti de l'ordre. C'est à ce
moment qu'il faudrait placer ce que dit Josèphe, qu'il prêcha la sou-
mission. Il était donc compromis dans le parti romain, et opposé à Ar-
chélaiis qui s'empressa de le déposer quand Auguste l'eut mis en
possession du petit état que lui avait légué scm père. Il est donc vrai-
semblable que Josèphe a Confondu les deux circonstances, parce qu'il
ne pouvait placer (ju'après l'an 6 ap. J.-C ce qui avait rapport à un
recensement, n'ayant pas compris la vraie nature de l'opération com-
(1) ScHiiREK, Gescliichte..., II, J'O. ue distingue pas deux Jozaros. l'un IjIn deSiinoii, l'autre
fils de Boéthos comme Niese. Indexa, parce que si Simon n'était pas Boéthos. il était du
moins son fils.
[b)Ant., XVTII, 2. l.
ol KN EST LA nLESTlUN Dl HtCENSEMEM HE nLlHlMLS.
entendu parler de recensement a mis les faits après l'an 6 ap. J.-C.,
mais, ayant déjà donné à la révolte de Judas son vrai caractère,
et ne pouvant s'appuyer sur aucun document pour le mettre en scène
'3) .-ln<., XVIII. 1. 1 : 'loOoa: oè Fa'j/xvi-r,; àv/;p£x tiô/îw; ôvojxa iâoat/a... WIll. 1.6: X.X.
5. 1.
i) Bell.. 11.8, 1 : '?.T^\ xùizù-j {Cuîtoniiis) z::, i'rr,ç, raXi/aîo; 'lo-ica; ôvoua zli i-O'yzftfS'.-j ï'tf,yz
Tov; iTî'.ytop'.O'j; y.axiÇwv, î'. sôpo-^ t£ 'Ptoiiaîoi; 'ùi'.y •jTToy.îvo'j'j'.v y.a; u.îTà TÔv 8çov olTOva-. 5vr,-
de grave
départ d'une scission très dans la secte, car jusqu'alors les
mier recensement (de l'an 6 après J.-C. qui eut lieu pendant que ,
tables.
de deux; il ne faut pas lui imputer trop d erreurs: c est bien assez
qu'il ait cru par erreur à un recensement général l 'i- 1 Mais rien, di-
ront les partisans de ropinion ([ue nous présentons ici. ne nous auto-
Iaic. et qui vieut trop tard, que de lui épargner cette erreur pré-
tendue.
Le parti que prend .M. Loisy est encore plus étrange. Dans son texte
courant : « Ce n'est pas sans quelque subtilité qu'on veut extraire du
texte l'idée de plusieurs recensements exécutés par
les ordres du
même en note
gouverneui' Huirinius u C'est l'interprétation ». et ;
Luc s'est placé au point de vue juif et palestinien, quand il sest placé
en termes exprès au point de vue mondial.
Voilà donc un premier sens auquel il n'y a rien à ««bjecter gram-
maticalement, qui n'est pas moins naturel que celui que supposent les
critiques, et qui parait conforme à l'intention de Luc d'après le con-
texte. C'est à cette interprétation que semble s'arrêter maintenant la
majorité des cinnmentateurs catholiques (jj. Elle suffit à justifier
pleinement Luc de la confusion qu'on lui reproche. Si Luc distingue
deuK recensements opérés par (Juirinius. il n'a donc pas antidaté de
1, B. Weiss. Cnniineutaire, 9' éd.: J. Wkiss. Die Schriflen des yi-uen Test.. 19ii7,
I'. i>4 : Luc, dans une phrase qui n'est pas parfaitement claire, semble distinguer un jue-
iiiier recensement d'un autre de lan 7.
Les exégètes assez sages pour ne pas risquer une conciliation trop
exacte se contentent ici d'un à peu près. L'approximation est suffi-
sante pour un évangéliste qui a dit au temps d'Hérode » (i, 5), sans ((
de Quirinius, parce qu'il était plus connu, ayant été légat deux fois,
et on ne peut pas prouver, en somme, que ce gouverneur n'a pas ter-
miné le premier recensement (1). Dans le silence de l'histoire, on
tranche le doute en faveur de Luc,
U serait sans doute trop hardi de nier la solide probabilité de ce
système. Au point de vue apologétique et scientifique, il ei^t irrépro-
chable; il défend la véracité de l'auteur sacré, et il ne la défend
qu'en interprétant correctement l'histoire.
Mais je suis persuadé, pour ma part, qu'on serait plus exact en sui-
vant la voie ouverte par des exégètes et des critiques d'une grande
valeur et qui tranche la question d'une façon beaucoup plus radicale.
Calmet Wallon (3) en France, Huschke, Wieseler, Ewald, Cas-
(2) et
pari en Allemagne (i), ont traduit notre verset « Ce recensement :
(1) Knabenbauer semble abriter Luc derrière une opinion populaire « Porro notandnin :
est facillime fieri pofuisse, ut illa descriptio apud popiilum nomen haberet ab eo su/i
t/uo illa absolula erat, procsertim quia idem postea allerum censum egit » {Cotn..
(2) Commentaire.
(Z) De la croyance due à VEvangile, 2* éd., p. 527.
(4) Cités par Schiirer, Geachichte.... p. 535, Je n'ai pu consulter aucun de ces travaux.
ou EN EST LA QUESTION DU RECENSEMENT DE QUIRINIUS? «i
qu'on soupçonne aisément les copistes davoir altéré les textes dans
effacé \j.z\) dans le texte d'Élien et mis r.zz-i^zz dans le texte du schol.
d'Aristophane. Mais on peut se demander si ce n'est point là un excès
de zèle. Une tournure qni figure dans Homère il) et qui se retrouve
dans le grec byzantin a toute chance d'appartenir au génie même
de la langue. Les papyrus, il est vrai, n'ont apporté à ma connais-
sance qu'un cas nouveau, zz-j -pwTJç s-y.-.. cité par M. Moulton 2), mais
ils ont permis de constater une fois de plus combien le comparatif
était rare dans la Koiné, et M. Moulton pense qu'il n'v a plus de rai-
ans après tou au plus. Les jeunes gens nés dans la phratrie ofi'raient,
le troisième jOur des Apaiuries. un sacrifice nommé koureion. Lu
an aprer? seulement on votait sur leur admission formelle à la
phratrie : ~.r^i zz C'.as'.y.xjiav zz /.:•-":•/ iva-. Sm'. Jzrizt,): ï~z'. f mi iv t":
•/ipEov hùc-r,'. (i), ce qui est traduit dans le Recueil des inscriptions
juridiques grecques [o) : « A l'avenir, le vote d'admission aura
lieu une année après l'offrande du koureion -. H parait que cette
prét^rtution —
sans parler des autres mentionnées dans le décret
ne fut pas suffisante, car le dernier règlement exige de plus y-z-zy- :
avant l'offrande du koureion ». Donc zpw-::; est pris ici pour r.z'z-.izzz.
Je sais bien que M. Dittenberger a refusé d'admettre ce fait pour une
(2) Grammaire..., p. 79, d'après un papyrus de Levde ii- m' s. ap. J.-G.
(3) Dittenberger, Sylloge, 2' éd., 439.
(4) Ligne 26 ss.
(5) Par MM. Dareste, Haussoulier et Th. Reinach, deuxième série, p. 201.
(6) L. 117 ss.
décret entre -j^-iziù'. ï-v. et Trcw-rtoi ï-v.. H faut de plus supposer une
ellipse fort dure avant le r, comparatif, la première année « après »
que, et cela avec l'indicatif présent i-;;-,. Tandis que la locution to>
née qui suit l'offrande du koureion ». mais alors ttcwto) n'aurait plus
aucun sens, et le délai serait bien vague.
Osant à peine m'inscrire contre l'autorité de pareils maîtres, je
me suis rassuré en trouvant que le sens proposé était celui de
M. Meisterhans i3i et de M. von Schoeffer (i). Voilà donc un cas
très net où ttcwt;; doit se traduire « avant ».
(1) L. l, p. 207.
(2) « Le délai d'un an (et non de deux ans), prévu par le décret de Ménexenos.
P. 223 :
permettra aux phratères de se renseigner et de contrôler les indications portées sur laf-
fiche ».
£|jLo\
Yàp o'j03"tç àn'w; ïsTxt (1 ) y^iJi-o?
duisant (2) »,
(pour TYjç ÉTÉpojv zapo'.y.r,7£a)çj twv se îyz'j.z-i \ cf. Thic, I, lxxi, 3 ; Xéx. ,
Cyr., IV, III, 7 : û o" y;;;.;^ç irTT'.y.bv /.-.r^zy.vj.ihy. \j.'r, yj-ipz/ -roJTwv. Assuré-
ment nous ne dirions pas : « Je possède une maison meilleure que
toi » ; les Grecs n'auraient pas reculé devant cette expression, voilà
la différence (4).
Il semble que ces exemples donnent toute satisfaction aux instances
de M. Schûrer. Au lieu d'un idiotisme, il en faut supposer deux. Le
rôle du participe après la comparaison contenue virtuellement dans
T.pÛKTt est le même que dans la phrase des LXX souvent citée jsTspov :
à'fsXOivT:; 'Is'/ivicj è; "l£c:j7a/.r,;j. ' Jer. ,xxxvi, 2; hébr.xxix, 2), qu'il faut
(1) Ou à;iwaîTa'..
(2) C'est d'ailleurs une règle générale que le terme surpassé peut être un nom de per-
sonne, et l'autre terme un nom de chose (RIEM\^^' et Goelzek, t. II, 669j. ;".
plus clair. Mais nier qu'il ait pu s'exprimer d'une façon trop concise
pour être très claire, c'est vraiment prendre beaucoup do soin de sa ré-
putation littéraire, quand on sacrifies! aisément ses connaissances his-
toriques !
Weiss [i) objecte que Luc aurait dû écrire -pz t:u y;y£;j.cv£J£'.v ou zplv...
prété Trponr; r,-t).ipy: dans le sens de 7:pb -f,: -i^-j.ipx:, et il semble bien
que ce soit le cas même ici, pour Théophylacte '2), du moins d'après
un manuscrit.
Pour tout dire, si nous inclinons dans le sens d'une solution qui
ici
(1) Commentaire, 1. I.
(2) Cf. Wallon, p. 527. Le texte est cité par Reinold : to-jtétti TtpoTêoa r,ytiLO-iVJO^-o;.
of manuici-ipts... British Muséum, 1906 The présent ms. was vvritten in A. D. 464 and
:
is one of the eariiest estant copies of the Peshitto, ani the earliest MS. of the Bible in
any language of which the exact date is known. Cf. Catalogue of Sijriac mss... by
\\. Wrirjht, p. 3 sq.
3) M. Margolionth a vérifié ma lecture et constaté qu'elle était exacte.
'4; J'ai mis entre crochets les mots que je n'ai pu lire, mais pour lesquels il y a une
place suffisante.
(5) Le premier mot est peut-être )w^^, mais je n'ai pas eu le temps d'examiner le texte
assez soigneusement pour proposer cette lecture comme certaine.
86 REVUE BIBLIQUE.
existe encore 7V, 75, 75\ 83, 8i% 85\ 86\ 92\ 9k\ 96, 100\ 102.
:
103, 108% 113\ 118\ 122\124(2). Il est possible que d'autres fois en-
core le titre ait été écrit, et qu'il ait disparu au moment où les feuille?
furent rognées dans le nouveau manuscrit; c'est ainsi cpi'au f. 86' le
titre à moitié disparu avait échappé à l' œil attentif de Wright.
* '
121 * * 118 * *
(3)
(1) Catalogue of sijriac nianuscripts in Uie British Muséum acquired since tlie year
1838 by W. Wright, London, 1870; n. cccxii, p. 250-251.
(21 CeUe liste diftère de celle de W. Wright par l'addition des ff. 7.-)^, 55^ 86% 92% 112'.
(3) A propos du schéma donné pour chaque cahier, il ne faut pas oublier que le syriaque
procède de droite à gauche, en conséquence lire : 118, 121.
LE PLUS ANCIEN MANUSCRIT BIBLIQUE DATÉ. 87
inc. 1, 20 Mv-^ v?îv-i-i-[o] (1); des. i, 30 >iaè-^ r-'j v°^!. — F. 121, inc.
III, 18 ^^^ oo, ^ioa^; des. V,3 r;,diJil;oM> -^n^.. Le verso est à peu près
complètement illisible. On remarquera, par la place quoccupe ce
II
^
109 119 * *
120 110
Is. VII, li-viii, 23; x, 15-xi, 15.
la dernière ligne de la seconde colonne est w^ii otcv^ vu, 22. Au recto,
inc. VII, 23 oo, i-iod^i )[oovJo]; des. viii, 7 Uy^ v^ov-^; je note à la ligne 16
[= VII, 25) )j>i. suivi de deux petits cercles, la fin de la ligne restant
vide. A la ligne suivante -i. est écrit au-dessus de la ligne prima manu.
Col. 2, 1. 15 ;oi/j (= VIII, i) est suivi d'un cercle et le v. 5 reprend à
la ligne suivante. Le ms. de l'Ambrosienne (2) a lui aussi une forte
ponctuation. A la dernière ligne noter l'inversion Pr^o ^oo^x^ tandis que
Ambr. a : ^oo^cio. Wr^- — F. 120', inc. viii," )P^s=° ''"^î ^^^' (^^^- ^'"^' ^'^
^oov= vQ:i^i.i!oo: f. 120, inc. viii,15vc.:s^o )u[>s«>]; des. viii,23p^! M»/ r^^• —
F. 119'', inc. X, 15 w.^na^ mo^.; des. x, 24 k'/ ©v^^- Le recto est presque
complètement illisible, mais son contenu est déterminé par les deux
pages voisines le début de 109' est certainement Is. x, 3i --a^o
:
^Qi^NjLj; f. 109 inc. xi, 9 (i^u. ^H-i»; des. xi, 15 v'j^>=^; ^^°^ x*^- Andjr. a
par erreur p^ au lieu de j-^i^.
III
* * 81 69 72 78 * *
(1) On donne toujours comme incipit ou desinit une ligne complète, sauf indication
contraire.
IV
* * 80 T3
79 88 * 91
Is. XXI, li-xxr\', 7; xxvi, 8- xxviii, i.
des. xxii, 24 \i<^n P)-^; f. 80, me. xxii, 24 \y^h p[^^ r^j ; des. xxiii, 7
^soLiL; o»-i>s^y. — F. 91, inc. xxiii, 7 ojiio iji-o;^; des. xxiii, 10 -^pi/o ivjld ...^loo;
f. 9r, inc. XXIII, 16 jc^j); [iii^-^ûj; des. xxiv, 7 Jjlsq.^ .^/o. — Les premières
lignes de 88^ sont illisibles, c'est seulement à la fin de la quatrième
qu'on reconnaît c^! de h. xxvi, 9; des. xxvi, 17 m-^cù-o ap^; f. 88,
inc. XXVI, 17 ovvs^-^ pi.v.ooo; la dernière ligne serait à lire h. xxvii, 3
[;aû3/o ^oio^^ua/]. — F. 79\ inc. XXVII, 3 p.:;.^ -oto^ ; des. xxvii, 11 [;o-p] V
^oKsi,^.: f. 79, inc. xxvii, 11 ov^a^^o o, .a^i.] ; des. xxviii, 4 [<»r-P>] "°« r^-
* 112
* 107 92 87 * *
h. XXIX, 7-xxxi, 7.
F. 112% inc. XXIX, 7 p.aib^ ^oovi,^; : des. xxix, 13 po-^j^. |i'>\o.-.o [Anibi\
a la leçon pu; au lieu de p^j-j^s); f. 112, inc. xxix, 14 |o) po, ^è-^; des.
XXIX, 21 -aiiioAo )is:i,^eo. — F. 87, inc. xxix, 21 .ji!."i>JioLl ov\ ,joa.ax> ; des.
XXX, 5 iN^^saoo )L^;xxx, 6 UHi Wy<^~^o pw; des. xxx, 14
f. 87% inc.
ti;v-^i; iv-^;. —
Lc f. 92 cst très peu lisible au recto, la première ;
I
LE PLUS ANCIEN MANUSCRIT BIBLIQUE DATÉ. 89
s^jjvai. ^cmiaj; des. XXXI, 1 v>^L\io (.iOLîï : f, 107, inc. xxxi, 1 "^^ ,ç-:^i.tooo;
VI
F. 123, inc. xxxii, li I'Ks^ U^î (V) k^o: des. xxxiii, 7 r^v^^-r^ v^^^l
f. me. XXXIII, 8o:i-è-^ ju^oîj; des. xxxiii, 19 "«>^;
123', îq-j p. |.iai:i- —
la première ligne du f. 82, Is. xxxiii, 19 oM-ti. ^v:.o .o«.iout, il convient
de relever une erreur -^o pour ^^o; des. xxxiv, i [i^rt] j^i ;n-> v°=^v^;
f. 82'', inc. xxxiv, 4 /-/o i^a^ ^^o ito»; des. xxxiv, 16, oi.^ i^ loi. i^.
—
F. 98"", inc. xxxiv, 16 o;^o pvio. [ov^toL^J à l'avant-dernièro ligne on lit ;
'^ (= Is. XXXV, 10); f. 98, inc. xxxv, 10 yQ.o;^o [^0=^]; des. ...
xxxvi, 9 [ivq^j -ofov^v] ^io j-;. — F. 95, inc. xxxvi, 9 ^^ /^ isiou/o ^v^o? ; la fin
de la page est complètement illisible; f. 95', inc. xxxvi, 18 i
y> snv [>]
.
op.;; jLj/; des. xxxvii, 5 [pivso] i.^^.)-.; -.o,op.^. — F. lOi, inc. xxxvii, 5 i-q^
vio/o w-^i; f. 104', inc. xxxvii, 16 ^c^ \>^i;jïl./;: des. xxxvii, 24 ^^^î]
cooo^ [^oœls/o. — F. 101^, inc. xxxvii, 24 u^^s^o -0,0)»/;; des. xxxvii, 33
in..-,_q\ \.a^ p [îoL/j] : f. loi, inc. xxxvii, 33 ^^t i^j^j p [o );©,]; le reste de
la page est presque complètement illisible. — F. 77, inc. xxxvi, 6
Ijibooj -0,0-^/ ^boo; des. XXXVIII, 18 [j^ i;oi. ^o^] p.; f. 77' , iiic. xxxviii, 18
lL<iio p3/; des. xxxix, 6 icooii^ )o) pn^.^. — F. 116, inc. xxxix, 6 ^««wisNjljo ^lj
VII
85 84 86 124 115 93 75 94
Is. XL, 22-XLVI, 11.
F, 94'', inc. xl, 22 ov^ïq^^o t^;/.: des. xli, 2 i^ia^ wo,aiû^. La première
ligne du recto est à peu près illisible, ^1^ paraît probable à la fin
de la ligne; des. xli, 13 /'oj^ pi p/. — F. 75, inc. xli, 14 ok>^ol ^.c^.i p;
des. xli, 21 [po; ydi^uu.] a^v^. Le verso, qui commence par les mots i-rso
^aat^^jL a^vû, cst à pcu près illisible à partir du milieu de la première
colonne; col. 2. 1. 2, le dernier mot est
duv. 26. F. 93', inc. xlii, 4 \^i —
po ;^jj] p p-;; f. 93 inc. xlii, 13 •>wo,a.3o;i.i.^ (la ponctuation forte à la
,
)))j^: des. xLiii, 6 [\^H{\ oixsaœ^: f. 115', inc. xliii, 7 ^^>^ w^^ ^3; des.
90 REVUE BIBLIQUE.
XLiii, 17 )-oa^ Mo-s )L.jao. — F. 12V. inc. xliii, 17 i-^^iVo id^^v^ w^i^c»,; f. 12i^,
inc. XLiv, 1 po; j-ooi N-c^K,^; : des. xliv, 10 ^oiov=-i poi "«^^oo. — Le f. 86 est très
peu lisible, le verso commence à h. xliv, 10 [i^ts^j ^^; ,^/; à la
ligne 21 le dernier mot est o^ao/ du v. 19. Au
premier mot recto, le
certain est '^);^ïi^/o du v. 21 à la ligne 9; à l'avant-dernière ligne de la
deuxième colonne, on lit ^-^i^niu. de xliv, 28. F. 84, — inc. xliv, 28
^loiouo <:>-r^: des. XLv, 8 ^!», ce mot semble suivi dans la ligne d'un
autre qu'on ne peut lire, d'autre part le commencement du verso est
certain, Is. xlv, 9 oii><iJis>i y=^ ^i^ ^o,: des. xlv, 17 p© v.ot-^o)i P- — F. 85',
inc. xlv, 17 y.aa\N ;,o^.^ vov^-i; des. xlvt, 1 [voowpu^i oooio o^j; à la ligne 22,
[= XLV, 25) j'ai remarqué l'inversion .^njuo ^.jm. Le recto est très peu
lisible, la première ligne de la 2'"
colonne est '^ c«i. .^-xiijlo (^ Is. xlvi, 7 .
VIII
F. 83% inc. xlvi, 11 iw, l—'r^ v>= {Ambr. ui )vx> pp=: des. XLvii, 6
^aou.» ^ov-^o. ^i^^; f. 83, inc. xlvii, 6 -isjJLi.; i-^co ^^o: des. xlvii, 13 po^q^^o]
^^.oioo. — F. 74\ inc. xlvii, 13 Wj^vio -^^i:^ où il faut noter l'omission
de Wr^ après -^a:^; des. xlviii, 7 [^];^doo \>.^ioo to-^-/; f. "lï, inc. xlviii, 7
>=^ ^ y^^ ^ [po] : des. XLVIII, 17 i-La:^^ locsx ppo. — F. 114% inc. xlviii, 17
pa-^o )hyl p. ;A : des. XLIX, 5 )^^ oii. )ooi/;% f. 114, itlC. XLIX, 5 [pLSfo]
orLoi. ..^ nvA : dcs. XLIX, 10 ka:iiûi.o ^oj/ v^^. — F. 103% inc. xlix, 10 P^^o»
,^Qj/ |t^ ; des. XLIX, 21 If^-^s^ il^cu^o; f. 103, inc. xlix, 21 ^^ v^o, )L;o[\ioo] :
des. l, 1 vocujj){ ^ciDùov^w^. Les versets 23 et 24 sont séparés par une ligne
ainsi constituée : .«.«.«. tandis que dans YAmbrosianns il n'y a
d'autre ponctuation qu'un point. — F. 96\ inc. l, 1 s^ûloNjl/ ^q^c^o des. :
pas lisible. — F. 105', inc. li, 7 il^^^;) wo.^ ^ai^^oo^ ; des. lt, 15 ypi^o:^ p
[iLau-i.]; f. 105, inc. li, 15 v>l o%iû-A %ai..^ po] ; des. lu, 1 v^-oij ^-p^u; ^•^^\x\.
—
F. 67% inc. lu, 1 i^-jL*ir Ua-=^ ..ul^o: des. lu. 11 "^-^-^o ppo. ^ojojj^t f. 67,
inc. lu, 11 M'OiJ'^^ï" [pîJ : la dernière ligne est illisible, sauf l'o/r// du
dernier mot in « .. ->i\ - — F. 76, inc. lui, 7 u^ ;--!o vjjjl;: des. liv, 3 P:>aaQ\o
v',^!-; f.76% inc. liv, 3 Mà^ai- iju -.^ho]'-, des. liv, 12 .^i-i.vLo ^osom^L..
IX
F. 99, inc. lvi, 2 p. wo,a.p/ icuo; f, 99% /y^c. lvi, 12 ;-/ 1oo>jo i;^; des.
LE PLUS ANCIEN \L\Nl'SCPiIT BlBLIOl E DATÉ. 91
LVii. 10 -^<--y^l Po ]-i^ i — F. 102% inc. lvii, 10 i^^.a-^ ju;.: des. lvii, 18
oUi.^ jio <m\ )i-qj: f. 102, inc. lvii, 19 )i-<iaaj. ji^oo^o iv^; des. lviii. 6
)j.--^-> |v>lo (Ijxj;. — F. 117, //^C. lviii, 6 vwVjo )1.o;-A : f/e^. LVIII, IV, V»/;' ou-ooi.;
f. 11T\ inc. LviH, 1+ oiLoL;^ /^ofo; des. lix, 9 jioi^-.jo ]pu. ^po";. — F. 122,
inc. lix, 9 lîou:^. v^ r?ii'- y; des. lix, 19 hp» ["^-è-io o,u^p] : f. 122\ inc. lix, 19
iJou ;-/ ija^ : fZ-^s. Lx, 6 --a^ ^oiixi îj^j. — Le début du f. 97' est illisible;
des. LX, 15 ^jcio:^. fr^i ^^r. à la ligne 21, [j^^ du v. 15 est écrit par
abréviation j[^; f. 97, inc. lx. 15 v-^ii-o v'J'r^ Ro^-o; des. lxi, 3 ^a^ >i^;
lîv^o^i.,. — F. 100, inc. LXI. 3 it^^^œ uoî -a^-" : des. lxi, 11 vo^^^ 75^^
Mà^û^: f. i00\ inc. lxii, 1 v v=^<mj "^^l (f^y. lxii. 8 .l-v^qj ^.>jls ^o]njlj.
X
'
111 * 106 113 ' 108 68
Is. Lxiii, 16-LXv, 25: lxvi, 18-2*.
««(( ^aoioio ^aii.;).- à la ligne 1+ est la fin d'Isaïe .««««. 0.0. -,1x10 \oi.: la
'
ligne 15 ne contient que des points; à la ligne 16 on lit :
'
'0 P^^
u^/; la ligne 17 est une ligne de points, puis commence le coloplion
donné plus haut. Au verso, malgré le titre p^jl; qui est écrit dans la
marge supérieure, on trouve la vision des ossements, Ez. xxxvii, 1
m
' *
* " 18V ' 191 ' * *
F. 191% inc. Is. VIII, 12 i;^:^ po, i^i. -^i,; des. viii, 17 >^q^i:>^ n^, ^^c
V
*
183 188 ' * ' ^ 187 192 *
F. 192% inc. XIV, 32 pu^ ^oîus^au o»^; des. xv, i voonju loj.^ \^f-o\
f. 192, inc. XV, i ^0, ] m .. y, poi^^^o^ .^0,^^; des. xv, 8 '^S'-^oo ^Q\nti v^v^... —
F. 187, inc. xv, 8 p-q^is^ irs^^,^ i;;-,,; des. xvi, 2 -^loj» \jloo .du^; f. 187% ?/zf.
XVI, 2 11.-, -<v>n-> ^oow jNn. Tt ; dss. XVI, 5 ^oiv^ciioo p-; . invvio. — F. 188, inc
XVIII, 6 i;-^ ]y^\ ^o^ijNjuo: des. xix, 1 '^ -^>-o; p^o fo,: f. 188\ me. xix, 1
\^i^o ic^.::^::^ iJLb.; des. xix. i Pp*î? i^i.^ l-',r«=^- — F. 183% /;ic. xix, i
P^^^jL^ pi^i^o pju>; des. XIX, 8 R^j^ ,-^^.0 jjouj; f. 183, i/ic. xix, 8 -is( "^
ooivaL/ pLio; la dernière ligne est illisible, l'avant-dernière commence
par ptci.— ppo de xix, 12.
VI
F. 190% inc. XXI, 2 6yts^]i ^ov^o© ^^\ des. xxi, 7 ^^-^ ^'M ^=<"? iv-»;
f. 190, znc. XXI, 7 .i^>>o .|vj>a_ -i-o;.; fi?e.9. xxi, 11 .^aai^-cu, n>^j^<»;; —
F. 185% inc. xxiii, 1 -x^u ^^\ kw; des. xxiii, 6 rv^^; ïi=xx^ 0^:^-/; f. 185,
inc. XXIII, 7 iis^i^uLi. ^oi^ ^01 );oi; ^/(?6\ xxiii, 11 ^«u» ,^13 "-^ ^is.
VIII
F. 193, inc. xxix, 13 ^^^ dii oqma o cJvio<iai3; des. xxix, 16 1^; p-4
94 REVLE BIBLIQUE.
v>
-. . . ..: f. lOS"^, inc. XXIX, 16 -r^i p^. ^p^/; des. xxix, 20 i^q-; ^j '^^^^.
F. i, inc. VII. 4 yo^'^i (to w.:!..^^ ...j^ ^o-l: f. 4\ inc. vu, 12 p ^po.o
\,.^v:» ov^ ipi: la dernière ligne commence par soous>i \^ Ez.. vu, 18 ,
^Mo uo-p njl^; des. x. 8 Uo^o. >=>oï3i.] ^..^^o: f. 7)\ inc. x, 8 n-^l m^j-^. \^i'.
^oovxsl^; deux dernières lignes commencent par les lettres /o. début
les
du mot )c^v-/o qui se trouve trois fois au v, 14.
Le recto du f. 2 a été gratté, on ne peut y lire que ,w^i]a-H[;J de
Éz. XVI. 43 vers le milieu de la page, et quelques lettres de-ci de-
là: le verso commence à xvi, 45 it^t^ v»^!:*!
[^c^^^j^o^ ^oowvui,^: à la dernière
ou avant-dernière ligne, le premier mot est .^aioai^ de xvi, 51. —
Je n'ai pu réussir à identifier le f. 7 qui se rattache au f. 2, verso et
xxii: à la dix-septième liune, on voit wii. 5 i^^^w, vV^P= -^^ v" «:'" ' --^•
XXIV, 18 P l-i-ai. -^ V^/o IjXLSL/; ; dcS. XXIV, 25 ycot-^ia*» )LOj-; iJjaj. : f. 6', îllC.
— - 35 iLo-^. Wr^ pour \i-o-^y= iP»: — -^lo pour ^r- — quatre points en
losange après le v. 35, tandis qu"-4///6;'. a seulement un point. Au
f. G = Éz. XXIV, 19-25 . V. 19 poi écrit deux fois; — 21 u^o pour-
M^x»: —
om. iNs,'-
-
butin de variantes est bien maigre et il n'y a pas lieu de s'en éton-
ner. Qu'on nous pardonne d'avoir exposé si longuement le résultat
de nos travaux au British Muséum, puissent-ils être de quelque uti-
lité à ceux qui entreprendront l'édition critique de la Pesitt<> de l'An-
cien Testament!
Rome, le 4 novembre J91n.
Eusrène Tisseram.
3IÉLANGES
balis inter Luc. xxi, 37 et loan. viii, 1 s. negari iiequit, et usus parti-
cularum zi et cjv a ioanneo longe distat.
6" Tandem ex defmitione tridentina pericope canonica seu inspirata
est, quia tamen inde ioannea esse comprobetur.
rogare » (2).
z J.J.ZZ ';zcz y-y.z 'ù.v/.zi'}.i-z ajTCJ paç àv tw Upw s '.ci Ty.wv , txç z\
^y.cjs'.v. vjy.Taç èr îCy^cy. svcç r, jai-^etc s:
quî nec post xxi, 38, ubi in ijuattuor codicibus Ferrar legitur, nec post \xi. 3G, ubi F.
Blass eain edidit.
RF.TLE BIBf.IOlE 1911, — N. à.. T. TIII. 7
98 REVUE BIBLIQUE.
Aabc... a7:a;, quod XIX, 4-8 scripserat, nunc cum loanne dicit za; b
Xai;. Tandem quod sequitur aTra; AiYi[j.£v:v wp6ptucv r.ptq a-j-'ov tam :
suum XXI exararet, loan. viii, 1 s. simul cum Matth. xxii, 17 ex ali-
quo fonte suo — et confidenter addere licet : e fonte graeco — re-
centi memoria tenuerit. Et pronum est conicere, Evangelistam textum
nunc ioanneum legisse apud Matthaeum, capite xxii, cuius capitis
materiam reliquam magna ex parte pauUo ante (Luc. xx) suo modo
enarraverat.
neni legisse, ubi nimc les-i solet, et apud Matthaeum. cap. xxii inter
versiculos iO et il. Atqui hoc niiUateniis quideni certum, at satis
ex quo tamen non invicte concluditur prius illud. Fuisse scilicet tem
pus quo Diatessaron syriacum liac pagella caruerit. nonnegamus. Sed
quum in antiquis versionibus syriacis evangelii quarti " separati »
non legeretur. fere aeque pro])abile est. eam. etsi a Tatiano admis-
sam i a scriba posteriore omissam fuisse, et deinceps a viro graeco,
,
suo contrariarn Bas ist bei einem Rigoristen wie Tatian, der sogar den legitimen
: «
Gebrauch der Ehe als Unzucht verwarf. selbstrerstâadlich » (p. 239). In hac se. hypothesi
inulto rnagis omittere debebat Luc. 7. 3G-50, ubi peccatrici " remittuntur peccata multa »
dum loan. 8, 11 de remissione non fit .sermo Hanc tamen narrationem, testibus G. L, A
.
t't latente Hontheim p. 220. 340i retinuit. — Num alius cognoscitur locus erangelicus
quem Tatianus ob " rigorismum « suum omiserit? Gerte nihil aliud huiusmodi apud
H on theim occurrit.
100 REVUE BIBLIQUE.
zi quam per /.y.', et vix aut ne vix quideni semel per :>/ connectun-
tiir. In D videlicet decies nullum cjv, in Rec. primum
$£, septies y.xi,
viir, 35, non nisi ter U inveniet, ;3v vero decies. Si contra confert quae
videbit in partibus Matthaei historicis legi li 252"\ /.xi 208'"'. :>/ bis
tantum; in sermone autem montano Matth. v-vii primum illud 31""\
alternm aeqne ac tertium IS'"'.
Unde saltem ex hac parte omnino verisimile est. pagellam nostram
esse eiusdem interpretis graeci.
Nulla fortasse ex his hypothesibus certa ratione aut probari aut excludi
poterit. Si tamen interpola torera recte et sapienter egisse suppona-
II
LE PAYS DE JOB
audacius viidoctissimus (p. 714} exverbis Eusebii (U.E.. 111, xxxix, 16, concludit. Papiara
historiam mulieris adulterae non ex libre sed ex mera traditione orali hausisse. Conceden-
dum sane videtur, Eusebium ignorasse ex quo fonte Papias hauserit, ideoque Papiam hune
fonteiD suum non clare indicasse. At vero hanc explicitam fontis inenlionera eo quoque
Papias omittere potuit, quod leclori eum supponeret notum esse. Atque hoc inerito tain
de Synopticis quam de quarto evangelio supponere poterat.
^1) Deutzscii, Wo lag das Parad'es, p. 2.J9 ; Stueck, Zeitschr. fur Assyriologie
XllI, p. 86.
MKLANGES. 103
porté à chercher dans cette région un pays de Ous. Or. une antique
interprétation, qui figure déjà dans un passage d'Aristée cité par Eu-
sèbe (ij, identifiait Job avec Jobab, roi des Édomites d'après Gen.,
XXXVI, 33 ss. L'appendice des Septante à la traduction de Job re-
prend cette identification et offre la série des rois d'Édom d'après le
Carneas autem dicitur nunc civitas Joh, quae ante dicta est Dennaba
in terra Ausitidi, in finibus Idiuneae et Arabiae. La tradition du Hau-
ran est donc le résultat d'une série de confusions. Tout d'abord,
identification de Job avec Jobab. Localisation de la Aswaia édomite à
AavaSà du Hauran, aujourd'hui edh-Dhuneibeh, sur la foi de .îosèphe
qui considère0"J7r,; y'^"/ comme fondateur de la Trachonitide. Passage
'
est presque à fleur de terre et où, par le fait même, toutes les eaux
des puits sont saumâtres. Or, ce pays de Bàz est situé à vingt dou-
bles-heures d'une autre région que le récit assyrien appelle Ha-
zu-u. Il y a longtemps que M. Delitzsch [k) a reconnu dans Hazou le
nom de i7- qui. d'après Gen., xxii, 21 s., est aussi un fils de Nahôr.
Dans Je;-., xxv, 20 et 23. on voit que le pays de yvj" se trouve dans
l'Arabie de même que le pays de ~12. Le yrj- de Gen., xxii. 21 men-
"'" de Jer., xxv, 20. Ce
tionné avec "i"" et 7?2. est le même que le
pays doit se trouver à proximité du pays de Bouz, lequel est eu con-
nexion avec Dedan el-'Ela et Teima. Il correspond au pays de Bàz
>
qui. dans Asaraddon, est donné en relation avec Uazou i""'. L'armée
de .lob est Élihou de Boiiz 1^. Le pays de Ous, patrie de Job, est donc
le même que
le Ous de Geii., xxii, 21 et Jer., x.vv, 20. Il doit se
localiser aunord du pays de Bouz, de façon à être exposé à la fois
aux incursions des Sabéens Job, i, 15), qui ne sont pas ceux du
grand royaume méridional de l'Arabie, mais de la ville de Sebà, non
loin deDedan (2), et à celles des Chaldéens qui viennent de l'est (3i.
Ainsi nous sommes amenés au nord-ouest de l'Arabie quelque part
au sud de Ma'ati. Par cela même nous nous rapprochons de la fron-
tière iduméenne et c'est ce qui nous permettra de reconnaître notre
terre de yi" dans le pays même nom que la Bible signale en Edom.
du
Dans Gen., xxxvi, 28, le personnage de y^:* est rangé parmi les
descendants de ^r-TC. ce qui veut dire qu'il faut chercher un pays de
Tliren., iv, 21. Ces indications concordent avec les précédentes, car,
sinous avons fixé la limite méridionale du pays de """, nous n'avons
pas déterminé jusqu'où il s'étendait vers le nord. Or, la limite entre
Édom et l'Arabie a toujours été indécise, si bien qu'une même ré-
gion, située sur leurs confins, pouvait être considérée comme appar-
tenant tantôt à l'une tantôt à l'autre des deux grandes divisions. C'est
ce qui est arrivé pour la terre de TJus. Nous avons vu comment le
ôp'.z'.; -.%: llzj\j.7.iy.: vS'. Apxi'.y.:. C'est en Arabie que Ptolémée (5) si-
tue les Xl^i-y.'. (6), dont le nom rappelle celui d'Ésaii chez les Arabes,
'ij! OU isù (yi")- Au temps de saint Jean Chrysostome il) on montrait
le fumier de Job en Arabie, et, à l'époque d'Iso'dâdh (vers 850), il
Nahor à coté de VVJ, ""2 et i^n. H s'agit des bandes araméennes connues sous le nom
de Kaldu [RB., 1910, p. 384 ss.j. On sait que .!>'
et « devant une dentale deviennent l en
assyrien. Le mot kaldu vient de /.a.sdu, kasdii ^~T!^Z).
( i) Prxp. ev., ix, 25.
née par Eusèbe entre Tèman et Pétra (1). En réalité, Tawâneh corres-
pond à Thornia de la taljle de Peutinger et à 0:âva de Ptolémée,
nullement à Tèman (2). La distance entre Pétra et Odroh pourrait
porter à voir dans cette dernière le site de 0:z'.y.âv. d'autant plus qu'il
y avait un :-.z7.-:h)-.':/.z't à 03:'.;j.av, d'après Eusèbe. et qu'on retrouve des
vestig-es de camp romain à Odroh (3). Mais l'ancien nom d'Odroh nous
est connu par le décret de Bersabée. où la ville figure sous la forme
'Acc:wv *i) comme on avait 'A$p:j dans Ptolémée, V, 16. Le souvenir
de Tèman se retrouve dans Pline Xat. hist., VI, xxxii, li) qui jux-
tapose les Thimaneos aux; Xabatéens. On voit que les Nabatéens
avaient laissé une partie du territoire aux anciennes tribus. Or. dans
Gen., XXXVI, 3i, l'Édonnte Z"w"~ est de la terre des Tèmanites.
M. Clermont-Ganneau retrouve ce nom de zrn dans el-Hesma, nom
de l'immense plateau qui s'étend de Tebouk au sud jusqu'au delà de
la route qui va de Ma an à Aqabah (5 . Telle est la région dans la-
quelle il nous faut situer Tèman, mais
le plus possible vers le nord,
III
§ 11
(2) Ibid.
(3) ViNCE>T, RB., 1898, p. 447.
1,2, 7 s. Liv, 1, ss. lx, 1 ss. lxii, 2ss., 6) jamais par Israël-Jacob.
; ; ; ;
siib B, 3"), qu'il n'essaie pas de justifier dans sa réponse, pas plus
qu'il ne relève Ja remarque rappelée sous le 1".
3" Un troisième trait caractéristique des chap. xl ss., c'est l'opposi-
tion qui s'y trouve exprimée souvent enti'e c choses anciennes » et
« choses nouvelles » ou « à venir » et dont il n'est jamais question aux
chapitres xlix ss. Ce n'est pas seulement au chapitre xlviii, 3-8 (1 ),
mais dans toute la section formée par les chapitres xl-xlviii, que nous
avons un contraste marqué et reconnu de tous entre « choses anciennes »
prédites autrefois ou que les faux dieux n'ont pu prédire, et « choses
nouvelles » ou « à venir », prédites aujourd'hui ou que les faux dieux
ne peuvent prédire. Voyez xli, 2-2-23; xlii, 8-9; xliii, 9,18-19; xlv,
11 ss.; XLvi, 9 s.; xlviii, 3-8. Gondamin admet que les passages cités
des chapitres XL ss., sauf celui de xliii 18-19, se rapportent au sujet qui
nous occupe, en conséquence détabiir que son interpré-
et il s'efforce
tation des « » et des « choses nouvelles » au cha-
choses anciennes
pitre xlviii s'applique aussi à ces mêmes termes dans les chapitres
précédents. Faisons abstraction de cela pour le moment. Maisle P. Gon-
damin ne s'est-il pas aperçu qu'en admettant en principe (et comment
pourrait-on le contester?] que p. ex. dans xli, 22-23 et xliii, 9, les
{\ I
Le P. Condamiii {KB., 1910, p. 201) s'exprime ainsi : « Nous avons dans xlviii, 3-8 un
contraste marqué et reconnu de tous, entre 'les choses premières' ou 'précédentes'
(n*IJ"iù\\*in)... et 'des choses nouvelles' (rilU?~ni..- » Cette paraphrase : « choses premières
ou précédentes », tend déjà, par insinuation, à restreindre dans le passage xlviii, 3-8, l'ap-
plication du terme n*I^^N"l aux chapitres xl-xlvii. Dans son article de la RB., 1908, le
P. Condaminallait plus loin le chapitre xlviii, disait-il, « proclame que les prédictions
:
anciennes se réalisent, sont réalisées, celles dont il est question dans les quatre poèmes
précédents et qui pourraient s'intituler La mission et l'œuvre de Ci/rus. Il annonce les
:
prédictions nouvelles, magnifiques, évidemment celles qui sont l'objet des quatre poèmes
suivants, concernant l'fpuvre du Serviteur de Jahvé... » (/. c, p. 173). Cet exposé était
absolument inexact et préjugeait ce qui est en question le prophète ne dit pas que « les :
prédictions anciennes se réalisent, sont réalisées »! mais que « les choses anciennes »
avaient été prédites depuis longtemps; il « n'annonce » pas des « prédictions nouvelles » !
mais dit qu'aujourd'hui seulement il annonce des « choses nouvelles ». Il est fâcheux que
le P. Condainin éprouve tant de peine à exclure résolument de ses prémisses les éléments
de ses conclusions. Dans son dernier article (/JB., 1910, l. c), après avoir parlé du contraste
marqué, au chapitre xlviii, entre les choses « premières » (ou « précédentes »), et les
« choses nouvelles », il ajoute « sans rien préjuger de la date de ces prédictions, mais uni-
:
quement pour exprimer le contraste, appelons les premières 'prédictions anciennes', les
secondes 'prédictions nouvelles' ». Non. Le prophète ne parle pas de « prédictions » mais
de « choses » prédites. Tenons-nous-en au contraste nettement marqué par le prophète et
très aisé à comprendre, entre « choses anciennes » et « choses nouvelles ». Je sais bien que
matériellement les termes : choses anciennes prédites, pourraient se rendre çà et là par :
suivant kli, 1-5 (1); 21-29; 8-20... Jahvé entre en discussion avec
:
que c'est lui qui a suscité Cyrus (xli, 1-5); il provoque les faux dieux
à produire des preuves ou des signes quelconques de leur puissance :
afin que nous sachions que vous êtes des dieux!... » Là-dessus Jahvé
constate (2i) le néant des idoles qui ne savent rien prédire et aussi-
tôt il reprend sa proclamation pour exalter sa propre puissance 25 :
« Je l'ai suscité du Nord, il arrive I... 26 Qui jadis l'a prédit et nous l'a
dans les défis adressés aux idoles que Jahvé lui-même a prédit ou se
dispose à prédire des « choses à venir », sinon ses interpellations
n'auraient pas de sens. Quelles sont les « choses à venir » prédites
par Jahvé? Ce sont celles qui forment la teneur du message adressé à
Sion au début de tout ce discours i^xl, 1 ss.j, message rappelé xli, 27 :
tion de Jérusalem à procurer par Cyrus, ici comme xlv, 11, 13 qui
forme la substance des « choses à venir » prédites par Jahvé, en regard
desquelles Jahvé constate triomphalement l'impuissance des idoles à
rien prédire aujourd'hui, comme elles n'ont rien prédit dans le passé.
3° Passons à xlh. 8-9. Après avoir constaté xli, 21-29, que les faux
dieux sont impuissants et qu'il est, lui, le premier et le seul à prédire
Jahvé poursuit en confirmant par les assurances les pins formelles les
promesses de délivrance qu'il vient d'adresser à son peuple : Israël
n'a rien à craindre, ses adversaires seront anéantis, Jahvé le sauvera !
(-VL1, 8-20). C'est ici que vient xlii. 8-9 (1) qui forme la conclusion du
discours xl, 1 ss.
(1) xui, 1-7 est le passage relatif au Serviteur de Jaiivé. qu'à l'exemple de Condamin
nous avons transposé dans la seconde partie du recueil (voir plus haut g I, A, 1°). Notons
à ce propos que c'est la présence de ce morceau immédiatement avant nos vv. 8-9 où il est
question des choses anciennes et des choses nouvelles, qui a été pour une bonne part la
cause de la diflicuité qu'ont éprouvée tant de commentateurs à définir d'une manière cer-
taine et précise la notion de ces choses « anciennes » et « nouvelles » ; il semblait en effet
qu'en cet endroit, à supposer lauthenticité des vv. 1-7, les « choses nouvelles » devaient
comprendre l'œuvre du Serviteur-Sauveur! La transposition opérée par le P. Condamin a
eu pour effet d éclaircir ce problème, bien qu'il refuse lui-même de reconnaître ce résultat
très appréciable de son idée. —
Le P. C. transpose les vv. 8-9 ensemble avec les vv. 1-7
dans la seconde partie (à la suite de xlix, 7). où la référence aux idoles et la mention des
choses anciennes et nouvelles manquent absolument de points d'attache. Contre notre
conclusion que les vv. 8-9 doivent être maintenus à leur place comme conclusion du dis-
cours ïL-XLi, il fait valoir \RB., 1909, p. 215) 1° que « le second poème (xlii. 10 ss.) étant
:
soudé au premier par xlii, 8-9 comme strophe alternante, on ne comprend plus comment
le prophète présente Jahvé comme s'avancant pour prendre la parole en disant « Long- :
temps j'ai gardé le silence » (xlii, 13, 14), puisque Jahvé vient au contraire de parler long-
temps dans le passage précédent (xli, 21-29, 8-20) ». Mais a) comment donc le P. Condamin
comprend-il ce silence de Jahvé? du silence que Jahvé avait gardé
Croit-il qu'il s'agirait
depuis le discours précédent? Ceci franchement nous étonne. Le contexte ne laisse pas
l'ombre d'un doute que le silence de Jahvé ne soit à entendre de l'attitude gardée par lui
pendant le temps de l'oppression de son peuple par les Babyloniens, et même peut-être
aussi par les Assyriens. Voir les commentaires, b) Condamin lui-même, en plus d'un cas.
admet la strophe alternante à la tin d'un poème, c) Si la supposition que xlii, 8-9 est une
strophe alternante était incompatible avec son maintien en cet endroit comme conclusion
du discours qui précède, je n'hésiterais pas, naturellement, à sacrifier la « strophe alter-
nante ». Condamin objecte 2° que les vv. 8-9, comme conclusion du discours qui précède,
sont séparés du passage sur les idoles par le long développement de xli, 8-20. Mais pour
apprécier le rapport de nos deux versets avec « le passage sur les idoles », il ne suffit pas
de compter le nombre des versets qui les séparent de la mention des idoles dans le con-
texte précédent! Le long développement de xi.i, 8-20 s'inspire d'un bout' à l'autre lui-même
du passage sur les idoles; c'est après avoir constaté l'impuissance des idoles, et pour le
motif de cette impuissance, que Jahvé, dans le long développement, rassure Israël en lui
disant qu'il n'a donc rien à craindre, que ses adversaires seront anéantis. Il n'y a pas de
solution de continuité dans la suite des idées depuis le passage sur les idoles jusqu'à xlii,
8-9.
.MKI,.\\<;KS. ll:i
Pour qui considère sans parti pris la suite des idées depuis le
chapitre xl. 1 jusquici. il n'est pas possible de douter que les
'( choses anciennes » ne soient à comprendre ici au même sens que
\Li. 22. oii Jah^é demandait comment les taux dieux a\aient jamais
prédit le pdssf' r'iw's-" : que •• les choses oou\ elles » n'c"" ne
soient la délivrance de la captivité et la restauration de Jérusalem,
annoncées XL, 1 ss., et à propos desquelles Jahvé défiait les faux dieux
de prédire à leur tour les « choses à venir ». Voir plus loin siib ô\
i" Au chapitre xliii, 0. après avoir annoncé le retour des eiilés
vv. Ô-8 Jahvé demande en parlant des dieux des païens
, « Qui :
dans le passé, les prophéties dont ils auraient été lobjet? < Qu'ils
produisent leurs témoins pour qu ils soient justifiés I... •>
: les faux
dieux ne sauraient exiger la foi dans les prédictions quils feraient
entendre parce qu'ils ne peuvent produire des témoins touchant des
prédictions autrefois accomplies comp^ xli. 22). Mais « vous êtes
mes témoins! » poursuit Jahvé (vv. 10 ss. ; on doit donc le croire à
présent. X"est-il pas évident que xliu, 9 le retour des exilés est mi>
en opposition aux choses anciennes (1 ?
5" « Quant à \liii. 18-19 », dit le P. Cniidniniu. " Kriniu nioutre très
bien contre Sellin que ce passaee n'a pas de rapport au sujet qui
nous occupe » RB., 1910, p. 207 Vraiment? Le sujet qui m'oc- .
et '
chose nouvelle » sont nettement mises en opposition. J'estime donc
que ce passa,i;e se rapporte au sujet qui m'occupe. Les « choses an-
liennes y représentent les événements de l'histoire
n ...t'ICn^
ancienne, notamment le passage de la mer Rouge et la débâcle de
l'armée éggjjfienne (\y. Ifi-I7i. La « chose nouvelle » (r.r-n • c'est
yui en appelle aux « prédictions anciennes faites sur ce sujet/ nJIais Condamin abuse I
que Jahvé établira une voie dans le dêserl (pour le retour des exilés
vv. 18 ss.). Notons que ravèuement de cette chose nouvelle est ex-
primé par le même verl)e, la même fieiire (... rî*2ïn nr" c'est main- :
tenant qxxeUe germe...], que celui des « choses nouvelles » xlh, !>
avant que/les germent, je vous les fais savoir i; v. plus haut 3". Ce
détail confirme à la fois, pour autant quil en serait besoin, Tinter-
prétation donnée à xlu. et le rapport de \uu, 18-19 au sujet qui
nous occupe.
(3" Il reste klvi, 9-10, un passage qui. au sens du P. Condamin, ne
prouverait ni dans un sens ni dans l'autre (7. c.) (l). En réalité ce
passage serait à hii seul décisif. Les « chose.^ anciennes depuis l'ori-
RECTIFICATION
A. V. H.
(t) Pour \Liv. 8. voir RB.. 1909, p. 512 s. Je n'insiste pas ici sur ce texte, non que j aie
moins de confiance clans sa râleur, mais parce que je désire borner cet examen aux passages
taisant explicitement mention des « choses anciennes » et « nouvelles » ou « à venir ».
(2) Voir RB., 1. c
CHROMQUE
Les quelques textes; publias ici ont été recueillis au cours d'un
voyage de vacances comme ils proviennent de contrées assez battues
;
par les épigraphistes, on s'est assuré avec tout le soin possible qu'ils
étaient inédits.
de long sur O^.SO de large, épais de 0'",20. La hauteur des lettres varie entre
0"\oî et 0"'.0:î. Ce bloc trouvé dans le Ledja est à présent au musée des Pères
Lazaristes de Damas. — (lopie.
^ TOYEYAÀB^ .^^^^nPECBSFYAorHToY
(\) Mission (Ions les régions désertiques de la Syrie Moyenne, p. 135 (rf. Inder.
p. 230).
(2) Semific Inscriptions, p. 128 (4' partie de l'expédition américaine en Syrie, 1899.
1900).
(S) DussACD el Macler. Voyage.... p. t2u.
4i PP. Javssen et Swir.wc, Mission urcliéologique en .Arabie, p. 268.
f-HKONlnlK. 117
3. Andoche. —
Ddusune maison parti-
culièredu quartier ;:rec, stèle funé-
raire en lïiarhre blanc avec relief et
e TTT X l
BAPAX T
iX'.ZZ.
ou de quatre offrandes.
mie: a
4. Sêleucie de Piéne. —
Fragment d'inscription grecque
fort bien gravée sur marbre sombre. Le morceau — <j'AÀDY!D
est intéressant, à cause dei, ligatures de certaines let-
tres. fait partie de la collection du P. Apollinaire,
Il
du R. P. Apollinaire à Khoderbeg.
sur 0"',30, épais de 0"',0,5. La hauteur des lettres varie entre 0™,025 et On',0-4.
Ce morceau provient des ruines d'el-'Audjeh. situé à quatorze heures au sud de
Gaza. Il se trouve maintenant au presbytère latin, chez Doni Gatt qui a bien
voulu nnus permettre d'en prendre un estampage et une copie.
1) Waddingtox, op. l., 2715. On pourra lire à ce propos Peudkizgt, Les Flottes ro-
maines en Syrie. Revue archéologique, 1898, A., pp. 41 ss. Pekdkizet et Fossey ont pu-
blié un décret honorifique et deux épitaphes de marins romains de même provenance que
notre fragment dans Biilletlii de correspoiidance hellrniifuc, 1897, pp. 75 ss. Voir aussi
deux décrets honorifiques du même endroit dans BCH., 1902, pp. 168 s., relevés par
V'. Chapot a qui Ion doit aussi une savante monograpliie sur Séleucie de Piérie. parue
dans le Bulletin des Anliquaires. .Mémoires, 1906, pp. 149 ss. Nous avons copié aussi a
Khoderbeg l'épilaphe du marin Miséaate Bassus. communiquée par le R. P. Jvi.vrert au
Bulletin des Anliquaires. 190.J, pp. 172 ss.
CHRUMnib:. Hf>
arracher jusqu'ici (fie. 1). Ces débris, nous avons pu les étudier et
pour xz-ôq. Mais tout cela est bien risqué et si plein d'incertitude que
je laisse la chose à de plus habiles.
Le deuxième fragment, A , c|ui se trouve à gauche du presbyteriuu).
est autrement clair que leune perdrix devant une plante.
précédent :
is
€»iC 1
H
122 REVUE BIBLIQUE.
ment A" qui représente les trois baies de la façade d'un monument.
Tous ces dessins sont obtenus par trois couleurs seulement, le noir, le
rouge, le jaune, sur fond blanchâtre. La façon sobre dont les sujets
sont traités, la parcimonie des teintes, le niveau relativement bas de
ce pavement nous amèneraient à dater cette mosaïque de l'époque
romaine, soit avant la guerre de Titus en 70, soit au temps de la fon-
I B
dont le fond n'est distant de notre angle de mur que de 1"',30. Ces
vasques, connues depuis des années déjà, ont leur ouverture dans le
cimetière protestant, mais eu réalité, elles s'enfoncent totalement sous
le mur grecs dans la direction du blocage en question
et le terrain
semblablement partie de la
^^r^j^y/f.sii^.jtW '
M
Une croix en relief Can-
j (^
^ tonnée du chifi're de .lé-
sus-Christ et de A et Q a
'
'^'
;li Sur les insUllations monastiques au Sion chrétien on consultera la lettre d'Euclier a
Faustus, datée de 440 : cuius {montis Sion) in vertire planitiem monachorum celluLi
nhtinuerunt ecclesiam circumdan/es, r/iue illU: ferlur ab aposfolis funda/a (Geyek,
Hin. Hieros., p. 126). Cf. Jean Mosch, Pré'^pirlt., 131. (P. G., lwxvii, 3). Le Cotnoiemora-
toriiim de Casis Dei (an. 808) mentionne encore, /« saucta Sion, inter presOyteros </
clericos XVII, excepth Deo sacratls cl inclHsis 11.
CHRO.MOLK. 12H
ce choix sera fait avec une prodie'alité suffisante pour n'omettre rien
tieview. lïl. avril 1910. Sur la canipasnp précédente, cf. RB.. 1909, pp. 43.^ ss. et la not.:-
de 1910, p. 113.
126 RKVrt: BlBI.lyUE.
ce tertre, en ont aplani la crête, escarpé les flancs déjà par nature
assez abrupts, et entaillé savamment la surface rocheuse pour y as-
seoir à jamais, ils le pensaient du moins, d'opulents édifices et d'or-
gueilleuses fortifications; là aussi des transformations incontestables
attestent deux, sinon trois phases dans une durée de plusieurs siècles
probablement.
En face de cette classification schématique des ruines, M. le
CHRONIQUE". 127
arabe.
La tâche consistait dans harmonie à établir entre les deux schémas.
l
renseigner l'historien sur telle phase déterminée que les textes lais-
saient dans l'ombre, ou sur quelque événement connu en gros par
une laconique assertion de vieilles annales : la découverte des stèles
votives militaires de l'époque de Septime-Sévère, la découverte de la
statue d'Auguste sur les marches du grand temple, la découverte du
128 REVLiE BIBLIQUE.
avec cette précision ce qui avait été bAti au déclin du vin" siècle par
des immigrants étrangers et ce qu'aurait bâti le fondateur même de
Samarie?M. Reisner ne redoute point les questions et ses réponses,
toujours lucides comme la parole d'un savant exposant les principes
d'une méthode familière depuis tant d'années, s'accompagnaient
d'une leçon de faits Voici un pavement séleucide sur lequel ont été
:
ce pan de mur est donc d'une époque intercalée entre les temps sé-
leucides et les origines de la ville. Ce mur étrange avec ses parements
sans liaison, avec ses rangées monotones de petites pierres travaillées
pour se ressembler toutes et ne fournir qu'une résistance mé liocre,'
trahit des constructeurs habitués à la brique et sans aucune expérience
pratique de la pierre merveilleusement élégante, ouvrable et solide
que les architectes antérieurs extrayaienten quelque sorte à pied
d'œuvre. De ne seraient-ils point nouveau-venus à
tels constructeurs
Samarie et venus de régions où la brique était d'un usage plus ou
moins exclusif ? L'information historique s'offrirait d'elle-même à ce
point; l'archéologie se suffira pourtant. Le beau fragment de mu-
raille inférieure assise dans une tranchée de roc n'est qu'une minime
partie de muraille identique, déjà connue sur plusieurs autres points
de la fouille. Ces tronçons raccordés indiquent un édifice aux propor-
l'aménagement intérieur n'est révélé que par-
tions très vastes et dont
tiellement encore. Les matériaux employés dans cette construction
fort soignée présentent assez fréquemment des sigles en hébreu ar-
chaïque usités comme marques d'appareillage. Par leur volume, leur
mode d'agencement, la nature de la taille, la ciselure de leur face ex-
térieure, ces pierres sont sœurs de celles qu'employèrent des cons-
tructeurs Israélites à Megiddo par exemple. Laissons néanmoins les
analogies du dehors. Dans l'épaisse couche de décombres qui chausse
le pied de cette muraille, remarquons à foison les tessons de céramique
Israélite et l'absence radicale de tout alliage de poterie hellénistique
ou plus tardive encore.
La dissection du squelette archéologique prolongée ainsi quelques
heures, en manipulant des débris et en s'arrêtant devant les objets
en place, avait donné à nos compagnons de visite les plus rebelles
à toute suggestion incomprise la sensation intime que l'archéologie
vraie n'était pas une divination, pas une loterie d'étiquettes impres-
sionnantes que l'explorateur s'est composées à sa guise pour jongler
avec, devant un public crédule et prompt aux ébahissements.
Dans ces faits palpables l'histoire s'encadrait d'ailleurs comme en
son moule naturel. Nul vestige d'une ville antérieure à l'époque
israélite la Bible raconte comment, vers la fin du x^ siècle, le
:
celled'un bloc rapporté. Les blocs insérés dans ces coupures ont
naturellement des hauteurs différentes afin de racheter l'inégalité de
niveaux; en général d'ailleurs cette fondation comprend deux assises
et l'assise supérieure seulement a été traitée comme assise de régula-
tion pour asseoir la muraille appareillée à refends. Toutes ces par-
ticularités, banales en elles-mêmes, offrent l'intérêt de caractériser
désormais un style de maçonnerie du même coup elles font la
;
(2) De décembremai les savants explorateurs se reposent des fouilles palestiniennes par
à
des fouilles en Éfiypte. Depuis plusieurs campagnes ils travaillent à Gizeli et sont en train
de ressusciter, sous forme de monuments admirables, la mémoire des vieux pharaons dont
le sphinx gigantesque et inquiétant garde les tombes et que des historiens sans miséricorde
de théologie protestante de Paris. Le titre de son livre (1), quoiqu'un peu long, n'ex-
plique pas aussi bien qu'une phrase de la préface, le double but de l'auteur : déter-
miner la priorité entre les trois synoptiques, et s. Marc étant reconnu pour le pre-
mier, découvrir à quelles sources il a puisé. C'est, dit M. Goguel, « un problème pure-
ment littéraire » qu'il estime, à rencontre de M. Loisy, qu'on peut étudier isolément.
A vrai dire l'auteur n'a point été tout à fait fidèle à son propos. Etant convaincu
qu'aucun événement surnaturel ne peut être historique, il tire de ce principe à priori
cette conséquence littéraire que les événements » mythiques » ne dérivent pas des
témoins de la vie de Jésus (2 . D'autre part, il conclut de certaines ressemblances de
style que tel événement n'est point historique [3).
Cependant, à tout prendre, l'enquête de M. Goguel est, en effet, « purement litté-
raire ». Et même faut-il entendre ce mot dans un sens très restreint. Aucun examen
n'est tenté du style de Marc, de ce qui le caractérise et le différencie des autres synop-
tiques; la question de ses tournures araméennes n'est pas même abordée (4), non plus
que ses relations avec le grec hellénistique du temps. Apparemment l'auteur a cru
qu'il suffirait de diviser Marc en péricopes et de comparer ces péricopes avec celles
(1) Publié dans la Bibliothèque de l'c'cole des Hautes Études, section des sciences
religieuses.
La publication a été retardée, et M. Goguel tient à noter que ses conclusions étaient formulées
avant la publication des t^vangiles synoptiques de M. Loisy. Aucun, lecteur attentif n'aurait été,
en effet, tenté de regarder M. Goguel comme innuencé de très près par M. Loisy quoique ces
deux savants aient plusieurs théories communes.
(2) La iransliyuiation a « un caractère mythique très accentué qui empêche absolument de la
faire dériver directement des souvenirs de Pierre » (p. 179).
(3) P. :25~ « Des raisons très sérieuses s'opposent à ce que nous attribuions au récit de Marc un
:
caractère historique. C'est d'abord l'analogie qu'il y a entre l'envoi des disciples avant l'entrée à
Jérusalem et l'envol des disciples pour la préparation de la Pâque ». Raison très sérieuse pour un
écrivain comme Marc dont les formules sont si peu variées '.
(4) A la p. 308 il n'est question que des mots araméens de Marc, avec un renvoi à Zahn, tandis
que la question des tournures, autrement imporlantc. a surtout été discutée par Wellhausen.
RECENSIONS. -133
solide, et d'après laquelle le second évangile aurait été écrit à Rome, sous l'influence
de Pierre par Jean Marc qui avait été le compagnon de l'apôtre » p. 21 . La critique
interne paraît à M. Goguel justilier cette tradition. Du moins attribue-t-il aux sou-
venirs de Pierre un certain nombre d'éléments du récit. Il s'arrête cependant aussi-
tôt qu'il n'y a pas de raisons positives de rattacher un fait à cette source. La tradi-
tion une fois admise comme solide, ne serait-on pas autorisé à faire dériver de
Pierre tout ce qui n'est pas inconciliable avec cette origine? C'est bien ain^i que l'au-
teur procède dans certains cas ; aussi, sur ce premier point, il n'y aurait à discuter que
sur le plus ou le moins. C'est certainement aussi le fait d'une critique judicieuse de
renvoyer dans certains autres cas à la tradition sans plus, c'est-à-dire à des sources
inconnues, peut-être orales, peut-être écrites. Dans l'ensemble cependant, il me parait
que M. Goguel, sans tomber dans l'excès qui fait de Marc le plus infime des ravau-
deurs, admet trop aisément des sources écrites.
Cela est tout à fait sensible quand il s'agit des Logia ou du recueil des discours.
La question est bien connue. Luc et Matthieu sont parfois d'accord entre eux pour
traiter d'une façon indépendante de Marc le même sujet, ordinairement desaphorismes
du Sauveur. On en conclut qu'ils suivaient alors une autre source, qu'on la nomme
Logia ou autrement. Aussitôt ces faits constatés, M. Goguel conclut encore que Marc
dépend des Logia. On a peine à croire qu'il se soit contenté d'un pareil raisonne-
ment (1;, car. enfin, au point indiqué, nous ne sommes qu'à pied d'oeuvre. Deux solu-
tions peuvent être présentées. Ou bien, en effet, que ni Marc a suivi les Logia, sans
Luc ni Matthieu s'en soient doutés, ou bien il représente une tradition parallèle aux
Logia. L'examen le plus attentif ne serait pas de trop pour trancher la question. Cet
examen, M. Goguel s'est dispensé de le faire.
Après cela on est étonné de son assurance. Quand il s'agit de comparer Marc et
Matthieu, les textes sont là. on peut discuter avec des chances sérieuses, et encore —
faut-il toujours tenir compte de cette inconnue qui est l'intention des auteurs, —
mais quand il s'agit des Logia dont le texte ne nous est pas parvenu directement !
d'un démoniaque que Marc a certainement trouvé dans sa source. S'il l'a omis, c'est
parce qu'il a établi —
à tort sans aucun doute —
une relation entre l'accusation de
folie portée contre Jésus par sa famille, et la dispute avec les Pharisiens ^> 'p. 91..
De semblables raisonnements n'étonnent pas chez ceux qui ne voient dans Marc
qu'un centon de documents mal adaptés, ils détonnent chez un auteur qui admet
linfluence sur Marc d'un témoin oculaire.
Et, pour le dire en passant, cette « folie j que les parents de Jésus lui auraient
(1 cependant tout ce qu'on peut tirer de plusieurs passages. P. 9S,Mt.et Le. sont plus près
C'est
du texte que Me. Donc la source de Me. est le recueil des discours. P. 103 • La plupart
primitif :
des éléments du teste de Mathieu ont, en effet, des parallèles daus d'autres passages de Marc où
ils semblent avoir leur place originale •. Suit la liste de ces passages. Puis aussitôt la couclusion:
. Il est rendu par là évident que la •2^' péricope est composée par le rédacteur avec des éléments
empruntés à la source des Logia ». Même raisonnement p. 1"" même raisonnement ou même ab- ;
reprochée dépasse de beaucoup la force du terme (1). Plus d'une fois. M. Goguet
passe un lourd trait à l'encre sur les fins contours de la rhétorique orientale. C'est
ainsi que d'après Marc les paraboles « seraient des artifices employés par Jésus pour
dissimuler sa pensée à la foule » (p. 101), et qu'il y aurait deux éléments contradic-
toires dans l'interprétation que Jésus donne au rôle d'Elie (2). Avec plus de sympathie
pour les textes, M. Goguel aurait vu dans la réponse du Sauveur une conciliation
ingénieuse avec moins de raideur scolastique, il n'aurait pas déterminé, non sans un
;
peu de pédantisme, ce qui convient ou ne convient pas dans les paroles que Marc
attribue à Jésus (3).
Outre la question des sources de Marc, il y a celle des états par où aurait passé
le texte M. Goguel est peu partisan du proto-Marc. Il
avant de nous parvenir.
refuse très sagement d'imaginer un premier Marc dépourvu de 6, 45 à 8, 26, sous
prétexte que Luc n'a rien connu de cette péricope. Il admet cependant des remanie-
ments assez sérieux dont il voit surtout la trace dans le grand discours apocalyp-
tique (Me. 13). Le point de départ est une excellente observation « Ou imagine :
les anges dans le ciel, ni le Fils, mais le Père seul » pour expliquer la non-réalisation
des prophéties. Etrange apologétique, car l'évangéliste -^ c'est de lui qu'il s'agit —
n'avait qu'à retrancher la prophétie elle-même. Même système critique lorsque
M. Goguel distingue avec toute raison dans s. Marc la ruine de Jérusalem et le der-
nier avènement du Christ. Seulement il attribue cette distinctiou au dernier rédac-
teur, entre 75 et 85, et il n'hésite pas à regarder le texte de Marc sur ce point comme
postérieur à celui de Luc. Cela est si évidemment contraire à tous les principes ordi-
naires de critique que M. Goguel doit supposer que le dernier rédacteur « a remplacé
l'allusion précise de la source à un siège, par un terme emprunté à Daniel, et néces-
sairement plus vague » (p. 246). C'est l'accuser d'une coquinerie fort subtile; ajouter
qu'il a peut-être agi inconsciemment, c'est un non-sens. La critique qui en viendrait
à soupçonuer chez les auteurs de semblables états psychologiques ferait sagement de
les abandonner à leurs incohérences.
Sur le paulinisme de Marc, je ne suis pas sûr d'avoir compris la pensée de l'auteur.
11 affirme très nettement que « Marc n'est en tout cas pas dominé par une préoccu-
pation dogmatique » (p. 305). C'est une des meilleures paroles de toute cette étude.
Je ne sais pas comment la concilier avec la conclusion : « En résuuié, si le deuxième
Évangile est effectivement un évangile paulinien, il faut dire qu'il n'est pas un exposé
théorique, mais une adaptation pratique du paulinisme « (p. 307). Mais qui pouvait
songer à un exposé théorique du paulinisme en racontant la vie de Jésus?
le principe pose par les Scriltes est faux puisqu'il contredit l'idée de la nécessité des soulTrances
du Messie. H résulte de l'autre, seulement, que le ministère d'Elle est déjà passé • (p. 181). Il
s'agit de Me. 9. 1-2-13. Il y a bien contradiction entre la pensée de Jésus et celle des scribes,
mais pas même l'apparence d'une contradiction i^ntre les deux éléments de la réponse de Jésus.
En quoi le ministère d'Élie. réalise dans la personne de Jean-Baptiste, victime de son devoir,
est-il en contradiction avec le riMe d'Élie tel que Jésus l'oppose à la théorie des scribes?
(3) « De plus, la parole de Jésus convient mal ici, car elle parait s'adresser à un homme qui
veut agir et non à un homme qui demande à Jésus d'agir • {p. 18-2 s.^ Tout cela parce que Jésus
demande au père de l'épileptique une foi plus ferme (Me. 9, 22 s.) :
RliCE^SIOiNS. 135
Ces remarques générales nous dispenseront d'entrer dans le détail. Notons seulennent
qu'il est faux de dire que « l'onction des cadavres n'est pas un usage juif « (p. 255).
Et pour le dire une fois de plus, quelle réserve ne s'impose pas quand il s'agit de dé-
clarer tel ou tel fait légendaire et non historique parce qu'il s'écarte de vraisemblances
dout nous sommes peu sûrs (1)si !
ment comme une valeur historique unique il représente probablement dans l'en-
:
semble un récit authentique d'un état très primitif de la tradition chrétienne sur la vie
et le caractère de Jésus » (p. 14). Et en eflfet l'auteur tablera sur Marc pour se faire
une idée de ce qu'était Jésus et de ce qu'il pensait être. Qu'est-il donc?« Une seule per-
sonne qui, comme un tout, vit une vie humaine et, comme un tout, peut être adorée
comme divine » (p. 278). Avec un peu de bonne volonté, on serait disposé à voir dans
ces termes un rajeunissement de la formule de Chalcedoine, en insistant même sur
l'unité de personne. M. Thompson conclut encore « Je me contente de dire de la :
personne totale de Jésus : « Voilà ce que j'entends par homme », et encore, « voilà
ment homme, et plus il est véritablement Dieu. Et en eflfet tout le livre est consacré
à prouver que Jésus est un pur homme. A qui donc sont destinées les formules qui
se rapprochent de celles de l'Église.^ Qui trompe-t-on? Personne, puisque M. Thomp-
son prend soin d'expliquer sa pensée assez clairement (2). C'est donc un jeu ? mais
flj C'est ainsi que le récit de la mort du Baptiste est relégué au rang des légendes pour des
raisons très frivoles. On lit encore à propos de la Transfiguration « Dans ce morceau nous trou- :
vons Jésus entouré" seulement de ses trois intimes, ce qui prouve que le récit a été lait ii une
épociue ou la conception des douze apôtres ne do ninait pas encore » (p. 1"!)). Voila des catégories
littéraires ei historiques construites bien légèrement. Et elles deviennent des règles inilexibles.
-2 Au surplus voici tout ce texte étrange « Ttiis, tlien, is the first conclusion towards wicti I
:
a esquissé d'une façon parfois très heureuse son genre d'esprit et sa manière d'ensei-
gner. Nous dirons même quil est un homme phis parfait, car l'auteur, qui le trouve
adorable connne homme, n'a pas hésité à lui imputer des imperfections qui touchent
au péché! C'est très gratuitement aussi qu'il lui attribue de croire à la réincarnation
d'Elie (p. 101), et monnaie appartenait en propre à celui dont elle représentait
que la
l'image (p. 119\ .Mais je lui sais bon gré d'avoir écrit que, pour des Anglais, le Jésus
de Renan était Français d'une façon intolérable (1;. J'ai déjà dit pourquoi je ne
consentirais pas à écrire que la théologie de M. Thompson est anglaise, car je la crois
intolérable pour des Anglais.
Jérusalem.
Fr. M.-J. Lagraivge.
Illi robur et aes triplex. C'est de M. Felteu que je veux parler, qui a eu le courage
d'entreprendre une histoire de l'époque du Nouveau Testament, ou du judaïsme et
du paganiï>me au temps du Christ et des Apôtres.
J'ai dit courage, peut-être même audace n'eût pas été de trop, mais on ne saurait
sans injustice prononcer le mot de témérité, tant il est évident que M. Felten s'est
préparé à cette grande œuvre par des études attentives et prolongées. Je lui en veux
cependant d'avoir dit qu'il n'existe pas de grand ouvrage qui embrasse toute la ma-
tière yVoncort). N'a-t-il donc jamais été hanté par la crainte de se rencontrer avec
Schùrer sans l'égaler?
Peut-être entend-il que sou plan est plus vaste, puisqu'il comprend le paganisme;
mais aussi combien ses développements du thème juif, le principal, sont plus res-
treints, et quiconque a pratiqué Schiirer n'a-t-il pas éprouvé souvent quelles lumiè-
de ce monde païen dont la pression s'exerçait sur le monde juil? Quoi qu'il en soit,
M. Felten eût été tout à fait dans le vrai en ajoutant a parmi nous », c'est-à-dire
qu'il n'existe en efifet aucun ouvrage catholique de grande envergure sur la matière,
et il faut le féliciter d'une tentative qui est incontestablement une heureuse réussite.
Un simple coup d'oeil sur la table des matières révèle l'étendue de Ihorizon.
L'histoire juive commence en 63 avant S.-C, au moment de la prise de Jérusalem
par Pompée; le théâtre des faits est indiqué par uue description du pays. Les der-
niers des Asmonéens cèdent la place à Hérode la domination romaine, inierrouipue
;
à demi par le règne d'Agrippa P'", par la révolution de l'an 66, et par la révolte de
Bar-Kokebas, est définitivement assise sous Adrien (p. 19-285).
Une deuxième section décrit la vie intérieure du peuple juif, constitution poli-
tique, Sanhédrin, Sacerdoce, administration du Temple, les Docteurs de la Loi, les
synagogues, les partis : Pharisiens, Sadducéeus, Esséniens; la vie de famille et les
fonctions sociales, le sabbat, les fêtes, les usages religieux, le prosélytisme, l'acti-
vité littéraire nous conduisent aussi jusqu'au temps d'Hadrien (p. 286-620).
Le second volume achève dans une première section ce qui regarde le judaïsme,
c'est-à-dire les vues théologiques des Juifs sur le canon des Écritures, Dieu, le Logos,
l'Esprit saint, les Anges, l'homme, le Messie, les fins dernières (p. 3-233). C'est seu-
lement alors que M. Felten aborde le paganisme, d'abord par sa situation politique
en insistant sur l'organisation des provinces orientales, puis par son état social et
moral, y compris les opinions philosophiques et religieuses des sages et du peuple
(p. 234-580).
On comprend que nous ne puissions discuter ni même passer en revue les opinions
de l'auteur. Ce qu'il faut dire, c'est qu'il a soigneusement consulté les sources, et
qu'il les a étudiées jusque dans les moindres détails. La bibliographie considérable
indiquée dans les notes prouve qu'il a lu beaucoup, mais aussi qu'il s'est tou-
jours formé son jugement lui-même. La composition est parfaitement nette; peut-
être M. Felten ne sera-t-il pas très flatté si l'on y reconnaît quelque chose de fran-
çais? Le texte ne comporte presque pas de discussion, en tout cas aucune polémique.
C'est dans les notes que l'on peut se rendre compte des préparations au moyen des-
quelles la conviction est acquise, de sorte que, si le texte courant paraît parfois trop
succinct, on trouve dans les notes beaucoup de détails utiles.
Naturellement déductions dépend beaucoup de la valeur des sour
la solidité des
ces, et,quand il s'agit de sources aussi anonymes et aussi dépourvues d'état civi
que certains documents juifs, c'est sur l'époque de ces documents que la controverse
doit surtout s'exercer. Je signalerai ici quelques points sur lesquels je ne puis me
rendre à l'autorité de M. Felten. Il place le livre des Paraboles d'Hénoch au temps
d'Alexandre Jannée et ne veut pas entendre parler d'interpolations chrétiennes. J'ai
jusqu'après mort d'Hérode le livre des Jubilés et le Testament des douze patriar-
la
rieure au lyf siècle (2). Or un juge aussi compétent que M. Dalman n'admet pas que
leTargiun d'Onqelos prophètes aient été rédigés par écrit avant le v^ siè-
ni celui des
cle. Des lors de s'appuyer sur leur texte pour ce qui regarde les espé-
il est difficile
rances messianiques des Juifs au temps de Jésus. M. Felteu estime qu'un personnage
nommé Onqelos (Akulas) a bien existé au i^"" siècle n'est-ce pas accorder trop de ;
crédit aux renseignements talmudiques qui ont probablement voulu parler d'une ver-
sion à la mmiere d'Aquila?
L'interprétation symbolique de l'Assomption de Moïse me paraît bien indulgente,
à juger d'après l'état chimérique et plus fanatisé que
d'esprit de l'auteur, plus
M. Felten ne le représente. En revanche je suis heureux que M. Felten admette
l'antériorité de IV Esdras par rapport à l'Apocalypse de Baruch, et qu'il rejette l'exis-
tence d'un Messie lévitique dans le Testament des XII patriarches.
(1) Le Messianisme..., p. 90, note.
[•2) CI. p. 552.
138 REVUE BIBLinUE.
Mais il faut le féliciter surtout d'avoir mené à bonne fin une entreprise aussi ha-
sardeuse, qui pourra naturellement être complétée et améliorée avec le temps.
L'érudition aussi étendue que précise de l'auteur suppose une puissancede travail con-
sidérable, qui ne se tiendra pas pour satisfaite de ce premier et très beau résultat.
Jérusalem.
Fr. M.-J. Lagbange.
Ou
connaît le plan du Commentaire critique international édité par la maison
ClarlvdEdimbourg. L'explication se poursuit à deux étages par un commentaire
sommaire et par des notes de critique textuelle et de philologie. De temps en temps
le commentaire est interrompu et complété par des développements plus ou moins
étendus, surtout sur la portée historique et religieuse des récits. C'est ce qu'on trouve
particulièrement, avec une disposition très lucide, une concision et une précision très
remarquables dans la Genèse de M. John Skioner. Au moment oîi ce savant était
chargé de l'exégèse de ce livre, paraissait The book of Genesis du Rév. Driver (1904);
mais la collection dont il fait partie n'admet pas le traitement technique des ques-
tions de philologie et de critique textuelle. On peut donc dire que l'Angleterre ne
possédait pas de commentaire critique complet du premier livre de la Bible. Celui
que lui donne aujourd'hui M. Skinner est assurément fort remarquable, et le recen-
seur ne peut que souscrire au jugement très favorable déjà porté par le R. P. Con-
damin (1). La philologie sémitique, l'archéologie orientale, l'histoire, sont maniées
avec aisance et sûreté. On est étonné de trouver sous un si petit volume 2) tant
d'informations variées. 11 semble bien que rien d'important parmi les découvertes
modernes n'a été négligé, sauf peut-être ce que l'auteur aurait pu trouver dans des
ouvrages français, comme le Canaan du P. Vincent. Mais s'il affecte de ne mettre
dans sa liste bibliographique qu'un seul ouvrage français. Les Origines de l'histoire
de Fr. Lenormant, dont il a tiré peu de choses, il met ses lecteurs au courant de ce
qui s'est dit en Allemagne. Il reconnaît d'ailleurs de très bonne grâce qu'il doit beau-
coup à Gunkel dont il a recueilli l'admiration commuuicative pour les anciens récits
— aussi beaux dans leur genre que les et la manière
paraboles de Nolre-Seigoeur, —
de les interpréter, moins pour leur valeur historique que pour leur portée religieuse.
. Aussi le déclare-t-il tout uniment c Uu des plus étranges préjugés théologiques est
:
celui qui identiCe la vérité révélée avec l'exactitude en matière de faits, soit dans
l'ordre scientifique, soit dans l'ordre historique. La légende est après tout une sorte
de poésie, et il est difficile de voir pourquoi une révélation qui s'est servie librement
de tant d'autres façons de poésie — fable, allégorie, parabole — aurait dédaigné celte
forme de poésie qui est la plus influente de toutes dans la vie d'un peuple primitif
(p. v)... C'est, en exégèse, un véritable suicide, de supposer que la valeur permanente
du livre consiste dans le résidu des faits historiques qui est sous-jacent à la forme
poétique et Imaginative des récits » (p. viii). On reconnu les idées de Gunkel
a
(cf. RB., 1901, p. 616 ss.i. C'est au même savant que M. Skinner emprunte sa dis-
tinction des légendes ou mythes en explicatifs, qui cherchent la cause, en ethnogra-
phiques, qui parlent des clans comme de personnes distinctes, en cultuels, qui
remontent aux origines des sanctuaires, en et i/mo logiques enfin, sans parler de la poé-
sie qui embellit, qui idéalise et qui crée. Légendes ou mythes, disions-nous. L'au-
teur les distingue eu ceci, que la légende suppose un fond historique, mais l'utilité
de la distinction n'apparaît guère dans la pratique, soit parce que le mythe peut
envahir la légende, soit parce que les Hébreux, trop peu doués d'imagination pour
inventer des mythes, ont mis en œuvre ceux de leurs voisins. Toutefois M. Skinner
tient à déclarer qu'il ne reste dans la Genèse que de faibles traces des mythes, éla-
borés comme ils lont été par le sentiment religieux beaucoup plus pur du peuple
au sein duquel s'est produite la Révélation.
D'après ce qui précède, on ne s'attend pas à trouver M. Skinner très ferme sur le
caractère historique des patriarches. Il n'ignore pas que plusieurs assyriologues érai-
nents, très indépendants de toute confession religieuse, reconnaissent dans ces gran-
des figures des personnalités qui ont vécu. Et la raison qu'ils en donnent, c'est que
le cadre où les narrateurs les ont placés est bien celui du deuxième millénaire avant
Jésus-Christ, milieu historique et informations positives qu'on n'eût pu inventer au
temps des rois de Juda et d'Israël, sans tomber dans de grossiers anachronismes.
Mais M, Skinner croit pouvoir répondre que précisément ce fond du tableau histo-
rique fait défaut à la légende des patriarches, et que les monarques orientaux nom-
més au chapitre xiv ont pu être insérés dans la tradition, à une date relativement
tardive, par un Juif bien informé sur les annales de Babylone. Fidèle à son système,
il attribue plus d'importance religieuse à l'Abraham de la tradition orale qu'au
nommé Abraham, hébreu dont le chapitre xiv raconte les exploits. Soit, la voca- —
tion du père des Croyants, la promesse des bénédictions futures, l'alliance inaugurée
avec le père d'Isaac, sa foi, son obéissance, parlent plus à notre foi et à notre coeur
que la délivrance de Loth. — mais enfin, si Abraham n'a pas existé! Le savant exé-
gète sent bien que le fruit religit^ux de toute cette histoire serait bien compromis, et
certaine que la séparation de cet ouvrage, même jusqu'à de très petits fragments
du contexte où ils sont enchâssés » (lvii). On voit que M. Skinner s'en tient au sys-
tème que Wellhausen a fait prévaloir en Allemagne. Ni les attaques des conserva-
teurs, ni celles d'un radicalisme outrancier ne lui semblent avoir ébranlé la redoute
de la critique grafienne J est issu de Juda, et E d'Israël, entre 930 et 750; le Deu-
:
-\
téronome apparaît en 621; le Code sacerdotal est promulgué par Esdras, et tout le
Pentateuque vers 432 avant Jésus-Christ, sauf quelques additions postérieures. En
tout cela rien de bien original. C'est assurément faire preuve d'un très bon esprit
que de préférer des solutions solides à des conjectures originales. Il nous semble
cependant que tout le système gagnerait à éire revu de plus près et à être modifié
dans le sens de la tradition.
Donnons encore, à titre d'information, comme tout ce qui précède, quelques
échantillons de l'exégèse de M. Skinner. La connaissance du bien et du mal, au Pa-
radis terrestre, c'est la connaissance de la vie et du monde qui distingue l'homme
fait de l'enfant. Le péché d'Adam fut un empiétement sur les droits de Dieu; les
vive opposition aux concessions projetées en faveur des fidèles orthodoxes parlant
arabe (les arabophones) lui a valu un exil qui dure encore.
Certes, nous ne contesterons jamais la grandeur de Téglise de Jérusalem et nous
comprenons très bien ralTectioii profonde de l'auteur pour cet antique foyer de
lumière et de sainteté, pour cette vénérable Sion jadis si brillante et depuis long-
temps si éprouvée. L'historien, cependant, doit se garder de tout ce qui peut gêner
son intuition et entraver son jugement. Faire de Jacques, frère du Seigneur, le di-
recteur de toute la vie de l'Église aux temps apostoliques est une prétention qui
manque de justesse. Tout le monde sait que s'il avait eu en mains la direction de
l'évangile, l'Église aurait eu du mal à se débarrasser du joug de la Loi et que c'a été
grâce à l'émancipation de Pierre et de Paul vis-à-vis de la communauté de Jérusalem
que l'Église a pu devenir véritablement catholique, c'est-à-dire universelle. Je ne
sais pas où l'auteur a vu que Jules Africain était originaire de Jérusalem (p. 61).
Suidas le fait naître en Libye, c'est tout ce qu'on possède là-dessus. Par contre le
voyage de Méliton en Palestine pour s'informer du canon biblique eût dû être noté
comme une preuve de l'autorité qu'on reconnaissait à Jérusalem dans le dépôt de
certaines traditions. Le témoignage peu honorable que Grégoire de Nysse a laissé sur
la vie morale de la ville sainte (1), vers 380, rabaisse nécessairement l'idéal que
voudrait à tout prix faire briller l'archimandrite P. Aussi est-il mis sur le compte
d'un moment de mauvaise humeur (p. Il6j. Cependant, les querelles raonophysites
et origénistes, certaines paroles d'Antiochos Stratégios et de Sophrone, sans parler
de rixes plus récentes, montrent suffisamment que la violence s'est maintenue comme
une tradition à Jérusalem.
Le grand homme, assurément, est celui qui a réussi à obtenir la dignité patriarcale,
le théophore Juvénal qui s'est toujours parfaitement conduit. S'il y a eu des troubles
à Éphèse, en 431, la faute en esta Candidien, le représentant de l'empereur (p. 161).
Le comte voulait qu'on attendit le patriarche d'Antioche et les évêques orientaux
pour se mettre en séance. Voilà le désordre. Car de quel poids étaient Antioche et
toute la Syrie à côté de la grande Jérusalem? Voir encore à la page 167 la sincérité
de Juvénal vengée des attaques de l'histoire (2).
Supérieure en dignité et en vertu, l'église hiérosolymitaine a été et doit demeurer
grecque. Tel est le Des l'époque de la diffusion du christia-
second point de la thèse.
nisme en Palestine, ainsi que l'auteur le fait remarquer avec soin, dans les villes et <.<.
que cette alfirmation a d'exagéré, si l'on veut bien se reporter à mon étude sur la Vie de
saint Porphyre dans les Conp't^ences de Saint-Étiennc, pp. 275-283. Après la conquête
arabe, l'archimandrite Chrysostome suit avec inquiétude les diverses phases de l'a-
rabisation forcée du peuple de Jérusalem, car pour lui tout ce monde-là descend des
vieux Grecs implantés en Palestine par Alexandre. Sous le calife al-Mansour (754-775),
l'enseignement du grec est prohibé; les chrétiens se voient obligés de traduire en
arabe les livres ecclésiastiques (p. 300). Sous Hakera, en 1012, les villes et les bourgs
sont arabisés de langue et de religion par le fer et par le feu (p. 360). A l'époque du
royaume franc, dans les fonctions communes des Grecs et des Latins, on lisait l'é-
(Ij PC, 46, 101-2 : ' Il nesl pas un genre d'immoralité qui ne s'y commette : la méchanceté, les
adultères, les vols. l'idoLitrie, le poison, les basses jalousies, les meurtres, le malenOn s'y trouve
ancré de telle sorte que nulle part on n'est plus porté à assa.«siner que dans ces régions, on les
gens de même race se ruent dans le sang comme des bétes fauves pour un gain insignIGant ».
(2) Voir DiiCHESNF.. Hist. ancienne de l'Église, IH. chap. x-xn, où les choses sont mises au point.
j42 REVUE BIBLIQUE.
vangile d'abord en latin, puis en grec , cela prouve que les arabophones compre-
naient le grec qui était pour eux l'unique langue liturgique (p. 388). Les revendica-
tions actuelles d'une liturgie en langue vulgaire ne sont aucunement fondées. Que les
pétitionnaires songent qu'ils descendent des anciens Hellènes «qui sous Alexandre et
les Diadoques ont fondé les brillantes villes helléniques de la Cis- et de la Transjor-
dane »; qu'ils lisent les pages 452 et ss., ils reconnaîtront leur erreur. Bref, toute
cette question de la langue liturgique, agitée dans l'église orthodoxe, est traitée à la
lumière des conclusions de P. Carolidès qui fait descendre les arabes chrétiens, mel-
chites et autres, de Grecs qui ont oublié leur langue et soutient que le Christ, bien
que sachant l'araméen, préférait le grec dans sa conversation (1).
Si le troupeau des fidèles doit sa lointaine origine à l'Hellade, a fortiori les pas-
teurs. Les quinze évêques venus du judaïsme ont résidé à Pella; aucun d'eux ne s'est
assis sur le trône de Jérusalem, la communauté n'étant revenue de l'exil qu'après la
fondation d'Aelia (p. 50). Et cette communauté, débarrassée de tout élément juif,
n'était plus que d'Hellènes, ayant à sa tête un Hellène, Marcos. C'est
composée alors
ainsi que la du siège épiscopal de la ville sainte, qui aurait pu, quoique
sémitisation
momentanée, créer un précédent, est écartée par une simple chiquenaude. Malheureu-
sement, il reste plus d'un texte résistant au choc, entre autres Eusèbe, Hist. eccL, IV, 5 ;
1910, p. 453. nous lisons : « Élie était d'Egypte; il fonda, le premier, la vénérable
communauté hagiotaphite j). Pour M. Papadopoulos, cette date est trop basse; à son
avis, la confrérie du saint Sépulcre a été fondée avec les sanctuaires, en 326. Son ori-
gine est la légion des siwadœi et des monazontes (pp. 96 s.). L'auteur ne peut nier
qu'au xv^ siècle des arabophones parvinrent au trône de Jérusalem, des laqoub,
des Ibrahim : oui, mais, les pauvres ils étaient réduits à gagner leur vie par le tra-
!
vail des mains et sous leur régime les monastères et les églises croulaient, les pèlerins
se faisaient rares, les sanctuaires étaient envahis par les étrangers (pp. 446 ss). Qui
plus est, ces prélats avaient des relations avec les occidentaux : l'un d'eux reçut des se-
cours du duc de Bourgogne, Philippe le Bon, pour la restauration des Lieux saints.
La troisième note, en effet, de l'église de Jérusalem, est d'être anti-latine, soit
pour des raisons de doctrine, soit, surtout, à cause du partage des sanctuaires. De-
puis le paragraphe intitulé ay.oç Owtio; za'i f, £/./.Xr,aîa 'IccoïoXûawv, nous savons
pleinement à qui nous avons affaire. Toutes les tentatives de rapprochement entre
l'Orient et l'Occident chrétiens, mises sur le tapis dans le cours des siècles, sont vio-
lemment stigmatisées. Quant aux aménités de langage, il serait facile den faire un
abondant florilège. A propos de l'interdit jeté sur le saint Sépulcre, lors du voyage
de Frédéric II : « la fanfaronnade papique alla jusqu'à l'excommunication du saint
tombeau » (p. 416). Une autre réflexion que tout homme intelligent voudrait ne pas
avoir faite : Le patriarche Sophrone IV assista au synode qui repoussa « le calen-
drier grégorien par lequel l'égUse latine cherchait à circonvenir les orthodoxes »
(1) Cf. Revue d'hist. eccl., 1910. p. G60. L'antisémitisme des Hellènes est à ce point que les étu-
diants en théologie d'Athènes ont présenté au recteur de l'université un mémoire contre l'ensei-
gnement de l'hébreu ils demandent la suppression delà cliaire d'hébreu comme sans utilité et
:
l'institution d'une chaire d'exégèse d'après le texte des Septante (IUlmieri, ibid.),
(2) Cf. Confér. de Saint-É tienne, pp. 288 ss. Saint Élie, par le R. P. Génier.
RECENSIONS. 143
('p. 4S2i. Libre à eux d'adopter même Tannée lunaire. l'inconvénient ne sera pas
pour nous. Les Croisades, en particulier, out le don de remuer la bile de l'auteur. Le
sujet, comme le lecteur sera à même d'en juger, ne mérite pas de documentation;
il sulûra de donner libre cours à la haine. La guerre sainte est une lèpre (p. 418);
les Croisés en partant laissaient derrière eux des ruines p. 422). C'est tout le ré-
sultat de l'expédition. Je ne relèverai pas les réûexions de l'archimandrite sur les
constructions des Croisés qui. à ses yeux, se réduisent à rien; elles dénotent une ab-
sence complète des notions d'art les plus élémentdires. Le cri de joie poussé à la
mort de Nicolas de Hanapes, mort qu'il voudrait rendre ignominieuse, écœurera
certainement celui qui sait dans quelles circonstances tragiques l'héroïque patriarche
finit sa noble carrière (p. 417,. Quoi que l'auteur en ait dit, les Grecs du moyen âge
savaient estimer le gouvernement latin qui leur faisait oublier toutes les tracasseries et
les atrocités des dernierscalifes. Du seul tableau des cérémonies du saint Sépulcreet de
la prospérité des monastères grecs au xii<= siècle trace, pp. 389 et suivantes, il ressort
avec quel tact et quelle tolérance s'exerçait l'autorité franque. L'auteur se refuse à
le reconnaître, mais il n'a pu détruire les documents. La même remarque s'impose à
propos de longue querelle des Lieux saints qui remplit à peu près la moitié de sou
la
livre. Les acteurs qu'il met en scène sont, en réalité, bien moins méchants qu'il ne
les représente. Les pèlerins occidentaux sont accueillis avec empressement dans les
monastères grecs, au xv- siècle: le P. Nau a une longue conversation avec l'higou-
mène de Saint-Sabas. Jusqu'au xix.' siècle, le clergé orthodoxe a respecté les tom-
beaux glorieux de Godefroy de Bouillon et de Baudouin et les restes de l'église de
Sainte-Marie la Petite.
La lente et inévitable pénétration de l'Orient par l'Occident, conséquence néces-
saire de la vitalité des peuples que celui-ci renferme, qui ne est une loi d'histoire
peut irriter qu'un esprit aux vues bornées. Les Croisades furent un épisode de cette
pénétration: elles ne réussirent pas, parce qu'elles se heurtèrent à des forces supé-
rieures et bien organisées. Si elles avaient eu une issue heureuse durable, la Pdles-
tine ne serait pas la terre pelée et désolée, sans industrie, sans voie de communica-
tion que On
y verrait fleurir la vie économique et sociale des nations
l'on connaît.
cultivées et aussi ce succédané de l'esprit chevaleresque qui s'appelle la courtoisie.
Toutefois la pénétration occidentale ne s'est point arrêtée à la prise de Saint-Jean
d'Acre. Elle s'est poursuivie sous d'autres formes, celles des traités par lesquels le
modus Vivendi des indigènes et des étrangers était réglé. De là, les démarches des
ambassadeurs de France à Constantinople. au xvi*^ siècle et aux siècles suivants,
des de la Vigne, de Brèves, de Césy, de Nointel, etc.. que l'historien parcourt pas à
pas, et à qui les latins doivent de pouvoir vaquer à leur aise aux exercices de dévo-
tion dans les Lieux saints. Je ne suivrai pas l'auteur dans ce dédale diplomatique, ni
dans les manœuvres attribuées à chaque confession, où l'on voit se succéder les gros
mots de faux, d'accaparement, de mensonge, de vol. de vénalité, etc. C'est aux inté-
ressés, qui doivent être outillés pour cela, à y répondre (t .
Pour nous, notre tâche sera de relever encore quelques erreurs historiques aper-
çues çàetlà. —
P.J3. L'un des chrétiens martyrisés à Ascalon s'appelle -z-yxoz et non
Outre les Latins, les Arméaiens, les Copies, les Géorgiens, les Abyssins, tous on* leur paquet.
(1
Ily a des pages qui sont un vrai jeu de massacre. Après les Francis.ains, les Jésuites sont mis
à mal. En 1583, trois Jésuites « fléaux, du public mouraient de la peste • (p. 49.ï\ C'est uu pré-
ambule au récit de la tentative des Pères de la Compagnie de supplanter les Pères Franciscains
dans la garde des sanctuaires. L'auteur cite à ce propos une phrase italienne sans qu'on voie
clairement d'où il l'a tirée.
144 REVUE BIBLIQUE.
rfpooo;. La première lecture appuyée par tous les rass. du De Martyribus Palœstinss
est confirmée par une inscription trouvée à Bersabée [RB., 1906, p. 86). — P. 91.
L'église des Apôtres ou du Cénacle a été construite après la mort de Constantin et
non du vivant et grâce au concours de sainte Hélène.
P. 91. Comment se fait-il quuu historien quia lu Éthérie place l'Éléona au pied du
mont des Oliviers Et pourquoi situer près du chêne de Mambré les tombeaux des
î*
saint des saints » o-zo atvcô -aXa'.b; îo-j3T.viâvs!oçXab;Tf;6îOT6/.ojîq -à "Âi'ia xôjv 'Aylio'K
A travers cette topographie embrouillée et contradictoire on arrive à découvrir la
pensée de l'auteur. La 7iéa de Justinien est soit à el-Aksa, soit à la mosquée d'Omar
L'une et l'autre de ces deux localisations sont insoutenables. Si les Byzantins ont
pratiqué l'archéologie de cette manière, quelle confiance pourrons nous avoir dans
leurs localisations? Lauteur n'a donc pas le droit de s'ebaudir des sanctuaires des
Croisés, institués xx-rà oavTXîtav. — P. 396. Les Croisés n'ont presque rien fait au
saint Sépulcre: c'est à peine si, en 1130. ils ont réuni les divers sanctuaires sous un
même toit. En 1Russe Daniel n'indique aucun changement. Or, ouvrons le
106, le
récit de l'higoumène au chap. x La sainte grotte est « surmontée d'une belle tou-
:
relle [reposant] sur des piliers et se terminant par une coupole, recouverte d'écaillés
en argent doré et qui porte sur son sommet la figure du Christ en argent, d'une
taille au-dessus de l'ordinaire; cela a été fait par les Fbancs ». P. 406. —
Sainte-Anne et Sainte-Madeleine sont des églises grecques. Voir de Vogué, Les églises
de Terre Sainte, chap. 4 et 7. —
P. 472. Depuis 1450 jusqu'au début du xvi* siècle
le monastère de Saint-Sabas est demeuré désert. Je renvoie l'auteur à Fabri qui, bien
que çavaT'.xbç Aai^vo? (Nea Sion, 1910, p. 147) (1), a visité Saint-Sahas en 1484. Dans
son Eififfatoriuru, H, 152, il signale habitacula monachorum, adhuc ibi degentium.
numéro sex, et 141 et ingressi monasterium a Cologeris monachis graecis reveren-
:
F.-M. Abel.
Questions générales. —
Le Compendium d'iatroductioa biblique du R. P. Cor-
nely jouit d'une réputation méritée. Cinq éditions étant épuisées à la mort du véné-
rable auteur, le R. P. Martin Hagen, auteur du Lexicon biblicum, a été chargé d'éditer
la sixième (1). Il a indiqué les points principaux sur lesquels s'est portée son activité.
Signalons deux changements heureux dans le sens de la critique. Le R. P. Hagen ne
vent les sept cents inscriptions minéennes à partir du xx^ siècle avant J.-C,
qu'Euting aurait relevées entre Pétra et Médine (p. 199)? Le Pv. P. Hagen a indiqué
assez correctement la division des sources de la Genèse d'après les critiques, mais
lorsque 209) il prétend attaquer les différences de style que ces critiques ont
(p.
signalées, ne connaît plus que le jahviste et un seul élohiste, auquel il attribue les
il
caractéristiques du code sacerdotal. Tout en est brouillé, et je ne sache pas non plus
qu'un seul critique ait attribué au jahviste Gen. 48,4 et Num. 32, 5. Parler d'autres
points serait engager une série de controverses qui ne sauraient trouver place ici.
Disons encore à l'éloge du R. P. Hagen qu'il a laissé de côté la distinction du car-
dinal Franzelin entre le formel et le matériel de l'Écriture à propos de l'Inspiration.
11 s'est évidemment préoccupé de faire sa part à l'écrivain sacré, même en ce qui
regarde les pensées, et il a distingué assez soigneusement la révélation et l'inspiration.
Ce qui suit mérite assurément d'être noté
« ubi vero de rébus agebatur, quas scriptor
:
turali operatione menti raeraoriaeque scriptoris veliit sciibendas obiiceret (cela est
encore du système Franzelin, mais l'auteur ajoute, et c'est nous qui soulignons) aut
eumni illas quaerendas inveniendasque gratia sua impelleret adiuvaretque » (p. 669).
Cette dernière incise, qui contient encore dans la pensée de l'auteur une notion sufC-
sante de l'inspiration, répond assez bien à ce qu'on a soutenu dans la Revue sur ce
sujet depuis 1896, on le constate avec plaisir. Ce point admis, le R. P. Hagen écrit
comme rédigerait un thomiste « Porro a Deo, ut alicuius libri auctor iure vocetur,
:
composition « Summo enim eum iure Deus auctor librorum sacrorum vocari potest,
:
Nouveau Testament. —
Il appartenait à Mrs. Lewis de donner l'édition défi-
nitivedu manuscrit syriaque du Sinai qui contient la plus ancienne version syrienne
des évangiles distincts (2). Il eût même été beaucoup plus juste de nommer ce ms.
« Lewis » que de désigner son confrère par le nom de Cureton. C'est le ms. de Cureton
que M. Burkitt a édité dans son admirable édition; sauf pour les endroits où Cureton
manque, —
et c'est en particulier le cas de tout le second évangile, M. Burkitt a —
(1) Outlines of Bible Knowledge, edited by Ihe most Kev. S. G. .Messmf.u, D. D., D. C. L., aichbishop
of Milwaukee, with 70 illustrations and four maps, in-8° de xi-298 pp. Fri jourg en-Brisgau, Herder,
dOlO.
(i) The old syriac Gospels or evangelion da-mepharreshê; being the test of tlie Sinai or Syro-
Antiochene palimpsest, including the latest additions and emendations, with the variants of the
curetonian text, corroboralions from many others mss., and a list of quotations from ancient
aulhors, edited by Agnes Smith Lewis,... with four facsimiles, in-'»" de lxxviii-334 pp. London.
Williams and Norgate, MCMX.
BULLETIN. 147
mis Cureton dans le texte, les variantes du ras. du Sinaï étant rejetées dans les notes.
Très naturellement, Mrs. Lewis a renversé cet ordre. Elle avait d'ailleurs un autre
motif de publier le ms. syrsin., c'est qu'un sixième voyage au Sinaï en I90fj lui a
permis de vérifier certaines leçons douteuses, si bien qu'elle estime offrir environ
trois cents corrections de l'œuvre de M. Burkitt. Mrs. Lewis opine toujours que
l'ancienne version syriaque est antérieure au Diatessaron de Tatien. De plus elle a
fait la preuve que le ras. trouvé au Sinaï n'en est pas originaire, mais qu'il vient de
la région d'Antioche, lieu d'oriizine probable de la version elle-même. Par un scru-
pule qui n'est pas sans quelque coquetterie. Mrs. Lewis reproduit fidèlement la dis-
position du ms. par pages et par lignes, pour faciliter la besogne à ceux qui seront
tentés de reviser son travail. Au bas des pages du texte syriaque, des notes indiquent
soit les variantes du Cod. Cureton, soit les similia in aliis codicibus. La traduction a
déjà été publiée par Mrs. Lewis : la nouvelle publication donne en appendice les
modifications exigées par les nouvelles lectures. D'autres appendices plus considérables
contiennent : 1 la liste des addenda et corrigenda par rapport à l'édition de M. Bur-
kitt; '2' la liste des citations des Pères syriens qui se rapprochent plus de l'ancienne
traduction que de la Pechittd :
5'' la liste des omissions du texte, qui constituent,
d'après l'éditrice, une preuve de son caractère primitif. Ajoutez à cela des notes où
certains passages remarquables sont discutés,une bibliographie très complète du
sujet et une introduction,
vous comprendrez quel labeur énorme suppose un ou-
et
vrage dont rimpression n'a pas duré moins de six ans. Le manuscrit du Sinaï doit
beaucoup à Mrs. Lewis; mais elle lui devra de vivre dans le souvenir reconnaissant
de ceux qui sauront se servir de cet incomparable trésor.
Un
prêtre de la Mission a eu l'heureuse idée de doter les étudiants d'un texte gréco-
latindu Nouveau Testament. Déjà ont paru les Évangiles et les Actes des Apôtres (1).
Le texte latin était tout indiqué ce ne peut être que celui de la Vulgate Clémentine.
:
Encore est-il que l'auteur cite en notes quelques passages très peu nombreux, per-
pauca, comme n'ayant pas été écrits par s. Jérôme. Quant au texte grec, on s'est
quel le texted'un Codex de cette valeur. Mais dans l'exécution il arrive ordinairement
qu'on perd courage, et qu'on n'ose préférer toujours le même manuscrit. Alors puis-
qu'on rentre dans l'éclectisme, il ne faudrait sacrifier le VatkanuH en cas de conflit
qu'a des autorités supérieures. L'auteur a tranché la question plus simplement. Il a
une si haute idée de la Vulgate qu'il lui immole son Codex favori : quotiescumqne ece-
nit utcodex B cum Vulgata per modiim discrepantiae aut omisslonis non congruerit,
alium quidem codicem latinae versioni magis similem aggregavirmis (p. vu). C'est là
un principe fâcheux auquel heureusement l'auteur n'est pas demeuré toujours fidèle.
Dans s. Marc, par exemple, il a eu le courage de renoncer a la piquante leçon r^-oçn:
'6.20) pour complaire à la Vulgate, mais il a conservé -jyar, (7. 3), pavT'.-ojvTa; (7, 4),
3-'.6aXa)v (14, 72), excellentes leçons qu'il eût fallu remplacer par -j/cva, Sa—iawvTai,
r.p^aTo, si le texte grec avait été conformé à la Vulgate selon la rigueur des prin-
cipes (2). Même inconséquence quand l'auteur adopte (8, 26) une leçon mixte qui ne
répond pas à la Vulgate, ou quand l'omission n'est pas au même endroit (9, 37 o-:
Q-jy. r,/.oXoj9£'. r,'j.'.'i n'est pas représenté dans la Va., et le grec oraeto; oj/. a/.oÀojÔEir-.a-.v
fl; Sancta lesu Christi evangelia et Actus apostolorurn, Grâece et latine, in-18 de viii-3H (double).
Paris, Gabalda, 1910.
(2, De même M'. 8, 28 twv ra5apr,vuv est maintenu en dépit de Geyasenorum.
148 REVUE BIBLIQUE.
qui y figure), ou quand le texte de B est conservé quoiqu'il soit omis dans la Vgf. (1,
34 ypioTov £tvai, 11,1 Brfi'^oi-(r^) Il est d'ailleurs juste de dire que les leçons de B qui
.
ne sont pas conservées sont indiquées en note, et qu'on indique aussi la provenance
des pièces dont il est gratiflé d). A tout prendre, ce que nous critiquons ici, c'est
moins la pratique de l'auteur que la façon trop absolue dont il a énoncé sa méthode.
La Nous n'avions rien jusqu'à présent, parmi les
correction du texte est soignée.
ouvrages catholiques, qui bon et aussi bon marché (2). L'auteur et
fût à la fois aussi
l'éditeur ont dû faire des sacriQces pour rendre service aux séminaristes. Nous ne
pouvons donc que souhaiter le prompt achèvement de tout le Nouveau Testament.
nie. Même conclusion lorsque D attribue, par exemple, à Mt. et à Me. un texte fort
semblable, et qui paraît influencé par Le. Il ne restait plus à M. Vogels qu'à dresser
la liste des leçons harmonisantes du Codex Bezae. On se demandera sans doute quel
estson point de comparaison, c'est-à-dire le texte reconnu comme pur de leçons
harmonisantes? Pour être plus sûr de ne point en augmenter le nombre dans D,
M. Vogels ne rejette du texte censé pur que les variantes rejetées à la fois par Ti-
schendorf, Westcott-Hort et B. Weiss. Il est donc en droit de regarder le total de
(1) Pas toujours cependant; par exemple Me. i, IG, a[j.jtê),r|CTpov est ajouté à B sans avertisse-
ment.
(2) Le N. T. tout entier, io-lS de 1100 à 1200 pages, broclié, pris net 1 fr. 80 (pour paraître en
avriM9H).
(3; Die Hannonistik im Evangelientext des Codex Cantabrigiensis, Ein Beitrag zur neutesta-
mentlichen Textkritik, von Dr. Theol. Heinricli Joseph Vogels, Religions und Oberlehrer, in-8" de
iv-119 pp. Leipzig, Hinrichs, 1910.
BULLETIN. 149
cienne latine remontent à l'original même de Tatieu, d'autant que l'ancienne syrienne
en beaucoup moins entachée. Tatien ayant plus d'influence en Occident qu'en
est
S\Tie, c'estune hypothèse assez étrange. Et il faut aussi tenir compte des manières
si divergentes d'harmoniser que l'on rencontre dans les textes occidentaux et s\Tia-
ques. Tout s'expliquerait mieux si on avait procédé dans plusieurs centres à un tra-
vail guidé par la même idée.
parler des origines chrétiennes. Les conférences ont porté sur Flavius Josephe, les
Rabbins et les Romains, le Canon catholique. Saint Paul, les Actes des Apôtres, les
Évangiles, l'authenticité des discours de Jésus, l'historicité des récits évangeliques. 11
des détails précis dont il enrichit certaines données qui la concernent, inspiration et
canonicité des Livres saints, développement des doctrines, etc. (1^ ». Et tout cela est
exposé avec la belle clarté française, ce qui ne gâte rien. « Chez M?'' Batiffol,
dit M. Michel Salomon (2.. le sens artiste est une autre façon d'estampille.
Qu'on lise, dans Orpheus et l'Évangile, les pages sur la couleur locale des discours de
Jésus, celles encore sur la parabole du semeur. Ajoutons que M='" Batiffol est un
écrivain sobre et délicat, d'une précision serrée et, à l'occasion, d'une justesse ai-
guisée ». Mais encore une fois, ce n'est pas aux lecteurs de la Revue qu'il faut ap-
prendre la place imcomparable occupée par notre collaborateur dans la défense de
l'Église et dans le développement des bonnes études ecclésiastiques.
du AV/'o redivivus ». Sans doute M. Brassac n'en conclut pas que s. Jean afûrme le
retour prochain de Néron en chair et en os ce Néron revenu serait un symbole pour :
viser Domitien. Mais c'est bien ainsi que l'ont entendu plusieius « rationalistes », et
de marque. Cette ingénieuse interprétation lui fournit la clef d'un passage très difficile
(17, 7-11). Il l'adopte, mais voici un étrange scrupule. « Cette explication qui cadre
assez bien avec les faits, donne lieucependant à une grave difficulté. Ainsi expliqué,
ce passage paraît ne pas être une prophétie, mais une histoire écrite sous lorme
d'apocalypse » (p. 778). Mais l'œuvre de s. Jean n'est-elle pas l'apocalypse par excel-
lence? Et cela empêche-t-il qu'elle soit en même temps une prophétie de la fin des temps ?
Sous le titre des Sept ('toiles de l'Apocalypse (3), M. Lampakis publie un voyage
archéologique aux sept églises, précédé d'un pèlerinage à Patmos. A chacune de ces
stations l'auteur consacre une notice historique, puis un aperçu sur les ruines et les
monuments, enfin une information sur l'état actuel des églises auxquelles saint Jean
a écrit. Le tout est accompagné de nombreuses photographies et dessins. Les moin
dres débris archéologiques sont religieusement notés. Avec cela, on trouve pêle-mêle
des représentations de tableaux modernes et d'anciennes icônes, les portraits de l'au-
(3) 01 éuxà àoTEpe; t>5; àuoxaWij^ewç, ûub T. Aa|x7Tâxiri, 8°, viii-475 pp., -255 gravures; Athènes,
Tzabella, 1909.
BULLETLN, Ibl
teur el des siens, en chambre, en voiture sur la route de Pergame. en chemin de fer
au départ de Thyatire. Ou ne peut vraiment douter que l'auteur ait fait la visite des
sept églises. Il y a aussi la photographie des trois anges qui régissent actuellement
les sept églises, car, ainsi que le fait remarquer M. Lampakis. les paroles de l'Apoca-
Ivpse se sont réalisées : les églises louées, Smyme et Philadelphie, fleurissent encore;
celles qui furent un peu morigénées, Pergame et Thyatire. existent, mais décimes de
leur ancienne splendeur, tandis que Éphèse, Sardes et Laodicée. objet des plus for-
tes menaces, ont sombré. L'auteur a utilise les anciens voyages et les études archéo-
logiques parues sur question; cependant on sera étonné de ne pas voir mentionnés
la
le « Vovage aux sept éj^lises » de M?"^ Le Camus, ni « The lettersto the seven chur-
ches » du professeur Ramsay.
Force unique, et enfin la Vie de la Matière » (p. 132^ — Mais ne vous semble-t-il
pas que nous sommes dispensés maintenant, nous du moins les biblistes, de savoir
ce que disent la Philosophie et l'Energétique?
que l'excellent travail de M. Ancel soit publié. L'opinion la plus répandue aujour-
d'hui parmi les exégètes et les théologiens ne semble pas très favorable aux expli-
cations des deux premiers chapitres de la Genèse, faites dans un sens scientiGque,
mais l'exposé du savant auteur est très propre à montrer comment le récit mosaïque
de la création se trouve foncièrement d'accord avec les découvertes les mieux établies
de la science moderne ». M. Ancel, lui, parle un peu ditTéremment : « Le fait est que
l'illusion d'une voûte céleste solide, et le manque de notions des gaz, ont pesé sur
les réflexions de Moïse et ont dérouté les traducteurs de la Genèse » 'p. 56). Il
n'admet pas les jours périodes « Six jours de suite, le soir... Dieu visita Moïse sous
:
rapporte et commente, ce que Dieu lui a dit et ce qu'il a vu, comme il l'a compris
et saisi. Ainsi il reste persuadé que l'évolution de la matière s'est faite en six jours,
1 Genèse science. La Matière vivante, son Travail dans ITnivers, in-8'^ de 139 pp. Paris.
et
Bloud, 1910. —
Page 10.
2) Connaissances élémentaires et Genèsede la matière. Ad majorem Dei gloriam, ad majorem
ecclesiae espansionem, in-l6 de'l pp. En dépôt à la Croix de Meurthe-et-Moselle », Nancy, 1910. «
i En tête de la brochure.
152 REMJE BIBLIQUE.
puisqu'il l'a vu ainsi » (p. 20). Voilà, dira-t-on, une étrange manière de mettre en
relief la véracité de l'Écriture. Quant à la partie scientifique, le recenseur se recon-
naît absolument incompétent, et il a été souvent embarrassé d'expliquer la chute des
eaux supérieures au déluge. Or c'est très simple « Qu'un astre errant soit passé près
:
de la lune, lui ait volé son atmosphère et son eau et ait déversé sur la terre tout
ou- partie de l'eau, il n'y a rien d'impossible » (p. 59). Cette charmante espièglerie
d'une comète n'est-elle pas digne du Songe d'une nuit d'été?
Les questions relatives au livre d'haïe sont loin d'être résolues les lecteurs de la ;
Revue ne peuvent l'ignorer. M. Glazebrook le sait aussi, mais il s'est fait une convic-
tion et il lui a paru opportun d'exposer au grand public sa synthèse ^'1). Le public ne
peut pénétrer dans le maquis des discussions, et il ne s'en soucie pas ; il a droit ce-
pendant à être éclairé sur le livre d'Isaïe à tout le moins comme sur toute grande
œuvre littéraire. Pour lui épargner un travail au-dessus de ses forces,
et pour laisser
1) celui de Jérusalem, l'Isaïe authentique, de 740 à 700 ( 1-39 en grande partie), dont
les prophéties sont reproduites dans un ordre fort singulier; 2) l'anonyme qui écri-
vait peu avant la chute de Babylone (538), auteur des chapitres 13, 14 et 21 3) ce- ;
lui qu'on nomme le Deutéro-Isaïe, vers 540, auteur de presque tous les chapitres 40-
55; 450 (55-66). Rien en effet dans cette partition n'est
4) le Trito-Isaïe, vers
nouveau dans la critique, et, fidèle à son thème, M. Glazebrook n'a pas pris soin de
discuter les objections qu'on a opposées à cette manière de voir. Puisque l'analyse
critique et philologique est en dehors de sa perspective, nous n'avons pas à l'y réin-
tégrer. ne reste donc qu'à indiquer les éléments nouveaux qu'il a mis en œuvre. Le
Il
ter aux débuts de la tragédie quand le chœur évoluait en présence d'un seul person-
nage. Ce personnage unique, c'est Jéhovah qui s'adresse tantôt aux nations pour leur
prouver le néant des idoles, tantôt à Israël pour lui annoncer la chute de Babylone,
44, 24 - 48, 21; 49. 7 - 55, 13) après un prologue (40, 1-31). Au cours de ces
trois actes se rencontrent les quatre célèbres morceaux du Serviteur de lahvé. En
dépit de son propos pacifique, l'auteur ne pouvait plus éviter d'argumenter un peu,
puisque, sur ce point du moins, les critiques dont il suit les oracles ne sont vraiment
pas d'accord. Les débats sont cependant réduits au strict nécessaire. L'opinion per-
sonnelle du savant critique est que les quatre fragments forment un tout, un poème
écrit par le même auteur, mais après le poème principal. Un argument bien anglais,
(1) Studies in the Bool; of Isaiah, by the Rev. M. G, Glazebrook, D. D.^ Canon of Ely and War-
burton Lecturer, formerly Head îlaster otClifton collège, in-8" de xix-349 pp. Oxford, Clarendon
Hress, 1910.
BULLETIN. i:;3
et qui n'est peut-être pas sans force contre ceux qui veulent, bon gré, mal gré, faire
rentrer les quatre morceaux dans l'organisme premier du contexte, c'est que, avec
les arguments de Marti et autres, on pourrait tout aussi bien faire passer pour partie
intégrante du Paradhe Lost des morceaux découpés dans un livre du Pu radiée He-
fjnined. Il y a donc deux poèmes, mais un seul auteur qui aurait repris son premier
thème, car le Serviteur serait encore une personnification d'Israël, dans la même
forme dramatique, qui cette fois mettrait en scène Jéhovah. le serviteuret les dations.
Ici encore nous ne prétendons pas discuter. Pour se convaincre que le Serviteur est
une individualité, il sufiit de relire les textes. Ceux auxquels cette clarté ne suffit
pas ne se rendront à aucun argument. Et cependant quelle impossibilité morale que
ce discours des nations pour lesquelles IsratJl a expié... sanss'en douter assurément,
et bien malgré lui!
Réserves faites sur la thèse critique, il faut reconnaître que M. Glazebrook a dé-
veloppé ses vues d'uue façon fort séduisante. C'est encore une manière de commen-
ter que d'exposer à grands traits la situation politique et religieuse, les passions du
temps, l'àme du voyant, réformateur des vices et prophète d'un avenir meilleur, dont
nous sommes les témoins. Le texte qui vient ensuite pénètre l'âme avec toute sa
force, et l'anglais est bien l'idiome qui convient le mieux pour traduire cette parole
nerveuse et vibrante.
La traduction n'est point la version anglaise officielle elle est l'œuvre de l'auteur :
qui offre un texte éclectique, modifié par des conjectures, sans qu'il prenne même le
soin d'indiquer quand il s'écarte du texte reçu. Il ne signale pas davantage par le
moindre index bibliographique les ouvrages des maîtres auxquels il reconnaît devoir le
plus. Le public anglais protestant fera sans doute bon accueil à ce travail de vulgari-
sation, mais de vulgarisation bien informée et qui présente sous une forme attra vante
le plus beau des livres prophétiques de l'A. T.
La maison Marietti a publié sans nom d'auteur nu psautier latin commenté d'après
Bellarmin Les explications sont pieuses, et l'ouvrage pourra être de quelque
(1 .
utilité aux ecclésiastiques. On se demande cependant s'il n'eût pas été plus à propos
de le publier dans une langue vulgaire. L'auteur n'a pas reculé devant la pluralité
des sens littéraux. A propos du ps. 2, 7, on lit : (t très hujus loci exposiliones, omnes
intentte a Spiritu sanctow.Il a très bien vu que le psaume 78 vise les temps Maccha-
béens, et que le psalmiste représente le peuple témoin de ce désastre : « Alloquitur
Propheta Deum, et in persona populi, qui futurus erat tempore MachabcOorum.
conqueritur de vastatione templi et civitatis ». Gela décèle du moins un sens exégé-
tique très juste.
Les psaumes dont il nous reste à parler n'ont que le nom de commun avec les
psaumes de David. Ils sont l'œuvre d'un musulman qui a prétendu doter ses core-
ligionnaires d'un psautier et qui, pour accréditer sa fraude, a transcrit presque tout
le premier psaume de David et le premier verset du second en tête de ses deux pre-
mières sourates, car ce nom convient mieux à ses élucubrations que celui de
psaumes. Ces morceaux, au nombre de 154 dans le manuscrit de la bibliothèque
Laurentienne, sont antérieurs à l'an 1202 après J.-C, d'aprèsla date du plus ancien
manuscrit. C'est presque tout ce que l'on sait de leur origine. Ordinairement c'est
Allah qui prend la parole, s'adressant à David, ou au peuple d'Israël, ou à l'hu-
manité, et, comme il fallait s'y attendre, il exhorte fort à respecter les femmes des
(1) Psalterium Davidis cum brevi et succincta paraplirasi es Bellarmini commentario de-
prompla, petit in-8' de T.'îi pp. Turin, Marietti.
154 REVUE BIBLIQUE.
croyants. Ces renseignements sont tirés d'une petite brochure de M. Krarup (1), qui
a publié dix-neuf de ces psaumes en arabe et dans une traduction allemande. Le
texte a été soigueusement étudié, d'après les manuscrits, avec l'indication de quel-
ques corrections vraisemblables et des renvois au Coran que le pseudo-psalmiste
possédait parfaitement.
gulaire enfoncée dans le sol (Qg. 1) et qui avait l'apparence du sommet d'une stèle.
C'était en effet une pierre levée, haute de 0,8.'i, rectangulaire (environ 0,30 sur 0,25),
sans rainures ni cupules, encastrée dans un pavé. Ce pavé lui-même iflg.2)était entouré
d'un mur en pierres sèches, dont il est resté quelques pierres, de façon à constituer
une enceinte d'environ trois mètres sur quatre. Dans l'angle occidental du sanc-
tuaire, un socle de terre cuite, épais de 0,12.5 et d'un diamètre de 0,24, a été regardé
par les explorateurs comme l'autel de ce sanctuaire. Sur le pavé ils ont encore
trouvé des fragments de calcaire qui ont paru des armes taillées et quelques frag-
ments de céramique. L'importance exceptionnelle de cette découverte tient à son
antiquité. C'est la première fois que l'époque néoUthique révèle aussi clairement
l'existence du culte des pierres. Comme le rappellent MM. Mosso et Samarelli, les
(1) Answahl pseitdo-davidischer Psalmen, arabisch und deutsch, herausgegeben von Ove Clir.
Krarip, in-S" de 30 et 29 (arabe) pages. Copenhague, Gad, 1909.
(2) AUi délia R. Accademia dei Lincei, 1910, Noti/.ie degli Scavi di Antichità, Vol. Vil, Fasc. 3,
p. 116 ss- Il sacrario betilico nella slazione neolilica di Monteverde, presso Terlizzi in provincia
di Bari. M. Mosso a bien voulu nous autoriser à reproduire les deux illustrations qui figurent ici
(3) Cf. Vincent, Canaan..., p. 108,
BULLETIN. loD
Grecs savaient très bien que leurs ancêtres avaient adoré des pierres brutes. Mais
ils ne leur donnaient pas le nom de bétyles. Pourquoi ne pas s'en tenir à la dénomi-
nation la plus simple et qui ne préjuge rien?
]Xous avons enfin un excellent ouvrage d'ensemble sur l'âge du bronze. C'est le
second volume (première partie) du Manuel d'archéologie préhistorique celtique et
gallo-romaine de M. J. Déchelette (1 ). Il y est tenu compte largement des influences
orientales. L'auteur a réduit à sa valeur l'influence phénicienne qui ne s'exerçait
point encore quand déjà les Égéens — ou quel que soit le nom qu'on leur donne —
avaient été à tout le moins les inspirateurs des arts en Occident. Le chapitre sur la
(p. 410). Mais il semble bien que de tous ces cultes celui du soleil était de beaucoup
le plus répandu et le plus actif.
(1) In-S" de xviii-51-2 pp. avec des appendices de Imo pp. Pari?. Picard, 1910.
lo6 REVUE BIBLIQUE.
du i«i" siècle, tcménos à ciel ouvert autour d'un petit sanctuaire, et accompagné d'un
vivier où, comme à Hiérapolis, on nourrissait des poissons sacrés. De plus eu plus,
M. Gauckler se convainc que, lors de la restauration païenne, de nombreux sacri-
ficespermirent d'ensevelir sous les murs et sous la statue du dieu syrien des victimes
humaines. Cette recrudescence de sauvagerie est bien dans le ton de la réaction
païenne de Julien l'Apostat, telle que l'avaient caractérisée les Pères, entre
autres s. On avait rejeté leur témoignage comme tendancieux;
Grégoire dcNazianze.
M. Gauckler conQrmation indirecte. Le distingué savant a exposé
leur fournit une
ensuite une théorie nouvelle et fort curieuse sur certaines statues antiques dont la
boîte crânienne a été sectionnée.Il se trouve que ces statues, dont les affinités nt
ordinairement syriennes, sont parfois dorées au visage et aux mains. De fort belles
statues hellénistiques, complètement nues, passaient ainsi au culte syrien; en même
temps elles étaient habillées. La dorure leur donnait l'aspect de divinités solaires; la
section du crâne aurait eu pour but de faire pénétrer le nnmen dans la statue au
moyen d'une opération rituelle à déterminer, et que M. Gauckler compare à l'onction
des rois de Juda. L'analogie ne peut être évidemment que très lointaine, car l'onction
était naturellement tout extérieure.
p. 156). M. Gabriel Leroux a reconnu (1) qu'il n'y avait pas /.ai entre Astarté et
Aphrodite. A côté du Zeus il n'y avait donc qu'une seule divinité féminine, l'ancienne
Astarté de Palestine, assimilée et non^jointe à Aphrodite Ouranie.
veau Dictionnaire héhr en-allemand (2) quand on le voit, dans sa préface, annoncer
qu'il se propose avant tout de rechercher l'évolution du sens des appellalifs et l'éty-
mologie des noms propres.
C'était, par là même, s'obliger à jeter un regard sur les autres langues sémitiques.
M. Kœnig a renoncé à citer ces langues dans leurs écritures propres. Déjà, on ne le
fait plus pour l'assyrien; le procédé de transcription est étendu à l'arabe, à l'éthio-
pien, à l'araméen.
Mais on savait d'avance que M. Kœnig ne serait pas disposé à mettre de côté ce
que peut fournir la tradition hébraïque aussi a-t-il donné la clef des notes massoré-
;
tiques. Plus secourable encore aux étudiants, il a mis toutes les formes difliciles —
un millier —
à leur place alphabétique. Le dictionnaire hébreu ne comprend que les
mots de l'A. T. il est suivi d'un vocabulaire des textes araméens bibliques, com-
;
prenant en outre bon nombre des mots fournis par les inscriptions d'Assouân.
Tel est le programme de M. Kœnig et on peut afurmer qu'il l'a rempli d'une
façon très satisfaisante. Pour tout ce qui regarde la langue elle-même, surtout telle
qu'elle a été comprise par la tradition de ses docteurs, on ne trouvera nulle part des
informations plus sûres. Les nombreux renvois aux ouvrages grammaticaux de l'au-
'j^dB on cite l'arabe phasaqa, exivit e cortice, praescriptum dei rellquit. etc. Il fau-
drait indiquer une idée intermédiaire. On ne voit pas bien non plus comment "ils si-
pas même pris un parti ferme. On trouve, çà et là, mais rarement, des identifica-
tions avec lesnoms arabes modernes, Bit dagân, rîha, qadis etc., mais aucune indica-
tion pour des noms comme Zif, Béthel, Shomerôn (Samarie), etc., etc. Mettre à côté
de Pounon « une station de campement », ce n'est point assez quand l'auteur n'est pas
:
Ci) Cerlaines indications de religions comparées n'y seraient pas contraires, par exemple l'em-
ploi du pluriel au sens du singulier pour la divinité chez les Assyriens et les Phéniciens, etc.
(2) Paris, Geuthner, 1910, in-8° pp, vm-43l.
158 REVUE BIBLIQUE.
ruisseau d'Ézéchiel, sorti du Temple, s'y dirige, ne peut être question du mont
il
des Oliviers. Quant au TV. T., le mot de Galilée y étant toujours pris dans le sens
de la Galilée du nord, les évangélistes auraient posé une véritable énigme en chan-
geant sans avertir le sens du mot; M. Resch ne vient pas à bout de cet argument
en objectant que dans Mt. 26, 32 et Me. 14. 28 c'est Jésus qui parle, puisque c'est
bien l'évangéliste qui reprend la parole dans Mt. 28, 16. Eusèbe, ni saint Jérôme, M
ni Hésychius, ni saint Sophrone n'ont eu le moindre soupçon de cette Galilée hié-
rosolymitaine. M. Resch ne trouve d'appui que dans un texte de Tertullien qu'il
sollicite un peu trop dans son sens (3). et dans les différentes recensions des Acta
Pilati. Or on sait ce que vaut la topographie de ces apocryphes. Mais tous les rai-
sonnements n'empêcheront pas la nouvelle tradition de se maintenir et de trouver
des défenseurs.
La propriété des Grecs orthodoxes qui porte maintenant le nom de Galilée, au
nord du mont des Oliviers, a même pris beaucoup plus d'importance durant ces
dernières années, pour la consolation des pèlerins qui veulent voir tous les lieux
saints sans trop s'éloigner de Jérusalem. Encore cette « Galilée », étant au sommet
du mont des Oliviers, est bien située comme lieu de l'Ascension et répond aux
données des Acta Pilati.
La tradition a créé, mais créé avec logique. M. Resch, gêné par le texte d'Ézé-
chiel, — son principal appui, — est obligé (voir sa carte) de faire commencer sa
Galilée aux vallées orientales qui descendent du mont des Oliviers, et cependant
de supposer que cette montagne en fait partie. De la sorte il ne peut même pas
dire que le rendez-vous est plus précis que celui qui aurait fait allusion à la Galilée
du nord, visant tout naturellement les bords du lac de Tibériade. Aussi bien quand
(1) Das Galilua bei Jérusalem, eine biblisclie Studie. ein Beitrag zur Palastinakunde von Kir-
chenrat D. Alfred Rf.sch, iii-8° de 33 pp. Leipzig, Hinrichs, 1910.
(2) Avec les LXX el; Tr;v Ta/iXa-av tt.v Trpb; àva-oXà;, mais on soupçonnait si peu une Ga-
:
lilée près de Jérusalem que la marge du Codex Q l'entend au sens propliétique de la Galilée du
nord.
(3) ln-1-2, XCV1II.-432, pp. Leipzig. R. Baedeker, 1910.
BULLETIN. 159
les évangélistes veulent partir du mont des Oliviers, ils savent le désigner par son
nom.
dont les destinées furent si intimement liées à celles de la côte syrienne et qui,
pourtant, a été si peu visité jusqu'ici, au point qu' «il n'y a pas encore de drogman »,
devient par là même plus attrayant et plus accessible. Comme autres nouveautés du
Guide, nous devons encore signaler un pian du bourg entier de Ba'albek et ses envi-
rons immédiats, dressé d'après M. Puchstein, et celui de la mosquée des Ommiades
à Damas, d'après M. Saladio. Le plan de Pétra s'est enrichi de nouvelles indications
puisées dans le croquis de M. Dalman (cf. BB., 1909, p. 4.56). Celui de Haifâ
est mis au point. Le panorama de Jérusalem ainsi que les plans de Tripoli et d'Alep
sont ceux de l'édition française de 1906. Tout ceci marque le soin que M. Benzinger
apporte à tenir le voyageur au courant non seulement des résultats de l'activité
scientiûque, mais aussi du développement économique et social de cette portion
de l'Orient à laquelle s'intéresse le monde entier. Seulement il se trouve certaines
concessions regrettables à une topographie peu soucieuse des documents bibliques et
des données de l'archéologie les plus positives, concessions qui sont un réel recul
scientiGque. Nous ne pensons pas qu'en maintenant la forteresse de David sur la
colline orientale de Jérusalem, l'auteiu* eût compromis en quelque chose son succès
de librairie. Puisqu'il admet l'identification de Oamra-ed-Daradj avec Gihon et l'at-
tribution du canal de Siloé à Ezéchias, il est tenu à cette conséquence nécessaire que
la forteresse de David et Sion étaient situées sur la croupe inférieure de l'Ophel. Les
deux cités de David du plan, ornées chacune d'un point d'interrogation, ne sont point
une solution satisfaisante. L'origine thermale de l'église d'Amwas continuera à faire
sourire. Non, les véritables bains de Nicopolis ne sont pas dans ce vénérable mo-
nument ; ils se trouvent au nord-ouest du village, dans un jardin où l'on peut voir
encore les sommes aux reproches,
voûtes en briques del'hypocauste. Puisque nous en
nous ferons remarquer que le plan d'Antioche est incomplet il y manque à l'est la ;
grande construction qu'on appelle les Thermes et qui semble une naumachie, puis les
restes bien conservés de la barrière de l'hippodrome. Le plan de Séleucie de Piérie
du capitaine Allen doit maintenant céder le pas à celui que M. Chapot a publié dans le
Bulletin des Anticjuaires, Mémoires, 1906, pi. L
Nous avons constaté nous-mêmes combien ce dernier relevé était supérieur en
précision au premier. Un détail pour finir : il y a des années déjà que le docteur La
Bonnardière n'est plus médecin à Jérusalem ; il compte même plus d'un successeur.
(1) Apolog., c. 21 Cum discipulis autem quibusdamapud Galilaeam. .ludaeae regionem, ad qua-
:
draginta dies egit docens eos quae docerent. Deliinc ordinatis eis ad officium praedicandiper
orbem circurafusa nube in coelum est receptiis... Il est clair que la Judée doit se prendre ici
dans un sens large, et dehinc ne prouve pas que l'Ascension ait eu lieu dans cet endroit.
i60 REVUE BIBLIQUE.
tenue. La modération de AVilsonest prise à partie Quoi! il n'y aurait dans la loca-
:
avant tout sur donc ouvertement à ses amis les Grecs que
l'église orientale. Qu'il dise
Constantin, Macaire, Eusèbe ne sont rien moins que de mauvais plaisants! Mais notre
orateur, qui sait ménager ses petits effets, a trouvé le secret de l'endurcissement des
catholiques en matière de traditions topographiques « Plus un site sera démontré
:
Le Gérant : J. Gabalda.
* C'est lui qui me fait descendre des hauteurs et monter des bas lieux :
* lui qui m'a donné pouvoir sur les liens pour que je les délie;
lui qui a meurtri par mes mains le dragon aux sept têtes,
et m'a fait fouler aux pieds ses racines, pour que je détruise sa semence.
'
ta droite a dissous le venin du calomniateur;
ta main a aplmi la route pour tes Qdèles.
8 Tu les as choisis d'entre les tombeaux
et tu les as séparés des morts;
-
tu as pris des ossements morts
et tu les as enveloppés de corps ;
Seisrneur a voulu pour lui. Dans les y 6-12. le Christ rend grâces à
Dieu de ce qu'il a accompli.
est monté, sinon qu'il était descendu dans les bas lieux de la terre »
{Eph. IV, 9-10)'? Mais ces bas lieux peuvent être aussi les enfers,
où le Christ descendra pour prêcher aux justes voyez Ode xlii, 15-26. :
(1] On dira en grec : h it^r^.oXç, [Ps. xciii, 4; Heb. i, 3) ou èv \;iLt<7Toti; [Luc. ii, 14;
Mat. XXI, 9, etc.), ou èv toïç ÈTtoupavtot; {Eph. i, 3, 20; il, 6, etc.).
(2) Les mots et me le lance rappellent Ps. cm, 30 « Emittes {ila.T.oa-:tlv.z) spirituin :
tuum et creabuntur ». Que l'Esprit soit entre ciel et terre, c'est iteut-étre une allusion à
Gen. I, 2. —
M. Gunkel (p. 309) voudrait que le « milieu « fût un terme gnostique mais :
le « milieu » qui joue un rôle dans la Pislis Sophia, par exemple, suppose le dualisme
"nostique, lequel est absent de nos odes. Le
« milieu » dans nos odes exprimerait l'idée
qui est maiestas tertia, aeris hune omnem anibitum sedein fatemur et diversorium ». Contra
Faustum, XX, 2 (éd. Zvcua. p. 536). Saint Hippolyte prête au gnostique Basilide une
théorie d'après laquelle les êtres se partagent entre deux plans, le cosmos d'une part,
et les êtres {)nepxô(j|j.ta : entre les deux, l'esprit intermériiaire, l'esprit qui est saint et en
qui réside « la bonne odeur de la fdiation » (xô jj-eTaË-j toO x6(T[jlou xal twv ûtiepxoctijlîwv
IxeOôp'.ov TtvEùaa). Pinlosoplioiim. VIT. 23. Boisskt, p. 127. Mais, ceci est décisif, l'idée de
l'esprit intermédiaire est chez Philon déjà : Dieu a étendu sa puissance jusqu'à l'univers
qui est sous lui, par le moyen de l'esprit intermédiaire : Tsivavio; toù ôeoù t/jv à?' eayxoù
ôiiva^nv oià ToO [AÉaoy TtveOjAaTtoç a-/Pi toO vTzoY.ti[i.é\o\>. Leg. Alleg. i, 37. Bousset, p. 123.
(3) Eph. VI, 12. Rapprochez Ignat. Eph. xiii, 2 : nâ; TToÀEfAo; xaTapyctTai ÈTioupavtwv xal
èutYSÎMV.
(4) Ignat. Eph. xvii, 1 : toû àç'/pyzoz toù aîwvo; toutou, (j-o aty_jxa).wTÎ(îr) ûpiài; ex toO
Se'ffjiov.
(5) Comme dans Acia Thomae. 32 (éd. Bonnet, j). 148-149). — Sur la racine, vo.xz
Dieu est vie. La main du Seigneur a frayé la route pour ses fidèles :
nous avons déjà rencontré cette route Ode vu. 2, 16-18 la science ,
1, 11 est intéressant de rapprocher un passage du psaume des Naasséniens, cité par Phi-
losoplioumena, V, lO : le Christ s exprime ainsi :
•''
Et sa pensée fut comme une lettre,
du Très Haut
sa volonté descendit :
elle fut envoyée comme une flèche d'un arc tiré avec force.
^Beaucoup de mains se sont précipitées vers la lettre,
'
mais elle s'échappa de leurs doigts et ils eurent peur d'elle,
(1) Dans // Pet. ni, 10-12, il s'agit du second avènement du Christ; pas possible de-
clairer par ce texte de la Secundo Pétri le passage de notre ode. Mais je note que, là
même, pour exprimer la ruine du monde, la Secunda Pétri se sert du mot Xysiv ffToi-/£îa :
"' et apparut sur son sommet la tête, qui fut dévoilée, le Fils véritable du
Père Très-Haut ;
(1) Sap. XVIII, 15. Cf. loa. XVI, 28 : £?^).6ov ex toC TraTpb; xai è)r,),y6a et; tov x6(T|jiov.
(2) Dans l'hymne de l'âme, qui s'est conservée dans les^c/c J^omoe, l'àme (le fils du roi)
qui pérégrine sur terre reçoit une lettre de son père le roi, qui lui rappelle sa destinée, et
lui dit : « Ton nom est livre de vie m, £ic).r,8r; oi -côovoiAà c7ou|3'.o>tov Cwf;;. Acta Thomae, 110
(éd. Bonnet, 1903, p. 222). — Le leste syriaque, pour expliquer comment la lettre parvient
au tils du roi, donne ceci : « Volavit (epistula) instar aquilae reginae avium, volavit et
consedit prope me et tota fada est serino ». Harris, p. 121, nous suggère ces rapirochements.
— On
peut rappeler aussi que chez les hérétiques nommés Elkésaïtes on croyait que la
révélation sur laquelle se fondait la doctrine elkésaïte était un livre tombé du ciel : y.ac
P'gXovTivà çépouffiv, ïiv )ivov(Tf/ à; oOpavo-3 zîîT-toy.Évai. L'information est prise à Origène par
EusEB. H. E. VI, 38.
(3) Spitta, p. 277.
166 REVUE BIBLIQUE.
après que M. Harnack a écrit « Cette description est pour moi to- :
une roue, la lettre est venue sur la roue, et la roue était avec la
lettre un signe de royauté et d'autorité {Regieriing, traduit Flemming).
Nous avons vu que un vivant, le Christ la roue n'est
la lettre est :
(1) Quon se rappelle dans le psaume des Naasséniens cité plus haut le y (jçpaYtôa; s/tov
-xaTaoy)TO!i,ai : « Je descendrai ayant [sur moi] des sceaux ».
(2) Justin. Apol. lv, 2 : ÔTisp [le supplice de la croix", w; TtpocïTtev ô itpoçr.T»]?, t'o asyKTTov
<jû|i.êoXov Tïjç îa-/iJo; xal âp"/'»',? aOroC \)Ti6.ç>-/ti.
LES ODES DE SALOMO.N. 147
jusqu'aux enfers.
La tête, — <' la tête » désigne le Christ comme nous le verrons
tout à l'heure, nouvel indice que la lettre symbolise le Christ,, — donc
<( la tête descendit jusqu'aux pieds » : le Christ est descendu aux en-
fers, parce que couru la roue. « Et ce qui était
« jusqu'au pied » a
signe était sur la roue » le Christ est descendu aux enfers avec :
par deux anges, la croix les suivant, et une voix vient du ciel et
ciel
(1 1 Spitta. p. 277, rapproche Proverb. xx, 26 : « Un roi sage dissipe les méchants et fera
nelledonnée à la croix dans la littérature chrétienne ancienne, voyez H. ton Schubert, Die
Composition des Pseudopetr. Ev. (Berlin 1893). p. 103-105. et Hennecke, Handbuch zu
den N. Apokryphen (190'»j, p. 85.
T.
(3^ 16 « Et apparut sur son sotnmet
Le i" la télé qui fut dévoilée » ne peut se compren-
dre d'une lettre le sommet d'une lettre! : Je restituerais : Kal wçiOri Èiràvu r, /.tza't.r,,
xai à7i£y.a),-j36r, ô ylo: 6 àÀvjôtvo; 'oû îia-po; toO v-iiiffTou. Le mot x£3a/.r) désignerait le Christ
(? Eph. TV, 15). Rapprocher Acta loannis, 98 (éd. Bo.t>ET, p. 200) :
-ô-/ y.Op-.ov trA-JU) toO
ffta'jpoô Édjpwv rryr.y.'x arj £-^ov-a, à).Xà ti-^a smvtiv itôvov /.''/..
(b) L'Ode xxm, ainsi entendue, donne peut-être quelque sens à cette terrible Ode xxxv,
que M. Harnack, p. 56, est prés de déclarer en gros et en détail totalement incompréhen-
sible. L'Ode XXIV et l'Ode xxiii dont on supprimerait les y 19-20^ auraient-elles formé primiti-
vement une seule et même ode? Quoi qu'il en puisse être, les y 5-7 de l'Ode xxiv déve-
loppent le y 18 de VOde xxm ils décrivent, en effet, comment périssent les « apostats »,
:
168 REVUE BIBLIQUE.
Un dernier trait pour décrire la lettre : elle est une tablette écrite
par le doigt de Dieu entièrement, comme était la table de la Loi
donnée à Moïse. Sur la lettre était écrit le nom du Père, avec celui
du Fils et de FEsprit saint. L'idée d'écrire un nom sur un objet revient
à mettre le sceau de propriété sur cet objet : « L'agneau était debout
sur la montagne de Sion et avec lui cent quarante-quatre mille [fi-
dèles] qui avaient son nom et le nom du Père écrits sur leurs fronts »
[Apoc. XIV, 1). Toutefois, si on comprend que les fidèles portent sur
leur front le nom du Père et du Fils, on ne comprend pas que le Fils
^" parce que je faisais du bien à tous les hommes, j'ai été haï.
*^ Ils m'ont entouré comme des chiens enragés,
ceux qui dans leur inconscience marchent contre le Seigneur,
*^ parce que leur intelligence est corrompue et leur esprit perverti.
ceux qui « furent anéantis dans le principe », les démons sans doute : « il n'était pas possible
de donner une parole pour Ces derniers mots expliquent les f 3-4 « ... ils
qu'ils suhsistent ». :
réclamaient le Seigneur,... il n'y avait rien pour eux ». Les j 2-3 décrivent l'angoisse de la
nature au moment où se lève le jour du Seigneur les oiseaux du ciel ne volent plus, les:
reptiles meurent dans leurs trous. Les y 8-9 visent la réprobation finale des hommes qui
n'ont pas accédé à la vérité. Mais tout cela reste fort obscur. Le y 1 est une énigme. Je —
ne crois pas qu'il renferme une allusion au baptême du Christ. La colombe est sans doute
symbole de l'Esprit l'Esprit vole sur le Messie, il est « la ttHe
: du Messie, il chante au- )>
dessus de lui, il parle, on entend sa voix. Mais quel rapport cela a-t-il avec la description
du jour du Seigneur?
LES ODES DE SALOMON. 169
'^
Pour moi, je relins l'eau de ma main droite,
(1) Harris, p. 125, à propos de Ode xxvi, 13, rappelle Clément. Alex. Paedag. I, 6 (éd.
Staehlin, p. 107) : T£),etwoi; ôà i-K'x^^tXici.:, f, àviTrscjcjt;, ûcte r] jièv yvôiffi; iv xàj storiofiaxi, xô
os Ttepa; TYJ; Yva)(7Sa); r, àvdtTiauffi;.
(2) Harris, p. 127 : « In some respects the Psalm appears to be Messianic in a Christian
sensé ».
(3) M. Spitta, p. 283. suppose que l'ainertuine désigne la mort, et il rapproche Testament.
Abrah. 16 (éd. James, p. 97). la mort apparaissant à Abraham et lui disant « Je suis le ca- :
lice amer de la inorl » (èvù) sîal -à u'.vtpov to-j ôavàTO'j noTYipiovj. L'amertume est le qua-
170 REVUE BIBLIQUE.
avant qu'Abraham fût, je suis » {loa. viii, 58). Sur quoi les Juifs
prennent des pierres pour le lapider, mais Jésus se dérobe à leurs
coups. Nous n'avons pas, dans les y 15-16, une affirmation de la pré-
destinationdu juste qui parle, l'hypothèse est de M. Harnack; nous
avons une affirmation de la préexistence du Chinst, et de son impassi-
bilité dans sa passion.
7. — L'Ode XXIX ne présente que quelques indications sur le Christ.
laquelle nous a Nisités d'en haut le soleil levant, pour éclairer ceux
qui sont assis dans les ténèbres et l'ombre de la mort {Ps. cvi, 10 et
14), pour diriger nos pas dans la voie de la paix » iLuc. i, 78-79 .
liflcatif répété de la mort : Ibid. 17 (p. 99). Cf. Eccli. xu, 1 : « mort, combien amer
(utxoôv) est ton souvenir! » Par contraste, la « douceur » serait la vie. — Comparez Actu
loannis, 9 (éd. Bonnet, p. 156) : ... ir:vto -b tîott.cicv 3 a-jyy-j-A.x'/z'.^ xtà.
(1) Harnack, p. 6i. Spitta, p. 283.
(2) Ita E. Krebs. Der Logos als Heiland Freiburg 1010}. p. 64 : » An den Christus der
Kirche kanu birr allerdinss nicht gedacht werden. wobl aber an den doketischen Christus,
wieer Z. B. in Jobannesakten c. 101... Legen wir die ganze Ode einem doketischen Christus
oder auch dem Christus (natiirlich nicht dem Jésus) der Ophiten in den Mund, so ist sie ver-
standlich, viel verstandlicher als im Munde eines jùdischen Mystikers ».
LES ODtS DE SALOMON. iTt
cviii, 28; cxviii, 78, etc.), sans qu'il y ait à chercher ici des ennemis^
autres que ceux du salut et de la vérité.
^
Car f ai cru au Christ du Seigneur, et il m'est apparu que c'est lui It Seigneur.
Il m'a montré son signe, et m'a conduit dans sa lumière...
'•
peler Ps. Lxvii, 12 pour soumettre les pensées {Ps. cxlv, 4) des
,
'
Les abîmes se sont liquéfiés devant ie Seigneur,
et l'ombre a été anéantie par son rej^ard..
- L'erreur a erré et a péri devant lui;
que vous m'avez donnés, parce qu'ils sont à vous... » [loa. xvii, 9 et
suiv). Cette brève description de la mission du Christ se termine par
une sorte d'appel lyrique aux élus sortez, vous qui avez été persé- :
de Ma7X. xv, 24, et parallèles. Les mots « J'ai été patient, je me suis
tu » sont un rappel d'Isaïe [Is. xlh, 14). Très remarquable est le ^ 8'' :
avec l'évang-ile de Pierre est plus saisissante, car cet évang-ile sex-
prime ainsi :
clous pour l'y fixer. L^e Christ se soumet à la méchanceté de ses bour-
reaux, par humilité, pour sauver son peuple, l'acquérir en héritage.
Aucune allusion au sang rédempteur.
9. —
L'Ode XLii. qui est de première importance pour la christo-
logie, s'ouvre par une allusion à la croix, qui se trouve littéralement
dans Y Ode xxvii :
XLii : XXVII :
'
J'ai étendu mes mains et me suis cou- '
J'ai étendu mes mains et sanctilie le Sei-
Dans les deux Odes le personnage qui étend les mains pour —
prier — est le Salomon mystique auteur des odes, le même qui dit
(1) Euangel. Pétri, 10 (Preuschen, p. 17. Schubert, p. 24-25. Hennecke, p. 81. Robi.n-
soN et James, Tlie Gospel according ta Peter (London 1892'. p. 19. Semeria. « L'évangile
de Pierre », Revue biblique, 1894. p. 536-539.
(2) Harkis, p. 129, rapproche une pensée de Marc-Aurèle. rencontre purement fortuite
dans une comparaison, sans quil faille comme GL>kEL, p. 314, parier ici dintluence de la
philosophie grecque.
174 REVUE BIBLIQUE.
'*
Comme la source fait jaillir ses eaux,
^ mon cœur fait jaillir la louange du
ainsi Seigneur,
mes lèvres émettent poitr lui une louange, et ma langue des cantiques.
* Mon visage exulte dans sa joie
et mon esprit exulte dans son amour.
Dans VOde xxvii et dans l'Ode xlii, étendre les mains est un geste
qui évoque la pensée de la croix, l'extension des bras de la croix où
a été crucifié le Juste (1).
Reprenons l'examen de VOde xlii. Les ^' 1-3 sont un prélude, dans
lequel l'auteur du psaume exprime qu'il va prier, qu'il lève les
mains pour prier. Puis, aussitôt, c'est le Christ qui parle (2), sans
transition, procédé familier à nos odes.
* J'ai été sans utilité pour ceux qui ne m'ont pas saisi,
(1) M. Harkis, p. 126, signale le même symbolisme dans le texte gnostique publié par
C. ScHMiDT, Kopt. gnost. Schriften, t. I, p. 33fi, description du Père : « Les cheveux de
sa tête sont le nombre des mondes (y.6(7[xot) cachés, ... et l'extension de ses mains est la
révélation de la croix». — Ce symbolisme des mains étendues (le geste des orantes) appar-
tient à la plus ancienne littérature chrétienne. Cf. Bnrnab. epistul. xii, 2, et la note de
FiNk, p. 75.
(3) On attendrait : J'ai été mort, je suis ressuscité (cf. Rom. xiv, 9; // Cor. v, 15). Mais
l'ode se lait sur la mort du Christ.
LES ODES DE SALOMON. 175
{.Marc. XV, 28; : il n'a pas péri, bien qu'il ait été condamné, nouvelle
négation de la mort du Christ. Puis, récit de la descente au Schéol :
avec lui à sa suite. Amère est la mort : le Christ a été pour elle plus
amer encore, il lui a été fiel et vinaigre. Il est descendu dans sa
profondeur « avec elle » : on peut se demander si le pronom elle
fiancé, fiancée, tente de fiançailles, sont des images sans aucune des significations « sacra-
mentelles « que le gnosticisme y mettra. Bocsset. Hauptprobleme, p. 315. Ce sont des
images purement morales, Gu>kel, p. 304.
176 REMJE BIBLIQUE.
« Aie pitié de nous, Fils de Dieu, et agis avec nous selon ta grâce :
--
fais-nous sortir des lieus des ténèbres et ouvre-nous la porte,
pour que par elle nous sortions vers toi.
-3Car nous voyons que notre mort ne s'est pas approchée de toi.
-^Pour moi, j'entendis leur voi.\, et je traçai mon nom sur leur tête;
-•^
c'est pourquoi ils sont libres et m'appartiennent.
Ceci est une description delà prédication du Christ aux justes em-
prisonnés dans le Schéol. « .\ie pitié de nous, Fils de Dieu », rappelle
Luc. xvu, 12, les lépreux demandant à Jésus de les guérir. Les morts
proclament que le Christ nest pas mort « Notre mort ne s'est pas :
approchée de toi ». Le Christ trace son nom sur leur tête, comme le
nom du Père est écrit sur le Fils [Ode xxiii, 20) ils sont délivrés, ils :
appartiennent au Christ.
d'un arc tiré avec force. La conception virginale est l'œuvre du saint
Esprit, qui a étendu ses ailes sur le sein de la Vierge qui conçut et
enfanta. Mais, dans cet enfantemçnt « sans douleur », elle a enfanté un
fils qui est « comme un homme », elle l'a enfanté « par la volonté »
mis qui veulent le saisir. Je ne péris pas, dit le Christ, parce que je
notais pas leur frère, ma naissance n'étant pas comme la leur : ils
cherchèrent ma mort
ne réussirent pas. L'Esprit est dans le Christ,
et
lEsprit ne peut mourir. La crois donc a reçu le Christ, la croix signe
de royauté sur la croix il est, non pas cloué, mais debout, il garde
:
manité. —
Nos odes ne sont pas marcionites, bien que des traits
semblent avoir une couleur marcionite si. pour Marcion, on doit re- :
quelque analogie avec celle que décrivent nos odes) mais, d'autre ;
sable. Si quelqu'un dit qu'il a été crucifié, celui-là n'est pas délivré
de la puissance mauvaise qui a fait les corps; si quelqu'un nie qu'il
ait été crucifié, celui-là connaît l'économie voulue par le Père (3). —
De ces confrontations on conclura, comme M. Wellhausen, comme
M. Gunkel, qne l'auteur des Odes de Salomon est étranger au gnos-
(1)Tertull. Ado. Valent. 27 « ... delalur ia virginem... per ipsani. non ex ipsa, non
:
matrem eani, sed viam passus. Super hune itaque Christum devolasse tune in baptismatis
saeramento Soterem per efligiem columbae... El Soler quidam permansit in Christo impas-
sibilis, inlaesibilis, inapprehensibilis.Penique eum ad appiehensiones venitur, discessit ab
illo in cognitione Pilati... ». Iken. Haer. I, vu, 2
Patitur vero aninialis et carneus Cliristus :
« ... Dicunt emisisse eum et Christum filiiim suum, sed et aninialem... Esse autem hune,
qui per Mariam transieril, quemadmodum aqua per tubum transit, et in hune in baptis-
iiiate descendisse illuni, qui esset de pleromate e\ omnibus. Salvatorem ia figura columbae...
Etliune quidem impassibilem persévérasse, non enim possibile erat pati eum. eum esset in-
compreliensibilis [àxçiTrjXo;] et invisibilis et propter hoe ablatum esse eum traheretur ad
:
(.3)
« [Primogenitum] appararuisse eumin terrahominem, etvirtutes
Iren. Haer.l, xxiv, 4:
perfeeisse. Quapropter neque passum eum. sed Simonem quamdarn Cyrenaeum angariatum
portasse crucem élus proeo; et hune seeundum ignorantiara et errorem crucifixum, trans-
figuratum ab eo, uti putaretur ipse esse lesus; et ipsum autem lesum Simonis aecepisse
fonnam, et stantem irrisisse eos. Quoniam enim virtus incorporalis erat. et Nus innati Pa-
tris, transfiguratum quemadmodum vellet, et sic ascendisse ad eum qui miserat eum, deri-
dentem eos, eum teneri non posset, et invisibilis esset omnibus... El nonwjportet eonfiteri
eum qui sit crucifixus, sed eum qui in hominis forma venerit, et putatus sit crucifixus...
ny est pas question de la naissance du Christ, non plus que dans Epiph.\>. Haer. xxiv, 3,
se montrer sous des aspects divers selon <pi il voulait et selon que
ceux à qui il se montrait étaient plus ou moins dignes, conception
bizarre qui servait à rattacher la vie ressuscitée du Christ à sa vie
naturelle, et celle-ci à sa préexistence. Cette soi-disant tradition dont
parle Origène comme non incroyable
d'une assertion est acceptée « >,
Odes de Salomon n'a pas cette indépendance qu'ont les Acta loannis :
il est plus radical que celui de la tradition tolérée par Origène.
crus, ils font comme s'ils ofiFraient un poison mortel dans une coupe
de vin et de miel, et l'étourdi boit la mort avec plaisir dans ce breuvage
perfide » Trall. vi, 2 , Donc ils sont chrétiens, ces hérétiques, mais
ils se trahissent en ce qu'ils « ne parlent pas de .Jésus Christ descen-
(1) ORir.EN. InMat. comment, ser. 100 « Venit ergo traditio talis ad nos de eo, quo-
:
niain non solurn duae formae in eo l'uerunt, una quideui secundum quam omnes eum vide-
bant, altéra autem secundurn quam transûguratus est corarn discipulis suis ininonte. quando
et resplenduit faciès eius tanquam sol. sed etiam unicuique apparebat secundum quod fûe-
rat dignus. Et cum fuisset ipse. quasi non ipse omnibus videbatur... Et non mibi videtur
incredibilis esse traditio iiaec, sive corporaliter propter ipsum lesum, ut alio et alio modo
videretur hominibus. sive propter ipsam Yerbi naturam, quod non similiter cunctis apparet .-.
(2 Clemem. Al. Adumbrat. in I loa. i^ 1 (éd. Staehli.v. t. TII, p. 210 : « Fertur ergo in
traditionibus. quoniarn lohannes ipsum corpus quod erat extrinsecus tangens, manum suam
in profunda misisse et ei duritiara carnis nulle modo reluctatam esse, sed locum manui prae-
buisse disclpuliù. Tixeront, Hisl. des dogm., 1. 1, p. 271, pour les autres textes de Clément.
(3) 4c<a /oa/uus, 89-104 'éd. Bonset, p. 194-202).
(4) Sur le docétisme primitif, Holtzmanx, T. Théologie X (1897). t. II, p. 385.
180 REVUE BIBLIQUE.
daut de David et de Marie (toj â/. Map(aç), qui a été enfanté vrai-
fils
sous Ponce Pilate, qui a été crucifié vraiment, et est mort..., qui est
ressuscité vraiment des morts... » (ix, 1-2). Mais, « s'il n'a soulTert
qu'en apparence {-h ccv.sTv), comme disent certains athées, des incré-
dules, qui ne sont eux-mêmes qu'une apparence, à quoi bon suis-je
enchaîné et désiré-je être livré aux bêtes? C'est pour rien que je
meurs » (x). — Vous, dit Ignace aux Smyrniotes, vous ne doutez pas
que le Christ soit « vraiment descendant de David selon la chair,...
vraiment enfanté d'une Vierge (s/. •rzapGsvcj), baptisé par Jean,... vrai-
ment percé de clous pour nous dans sa chair au temps de Ponce
Pilate et dutétrarque Hérode » (Smyrn. i, l-^^i. Le Christ a vraiment
souffert, et « il n'a pas souffert en apparence (ts ocy.sîv) comme des in-
crédules le disent, qui ne sont eux qu'une apparence, et à qui il ar-
rivera d'être, conformément à ce qu'ils enseignent, sans corps et
démons » (ii). Même après sa résurrection, Jésus Christ a eu un corps
(m). J'ai à vous mettre en garde contre les « bêtes anthropomorphes »
que sont ces hérétiques, fuyez leur rencontre, priez pour leur con-
version, si difficile soit-elle (iv. 1), Si les actions du Christ ont été
une apparence, à quoi bon souffrirais-je? « Car c'est pour souffrir avec
lui que je souffre tout, lui-même m'en donnant la force, lui qui s'est
fait homme parfaitement » (iv, 2). Ignace dénonce aux fidèles de
(1) Ce texte est difficile, parce qu'elliptique : il vaut mieux s'en tenir au christianisme ensei-
LES ODES DE SALO.MON. 181
ni l'un ni l'autre de Jésus Christ, ils ne sont à mes yeux que des stèles
funéraires; et des tombeaux, sur lesquels ne sont inscrits que des
noms d'hommes » [Philad. vi, 1).
par un incirconcis.
Ainsi encore l'Ode xi. Le personnage qui parle a eu son cœur cir-
concis : le Très-Haut a circoncis son cœur par l'Esprit saint (1). Le Très-
Haut a mis son amour dans le cœur circoncis ; en même temps que
l'amour, sa science.
<'
Vue eau parlante s'est approchée de yncs lèvres, de la source du Seigneur,
libéralement.
'
Et j'ai bu, et j'ai été enivré de Veau vivante qui ne meurt pas.
s'emploie avec zèle à ce que soient connues les choses qui nous ont
fine par un circoncis les apùtres?). Mais à la phrase suivante le circoncis n'est plus supposé
être un apùtre, mais un hérétique.
(1) Cf. Col. II. 11 : « En lui le Christ) vous avez été circoncis d'une circoncision non
faite de main d'homme, de la circoncision du Christ... »
182 REVUE BIBLIQUE.
'" Et ils ont bu tous les assoiffés qvi ('talent sur terre.
1' Et la soif a été détruite et éteinte,
car c'est par le Très-Haut qu'est donnée la boisson.
12 Heureux donc les ministres de cette boisson !
Les âmes qui étaient mourantes ont été ranimées, vivifiées, redres-
sées : la boisson « a donné la lumière à leurs yeux » (nouvelle
preuve de l'équivalence des symboles). Un ruisseau a jailli, qui est
devenu un large fleuve et a inondé l'univers. Les hommes « vivent
par les eaux vivantes pour Téternité ». L'Ode vu nous a montré que
cette eau parlante et vivante, qui est la lumière du monde, c'est le
Très -Haut se manifestant en une théophanie visible aux hommes sur
terre. En effet, le Seigneur
Ro?)i. XIII, lii, qui désigne par là le baptême mais notre ode ne
:
vertir les âmes de ceux qui veulent venir à Dieu, pour faire le
monde captif de cette bénie captivité. Les peuples dispersés sont ras-
semblés en un :
"
Des empreintes de lumières ont été placées sur leurs cœurs.
8 Ils ont marché dans ma vie, et ont éfr sauvés;
ils sont avec moi pour l'èterniti'.
gneur Christ! » Mais ici encore il n'est pas parlé de péché une :
science, une vie, une bénédiction, un amour, et l'homme est uni, in-
corporé au Christ-Dieu.
Dansl'Of/e xix, le Christ est « une coupe de lait ». Les mamelles
du Père ont été traites par l'Esprit, et ce lait est donné au monde ceux :
'
Soyez riches en Dieu le Père, et recevez la pensée du Très-Haut.
Fortifiez-vous, et soyez sauvés par sa grâce.
^'
car je vous annonce la paix à vous, ses saints.
'
Tous ceux qui entendent ne succomberont pas dans le combat,
et ceux qui connaissent ne périront pas,
et ceux qui reçoivent ne seront pas confondus.
* C'est une couronne éternelle que la vérité :
plus, l'auteur y exprime qu'il n'a pas toujours participé à cette con-
naissance, et que ses yeux se sont ouverts :
'
Comme le soleil est la joie de ceux qui recherchent son jour,
ainsi ma joie est le Seigneur, car il est mon soleil :
'
j'ai eu des oreilles, et j"ai entendu sa vérité;
' j'ai eu la réflexion de la science, et je me suis réjoui.
Par son moyen, ^ j'ai abandonné la route de Terreui-:
je suis allé vers lui. et j'en ai reçu généreusement le salut.
•
Selon son don il m'a donné,
et selon sa munificence il m'a traité.
''
J"ai revêtu l'incorruptibilité grâce à son nom.
'
et j'ai abondonné la corruption par sa grâce.
• La mortalité a disparu de devant mun visage.
le Schéol a été anéanti par sa parole l .
'•^
Une vie immortelle est montée dans la terre du Seigneur ;
et elle a été départie sans réserve à tous ceux qui se confient en lui.
Le Très-Haut est mon soleil: ses rayons m'ont ressuscité d'un état
de ténèbres, d'ignorance, d'infirmité comparable à la mort. J'ai
•
O Seigneur, à cause des indigents ne me retire pas ta parole ;
'
à cause de leurs œuvres ne me refuse pas ta perfection.
'"'
•
Victorieusement ta droite accomplira notre salut:
tu accueilleras des hommes, de partout,
^ et tu garderas tous ceux qui sont emprisonnés dans les iniquités.
•'
Tu es mon Dieu; le mensonge et la mort ne sont pas dans ta bouche.
'" mais la perfection est ta volonté.
Tu ne connais pas la vanité, " parce qu'elle ne te connaît pas non plus.
'- Tu ne connais pas l'erreur. '•'
parce qu'elle ne te connaît pas.
'' L'ignorance est apparue comme une cécité et comme l'écume de la mer.
*^ Ils avaient pensé à son sujet, la nulle, qu'elle était grande.
'' Ils vinrent eux aussi à lui ressembler et furent réduits au néant.
Mais ils comprirent, ceux qui comprenaient:
ils réfléchirent, '• et ils ne furent pas souillés dans leurs pensées.
parce qu'ils étaient dans la pensée du Très-Haut...
la droite accomplira notre salut )>. Tous les hommes seront accueillis
par le Très-Haut dans la vérité. Ceux qui comprenaient ont com-
pris : ils sont entrés dans la pensée du Très-Haut, et ils ont dit la vé-
(1; J'écris « sa parole r. qui est le sens réclamé par le contexte. H-4r.NACK, p. i'j.
18C REVUE BIBLIQUE.
rite à ceux qui étaient dans Terreur. — Dans Y Ode xxi, Salomon
parle encore au nom du juste, il raconte comment il a passé de la
cécité à la lumière :
"
Mon cœur a débordé:
il a envahi ma bouche, il a jailli sur mes lèvres;
l'exultation du Seigneur s'est accrue sur mon visage, ainsi que sa louange.
Cette Ode n'a rien de chrétien, écrit .M. Harnack 1. De quel ju-
daïsme donc relève-t-elle? demanderai-je. Le juste qui raconte là son
e.xpérience religieuse, est un homme qui n'attend rien de la justice
selon la loi la loi est pour lui inexistante, il ne la connaît pas. Au
:
a été « élevé vers sa grâce et vers son salut ». Notez l'expression si-
gniticative « J'ai dépouillé l'obscurité et revêtu la lumière ». De
:
mort qu'il était, il a été ressuscité ses membres ont été sans douleur :
- il m'a dressé sur mes pieds sur la hauteur du Seigneur, devant sa perfection
et sa majesté,
tandis que je loue selon l'ordonnance de mes cantiques.
^ Il m'a engendré devant le visage du Seigneur,
et bien que je fusse un homme, j'ai été appelé le brillant, le fils de Dieu.
(1 Harnack. p. 52.
(2) Commedans VOde xxix « II m'a t'ait remonter des profondeurs du Schéol, et de la
:
gueule de la mort il m'a arraché >•. On a donc dans les Odes une double conception du
Schéol, lune au propre, l'autre au figuré, et amphibologie entre les deux. Cf. // Tim. ii,
17-18 : « ... Hyménée et Philéte se sont éloignés de la vérité, en disant que la résurrection
a déjà eu lieu ». Toutefois les erreurs dénoncées dans les Pastorales ne coïncident pas avec
celles des Odes de Salomon.
LES ODES DE SALOMON. 187
•
Cependant que je loue parmi ceux qui louent,
et que je suis puissant parmi les puissants.
•
Car selon la grandeur du Très-Haut, ainsi il m'a créé,
et selon sa nouveauté il m'a rénové,
et il m'a oint de sa perfection,
'•
et je devins l'un de ses proches.
Et ma bouche s'ouvrit comme un nuage de rosée;
mon cœur répandit comme un torrent de justice.
^ ma présence fut dans la pai.v.
et je fus aflfermi par l'Esprit de sa providence.
parmi ceux qui le louent. Il est appelé fils de Dieu », un nom que <(
"
Et je ne serai ixis un étranger...
^ Parce que je raime..., je deviendrai fils.
(3) Les proches de Dieu, les êtres qui sont près de lui, les anges. Cf. Mat. \vni, 10.
Spitta, p. 287. L. Hackspill, « L angélologie juive à lépoque néo-testamentaire ». Revue
biblique. 1902, p. 542-543.
(4) Harkis traduit « The Spirit brought me forth befove tlie face of the Lord ». Flem-
:
MiN(; X Er (^^der Geist' bat mich erzeugt vor dem Angesicht des Herrn ». Glnkel
: « Er (der :
Geist) hat mich geboren vor dem Antlitz des Herrn La traduction de Gunkel et de M. La- -
.
bourt spécifient bien plus que celle de Harris et de Flemming, et bien plus que le contexte
ne suggère car à ce moment de son o ascension
: le personnage qui parle n"a plus à être )>
engendré !
(5) Cf. .Ua(. IV, 1 : à.'rr,yjir, ilz xov ipr,(xov û-à toO Tîvs-Jp.aTo;. Rapprochez Evongel. Uebr. le
Christ porte par l'Esprit sur le Thabor. Preuschen. Antilecjomena , p. 5.
6] HACkSi'iLL, p. 532 : le corps des anges est brillant comme du chrysolithe.
188 REVUE BIBLIQUE.
les anges, qui sont (Ps. en, 20) qualifiés de ouvaxot Ig^ôi (1). On ne
peut pas dire avec M. Gunkel qu'il soit devenu « un des anges les
plus élevés ». Il a été créé par l'Esprit « selon la grandeur du Très-
Haut », ce qui s'entend d'une nouvelle création (dans le sens de Gai.
VI, 15 : rénové selon sa nouveauté » (au sens de
y.aivy; y-iiiç), il a été «
présence, tout son être, est dans la paix et dans la joie. Cette ode peut
donc s'interpréter au mieux du bonheur des saints dans le ciel (2).
' Il m'a rempli des paroles de vérité, pour que je puisse l'exprimer :
hommes), les hommes se parlent les uns aux autres ils étaient avant :
1 Hak>\ck, p. 42.
2 Au y 6, les mots : « 11 ne connaît ni sa descente ni sa roule veulent parler de la
route de la La parole ne descend pas. au sens de déchoir, et c'est le sens
descente i
Harris».
suggéré par la première partie du verset.
'3) Sur la parole ainsi conçue, dans les livres sapientiaux surtout, voyez W. Bolsset.
Die religion des Judentums (Berlin 1903), p. 341; J. Lebreton, Les origines des dogme
de la Trinité (Paris 1910), p. 119-120; E. Krebs, Der Logos als Heiland.
190 REVUE BIBLIQUE.
réside dans l'homme qui Ta reçue de Dieu, et que par la parole s'est
manifestée la connaissance du Seigneur.
Ainsi fixée la signification de VOde xii, on a la clé de VOdc xvi. Le
soi-disant Salomon y exprime que sa mission est de louer le Très-
Haut (2), puis il ajoute :
Nous avons ici une élévation sur l'œuvre de « la parole » (4), l'ins-
trument grâce auquel Dieu a exécuté et ordonné la création Le :
parole ». Pas plus que dans VOde xii, « la parole » n'est ici le verbe,
le Logos :nous restons dans la conception sapientielle de « la pa-
role ')
(5).
(1) H.^RRis, p. 106. Ceci contre Harnack qui voudrait que les «mondes » fussent les éons.
Harris, p. 111, a cru retrouver dansles y 1-5 un souvenir d'Eplclète. Hahnack, p. 45,
(2)
ne croit pas ce rapprochement fondé.
(3) La « parole du Seigneur
» scrute l'invisible. Comparez/ Cor. n, 10-13.
M. Harris observe que l'auteur de Y Ode xvi, après avoir dit que Dieu s'est reposé la
(5)
création finie, ne dit pas un mot du sabbat, et représente que les créatures font leur
LES ODES DE SALOMON. 191
L'Ode XLi est un cantique des saints, ils vivent dans le Seigneur par
sa STâce, ils ont reçu la vie par son Christ. Exultons d'allégresse dans
le Seigneur y 1-T .
« Qu'ils s'étonnent tous ceux qui me voient, parce que je suis d'une autre race.
^ Le Père de vérité s'est souvenu de moi. lui qui me possédait dès le principe.
'" Car sa plénitude m'a engendré, ainsi que la pensée de son cœur.
" Son verbe est avec nous pour toute notre ruute;
'- Le Sauveur qui sauve nos âmes, loin de leur
nuire,
'^ l'homme qui s'est humilié et a été exalté par sa justice,
''
du Très-Haut est apparu dans la perfection de son Père.
le Fils
•^ Une lumière a lui du verbe, qui était en lui dès le Principe.
'•^
Le véritable Messie est unique, et il a été désisoé avant la création du
monde,
'"
pour sauver les âmes à jamais par la vérité de son nom...
au sens que nous avons déterminé plus haut) est avec nous pour
toute notre route. Et cette parole nous est apportée par le Christ. Le
Christ est « le sauveur qui sauve nos âmes ». Il est « l'homme qui
s'est humilié et a été exalté ». Il est « le tîls du Très-Haut ». Il est
« apparu dans la perfection de son Père ». A nos yeux a lui une lu-
mière du verbe qui était en lui (dans le Père; dès le principe ». Le <(
'
La grâce a encore couru, et elle a revêtu la perdition-,
•'
Entants des hommes, convertissez-vous et vous, leurs filles, venez ! !
'
Pareil <i ce qui est en bas est ce qui est en liout,
car tout est en haut.
Il nij a rien en bas, si ce n^est une apparence,
pour ceux Cil qui ne réside pas la science.
Ce qui est en haut est en bas, mais tout est en haut, car en ])as il
même qui revêt et qui détruit, c'est le même encore qui se tient sur
un sommet élevé : il se tient, il est debout, tel que nous avons vu le
Christ sur la croix dans YOde xxxi. T. Il élève sa voix, qui retentit
sur toute la terre 2).
le contraste des deux voies, comme dans la Didachè i, 1), comme dans !
'
\) Le y 5 de YOde
xxxi\ n'est pas une spéculation mystique ne reconnaissant d'être qu'au
comme le veut M. Harnack, p. 66. Pas
divin, au bien, et déniant l'être au terrestre, au mal.
davantage une réminiscence du mythe platonicien de la caverne! Xi de la maxime prêtée
au Christ par les Acta Philippi. 34 : 'Eàv ar; -o'.t-^tt.tî Otitiv -zk -/.i-tù eî; Ta âvw x-:).. Prec-
scHEN. Antilegomena, p. 28\ Cf. Martijrium Pétri, 9 (éd. Bonnet, p. 94 : sàv u.t; T.o:r,Tf,zz....
sagesse.
L'0(/e xxxviii décrit la vérité sous le symbole d'un char qui porte
le juste :
1 Je suis monté sur la lumière de la vérité comme sur une voiture (1).
- La vérité m'a conduit et m'a porté,
m'a fait passer les précipices et les crevasses,
et m'a sauvé des rochers et des ravins.
3 Elle me devint un port de salut.
et me plaça sur les bras de la vie immortelle.
'
Les torrents sont plus rapides et plus agiles que l'éclair.
Les torrents symbolisent les puissances du mal (2), ils sont plus
rapides que l'éclair : ainsi dans le troisième évangile (L21C. x, 18).
Satan tombe du ciel comme un
éclaii'. Ceux qui marchent sans
tache {Ps. cxviii, 1), les saints,ne seront pas troublés. Ce signal ((
>
nest pas, croirai-je, un rappel du char d'Élie, et il ne s'agit pas ici de l'ascension de
l'âme au ciel, mais de son cheminement sur la voie du Seigneur.
2) Au y 7 « Les torrents vous seront soumis », comparez J.uc. x, 17 : « Les démons
nous sont soumis ». Id. 20 « Les esprits vous sont soumis ».
:
(3) Cf. Isai, V. 26 : ToiyasG-jv àpEï TÔaffr.aov, iv toï; iOvso-'.v xt).. L'image est reprise par
Ignat. Smyrn. i, 2.
LES ODES DE SAI.OMON. 19o
'-'
ses traces sont fermes sur l'eau et elles ne sont pas effacées,
mais elle sont comme du bois qui est solidement fixé,
'" et d'ici et delà s'élèvent les values:
mais les traces de >"otre-Seigneur Christ sont fermes et elles ne sunt pas
effacées ni détruites;
" lechemin a été frayé pour ceux qui passent après lui.
pour ceux qui parfont le chemin de sa foi et adorent son nom.
Les traces du Christ ne sont pas effacées (2), eUes sont fermes comme
du bois. Le chemin a été frayé pour ceux qui passent après lui :
fljMarc. \i, 45-52; Mat. xiv, 25-33; loa. vi, 14-21. '
(2'Harxack, p. 70, croit que dans Notre-Seigneur Christ », le mot Christ est interpolé,
^(
Pierre Batiffol.
(i; Cf. Magnes, ix. 1 : « Ce mystère (la mort du Christ), nié par certains, o t'./e; àovovv-
Ta;, est la source de notre foi », etc. Trall., is, 2 et x.
LES PAYS BIBLIQUES ET L'ASSYRIE
(Suite)
était jSIs d'une Babylonienne. Nikou'a 2 qui eut les prérogatives d'une .
reine mère durant le règne de son fils ['S Dès le début de sa royauté, .
Babylone rasée par snn père 'V. On pourrait se demander alors si, en
fait.Sennachérib n'avait pas accordé à son tils lautorité sur cette ville.
» serait-ce pas à quïl changea le nom d'Asaraddon en
cette occasion
celui à'Asur-etU-ilnni-mukhi-apla Asour, seigneur des dieux, éta- <<
des grands dieux, mes seigneurs, les renversa. Quand ils virent l'élan
dematerriblebataille. ils de vinrent hors d'eux-mêmes 9\ l>tar. la dame
(1) D'après le canon de Ptoléiuée. la liste des rois babyloniens, la Chronique Babylo-
nienne.
\'l) Elle est nommée dans K>'ldtzo>'. Assijr. Gebeie an <len Sonnengatt. n" 101, et dans
JoHNS, Ass. deeds and documents, n- 645. rev. 2 Xa-ki-'-a].
3, C'est ce qui ressort des lettres à elle adressées par les Babyloniens iAVincklei;. Altor.
Forschunrjen, II, p. 187 ss. .
(4; Dans l'inscript. de la pierre noire, Asaraddon déclare nettement qu il a elé choisi par
Mardouk pour relever les monuments de Babylone. Les inscriptions concernant les travaux
du roi à Babylone ont été étudiées par Meissaer et Rosi, Beitr. zur Assijriologie, III. p.
218 ss.
i5) Imposition du nom à'Asur-etil-Hàni-mukin-opla à Asaraddon par Sennachérib, dans
III R., 16, 3 : cf. WixcKLER, Altor. Forschungen, II, p. 55 ss.
(6j Sur ces événements, /?/>., 1910. p. 520. Asour-nadin-.-ouma avait été déporté en Élarn
(694 av. J.-C] et les inscriptions sont muettes a son sujet a partir de ce moment. Le prince
héritier était Arad-Bélit (identifié avec ~"'*2"*~N. cf. BB.. 1910. p. 520 ,
et non Asaraddon :
(7] Le teste dans /// R., 15-16. Pour la partie qui nous occupe, Deutzsch, Ass. Lese-
stuclie, 4^ éd., p. 70. Traductions dans KèiHnschr. Bibliotheh, II, p. 141 ss. {Wisckler};
Gressmann, .Altor. Texte und Bilder, I. p. 122 .U.ngnad .
furent hors d'eux-mêmes », et compareT mahhûias ileml qui se dit de Tiamat au moment
' " ^-
-—•
'!)Prisme brisé, II, 25 s." '
3) Lire Uir le nom écrit idéographiquement Dûr-ilu « mur de Dieu ou plus exactement
mur d'Anou} ». Outre les texte.* cités ilans Beitr. zur Assyriologie. III. p. 282 et Deutzsch.
Die Bab. Chronik, p. 32, n. 1. cf. les lectures Di-ri. Di-e-ri (HrvKE. .1 nev: boundary stone.
p. 2l6j. On a déjà la lecture Di-i-ir à l'époque ùe Hammourabi Thlreai-Da>"gi>', Lettres et
Contrats..., n' 1. face. 1. 20'.
(4^ L'hypothèse de Hommel. Winckler, Rost, Maspero. suivant lesquels linvasion des Cim-
rnériens devrait se placer en l'an 679-678. repose uniquement sur la restitution 'Gi-mir]-ri
proposée par \Sinciiler pour le début de la ligne 2 dans la col. IV de
Chronique Babylo- la
nienne Maspero, Histoire ancienne.... III. p. 350, n. 2 Mais il faut observer que le signe
.
/•(
lui-même est douteux et que ce qui reste du signe précédent eïciut la lecture mir,
comme on peut le Toir d'après la dernière collation de Delitzsch Die Bali. Chronik. p. 14)*
5) RB., 1910, p. 505 ss.
Nous considérons n",3'^*2 comme un pluriel de majesté (usité en Phénicie pour les noms de
divinité,, dérivé de MilkaL « la Reine », c'est-à-dire c la Reine des Cieux « Jer.. 7, 18: 47.
17-19). la déesse Istar-Astarté.
202 REVUE BIBLIQUE.
chai sa muraille et son assise, je les jetai dans la mer, je détruisis l'en-
droit où elle était située (6). )>
(10) Koundi correspond à Kuïvoa, ancienne ville située près de Tarse (Winckler, Allor. l'or-
LES PAYS BIULinUES ET LASSYRIE. 203
de la mer dans un autre lieu je fis élever une ville que j'appelai du
:
sclningen, II, p. 118); Sizou a été rapproché par Sachau de Sis en Cilicie (cf. AYincklek,
À'.ir.-, p. 88, n. Cette dernière ville porte encore actuellement le nom de Sis. Les anciens
ij.
noms étaient r, liseta, -c'o SiV.ov y.â<7Tpov, Si/sya (Kiei'Ert. Form.r orbis antiqui, VU, p. l'J, B).
(1) Prismes A et C, I, 43 s.
(5) Ce sont les gens « de la Mer où se lève le soleil » dont il est parlé à la 1. 33.
(6) C est à rebours l'itinéraire d"Asour-nasir-apla que nous avons suivi dans RB.. l'.'iO,
p. 59 s.
204 REVUE BIBLIQUE.
n'est pas plus fier qu' Asaraddon rentrant à Ninivc : « Afin de faire
voir aux gens la force de mon seigneur Asour, je suspendis au cou de
leurs grands les têtes de Sandouarri et d' Abdi-Milkoutti, et je circulai
dans boulevard de Ninive avec des chanteurs et des instruments de
le
musique (2). « Nous avons vu comment la Chronique Babylonienne
avait pris soin d'insérer cet événement parmi les memorabilia du
règne.
A peine rentré dans ses Étctts, Asaraddon eut à faire face à de nou-
veaux périls dans la Babylonie du sud. Les Kaldou n'avaient pas tous
été déportés en Phénicie. Un bon nombre s'étaient réfugiés en Élani
et avaient fini par gagner à leur cause le roi Houmban-haldas II qui
s'était montré sympathique à Asaraddon au début de son règne. L'ar-
(1) Prismes A et C, I, 46 s.
(6) Ibid.
il pas le temps de mener à bien son entreprise, car une terrible coa-
(1) Les événements dans les prismes A et C. Il, 'il ss., et dans le prisme brise, 111. 19 ss.
La Chronique Babyloidenne n'en dit pas un mot. Mais les prismes d'Asaraddon ayant été
rédigés avant l'an 673. d'après la date du prisme B (prisme brisé), et d'autre part les prismes
A et C faisant mention de la victoire contre les Cimrnériens après la première campagne en
Egypte, nous plaçons entre la première et la seconde campagne en Egypte v675-674, la lutte
contre les Scythes et les Ciliciens (prismes A et C, H, 6-31 prisme brisé. III, 1-18). tandis-.
(1) du nom Askuzai, écrit aussi Jsknzai, que les Grecs tirèrent le nom de Ix-jOa-.
C'est :
Bible, '^SkuN (qui correspond à Askuza) est descendant de "lï^ïi (qui correspond à Gi-
mirra) (len., 10.
: 2 s.
(2) KsuDTzoN, op. If'ud., n" 29. Sur l'identité entre Partatoua et IlpoToôJr,;. roi des Scy-
thes, cf. WocKLER, Altor. Forschungen, I, p. 488. On remarquera que, dans Hérodote (1.
103 comparé avec I, 15), le fils de IIpoToOOr,;, à savoir Mao-jo;, est en lutte contre les
s.,
(4) Même nom que TeiTTir,;, le second des Achéménides. Comme nous l'avons dit, les Scy-
thes étaient des Aryens aussi bien que les Mèdes et les Perses.
(5) Prismes A et C, II, 6 ss. Prisme brisé, III, 1 ss. Sur le pays de Tabal, RB., l'JlO,
;
p. 514.
trée du grand Nefoud [k). Les dieux de la cité avaient été emportés
en Assyrie (5). règne d'Asaraddon, le roi d'Arabie {A-ri-bi}, qui
Sous le
n'est autre que ce Hazaël (Ha-za-ilu vaincu par Sennachérib (6), )
(2) Dans Prismes A et C. la campagne en Arabie se trouve intercalée entre les expé-
les
ditions au pays de Kaldou et celles sur la frontière d'Élam et en Médie. Dans le Prisme
brisé, elle fait suite à l'expédition de Médie. En combinant ces données avec celles de la
Chronique Babylonienne, il nous semble plus vraisemblable de placer cette campagne en
même temps que l'expédition d'Egypte de 673, surtout si l'on tient compte de la suite des
événements dans la campagne de Sennachérib en 690 {RB.. 1910, p. 516 s.).
(3) RB., 1910.p. 510 s.
(4) Ibid.
i5) D'après les Prismes A et C d .\saraddon, II, 55 ss.
(6) RB.. 1910, p. 516.
208 REVUE BIBLIQUE.
dame Taboua. élevée dans mon palais, et je la fis retourner dans son
pays avec ses dieux (2) ». Ainsi Asaraddon se conforme aux coutumes
des Arabes. Fréquemment nous avons constaté que ces tribus avaient
une reine à leur tête (3) et — à l'époque de Sennachérib — Hazaol
passait après la reine (i). Taboua a été élevée dans le harem du roi
d'Asour, c'est à elle qu'Asaraddon accorde les honneurs du matriar-
cat Hazaël l'épousera et sera ainsi le second en dignité, comme par
:
roi d'Assyrie qui intervient et qui fait partager à Jalon, fils du défunt,
l'autorité de Taboua (6). On augmente le tribut, dans lequel, à côté
des chameaux, figurent les célèbres aromates de l'Arabie.
Asaraddon avait donc des guides très sûrs pour le conduire jusqu'à
la villed'Adoummat. Grâce à eux, il pourrait continuer sa marche à
travers le désert. C'est cette marche qui est décrite dans les prismes
A et G' (III, 25 ss.) et B (IV, 10 ss.). On passe d'abord par le pays de
Bdzu qui n'est autre que Bouz de la Bible [Gen., xxii, 21), contrée
d'Arabie comme Dedan et Têma [Jer., xxv, 23), patrie d'Élihou l'un
des amis de Job ^7). La description du pays (8) est intéressante à
cause de sa ressemblance avec Is., xxx, 6 ss. « Le pays de Bàzou :
Nous suivrons la description des Prismes A et C. III, 25 s.; Prisme brisé, IV, 10 ss.
(8)
(9) Sur cette particularité des régions du sud-ouest du Djôf, cf. RB., 1911, p. 104 s.
(10) A l'époque des Sargonides, la double-heure comme mesure de distance équivalait à
un peu plus de six kilomètres (cf. Fr. Thl'reau-Dancin, Journal asiatique, lOOii, p. 99,
n. 1).
LES PAYS BTRLTOIES ET L'ASSYRIE. 209
vint se jeter à ses pieds, comme avait fait Hazaël, et obtint miséri-
corde. On dieux après les avoir marqués de l'estam-
lui rendit ses
pille attestant letriomphe du dieu d'Asour. Asaraddon le plaça à la
tête du pays de Bàzou et lui imposa un tribut .6 .
• Il On ne sait à quoi correspond, dans la réalité, la pierre désignée sous ce no!ii pilto-
resque.
2 C'est le pays de i7n signalé avec y!i2 dans Gen., 22, 21 s.: cf. BB., i9ll, j). 104 s.
etc. Glaser cherche à identifier les noms de pays avec des villes du Yémen (S/dzze..., II,
p. 26.3 SS.;.
•V Prismes X et C, 111, 4o ss.
(6j Ibid.
7} BB.. 1910, pp. 190 et 385.
S; Prismes A et C, 111,53 ss., et IV, 3 ss.
(9) Ibid., IV, 8 ss. Sur cette campagne, Rost, Untersuch. zur oUor. Geschichte, p. 87 ss
Streck, Zeitschr. fur Assyriologie, XV, p. 362 ss.
(1) chronique Babylonienne ,\\\ 19 ss. Sur le pays de Soupria, Hillerbeck et Delitzsch,
dans Beitr. zur Assijriologic, VI, 1, p. 46. La population de ce pays était hittite d'après le
nom d'un roi qui finit en Te-sub (dieu national des Hittites; Delitzsch, Die babylonische
:
Chronik, p. 35.
(2) Prismes A et C, V, U ss.
(4) Comparer les listes similaires de Téglalh-phalasar 111 (BB., 1910, p. 198), de Sargon
{ibid., p. 383), de Sennachérib {ibid., p. 508).
LES PAYS BIBLIQUES ET L'ASSYRIE. 211
u-su dont le nom peut être comparé à celui du satrape des Philistins
u,*"i3N (G Avysu;;). C'est ici que devait se placer la ville d'Asdoud qui
n'est inscrite, par suite d'un oubli, qu'à la fin de la première énumé-
pour roi Ahu-mil-ku
ration. Elle s'appelle la \ï\[e à' As-dii-di et a
("Sninxy que mentionnera encore Asourbanipal. Sous Sennachérib
nous avions, pour la Phénicie, un groupe de quatre villes Samsi- :
été ajoutés après coup (de même que la ville d'Asdoud). Comme pour
Juda, Édom, Moab. c'est le déterminatif de « \ille » (au lieu de celui
de « pays ») qui précède Bit-am-ma-na ("i-îa^-niz;. Le roi est le même
qu'au temps de Sennachérib, Bu-du-ilu '^n—r:: (7 .
(3) Le nom est écrit phonétiquement. Noire lecture Is-mi-en dans Ul',.. 1910. p. 5I0 doit
être rectifiée.
(4J RB., 1910, p. 510. Cf. le roi dAscalon, Mi-tl-in-ti, au temps de Téglath-phalasar III
{ibifl., p. 198).
(3) Pour les identifications, cf. surtout Delitzsch. Wo Uig dns Paradies, p. 292 s. et
HoMMEL, Gesc/i. des dit. Morgenlandes, p. 156 s.
(i) Lire ainsi au lieu de A-me-zu (Wincklkr), Gi/-?He--ît (Delitzsch, Hommel) : Cf. Meissner
et RosT, dans Bvitr. zur Assyriolocjic, 111. p. 196. en note.
Ce sont tous des dieux phéniciens dont les noms voisinaient avec
ceux des dieux assyriens dans les conventions entre les deux peuples.
Malgré les malédictions qui devaient le frapper, Ba'al n'hésita pas
à rompre le traité i i et à s'allier avec Taharqou Tar-qu-u . le roi
(t; Sur ce traité WiNCKLER, AUor. Forschungen, II. p. 10 ss.: Peisck. Mitt. (1er vor-
ileras. Gesellschoft III, 1898, p. 238 s. = 12 s.).
(2) Lire ainsi au lieu de Mi-il-gi-su de Winckler. d après Johns. cité dans Mitt. (1er
vorderas. GeseUschaft. III. 1898. p. 239 = 13 .
insclirifl. Textbuch. 3« éd.. p. ô2 s., on voit clairement il. 12 ss.) que Bo-'a-lu de
Sur-ri a placé sa confiance en Tnr-qu-u. roi du pays de Ku-u-si.
(5 Celte campagne est mentionnée durant la dixième année d Asaraddon dans la Chro-
Babylonienne IV, 23 ss.'.
nifjue
6Le récit reconstitué par XS'inckler loc. laud. et la Chronique Babylonienne don-
nent lun et l'autre indication du mois.1
'') WcNCKLER, Keilinschrift. Tejclbuch, 3^ éd.. p. 53, 1. 12 ss. C'est ce récit que nous
suivons pour les débats de la campagne.
214 REVUE BIBLIQUE.
d'Egypte Mii-sur ,
j'installai en masse des rois, des gouverneurs, des
lieutenants, des hauts dignitaires, des fonctionnaires, des scribes.
J'établis pour toujours des sacrifices permanents à Asour et aux dieux
grands, mes Seigneurs. Je lui imposai un tribut et une redevance à
ma » On voit avec quel
seigneurie, pour chacjue année, sans cesser.
soin Asaraddon veut organiser sa conquête. Il se rend compte de
l'importance du coup qu'il vient de porter. Seule l'Egypte avait pu
borner l'extension prodigieuse de l'empire nini\ite. La distance entre
les deux pays, la domination séculaire des Pharaons, autant de rai-
(1) L"inscription du Nahr el-Kelb est ea mauvais état, mais celle de Sendjirli (sur cette
ville, RB., 1910, p. 183 s.) est bien conservée. D'abord publiée par Schrader (dans Li-
SCHAN, Ausgrobungen in Sendschirti. I). cette dernière vient d'être rééditée par Ungnad
(dans Vordcrasiatische Schriflflenlunâler du Musée de Berlin, I, n" 78). Sur les re-
présentations qui accompagnent ces inscriptions, Mvspeko, Ilisfoire (nicienne..., III,
p, 374 s.
(2) Cette ville ligure comme dernier mot de l'itinéraire mutilé reconstitué par Winciiler
(cf. sup.). Elle se trouvait sur la limite orientale de l'Egypte.
216 REVUE BIBLIQUE.
onzième année (670 av. J.-C.) le roi tua par les armes beaucoup de
ses grands en Assyrie (1). » Afin cependant de donner une certaine
satisfaction à son fils déshérité, il confia à Samas-souma-oukin la
vice-royauté de Babylone. Nous avons vu comment Sennachérib avait,
lui aussi, placé son fils aine sur le trône de la ville sainte (2). Fidèle
l'a fait sur terre et nous l'a montré. » Le monarque avait-il un pres-
(5) Ces renseignements si intéressants (qu'il faut comparer avec ceux de la Cyropédie)
sont donnés par Asourbanipal lui-même (Cyl. de Rassam. I, 31 ss.).
218 REVUE BIBLIQUE.
avait régné douze ans sur l'Assyrie, ses deux fils montèrent sur le
trône, vSamas-souma-oukîn à Babylone. Asourbanipal en Assyrie (2) ».
C'était à Asourbanipal qu'il reviendrait de poursuivre la campagne
d'Egypte et de consolider la conquête faite par son père. Asaraddon
qui, par son énergie, avait réussi à s'asseoir sur le trône paternel,
à repousser l'invasion des Aryens, à fortifier sur les pays phé-
niciens ou syriens la suprématie d'Asour. à pénétrer en Egypte
jusqu'à Memphis. Asaraddon était frappé avant d'avoir pu achever
son œuvre. L'étendue du territoire soumis à Asour ne permettait pas
au pouvoir suprême de tenir dans sa main tous les fils de l'adminis-
tration. Toujours sur l'un ou l'autre point une révolte pouvait éclater.
L'Assyrien avait trop embrassé pour bien étreindre.
{A suivre.)
P. Dhorme, 0. p.
(1) La date de la mort est donnée dans la Clironique Babylonicune, IV, 30 ss.
quae est in Eleona conveniamus , non sans ajouter aussi avec lui :
220 REVUE BIBLIQUE.
ment rendu, c'est à eux qu'en revient tout le mérite, car les travaux
étaient décisifs et la ruine s'exprimait elle-même, .le reconnaîtrais toute-
fois par trop malle liljéralisme parfait et l'exquise courtoisie qui m'ont
I. LES RUINES.
clos du Credo, où Ion accède par une étroite rampe, A, est une
esplanade légèrement relevée vers Torient. Dès l'entrée on passe
sur la voûte d'une petite chapelle restaurée naguère par M'"" la
princesse de La Tour d'Auvergne et connue depuis des siècles comme
le sanctuaire duCredo ». Au delà une cour presque plane, où
«
Pater avec son élégant pavillon projeté en avant mais pas tout à
fait au milieu de la terrasse. A force de soins et de terres rapportées
contemplaient à leur aise par les arcades des galeries au plus et tout
à de rares intervalles une main pieuse pouvait-elle apporter aux fleurs
et aux arbustes qui égayaient ce coin déterre des soins attendris.
repéré l'axe de V"". Quelques heures de travail font retrouver une tran-
chée identique, section V, cette fois avec plusieurs beaux blocs d'ap-
pareil à peine ébranlés de leur lit de pose sur la fondation puissante
en silex. Bientôt on est en possession des angles avec une assise ap-
pareillée, ensuite de la grande tranchée perpendiculaire est-ouest,
parallèle au tronçon déblayé au début de la fouille. On la suit en re-
venant à guider avec une sécurité absolue par les
l'ouest, se laissant
fondations désormais familières et par la double paroi de roc. Devant
l'édicule qui couvre l'abside souterraine du Credo, force est bien de
s'arrêter ; mais voici tout à point un angle intact de splendide ma-
tout cela sans doute plus vite raconté que fait, mais aussi beaucoup
plus facile à suivre sur le plan qu'à travers cet inévitable brouilla-
mini des indications aussi peu littéraires que possible, par des points
L'ÉGLISE DE L'ELÉONA. 227
elles avaient été vues les amorces de fondations dans la roche vive;
solide qu'utile dans l'analyse du plan. Il fournit en second lieu une base
ferme pour déterminer non plus seulement l'orientation générale d'axe
dans une tranchée de largeur variable, mais lorientement strict d'une
paroi de l'ancien édifice. Il fixe enfin la relation de ce qui est appelé
la « crypte du Credo « avec le monument primitif, au moins par
l'extrémité méridionale de cette « crypte », puisque le mur qui la
limite au sud et dans lequel sont pratiqués en partie les escaliers
modernes prolonge tout bonnement l'ancien mur. Cette constatation,
qui éclatait au regard dès le premier report du vieux fragment de
mur d'ante sur le plan préalable du terrain, ne parut d'abord qu'une
coïncidence de hasard. Elle n'en fut pas moins soumise sur place à
un contrôle minutieux. Afin d éliminer le plus possible les chances
d'erreur dans un raccord d'orientement à opérer sur de courtes sec-
tions dans la crypte d'une part et dans la tranchée d'autre part, on
devait essayer un développement des axes pour de plus longues visées.
La face interne, /^-n^, du mur de la crypte une fois repérée sur le sol
extérieur, son orientement a été tracé d'ouest en est sur une longueur
de 8 mètres, jusqu'à n~, où il était barré par l'habitation du gardien.
Le parement extérieur de lante mesuré à son tour sur la même
étendue, ^n'-m^, a produit une parallèle absolue à la précédente ligne
d'orientement. L intervalle n--?n'' entre ces parallèles mesuré sur le
mur de la maison qui avait limité les visées a rendu 1"\V25, c'est-à-
dire pratiquement l'épaisseur de l'ancien mur. Or, quelques jours
plus tard, en relevant le passage G, qui conduit à la mosaïque F,
sous les amorces de construction remaniée nous retrouvions en place,
0, la même assise de régulation que dans la face méridionale de
Tante et sur sa ligne précise. En mesurant alors, de ce point fixe, une
L'ÉGLISE DE L'ÉLÉONA. 229
largeur exacte de 1"', V-,nous avons corrisé les cinq millimètres d'er-
reur probable dans le placement théorique par les opérations anté-
rieures. L'insignifiancemême de cet écart n'est-elle pas la meilleure
démonstration que premier relevé, tout à fait ingénu, serrait de
le
bien près la réalité? Que le mur ait été conservé ou détruit entre
7n^-o, il est donc désormais établi qu'il coïncide avec le mur-limite
7î-n^ de la crypte actuelle.
de s'attarder à décrire les vestiges d'une citerne exigu<*, />,
Inutile
collée par la suite au flanc méridional de l'ante, ou de petites cavités
dans le rocher, q, suffisamment exprimées par le plan. Il ne serait pas
moins banal de prophétiser la découverte de la tranchée dans le
roc avec ses débris de massive fondation dans la section m-'-m\ lais-
sée jusqu'ici intacte à l'orient de l'habitation du gardien. Un détail
va montrer le développement le plus authentique de la muraille
primitive jusqu'à 62°", .50 à l'orient de l'ante, par la tranchée dans le
roc YY' . On observe à la hauteur de l'angle sud-ouest du Pater une
mosaïque, E, déblayée sur une assez spacieuse surface. La fouille
s'est arrêtée au sud pour ne pas endommager inutilement la voûte de
la minuscule citerne construite à basse époque à travers la ruine et
J'} 'avec un écartement axial de -21 mètres. Lédicule qui protège l'ab-
side du Credo interdisait de suivre la ligne des anciennes fondations à
l'occident de .Y sur la section X-X", échancrée en sous-sol par l'absi-
diole elle-même. Un sondage au point X* eût peut-être rendu quel-
ques vestiges d'une ante analogue à }'; la difficulté de le pratiquer
sans interrompre, ne fût-ce que pour peu d'heures, la circulation
publique dans cet étranglement du chemin est sans doute la cause
qu'il a été jusqu'ici différé. Ajoutons que les chances sont minimes
de retrouver des traces claires de Tante originelle en ce point où la
roche, beaucoup plus élevée qu'en T, n'est qu'à une faible profondeur
sous le niveau actuel du chemin, exposant par conséquent à mille
causes de ruine une construction spécialement fragile comme l'est
toujours une ante. 11 n'y a pas non plus beaucoup d'espoir qu'on
ressaisisse un jour ou l'autre l'attache du mur II sur la ligne X*-X.
Si elle avait échappé aux maçons qui ont remanié la « crypte » en
diverses périodes antiques, elle aura probablement disparu dans
l'érection du dernier édicule.
La crypte n'a pas l'air, sur ce côté, de s'adapter à l'alignement du
mur supérieur comme à l'extrémité méridionale ; ce qui sera dit plus
loin montrera que sa relation avec ce mur doit cependant avoir été
plus ou moins la même.
A partir de X la tranchée a été mise au jour sans interruption sur
une longueur voisine de 40 mètres. La fondation en silex est continue
sur 25 mètres, entre les lignes transversales III et Y, et avec de no-
tables restes de l'assise de régulation. A une époque indéterminée,
mais postérieure à la ruine du grand mur, le bassin rond et le dé- M
potoir A'^ inséré dans une conduite d'eau avant son débouché dans une
citerne ont été appuyés sur le vieux mur. En pénétrant dans la ter-
rasse du Pater la tranchée a coupé d'anciens tombeaux c'est du :
moins le fait évident pour 7', dont elle n'a laissé subsister qu'une fosse
éventrée longitudinalement par le milieu. La conservation de J', qui
se développe en caverne spacieuse sous laire même de l'édifice, por-
tait demander s'il ne s'agirait pas plutôt d'une sépulture ulté-
à se
rieure aménagée pour quelque personne de considératio'n. A scruter
de très près la situation du caveau, la relation de son entrée avec la
muraille, on se persuade plutôt qu'il est réellement antérieur, mais
qu'on donné le soin de le conserver précisément peut-être en vue
s'est
de nouveau pour une sépulture qu'on ne pouvait prati-
l'utiliser à
taller cette
plus tard
est
alors,
tombe en une
donc antérieur à la
quand on venait.
si l'on veut,
telle situation
ins-
mmm
Fig. 3. — L'épitaphe du sépulcre a.
par rapport au mur, on avait donc un
intérêt spécial à rechercher ce voisinage immédiat et d'autre part on
avait libre accès à ce point, car si l'on eût ébréché le vieux mur pour
creuser la jeune sépulture, quelque vestige du mur fût demeuré per-
ceptible ici comme partout ailleurs où les fondations ont été arra-
chées. D'où il suit qu'apparemment
la ligne I-L' n'a jamais été plus
longue que ne l'a recouvrée. Elle est d'ailleurs un peu trop
la fouille
reculée à l'ouest pour se raccorder théoriquement aux lignes per-
pendiculaires A'\Y et }"}' et lante )' sûre contre-indiquait déjà l'hy-
pothèse d'un tel raccord. Pour comprendre néanmoins qu'il s'agisse
bien d'un élément architectonique de notre édifice, il suffît de noter
sa nature, son orientement, sa relation avec les autres lignes, surtout
236 REVUE BIBLIQUE.
tier de roche dure, r^, calé avec le plus grand soin et prenant l'ali-
gnement exact des deux tranchées. Contre la saillie que fait ce bloc,
au sud, s'appuyait une tombe maçonnée, ?', développée de biais au-
(1) PI. VI, 1 : cf. dans la pi. v, 21 a l'élévation .^éoméli'ale de l'autre face, 21 b le plan,
21 c la coupe au sommet de la corbeille
LÉGI.ISE DE L'ÉLÉONA. 239
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A -Ji
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L'ÉGLISE DE L'ÉLÉONA. 241
taillés dans le roc, ad (cf. pi. vin, ii; un escalier h (pi. x, 1), dont les
prolongé par une très pauvre maçonnerie 'fig. 7) (;t débouchant, par
quatre petits degrés rapportés, sur l'esplanade quadrangulaire ^y
enserrée à l'angle nord-est par les lignes A'A', VI et VII du monument
supérieur. Mieux que toute description, photographies, plan et coupes
à large échelle traduisant les nuances de ce rapiéçage, où s'amal-
gament les éléments les plus disparates : des pierres à stries médié-
vales dans les montants de porte extérieure
du tunnel pi. x, 2); un
claveau d'arc x, remployé dans un jambage de la porte ^/, sans souci
de la fausse arête et de l'instabilité qu'il y introduit (fig. 6); quel-
ques blocs arrachés à l'appareil ancien très caractérisé des grands
murs extérieurs (v. g. /, m, n, pi. iii), un fragment de dalle creusée
REVUE BIBLIQUE 1911. — \. S., T. VIII. 16
242 REVUE BIBLIQUE.
en bassin avec canal d'écoulement (o, iig. 8), sans parler de plus
menus débris. Tout cela disparaissait sous un épais revêtement en
sluc peint dont les morceaux ont été ramassés par corbeilles. Ce
lourd badigeon ne se confond point avec un stuc antérieur très fin et
'^0k3i
jiirrace a.ctuecie
'^i.l''-l-Y:d'-!-.'JA^2-i
TU-ve^u au l'oc
3l : d l'IG;
cLîns U crypte ù.clue'de
-0,3S.
SOc:
iéd
l-ig. 0. — La crypte. Coupe transversale sur la ligne x:c du i)laii
de coloris élégant suggéré ici par quelques déJjris et qui sera retrouvé
en place ailleurs. Et ce stuc lui-même n'était peut-être qu'une déco-
ration de seconde main succédant à quelque revêtement primitif en
marbres précieux qui aurait été dilapidé. Du moins est-ce un pla-
UÉGLISE DE LÉLÉONA. 243
^l.'i*?L"X'--
% -i
.r^n
mètres
Fig. 7. — La crypte. Coupe transversale sur la ligne nn du plan Dg. -J.
(1) Ainsi qu'on l'a pratiqué, par exemple., à l'époque romaine dans le Qo.fr Fira'oun à
244 REVUE BIBLIQUE.
peut espérer retrouver, sous l'emplâtre dont ils les ont offusquées,
des parois de maçonnerie ou de roche qu'ils ne se sont pas imposé
de détruire. Ainsi déjà ont été recouvrés tous les éléments anciens
bien nets visibles dans les figures 8 et pi. vin. +. Le jour où l'on
aurait la faculté de sonder le pied même du mur intérieur du préau
et d'explorer la galerie méridionale du cloître, ne retrouverait-on pas
d'utiles compléments d'information sur la crypte primitive et la ca-
verne qui en a été l'origine?
De la décoration du monument il ne reste en place que divers mor-
ceaux de pavements en mosaïque. Une très fine mosaïque blanche
parait s'être développée tout le long du grand mur septentrional
depuis la lisne VI presque jusqu'à V; un peu avant d'atteindre ce
dernier mur, la mosaïque blanche cesse aujourd'hui devant un lam-
beau de splendide mosaïque historiée, B ivoy. pi. iv dont le niveau,
est plus élevé. Inutile de rappeler qu'il existe une autre mosaïC[ue
historiée, d'un style plus simple et non moins classique, E pi. i etiv,,
dans la zone méridionale de l'édifice. Les rares mais excellents élé-
ments qui permettent de ressaisir une bonne partie des superstruc-
tures trouveront mieux leur place dans l'interprétation ultérieure.
Un simple coup d'œil sur les annexes achèvera cet examen des
ruines. Deux sont tout à fait juxtaposées vers le milieu du monument,
à la hauteur du mur V; tellement juxtaposées que l'une a tout l'air
d'avoir quelque peu enjambé sur l'autre comme si elle lui eût été
substituée. D, qui occupe le niveau le plus bas, est une chambre de 5™ X
4™, 60, ornée d'un pavement en mosaïque divisé en deux zones le des- :
246 REVLE BIBIJOLE.
fournira aux techniciens tous les chiffres utiles pour sauver de cette
description par trop spéciale. La coupe longitudinale en particulier,
pi. 11. olîjet du soin le plus persévérant, s'est efforcée de traduire ce
placement sur le sol avec clarté pour l'œil le moins exercé l ). C'est '
donc sur elle que va se fonder tout d'abord l'interprétation qui nous
incombe maintenant.
II. — LE MONUMENT.
(1) J'implore miséricorde pour l'architecture ilu cloître neuf dessinée à vue et seulement
pour mieux préciser la situation des vestiges antiques.
(2) On remarquera sans doute que celte même longueur ^
multiple probable déterminé
d'une unité métrologique ancienne —
se retrouve dans la citerne centrale. Et à propos de
ceschittres. on me permettra de signaler que toutes les cotes inscrites sur les plans ne sont
pas des mesures brutes prises sur le premier point venu et variables d'un ou plusieurs cen-
timètres sur un point contigu. Ce sont les moyennes les plus approchées calculables au
moyen d'alignements à la règle sur des surfaces aussi développées que possible. Les hommes
du bâtiment ou de simple métier archéologique savent à merveille que foule mesure chifl'rée
est. en fin de compte, une mesure inexacte: il faut cependant des chiflVes dans les relevés
archéologiques et avant de décréter de nullité ceux qu'un contrôle sommaire nuancerait çà
et là d'un ou plusieurs centimètres dans une des tranchées de roc, on fera prudemment de
réitérer les précautions prises tout le long de ce peu attrayant labeur.
LÉGLISE DE LÉLÉONA. 249
cycle est sans liaison intrinsèque directe avec le vaste édifice dont
nous connaissons les murs extérieurs. De quelque manière que celui-ci
faire foi. tandis qu'elles attestent non moins clairement une harmonie
d'un bien autre intérêt entre le grand édifice et l'absidiole : celle-ci
est tracée sur l'axe centralde celui-là. dans une orientation rigoureu-
sement identique et dans un plan horizontal qui fait inéluctablement
de celle-ci un sous-sol, disons tout de suite la « crypte » de celui-là.
Si le terme était admis d'emblée, nous serions au bout de toute re-
cherche; mieux vaut néanmoins détailler la justification du mot en
faisant toucher du doigt aux plus défiants la réalité de ce qu"il
exprime.
Dès qu'on examine — au moins sur la phot., pi. ix — la construc-
tion soignée de l'absidiole, en dépit des mutilations ultérieures et du
délabrement actuel, on se persuade qu'elle est trop frêle pour com-
porter la moindre fonction architectonique. Dans une église quelcon-
que, la base d'une abside fait toujours corps avec le mur de chevet;
on vertu d'exigences statiques faciles à soupçonner sans être grand
clerc dans les mathématiques et la mécanique de l'architecture, ab-
side et chevet sont des éléments maîtres, dont la structure requiert
230 REVLE BIBLIQUE.
coupes étalent à satiété les preuves les plus palpables de cette dis-
sociation. Les murailles b-e et 6 -e sont de pitoyables hourdis insérés
sous un plafond rocheux qu'on voulait sauver de l'effondrement et
dissimulés du mieux qu'on avait pu sous un plâtras orné de pein-
tures. Telle était toujours l'évidente vénération inspirée par la caverne
ruineuse qu'on sacrifiait toute commodité, toute élégance et toute
symétrie à l'unique préoccupation d'en conserver la plus large super-
possible et d'y laisser paraître de la disposition première tout ce
ficie
verne de 7 X 4'", 50 qui serait, certes, plus que suffisante pour deve-
nir la crypte d'un très monumental édifice. Et la caverne eut jadis
manifestement une largeur beaucoup plus considérable cela se déduit ;
diole sur une ligne axiale qui exige un certain développeaient pro-
portionnel de la caverne au nord et au sud de cette ligne. Laissons au
surplus à quelque heureuse fouille ultérieure de faire sur ce point
une évidence qui serait infiniment plus saisissante que tous Jes raison-
nements et contentons-nous d'avoir en quelque sorte sous les yeux une
caverne pJus spacieuse déjà qu'il ne serait requis pour autoriser la
comparaison avec la plus auguste des cavernes celle de la Nativité:
(Ij Théoriquement réduite au minimum absolu qu'on vient de dire, la caverne du mont
des Oliviers ofiVirait une superficie de 31 mètres carrés; celle de Bethléem en mesure 46 au
maximum.
L'KiiLlSE DE L'ELÉONA. 2o3
pour soupçonner de suite le rôle des petits fossés dans le roc avec
leur débris de solides fondations et peut-être une série d'enfoncements
latérauxcomme /•'
déjà mis au jour : les coupures dans le roc sont le
n'eût pas offert au coup d'œil une symétrie al^solue ; mais à qui est-il
(1) V. g. l'église syrienne des Archanges à e/--l//f/er/n (Butler, Ancient Architect. in Sijriti,
II, B, fig. 51, p. 58), pour citer un seul de ceux qui me reviennent provisoirement à l'es-
prit.
L'ÉGLISE DE L'ELÉONA. 2oo
plus banal des petites tranchées VIII et IX dut être dassujétir avec
toute la solidité désirable l'épaulement de multiples arceaux jetés
dun bord à l'autre du réservoir pour supporter le dallage de ferme-
ture au niveau général des portiques et assurer la circulation dans la
cour intérieure.
Devant ce grandiose atrium commençait la brusque déclivité de la
montagne. Pour se ménager l'espace d'un péristyle digne de tout
son édifice, digne aussi de l'incomparable panorama, la Ville —
Sainte étalée toute, presque à portée de la main. l'architecte n'hé- —
sita pas à enjamber sur l'escarpement du rocher. Il prolongea les
grands murs longitudinaux et les termina en solides et majestueuses
an tes aux points qu'on sait.
Entre ces murs, à i"'.10 de la façade de l'atrium. lemurlI-II" réalisa
le socle inébranlable nécessaire aux colonnes, sans doute puissantes et
somptueuses, du péristyle. L'architecte eût pu se contenter ensuite d'un
remblai vulgaire pour niveler l'intervalle entre les lignes II et III;
en homme consciencieux et avisé, il semble avoir préféré un procédé
plus soigneux. Une masse inégale de remblai accumulée sur cette
pente du rocher, quoique maintenue par les murs qui l'encadraient,
demeurait exposée à des tassements irréguliers ou à des dislocations
à la moindre secousse. Le dallage du péristyle eût nécessairement
souffert de ces dislocations, sans parler du danger que créait ce poids
énorme de remblai portant contre la base de la colonnade. On parait
à tous ces inconvénients au moyen de pilastres appliqués contre les
murs II et III et supportant une série d'arceaux très rapprochés,
sur lesquels on faisait courir un dallage. Une note manuscrite de M. le
capitaine Guillemot, en date du 2i janvier 1891, fournit à ce sujet
Dans les fouilles
la plus positive et la plus précieuse indication (1).
sommaires qu'il avait opérées au Credo, M. Guillemot atteste avoir
reconnu en place plusieurs de ces pilastres chargés encore de quel-
ques vestiges des arceaux et d'un dallage recouvert par une <>
(1) Sijrie centrale : Archilecture.... I. pi. l'J, i et p. 59. L'échelle des plans se trouvant la
même, rend la comparaison encore plus facile et plus saisissante.
REVLE EIBLinUE 1911. — N. S., T. VIII. 17
2o8 REVUE BIBLIQUE.
embrasser d'un coup d'œil la relation des niveaux. Étape par étape,
cette coupe du sol s'est augmentée d'un détail d'élévation, puis
d'un autre, à mesure que l'analyse patiente des fragments aboutissait
à une donnée sûre. Au moment de clore cette enquête provisoire, le
progrès du diagramme était devenu tel, que son achèvement en
quelques coups de crayon m'a paru plus simple et plus expressif,
que de longues explications pour montrer au lecteur la physionomie
d'ensemble du monument impliqué par les ruines. Aussi bien n'est-ii
tion, en môme
temps que leur rapprochement justifié indiquera le
procédé d'analyse. La fouille sur la terrasse du Pater livra un jour
un éclat de calcaire rouge mouluré sur lequel se pouvait mesurer
seulement le profil d'un tore avec l'amorce d'un listel et d'un cavet.
le tout guère plus grand que la main, assez grand toutefois pour
(1) PI. ^^I. 3. Un petit dé, attachée la base, est trop ébréché pour que l;i mesure exacte
en ait été possible. Il a été négligé dans les graphiques de la pi. v, 1 a, b, c.
260 REVUE BIBLIQUE.
(1) Le P. Gré a publié naguère un de ces chapiteaux. {La Crypte du Credo, p. 62).
(2)La bande supérieure, quoique très ébréchée —
cf. la phot. pi. vu, 2 —
est cependant
d'une détermination assez facile.
L'EGLISE DE LEI.EONA. 201
tecture.... p. 22; 1904. exemples sont légion dans le beau volume pour justilier cette
Et les
généralisation initiale. .Ils se sont multipliés encore dans lintervalle ainsi qu"on le pourra
constater en tournant les pages des plus récentes publications de M. Butler (Princeton
Uiiirersity Arch. Exp., Div. II, Ancient Architecture in Syria, déjà six fascicules parus
depuis 1907 Exemple pris au hasard dans ce dernier ouvrage. Divis. II, Sect. B. p. 177 ss.
1. :
deux baptistères à Ddr Qitn, une des « villes en miniatures » dans un massif montagneux
de la Syrie du Nord, en relation avec des églises d'inégale importance dont la i>rincipale et
la plus ancienne, lîg. 18C, a beaucoup d'analogies avec celle du mont des Oliviers, en plan,
proportions et décor, par exemple le chapiteau à feuilles d'eau. Même multiplication est
attestée, je suppose, dans la petite cité Lycaonienne récemment explorée par Miss Bell et
Sir W. Ramsav, The thousand and one Churches, p. 72, 133 ss. deux baptistères y sont :
(4) Une importante série de ces représentations antiques est groupée par M. C. F. Rogees,
Baptism and Christian Archaeology, Oxford, 1903, malheureusement avec de bien pau-
vres dessins.
264 REVUE BIBLIQUE.
(1) Souvent reproduite. On la trouvera par exemple dans le bon article de dom H. Le-
CLERCQ, Baptistère, dans le Dict. d'arch. chrcl., fasc. xiii, col. 395, fig. 1317.
(2) Voir dans du baptistère monastique de Timgad 'Ballu, op. t., p. 104) certain
le cas
« petit bassin hémisphérique» en relation avec les « deux cuves hexagonales ». Comparer
aussi le cas identique du baptistère d'Amwàs [RB., 1903, p. 586 ss.^, exemple qui a lavan-
tage d'être palestinien et d'offrir en outre une sacristie très probable en avant de la cha-
pelle baptismale, dans une situation qui répondrait bien à ce que présente le groupe C-D
de nos ruines; groupement similaire se retrouverait sans grande recherche en maintes
autres ruines chrétiennes.
Planche 1.
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^S^»SJS^S3:HS»^^^»ra-Â^^»-SS&S^
Planchk VI.
Planchk VI.
1. Chapiteau antique; ot. V, -21 o. b, <. — -2. Chapiteau de pilastre <l'épo(iue romane /. ;cr. V, 2-2 « et 6.
;j. Fragment de chapiteau antique. — Fragment de colonnette en;-iagée;
'». cl. V, G.
Plant.mk VII.
2.— Fragment d'architrave antique ; cf. pi. V,:2 ((./_/ et l.'«. 3. — Base anti(|ue; cf. pi. V, i a. h, c et i'>.
Planche YIII.
*»^
Phot.Savîgnac.
Phot. Savignac.
H. Vincent, O. P.
(1) EusÈnc, Vie de Constantin, III, 41 et 43; PG., XX, col. 1101 et 1104. Malgré l'ea-
chevêtrenient du texte, — dailleurs mal conservé daas second passage (cf. l'éd. de Heikel,
le
dans la Patrnlogie de Berlin, Ensel)., I, p. 96', — il ne s'agit bien que d'une église. Valois
en faisait déjà la remarque dans sa très judicieuse annotation. Cette unité ressort claire-
ment du style familier à Eusèbe et surtout de la comparaison avec le Panecjyrique de
Const. (ch. IX; PG.. XX, c. 1369 et 1372). La même fondation de sainte Hélène est attri-
buée à l'empereur presque dans les mêmes termes. 11 ne subsiste néannioins plus ombre
d'amphibologie sur l'unité du monument érigé sur la sainte caverne en mémoire et tout
proche du lieu de l'Ascension.
MÉLANGES
I
rs 15
Sonoessi tratti da due pezzi di nianoscritto membranaceo in scrit-
tura seniionciale del sec. m iv, provenienti dal Faium ed ora nella
collezione dell' arciduca Rainer. Il fr. primo e secondo stanno nella
stessa pag-ina, ch" era scritta in due colonne ; il terzo è in altra
facciata, di cui pare rimasta sia una sola colonna : al rovescio d'
entrambi i pezzi nulla tu scritto, corne in parecchi papiri. Le linee
d' ogni colonna contenevano da 2i. lin. ôi a 31 o 32 lettere (hn. 10),
per lo più perô 29, quante ne suole supporre il Wessely ne' supple-
menti o nell' indicare con punli le lettere perdute. Il nome inella-
bile non è in lettere quadrate. corne Iho trascritto per comodità,
(1} Mélanges offerts à M. Emile Châtelain... par ses elèces et ses amis. 15 avril
1910 Champion, 1910;, 224-229.
(Paris,
MÉLANGES. 267
Testament héjjreu est tout à fait analogue à celui des autres frag-
ments d'Aquila tout y est de même le même mot à mot de la tra-
; :
('''7 nzNi-N^), e non già ;>/. ï-ti-hr^ v.:', ; e nel verso seg., secondo Teodo-
reto, varii codici cit. dal Field e in parte il Vat. gr. 752, rese /.ai
(1) Ad
es., per ben oUo volte ni"* vi è slampalo T^*'^^*^. cio che il Wess. non puù avère scritto.
;
Le autorità e le citazloni sono già tutte raccolte dal Field, e sorprende corne il Wess.
(2)
non r abbia avuto sotto mano o non abbia pensato a ricorrere ad esso.
268 REVUE BIBLIQUE.
-f, xpt7V.zix '?,: y.xzz'.y.z :zJtwv. cceje'.v -raTç '^jZ'j/.yXz aJTwv, COnfer-
mato dalla Siro-Esaplare che dà a Simmaco :>/. i-si^Or, y.:-., sembra,
ed £V r?i Tr, àp£77.£â.
Xè c' è da sospettare suU" esattezza dell" attribuzione, tanto se
badiamo in générale alla disarticolazione, sensibile durezza e
pedantesco letteralismo délia prima série di citazioni e alla relativa
scioltezza délia seconda, quanto se osserviamo in particolare certe
versioni esclusive o predilette dei due traduttori. come "^zj'i.tj\j.-x
ed (Simm.
t-jyy.z'.--\-x tizj.z'iJz-j.-'.z^ per Aquila, e yziz/.v.y. ;j.3tX/wV
7^ {y2 di comparazione ; Aq. i-b. r.ypy.) (1), zztûtvi lAq. zcpEjE^Gat).
t')zr, (Aq. y.z\j.y^ per Simmaco. ed il passo vicino di Jer. xiii, 10, che
Aquila tradusse in :. r.z zt-j^iv-.zz èv zv.z'/.i'z-.r,-'. v.ypzix; aÙTwv
e Simmaco, secondo la Siro-Esaplare bene ritradotta dal Field, in
c'. :;£j:vT£r èv t?, yptT/.iiy. -%: /.y.pV.y.z aJTwv, Basta COnsultare la COn-
cordanza del Redpath aile citate parole e ad ïzy.-z"i'ij.v:i (non usato
mai da Simm, per notare i susti diversissimi dei due, quali sem- i
(1) Cfr Eccl. IX. 17. Cf. C. Taylou Hebreiv-Creek Cairo Genizali Pallmpsests from Ihe
a due colonne ed ha nel 1. 3' per colonna 24 linee e 23 nel 1. 4", raentre le pagine dei Salmi
non sono divise in colonne e contengono da 29 a 30 righe. Anche le dimension! dello
spazio sciitlo mi sembrano molto différent!, a giudicare dalle fotografie. Quindi si capisce
come il Buukitt ib. 53 parti di botli Mss senza accennare ad altra diversité che délie mani.
A chi teneva sott' occhio gli original! non poteva nemmeno venire un dubbio.
MÉLANGES. 269
tetragramma arcaico, non meno che nelle copie non esaplari délia
1) Fragments of the Books ofKimjs accordinrj to tlie translat'toa of Aquila (Cam-
bridge 1897) 15.
(2] Cf. Taylop. o. c. 26: L. Tralbe yomina sacra in Quellen und Vatersuchungen zur
lateinischen Philologie des MUtelaUers. II 1907} 27 segg.
(3; Burkitt /. c. Ivi riferisce i passi di Origene e di S. Girolatno.
(4) Dico « meglio », nia non ne ho prova alcuna. !•
^ ^ ctie si vede otto o nove volte nel
célèbre codice Barberiniano dei Profeti da f. 97' al 117, è probabilmente una deformazione
délie solite lettere quadrate e non délie arcaiche del tetragramma.
versione di Aquila verso il.vi secolo (1). Non c' è ragione di limitare
ad Aquila le generali parole di Origene (e di (iirolanio) conven- :
Aquila aveva per la storia délia scrittura fra i Giudei, e non occorre
aggiunger parola aile parole incomparabilmente più attendibili di
lui, nemmeno per osservare quanto prudentemente egli concludeva
(2) Invero, S. Girolamo al principio del Prolofjus Caleatus parla esplicitamente di qui-
bnsdam fjraccis l'oluminilnis coH' antica figura del tetragramma, ma Origene in Ps. 2,2
(P. Gr. XII, 1104) non dice né greci ne ebraici i codici più accurati, ai quali accenna-, ne si
raccoglie quali fossero, dall' 'Eêpaîoi; yapa/.Tvjpffi xei-rat to &vo|Jia. quasi fosse ridicolo nolare
queslo a proposito di mss. ebraici, perché l' inciso è messo soltanto di passaggio e per risalto
di cio che segue : 'Eêpaïxoî; oï oO xoï; vjv à),).à xotç àp^aiotâToi:. Ivi stesso Origene. al v. 1
(col. 1100), ricorda due manoscritti ebraici del Salterio da se veduli, non furono certo
e
quelli i soli che vide del V. T. ebreo. Del resto, se Aquila e Simmaco maniennero nel
nome divino arcaiche, lo avranno fatto perche ciù trovarono nei loro manoscritti,
le lettere
che nessuno, per quanto io sappia, imagina scritli per iutero nell' alfabeto antico. E, allora.
è temerario credere che anche i più zelanti giudei abbiano continualo ancora, per qualche
tempo almeno, a fare altrettanto nelle proprie copie del teste sacro, e che Origene, di poco
posteriore ai nostri Iraduttori, ne abbia vedute più d'una e stimatele anche per questo più
accurale? La congettura mi pare non improbabile né indifférente. Anche il Traube, pur —
accettando la spiegazione délie parole di Origene proposla dal Burkitt, accenno che potrebhe
esser più giusto il supporre « dass in einem Zweig der hebriiischen Ùberlieferung das
Tetragramm mit alter Schrift inmitten der jùngeren Quadrata gegeben wurde und dass
Aquila das ihm daher gelaufige alte Wortbild in seine ÎJbersetzung ùbernahm ». O. c. 28.
(3) Fragments ecc. 16.
E vedi la mia nota précédente.
(4) Cf. le introduzioni del B.ethgen- p. xxx sg., Briggs I p. xix sgg., e di altri recenti
gua e di stile cosi diversi corne Aquila e Simmaco. non puo non
essere grande la differenza dei supplément! e délie congetture seconde
che si supponga autore F uno piuttosto che Faltro.
Veramente. nel Wessely una simile preoccupazione non mi pare
sia stata grande nondimeno credo di potere sospettare senza teme-
:
rità e irriverenza. che egli forse avrebbe messo dei semplici punti, o
altre lettere con punti al di sotto. in vece di certune che ha supplite,
nel Salm. cxii. 1 seconde Eusebio, ecc. (1); se pure qui lo spazio
non domandi Jy.vcXcYr.Tti) (2 .
Tanto basti da parte raia. Ucli. Wessely avrà doppia riconoscenza dai
critici sacri, se. dopo avère donato loro cosi piccole ma cosi impor-
tanti reliquie di un antichissimo manoscritto di Sinimaco, si com-
piacerà di chiarire sull" originale i poclii dubbi, ne' quali ci lascia la
stampa, e che mi spiace di dover soUevare.
Roma.
M^' Giovanni Mercati.
(2) Cf. TvYLOR, 31. Infatti. computando punti e i supplemenli messi dal Wessely e le
i
lettere superstiti hanno appena 23 leltere in tulta la linea, eioè sei ineno del solito. Ciù è
si
possiblle, supponcndo certe lettere molto volurninose. ma. d' ordinario, é Iroppo poco.
(3t Cf. T.wLon, 33. — Nell' uso dei fr. esaplari ho preferito quelli pervenutici per tiadi-
zione diretta o distintainenle citati da Origene e da Eusebio. agli allri di origine poco chiara.
con due o Ire sigie unité davanti, de' quali è sempre dubbio se 1' esalto tenore sia di questo
di quello interprète, e se 1'
accordo si estenda ai piii minuti particolari (conie articoli.
tempi ecc.)o stia solo nel senso e nelle frasi ail' ingrosso. Perù la scella non è spesso con-
cessa a causa délia rarità di quel casi felici.
tier d'AquHa? (pp. 64-68 dove si dimostra Simmaco autore dei noslri frammentini. Lo-
,
II
« peuple. »
A ara est le dieu protecteur est aussi le même dans les deux monu-
ments. Ce personnage est appelé Rab'el dans l'inscription de Hégrà:
dans celle de Imtàn il est désigné par le qualificatif de « notre maî-
tre titre donné d'ordinaire au roi régnant, lequel était alors Rab'el II.
» ,
dieu de notre maître, (dieu) qui est à Rosra », ne soit le même que
((A'ara qui est à Ro^;ra, dieu de Rab'el », et que par conséquent
« notre maître premier texte, ne corresponde à Rab'el dans
», dans le
^/ H
J
"l \
h\J
)L
[j^
\^
36 de Rab'el. J
j j. j . -, .
1
Fig. 1. — GrafGte nabatéende Seqeiq
i ed-Dib.
-
près du gadir de ."^eqeiq ed- -«
-
(Ij Lors de noire seconde Mission en Arabie, confiée i)ar la Société Française des Fouilles
archéologiques. Nous espérons pouvoir publier, durant le cours de l'année, les résultats
de cette expédition et de celle de 1910. En attendant nous transmettons ici tous nos
j
remerciements à Société et et à son Président, M. Babelon, qui veulent bien nous per-
la
(3) Voir aussi le nom propre Yaolt, I, p. 723 et les noms de tribu
-''f^^ yr.--^i
,
«^a^l yj y}JJi. pjj Ju, Ib\ DoREiD. 190 13. 302 19.
276 REVL'E BIBLIQUE.
Pure hypothèse sans doute, mais qui n'est pas dépourvue d'une
certaine vraisemblance. Nous la présentons pour ce qu'elle vaut sans
lui attribuer plus d'importance quelle n'en mérite; car il est pos-
(1) Si on s'arrête à la lecture 36 pour la date du graffile, celui-ci sera tout à fait des
derniers jours du règne de Rab'el, puisque c'est au printemps de l'an 106 que fut fondée la
province d'Arabie.
(2) RB., 1897, p. 289, 295 etc.
(3) Il serait maintenant difficile, et même moralement impossible, de supposer que l'ins-
cription d'Umm er-Resâs, datée de l'an 2 de Malikou, se rapporte au règne de Malikou III,'
ainsi qu'avait cru pouvoir le suggérer autrefois M. Dussaud (R. Dussald et F. Macler,
Voyage..., p. 173).
MELANGES. 277
m
DEUX EX-VOTO BABYLONIENS
Henry Marcopoli (Alep) a bien voulu m'envoyer l'empreinte en
1.
BORP
BOKD \
KEVEHS
:
^
'' mâr Na-zi-ilu Marduk ' a-na balàti-^û hu-nd ^'ni-si-e a'-ab-éi'f
278 RE\'UE BIBLIQUE.
"'
ù ur-ta-m ^su-itl-hi-mi is-ni-iiq : Au dieu Sougamouna, son dieu ((
^\^
^^ '
<^1
^
-^ *
**^
I>iî$=34-#ii
^^^ ''*'*''^ ^ l'époque gréco-
romaine comme camée et
on y a représenté une tête
(1) Cf. WiNCKLER, Milt. der deutsch. Orient-Gesellschofl, n" 35, p. 51 et HB., 1908,
p. 314.
(2) A. Jeremias, Dus aile Testament Im Lichte des Alten Orients, V éd., p. 532.
fig. 178.
MÉLANGES. 279
entre les mains — que ces ex-voto aient servi à figurer les yeux
dans une statue de Mardouk, comme on la admis quelquefois (1 .
Fr. P. DuoRME.
IV
QUESTIONS DE CRITIQUE LITTÉRAIRE
ET D'EXÉGÈSE TOUCHANT LES CHAPITRES XL SS. D'ISAIE
Suite)
Serviteur de Jahvé qui seront chantées dans les poèmes xlix ss. Et
de cette « exégèse si logique », le P. Condamin concluait que le cha-
pitre XLVIII est un poème de transition. Je soutiens au contraire qu'au
chapitre XLvni. exactement comme aux chapitres xl ss.. les " choses
nouvelles » sont, non pas précisément celles dont il sera question à
partir du chapitre xlix en opposition avec la teneur des chapitres xl
ss., mais simplement la délivrance des captifs et la restauration d'Is-
raël à amener par le triomphe de Cyrus les u choses anciennes » sont
;
(1) Le p. Condamin traduit très bien : le passé, je l'ai prédit jadis: le sens de •rxîZ
n'est pas ici d'avance, comme le contexte immédiat pourrait sembler le faire croire et
comme Skinner le comprend. 11 y a, en effet, anlilhèse entre 7x^2 au v. 3 et nnyc au
T. 6 : entre les prédictions dont les choses anciennes furent l'objet jadis, et celles concer-
nant les choses nouvelles maintenant.
(2) J'ai noté à ce propos que les prédictions touchant les choses anciennes « sont expli-
citement marquées ici comme déjà accomplies », tandis que la conquête de Babylone ne
moment, être considérée comme un fait appartenant au passé. Le P. Con-
pouvait, en ce
damin demande pourquoi la conquête de Babylone ne pouvait, en ce moment, être consi-
dérée comme accomplie? {RB., 1910, p. 206). Parce quelle est considérée comme devant
encore s'accomplir (voir plus loin vv. 14-13). « ... Dans l'opinion des critiques (qui font
vivre l'auteur d'Is. xl ss. à l'époque de la captivité), rien n'empêche, dit le P. Condamin.
de supposer un intervalle de temps entre la composition des quatre pi-emiers poèmes et
celle du poème de transition et des quatre derniers » [HB., 1910, p. 207). Il est donc en-
tendu que dans les quatre premiers poèmes, la conquête de Babylone n'est pas encore
censée accomplie. Mais il n'est pas admissible, ni dans l'opinion traditionnelle, ni dans
celle des critiques, que le prophète au chapitre xlvui, eût continué à parler de « choses
anciennes » et de « choses nouvelles », comme
aux chapitres xl-xlvii, en don-
il l'avait fait
nant à ces termes une portée ou une extension différentes. Voir plus haut 3 IL A, S**. Le —
lecteur voudra d'ailleurs se rappeler que quand je parle de la « conquête de Babylone » par
Cyrus comme terme opposé aux « choses anciennes «, je vise par là non seulement le simple
lait de la prise deBab\Ione, mais en même temps la délivrance d'Israël et le saint à pro-
curer par Cyru.v; j'avais suffisamment indiqué cela en exposant l'état de la question (IW.,
1909, p. 510). Or, jusque dans les poèmes suivants (xux ss.), le prophète continue à envi-
sager constamment la fin de la captivité, le retour de l'exil et la restauration comme encore
futurs; mais ces bienfaits, d'après le point de vue des chapitres xm\ ss., seront l'élément
préliminaire de l'œuvre du Serviteur de Jahvé. C'étaient ces mêmes hienfaïls, procurés par
l'entremise de Cyrus et inaugurés par la conquête de Babylone, qui étaient, dans les cha-
pitres XL-XLVU, les « choses nouvelles »; au chap. xlviii, où Cyrus occupe encore l'horizon
du prophète (vv. H-15), ces événements ne sont pas encore supposés accomplis; ici, pas plus
que là, ils ne sont donc compris parmi les « choses anciennes « appartenant au passé. =
(3) Je te fis connaître ninî/Gw'ri au parfait, comme au v. 5) des choses nouvelles
dès maintenant ^= seulement dès maintenant, pas autrefois, pas plus tôt, comme le pro-
phète l'ajoute aussitôt avec insistance et comme le contexte l'exige.
a) D'après Condamin, il faudrait voir ici l'annonce de prédictions nouvelles qui seroni
du chapitre xux Autrefois je t'ai prédit les choses anciennes; dorénavant je
faites à partir :
te fais entendre des c/ioses nouvelles. Ce présent serait à comprendre au sens du futur.
J'ai remarqué que celte interprétation contredit ouvertement le sens du texte « Le pro- :
phète s'exprime au parfait, "j'ir"72w*n je t'ai fait entendre des choses nouvelles... On
peut certes traduire au présent : Je te fuis entendre..., mais à la condition de donner à
ce présent une portée telle qu'il s'applique à la prédication du prophète considérée dans
toute son étendue, y compris notamment ses discours précédents dont celui du cha-
MÉLANGES. 281
dictions qui seront proclamées pour aux chapitres xlix ss., à l'exclusion
la |)reniière fois
des chapitres xl-xlvii » [RB., 1909, p. 510J. Que répond le P. Condarnin? ... Le parfait <(
peut s'employer fort bien pour une action future, si cette action est fermement résolue.
Pareil usage est même fréquent... » (RB., 1910, p. 205). Sans doute, et pas n'était besoin
de citer Driver et Kaulzsch pour le prouver. Il fallait prouver que le parfait peut s'em-
jdoyer pour une action future, quand il s'agit de signifier l'action future comme telle
en opposition avec l'action passée. Condarnin cite à l'appui de sa version Skinner. Reuss,
Driver qui traduisent au présent; mais ces auteurs n'attribuent pas à ce présent la valeur
du futur et tout est là! Il s'agit, d'après eux, de l'action présente.' X'ai-je pas moi-même
faitexpressément remarquer qu'on pourrait traduire au présent : Je te fais connaître:''
Mais n'abusons pas d'une équivoque. .\u reste, quand, après avoir dit au v. 5 « Je les :
prédis (les choses anciennes) jadis (7NC), avant l'événement je te les fis connaître
" Je te lis connaître les choses anciennes depuis longtemps, — je te fis connaître les
choses nouvelles seulement dès ce jour! » Le commentaire de Dillmann porte « Je Vai :
fait entendre des choses Le parfait est correct, parce qu'il exprime une ré-
nouvelles :
férence à ce qui a déjà été exposé dans le livre ». C'est catégorique et c'est juste.
'0 nn"Q, dans notre passage, ne signifie pas simplement dorénavant ; la particule ex-
prime, non pas par voie de pure affirmation, mais par voie de restriction, une antithèse
avec 7XQ aux vv. 3, 5; cette antithèse est marquée avec emphase aux vv. 7-8 : « .-l présent,
pas jadis... » Le sens est C'est seulement aujourd'hui que je te fis connaître des choses
:
nouvelles. Le contexte réclame ce commentaire. C'est maintenant pas jadis, que Jahvé a ,
lait connaître les choses nouvelles. « de peur que tu ne dises : voici, je les savais.'...
Car je sais que tu es rebelle!... « Si le peuple avait été instruit plus tôt des choses nou-
velles, il aurait oublié qu'il était redevable de cette connaissance à Jahvé et ne lui aurait
jias rendu la gloire qui lui revient de son œuvre. Tout le passage 3-8 expose les procédés
que Jahvé s'est vu obligé de suivre à l'égard du peuple rebelle, pour sauvegarder son hon-
neur. Jadis il lui a annoncé « les choses anciennes » d'avance, de peur que le peuple n'en
rapportât le mérite à ses idoles; et ce n'est que maintenant qu'il lui a annoncé les choses <
nouvelles », il a attendu pour cela que les événements fussent à la veille de se produire,
pour la même raison. Le prophète a évidemment en vue des événements qui, au point de
vue du peuple captif, sont imminents. Entre la i)rédiction, conçue au point de vue indi-
qué, et l'événement, il ne pourra pas s'écouler un temps assez long l'our que le peuple
puisse encore se méprendre sur l'origine de la connaissance qu'il en a reçue ou trouver
l'occasion de dédaigner les rappels qui lui seraient adressés. Or, ces événements immi-
nents, quels pourraient-ils être, sinon la délivrance de la captivité et la restauration an-
noncées comme
choses nouvelles et imminentes déjà aux chapitres xi.-xlvii (comp. xliii,
18-19...)'?Le P. Condarnin répond {RB., 1910, p. 207) que « toute cette explication pré-
suppose comme acquis le sens donné au chapitre xlviii par M. Van Hoonacker •. Pardon;
elle ne le présuppose pas, elle l'expose en serrant rigoureusement le texte. Le P. Condarnin
sais pas; 7 à présent elles furent créées d), pas jadis; et avant ce
jour tu n'en as rien entendu, de peur que tu ne dises : voici, je les
savais! 8 Tu n'en as rien entendu, tu n'en as rien su, ce n'est point
depuis jadis que ton oreille fut ouverte, car je sais que tu es rebelle
et quoii t'appela prévaricateur dès le sein. 9 A cause de mon nom
j'arrête ma colère, et pour mon honneur je me contiens à ton égard
pour ne point t'exterminer... 11 C'est à cause de moi, à cause de
moi que je le fais ... et je ne donnerai ma gloire à nul autre! (2i.
12 Écoute-moi, .lacob,... moi je suis le premier et je suis aussi le
dernier; 13 c'est ma main qui a fondé la terre et ma droite qui a
puis le chapitre xl. ou n'avait point entendu annoncer ces choses.Il veut inculquer en par-
pourquoi Jahvé, qui a déjà souvent parlé autrefois pour annoncer d'avance les évé-
ticulier
nements qui devaient se produire, a attendu jusque maintenant d'envoyer à Israël, en
termes précis, le message de la prochaine délivrance.
(1) Créées, appelées à l'existence par la parole divine. Je traduis le parfait 1X12- par le
passé : furent créées; non pas que par lui-même ce parfait ne pût se traduire elles
elles :
sont créées, de manière à signifier l'état de création mais parce que le passé, signifiant l'acte
;
de création, me semble mieux en harmonie avec le contexte et avec l'exigence des circons-
tances historiques. La « création » en vue n'est pas envisagée du coté de l'effet, car les choses
nouvelles n'existent pas encore; elle est envisagée du côté de l'acte créateur; et celui-ci est
déjà censé posé,comme il est impliqué dans la proposition négative elliptique pas jadis. :
Les vv. 9, 11 indiquent clairement que Taccomplissement des « choses nouvelles an-
(2)
noncées aujourd'hui » (6-8) marquera l'apaisement de la colère de Jahvé contre son peuple
(comp. Is. XL, 2, etc.). La colère divine s'était manifestée par la dispersion de la nation.
Les « choses nouvelles » Jahvé n'exter-
consisteront essentiellement dans la restauration :
\o) Dans le passage 12-15... Jahvé annonce le triomphe de Cyrus sur Babel. Cette procla-
mation est un développement des vv. 9 ss. où Jahvé vient de dire que c'est pour l'honneur
de son nom qu'il accomplira les « choses nouvelles ». Aux vv. 17 ss., c'est toujours la pen-
sée de la prochaine restauration d'Israël dont s'inspire le discours : si Israël avait été fi-
dèle, jamais l'épreuve de l'exil ne l'aurait atteint. Enfin, au v. 20. le discours se termine
l>ar un appel triomphal à quitter Babel, dont la ruine est imminente et certaine. — Le
P. Condamin avait traduit le v. 14 avec la ponctuation comme suit :
vance, comme c'est le cas pour rN''2 xli. 26 » RB.. 1909, p. 51 1>
Donnons à cette note de trois lignes un peu de développement.
1** XLI, 26 porte d'après la traduction de Condaniin :
[RB., 1909, p. ôlO, note 3j, savoir qu'il aurait dû paraître absurde de supposer que les faux
dieux eussent eu à prédire que celui que Jahvé aime, accomplira sa volonté! Et puisque
:
cette première raison n'a pas suffi au P. Condaniin, 2° cette autre raison que le prophète
aurait dû se servir du pronom pxT au singulier, et pas de n^X au pluriel pour exprimer
la notion qu'on lui prête. Le pronom ."T'N vise, non pas ce qui est énoncé dans, la parole
du V. l^*", mais les faits auxquels cette parole se rapporte. 3' Le contexte exposé plus haut :
ce que les Israélites sont solennelieniHnt invités à écouter, c'est l'oracle du v. li*" avec le
développement qui suit. La question incidente au v. 14^-; a pour objet de rappeler en pas-
sant que Jahvé est seul à prédire d'avance le triomphe de Cyrus comp. xu, 22-23, 27;
voir plus haut f.
II, B, 2°).
(1) n*"'^]»!"!* à la troisième personne du parfait consécutif: le succès final de Cyrus est
encore futur; litf. : il fera 7-éi(ssir sa voie. Le grec x^l cOûôto-ra. n'est qu'une traduction
libre exprimant le même sens et n'autorise pas une modification du texte. La. distinction
entre la vocation de Cyrus et l'achèvement de son œuvre est marquée en termes tout aussi
explicites, par exenjple xlvi, 11-13; voir plus haut S H, B, 6°.
.284 REVUE BIBLIQUE.
l'a prédit? D"a pas le sens Qui de vous ou de moi? et la réponse at-
:
parmi les dieux des païens?... (1). Notons en outre qu'il ne s'agit pas
dans cette question du salut d'Israël à procurer par Cyrus, mais de
l'apparition de Cyrus sur la scène de l'histoire. Or d'après mon inter-
prétation des chapitres xl-xlviii, c'est la mission de Ci/rus à l'égard
r
d'Israël qui forme la substance des « choses nouvelles » prédites au-
jourd'hui.
b) Delitzsch sur xli, 26 remarque « trxrz... in relativem Sinne ))",
:
1
c'est-à-dire : « in der Anfangszeit der hiermit zu einem Zielpunkt
gelangten Geschichte » (p. 430); Gheyne : « Fro?}i the beginning, i.
même « Wer hat voq den Gôttern von Anfang an, schon im Voraiis,
:
lisme entre les deux stiques, mais le lien logique entre les deux élé-
0"ip)2 au sens ab initio, olim, longe antea, von Allers, in der Vorzeit,
(1) Comp. Dillmann, in h. l. Aus der Anlwort ... versteht sich, dass "1Q nicht ineint
: :
wer anders als ich? sondern wer unter euch, Gôtlern? ... Dass die Siège des Cyvûs
:
lange zuvor von Jahve geueissagt worden seien, ... sleht hier nicht.
MELANGES. 28o
d'avance pour xlvi, 10. Quoi d'étonnant que "n*2 'litt, ex tune qui :
.,
that lime ("x^z should l)e rendered either beforehand or long ago.
Mais en aucun des deux cas se rappeler l'observation précédente.
sub a) il ne saurait être question de contradiction avec notre explica-
tion du chapitre xlviii.
A. VAX HOOXACKER.
Louvain. 11 mai 1910.
(1) Acta SS., tome VIII, sept., pp. 148-158. Revue de V Orient chrét., 1904. pp. 348, 356.
Croisière autorir de la mer Morte, p. 155.
(2) nap£oà/o;j.ïv îtotï tw àêoà Kypta/.'-ô r.^zaô'j-i^M r?,; ).a-jpa; lo-^ Ka/aaùvo;.
Cap. XLVI :
i
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LaJP"**'
* cessairement être en rapports
m !.. m* A s constants avec ceux de Jéricho.
L'oratoire de saint Georges
étaitprobablement la chapelle
lN(A)THArSU;TÂ?1 où Cyriaque fut enseveli et qui
la
i TûBS^- i
tion
que dans
du xenodocliium de Jéricho
la Vie de saint Sabas de Cy-
ainsi"
Les autres vestiges visibles dans le petit oratoire sont un autre frag-
ment de mosaïquage où se voient des guirlandes entrecroisées, puis
une tête de gargouille, des pierres de taille portant des traces de
peintures et d'inscriptions d'époque relativement récente, enfin des
fragments de sculptures de même époque que la mosaïque. Une épi-
taphe juive en hébrea carré, ornée d'une représentation sommaire
du chandelier à sept branches, est venue échouer on ne sait comment
parmi toutes ces ruines chrétiennes.
2. — InsciHption de Beisâii.
MAPXeMNAr.
(IJ Le p. Féderlin {La Terre Sainte, 1903, p. 310) a trouvé dans les ruines de Guilgal
une belle pièce d'or à l'efligie de Justin II. Si l'on avait encore quelque doute sur notre
manière de lire la date, il devrait s'évanouir à la lecture des papyrus de Strasbourg (Prei-
sigke), n''*46, 47, 48, où le mois de Pharnenoth (mars) de la 1^'= année de Justin II pa^iÀîia; :
ToO fitio-i-zo-j r,u.ci)v ocffnôto'j <I»X. 'lo-jaTÎvou £-o-j; TrpwTov, tombe dans la 14- indiction, tt,; T:a-
pO'jor); lô' '.vfô'.XT'.wvo:).
(2) Elle mesure 0'",61 de hauteur sur 0™, 67 de large. La hauteur des lettres est deO^jOe.
(3) Cf. Cyrille de Scythopolis, Sabx Vita, 73 : KaTx rr.v toj Osiou r.ç.z>7o-i-zov Tptir,v
aïrr,(jiv...
(r Sahae Tito : 'ApaÉv.o; oiti;.-. lo"^ DIo'jtto'ou àEiwaa l/wv. Son père Silvanus fut un
jour saisi par les habitants de Scythopolis et brûlé vif. Hisl. arcan., xwii, 5 : r,v géti; 'Apaév.o;
lIa),atffTÏvo; yévo;... à; povXrj; àEiioaa r,X6£... 6 pir/Toi Tza-rip -e y.al àôcÀsôç :?) toOtou ôyvâjxsi
6appoCvT£; Siaycyôvaffi |i.£v iv Sxy9o7;6).£i xx),. Arsenius feignait d'être chrétien, mais au fond,
était toutdévoué aux Samaritains.
(2) A propos
de l'inscription de Séleucie puliliée dans RB., 1911. pp. 117 s., on complé-
tera ainsi les deux mots tronqués de la 6" ligne ÈxaTÔvraixQv /wpTYi;... le. centurion de la
cohorte Jc. d'après la transcription analogue du papyrus de Berlin H, 423 (ii* s.), elç
Xit)p-r,v 7:pîu.av.
CHRONIQUE. 291
pendant des ostraca portant des reçus entre particuliers, des billets,
des comptes, des contrats privés.
Les ostraca de Samarie, au nombre de 75, sont écrits en caractères
phéniciens très voisins de ceux de l'inscription de Siloé pour ne
pas dire identiques aussi n'y a-t-il aucune témérité à les faire re-
:
(ô) Dans la dixième année. A Semaryô. De Tell. Une jarre d'huile fine.
(12) Dans la dixième année. De Ynsat. Une jarre d'huile fine. A Ahino'am.
Nous pouvons identifier avec assez de vraisemblance Vasat (qu'il
faudrait lire peut-être Vasit avec le village actuel de Yasid, à huit
kilomètres au nord-est de Sébastieh, un peu au-dessus de Tallouzah.
Ahino'am[\l Sam. ii, i est aussi un nom biblique.
(33; Dans la onzième année. De Sarar. A Yeda'yô, Maranyô, Gadv^ô].
(1) La numérotation est celle qu'a adoptée le professeur Reisner dans le rapport qu'il pré-
pare sur le sujet.
(
CHRONIQUE. 293
Comme nom de lieu, Sarar (1) a un bon répondant dans Deir Se-
rour, ruine située à sept kilomètres à l'ouest de Sébastleh. Yeda'yô
est l'équivalent du Yeda'yah ri"':;""!' biblique (I Chron. ix, 10). Ma-
ranyô a une bonne saveur araméenne. Gadyô peut être comparé à
Gaddiel de Num. xrii, 10.
(42; Dans la neuvième année. De Saphtan. A Ba'alzaraar. Une jarre devin vieux.
Le nouveau petit livre de M. Loisy ne cherche pas ses lecteurs parmi les croyants,
surtout parmi les croyants catholiques, dont « on ne se propose pas dinquiéter la
foi » (p. 7). On nous dit aussi que « si cet écrit n'a rien d'une publication populaire,
il est tel qu'on l'a souhaité » (p. ']. Et cependant on a eu en vue « un assez grand
nombre de lecteurs » (p. 7). Laissons de côté les intentions, dont Dieu seul est juge,
mais rapprochez ces deux termes. Tous les travaux antérieurs de l'auteur, hérissés
de discussions fort subtiles, honorablement grossis de renseignements bibliographi-
ques, et en somme assez coûteux, sont condensés en quelques pages qui présentent en
raccourci l'idée que se fait l'auteur de Jésus et des origines de l'Eglise et des évan-
giles. Si cela n'est point une publication populaire . c'est sans doute que Je populaire
trouvera, et avec raison, que c'est encore trop compliqué, et qu'il ne s'intéresse pas
à ces sortes de travaux.
En supprimant les discussions et les analyses techniques, l'auteur s'exposait à s'en-
tendre dire qu'il affirmait sans preuves. 11 semble avoir voulu répondre d'avance en
établissant que sa méthode est légitime. C'est tout l'intérêt du nouveau volume pour
ceux qui connaissent les précédents. Or je pense que M. Loisy n'a rien écrit qui per-
mette mieux, à des personnes habituées à la critique, de se rendre compte de l'ar-
une autre source qui leur est commune. Je reconnais que ces conclusions sont celles
de la plupart des critiques non catholiques. Pour ma part je n'ai rien à objecter à
cette hypothèse; depuis longtemps j'ai dit que je la regarde comme très probable.
Au regard de l'apologétique chrétienne, il suit de là que saint Marc passe au premier
rang, occupé jusqu'alors par saint Matthieu.
donc de saint Marc surtout que s'occupe M. Loisy. Il estime pour son compte
C'est
que Marc a mis à profit le recueil de discours, tout en reconnaissant que cette opi-
nion n'a pas prévalu. Sur ce point encore il n'y a pas à insister en ce moment.
Mais voici le point capital. L'étude critique de Marc a permis d'y reconnaître
quatre couches. La distinction des documents A, B, C, D est fondée sur les particu-
larités du langage, les incohérences de la composition, l'évidence, plus ou moins
nette, des superpositions. Que représentent ces documents? Le document A est « une
simple notice concernant Jésus de Nazareth, qui, après avoir recruté quelques adhé-
rents dans son pays de Gahlée, en prêchant l'avènement prochain du règne de Dieu,
a été crucifié à Jérusalem, par jugement de Ponce-Pilate comme prétendant à la ,
royauté sur les Juifs. Soit B une série de compléments intercalés dans la notice pré-
RECENSIONS. 293
cédente, et comprenant des récits de miracles, ou bien des prédictions de Jésus rela-
tives aux simples faits de la notice. Soit C une autre série de compléments destinés
à étoffer la biographie du Christ en donnant une idée de son enseignement. Soit D le
point de vue général de la compilation, tel qu'il résulte d'additions et retouches qui
semblent imputables au dernier rédacteur » p. 31 1. Mais tout cela n'est que de la
critique littéraire, et tout cela en soi n'aurait pas une grande portée, outre qu'on
pourrait toujours chicaner sur les résultats de cette critique. Il faut trouver dans les
Je confesse que pour moi conGance dans l'exercice légitime de la critique. S'il
j'ai
était établi que la critique littéraire distingue dans le second évangile quatre docu-
ments; si cliacun d'eux avait une physionomie distincte: si de plus, et c'est la pré-
tention deM. Lolsy, on pouvait désigner dans le christianisme naissant des groupe-
ments qui aient eu des physionomies correspondantes, je n'hésiterais pas à dire que
le problème littéraire et le problème historique sont résolus autant que de pareilles
branlement causé parla mort de Jésus, la foi des disciples s'est ressaisie, et ils ont cru
qu'il était le Messie, vivant auprès de Dieu: premier stade. C'est sans doute dans cet
esprit qu'où aura écrit le récit A. Ensuite ils ont fortifié cette foi par des récits de
miracles et de prophéties, document B. Enfin ils ont admis qu'il était Dieu, ce qui
répond à la situation du document D, quoique M. Loisy ne définisse pas clairement
ici son caractère.
A-t-on le M. Loisy. s'il est prouvé que
droit d'écrire ainsi l'histoire? Oui, répond
le second évangile compose de documents qui correspondent à ces états d'esprit
se
successifs, et si la tradition chrétienne, en dehors des évangiles, nous permet de
constater indépendamment ces états d'esprit.
Essayons donc cette intéressante contre-épreuve de la distinction des sources de
Marc.
Ce qu'il importe surtout de connaître, c'est « le point de départ du christianisme »
(p. 33). Il faut trouver dans la vie chrétienne quelque chose qui réponde à la
notice A. Il faut ensuite trouver la tendance à recourir aux miracles, et. seulement
après, la glorification de Jésus comme Dieu. Or on le croira à peine, c'est à saint Paul
que M. Loisy a recours pour résoudre ce problème. « Bornons-nous au témoignage
notre notice A » (p. 39. Il est ioutile, n'est-ce pas, de s'indigner de cette désinvol-
ture. Il suffit de rappeler que l'epître aux Romains a été écrite vers .50, ou peu après.
Qu'on la relise pour voir si la vie de Jésus, fils de David selon la chair, mais Fils
de Dieu selon l'esprit de sainteté, est un fait juif, un trait d'histoire locale, de mé-
diocre relief. En voulant mettre les points sur les i. pour faire concorder ses do-
296 REVUE BIBLIQUE.
ciiments avec la vie chrétienne, ^I. Loisy a perdu le bénéfice du vague de ses pré-
cédentes argumentations. Il faut en effet établir l'accord . et en prenant saint Paul
pour point d'attache, mais saint Paul tel qu'il est. Puisque les principales sentences
de Jésus n'ont été écrites, d'après M. Loisy, que vingt-cinq ou trente ans après la
mort de Jésus, et que la première esquisse de sa vie « a pareillement existé de très
bonne heure » (p. 277), donc après l'épître aux Romains, il faut simplement conclure
que jamais ce rééit, soit le document A, n'a pu être écrit par un chrétien, s'il ne
contenait ce que Paul regarde comme l'évangile commun de tous les chrétiens, la
I
foi en l'origine divine de Jésus.
Mais comment Loisy a-t-il pu croire un instant que Paul regardait l'apparition de
Jésus comme « une histoire de médiocre relief » ? Ce sont des choses qu'il faut citer.
« Qu'avait donc réalisé Jésus avant sa mort? Presque rien, évidemment. De cette
œuvre personnelle Paul ne veut point parler, mais il dit qu'il n'en veut rien savoir -,
comme il n'en peut rien ignorer, c'est qu'elle lui semblait insignifiante. Et Paul le
laisse clairement entendre. Selon lui, Dieu choisit ce qui est insensé pour confondre
la raison des prétendus sages, et ce qui est faible pour confondre ce qui se croit
fort. Jésus donc n'avait rien dit d'extraordinaire ni rien fait d'éclatant. Il avait été
crucifié : tel était, selon son grand apôtre, le seul fait notable de sa carrière...
Quelle idée commune relie ensemble Jésus. Pierre et Jacques, et ce prédicateur in- I
trépide qui déclare ne pas plus se soucier de ce qu'a été Jésus en vie que de ce qu'ont
pu être aussi en ce temps-là, auprès de lui, et ce Pierre, et ce Jacques, et aussi Jean,
qui étaient « quelque chose » dans la communauté de Jérusalem quand Paul, après
une quinzaine d'années de prédication, s'en vint les voir, pour s'assurer « qu'il ne
courait pas pour rien »? Ici p. 3.5 on cite en note Gai, 2.2. 6. Il est inutile de rappeler
,
au candide lecteur. ~
et combien candide on le suppose que l'épître aux Galates ne !
—
contient aucune comparaison entre Jésus, d'un côté, Pierre, Jacques et Jean de l'autre.
M. Loisy joint sans doute par la pensée à ce texte un autre texte qu'il n'a pas besoin
d'indiquer, puisque sa publicatioa n'est pas populaire : « Aussi, désormais nous ne
connaissons plus personne selon la chair; et si nous avons connu le Christ selon la
chair, à présent nous ne le connaissons plus de cette manière » (II Cor. 5, Kî;. Il
aurait pu ajouter que d'après s. Paul de Jésus non seulement
Phil. 2, 6), l'existence
n'avait rien eu d'extraordinaire et d'éclatant; ce fut une humiliation, une existence
d'esclave, mais de celui qui était égal à Dieu. Et si Paul parle de ce qui est dans le
monde sans considération et sans puissance, il ajoute aussitôt « Or c'est par lui que :
vous êtes dans le Christ-Jésus, lequel, de par Dieu, a été fait pour nous sagesse, et
justice, et sanctification et rédemption »... I Cor. 1, 30 Tout cela fait juif, histoire .
de médiocre relief... Plus que médiocre pour le Fils de Dieu, en effet. Mais si l'au-
teur du document A écrivait dans cet esprit, où est donc l'état primitif du christia-
nisme qui ne regardait Jésus que comme un pur homme, devenu iMessie après sa
mort? Et s'il le regardait comme un pur homme, lui écrivant après s. Paul, de quel
droit le regarde-ton comme témoin du premier état religieux du christianisme? Et
enfin, et surtout, où est la concordance annoncée entre la succession des documents
et la successiondes idées d'après s. Paul?
ne serait pas loyal de taire un argument sur lequel M. Loisy paraît compter
Il
beaucoup pour prouver à quel point l'action de Jésus a été insignifiante. Cet argu-
ment pourrait même faire impression, car il ne repose pas comme le précédent sur
une aussi hardie combinaison des textes. C'est un fait notoire que Jésus n'avait pas
tranché explicitement la question de savoir si la foi en Jésus dispenserait de la Loi
juive. « Dans ce contlit, ce qui est très significatif pour nous, c'est que l'autorité de
RECENSIONS. 297
Jésus ne peut être alléguée par aucune des parties contendantes. Le fondateur pré-
sumé du christianisme ne compte pas dans ce débat où se joue l'avenir de sa re-
ligion... Voilà déjà un fait capital pour rmtellisence des Évangiles » p. 34).
Sans doute, cela est capital. Et en efl'et Jésus n"a pas donné la solution explicite;
on ne pouvait citer de lui aucune parole sur cet objet précis. Mais la tradition sur ce
point a-t-elle changé? elle qui transforme, qui superpose, qui précise, qui amplifie.
(]ui magnilie. comment est-elle demeurée muette? Que vient faire ceci quand il s'agit
de prouver que la tradition évangélique se compose de plusieurs couches.' N'est-ce
pas plutôt l'occasion d'admirer son extraordinaire stabilité? Ce qu'elle a dit. c'est
que Jésus avait conféré toute autorité à Pierre et a ses apôtres, et c'est bien eux en
effet qui se croient investis du pouvoir de résoudre cette question. Et ils l'ont ré-
solue précisément dans les lignes d'une pensée de Jésus que M. Loisy regarde comme
authentique : « Il suit de là que le droit au royaume en tant que droit il y a. ne se
fonde pas sur la qualité d'Israélite et ne la suppose pas nécessairement... L'admission
des Gentils ne comporte donc aucune difficulté de principe. Ceux qui se trouveraient
dans les dispositions moralfs que Dieu demande pourraient avoir part au royaume,
tandis que les Juifs qui n'ont pas ces dispositions invoqueront inutilement le titre de
leur origine» etc. ;p. 134 . Mais n'est-ce pas précisément là le point de départ de
l'épitre aux Romains? Jésus compte ici doublement, et pour sa pensée et parce que ,
attaché une importance capitale à l'apparition sur la terre du Fils de Dieu, et que
s'il n'a pas parlé des détails de sa vie, c'est qu'aucune de ses épîtres n'a eu pour but
de la raconter à des disciples qu'il savait déjà convaincus. Mais il est du moins une
action de Jésus à laquelle Paul apporte un témoignage positif : c'est l'institution de
la Cène ^K Vous concluriez que la tradition évangélique qui la rapporte est con-
temporaine de la première épître aux Corinthiens? Erreur, car aussitôt largumen-
tation tourne c'est à Paul que cette relation qui se présente comme historique est
:
empruntée, et elle fait partie des dernières couches de la rédaction. Quand Paul ne
dit rien, il confirme-, quand il parle, cela ne prouve rien, car c'est lui qui a inventé.
Toujours est-il que, aux environs de l'an 50, grâce à Paul ou sans lui. on était aussi
avancé en christologie que tout l'évangile de s. Marc. La méthode est excellente,
il n'y a qu'à constater son résultat. Non seulement s. Paul n'autorise pas la distinc-
tion des documents A et D: il prouve que dès l'an ôO on était en D. « C'était donc,
dirions-nous pour emprunter les termes de M. Loisy. ce que croyait, ce que savait
la première génération chrétienne » (p. 39;.
11 n'est pas moins impossible d'établir la distinction entre les documents A et B et
même, non de la tradition des témoins, etc. » page 216 Ce et pour cause insinue même . > «
que Paul a feint une révélation pour combler la lacune. On sait que l'interprétation de
à~o Toô y.'jpîo'j est fort controversée, même parmi les critiques non catholiques. Ceux mêmes
qui soutiennent que Paul dit tenir cela du Seigneur n'excluent pas pour cela l'intermédiaire de
la tradition, qui est caractérisée par le détail précis des faits.
208 REVUE BIBLIQUE.
leur concordance avec des états distincts de la pensée chrétienne. D'après le passage
que nous avons A est une histoire sans miracles, B un complément
cité, on dirait que
qui ajoute des miracles. Mais M. Loisy admet que Jésus a fait des miracles, c'est-à-
dire des exorcismes guérissant des troubles nerveux ou cérébraux qui ont passé pour
des cures merveilleuses d). Si cela est, pourquoi A ne les aurait-il pas rapportées?
Des miracles sont encore l'explication la plus simple , on peut dire l'explication
nécessaire, de la foi des disciples en Jésus comme Messie.
Il faudra donc que B soit seulement une amplification des premiers miracles. Rien
de plus plausible, et de fait Luc et Matthieu ont ajouté des miracles à ceux de Marc.
Mais où est la contre-épreuve de la distinction de A et de B dans saint Paul qui ne
dit pas un mot des miracles ni des exorcismes de Jésus? Quant au documente,
M. Loisy ne parait pas le regarder comme plus ancien que le document A. Et en effet
il ne marque aucun progrès dans la foi l'un contient des sentences, l'autre des ré-
;
cits.
la langue, et s'imagineront que M. Loisy a fait sur Marc un travail analogue à celui
qui a été fait sur le Pentateuque ; or je ne sache pas qu'il ait rien écrit là-dessus.
Mais peut-être que par langage il L'argument tiré des différences
entend le style.
du style n'est certainement pas sans valeur. Mais doit être permis d'affirmer avec
il
d'excellents critiques qu'il ne s'applique pas à Marc, dont l'unité littéraire est aussi
certaine que celle de I^uc. Puisqu'on n'est pas même d'accord sur l'usage par Marc
du recueil des discours, comment pourrait-on discerner quatre couches dans sa ré-
daction, si l'on ne prend précisément pour critérium l'évolution qu'on prétend appuyer
sur les sources?
J'ai m'a paru le plus neuf dans le nouvel ouvrage de M. Loisy.
insisté sur ce qui
Jamais il crûment des documents évangéliques « Est-on sûr que
n'avait parlé aussi :
des récits vienne de l'apôtre Pierre par son disciple Marc? En aucune façon. Peut-on
se fier à des inconnus dont on ignore s'ils étaient bien renseignés et s'ils méritent
confiance? » (p. 22). Sentant bien au sujet des
qu'il ébranlait ainsi toute certitude
origines chrétiennes, il s'est efforcé de rendre aux documents quelque crédit en les
considérant comme les organes d'une société vivante. L'idée était bonne, mais il n'a
pu trouver dans les faits l'appui d'un système d'évolution rationaliste. Les documents
tels qu'ils sont valent ce qu'ils valent ; on ne saurait les remplacer par d'autres. Mieux
vaudrait confesser simplement qu'on écrit d'après un schéma rigoureusement tracé
par la raison : au début, une histoire plausible, parce que dépourvue de tout élément
(t; p. 61 ; « Jésus enseignait et il (aisait des miracles >. 1'. a-l : « Il agissait avec une elficacité
particulière sur la catégorie île malades que l'on regardait comme spécialement possédés du dé-
mon, les malheureux atteints daffeclions nerveuses et de troubles cérébraux, de dérangements
d'esprit ». D'après ce critère, le possédé de Gérasa appartiendra àla plus ancienne rédaction, le
paralytique, le lépreux, l'homme à la main desséchée, la belle-mère de saint Pierre seront ren-
voyés à la seconde couche. Mais quand nous l'era-t-on grâce de l'explication des affections ner-
veuses ? j
RECENSIONS. 299
mais il ne serait rien de plus, incapable, à l'inverse des grands hommes, de profiter
des leçons des choses, qui « arrive tout formé pour sou rôle quand il commence à
prêcher » ip. 80;. et qui, incapable de secouer son idée fixe, vient se buter contre
l'obstacle. Du
moins sa mort le préserva de l'échec qui l'attendait, car elle permit à
ses disciples de lui donner le trône que sa propre foi lui avait promis » p. 40\
«
Pour ces disciples, c'est un peu plus compliqué. Tantôt la mort de leur Maître n'est
qu'un accideut. ^rave sans doute et troublant, mais réparable p. 114 et qui ne les i
,
a pas empêchés d'affirmer avec force le Christ vivant, tantôt la mort inattendue,
foi ne retrouva son assiette que dans la croyance à la résurrection du crucifié p. 194''.
tain, tant il redoutait de passer pour a béotien », comme il disait. Ayant l'habi-
tude de concilier les contradictoires, il avait conscience qu'avec sa méthode on ne
pouvait pas être bien sûr de son fait. Sou scepticisme sur son œuvre devient une
marque de bon goût, et on lui en sait presque bon gré. M. Loisy. lui, paraît bien
persuadé d'avoir reconstitué le fait évangélique dans sa « forme native . On est
déconcerté de cette assurance, et plus d'un lecteur est aussi ébahi de sa confiance
dans cette œuvre d'édification, que de l'entrain avec lequel il démolit la vieille his-
toire. Évidemment il est siucère et il est convaincu, et quand il nous dit que son
livre est « un livre honnête » p. 47 , il faut l'en croire. Attendons-nous à entendre
dire — mais n'est-ce pas déjà monnaie courante? — qu'on ne peut écrire de livres
honnêtes que lorsqu'on a rompu avec l'Eglise. Tout de même l'Eiani/IJe et l'Eglise
était aussi un honnête livre, et cependant les mêmes idées, qui ne s'adressent plus
aux catholiques, servaient alors à l'ÉgUîe de rempart contre M. Harnack. M. Loisy
se faisait donc à tout le moins une étrange illusion. Son illusion n'est pas moindre
aujourd'hui d'accorder tant de crédit à des combinaisons précaires pour représenter
l'évangile dans sa forme native. On préférera s'en rapporter aux Evangiles que l'É-
Jérusalem.
Fr. M.-J. Lagranc.i:.
BULLETIN
Tsouveau Testament, les quatre petites épîtres catholiques dans la version philoxé-
nienne originale, du vi'^ siècle, et l'histoire de la femme surprise en adultère (Jo.
7. 53-8, 12). Les quatre petites épîtres catholiques, 2^ et 3« de s. Jean. 2^ de
s. Pierre et s. Jude, ne figuraient pas dans la version pechittâ, qui était devenue la
pris de rendre lesmoindres particularités du texte original. C'est aussi ce que fit Tho-
mas de Harkel, dont la version est un calque qui serait incomparable comme ins-
trument de critique textuelle s'il était phis ancien, tant il reproduit avec fidélité le
texte grec que Thomas avait sous les yeux. La version philoxénienne devait natu-
rellement tenir le milieu entre la pechittâ et la harcléenne, ou comme on dit de
préférence en français, l'héracléenne. Ces faits sont aujourd'hui bien connus de
tous. M. Gwynn devait les rappeler pour préciser la nature de son travail. Il établit,
plus solidement qu'on ne Tavait encore fait, que la traduction des quatre petites
épîtres catholiques publiée pour la première fois en Occident par Pococke en 1630 est
bien la traduction philoxénienne, avant la revision de Thomas de Harkel. Pour
cela, M. Gwynn prouve d'abord que le texte supposé philoxénien et celui de Thomas
appartiennent bien à une seule version. C'est le point le plus important et le plus
délicat, car il est facile de constater que le texte harcléen a précisément le caractère
d'une revision plus rigoureusement conforme au grec. Ce qui augmente la difficulté,
(1) Reinnants of tlie latcr syriac versions of Ihe Bible in t>M' |)arts. l'art I New Testament, the
;
four minor catholic epistles in llie original Pliiloxenian Version, cl the Sixtli Century and the
history ol" the woman taken in ailultery (St-.Iohn 7, o:i-8. 1-2. Part II 0I<1 Testament, extracts
:
(hitherto inediteti) Irom the Syro-Hexaplar Version, of tlie Seventh Century. after Uie Greek of the
L\X. Genesis I.eviticus 1 et :i Clironicles Nehemiah, Kdited. ^^ith Introductions. Notes, and
: : :
Reconstructed (ireek Text by John Gnvvnn, D. D. (Dnbl.). Hon. D. G. L. Oxon.) Regius professor of
Divinity in Ihe University of Dublin, in-S" de i.xxii-161, et xxni-78 pp. Published for the text and
translation Society by Williams and Norgate, Londres et Oxford, l!K)'J.
BULLETIN. 301
rendre hommage au tact philologique très sûr et à la méthode très exacte qui mar-
quent toute cette discussion. L'auteur, se proposant d'éditer les quatre petites
épîtres, adû réunir le plus grand nombre possible de manuscrits et les classer. Dans ce
classement il a dû aussi examiner la théorie étrange du défunt prof. Merx, pré-
férant les mss. les plus récents, pour cette raison qu'ils sont appuyés par une
version arabe conservée dans un ms. attribué au ix.*^ siècle. Le paradoxe de Merx
est réfuté avec une précision parfaite. Il est donc assuré que M. Gwynn, s'appujaut
sur des mss. plus anciens et meilleurs que ceux qu'on avait employés jusqu'à pré-
sent, a donné des quatre petites épitres catholiques une édition très supérieure à ce
que l'on possédait. Cette édition est à la fois plus semblable que les précédentes et
au consensus des principaux mss. grecs et à la version harcléenne elle-même.
La version philoxénienne, mieux connue, rend donc à son tour témoignage aux
grands onciaux (1). L'édition des textes syriaques est accompagnée de notes indi-
quant les variantes, et suivie de notes rapprochant le texte philoxénien du grec et
des autres textes syriaques, de plus d'une retraduction en grec, indiquant, autant
que faire se peut, le texte que le traducteur avait sous les yeux. De sorte qu'on peut
dire que nous ne possédons aucune partie de la Bible syriaque éditée avec plus de
soin, et d'une façon plus utile aux biblistes, même à ceux qui ne savent pas le
syriaque.
La péricope de l'adultère est reproduite sous deux formes différentes, l'une re-
montant à un abbé Paul, du vu" siècle (2), l'autre d'après le texte fort divergent,
conservé par la Chronique de Zacharie de Mitylène.
La deuxième partie de l'ouvrage de M. Gwynn est consacrée à des fragments
inédits de la version syriaque syro-hexaplaire de l'A. T. exécutée par Paul de Telia
au début du vu" siècle. L'auteur rappelle quelles parties sont déjà éditées, quelles
autres manquent encore, à savoir une grande partie de la Genèse, le Lévitique, le
La Revue a signalé (1908, 4.50 s.) l'heureuse acquisition par M. Charles L. Freer
de quatre manuscrits bibliques fort importants. M. Henry A. Sanders, de l'Univer-
sité de Michigan, a été chargé de les publier. L'ouvrage qui vient de paraître (3)
est consacré au premier manuscrit, comprenant le Deutéronome (sauf 5,16-6,18) et
Josué (sauf 3, 3-4, 10). On n'est toujours pas fixé sur son origine. Mais, d'après
M. Sanders, les quatre mss. acquis à Gizeh (le 19 déc. 1906) ne s'étaient pas beau-
(1) Surpassages étudiés, la philoxénienne coïncide avec N 05 fois, avec A 60 lois, avec B 53
Ii:>
fois, etc.,dans des cas où les principaux onciaux ne sont pas d'accord entre eux.
(2) yu'il soit Paul de Telia ou son contemporain l'aul qui (en 6-24 en Chypre) traduisit s. Gré-
goire de Nazianze en syriaque.
(3) ïhe old Testament mauuscriptsin tlie Freer collection. Part I The Washington manuscript :
of Deuleronomy and Joshua, by Henry A. Sandeiss, University of Michigan^ in-4» de 104 pp. New-
York, the Macmillan Company, 1910.
302 REVUE BIBLIQUE.
coup éloignés de leur lieu d'origine. Ce serait le monastère des vignerons, près de la
troisième pyramide, qui possédait une église de Timothée. Les quatre mss., achetés
dans quelques monastères grecs, avaient été réunis et n'ont plus été séparés jusqu'à
leur récente découverte. Le Codex contenant le Deutéronome et Josué est destiné
par M. Freer à la Smlthsoninn Institution de Washington, D. G.; il portera donc le
texte du ms. D'ailleurs, en même temps que ce travail doit paraître une édition en
fac-similé.
(1) Bible abrégée, à l'usage des gens du monde et des maisons d'éducation secondaire, Extraits
de la traduction de l'abhé A. Ci;ampun, in-8° de 71-2-[-2l"] pages. Desclée, Paris, Rome, Tournai,
BULLETLN. 303
(p. i\, note), mais parce qu"il sera « plus facile de comprendre ces prophéties en
leur donnant le cadre même des événements qu'elles prédisent p. 434. A ce
.>
compte, il eût fallu placer Daniel plus loin, et non avant, puisque la prophétie 9.
1--27 se rapporte, comme le dit très bien lannotateur, au temps d'Antiochus Kpiphane.
Si la traduction est celle de Crampon et de ses successeurs, les notes sont parfois plus
récentes: on eu trouve qui citent le Canaan du P. Vincent p. S2, lô2i. L'ensemble
est très satisfaisant (1), et permettra à tout le monde de lire les plus beaux passages de
la Bible. On peut acquérir séparément l'Ancien et le Nouveau Testament, ce dernier
étant naturellement plus complet. Les évangiles synoptiques sont distribués de
façon à constituer une Vie de Jésus.
Voici un petit volume d'une allure très modeste, puisque, vendu eu gros, il ne coûte
que 30 centimes. Et ce n'est rien moins que les Evangiles et les Actes ((es Aj)ô-
tres Encore n'est-ce pas un simple tirage de propagande. Quelques prêtres
(2\
ont eu l'heureuse idée de former en France une filiale de la Société de saint Jérôme,
approuvée par Sa Sainteté. Ils ont traduit du grec en français les textes qu'on vient de
dire, d'après l'édition de Nestlé, tout en revenant à la Vulgate dans les cas où la
discordance est trop sensible: mais alors on avertit en note 3 Aux notes traduites .
en français de l'édition italienne, les éditeurs en ont joint quelques autres, marquées
d'un astérisque. La traduction est vive et alerte, d'un français assez coulant, plutôt
que très littérale, beaucoup moins littérale que Crampon, pour prendre un point de
comparaison.
doter; on peut dire qu'ils en recueillent des maintenant le fruit, surtout pour ce qui
concerne la défense de notre Foi. Où trouverait-oii, de préférence, des maîtres assez
connus par une érudition de bon aloi pour parler avec autorité dans les questions
soulevées? où trouverait-on, en dehors d'elles, des chaires entourées de l'auditoire
intelligent qui ne saurait se contenter des développements toujours un peu vagues
donnés daus les églises ? Entre la prédication et le cours technique, il v a place
pour des discussions très serrées, sans étalage de textes en langues anciennes. C'est
bien ce qu'on a compris, surtout, semble-t-il, à Paris, à Toulouse et à Lyon, où les
conférences bibliques ont eu un vif succès.Ne serait-il pas à propos de les produire
en dehors des grands centres, dans une chaire spéciale, dressée par l'Évéque,
aussi,
comme M='' Gibier l'a fait avec un si heureux succès, répandu partout avec Orp/tem
et l'Évanf/ile de M'^-'"' Batiffol ? Quoi qu'il en soit, venons aux excellents livres qui
nous parviennent de Paris et de Lyon.
M. Mangeuot a donné au trimestre d'été de lUlO des conférences apologétiques
sur les évangiles synoptiques. Elles ont été éditées avec deux appendices, articles
extraits de la Revue du Clergé français 4). Les conférences sont au nombre de neuf;
elles portent sur la tradition évangélique, la rédaction et la valeur historique des
synoptiques, la conception virginale de Jésus, son ministère public, ses miracles, la
forme de son enseignement, son témoignage sur sa mission et sa personne, son procès
et sa mort, et enfln sa résurrection. L'intention apologétique s'exerce par la réfuta-
tion des opinions de M. Loisy, qui est constamment résumé et souvent cité. Son
influence est donc toujours regardée en France comme redoutable. A ce qu'on assure,
un bon nombre d'esprits, d'abord séduits par ses déductions ingénieuses, commen-
cent à s'étonner de l'intrépidité de ses affirmations. M. Mangenot, esprit calme et
pondéré, excelle à signaler ces intempérances de subjectivisme. Il sait d'ailleurs faire
la partde la critique. On aime à l'entendre dire « Rien du côté de la plus sévère :
orthodoxie n'interdit de reconnaître que lÉvangile de saint Marc est le plus ancien
des Synoptiques et a servi de source aux deux autres tels que nous les possédons »
(p. 47 . Sur la méthode : « 11 y a donc lieu de distinguer, dans les Synoptiques, ce
qui appartient à la tradition primitive et ce qui est secondaire dans la tradition évan-
gélique; il est juste de faire, dans leurs récits et même dans les discours qu'ils rap-
portent de Jésus, le départ de ce qui est réel ou interprétatif, de ce qui a été réelle-
ment dit par le divin Maître ou de ce qui est un développement ultérieur de la tra-
dition ou l'œuvre des évangélistes dans la rédaction des faits et des paroles qu'ils
tenaient de la tradition » (p. 69i. On eût aimé voir M. Mangenot faire l'application
de ce critère aux récits de l'enfaDce. Mais il s'est contenté de réfuter les objections
littéraires contre le dogme de la conception virginale. Quant aux récits si différents,
selon s. Matthieu et selon s. Luc. il se contente de dire : « Afin de pouvoir nier leur
historicité, les critiques les déclarent inconciliables. J'estime qu'ils le sont en effet,
M. Mangenot n'a pu se résoudre à suivre .M. Belser qui fixe à une année le minis-
tère public de Jésus.Il est en effet bien chimérique de tenter la réduction des don-
nées de Jean à une année. Son explication du but des paraboles est dirigée à la
s.
fois contre M. Loisy et contre le Révérendissime Père Fonck. Elle coïDcide à peu
près avec celle qui a été proposée dans cette Reçue [l) cependant M. Mangenot -,
admet que Jésus, qui avait d'abord parlé en termes clairs, inaugura à un certain
moment un nouveau genre de prédication. Ce sont les paraboles relatives au royaume
de Dieu qui ne sont pas claires, les autres pouvaient être comprises de tous. « Jésus
n'a donc pas distribué un double enseignement, exotérique et ésotérique, mais un
seul, public et le même pour tous, compris des uns, incompris des autres, selon les
dispositions bonnes ou mauvaises, qu'ils apportaient à l'entendre » (p. 245). C'est,
nous semble-t-il, méconnaître la pensée si nette de s. Marc sur l'enseignement spécial
donné aux disciples.
Les Facultés catholiques de Lyon ont suivi l'exemple donné par Toulouse et par
Paris. En 1909, MM. Bourchany, Périer et Tixeront ont discouru du Modernisme, de
la Trinité, de la Divinité de Jésus-Christ. En 1910, MM. Jacquier et Bourchany ont
abordé de plus près les questions bibliques en traitant de la Résurrection de Jésus-
Christ et des miracles éxanrjrliques [2). La défense des récits de la Résurrection par
M. Jacquier se tient dans les mêmes lignes que celle de M. Mangenot à Paris et de
M^''' Ladeuze à Louvain. Et cela devant un auditoire étendu, avec la bienveillante
sympathie des autorités ecclésiastiques. Ce fait est à citer aux personnes qui ne veu-
lent pas voir les progrès... de l'exégèse qui croit au progrès. M. Jacquier donne
comme un résultat assez assuré pour être proposé à tout le monde, que les évan-
gélistes ont suivi des sources, et que les deux principales sources de s. Luc et de
s. Matthieu, c'est s. Marc et le recueil de discours (p. lO;. Il dit aussi que la finale
de s. Marc « n'est pas la suite naturelle de ce qui précède » (p. 54). Il ajoute, il est
vrai, que cet appendice « a dû être ajouté par l'auteur lui-même », sans s'expliquer
sur les motifs que pouvait avoir s. Mjrc de ne pas donner à son texte sa suite natu-
relle. On ne voit donc pas pourquoi AI. Jacquier lui-même " a dû » proposer cette
leur a sans doute paru que le meilleur moyen d'exiger la même réserve de la part de
leurs adversaires était de témoigner dans la discussion des scrupules qui n'excluent
pas la fermeté dans la couclusion. Ils opinent toujours que le secoad évangile a servi
de source à notre saint Matthieu grec, et disent assez clairement que la finale de
Marc (16, 9-2o;. canonique et inspirée, cela va sans dire, n'est pas du même auteur
que l'évangile. Ils estiment plus probable que le ministère public de Jésus a duré
plus de trois ans. Sur le jour de la mort du Christ, 14 ou 15 nisan, ils ne se prononcent
pas.
La question des rapports de Philon avec saint Jean est assurément une question
ouverte. Mais il y a la manière. faudrait d'abord bien lixer les grandes thèses de
Il
Philon. puis les comparer à la théologie johannine. M. Jean d'Alraa 4) procède plu-
tôt par rapprochements verbaux, ce qui est naturellement plus impressionnant pour
le public, mais moins décisif pour les critiques. Il regarde comme acquis que le
Logos de Philon profondément imbu de théologie égyptienne. Cela est tout à fait
est
contestable. Par contre il ne se préoccupe pas de ce que Philon a pu emprunter
à la
Bible, même dans sa conception du Logos, et le fait de cet emprunt est cependant
certain. Par un artifice littéraire très inotîeosif. Philon met dans la bouche des per-
sonnages bibliques l'explication allégorique de leurs actes. M. Jean d'Alma imasine
que c'est de la sorte que saint Jean a créé ses scènes. Il y a pourtant cette diCférence,
que Philon se donne pour un philosophe exégète qui allégorise, et saint Jean pour
li
306 REVUE BIBLIQUE.
Il parait qu'il est nécessaire en Allemagne de prouver que Jésus a existé. C'est que
la Sozialdemokratie s'intéresse plus aux questions religieuses théoriques que nos
socialistes français, et qu'elle a la prétention de s'attaquer à l'histoire. M. ï'ranz
Mefïert a donc écrit : l'existence historique du Christ (1), en insistant sur l'indépendance
des évangiles par rapport au Bouddhisme. Sauf Napoléon !) cité en bonne part, les
noms français ne figurent ici que comme avocats du diable Yves Guyot. Loisy (2), :
Burnouf, Hochart. Jacolliot, Renan, Voltaire. Il va sans dire que les travaux de
M. de la Vallée Poussin et son bel article de la ReiU'' Bibliqve 3) n'entrent pas dans
l'horizon de l'auteur. Peut-être estime-t-il que les Allemands croiront plus volontiers
au Christ, si ces diables de Français n'en font rien, en dépit de ]N'apoléon, « le grand
Corse » ? Pour nous, nous sommes heureux que la question ait été aussi bien traitée,
et nous saluons avec sympathie la nouvelle série de brochures apologétiques (4).
quelque roman pieux; en réalité on traite surtout des apparitions du Christ ressus-
cité. C'est évidemment une tentative de les rendre croyables en les atténuant au —
point de les éliminer, —
aux personnes qui expliquent tout par le subliminal et la
subconscience. De cette façon les cinq cents frères qui ont vu le Seigneur d'après
s. Paul ont été l'objet de l'action de l'Esprit du Christ, individuellement et peu à
peu, et ils ne se sont groupés que pour la Pentecôte. Tout cela est tellement spécial,
avec des inductions si subtiles d'après les apocryphes, que pour discuter la thèse il
figure dans un apocryphe arabe {Mythological Acts ofthe Apostles, de Mrs. Lewis,
p. 157) s. Jean l'a tué pour le punir d'un crime, et l'a ressuscité, et dans l'intervalle
:
il a eu une vision.
Nous pensions trouver dans VHistoirc politique et relir/ieuse de l'Arménie, par Fr.
(1) Die geschichtliche Existenz Cliristi.MmDr. tlieol. Franz MEFFF.r.i, ia-8" de 191 pp. M. Glad-
bacii, 1910.
(-2) Rangé parmi les protestants à la p. "8.
(3) Le boudhismc et Irs Evanç/iles ranoniques. 1906, p. 333 ss.
(4) lu autre caliier est consacré à l'esclavage et l'ancienne Église, Sklavenlos v.nd aile
Kirche. von Dr. .Ailfons Stf.inman.n.
(S\ The vision of the young maii Menelaits, studies ofPentecost and Easter, by the author of
t Resurrectio Christi », petit in-8" de xxv-2to pp. London, Kegan Paol, Trench, Triil)ner, 1910.
(6) Sainte Marie-Madeleine, La tradition et la Critique, in-!6 de 3-20 pp.; Sa vie, 318 pp.; Son
culte, 3W pp. Paris, Savaète, 1910.
BULLETIN. 307
ïournebizei 1). quelques détails intéressants sur les versions arméniennes de la Bible.
Tout ce point tient en une page 'p. 63.5 >~ous ne pouvons donc que signaler cet
.
On oublie pour un instant que les Origines de la théologie moderne n'entrent guère
dans le cadre de cette Rerue pour dire toutbien qu'on pense du premier volume
le
que nous donne M. l'abbé Auguste Humbert, traitant de \dL Renaissance de rantiquilc
chrétienne (1400-1.521) '2). Encore est-il que la position prise par Érasme, admirateur
de s. Jérôme, et la réaction anti-intellectuelle, anti-historique de Luther, qui pré-
tendit s'appuyer sur s. Augustin, ne laissent pas de fournir de précieuses lumières
sur la question biblique. M. aux anecdotes, ni même
Humbert ne s'arrête pas
et —
peut-être y a-t-il là une lacune —
aux études psychologiques, mais il sait tracer les
courants doctrinaux, et en s'appuyant sur les sources. Il eût rendu service aux pro-
fanes en disant oii en sont les éditions des grands réformateurs. Le livre appartient
à la « Bibliothèque théologique », mais il touche de si près à l'histoire qu'un peu de
bibliographie ne serait pas de trop. Après cet essai, on peut attendre beaucoup de
M. Humbert; c'est un historien de race dont les débuts ont fait honneur à la Revue
des sciences •philosophiques et théologiques.
les éléments de la description du peuple vengeur, ce peuple demeurait caché dans les
il) Depuis les origines des Arméniens jusqu'à la mort de leur dernier roi il'an 1393), grand in-S"
mise en grande partie sur ses lèvres (3) et d'appliquer le même critérium aux Pro-
verbes. Quant à prétendre avec le P. Coruely que l'auteur de la Sagesse a mis eu
œuvre des ouvrages perdus de Salomou, c'est une de ces échappatoires qui ne satis-
et la supériorité de son œuvre tient précisément à ce qu'il n'a pas hésité à expliquer
le texte grec. Il s'exprime assez durement sur le compte du traducteur latin (5), et si
(1) Commentai' iu s in librum Sapienliae auctore Rudolpho Cornei.y, S. I., opus postumum
edidit Franciscus Zor.ELi., S. I., in-8" de iv-Oii pp. Paris, I-ethielleux, 1940.
(i) Zorell. p. m :quum auctor... quo tnagis aulem opus procedebat, eo sœpius ac coiiDdentius
alteram libri parleni illi régi nomioatim attribueret ».
• litulus autem SapieiUia Salomoiiis » (qui non est idem ac • liber Salonionis de Sa-
(3) P. 2 : •
pientia ») apte operi pnBlixusesl quod in sapientissimi régis sapientia explananda et inculcanda
totum versatur •. —
Avec cet argument on pourrait distinguer • La loi de Moïse » et « le livre de
Moïse sur laLoi », ce qui serait sans doute contraire à la pensée du R. 1'. Cornely.
(4) 11 ne peut être question en pareil cas d'un simple changement dans la l'orme, p. -j » Auctor :
ergo, uti temporum condilio ferebat, doctrinam traditam ita in novam l'orman redegit, ut vêtus
ex ea luceat. »
(o) «Imperito indisertoque... ita ut nonnuilis in locis obscurior impeditiorque sit alque vix
intelligi (jucat nisi primigcnio textu in auxilium vocato », p. .'il.
BULLETIN. 309
Oa sait assez que l'illustre maitre était un helléniste bien informé, et l'on regrettera
seulement qu'il n'ait point relevé dans les papyrus des expressions propres à mettre
dans tout son jour une langue écrite en Egypte. Assurément le commentaire est
abondant, et le R. P. Zorell qui l'a abrégé semble le juger encore trop long. Cepen-
dant on ne saurait le taxer de verbiage. Un livre biblique de cette importance devait
être étudié de très près, et. comme il est très difGcile, on ne se plaindra pas que
Il va sans dire aussi que cette interpré-
l'interprétation soit poursuivie dans les détails.
non sans de certaines inconséquences. Par
tation est très strictement Jitteraliste,
exemple l'auteur admet que la femme de Lot n'a pas été changée en statue de sel.
C'est son cadavre qui a été recouvert de sel, et les flots de la mer, accumulant le sel,
ont fini par former une statue. Et cependant il n'ose décider si la statue dont parlait
l'auteur de la Sagesse est la même que celle qui fut formée au temps de Lot: il ne
serait pas prudent de se prononcer là-dessus (1\ Mais n'est-il pas plus probable que
les intempéries ont défait en plusieurs siècles ce qu'elles avaient fait d'abord? De
même le P. Cornely admet que la ruine de la Pentapole a été causée par des érup-
tions volcaniques, ce qui ne répond pas littéralement au texte de la Genèse (2). Mais
il tient à maintenir le sens propre du livre de la Sagesse (10, 7) : à cette époque, la
terre « fumait », comme fume une fournaise; on n'a pas le droit de voir dans cette
fumée la vapeur constatée par les modernes. Depuis ce temps la terre s'est refroidie,
voilà tout.
Encore un exemple. Le texte dit (16, 21) que la manne « se transmuait en ce
que chacun désirait ><. Les littéralistes les plus déterminés ont imaginé, dit Calmet.
« qu'il se faisait à tout moment dans la manne un changement réel de sa substance,
en celle que l'on désirait ». Le R. P. Cornelv ne va pas jusque-là, mais il admet
que la manne prenait en effet le goût que chacun désirait, puis il restreint très
arbitrairement ce privilège aux seuls justes, alors que les fils (de Dieu) sont ici pour
le peuple d'Israël. Autant vaudrait faire passer le texte au laminoir du bon Calmet :
la manne « était tout ce qu'on pouvait désirer, elle leur tenait lieu de tout, elle
était équivalente à toutes les plus excellentes nourritures ».
Dieu.
(1) p. 38C . utrum illa ipsa sit, qu.t Loli tempore exorta est, neque
: prudeater affirniari potest
neque prudenter negari ». Et cependant Calmet disait déjà « L'Auteur s'exprime suivant la tra- :
dition de son temps, ou l'on montrait encore le monument de la femme de Lot changée en statue
de sel. »
Salomon que 10, 1-22, 16 et aux témoins du roi Ezéchias 25, 1 29, 27.
Mais il est assez évident qu'il n'a pas voulu discuter la question des auteurs ni de
l'époque où l'ouvrage a été composé sous sa forme actuelle. Il s'amuse sans doutej
'
lait de chèvres (Prov. 27, 27), et en répondant que les rois ne sont pas obligés de
s'en tenir aux menus qu'ils écrivent pour les bergers. N'y avait-il rien à dire sur les
points beaucoup plus graves et plus significatifs qui touchent à la doctrine et à la
pensée ?
(1) Je tombe sur cet exemple Prov. 24, 19. Hoc vero loco versio vulg. non est satis apta; ne
:
conlendas cum pessimis, ne excandescas de sceleratis diebr.) nec aemuleris impios, ne zelo
invidiae contra impios movearis (cela est encore la traduction du texte hébreu); temporalis
([uippe prospérités brevis est et vana, g!'.o;iiVjw non habent futurorura spem //lait"; sensum bene
déclarât vulg., quia non erit futuruni bonus exitus) malo (cela est encore la traduction de l'hé-
breu); non potesl sibi promittere l)ona pro tempore future es certa retributionis norma; nam
lucerna impiorum extinriuetur ; cf. 13, 9: félicitas evanescet (cela est du commentaire), etc.
v2) Jinnales du Musée Guhnet. t. XXXIII. Catalogue du Musée Guimet, Cylindres orientaux,
par L. Delvporte. In-4<> de xi -j-140 pp. et 10 pi. Paris, Leroux, 1909.
BULLETIN. :3H
notre ère"» les êtres fantastiques, animaux dressés, taureaux à face humaine, aiiiles
léontocépliales, etc., sont très fréquemment représentés. Déjà Gilgamès et Eabani,
les héros de la fameuse geste babylonienne en douze chants, possèdent leurs attributs
caractéristiques, ce qui suppose que les légendes concernant ces personnages se
racontaient à la veillée des cette haute époque (1). Ce sont eux encore qui fournis-
sent la plupart des représentations aux graveurs de l'empire d'Agadé (vers 2700-
2200 . dont l'art était alors à son apogée. Éabani est toujours le personnage hybride,
au corps d'homme, mais à la croupe et aux jambes de taureau. 11 forme le lien
entre le sauvage qui court à travers le désert en compagnie des animaux et le cita-
din dont le type est Gilgamès. Celui-ci. tantôt nu pour bien faire ressortir ses mem-
bres musclés et son buste d'athlète, tantôt étroitement serré par une ceinture, lutte
contre le monstre Éabani et tous deux finalement deviennent les inséparables com-
pagnons itels Héraclès et Iphiclès, qui vont purger la terre des monstres qui l'in-
festent. Aussi les voit-on se mesurer avec les taureaux les plus vigoureux, même
avec le taureau céleste (le Minotaure) que la déesse Istar a lancé contre eux pour
se venger des affronts que lui a infligés le grossier Éabani. Souvent encore ce sont
les lions que nos deux champions mettent à mal, en les saisissant par les pattes ou
par la queue. Les cylindres étaient le commentaire vivant du récit épique, où les
détails de ces exploits merveilleux avaient été notés avec une abondance digne d'Ho-
mère. On s'ingénie aussi à fixer les traits de la divinité, qu'il s'agisse du dieu aux
ailes de flamme (Sama.s. le dieu-soleil), du dieu-serpent, du dieu au vase jaillissant
(qui abreuve les hommes des eaux de la vie).Enfin, les hommes ou les femmes, en
posture d'aduration devant la divinité ou en train d'offrir la victime du sacrifice. Les
plus humbles sont vêtus d'une « pièce d'étoffe, presque toujours à franges, enrou-
lée en forme de jupon court >> : les aristocrates portent le chàle à rayures verticales
ou à franges, parfois même le kaimakès. Au temps de la première dynastie babylo-
nienne (à partir du vingt-deuxième siècle avant notre ère), des personnages nou-
veaux apparaissent, principalement un dieu barbu porteur d'une masse d'armes et
qui pourrait bien être le dieu Adad i2 ainsi qu'une femme nue parfois plus petite .
que les autres flgurants; dont le rôle est celui d'intercéder pour le possesseur du
cylindre. En Assyrie, on a l'habitude de représenter un arbre sacré autour duquel
se groupent les personnages divins ou humains. L'homme prie la divinité, lui offre
sa modeste obole, chevreau ou agneau. La chasse et la guerre sont aussi fort goûtées
des graveurs assyriens. La piété des rois de la dynastie néo-babylonienne (62.5-.539)
donne une place prépondérante au sacerdoce. De lik la présence fréquente du prêtre
sur les cylindres et les cachets plats de cette période.
La façon dont M. Delaporte a rendu compte des scènes figurées, la réserve presque
timide avec laquelle il hasarde une nouvelle hypothèse, le soin qu'il a eu d'invento-
rier, pour les mettre en parallèle, les cylindres des autres collections, tout cela dénote
un grand souci d'exactitude et de clarté. Peut-être pourrait-il maintenant donner un
travail d'ensemble sur la ulyptique chaldéenne. babylonienne et assyrienne. Ce serait
le moyen de remplacer des publications déjà vieillies et de ïour niv procul ab Urbe stu-
dentibus une raine de matériaux très précieux pour la reconstitution de la vie et des
idées religieuses dans les antiques civilisations mésopotamiennes.
Puisque nous sommes dans le domaine des cylindres orientaux, n'oublions pas de
1) Il ne faut pas oublier que le récit du déluge babylonien est contenu tout entier dans cette
vieille épopée cf. notre Choix de textes.. ., p. iOO ss.
:
production des trésors qui Ggurent dans ses collections d'art oriental devînt un arti-
cle de commerce et il a préféré se comporter avec la plus grande libéralité à l'égard
des assvriologues. Le catalogue, très soigneusement dressé par M. "Ward, contient
323 numéros. A côté des cylindres babyloniens et assyriens,
il en est de provenance
sente trois personnages à longue barbe, se faisant face deux à gauche et un à droite)
de chaque côté de l'inscription qui consiste simplement dans le nom du possesseur.
En plus, une étoile et un poiiinard. Le second cylindre est de facture toute babylo-
nienne et a dû être utilisé simplement par le Sabéen qui y grava son nom. Le dieu
Adad, debout sur son taureau, reçoit les adorations d'un personnage également
debout. La scène est encadrée par deux génies ailés, à tête d'aigle. Dans le ciel, le
croissant de la lune, l'étoile d'Istar, les sept ronds qui représentent ou les Pléiades
ou les dieux Igigi. Les sceaux babyloniens portent de préférence une divinité, sou-
vent assise sur son trône, tandis que les Assyriens ne négligent pas l'arbre sacré que
M. \Yard appelle « arbre de vie ». La collection de M. Pierpont Morgan est surtout
riche en cylindres syro-hittites. A côté des représentations purement hittites on re-
connaît fréquemment l'influence de l'art égyptien, babylonien ou assyrien. L'éditeur
se contente généralement de décrire les scènes et ne hasarde une interprétation que
lorsque le sujet est suflisamment clair par lui-même. Tout le monde rendra hommage
à la compétence de M. N\ ard en glyptique orientale.
lime et de soleil, arcs-en-ciel, nuées dans l'air, position des planètes sur tel ou tel
point de l'écliptique, sont des indications dont l'astrologue doit tenir compte. S'il y
a une éclipse de soleil, le premier jour de Marheswan 'octobre-novembre., le roi-
sera tué par ses Ois; si elle a lieu le treize du même mois (jour néfaste!, c'est le
roi d'Akkad Babylonie' qui est voué à la mort; mais, le vingt et un. c'est au roi
d'Amourrou ;cûutrées de l'ouest) d'être victime. Par contre, si l'éclipsé a lieu le
trentième jour du même mois, « le roi prolongera sa vie, mais sa troupe est ren-
versée par les armes ». Parfois la nature du phénomène iulluence la déduction as-
trologique si, par exemple, au mois de >'isan (mars-avril), la planète Vénus « est
:
barbue d'une barbe les gens du pays mettront au monde des mâles. On est dé-
,
(1) Cylinders and olher ancient oriental seuls in Ihe library of J. Pierpont Morgan cataloguée!
by William Hâves Wap.d. Grand ia-4" (de luxe de 1-29 pp. -f ^9 pi. New-Vnrk, privately priuted,
190!».
^-2' L'astrologie chaldéenne, etc. Fasc. 0. Supplément, texte. In-l^de 09 pi. Paris, c.euthner. 1910.
^3) L'astrologie chaldcenne, elc. Fasc. 10. Supplément, transcription, in-l" deti:5 pp. Paris, Geutli-
ner. r.HO.
BULLETIN. 313
concerté quand on voit la multitude de petits faits que les astrologues clialdéens
avaient consignés dans leurs mémoires. iVous avons donné déjà un échantillon de
ces observations à propos justement de la (1). La
publication de IM. Virolleaud
manière dont l'auteur a poursuivi son travail atteste éminemment son souci de la
précision et la richesse de ses informations dans le domaine de la littérature as-
trologique. Aussi nous refusons-nous à reconnaître M. Virolleaud dans l'auteur d'un
petit fiictum intitulé La légende du Chrixt que la librairie Geuthnei' a lancé sur le
marché. C'est une méchante plaquette dont nous ne voulons pas parler, car nous
n'aurions à en dire que du mal, au point de vue strictement scientifique.
nous ne rendons pas compte de son second volume, c'est que la première partie seule
en est éditée. Mais les astres n'ont pas fait tourner la tête du P. Kugler et il est de-
venu, en Allemagne, champion du bon sens contre les déplorables excès du pan-
le
du P. IvLigler, Im Bannkreis Babcls, est l'une des phases de cette intéressante polé-
mique (4). Le point en litige est l'antiquité de la science astronomique chez les Chal-
déens, Kugler tenant pour l'origine récente ivers 700 av. notre ère), Winckler et Je-
remias pour une époque bien plus reculée. Nous croyons que Kugler est dans le vrai,
en distinguant soigneusement astrologie et astronomie, celle-là datant des origines et
se réduisant à une observation pratique des phénomènes astraux au point de vue de
la divination, méthodiquement ces phénomènes et procédant par
l'autre classant
voie scientiûque. La plus grande partie de l'ouvrage est consacrée à une critique
serrée de ce que M. Winckler appelait sa « formule » {Formel). Celle-ci avait été
exposée, avec une légère emphase, par son auteur et — tout en se défendant de
vouloir jeter le ridicule sur sou adversaire — le P. Kugler éprouve un malin plaisir
à souligner le ton solennel avec lequel la soi-disant découverte avait été communi-
quée au monde savant. La formule
Hunmehijild WeUbild, Ma-
est la suivante : =
krokosiitos =
Mikrokosmos, ce qui veut dire, en langue profane, que les choses et
les événements de la terre sont interprétés par les anciens comme « l'image, la re-
production » de ce (jui se passe ou de ce qui s'est passé dans le ciel. On devine la
voie ouverte à la fantaisie par cet axiome. Les récits qui nous relatent les faits his-
toriques les plus palpables sont des constructions d'origine astrale, et comment dis-
tinguerons-nous l'objectif du subjectif dans ces récits? L'histoire biblique est la pre-
mière victime de ce genre d'interprétation. Pour ne pas insister outre mesure, nous
nous contenterons de renvoyer aux spécimens que nous avons détachés précédem-
ment des divers écrits panbabylonistes (.5). Le P. Kugler détruit, par le menu, les
bases sur lesquelles M. Winckler a voulu édifier sa thèse. Maintes digressions repo-
seront le lecteur que fatigue un peu la discussion par trop unilatérale. Pour montrer
par un exemple frappant les absurdités où peut conduire le panbabylonisme à ou-
trance, l'auteur consacre vingt pages de son livre à un pastiche de l'ouvrage de
M. Jensen, D/'s Gllr/ainesch-Epos. Utilisant les procédés par lesquels Jensen a ra-
mené à Tepopée babylonienne tous les faits et tous les personnages de TAncien et du
?souveau Testament, le P. Kugler établit,que le roi Louis IX
par mode de plaisanterie,
est « un héros un Gilgamès français ». C'est la démonstration par l'absurde
solaire et
des nombreux illogisnies contenus dans la thèse de Jensen. On trouvera le procédé
un peu lourd. Mais peut-être n'est-il pas inutile, au delà du Rhin, d'insister longue-
ment sur des écarts d'imagination dont se laissent griser des esprits peu familiarisés
avec les exigences d'une impitoyable logique. Avec le P. Kugler, nous dirons en
finissant : Sapienti sat!
Comme pour fixer un nouveau jalon sur le chemin parcouru par le panbabylo-
nisme, M. Wilhelm Erbt interprète se/on /'/ formule l'évangile de S. Marc il". Xous
pouvons laisser sa brochure sous la rubrique « Peuples voisins ». car on n'y trouvera
guère que de l'astrologie chaldéenne à propos de l'évangile. Je me trompe. A la
page 62, vous verrez « le Zodiaque dans Marc » et une figure astronomi({ue où, en
effet, apparaissent toutes les constellations du zodiaque vous prouvera par a -^ b
que les faits évangéliques se ramènent à ces constellations. Laissons à l'auteur son
style sibyllin : Pleine-lune. — Mort. — Soupir. — Baptême de l'esprit. — Croix. —
iNinib, Soleil, Solstice d'été. Voulez-vous savoir à quoi correspondent les apôtres?
c Philippe, mois de Sabat, Aquarius, Adad. — Barthélémy,
mois d'Adar, Pisces, les
sept dieux, etc.. etc.. ». Évidemment nous avons là un phénomène de déséquilibre
qu'il importe d'enrayer. Ces aberrations du système astral illustreraient la fable de
La Fontaine « L'astrologue qui se laisse tomber dans un puits ». En tout cas, à la
vue de ces élucubrations sur l'évangile, on redit de bon cœur la prière de Jésus :
Conftteor tibi, patcr... quia abscondisti hoec a sapientibus et prudent ibus el revelasli
ea parvulis.
avons analysé l'ouvrage deBehrens sur les lettres de l'époque des Sargonides dont l(
sujet est religieux ou cultuel (2). On annonce comme devant paraître dans la mêmel
collection une étude de M. Ylvisaker sur la grammaire assyro-babylonienne d'aprèsj
le style de cette correspondance. Voici maintenant une monographie, due à M. Erns^
Klauber, sur les fonctionnaires en Assyrie toujours d'après ces lettres i3). Le traité
se divise en deux parties, l'une sur le roi, la cour, la condition générale des fonc-
tionnaires, l'autre sur les divers degrés de la hiérarchie. On trouvera dans le premier
chapitre une étude sur les lettres elles-mêmes (4) et la façon d'en déduire des ren-
seignements concernant le rôle que jouait dans l'adininistration tel employé dont
nous ne connaissions que le nom. Déjà M. Godbey avait catalogué ces noms de fonc-
tionnaires qui apparaissent dans la correspondance de l'époque des Sargonides (ô),
(1) Das Markusevangclium dans les Mitleilungcn der vorderas. Gesellschafl, 1911, 1. Nous
prierons la vorderasiatische Gesellsc/iaft de nous donner des études sérieuses sur l'antiquité
orientale et non pas des fantaisies de mauvais aloi, telles que celle que nous avons sous les yeux.
(•i) RB.. i;)07, p. 4(i3.
(3) Assyrisches Bcamtentv.m nach Briefen ai'.s der Sargonidenzeit von Dr. Pliil. Er.ssT Klacder.
ln-8 de M —
1:28 pp. Leipzig. Hinriclis, 1!>10. Dans les Leipziger se-ûiitisliclie Studien, V, 3.
(4) Ces lettres sont publiées dans H.uiPEB, Assgrian and babylonian letters etc.; cf. RB., 1910,
p. 313 s.
(5) Americ. Journ. of semitic languages, XXl, p. 05 ss.
BULLETIN. 315
M. Klauber se contente de rectifier ou de compléter cette liste (pp. 7-10). Grâce aux
missives royales on peut se rendre compte du cérémonial usité à la cour d'Assyrie
dans les grandes circonstances. >'ous pouvons même assister à une audience. Celui
ou celle qui avait obtenu l'insigne faveur de « voir le visage du roi >' ( souvenons-nous
d'Estlier devant Assuérus), devait commencer par se prosterner et baiser la terre ; les
lettres d'El-Amarna nous ont déjà renseignés sur cette exigence du protocole que les
Égyptiens avaient en commun avec les Babyloniens et les Assyriens (1). Parfois les
lettres nous décrivent les grands banquets que les monarques de .Ninive donnaient à
leurs vassaux ou à leurs amis ce sont les festins d'Assuérus et de Balthasar. D'autres
:
de princes vassaux.
Les principales fonctions sont exercées par des sortes de majordomes qu'on appelle
« », ou parfois « grands du palais ». Il y aurait lieu de
ceux qui président au palais
les rapprocher des « maires [majores] du palais » sous les Mérovingiens. M. Klauber
étudie en détail les formalités qui accompagnaient l'investiture d'un emploi quelcon-
que dans l'administration royale. Le serment de fidélité est prêté par l'élu et dans
le texte de ce serment figure la phrase suivante « Communiquez-nous tout ce que :
vous voyez et entendez » Des récompenses sont accordées aux bons serviteurs, des
!
châtiments sont réservés aux infidèles. L'une des punitions ordinaires est la confis-
cation. L'emprisonnement, la mutilation (on arrache la langue du menteur), la mort
punissent les crimes plus graves. Nous ne pouvons entrer dans le détail des fonctions
qui sont étudiées par M. Klauber dans sa seconde partie. Signalons le iurlànu
« commandant en chef v, qui correspond au turf an de la Bible, le rab-.saqr « général »,
qui est le rah-saqé delà Bible, h'nharali'ku, dont le nom se retrouve à l'époque d'Ar-
taxerxès I et de Darius II, n'a rien à faire avec ~"12X de Gru.^ 41, 4.3, tandis que le
salsu « le troisième » de ceux qui étaient sur le char de guerre pourrait bien être la w*''"'"»!*
)
sur la main duquel s'appuie le roi dans // B.eg.^ 7. A noter que le nom de titre écrit
m-ud-safj et qu'on a souvent comparé avec le vab-sag (=: saqù) doit être lu proba-
« eunuque » (r'iT
blement iu-M^-jvi comme l'a reconnu tout dernièrement Jensen (2).
).
etc.).
Pour mener à bien son travail. M. Klauber a été contraint de traduire nombre de
lettres de l'époque des Sargonides. Il a voulu faire d'une pierre deux coups, eu pu-
bliant dans Der Alte Orient (XII, 2) une petite brochure de vulgarisation sur la situa-
tion de l'état et de la société en Assyrie et en Babylonie d'après la correspondance
royale ou privée (3). L'auteur utilise des lettres de l'époque hammourabienne et du
temps d'El-Amarna. Il y a même une illustration (lettre de Hammourabi à Sin-
frande funéraire, coutume dont nous avons constaté la persistance sous Xabonide le
dernier des rois deBabylone 4\ Elle est adressée par Ammi-ditana, le troisième suc-
cesseur de Hammourabi. En voici la traduction d'après M. Thureau-Dangin « A :
le beurre pour les offrandes funéraires du mois d'Ab font défaut. Aussitôt que tu
verras (recevras) cette mienne lettre, que ton intendant prenne 30 vaches et 60 qa (ô
de beurre, qu'à Babylone il vienne. Et alors, jusqu'à ce que les offrandes funéraires 6, ^
soient achevées, qu'il apporte du lait. Qu'il ne tarde pas, qu'il arrive promptement. »
Les contrats proviennent de Teilo, l'ancienne Lagas fouilles du commandant Gros),
d'Abou Ilabbah (Sippar;, de Babylone, de Dèlem (Dilbat). del-Oi\^imir (.Ki^, et de i
Sit-tab. A côté de ces textes de provenance suméro-akkadienne. deux contrats (n' * 237
et 238 sont d'origine mésopotamienne (ville de Tirqa, non loin de Deir ez-Zor sur le
L'un des contrats de Tirqa (n° 238 a été également étudié par l'auteur dans le
Amarna, cet idéogramme a parfois la valeur Ba'al. » pourrait-on pas lire Iari/>-
Ba'al et reconnaître ainsi le nom même de Ieroub-Ba''al porté par Gédéon? Non
content de cataloguer les textes et d'en faire connaître la date exacte, M. Thureau-
Dangin a dressé la liste des personnages, des pays, peuples, localités, rivières, canaux,
ediûces, enfin des noms divins qui figurent sur les tablettes. Les noms de personnes
offrent le plus haut intérêt pour la comparaison avec l'ancienne onomastique bi-
blique. A remarquer l'explication ildn deux dieux, les Gémeaux » pour le double
« les
signe divin AN-AX, les différents noms Inuana^Irnanu, Inuinni. Irnini. etc.i,
d'Istar
l'interprétation du nom du >'oé babylonien, J'to-napistim, par « Uta (le soleil) est
(1) Lrllres et contrats de l'époque de la première dynastie babijlonienne, par Fr. Tirt.eau-
Dangin. In-4 de 68 pp.
"
+
CXVl pi. Paris, Geuthner, 1910.
(2) The letters and inscriptions o/' HaminKrabi.
(3) Hilprcclit annirersary volume, p. l."i<j ss.
(4) RB., litOS, p. 135.
Mesure de capacité.
(3)
(0) Le mot eraployé est kispu. Il y avait chaque mois un ùm kispi • jour de l'offrande funé-
raire » cf. notre ouvrage La religion assyro-baO y Ionienne, p. 40).
BULLETIN. 317
ma vie ». et bien d'autres faits nouveaux qui commentent rénumération des divinités.
Ou ne peut que souhaiter la continuation de la belle série inaugurée par M. Thureau-
Dangin. L'édition ne pouvait être confiée à de meilleures mains.
Les deux premiers cahiers du huitième volume des Beitrâge zar Assyriologie con-
tiennent une dissertation de M. Hans Bauer sur c les temps dans le verbe sémi-
tique » une autre de M. F. Steinmetzer sur le koudourrou de Melisipak 2,. une
(1 .
troisième de M. E. Ebelinj: sur le verbe dans les lettres d'El-Amarna i3,. De cette
dernière nous ne pouvons dire qu'une chose, c'est que, faite indépendamment du tra-
vail de M. Bùhl dont noHsavous parlé déjà '4;. elle a été conduite avec un admirable
souci de nomettre aucun exemple intéressant. L'auteur reconstitue l'un après l'autre
tous les thèmes verbaux et accumule ensuite les cas relevés dans les lettres. Source
d'iulormation de premier ordre pour tous ceux qui s'occupent des origines et de l'évo-
lution de la langue hébraïque. Naturellement, c'est la collation de Knudtzon (ô) qui
fournit les matériaux. Les trois dernières pages sont consacrées à corriger certains
passages de la traduction proposée par Knudtzon. La thèse de Bauer sur le verbe sé-
mitique est remplie de théories plutôt que de faits. Elle peut se résumer ainsi L'im- :
qataJii a la valeur d'un participe présent ou passé, tandis que qatila et qatula déri-
vent plutôt des adjectifs. L'auteur passe ensuite en revue les modifications que subis-
sent le parfait et limparfait dans les diverses langues sémitiques.
Le travail de M. Steinmetzer n'est pas de première main, puisque le P. Scheil avait
publié l'interprétation du koudourruu de Melièipak. dans les Mf'molres de la Délé-
gation en Perse t. II. l''00 . On y trouvera des vues intéressantes surtout en ce qui
concerne les symboles et emblèmes des dieux sur les pierres-limites.
Fr. P. Dhorme.
cepts, il devrait en être ainsi; en réalité, c'est comme si rien n'avait été fait, tout est
à recommencer. La mer .Morte elle-même n'est pas à l'abri de tout danger. Depuis
notre croisière de 1908-1909, le bateau na plus fait que de rares traversées, une fois
seulement avec des voyageurs, et cela, avant la révolte des Arabes. L'inaction l'a dé-
térioré au point qu'on naurait pu du soulèvement, au
s'en servir dans la répression
cas où Ton aurait eu l'idée qu'il était susceptible de rendre des services. Lors de la
révolte, les oies et autres volatiles de Àbd en-Xéby. à la Lisàn, ont été dévorés par
les factieux, un groupe d'Américains en voyage a été rançonné vers Zoueirah. Il est
garnison turque a dû son salut en décembre passé. On sera donc heureux d'en con-
naître l'histoire et d'en posséderde belles reproductions. Les autres sites délaissés '.
que l'auteur passe en revue ne sont pas d'un moindre intérêt que les châteaux de la
Transjordane, que Pétra et Kérak ce sont les plus anciennes mines du monde civi-
:
Feiran, et le mont Sinaï qui reprennent sous la plume de l'auteur ces teintes merveil-
leuses que nous avons admirées ensemble.
Néby Mousa où sont présentées des hypothèses déjà rebattues sur l'origine du sanc- '.
tuaire. L'auteur omet les principaux témoignages occidentaux. Voir sur le sujet, Abel,
Une croisière autour de la mer Morte, pp. 173-184, où la notice de M. Spoer, ZDPV.,
1909, pp. 209 ss., n'a pu être citée dans la bibliographie, à cause des lenteurs de
l'administration à nous faire parvenir ce fascicule. —
M. Wurst donne un bref rap-
port sur la température de septembre 1909 à août 1910. 1910, n" 6. M. Holscher —
tirede son carnet trois inscriptions t/rerques recueillies, dit-il. au cours d'un voyage
de 1903. L'éditeur en a ajourné la publication jusqu'ici, dans l'espoir qu'elles seraient
publiées d'après des copies plus correctes que les siennes. Personne ne s'étant décidé,
M. Holscher marche. Les hésitations aussi bien que la publication étaient inutiles.
La V^ de ses inscriptions (de Dera'ai a été publiée par Schumacher en 1889, Across
the Jordan, p. 131 ; la 2- la Revue archéo-
de Sidon") se trouve fort bien transcrite dans
lor/ique, 1898. B, p. 110. éditée par le P. Lamraéns
donné lieu ensuite à une
; elle a
savante étude de M. Perdrizet sur le roXÎTEuaa Kxjviwv (et non Txjvt'wv) dans la même
revue, 1899, B, pp. 42 ss. A propos de stèles analogues, M. Macridy en a donné de
nouveau la teneur dans /JB., 1904, p. -549. Quand une inscription a été pubhée trois
fois avec soin, commentée et discutée, on s'abstient d'ordinaire d'en présenter ensuite
une simple copie et encore défectueuse. En tout cas, si l'on est palestinologue. on ne
publie rien sur Dera'a sans consulter Schumacher au préalable, rien sur Sidon sans
revoir les travaux de Macridy. Quant au fragment de Safed, qui termine la série, il
est absolument inutilisable. On y observera sur le champ de la pierre où les lettres
grecques ont disparu, uue marque de tâcheron médiéval. P. Linzen un tableau — :
Bas heilige Land, 1911. — Le P. Fr. Dunkel traduit de l'arabe un article de Don
Khalil Martha sur les tombeaux de David et de Salomoit d'après les auteurs arabes.
BULLETIN. 319
d'une carte détaillée du pays situé sur les confins de l'Egypte et de la Syrie nord de :
toire l'fji/ptien. Deux notes sur la compréhension du ternie Ere: Israël., dues à S. Klein
et à S. Krauss. — L. KÔhler : Remarques succinctes touchant de récentes publi-
cations.
çon Aetheria qui se présente à lui avec les garanties les plus sérieuses. Quant au
pays d'origine, la Galice a ses préférences et à bon droit, semble-t-il. Le P. Garcia
répond avec beaucoup d'à- propos aux raisons que M. Meister avait mises en avant
pour prouver l'origine provençale d'Éthérie. La comparaison de l'Euphrate avec le
Rhône n'est point du tout péreraptoire. La pèlerine pouvait avoir donné une descrip-
tion du Rhône dans la partie de sa relation aujourd'hui perdue « et alors la compa-
raison était intelligible et naturelle. Même sans cela, il n'était pas difficile pour ces
sœurs, dont l'érudition est louée par notre pèlerine, de connaître un fleuve, dont
constamment dans la littérature latine
l'impétuosité était proverbiale. Il est appelé
pneceps, velox, ferox, fpirges Uhodani ». Nous ajouterons, comme exemple encore
plus topique, cette métaphore de s. Jérôme qui suppose la réputation du Rhône ré-
pandue dans tout le monde romain « Ililarius Latime i^loqueiitid' liliodauus » il).
:
D'autre part, la façon de désigner la patrie d'Éthérie dans la lettre a bien des chances
de s'appliquer à la Galice de préférence à toute autre région. Le début de Valerius :
« Itaque dum olim almifica fidei catholicœ crepundia lucifluaque sacrse religionis im-
mensa clarilas huius occidux plarjœ sera processione tandem refulsisset extremitas,
eadem beatissima sanctiutonialis Aetheria... immensum totius orbis arripuit iter »
comparé à cette autre phrase de la fin de sa lettre : « Quœ extrême occidui maris
uceani litore exorla orient i facta est cof/nita » amène naturellement à identifier le
pays de la pèlerine et celui de Valerius le Galicien. La Galice est encore extremitas
occiduw plarjx dans la vie de s. Fructueux: Gallœcia sita ia extremitate oceani maris
occidua dans la chronique de l'évéque galicien Idace. Le P. Garcia montre ensuite
que les hispanismes ont résisté à la critique de M. Meister, tandis que les locutions
prises pour des gallicismes ont souvent passé les Pyrénées.
Pour la date, l'éditeur, tout en restant circonspect, trouve que l'époque assignée par
M. Meister à la Peregrinatio, le vi'^ siècle, semble solidement établie. Pour nous la
phrase citée tout à l'heure du début de la lettre de Valerius s'oppose à cette date. En
effet Éthérie quitte les plages de l'extrême Occident quaud le christianisme vient à
peine de se répandre dans la contrée, quand la foi catholique y est encore au ber-
ceau. Ces expressions ne se comprennent guère que s'il s'agit du iv^ siècle, car en 400,
au concile de Tolède, on trouve déjà des évéques de Galice, d'après Idace (I~. De
plus, en 41Ô, l'évêque de Braga, Palclionius, est en relation avec un de ses prêtres,
Avitus. qui réside à Jérusalem et veut lui envoyer des reliques de saint Etienne (2 i,
et en 456, il y a des monastères de vierges, inquiétés par les Suèves. Donc, toute
cette floraison du christianisme en Galice au v<> siècle présuppose une évaDgélisation
durant les années du siècle précédent.
lestinienne suivant les noms scientiliques accompagnés assez souvent des dénomina-
tions arabes par Dinsmore et Dalman. — Le jrrétoire de Pllate identifié avec le pa-
laisd'Hérode le Grand par Eckardt. L'auteur paraît ignorer l'étude très sérieuse de
van Vebber {Theolor/ische Qunrtahchrift, 1900, Hett II; RB., 1905, p. 650) qui aboutit
à la même conclusion que la sienne. —
Hoischer Gath et Azeka représentée aujour- :
d'hui par Tell es-SaOeh et par i'ell Zakariah. — Reuter : Note sur l'antique cime-
tière de Beit-Râs.
Le Gérant : J. Gabalda.
(1) Prologue.
(2) 1, 4.
REVUE BIBLIQUE 1911. — >'. S., T. VIII. 21
322 REVUE BIBLIQUE.
tout leur cœur, de toute leur âme et de toute leur force » (6), pour
qu'ils deviennent une plante de droiture, un objet de bénédiction et
;1) 1, 6. — (2j 1, 10, 1 i et 24. — (3) 1, 11. — 'A) 1, 11 et 14. — (5) 15, -34: 12. 16-18,
— (6) 1, 15 et 23.— (7) 1, 16. — (8) 1, 25 ; cf. 19, 29. — 9; 1, 17.
LE LIVRE DES JUBILÉS. 32:i
sans doute de peur que Moïse n'écrive pas exactement ce qu'il a vu,
ou plutôt pour bien assurer les lecteurs que les Jubilés reproduisent
la parole divine, Dieu continue en s'adressant à un ange de la face :
(1) 1, 18. — (2) 1, 23-28. — (3) 7, 11, 12; 8, 12, 18-21, 30; 11, 24; 13, 28; 15, 26,
27,30-34, etc. etc. — (4) 15, 31-32 ; 19, 18 22, ; 11, 12, 14 ; 23, 29-30, etc. etc. —
(5) 1, 4.
— (6) 1, 26. — (7) 1. 27. — (8) 1, 29. — (9) 3, 10, 31 ; 4, 5-6, 32: 5, 13-14; 6, 17, etc.
324 REVUE BIBLIQUE.
le législateurhébreu les lois des temps f'I). Les Jubilés sont donc
partie l'œuvre de l'ange et partie celle de Moïse, écrivant sous sa
dictée, comme l'envoyé céleste le presse de temps en temps de le faire,
par exemple quand il termine le récit de Finceste de Ruben : « Et toi
celui que j'ai écrit pour toi ». Il en est de même dans xxx, 12, où il
cite une « parole de la loi » qu'il a écrite pour lui. Mais il ne s'ensuit
pas que dans les autres passages où l'ange dit « J'ai écrit pour toi »,
qu'à ce que mon sanctuaire ait été bâti pour léternité Or, Singer et .
(3) Singer, Das Buch der Jubilâen, 1898, p. 15; Cliarles, The Book ofjubilees, 1902,
qu'il ma données dans mes mains, pour que j'écrive pour toi les lois
(lu temps et le temps selon la division de ses jours » il). Placés à la fin
quent d'une façon trop évidente aux Jubilés pour qu'il soit besoin
d'insister. Personne ne songerait à affirmer que le Pentateuque a pour
objet la loi du temps et le temps selon la division de ses jours.
Charles, lui, a entrevu les objections que soulève son interprétation:
il <( » à la fin de sa note sur i. 2T. qu'elle n'est pas sans diffi-
confesse
culté et « ne parait pas adéquate )>.
Les Jubilés sont donc un véritable apocryphe, un écrit soi-disant
inspiré d'en haut à un des grands hommes d'Israël. Cette fiction lit-
téraire était alors très en vogue dans les milieux pharisiens et natio-
nalistes (2). Elle fournissait im excellent moyen de consacrer les doc-
propagande leur tenait à cœur. Quelques auteurs avaient
trines dont la
déjà composé des Livres de Xoê et à'Hcnoch. Celui-ci imagina ce
qu on a pu appeler une Apocalypse de Moïse.
Les productions similaires de ses devanciers lui étaient d'ailleurs
bien connues. Il les tenait en haute estime, et pour cause. Ce n'est pas
seulement à son livre qu'il attribue l'inspiration divine. Il la départit
(1) 50, 13.— (2] VoirPrançois Martin, Le Livre d'Hënoch. 1906, p. cv-cvi.
32G REVUE BIBLIQUE.
cieux, et il écrivit tout » (2). C'est également à l'école des anges que
Noé a puisé ses connaissances, et il a tout écrit dans un livre, comme
les anges le lui avaient appris (3). Quant à Jacob, c'est dans les tablettes
du ciel elles-mêmes, tablettes qu'un ange lui a apportées dans une
vision, qu'il a lu et appris tout ce qui devait arriver à lui et à ses fds
dans tous les siècles (i). Lange lui a fait comprendre ce qui était
écrit et le lui a rappelé à son réveil, et il a écrit à son tour tout ce
qu'il avait vu et lu (5).
Notre auteur atteint ainsi un double but. il a fait à son apo- Comme
cryphe, il donne à ceux d'Hénoch, de Noé
de Jacob (6) l'autorité et
que confère l'inspiration divine. Et il contribue par là à répandre et
à accréditer les idées qui lui sont chères, puisque ces apocryphes reflè-
tent les mêmes tendances (7) et procèdent sans doute delà même école
ou du même cercle de Pharisiens et de simples prêtres. Avant de
mourir, Jacob a donné à son fils Lévi, le véritable héritier de Sem,
d'Hénoch, de Noé et d'Abraham, « tous les écrits et les écrits de ses
pères pour qu'il les gardât et les renouvelât (par des copies) pour ses
enfants jusqu'à ce jour » (8).
D'autre part, il grandit encore le crédit de son propre livre, basé
en partie, il le dit parfois expressément, sur ces apocryphes. Telle ou
telle de ses prescriptions, sur le sacrifice par exemple, n'est pas seu-
déjà inscrite sur les « livres des pères » d'Abraham 9). A plusieurs
reprises aussi, le même ange laisse entendre assez clairement que sa
révélation à Moïse est l'écho de l'enseignement d'Hénoch sur le calen-
drier (10) ou du (( témoignage » que ce patriarche a écrit et déposé
« sur la terre pour tous les enfants des hommes et pour leurs généra-
(1) 4, 19. ^
(2) 4, 21; cf. 10, 17. (3) 10, 13. —(4) 32, 21. —
(5J 32. 22 et 26. —
(6) Sur apocryphes d'Hénoch et de Koé, voir François Martin, Le Livre d'Hénoch,
les
p. LXïviii-cv. U ne nous est pas parvenu d'apocryphe de l'Ancien Testament portant le nom
de Jacob.
(7) Cf. FraiQçoisMaLTlia, Le Livre dÈcnoc/i, p. xi et p. xcix.
contredit.
Les passages où il s'astreint à reproduire à peu près exactement le texte
sacré ne sont pas très nomJjreux. Voici les principaux : m, 6, les paroles
d'Adam après la création d'Eve Genèse, ii,23 = :
— m. 17-19, l'entre-
tien d'Eve et du serpent Genèse, m. 2-5: m. = —
-ii-^ô, les malédic-
tions divines contre nos premiers parents coupables ^= Genèse, m, 17,
19 :
— IV, 7, les paroles d'Adam après la naissance de Seth Genèse, =
IV. 25: — IV. 28. les paroles de Lamech après la naissance de Xoé
= Genèse, v, 29 :
— v. i et 8, les menaces de Dieu avant le déluge
=z Genèse, vi, 7 et 3 :
— vi. 5-9, l'alliance de Dieu avec Noé après le
déluge = Genèse, — ix, 1-7 : vu. 10-12. la malédiction de Noé
contre Gham
ses bénédictions sur Sem
et sur Japhet = Genèse, et i\,
25-27; — X, 22, paroles de Dieu avant
les confusion de Babel = la
Genèse. 6-7: — \i. 22-2i 19-21, bénédictions divines
xii. et xiii, les
accordées à Abraham = Genèse, su, 1-3 li-H; — 28-29, et xiii. xiii,
et les démons. Pour les passages du Livre d'Hénoch auxquels ils correspondent, voir Fran-
çois Martin, Le Livre d'Hénoch. ]>. cviu-cix.
328 RliVUE BIBLIQUE.
n'y aura plus un dessein unique chez eux jusqu'au jour du jugement».
Lorsque Dieu commande à Abraham de quitter son pays, il lui fait
en terminant, xii, 22-24 =
Genèse, xii, 1-3, la promesse d'être son
Dieu, promesse que ne contient pas la Genèse à cet endroit: « Et je
serai ton Dieu à toi et à ton fils et aux fils de ton fils et à toute ta race.
Ne crains pas dès maintenant jusqu'à toutes les générations de la
:
(1) Je ne parle pas ici des divergences avec la Bible qui peuvent s'expliquer par les leçons
particulières du texte hébreu suivi par l'auteur des Jubilés.
LE LIVRE DES JUBILES. 329
terre, les eaux, les abîmes et les esprits, en plus de la lumière et des
ténèbres, la seule œuvre du premier jour d'après Genèse, i, 3-5. Sur-
tout, il s'étend sur la création de tous les esprits cjn'il énumère
avec complaisance, ii, 2, et dont il indique le rôle soit vis-à-vis
de Dieu, 3, ii, l'homme, m, 1.
soit vis-à-vis de
Au second jour, II, i, il place la création du firmament. Mais pour
é\iter encore la confusion ou la contradiction avec l'œuvre du pre-
mier jour, il ne lui donne pas le nom de « ciel », comme Genèse, i, 8.
Il complète l'œuvre du troisième jour, ii, 7, par la création des
La création des astres a bien lieu le quatrième jour, ii, 8-10. Mais
le soleil seul, et non pas tous les luminaires, comme dans Genèse, i,
li, est un « signe pour les jours et les semaines et les mois et les
fêtes et les années et les semaines d'années et les jubilés et tous les
temps des années ». C'est lui qui donne la vig-ueur aux plantes et aux
animaux.
Il décrit ensuite rapidement l'œuvre du cinquième jour et celle du
ti) 8, 16-18.
330 REVUE BIBLIQUE.
d'ailleurs que Jacob est son véritable héritier. Pour prévenir les suites
les plus tendres et les plus magnifiques que le Seigneur Dieu soit un
:
père pour lui, et que Jacob soit son fils premier-né (10). Que Dieu fixe
son choix sur lui et sur sa race, pour qu'ils soient le peuple de son
héritage (11). Que le Seigneur lui donne une race de justice, et qu'il
sanctifie de ses enfants au milieu de la terre entière. Que les peuples le
servent et que toutes les nations se prosternent devant sa descen-
dance (12). C'est Jacob qui édifiera la maison et qui élèvera le nom
(1) 19, 13-14. —(2) Genèse, 25, 27. — (3) 37, 1.^. — (4) 19, 15-16. — (5) 19, l'J.
—
(6) 19, 17. —(7) 19, 18. —
(8) 19, 23-25. — (9) 22, 28. — (10) 19, 29. — (11) 22, 10. —
(12) 22, 11.
LE LIVRE DES JLBH.ÉS. 331
d'aînesse par Ésaii, et, comme pour disculper Jacob d'une exigence
excessive, il transpose Genèse, xxvi, 1 , avant Genèse, xxv, 29, de sorte
que c'est où la disette commençait à sévir sur la terre,
à l'époque
qu'Ésaii trouve Jacob occupé à confectionner un plat de lentilles (3i.
Toujoure pour préparer le stratagème de Rébecca. il place également
Genèse, xxviii, 1, avant le récit de Genèse, xxvn. 1 et suivants, et il
met sur les lèvres de la mère les paroles que la Rible attribue à Isaac.
Rébecca appelle Jacob 4) et le supplie de ne pas prendre une femme
!
parmi les filles de Canaan, comme l'a fait Ésaû, dont les deux femmes
ont rempli son âme d'amertume. Elle l'engage à aller chercher une
femme dans la famille de son père à elle. C'est une nouvelle occasion
pour Jacob de faire éclater sa supériorité morale sur Ésaii. Il déclare à
sa mère qu'il est resté ^'ie^ge jusqu'à ce jour, et il lui jure de faire sa
volonté. Malgré les instances d'Ésaii pour lui faire épouser une des
sœurs de ses femmes, il ne l'imitera pas. Alors Rébecca, inspirée par
l'esprit de justice qu'elle a demandé, bénit Jacob, fils pur et race ((
sainte », comme l'a béni Abraham, avec les efï'usions les plus tendres,
les souhaits les plus étendus : que Dieu lui accorde autant d'enfants
qu'ily a de mois, qu'il multiplie ses descendants, qu'il leur donne la
Palestine, la terre agréable, qu'il fasse de leur race une race bénie et
sainte, que chez elle soit édifié le sanctuaire du Seigneur pour tous
les siècles (5).
Finalement, Jacob se trouve désigné de tous les côtés, par ses qua-
lités personnelles, par sa piété filiale, par les fautes d'Ésaii, par l'ac-
quisition du droit d'aînesse en temps de famine, par les bénédictions
inspirées d'en haut à Abraham et à Rébecca, par son aversion pour
les filles de Canaan, pour recevoir les bénédictions d'Isaac, les seules
(1) 22, 24. — (2) 22, 30. — (3) 24, 2-3. — (4) 25, 1-JO. — (5) 25, 11-23.
332 REVUE BIBLIQUE.
dir Jacob. A sa mère qui l'engage à aller prendre deux chevreaux pour
Isaac,Jacob répond pour attester son amour filial « Je n'épargnerai :
rien de tout ce que mange mon père et qui lui est agréable » (1). Isaac
ne commence pas par lui demander : « Qui es-tu? » et Jacob ne lai
dit pas : « JesuisÉsaû, ton premier-né » (2), ce quipourraitle faire ac-
cuser de mensonge, mais simplement : « Je suis ton fils » (3). Si Isaac ne
le reconnaît pas, parce que ses mains étaient velues comme celles d'É-
sati, « c'est une disposition du
pour détourner son esprit »(V). Cette
ciel
fois cependant, il mon fils Ésaû? » Mais Jacob se
interroge : (( Es-tu
contente de répondre « Je suis ton fils » (5), au lieu de « C'est moi »,
: :
Seigneur m'a béni et dont il a béni mon père Abraham, soient (ac-
cordées) à toi et à ta race jusqu'à l'éternité (6). Il appuie également >•>
béni ainsi que toute sa race pour l'éternité » (7). Enfin, ce qui est plus
grave, il altère la fin de la bénédiction qu'il lui accorde, au point d'en
faire une imprécation. Dans la Genèse, xxvii, iO, il termine ainsi :
Pour fuir la colère d'Ésaû, Jacob consent, sur les conseils de Rébecca,
||
à se rendre en Mésopotamie, mais à la condition expresse qu'Isaac
l'yenverra. Il ne veut pas partir de son chef, il ne veut pas laisser
soupçonner son respect de l'autorité paternelle et s'exposer à en-
courir la malédiction de son père s'il l'abandonne, sans le consulter,
dans sa vieillesse et ses infirmités 10).
A son départ, la douleur de Kébecca donne à Isaac l'occasion de
prédire le bonheur et la grandeur future de leur fils chéri, comme
aussi de célébrer sa perfection et sa droiture (11).
Jacob se rend donc en Mésopotamie. Les détails de la Genèse, xxix,
1-14, sur sa rencontre avec Rachel et son arrivée chez Laban, parais-
sent peu utiles à l'auteur des Jubilés. résume en un verset (12), Il les j
(1) 26, 7. —(2) Genèse, 27, 19. — (3) 26. 1.1. — 26, 18. (4) — (5) 26, 19. —(6) 26, 2i.
— (7) 26, 28. — (8) Traduction de Crampon. — 26, 34.(9) — (10) 27, 1-7. —
(11) 27.
13-18. — (12) 28. 1. — (13) 28. 2-10. — '14) Genèse, 30. 1-2.
LE LIVRE DES JUBILÉS. 333
fallait s'y attendre, il omet absolument dans cet épisode tout ce qui a
trait à la ruse imaginée par Jacob pour se faire un bon troupeau (4) ;
Séir, Jacob, lui, une fois de retour, reste non loin d' Isaac et de Rébecca
et les honore (19) il leur envoie même régulièrement, quatre fois
;
par an, de tous ses biens et de tout ce qui leur est nécessaire. Aussi le
bénissent-ils de tout leur cœur et de toute leur àme (20), et avant de
mourir, Isaac n'hésite pas à lui donner, en qualité d'ailleurs de pre-
mier-né, la plus grande part de ses biens (21).
Le récit de l'enlèvement de Dina et de la vengeance qu'en tirèrent
Siméon et Lévi (22) est peut-être, de toutes les parties du Livre des Ju-
(1) 28, 16. — (2) 28, 25-27. — (4) Genèse, 30, 37-42, et 31, 4-13.
(3) Genèse, 30. 25-36. —
(5) Genèse, 30, U-16. — (6; Genèse, 32, 24-32.
Genèse, 32, 1. —
(8) 29, 6.(7) —
(9) Cependant 31, 2 contient une allusion aux idoles dérobées par Rachel.
(10) 29, 7 et 8. —
(11) Genèse, 31, 45-54. (12) 29, 13. —
(13) Genèse, 31, 21. — —
(14) 29, 4, —
(15) Genèse, 31, 55. (16) 29. 12. —
(17) Genèse, 31, 47. —
(18) 29, 11; V. Chai'les, The hook of Jubilees translated, 1902. p. 176. note sur ce
verset.
(19) 35, 12. — :20) 29 15-20. — (21) 36, 12-13. — (22) Genèse, 34.
334 REVUE BIBLIQUE.
Dina n'a pas péché par curiosité, elle n'est pas sortie « pour voir les
fillesdu pays » (2). « On l'enlève » (3), sans mention de circonstance.
La faute de son ravisseur est d'autant plus abominable que Dina est
('une petite fille, une enfant de douze ans », ce que la Genèse ne nous
avait pas appris. C'est donc à très bon droit que les fils de Jacob ont
vengé leur sœur. S'ils ont péché, c'est pour avoir parlé avec malice aux
Sichémites, pour avoir agi artificieusement à leur égard (i). C'est le
seul blâme que leur infligent tout incidemment les Jtibilés. Ils n'ont
garde de rappeler que la fraude consista à amener ces Gentils à se
laisser circoncire pour qu'on put les massacrer tout à l'aise (5). Il leur
aurait été d'autant plus difficile d'excuser les fils de Jacob du meurtre
de gens circoncis, qu'ils tirent plus loin de l'incirconcision des Siché-
mites la raison d'être de l'action des enfants d'Israël (6). La mise à
doit exterminer par le glaive tous les hommes de Sichem parce qu'ils
ont commis une infamie dans Israël. Et le Seigneur les a livrés dans
la main des enfants de Jacob pour qu'ils les exterminent par le
glaive » (7). Siméon et Lévi n'ont fait qu'exécuter les premiers la loi
di^àne qui iuterdit de donner une fille d'Israël à un Gentil le père :
ou le frère qui livre ainsi sa fille ou sa sœur doit être lapidé, la femme
doit être brûlée et le Gentil doit périr aussi (8). Cette loi est toujours en
vigueur (9). Elle est formulée dansles paroles mêmes que la Genèse (10)
met sur les lèvres des fils de Jacob lorsqu'ils veulent tromper les Si-
chémites, et dont les Jubiles leur font un titre de gloire « Nous ne :
(1) Genèse, 34, 30 et49, 5-7. — [V Genèse, 34, 1. —(3)30, L>. — (4; 30, 3. — (5) Genèse,
34, 13-17 et 25. — (6)30, 12. — ;7) 30, 5-6. — (8) 30, Ml. — ,9) 30, 10. — (10) Genèse,
34, li. — (11) Dans la Genèse : « notre sœur ». — (12) 30, 12.
LE LIVRE DES JUBILES. 33"i
homme d'Israël de prendre une femme chez les Gentils. S'il le fait ou
le laisse faire, il s'attirera toutes sortes de malédictions (1). Aucune
offrande, aucun sacrifice ne pourra expier cette faute (2). Voilà pour-
quoi l'ange ordonne à Moïse de témoigner à Israël : « Vois comment il
morceaux des Jubilés^ il les bénit à son tour et leur prédit les plus
glorieuses destinées, à Lévi surtout, comme prêtre du Seigneur dans
Israël (15).
30, 14-15.
(I) —
2; 30, 16. (3j 30, 17. —
(4 30, 18. —
(.5) 30, ly. —fj) 19, 9. — —
(7) 32, 21. —
(8) 30, 23. (9) 30, 20.—
(10) 30, 25. Charles traduit « reprocha » à ses fils, mais en corrigeant le texte pour l'har-
moniser avec la Genèse. L'éthiopien et le latin des Jubilés, loculus -est ad tUos, sont
formels, et tout à fait daccord avec l'esprit qui anime la narration.
(II) 30, 26. —
(12) 31, 1-3, et Genèse, 35. 1-7. —
(13, 31, 7.— ;i4) 31, 12.
(15) 31, 13-17. Celte exaltation de l'exploit de Lévi à Sichem est absolument contraire aux
Tues rabbiniques sur ce passage de la Genèse. Cf. B. Béer, Das Buch der Jubilaenund sein
VerhûU.niss zu den Midraschim, 1856, p. 50.
336 REVUE BIBLIQLE.
Jacob est rempli de joie à la pensée que cette bénédiction est inscrite
sur les tablettes du ciel et qu'il y a une espérance éternelle pour lui
et pour ses fils devant le Dieu de toute chose 1). Peu après, éclairé
encore par un songe de Lé^'i 2), il l'instituera prêtre du Seigneur et
les livres qu'il tenait d'un ange (5) et ceux de ses pères.
Il est remarquable néanmoins que si notre auteur a fait répandre
les bénédictions d'Isaac sur Lévi, il n'a pas osé le faire bénir expressé-
ment par Jacob. La contradiction avec Genèse, xlix, 7, lui a paru trop
forte. Seulement, au moment d'expirer, Israël « bénit ses enfants » (6 .
fils et ses alliés viennent l'assiéger dans Hébron avec une nombreuse
31, 32.
(IJ —
•2; 32, 1.— ;3 32. 3-15. [4 45. 16. — (5 32. 21-26. —
(6) 45, 14. — —
(7) 33, 16-17 et 41. 23-25, 27. —
(8^ 32. 18-20 et 41. 28.
(9) 32, 17-19. Dieu promet à Israël la domination sur « toute la terre »,
au lieu que dans
Genèse, 35, 10-12. il nest question que de la domination sur la Palestine.
(10) 31, 26. —
[W') 36, 20. —
(12) Gem-se, 25. 27.
(13^ 34, 1-9. Cf- Genèse. 48, 22, qui fournit, à la vérité, une base historique à ces ampli-
fications.
(14) 37 et 38. — (15) 38, 2 et 3.
(16' Comme modifications peu importantes,
on peut citer celles relatives à Débora et à Ra-
chel. Débora, nourrice de Rébecca, estvenue avec celle-ci en visitechez Jacob, 31, 30; voilà
comment il se fait qu'elle est morte et qu'elle a été ensevelie loin de la demeure de ses
maîtres, 32. 30; cf. Genèse, 35. S. Racbel suivit Jacob qui accompagnait Rébecca rentrant
chez Isaac. lorsiiu'en arrivant à Éphrata. elle fut prise des douleurs de l'enfantement et
mourut. 32. 31-3 i: Genèse, 35. 16-20.
LK LiVI'.E DES JL BILES- 337
bien que tes descendants seront étrangers dans un pays qui ne sera
pas à eux », etc. Les Jubilés écrivent « Il fut dit à Abraham Sache » "2
; :
Mambré et nous nous entretînmes avec lui » 3). Parla même se trouve
supprimée la difficulté de concilier le début du verset de la Genèse
avec la tin. —
Si Dieu met Abraham à l'épreuve, en lui demandant
il avait appris que Moïse allait châtier les Egyptiens, il voulait les sau-
,
—
Les magiciens n'opèrent de prodiges
devant Pharaon (9j que parce que le prince du Mastêmà leur prête
son appui 10 et que les anges leur permettent de faire le mal. Mais
,
ils ne peuvent pas porter remède aux plaies d'Egypte (11). parce que
les anges ne leur en ont pas donné le pouvoir 12 Au dire des Jubi- . —
lés (13), ce sont les démons qui ont tué les premiers-nés des Égyptiens :
d'après l'Exode, c'est lahveh lui-même qui les a frappés (li). — Dans
le récit bibUque, lorsque les Israélites se mettent en marche pour
quitter l'Egypte, lahveh dit à Moïse « Dis aux enfants d'Israël de se :
mettre en marche. Toi, lève ton bâton, étends la main sur la mer, et
mènes dans Vigoureux, Dictionnaire de la Bible, fascicule XXX. 1908, col. 2t37.
(2) 14, 13. (3) 16. 1. — —
(4) Genèse, 22, 1-2. —
17, t5-18 et 18, 12.
(5) (6) Exode, —
4, 24. — 48, 2-4.
(7) (8) — Exode. 4, 2.V2.i. —
(9j Exode. 7, 11, 22; 8, 7. (lO; 48, 9. —
— (11) Exode, 9, tl. 12) — 48, 10. -- (13) 49, 2-4. —
(li) Exode, 11,5: 12, 29, 30.
REVIE CIRLIOIE 1911. — N. S., T. VIII. 22
338 . REVUE BIBLIQUE.
fortifiés, puis les a frappés et précipités dans la mer pour exécuter les
lui » :
Ils taisent même les faits qui Tont provoquée les préférences de :
cun se délecte avec sa coupe comme moi avec cette coupe » (li). Dans
la Genèse, il disait « Ne saviez-vous pas qu'un homme tel que moi
:
(1) Genèse, 20, 2-18. — 2) 16, 10. — ,3; Genèse, 26, 7-10. —
(4) Genèse, 12, 14-20. —
(5)13, 13-15. — (6) 34, 11-12.— 7) Genèse, 37, 12-32. —
(S, Genèse, 37, 2-11. —(9) 30
et 31, 4-22 ; voir plus baut, p. 335 s.— (10) Genèse, 44, — 5. ( 1 1} 43, 2. — (12) Genèse. 44.
10. — 13} 43, 6. — 14) 43, 10. — (15) Genèse, 44, 15. — (16) Genèse. 44, 18-34.
340 REVUE BIBLIQUE.
Jjref (t). 11 n'a garde de dire que Benjamin « avait un frère qui est
mort » (2) ; pour éviter tout ce qui pourrait paraître une atteinte à la
vérité,il dit: « L'un partit etfutperdu, et iln'apas été retrouvé » (3).
—
Quand Joseph se découvre à ses frères, lui non plus il ne fait aucune
allusion aux pénibles circonstances qui lont amené en Egypte {k .
Les additions lui sont inspirées par des motifs analogues ou par le
désir d'exposer des vues personnelles auxquelles il attache une grande
importance. Quelque étrangères qu'elles soient à la Genèse ou à
l'Exode, elles sont absolument fondues dans la narration et présentées
sur le même pied que les faits empruntés aux Livres Saints. Nous en
avons déjà vu quelques-unes à propos de la création et de l'histoire de
Jacob (15). Il y en a d'autres.
D'abord, tidèle à son programme d'écrire une histoire divisée en
jubilés, il donne des dates partout, même là où la Bible ne fournit ni
indication ni base. Les événements sont datés d'une façon très pré-
cise,par jubilé, semaine d'années, année, parfois même mois et jour,
à partir de la création du monde jusqu'à l'exode. Par exemple pour
Abraham, l'éditication d'un autel à Béthel eut lieu la T' année, la
1" semaine (du iO" jubilé), à la nouvelle lune du P' mois (16); la
descente en Egypte, la 3' année de la même semaine de ce 40' ju-
(1) 43, —
(2) Genèse, 44. 20.
11-13. (3) 43, 11. — —
ii) 43, 16-20. (5) Genèse,—
45^ 5. _43, 16.
(6) —
(7) Genèse. 45. 17-20. —
(8) 43, 18 et 44. 9. — (9) 45. 6. —
(10) Genèse, 46, 31-47. 12.— (11 48, 1.— (12) Exode, 2, 15-4. 23.— (13) 20, 4; 22, 20;
25, 1, 5; 30, 7-17. (14) Exode, 3.— —
(15) Voir plu? haut, p. 329 à 33G. (16) 13. 8.—
LE LIVRE DES JUBILES. 341
meure avec lui. En cela, il fait montre de plus de piété filiale que
Cham et que Japhet, qui ont bâti des villes plus loin de leur père 1-2).
Abraham comprend et fuit dès son enfance l'erreur de tout le
genre humain, qui court après les idoles. Bien qu'il n'ait que qua-
torze ans, il se sépare aussitôt de son père pour ne pas participer au
culte des idoles, et il se met à prier le Créateur 13 Il cherche même ! .
que Sara y soit morte (8). Il supporte avec une patience admirable la
douleur que lui cause la mort de Sara 9), et il meurt dans les bras
de Jacob, en se faisant fermer les yeux par lui (10).
La tentation de Joseph est narrée avec des circonstances qui l'aggra-
vent et font ressortir la sainteté du fils de Jacob. La femme de Putiphar
le sollicite une année entière (11). Elle ne se contente pas de saisir son
vêtement il2), elle l'étreint et le retient de force dans la maison pour
l'entraîner au mal 13). Joseph a une telle horreur du péché, un tel
désir de fuir la tentation qu'il brise la barre de la porte (14). L'auteur,
qui a si fort abrégé l'épisode des songes, trouve qu'il ne. suffit pas de
laisser louer Joseph par les faits comme la Genèse 15 Il insiste sur .
,1) 11. 23-24. — (2) 12, 16-21. —(3) 12. 25-27. — (4) Genèse. 14, 17. —
(5) 13, 28.
— (6) 14, 20.— (7) 19. 1. — (8) Genèse. 23, 2. — lO^ 19, ::. — (10)23, 1-8.— (II) 39, /
8. —(12) Genèse, 39, r>. 9. 39. (14; '.i-lO. Genèse, 41. 47-49, 53-
57. —
(16) 40, 8.— (1?; 46. 12. — (18) 47. — (19;
4. 47, — (20)
9. 48, 4-10. — (21) 48,
2-3, 9-12, 15-17 et 49, 2-'i. — (22) 48, 14-19.
LE LIVRE DES JUBILÉS. :{i3
dans en se basant sur Genèse, ii, 17, pourquoi Adam est mort
IV, 30,
à 930 ans, ou avant d'avoir mille ans, c'est-à-dire « un jour com- •>>
plet; —
dans XIX, 11, qu'Abraham a épousé Cétura, parce qu'.\gar
était morte avant Sara; —
dans xlii, 25, que Joseph a fait mettre sa
coupe dans le sac de Benjamin pour savoir si ses frères étaient unis.
Dans leur ensemble, les Jubilés sont une œuvre d'un caractère per-
sonnel, La Bible en est la source principale évidemment, mais enfin
rien de plus. L'auteur emprunte également à des sources légen-
daires, aux traditions ou aux idées théologiques de son temps ou de
son école, voire même, semble-t-il, à des vues strictement person-
11 fond tous ces emprunts avec les données bibliques en une
nelles.
œuvre relativement homogène et assez bien ordonnée, dont tous les
éléments apparaissent au même plan. Par conséquent, il est fort im-
prudent, toutes qu'une des versions, latine ou éthiopienne,
les fois
ne fournit pas d'appui, de vouloir corriger son texte pour l'harmo-
niser avec la Bible, comme Charles le fait trop volontiers. C'est s'ex-
poser à aller à l'encontre de la volonté formelle de l'auteur, et donc
à fausser sa pensée et à en dénaturer l'expression. Nous avons vu à
quel degré il pratiquait le respect du texte sacré que supposent ces
corrections de Charles.
Enfin, il paraît vraiment excessif de vouloir se servir des Jubilés
comme le fait Littmann(3^, pour confirmer, même indirectement, la
théorie des sources du Pentateuque. Pour faire toucher du doigt la
fragilité de ces déductions, il suffit de rappeler quelques laits.
(1) Charles, The elhiopic version o/' the Ilebrew Book of'Jubilees, 1895, p. xvii.
(2) Schûrer, Geschichte des jvdischen \'olkes im Zciialter Jesu Christi, 4" édition,
1909, p. 372. »
(3j LiUmann, Zeitschrift der Deutschen morgenl. Cesellschafl, 1899. p. 370, et dans
Kautzsch, Die Apokryphen and Pseudepigrap lien des Alten Testaments, i. IL 1900, p. 37.
344 REVLE BIBLIQUE.
ferait partie du même Code (2). En revanche, il fait des emprunts par-
ticulièrement importants à ce qu'on appelle le document jéhoviste :
le « Code sacerdotal ».
En fait, l'auleurdn Livre des Jubilés n'a pas fréquenté les critiques.
Il n'a même pas une connaissance inconsciente des « sources » avant
la lettre. Il a puisé partout où l'intérêt de sa thèse le commandait,
et il se trouve que tout prêtre qu'il est, il a puisé et aussi taillé et
[A suivre.)
Krançois Martin.
Ainsi l'armée ninivite drainait, sur son passage, toutes les forces
disponibles des régions vassales. Le ravitaillement s'effectuait sur
place, si bien qu'une énorme masse d'hommes bien équipés et appro-
On la franchit avant
visionnés se pressait à la frontière égyptienne.
l'arrivéedu nouveau monarque. La ville de Karbanit. située dans
la région orientale ou centrale du Delta (81, fut le premier point
(1) Combiner pour le récit de la première campagne le cyl. de Rassam. 1. 52 ss. avec
Rm. 3 [KB., II, p. :>38 ss.; et K. 'l&l'i-K. 228 {ibid., p. 236 ss.>.
(7) On voit que les scribes, tout en s inspirant des listes précédentes au i>oint de vu»
géographique, savaient y introduire les modiûcations nécessaires au point de vue historique.
(8) Maspero, Histoire ancienne..., III, p. 381. n.
'».
LES PAYS DIRLIQIES ET L'ASSYRIE. 347
forteresse, et, pour sauver sa vie, il monta sur un bateau, quitta son
camp, s'enfuit tout seul et entra dans Thèbes Xi-'u=i n: (3). » Après i
d'armes (5).
TÎUe d'eau. Réunis donc maiulenant le reste de l'armée, viens camper contre la ville et
prends-la, pour que ce ne soit pas moi qui prenne la ville et pour qu'on ne l'appelle pas
Bible appelle ]':'^ et que les Annales dWsourbanipal écrivent .S^-'^-^^^/ (1) ;
chérib {RB., 1910. p. 508), qui aurait été intronisé en Egypte par Asaraddon.
(6) Dans K. 2675 et K. 228, recto, 33 ss. {A7>"., II, pp. 102-103, note).
venue l'an 666 av. J.-C. semlilait devoir assurer la paLx en Egypte (8i.
Les armées assyriennes, qui étaient venues renforcer les rois vassaux,
purent reprendre le chemin de Mnive.
Ce ne fut qu'une accalmie. La graine des Pharaons n'était pas épui-
sée parla disparition de Taharqou. De Sabacon 'Jîa-ba-ku-u le fon- .
(2) Asourbanipal avait un culte spécial pour Nabou Xéboj, le dieu de l'écriture.
(3) La date de cette mort d'après Ma^I'Eko, Histoire aiicienni-..., III. p. 396.
(4) RB., 1010, p.50î.
(5) C'est bien ainsi qu'il faut lire le nom d'abord transcrit Ur-da-ma-ni-e cf. Stcindoi; k i
entourée par les eaux, elle dont la nappe liqidde était le rempart et
qui avait les eaux pour muraille ? L'Ethiopie était sa force, ainsi que
l'Égvpte; c'était sans fin! Pont et les Libyens étaient ses auxiliaires.
Pourtant elle s'en alla, elle, en exil, captive: pourtant ses enfants
furent écrasés aux carrefours de toutes les rues; sur ses nobles on
grands furent chargés de chaînes. »
jeta le sort et tous ses
Que devenaient, durant ce temps, les pays bibliques proprement
dits? Ils gravitaient dans l'orbite du vainqueur, et nous avons vu avec
quelle jactance Asourbanipal. comme son père Asaraddon, se complai-
sait à compter un à un les vassaux qui s'échelonnaient dans la Syrie,
la Phénicie, la Palestine, laPhilistie et la Transjordane, Cependant, la
Phénicie était toujours disposée à prêter l'oreille aux excitations qui
lui venaient d'Egypte. Les marins de la côte apportaient les nouvelles
mer, n'avait pas gardé mon ordre royal et n'avait pas écouté la parole
de ma lèvre (3). » Les troupes (jui revenaient d'Egypte, aidées parles
vaisseaux des villes fidèles, firent le blocus de l'Ile : « Je captai ses
roules sur mer et sur terre. » Ba al cria grâce. Pour sceller sa sounùs-
(^1) Xah., m, 8-tO Irad. van Hoonacken. Schiader, Maspero, van Hoonacker s'accordent
à reconnaître dans le passage du prophète un souvenir très clair de la dévastation par les
troupes d'.\souibanipal.
(2) RB., 1911. p. 211.
(3) Cyl. de Rassam, II, i9 ss.
LES PAYS BIBLIQUES ET LWSSYRIE. liDl
sion, donna Tune de ses filles et plusieurs de ses nièces, qui aug-
il
roi. Leurs noms, bien phéniciens, méritent d'être signalés comme nou-
et fit pour eux ce qu'il avait fait pour l'Égyptien Néchao « Je les :
revêtis d'un habit aux couleurs variées, je passai à leurs doigts des an-
neaux d'or et leur permis de se tenir debout en ma présence 11 » ( 1.
(5 RB., 1911, p. 204. Ri'nurquer l'élément .S«/u7 (le dieu des Ciliciens, Sandon, Sandes
dans chacun de ces noms.
(6) Interpréter l'expression e-me-dn mâ(i-h( iCyl. de Rassam, H, 8i; d'après RB., 1910.
p. 506, n. 2.
•') Contparer Â-bi-ba-al {RB., 1911, p. 211 .
(9) Comparer Bu-du-ilu,iov des Ammonites au temps de Sennachérib {RB., 1910, p. 508 .
Gygès [Gu-gii, Gu-ng-gu), le dieu Asour qui m'a procréé révéla mon
nom en songe Prends les pieds d'Asourbanipal roi d'Asour » Docile
: !
semble que, vers l'an 660 av. J.-C, ces xMannai s'étaient ligués avec
les Cimmériens pour une action commune. Gygès avait eu raison des
Cimmériens. L'armée d'Asourbanipal fit une tournée triomphale chez
les Mannai (6). Leur roi, Ahsêri, fut tué par ses propres sujets. Le
(1) Combiner les données du cyl. de Rassani, H. 1)5 ss. avec cvl. E, l-t2 [KB., II, p. 173.
n. 20).
et comme concubine royale Fune de ses filles. Son tribut annuel fut
augmenté de trente chevaux.
Cependant les Mèdes s'agitaient sur la frontière orientale. Les craintes
d'Asaraddon n'étaient que trop fondées lorsqu'il questionnait anxieu-
sement son dieu soleil concernant ces envahisseurs (1). Un chef iranien,
Biriz-hadri, avait groupé en une seule masse les cantons jusque-là
séparés (-2). Les Assyriens eurent à réduire soixante-quinze forte-
resses (3). Le pacha de Loubdi, sur
assyro-médique, eut la la limite
tête tranchée. On apporta ce trophée à Ninive comme jadis la tête
d'Abdi-Milkoutti et celle de Sandouarri (4).
A le temps de souffler qu'un messager
peine Asourbanipal avait-il eu
arrivait de Babylone où régnait Samas-souma-oukin, le frère du roi
d'Asour. L'armée babylonienne n'était pas comparable à celle de
Ninive et, en ce moment, elle venait d'essuyer un lamentable échec.
Les Élamites, sur lesquels dominait Ourtakou, l'ancien ami d'Asar-
addon (5i, avaient fait soudain irruption en Chaldée, et « comme des
sauterelles » couvraient tout le pays (6). C'était une véritable félonie,
car, raconte Asourbanipal « lorsqu'il y avait eu une disette et une la-
mine en Élam, je lui avais envoyé (à Ourtakou) du blé, qui fait vivre
les gens, et je l'avais aidé. Ses gens qui avaient fui devant la disette
et s'étaient installés au pays d'Asour, jusqu'à ce qu'il tombât de la
pluie dans son pays (7), ces gens-là qui vivaient dans mon pays je les
lui avais fait reconduire '). Sans tarder, les soldats de Ninive se mettent
(7) Comparer la descente des Hébreux en Ésypte par suite d'une famine.
(8) RB., 1911, p. 209. Sur les Gamboulou, MB., 1910, pp. 190 et 385.
(9) RB., 1911, p. 209.
(10) Ibid.
REVLE P.IBLIQLE 1911. ?'. S., T. Vl». O3
3:,4 REVUE BIBLIQUE.
avec Ourtakou !
1 ,. 11 périt de la morsure d'un sanalier. D'autres cliA-
dont le vrai nom est Tep-Houmban (3), s'était assis sur le trône d'Élam.
Sa première démarche fut d'écrire à Ninive j)0ur réclamer les fils
d'Ourtakou et ceux de Houmban-baldas H i qui s'étaient réfugiés .
battu. On lui trancha la tète qui fut apportée à Ninive et viat aug-
menter la collection de crânes commencée par Asaraddon et continuée
par son fils. Les inscriptions oflicielles s'étendent longuement sur les
péripéties de cette bataille [d). On illustra par des reliefs les épisodes
asneau s tandis que les autres chefs des Gamboulou étaient amenés
à Arbèles où on leur arracha la langue avant de les écorcher vifs (8 .
Cette fois encore le danger qui montait du sud avait été écarté.
Mais le fou couvait toujours sous la cendre et ce fut le propre frère
(1) La révolte de Bèl-iqisa et les agissements des Gamboulou dans le (vlindreB, IV. ôOss.
(2) ScHEiL, Ti'i les clamites-anzaniles, U, p. xxi.
(3) Ibtcl.
(4) RB.. 1011. p. 201. C'était le frère et le prédécesseur d'Ourtakou.
(5) Masi'Ero, Histoire (utcienne..., III. p. i06. n. 2.
(9) Lire le jugement sévère, trop sévère même, de .M. de Morgan sur les Assyriens {Les
prem. civilisations, p. 340 s.).
LES PAYS BIHLIOLES ET LASSVRIE. 35';
villes, des champs, des jardins et les gens qui y habitaient >-, sans
oublier « les soldats, les chevaux, les chars de guerre » (2). Nous
savons aussi que les Assyriens avaient marché contre TÉlam pour
défendre les frontières de Babylone. Mais Babel, rori;ueilleuse
cité, ne pouvait se résoudre à accepter la tutelle de Niuive. Les villes
(1) D'après Tiele, cite dans Maspep.o, Histoire ancienne..., II!. p- ^l"; n. 3.
(2) Cyl. de Rassain, III, 70 ss. Le récit de l'intronisation dan> III /•'.. 16, n' 5 (KB.. II,
p. 258 ss.).
médité le mal, ont commis une chose hostile, je leur enverrai une
affreuse mort. Par le poignard de fer rapide, par un abîme de feu,
par la famine, par la peste, j'anéantirai leur vie (4). » Ce signal
divin fut écouté et l'armée se mit en campagne. On marcha directe-
ment sur la Babylonie. Les cités de Sippar [Abou-Habbah), de Baby-
lone, de Borsippa {Birs Nimroud), de Koutha {Tell-Ibrahim) tom-
bèrent aux mains des Assyriens. La peste et la famine achevèrent
de jeter la désolation dans le camp de Samas-souma-oukin (5). En
Élam, une guerre intestine éclata. Houmbanigas II fut détrôné par
Tammaritou et mourut dans une mêlée. Au lieu de s'appuyer sur
pour qui la vie parut précieuse en sorte qu'ils ne se jetèrent pas dans
le feu avec leur maître, Samas-souma-oukin, ceux qui devant les
coups du poignard, devant la disette, le feu brûlant, purent s'enfuir
et trouver un refuge, le filet des grands dieux, mes seigneurs, auquel
on n'échappe pas, les renversa; aucun n'échappa, nul rebelle ne
(2) Ihid.
(3) RB., 1911, p. 214.
(4) IbicL, IV, 110 ss. CyL B, VII, 72 ss. CyL C. 88 ss. Cf. iWi.. II. \k 26G ss.
à Gygès. Le roi d'Asour s'était écrié « Que devant son ennemi gise :
que la divinité reconnaît. Tu as maudit mon père et sur lui s'est posé
le malheur. Moi, ton humble serviteur, bénis-moi et je traînerai ton
joug. ))
(1) Cyl. de Rassani; VI, "J9 ss. Comparer la description de la ruine de Baylone dans /s.,xiii,
20 ss.
Sur Tordre des grands dieux, mes seigneurs, je lui mis (à Ammou-
ladi une chaîne de chien et je lui fis garder la cage (7). » On se lanra
ensuite à la poursuite ài^V-o-a-te-', fils de Bir-Dadda. Asourbanipal ne
pouvait lui pardonner d'avoir trahi ses serments, car c'était le roi
d'Assyrie lui-même qui l'avait intronisé en lieu et place du fils de
Hazaëi auquel revenait la couronne. Le roi des Nabatéens, Nadnou.
devança les sommations d'Asourbanipal et vint en personne se dé-
clarer vassal de Ninive (8). Mais le fils de Bir-Dadda s'était échappé
et les Nabatéens ne le livrèrent pas. La soumission de Nadnou était
1) Ne pas le confondre avec U-a-a-te- lils de Hazai-l dont nouj parlerons bientôt. La
variante da-ad-da rend certaine la lecture de l'idéogramme d'Adad.
(2) Cvl. de Rassarn. VII, 107 ss.
(3) La ville a conservé le même nom. En même temps que labroiid, A-ourbanipal signale
Ua-u-ri-i-na 'probablement Han-drin non loin de labroudj : cf. Delitzsch, Wo log das
Paradies, p. 297.
(4) RB., 191 L p. 208.
,6) Sur le rôle de la reine chez les Arabes, RB.. 1911. p. 20S. Le titre de ( reine d'.\r*-
bie » est attribué à Adiyà par K. 2802, n. 1 KB.. H, p. 218, n, 1 '.
les chameaux comme du petit bétail, je les distribuai aux gens d'A-
sour. Dans mon pays, les chameaux se vendaient pour un sicle et
(3) D'après les identifications de Glaser (.SAj;:p der Gesch. xind Geogr. Arobie)ts,U,
p. 276 ss.).
savoir Abiiaté et son frère Aamou, tombent alors entre les mains des Assyriens. Mais, en
suivant la relation, on s'aperçoit que le second fils, Aamou, n'est fait prisonnier qu'après la
démonstration contre la Pbénicie (Ousou et Acre) dont nous parlerons plus loin : cf. cyl. de
Rassam, X, 1 ss.
LES PAYS Bini.InUES ET l.A»VKIE. 361
Ouaté était encore indemne. Mais la peste se mit dans >on armée et,
avec la peste, la famine, si bien que " pour leur faim ils mangèrent leurs
enfants » (2). C'était le châtiment dont les dieux vengeaient la félonie,
cœur dn dieu Enlilfi). » Et le roi décrit en détail l'action des dieux s'a-
charnant, chacun suivant sa spécialité, à la destruction de l'Arabie. Fi-
nalement les soldats d'Ouaté en eurent assez de résister au vainqueur et
de supporter les mille et une privations que la guerre leur occasion-
nait. Ils trahirent leur chef. Celui-ci fut capturé, et A>ourbanipal le
fit amener à Niuive 5; : « Sur l'ordre d'Asour
et de Bèlit. avec- le cou-
(6) Le sens Ae sirritu « corde ». comme dans le Poème de la création. IV. 117) cf. ;
Jense?!, KB., "VI. 1, p. 341 et Thcp.eau-Dam.in, Restit. mntér. de la Stèle des Vautours,
p. 45, n. 6.
Tèri, lequel s'était tenu du côté de son frère Abiiaté et avait lutté
contre mes troupes, je le pris vivant au milieu du combat. DansNinive.
ville de ma seigneurie, j'arrachai sa peau 'k. » (
cus depuis son palais jusqu'à la porte du temple (5), inaugurant déjà
les triomphes solennels des Romains. Puis, il se mit en prières et
exalta les divinités nationales qui lui avaient accordé de réduire tous
les ennemis d'Asour.
Et cependant lÉgypte était restée insoumise. Sans doute, son his-
toire, durant le règne de Psammétique, est des plus obscures (6).
Mais un fait certain, c'est que ce roi travailla jusqu'à sa mort (survenue
vers l'an Gll av. J.-C.) à reconstituer sur de nouvelles bases l'empire
des Pharaons. Son fils, Néchao 11, se verra déjà assez fort pour venir
se me-;urer avec l'un des successeurs d'Asourbanipal (7). Pour le mo-
ment, les Égyptiens se contentent d'avoir entre les mains Tune des
portes de la Palestine, la cité d'Asdoud dont le long siège était resté
légendaire Le royaume de Juda, grâce à sa vassalité vis-à-vis de
(8).
Nous avons pu constater
l'Assyrie, se trouvait relativement tranquille.
que Maoassé (690-G38 av. J.-C.) avait successivement contenté les exi-
gences d'Asaraddon et d'Asourbanipal. Mais des dissensions intestines
avaient éclaté dans Jérusalem et, pareil aux monarques d'Assyrie,
tion. Elles nous apprennent, cependant, que l'Arménie, elle aussi, spé-
cialement rOurartou (•^z-'IN s'était soumise en la personne de son roi
;,
(1) II Reg., XXI, 16. Comparer les cruautés d' Asaraddon. MB., 1910. pp. 201 et 217.
(2) II Reg., XV, 23 s.
nipal, le dernier des grands rois d'Asour, fut identitlé avec le contem-
porain de la chute de Ninive et, comme on attribuait cette catastrophe
à la mollesse du monarque, ce fut Asourbanipal qui hérita de cette
triste réputation. En outre, la fin tragique de Samas-souma-oukin au
Asourbanipal moiïrut l'an 625 av. J.-C. Il laissa deux fils, Asour-et-
il-ilàni-oukîn (abrégé en Asour-etil-ilàni) et Sin-sarra-iskoun (4). Le
premier régna un peu plus de quatre ans (5) et ne fit rien de re-
marquable. Le second vit s'écrouler sous lui l'antique empire de
Ninive et de Ghaldée. Nous avons traité ailleurs la question de la
chute de Ninive i6) et nous ne pouvons que répéter ici les conclu-
sions auxquelles nous sommes arrivé. La prise de la ville eut lieu
l'an 607 av. J.-C, sous le règnede Sin-sarra-iskoun. Elle fut accomplie
par un roi mède, à la tête d'une coalition composée des Mèdes et des
Scythes. La tradition se partage concernant le nom de ce roi mède :
(6) Dans Les Aryens avant t'yi-us (Conférences de Saint-Étienne, 1910-1911, p. 94 ss.).
LES PAYS BIBLIQUES ET L"ASSVRIE. 365
nouveau exercer son action sur les pays bibliques. Action bien pas-
sagère puisqu'un Aryen, le Perse Cyrus. finira par s'emparer de Ba-
bylone (539 av. J.-C. .
P. DUORME.
CHRONOLOGIE DES ŒUVRES DE JOSÈPHE
(1) Ces renseignements biographiques seront trouvés avec facilité dans la ] ie de Josèplie
écrite par lui-même, '(.'f. 1-7, 75 s.
(2) EtsiniE, BE., 111, 9, 2, éd. Schwartz. p. 222 : ['lûiar^-oç' Ttaçà 'Ptofiaiou; -iixo'jz-/ àvf,o
£7tiôoçô~axoç, w; a'Jîbv [XÈv àvaôÉse'. àv&fiâvîoç èrzi tf,z 'Pw[J.a;«ov Ti[ir,6r,va'. îTO/.sto;, loii; oï
dune fortune qui a été mainte fois esquissée de main d'artiste, Josè-
phe est redevenu, j>our les historiens contemporains, ta source fon-
damentale, indispensable, sans laquelle nous ignorerions presque
tout du milieu et du temps quil nous importe néanmoins à un si
haut degré de connaître, puisque c'est le temps où parut Xotre-Sei-
gneur, le milieu où fut prêché l'Évangile et où germa l'Église. Sans
revenir sur le détail d'une vie qui est dans toutes les mémoires, ni
aborder en ce moment la délicate critique de Josèplie historien ou
écrivain en général, il ne sera pas hors de propos d'examiner en quel
ordre et à quelles périodes de sa vie furent écrits les ouvrages que
nous possédons de lui. Ainsi que le faisait observer un jour Pline
le Jeune [2) à un lecteur passionné pour les œuvres de son oncle, même
1 1 Bien avant S. Jérôme les apologistes cnrétiens aimaient à invoquer l'autorité de Jo-
sèphe; c'est lui pourtant qui a le mieux indiqué, pour
justifier de sa propre admiration, les
motifs de cette sympathie manif'esdssime confifetur, propter magniludinem
: [Josephii.'i]
signorum, Chri&tum a Pharisaeis interfectum, et Joannem Baptistam vere propketam
fuisse e( propter interfectionem Jacobi apostoli dirutara Hierosolymam (De vir., l. /.;
cf. .i(/i-. Jovin., 1,39, MiGNE, PL., XXIII, 2»i5 et maint autre passage]. Naturellement le sens
de Josèphe n'était pas toujours celui qu'y découvrait saint Jérôme on en a excellemment :
pour preuve ce fameux témoignage relatif à Jésus; cf. Lagra-^ge, Le Messianisme, p. 19,
et RB.. 1898, p. 1.5(.iss.; Schurek, Geschichled. Jiul. Tolkes..., IK 544 ss. et Bere>'dts, Die
Zeugnisse vom Christentum ira slovischen « De bello Judaico a des Joseplius dans Texte
und Vnters. de Gebhardt-Harnack
N. F., XIV, i, 1906, p. 38 ss. S. Jérôme ne s'en embar-
:
oncle) ordine scripti nolum tibl. faciam ; est enim liaec quoqxie studiosis non injucundo
cogniiio.
(3) S. Jérôme (De vir., 13] lui lait honneur du livre in quo et Mfichabaeorum [iligne :
Macchahaeorum, éd. critique de Richardson, Texte u. Int., XIV. i, 1896, p. 16] suni
digesta martyrin, IV 1. des Macchabées. Photius [Biblioth., cod. 48; Migîte, PG., CIIl.
84,>met de plus sous son nom un traité TiEpl to-j KavTÔç, sans méconnaître la vraisemblance
d'une attribution pseudépigraphe pour un ouvrage d'inspiration chrétienne. Exposé de la
discussion dans Schurer. op. /., p. 90 s.
3(38 REVUE BIBLIQUE.
(1) Par exemple Antiquités, XX. 12, 1, ^ 268, cette indication des —
sera fournie, à l'oc- jiii
casion, pour rendre la recherche plus facile à ceux qui ont sous la main une des éditions de
Niese ; dans l'éd. Dindorf ce ch. 12 est numéroté 11, 'î. — C'est apparemment ce même projet
d'un ouvrage sur le caractère rationnel de la Loi qui est rappelé dans Antiq., I, prolog., 4,
g 25; 10, 5, j! 192; lit, 6, 6, ji li3; 8. 10. >! 223: IV. 8. 4. g 1!)8. Quant aux expressions
fréquentes « comme nous l'avons déjà montré ailleurs )>, ou « ainsi qu'on l'a indique déjà
ailleurs »,ou bien elles se rapportent à quelque passage antérieur de ses onivres, ou le —
plus souvent —
elles ne sont qu'une vulgaire distraction de copiste transcrivant inaciiinale-
ment sa source. Un tel procédé donne à rellécliir sur la composition historiiiue chez Josè-
phe. On sait du reste qu'il n'a point le monopole de celte reproduction inintelligente des
sources.
(2) On en a une preuve certaine, pour les livres de la Guerre, dans une lettre du roi
Agrippa II à Josèphe {Vie, 65, § 365) : r,5'.(7Ta ôi^>,8ov ty-jV p-jêXov... iii^m ôé (xoi xai •:«: XotTra;.
CHRONOLOGIE DES ŒUVRES DE JOSÉPHE. .{69
vers 100, même un peu après; aucune date n'est indiquée pour
Contre Apion, estimé seulement dernier ouvrage de Josèphe qui
le
pas sans doute que d'avoir des conséquences défavorables pour la va-
leur du livre estimé entre tous parmi les œuvres de Josèphe. Essavons
donc de grouper et de discuter à nouveau les éléments du problème.
Rappelons d'abord l'unique donnée acquise la date des Anti- :
quités. Au moment de
clore ce laborieux ouvrage, l'historien, qui en
est très fier et qui se persuade avoir été le seul homme capable de
note qu'il s'interrompt dans la treizième année du règne de
l'écrire,
(Il ScHÛKER, Geschichte..., 1% p. 77. Cette opinion, qui date de 1901, parait nuancer l'a-
vis que l'éminent historien exprimait dans son article Josephiis de la Rcalénculdopodie fiir
prot. Theol. •', IX, 377 et 379. daté de la même année.
(2) Ainsi que l'a pratiqué, par exemple. M. Maurice Croiset, His(. de la litlcr. (jrecque,
V, 442 ss.
(3j Hypothèse adoptée entre autres par M. Dessau, Prosopographin iinpej'H romani. Il,
69, n° 189,
(4) Antiq., XX, 12, 1, % 267 : ... t-?;; vjv ivscTWfjr,; Yjaipa;, r,-;: èstiv Tpicxa'.oïy.aTo'j u.kv
ÈToy; tt;; Aoaîxiavo'j Kaicapoç àf///?, s[>-o\ 6' àTtô '{E^iazia^ TiVJX-/\y.oa-îo^ Tc -/.ai ey.-co-j.
(5) On saitpar la lie, 1,^5, que Josèphe était né -w Ttpw-rw [i~t'-] '/;; Taiou Kat^aco;
r,Y£[iovîa;. Cette première année de règne de Caligula fut inaugurée le 16 mars 37. En com-
binant cette indication avecle synchronisme indiqué pour la 56® année de l'historien, Tille-
mont [Hist.des empereurs, I, éd. de Venise, 1732, p. 579 et 644; avait déterminé déjà ces
dates extrêmes de sa naissance.
(6) .4.vec M. GoYAU, La Chronol. de l'emp. rom., 1891, p. 170.
(7) Contre Apion, I, 9.
assuré pour le erec un concours qualifié li. C'est bien l'ouvrage in- ,
que Titus et Vespasien sont les deux héros de premier plan dans tous les
événements racontés. Ailleurs on retrouve encore sous la plume de
Josèphe cette mention du contrôle des anciens généralissimes de
l'armée romaine de Judée. Cette fois pourtant il y a déjà une nuance :
les deux empereurs ont sanctionné le livre, mais Titus en prend seul
la responsabilité et inscrit de sa main son visa élogieux et l'ordre de
publication du récit qui doit faire foi officiellement 2). Il y a, bien
sur, une précision moiadre dans l'apostrophe de Josèphe à Juste de
Tibériade. son rival littéraire«... Pourquoi n'avoir pas produit ton :
mais mamtenant que d'une part ceux-ci ne sont plus parmi nous,
et que d'ailleurs tu ne t'attends plus à être confondu tu t'enhardis » (3) ,
Ces vingt ans » sont sans contredit un des chififres ronds tout à fait
*^
cinq ou six ans près à quelle date le polémiste entend se reporter; carj
évidemment l'antithèse suggérée est que son récit à lui de cette
même guerre a été publié à l'époque ainsi déterminée par un trop!
vague à peu près (4).
A fond sur ce contrôle pereonnel de Vespasien, dont Josèphel
faire
est si fier, on a tout de suite un terme précis que l'achèvement de la]
Guerre ne saurait dépasser Vespasien mourut le 23 juillet 79. Il faut! :
(1) L. l.. I. 9. ^ 50 s. : -xTr,; aoi tr;; -pavuLaTcia; i\> -asaffy.suTJ Yîy£<jr.(AÉvr.;, /prjçâjieveJq
xifj'. Ttpô; Tr,v 'E/).r,vtÔa çjojvrjv ffvvîpYOî; jrpwToy; -rzwzuyj To*J; aÙTOxpaTopa: toO îioXéjiowl
Yîvoii.îvo'j? Oùîff-aT'.avôv xat Tirov r^liuinx Àaôïïv (lâpT-jpa;. Ilpwîoi; yàp oî'ôwxa Ta |5l'.oÀ:a (ceuil
de la Guerre)...
(2) Vie. 65, g .361 ss. : '0 [ièv vàp a-iroxpâTwp T:to; èx [xo/wv aùrûv (les livres de Josèphe)!
lêo-Arfir, TTjV Yvôifîiv toï; àvôpwiîoi; ^TtapaSoùvai -rwv Tipileuv, ùa-t yapà;a; tî; la-jtoO yf.çil làl
pi6).îa 5r,[ioff'.à)(ïat jtpofflTaÇev Çî 363i.
(3) Ibid., 'i 359 S. : ôià tÎ J^wvtwv OÙEffTCacjtavo'j xai T;to-j twv ayroxpaTÔpwv... xal paaiXéwd
'AYP'-~'Ta Ttsptôvco; iti... tt)-/ tdropîav oùx êsEpe; sic (XÉaov ; y»? î'-xofft ÈTtôv î'-xî; ^tyç9.\i.\i.érT(t
•tpô
xat Tcao' î'.SÔTwv £ij.=X/.£; rfi; axpiêcîaç Tr.v [xap-upîav ànosipsffôaf vûv S' ôi' îxeïvoi (iàv oùxét^
s'.ffiv (Xî6' YiULw/, £).£Yx9^i"'3t'. S' oO vosxîÇei;, TîOâppr.xa;.
(4) Il n'y a donc pas lieu de mettre autant de confiance là-dessus, que parait lavoir fait
cette Guerre que nous estimions depuis quinze à vingt ans en circu-
lation. 11 faut lire de près « Ici s'arrêtera pour moi ce qui a trait à :
(1) Cf. Antiq., I, proL, 1, i 4; C. Ap., I, 8, §46; 10, ^55 S.; Vie, 65, § 336.
(2) Guerre, prol., t, g 3 : TTpoy6£iJ.r,v àyà) toï; xatà tyjv 'Pwu.a;wv ^lyeuovtav 'E)).âo'. y/Mnar,
[xîTaoa),à)V â toï; âvw [BapSipoi; xf, TiaTptw (TuvTâEaîàvsTrejX»!'* 'ï^pôtepov àçriYïi(7a'70a(...
(3) Guerre, VII, 5, 7, '0_ 158 et 161 : Oùecîva'jiavo; Èyvw téulsvo; Elprivrj; y.axaffXîuào-ai- tayù
8è... £T£te),£Î(i)to... 'AvÉ8r,X£ Sa âvTaOôa xal xà è/. toô lîpoO twv 'IjySaîwv ypucyâ /.aTa(77.c'jà(7|Aata
1906, p. cxxxxiv brevi post a. 75. Pourquoi pas brevi ante a. 79?
:
(6) Aniiq., I, jjroL, 2. i? 6 : 'H5-/; (J.àv ou-/ xal Trpôxspov o'.zvorfir,y, ôxs xôv 7rô).£(Aov «juvÉypasov
xxX.
ô" ivxaOÔà xà xai xôv ypisîtv
(7) Tla'jGôxai (lo'. xy;; àp/a'.OAoyîa; jxï6' r,v tlÔasjjiov Y)p|à(jLY;v
Je ne vois pas que les critiques aient tenté une discussion de cette
difficulté. Si négligent que se trahisse mainte fois Josèphe à s'accorder
(1) Antiq., XX, 11. 1, j? 257 s. : 'ApX"^,v à/aêsv ô TtôXeijLo; oîUTÉpw u.£v stst tv); £7riTpon?,î
4>)vWpoy, 6wÔ£xâTto os xf,c >'épwvo; àp^r,;. 'A),X'... àxpiêw; -yvâSva'. îràpeoTcv toT; pou).o(i.évot; ivTU-
•/£Ïv Taîç ûk' i\i.o\) TTEpt ToO 'Iciuoaïxoû 7io)i[ioy pîgXoiç Y-Ypap-fJiévat;.
(2) 'Eîtl toOtoi; 8e y.aTaTra-Jffw ttiv àpxot'.oXoYtav... y.dv to ôeïov ÈTrirpÉTtr) xatà 7rEp!.5po[ir-,v
•jTTOyLVÔTW TtiÀiv TOÙ T£ iïo).£[j.ov XKi Twv TUjJ.êEorjXOTwv 7,11.17 (xÉ/pt if^z vûv ÈvEiTtaxT'/i; r;ii£pa:
{Ant., XX, 12, 1. ji 267). On a en quelque manière l'impression d'une seconde clausule ré-
dactionnelle : cf. la noie 7 de la page précédente.
(3) L'heureux souci que la postérité marqua de bonne heure pour l'héritage littéraire de
Josèphe semble devoir rassurer contre l'appréhension de quelque perte considérable.
CHRONOLOGIE DES OEUVRES DE JOSÈPHE. 373
(1) Et que la critique à tendance juive lui a reprochées avec une dureté qui confine
parfois à l'injustice. Précisément à propos de la complaisante énumération des faveurs im-
périales qui vient d'être rappelée on a écrit « Nulle part l'égoïsme et la bassesse de l'histo-
:
rien [Josèphe] n'éclatent mieux que dans l'insistance qu'il met à énumérer les bontés des
Flavius à son égard » (Hild, Les Juifs à Rome devant ropinion et dans In littérature;
Rev. des ét.juiv., XI, 1885, p. 172, n. 5).
(2) Dion Cass.. LXVII, 14, 2; contre les sectateurs des Tt.w 'lo-jôatwv rfii) on sévissait par
la spoliation des biens, l'exil ou la mort.
(3) Suétone, Domit., 12, 2, éd. Ihm 1907, p. 344 s. : Prueter ceteros (les empereurs
depuis Vespasien) Jiidaicusfiscus acerbissime aclus est; et Suétone fournit un exemple de
cette âpreté : un vieillard noiwgénaire soumis en public à un examen qui devait prouver
si oui ou non il était juif.
Dion Cass., LXVIII, 1, 2 (Nerva) 'loyoaVxoO pîoy y.aTaiTiàffôal xiva; GuvEywpnTE. Quant
(4) :
Th. Reinach, Les monnaies juiv., p. 52; cf. Ecruel, Doctrina numorum veterum, VI.
404 s. GoLDscHMiD. Impôts et droits de douane en Judée soîts les Romains; Rev. ét.juiv.,
;
se dérober, au point qu'on ne sait même s'il ne fut pas écrit peut-être
avant Rien de plus ne le coordonne à quoi que ce soit de la
la Vie.
que l'allusion à la Guerre et aux Aniiquités (1)
carrière de l'écrivain
comme à deux ouvrages antérieurs et la dédicace à un certain Épa-
phrodite, identique sans contredit à celui qui avait reçu l'iiommage
des Antiquités et qui reçoit aussi la dédicace de la Vie. La détermi-
nation historique de ce personnage n'est pas un vulgaire passe-temps
d'érudit. Dans la mesure où elle serait possible, il en découlerait
un heureux appoint de lumière pour le problème chronologique
examiné en ce moment. Puisque cet Épaphrodite fut pour Josèphe
un ami très cher, voyons d'abord si l'historien n'aurait pas trouvé
l'occasion de nous apprendre quelque chose de moins imprécis à son
sujet.
Dans le prologue des Antiquités Épaphrodite est « un homme
amoureux de toute espèce de science, qui trouve cependant ses prin-
cipales délices dans la connaissance des faits, ayant été mêlé lui-
même à de grandes affaires et à d'extrêmes vicissitudes de fortune
sans cesser de montrer une énergie admirable et un invincible amour
de la vertu ». Josèphe n'a pu lui refuser de tenter cette merveilleuse
entreprise d'écrire l'histoire de son peuple, car Épaphrodite « s'em-
ploie sans trêve à stimuler sur le chemin de la gloire tous ceux qui
sont de taille à faire œuvre utile ou belle (2) ». Cette rhétorique
apprêtée laisse du moins entrevoir un esprit ouvert et curieux, désin-
téressé aussi et en situation deprovoquer, d'encourager, de presser
de grandes entreprises littéraires et historiques.
La Vie se ferme, on Ta vu, sur une adresse à Épaphrodite, le ce
(2) Anliq., prol., 2, ^ 8 s. : 'Euaspôoico; àvrjp âiraffav [aèv toÉav T:atôïîa; -/jYaïtriXoj:, ôiaçs-
povTMç Ô£ -/«îpwv ijAUîipsai; :tpaY[iâxo)v, àrs ori tisfâXo'.; u.èv a'>r6; w.ùi,G%- •yzpàytj.arTt xai TÛ-/at;
ïtoXuTpÔTTOi;, i'i aitaT'. oï Ôa-ju-acr/jv çûrîîw; £7tt5ctÇd[.i.svo; I aj^ùv y.ai Tcçoaipcc-v àpexv;; àa£-a>t(vr,-
Tov. ToÛTw Sri TCE'.Oôaîvo; u; %\t\ toï; y_p;î?7:aov r\ y.a^ôv xt TipaTTSiv o-JvatjLîvot; '7-j,u.5t)oxa),oûvT'.
xat èjiaijTov alT/uvôiAevo; xtà.
(3) Traluction quelque peu libre de xpài-^-î àvopoiv : k iiomme très distingué ». ou mainte
autre nuance analogue.
(i) Dans les Œuvr. compl. de FI. Josèphe trad. en français sous la direction de
M. Théodore Reinach : tome VII, fasc. 1, p. 1. Cette publication inaugurée en 1900 et dont
lesvolumes devaient se succéder c à des intervalles rapprochés » (tome I, p. vni) nest pas
«ncore à m"itié réalisée: elle rendrait pourtant d'utiles services.
370 RENTE BIBLIQUE.
(2) II, 41, g 296 : loi Si, 'Er.a;p65'.Tc, fii/iffra Tr,v àXi^ÔEtav àvoczwv-'. v.a). o'.ol aï toï: ôacio)?!
Po'j).r,aou.£vo'.; Tîîol toù yÉvov; Tr.u-fov E-.ôÉva'. toîto -/.ai 'b t:ç>ô «ùtoO rrypi^Ow j3iéX:ov.
(3j Etiexne de Byzance, s. v B'.6ûvtov et les notes de Th. de Pinedo dans l'éd. de Leip-
zig 1825, t. IV, 282; cf. Tacite, Annal, XV, 55.
(4) SiiDAS, Lexicon. v 'Er:/.rr,-o:. renseignement conlest»' sans qu on voie bien pour-
quoi par Dess.w, Prosop.. Il, 36. n" 51.
(10) Cf. Cony, Archias, dans Pally-Wissowa, Real-EncijcI., II, 464, no 21. Il ne parait
avoir été question de ce grammairien ni dans X'Hist. de la littér. grecque de MM. Croiset,
ni dans la Gesch. der Griech. Litter. in der Alcxandrinerzeif de M. Susemihl, à moins
qu'ils n'aient eu en vue ce même personnage sous le nom d'Archibios, Croiset. V. 351; —
SiSEMniL. I. 369. —
suivant une conjecture ancienne de Bernhardy sur le passage de Suidas.
11) Le nom de ce préfet a passé de Suidas dans Dessau (Prosop., II, 384, n" 474j et de
là dans les listes de Sf.ymoir de Ricci, The Proefvcis of Egypi ; Proceedings Soc. Bibl.
Arc/i.. XXII, 1900, p. 377. n 23 et XXIV, 1902, p. 59, n" 23. Je n'ai su en trouver aucune
CHRONOLOGIE DES OEUVRES DE JOSEPIIE 377
nouvelle attestation dans les récents documents épigraphiques accessibles, ni surtout dans
les recueils d'ostraca et de papyrus qui nous ont pourtant rendu tant d'autres noms de
fonctionnaires romains en Egypte.
(1) Steph.. Thésaurus : \'eHUsfus, et Suidas lui-même è-îyapt;. :
plus puissant des hommes )> et si l'on a reculé devant une telle
tournure, n'était-ce pas déjà l'indice qu'on nuançait incorrectement
le texte en y accentuant le concept étymologique de puissance? Il y
a largement assez de transformations dans la fortune du rhéteur grec
pour motiver les termes qu'emploie son panégyriste. D'abord esclave
et marchandise à vendre, précepteur ensuite d'un fils de grande
famille, puis auteur goûté, —
les nombreuses citations d'écrivains
ultérieurs et la statue à Rome en font foi, — finalement richissime
propriétaire et bibliophile dans la capitale de l'empire : voilà tout
ce qu'il faut d'épisodes disparates et une situation assez en vue pour
correspondre aux indications de Josèphe. Afin d'ailleurs qu'on ne
se hâte point ainsi de eourii* droit à de grands événements politi-
ques lorsque l'historien juif écrit •^z-;xk:i:... -pâvi^acrt. on notera
:
(3) Voici le texte de Pliotius [Biblioth.. cod. 33; Migne, PG., ClII, 65) : 'AvE-yvâioer,
'loucTou Tiêîpiétoç xpov'.y.ôv, o"j v) ïTriypatr, « 'Ioucto'j Tiêîpiiwc ' ioyôatwv [iaai>iwv tûv iv toïç
(jT£'(ji(iao'tv — tables généalogiques — »... "Ap-/îTa'. oà xfjç lo-Topîai; àTtô MwOasw; -xaxaXrjYsi 8è so);
tikeM-zfiZ 'AypÎTtTîa toO éê5d|J.ou [jlèv tcôv àîro tyj; otxta; 'Hpwôou, uafâTov oï èv toî; 'louoaîwv
pafft),eù(7tv, ôç i:ap£>.aêe (jlèv ty;v àpxr,v in\ K)auô;ou, r,\)^rfir\ oè Itzi NÉpwvo; -/.ai Iti [Jià/Àov -jûÔ
OOsa-Ttactavoù, Tî)£"jTà oï ëxsi toîtco Tpaîavoù, o-j xal r, '.«j-opia xaT£/r,îcV.
(4) TeXeutS au présent, après des verbes à l'aoriste, malgré la coordination TîapÉ).ao£ (jlév...
(6)Sans doute ce verbe au présent paraît d'abord répondre assez à àp/_£T5:'., qui a inani-
festement pour sujet 'loùaToc, mais on supprime la corrélation ëw; t£),£ut^; '^YpInTra... :
380 REVUE BIBLIQUE.
sition très solide quand il élimine (1) les objections soulevées contre
le dire de Photius par diverses subtilités déduites d'expressions défa-
vorables à Agrippa dans les Antiquités et que Josèphe n'eût, dit-on,
pas écrites du vivant du roi, ou de l'extension qu'il donne à son
royaume (2), ou enfin de la connexion littéraire et clironologique
entre les Antiquités et la Vie : tout cela est en effet plus que précaire.
Précaire probablement aussi l'hypothèse de M. Stein par exemple (3)
que le § 65 de la Vie où Josèphe polémise contre Juste de Tibériade
serait une insertion après coup dans le livre depuis longtemps achevé.
On a déjà vu que l'argument de M. Dessau tiré de l'expression « vingt
ans » ne peut pas prouver grand'chose. L'identification tentée plus haut
d'Épaphrodite est cependant de nature à faire hésiter devant l'affir-
mation tardive de Photius. La date qui en découle se trouve d'autre
part en parfaite conformité avec la donnée générale de la Chronique
d'Eusèbe qui arrête apparemment l'œuvre de Juste et fixerait donc
aussi la mort d'Agrippa II dans la première année de Nerva (4). Dans
la Chronique du Syncelle une laconique mention de Juste de Tibé-
riade (5) est intercalée entre Nerva et Trajan. On ne voit pas le moyen
d'y chercher, avec M. Schùrer (6i, une confirmation de Photius disant
expressément la troisième année de Trajan. La Chronique d'Eusèbe
doit avoir utilisé Juste par Jules Africain; on supposait la même
chose de la Chronique du Syncelle (7), au début du ix" siècle, et
quoique M. Krumbacher (8) indique comme sources immédiates de
Georges le Syncelle les chroniqueurs alexandrins Pauodore et An-
nianos, il se pourrait bien qu'en fin de compte la source première
fût encore Jules Africain.
TîÀ£yTç Se..., nécessaire pour que la dale soit délinie. On prêterait de plus à Photius une
assertion peu intelligible, car si Juste était mort la 3* année de Trajan, il est donc difficile
qu'il en ait cependant achevé l'histoire.
-^
CHRONOLOGIE DES OEL'VKES DE JuSÉPHE. .ixi
(2; Der Chronograph aus dem zehnten JahreAntonins, dans les Texte und Intersuch
de Gebhardt-Harnack, XII, i, 1894, pp. 42 ss.
'3; Voy. Th. Rei>ach, Les mon. juiv.. p. 38; Schùrer, op. L, pp. 585 ss., en particulier
597, n. 43, pour les incorrections et les erreurs glissées dans ces légendes nuroismatiques.
(4; Doc(r. num. vet.. 111,493.
aussi par Clermont-Ganneau (1), sans parler des numismates les plus
distingués, ne sera plus contestée. Mais jusqu'à ce que des monnaies
de date ultérieure aient été trouvées, de quel droit invoquer la nu-
mismatique à Tappui du renseignement de Photius et ne peut-on pas
tout aussi bien la lui opposer? Au cours de 95, Agrippa II, roi depuis
50 dans la petite principauté de Chalcis, comptait déjà 45 ans de
règne, donc une vie déjà relativement longue puisque Claude —
dans Tentourage de qui il vivait à Rome —
avait voulu lui conférer
la royauté dès l'an 44, à la mort d' Agrippa P" (2). Il n'y aurait par
conséquent aucune invraisemblance à admettre la mort d' Agrippa II
à partir de la fin de 95 et avant l'assassinat de Domitien le 18 sep-
tembre 96. La date où Josèphe achevait à peu près d'écrire la Vie se
trouverait par le fait délimitée assez strictement entre les derniers
mois de 95 et le milieu de 96.
Ainsi se concevrait dès lors l'évolution de l'œuvre littéraire de
Josèphe. Mêlé par la force des choses aux événements qui semblaient
devoir anéantir le judaïsme et les Juifs, il éprouve le désir de se re-
dire à lui-même et de redire surtout pour l'édification des autres à
quel point ce drame a été poignant. D'autant que d'autres n'ont pas
craint de risquer ce tableau sans s'interdire même, pense-t-il, de le
défigurer. Il est donc urgent, dans sa conviction, de redresser toutes
ces déformations inconscientes ou criminellement tendancieuses;
c'est une œuvre de justice, une œuvre aussi de très opportune grati-
tude à l'endroit des grands vainqueurs, et comment ne pas voir que
c'est encore une amvre de piété nationale — sanctus amor patriae —
que de sauver, pour la postérité, l'honneur et l'héroïsme de la patrie
qui meurt? Et la Guerre fut écrite; elle jaillit plutôt, du choc de ces
sentiments qui réagissaient avec avantage les uns sur les autres, la
certitudedu contrôle direct et qu'on pouvait escompter franche-
ment antipathique dans les partis rivaux imposant quelque mesure
au langage, le souci de ne point froisser en haut lieu refrénant la pas-
sion, tandis que la conscience des choses vues, le souvenir cuisant
des angoisses vécues, l'image — précise encore mais grandie déjà
par un premier recul dans le temps et dans l'espace de toutes les —
grandeurs évanouies donnaient au récit chaleur, coloris et vie.
Ce livre achevé dans la forme grecque vers 77 ou 78 à peu
(Ij Vn édit du roi Arjrippu H ; Rec. d'arch. or., VII, 1905. p. 75.
(2) Antiquités, XIX, 9, 2. M. de Saulcy (Num.de la T. S., p. 316) fait mourir Agrippa 11
à l'âge de soixante-douze ans, en l'an 99 de J.-C. » et (p. 335) : « âgé de soixante-dix ans...
en l'an 100 de J.-C. »! La première donnée dérive probablement fi'Eckhel (III, i93); mais
quel en est le fondement ?
CHRONOLOGIE DES ŒUVRES DE JOSEPHE. 383
1
MÉLANGES
''2''2, "23, 36, 48, 51, ''231. Field ;2i n"a pas hésité à y reconnaître des té-
moins de la recension lucianique, car leur texte ressemble à celui
que citent saint Jean Chrysostome et Théodoret, et ils contiennent
les leçons signalées, à la marge du manuscrit syro-hexaplaire de
Milan, par la lettre lomad, initiale du nom de Lucien. Un scholion
anonyme sur le nom divin hm"!, relevé par Ceriani dans un manuscrit
des homélies cathédrales de Sévère d'Antioche traduites par Jacques
(1) C. H. Cornill, Dus Bucli des Propheten Ezechiel, Leipzig, 1886, p. 65 : « Am leich-
testen zu erkennen ist Lucian, Iheils wegen der von Field Orig. Hex. I Prol. pg. Z,A'V.V/,Y
f.vortfelllich charakterisierten Eigenthiimhkeit selner Recension, theils weil uns hier in
Chrysostomus und Théodoret ein besonders umfangreiches Material zur Contrôle vorliegt. »
(2) F. Field, Origenis Hexaplorum quae supersunt..., tomus I, Oxonii, mdccclxxv,
p. LXXXVIIl.
MELAMiES. 385
/6'X^ publiés par Cozza-Luzi, et dont Ceriani avait, dès 18!M>, détermine
C'est justement le TV//, sf/r. 162 qui nous fournit l'occasion d'écrire
sur la lucianique d'Ézéchiel. Ce précieux manuscrit d'une chronique
syriaque anonyme, citée trop longtemps sous le nom du patriarche
jacobite Denys de Tell Mahré, contient 123 feuillets palimpsestes,
1) Br. Mus., Add. 12, 15'.», toi. 302. Voir sur ce manuscrit et le début du sctiolion
W. Wright, Catalo(jue of syriac manuscripts in t/ie British Muséum acquired si/ice
ihc year 1S3S, London, 1871, p. 5:34-.546. en particulier p. 545.
(2) C. H. CoRSiLL, op. laud., p. 65 sq.
'3) O. Procksch, Studien zur Geschichte der Septuarjintu, die Prop/ieten, Leipzig,
tannique, dont deux ont été lus et publiés par Tischendorf et sont
connus sous les sigiesZ' et Z*^. Ceriani, avec une simple copie de quel-
ques feuillets du ]'at. st/r. i6''2, avait deviné que les fragments de
Londres et ceux de Rome sont à rapprocher; leurs écritures, infé-
rieure et supérieure, sont identiques.
En éditant (1 ) le texte grec des 129 feuillets palimpsestes qui se
trouvent réunis dans la chronique du Pseudo-Denys, nous avons pro-
posé le nom de Codex Zuqninensis resci'iptus ]'eteris Testamenti, par
allusion au lieu où le manuscrit actuel fut écrit, le monastère de
Zouqnin. près de Diàrbekr (*2). Le grec appartient à six écritures dif-
férentes, les six groupes de feuillets sont désignés par lessigies Z' àZ^'.
Une partie notable du Cof/ex Zuqninensis se rapporte à Ezéchiel;
c'est d'abord Z' avec cinquante-deux feuillets en onciale penchée des
vii"-vm^ siècles, puis Z" avec cinq feuillets seulement d'Ézéchiel, mais
plus ancien queZ\ ayant une petite onciale qui remonte au vi° siècle.
(1) Codex Zuqninensis rescriplus Veteris Testamenti, dans les studi e Testi de la
chrétien, à commencer par Bulletin critique, 1896, p. 321-327. Cf. aussi R. Duval, Za
Littérature syriaque, 2" éd., Paris, 1907, p. 196.
(3) Z sans aucun indice est Z" dans le cours de tout cet article ; là où il y a lieu, les
/.z'-, c'est-à-dire "J'^ 48 51 ''231 , ont une erreur manifeste a:vo)v. qui
s'exjilique certainement par une mauvaise lecture «le l'abréviation
2VWV = avOpoj-ojv . Le mot -zz^y-M'i a déclanché limagination d'un
copiste distrait, favorisé par le mot /.%'. que Lucien avait ajouté, il
et.
lucianique de LZ Jlidt.
\):ry.zz Tcov EÇîcpoiv tojv ,Vaez;j71ijv s'.r -.r;) xSi.r^-i Tr,v srtoTECxv 7:r,-/a)v r.t'n'C-
nous avons déjà dit que ce manuscrit est une copie travaillée, le texte
lucianique y étant retouché, en maint endroit, d'après le texte
vulgaire; —
xlv, 11 a omet /:'./•.; /.a', -z ce/.x—v t:j ';z\j.zz qui se trouve
dans VZ, mais manque, il est vrai, dans quelques autres manuscrits;
— xLvii, 9. un homoioteleuton a fait omettre -xv iz z y:i t-î.'/,hr, z
T,z-oc\j.z: £•/.£'. 'lr,zz-:y'..
7.r.o ^oppy. [J.iH ZT.'/.br/ v.y.: yz-j.y-.hr/ v.y.: -.zz'/wi /.y. r.'/.r,hzj: i.y.uyt /.y.'. hiûZXY.x:
^a/wjj'.v (1). Dans les deux manuscrits 22 et 48, la place d'honneur est
(1) Cette erreur suffit à démontrer que jI dépend, au moins i)our ce passage, J'ua ma-
nuscrit en minuscule des x'-xi« siècles ; si toutefois la note de Holmes-Parsons exprime
bien ce qui se trouve dans le manuscrit.
388 REVUE BIBLIQUE.
occupée par la leçon commune des Septanle : ... a^o ^oppa ocp[j.x-x
/.a', xpcyot [Xct' cyXcu Aawv 6jp£0i y.ai -sX-rai /.ai |3aAou(7i... La leçon
lucianique a été ajoutée dans la marge, de première main dans 48,
à une date que j'ignore pour '2'2. Enfin ,>^ a une leçon combinée,
c'est-à-dire qu'il a bloqué dans le corps du texte les deux for-
;j,î6' ozXwv y.ai xp\J.x~u)y y.y.i -poybn y.ai T:\rfiz'jz Xaiov y.ai 0o)pay.aç y.ai a77i',-
oa; y.ai 'izzpvf.taoÎKy.vx:; -tpi^r^zz^nx'. z~\ 7£ y.y.', ;3aAC'J7i 9'JÀa///;v ap[j.aTa y.z'.
Tpo*/oi [j-sO 07AOU Aawv ôupsoi y.at irEATai y.xi |5aXo'j!ji. . . Si singulier que
paraisse l'enchevêtrement des leçons dans le groupe a, il me parait
assez facile à expliquer, une fois admise dans son modèle l'omission
des mots a.T.o ^oppx à -r.ip'Ar^zzy-x'. ita 7£ : cette omission n'est pas fortuite, m
car le mot e-i s£ se trouve au début de la phrase, et dans Fancètre du
groupe a, il précédait immédiatement y-z '^zppy.^ c'est dire que, ici
ctv £'::t c7£ zav-£ç, a contient une leçon assez répandue : r.av-zz r,;:jc7iv
qu'on dit préférées par les atticistes d'Antioche, et qui, en tout cas,
sont de beaucoup les plus fréquentes jusqu'au chap. xxii, font place
tout à coup aux usages de la v.zvn,. Voici quelques exemples qu'il
serait facile de multiplier : r^ïôicsav, £Xa[j.6avo(7av (xxii, 9, 12) au lieu
de '/jaSiov, sXasJLÔavov ; r)X6oaav (xxili, 17); £ça-offT£XXocav (xxiil, 40, dans
SS, 5i, '2S1)\ l'impératif £'.t:ov au lieu de £.::£ (xxii, 1k \ xxiv, 23);
MÉLANGES. 38'»
i"jyy>au lieu de £y/££ xxiv, ;îj. D'autres exemples sont plus discuta-
bles,mais pourtant vaudraient d'être étudiés, tels zctiv (xxiv, 3),
auquel la lucianique préfère -.'ivi-.-.z 7£',sOr,7;v-:a'. avec un sujet neutre :
(XXVI, 16) au lieu du singulier de T'Z Tlidl, zvrJyr^z-.-y.'., qui est plus
conforme à la syntaxe classique.
Ces leçons du groupe a, qui cadrent mal avec ce que nous savons
des corrections de Lucien, ont tout d'abord contre elles de ne pas
ressembler au style de la première partie d'Ézéchiel. mais surtout,
elles sont condamnées par la continuité du style lucianique dans VZ
Thdt. Tandis que dans les vingt premiers chapitres, a se trouve rare-
ment seul contre VZ et Thdt à la fois, il se trouve tout à coup très
divergent de ces trois autorités, et le plus souvent, il n'en diverge
que pour donner soit les leçons tout à fait communes, soit des va-
riantes qui se trouvent ailleurs, particulièrement dans G'i et ///.
Voici la liste des principales variantes pour le passage xxii. 9-31, qui
est tout à fait au début de la section hétérogène, puisque au v. 3, a
contient encore la formule tacî As^e', astova-. y.jpccç (1).
poq y.x'. 'j.zK'.oz: LXX,' — £',ç -z 7(ovîuO-/;va'.] t:j ya)V£yOr,v3:i LA A'/ — ty;
cZAr^Qjvav) £v [xsaw ajT-/;ç 51 \ y.ai x'. yr^zx'. zzj £-"AY;0jv0r,7av £V [/.zzm ccj
LXX; — 26 tcv vo[xsv A 26 42] om. tsv LXX; — y.xbxpz'j /.xi ay.x^xz-
TC'J 42] xy,x^xpizj y.a-. y.xHxzzj 86 147 233 239 (... t;j y.xHxpz'j LXX);
(1) La leçon de V Z Thdt est la première; elle est suivie de la liste des autorités qui
s'accordent avec elle. La leçon de a vient après le crochet. LXX indique la leçon la plus
fréquente, ou tout au moins une leçon très fréquente.
300 REVUE BIBLIQUE.
— 27 t:j y.rSKt<zy.\ 'hr/3.z i^add. hexapl.) G''}, et sub aster. Q 88] om.
LXX; — 28 avaiTJTo) Q'"^' ^Z sub aster.)' om. LXX Thdt; — 30 -j^z
;jvai7.a L.YXj p. sic 49 90,' — 15 v/ 'ociq yiôpxi: LXX] sic Ta; 2Mpocç Q
()'2 88 106 i 47 t^l?^. Enfin une fois, les autorités sont partagées à peu
j)rès également, et la leçon de VZ Thdt paraît la meilleure : 31 tcv
Oi>[jLcv] om. -zv.
Eugène Tisseraxt.
MÉLANGES. 391
II
PASTEUR D'HERMAS
Li:
même Hermas fait sa prière dans sa demeure, et il est sur son lit,
:
gions supérieures, tandis que ses sens sont liés comme ceux d'un
homme endormi; et c'est alors qu'il croit voir un homme d'une extra-
ordinaire grandeur, qui L'appelle par son nom et lui demande ce qu'il
veut entendre et voir 2i. De part et d'autre encore, c'est le même
xai xaOtcavTo; £?; tyjv vt/.îvr.v, tl<7r,lbf/ irr,o ti; ivooço; t?) 6-bzi... y.oli r^mi'i.'j'X-ô u.î -/.àvù àvTr,(7~a-
(7â(i.r,v aïkôv. Poimandres. 1 (éd. Reitzenstein, p. .328) : èwota; |aoî hôte vevoixév/î; izzol twv
ôvTtov. xat u.îTîtop'.(76£;i7r,; tio'J t?]; oiavoîaç <j3Ô5pa, •/.a7a'7)^c6£'.<7wvTî twv cwitaT'.xwv \lo\) ctlnhir
•Tîwv, xa6â;i£p 0'. èv "jTtvw Pîoap-/;[jiivo'.... £oo:â-:'.va -jnEOfAîvÉôr, [aétow àTîîptopîcTw lUY/âvovTat y.a-
"kiîv (jLO'j TÔ ôvoy.a, v.al XÉYovTa u.o'." tî ^vj'/v. ruwjnrv. xal ^-.ifjO.nhi.'.;
392 REVLE BIBLIQUE.
(1) Hermas, loc. cit., 2 -.li-^v. (lov à-îTxdt/r.v Otio toO <ï£[xvoTi~o'j aYY-'-o^ tva [lïTa crou olxr,(7a)
Taç Xoiità; f,|X£pac tïj; Çwr,; soy . £ o o?a èyà) oxi TtâpsffTiv èxiteipâ^wv (jle, y.al Xéyw aÙTôi* ffù yap tîç si :
èycô Y^tp? ?^i!J'''-> Yivw<7/(0, co 7:apeô66r,v. >,éY£' [J^oi- oOy. ÈTrty'.vwcr/îi; tie; oo. çvi[i.î. èyw, çofftv, £Î|ii
6 uoi|Ar)v w TtapEÔôOr,;. Poimandres, loc. cil.: (frjjxl iyôi- cO vjp xî; el; èyw [aév, çrid'.v, eîjii 6
T0i(iàv5pT):, 6 Tr,; aùôîvtîa; voûr oiôa ô (îo'ij).ct y.cd <70v£i[xi aot Tzay'za.yov.
(.2) Hermas, loc. cit., 4 éxi Xa'/.oOvTo; aCiToO r;XXota)6r, r, tôsa aÙTOv xai ètïeyvwv aÙTOv. Poi-
:
mandres, loc cil. : toOto dnàjv r-iÀ/.ayr, tr, iôéa xac eOôéoj; Tzi-nix [loi Yivot/To por.^.
'3) R. Reitzenstein, Poimandres, |>. 13.
traduit dès lors par témoin et cette dernière signification est beaucoup
;
trop ce que \dent faire un pasteur dans la cosmologie des livres her-
métiques, tandis qu'un révélateur, un témoin des vérités mystérieuses
sur Dieu et sur le monde y est tout à lait à sa place. La thèse de
Granger, cependant, qui suppose un original copte non seulement au
Poimandres, mais encore à la Pistis Sophia et au lii-re de Jeu, parait
inacceptable à des coptisants tels que C. Schmidt ii, et nous ne sau-
rions non plus nous prononcer à son sujet. Mais quand il s'agirait
dans le Poimandres d'un pasteur des hommes, il resterait toujours
à montrer que le symbolisme dHermas, disons même tout le
symbolisme chrétien du Pasteur, ne peut avoir qu'une origine
hermétique. Or, il n'est pas dans r.\ncien et dans le Nouveau Tes-
taments de figure plus habituelle que celle qui consiste à représen-
ter Dieu sous les traits du bon pasteur, et à parler du peuple d'Is-
raël comme du troupeau choisi de Jahveh. Qu'il suffise de rappeler,
par exemple, le psaume xxii : Domimis régit me {r.zvi.xvn: [j.t), et nihil
inihi deerit ; in loco pascuae ibi me collocauit : et surtout le chapitre
SELï, Griechische Zauberpnpijn, ap. Denkscltr. der A'. A. Akademie der Wissenscft.
in Wien, 1888, p. 104, L 2373 ss.
le quatrième Évang-ile (2i, mais aussi dans les Synoptiques (3), dans
la première épitre de saint Pierre (4), et dans l'épitre aux Hébreux (5).
Ailleurs, elle est appliquée aux chefs des communautés (6); et la
I
piété chrétienne ne cessa jamais de rester fidèle à cet usage (7;. Point
n'est donc besoin de sortir du milieu originel dans lequel prit nais-
sance et se développa le christianisme, pour expliquer Teaiploi par
Hermas d'un symbole déjà traditionnel « Quand, dans la cinquième :
(1) Cf. encore II Par. ±8. l&;Zac/i. 11,7; Eccli. 18, 13. Ailleurs, les pasteurs sontles
chefs humains d'Israi-l Jerem. 3. 15: 23. 1 Zach. 13.7 Ezech. 34. Dans le livre d'Hc-
: ; :
noch, 89. 59 ss., les 70 pasteurs sont des anges; cf. V. Martin, Le Livre d'Hénoch,p. 217,
note.
(2) Joan. 10, 11 ss.
(7) Martyr. Polyc. 19, 2 Ignace, P/iilad. 2, 1. Il n est pas nécessaire de rappeler ici le>
;
(10) Cyrène, qui était une colonie arcadienne, a été un centre florissant des cultes herméti-
ques. Cf. Pseudo-Apllke, Asclepius, 27.
MÉLANGES. 39"
vcjç s'évanouit tout à coup dans la lumière qui est identique à lui,
et cependant il se différencie de nouveau, on ne sait comment, de
cette lumière, et il recommence à parler au voyant comme aupa-
ravant. Ces remarques ont été faites déjà par M. Dibelius '6), et plus
récemment elles ont été reprises par E. Krebs 7) trop exactement
pour que nous puissions encore y insister ici. Il y a lieu au contraire
de noter le caractère incomplet et arbitraire des rapprochements
faits par Reitzenstein, Qu'il y ait entre la vision d'Hermas et ceUe
{i)Psahn. 11, i.
(2) I Req. 17, 40, 43.
{i) Matih. 10, 10 = Le. 9. .3.
(4) EjocL 4. 2; 7, 9, 20; 8. 16; 14, 16; 17. 5,9; Xurn. 20, S.
(.5) Heruas, lis. 2, 4, 1; Vis. 3. 10, 7.
(d) Zeitsclirift fiir Kirclhengeschichte, 1905, p. 175 s,
Philon les décrit dans un passage célèbre {De uita contempL, 3) (1). »
Et c'est tout. Plus récemment le même auteur exécute avec la
même désinvolture la pensée chrétienne : « Il soutient en particulier
cette thèse que saint Paul connaissait les productions littéraires des
religions hellénistes à mystères, et que tout en les combattant il leur
a fait de nombreux emprunts. La vie et la pensée religieuse de saint
Paul se mouvaient dans une atmosphère analogue à celle des mys-
tères (2). » Tout à l'heure cependant, nous avons montré que la tra-
dition juive était de longue date familiarisée avec le symbolisme du
pasteur, et nous avons reconnu que dans le livre d'Hénoch les pas-
teurs représentaient précisément des anges. Il n'est pas jusqu'à la
transformation du pasteur qui n'ait son pendant dans l'apocalyptique
juive. « Cum loquerer haec in corde meo, lisons-nous au quatrième
livre d'Esdras, respexi oculis meis, et uidi mulierem in dextera parte,
et ecce haec lugebat et plorabat cum uoce magna, et animo dolebat
ualde, et uestimenta eius discissa, et cinis super caput eius (3). »
Mais tout d'un coup, la vision change : « Et factum est, cum loque-
bar ad eam, faciès eius fulgebat subito et species,coruscus fiebat uisus
pov Y) Ta xâÙJ.r, twv Ôsîwv àpExôJv xat ô'jvaiiïwv cpctvraffioOffOai- tto/àoî oùv xal ÈK).a),où(ïiv èv {iTrvot;
6v£i&07to).oû(JLEvoi Ti Tr,; Upa; çO.Offoçîa; àoiôi[ia côv^xaTa (M. H, 475, I. 22 ss.).
(2) Revue des Sciences pliilusophiques el lliéoloyiquesA. V (1911), p. 188. Cf. R. Reit-
ZENSTEiiV, Die hcllenislisc/ien Myslerienretigionen. Hue Grnndgedanken und Wirkun-
gen, Leipzig, 1910, |). lGO-207.
(3) l\ Esdr. 9, 38 ;éd. B. Violf.t, p. 278; Vis. IV, 3, 1-2).
MÉLANGES. 39"
IWEsdr. 8, 1. Déjà JxciiMxyy, Der H irte des Hermas (183.5), avait signalé de nombreux
(2)
points de contact entre Hermas et l'Apocalypse d Esdras. Cf. par exemple. ]is. 1, 3, Set
IV Esdr. 6, 17: —
Vis. 2. 4, 1 v.xi o-.à -ol-j-t,-/ l'Église) ô xoTao; xa-ïi^Ti^^r) et IV Esdr. 6,
:
55 : quia propter nos (les Juifs) creasti saeculurn; id., 6, 59; 7. 11 ; — Vis. 2, i, 3 : ypi-iï-.:
oSv ôOo P'.oÀapic'.a. et IV Esdr. 12, 37-38 : Scribe ergo omnia ista in libro quae uidisti...; —
Vis. 3, 1, 2 iCf. Vis. 2. 2, 1 : •rr,>;-fi<j'x:. xio/Àixi; -/.ai oîr.ffîi; toO y.upîo-j et IV Esdr. 6, 31 : .-«i
ergo iterum rogaueris et iterurn ieiunaueris seplem diebiiS, ilerurn tibi renunliabo maiora
— Vis. 4, 3, 5 . i/oso; vàp iyi'/izo et IV Edr. 10, 26 Et ecce subito emisit .sonitum uocis
:
nom était très courant dans l'antiquité parmi les salutations qui ter- ;
bien nous fournir des indications sur le nom réel de l'écrivain. Une
question beaucoup plus sérieuse se pose à propos de l'allusion faite
par Hermas à l'Arcadie. « Après la fin du livre qui va de la cinquième
vision à la huitième similitude, l'auteur chrétien ajoute un complé-
ment aux visions, la neuvième similitude. L'x';';ihzz \j.t-yMZ'.y.: le -:•?;;
(1) Zielinski, Hermès iind die Hermelik ; Archiv fur ReUyionswissenschaff, t. VUI.
p. 323 ss.
{^) Ap. Pétri, 4 éd. Preuschën. Anlilegomena-, p, 84, I. 14); Evang. Eu., fr. a (éd.
ses visions 5., et par conséquent nous n'y trouverions qu'une preuve
(2) Poimandres, xin xiv^ ; éd. Reitzenstein, p. 339 : È5A0J li «joj './.éToj -.-Evoyiivoy è::'; t?,;toO
ôpo-j; xaTaêâ'îîoj; \lz-7. tô aï Èaoo ôia/îxOr.vai... Dans une lettre du 11 mars 1911, le R. P. L\-
GaA.NOE aie fait remarquer que l'Arcadie était la patrie des bergers Arcades arabo . N'est-ce
pas parce que le personnage principal d'Hermas est un berger qu'on y ramené le souvenir
de l'Arcadie?
(3) Dans la Pistis Sophia, Jésus apparaît à ses disciples sur le mont des Oliviers, c. 2
(4; CcMONT, Les religions orientales dans le paganisme romain- Taris, 1909i,
Cf. F.
p. 341, note 41 « Son action 'de l'hermétisme^ a été. je pense, purement littéraire en Occi-
:
dent. On ne trouve pas de trace, que je sache, au moins dans le monde latin, d'une secte
hermétique avec un clergé et un culte. Les Heliognostae ou Deinvictiaci qui prétendirent
en Gaule assimiler le Mercure indigène au rhot égyptien, sont des gnostiques chrétiens...
L'hermétisme qui sert d'étiquette à des doctrines d'origine très diverse, a été inlluencé, je
pense, par la dévotion générale plus qu'il ne l'a suscitée. 11 est le résultat d'un long effort
pour concilier les traditions égyptiennes d abord avec l'astrologie chaldéenne, puis avec la
philosophie grecque et il se transforme en mèine temps que cette philosophie ».
(5) B. Violet, Die Ezra-Ai>okalyj>se. I GCS), l. c et p. 27CH1V Esdr., Vis. IV 1. 1).
400 REVUE BIBLIQUE.
vons guère affirmer avec certitude qu'ils n'ont pas eux-mêmes subi
des influences chrétiennes. D'ailleurs, la représentation du trône
et des serviteurs est-elle si rare et se rencontre-t-elle si exclusive-
ment dans hermétique? Malgré tout, je ne puis m'em-
la tradition
est fille de la Foi; ... les autres sont filles l'une de l'autre : elles
s'appellent la Simplicité (àxXô-vjç), la Science (è7:ia-i^[jLYj), l'Innocence
(à-/.ay.{a), la Chasteté (7£;/vèrr;ç). la Charité (Jc-^xT.r,) ... La Continence
naît de la Foi; la Simplicité de la Continence; l'Innocence de la Sim-
plicité, la Chasteté de l'Innocence; ia Science de la Chasteté; la Cha-
rité de la Science (Vis. 3, 8, 3 ss.). Mais ailleurs, dans la neuvième
similitude, la liste des vertus est différente ; celles-ci sont au nombre
de douze, et d'elles toutes il est dit : yZ-y.'. vàp a- TrapOévc. ojvi;xsiç çhl
cîj u'.cu 9, 13, 2) (1). De ces douze vierges, la pre-
Tcj OecD (Sim.
mière est la Foi (zt^tu) la seconde, la Continence (lyv-p^'^i^c) la
; ;
(1) Cf. J. Lebreton, Lea orùjines du dogme de la Trinité, Paris, 1910, p. 439 s.
(6) Tab. Cebet. 23, 2. Ces indications sont empruntées à F. X. Flnk, Patres Apostolici -,
t. I, p. 606, in h. l. Cf. A. et M. Croiset, Histoire de la littérature grecque, t. V,
p. 416, noie 2 : « 11 me semble qu'on sent aussi son influence (du Tableau de Cébèsj dans les
visions d'Hermas ».
(7) II Pelr. 1, 5-7. On peut utilement rapprocher le procédé de style employé dans ce pas-
REVUE BIBLIQUE 1911. — N. S., T. VIII. 2C>
402 REVUE BIBLIQUE.
xcv/.ix, 7:A£Cvs;{a, àTZT-r;, çOivcç, csXoç, bp-rr,, -pz-i-.eix, y.ay.ta ; et dix puis-
sage de la II" Pétri, de plusieurs textes des livres hermétiques. Cf. par exemple Poimandres,
5, 11 (éd. Parthey, p. 48); 11, 4 [id. p. 87); 12, 13-14 iid. p. 107).
(1) Poimandres, 13 (14), 7-10; éd. Reitzenstein, p. 342, 1. 8 ss.
(4) Plusieurs listes de péchés se trouvent déjà dans le ^'ouveau Testament : Me. 7, 21-28
(cf. J.-M. LAGR4NGE, Evungile selon saint Marc, in h. 1.); Rom. 1, 29 s.; I Cor. 6, 9 s.
et non chez les prophètes juifs, qu'il a pris l'idée de la parole di\'ine
et de la révélation (2). » Mais en même temps, ce même Philon res-
tait si altaché aux croyances traditionnelles de sa race, qu'il com-
mentait, dans la plupart de ses ouvrages, les livres sacrés d'Israël, et
qu'il metlait au service de ses coreligionnaires son talent d'écrivain,
qu'il supportait même pour eux dans un âge avancé les fatigues et les
dangers d'un voyage à Rome 3 Même lorsqu'il subissait l'influence
.
(1) Phil. 3, 5.
(2) E. Br.ÉBiER, Les idées philosophiques ef religieuses de Philon d'Alexandrie,
p. 316 s.
.
(3) Cf E. Bréhier, Philon, Commentaire allégorique des sai7iies lois, Paris, 1909,
p. IV.
(4) Ce sont là les litres doanés par M. Leereton à la première et à la seconde parties de
son livre sur les Origines du dogme de la Trinité. Paris, 1910.
406 REVUE BIBLIQUE. J
taines et il parait difficile d'arriver à des conclusions précises. Com-
ment veut-on. avec de tels documents, établir des relations de dépen-
dance et de filiation? Il se peut, dans certains cas, que les ouvrages
hellénistes, auxquels on ou contemporains
se réfère, soient antérieurs
des livres chrétiens; peut aussi qu'ils leur soient postérieurs,
il se
et c'est le cas le plus fréquent chez Reitzenstein autant dans son ,
étude sur le Poimandres que dans son livre plus récent sur les
religions hellénistes à mystères (1), où il veut montrer par exemple,
à Faide du Corpus henneticum, que saint Paul avait subi l'intluencc
de ces religions. Le même fait se produit encore chez Schermann i2 ,
Gustave Rabdv.
III
d'heure. Le motif de cet arrêt n'était certes pas l'intérêt que pouvait!
offrir cette mesquine localité la visite de quelques mauvaises cabanes]
:
à ces braves gens que le procédé était un peu vieux jeu et que le]
thot, du Dr Ehrlich.
2. — Ouâdv Jal)îs.
IM.A.M.IIK II.
Pliot. ou p. JauBsi'n.
I. Tell 'Ammatn.
DuAclv el 'Aral).
MÉLANGES. 409
Crotjuis de l'itinéraire.
HO RENTE BIBLIQUE.
(1) Caetani, Annali delV Islam, 15= an. de l'hégire, 31-40; 16^ an., 319 ss.
p. 593.
MÉLANGES. 411
naissante.
De l'ouély, nos chevaux nous emportent en un quart d'heure jus-
qu'au campement qui se dresse sur une plate-forme caillouteuse
dominant de quelques mètres la dépression embroussaillée où les eaux
abondantes de Vouàdy Badjib se fraient un passage. Une saignée
pratiquée un peu en amont amène par un canal une quantité d'eau
suffisante pour l'irrigation des champs situés dans la plaine d'e/-
Boueib. L'étendue semée de grosses pierres où se trouvent nos tentes
a été remuée récemment par des chercheurs clandestins d'antiquités,
dont le quartier général est Beisân. C'est é^idemment une ancienne
nécropole dépendante de la petite ville de Ammata dont il reste '
bâtis sur le Jourdain ; 2). Le succès fut de courte durée, car Théodore,
fils de Zenon le tyran de Philadelphie Amman), dont Amathous
était le repaire, infligeaau vainqueur des pertes sérieuses au moment
où celui-ci se retirait vers la Judée (vers 96 av. J.-C.'. Le condot-
tiere juif se vengea quelque temps après en" livrant la ville aux
instincts pillards et sanguinaires de ses mercenaires pisidiens et cili-
ciens (3). C'est non loin de là, à Ragaba, aujourd'hui Radjib sur le
{\) Des tombes pareilles se volent aussi à >'iinrin où nous sommes passés le 31 janvier ;
(1) Aiit. Jud. XIII, 15, 5 : àîtsÔavEv èv tûî; rcpaovjvrijv opot;, iroXiop.xwv 'Payaêà, çpo-jptov
Tuepav Toû 'lopoàvou. Cf. Scihekkr, GDJV. ', I, p. 284.
(2) Ibld., XIV, 5, 4.
(3) OnotitnslU'on (Lai^anle, |). '239) : li^txan xal vvv 'A[j.|i.«6oO; v.ô)\j:r, èv t?, FlEpata Tf,
(4) Josue, 13, 27. ïalmud de Jérusalem, Schcùi'iUi, 9, 2 : iDCy 712Â*. Les auteurs
arabes ont 'Amlà ^^. Aujourd'hui les Bédouins accentuent la première syllabe et lonl
sentirdeuv m. En 1154 de notre ère, Idrisi écrit que Jéricho, 'Amtâ et Beisân sont Us plus
bellesvilles de la vallée du Ghôr. Nous avons vu que laqoùt y place le tombeau d'Abou
'Obeydah. Cf. Le Stkange, op. /.,pp. 31, 393.
(5) Loca Sancla, p. 20. Schebi'ilh, 6, 1 : SilST NP^Zn.
MÉLOiGES. 413
deux ou trois tells sur les flaucs desquels les pierres des anciennes
constructions gisent parsemées: de rares tentes de nomades sur le
bord du Radjib roprésontent la population de l'endroit. L'un de ces
tells que nous avons visité avant la tombée de la nuit est situé dans
une boucle de la rivière qui, sur trois côtés, lui sert de fossé natu-
rel 'pi. II, ij. Au sommet, les arasements d'une forteresse à peu près
rectang-ulaire de 60 pas de long- sur iO de large sont encore très
visibles ainsi que la chaussée en plan incliné qui y donnait accès
(fisr. 1). C'est tout ce qui demeure du praesùlium 'k'cjy.a saccagé par
Alexandre Jannée; le milieu est occupé par des tombes sarrasines.
Sur la pente sud-ouest, deux fondations de murailles et un chapi-
teau rongé par la dent des siècles.
Le 2 février au matin, notre caravane franchit louàdv Radjib et
pénètre sur des terres que des paysans arabes travaillent pour le
compte des Bédouins Bclaouné. Un des nomades de notre escorte a
refusé d'aller plus avant. Les espaces inconnus qui s'ouvraient au
nord l'ont effrayé. Comme il appartient aux Abou Nsêr. tribu qui
gyrovague aux environs de Jéricho, il a pensé qu'il était suffisam-
ment éloigné de ses pénates de toile pour que la route de son re-
tour olirit des difficultés non chimériques. Le 11 février nous retrou-
vons Salem (ainsi se nommait le guide en question auprès de 'Aïn
Douk, encore tout ému du mauvais pas dont la Providence ^ient de
le tirer. Voici en deux mots le récit de ses tribulations. A peine
nous a-t-il quittés qu'il serre entre son cuir de la plante des pieds
et celui de sa babouche les medjidiés qu'il a touchés comme émolu-
reçut sous leur tente une hospitalité qui lui remit les esprits en place
et finitpar regagner son campement, avec son argent dans la se-
melle. Les deux Qa'abné qui l'avaient fouillé soigneusement n'.avaient
pas réussi à mettre le nez sur la cachette.
Les gués du Jourdain et les chemins qui y mènent ont été depuis
longtemps le théâtre de faits autrement graves que ce morceau de
chronique locale. Cependant, la manière varie peu. Salem se défen-
dant d'appartenir aux Abou Nsèr et reconnu comme tel à son lan-
gage rappelle ])eaucoup l'épisode du Sihboletli qui se déroula préci-
sément aux passages de la région de 'Ammatâ, puisque ce fut après
s'être concentrés à Saphôn que les Éphraïmites prirent la fuite une
fois vaincus par Galaad (1). D'une tournure moins orientale est le récit
de Guillaume de Tyr, relatif à la défaite des Turcs venus pour re-
prendre Jérusalem en 1154. Le gros de l'armée franque se trouvait
à Naplouse. Suppléant au nombre par la valeur, la petite garnison
de Jérusalem culbuta furieusement les infidèles sur le mont des Oli-
viers et les harcela tout le long de la route de Jéricho en leur fai-
sant beaucoup de mal. Cependant les soldats de Naplouse, avertis de
cette irruption des ennemis et de leur retraite, venaient occuper les
gués du Jourdain et ajouter l'extermination (2). à la déroute
Pendant que Salem était aux prises avec les difficultés de la vie no-
made, nous poursuivions notre chemin vers le nord, guidés par un
nègre venu de Mizàr. Un quart d'heure après le départ, nous passâ-
mes à proximité d'une quantité de rocs arrondis, pressés comme un
troupeau. C'est ce qu'on appelle dans le pays les brebis d! Abou Obei-
dah. Le troupeau pétrifié nous occupait encore quand nous franchî-
mes la ravine nommée Abou Halâ « le père de la solitude ». La route
longeant alors le pied des montagnes est ferme et pierreuse; des
grottes s'ouvrent dans la paroi rocheuse et la campagne qui s'étend
vers le Jourdain est cultivée. Le k/iirbet Fakaris (3), qui se trouve
à un quart d'heure au delà des brebis en pierre, présente un en-
(1) Jug. 12, 1-7. Cf. LA(.RANGE,y/>. /., pp. 207 ss. Vers le conduent de l'ouàdy Radjil), se
trouve le gué Turinnûnyeh. Directement à l'ouest de Deir 'Alla sont les gués Abou Si-
dreh et Oumm Sidrch, signalés dans la carte de Schumacher.
(2) Qui vvro apud Neapolim convcnerant,... unanimiter egi-edientes, ad Jor-
XVil, 20 :
que les Aral)es connaissent sous le nom de doum .»3-^) (2). Nous re-
marquons aussi une solanée appelée djinnen par les indigènes : son
de la grosseur d'une orange fournit une poudre qui sert à
fruit faire
cailler le lait. Notre guide nous encore savoir, en nous montrant
fait
àe% jyommiers de Sodome '.J:^;, que la bourre produite par ces ar-
bres est employée actuellement dans le Ghôr à faire des coussins. Les
Arabes du moyen cige en usaient de même 3). L'un d'eux a tracé de
cette plante cette peinture assez réaliste : « Elle produit des pommes
qui ressemblent aux bouche des chameaux
chairs sortant de la
quand ils mugissent. Il s'échappe de l'intérieur de ces fruits une
substance inflammable que l'on préfère à toute autre pour allumer
le feu. Elle sert aussi à bourrer des coussins et des oreillers » (4).
En somme, c'est la flore des bords de la mer Morte qui réapparaît
icicomme en général sur tous les points irrigués du Ghôr et de la
Ara bah (5.
(1) Ihn el-Beitiiar. Traité des Simples, Xoiices et extraits ries mss. de la Bihl. Nat.,
XXV, p. 214. Cette huile « est chaude et renommée contre lengourdissement : elle est bien
connue dans le Ghôr ».
[1) P. 238.
(31 P. 448.
(4;, Ibid.
(5) RB., 1909, pp. 600 s.
416 REVUE BIBLIQUE.
que les Grecs appelaient Aw-bç à'vpioç, le lotus sauvage, sorte de trè-
fle décrit par Dioscoride (1). Nous sommes à présent au point où la
vallée du Jourdain est le plus resserrée tout au plus six kilomètres de
;
Ce nom provient du gros tell el-Qarn situé surle Jourdain non loin de l'aboutisse-
(3)
ment de l'ouâdv. On trouve aussi les deux noms réunis, Qarn el-Eimmar.
MÉLANGES. 417
définitive (1,. Emporté lui aussi par la peste d'Amwas 639;, il repose
vraisemblablement dans le 7nizdr qui garde son nom. au cœur même
de la province confiée à son administration.
C'est à l'intérieur de Xouady Jobîs (pi. 1. 2 que nous prenons
notre repas de midi. Un cours d'eau limpide serpente au fond de la
large vallée, à travers les roseaux et les arbustes épineux. Les pentes
sont formées de conglomérats de petits galets au milieu desquels on
voit engagés quelques blocs de grès. Vers la « porte de l'ouàdv >^
neurs funèbres, conduite que David trouva louable. Plus tard, David
fit transférer leurs ossements à au pays de Benjamin 2).
.Séla.
(1) Cf. C\ETA.M, Aiinali deli Islmn. 16' an. de l'hégire, 320. Ce n'est donc plus le Scha-
rablt qui embarrassait naguère Neslle li-anl la carte de Fischer-Gulhe. Quant à Scftar-
habil, d'après une inétatliese que se permettent ordinairement les Arabes suivant le prin-
! cipe du moindre effort, c'est une sinriple fantaisie d'y voir avec Mommert, sur le dire d'un
missionnaire, le sens de " ruine d'Abel >' ZDPV., 1907, p. 212; 1908. p. 296.
X "y^f *^*''r*' -^ug.. 21. 9: I Sam., 11;31. 11-1.3: H.So/»., 2,5; 21. 12; Chron., 10,
11.
alors à travers des champs de blé et des prairies envahies par les as-
phodèles, nous arrivons au bout de trois quarts d'heure sur un
terrain semé de ruines ce sont des fragments de colonnes en granit
:
ments sont seuls visibles fig. 3). Cette colline, plus élevée que la ville,
est abrupte et d'un accès difficile. Le sommet, tronqué par une plate-
forme plus spacieuse que celle qui termine les cônes artificiels de Ma-
chéronte et d'Alexandrion, est un des plus remarquables belvédères de
la barrière orientale du Ghôr. Immédiatement au sud s'étend une série
dt' labaqàt ou plateaux; au nord, c'est tabaqdt Fa/iil et ses ruines;
en avant, la vallée du Jourdain depuis l'extrémité méridionale du lac
de Tibériade, moirée par les méandres du fleuve qui s'empourprent
sous les reflets des nuages embrasés au crépuscule, la plaine de Bei-
sàn avec ses nombreux tells et ses cours d'eau infinis. Au fond, Gel-
boë, Néby Dahy. le Carmel, le Thabor, les monts de la Galilée supé-
rieure bornent cet attrayant panorama (1).
'
Pahl dont ils ont fait Fihl. Quand les colons macédoniens vinrent
s'installer sur ces plateaux, vers 310 avant notre ère, le mot de Pahl
'
suffit à leur donner l'idée de nommer cet endroit Pella. Ce nom leur
I (1) Entre racrojiole et la ville, dans la vallée du Djirm se voient les ruines d un temple
dont les colonnes renversées ont un mètre de diamètre ; des sculptures d'acanthes, de
volutes, de corniches avec oves d'un travail fin permettent de juger de la perfection de ce
1 monument. Dans le khirbet nous retrouvons le linteau publié dans RB.. 1899, p. 22. On
trouvera la description de la basilique près de laquelle nous avons campé et des Testiges
anciens qui bordent le Djirm el-Môz dans la brochure illustrée de Schumacher, Pella,
L'indres, 1888.
'
KooûT, éd. Wustenfeld, III. Talmud de Jérusalem, Schebi'ifh, 6. 1.
i, Etienne de UyzaNCE né).)», tio/i: ^lay.îôovîaç., ©sffTotXa;. "Axa-x;. 7.o:).r,; Iyp{a;.
:
420 REVUE BIBLIQUE.
Azôtos (1). Le rapport est lointain, pourtant aussi, tandis que les ;
Fig. 3. — Tell cl-Hoçu (Acropole de Pella). Au premier pian passe l'ouàdy Djirm el-Moz.
J
avant .I.-C, dans une campagne où
la forteresse du Thabor avait
(1)Ét. de Byz. : "AÇwTo; (qu'Épipbane qualifie de Ti6).t; 'EXWjvwv) 7:c>),i; Uoloiiaxv/riç... £(j:i /.a
a),).r, îtôÀt; "Aîwto; 'A/aiaç. Apamée de l'Oronte fut aussi appelée Ui'/la., dit Etienne de
liyzance, ànô tt,; îv Maxioovia.
(2) PoLYBE, //(.>" ^, 5, 70 : à'JsaÀKyâijLîvo; ci y.al t6 'Ara^-jp-.ov àyélfolt. -xalTiooàYwv TtapéXaês
IléXXav y.al Ka(jLoOv xat Fôspo-jv.
MELANGES. 421
^^ctoire, qui livra aux califes la vallée du Jourdain tout entière, eut
pour principal théâtre les terres détrempées du sud-est de Scytho-
polis. On y pataugea si bien que la bataille fut appelée par les
Arabes fjàm er-radfjhah ou " journée de la fange ». Le 8 février,
nous trouverons sur la rive droite du Jourdain, vis-à-vis du cours
du Jabis, un tertre ruineux nommé tell Railghah. Encore un exemple
qui fait saisir combien l'onomastique de la vallée du Jourdain a subi
l'influence delà conquête arabe. Ouant à Fahil. à la fin du ix" siècle.
sa population était à moitié grecque et à moitié arabe. Les quelques
habitants qui. de nos jours, sont \enus repeupler ces ruines, sont
peu sympathiques et ne manquent pas de manifester leur hostilité aux
rares étrang-ers qui viennent planter leur tente chez eux pour une
nuit.
du Talmud que louàdy Djirm el-Môz (i). Revenus dans le Ghôr, nous
(1) ScHLERER, GDJ]'.*. Il, p. 174. JosÈPHE, BJ., III, 3, 5. met une nillr, parmi les toparchies
de Judée. Ce n'est point assurément la Pella de la Décapole. Pelle doit se trouver entre
Nicopolis et Dômeh en Judée. Une inscription des environs de Ljdda mentionne un Mapyiwv
ne/J.EJ;. RB., 1904, p. 83.
(2) BiTiFKOL, Liltérat. grecque, p. 89. Le gentilis de Pella est HsÀ/.aïo; (Eusèbe. HE., W.
(3) Caetani, Annali delV Islam, XZ" an.de l'hégire, 207 ss. —
L^Si^xîioz, Palestine un-
derthe Moslems,p. 439.
(4) ScUebi'Uh, 6, 1 "/"ET NT^Z". L'identification de ces thermes avec le Djirm el-Môz
:
est mise en avant par Schimachek, op. l.. p. 35 et Schierer. op. l., p. 174. Le Djirm s'ap-
pelle aussi ouôdy Fahil.
422 REVUE BIBLIQUE.
l'est par une sorte de fortin appelé Araq Redjeidân. Aux environs,
'
enfants en bas âge forment un groupe spécial. Des ânes les empor-
tent un peu comme des paquets leur petite tête toute souriante
;
émerge des sacoches dans lesquelles ils sont enfermés. Ils ont parfois
pour pendant un ou deux chevreaux qui font contrepoids dans la
seconde poche de la sacoche. Les enfants des bonnes familles de la
tribu sont installés sur des couvertures disposées en manière de divan
sur l'échiné de l'Ane. Un pauvre orphelin est bajulé sur le dos d'un
Bédouin charitable. Les vieilles femmes suivent dans leur ample robe
de cotonnade bleue, toutes armées dune longue pipe, distraction de
la Bédouine à la retraite. Les jeunes femmes en bottes roug-es ferrées
les sacs de grains, etc. Toute la bande séloigne vers le sud. Tel .Jacob
se rendant vers Soukkoth avec sa substance ».<>
(1) Baladzuri 215, d'après Caetani. Annali, 13« année de l'hégire, 211.
(2) Ils ne connaissent pas Youâdy el-'Amoud qui se trouve plus au nord-est, près de
Mendah d'après Schumacher. A un quart d'heure au nord de Ouaqqas passe le ravin sans
eau nommé el-Hasa ou Hoitsa (Schura.j.
(3J La scille {'onsol, basai el-berr) eii un oignon sauvage décrit par Ibn el-Beithar, Xo-
iices..., XXV, p. 476.
424 REVL'E BIBLIOLt:.
ne reste plus qu'une arche à l'ouest et une culée à Test. C'est près de
là que viennent encore se réunir les diflerentes routes du nord de
Adiloùn avant de conduire sur une ligne commune unique au pont
du Jourdain appelé djisr el-Medjàmy. Les nombreux campements
V. (lADARA.
sentier montant qui suit les traces d'une ancienne voie. A une heure
cinquante, nous rencontrons deux gros fragments de colonnes qui
paraissent trop longs pour être des milliaires. Une heure et demie de
montée nous amène sur un plateau de terre rouge, et des restes de
sculpture antique d'un très bon goût nous font pressentir le voisinage
dune de ces villes helléniques que les Grecs d'Alexandre savaient faire
surgir sur leurs pas.
On ne considère souvent dans l'œuvre d'Alexandre que la caducité
de son empire : à bien des yeux, sa campagne en
Asie n'est qu'une
marche triomphale à jamais terminée par
une catastrophe d'où l'on
tire de grandes leçons morales. Cette vue des choses s'arrête aux ap-
parences et se contente des simples dehors. Le partage de l'empire
du conquérant entre ses généraux, loin d'enrayer ou de clore l'œuvre
du fondateur, n'a fait que la consolider, car chacun deux s'est appli-
qué à faire prévaloir dans le lot de peuples qu'il s'était adjugé, l'idée
directrice de la conquête qu'il eût été difficile à un seul de réaliser,
je veux dire la diffusion de l'hellénisme. L'établissement de la civili-
sation comprise sous ce nom eut la colonisation pour agent principal.
Alexandre et ses successeurs avaient saisi que la seule installation
d'un gouverneur et dune garnison de race hellénique dans une ville
asiatique ou égyptienne ne suffirait pas à l'helléniser. Là où ils fu-
rent réduits à en agir de la sorte, leur plan se heurta à d'innombrables
difficultés. L'histoire de Jérusalem sous les dynasties macédoniennes
de Syrie en est une preuve. Sur les points, au contraire, où ils réus-
sirent à implanter des éléments tirés du monde grec pour qu'ils y
MELANGES. 42o
lité des vainqueurs s'absorber dans celle des vaincus. Les centres hel-
li Voir le plan dressé par Schlmacuek, \or(hein 'Ajliin, p. il, et la coupe de l'aque-
duc, p. 79.
(2) Ces voies, maintenant complètement délabrées, permettent encore l'accès de Gadara
426 REM'E BIBLIQUE.
riiot. du P, Jaussen,
dont le territoire immédiat est clos au midi par l'ouâdy el-'.\rab. au nord-est par l'ouàdy
Samar, au nord par le Yarmouk. à l'ouest par la vallée du Jourdain. Ce nest que par l;i
ramification du sud-est qu'il tient au pays de 'Adjloûn.
'1) De nombreux sarcophages où l'on retrouve les motifs indiqués ci-dessus se voient
encore aux abords de Moukeis, village qui s'élèvi' sur les ruines de l'ancienne Gadara.
Malheureusement, ces richesses archéologiques sont mises en pièces par les .\rabes qui re-
peuplent cet endroit longtemps désert. En 1812, BcRChHARDT (Travels in Syria. pp. 270 s.)
comptait plus de 70 sarcophages sur la déclivité nord de la montagne qui porte la ville. CI.
ScHiMACHER. op. /., p. 68. Sur l'inscription de Gaius Ànnius yoii RB., 1895, p. 618.
MELANGES. 427
^^^'•S^l
'kr
Pliot. du P. Jaus?en.
décors. Assis sur les degrés supérieurs du théâtre de l'ouest (fig. 5),
vous portez instinctivement vos regards sur la colonnade d'une voie
triomphale qui se perd dans la campagne fertile, puis sur la pointe
sud du lac de Tibériade deux sommets galiléens du Thabor et
et les
(1) La construction d'un grand khàn au centre des ruines a causé des actes de vandalisme
qu'on ne peut que déplorer. Des débris provenant des ruines de temples ont été insérés
dans la construction. La déformation de l'antique cité, contre laquelle Schumacher protes-
tait déjà en 1899 {ZDP\ .. 1899, p. 182 se poursuit d'année en année suivant les besoins des
1,
maçons arabes. Le théâtre de l'ouest est encore bien mieux conservé que celui du nord.
Pour leur description architectonique voir Schumachek, SorUiern 'AJlân, pp. 49 ss. En
187."), GuÉRiiv (Galilée, l. pp. 300 ss.j a pu voir les ruines dans un meilleur état que nous,
car alors les quelques habitants de Moukeis se contentaient de vivre dans les grottes sépul-
crales. Cet explorateur signale <( d'ouest en est une longue rue dallée que bordaient jadis
428 REVLK BIBLIQUE.
charme les yeux quand ils se portent à gauche (fig. 6 ; à droite, ce sont
Pnot. Jaussen.
des deux côtés des colonnes raoïiolithes, dont les bases seules sont encore en partie debout.
A droite et à gauche s'élevaient, sur divers monticule?, de nombreux monuments, bâtis tous
en pierres de taille et décorés pour la plupart de colonnes monolithes, les unes calcaires.
es autres basaltiques, soit corinthiennes, soit ioniques... Parmi ces édifices, on remarque
plusieurs temples, qui ont dû être transformés en églises à l'époque chrétienne ».
1) 11 faut une heure pour descendre de Moukeis à el-llanimi, deux heures pour en re-
la lave a été mise à nu par endroits, grâce aux travaux nécessités par
la création delà voie ferrée de Caifia à Damas. Les deux principaux
points d'émergence se trouvent à proximité des ruines; il était naturel
toutes parts dans le but de prendre des bains pendant quelques jours
et d'y laisser diverses maladies [k). » Au vi" siècle, les sources
étaient connues sous le nom de w Thermes d'Élie ». Les lépreux, cfui
recevaient des secours de l'hospice où Ion hébergeait les étrangers,
(3) In Joh., VI, il : Fâoapa vào ti6).'.; aiv ÈaT'.v Tr,; 'IojSa;a;, 7:spi r,v xà ô'.ao6r,Ta 6c'p|xaTUYX*"'^'-
Par deux ['Ononiasticon [éd. Klostermann, pp. 22. 7i' mentionne les bains chauds de
fois
Gudarœ nomine Ammathcu ubi calidœ oqux erumpunt. Gadara iirbs trans Joidanem —
contra Scydiopolini et Tiberiadem ad orientalem plagam sifa in monte, ad cuius rri-
récit d'Épiphane montre que ces bains en commun ne se prenaient pas sans détriment de la
moralité.
V.^0 REVUE BIBLIQUE.
fera lui-même
école ou du
moins il devien-
dra le type de
cette classe d'es-
prits indépen-
dants qui se
sont donné le
nom de cyni-
ques. Tout le
monde connaît
Phot. Jaiiseu.
1 Geyer. Itin. Hteros., p. 163 ad milia tria 'a Gadera] sunt aquas calidas. qua'
;
inspire encore, 500 ans plus tard, les traits caustiques d'un syrien de
Samosate, lameux Lucien, en ([ui il trouve un imitateur et un con-
le
Ô (7110UÔOY£),OIOÇ.
L'île de Tyr est ma nourrice, mais la patrie qui m'a engendré c'est l'Attique habi-
tant dans la syrienne Gadara. Rejeton d'Eucrates et compagnon des Muses, moi, Mé-
léagre, je me suis fais le suivant des Grâces méuippiennes. Je suis syrien. Quelle
merveille? Étranger, nous habitons tous la même patrie qui est le monde. Le chaos
nous a tous fait mortels. Chargé d'ans, j'ai gravé ces lignes sur la pierre avant de
descendre au tombeau, car la vieillesse est voisine de rHadès(l).
Es-tu Syrien? Salam! Es-tu Phénicien? Audoni! Es-tu Grec ? Xatf s. Et toi, de ton
côté, salue de même (3).
ment vif et fugitif qu'on veut fixer (3) ». Les sujets qu'il traite sont
(1) Anthologie palatine, VIT, 417 TiiTpa oî \it Xcxvoï 'At61; èv 'Airsupioi;
: vatofiÉva raôâ-
ûot;. Comme on le lit au moyen âge, on disait déjà Assyrien pour Syrien.
(2) 418, 419 Faôâpwv yùtivànôlii
:
—
TaSâpMV 6' Ispà -/Ôwv.
(3) 419, Aùoovtç est reslilué par Scallger d'après Plante, Pœnul., V, 2, 41 : Saluta hune
rursus Punicè verbis meis. — Auô donni interprété par Bochart, Geog?-. sacra, II, 6 :
Kn dénouant les bandeaux de la virginité, ce n'est point un mariage qu'a fait Cléa-
rista. car elle a épousé l'Hadès. Hier soir les liâtes jouaient aux portes de la nymphe...
ce matin, elles poussent un gémissement, et réduit au silence. Hyménée adopte un
chant lugubre. Les mêmes torches qui répandaient leur clarté autour du lit nuptial
vont montrer à la morte la voie des enfers (i;.
) .
(1) Les habitants interrogés à ce sujet disent plus volontiers Moukeis que Oumm Keis.
(2) POLVBi:, Hist.. V, 71 : raSapwv, â ôoxsï twv xa^' àxsîvoy; toô; TOTtouîCi/ypÔTriti Siaiïpstv.
(3) A'iHiq., XIII, 13, 3; 15, i. Bel. Jitd., I, 4, 2.
(4) Ânliq., XIV, 4, 4 : xat Tâoapa [lèv. ;jLtxçôv £;x7tpo(î6£v xaTacr/.açî'ffav, àvÉ/ticï 6 noii-i^io:
Ar,îiY)Tpi'w yapiÇôfjisvo; tw FacapET, àTtsJ.îufiépw la-jToù.
^5) Anliq.. XV, 10, 1, 3.
lisme, abattirent eux-mêmes les remparts de leur cité (1). Ce fut aux
ncclamations joyeuses de la foule que Vespasien fit son entrée dans
la ville où les dispositions bienveillantes à légard des vainqueurs
étaient entretenues parune nombreuse aristocratie de la fortune (2).
Le généra] laissa une garnison dans la
ville démantelée c'était pro- :
(2) IV, 7, '.i xà TâSapa y.aTor/.ouv nloiauji. A ceUe occasion, .Josèphe donne GaJara
: 7io)./oî oè
pour capitale de la Pérée. Ailleurs, il donne à cette province Pella comme limite nord!
(3) Cl.-Ganneal, i?^10., II, p. 299 ss. Épitaphe, à Djébàïl, d'un Gadarénien entré dans la
légion X' L. Philocxlus L. films, colonia Valen{tia) Gadara, miles Legionis
: Fr{etensis]. X
Études d'arcliéol. orient., I, 168; Michon, RB., 1905, p. 573. Dédicace trouvée à Gadara :
et coh{ors) I.
(4) Cyrille de Scythopolis, Saba- Vita, 33: ITapà -cov ),£yÔ!J.evov 7:oTa[ièv Faoâpwv. Les ana-
chorètes trouvent des grottes dans Yarmouli. S. Épiphane y signale aussi de grands sé-
le
pulcres taillés nommés polyandria dans l'un desquels il place une scène de magie. Voir
ces toinbeau.v dans Schumacheu, The Jaulàn, p. 157.
(5) Voir la discussion topographique sur le sujet dans Lagrange, .S'. Marc, pp. 126 ss.
436 REWE BIBLIQUE.
Jérusalem.
Fr. F. -M. Abkl.
CHROMOUE
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.ïïePI[^AAAHT6ôHKeH
£Yl^ôÇMlAMTei
Opûv I
AssvTisj TCJ hpéMç I
TO TTpaov 6a'j;j.aÇs twv |
y.-:'.j;j,â-o)v "/.(ai) t(7)v
7::v(.)v ty;v |
àps-rjV zCo v-(x\) tmot, -.m tc-oj T-r;v |
Tïspiy.aAA-r; TsOriy.Ev j îù/.c--
•;,{av iv ï-i'. |
yÇr/ •.vg('//.':iwvcç) C .
la voyait plus de son temps, « lu. -r,v rapcjsav 3J/.:7;j.iav que nous tra-
duirions : <( à cause des revêtements décoratifs actuels ». Dans notre
cas il s'agirait donc du pavement en mosaïque où est insérée l'ins-
cription. — le koppa
L'année i98 (noter =
90) calculée d'après l'ère
(2) Dans une des inscriptions de l'Élianée contemporaine de celle-ci, on a noté aussi un
signe de séparation, mais divergent de celui qui nous occupe (RB., 1900, p. 471).
CHRONIQUE. 439
portante église, il y aurait lieu de se demander si Léonce n'y aurait pas fait exécuter sim-
plement quelques restaurations, ou même le seul pavement en mosaïque. Un groupe de
chapiteaux corinthiens du meilleur style ont été découverts dans les récents travaux. Nous
les avons photographiés et il nous parait difficile de les dater plus bas que la fin du iv« ou
1892. p. 637), divers autres débris de moindre importance mais de style analogue, suggèrent
ici un des monuments chrétiens les plus anciens de la cité. Et qui dira sa relation possible
avec le monument du stratège nabaléen Itibel érigé par son lils Al)dobodas? {CIS., II,
196). Les deux inscriptions dédicatoires de ce monument ont été en effet découvertes en
ce même lieu.
M.-R. Savigxac, 0. p.
NOTE DKPIGRAPHIE.
raient sur l'état actuel des chiffres comme si c'était leur état ori-
ginel.
Pour le texte de Scythopolis, je reconnais avoir attribué au lapi-
cide une trop forte entorse à la grammaire. Ma restitution n'est que
très hvpothétique. car la lettre qui suit TOllEP parait être un P.
[Abel]
se sont laissé entraîner à donner les informations les plus étranges, et.
Voici donc, dans les Etudes bibliques éditées par M. le Professeur Bardenhewer,
deux monographies consacrées aux deux généalogies du Christ qui se trouvent,
comme chacun sait, dans saint Matthieu et dans saint Luc.
I. — La première, du Pi. P. Vogt, de la Compagnie de Jésus, a déjà quatre ans de
date; ce compte rendu est donc fort en retard. On n'aurait pas été tenté de revenir
en arrière si la publication de M. Heer n'avait de nouveau appelé l'attention sur un
problème délicat. Des deux ouvrages, celui du P. Vogt est le plus classique, si l'on
sen tient à la manière de traiter le sujet. Il débute par le schéma des opinions,
avec une énumération assezcomplètedesauteursqui ont pris parti depuis le xvr siècle.
Tout cela est fort clair, et assez utile, quoique l'intérêt du livre ne soit pas là. Trois
groupes principaux d'opinions I ceux qui voient dans les deux cas (Matthieu et Luc)
:
la généalogie de Joseph II ceux qui voient dans Mt. la généalogie de Joseph, dans Le. la
;
généalogie de Marie; III ceux qui ne se prononcent pas. Quoique le groupe I soit divisé
en plusieurs fractions, pratiquement, au point de vue de l'auteur, il s'agit de ceux
qui tiennent avec Jules Africain que la descendance est dans Mt. une filiation réelle
par le sang, dans Le. une fihation légale. Il est indispensable, pour la clarté de ce
qui va suivre, de rappeler les grandes lignes de la théorie de Jules Africain, dont le
texte nous a été conservé par Eusèbe (1). Dès cette époque, et sans doute depuis plus
longtemps, on était embarrassé pour concilier la généalogie de Mt. qui donne à
Joseph pour père Jacob, et celle de Le. qui lui donne pour père Héli. C'était la diver-
gence fondamentale. Jules Africain pose en principe que chez les Hébreux on n'atta-
chait pas moins d'importance à la filiation légale qu'à la filiation naturelle. Comme
exemple de filiation légale, il cite la loi dite du lévirat. Quand un homme mourait
sans laisser de fils, son frère, habitant au même endroit, devait épouser sa veuve.
Les enfants qu'elle lui donnait étaient regardés comme descendants du premier mari
défunt. Appliquant ce principe à la question, l'Africain dit que Matthan dans la ligne
de Mt.) et Melchi (dans la ligne de Le.) avaient successivement épousé la même femme,
nommée Estha. Du premier mariage naquit Jacob, du second naquit Héii. Jacob
et Héli étaient donc frères du côté maternel. Héli mourut à son tour sans enfants, et
c'est ici qu'intervient le iévirat. Jacob, son frère, épousa sa veuve et lui donna un
fils, Joseph (père putatif de Jésus), qui était donc en même temps fils de Jacob et fils
d'Héli.
Or l'Africain ne donne point cette solution comme une supposition ingénieuse,
mais comme un souvenir traditionnel, conservé dans la famille de Jésus, parmi ceux
que les chrétiens nommaient par respect « les Maîtres » (oect-otjvoi). Ils racontaient
qu'Hérode avait fait détruire tous les registres officiels contenant les généalogies des
principales familles, surtout dans la descendance des rois et des grands prêtres. On
les avait reconstituées comme on avait su, et c'est ainsi qu'où avait réussi à produire
les deux généalogies de Jésus dont la différence était expliquée par les « Maîtres >
ou moins consciemment sur une autre hypothèse. Le Vogt rappelle que la même
P.
difficulté de raccbrder les généalogies se pose à propos de Salathiel et de Zorobabel
qui figurent dans toutes deux avec des ascendants et des descendants différents. Le roi
Joachim étant mort sans enfants, on a pu supposer que sa veuve Xoestha ou Nestha avait
épousé Melchi. Jéchonias, fils de Joachim et de \estha IV Regn. 24, 8), eût été i
ainsi frère de Néri, fils de Melchi. Néri mort sans enfants, et Jéchonias ayant épousé
sa veuve, Salathiel pouvait figurer dans l'arbre de Mt. comme fils naturel de Jéchonias
et comme fils légal de Aéri. L'hypothèse une fois acceptée, on devait assez naturel-
lement la renouveler pour résoudre la difficulté plus grande encore des ancêtres
immédiats de Joseph. N'est-il pas étrange qu'on l'ait proposée de nouveau sur le nom
de Melchi, en donnant à sa femme le nom d'Estha, si semblable à Nestha? La solu-
tion des« Maîtres », au lieu d'être traditionnelle, ne serait qu'un décalque d'une solu-
tion déjà imaginaire... Or
Vogt ne se contente pas de cet avantage. Il tient
le P.
absolument à une descendance rigoureuse par le sang. Ce qu'il nous faut, dit-il»
c'est un descendant de Juda (p. 26). —
Oui sans doute, mais comme l'Africain l'a si bien
dit, cette filiation peut être naturelle ou légale. S'il n'en a pas donné d'autre preuve
que le lévirat, c'est que dans l'antiquité tout le monde tenait cette proposition pour
évidente. Quand le P.Vogt prétend que Luc, s'adressant à des Gentils, devait néces-
sairement leur parler de filiation naturelle, sous peine de n'être pas compris, il
d'une fois sur la force du lien adoptif il prétend même que la conception primitive
:
l'antiquité. On ne prouvait pas ce sur quoi tout le monde était d'accord. Nous n'a-
vons pas à substituer nos idées à celles des anciens quand il s'agit d'expliquer
leur pensée.
Naturellement, — le lévirat en est une preuve — , on cherchait à concilier le plus
possible la parenté légale et la parenté naturelle ; l'adopté, pris dans la famille,
paraissait encore plus sûrement un fils, et naturellement aussi l'adoption - quel
qu'en fut le mode — n'était pas le cas le plus fréquent. Il ne servirait de rien de
pousser les choses à l'absurde, comme fait le P. Vogt. et de prétendre que dans
le système ancien. Luc n'avait donc cité que des pères légaux ip. 30\ et qu'avec
cette méthode Jésus ne descendrait pas plus d'Adam que de Joseph p. 31'. C'est
un défi au sens historique que d'admettre au temps de Jésus une lignée royale
reconnue officiellement par ordre de primogéniture de maie en mâle; c'est assez
de prouver solidement que les descendants de David pouvaient être connus et pos-
séder des titres généalogiques. Se montrer si scrupuleux sur la transmission des
droits uniquement par le sang est en tout cas contraire au sens des Pères qui n'ont
pas hésité à regarder les deux généalogies comme se terminant à Joseph, et qui.
tout en regardant l'une comme légale, l'autre comme naturelle, les ont mises sur le
même pied. Us ont estimé que de la sorte Jésus, qui n'était cependant pas le fils
de Joseph, se rattachait à David, et cette filiation qui nous paraît assez étrange,
je le veux bien, leur a paru parfaitement fondée et satisfaisante pour justifier les
prophéties et les promesses.
Le R. lui, ne le concède que de très mauvaise grâce. L'examen de
P. Vogt,
la tradition lui évidemment très pénible, quand il lui faut ranger du côté de
est
Jules Africain. Eusebe. saint Jérôme, saint Augustin, saint Thomas. Aussi s'efforce-
t-il de relever les moindres diverirences. d'ex.igérer les doutes, de restreindre les
affirmations. Quand il conclut que l'accord des Pères n'est pas tellement cogent qu'il
interdise toute nouvelle enquête, ce n'est certes pas moi qui le chicanerai sur ce
point. Je demande seulement qu'on tienne compte de ce critère dans d'autres cir-
(2) The Religion of theSemite:<.'^ éd.. p. 273: texte iltjâ cité RB., IOjC, p.oûo. note J. .4 la suite
d'une alliance, cesontmême des tribus qui se généalogisaient au même ancêtre: on employait
le verbe uasaba avec différentes lornies et modalités.
3) The old syriac Gospels, p. xis.
•
446 REVUE BIBLIQUE.
constances, et aussi qu'on regarde les Pères comme des témoins très assurés des
conceptions de leur temps. Sur ce point leur autorité n'est pas moins respectable à la
critique qu'à la théologie. La difficulté à concilier les généalogies éclatait à tous les
yeux; saint Augustin y est revenu plusieurs fois. Il y avait une manière bien simple
de la faire disparaître, c'est celle du R. P. Vogt dire que Luc a tracé la généalogie
:
de Marie. Cette solution se fût imposée si on eût regardé la généalogie légale comme
iasuffisante. Personne n'y a songé (1). Personne n'a prétendu que la généalogie na-
turelle donnât à Jésus plus de droits que l'autre. C'est là un sentiment dont il serait
téméraire de s'écarter, même comme critique, car il est l'expression des convictions
religieuses des anciens. Il nous faut un descendant de David, soit, mais par la voie
naturelle ou par la voie légale (2).
de Le. n'est pas celle de Marie, elle ne sert de rien, elle ne sert même qu'à em-
brouiller les choses p. 81); il nous faut toujours une généalogie de la liguée royale,
de mâle en mâle, par ordre de primogéniture, une généalogie qui donne à Jésus
le droit de revendiquer le trône de David. Mais, n'en déplaise à l'auteur, Marie ne
pouvait donner à son Fils aucun droit strict au trône de David; ce droit ne se trans-
mettait pas par les femmes; aucun Juif n'aurait été touché de cet argument. Et ce
n'est pas seulement la généalogie de Luc que Vogt condamne, au sens où l'ont
entendue les Pères, comme inutile et nuisible (p. 81), c'est aussi, eu dépit de ses
dires, celle de saint Matthieu. Si Mt. a dressé une généalogie inefficace selon les
idées de Vogt pour établir les droits de Jésus, il s'est livré à un travail superflu. Et
d'autre part, si Mt. a tracé une généalogie utile tout en n'aboutissant qu'à Joseph
et à David, pourquoi Luc aurait-il perdu son temps en remontant de Joseph à Dieu.!*
Constamment on voit se faire jour cette étrange prétention d'apprécier les Pères
et même les textes sacrés d'après des idées qui peuvent être aujourd'hui plus cou-
P. Vogt, cette fois d'accord avec les rationalistes, l'entend autrement. Jésus n'y est
point affirmé Fils de Dieu, mais plutôt Fils de l'homme, deuxième Adam, nouvel
ancêtre de l'humanité. Pourquoi cette témérité exégétique ? Pour que le baptême
donne à la généalogie le caractère d'une généalogie réelle, selon la chair et le sang,
permettant de revendiquer le trône de David. Et cette même réalité est introduite
dans la traduction du texte : /ai ajT'o; r,v 'Ir^aou? signifie : « et lui-même Jésus était
réellement » quoi? âgé d'environ trente ans...? est-ce que l'âge de trente ans était
l'objet spécial des complaisances du Père? Pvon! le sens est : « et lui personnelle-
ment, ce Jésus, était réellement en sa qualité de Fils de l'homme, aussi le fils aîné
(Il Le R. p. Vogt ne cite dans ce sens aux premiers siècles qu'un début de commentaire de
Mt. faussement attribué à saint Hilaire: mais de quel droit le date-t-il du temps de l'évèque de
Poitiers?
(-2) Saint Augustin pensait même que, absolument parlant. Luc aurait pu dire .(/e>î(((7 pour
marquer l'adoption J\on ergo alienuin essel a veritale, eliamsi Lucas ah illo esse Joseph yeni-
:
luiii diceret. a quo f'uerat adoptalus, etiam sic quippc yenuit eum, non ut homo esset sed ut
filius esset {De cens, Ev. II, ni. 7). On peut mesurer ici toute la distance entre les idées des an-
ciens et les nôtres.
RECENSIONS. 447
de Dieu » 'p. 90). Après ce tour de force exegétique. on trouvera tout naturel que
Vogt joigne Jésus Héli en passant pardessus Joseph
à Jésus, qui passait pour fils
:
deJosepii, était en réalité tils d'Heli, Héli étant censé le père de Marie. Si ou
objecte que d'après la tradition chrétienne le père de Marie se nommait Joachim,
il est facile de répondre ou que le même homme
deux noms, ou que la tradi- avait
tion s'est trompée, ou que le nom de Joachim a été emprunté à l'histoire de Suzanne
(Dan. 13, 4 dont le mari se nommait Joachim. Joachim était riche et époux de
Suzanne; le père de Marie était riche et époux d'Anne-, nouveau démarquage dans
le goût d'Estha-Melchi!
Il est pourtant bien dur de rompre toujours avec toutes les traditions. Eu finissant,
le P. Vogt trouveun appui prophétique dans /acharie 12, tO-14) cinq cents ans ,
avant notre ère, puis il met de son côté tous les Pères qui ont compris la lignée de
Luc comme une lignée sacerdotale. C'est toujours le même système seule une :
filiation naturelle pouvait transmettre à Jésus des droits sacerdotaux; donc ces
pouvait transmettre à Jésus des droits royaux, la généalogie par Joseph ne transmet-
tait donc pas de droits royaux.
En réalité, le seul point d'appui du P. Vogt et de son opinion est dans les textes
de saint Justin qui supposent que Marie était de la maison de David; nous les retrou-
verons tout à l'heure.
II. —
Il semble bien que la brochure du R. P. \'ogt n"a pas eu une bonne presse
R. P. \ogt pour traiter une question aussi complexe. Beaucoup plus au courant de
la critique textuelle, il n"a pas non plus cette outrance dans le raisonnement, ce parti
pris de faire flèche de tout bois, qui vicient les meilleures parties de son devancier.
Sur la question des « Maîtres », parents du Seigneur, M. Heer prend le contre-
pied du P. Vogt. On ne peut prouver que ce soient des Ebionites, et leur témoignage
sur la destruction des archives par Hérode est parfaitement recevable. Il faut encore
les en croire quand ils disent que les généalogies ont été rétablies; mais ils n'ont
plus aucune autorité quand il s'agit du point qui les touchait de plus près, celui du
lien qui unissait Joseph à Jacob et à Héli. Car M. Heer soutient, comme M. Vogt.
mais pour d'autres raisons, que la généalogie de Luc est celle de Jésus par Marie. A
ces hstes rétablies, M. Heer accorde un entier crédit. Quand Josèphe s'appuie sur les
tablettes publiques, c'est à elles qu'il fait allusion. Si l'on n'avait pas brûlé les ar-
chives, il serait remonté beaucoup plus haut que cinq générations. Il existait donc
de nouvelles généalogies, que M. Heer regarde comme parfaitement sûres, fondant
une certitude historique parfaite, et auxquelles Matthieu et Luc ont eu recours, de
préférence même aux documents bibliques 1), quand ils pouvaient consulter les deux.
Franchement, cela n'est pas très cohérent. Puisque M. Ileer insiste tellement sur
l'existence de ces listes officielles, autant valait-il suivre l'autorité de Josèphe qui
les allègue, que celle des « Maîtres » qui ne parlent que de listes reconstituées d'après
des souvenirs privés. Sur ce point la négation du P. Vogt est certainement plus lo-
gique, d'ailleurs trop logique par sa précaution de taxer d'hérésie ceux dont il veut
récuser le témoignage.
Mais il y a encore beaucoup plus de contradiction, du moins apparente, dans la
façon dont M. Heer entend le sens, la fonction de la généalogie de Luc. Il opine très
justement contre le P. Vogt que le sens de la voix du ciel au baptême c'est d'affirmer
que Jésus est Fils de Dieu au sens propre. Puis, il ajoute que c'est aussi la fonction de
la généalogie. Cela est tellement étrange, que je cite le texte en note (1). L'auteur j
revient plus d'une fois (2;. Et il allègue longuement dans ce sens l'autorité de saint
Irénée. Mais saint Irénée esquisse seulement une typologie admirable, dont on peut
bien croire qu'elle a été dans la pensée de saint Luc. Jésus parait dans sa généalogie
comme un second Adam, Sauveur des hommes, et de tous les hommes, puisqu'il
n'est pas seulement fils de David, mais qu'il remonte par ses ancêtres jusqu'à Adam,
issu de Dieu. C'est là une conception fort différente de la première manière de
M. Heer, et c'est celle qu'on peut conclure de quelques-uns de ses textes (3). Dans
Tune, la généalogie confirme la filiation divine (4j, et cela est inintelligible; dans
l'autre, elle associe à la filiation divine humaine. On dirait que quand
la filiation
M. Heer a dit nouvel Adam, il a dit en même temps Fils naturel de Dieu. Les deux
:
caractères sont réunis en Jésus, mais ils n'en sont pas moins distincts. Et la seconde
manière qui, si elle n'est pas celle vers laquelle a évolué M. Heer, est du moins
celle qu'ont exposée de très bons commentateurs, cette seconde manière permet
aussi bien que la première d'admirer l'harmonie et l'art de la composition de Luc.
Ce que je me permets de critiquer ici, c'est donc l'exagération (5) d'une idée juste.
Mis en veine de typologie, M. Heer note que saint Irénée n'a connu dans la liste
de Luc que 72 noms, parmi lesquels il faut compter Jésus et .\dam, tandis que les
différents manuscrits ou versions vont jusqu'à 77. Le chiffre de 72 est symbolique,
il signifie l'universalité des nations. Cela, on peut le concéder. Mais Luc a-t-il mis
72 noms, ou ne serait-ce pas Irénée qui s'est arrêté à 72 précisément pour obtenir
un sens typologique? M. Heer regarde le chiffre de 72 comme primitif, et alors com-
mence une opération qui rappelle celle de Procuste, quand son hôte était trop grand
Caïnan (n" 65 du grec) est rejeté pour ce seul motif qu'il est omis par D, lu 'Ailam par
si/rsin. et Thamon par e. On sait que sur ce nom se sont engagées des luttes épiques
(I) DiesorZusaiumenliang he\ Lukaszwingt rormlicli ilazu dein Slammbaunigenau diesel helogische
Funktion zuzuweisen, niinilicli die schrUlstellerisclie Funktion, Jésus als den Solui Gottes zu er-
weisen. ahcr nicht in menscliiicliem, sondern in einem iibcrmc^nscliliclien Sinn etc. (p. 40).
(-2)Par exemple p. 51.
(;{)Par exemple p. 103, où la généalogie est un moyen de concilier d'une laçon typologique la
nature du Kils de l'homme et la nature du Fils de Dieu cf. p. liî", p. Iliv, et surtout p. 97.
:
CO II n'y avait qu'un moyen de l'entendre ainsi, c'olailde rattacher « Fils do Dieu « directement
à Jésus en sautant par-dessus la généalogie comme avait fait un ancien auteur cité par M. Heer
(PL., XXXV, 2253 s.); celui-là du moins était logique, car la filiation d'Adam par rapport à Dieu
étant celle d'une créature, il est impossible de comprendre comment Jésus, second Adam, élait
par cela même le propre Fils de Dieu.
(5^ Cette exagération se retrouve encore dans la p. 45, note, où l'auteur se prononce pour l'au-
thenticité du passage emprunté au Ps. 2. 7; à la p. 42, note, où Col. 1, ISserait une allusion à la
généalogie de Luc que saint Paul aurait connue et à son sens typique. Le sens de • Le Christ est... :
le premierne d'entre les morts • serait le Christ est issu des ancêtres mortels de la généalogie
:
that 4 et Lévi ].5] avec Admein ôo^ sont enlevés et, du moins pour Matthat et pour
Lévi. les raisons sont plausibles. Malgré tout il noms. C'est ici qu'il faut ad-
reste 73
mirer à la fois la sincérité érudite et le don qu'a M. Heer de raisonner d'après ses
propres conceptions. Un critique moins instruit des usages de l'antiquité ne compte-
rait pas le nom de Jésus : mais M. Heer sait que les anciens, en pareil cas. comptaient
toujours le premier et le dernier. Pourtant il ne faut que 72 noms. Et c'est Joseph qui
ne compte pas, parce qu'il est père putatif! Donc Jésus se rattache directement à
Héli. c'est-à-dire par Marie, et pour qui connaît les habitudes typologiques des an-
ciens, tout cela est très clair !
Ce n'est pas ici le lieu de discuter cette «restauration du texte p. 96. >>
d'une vierge qui, comme j'ai dit 4). était de la race de David, de Jacob, d'lsa;ic et
(i; Ir.ÉNKE. Haer. II. 33, .3 ad bo.pt ismum en ha venit wjn'hi.m qui triginta annos sv./jpleverat,
:
sed qui inciyerel esse tanquain triginta annorum. cura veniret ad baptismum. Où l'on voit
d'ailleurs qu'Irénée lisait ào-/6;jEvoç, Qui, je le reconnais volontiers, pourrait être supprimé,
mais non remplacé par Ipyôaîvo:. On comprend ditficilement comment l'incise A qui n'est encore
p. 94 que très dl?îne d'attention selir beaclitenswert devient à la p. 9t> partie intégrante du texte.
Ce nouveau texte est proposé avec une réserve de bon goût Der griecbisclie Wortlaut ware :
hiemacli — Kleinigi^eiteo daliingestellt etwa folgender. mais enfin il est proposé, et traduit.
(2) Il l'ait justice cependant de l'argument prophétique tiré de Zacharie. Cest à ce propos qu'il
accuse le livre du P. Vogt, dont il relève les qualités, de choquer trop souvent le sens historique
et philologique (p. 98 et note l .
des palriarches. puisque devenu chair par une vierge de leur race, il a enduré de se faire chair >
(C, 2 On sait que d'aiirés y. Heer, ce premier-né de Col. 1. lo ss. est une allusion à la généal".
.
d'Abraham, soit parce qu'ldam lui-même était père de ceux qui sont énumérés et
dont Marie descend par sa race : car nous savons que ceux qui ont engendré des
femmes sont pères aussi des enfants qui sont nés à celles-ci ». Je crois que ni le
que... soit que »... autrement que comme une allusion aux deux généalogies, l'une
seterminant à Abraham, l'autre se terminant à Adam. Dans les deux cas, le rai-
sonnement est le même. Justin regarde donc les deux généalogies comme celles de
Jésus par iMarie en ce sens que Marie descendait des ancêtres nommés. Il sait ou
croit savoir par ailleurs qu'elle était (ille de David; il ne le conclut pas directement
des généalogies, autrement il faudrait dire que la généalogie de Matthieu est aussi
celle de Marie. Qui prouve trop, ne prouve rien.
M. Heer n'a donc pas établi sa thèse plus que le P. Vogt, et les caractères gras
qu'il emploie ne donnent pas plus de force au raisonnement. Il aurait dû plutôt les
éviter quand il s'agit de prouver par le Talmud que Marie était fille d'Heli. Le Tal-
mud de Jérusalem parle en effet d'une Marie, fille d'Éli, suspendue en enfer par les
seins, pour avoir jeûné avec ostentation (1 Rien ne prouve que le Talmu l'ait re-
. I
gardée comme la mère de Jésus, et peu importe que quelque rabbin de basse épo-
que rapprochement méchant. Aussi bien les traditions du Talmud sur Jésus
ait fait ce
— si prononcer à ce sujet le mot de tradition
l'on peut sont si confuses qu'on —
n'est pas même certain qu'il ait connu la mère de Jésus sous le nom de Marie, à
moins qu'il n'ait emprunté ce nom à l'Évangile, en la confondant peut-être avee
Marie de Magdala \2).
qu'à présent tant d'importance. Par ce jeu de chiffres, que M. Box nommait une
sorte d'acrostiche, Matthieu indiquait d'une autre façon la filiation davidique de
Jésus; il ne la prouvait pas. M. Heer y voit une preuve rigoureuse (ô;. Il est bon
d'interpréter les textes selon l'état d'esprit des auteurs et des premiers lecteurs. Mais
on peut tout de même se demander si on en était là au premier siècle de notre ère,
soit parmi les Juifs, soit parmi les chrétiens. Au contraire, M. Heer me parait avoir
parfaitement réussi à prouver que l'omission de trois noms, Ochozias, Joas, Ama-
sias dans Matthieu (1, 8) est due au phénomène de la damnatio meniorioe. C'était
déjà l'opinion de saint Hilaire et de saint Jérôme. Il s'agit d'un usage ancien ;
les
Pères sont ici d'excellents guides. Il a fallu du courage à M. Heer — mais il n'en
manque pas — pour revenir à leur opinion qu'il a parfaitement mise en lumière.
gie tle Luc. Ce qui suil prouve que Justin pensait plutôt à celle de Matthieu qui met les patriar-
ches plus en relief: cf. Dial. XLIII. l • né d'une vierge de la race d'Abraham, de la tribu de
Juda et de David », dans l'urdre descendant de Matthieu.
(1) .1. Hagiga, M, 2.
j
^2) CL Le Messianisme..., p. -288 s.
|
"
^3) -TT soit 4 -f ^ '..
est nouvelle en ce sens qu'il est le premier catholique à la soutenir, mais elle ne présente
rien d'essentiel qui n'ait été réfuté d'avance par .^LM. Zahn, Burkitt. etc., pour ne
citer que des protestants. Le-'<yrs(n. demeure complètement isolé. "SI. Heer lui adjoint
encore comme compagnon le dialogue de Timothée et d'Aquila 2). Ce serait très
Grave, puisque la leçon prendrait ainsi pied dans les textes grecs 'la/.œo ÈY£vv7;a£v :
Tov 'Ir,aoi3v tov X£yô;x:vov Xv.cttov. Heer Suppose que l'auteur 'du v^ siècle !) a combiné
la leçon des grands manuscrits celle du si/rsiu. : il ne semble pas connaître la dé-
et
de Joseph que si le lien entre Joseph et Marie était déjà caractérisé par un mariage,
ce qui se pouvait à cause de la nature spéciale des fiançailles chez les Hébreux.
En terminant, j'exprime le regret de ne pouvoir rendre un hommage sans restrictions
aux brillantes recherches de M. Heer. La Revue l'a fait, quand il se tenait sur un
autre terrain. Ici il s'agit delà méthode historico-critique: j'ai cru devoir accentuer
les divergences. Elles n'empêchent pas l'estime pour un travail aussi approfondi.
Entre le réalisme presque judaïsant du P. Vogt et la typologie exaspérée de M. Heer,
il doit y avoir une voie moyenne. C'est d'ailleurs celle qu'a toujours suivie le gros de
l'exégèse catholique,
Jérusalem. 11 janv. Imh.
Fr. M.-J. Lagrange.
(1; Cf. RB., lOOti, o03 ss.
(2) Publié par M. Conybeare en 1898.
(3) Evangelion da-Mepharrcshe. Il, 205.
BULLETIN
S. .T.\ l'épigraphie (R. P. Jalabert, S. J.), l'Eucharistie (M. Lebreton). Dans l'article
sur rÉ"vpte, le R. P. Malloa s'attache tout d'aborJ aux relations de ce pays avec
les Israélites. A propos de Joseph, il est vraiment étonnant que le coûte des deux
frères soit encore rappelé comme une « analogie égyptienne ». S'il y a analogie, serait-
ce donc que le genre littéraire des récits est le même? Pour conclure, l'auteur ren-
voie a Maspero et à Viiiouroux. M. Vigoureux paraît croire que le conte des deux
frères confirme la véracité de l'histoire de Joseph: est-ce ce que veut dire le R. P.
Mallon? « Une histoire semblable est racontée dans le • conte des deux frères », ro-
man composé plus tard sous le règne de Ménephtah »... (col. 130.5). L'histoire, conte
ou roman, n'est même pas tellement semblable, puisque les deux frères sont le thème
de rincestueuse Phèdre et Hippolyte. etc.) agrémenté des invraisemblances les plus
i
sur les analogies. La principale difficulté opposée à l'histoire de Joseph, c'est que son
surnom que la Vulgate a traduit Sclvator mundi est, d'après des égyptologues très
compétents, un mot de frappe relativement récente. II est vrai que M. Naville et
d'autres ont combattu ces vues. Le P. Mallon ne parle pas de ce point; on dira
qu'il ne pouvait entrer dans trop de détails dans un semblable dictionnaire. Sur l'é-
poque de l'Exode, l'auteur expose les deux systèmes les plus en vogue, et donne le
choix entre le règne d'Aménophis IV et celui de Ménephtah. La Tievue ne saurait
lui en faire un reproche, puisqu'elle n'a jamais professé sur ce sujet une opinion bien
ferme. Mais la date la plus haute soulève une question assez grave. Si l'Exode a eu
lieu sous Aménophis IV^, au temps de Moïse l'alphabet cananéen n'existait pas-, le
Pentateuque aurait-il donc été écrit en égyptien ou en assyrien? Le R. P. Mallon n'a
pas ahordé non plus ce point. Il ne parait pas être de ceux qui répondraient hardi-
ment que l'alphabet était déjà inventé, sans tenir compte du fait del-Amarna. Quant
aux miracles de la sortie d'Egypte, le R. P. s'applique à faire ressortir leur carac-
Faut-il parler de la critique biblique aux jeunes gens? et comment leur en parler?
Double question qui préoccupe les maîtres cbrétiens consacrés à l'enseignement de la
jeunesse. Le R. P. Giovannozzi, directeur de l'enseignement religieux pour les élèves de
cours secondaires à Florence, a fait une large part à la Bible, et il ne laisse pas ignorer
à ses élèves les problèmes soulevés par la critique. Aussi bien qui donc les ignore
aujourd'hui? et n'est-ce pas vers ces questions qu'on dirige de préférence les jeunes
esprits quand on veut créer en eux des préjugés contre la Foi? Dans cette situation, le
seul parti à prendre est une défense loyale. C'est ce qu'a fait avec succès le R. P. Gio-
vannozzi, auquel son mérite reconnu comme savant, et spécialement comme astro-
nome, assure la sympathie et le respect des jeunes ,1). L'auteur est assez large quand
il s'agit de prononcer ([u'une chose n'est pas de foi ; en fait ses solutions sont plutôt
conservatrices. Exemples il n'est pas de foi que le déluge ait englouti tous les
:
hommes, mais on ne peut attaquer non plus cette proposition au nom de la science.
La femme de Lot a été enveloppée dans des débris de cendres et de pierres; l'expres-
sion de bloc de sel a été suggérée par la nature du sol. Josué n'a fait arrêter ni le
soleil ni la terre, mais il s'est réellement produit un phénomène qui permettait à
l'écrivain sacré de s'exprimer comme il l'a fait, lui même croyant d'ailleurs que le
soleil s'était arrêté. Jonas a réellement passé trois jours dans le ventre du poisson,
mais on ne peut exclure absolument l'explication parabolique; que les jeunes gens
s'en rapportent à la Sagesse prudente de l'Eglise « La luce verra anche in niateria
:
storica, e, quando sia vera luce, la Chiesa sarà ben contenta di aprire le linestre e le
porte » (II, p. 76). On comprend qu'un enseignement aussi distingué ait toujours été
tenu en grande estime par les archevêques de Florence.
Nouveau Testanent. —
M. liutton a entrepris de traduire en sigles les rela-
tions des principales autorités textuelles du N. T. Il nomme cela un atlas (3). Dans
chacun des livres du N. T. un certain nombre de leçons sont réparties en texte
alexandrin, texte occidental et texte syrien. Puis ces passages forment les têtes de
ligne d'un tableau où les principaux mss. et versions sont énumérés. Dès lors on
se rend compte d'un coup d'œil du nombre de fois où tel ms. etc. a des leçons
alexandrines, occidentales ou syriennes. M. Hutton ne nous dit pas ce qui l'a décidé
dans le choix des passages examinés. Les tables sont précédées de notes où l'auteur
expose ses vues sur la critique textuelle et les mérites respectifs des principales re-
(1) I problemi deW Esislenza. Corso triennale di Religione per studenti di Mceo: voLI. La divi-
nità del Cristianesimo (seconda edizione). Vol. II. I Dogmi del Crislianesimo. ^L "U'oisièiue volume
sera consacré à la morale), Firenze, I9H, Scuola tipografica Calazanziana.
(2) Compendium introductionis fjeneralis in sacram Scripluram. Pars prior. Documenta. In-H"
de xii-127 pp. Bruges, Bejaert, 1911.
(;<) An Atlas of te.rtual critici&m. being an atiempt lo sliow Uie mutual relationslup of ihe
authorities for the te\t of tlie New Testament up to al)0Ut 1000 A. D., by Edward Ardron Hltton,
M. A. vicar of St Michaers, Hargrave, in-lO de xvi-i2'; pp. (avec des tables). Cambridge, a tlie
Universitv Press, l'Jll.
/
censions. Il est inquiétant de lire (p. 31) qu'Eusèbe et Basile appartenaient tous deux
à Césarée. M. Hutton aurait-il confondu Césarée de Palestine et Césarée de Cappa-
doce? L'ouvrage comprend des notes utiles de M. Burkitt.
férences est aujourd'hui communiqué au public. Mais ce n'est pas sons la forme de
conclusions adoptées par tout le groupe. Chacun fournit sa contribution, et ces essais,
W. Sano.'IY : Les conditions dans lesquelles ont ('té t'cfits les évangiles, et leur
portée par rapport à certaines difficultés du problème synoptique. — Sir John C. Haw-
Kijvs i. S. Luc ne s'est pas servi de s. Marc comme source dans sa section 9, 51-
:
18, 14. 2. L'omission par s. Luc de la matière contenue da7is s. Ma?'c 6. 4-5-8, 26.
3. La Passion de s. Luc dans ses relations avec le problème s/jnoptiqtie. B. H.Streeter: —
Sur l'ordre original de Q; Connaissance et usar/e de Ç de la part de s. Marc; Exten-
sion pnmitive de Q; Évolution littéraire des évangiles; Nofre-Seigneur devant Hérode.
— "W. C. Allen Le livre des Paroles employé par l'éditeur du premier évangile;
:
eschatologique.
Il serait superflu de dire que tous ces essais font honneur à la patience et à la
droiture anglaises. Onne voit percer nulle partie souci de lancer de brillantes hypo-
thèses, on ne craint pas de dire une fois de plus ce qui a été dit déjà, l'unique préoc-
cupation étant de serrer de plus près les questions. Cependant toutes les observa-
'
tions n'ont pas la même valeur, et peut-être trouvera-t-on, dans une étude, de bonnes
raisons contre telle conclusion ou même tel principe que l'étude voisine accepte ;
on dirait parfois que les efforts déployés de part et d'autre se neutralisent. De toute
façon des pages si consciencieuses et si mûries demandent à être lues de très près-
Ce une erreur cependant que d'y voir le vnde-mecum de l'étudiant. Les pre-
serait
mières bases du svstème des deux sources sont supposées plutôt qu'établies. Il n'est
question nulle part de prouver la priorité de Marc, ou son emploi par Luc, ou la
dépendance de Mt. et de Le. par rapport à Me. Tout cela est censé admis, et ce sont,
on l'a vu par la table des matières, les questions ultérieures qui ont absorbé l'atten-
tion des professeurs d'Oxford.
Nous sommes orientés dès le début. M. Sanday rappelle que si l'hypothèse deû
deux documents explique assez bien les ressemblances des synoptiques, leurs diver-
gences seraient plus naturelles si on pouvait admettre qu'ils ont puisé à m\e mêm«
catéchèse orale. C'est en particulier le cas lorsque le même mot est pris dans un sens
différent chez deux évangélistes, ou lorsque les mêmes phrases sont placées pal
l'un dans un par l'autre dans la bouche d'un acteur, etc. Même difficulté
récit,
quant à la priorité de Marc, lorsqu'il parait contenir des traits secondaires, ou dans
les cas oii Le. et Mt. s'entendent contre lui sur des traits qui semblent primitifs.
(1) Sludies l'a Ihe synoptic problem, hy Members of llie Univeisity of Oxford edited by W. Sas
D.vY D. D. Lady Margaret Profossor of Divinity, in-S" de xxvfi-4.^6 pp. Oxford, at tlie Clarendoj
Press, l'Jll.
BULLETIN. 455
A ces difQcultés M. Sanday répond d'abord, — et la réponse, pour n'être pas nou-
velle, est encore la meilleure. — que les évangélistes sont des historiens, non des
copistes. Il neuve de son argumentation, que les
ajoute, et c'est la partie la plus
anciens n'étaient pas aussi bien pourvus que nous pour copier des textes. Ils n'écri-
vaient point sur des tables, mais plutôt sur leurs genoux comme font encore les —
scribes arabes, — et les rouleaux qu'ils consultaient gisant à terre, il se passait plus
de temps entre la lecture des sources et la rédaction-, on se contentait donc plus
volontiers d'une citation approximative. Spécialement quant à l'usage de ;\Iarc par
Luc, M. Sanday qui rejette avec raison le Proto-Marc, imagine une recension plus
coulante qui aurait servi de texte à à s. Matthieu et à s. Luc. L'étrange est
la fois
que cette recension aurait complètement disparu, nos mss. ne nous ayant conservé
qu'une recension plus originale. L'hypothèse est tellement en l'air, qu'elle ne peut
vraiment pas Oj;urer comme élément appréciable dans la question synoptique. Au
contraire, la dimension limitée des tomes de papyrus qui ne permettait pas de faire
des livres trop longs est un fait positif dont on doit tenir compte quand il s'agit
d'expliquer pourquoi les évangélistes n'ont pas reproduit tout ce qu'ils trouvaient
dans leurs sources.
M. Sanday s'est dispensé de faire une application de détail aux difficultés qu'il
avait énumérées au début. On ne voit pas en effet comment ces solutions explique-
raient les passages secondaires de s. Marc: aussi bien navait-il choisi comme exemple
de caractère secondaire que des omissions.
Les notes de M. Hawkins sont empreintes de la sobriété, de la précision, du rai-
sonnement déduit avec exactitude, n'allant jamais au delà des prémisses, qui font
tant d'honneur à l'auteur des Horae synopticae. Il pense que Le. a renoncé à se ser-
vir de Me. soit dans « la petite interpolation » (Le. 6. i>0-8, soit dans • la grande :i ,
interpolation » Le. 9. .51-18, 14^, quoique, dans ce dernier cas, il n'y ait pas moins
de 'trente-cinq versets ou parties de versets qui ressemblent à ce qu'on lit dans Me.
Mais un certain nombre de ces passages consiste en doublets, c'est-à-dire que Le. y
revient ailleurs, cette fois en s'inspirant de Mc: si donc dans la grande interpolation
il traite de nouveau ces thèmes, c'est qu'il suivait une autre source ou il les lisait.
Assez souvent, dans cette section, Le. se rencontre avec Mt. dans un rapport plus
étroit qu'avec Mc; nouvelle preuve qu'il ne s'attachait pas alors à son guide ordi-
naire. D'ailleurs sir J. Hawkins estime que cette seconde source n'est pas seulement
ici les Logia, mais que Le. a pu consulter des disciples ayant suivi le Maître. On
s'expliquerait ainsi que, ne voulant pas perdre une tradition aussi précieuse, il ait
abandonné pour un temps trame de Marc; peut-être même, ajoute M. Hawkins,
la
Le. avait-il rédigé cette section avant de connaître Marc. Cette hypothèse rendrait
mieux compte de la liberté que Le. a prise vis-à-vis de Mc. qu'il estime tant, mais on
avouera qu'elle n'est pas nécessaire. Venant à une autre marque de l'indépendance
de Le, l'omission de Mc. 6, 45-8. 26, M. Hawkins prouve péremptoirement que
cette section est trop dans le style de Marc pour qu'on puisse l'attribuer à un Deu-
téro-Marc, et il indique les raisons qui justifient l'omission, surtout si Le. était
décidé à ne pas écrire un évangile trop long. De Mc, M. Hawkins pas.se au second
document qu'il nomme encore Q (Quelle, source) pour ne rien préjuger, mais qu'il
est très tenté de nommer Logia, car il croit que bien lui que Papias avait en
c'est
vue. Un essai de reconstruction de ce document tel qu'il doit avoir été écrit ne lui
paraît pas (p. 118. note 2' moins futile qu'à M. Burkitt: cependant, selon sa manière
très subtile de doser les probabilités, il indique trois classes de passages (en tout
84) communs à Le. et à Mt. qui ont plus ou moins de chances d'avoir fait partie des
436 REVUE BIBLIQLE.
Logia. Oiren conclure sur la forme de ces Lugia? Qu'ils étaient écrits sans aucun
ordre chronologique, puisque Le. et Mt. les ont placés dans des contextes si différents,
et, pour la même raison, qu'ils étaient rarement pourvus d'introductions tirées des
circonstances. Cependant M. Hawkins est trop prudent pour conclure que les Logia
ne contenaient rien de plus que les parties communes à Le. et à Mt. Il estime au
contraire qu'ils ont dû être beaucoup plus considérables, parce que Papias n'aurait
pas accordé tant d'importance à cet ouvrage, s'il n'avait compté qu'environ 236 ver-
sets, et qu'il ne l'aurait pas non plus mis en relation avec l'évangile de s. Matthieu
qui en compte 1.068. Comme d'autre part il est peu probable que l'antiquité ait laissé
perdre un recueil d'une telle valeur si son contenu n'avait été conservé dans les Evan-
giles canoniques, il faut se demander
ou Mt. n'en auraient pas conservé des
si Le.
parties assez considérables dans des passages où ils ne se contrôlent pas l'un par
l'autre. Et c'est à cette œuvre délicate que M. Hawkius consacre d'ingénieuses sug-
gestions. Elles seraient sans doute moins purement conjecturales qu'il ne les présente
s'il tenait plus fermement à la tradition qui fait de s. Matthieu l'auteur du premier
évangile.
Le troisième essai de M. Hawkins est relatif à l'indépendance de Le. par rapport
à Me. dans le récit de la Passion. C'est un fait reconnu, qu'il met de nouveau en
lumière. L'explication qu'il en donne ne paraîtra pas heureuse c'est comme com- :
pagnon de s. Paul dans ses missions que Luc se serait accoutumé à prêcher la Pas-
sion d'une certaine manière qu'il ne se serait pas soucié de rendre plus conforme à
celle de s. Marc. Mais M. Sanday a fait remarquer que les divergences de s. Luc
ont le caractère de particularités historiques, plutôt que de vues doctrinales, et qu'il
n'y a donc pas de raison de les rattacher à s. Paul.
près un principe qui lui parait décisif : Le. a coutume de suivre l'ordre de ses sources,
ce que ne fait pas Mt. nous en avons la preuve dans leur conduite par rapport à
:
Me. Quand ils s'inspiraient de Q, il y a tout lieu de croire qu'ils ont agi de la même
façon. Mais ce raisonnement était d'avance privé d'efficacité par les observations de
M. Hawkins. S'il est prouvé que les Lor/ia n'avaient aucun ordre chronologique,
pourquoi Luc se serait-il appliqué à reproduire une suite purement matérielle? Cela
pouvait suflire à Matthieu, qui aime à grouper les discours, non à Luc qui préfère
leur donner des cadres... Il serait donc au moins aussi aisé de retourner la proposi-
tion. Lorsque M. Streeter conclut ensuite que ^Ic. s'est inspiré de Q, on a l'impres-
sion que la conclusion est un peu trop absolue. Avant de rien conclure pour Me, il
faut d'abord démontrer que Mt. et Le, dans un passage parallèle à Me, suivent une
autre source que lui, sans quoi la question ne serait pas posée nettement. On obtient
ce résultat en montrant qu'ils se ressemblent beaucoup plus entre eux que chacun
d'eux avec Me. Soit, et cela prouve bien qu'ils avaient une source commune. Mais alors
connnent prouver que cette source est aussi celle de Me, puisqu'il en diffère au moins
autant que des deux autres synoptiques qui se sont passés de lui? Si l'indépendance
de Lc.-Mt. par rapport à Me. est établie par certaines divergences, ces mêmes diver-
(1) Il y a à tout le moins un peu d'antinomie dans les termes. Si l'on emploie un ouvrage par
simple réminiscence, cela ne peut guère se nommer « faire des extraits • ^cf. p. 166).
BULLETIN. 457
particulierque Le. 9, .51-18 14, est, dans l'ensemble, un extrait de Q. Mais il faut
entendre ici que Q avait été développé en divers sens, et que Mt. et Le. n'avaient
pas sous les yeux la même recension.
L'essai sur l'évolution littéraire des évangiles n'a pas le même caractère technique
que les autres. On eût pu le du volume comme une sorte
placer en tête ou à la lin
de sommaire des opinions adoptées aujourd'hui par toute une école de critique.
Nagueres (27 mars 1911), M. Jean VVeiss faisait à Jérusalem une conférence sur la
façon dont les évangiles se sont produits [ilic Eiilsfclunu/ ilrr Eiynufclirii), et suivait
exactement les mêmes lignes que M. Streeter. Il est très probable qu'il ne l'avait pas
lu, et peut-êtreM. Streeter n'avait pas non plus conscience de se rattacher aux tra-
vaux antérieurs du professeur de Heidelberg. C'est qu'il s'agit désormais d'un thème
reçu et il faut reconnaître que M. Streeter l'a traité d'une façon très brillante. Au
début, très peu de temps après la mort de Jésus, en Palestine, personne n'éprouvait
le besoin d'écrire la vie du Maître, parce que la tradition vivante en conservait
encore les traits, surtout pour ce qui regardait la Passion et la Résurrection, d'autant
qu'on espérait comme prochain l'avènement du Seigneur. Tout au plus demandait-
on à counaitre et à posséder par écrit ses paroles, qui devaient servir de lumière
dans les occurrences de la vie. Personne ne songeait à remplacer la tradition orale,
mais on voulait la compléter, lui donner une physionomie plus nette sur certains
points d'une importance majeure, par exemple le rapport de Jésus avec la prédication
de Jean, qui avait si fort ébranlé les esprits, l'attitude à prendre envers les Phari-
siens, chefs spirituels de la nation. Il fallait aussi expliquer pourquoi Jésus, devenu
Christ par sa résurrection, et attendu dans sa gloire de Christ, avait, durant sa vie,
si peu répondu à l'idéal des Juifs. L'histoire de la Tentation racontait comment cet
idéal n'était pas celui qui convenait à Jésus, mais plutôt une suggestion du malin qu'il
avait repoussée. C'est ainsi que les LoQi'i ont pris naissance, et c'est pour cela qu'ils
ont compris, outre les paroles de Jésus, tout ce qui regardait les rapports de Jésus et
du Baptiste, le récit de la Tentation et les discussions de Jésus avec les Scribes et les
Pharisiens; c'était assez pour les chrétiens de Palestine aspirant après la Parousie.
Tout autre était la situation à Rome. On voulait savoir les principaux événements
de la vie de Jésus, il fallait exposer la trarne de sa Passion et de sa vie à la lumière
de la doctrine de Paul. Ce fut l'œuvre de Marc, qui s'étend sur ces points avec le
sentiment le plus vif des faits vus pour eux-mêmes, et qui réduit à quelques linéa-
ments ce qu'il croit nécessaire d'emprunter aux Lofjia. Après ces dajx oeuvres pri-
mitives, l'époque de ia réflexion exigea des vies complètes, comprenant à la fois les
récits et la doctrine; les deux autres synoptiques ont la prétention d'offrir des touts
complets, et poursuivent des intentions apologistes, le premier évangile s'aitachant à
prouver que Jésus est le Messie attendu par les Juifs, le troisième qu'il est bien le
Sauveur du monde. En lisant M. Streeter, on se dit que les choses ont du se passer
de la sorte, et en effet cet exposé des origines réalise la situation et les besoins de la
communauté primitive dans la façon dont ils auraient été satisfaits si la thèse cri-
tique sur l'étendue des Logia était démontrée. A la réflexion, il surgit des doutes.
Lorsque par exemple M. Streeter demande si les premiers chrétiens pouvaient son-
ger à une vie de Jésus, eux qui n'avaient jamais entendu parler de biographies
d'Isaïe, de Jérémie. d'Ézéchiel et des autres prophètes (p. 212), on pourrait répondre
458 REVUE BIBLIQUE.
qu'ils avaient lu sans doute les gestes d'Elie et d'Éiisëe, sans parler de la vie de
Samuel, depuis sa conception jusqu'à sa sépulture. Il est très facile d'établir une har-
monie parfaite entre des tendances présumées et un ouvrage présumé, mais d'autres
corabii)aisons seraient possibles. La seule utilité de ces généralisations est de dessiner
clairement pour le grand public le résultat des études de détails; elles n'offrent pas
en elles-mêmes un argument de plus. D'ailleurs tous les faits ne sont pas également
maniables. Si Marc a abrégé ce qui regardait le Baptiste parce qu'on ne s'en souciait
pas à Rome, pourquoi a-t-il raconté si longuement les circonstances de sa mort? Il
est aussi bien difûcile de croire que les premiers chrétiens de Palestine n'attachaient
pas d'importance aux miracles, parce qu'ils vivaient dans une atmosphère qui en était
comme saturée. Quoi qu'il en soit, il n'estque juste de constater que cette critique
se rapproche en partie des thèmes de M. Streeter est prêt à admettre
la tradition.
que les Loyia sont une œuvre de s. Matthieu, écrite une douzaine d'années après
la mort de Jésus. Le second évangile vieut de Rome, et il répond parfaitement
à la description qu'en a laissée Papias. Le premier et le troisième évangile sont de
l'époque qui suit celle des Apôtres, mais ils contiennent une bonne partie de l'écrit
primitif. D'ailleurs, ce que M. Streeter dit de leur but est admis depuis longtemps
par l'exégèse la plus conservatrice.
L'arrangement de M. Streeter a paru si peu satisfaisant à M. Allen qu'il imagine
tout autrement les Log'ui. et c'est bien d'après lui qu'ils mériteraient vraiment le titre
de Logia. Hari.ack a reconstruit cette source d'après Le. et Mt. Mais, dit avec raison
M. Allen, —
et l'observation a été faite maintes fois, si nous reconstruisions un —
Marc d'après Le. et Mt., combien ne serait-il pas différent du Marc authentique! De
plus M. Allen ne comprend pas ud recueil de discours qui aurait encore embrassé
quelques récits. Il se borne donc à prendre dans Mt. les paroles ou sentences de Jésus
qui ne sont pas dans Me; obtient il ain>i un recueil de discours dont la phraséologie
et la théologie ont le même aspect, — ce qui n'a rien d'étonnant, puisque tout est
emprunté au même auteur. Quant à Luc, il n'aura connu cette source que sous une
autre forme. Ce qu'il y a bien à retenir dans Targumentation de M. Allen, c'est que
le premier évangile a souvent des termes d une saveur très primitive qu'on ne peut
taie, d'abord notée dans son carnet, puis combinée par lui avec le texte de Me. pour
une forme dont s'est servi Mt. C'est sur ce point, semble-t-il. que portent les réserves
de M. Sanday, un peu inquiet de voir ébranlée, à la fin du volume, la base sur laquelle
reposent les autres essais. Et il faut convenir que M. Bartiet ne se dégage pas suffi-
samment de l'équivoque. Lorsqu'il soutient que Q contenait un récit de la Passion,
qu'est-ce dire, si Q est simplement la catéchèse orale, fondement de toute la tradition
évangélique?
M. Addis semble avoir eu pour but de rassurer les personnes qui craignent que
la critique de l'hexateuque ne soit appliquée au Nouveau Testament d'une manière
aussi destructrice de l'unité. Il montre bien que le cas n'est pas le même.
M. Williams s'en prend à la théorie de M. Wendling sur les trois couches de Marc
et montre correctement qu'elle est contredite par les faits. Lui-même croit cependant
devoir concéder que le second évangile a existé dans trois états on y aurait ajouté ;
échangé leurs idées, plutôt qu'ils ne les ont mises en commun pour les imposer au
public. Des esprits très divers ont abordé le problème synoptique par différents
points. L'accord n'en est que plus impressionnant, par exemple sur la priorité de
s. Marc. Le désaccord prouve peut-être d'ores et déjà que certaines questions sont
distingué deux Jean, l'un qui est évidemment l'apôtre, fils de Zébédée, et l'autre
qu'il qualifie de presbytre Que l'on accuse ce vieil homme de radotage, ou ses
.'
copistes d'infidélité, j'y consens, mais si l'on s'en tient au texte courant, le doute
n'est pas possible. Relisons-le encore une fois. « S'il venait quelqu'un qui avait fré-
quenté les presbytres, je m'informais des discours des presbytres, ce qu'André ou ce
que Pierre avait dit, ou ce [qu'avait diti Philippe ou ce "qu'avait dit] Thomas ou
Jacques ou ce [qu'avait dit[ Jean ou MaHhieu ou quelque autre des disciples du
Seigneur, et ce que disent Aristion et le presbytre Jean, disciples du Seigneur. » Et
cependant ce n'est personne de moins autorisé que dom J. Chapman, le savant bé-
nédictin anglais, qui entre en' lice pour réduire à un seul ces deux Jean, qui ne seraient
plus que Jean l'apôtre, auteur du quatrième évangile, de l'Apocalypse et des trois
épîtres qui portent son nom. Le travail de dom Chapman était déjà écrit en 190.3 et
1904; il l'a seulement retouché (P.
Puisque dom Chapman tient pour l'unité, on est tout d'abord étonné qu'il affirme
très nettement que les presbytres ne sont pas les apôtres, mais les disciples des
apôtres. Au lieu de sous-entendre : a à savoir », il sous-entend « pour savoir par
eux ». « Je m'informais des discours des presbytres [pour savoir par leur canal] ce
qu'André », etc. Et cela parait tout à fait bien vu, mais n'en résulte-t-il pas que le
presbytre Jean sera plutôt un disciple des Apôtres qu'un disciple de Jésus et surtout
qu'un Apôtre'? La phrase présente une autre difficulté. Papias s'informait donc, d'a-
près dom Chapman, de ce qu'avaient dit les apôtres par le canal des presbytres et
de ceux qui les avaient fréquentés, donc à travers deux intermédiaires: mais s'in-
qui avaient fréquenté des presbytres qui les connaissaient? Je crois volontiers avec
dom Chapman qu'il faut supprimer au moins un intermédiaire, et que si Papias n'a
pas interrogé directement Aristion et le presbylre Jean, du moins ceux qu'il interro-
geait avaient reçu leur témoignage. Je dis donc avec l'auteur « Le résultat de cette :
Aristion ne sont pas coordonnés avec les Apôtres, mais avec les Presbytres, et c'est
un résultat extrêmement important » (p. 25). Très important, en elTet, car il prouve
que Jean le presbytre n'est pas sur le même rang que les Apôtres, mais sur le même
rang que les presbytres, dont il porte précisément le nom pour être distingué du fils
de Zébédée. Et j'avoue que, jusqu'à cet endroit, j'ai cru que dom Chapman allait
conclure à deux Jean. Mais point, il paraît au contraire, chose étrange, tout à fait
convaincu d'avoir démontré l'unité. Il y a pourtant bien longtemps qu'on a montré
que le Jean, dit le presbytre, nommé après Aristion, dans une catégorie à part, ne
peut être Jean l'Apôtre; que Papias n'a pu mettre une seule personne à la fois parmi
les morts et parmi les vivants-, qu'en le liommant une fois encore après Aristion et en
rangeant sur le même plan les narrations de l'un et les traditions de l'autre, il
montre assez clairement qu'il ne parle pas du dernier des Douze. Enfin c'est bien ce
qu'a compris Eusèbe, qui avait le livre de Papias sous les yeux.
Dom Chapman attaque séparément chacune des raisons d'Eusèbe, comme un
avocat s'efforcerait de répondre aux arguments d'un adversaire. Sans doute si l'opi-
nion d'Eusèbe était évidemment fausse, il faudrait bien essayer de montrer que ses
arguments ne prouvent Mais qu'a donc d'impossible, d'invraisemblable, d'ab-
rien.
surde, l'existence d'un second Jean en Asie, ou même en dehors d'Asie, car enfin
Papias ne dit même pas que le presbytre ait habité l'Asie?
C'est, dit dom Chapman, que s. Irénée a compris qu'il s'agissait de Jean l'Apôtre.
Si Irénée parle de science certaine, qu'on change le texte de Papias, ou qu'on dise
qu'il n'a pas su ce qu'il écrivait. Mais entre Irénée, se fiant probablement à sa
mémoire, et Eusèbe relisant le texte de Papias pour contrôler le dire d'Irénée, — et
il avait les deux livres sous les yeux, — il faut opter pour Eusèbe. Qui n'a pas cou-
tume de rendre armes quand une personne, même d'intelligence très médiocre,
les
La mémoire de s. Irénée a pu s'accrocher
affirme qu'elle a relu un texte pour vérifier.'
à l'un des passages où Papias parlait de Jean le presbytre, sans se souvenir du pas-
sage que nous avons cité, où il le distingue de Jean l'Apôtre.
Mais, dit encore dom Chapman, nous aboutissons à cette conséquence absurde
qu'il faut alors admettre deux Jean le presbytre, celui de Papias et celui qui a écrit
les deux petites épîtres johannines, à savoir l'Apôtre qui prend aussi le titre de pres-
bytre! Cette conséquence n'est pas au>si terrifiante qu'elle le paraît au savant
anglais. Jean l'Apôtre a pu prendre le titre de -pjcrojrspoç, comme s. Pierre a pu
prendre le titre de TJV7:paojT3Go; (I Pet. 5, 1), mais cela n'empêche pas qu'il ait pu
exister dans la catégorie des presbytres un nommé Jean. Il faudrait seulement re-
connaître que répithète de presbytre qui pouvait être prise par un apôtre est devenue
dans la langue de Papias et d'Irénée une sorte de terme technique pour désigner les
anciens de la génération suivante. Mais n'est-ce pas ce que dom Chapman a soli-
dement établi?
Parlons franc. D'où vient que M. Brassac a pu écrire : « pour la distinction : ... en
général les adversaires de l'authenticité du quatrième évangile » ; « contre la dis-
(1) Manuel biblique. III, 13« éil. (p. -la.'i et loti, en note).
BULLETIN. 4G1
Cela siïnifie évidemment qu'on craint, en admettant deux Jean, d'aDFaiblir la thèse
bué quatrième évangile au presbytre, Eusèbe nous l'aurait dit. Et je ne puis que
le
Harnack, qui est tout à fait en l'air. Mais alors pour(]uoi en a-t-il si peur? Il semble
que des deux côtés on raisonne trop d'après les livres pour conclure aux réalités.
Papias ayant nommé Jean le presbytre, il faut, diront les partisans de M. Harnack.
qu'il ait joué un rôle considérable. Mais, dit dom Chapman, personne n'a plus parle
de ce Jean '1). sauf les lecteurs de Papias, il n'a donc jamais existé.
Or il suffirait de conclure : il n'avait donc rien fait d'assez remarquable pour qu'où
continuât d'en parler. On peut avoir existé dans la réalité sans avoir un état civil
dans les livres, et on peut avoir été nommé dans un livre sans avoir rien fait d'extra-
ordinaire.
De Jean le presbytre, le texte actuel d'Eusèbe dit, comme d'Aristion. qu'il était dis-
cipledu Seigneur. D'après dom Chapman. ce mot doit être entendu en toute rigueur,
puisque ce Jean serait Jean l'Apôtre. Mais, tout en le distinguant, on pourrait se
demander s'il a connu personnellement Jésus, ou s'il a été son disciple au sens large
(Act. 9, 1). La version syriaque ne porte pas cette mention, qui ne paraît pas non
plus dans l'esprit d'Eusèbe. Je ne voudrais pas chercher chicane à dom Chapman
sur ce point, beaucoup moins clair que le point principal; pourtant à lire la phrase
comme lui, Aristion et Jean le presbytre appartiennent plutôt à la génération qui a
suivi celle des apôtres.
Lorsque Jean le presbytre sera rentré dans l'obscurité relative dont il n'aurait
pas dû sortir, on trouvera moins d'inconvénients à lui rendre l'existence à laquelle
il a droit. Quand la question qui le concerne aura perdu de sou importance, elle
sera tout naturellement résolue. Certes on n'a rien à objecter à ce qu'il n'ait existé
qu'un seul Jean. L!n seul Jean suffit à tout. Un seul Jean a écrit les ouvrages
canoniques attribués à Jean l'Apôtre. Un seul Jean a conservé un souvenir
éternel. Mais quand on revient au texte de Papias, on se demande pour la centième
fois pourquoi donc, n'ayant pas nommé tous les Apôtres, il a mis parmi eu.xJean, qu'il
se proposait de nommer encore après Aristion... Et on ne trouve pas de réponse...
Etrange brochure que celle de M. W. Brandt sur les régîtes de pureté des Juifs et
leur description dans les Evangiles ;2). Ilpresque uniquement du célèbre pas-
s'agit
sage de saint Marc (7, 1-5) sur la lotion des mains avant le repas et autres usages
des Pharisiens et des Juifs, relatifs à la pureté des aliments et des ustensiles.
« Ila entendu dire qu'il y avait deux tombes à Éphèse, mais il n'a pas entendu dire qu'ily avait
eu deux Jean connus en cet endroit • (p. 55).
(:2i Jûdische Reinheitslehre und ihre lieschreibung in den Evangelien, von Wilhelm Brandt,
in-8'> de vn-6i pp. Giessen, Tôpelmann, 1910 (Beiliefte zur Zeitsciirift liir die alttestamentliehe
Wissensclialt. XlX .
462 REVUE BIBLIQUE.
M. Biiehler (1) a essayé de prouver que le devoir de se laver les mains avant de
manger n'était d'abord obligatoire que pour les prêtres, qu'il n'a été imposé aux doc-
teurs qu"à la fin de i'^'" siècle de notre ère, et qu"il n'a jamais été tout à fait général
parmi les Pharisiens. D'où il fallait naturellement conclure que les faits racontés par
Marc et la leçon qu'en avait tirée Jésus n'étaient point authentiques, sans parler
des renseignements fournis par l'évangéliste lui-même. Là-dessus M. Brandi reprend
toute la question, prouve que les usages dont parle Marc sont, sinon établis sur des
textes, du moins vraisemblables, et cependant il conclut que les paroles de Jésus ont
été inventées par la tradition chrétienne pour appuyer sur l'autorité du Maître la pra-
tique des Gentils qui ne distinguaient pas entre aliments purs ou impurs!
Voyons d'abord la défense de Marc; on comprend que dans ces conditions, elle n'a
aucune arrière-pensée apologétique. Il y a à distinguer plusieurs usages. Pour ce qui
regarde la lotion des mains, M. Brandt lit dans Marc nj/.vâ (au lieu de -jytJ^fj) les :
Juifs observants se lavent « souvent » les mains avant démanger. Ce « souvent », dit
l'auteur, pourrait faire allusion aux différents actes de la lotion. Il fallait verser de
l'eau deux fois et se frotter les mains dans l'intervalle. Chacun voit ce que cette
interprétation a de forcé. Sur le fond de la question, M. Brandt distingue, très juste-
ment, semble-t-il, le principe de l'impureté des mains avec les conséquences qu'en
ont tirées les Rabbins, et le simple fait de se laver les mains avant le repas. Il concède
à M. Bùchler que la doctrine de l'impureté des mains ne s'est développée que peu à
peu. D'abord il fallait tremper ses mains avant de manger des choses saintes, puis on
obligea à verser de l'eau sur les mains avant de manger des oblations, et cela ne —
regardait encore que les prêtres, —
puis on obligea les rabbins et enfin tout le monde à
recevoir de l'eau sur les doigts avant de manger quoi que ce soit. C'est bien là en
effet un schéma rabbinique, mais il serait imprudent de fixer des dates très fermes.
Si l'usage était devenu universel au ii*^ siècle, est-on sur qu'il n'existait pas un siècle
auparavant? et si Hillel et Chammaï, et non pas seulement leurs disciples, ont posé
le principede l'impureté des mains, peut-on affirmer qu'il n'avait pas conduit assez
vite aux usages attestés par l'Évangile? De toute façon, il est très juste de dire avec
M. Brandt qu'on n'avait pas attendu les décisions des rabbins pour se laver les mains
avant le repas. Il estime que cet usage a été emprunté aux Grecs. Il est bien plus
vraisemblable qu'il est héréditaire en Orient où il existe encore, beaucoup plus chez les
Bédouins que chez les citadins. L'usage de manger avec les doigts les oblige à se laver
surtout la main droite, et le texte cité par M. Brandt sur Chammaï s'explique assez
simplement par l'usage actuel de donner de la main à son hôte une portion de choix (2).
Comment cet usage fut-il regardé par les Pharisiens comme un rite ? C'est ce que
M. Brandt renonce sagement à expliquer, mais rien n'est plus vraisemblable que cette
fusion des idées et des usages dès le temps de Jésus. Quand il s'agissait de manger
« des pains », en prenant les termes à la lettre, les disciples se dispensaient sans
doute d'un usage qui suppose la table mise et le plat de viande avec du jus apporté
au milieu des convives. Les Pharisiens, du moment qu'ils donnaient à l'usage un
sens religieux, relatif à la pureté, devaient l'étendre à toute sorte de nourriture.
M. Brandt passe ensuite au second usage attesté par saint Marc. Préférant la leçon
SaTtitawvTai (au lieu de ç.av-î(iwvTat), il l'applique aux personnes : les observants qui
reviennent du marché ne se mettent pas à table sans avoir pris un bain (cf. Le. 11,
29). On a nié absolument cet usage. L'auteur a réussi à découvrir un texte du Tal-
niud de Jérusalem (1) qui prouve quemême des gens du peuple se croyaient tenus
à prendre un bain avant de manger quand ils se savaient en état d'impureté. Des
personnes scrupuleuses ont pu se croire tenues à la même précaution lorsqu'elles
revenaient de la place publique, où il était si facile de se contaminer.
Mais que faut-il penser du lavage des pots? M. Brandt suppose qu'ils sont enterre
cuite. Dès lors, s'ils ont encouru l'impureté, il faut les briser; cette fois la Loi est
formelle; il ne suiflrait pas du tout de pour
les laver les rendre purs.
Pour résoudre cette difficulté, on pourrait dire que
les pots sont en métal ou en
bois; mais M. Brandt s'est interdit cette solution. Il suppose donc que, dans ce con-
texte, Marc a voulu parler de la purification des pots et des assiettes avant le repas ;
ce serait une simple précaution à tout hasard. Comme on ne sait pas au juste si le
pot ou l'assiette n'a pas contracté quelque imoureté non prévue par la Loi, on les lave
avant le repas. De cet usage aussi le Talmud olîre des traces positives au ii" siècle,
et on peut supposer que l'usage remonte plus haut. Après tout cela on peut bien
estimer que les Pharisiens pensaient aussi qu'une nourriture profane avait des chances
de contaminer, ce qui est le sujet de la discussion des Pharisiens avec Jésus. Parvenu
à ce point. M. Brandt aurait dû s'apercevoir qu'il otîrait un appui précieux à ceux qui
lisent GxvTbojvTat. Si la nourriture pouvait contaminer, il fallait l'asperger ou la laver
elle aussi, autant que faire se pouvait.
AinsiM. Brandt a réussi à prouver que tous les usages visés par Marc existaient
bien à du premier siècle et même avant. 11 a enlevé du chemin tout ce qui
la fin
précisément parce quela pensée demeurait enveloppée dans le contexte des circons-
cachet du maître. Si la première partie de sa thèse est bien établie, comme nous
croyons, on ne s'arrêtera pas à la conclusion qui tient au scepticisme radical de
l'auteur.
Au s'il est tout à fait
surplus, à propos de chercher dans le Talmud et dans
les autresœuvres des Rabbins des renseignements sur leur mentalité et leur ca-
suistique, on serait par trop crédule en regardant leurs compilations comme le
miroir des faits. Les textes évangéliques, beaucoup plus en contact avec les faits, et
des faits récents, ont une valeur que tout le Talmud ne saurait ébranler.
M. Bultmanu, dans une brochure assez courte, mais très étudiée, Le stijle de la prr-
de Paul et la Diatribe cynico-stoicienne (i).
(liciitioii
nique du iii"= siècle avant J.-C, disciple de Bion de Borysthène. Horace, surtout
dans ses satires, Sénèque. Musonius Rufus, Epictète, Dion de Pruse. Le dernier de
la liste est Plutarque, qu'on s'étonne un peu de trouver là, et dont le nom seul
prouve que M. Bultmann n'entend pas parier d'une école particulière de philosophie,
puisqu'on connaît assez la guerre qu'il fit aux Stoïciens. Il s'agit donc surtout des
prédicateurs de vertu. Qu'y a-t-il d'étonnant à ce que les prédicateurs emploient le
même style? dira quelqu'un. Or voilà précisément une des figures qu'emploient en
commun la Diatribe et saint Paul l'interlocuteur qui : fait des objections et qu'on
remet à sa place.
Pour avoir pleine lumière sur le sens de cette ressemblance et des autres, il fau-
drait encore comparer saint Paul à saint Jacques. On constaterait que saint Jac-
ques est indemne de ce-tte influence, tandis que saint Paul l'a subie. Évidemment il
n'est point question d'une dépendance littéraire; sans cela Epictète ne figurerait pas
au premier rang dans les analogies; il s'agit d'un moule, ou si l'on veut d'un habit
dont Paul et les stoïciens ont pu revêtir leur pensée, parce qu'elle était destinée à
produire un certain effet. Aussi bien M. Bultmann n'aborde pas la question du fond
des idées, et, même à s'en tenir au style, il n'est point porté à exagérer les ressem-
blances. Malgré tout, saint Paul avait son genre d'esprit et son tempérament qui
n'étaient pas ceux d'un Grec, et sa foi dans la Rédemption et la grâce qui n'était pas
la confiance d'un stoïcien dans sa volonté. Puisque nous aimons à dire que le style,
c'est l'homme, ces dons individuels devaient se retrouver dans le style. Paul est con-
vaincu, le philosophe l'est aussi: tous deux cherchent plus à communiquer leur con-
viction et à entraîner qu'à démontrer par la dialectique. Cependant le Grec est
toujours porté à raisonner. S'il se sert du dialogue, c'est pour conduire la pensée à
son but par un artifice ingénieux; chaque réplique est un anneau dans une chaîne;
lorsqu'il termine une phrase par le mot du commencement, c'est pour montrer que
la conclusion résout bien le problème posé. Dans saint Paul, le dialogue n'a pas ces
allures savantes, et le dernier mot du cadre verbal qui enferme ses énumérationsest
simplement un rappel qui fixe l'attention. On sait que ce dernier phénomène est
regardé par certains critiques comme un indice de style poétique. Quand un pro-
phète emploie Yiucluaio, c'est, dit-on, une preuve qu'il recourt à la poésie. Or où
trouver des cadres plus fermes que dans s. Paul, Rom. 8, 31 ur.èp f,,aôjv... 34 urrÈp tjijlôjv
et 8, 35 Tt; f,;jLa; ytosbs'.... 39 f,,uLà; /tocbat 21? Cette réflexion dont M. Bultmann a
fourni lui-même le thème, pourrait bien suggérer en même temps, et qu'il faut
plutôt regarder cette figure comme appartenant à la rhétorique qu'à la poétique (3),
et que s. Paul suit ici décidément les traditions sémitiques plutôt que les tournures
grecques. Le goût de l'antithèse, poussé chez s. Paul, a aussi ses racines dans
si loin
aussi la matière dans la vie de tous les jours, mais, outre qu'il ne parle jamais ni
(1) Der Stil der Paulinischen Predigt und die Icj/nisch-stoisc/ie Diatribe, von Lie. Rud. Bilt-
MASN, Uepetenla. d. Iniversitat Marburg, in-8 de 109 pp. Gotlingen, 1910.
(-2) CI. nom. 12, i-5.
(3) Quelles belles strophes on obtiendrait en coupant s. Paul en petites lignes, et en écrivant
en lettres grasses certains mots, par exemple x£pôï)(7a) qui revient quatre fois I Cor. 9, 19-22.
MII.LKTIN. 465
« stimulus carnis ». « l'aiguillon à la chair », dont s'est plaint s. Paul II Cor. 12, 7 .
non sans le mettre, par manière de compensation, en très illustre compagnie, comme
si cette cruelle maladie, loin de nuire au génie, en était presque un indice. M. le
D'" Adolphe SeeligmilUer ne partage pas ces opinions. Spécialiste de maladies ner-
veuses, il s'est cru autorisé par son expérience et ses études à réfuter M. Krenkel T.
Même sans être spécialiste, on peut estimer qu'il y a réussi. Mais quelle était donc
l'attaque dont s. Paul a prié Dieu si instamment de le délivrer"? M. Seeligmiiller se
défend de conclure : il inclinerait vers une malaria ou une migraine affectant les
yeux. Ce ne serait pas en tout cas des assauts de la chair, résultant de tentations ou
de suggestions diaboliques. >'ous le croyons volontiers; mais où M. Seeligmùllera-t-il
pris que cette explication était une doctrine catholique ?
textes annotés et traduits par Charles Micdel. correspondant de l'Institut, professeur à l'L'niversité
de Liège: Histoire de Joseph le charpentier, rédactions copte et arabe traduites et annotées par
P. PEETEns, bollandisie: in-lâ de XL-iw pp. Paris, Picard, lîUl.
—
I
en français; peut-être cela ne va-t-il pas sans négliger quelques nuances '!).
Le P. Peeters a traduit l'histoire de Joseph avec sa maîtrise ordinaire, mais sans
s'astreindre à être trop littéral pour cette très bonne raison qu' « une traduction est
surtout faite pour ceux qui en ont besoin et non pour les spécialistes... » et que « à
force de chercher l'exactitude du menu détail, elle devient fausse dans l'ensemble »
prêt et échange (p. xxviii). Avant d'accepter ce jugement sommaire, il faut rappeler
que, d'après M. Nau lui-même, Nestorius se refusait à admettre entre la nature et
l'hvpostase la distinction qu'on a admise depuis; de plus il suffit de parcourir non
pas même le livre, mais la table dressée par M. Nau, pour se convaincre de léuer-
gie avec laquelle Nestorius a proclamé l'unité de personne (prosôpon) dans le Christ.
Il est vrai qu'il parle en maint endroit du prosôpon de la divinité et du prosûpou de
l'humanité, mais il faudrait savoir s'il ne s'en tient pas aux déclarations du début,
d'après lesquels il n'y a, semble-t-il, qu'un prosôpon, celui du Verbe, qui n'appartient
à la nature humaine que parce qu'il agit en elle. On devra du moins tenir compte
de textes comme celui-ci « Depuis qu'il s'est fait (chair) et qu'il a habité parmi
:
nous, il a attiré la chair par appropriation jusqu'à son propre prosôpon, qui est pour
1) Par exemple t/Yyixev (i, -;>; et f,yy'.atv (2, 2) traduits « arriva », tandis que M. Araann traduit
le parlait » était arrivé » et l'aoriste « arriva •.
yestorius.
(2)
—
Le livre d'Héraclide de Damas, traduit en français par F. Nau. professeur à l'Ins-
titut catholique de Paris, avec le concours du R. P. Bedjan et de M. Biuèbe, suivi du texte grec des
trois homélies de Nestorius sur les tentations de Notre-Seigneur et de trois appendices Lettre à :
Cosme, —
présents envoyés d'Alexandrie; Lettre de Nestorius aux habitants de Constantinople.
In-S" de xxvui-40i pp. Paris, Letouzey et Ané, 1910.
BULLETIN. 467
deux d'une part, pour l'essence de Dieu, et d'autre part pour l'union et l'appropria-
:
tion de la chair; de sorte que même la chair qui est chair par nature, par suite de
cepté de souffrir ce dont on m'accusait, afin que les hommes puissent recevoir sans
encombre l'enseignement des Pères tandis que j'étais ainsi accusé, car je ne m'oc-
cupe pas de ce qui a été fait contre moi ù (p. 330j.
Tout le monde rendra hommage à la maîtrise avec laquelle .M. >'au a su rendre
accessible à tous un texte si embarrassé il.
(1; C'est M. Nau qui a débarrassé le marché littéraire du titre bizarre de Bazar d'Hcraclide, eu
montrant que le syriaque tegourld {mercatura) devait être la traduction du grec îrpa-'tiaTïia
« traité > plus souvent que commerce « ».
l'existence de doublets — déjà concédée par le vénéré et très strict Père Corluy, S. J.
— n'est pas la plus simple explication des faits, l'auteur résout comme il peut les
c'est qu'ils sont encore plus visibles dans le texte original des Septante. Pour le nier.
M. Allgeier alléguera certains manuscrits des LXX, sans paraître se douter que
toute une catégorie de manuscrits a été corrigée d'après le texte massorétique, ou il
credenda sunt, quae in verbo Dei scripto vel tradito conlinentur ». Un point, c'est
tout. Heureusement que le texte du concile du Vatican continue, sans même une vir-
gule : « et ab Ecclesia sive solemni iudicio sive ordinario et universali magisterio tan-
per accidetis. « Sic ergo circa mundi principium aliquid est, quod ad substan-
tiam fidei pertinet, scilicet mundum incepisse creatum; et lioc omnes concorditer di-
cunt. Quo autem modo et ordine factus sit, non pertinet ad fidem nisi per accidens
inquantum in Scriptura traditur, cuius veritatem diversa expositione Sancti salvantes
diversa tradiderunt (1 . » iM. Schulz n'entendait pas sacrifier la vérité de l'Ecriture
tout en confessant que le texte inspiré prend un autre caractère et doit être inter-
prété un peu différemment si l'on opine pour l'existence des doublets. Ce qui est mis
en question, ce n'est pas la vérité de l'écrivain sacré, mais la certitude de l'interpré-
tation ancienne, sur des points qui ne sont pas résolus par le magistère solennel ou
ordinaire de l'Eglise.
M. Schulz lui-même ne paraît pas très disposé à se rendre aux raisons de M. AU
geier. 11 le lui déclare dans l'avant-propos d'une petite brochure intitulée EUloire et
édification dans l'Ancien Testament (2). Le but de ce nouveau travail est de montrer
qu'il y a dans la Bible des récits édifiants qui ne sont pas strictement conformes à la
réalité des choses. Les preuves sont tirées de Judith. Tobie, la Sagesse, etc., et ordi
nairement appuyées sur les concessions des exégètes les plus conservateurs, comme
Hoberg, Kaulen, etc. (31. M. Schulz fait remarquer que tel est d'ailleurs le procédé
PentaleucJi, donne les conclusions de la méthode (1). Depuis son précédent ouvrage,
temps de modifier ses points de vue. Aussi nous contenterons-
l'auteur n'a pas eu le
nous de renvoyer à ce que la Revue a déjà dit concernant le système adopté par
M. Wiener (2). Les arguments sentent le barreau songez que l'auteur est harrhter- :
f(t-lau\
Le troisième livre d'Esdras, que le Concile de Trente n'a pas reçu dans le Canon,
a profité du regain d'intérêt qui s'attache aux livres apocryphes. On a même pré-
tendu en divers endroits le préférer aux deux livres canoniques d'Esdras et de Xéhé-
mie (I et II d'Esdras dans la Vulgate). On
sait que nous ne le possédons qu'en grec
— sans parler des versions du grec, — que correspondant soit aux deux livres cano
et
niques, soit même à une partie des Paralipomènes, il a de plus certaines parties eu
propre, en particulier la charmante histoire des pages (III Esd. 3, 1-5, 6), et
qu'il range les faits dans un ordre particulier. Le R. P. Bayer, de l'ordre des Frères
Mineurs, s'est proposé de l'étudier en le comparant aux livres canoniques et de pré-
ciser sa valeur et ses origines 3 . Il a commencé par comparer le texte grec de III
Esdras aux parties qu'il a en commun avec le texte raassorétique. La conclusion est
que ce texte a été traduit d'un texte hébreu etaraméen assez semblable au texte
massorétique. Le traducteur savait d'ailleurs mieux l'hébreu que l'araméen, et ses
contresens sont plus nombreux quand il traduit cette dernière langue. En somme la
traduction est fidèle, tout en demeurant suffisamment grecque; c'est un bon exemple
d'une traduction exacte sans être trop littérale. Lorsqu'on peut conclure que le tra-
ducteur avait sous les yeux un original différent du texte massorétique actuel, il y a
lieu de comparer la valeur des traditions. Dans la majorité des cas, d'après le
R. P. Bayer, le texte grec de III Esdras représente une meilleure tradition textuelle.
Mais il n'en est pas ainsi lorsque l'on compare la chronologie de III Esdras à celle
des deux livres canoniques. Le R. P. croit pouvoir conclure que III Esdras avait
l'autre ouvrage sous les yeux et qu'il en a changé l'ordre des faits dans un but dé-
terminé. Encore est-il que cette préférence n'est pas absolue. D'après III Esdras, il
venir Zorobabel sous Cyrus. Le P. Bayer refuse d'identifier ces deux person-
iDt. 17, l't-20 n'est pas de Moïse, mais de Samuel. Cependant elle est non seulement insérée
dans un corps mosaïque, mais rédigée de laçon à laire cruire que les Israélites n'étaient pas en-
core dans le pays de Canaan. Cette fiction admise, pourquoi ne pas l'étendre à des parties beau-
coup plus considérables du Deutéronome et au livre entier?
1) The origiii of ttie Fentateuch, |)ar Hap.old M. Wiexer, M. A., I.L. lî. etc. In-8 de v -j- 152 pp. ,
nages, comme on l'a proposé pour concilier les deux récits, et donne raison à l'apo-
cryphe quant à la tentative de Sesbassar. Quant à l'auteur des livres canoniques :
« il a enchevêtré de telle sorte les récits puisés à différentes sources sur les deux res-
taurations du Temple, qu'une deux événements n'est presque plus
séparation des
possible » (p. ne donnera guère satisfaction à M. Allgeier. D'ail-
104), solution qui
leurs toute cette partie historique est vraiment traitée trop succinctement; il fau-
drait une étude beaucoup plus complète pour aboutir à un résultat définitif.
L'auteur devait aussi se préoccuper des parties propres à l'apocrjphe, surtout de
la dispute des pages, avec les privilèges accordés par aux Juifs et le départ de le roi
premier dans l'estime générale, seul connu des premiers chrétiens de langue grecque.
Puis l'atchetype cristallisé dans la forme massorétique, traduit en grec et remplaçant
l'apocryphe dans l'estime du monde chrétien. Ce n'est pas un petit mérite d'avoir
traité toutes ces questions en si peu de pages. Elles seraient plus claires si l'auteur
avait exposé aux débuts les relations de fait entre les deux textes. Il a probablement
supposé la connaissance d'une bonne introduction ;
pourtant un peu de synthèse
aurait donné du jour à ses analyses.
Par une heureuse innovation, l'éditeur s'est résolu à éditer le texte grec, et il annonce
qu'il en sera désormais ainsi pour les textes grecs et latins. Des textes orientaux
Les Psaumes de Salomon, introduction, texte grec et traduction par J. Yitkao, docteur es
(l)
avec les principales variantes delà version syriaque par François Martin, prof- de langues
lettres,
sémitiques à l'Institut catholique de Paris, in-8» de 427 pp. Paris, Letouzey et Ané, 1911.
BULLETIN. 4:1
pressims personnelles profondes du temps d'.A.lexaudre Jannée. Disons que les cha-
pitres suivants sont consacrés aux doctrines, à l'auteur, à l'histoire du livre dans les
littératures juives et chrétiennes et jusqu'à nos jours, avec une revue complète ana-
lysant les diverses opinions des critiques. Le chapitre V, qui traite de l'original hébreu,
c'e»t-à-du'e jdutùt de la langue grecque hébraisante de la version que nous possédons
seule, est très approfondi et digne du philolugue qu'est M. Viteau. Désirant donner
une édition originale, quoique celle de vonGtbhardt soit justement estimée, M. Viteau
s'est occupé du classement des manuscrits. Il a suivi surtout la Ms. R [Vatic. grec.
Dans quelle mesure les rabbins qui ont composé leTalmud et les Midraehim ont-ils
pratiqué la polémique contre les chrétien*, les gnostiques ou les Juifs simplement
apostats? C'est une question fort délicate. Lejuddïsmea ne pouvait ne pas se préoccuper
beaucoup du christianisme qui grandit et lui reproche sa stérilité, l'abanJon de Dieu,
son irupuissance, qui prétend même lui avoir dérobé le secret de ses Ecritures. Il
Midrac/i « {2). Le sujet traite est plus ample et plus restreint que le titre ne l'indique.
Plus restreint, car l'auteur nous fait grâce de nouveaux développements sur les Minitn :
plus ample, parce qu'il esquisse quelques controverses entre juifs et chrétiens, par
exemple en ce qui touche au véritable Israël.
Israël, accusé par les chrétiens d'avoir encouru la répudiation de Dieu, se défen-
dait par une parabole. Une négresse, st-rvante. disait à son amie : Mon maître va
répudier sa femme, parce qu'elle a les mains noires, et m'épouser. Mais, répondait
l'amie, il sera plus facile à ta maîtresse de se laver les mains qu'à toi de changer de
couleur ! Israël était bien la maîtresse; l'esclave négresse, si longtemps plongée dans
1 Le Messianisme.... p. 2it8.
Religionsgescftichtl.iche SCudien. I Heft : Die Bezeichnungen fur L'hi-islen und Gnosiiker im
{ij
Talmud und Midraî. Von Dr. A. Marmokstei.n Rabbiner, Skotsctiau ^^Oest. Schlesien) : in-S» deSi pp.,
chez l'auleur. 1910.
472 REVL'E BIBLIQUE.
l'idolâtrie, n'nvait pas le droit de lui reprocher des fautes passagères. Mais si la né-
gresse était l'Église venue des Gentils, n'avait-elle pas changé de couleur? Quand les
rabbins prouvent la résurrection par les miracles d'Élie et d'Elisée, entendent-ils
suggérer que la résurrection de Jésus n'est pas prouvée (p. 37)? Certes tous les argu-
ments leur sont bons, et leur silence même peut être tendancieux, mais on doit
s'abstenir de conclure. Et y a-t-il eu des chrétiens qui rejetaient les Prophètes et
les Hagiographes (p. 33 1 ? Cette division n'indique-t-elle pas elle-même un milieu plus
palestinien, certains Samaritains, peut-être? Quoi qu'il en soit de ces doutes, on
saura bon gré à M. JMarmorstein d'avoir sondé quelques textes intéressants au point
de vue de la polémique.
criptionde Mésa (1) s'appiiie sur quelques travaux antérieurs et les résume d'une façon
très claire. L'auteur a ajouté en appendice l'inscription de Siloé et le calendrier de
Gézer, On croira avec peine qu'il n'a pas même cité le travail du P. Vincent dont les
conclusions ont été adoptées par M. le Professeur Marti (2). La transcription et la
traduction proposées étaient tolérables comme un premier essai de déchiffrement,
mais il faut une belle dose de sans-gêne pour les présenter au public trois ans
après la décoivverie.
Er/ijptiens et Êgéens. — M. le baron v. Lichtenberg a esquissé tes influences
les traces en Palestine. On est étonné qu'il n'ait pas cité le runaan du P. Viucent.
mis en lumière par M. Daressy. Ce sont des tablettes en terre cuite, dont les plus
grandes ont 0'",30 sur 0™,07, et qui représentent des prisonniers. Elles faisaient partie
de la décoration du temple de Ramsès III à Mcdinci HaOou. et nous montrent par
1) The Moabite Slone. by W. H. Bennett. D. D., Litt. D., iii-16 de 86 pp. Edinburgh T. et T. Clark,
l!)ll.
Ptevue biblique en tnutes lettres, puisqu'on ne parait pas soupçonner son existence), 1909,
2
1». p. 493, 6:i3; 1910, p. 158 ss., 320, i"i. Inutile d'ajouter qu'un article de la même Revue
-243 ss.;
sur Mésa ;i901, p. o-22 ss. ne pouvait aspirer à être cité par M. Bennett.
(3) Einflûsse der ûgdischen Kultur auf Acgypten und Paldstina, von Reinhold Freilierrn v.
Lu.UTEN'nERC, in-8° de 104 pp. Leipzig, Hinrichs, 1911.
(4) Plaquettes émaiUécs de Mrdinet-Habou, tirage à part aimablement envoyé par l'auteur.
BULLETIN. 473
conséquent le type des populations voisines de LÉgypte au \iv siècle avant notre ère.
« L'image du captif est couverte d'eraaux fondus au feu qui nous donnent tous les
détails du costume... Les couleurs employées sont blanc, rose, rouge foncé, jaune :
clair, vert foncé, vert clair, gris-bleu, noir, brun-rouge et brun-jaune. ^ M. Daressy
a distingué, outre les nègres, si faciles à reconnaître, non seulement par la couleur,
mais par les cheveux crépus et les lèvres charnues, des prisonniers à peau rouge et
des prisonniers à peau jaune, Hittites, Sémites, Libyens, peuples de la mer. Les peu-
ples à peau rouge ne sont représentés que par deux échantillons, que >L Daressy
nomme ïoursha, et ils ont le même costume que les peuples de la mer. fort distinct
de celui des Hittites, des Sémites et des Libyens. Oa remarquera surtout un Philis-
tin ;i i
vêtu d'une sorte d'éphod fixé par une ceinture qui n>st pas sans analogie avec
le costume crétois, très rudimentaire, mais le Philistin a de plus une longue robe. Il
s'est déjà rapproché des usages asiatiques: on pressent le moment où il sera séraitisé.
Il est d'une si belle allure avec son visage régulier, son nez fort, mais droit, ses che-
vaux ou coupes ou renfermés dans sa coilTure. sa barbe abondante,, mais taillée avec
soin, une sorte de pectoral suspendu à un riche collier, qu'on le prend aisément pour
un prince. En mettant en face de lui un Sémite, ou peut imaginer David à la cuur d'Achis
roi de Gath.
et économique de la Chaldée plus de trois mille ans avant notre ère 2 On ne pou- .
Il n'a pas été moins heureux que son devancier si l'on en juge par la publication
dans laquelle MNL Cros, Hsuzey et Fr. Thureau-Dangin communiquent au
monde savant les principales découvertes 3 Chacun des auteurs a fourni sa con-
.
Les résultats de ces fouilles dans de Sa[izec et Heuzey, Découvertes en Chaldée (Paris, Le-
•2
i) Souvelles fouilles de Telloh. par le commandant Gaston Cros, publiées avec le concours de
Ikon Helzey et de Fr.A>çois Tucr.EAi-DAXGiN. Première livraison, p. i-104, j»l. II. III, VI, vues 1 et
2. 3 et 4 Paris, Leroux, 1910 Deuxième livraison. 10-5-2i4, pt. I, V, VII, VIII, vues
. et « Paris, .'i
tain nombre des dissertations qui composent les deux premières livraisons ont déjà
paru dans les «Comptes Rendus» de l'Académie des InscriptionsetBelies-Lettresoudans
la « Revue d'Assyriologie ». Mais elles ont été mises au point. Parmi les textes les plus
intéressants, signalons la tablette d'argile où, sous forme de lamentation, est racontée
la destruction de Lagas, à l'époque d'Ouroukagina (vers 3000 av. J.-C.» '1); 'a lettre
anciens ont fait pour le déchiffrement des textes cunéiformes. Il ne faut pas oubliei
que c'est grâce aux documents trilingues qu'où est parvenu à pénétrer le mystère de
toute la littérature assyro-babylonienoe. C'est pourquoi dans sa table de l'ancienne
écriture perse, l'auteur donne, outre la forme et la valeur syllabique du signe, le
nom du savant qui a déterminé cette valeur. Les vétérans de la science cunéiforme
reparaissent au jour : Grotefend, Lassen, Hincks, Burnouf, Rawlinson, Oppert, etcJ
Une autre table donne la liste des signes élamites et de leurs équivalences. Le pli
bel hommage est rendu aux travaux du P. Scheil dans le domaine des inscriptions
d'Élara (p. xxxi). Nous ne pouvons insister sur l'importance des textes achémé-j
si cette inscription est du premier, ce n'est plus Darius, mais Cyrus, qui doit être
considéré comme le promoteur de l'écriture perse. M. Weissbach maintient sa thèse
antérieure qui reconnaît dans l'auteur du monument de Mourghab non pas Cyrus le
Grand, mais Cyrus le Jeune. L'inscription elle-même « Je suis Cyrus, roi Achemé- :
que Cyrus le Grand aurait eu soin d'accoler à son nom sa généalogie (Cyrus. fils
de Cambyse, petit-lils de Cyrus. arrière-petit-fils de Té'ispès), comme il le fait dans
le cylindre babylonien d. 20 ss.) qui est resté de lui. En appendice, M. Weissbach
Langues. —
La découverte des papyrus a renouvelé, comme on le sait. la culture
du domaine de la grammaire néo-testamentyire. Actuellement, une grjnimaire du
Nouveau Testament, pour être acceptable, doit s'occuper des rapports existduts entre la
langue commune, révélée en grande pjrtie par la correspondance privée des papyrus,
et la langue des écrivains sacrés. M. L. Piadermacher. désireux de nous otTrir une
grammaire tout à fait à jour, s'est conformé naturellement à ce programme dans le
premier fascicule qu'il vient de lancer dans le public '3). La forme adoptée par ce
professeur n'est point celle des grammaires ordinaires oùla matière se trouve morce-
lée en une infinité de règles. Cest plutôt une causerie didactique du genre employé
dans les revues, partagée en paragraphes assez étendus, dont chacun peut faire l'ob-
jet d'une classe intéressante. Le style est limpide, aucunement surchargé de ces abré-
viations qui donnent à certaines grammaires l'air d'un véritable logogriphe de nature
à décourager l'étudiant. Parmi les sources mises en œuvre pour établir le milieu
linguistique du dialecte néo-testamentaire, M. Radermacher a eu l'heureuse idée de
faire entrer les inscriptions de Syrie publiées par Waddiogton et d'autres épigraphis-
tes. Le phénomène de la suppression du sigma à la fin de certaines prépositions
comme \>-i-/x'-i, r^'"/.?v ^7.?'-^> ^7.?' pour cause d'euphonie, l'amène, en passant, à une
juste Ircture d'une inscription de Btheiiie h.-'o pour h-'o;; -f;; /.'•j;j.t:, au lieu de la
restauration défectueuse de Waddington h toj (p. 39, note 1). A côté des papyrus
qui eussent pu être utilisés davantage, semble-t-il, l'auteur s'est servi des apocryphes
de l'Ancien et du Nouveau Testament et de ces premiers hagiographes byzantins, au
style simple jusqu'à la famiharité. où l'on sent la langue du peuple à peine dissimu-
lée sous un léger vernis de culture. Au milieu de ce cadre dressé par un esprit très
maître de sa matière, quelques exemples tirés du Nouveau Testament, trop peu
même pour une grammaire qui s'intitule : NeutestamentJiche Grammatik. Il est vrai
qu'au point de vue de l'orthographe et de morphologie pure, il n'y a pas énormé-
la
puisque nous la retrouvons dans un manuscrit du ix'' siècle de la Vie de Jean le Si-
lenciaire. composée par Cyrille de Scythopolisi 2). Dans la partie de son ouvrage con-
sacrée à l'écriture et à l'étude des formes, l'auteur a mis en œuvre les résultats du dé-
pouillement des papyrus exécuté par Mayser. Pour la syntaxe, les rapprochements
du grec néo-testamentaire avec la /.o'.vr; sont beaucoup plus rares que dans la pre-
mière partie. La langue du Nouveau Testament y paraît un peu trop isolée de son
milieu. La division de la matière, toutefois, y est très nette et grâce à cette qualité la
grammaire de M. Boatti sera d'un grand secours aux étudiants désireux de s'initier
à la langue des livres inspirés.
(1) Parle I. Fonologia e Morphologia y-l" cdit.), xvi-U4 pp. Parte II. Sf'n/asst", l'»8 pp. Venise,
Libreria Emiliana, d910.
(2) Sinai Wi. l'ubliée parl'archid. Cléoptias, Jérusalem, 1907.
(3) yovi Testamenti Lexicon Grœcum. lii-8°, UiO pp. Paris, Letliielleux, 1511.
Bll.l.ETIN. 477
définitions théologiqiies. Plus d'uue fois l'auteur a utilisé les travaux de Deissmann
sur les papyrus.
Pierre fut emmenéà Samara. villearabe sur le Tigre, aux environs de Bagdad. Avant
recouvré sa liberté, il vient à Rome recevoir du pape la tonsure monastique. A son
retour en Orient, les circonstances l'obligent à demeurer à l'Athos, dont il prévoit
les glorieuses destinées. 11 sy crée un ermitage. Le reste de l'étude de M. Kirsopp
Lake est consacré à Euthyme de Thessalonique, à Jean Colobos et à la venue d'A-
thanase l'Athonite.
qui regarde l'antiquité, mais aussi pour des questions actuelles auxquelles se pas-
sionne l'opinion, telles que le Sionisme, la colonisation de la Palestine, les influences
étrangères, l'état de l'islam, les compétitions indigènes dans l'église orthodoxe, etc.
(1' Theeadyd'jiji of iiionagdciiiii on niount Athos, ia-1-2, HT pp. Oxford, Clarendon Press. 1909.
(2) In-S", xx-aio pp. Leipzig, Hinriehs, 1911.
3) In-8°, iv-136 pp., 1 esquisse de carte, et 18 plioto^apliies excellentes. Berlin : Minier und
Sohn. 1910.
478 REVUE BIBLIQUE.
Mispa avec Nasbe. L'auteur se montre d'ailleurs très informé des opinions émises à
ce sujet. —
P. Rahle Les sanctuaires musulmans autour de Jérusalem et aux envi-
:
j-ons. — Rothsteio : Coutumes /nusulmanes relativement aux noces à Lifta. Les trois
derniers articles sont illustrés par de belles pliotogravures.
de Benjamin à Tell Nasbe. On voit que les identitications sérieuses finissent par
s'imposer avec le temps. C'est un encouragement pour les topographes que pour-
rait inquiéter la vogue de certaines fantaisies que se permettent des palestinolo-
gues improvisés. J. Reil —
Miniatures de l'évangéliaire de 1211 du couvent sijnen
:
Nea Sion, 1911, 3. — Themelis : réfutation de certaines théories erronées sur l'his-
toire de l'église de Jérusalem. — J. Phocylides publie la vie de Théodore le Sabaïtc
qui devint évèque d'Edesse et le martyre de son parent Michel, où Ton trouve des
renseignements pleins d'intérêt sur Jérusalem et saint Sabas dansla deuxième partie
monie était donc en usage déjà au viiT siècle. Jusqu'ici le plus ancien témoignage
connu relatif à ce fait était celui du moine Bernard (870),
A propos de l'inscription de Séleucie publiée dans RB., 1911, pp. 117 s., on
complétera ainsi les deux mots tronqués de la 6^ ligne l/.aT6v-apyov /wot/iç... le cen-
Theologia dogmatica. — De Deo uno et irino. Feria II', IV^ et VI', hora 8*
a. m.
R. P. Hyacinthus Petitot.
Theologia moralis. — I)e ultimo fiuf et de nctibxs liumfnii.'<. Ferïa IIP, ¥=> et
sabbato, hora 8* a. m.
R. P. N.
R. P. Paul Dhorme.
R. P. Piaphaël Savignac.
R. P. Marie Abel.
R. P. Aritoiiin Jalssex.
R. P. Bertrand Carrière.
R. P. A. Jalsse.n.
R. P. P. Dhorme.
R. P. M. Abel.
Voxjages :
I. Du 12 octobre au 18. —
Djifneh, Atâra, Abiid, Rentis, Djildjiiieh, Kafr Saba.
Ras el-'Aïn, Ibn Ibrak, Kafr Aoa, Lydda, Ramieh, Medyeh, Gézer, Amwas, Beth-
Horon, Jérusalem.
il. Du l*^"" janvier au 7. —
Bethléem, Aïo-Djedi, Sebbeh, Djebel Ousdoum,
Zoueira, Karmel. Hébron. Jérusalem.
III. Après Pâques. — Jéricho, Mont Nébo, Mâdabâ, 'Amman, Djérach, Hosn,
le Djôlan, Banias, Tell el-Qâdy, Hounin, Safed, Capharnaura, le !ac de Tibériade,
Tibériade, le Thabor, Nazareth, Djénin, Sebastyeh, Naplouse, Jérusalem.
Le Gérant : J. Gabalda.
Après tous les travaux regorgeant dérudition. qui ont été, ces der-
nières années, consacrés à lApocalypse de S. Jean, il n'est pas facile,
je le crois, de dire quelque chose de neuf touchant les possibililés
des sens apocalyptiques: mais, entre les divers sens chaque fois pos-
sibles, disons même plausibles, il faudrait pouvoir en choisir un avec
décision; car c est là le but essentiel de toute exégèse; or, l'unanimité
d interprétation du livre aux sept sceaux est encore loin d'être un fait
acquis à la science théologique. De nombreux travaux traitent —
parfois au petit bonheur —
de ses sources littéraires, de ses parti-
cularités linguistiques, des préoccupations doctrinales du milieu où
cette Révélation a paru, des attaches juives, orientales ou hellénisti-
ques de son imagerie, entin des prétendues « clés historiijues » des
visions ou symboles étudiés un à un; mais je ne sais s'ils sont entiè-
rement de nature à rendre l'Apocalypse plus populaire chez cette
nombreuse fraction des croyants, doués d'un sens rassis mais étroit,
qui la considèreut encore comme un livre presque incompréhensible,
dont l'étude détaillée est un peu dangereuse, et ne saurait attirer
que des fantaisistes. En dépit du caractère sacré que la foi les oblige
pourtant de reconnaître à cet épilogue du Nouveau Testament, beau-
coup de prêtres, et même des prêtres théologiens, partagent encore,
sans se l'avouer, les appréhensions ou les réptftinances que trahissait
autrefois saint Denys d'Alexandrie, quand il n'osait l'attribuer à un
Apôtre. Cependant, si Dieu a inspiré ce livre, c'est pour c|ue nous le
lisions et que nous le comprenions.
Si tant de recherches savantes, et parfois fort méritoires, n'ont pas
encore abouti aux résultats qu'on aurait pu en espérer, cela peut
tenir au fait que la plupart ont eu un caractère trop fragmentaire ou
trop spécial. L'abus de la méthode analytique a été particulièrement
funeste à ce livre. Avant d'étudier cette œuvre si vivante, les cri-
REVUE BIBLU.iLE 1 '.' 1 1 . — >'. S.. T. VHI 31
482 REVUE BIBLIQUE.
(I) Parmi les commentaires récents, il n'en est aucun qui me paraisse plus utile que^
celui du professeur de Cambridge H. Barclw Swete. Il m'a toujours servi, et je suis d'ac-
cord avec lui pour la plupart des conclusions.
STRUCTURE DE L'APOCALYPSE DE S. JEAN. 483
sept trompettes (viii-xi» et sept coupes xv-xvi' aux mains des Anges
exécuteurs des jugements divins. — On sera fiapjîé aussi, au milieu
de la variabilité des imag-es symboliques, de la ténacité de certaines
d'entre elles, ainsi de la couleur blanche attribuée soit à des vête-
ments, soit à d'autres objets (i, li; ii, 17: m, i, .5. 18; iv. 'n vi, 2, 11 ;
vu, 9, 13; XIV, 14-; xix, 11, li; xx, 11 . laquelle couleur, dans les
moins obscurs de ces passages, symbolise évidemment l'idée de triom-
phe. Enfin beaucoup de développements ou de tableaux sont parallèles
deux à deux, par mode de similitude ou d'antithèse; beaucoup de
figures isolées aussi sont antithétiques, et vont s'opposant deux à deux,
soit dans l'intérieur dune même série, soit même en demeuuant si-
tuées respectivement en des séries diverses. Je ne pourrais en donner
l'énumération que dans le commentaire détaillé. Certains tableaux
antithétiques ont d'ailleurs exactement la même entrée en matière :
ainsi c'est un des Anges aux sept coupes qui montre au Voyant la Pros-
tituée Babylone xvii, 1 seq.i, et un autre de ces mêmes Anges qui
lui fait voir la Jérusalem nouvelle, fiancée de l'Agneau (xxr, 9 seq.i.
Avec cela, beaucoup d'anticipations, de répétitions au moins appa-
rentes, de figures ou de scènes entières qui semblent d'abord laire
double emploi.
En outre de ces observations formelles et générales, il est certaines
particularités frappantes du contenu qui ne peuvent échapper au lec-
teur intelligent et attentif. Ainsi la section -- iv-xx . qui est comme le
corps de la prophétie, n'est pas aussi homogène que les autres elle :
suture. Pourtant elles doivent avoir chacune leur rôle particulier dans
a Révélation, car on voit tout de suite que c'est la dernière partie de
a section qui contient les prophéties les plus saillantes, les plus ori-
sinales, les plus développées et les plus précises dans leur détail. Cela
n'empêche que les deux parties ont. pourrait-on dire, un fond de scène
commun : c'est ledécor céleste qui a été décrit au chapitre iv, le trône
de Dieu, les quatre Animaux symboliques, l'océan de cristal, les vingt-
le chœur des .\ng-es. C'est de là que partent, avant
quatre Vieillards,
ou après chaque grand déploiement de la puissance divine sur la terre,
ces chœurs de voix triomphales dont nous avons parlé (iv, 1-11: v,
8-U; VII. 11-12; XI. 15-18; xii, 10-12; xv, 2-V : xi\. 1-8^. Le « drame .^
II
spéciale, l'attention de ses lecteurs, comme sur des prophéties qui les
toucheraient de plus près. Jusque-là, avec les sept sceaux et les sept
trompettes, nous restions la plupart du temps dans les lieux com-
muns apocalyptiques, tremblements de terre, invasions, chutes d'é-
toiles, etc., assurément très grandioses, mais ne comportant pas d'ex-
plication trop déterminée, vu l'extrême variété des conditions de
temps et de lieu où peuvent s'appliquer. Tout cela représentait
ils
Celui qui vit aux siècles des siècles qu'aux jours de la voix du
septième Ange chap. xi, 15) quand celui-ci sonnerait, le Mystère de
Dieu s'accomplirait, ainsi qu'il l'a annoncé à ses serviteurs les
Prophètes » (x. 6, 7). Cependant, après cette septième trompette, le
chapitre xii et les suivants nous ramènent au siècle présent, comme
si rien encore n'avait été exécuté. On en a conclu que la vision de la
d'un a2///e /nve c'est le ,'i',6>.xp'2'.;v que tenait dans sa main le grand
.•
sur leur avenir inquiétant, alors nous serions moins surpris de ces
procédés expressifs et nous les comprendrions mieux.
Voilà donc la répétition dune anomalie, d'un même désordre
apparent, qui nous a fait découvrir un ordre supérieur, parce que
plus varié. Ces « emboîtements » sont Lan d'atl'aiblir l'impression de
l'unité de l'Apocalypse.
II. Il une autre grave objection contre 1 homogénéité du
existe
livre. C'est le fait des redites nombreuses qui le remplissent, et qui
seraient, pense-t-on, tout à fait inutiles si le tout émanait d'un écri-
vain spontané, et non d'un rédacteur qui coud ensemble tant bien quo
mal un bien ramassé un peu partout et dont il ne veut pas laisser
perdre une parcelle. Dans le commentaire, je montrerai qu'il n'en est
pas ainsi. En examinant, par exemple, le chapitre xii, où ces redites
sont très visibles, nous verrons qu'il n'y a pas là sm\T^\e juxtaposition
des sources analogues, mais que plutôt, dans Vintérieur d'une même
série, une vision schématique, qui contient déjà toute la révélation
visée, s'explicite ensuite en di\isions plus amples quelles, identiques
à la première pour le fond, mais y apportant chacune une précision
et une clarté nouvelle 1 J'ai appelé cela ailleurs un développement
.
(1) C'est ce que j"ai déjà exposé dans cette Revue. Le douzième chapitre de l'Apoca-
lypse, octobre 1909.
492 REVUE BIBLIQUE.
colère, pour que les calamités des Anges exterminateurs passent à côté
d'eux sans les atteindre, chantent les louanges de Dieu devant son
trône (vu, 1-17 i. Leur attitude forme un contraste absolu avec celle
des mondains méchants. Cette vision d'ensemble, anticipée, qui ap-
paraît au Voyant au terme des préparatifs qui se font au ciel pour la
destruction du monde, résume déjà tout ce qui va s'accomplir au
lui
L'autre série xiv, 6-xv, 5 a beaucoup d'analogie avec celle qui pré-
cède. Il se fait encore des préparatifs au ciel avant l'effusion des sept
coupes pleines de la colère de Dieu. Trois Anges qui font des proclama-
tions (xiv, 6-11répondent aux quatre Cavaliers du chap. vi. Comme
le premier des Cavaliers du chapitre vi était désigné par les traits
mêmes de sa description —
ainsi que nous le démontrerons en son
lieu —
comme agent symbolique des conquête spirituelles du Verbe et
de l'Évangile, tandis que les trois autres symbolisaient la préparation des
vengances, ainsi le premier Ange (xiv, 6-7) remplit un rôle bienfai-
sant, lui qui «< porte un Évangile éternel pour être annoncé aux habi-
tants delà terre ) et proclame la prochaine victoire de Dieu; les deux
autres au contraire annoncent des malheurs. Le parallélisme ne s'ar-
rête pas là, et la fameuse antithèse ressort d'une façon encore plus
nette dans la vision qui suit, de la 7noisson et de la vendange. La
« moisson », qui, d'après la terminologie de l'Ancien Testament, est
une image essentiellement joyeuse, est faite par un personnage qui
est « comme un Fils d'homme », c'est-à-dire parle Christ lui-même
qui recueille les élus li-16); la u vendange »,qui, dans la même ter-
minologie, signifie ordinairement l'écrasement des ennemis, foulés
aux pieds comme des grappes dont le sang jaillit, est accomplie par
un subordonné, par un Ange 17--20 La cuve de vengeance est
esprit ,
1.
foulée; mais les amis de Dieu, les vainqueurs de la Bête (xv, 2-V
chantent devant le Tout-Puissant le cantique triomphal de Moïse. Ces
scènes rappellent tout à fait celles du chapitre vi et du chapitre vu,
bien que le parallélisme soit dans le fond plus que dans la forme.
montrer le but et le résultat de l'ef-
Elles sont destinées, elles aussi, à
fusion des coupes qui va suivre, au chapitre xvi.
2' J'ai dit que la même antithèse apparaît encore dans toute son
sans convertir les autres (xi, 13-21), mais aussi, d'autre part, après
l'intermède du ^loXapfciov, dont nous avons vu la haute portée, voici
le tableau des Deux Témoins (xi, l-li, qui représente la continuité
du pouvoir du Bien sur la terre, résiste à toutes les persécutions,
même à la mort, et ressuscite toujours quand on croit lavoir détruit,
pour le plus grand bien des habitants du monde, qui, devant un tel
spectacle, tinissent par « rendre gloire au Dieu du ciel » 11-13).
Alors la septième trompette, celle de la consommation, n'a plus qu'à
sonner.
Avec de la sixième coupe, a lieu le rassemblement des
l'effusion
rois de pour la bataille de ce grand Jour du Dieu tout-puis-
la terre «
sant » (xvi, 14). Le sort des élus est vaguement indiqué par la
phrase « Heureux qui veille et qui garde ses vêtements ». Ici l'anti-
:
thèse, il est vrai, n'est pas développée, mais cette scène amorce le
chapitre xix, où elle le sera très amplement.
L'antithèse fondamentale se retrouve encore en de nombreux pas-
sages que nous ne pouvons citer ici. Nous voulions simplement
montrer qu'elle se trouve principalemenl située en des points cor-
respondants de développements divers entre eux, et c'est là un fait
hautement significatif, en ce qui touche à la composition du livre.
Une observation d'un autre ordre se rapporte à un caractère parti-
culier de l'un des deux membres de l'antithèse, les amis de Dieu, la
Cité de Dieu. Cette collectivité est constamment représentée dans un
double état l'un de persécutions et d'épreuves, l'autre de sécurité inté-
:
premier état, celui d'Église militante, elle vit sur la terre, obsédée
par le Dragon, mais gardant cependant la sécurité et la paix dans
le désert où elle est réfugiée c. xii) dans le deuxième, elle appa-
;
(13, 14, 15). C'est un présent. Puis viennent des verbes au futur —
au moins dans les meilleurs manuscrits —
qui doivent se rapporter
à la phase dernière qui suivra le Jugement « Et Celui qui est assis :
sur le trône les fera habiter sous son abri (!7-/.-r;vwa£ià^"aj-:5j;). Ils li au-
ront plus faim, et ilsn auront plus soif.... l'Agneau... sera leur pas-
teur (zoty.avEî) et les mènera aux sources des eaux de la vie, et Dieu
essuiera toute larme de leurs yeux » (15, 16, 17). Il s'agit sùremenf,
en ces derniers passages, de la consommation du règne de Dieu au
ciel, et il est au moins remarquable que l'emploi du futur les sépare
nettement des passages précédents, lesquels peuvent s'appliquer,
comme les promesses des lettres, à la phase du Règne de Dieu,
initiale
celle de la grâce terrestre. Plusieurs autres passages du livre, que nous
(IJ Voir B. Allô, La Variabilité des symboles dans l'.ipocafjjpse, dans la Revue des
Sciences philosophiques et théologiques, aviiil 1908.
STRUCTURE DE L'APOCALYPSE DE S. JEAX. 497
quant à Viciée. C'est pour cela qu'il a établi ces grands cadres si nets.
Mais dans ces cadres, Tinspiration et le souvenir se jouent encore
avec une grande liberté, sans aucun souci d'harmoniser les détails,
quant à la forme littéraire. La constatation de ce double fait empêche
de croire que l'Apocalypse soit l'œuvre d'un compilateur, et en
même temps de considérer son auteur comme un artiste de la plume,
un écrivain professionnel. C'est un esprit spontané, qui saisit puis-
samment, retient et org-anise de même, mais qui reste bien étranger
aux règles grecques de l'art d'écrire, —
comme sa langue toute seule
suffirait à le montrer.
m
Nous ne sommes pas encore au Ijout de l'analyse qui peut nous
dévoiler, avec les procédés de composition de l'auteur, sa psvcho-
logie d'écrivain. Nous avons vu comment la netteté de ses cadres,
et leurscorrespondances voulues, n'empêche pas la matière ardente,
qui y est versée tout en fusion, d'échapper maintes fois aux lois du
parallélisme général qu'il s'est imposé. En lace de cela, nous pou-
vons noter un phénomène inverse un parallélisme qui semble pres-
:
que inconscient, en tout cas non cherché, entre des idées ou des
figures éparpillées dans des cadres tout à fait distincts ou distants les
uns des autres.
C'est, par exemple^, la répétition d'une image qui revient en des
scènes absolument différentes, pour éveiller partout la même impres-
sion. Ainsi en est-il des vêtements blancs, ou de la couleur blanche
en général. Ce trait revient une douzaine de fois dans le livre, sans
parler des images similaires. Il appartient à l'aspect de Dieu et de son
trône, au Logos, aux élus. Dans le chapitre vu, v. 9 et 13, c'est de
toute évidence le signe de la pureté, de la joie et de la victoire.
Ainsi en est-il encore dans les lettres du commencement (ii, 17; m,
i, 5, 18 . Cela montre comment il faut l'interpréter dans les passages
en soi moins clairs. Ainsi le cheval blanc du premier cavalier, au
chapitre vi, 2 (ép. xix, il ne peut être quela monture d'un triom-
,
partie dans les Deux Bêtes qui représentent de leur côté le pouvoir
politique et le pouvoir intellectuel de l'Antéchrist. Mais c'est un paral-
lélisme d'idées seulement, transcendant à toutes les formes littéraires
un peu compliquées dont l'auteur a coutume d'user.
De même, les hommes qui ont reçu la « marque de la Bête » au cha-
pitre xiiT, et qui sont destinés à « boire du vin de la colère de Dieu »
(xiv, 10), s'opposent manifestement à ceux qui ont été marqués du
signe de Dieu au chapitre vu. afin d'être épargnés par la colère, et à
ceux qui ont le sceau de l'Agneau et le nom de son Père écrits sur leurs
fronts (xiv, 1).
i
bûO / REVLE BIBLIQUE.
^Septième coupe \vi. 17 seq. ). Puis cette dualité est inadmissible dans la
/série des lettres aux sept églises, qui sont très homogènes et toutes
/ pareilles dinspiralion les unes aux autres. Or, là aussi, nous trouvons
/ la même division du septenaii'e en trois et quatre. Dans les trois pre-
mières, à Éphèse. à Srayrne, à Perg-arae ii, 1-17 il y a un détail ,
I oreilles entende ce que l'Esprit dit aux Églises ». précède les promesses
faites au " vainqueur >. Dans les quatre dernières. àThyatii^e, àSardes.
à Philadelphie et à Laodicée ii, I8-111. •2-2
, la caractéristique est in-
verse et l'admonition suit la promesse. C'est peu de chose; mais ce
peu de chose est très significatif. Il nous dévoile chez l'auteur un
goût, un instinct, un je ne sais quoi de peu explicable pour nous.
qui le fait diviser la même façon toutes les séries de sept, que le
de
coutenu pour cela des raisons, ou qu'il ne lui en fournisse
lui fournisse
pas. C'est un trait individuel que je ne me charge pas d'expliquer et
où je n'ai aucune envie de chercher un sens mystique, bien que —
tout soit possible avec la « Gêmatria » qui était alors en honneur.
Mais ce trait, on ne peut pas le négliger, et sa ténacité, jusque dans
les sept lettres, diminue beaucoup la vraisemblance de la théorie
dualiste.
De pareilles observations, qui iront se multipliant et se précisant
dans l'étude du texte, tendent à un double but faciliter l'intelligence :
du livre mystérieux, par la mise en relief des lois qui ont présidé à
sa composition littéraire: — en faire ressortir l'homogénéité, indice
d'unité, niée par tant de critiques à contre-sens. La détermination
de l'origine et du symbole pris à part peut nous coûter
sens de chaque
des études longues et fastidieuses: mais elles auront beaucoup plus
de chance d'aboutir à un résultat sérieux après que cette étude de la
structure littéraire, qui révèle déjà le sens général du livre, nous aura i
tiens de notre temps, et de tous les temps, pour tous ceux qui, au
milieu des obscurités et des fluctuations de cette vie, attendent, se
liantdans leur espoir contre tout espoir, la victoire finale et abso-
lue de Jésus-Christ.
E. Bernard Allô.
LE LIVRE DES JUBILES
BUT ET PROCÉDÉS DE L'AUTEUR. — SES DOCTRINES.
(Suite) (1).
LKS DOCTRLNES.
(2) 21, 24. — (3i 21. 23. — (4) 20. 3. — (5) 30, 21.
LE LIVRE DES JUBILAS. 503
servation par les auges ou par les ancêtres, quelquefois même par
Dieu, son inscription sur les tablettes du ciel ou sur les livres des
aïeux d'Abraham, Hénoch et \oé 1 ). les châtiments temporels (2) et
éternels 3 qui attendent ses violateurs, les bénédictions réservées à
ceux qui l'observent ;i . Comme les Juifs de son temps arguaient sans
doute, pour justifier leurs négligences, de la désuétude, de la cou-
tume contraire, du caractère temporaire éphémère de toutes les
et
n'y a pas à laisser passer un seul jour en plus des huit jours » (11;.
D'autres vont plus loin; ils sont ^< infidèles à ce commandement » '12);
. ils blasphèment en n'observant pas l'ordonnance de cette loi » (1-3)
« :
ils traitent leur personne comme les Gentils(li,, et ils laissent « leurs
enfants sans circoncision, comme ils sont nés v (15 .Ce sont des fils de
Réliar 16 Ni eux ni leurs fils ne seront des
'
. enfants de l'alliance
1) 2i. —
2i 21. -.'2.
10. 3 22. 12. —
(4} 21. 24; 36, 6. —
{ôj37. où Esaii invoque ce [irétexte jiour violer son serment.
18,
Que les Israélites gardent donc sur eux le signe de l'alliance, sïls
ne veulent pas être déracinés de la terre (i). Ce faisant, ils ne feront
qu'imiter les anges. Car tous les anges de la face et tous les anges de
la sanctification ont été créés circoncis (5;. En ordonnant à Israël de
se circoncire, Dieu l'a fait entrer dans la société de ses anges saints (6).
Qu'ils le gardent éternellement, car « cette loi est pour toutes les
générations, à jamais... C'est une loi éternelle, décrétée et inscrite sur
les tablettes du ciel » iT).
célèbrent le sabbat (en s' abstenant) de tout travail » (14). Plus loin,
lange qui instruit Moïse, remarque que cette faveur n'a été faite qu'à
Israël le Seigneur n'a pas sanctitié de « peuples pour observer le
:
(1) 15, 26. — (2) 15, 26. — (3} 15. 34. — '4; 15, 28. — (5) 15, 27. — (6) 15, 27. —
(7) 15, 25. — (8} 2, I. 21. — ;'9) 2, 23 et 26. — (10) 2, 30. — (II) 2, 32. — (t2) 50, 9.
d'Israël : « Je les sanctifierai pour moi pour qu'ils soient mon peuple...
comme j'ai sanctifié et je sanctifie pour moi le jour du sabbat » il).
Comme ce jour est ' béni et saint ». ainsi Jacob est « béni et saint, et
celui-ci est avec celui-là pour la sanctification et pour la bénédic-
tion » (2^. Et il a été donné à Jacob et à ses descendants « d'être tous
les jours les bénis et les saints du premier témoignage et de la (pre-
mièrej loi, comme (Dieu) a sanctifié et béni le jour du sabbat dans le
septième jour » 3).
Le pays babité par Israël doit célébrer lui aussi le sabbat à sa façon,
e'est-à-dire par le repos tous les sept ans (ii, selon les indications
donnéespar un ange à Moïse sur le mont Sinaï (5) : « Et la terre aussi
célébrera ses saijbats tant que vouslbabiterez» (6i. Usemble même que
toutes les créatures doiventparticiper àsa célébration. ' Le Seigneur fit
le septième jour saint pour toutes les créatures » 7 .Mais ilfaut entendre
ces mots de toutes les créatures qui dépendent d'Israël ici-bas, car
les Gentils ne sont certainement pas appelés à cet bonneur Dieu n'a :
tout travail quel qu'il soit, aucun ne convient 15 Us ne feront même '
.
pas leur bon plaisir 16), Non seulement ils ne travailleront pas eux-
mêmes, mais ils ne feront travailler ni leurs enfants, ni leurs serWteurs
et leurs servantes, ni leur bétail, ni l'étranger qui est chez eux 17 Le ; .
ils auront soin de préparer des aliments la veille, le sixième jour (21 .
animal 2i^. Us n'ont pas le droit d'aller en voyage 25 .Us iront jusqu'à
(1) 2, 19. — 2) 2,23. — '3) 2, 24. — (4] Voir Léfitique, 25 et 26. 34. 43. — ',5, 50. 2 :
cf. 7, 35-38. — (6) 50, 3. — (7) 2. 25. — ^8) 2, 31. — (9; 2. 18. — (10; 2. 21; cf. 2. 31
et 50. 9. — (11 2, 20. — (12 50. 6. — ;i3; 2. .'.9. — (14) 50, 12. — 15) 2, 29. —
(16, 2. .29. — 'ITj 50. 7. — ;i8j 50. 12. — 1
19 i
50, 8. — :20, 2, 29. — (21 1 2, 29 : 50, 9.
— (22; 2, 30 ; 50, 8. — 23) 50, 8. — ;24) 50, 12. — 25; 50, 12.
o06 REVUE BTBLIQŒ.
tout cela indistinctement sous peine de mort (6). Les seules œuvres
permises en ce jour saint sont des œuvres de religion ' brûler de :
jours en ^'igueur, car « elle a été donnée aux enfants d'Israël en loi
éternelle pour leurs générations » 8 .
avec lui. Il nous donna un grand signe, le jour du sabbat, dit l'ange
»
à Moïse, pour que nous fassions œuvre pendant six jours, et que nous
gardions le sabbat le septième jour, en nousabstenant de toute œuvre.
Et à tous les anges de la face et à tous les anges de la sanctification, les
deux grandes classes (d'anges) il nous a ordonné ceci de célébrer le , :
sabbat avec lui dans le ciel et sur la terre » (11). Nous lavons donc
observé « dans les cieux, avant qu'il soit notifié à toute chair d'a-
voir à garder le sabbat en ce jour sur la terre 1*2 . Maintenant.
43; 11 Macchabées, 5, 25: 15. 1. Sur l'holocauste du sabbat, v. II Esdras. 10. 33. Cf. Ronsch,
Dax lUuh der Jubiloen, 1874. p. .jIO-512,. sur l'observance du sabbat d'après la Bible, la
Mischna et lesJi;/)î7e5,- Béer, Das Buch der JuhiUien. 1856. p. 39 et 53, sur les observances
sabbatiques des Jubilés et la tradition juive.
S'ils le font, ils seront « saints et bénis tous les jours - comme les
anges ne seront pas déracinés de la terre (3). Au contraire,
(2), et ils
Seig-neur 7)
Le vrai Dieu est saint, tidèle et juste par-dessus tous. Il n'y a pas
chez lui d'acception de personne, et il ne reçoit pas de présent corrup-
teur 8 Son nom est célébré, glorifié, grand, splendide, admiralïle
.
et puissant '9).
Dieu de justice '20,, Dieu des siècles (21), Seigneur de tous les siè-
cles (22), Dieu de Sem (23), Dieu d'Abraham (24). Dieu d'Abraham
et d'Isaac (25 , Dieu d'Isaac '26), Dieu d'Israël (27), Dieu de tout (28)
et surtout celui de Dieu très-haut (29).
Bien qu'il parle assez souvent du ciel, surtout à propos des anges
et des tablettes sur lesquelles sont inscrits les préceptes divins, cepen-
dant ne semble pas en faire l'unique séjour de Dieu. A cet égard, on
il
dirait qu'il partage parfois les vues de 1 auteur d'un texte interpolé
la création pendant six jours seulement ; de son côté, Adam ne travaille à nommer ces
animaux puis Eve que pendant les mêmes six jours, 3, 1-6.
(i; 2, 21. — Z] 1, 27
(2j 2, 28. —
(4) 2, 29. 5) 23, 19. — (6) 50. 13; 2, 27. — — —
1 , 2, 25, 27. —
21, 4. (9j 36, 7.
8j — —
(10) Voir plus haut, p. 336 à 338.
(11) 32, 24-32. Bohn, Theologischc Studien und Kriliken, 1900, p. 170, est d'un avis op-
posé. Il estime que la raison de cette omission est tout autre, et que l'auteur ne redoutait
pas les anthropomorphismes.
(12) 7, 20; 10, 8; 16, 26; 22, 6. —(13) 2, 31, 32: 11, 17; 17. 3; 22, i, 45. 5.
(14) 8, 20; 23, 1.— (15)10, 3.— (16) 12,4; 20, 7.— (l7) 13, 8. —(18)15, 3; 27. 11.
— (19) 25, 15. —
(20) 25, 21. (21) 25, 15. —
(22 31. 13. (23) 8. 18. —
(24^ 45, 3. — —
— (25) 44, 5.— (26) 45, 3. (27) 45, 3. —
(28) 22, 10, 27 —
30. 19 31, 13. 32. (29) 7, ; : —
508 REVUE BIBLIQLE.
dans le Livre des paraboles d'Hcnoch (1). Pour lui. le séjour, du moins
le séjour provisoire (2) de Dieu, de ses anges et de ses élus est aussi, à
l'occasion, le jardin d'Éden, qui est le lieu le plus sacré de la terre (3).
C'est là que les anges conduisent le juste Hénoch pour le glorifier et
l'honorer. Il y écrit ses livres sur le jugement et le châtiment du
monde et toute la malice des enfants des hommes (4). Dieu amène
néanmoins son déluge sur l'Eden, d'après un verset assez obscur (5 .
mais il n'est pas détruit pourcela. Lors du partage de la terre entre les
fils de Noé, à la sortie de l'arche, il est compris dans" le lot de Sem (6),
et Noé sait, évidemment par révélation, » que le jardin d'Eden est
le saint des saints, parce qu'il est la demeure du Seigneur " (7).
Il va eu ou il y aura plusieurs créations. Les passages dans lesquels
l'auteur des Jubilés expose ses théories sur ce sujet sont malheureuse-
ment altérés en partie ou déplacés. Autant qu'on en peut juger malgré
l'état du texte, il distingue deux créations ou, plus exactement, une
36; 12. 19. 13. IG. 16. 18, '.>: 20. 9; 21, 20, 22, 23, 2.j; 22,
-li); : G, 11, 13. 19, 23, 27;
25, 3, 1 1 , 21 ;32, 1 39. <1.
27, 15 ; ;
(13) Voir p. 5?6. Charles, 7 lie Rook of Jubllees... iranslated, 1902, p. 10, note sur 1,29,
croit découvrir dans les Jubiles trois nouvelles créations. Celle de la lin des temps serait la
troisième. La première aurait eu lieu après le déluge et le châtiment des mauvais anges ou
veilleurs. Lorsque le Seigneur eut exterminé l'Iiomme et toute chair, à l'exceplioa de Noé, 5,
4-5, et qu'il eut châtié tous les pervers, 5, 11. « il lit pour toutes ses «vavres une nature
nouvelle et droite, afin qu'elles ne commissent plus le crime dans toute leur nature jusqu'à
réternité, et pour que tous fussent justes, chacun selon son espèce », 5, 12. Mais ce ver- —
.sel se trouve au milieu du récit de la condamnation des veilleurs et des hommes, 5, 11 et
13, qu'il coupe d'une façon tout à fait inattendue. En outre, après le déluge, les descen-
dants de Noë n'ont pas lardé à commettre l'iniquité. 10, 1-2, etc. Ce verset n'est donc
pas à sa place: dans le texte primitif, il devait faire partie du tableau de la lin des temps:
par conséquent, il ne traite pas d'une création distincte de celle qui aura lieu alors.
La deuxième (( nouvelle création » coïnciderait avec la fondation de la communauté
juive par Jacob, qui devrait, d'après 19, 25, fonder le ciel, affermir la terre et renouveler
les luminaires. —
Mais celte prophétie d'.\braham ne porte pas sur Jacob lui-même; elle
porte sur ses descendants « Dans sa race sera béni mon nom et le nom de mes pères, dit
:
Abrabam..., et eux sont destinés à fonder le ciel et à affermir la terre et renouveler tous
LE LIVRE DES JUBILES. 309
l'a dirigé et le dirige tous les jours par les esprits ou par les anges 1 j.
la bénédiction d'isaac 8 .
Sur ces tablettes aussi, sont inscrits tous les préceptes que Dieu a
donnés à son peuple, à ceu.x qui connaissent le droit de la loi (9).
Nous avons vu, à propos des observances légales, l'usage continuel que
faitnotre auteur de cette idée des tablettes célestes. Elle lui a été sug-
gérée sans doute par la parole de lahveh à Moïse « Monte vers moi :
les luminaires », 19. 24-25. Il s'agit donc « des temps du salut, et non pas. comme le
veut Charles, d'une époque nouvelle inaugurée par Jacob o, dit avec raison le P. La-
grange, Le Messianis))U' chez- les Juifs, 1909, p. 149, noie 3.
cob, et vingt-deux espèces d'œuvres ont été faites jusqu'au septième jour ». Ce passage
montre que l'auteur a vu un moyen d'exalter Israël dans le double rapprochement qu'il
imagine entre le nombre des iK-uvres de Dieu et celui des Patriarches, et entre le couron-
nement de la création et la venue de Jacob. Mais il ne prouve pas qu'il place une nou-
velle création au temps de Jacob. Il ne contient pas un mot sur ce sujet, pas plus qu'il
n'y est fait allusion dans toute la suite de l'apocryphe. En d'autres termes, la fondation
par Jacob du peuple élu de EKeu est assurément une date très mémorable. Rien n'indique
cependant qu'elle coïncide avec un renouvellement de la nature.
(1) Voir p. :.lû-5l4 : les anges et les démons. — 2) 15, 32. — (3; 4, 19. —(4; 16, 3.
— 16, 3.
(5]
(6) 32, 21-24. Cf. Sagesse, 10. 10 C'est la sagesse « qui lui montra à Jacob' le royaume
:
féré de notre apocryphe. Hénoch voit « dans une vision de son sommeil
cequi a été et ce qui sera, comment cela se passera pour lesenfants des
hommes dans leurs générations, jusqu'au jour du jugement » (8). —
La Genèse avait écrit « 0?i rapporta à Rébecca les paroles d'Ésaii son
:
fils aîné » (9) contre Jacob. Les Jubilés substituent à cette expression
la suivante : « Et les paroles d'Ésaû, son fils aine, furent dites en
songe à Rébecca » 'ylO). Elle apprend aussi par un songe le jour de
sa mort (11). — C'est encore dans un songe que Jacob reçoit les ins-
3. — Anges et dhnons.
et les eaux (18). Us sont répartis en trois classes les anges de la face, :
(1) 39, 6. — (2) 30, 9. — [3) 33, 10-12. — (4) 32, 10, 15. — (:.) 50, 13. — (6) 33, Iti.
— (7} Voir p. .".13. — (8) 4. 19. — faj Genèse, 27, 42. — (10) 27, 1. — (11); 35, 6. —
(12) 29, 3.
(13) 29, 0. Ces deux songes, de Jacob et de Laban , sont rapportés dans la Genèse, 31,
10-13 et 23-24. — (14) 32, 32, 21.
1. — (15) — (1»;) 41, 24. — (17; 2, 2.
(18) Sur la création des anges avant ou après le monde daprès les Pères, voir l'article de
LE LIVRE DES JLHILES. 311
ils leur prêtent encore le rôle de gouverneurs des nations. Car Dieu a
donné pouvoir à des esprits sur tous les peuples, à l'exception du
peuple d'Israël. Sur celui-là. donné pouvoir ni à un ange ni à
il n'a
un esprit : lui seul est son chef, il le guide, et il le requiert de la main
de ses anges et de la main de ses esprits et de la main de toutes ses
puissances (5i.
face et comme les saints » 8;. Dans l'histoire d'Asar, c'est un « ange
de Dieu, un des saints » qui apparaît à l'esclave de Sara 9,. Et « tous
les saints du Seigneur approuvent la loi portée contre l'inceste à
propos de Ruben 10 Aux uns et aux autres, le nom d'anges est plus
.
3; Même flottement, en effet, dans cet apocryphe: voir Framois Martin, Le Livre d'Hénoch,
p. xxin.
(4) 2, 2. Les attributions des esprits sont les mêmes dan> le Livre d Hénoch, ibidem,
p. XXV
(5; 15, 31-32.
(6, 2, 18. — (7) Isaïe, 63, 9 : « Et l'ange de sa face les a sauvés ». — '8 31. ij. —
v9) 17, 11. — (10} 33, 12.
312 REVUE BIBLIQUE.
Bien qu'ils soient au-dessus des " esprits », ils semblent doués d'un
corps, car ils entêté créés circoncis : « telle a été leur nature depuis le
jour de la création » (1). Cette supériorité d'un être corporel sur un
être tout spirituel n'est pas pour déconcerter la pensée juive, qui avait
imaginé l'histoire des veilleurs 2'i. f
Leur mission est double louer et servir Dieu au ciel, remplir les :
ont chanté des louanges en sa présence sur toutes ses œuvres (5). Us
forment la société de Dieu, le Seigneur leur communique ses projets (6).
De leur côté, ils doivent le servir, exactement comme feront les lévites
après l'institution du sacerdoce (7), et faire œuvre au ciel pendant
six jours de la semaine (8 Mais le septième jour, le sabbat, leur a été
.
(1) 15. 'il. — G. Bareille. op. cit., coU 119Ô-1200, résume les opinions des Pères sur la
nature des anges. Plusieurs, sous l'influence du Livre d'Hcnoch, ont admis la corporelle des
anges. Toutefois, Tertullien explique, De carne Cfirisli. 6. P.L., t. II, col. 764-765, que ce
n'est pas une corporelle grossière comme la nôtre, et, pour Origène, l'ange n'est pas précisé-
ment un corps mais un esprit uni à un corps très sublii. In Joan., c. 13. 'S3, 34, P. G.,
t. XIV, co!. 4.'i7: In Matlh., c. 17, 30, P. G., t. XIII, col. 1570. elc. Cette opinion perdit —
à peu près tous ses pariisans à partir du quatrième concile de Latran (1215). La doctrine de
l'Église est. en effet, que les anges sont des esprits sans corps même éthéré (Vacant, ibidem,
col. 1227 et coi. 1268).
I Maccb.,7,4t; Matlh.. 1, 20:2, 13: Luc, 1, 11, 26, etc. —combattent le démon pour défen-
dre l'Église du Christ, .\pocalypse, 12. 7. Voir pour références plus complètes Vacanl. —
art. Anges d'après la :Sainte Écriture, dans Vacant-Mangenot, Dictionnaire de théologie
catholique, fascicule 5, 1901, col. 1189-1192.
(4) 2, 2. — (5,1 2, 3. — (6) 2, 19 ; 3, 4.
(7) 30, 18: 31. 14. _ (8) 2, 17; cL 3, 1. — (9) 2, 1, 17. — (10) 2, 18. —(Il) 2, 21 ,
Israël, pas plus que ne font les esprits, cependant ils communiquent
les révélations du Seigneur aux Patriarches ou à Moïse. Ils montrent à
Hénoch, qui reste avec eux pendant six jubilés d'années, tout ce qui est
sur la terre et dans les cieux (2), surtout le calendrier 3). Ils disent
I à Noé tous les remèdes aux maux apportés sur la terre par les dé-
mons dévoilent leurs séductions et lui en enseignent la gué-
(4), lui
rison par les plantes (5). Un ange de la face découvre à Abraham ses
hautes destinées (6) puis lui apprend la langue de la création, l'hébreu,
oublié par les hommes depuis le jour de la chute de Babel (7). Des
anges lui annoncent, ainsi qu'à Sara, la prochaine naissance d'Isaac(8),
qui sera la tige d'une race sainte, part du Seigneur (9). C'est un ange
qui remet à Jacob les tablettes de Fliistoirc disraël, lui en donne
l'intelligence et lui prédit sa mort en Egypte et son ensevehssement
en Canaan (10). Juda apprend des anges qu'il a obtenu par sa pé-
nitence le pardon de son crime (11 j, et que sa descendance vivra parce
que ses lils n'ont pas connu Thamar(12). Le même ange de la face,
qui a révélé à Abraham les desseins de Dieu sur lui, écrit plus tard
pour Moïse le livre de la première loi 13), c'est-à-dire le Pentateuque,
puis il lui dicte ou lui communique de la part du Seigneur et d'après
les tablettes du ciel les Jubilés eux-mêmes ou l'histoire de ce qui arri-
vera dans toute la division des jours, depuis la création jusqii'à l'éta-
Idissement du royaume messianique (l'i-).ll lui fait connaître spéciale-
ment les jours des sabbats et leurs ordonnances (15), ainsi que les
lois du temps et le temps selon la division de ses jours (16), l'interdiction
célèbrent en sa présence les actes des Israélites fidèles, qui leur sont
bien connus (19) Ainsi, ils bénissent à jamais Abraham pour avoir célé-
.
bré en son temps la fête des Tabernacles (20); leurs voix se font entendre
(I) 3, 15.— (2)4, 23. —(3)5,23. — (4) 8, 10. — (5) 18. 9-16. — («) 19. 3. — (7) 14,
•20. — 32, 22.
(8) —
(9) 48, 19.
de te garder dans toutes tes voies, ils te porteront sur leurs mains », etc.
(II) 16, 7. —(12) 17, 11. (13) 48, 4.— —
(14) 48, 9. 13, 16-18. (15) 48, H et 13. —
— (16) 1, 29.
(17) 35. 17. Il est possible cependant que le« protecteur >> de Jacob soit Dieu et celui
d'Esaii le démon.
(18) 4,6. —
(19) 1, 2.J. —
(20) 16, 28.
LE LIVRt: DES JUBILÉS. r.ia
Enlin, comme nous allons le voir, ils exécutent les jugements divins
contre les anges coupables.
Tous les anges n'ont pas été fidèles à leur créateur. Un certain
nombre d'entre eux. ceux qui sont appelés les veilleurs, ont commis
le péché. L'auteur a tiré leur histoire du cycle des apocalvpses
d'Hénoch et de Noé (3 En introduisant les veilleurs dans les clas-
.
ses d'anges créés par Dieu, il lui aurait été facile de la souder à son
œuvre. Il n'a pas pris cette peine ou il n'y a pas pensé; il s'est contenté
d'insérer la légende à peu près telle quelle pour amener le récit du
déluge.
Les anges nommés veilleurs sont donc descendus sur la terre, du
temps de Jared i envoyés par Dieu ;5 pour instruire les entants
,
des hommes
exercer la justice et l'équité sur la terre. Séduits par la
et
beauté des filles des hommes, ils se sont unis à elles pour pécher et se
souiller ^6). Déplus,
ils ont exercé la divination par le soleil, la lune
1) 17, 1.5. Le texte ne contient pas cependant le rnola anges]»; il \ est dit seulement : ^ Il
y eut des voix dans les deux au sujet d'Abraham >.. etc.
{'2) 30. 20.
(3, François Martin, Le livre d'Hénoch, 1900. p. lxxix-lxxx, sur les divergences du
Cf.
récit entre Hénoch et les Jubilés ; je signalerai ces divergences en détail dans les notes qui
accompagneront la traduction des Jubilés.
(4 4. 15. — (5j 5. 6. — (6 4, 22. — (7) 8. 3. — (8, 5, 2. — V 5. 1. — ;iOi 7. 22. —
;il 7. 2i. — 12; 5. 4, 5; 7. 25, 26.
ol6 REVUE BIBLIQUE.
appelé « démon ».
(7) 10, 11. — (8) 49. 2. — ;9) 49, 4. — (10) 40, U ; 46, 2. — (II) 23, 29; 50, 5. —
(12) 10, 11.
U) 10, 11.
(13)1, 20; 15, 33. — (
.
(16) 18, 9, 12 ; 48, 9, 12, 15 (d'après le texte des manuscrits A et B). — (17) Ibidem.
— 118) 10. 8.
LE LIVKE fiES JUBILÉS. olT
perdre {D. Ils ne se sont que trop bien acquittés de leur mission.
Immédiatement après le déluge, ils ont commencé à séduire les en-
fants de Noé 2 à les égarer et à les perdre 3
,
Ils les ont aveuglés .
et les oût fait errer, ils ont exercé une véritable domination sur tous
les vivants (i) et sont allés jusqu'à faire périr les petits-fils du pa-
triarche (5 Pour mener ce combat contre l'humanité, ils ont em-
.
ployé tontes les ruses, car ils ne marchent pas dans la droiture et ils
ne luttent pas avec loyauté 6 .
ajouté, je ne pourrai pas exercer mon pouvoir sur les enfants des
«
Les anges ont exécuté ces commandements. Ils ont montré à Noé
les remèdes à tirer des plantes contre les maux et les séductions
Cl) 10. 3. — (2) 7, 27. — 3 10. 1. — '4i 10. 3, G. — 5' 10, 2. — 6, 10. 10. —
- 10, 8.
(8 Voir p. 520. — Sur la doctrine de la dépendance de Satan à l égard de Dieu, dans Hé-
noc/?, voir Françoi> Martin. Z.*^ Livre d'Hénoch, 1906. p. xxxi.
(9' 10. 6. — •
10 10, 3-.-.. — 11, 10. 6. — (12, 10, 8. — ;i3) 10. 9.— (14) 10, 10.—
15 10. 11.
518 REVUE BIBLIQUE.
Mais en somme,
ne réalisent leurs noirs desseins que contre les
ils
païens. Ces esprits les dirigent de telle sorte qu'ils les font errer loin
de Dieu. Il arrive même que les démons frappent ces païens ou ces
méchants non plus seulement par la permission divine mais par ordre
du Seigneur. Ce sont les puissances du Mastêmà, qui comme puis-
sances du Seigneur, ont mis à mort les premiers-nés de toute la terre
d'Egypte, pour châtier et pour vaincre l'endurcissement de Pha-
raon 8). C'est leur prince qui, à la suggestion divine, frappe les
Égyptiens et les précipite dans la mer !9i.
Tout ce que les démons peuvent contre Israël ou contre les justes,
c'est d'exciter contre eux soit les Gentils ou les méchants, soit Dieu
lui-même. Le prince du Mastêmà se présente un jour devant le Sei-
gneur pour accuser Abraham d'aimer Isaac plus que tout « Dis-lui :
(1) 10, 8. — (2V 11. 5. — (3; 12, 20. — (4) 11, 4. — :.; 22, 17. — (6) 11, tl. —
(7) 15, 31. — (8] 49, 2-4. — :9) 48, 17. — (10) 15, 32.— (11) 19, 28.
LE LIVRE DES JUBILES. 519
Moïse des mains du prince des démons, quand il voulait le tuer à son
retour en Egypte \1]. Des anges déjouent les efforts de Mastèmà,
lorsqu'il cherche à faire tomber Moïse dans les mains de Pharaon et
qu'il seconde les incantations des magiciens 8 Grâce à leur inter- .
vention, ceux-ci ne peuvent pas guérir les maux qu'ils ont causés 9;.
Ils s'interposent entre Israël et les Égyptiens pour laisser à Israël le
temps de fuir et neutraliser ainsi les excitations du chef des dé-
mons ^10). Puis, afin que ce même Mastèmà ne puisse pas accuser les
devant leurs oppresseurs
Israélites et les empêcher d'en obtenir des
vêtements et des objets précieux, ils l'enchaînent et le tiennent loin
des enfants d'Israël '^11 .
Ni pour les anges ni pour les démons, les Jubilés, bien différents
en cela du Livre d'Hénoch, ne donnent un seul nom propre, en
dehors, de ceux du prince des mauvais esprits. C'est d'autant plus
étonnant que l'auteur goûte fort d'ordinaire ce genre de précision,
comme nous lavons constaté à propos des femmes des Patriar-
ches (^12).
i. — L'hommç et le péché.
L'homme a été créé pour être heureux. Dieu a fait pour lui la
graisse de la terre; il lui a donné de pouvoir manger et boire dans la
(1) 17, 16. —2) 18, 12. — 3 48, 15. — (4j 48. 12. — ;5i 1, 20. — 6; 18, 9-11. —
{-) 48, 2-4. —(8) 48, y. — ;;:ii 48, lO. — (lO) 48, 13. — 11) 48, 13-18.
(12i Voir plus haut, p. 341.
Ô20 REVUE BIBLIQUE.
bon (2).
Aulieu de jouir de son bonheur, l'homme s'est laissé enlacer dans
le péché (3), qui se commet partout, dans le ciel et sur la terre, dans
la lumière et dans les ténèbres (4), à toutes les époques. Au temps de
Noé avant le déluge, toute chair a corrompu sa voie, depuis l'homme
jusqu'aux animaux (5); des anges même ont péché (6). Chacun s'est
vendu pour faire l'iniquité, la terre en a été remplie, et il s'est commis
jusqu'à des fautes contre les bêtes et tout ce qui se meut sur la terre .
Toutes les pensées et tous les désirs de l'homme ont eu pour but la va-
nité et le mal (7).
Après le châtiment des veilleurs et après le déluge, les esprits
mauvais n'ont pas tardé à égarer de nouveau l'humanité (8). Abra-
ham a proclamé que de son tcmps^ toutes les œuvres des hommes
étaient péché et malice, que toutes leurs actions étaient impureté,
perversité et souillure, et qu'il n'y avait pas chez eux de justice. Il a
fortement recommandé à son fils Isaac de ne pas aller dans leurs voies
avait été créé pour le plaisir (13), et condamnés à vivre dans la souf-
france puis à mourir li). Les animaux, qui s'entretenaient tous dans
une seule langue, cessèrent de parler et furent expulsés eux aussi du
jardin d'Éden. Ce sont là les seules suites de la désobéissance
d'Adam et d'Eve.
(1) 22, 6. — (2) 21, 20; cf. 45, 5. — (3) 1, 21. — (4) 4, 6. —(51 5, 2, 3. — (6) voir An-
ges et démons, p. 515. — (7j 7, 23, 24. — (8) 10, 1 et suivants. — (9) 21, 21-22. — (10) 1,
10-14; 23, 9-15: voir Royaume messianique, p. 525. — (11) 3, 21-22. — (12) 3, 17-35. —
(13) 2, 7. — fl4) 3, 28-29.
(15) 10, 8; cf. 11 4, 5. Les /H/n7^s combinent les deux doctrines quon rencontre dans le
Livre d'Hénoch. dont l'une attribue le péchV' aux mauvais anges, l'autre à la malice des
hommes. Voir François yiarlin, Le Livre d'Hihwc/i.f. x.\xi-x\xii.
LE LIVRE DES JUBILES. 521
Les fautes que commettent les hommes n'ont pas toutes la même
gravité. Il yadespécliésd'ignorancei 1 . ou même d'impureté. dont le
Enfin, il est des péchés qui, commis par les pères, retombent sur les
enfants, ou plutôt que les enfants eux-mêmes commettent en la per-
sonnede leur père. Les Jubiiésnen citent qu'un exemple, mais combien
important pour légitimer les revendications d'Israël ! C'est celui de
Cham. Canaan a erré dans le péché de son père, et c'est pour cela que
toute sa race doit être détruite(ll).
Le péché grave a des suites funestes dès ici-bas soit pour l'individu,
soit pour le genre humain tout entier. D'une façon générale, le Seigneur
cache sa face au coupable, le déracine de la terre lui et sa race, fait
(1)22, U. —
(2) 5. 17-18. Ces versets ne paraissent pas à leur place. 3i 34, 19. —
— 4;41, 24-25. —
(5i 21, 22. (6) 15, .34. —'") 26, 34. —
(8 15, 34. '9) 22, 22. — —
— (10 30, 16. —
11: 7, 10-13; 22, 21. 12 21, 22. — 1
(13i Les Jubilés Tenveneal la prédiction d'isaïe. 65, 20. sur la longévité dans la Jéru-
salem nouvelle, longévité relative pojr le pécheur lui-même « Il n'v aura plus là de :
jeune enfant né pour peu de jours, ni de vieillard qui n'accomplisse pas le nombre de
ses jours: car ce sera mourir jeune que de mourir centenaire, et c'est à cent ans que la
malédiction atteindra le pécheur » 'trad. Crampon].
(14 3. 25. — (15 4, 30. — (16] 23, 9.
522 REVUE BIBLIQUE.
Il est tenu en effet dans le ciel, en vue d'un jugement ultérieur, des
registres exacts des actions humaines et de la valeur morale de leurs
auteurs.
Les pécheurs ne sont pas mentionnés sur le < livre de vie » (3), ou
en sont effacés après certains crimes, s'ils y étaient déjà inscrits (4.). Ils
sont effaeés aussi dans des ca-s analogues du <c livre de la correction
des hommes » (5), c'est-à-diredu livre où figurent les noms-
peut-être
de ceux que Dieu corrige pour les ramener à lui. Mais ils sont portés sur
le livre de ceux qui sont condamnés à périr (6), et sur le livre voué à
la destruction (7). Ils sont inscrits sur les tablettes du ciel comme en-
nemis de Dieu (8 leurs fautes sont couchées sur « les livres éter-
1
;
Dieu jugera les uns et les autres, car il est l'auteur du jugement (13),
et iljugera par conséquent sur documents authentiques en quelque
les
sorte. Il a déjà jugé les géants, fils des veilleurs coupables, ainsi
que les Sodomites (H), et il a exercé ou exercera encore d'autres juge-
ments particuliers, par exemple contre les Philistins (15), les égyp-
tiens (16), etc. Mais de plus il rendra un jour un jugement général et
définitif.
l'aiment » (1). Pour lui. comme pour les auteurs sacrés (2), le mot
('jugement », qu'il s'agisse d'un jugement ou d'un juge- particulier
ment général, est souvent synonyme de « condamnation ou même ><
de « châtiment » (3),
Le jugement général sera rendu le « jour du jugement », c'est-à-
dire, d'après les contextes de cette locution, à la fin du monde (i) ;
terre, dans la lumière et dans les ténèbres, dans le schéol et dans les
abimes, et dans le lieu obscur » qui ne doive être jugé. Il les jugera
sur toute chose, « le grand selon sa grandeur, et le petit selon sa
(1) 23, 31. — (2) Exode, 6. 6:7. 4; 12, 12; Isaïe, 66. 16, etc..
(3) Voilà pourquoi plus d'une fois Charles emploie dans sa traduction le mol « condam-
nation », V. g. 5, 10, là où je crois devoir employer celui de
jugement », qui représente «
exactement le sens primitif des mots éttiiopiens correspondants. Dans quelques cas cependant,
V. g. 7, 29, le contexte impose absolument pour les mêmes mots le sens de condam- «.
nation M.
(4) Voir particulièrement 10, 22 : après la confusion de Babel, les peuples se disperse-
ront, et « il n'y aura plus un dessein unique cliez eux jusqu'au jour du jugement ». Cf. 9,
15; 10, 17; 16,
22, 21. 9;
leur avait ordonné de marcher est déjà décrété, inscrit et gravé sur
les tablettes du ciel j). Dieu a même fait à son élu Hénoch la
dent déjà les anges prévaricateurs (3) et les neuf dixièmes des dé-
mêmes réserves, ce châtiment quel qu'il soit sera sans fin, de sorte
qu'il « sera dans l'opprobre et dans la ma-
renouvelé tous les jours
(1) 5, 13-li. — -i» 4, 23. — (3) 5. 6. 10. — (4) 10, 5, 0. 11. — 5) 7, 29; 22, 22. —
(6' 5, 6, 10.
(7) 7, 29. Voir, sur les conceptions analogues à' Hénoch, Franrois Martin, Le Livre d Hé-
noch, p. XLT.
(8^ 7, 29. — (9) 9, 15, — (xa) 36, 10. — (11] Ibidem.
(12} Le Livre des paraboles d' Hénoch appelle ces exécuteurs les « anges du châtiment»:
voir op. cil., p. XLV.
13) Charles, Apocahjplic Lileralur. dans Cheyne. Encyclopaedia biblica. 1899, pense
LE LIVRE DES JUBILÉS. 525
qu'avant le jugement final les âmes des justes résident vraisemblablement dans un séjour
intermédiaire, au Païadis ou au Ciel.
(Ij 4, 23. — (2) 8, 19; voir p. 508. — (3) 36. 1.
(4) Dans 12. 19, le rnot éthiopien malakùl signifie « la domination » de Dieu et non « le
règne « ou « le royaume
messianique; dans 50,
» 9, mangest, qui signifie proprement
« règne », s'applique au sabbat, jour de règne saint
;< » pour Israël.
(5) 23. 14. — ((i) 23, 17.
(7) 23, 19. Les plaintes de l'auleur sur l'infidélité des Israélites à la loi de la circonci-
sion, 15, 33-34, visent aussi cette période.
;8) 23, 19.
526 REVUE BIBLIQUE.
au glaive et à la guerre pour les ramener dans la voie. Mais ils n'y
réussiront pas. Les méchants qui échapperont au carnage finiront
par triompher, grâce à leurs fraudes et à leurs richesses. Sans en
avoir le dioit, ils s'arrogeront un grand nom, et ils iront jusqu'à
souiller le Saint des Saints par leur impureté et leur corruption (1).
Le Seigneur châtiera d'abord ces crimes par une nouvelle dimi-
nution de la durée de la vie (2). Seuls, les hommes vigoureux attein-
dront 80 ans, alors que les jours des anciens allaient jusqu'à
1000 années. Ces années si brèves ne seront que douleur, aftliction
et calamité (3). Les hommes de cette génération perverse ne jouiront
d'aucune paix ;V. Dieu leur enverra plaie sur plaie, blessure sur
blessure, malheur sur malheur, rumeur sinistre sur rumeur sinistre
et toute sorte de châtiments et de souffrances gelée, grêle, neige, :
(1) 23, 21. — (2) 23, 12.— (3) Ibidem. — (4) 23. 12 et 15. — (5 23, 13. — (6) 23, 18.
paix » dont parle Rébecca quand elle bénit Jacob 6 Il n'y aura ni .
Il descendra même
dans cet Israël sanctifié, pur désormais de toute
faute, de fornication, d'impureté et de souillure, de péché et d'er-
reur. 12 II habitera éternellement avec eux dans son nouveau sanc-
tuaire, créé au milieu d'eux, à .Jérusalem, sur le mont Sion. pour les
siècles des siècles, et il apparaîtra aux yeux de tous, et tous sauront
qu'il est le Dieu d'Israël et le père de tous les enfants de Jacob, roi sur
la montagne de Sion pour tous les siècles des siècles. Et Sion et
Jérusalem seront saintes 13 .
10) 1, 29; cf. 4. 26. La perspective fait singulièrement défaut dans cette peinture du
royaume : les prédictions de Dieu, 1, 23-29. suivent à peu près sans transition l'annonce de
ce qui adviendra après la captivité.
(11) 1, 23-25.— (12) 1, 26; 50, 5. — (13; 1, 26-29.
528 REVUE BIBLIQUE.
(5) 5, 12. Voir plus haut, p. 508, noie l"i, sur le déplacement de ce verset.
(6) Charles, The Bookof Jubilees... (ranslated, 1902, p. 9, noie sur 1, 29.
(7) Ibidem, p. lxxxvii. — .8) 23, 14; cf. 23, 22. — (9) Charles, op. cit.. p.
Lxxxviii. — (10) 23, 19.
LE LIVRE DES JLBILÉS. 529
Il n'est dit nulle part que celte transformation sera graduelle et pro-
gressive. Bien mieux, et la conversion d'Israël et la nouvelle créa-
tion seront précédées de véritables catastrophes calamités de toute :
sorte (1), destruction de la terre et de tous les êtres ^i, suerre ci-
vile (3), invasion des nations (ij. Et tout au moins la principale de
ces catastrophes, la destruction de la terre et de tous les animaux
n'a évidemment pas eu lieu encore.
L'auteur des Jubilés écrit donc pendant la période de crime qui
précède royaume, et très vraisemblablement au début de cette
le
milieu qui lui ont paru intéressantes et adaptées à son but. Mais il ne
s'est pas préoccupé de les coordonner entre elles, quelque disparates
qu'en fussent les éléments. Il les a juxtaposées sans plus (7). x\insi le
Voir par exemple les doctrines des Paraboles àa Livre d'Hénoch sur le sort des àines
(6)
des justes après la mort: François Martin, Le Livre d'Hénoch. 1906, p. sxxiv-xxxv.
(7) L'auteur agit de même dans l'histoire des veilleurs, p. 515, et dans son enseignement
sur le calendrier.
LE LlMiE DES JUBILÉS. 331
ne cherche pas à les combiner et ne paraît pas avoir cure des difficul-
tésque peut engendrer cette façon d'agir.
Deux catégories de justes participeront au royaume messianique.
La première comprend ceux qui vivront encore à l'avènement du
royaume, après avoir été jusque-là opprimés et meurtris par les con-
tempteurs de la loi. Ceux-là, le Seigneur les guérira de leurs maux et
les fera lever, cest-à-dire les relèvera de leur état d'oppression et
d'inférioritépour leur donner une grande j^aix et leur faire chasser
leurs ennemis (1). D'après ce que nous avons vu delà durée du royaume,
il semble que ces justes vivront toujours en corps et en âme, tels qu'ils
(2) P. Volz. Jiidische Eschatologie, 1903, p. 25, propose à peu près la même interpréta-
tion pour 23. 30-31, mais il voit dans ces Tersets, je ne sais pourquoi, « une amplilication
ultérieure ».
deuxième partie mais Isaïe, ii, 1-5; iv, 2-6; xi, 1-13; xxv,
d'Isaïe (2),
ral (3), Certaines parties des premiers chapitres dlsaïe sont frappantes
à cet égard, par exemple ii, 3 : « Des peuples nombreux viendront et
(2) Isaïe, 43, 19 sq. : 44, 3-5; 49, 8-13: 60; 65, 17-25; cf. Jérémie, 31, 31-34.
Cette thèse a été solidement établie par plusieurs exégèles catholiques. Le règne de
(3)
Dieu dans l'Ancien Testament, dit fort justement le P. Lagrange, « était le passage du droit
au fait, ou encore la reconnaissance du droit, la mise en scène historique d'une idée éternelle,
le progrès sans doute extraordinaire et merveilleux, mais enlin la suite d'une ciiose com-
mencée » {Revue Biblique, 1908, p. 60). Cf. du même aalear, Le Messianisme chez- les Juifs,
gieux : « La grande œuvre de Dieu devait être l'instauration de son règne, la conquête des na-
tions, l'épanouissement de la justice et de la paix. Tout cela devait se réaliser
d abord ici-bas
d'une façon progressive, sans heurts ni secousses ». Plus tard seulement, les prophètes
ajoutèrentau tableau lesgramls bouleversements que des apocryphes commele Livred Hénoch
ont si longuement développés. Cf. ibidem, p. 543-544, sur le progrès d'Israël et même de
l'individu dans les prophètes, en particulier dans Jérémie, 31, 31-34; du même, L'ar- —
gument proplictiquc, dsim Revue pratique d'apologétique, 1908, t. VII, p. 92-98: J.-B. —
Frey, art. Royaume de Dieu dans Vigouroux. Dictionnaire de la Bible, fasc. XXXIV,
1910, col. 1239.
que nous avons déjà vus employés pour désigner le royaume 2 pour- ,
1 31. 18-20.
(2 23. 30: 25, 20; v. plus haut, p. 527.
(3 Oa pourrait tout au plus rattacher
le rôle de ce Messie conquérant à la réalisation
des jugements des justes sur leurs ennemis. 23, 30. Pour tout le reste, son caractère faij
plutôt contraste avec la conception d'un royaume spirituel et rnoral comme celui des Jubilés.
LE CATALOGUE
DES VICES DANS L'EPITRE AUX ROMAINS (1, 28-31
-* Et parce qu'ils nont pas jugé à propos de pénétrer plus avant dans la connais-
sance de Dieu. Dieu les a abandonnés à leur raison dégradée, pour manquer à leurs
28) ûo/.iuLxîTs'.v, vériQer si on est digne, juger bon. ï/tvi Iv irziyvwciai comme iv ocyi^
ï/tv/ (Thuc. II, 65, 3) ou iv ata/jvrj ï/stv (Xen. Cijr. VI, I, 36) pour être en colère,
être confus; donc ici « connaître ». Mais È-fyvoj'.ç n'a pas dû être employé dans le
sens de yvCiai;; il s'agit d'une connaissance plus approfondie : cf. I Cor. xiii, 12. pour
de yvwa'.; et de è-Jvvwt'.; dans Justin, Contre Tri/pJi. III. S.
le verbe, et la distinction
Les païens ont dédaigné de prendre de Dieu une connaissance plus approfondie,
Dieu les livre à une intelligence àoô/.iaov (jeu de mots), c'est-à-dire qui ne saurait être
approuvée par personne, disqualifiée. Le vou? n'est pas seulement l'intelligence spécu-
lative, mais le principe des actions morales, ce qui a induit la Vg. à traduire sensum
au lieu de inentem. C'est le principe raisonnable tout entier qui est dégradé. Ta af, y.aôv
/.ovTa, par opposition à ta y.xôr/.ovra (Xkin. Cijr. I, ii, 5 , les devoirs, officia, comme
le devoir est tô /.aOf.x.ov. Ce dernier terme était fort employé par les stoïciens: on en
attribuait même la parenté à Zenon (Diog. Laerce, 25 et 108); d'ailleurs il appar-
tenait à la langue de tout le monde. La raison, qui ne mérite plus son nom. se porte
la distinction se fait en séparant une paive. Il est difficile d'indiquer un ordre logique.
Il semble pourtant que les quatre premiers défauts sont plutôt des dispositions mau-
LE CATALOGUE DES VICES DANS L'ÉPITRE AUX ROMAINS (I, 28-31). 53b
vaises qui se manifestent par les cinq péchés qui suivent. Les qualiGcations qui vien-
nent ensuite ont rapport aux relations des hommes entre eux.
29) Entre les deux premiers couples il y a plutôt decrescendo, car àoi/îa, injustice
positive, est pire que -Xsov:;??., cupidité, avarice qui peut conduire à l'injustice, et
-ovr,p(a, malice exercée, est pire que /.z/.îa, disposition au mal. — Le meurtre et la
discorde sont comme encadrés entre les déf.iuts dont ils proviennent, l'envie et la
y.a/.or'Oc'.a [jlev i-jxi zx/.îa /.t/.yj'X'xhri, xxzoTpo-îa ôc Tzov/AXr^ y.yÀ zavTooa-r] ^ravo'jpytK (Am-
inon. p. 80 dans le Thésaurus), dionc une disposition générale à faire du mal. La ruse
loôXoji estun genre très étendu; elle est tout à fait coupable quand elle dégénère en
fourberie ou en fraude. i'-OjataTat, auteurs de médisances ou de calomnies quand on
ne les profère qu'à voix basse.
nion de ThéoJoret : OsoaTJYEÎç /.aXst tou; àns/ôw; -soi -bv ôsov o'.ay.E'.ijiÉvouç, d'Euthy-
mius. On allègue surtout Clém. Rom. (ep. XXXV, 5) qui emploie ÔEo^-JYt'a au sens
actif de la détestatioa de Dieu. Cependant le mot n'a jamais ce sens dans le grec
profane; et surtout on ne voit pas pourquoi Paul mettrait un crime aussi énorme
dans la série des châtiments de la raison ; il serait plutôt cause de sa dégradation.
Il faut donc traduire avec la Vg. Dca O'Iibile-'^ (de même Pcs.), détestés de Dieu. Mais
pourquoi ce terme dans la série des vices et des défauts? Ou ne peut l'expliquer que
parla tradition scripturaire. Dieu hait spécialement l'orgueil et la détraction (1): [n^jr^-r]
j'vxvT'. Ivjo(o'j y.x\ ivOpw-jjv j-Epr/javt'a ^Eccli. X, 7); les Proverbes (vi, 16 s.) rangent
parmi ce que Dieu hait ôsQaÀfjLo; uSptsxou, YÀwaaa àôt/.o;... C'est bien
: le même con-
texte; GioïTjyEu est donc moins un défaut qu'une épithète qui se joint à certains dé-
fauts, presque une parenthèse. Les jÇptiia'! sont des insolents, peut-être même vis-à-
vis de la divinité. L'j'6o;; attirait spécialement sa colère. D'après Aristote, c'est le
défaut des aristocrates [Pot. iv [\i[). C'est naturellement aussi le défaut de ceux qui
dominent ou aspirent à dominer; il dérive de l'orgueil. — Les aky/,6^zi sont les fan-
farons; Vg. • elatos: Cypnea : jactanfes sui; Lucifer : gloriantes. Comme s. Paul ne
semble avoir en vue que des défauts graves — on songera moins au miles gloriosus
de Plante qu'à une certaine arrogance. D'après Pliilon, c'est le désir de la gloire
qui conduit à ce défaut (De spécial, kg. iv, 87; M. H, p. 3-50); il n'est donc pas
ridicule, et peut facilement être offensant. D'après les stoïciens : Jactatio estvoluptas
gestiens et se offerens insolentius (Cic. Tusc. I\', ix, 20).
Ici encore nous avons, avec les trois dernières épithètes, un ordre décroissant.
L'ordre qui va du moins grave au plus grave a été esquissé par le pythagoricien Cal-
licratidas {ap. Stob. Flor. lxx.xv, 16, cité par Field, Notes on tite tninslntion
t.
of Ihe iV. T. p. 152) : àvây/.a yào tojç noÀÀx 'É/ovxaç -CET-j-foi^Oa'. -pàTOV, TcTuçwjjlevw; oï àXa-
Çôvaç yri-ViiOx'.- xK7.'C/yij.^r>\ yiio xvtio:, 'j-Epr/iâvo; t);jlev... j-Epr/.pxvajç oè ycVO|j.ïvioç, -joçiaTa;
fjjJLEV.
— è-iîjpETx? /.a/.ôjv forme difiicileraent couple avec ce qui suit. Si àÀa^^ovs; indiquait
seulement on pourrait penser à ceux qui inventent des fautes dont
les fanfarons,
ils se chargent eux-mêmes par gloriole, les fanfarons du crime. Mais ce défaut n'est
(1) Ze'j; yàp \).t;y.lr,^ ^/wffar,; /.oiATioy; jitiÇfiyby.ioEi {Hofa. Ant. 127 s.).
536 REVUE BIBLIQUE.
peut-être pas assez commun pour être signalé ici. Je pense que Pau! vise celui que
Philon nomme xav.o[ji»î-/avoç (De sacrificiis Abelis et Caini, 32; M. I, 166), inventeur
d'odieuses machinations, plutôt que celui qui invente par raffinement de nouvelles
manières de pécher (contre Cornely). On peut comparer aussi àYpjTvvouvrï; oùz ;?? xb
àyaObv à).X'si;Tb T:ov/jpov {Didakè, \, 2), ceux qui veillent uon pour le bien, mais pour
le mal.
— vovsjaiv à-EiOsu ouvre la série des vices négatifs. Philon, De ebrietate, 17 s.; M.
I, 360 : voLio'j /.sî.sûovToç, il "û/^pt, xou; yovï?; xtiiàv, 6 [j.Èv [at] xijjlwv à-siOrjç. Les païens
regardaient le respect des parents comme l'un des premiers préceptes de la loi divine :
EsCH. Suppl. 707 ss. Eum. 269 ss.; EuR. frag. 852s. [Nauck]; PiND. Pyth. vi, 23 ss.
; ;
XÉN. Memor. IV', iv, 19 s. Chez les Romains anciens l'obéissance était due au père
durant toute sa vie. Les Juifs avaient le précopte du Décalogue, et lepseudo-Phocylide
le mettait au second rang (v. 8) :
31) àa-vÉxoj; forme jeu de mots avec àcruvGéxouç. Il doit cependant avoir sa raison
d'être. Comment un vice d'être
est-ce inintelligent »? C'est que si les Grecs analy-
<'
sent selon l'ordre humain, Paul, comme les anciens sapientiaux, se place toujoursau
point de vue de Dieu. Il s'agit de ceux qui n'ont aucune ouverture pour les choses
religieuses; le mot grec rend tantôt b'iDS tantôt Slj qui ont ce sens; cf. Ps. xci
(xcii), 6; Sap. I, 5; XI, 15; Eccli. XV, 7. Dans ce dernier texte (héb. 213 "lU^^N), les
àa'jv£xoi sont ceux qui ne comprennent pas la Sagesse divine; vu,
cf. àopoaûvr; (Me.
22). Si Paul a visé un sens un peu spécial qui rentre dans Euthymius
le contexte,
l'a bien indiqué en traduisant àauvsiÔTjxou?, les gens sans conscience, ou du moins
sans délicatesse de conscience, qui n'envisagent pas leurs actions selon leur portée
religieuse, et qui, par conséquent, sont peu sûrs en affaires. En aucun cas ce ne sont
des impies (contre Cornely). àauvOéxojç a été traduit iiicompositos parla Vg. selon le
sens philosophique du mot, « simple », par opposition à ce qui est composé. Dans
Démosthène (383, De fais. leg. 136) le sens paraît être inconstant, sur lequel on ne
peut compter en politique, versatile : w? ô ij.£v ûripLo; iaxtv 6/Àoç, àaxa6;j.7jx6xaxov T:pày|j.a
xwv -dtvxojv xx't àauvOETwxaxov. Cf. PoLYB. Exc. Vat. p. 434 [Thés.) : tj r.fhi xbv ^fov fj[xôjv
« infidèles à leurs engagements » (auvOv/a')? f'i'difragi, comme dans Jer. in, 7. 8. 10.
11 (pour rendre les sens de t:;2) en parlant d'une épouse infidèle ou plutôt perfide.
dtaxôpyoj; sine affeclio)ie (Vg.) ne s'entend probablement pas des parents, déjà
nommés. Les hommes ne s'aiment pas entre eux; chacun pour soi. A la suite de ce
mot, quelques témoins ajoutent aanovocj;, soit d'après II Tim. m, 3, soit comme
glose de àTJvOixoj;.
àvaÀEirJaovaç, sans pitié, sans miséricorde; ce mot ajoute au précédent l'idée d'une
infortune à laquelle on demeure insensible.
thètes qu'on inscrivait sur les jetons de spectacle, épithètes qui sont
parfois des noms de vertus, maisplus souvent des noms de vices, et au
vocatif, comme impude'iiis, moice (adidter), patice. cinaidus, fur,
ehnose ou vinose, arpax. Ce rapprochement est en effet des
trico,
plus suggestifs ne prouve mieux que ces reproches pour rire,
et rien
peut s'en convaincre en parcourant les textes recueillis par d'Arnim (1).
DiOG. Laert.. vu, 110. d'après Hécàton et Zéiioii : xwv oà -aOwv -à à>wTàTw... slva-. yvrr,
(1) StoicoruiH veterun fragtneald, III. ii" 377 ss. C'est, je pense, une erreur de Diete-
Y\c\\{Xekijia, p. 171, note 2) d'avoir cru que Laclance citait les Stoïciens, lorsqu'il dit : très
suntigitur adf'eclus qui honilne^ in oninia facinora praecipites agunt ira ntpidilas li-
bido, proptereapoetae très Furias esse dixerunt, (/uae mentes hominum exagitant (Insl.
div. IV, XIX, 4). Lactance expose plulôt sa manière de voir, empruntée seulement en
partie aux Stoïciens, par exemple quant aux Furies.
(2) De vita Mosis,ll, 139; M. Il, p. 156 eï ti ûreosaîvono : odayo^i è? à/.ÔYoy Ttâôou; r, îtapà
çûffiv ÈTratpoOor,; v.cù [x.£T£wpi^o-J<7r,; fjôov/jç r, (rTsXÀo'jTr,; ï\incù.iv X^Tir^; xal xa9atpoû<jri; ri
àTtoaxpÉcpovTo; xat àTcoxÀîvovtoç xrjv èti' eOôîia; ôptir,v çôooy îj fô; È7rt6"j[J.îa; 7:pô; xà [j.r, r^'jj^ii'^i'x
£),xo'Jar;; xal à7ro-£ivoû'7-/j; ^ia... Ce passage est cité par d'Arnim, lil, 392.
(3) DiETERTCU, Neliyia, p. 170 : 3i),r|00v;'a, çt),07i)v0UT{a, çiXoôolix, Ô£'.'7tôï[jiov{a [luxuria,
avaritia. ambitio, superstitio).
(4) Cic. Pro Murena, 61 : neminein misericordein esse nisi sUillunief levein.
LE CATALOGLE DES VICES DANS LEPITRE AUX ROMAINS I. 28-31'. 539
(i; SÉNÈQLF.. De clementia,l\., 5 Scio maie audxre apxid imperitos seclam Stoicorum
:
tanquam nimis durum... obicitur enim illi, qitod sapientem negat misereri, negat
ignoscere... Misericordia est aegritudo animi ob alienarum miseriarum speciem...
aegritudo autem in sapientem virum non cadit.
o40 REVUE BIBLIQUE.
C'est à la même
grande école de Platon et d'Aristote qu'il faut
attribuer le groupement des vices par opposition aux quatre vertus
cardinales, la prudence, la tempérance, la force et la justice 7).
'1) De migralione Ahrahomi, 50. M.I, 4^5 : u>'i T?;oovaî f, i7:i6'j(xta'. f, /O-aiy; ;6êoi f, Trâ/tv
(3) De agriciiltura, 83 M. I, 313 ; : xai yàp xaxCai z(o yé^ci TÉTTaps; xai iriôr, Taûra'.;
Icâf lÔjjLa — , 5; T,5ovaT; xai £TCi6-j|jLÎat;, àôix'lat; te y.al -avoypyjai;, et: et x'j~<xy7.'.z xai ttÀcOvî-
à peine lenfanl est-il sorti des langes qu'il a pour compagnes àçpoa'jvr.v àxo).a(7'av àSix-av
çôoov Oî'./.iav. Ta; àX).a: (JUYvîveî; xï;pa;.
(6) De cou fusions ling. 21 ; M. I. 408. .\u voO; se rattachent àfpoajva; xai oiûIol: àxo/a(j;ai
Tî xai ào'.xia'.. le 6-..{jl6; a en partage Ta; âxfiavEî; xai 7Tapa;6po-j /jTTa:. et £r:'.6\;u.ia TO-J; -j-o
(1) De specialibus legibus, IV. 87 ss. ; M. II, 350 et comparez A>di!omci.s dans nAaNni,
m, 397.
(2) Les idées... de Pliilon..., p. 272.
(3) De sftcriftciis Abelis et Caini, 32 ; dans Mangey II, 268 s. dans De mercede mere-
tricis.
tentia]. 182: 40G\ Philon a dit aussi 7tr,7rî oà Triv-oùv à6'.xou.âT(iiv à6e6xr,; [De Decal.
M. II. :
91; M. I, 196; ce dernier texte cité par Lietzinann;. Cf. Siuus Italicus, IV, 792 heu pri- :
(4) v, 1 s.
(5) Dans ce livre, riches et puissants sonl ordinairement synonymes de pécheurs; les
pas » etc., pouvait être omis, comme compris dans les mauvaises
pensées. Quant à la ';Suyj:zr^\v.y., dans la Bible grecque elle désigne
toujours le blasphème, c'est-à-dire une parole insultante pour Dieu.
C'était peut-être le sens que lui donnait la catéchèse primitive. Dans
Matthieu, après l'interdiction du faux témoignage, dans Marc surtout,
entre l'envie et l'orgueil, il semble bien que le mot doive être pris au
sens de parole offensante pour les hommes, sens qui était très usité
en grec, concurremment avec l'autre signification. Ce serait une
dépendance de ce que nous nommons le huitième commandement,
un terme grec pour désigner une chose interdite par la loi juive.
En négligeant ce que ce mot a pour ainsi dire d'intermédiaire, il
demeure une opposition assez marquée entre les péchés très concrets,
communs à Matthieu et à Marc, et les vices caractérisés par des termes
(1) Me. viii, 21.
29-31. Sur un rapport possible de lénumération des péchés dans Marc avec « les deux
voies source de la Didacliè, cf. Seeeeri;, etc. » [Les évautjilex synoptiques, l, p. 967,
)i
note 3).
(i; Rom. XIII, 13; II Cor. xii, 21 ; Gai. v, 19; Eph. iv, 19; de plus dans le N. T., I Pet. iv,
abondante. —
sans parler des cyniques et de la comédie. Les jeunes
gens de Térence expliquaient d'avance la pensée de Sénèque Qitid :
aliud est vitJa nostra incendere, quam auctores illis inscribere deos et
dare morbo exemplo divinitatis excusatmn licentiam (1).
Il est d'autant plus étonnant que Paul se soit refusé ce facile
Chez les Asiatiques, le ton dans les querelles est beaucoup [dus
élevé ; les intrigues secrètes le cèdent aux éclats de voix. Aussi, quand
il s'adresse aux Éphésiens, ce qu'il leur recommande d'éviter, c'est :
de ne pas voir une peinture des vices propres aux Galates dans l'énu-
mération que Paul leur adresse des vices de la chair « l'impudicité, :
Toutefois, les exég-ètes modernes sont d'accord que saint Paul n'en
a pas aux philosophes, et nous ne voulons pas céder à la tentation
de rétorquer l'argument de ceux qui flairent ici une pensée stoïcienne.
Mais le stoïcisme et le caractère des Romains s'accordaient à merveille
et s'amalgamaient aisément. Dans sa description de la déchéance
morale des Gentils, saint Paul, écrivant aux tidèles de Rome, n'a-t-il
pas dû insister sur la part propre aux maîtres du monde? Ils se flat-
taient de réunir tous les peuples dans une même société. Tous les
idées qu'énumère Paul sont précisément des vices anti-sociaux,
marquant le triomphe de l'orgueil personnel, en hostilité avec les
autres hommes, même dans la famille, détruisant toute stabilité dans
les relations et surtout cette bonté du cœur qui est le meilleur ciment
de l'ordre social.
Lesprit un peu lourd de ces Occidentaux, comparé à la vivacité
orientale, s'accommodait assez bien de lépithète d'inintelligents.
Leur amour de la gloire dégénérait souvent en jactance, et les temps
étaient déjà loin où le respect de l'autorité paternelle était l'une des
forces morales de Rome.
On se ferait scrupule de serrer la comparaison de trop près, et il
est sur que Paul n'entendait pas dire aux Romains chrétiens des cho-
ses désobligeantes pour leur patriotisme. Il ne s'arrogeait pas le droit
de les traiter comme ceux de Corinthe ou d'Éphèse, ou comme ses
Galates mais enfin il serait étonnant que le sens des réalités n'ait pas
;
guidé sa plume.
Peut-être faut-il ajouter que s'il n'a pas été très précis, comme
nous avons dû le reconnaître, c'est que déjà sa pensée suivait un
n.ouveau tour. Il préparait son apostrophe au juif « Ainsi tu es :
Il devait donc, dans son énumération des fautes, s'en tenir à des
reproches que les Juifs avaient mérités. Si cette explication est juste,
tout devient clair.
Les Juifs se sont morale plus pure
targués surtout d'une vie ;
de l'hypocrisie
faire la part officielle qui les inspirait, pour la plus
grande gloire de la nation, et, à ce qu'ils croyaient, de Dieu. ^lais
(1) II, 1. D'après l'opinion de beaucoup la plus commune (contre Lipsius), c'est bien au
juif que Paul s'adresse dès le début du ch. ii, sans le nommer, i)our mieux ménager 1 ef-
fet du V. 17
I.E CATALOGUE DES VICES DANS L'ÉPITRE ACX ROMAINS (I, 28-31). 549
point où l'histoire les avait conduites, des affinités spéciales. N'y eùt-
il eu de commun que l'instinct de la domination, l'orgueil et l'é-
{1) C'est peut-être ce qui a donné lieu à la charge de TaciteSeporad epulis, discreti
:
dans Plutarque [De educ. lib., XV); jamais encore dans les Papyrus
grecs qui fournissent une contribution si précieuse à la lexicographie
du Nouveau Testament.
En général, la tradition occidentale est fixée par les versions latines
où rapina traduit àp-av-j.sç ; elle interprète Philip., ii, 6 : Le Christ
n'a pas considéré que ce fût pour
une itsurpationlui d'être égal à
Dieu. La tradition orientale voit dans '7.p-y.-;\j.'zz V objet même de l'u-
surpation; le Christ n'a pas regardé sa divinité comme une proie h
laquelle on s'attache pour en jouir ou dont on puisse craindre d'être
dépossédé comme d'un bien usurpé.
Il est inutile d'ajouter que les deux exégèses, divergentes dans
l'interprétation littérale, s'accordent sur la conclusion doctrinale :
II
(1) Cf. LiGHTFOOT, Philippians, p. 133-137: L. Duchesne. Bull, crit., IV (1883). ji. 2'i;
Badham, Philippians, ii, V>, The Expository Times, 11)08, p. 331-333; J. Ross. 'ApTzoLy\i6;,
Philip., II, 6 (The Journal of theological studies, juillet 19rtii, p. 57.>-576).
MÉLAiSGES. ool
Où i"*?
Ç'^t''-OV oiioÈ 0'j[X7:oTiy.ôv, oijia;, A mon avis, ce n'est pas. dans un fes-
::pooi[i.iov sùcoyîaç, uaipasi: zaî àpraTab; tin, un prélude bien amical, ni digne de
•/.ai ysipôjv oiatXXa zal ota"j'/.oiVta[xô;, àÀÀ' convives que les regards jetés (sur les
a-o:îa /.at xuvtxà TcÂEUTwvTa noÀÀây.tç $i; plats}, l'avidité à s'en emparer (àpjiaï-
Àoiooptaç /.'xi opyàç, où xaT' àÀXrjXtov [j.ôvov. ao'ç , les disputes à coups de mains et de
àXXà /.a\ zarà twv Tsa-sro/.ouwv /.a\ -/.%-.->. coudes; ce sont là des pratiques dépla-
tCjV i(jIltiVTOJV. cées, cyniques, et qui dégénèrent souvent
en injures et emportements, non seule-
ment entre les convives, mais encore en-
vers les serviteurs et les amphitryons.
Toùç 1J.EV cjv T^ç ô'jpaç èTziOujAOuvta; Il convient, ^/i/ Plutarque, d'écarter
sAauvEtv
àT.tl ;:poaT])4E, tou; -?;? -W/r^z des enfants ceux qui n'aiment que leur
ipaaTa; vr/.^'viiri /.%-% -o (jijvoXov. Kal charme physique et, en général, d'ad-
mettre auprès d'eux ceux qui sont épris
XTÊOV k'pwra; v.cà tov iv Kpr^Tr, -/.xÀoyiic- de leur Ame. Ainsi faut-il fuir les amours
vov ap— ayao'v. en usage à Thèbes et à Elis, et ce qu'on
appelle en Crète rap;:aY[j.ô;.
(1) Quaestiones convivales, II. x. 2. p. (;'i4 A Plut.. Scripta Moral, éd. Didot\ t. Il,
p. 781).
(2) Plut., Moralia, p. 12 A. éd. Hemadakis (Teubner . 1888. t. I. p. 2C,. i:.-20 (= Di-
dot, Plut., Script. Moral., I. p. \?,).
552 REVUE BIBLIQUE.
s'en emparait point par persuasion; il l'enlevait (où vàp -v.Hoî y.aTap-
III
Dictionnaire des antit/iiités romaines, de Daremberg et Saglio. n'a i)as d'article Har-
pagmos ». on y décrit cet usage à l'art. Éducation, t. Il, 1° partie, p. '»7(j a.
MÉLA^'GES. 353
sion de leur refus, comme s'il eût eu un cœur froid et sans charité;
aussi introduit-il les étrangers chez lui. et leur sert-il à hoire et à
manger?
Un texte d'Eusèhe de Césarée [Hisl. eccles., VIII, xii. 2: P. G., X,
TG9 G) présente le mot y.z~-jL';\j.y. avec le sens très net de nioi/en qiion
saisit pour échapper : (Certains chrétiens, dit Eusèbe,
tViV -cTpav oeûyovTî; tS'm aXwva-. /.at I l'iivant l'épreuve, avant d'être pris et
3?ç /Eïpa; Twv È-tSoûXwv uJ)vm, oL-ifoOvi de tomber aux mains de leurs ennemis?
èÇ j'i/riXGJv ôwaaTwv iajToli; xaTî/.prjav.- j se précipitèrent du haut de terrasses éle-
7av, TÔv OdvaTov ap7:ayijLa Oéjasvci-. ttI: vées. saisissant la mort comme le moyeu
Tôjv ojaasSwv [JLO/Or^pîa;. 1 d'échapper à la méchanceté des impies.
état d'égalité divine lui fût un prétexte [ou une occasion] à saisir
(pour se dispenser de la soumission et de l'obéissance à son Père
dont II au contraire, lui-même s'est dépouillé (de ses
était l'égal;;
prérogatives divines en prenant (volontairement la forme d'un
i i
esclave.
On voit, d'ailleurs, aisément que cette interprétation ne diminue
en rien l'affirmation de ce passage relative à la divinité de .lésus-
Christ.
Paris.
L. Saint-Paul.
5o4 REVUE BIBLIQUE.
II
Nous avons publié dans la Revue (1909, p. 576 ss.) quelques notes
sur un sanctuaire lihyanite récemment retrouvé au Khirbet Hereibeh
situé à quelque distance au nord du
villag"e d'el- Ela, sur la frontière
actuelle du Hedjaz. A ce sanctuaire
appartenait très vraisemblablement
iv^^^ vil l'inscription lihyanite que la So-
ciété française des fouilles archéo-
logiques nous autorise obligeam-
ment à communiquer à nos lecteurs,
en attendant la publication pro-
chaine du second volume de notre
« Mission archéologique en Arabie »
dans leque
de notre dernière exploration
MELANGES.
5o6 REVUE BIBLIQUE.
bien ^j^^", J^i-* etc.). Si o,s.UL» n'est pas mentionnée par les auteurs
arabes comme un nom de personne, on apprend par le Lisan al-
"^Arah que ^Jul? est un nom propre d'homme, qui, d'après Yâqùt (1),
est d'un usage assez fréquent. De plus, employé comme nom propre,
il est toujours précédé de l'article. On dit o^LJ'... La même :
orthographe se trouve chez Ibn Doreid (2). Comme nom propre nSïn
serait donc parfaitement justifié.
immole >.
« — (iàbat
ont offert à dhou dans son sanctuaire, » ou « dans le
sanctuaire de dhou — Gàbat ». C'est sans doute aussi à cause de l'im-
molation qu'on insiste sur la jeunesse de Sàlim: les Arabes immo-
laient de préférence les jeunes gens, comme on le sait entre autres
par la pathétique histoire du fils de saint Ml -2 .
Yâqùt (2) situe v^J-^ 'A trois milles de Médine, sur la route de Da-
mas; "^M était donc au sud d'el-'Ela, sur la route de Médine. Mais
Yâqùt parle de ^^ d'après une de ses sources seulement, d'après
Tabary, car selon d'autres témoignages, il écrit l)'-i;. Et pour lui,
tain; il termine la ligne. Il faudra admettre que le lapicide n'a pas eii
\p) kallu (3), dont le sens de « sage » (4) est le plus fréquent et qui
sert d'épithète à un prêtre ou à un devin. Il est fort possible que
l'afkal nabatéen ait revêtu ce double caractère qui, dans l'antiquité,
était assez commun au même individu. Ce devait être, en tout cas, un
persoijinage important pour qu'on cré;U ainsi à son profit, dans le cas
d'une violation de sépulture, une amende de mille drachmes, payée
d'ordinaire au roi, quelquefois cependant au stratège. Peut-être ne
serait-on pas très loin de la vérité en reconnaissant en lui la pre-
mière autorité religieuse locale. »
Cette hypothèse reçoit aujourd'hui une nouvelle confirmation.
On remarquera d'abord que Abdwadd, l'auteur de l'inscription,
porte le titre de ~* --EN- Ici Afkal est déterminé par le nom du dieu
Wadd; il désigne donc, selon toute vraisemblance, un dignitaire
chargé des intérêts du dieu. Et, de ce chef, ne semble-t-il pas qu'on
soit autorisé à traduire "V"'2£n par prêtre de Wadd »?
<<
i
560 REVUE BIBLIQUE.
Alors que Bal fait une consécration à deux dieux, Arsû et Azizù, il
ne se déclare F'afkal que d'un seul (-2), NnS»^ '""'r;' n S^Ex. L"afkal
désignait donc une dignité religieuse bien spécifiée (3). Et il semble
que la meilleure traduction à proposer soit celle de « prêtre ».
(1) Tour pernieUre au lecteur de sui\re plus facilement la discussion, nous donnons la
X Pour Arsù et pour 'Azizù, dieux bons et louables, a fait (cecij Ba'l tils de Yarhibola ,
'Afkal de 'Azizù, Dieu bon et miséricordieux, pour sa vie et celle de son frère, au mois
d'octobre de l'an 500, etc.
(2) Dans linscription nabatéenne,
1'
'afkal n'est déterminé par aucun uum divin « El :
quiconque ne fera pas comme c'est écrit ci-dessus sera redevable à Dùsarà et à Hobal et à
Manùtu de 5 samdins, et à 1' 'afkal. d'une amende de mille drachmes de Harétat. »
(3) Si l'inscription de Warka, Hommel, Sud-ar. Chrest., p. 113, à laquelle fait allusion
Lidzbarski, portait ^.T^'jhzza ^t *' in" était pour TT", on aurait un rapport assez
curieux entre cette inscription ininéenne (?) et palmyrénienne déjà citée. On
l'inscription
sait en eflet 'v. Dussald, ISotes de mijlliologie syrienne, p. Il, etc). que "i""!'", '^/y^.
n'était qu'une épitbète et que le nom spécifique du dieu était "JÛl^V"'^^"- 1 étoile du
matin. Le If^TÎ? de Palmyre serait une reproduction du ^r,fy'J SjSN, minéen. Serait,
SdEN
il permis de dire aussi que lelihyanite (avec le nabatéen?) a hérité ce nom du minéen?
MÉLANGES. u61
blement »
Peut-être d'autres ouvrages arabes, que nous n'avons pas sous la
main, contiennent-ils des renseignements plus explicites sur ce digni-
taire qui a dû, a un moment donné, exercer ses fonctions à la manière
des faqîrs modernes, en inspirant la crainte et la terreur les spécia- :
listes saliront trouver ces textes et les mettre en valeur. Qu'il nous
(Ij Si quelque auteur a déjà fait le rapprochement entre le "'S^x des inscriptions et le
prêtre i liCi'; de la tradition arabe, nous n'en avons pas connaissance et il nous est dif-
ficile de nous renseigner, à Jérusalem. Nous savons seulement qu'on a essayé de rat-
qui cite matériellement le mot 3-^' ^^"^ ^" ^"'^° tirer, le regarderait volontiers comme
' o
I f
l'équivalent de Lvi.- « celui qui fait attention à une chose, qui s'applique ». Les rensei-
gnements tirés de la tradition arabe sur IXi' cadrent peu avec ces hypothèses. Inutile
d'insister sur le fait qu'en arabe on écrit généralement :
\ viNt " ^^ 'afkal », comme
si on voulait indiquer le prêtre connu de tous, « le grand prêtre ». Quant à l'etymologie du
mot, on hésitera sans doute encore longtemps, avant de la déterminer. Mais dés mainte-
nant deux voies paraissent ouvertes rattacher "il£x à une racine assyrienne, en cherchant
:
ViCa! ^^^ ^"^ comparatif qui peut aisément être pris pour un superlatif.
III
LE PSAUME Vil
V. 9, lire avec Bickell ]\'[^ car la troisième personne entre les vv.
accents, ce qui n'est pas très beau mais M. Rothstein lui-même admet
;
''^'":.
cette accentuation : il faut lire
Le v. 10 est aussi défectif à moins qu'on ne lise p •-]; ^'l'irz'l.
Au V. 15 accentuer •jw.
Ciilembor:^ Hollande).
W. VAN KOEVERUEX.
CHRONIQUE
LES RÉCENTES FOUILLES D'OPHEL
(1) Un comple rendu plus complet, comprenant un rapide historique de la mission, avait
été préparé pour paraître dans la Revue dès le mois de juillet. Les incidents déplorables
suscités à Jérusalem à propos de certain détail de ces fouilles, sont venus modifier les pro-
jets de publication qu'avaient formés, je crois, MM. les directeurs de la mission. Remettant
à plus tard leur propre journal de fouilles, ils ont voulu que leurs premiers travaux fussent
présentés par un témoin qu'on ne soupçonnerait pas de partialité, puisqu'il est étranger à
l'entreprise et nel'a suivie qu'en curieux très intéressé par ses résultats scientifiques. Ce
compte rendu plus détaillé a donc été publié par les soins du syndicat, en double édition
anglaise et française, à Londres, par Horace Cox {The Field, Bream's Buildings) sous le
titre « Jérusalem souterraine». On se reportera à cette publication intégrale pour avoir une
présentation provisoire des explorateurs et de leur méthode de fouilles. On y trouvera na-
turellement aus^i une documentation graphique plus complète.
CHRONIQUE. 367
H. VixcEXT, 0. p.
Pour mettre quelque clarté dans une description qui n'a plus à
tenircompte de l'ordre et des péripéties de la fouille, on examinera
d'ensemble :
1" la source ;
(1) J'implore la clérneace de tous les amis qu'aurait pu désobliger, au cours de presque
deux années, notre fidélité opiniâtre à éluder leurs questions, pour faire honneur à renga-
gement de discrétion qui nous avait ouvert le chantier. Ils sauront du moins qu'ils peuvent,
au besoin, compter eux-mêmes sur une discrétion qu'ils n'ont pu faire fléchir.
568 REVUE BIBLIQUE.
la discussion de ce sujet.
Il serait non moins hors
1. — Fontaine ilc la VicioC. Entrée de la caverne
de propos de montrer en
Mie du palier extérieur.
quoi sont inexactes les an-
ciennes descriptions de la fontaine, même si l'inexactitude portait
sur des particularités faciles à constater avant les travaux de 1900-
1011. Le plan et les coupes (pi. I enregistrent l'état des lieux après le
déblaiement total ; on indiquera finalement les transformations qu'a
imposées la restauration du bassin.
La seconde rampe de l'escaKer moderne se termine dans le vide, à
donne accès dans la chambre d'eau.
0" .75 de la porte irrégulière qui
des parois. Au lieu dune fine coupe au ciseau, ainsi qu'on la peut ob-
server en toutes les autres parties de la monumentale alcôve, à la
(1) Dans b ou a enfoncé, au début des fouilles, une forte palte-ticlie pour accrocher un
phare pendant les travaux de nuit. Le trou est aujourd hui rempli de tiinent. [.'autre a été
intenlionnellemenl exagéré dans le dessin.
CHFii'MnlE. 571
section R' du bassin, prise ainsi entre deux barrages, le sol rocheux
est sensiblement plus bas, mais tout à fait fruste. Un canal en maçon-
nerie. A', le traverse en biais de nord-ouest en sud-est où nous le sui-
vrons plus tard dans son anfractuosité de roc. Son amorce fig. i) a été re-
trouvée dans la grande entaille du bassin H, précisément sous le mur /,
dont la fonction devient ainsi très claire : obturer le canal A', rétrécir
le bassin en inutilisant la section //', et refouler toute l'eau à l'occident.
A l'orient du gros blocage /, qu'on a eu soin de respecter, la fouille
a rencontré un béton eé (pi. 1, 2 et '*) d'une résistance extrême, à un
niveau supérieur de 1'". du bassin R et développé,
10 environ au radier
par endroits presque à fleur de roc. dans la direction du Cédron, sous
l'amas de décombres qui porte aujourd'hui la première volée de
marches. Il semble que ce béton ait été détruit depuis longtemps sous
l'escalier; il n'était franchement conservé que dans l'étroite zone pro-
tégée par le pied de la muraille. En le défonçant pour atteindre la
crête du roc, on a mis à jour un nouveau canal. Z, violemment ouvert
à une profondeur moyenne de i'^.SO dans l'assise rocheuse. Ce canal
pénètre sous l'escaUer moderne et vient se perdre dans une caverne
assez exiguë, J/. dont le plafond de roc et la paroi orientale très as-
surés gardent la trace d'un ruissellement d'eau fort prolongé. Cette
petite caverne, située vers le milieu de la T marche de l'escalier
extérieur, n'est plus qu'à 15 ou 16 mètres du litactuel du Cédron;
mais on savait déjà —
et les travaux préalables à la construction de
la nouvelle mosquée-école de Siloé durant l'hiver de 1909-1910 ont
fait constater de nouveau — que la vallée est remblayée en ces pa-
rages d'au moins i mètres. Aucune donnée précise ne fixe en ce point
l'exacte situation du lit primordial: à tenir compte cependant de tous
les indices connus, on doit le reporter de 5 à 6 mètres au minimum
572 REVUE BIBLIQUE.
zone couverte encore de ^deux béton (?f. par des décombres que 1 on
croirait pris dans la curure d'un bassin : terre lavée et alliage extraor-
dinaire de tessons d'une poterie assez uniforme, casseaux de jarres et
de cruches de grandes dimensions. Pas une pièce intacte, pas un tes-
son ornementé, pas même de casseaux assez grands pour permettre
de saisir un galbe de vase je me suis pourtant beaucoup acharné à
:
(1) La teiiniaologie qui sera cuiistamment usitée à propos de la poterie est celle usitée
dans la Revue depuis iî^., 1906, pp. 55ss.avec la chronologie correspondante.
I
574 REVISE BIBLIQUE.
xi"" siècle avant notre ère. Or, peu après, des casseaux de jarres
juives bien caractérisés et de trois à quatre siècles plus jeunes, selon
toute vraisemblance, étaient arrachés de dessous le mur / en déblayant
lorifice très soigneusement obturé du canal en maçonnerie K.
Une coupe nécessitée dans ce mur pour l'assèchement provisoire du
bassin, en a fort à propos révélé la nature une maçonnerie relative-
:
(2) Je n'ai pu remarquer, ni en place ni dans les déblais, aucun fragment de poterie cana-
néenne.
CHROMOIK. r;7r,
d'un canal qui sera décriten son lieu devait cependant introduire
quelque ordre assez spontané dans cette apparente incohérence.
Dans lamas énorme de vase et débris qui obstruait aux trois quarts la
section occidentale du Ijassin de f/^', toute tentative de classification eût
été apparemment chimérique du moins ila parupUis prudent de n'en
:
(1) Même à la partie supérieure du mur, seule déblayée en 1901, ce vieil enduit était facile
à discerner des plaques de ciment moderne étendues sur les craquelures et sur les brèches.
r)76 REVLE BIBLIQUE.
gique, ils ont été numérotés (pi. I) de I à Vlll, pour la facilité des
repères provisoires.
I. Le n" I, depuis très longtemps soupçonné 1 n'est autre que ,
(1)Dès 1884. par exemple. M. le chanoine Birch, M. le prof. Sayce et M. le capitaine Con-
der rompaient déjà des lances pour ou contre la possibilité d'un tel canal Q.S., ISSi.
p. 75 SS., 173 s., 241; 1885, p. 60.
(2) QS.. 1886, p. 89 ss. Cf. le plan, face p. 88, avec celui de M. Birch {QS., 1884. face
p. 75) et les observations de M. Birch QS., 1889, pp. 35-38).
(3) Fouilles de M. Schick avec plans nouveaux où s'enchevêtrent, sans distinction suffi-
sante, les constatations et les hypothèses nouvelle tentative en 1890
QS'., 1886, pp. 197-200 ;
{QS., 1890, p. 257 s.; 1891, pp. 13-18,. et en 1891 {QS., p. 199). Fouilles accidentelles à la
fontaine dirigées et décrites par M. Schick (QS., 1902, pp. 29-35), visitées et mieux décrites
par M. leD' Masterman ilnd., pp. 35-38 .
W msçoiinerie en bétoi
verse une première caverne
1902, p. 196); on verra bientôt qu'il faut lire en réalité « 20 pieds » environ, c'est-à-dire
6 mètres. Schick avait dû prendre pour l'orilicc du canal, qu'il explorait seulement d'en
haut, un petit enfoncement dans la paroi de maçonnerie (|uia fout l'air d'un premier mih-
rab, à une époque où le niveau du |)alier était plus bas.
CHRONIQUE. r,7(t
(1) Masterm\>'. Tke recently-discovered aqiieduct front tlie Virgin s founlaiu. QS.,
1902, p. .33 SS.
2) La première section .seulement de ce canal est tracée pi. I jujur imliiuer son place-
rnent et sa relation avec les autres galeries.
S80 REVUE BIBLIQUE.
tenaient exclusivement à
la plus basse époque Israé-
lite, avec une prépondé-
i-ance très notable de piè-
ces judéo-helléniques, en
même temps qu'une ex-
trême variété de fragments
moulurés d'une vaisselle
qu'on n'a pas coutume de
trouver en des canaux.
De là il n'y avait qu'un
pas à l'hypothèse
d'un
remblai pratiqué d'un seul
coup pour obturer le tun-
nel III. Bientôt on allait
s'apercevoir que la gale-
rie II se développait avec
les mêmes caractères, au
\. et au S., et Ion atteignait
la crête du rocher et le
plafond de la galerie. Ce
plafond n'était pas de roc,
ainsi qu'on l'aurait pu ima-
giner, ni en dalles, mais en
quartiers de roche et en
blocs d'appareil énormes
^'jLAaOiV^iïcS. aSL4VÏ
en travers de
(fîg. 5) jetés
la tranchée, empilés au Fig. 5. — Dans la i^alerie II. sous les blocs du plafond.
pour s'y appuyer avec solidité a glissé presque au fond, s arrêtant par-
fois sur une assez faible saillie, sans doute parce qu'il atteig-nait à ce
au sommet voy. pi. IV, 2'. C'est nouveau tunnel sous roc, le
l'entrée d'un
n" m. Un couloir de 2'",o0 delongse développe, par 52' SU., non sans
quelque sinuosité, derrière cette entrée dont il conserve en gros la forme.
Le plafond se maintient àpeu près horizontal, mais le sol descend d'en-
viron 0™,50 sur celte très faible étendue. Soudain le plafond retombe
en manière de conque à 0'",95 seulement; une protubérance bien cal-
culée à la base d'une paroi masque aux une
h (fig. 6)
2 3 étroite porte
ouvrant de biais sur une nouvelle section du couloir, qui s'élargit jus-
qu'à 1™,05 en moyenne, se relève à l'",50 de hauteur maximum ets'o-
58i REVUE BIBLIQUE.
sédiments très durs causés par la longue stagnation des eaux, a laissé v
de terre humide qui avait l'air de faire office de tampon sous l'angle
d'un bloc de proportions immodérées, et que la fouille avait déjà
privé d'un supplément très opportun d'appui inférieur. Spontanément,
tout glissa des mains dans la boue du tunnel, moins la bougie... Et
de frotter le fond du cartouche... et d'arracher la terre pincée sous
l'angle du bloc malencontreux, sans souci de son équilibre, heureu-
sement meilleur que notre prudence! Comment en effet admettre que,
dans le champ une fois nettoyé de ce cartouche, n'allaient pas appa-
anguleuses de quelque vieille inscrip-
raître enfin les lettres grêles et
tion hébraïque, pendant de l'inscription trouvée naguère au bout du
tunnel de Siloé ? La déception fut d'autant plus sentie que l'espoir
avait été plus imprévu et l'obstination plus prolongée à fourbir cette
roche, puis à l'éclairer suus tous les angles et à la scruter dans toutes
les positions . Quand il fallut faire droit à l'évidence que rien n'avait
jamais été gravé là dedans, surgit l'idée qu'on aurait pu seulement
tracer, par un procédé quelconque, des lettres que le temps avait
comparaison assez utiles dans la suite, pour qu'on veuille bien par-
donner la confession candide que leur mention vient de provoquer.
V. Le tunnel V, dont l'amorce a été indiquée tout à l'heure, n'exige
pas de longs détails pour compléter et préciser le graphique pi. 1. 1 Le .
588 REVUE BIBLIQUE.
(l) Hauteur inaxiinuin de celte galerie, r",65; minimum, 1">,35 ; largeur maximum, à l'en-
trée, 0'", 87 i parcours intérieur, O^./O; largeur minimum, au point d'interruption,
sur le
O'^jas ; largeur moyenne, 0'^,bO section trapézoïdale assez régulière dans toute l'étendue.
;
CHROMOUE. 589
(1) Nivelé maintenaat par un lit de ciment depuis que la création d'un barrage plus effi-
Fontaine de la Vierge. La caverne E vue de l'entrée, après l'obturation lie la crevasse D et l'installa-
tion du gradin devant rorifice du canal VI.
Planche IV.
— £
CHRONIQUE. ",91
spécial de ces notes. Car ici encore, sur un monument estimé connu
dans le plus intime détail, les courageux travaux de M. A. ont amené
de curieuses révélations.
[A sitivre.)
RECENSIONS
tion dans les pays de langue anglaise m'engagent à faire de l'Introduction de M. Mof-
fatt une recension un peu détaillée.
D'abord quelques remarques générales.
Le plan de cette Introduction est plus étroit que celui des livres similaires. Cela
se comprend d'ailleurs aisément. U International Theological Litnarij consacre cinq
volumes à l'étude du Nouveau ïestanient. Le Tcxt and Canon o/' the Neiv Testa-
ment, la Thcology of the New Testament, une Histori/ of Christianit;/ in the Apo-
stolic Age ont déjà paru, et une Contcmj)orary History of the New Testament est an-
noncée. L'auteur a été forcé de se limiter aux questions littéraires qui se posent au
sujet des livres du Nouveau Testament .: questions d'auteurs, de temps et de lieu de
composition, de dépendances littéraires. On ne regrettera pas qu'il a dû négliger
rhistoire du texte et l'histoire du canon : ce sont deux sciences qu'il y a profit à
étudier et à traiter séparément. Mais les questions littéraires qui relèvent de l'Intro-
duction proprement dite ne peuvent être complètement séparées des grandes ques-
tions doctrinales, historiques et chronologiques de l'âge apostolique. A ce point de
vue, la trop grande division du travail offre des inconvénients. Cela est particulière-
ment évident dans l'étude des lettres pauliniennes, écrits de circonstance, qu'on ne
peut isoler des périodes bien connues de la vie de l'Apôtre. Aussi nous ne craignons
pas de dire que M. Moffatt a trop peu insisté sur l'histoire générale de Paul, sur les
origines des églises fondées par lui et sur la chronologie du grand Apôtre. Ce dernier
point est trop rapidement résumé, surtout maintenant qu'il y a moyen de préciser
par suite de l'inscription de Delphes, publiée par Bourguet {De Rcbus Delphicis
imperatoriae aetatis, Montepessulano. 1905). Cette inscription permet de dater assez
exactement le proconsulat de Gallion 1.52-53) et par suite le séjour de saint Paul à
Corinthe {Act. 18, 12-17). Elle jette ainsi une lumière très précieuse sur la chrono-
logie des voyages de l'Apôtre. M. Mofîatt semble ne pas avoir connu cette inscription.
C'est regrettable.
Si donc les questions littéraires sont quelquefois trop isolées de l'histoire générale,
il convient d'ajouter aussitôt que, au point de vue où elles sont abordées, rien n'a été
épargné pour que la discussion soit toujours claire et complète. Chaque étude est
précédée de renseignements bibliographiques extraordinairemeut abondants où l'on
RECENSIONS. 593
Correspondance de Paul, bien entendu celle que Moffatt tient pour authentique
(64-176); le second chapitre traite de la litterature^historique (le.s Évangiles Synop-
tiques et les Actes^ (177-314y; le troisième des Homélies et Pastorales (315-482) :
Nous ne suivons cette division que dans ses grandes lignes. Le groupement com-
munément admis nous semble préférable : c'est d'après celui-ci que nous avons fait
certains procédés de style, surtout la prose métrique. Nous ne pouvons pas insister ;
ici. M. Moffatt réfute soigneusement les objections contre II Thés.: il n'a pas connu
l'hypothèse récente dHaroack qui croit cette lettre destinée aux juifs convertis de
ïhessalonique.
La question des destinataires de l'épître aux Galates est fort controversée.
M. Moffatt est un partisan décidé de la JSorth Galatian Theory : la lettre aurait été
écrite aux habitants de la Galatie proprement dite. Il est certain en effet que Paul
avait évangélisé cette contrée dans son deuxième (Act. 16, 6) et troisième voyage
{Act. 18, 23), du moins pour ce qui regarde les régions les plus occidentales. A notre
avis, ces textes, quoi qu'on en ait dit, ne permettent point d'autre interprétation. Et
comme la lettre aux Galates a été adressée à des chrétiens que Paul avait évangélisés
deux fois déjà {Gai. 4, 13 -oôtesov = une première fois) il faut l'attribuer logique-
ment au troisième voyage, dans l'hypothèse que préconise l'auteur. C'est ce que fait
M. Moffatt. Il rejette absolument la destination de la lettre aux chrétiens d'Antioche,
Iconium. Lystre et Derbes, villes qui appartenaient à l'époque de Paul à la province
romaine de Galatie et qui furent évangélisées par l'Apôtre dans le courant du pre-
mier et du deuxième voyage. Cette opinion, la South Gahitian Theory, nous parait
cependant sérieusement probable et s'appuie, entre autres, sur la présence, dûment
constatée par les inscriptions, d'un élément juif considérable dans ces dernières com-
munautés. Or il est avéré et reconnu partons que la controverse dans la communauté
des destinataires requiert la présence d'un élément juif important. On ne saurait
prouver d'autre part que beaucoup de juifs habitaient, à l'époque de Paul, l'ancienne
Galatie. On peut donc, nous semble-t-il, faire des habitants convertis dans la pre-
mière tournée d'évangélisation en Phrygie et Lycaonie, etc., les destinataires de
l'épître aux Galates. Elle pourrait être datée du second voyage de saint Paul. Nous
reconnaissons volontiers que la question est difficile et que les idées sont partagées.
Elle est d'ailleurs fort bien exposée par M. Molfatt qui s'est beaucoup inspiré du bel
ouvrage de Steinmann sur cette controverse.
Paul, d'après Moffatt, aurait écrit quatre lettres aux Corinthiens : 1) une lettre
perdue, antérieure à la première lettre canonique et rappelée dans celle-ci (I Cor. 5, 9);
du séjour d'Éphèse et aurait été écrite « dans une grande affliction, dans l'angoisse
de mou cœur et avec beaucoup de larmes » (II Cor. 4. 4i ; 4) enfin, arrivé en Macé-
doine, après réception de nouvelles consolantes sur la situation des chrétiens de Co-
rinthe, il écrit la seconde lettre canonique II Cor. 1-9 (moins 6, 14-7, 1) et 13,
11-13. On que ces conclusions ne sont pas nouvelles, mais on fera bien de se
sait
nerveux, on ne peut rien tirer d'un changement un peu brusque de ton, ou d'un
manque de liaison entre deux sections qui se suivent.
L'épître aux Romains fut envoyée de Corinthe à la grande communauté de Rome
RECENSIONS. 595
que Paul n'avait point encore visitée. Elle finissait au chapitre 15. TJn exemplaire en
aurait été adressé à l'église d'Ëplièse par Paul lui-même, avec
une conclusion propre
et de longues salutations (16, 1-23). La
ne serait pas de
do.xologie finale (16, 25-27)
la main de Paul; mais elle ne serait pas non plus marcionite, comme on l'a pré-
tendu récemment. Les traces d'un éditeur postérieur seraient visibles en plus d'un
passage.
Quant aux épitres de la captivité, elles furent écrites pendant l'emprisonnement à
Rome : le lieu de composition serait certain pour la lettre aux Philippiens et à Phi-
lémon; on ne saurait démontrer la même thèse pour la lettre aux Colossiens; mais
très probablement elle daterait aussi de la même captivité. A cette même époque, il
faudrait rapporter la lettre perdue adressée aux Laodicéens mentionnée Col. 4, 16.
Ce —
en dehors de quelques notes recueillies par l'auteur des épîtres
serait là
Pastorales et dont il sera question plus tard —
tout ce qui nous est resté de l'activité
littéraire du grand Apôtre. Pour M. Moffatt, malgré les arguments très solides et de
plus en plus écoutés qu'on fait valoir pour la délivrance de l'Apôtre et une seconde
captivité romaine, la vie de Paul .se termine avec la fin du récit des Actes. Cette con-
clusion entraîne, comme conséquence logique, la non-authenticité des épîtres à Timo-
thée et à Tite.
C'est parmi les homélies que M. Moffatt place Tépître aux Éphésiens dont il nie
l'authenticité. L'écrit aurait été composé en .Asie Mineure, entre 75-8.5, par un chré-
tien de l'école de Paul, utilisant beaucoup l'épître aux Colossiens et connaissant aussi
la /» Pétri. Sç, voudrais m'étendre un peu sur ce point spécial, parce que l'étude sur
les questions littéraires de l'épître aux Ephésiens caractérise bien la méthode et les
procédés de l'auteur. 11 est entendu que is'p/*. 1, 1 la leçon âv 'Eoi^w est inter-
polée et que la question insoluble des destinataires de cette lettre sera absolument
négligée dans l'examen des arguments exposés par M. Moffatt contre l'authenticité.
Si jamais il était nécessaire de commencer l'étude d'une question par l'examen
complet de la tradition, ce serait certes le cas pour le problème que nous abordons
ici. Il n'est point difficile de l'établir. M. Moffatt reconnaît que saint Clément de Rome,
dans sa lettre à l'église de Corinthe, écrite en 96, fait allusion à certains passages de
l'épître aux Ephésiens. De telles allusions sont plus nettes encore au commencement
du second siècle dans les lettres d'Ignace et de Polycarpe. Vers le milieu du second
siècle, Marcion la proclamait authentique et la croyait adressée aux chrétiens de
Laodicée. Un peu plus tard la lettre est citée comme paulinienne par les auteurs
chrétiens de partout. M. Moffatt conclut de ces témoignages que la composition de la
lettre aux Ephésiens ne peut pas être portée après 85. C'est fort bien. Mais M. Moffatt
n'admettra pas qu'à cette époque la lettre circulait sans nom d'auteur : il a beau l'ap-
peler une homélie, c'est une lettre ;
elle en porte tous les caractères littéraires, et
partant, elle aura toujours porté un nom d'auteur, le nom de son auteur réel ou un
pseudonyme. Dès lors, si l'on nie l'authenticité de la lettre aux Éphésiens, il faudra
conclure que les chrétiens de P»^ome et leur chef, saint Clément, se soient laissé im-
poser un faux, quelque trente ans après la mort de l'Apôtre et cela dans la ville
même où celui-ci avait passé ses dernières années et où tout naturellement on devait
être au courant de son activité littéraire. Cela est-il probable? Il faudra conclure en
outre que dans l'Asie Mineure, où l'écrit pseudonyme aurait été composé, les chefs des
églises chrétiennes d'Antioche et de Smyrne auraient été victimes de la mystification
au début du second siècle. M. Moffatt, qui est si minutieux quand il s'agit de critique
interne, aurait dû exposer l'argument de tradition là où il discuta le problème de l'au-
thenticité; il l'a au contraire relégué, en petit texte, au paragraphe final et très court
596 REVUE BIBLIQLE.
Certes, il est légitime d'examiner aussi le contenu de la lettre, d'en étudier le vo-
cabulaire et le style pour s'éclairer sur la question d'auteur. Mais il ne faut point
oublier que la critique interne n'a pas de monopole. Les raisons internes qui poussent
M. Moffatt à nier l'authenticité de l'épitre aux Éphésiens sont avant tout la compa-
raison avec l'épitre aux Colossiens et avec la J» Pétri, puis, en ordre subsidiaire,
l'étude du vocabulaire et du style comparés avec le vocabulaire et le style des lettres
indubitablement pauliniennes.
Nous avons refait le travail de Moffatt et nous sommes arrivé à des conclusions
diamétralement opposées. Il serait trop long de critiquer toute l'argumentation, mais
nous en dirons assez pour montrer combien elle est peu solide et ne saurait rallier
l'assentiment. M. Moffatt commence par imprimer en deux colonnes les passages pa-
rallèles des deux lettres aux Colossiens et aux Ephésiens. Ces passages sont nom-
breux et la relation entre les deux épîtres est très étroite. Le but, l'ordre et la dis-
position, l'objet sont sensiblement les mêmes, mais le ton de l'épitre aux Éphésiens
est plus général, le style est moins nerveux, l'exposé est plus objectif, moins polé-
mique. Cependant il n'y a pas trace de copie servile l'auteur développe à l'occasion
:
les idées moins complètement exposées dans la lettre aux Colossiens on en trou- :
sidérer le premier non seulement comme un vulgaire plagiaire, mais même comme
un habile imitateur du second. Dans les grandes lignes, et sauf certaines différences
que je ne voudrais pas diminuer, le rapport d'Eph. à Colos. ressemble beaucoup au
rapport de l'épitre aux Romains à celle aux Galates, ou des deux lettres aux Thessa-
loniclens. C'est de part et d'autre le même auteur qui sest assimilé les vérités que la
tradition et la révélation lui ont apprises et qui les expose d'une façon originale qu'il
n'est pas aisé d'imiter. Et puis, dans Ihypothèse de la non-authenticité de la lettre
imitateur de Paul n'eût certes pas manqué de reprendre, de développer des passages
comme CoL 2, 8; 16-18, etc. Dans ce même ordre d'idées, on peut noter aussi que
les exhortations morales des deux lettres se ressemblent bien plus que la partie dog-
matique autrement difficile et originale. Pour tous ces motifs, il nous semble indé-
niable que la comparaison générale entre Eph. et Col. est favorable à l'identité d'au-
teur des deux lettres.
Cette impression n'est certes pas diminuée par les remarques en sens contraire
dont M. Moffatt accompagne, au bas des pages, les textes parallèles. Qu'on en juge
par ces exemples ;ii. A propos de Eph. 1, 7 on note à l'exception de 2, 16, c'est la
:
Pauline view in the direction of the Johannine! A supposer qu'il n'y eut dans la
lettre que deux passages où il serait question de la mort du Christ (l'auteur cite en-
comme indiquant la fnrme dans laquelle se manileste le caractère irréprocliable, est une louclie
non-p»ulinienne. » Nous avons montré ici même 1?K>1», p. "
svv.) qu'il est bien plus probable qu'il
faille rapporter Èv àyâit-/) à ce qui suit.
RECENSIONS. r,9T
core 5, 2 qu'il compare avec I Petr. 2, 21 mais qu'il pourrait tout aussi bien comparer
à Phil. 2, 5 sv.), on ne voit pas encore comment on serait par là hors du champ
paulinien dans la direction johannique. Mais il est faux qu'il n'y ait dans l'épître aux
Éphésiens que deux ou trois allusions à mort du Christ. Citons encore la1, 20 : :
tion entre ces Dieu ou que c'est ie Christ qui confère les
afûrmations que c'est
charges et les Clément de Rome l'avait parfaitement re-
charismes [cf. Gai. 1, l).
marqué et fort bien exprimé dans ses remarquables paroles « les apôtres nous ont :
été dépêchés... par le Seigneur Jésus-Christ. Jésus-Christ a été envoyé par Dieu.
Le Christ vient donc de Dieu et les Apôtres viennent du Christ ces deux choses
viennent en bel ordre de la volonté de Dieu» (xlii, I). Il en est de même de la ré-
conciliation qui tantôt dans saint Paul est attribuée à Dieu par le Christ, tantôt au
Christ : Dieu est V auteur de la réconciliation, le Christ en est Yimtniment. D'ail-
leurs l'épître aux Colossiens 1, 22 ne s'exprime pas autrement que l'épître aux Éphé-
siens. Il n'y a pas ombre de christologie diverse Eph. 2, 15 et II Cor. 5, 18.
Une dernière opposition — car je suis forcé de passer les moins importantes :
—
dans indubitablement authentiques, Paul proclame l'union spirituelle des
les lettres
chrétiens issus du judaïsme et des chrétiens convertis du paganisme sur la foi des pro-
phéties de l'Ancien Testament; dans l'épître aux Éphésiens cette même union serait
basée sur le décret éternel de Dieu. Si M. Moffatt avait songé à la composition des
communautés chrétiennes chez les destinataires d'Eph., il aurait sans doute saisi la
raison pour laquelle Paul s'abstient de trop argumenter des prophéties : les lecteurs
auraient eu peine à suivre et à comprendre puisqu'ils n'étaient ni d'anciens juifs ni
d'anciens prosélytes. Il faut de l'audace, certes, pour contester le caractère paulinien
de Eph. 4, 4 : iv cjw;j.a, xx'ï ïv -v£ij[j.a x.xôto; xx\ iy.kr'fir-ô sv ii.tx IX-îot t^: y.Kr^'^iMç uixô&v.
M. Moffatt ne s'en effraie point. Mais la vérité est que, au point de vue des idées,
l'épître aux Ephésiens reflète les grands courants de la théologie paulinienne. Le
rapport doctrinal entre Col. et Eph. n'est donc pas défavorable à l'authenticité de
cette dernière lettre.
M. Moffatt est mal disposé contre l'épître aux Éphésiens : ce n'est pas un interroga-
toire qu'il lui fait subir, c'est un réquisitoire qu'il prononce. C'est dans ce même
598 REVUE BIBLIQUE.
lettre, n'est pas exagéré : 37 mots qui ne se retrouvent pas ailleurs dans le JVouveau
Testament, et 43 qui ne se lisent pas dans saint Paul, les Pastorales comprises.
Au lieu d'appeler l'attention sur la ressemblance générale du vocabulaire û'Eph.
avec le vocabulaire paulinien. et tout particulièrement sur l'usage des petites particules
ïl' t;?, zl-.i. aoa oJv etc., sur l'identité du vocabulaire théologique et même sur la
prédilection de part et d'autre de verbes et de substantifs composés : tjvcveiçj-.v,
différences de détail dans le choix des mots, différences dont on ne peut générale-
ment fournir une explication. On doit constater que Paul se sert de iva/.a-.voùv
II Cor. 4, 16, Col. 3, 10; et l'auteur de £p//. 4, 23 de œvxvsojaôa;. Mais que peut-on
conclure de là par rapport à la question d'authenticité? On insiste particulièrement
sur le vocable o:ioolo; qui se rencontre deux fois dans Eph., sept fois dans les Pas-
torales, alors que dans les autres lettres l'Apôtre se sert du terme hébreu ax-x-^i;
(sept fois, et deux fois dans les Pastorales). J'expliquerais ce phénomène, que pour
ma part je ne trouve pas si singulier, par l'abandon graduel des termes hébreux et
leur remplacement par les mots grecs mieux à la portée des communautés pagano-
chrétiennes. D'ailleurs oiâSoÀo; n'est pas rare dans les LXX. Mais à supposer que
cette explication ne vaille pas et qu'on ne puisse attribuer à saint Paul aucune
raison pour abandonner le terme saravà;, il n'y aurait aucune fausse modestie à
conclure à notre ignorance, et il serait prudent de ne baser aucune conclusion impor-
tante sur des indices aussi équivoques. Il vaut mieux ne pas poursuivre ces remarques.
Ce que nous avons dit suffit déjà pour conclure qu'au point de vue lexicographique
il n'y a pas le moindre motif d'abandonner la tradition sur l'auteur de l'épître aux
Ephésiens. Il y a dans le vocabulaire de cette lettre plutôt un argument en faveur de
son authenticité comme l'a franchement reconnu M. N;igeli (Wortschatz des Paulus,
p. 85^
La comparaison du style de la lettre aux Ephésiens avec le style des lettres pau-
liniennes n'est pas de nature à contrebalancer tous les indices et arguments concor-
dants en faveur de l'origine paulinienne de Eph. Certes, la phrase de l'épître aux
Ephésiens est longue, surchargée d'incidentes et de participes; les anacoluthes sont
fréquentes ; les parenthèses, les constructions avec génitifs répétés comme 3Î; "i-a-.vov
8dÇr)ç TTjç y âp;-:o; xjtou (1, 6) affectent désagréablement le sentiment esthétique. Mais
on trouve à peu près les mêmes phénomènes dans les autres lettres de l'Apôtre.
Tous ceux qui ont étudié ces écrits au point de vue du style et de la construction de
la phrase le savent, et il n'est pas nécessaire de citer des exemples. Si le style dans
la lettre aux Ephésiens est moins vif et moins nerveux que dans la plupart des lettres
de saint Paul, cela peut parfaitement s'expliquer par l'absence complète de toute
polémique et par la profondeur du sujet qui est exposé dans la partie dogmatique de
cette lettre.
Nous sommes loin d'avoir épuisé le sujet, c'est entendu. Mais nous sommes con-
RECENSIONS. :j99
vaincu que, d'après les remarques générales exposées plus haut, la thèse de l'au-
thenticité de l'épître aux Éphésiens est non seulement défendable, mais qu'elle
s'impose et qu'elle finira par prévaloir. Nous reprenons maintenant, après cette
analyse critique plus détaillée, le résumé succinct des principales conclusions du livre
avait aussi accès à des billets de l'Apôtre qu'il a même insérés dans II Tim. 1, 1-18 ;
L'épître aux Hébreux est uu traité écrit vers 80 par un Helléniste à une com-
munauté chrétienne de Rome ou d'Italie. Les efforts tentés par les critiques récents
pour en découvrir l'auteur, d'après l'examen interne de l'épitre et ce que nous con-
naissons sur les principaux disciples de Paul, n'ont donné aucun résultat. D"après
Motfatt, il ne serait pas nécessaire de rattacher l'auteur au cercle des disciples de
Paul. On ne sait rien de précis sur le but et l'occasion de cette lettre. Elle fait le
désespoir de 1' « Introducteur ».
Mentionnons encore très brièvement, au sujet des questions sur lesquelles l'accord
n'est point fait parmi les coreligionnaires de l'auteur, la position prise par M. Moffatt :
il admet l'existence d'un Marc primitif, toujours pour des raisons de critique interne,
L'Évangile de Lue et les Actes auraient été composés vers la fin du premier siècle,
l'Évaugile entre 80-90, les Actes vers 100. Le médecin Luc. le compagnon de Paul,
en est l'auteur. Ajoutons encore que M. Moffatt s'abstient de tout jugement sur les
le massacre de l'an 64. A noter que l'auteur paraît se rallier à l'opinion qui fixe le
martyre de saint Pierre en 67. Une plus juste appréciation de la tradition mènerait
certes à des conclusions beaucoup plus fermes. Le cas présente beaucoup d'analogie
avec l'épitre aux Ephesiens Clément de Rome connaît la L' Pet ri et elle est fami-
:
lière à Polycarpe.
L'épître de Jude date probablement du commencement du second siècle : l'auteur
connaît des tendances libertaires qui menacent la foi et surtout les mœurs des chré-
tiens auxquels il dénonce avec indignation ces abus et menace les fauteurs
écrit; il
second siècle on en aurait fait le frère de Jacques, dans le but d'augmenter l'autorité
de récrit.
La seconde épître de Pierre qui dépend de la lettre de Jude ne pourrait être beau-
coup antérieure au milieu du second siècle. Ce serait l'écrit le plus récent du Nou-
veau Testament. Sans vouloir nier les difficultés très réelles que présente la question
de l'authenticité de cette lettre, il n'y a aucune nécessité à lui assigner une date si
récente. On peut fort bien placer la lettre de Jude et la 11^ Pétri à l'époque aposto-
lique.
C'est réellement pitié de voir le traitement que subit la belle lettre de Jacques,
RECENSIONS. 601
toute remplie de maximes évangéliques. L'épître serait non seulement postérieure aux
lettres de Paul dont elle aurait utilisé l'uneou l'autre, mais elle ne daterait même
pas du premier siècle. On ne connaîtrait rien de précis sur l'auteur et le v. i serait
peut-être interpolé. C'est à cette conclusion que tendent deux caractères internes, la
couleur religieiKe et le style, d'après lesquels il faudrait résoudre les questions litté-
raires relatives à cette épître.
Il ne reste plus qu'à parler des écrits johanniques dont M. Moffatt a partagé l'étude
entre trois chapitres différents. On saisira le motif de cette division quand on con-
naîtra ses vues sur le problème johannique. Cette fois M. Moffatt examine la tra-
dition.
Sa thèse fondamentale —
et, empressons-nous de le dire, radicalement faussse —
c'est que l'Apôtre Jean est mort martyr bien avant la destruction de la ville de Jéru-
salem en 70. Il donne trois arguments en faveur de cette opinion la prédiction du :
Christ rapportée, Marc 10. 39 et Matthieu 20. 23, le témoignage de Papias, les
calendriers anciens de différentes églises. Je renvoie pour la réfutation de ces argu
ments qui m'entraînerait trop loin au commentaire du P. Lagrange, à l'examen cri-
tique du témoignage de Papias par IM. Lepin {L'oingine du quatrième Évangile,
p. 109-123, et pour ce qui regarde la question des calendriers à l'article de Bernard
dans VIrish Church Quarterbj de Janv. 1908). Un témoignage du gnostique Héra-
cléon (chez Clément d'Alexandrie, Strom. 4, 9) qui mentionne parmi les non-martyrs
« Matthieu, Philippe, Thomas, Lévi et beaucoup d'autres et omet le nom de Jean -
l'Apôtre, ne conQrme pas le martyre palestinien de celui-ci. Car il est très probable
que le commentateur gnostique connaissait la tradition, le " martyre » de saint Jean
dans une chaudière d'Huile bouillante, et que, pour ce motif, il regarda l'Apôtre
comme un véritable martyr. Toujours est-il que d'un fragment isolé comme celui
que rapporte Clément d'Alexandrie sans en faire connaître le contexte, on ne peut
rien conclure. L'opinion sur le martyre palestinien de l'Apôtre Jean est donc dé-
pourvue d'arguments sérieux 'on a même déclaré que c'était un caprice anticritique) :
elle est de plus opposée à une tradition universelle, ancienne et qui se présente avec
vocabulaire que par les idées religieuses des deux écrits, qu'ils ne proviennent pas
du même auteur, mais du même cercle asiatique. M l'Apôtre ni le presbytre Jean
n'en seraient l'auteur. L'Evangile ne serait d'ailleurs pas d'une unité parfaite. Non
pas que Moffatt accepte la théorie des sources dans le quatrième Évangile, mais il
602 REVUE BIBLIQUE.
nymes, probablement d'origine juive, qui voulaient cacher leur nom derrière l'objet
de leur écrit ». Ce ne fut point un témoin oculaire. L'Évangile daterait d'un peu
avant 110. L'auteur de l'appendice, le même que l'éditeur de l'Évangile, serait diffé-
rent de l'auteur premier et aurait écrit très peu de temps après. Il est probable, mais
non certain, que cet éditeur serait aussi l'auteur de la L^ Jo., homélie écrite contre
l'hérésie gnostique de Cérinthe.
Ainsi se liquiderait, devant le tribunal de la critique interne, entre deux ou trois au-
teurs différents l'héritage traditionnel de l'Apôtre Jean. Mieux que dans aucune autre
question, la méthode de l'auteur se révèle ici '< Pour éclairer la route (dans l'obscur
:
J'ai voulu donner dans les lignes qui précèdent une' idée générale de l'importani
ouvrage de M. Moffatt. Si l'on a eu la patience de les lire jusqu'au bout, on sera ren-
seigné sur les mérites et les défauts de ce livre. Fruit d'un immense labeur joint à un
remarquable talent d'exposition, il contient une somme considérable de renseigne-
ments, une mise en œuvre de matériaux exlraordinairement abondants, mais beau-
coup de ses conclusions sont influencées par une appréciation injuste de la tradition
historique dans les premiers siècles. En d'autres mots, M. Moffatt est un informateur
précieux qu'il y aura presque toujours profit à consulter et qui a droit d'être en-
tendu mais il ne sera jamais un guide, ni même un conseiller.
:
Louvain. B. COPPIETERS.
Voici assurément le meilleur ouvrage que uous ayons sur l'idée que se faisait
saint Jérôme de l'inspiration biblique. M. S-hade n'a certes pas l'intention de déni-
grer le grand docteur, pourtant il ne le montre pas sous un jour bien favorable. C'est
que la logique et la cohésion n'étaient pas sou fort, et on risque toujours de l'amoin-
drir quand on met ses opinions eu systèmes. Ou n'en voit plus que les aspects dé-
cousus, sans pouvoir se rendre compte de la pénétration de ses vues, de l'intelligence
historique, de la connaissance toujours plus parfaite qu'il acquérait de la Bible et
C'est de 390 à 394 que s'accomplit cette crise décisive. M. Schade aurait augmenté
de beaucoup l'utilité de son livre en dressant à l'entrée le tableau cbronologique
des œuvres: ce serait comme un phare éclairan!; tout le reste. Le cadre est d'ail-
leurs excellent; il comprend l'essence de Tinspiration et ses propriétés, jusquou
:
elle s'étend et à quels livres. L'auteur a reconnu très franchement que depuis 390
Jérôme, qui n'admet plus l'autorité irréfragable des Septante, ne regarde plus des
lors comme canoniques les livres de l'Ancien Testament qui n'étaient pas compris
dans le canon hébraïque. On a essayé de nier ce fait en alléguant que Jérôme repro-
duisait la pensée de ses maîtres juifs plutôt que la sienne.
alors Notre auteur
donne coup de grâce à cette échappatoire de Franzelin et de Cornely en dressant
le
patience est condensé en quelques pages avec des divisions qui montrent bien la
portée des allusions du saint Docteur. M. Gaucher avait imaginé un autre subterfuge :
Jérôme aurait regardé ces livres comme inspirés sans les tenir pour canoniques.
Rien de plus contraire à la doctrine du maître qu'une pareille abstraction. Nous
catholiques ne pouvons suivre saint Jérôme dans son appréciation des livres cano-
niques ce n'est pas une raison pour la méconnaître.
:
Je regrette que M. Schade n'ait pas employé aussi strictement la méthode chro-
nologique quand il s'azlt de l'opinion de saint Jérôme sur l'exactitude rigoureuse
des écrivains sacrés. Il était cependant sur la voie lorsqu'il a reconnu que. à partir
de 394. Jérôme, rompant avec Origène, s'éloigna de plus en plus de l'exégèse alléjo-
rique. Or cette exégèse lui rendait les plus grands services, M. Schade Ta très bien
vu, et cependant il ne s'est pas demandé si. à défaut de ce secours, Jérôme n'avait
pas été dans l'embarras et n'avait pas cherché à en sortir par une autre voie.
En elfet. l'exégèse allégorique offrait des ressources merveilleuses pour résoudre
certaines difficultés. Saint Jérôme, dit notre auteur, la préferait au sens littéral quand
il jugeait le sens historique physiquement impossible, quand la Bible n'eut pas été édi-
fiante au sens littéral 1 ou quand ses commandements eussent été impossibles 2;.
,
ou certaines difflcultés insolubles (3). Il est clair qu'à cette époque saint Jérôme se
débarrassait assez cavalièrement, trop même, des difficultés du sens littéral. Il ap-
prit à l'estimer davantase et renonça à des solutions par trop aisées. Les difficultés
ne disparaissaient pas toutes pour cela; d'autres se présentèrent à son esprit à me-
sure qu'il connut mieux la bible hébraïque et le rsouveau Testament. Est-il vraisem-
blable qu'il n'ait pas cherché un moyen de les résoudre ?
M. Schade nous afûrme qu'en tout cas il n'a jamais abandonné la thèse tradition-
nelle de l'inerrance de l'Écriture. Je le crois aussi. C'eût été une débâcle-, les difli-
cultés auraient disparu, mais que serait devenue la dignité de l'Ecriture? Certes
saint Jérôme n'en est pas là.La question, telle que la pose M. Schade. est mal
posée. Elle se posait plutôt pour saint Jérôme comme pour nous Etant donnée la :
véracité de l'Écriture, comment expliquer certains faits, révélés par une étude ap-
profondie de cette Écriture? ?»'est-il pas évident que les Apôtres et les Évangélistes
n'ont pas cité l'Ancien Testament avec une exactitude ponctuelle? N'est-il pas évi-
dent que les auteurs sacrés s'expriment d'une façon différente sur certains faits qui
ne peuvent s'être passés de deux façons? Ae trouve-t-on pas dans toutes leurs œuvres
des imperfections dont une certaine manière d'entendre l'inspiration eût dû les
préserver? Que saint Jérôme se soit préoccupé de ces cas, M. Schade ne songe pas
à le nier, mais il pense qu'ils lui ont paru suffisamment résolus par la distinction
entre le sens et les mots. Jérôme aurait soutenu l'inspiration du sens, non l'Inspi-
ration verbale.
Ce sont bien en effet les termes approximatifs dont il s'est souvent servi, mais
cette distinction ne pénètre pas suffisamment dans sa pensée. D'abord saint Jérôme
a souvent insisté sur l'importance des mots, quand il s'agit d'une Écriture inspi-
rée (1), et quand il parle du sens, il faut voir ce qu'il entendait par là au moment
de sa vie supposons arrivé. M. Schade consent à ce que saint Jérôme
où nous le
ait admis l'inspiration verbale si l'on entend par là l'élévation des facultés humai- :
nes et la conduite surnaturelle dans le choix des mots, par opposition à une dictée
surnaturelle des mots (2). Pense-l-il donc que d'après Jérôme il y avait dictée sur-
naturelle des pensées, au sens mécanique où il le prend quand il s'agit de l'inspi-
ration verbale? Il affirme il est vrai que saint Jérôme insiste sur l'identité de la ré"
vélation et de l'inspiration (3). Pom-quoi aucune citation, sur un point aussi grave,
dans un ouvrage d'ailleurs si bien établi sur les textes? Et si Jérôme a dit cela quel-
que part, est-il demeuré fixé sur ce point? Ce que Jérôme a rejeté avec énergie quand
il a protesté qu'il s'attachait au sens de l'Ecriture, non aux mots, c'est l'exégèse tar-
gumique qui en venait à préférer la traduction littérale des mots à l'interprétation
du sens. îsulle part il n'a abordé la question soulevée par Franzelin d'une inspira-
tion réduite aux pensées, conçue comme une suggestion expresse des pensées qui
n'aurait eu aucune iniluence sur les mots. Il a toujours reconnu que les mots, fai-
parle du sens, il ne l'oppose point aux mots dans le sens antipsychologique de Franze-
lin ; il l'entend d'une façon assez large que M. Schade n'a pas voulu constater. En-
core notre auteur ne se sent-il pas sur un terrain bien solide, car il conclut que si
saintJérôme avait pu soupçonner que les exemples choisis par lui seraient un jour
étudiés au point de vue de l'inerrance de la Bible, il les aurait choisis avec plus de
circonspection (4; !
Ce n'est pas cependant la circonspection qui lui manque, et M. Schade qui a re-
connu en lui un sens politique très avisé (5), aurait dû s'apercevoir qu'en se servant
de l'antithèse du sens et des mots, il en suggère plus qu'il n'en dit. Les exemples
sont choisis avec soin et parmi les cas vraiment difficiles. Voici quelques-uns de ces
cas. C'est d'abord un passagede saint Matthieu : Tune impletum est quod scriptumest
per Jeretniam prop/ietam dicentem : et acceperunt Ir'Kjinla aryenteos... (Mt. 27, 9).
Jérôme le glose ainsi Hoc in Jeremia penitus non invenitur, sed in Zacharia, aliis
:
multo verbis ac toto ordine discrepante. Il ne peut pas ignorer que l'ordre des mots
est tellement différent dans Zacharie que le sens n'est pas le même, puisque, dans
cas où subtilité étrangère à la pensée de Jérôme; c'est encore du Franzelin qui admet l'ins-
>i :
ZacharieCll, 12 s.), c'est le prophète qui jette l'argent au potier. Aussi conclut-il
que l'Apôtre ne s'accorde ni avec les Septante ni avec l'hébreu Accusent Apofttolum :
falsUalis, quod nec cum Hebraico, nec cum Septuaginta congrunt translatoribns :
et quod his mnjus est, erret in nomine, pro Zacharia quippe Jeremiam posuit.
Jérôme s'y refuse cependant, et
Ainsi tout conduit à accuser l'évaniréliste d'erreur.
avec énergie Sed absit hoc de pedisscquo Christi dicrre. Quelle est donc la raison
:
qui lui permet de rejeter la conclusion qu'il avait si bien prép arée? C'est qu'il n'y
aurait erreur que si saint Matthieu avait entendu affirmer l'exactitude de la citation
et du nom de l'auteur. Or, ce n'était pas le but qu'il se proposait cui curae fuit non :
verba et si/llabas ancupari, sed scntentias doginatum pono'c. D'un côté les sens dog-
matiques, de l'autre les mots et les syllabes. Evidemment il y a un milieu. Jérôme ne
s'est pas soucié de préciser, il a suffisamment donné à entendre que l'inerrance n'est
pas synonyme de ponctualité. C'est de la même façon que ïhéophylacte dira plus
tard à propos de la servante ou des servantes de Caïphe
« Matthieu dit que c'est :
une autre, Marc dit que c'est la même, mais cela nous importe peu quant à la vérité
de l'Évangile; est-ce que les évangélistes seraient en désaccord sur un point impor-
tant et qui touche au salut (1)? »
Autre exemple de saint Jérôme. Saint Jean cite videbunl in quem compunxerunt, :
ce que les Septante avaient traduit Et adspicient adme^pro his quae dluserunt, sive
:
s'ily avait petite, au lieu de peu importante. Le sens même est contraire, sensus
contrarius est, ou plutôt contradictoire, e regione sit posilum. Quelques modernes
ont éliminé cette difficulté en notant que la citation est placée dans la bouche des
scribes, qui ont pu se tromper. Cette solution n'avait pas échappé à Jérôme, qui l'a
proposée ailleurs-, mais aujourd'hui il estime que ces détails ne nuisent pas à la vé-
racité de l'évangéliste. Haecreplico non ut erungelistas arguam falsitatis {hoc quippe
impiorum est, Celsi, Porp?iyrii, Julicuii), sed ul reprehcnsores meos arfjuam imperitiae ;
et impetrem ab eis venlam, ut concédant mihi, insimplicl epistola,quod in Sci'ipfuris
sanctis, velint, nolint, apostolis concessuri sunt. Jene sais comment Jérôme aurait
pu exprimer plus fortement que l'Écriture n'est pas exempte de certaines imperfec-
tions, inséparables de tout travail humain. Et il est sur de son affaire, velint nolint.
Suivent d'autres exemples saint Marc (1, 2) cite Isaïe et commence par un texte qui
:
appartient à le même saint Marc (2, 2o), David est entré dans la
Malachie; dans
maison de Dieu sous le pontife Abiathar, tandis que, au livre des Rois, nous ne lisons
pas Abiathar, mais Achimelech. Et après d'autres exemples encore ex quibus uni- :
de mots, à moins qu'on ne dise avec certains harmonisateurs que le même grand
prêtre portait les deux noms; ici la difTérence des mots conduit nécessairement à la
distinction des personnes ; l'histoire est rapportée telle qu'elle s'est passée ou attri-
buée à une autre personne, et de même la citation. Mais cela est tout à fait indifférent
filio Seor : nec sepultus est in Sychem, sed in Hehron... En présence de cette diffi-
culté, iVIelchior Cano n"a pas hésité à dire que saint Etienne s'était trompé, mais que
saint Luc avait été l'historien le plus véridique en reproduisant tel quel le discours
avec ses erreurs. C'est une manière de comprendre l'inspiration. Ce n'est pas celle de
saint Jérôme, et sans se prononcer trop ouvertement, il en suggère une autre : différa
solutionein et istins quaestiunculae, ut obtrectalores mei quaerant, et intelligant,
non xerba in Scriptuns co)isiderinula, sed .^ensvs. Encore une formule émolliente,
car il ne s'agit pas de mots, mais de faits historiques. Si donc il faut s'attacher au
sens de l'Écriture, non aux mots, les sens ne peuvent être ici que l'enseignement
doctrinal; les mots sont les exemples historiques allégués, dont il n'importe absolu-
ment pas, pour la conclusion de saint Etienne, qu'ils se soient passés comme il le dit,
ou comme on le lit dans la Genèse.
En présence d'une pareille série d'exemples —
et on ne les a pas tous cités, ii faut —
beaucoup de candeur pour soutenir que saint Jérôme aurait été plus circonspect, s'il
avait pu se douter qu'on le prendrait en mauvaise part. Il avait une idée qu'il a incul-
quée fortement, en faisant appel à toutes les ressources de son érudition. Il s'est si
bien douté qu'on pourrait se servir de ces exemples pour attaquer la véracité de
l'Écriture, qu'il a protesté d'avance contre un pareil travestissement de sa pensée.
Il était embarrassé, et il le laisse voir, car les imperfections qu'il admet sont bien
une certaine manière d'erreur, ce qu'où nommerait aujourd'hui une erreur maté-
rielle, mais le mot d'erreur lui répugnant, il en a laissé la responsabilité à d'autres.
C'était en 392, trois ans avant la lettre à Pammachius, au moment fixé par M. Schade
pour l'évolution de sa pensée Sunt aulem qui asserant, in omnibus poene testimo-
:
niis quae de leteri testamento sumuutur, istius iiiodi esse errorem, ut aut ordo mute-
tur, aut verba, et interditm sensus quoque ipse diversus sit, vel apostolis, vel evan-
gelistis non ex librocai-pentibus teslimonia, sed memoriae credentibns, quae nonnunquam
fallitur (1).
Puisque saint Jérôme n'a pas voulu prendre celte opinion à son compte, il serait
injuste de la lui attribuer, mais il est visible qu'il n'en était point choqué, car il ne
s'iigissait pas d'attaquer la véracité des Écritures mais d'y reconnaître une certaine
manière d'erreur. Aussi M. Schade exagère-t il beaucoup que Jérôme
lorsqu'il prétend
a mis cette opinion en opposition très crue avec la Jérôme entend
sienue propre (2).
plutôt donner par là un supplément d'information qui pût avoir son utilité pour qui
ne trouverait pas sa propre explication satisfaisante (3'. C'est ainsi qu'après avoir
suggéré que les Apôtres se servaient plus volontiers des Septante comme plus
connus, il ajoute : licet plerique tradant Lucam Evangelistcun, ut proselytum, he-
braeas litleras ignorasse (4).
Si l'oa veut mesurer la distance qu'il y a entre l'opinion de saint Jérôme et une
autre qui paraît bien, elle, avoir confondu inspiration et révélation, qu'on compare à
cette expression si mesurée celle de IMelchior Cano : Impium est autem, quod Spi-
ritns sancti consiUo scripsit Lucas, id hebraicarwn litlfrarum itpiorationi tribucre (1).
Et, encore une fois, on pensera si l'on veut que saint Jérôme
trompé sur ce s'est
point comme il s'est trompé sur les deutéro-canoniques, mais puisque M. Scliade a
si bien pénétré sa pensée sur le second point, il me pardonnera de lui avoir exposé
quelques difficultés sur la manière dont il a entendu le premier. Je pense que, cette
fois encore, tout le mal vient de la distinction de Franzelin. Ce n'est pas avec cette
je crois qu'il faut dire que c'est une des plus admirables performances de l'esprit
humain. Qu'on soit indulgent pour l'incohésion d'un système qui n'a jamais été bien
fixé dans l'esprit du saint Docteur; il est si beau dans le détail, et il a toujours été
épris de la vérité si passionnément.... Mais peut-être M. Schade répondra-t-il en
manière d'écho : trop passionnément!
Jérusalem. Er. M.-J. LagranGE.
Bibelatlas, m W
Haupt imd- 28 Nehenkartcn, par M. le prof. D"" H. Guthe, avec
une table alphabétique des noms anciens et modernes. Petit in-folio. Wagner et
comme sur les voyages de S. Paul et le morcellement des provinces dans l'empire ro-
main-, c'est, sans contredit, le cas de M. G. Il faut — troisième et plus technique
exigence — qu'un tel savant soit doublé d'un spécialiste cartographe; c'est eucore le
cas. Enfin il est indispensable que les cartes où sont traduites les informations docu-
mentaires harmonisées avec les conditions et le relief du sol, soient fixées avec clarté
et autant que possible avec élégance par un graveur détalent; puisque V Atlas sort
des ateliers de Wagner et Debes à Leipzig, on s'attend bien à des cartes claires, d'un
dessin ferme et soyeux, ou chaque détail toponymique paraît s'offrir de lui-même
sans exiger de recherche parmi l'expression conventionnelle du sol et malgré la com-
plication des teintes qui concrétisent chaque situation historique. La plupart de ces
cartes sont de vrais chefs-d'œuvre de lucidité et de goût toutes, sans exception ni :
dont son Atlas doit dès aujourd'hui devenir le Manuel lui en sera reconnaissant. Ses
principales phases topographiques font l'objet de six cartons limpides; quatre autres
à plus petite échelle, mais d'un dessin géographique très poussé encore, la font
La désignation
(1) muraille large >. qui revient dans 3 plans, repose sur une coquille du
<.
texte hébreu dans Néh. 3, 8 (cf. RB., I90l, p. G2 et i>7) et sur une méprise archéologique de
M. Schick dont la preuve sera faite quelque jour. Ce niur-fantônie n'a pas plusde réalité archéo-
logique ni d'autlienticité documentaire solide que la • tour Méah (cf. RB., 1899, p. 582 ss.;,
que .M. G. eonserve par tradition. .le ne comprends pas la rubrique Coteau des Jébuséens > sur
la rampe sud-est de la colline occidentale; où eu lit-on quelque indication dans la Bible? et les
fouilles très soigneuses qui sont pratiquées précisément en celte région depuis de longues
années par les PP. Assomptionistes n'i>nt pas livré un indice archéologique de celte occupation
.lébuseenne. Les diagrammes de la Revue (189."», p. 39 1904. p. .Vj) assignent à la porte de la :
Vallée et à la porte Sterquiline des situations un peu autres que les plans de M. G. Nuance ana-
logue pour le tracé du " second mur" à l'orient du Saint-Sépulcre (RB., 190-2, p. 33). Il ne faut
plus de point d'interrogation après Bethesda localisée;» la piscine de Sainte-.'Vnne et si M. Couder
n'était pas mort, il protesterait une fois de plus contre l'étiquette qui fait figurer son nom à
côté d'un Calvaire excentrique, rival de celui qu'on met sous le patronage de Gordon au Bézétha.
si l'on tenait a présenter les quartiers neufs de la ville actuelle, il eut fallu refondre ce carton
qui est loin d'être à jour.
RECENSIOiNS. G09
cartons:la Judée et Jérusalem actuelles. EnOn, les 9 feuilles qui groupent alphabé-
Il ne se peut rien de plus méthodique, de plus prudent et de mieux informé que les
diagrammes où s'expriment renchevêtreraeiit et les vicissitudes des principautés pa-
lestiniennes dans la période qui va des Hasmonéens à la réduction en provinces ro-
maines. La première pénétration Israélite et les groupements ethnographiques ne
sont pas moins heureusement traduits. Avec de telles cartes sous les yeux, ceux qui
n'ont pas encore pâli des années durant sur la littérature si souvent embrouillée de
Josèphe et sur des livres bibliques d'interprétation ardue, se feront presque sans elFort
la notion la plus correcte à laquelle ou puisse aujourd'hui prétendre. Les spécialistes
pousseront naturellement plus à fond les déterminations géographiques d'après les
culté est fameuse (2), ou dans le détail géographique de régions jusqu'ici insuffi-
samment relevées (3). Quand il existera quelque part une documentation technique
plus siire, M. le prof. Guthe sera le premier à la mettre en œuvre. Pour longtemps
néanmoins, et à tous points de vue, son magnifique Atlas fie la Bible demeurera le
(•1) Voir par exemple dans le ir^ précédent de la Revue le diagramme où le P. Diiurme a con-
crétisé ses études « sur les pays bibliques et l'AssjTie •.
(2; pour ne citer que deux exemples au hasard dans la carte 1, les noms Fïrân et en-Nuwc-
Iji'a danà lu péninsule sinaitique sont certainement moins (amiliers dans l'articulation courante
que Feirâii et en-Noiu'ih^a.
(3) C'est ainsi qu'on aura quelque peine à suivre le distingué cartographe quand il suggère de
reculer la rive du golfe élanitique d'envirim 40 kilomètres au nord jusque vers 'Ain Ghoudinn
où il localise Asion-iiabcr. il se peut bien que le nom moderne conserve l'écho du vocable bibli-
(|ue, mais à la suite d'un de ces déplacements l'rciiuents dans la toponymie orientale. Si la côte
avait reculé dans de telles proportions depuis l'époque de la migration Israélite, les traces en
seraient moins oblitérées géologiquement et on n'a Jamais signalé de vestiges importants à
Ghoudiàn. —
Depuis unedou/.aine d'années, la iteoue rappelle périodiquement, mais en vain,
l'altenlicjn des cartographes sur le site très intéressant de Fe/i«n —
une vraie ciel" pour une partie
de l'Itinéraire des Hébreux. L'Atlas nouveau l'ignore toujours. Il a pouriant accueilli des déter-
minations géographiques moins précises encore —
pour n'en pas médire davantage tel, pour :
produire un seul cas, ce Oumui Adjoueh (Umm 'Vdschwa) inscrit en {)lusieurs cartes à 40 kilom.
'
environ à l'O. 0. N. de Bersabee. .l'y suis allé en \ petites heures de marche de Bersabée, en
lévrier 1004, et, si j'en crois ma feuille d'itinéraire, il faudrait fixer (lumm 'Adjoueh à 18-ï20 kilom.
au S. S. O. de Bersabée. Combien d'ailleurs il serait désirable que tout le bassin de Bersabée et
l'écheveau de vallées du >égeb septentrional fussent relevés par un ingénieur topographe...
II. Utrura traditionis suffragio satis fulciri censenda sit sententia qiiae tenet Mat-
thaeum et ceteros EvangeUstas in scribeudo praecessisse. et pi imum Evangeiium pa-
trie sermone a ludaeis palaestinensibus tune usitato quibus opus illud erat directum.
conscripsisse?
Resp. : Affirmative ad utramque partem.
III. Utrum redactio huius origlnalis textus differri possit ultra tempus eversionis
Ilierusalem. ita ut vaticiuia quae de eadem eversione ibi Jeguntur, scripta fueriat
post eventum: aut. quod allegari solet Irenaei testimonium 'Adrers. haçrcs., lib.
III. cap. I, n. 2i. incertae et controversae interpretatioriis. tanti ponderis sit existi-
Resp. : Affirmative.
VI. Utrum ex eo quod auctor primi Evangelii scopum prosequitur praecipue dog-
raaticum, et apologeticum, demonstrandi nempe ludaeis lesum esse Messiam a pro-
phetis praenuntiatum et e davidica stirpe progenitum. et quod insuper in disponen-
BULLETIN. 611
dis factis et dictis qnae enarrat et refert, non semper ordinem chronologicum, te-
net, deduci iode liceat ea noQ esse ut vera recipienda aut etiam affirmari possit ;
point encore représentés, même dans les citations des Pères. La recension du papvrus
(iv- siècle) se tenait particulièrement près du grec. On remarquera le texte 6. 2 :
[iident]es autem filii [Dî fil ta s' hùmimun [quia sjj~>:ciosae siint. 2. Exode irrec 31.
13. 14 et 32, 7. 8 i^commencement du ni*' siècle;. Le texte est trop petit pour être
classé; cependant M. Hunt a noté des accords avec AM contre B. 3. Exode grec
40, 2G-32 (me siècle;. Ln accord avec BG contre AFM, mais deux accords avec
AFGM contre B. L'ne variante n'était connue que par un ms. du moyen âge: une
autre est nouvelle. 4. Tobie 'grec) 2, 2. 3. 4. 8. L'éditeur rappelle juentre la re-
cension de Tobie représentée par ms. Vatlcftiuis et Al^xandrinas et celle du Cod.
les
pour nous chrétiens? (3). Il répond que la Bible est pour nous un organe de la Révé-
lation, qu'elle est inspirée et par conséquent véridique. L'auteur s'étend en passant
sur les évangiles, et montre le cas que l'Église a toujours fait de la Bible. La préoc-
cupation dominante de l'auteur paraît avoir été de montrer combien respectable e
divine est la sainte Écriture, mais aussi de répondre aux objections de la critique
Pour cela, il n'hésite pas à se placer sur le terrain choisi par le R. P. de
historique.
llummelauer dans sa célèbre brochure. Exerjetisches ziir luspiratioiisfragc, dont il
s'approprie les principaux canons sur le discernement de ce qui est vraiment enseigné
dans la Bible comme histoire. On notera aussi les ressources qu'offre le R. P. Ca-
pistran au laïc instruit qui serait embarrassé des miracles de l'Exode : « Ici. comme
dans beaucoup d'autres endroits, il faut tout d'abord tenir compte de la manière dont
s'exprime un Oriental. Souvent il met en relief l'action de Dieu, sans nommer les
L'auteur semble aussi parfaitement d'accord p. 188 avec « les nouveaux exégètes
qui regardent certaines parties de la Genèse, des Juges et des Rois comme un préci-
de traditions populaires, le livre de Ruth comme une idylle, Jonas comme
pité littéraire
un midrach, c'est-à-dire comme un récit très libre pour mettre en valeur une vérité
religieuse, Job comme un dialogue de philosophie religieuse, Judith comme une
légende fortement tissée d'histoire {4] ».
montre ta puissance, et que tablette écrite sorte. » M. Hunt traduit : let this prayer be accom-
la
plislied. Mais ne s'agit-il pas plutôt d'un véritable oracle mécanique? On tirait la tablette ou bien
rien ne sortait; cf. I Sam. 14, 41 Sept.).
On 3 cite le commencement de l'évangile selon s. Jean en s'arrctant après ô Y^ïo^ev. C'est
(-2)
la coupure adoptée par la Vulgate, et déjà attestée pour l'Egypte par s. Arabroise Enar. in :
PS. 36 Alexandrini quidem et Aegyptii legicnt »... factum est niliil quod faclum est », el inter-
:
On ne devrait pas s'en tenir au genre littéraire pour discerner ce qu'un livre bi-
blique contient vraiment d'histoire : « On tiendra avant tout pour historique un récit,
quand son contenu a passé d'une façon durable comme un t'ait dans la vie de la foi
do l'Église, ou quaod il est notablement connexe avec l'histoire du salut » (p. 188).
neuf auteurs, selon qu'il s'agit des Iraniens, .luifs, Hébreux, etc. Parmi les collabo-
rateurs catholiques, Ms'" Casartelli, le R. P. Thurstou, S. J. (sur la doctrine de
l'Église romaine), M. Turmel (Concordat). L'article qui touche de plus près à la Bible
bien naturel de se sentir en union d'idées avec ceux qui s'occupent du N. T., M. Gre-
gory leur adresse un appel très chaleureux et très cordial, moitié exposant ses vues,
moitié faisant appel à leurs conseils, mentionnant à l'occasion ceux qu'il a déjà reçus.
Son intention est donc de faire une édition critique, en donnant le texte de son
choix, c'est-à-dire celui qu'il regarde comme le plus rapproché du texte original.
Plusieurs professeurs opinaient pour l'édition d'un manuscrit, Sinaiticus, Vatlcanus,
ou mèmç.Alexandrlnns. M. Gregory objecte qu'il aurait fallu quand même le nettoyer
de ses fautes; on faisait donc la part à l'action de l'éditeur. Surtout, quand il s'agit
d'un texte comme celui du N. T., où nous avons tant de ressources pour réaliser un
texte meilleur que celui d'un manuscrit quelconque, c'est un devoir de faire tous les
effortspour y arriver. La majorité se rendra sans doute à cette raison, sinon ceux
— très rares en somme —
qui peuvent se former une opinion, du moins ce nombre
très considérable de professeurs et d'étudiants, ou d'autres, qui ne seront pas fâchés
d'avoir l'avis d'une personne aussi compétente que M. Gregory. D'autant que ceux
qui peuvent se faire une opinion en auront toute facilité par l'apparat qui accompa-
gnera Cet apparat sera complet. Par où l'éditeur n'entend pas qu'il allon-
le texte.
gera à propos de leçons assurées la liste des mss. Disons bien vite avec lui que cet
énorme travail n'aurait pas de but. Toute leçon divergente doit être mentionnée,
mais, pour les leçons certaines, c'est assez de montrer qu'elles le sont par des té-
moignages suffisants.
Contrairement à l'avis de quelques savants, Gregory incline à laisser de côté daus
(1 Hncyclopaedia of Religion aad Ethics, editetl by James Hastings... wiili the assistance of
.rohii A. Sei.bie; volume III : Burial-Confessions; in-4» de xxi-'JOl pp. à deux colonnes. Edinburgh,
Clark, 1910.
i2) Vorschlage fur eine krilische Ausi/abe des r/riechisc/ien Neuen Testaments von Caspar
liené GiiEcoiiY 8" de iv-d2 pp. Leipzig, Hinriclis, 1911.
;
614 RE\X'E BIBLIQUE.
Tapparat toutes les éditions imprimées. Quoi, même le tcxtus rcccptus? Lui-même.
Mais il y aura unsigle pour représenter ce qu'il est en réalité le texte presque officiel :
de l'église byzantine. 11 figurera comme valeur traditionnelle, non comme édition. Une
autre question est de savoir si les autorités seront rangées par ordre alphabétique et
numéral ou par groupes. La question est cette fois posée plutôt que résolue. On sent
bien que l'éditeur n'est pas bien sûr de pouvoir discerner des groupes, surtout de
leur tracer des limites. Peut-être pourrait-il adopter une solution mixte; se réserver
d'indiquer les groupes quand ils sont nettement déterminés; dans les autres cas mettre
tous les témoignages à la suite. Il sera en tout cas nécessaire, comme l'éditeur le dit.
de noter à chaque page
témoins principaux qui peuvent être entendus. D'une façon
les
les mœurs sont moins arrêtées, mais enfin ces phénomènes ne regardent pas l'éta-
blissement d'un texte meilleur. Nous félicitons aussi M. Gregory de conserver Tordre
traditionnel des livres; cela n'empêchera pas les critiques de procéder à leurs théories;
eux-mêmes ne seront pas fâchés de n'être pas dérangés dans leurs habitudes.
Que dire de la langue de l'introduction?
Si M. Gregory ne se décide pas pour le latin, nous plaidons énergiquement pour
qu'il soit fait une part au français, langue demeurée universelle. Le système de
Eu attendant ces grandes éditions, celle de M. Souter pourra rendre quelques ser-
vices (li. L'éditeur déclare que son texte semble avoir servi de base à la revision an-
glaise de 1881, et qu'il est fort usité à Oxford. Les personnes qui n'habitent ni cette
même l'Angleterre, auraient aimé quelque chose de plus précis. Car le texte
ville ni
pagné d'un apparat critique. La liste des témoins, rédigée en partie d'après Gregory
et von Soden, Malheureusement l'éditeur ne vise en aucune
est tout à fait respectable.
façon à être complet. Des passades considérables des évangiles ne présentent aucune
variante (1\ et, quand les variantes sont indiquées, toutes les autorités ne sont pas
mentionnées, même dans des cas graves 2;. Cependant il faut savoir gre à M. Souter
d'avoir mis à la portée des étudiants un grand nombre d'indications qui n'avaient
pas encore été extraites des éditions spéciales pom* l'usage de tous. Comme édition
ce volume donnant pour un prix si modique
est très soigné; en le {o les presses
d'Oxford ont rendu un service signalé aux petites bourses.
Les Actes des Apôtres auraient été composés au début de Tan 60,. en tout cas avant
la mori de s. Paul.
Assurément tout ce qu'écrit M. HarnaL-k mérite la plus grande attention, et les ca-
tholiques ne peuvent qu'apprécier le com-ours qu'il prête aux thèses traditionnelles.
Mais si nous devons nous mettre en garde contre l'engouement des thèses radicales,
nous ne sommes pas non plus obligés de suivre un savant protestant, quand sa reac-
tion nous paraît sur certains points légèrement outrée.
Hâtons-nous de dire que cette restriction ne s'applique pas à la vigoureuse dé-
monstration fournie par M. Harnack de l'unité des Actes. Les Wù'stiicke, où l'auteur
prend la parole comme du livre émanent du même au-
l'un des acteurs, et le reste
du troisième évangile. C'est Luc, le médecin. Aux
teur, et cet auteur est aussi celui
lins de non-recevoir très vagues de MM. P. W. Schmidt et Clemen. le maître de
Berlin oppose une nouvelle mise en lumière de l'unité. Il réimprime les Wlrstiicke
en soulignant les termes ou les constructions qu'on ne retrouve guère que dans le
reste du livre ou dans le troisième évangile. On touche ainsi du doigt que ces mor-
ceaux sont pour ainsi dire une concentration de la manière de Luc. Cet argument
positif est confirmé par une contre-épreuve. Dans le troisième évangile, les passages
empruntés au recueil de discours n'ont plus du tout la frappe de Luc. Il respectait
donc le style de ses sources. Par ailleurs les Mlrgd'tcki' ont le caractère d'un écrit
original; ce n'est donc point une source pour l'auteur des Actes; c'est plutôt le type
même de son style. Ce point acquis, il restait à répondre aux critiques protestants
qui refusent opiniâtrement d'accepter la valeur historique des Actes et aussi leur
composition par un témoin tel que Luc, compagnon de Paul. Ils allèguent la manière
dont les Actes esquissent la situation de Paul par rapport au Judaïsme, manière qu'on
juge inconciliable avecle dessin tracé d'après les épîtres paulines. M. Harnack aborde
cet esprit pratique qui l'a conduit à une solution habilement ménagée, à une évolu-
Par exemple Me. 4. 1-8; 5. :i-3-2. Des pages entiOres du quatricme évangile.
(1)
Par exemple Me. 1, l.
(2)
point, c'est que dans la réalité on en était encore là. Luc n'en a pas dit plus, parce
qu'alors il n'y avait rien de plus à dire. — L'argument
nouveau nos exégètes n'est pas ;
Rome, ou il est à Rome dans une autre situation. Car alors, pourquoi ne pas nous dire
ce qu'il en est? Il demeure donc que Luc, et très volontairement, n'a pas dit tout ce
qu'il savait... Quoi qu'en pense Harnack, il avait une très bonne raison de garder ici
cette réserve, s'il se proposait d'écrire un troisième livre, le second étant assez étendu
d'après la coutume des libraires anciens. La dernière phrase des Actes est exacte-
ment sur le même modèle que la dernière phrase de l'évangile; elle pouvait donc
être, elle aussi, une pierre d'attente. Luc se ménageait ainsi de revenir à Pierre on à
tel autre acteur des origines, pour achever enfin le récit des destinées de s. Paul. Puis-
que le procès de Paul le préoccupait tellement, est-il naturel qu'il ait pris la plume
avant de savoir comment tout s'était terminé? Il est plutôt très naturel, si le procès
n'a abouti qu'à un non-lieu, que cet épisode ait été raconté en passant au début d'un
troisième livre. >'e peut-on pas opiner aussi que, si la conclusion des Actes est si
peu dramatique, c'est que le premier procès de Paul avait fini, comme on dirait, en
queue de poisson? Qu'il ait été repris plus tard pour aboutir au martyre de l'Apôtre,
c'étaitdans un autre horizon, surtout si l'on admet, avec les exégètes conservateurs,
que Paul, auteur des pastorales, est revenu en Asie. Ainsi, dans l'opinion conserva-
trice sur la carrière de Paul, la couleur terne du dernier verset des Actes répondrait
bien à la réalité.
iM. Harnack ne nous paraît donc pas avoir réussi à assigner une date précise à la
composition des Actes. Il a, certes, raille fois raison d'établir combien ce livre est ancien,
mais nous ne prétendons pas non plus qu'il soit postérieur à l'an 70. Il n'est pour-
tant pas évident que les raisons alléguées par l'auteur soient toutes irréprochables..
Il prouve que l'ouvrage est très ancien parce que sa christologie est tellement an-
cienne qu'il n'en est pas de plus ancienne. L'argument suppose que cette christologie
appartient en propre à Luc. Pourtant II. ajoute que Luc a pu mettre dans le discours
de Paul (20, 28) des réminiscences de la théologie pauUnienne; cela est dit deux fois
cience d'historien, qu'il n'ait lien dit du malheur qui menaçait les Juifs, même s'il a
écritpeu avant la ruine du Temple. Les conservateurs accepteront-ils l'argument de
Harnack, que si Luc avait connu ce fait, il n'aurait pas manqué de forger une pré-
diction qui l'annonçât?
Après cela, il est assez étonnant que l'auteur soutienne que le discours eschatolo-
gique du troisième évangile n'a pas été nuancé d'après les faits du siège. Nous ne
soutenons pas non plus qu'il s'agit d'une prophétie post ernifum. La prophétie exis-
tait certainement. Mais on dirait bien que Luc l'a revêtue plus que Me. et ^Mt. de ses
modalités historiques parce que la perspective se rapprochait.
Pour le dire nous parait peu probable que Luc ait écrit les Actes
avec précision, il
en l'an 62, parce que nous pensons, comme Harnack, qu'il s'est servi de l'évangile
de s. Marc, et que s. Marc, d'après s. Irénée. a écrit après la mort de s. Pierre et de
s. Paul. Quoique H. laisse ici un certain jeu à l'affirmation, en supposant que Luc a
pu consulter une première rédaction de Marc, il admet très bien que sa thèse serait
caduque si Marc n'avait écrit qu'après la mort de Paul. Aussi n'hésite-t-il pas à suivre
dom Chapman dans son étrange exégèse de s. Irénée (1).
Nous pensons, avec la Commission biblique, que l'autorité d'Irénée n'est pas irré-
fragable, mais il faut du moins le lire sans trop le torturer. Parce que le but d'I-
rénée est en effet de prouver que l'évangile des disciples est bien celui des apôtres,
il lui aurait été interdit de fixer approximativement la date des évangiles, et il n'au-
rait pas eu le droit d'établir le synchronisme : composition de l'Évangile de Matthieu
pendant que Pierre et Paul fondaient l'église romaine, sous prétexte qu'il n'y a pas
de connexion entre les faits. Je retire le mot de torture; mais les entraves sont bien
une gêne, et ce sont vraiment des entraves que les gloses de dom Chapman, insérées
dans le texte d'Irénée. On les donne en note en anglais, pour ne pas s'exposer à
trahir la pensée de l'auteur en la traduisant ,2).
Et cependant le savant bénédictin concède qu'Irénée a bien voulu fixer une date en
parlant de Jean, « Car ï-zi-x s'entend clairement du temps < p. .568 . Or cet ï-i\-:y.
est en étroit parallélisme avec [j.i-.i. Si l'on veut attaquer Irénée. mieux vaut
dire avec Blass qu'il ne savait rien d'authentique, et qu'il a seulement regardé comme
accomplie promesse de saint Pierre
la (II Pet. 1, 15). A cela dom Chapman répond
que la seconde épître de saint Pierre n'était apparemment pas du tout familière à
saint Irénée 'p. 364}, réponse d'une saveur moins conservatrice assurément que la
rait-il eue s'il avait pu consulter son Maître? Harnack est obligé de supposer que
Marc s'était éloigné de Pierre. Que ne s'en rapprochait-il Encore Harnack est-il I
contraint par cette supposition à rejeter la tradition si ferme qui assigne Rome
The journal of theological Studies, 19D5, p. ."iGa ss.
(1)
Matthew araong tlie Hebrews in their o\\n language publislied a writing also of the Gos-
(2)
pel [besides preachhiij it]. Peter and Paul preaching tlie (iospel [-not to Jews btil] atRome [ifithoitt
writing it down], and founding tlie Cliurch there [n'hose testimony I shall give presently. viz.
III 3]. But [allhough tliey dicd williout liaving ivritten a Gos//eZj after their deatli [their preaching
has not been lost to us for] Mark, tlte disciple and interpréter of Peter, has lianded down to us.
he also in writing[h'Ae Matthew]the ttiings ^^hich were preaclied b> Peler, etc. Il est certain que
la thèse d'Irénée n'est pas fortiflée par le fait que Marc a écrit après la mort de Pierre; si donc
il avait pensé que Marc avait écrit avant, il n'eut pas manqué de le dire. Et n'est-ce pas la pré-
occupation de renforcer l'autorité du disciple par celle de l'apôtre qui a conduit la tradition
alexandrine à dire à la fin que Pierre avait formellement approuvé l'évangile ?
(3) M. Fillion ne juge nullement invraisemblable liue II Pet. 1. 15 soit une allusion a l'évangile
de S. Marc.
618 REVUE BIBLIQUE.
comme le lieu de composition de l'Évangile. Ce sont doue bien les textes les plus
respectables qui sont ébranlés... sous couleur de conservatisme.
On voit qu'ici nous plaidons plutôt pour la date de Marc que pour celle de Luc.
Ceux qui n'admettent pas que Luc se soit servi du Marc actuel peuvent faire abs-
traction de cette difficulté. Les bonnes raisons de M. Harnack pour prouver l'anti-
quité des Actes trouvent leur application en l'an 68, aussi bien qu'en l'an 62. Nous
disons donc seulemeot que la brusque terminaison des Actes ne prouve pas que cet
ouvrage ait été écrit aussitôt après la fin des deux ans de captivité. De très bons
auteurs placent le martyre de saint Pierre en l'an 64. Marc a pu écrire aussitôt après
sa mort l'évangile très court dont il possédait tous les éléments. Entre ce moment
et l'an 69, il restait à Luc assez de temps pour écrire l'évangile et les Actes. Les
événements de l'an 70, sa mort peut-être, ont pu l'empêcher d'écrire un troisième
ouvrage, qu'il a dû avoir l'intention de rédiger, même s'il a, comme le prétend Har-
nack, écrit les Actes avant d'être en état de satisfaire l'intérêt qu'il avait excité.
Est-ce pour se faire pardonner de revenir à la tradition que JM. Harnack compare
les écrits du Nouveau Testament- à des poutres branlantes qui ne sont pas plus
solides pour être plus vieillesComparaison n'est pas raison. Cette sortie
(p. 65).
d'un goût douteux n'amadouera aucun protestant, car ce sont bien les concepts et
l'esprit de l'Eglise catholique qui respirent dans les écrits du Nouveau Testament, et
ils sont d'autant plus dignes de confiance qu'ils remontent à des témoins plus sérieux.
Mais, ce point admis, il serait peu avisé d'attacher une importance suprême à
vieillir de quelques années l'œuvre de Luc et de Marc. De même qu'une légende
Le Dictionnaire apologétique, dirigé parM. d' Aies, contient dans sonsixième fasci-
cule une étude fort remarquable de M. Lepin sur les évangiles ca)ioniques. Il sem-
ble même que M. Lepin ait fait quelques pas dans la direction de la critique.
N'est-il même pas étrange qu'il explique à manière des critiques indépendants
la
fidèles.
« Inutile de dire qu'à une époque ou l'on pouvait encore si facilement consulter les
témoins, les mêmes documents ont dû rapidement se diversifier dans le détail, se
point de vue personnel, leur but propre, et aussi leurs sources d'information spécia-
les sur les points particuliers » (col. 16:U). Ce sont bien les positions où l'on se place
communément aujourd'hui. Mais comment M. Lepin peut-il les concilier avec ses
conclusions, qui sont très conservatrices, sur les évangiles canoniques? c'est ce qui
apparaît moins clairement. D'abord M. Lepin n'est guère sympathique à l'hypothèse
d'une utilisation mutuelle de nos Évangiles : « En effet, on ne trouve nulle part, entre
saint Marc et les deux autres Synoptiques, une identité absolue (1 . Or si son
texte avait été utilisé par eux, l'un ou l'autre, semble-t-il, devrait contenir des récits
entièrement pareils, des phrases littéralement semblables » (col. 1632 . Réponse :
Il y en a de très semblables, mais il n'est pus néccîsaire d'en trouver partout, si les
évangélistes ont travaillé comme M. Lepin vient de nous le dire, abrégeant ou déve-
loppant selon leur point de vue personnel, leur but propre, etc. Il s'est abstenu d'ar-
gumenter du respect empêcher un évangéliste d'utiliser à son gré
spécial qui devait
un texte inspiré; tout son raisonnement est doue en flagrante contradiction, d'une
colonne à l'autre. On est obligé de le dire, parce qu'il s'agit d'un point de la première
importance, évidemment en faveur du texte que nous avons cité
et que la raison est
le premier on ne peut exiger d'aucun auteur qu'il se comporte vis-à-vis de ses sour-
:
des apôtres et tout spécialement de saint Pierre. Toute la discussion qui suit tend à
prouver que notre second évangile, qui a eu Marc pour auteur, a été écrit d'après la
catéchèse de saint Pierre, d'après des renseignements personnels. Quelle raison pou-
vait avoir Marc d'utiliser un document narratif composé d'après la catéchèse de
Pierre? Pourquoi admettre l'i-xistence de ce véritable p/oto-Marc. qui fait double
emploi avec le Marc véritable? Sur quoi est-elle fondée? ISon seulement M. Lepin ne
le dit pas, mais la description qu'il donne de l'évangile de saint Marc parait bien
exclure un emploi un peu suivi de sources écrites, surtout en matière de narrations.
Si c'est lui qui a composé le document narratif, c'est donc lui que les autres ont
utilisé.
gnage traditionnel et de l'étude directe du livre, il semble bien résulter que saint Mat-
thieu est responsable de l'œuvre définitive comme de l'œuvre initiale, soit qu'il l'ait
exécutée également lui-même (3;, soit qu'il l'ait seulement couverte de son autorité 4 ,
qu'à tout le moins on ait jugé dès l'origine le nouvel ouvrage essentiellement conforme
'ô'
à celui qu'il avait authentiquement publié » 'col. 1661).
un peu compte de
Si l'on tient la tradition, — représentée ici par le seul Papias, sur
lequel s'appuie aussi M. Lepin, — cette dernière hypothèse est la seule admissible,
comme elle est la seule vraisemblable : « Matthieu avait écrit en langue hébraïque
les discours du Seigneur, et chacun les interprétait comme il pouvait ,' (Eus. E. E.
III. xxxix, 16, ap. Lepin, col. 1604 . C'est dire clairement que l'apôtre ne s'était
pas traduit lui-même et qu'il n'existait pas de traduction authenti<iuée par lui. Si per-
sonne ne songe rendre l'apôtre responsable de toutes ces traductions diverses, pour-
à
quoi le rendre responsable de celle qui a prévalu? La responsabilité appartient ici à
l'Eglise qui a jugé inspiré le premier evaugile, et qui a continué de lui donner le nom
d"evangile selon Matthieu, sans s'arrêter au « caractère dadaptation que l'on doit
reconnaître à cette traduction » (col. 1661), puisque c'était le même évangile, 'luoci'l
siibstaniiam.
M. Lepio,qui a consacré à saint Jean des études spéciales, s'est étendu particulière-
ment sur le quatrième évangile. Cette fois encore on rendra justice à son effort pour
serrer de plus près la vérité « Il est même incontestable que ses comptes rendus de
:
ilne pouvait sans un miracle auquel Dieu n'était nullement obligé, avoir retenu inté-
gralement les paroles du Christ et de ses interlocuteurs, et l'on peut parfaitement pen-
ser qu'il les a exprimées plus d'une fois sous une forme qui se ressentait de l'expé-
rience acquise et accusait le travail accompli dans ses pensées par l'effet de ses
longues méditations » (col. 1750).
Poursuivant ses études sur le Nouveau Testament, M. Jacquier aborde une nouvelle
section Le ynureau Testament dans rÉglise chrétienne. Le premier volume de cette
:
Testament (l]. Ces termes indiquent déjà que l'auteur ne prétend pas démontrer
que dès le début du n*' siècle l'Église catholique a possédé une collection fermée des
écritures du Xouveau Testament tenues pour inspirées. Cette position, qui est plus ou
moins celle de Franzelin et de Zahn. peut être nécessaire au protestantisme scripturaire
conservateur; elle s'accorde mal avec les faits, et n'est point partie intégrante du
dogme catholique. En revanche, il importait de prouver contre M. Harnack que dès
le début l'Église était en possession d'im principe qui lui permetttait de former et de
définir son Canon. M. Jacquier l'a compris et il a poin"suivi l'examen des témoignages
dans les périodes apostolique, post-apostolique. — qu'il qualifie de préparation du Ca-
non, — puis dans la période déformation, de l'an 170 à l'an 350, dans la période de pro-
nuilgation, de 3.50 à 450, qui a eu son terme définitif au Concile de Trente. Les textes
sont examinés avec la précision et la modération que l'auteur apporte dans toutes ses
ment, parce qu'il était d'origine apostolique » p. 442). Il semble que ce mot d'^ ori-
gine apostolique », assez fréquemment employé, pourrait créer une équivoque, et
qu'il y aurait avantage à le remplacer par celui de « garantie apostolique ». C'est
celui qu'a employé M^''" Batiffol. dans une étude très pénétrante (2i qui n'a pas été
citée par M. Jacquier. PiPlativement à l'authenticité de la Vulgate. on s'étonne qu'il
n'ait pas fait sienne l'opinion du R. P. Durand. On s'étonne encore davantage qu'il
résume d'après M. Chauvin ce qu'il nomme « l'opinion actuelle des théologiens ».
Cette opinion, qui n'est en somme que celle du cardinal Franzelin, est-elle vraiment
la plus autorisée"? Dans la neuvième édition de son manuel lS!>5i. M. Vigouroux
phrase a été remplacée par cette autre: « On peut néanmoins soutenir l'opinion du
P. Vercellone » (15'' éd., p. 237 Puisque
. _M. Jacquier j^o/uati user de ce laissez-passer,
fallait-il qu'il demeurât sur une opinion qui n'est évidemment pas la sienne?
ques pour le temps de l'Avent, de Noël et de l'Epiphanie «, publiés déjà par M. l'abbé
Dard. Après l'Enlance et les premières manifestations « aux centres principaux de la
Palestine », c'est l'exemple et l'enseignement du divin Maître durant la première
année de sa vie publique en Galilée, aux rives du Lac, par les villes de la Décapole,
qui sont maintenant étudiés par l'exégètesîir, commentés par l'ardent apôtre, mis en
relief par le théologien et l'écrivain distingué que révélèrent les volumes antérieurs.
En nous faisant assister à la prière de Jésus dans le silence de la nuit et la solitude
austère du mont des Béatitudes, M. Dard a écrit : « Il priait : la brise passait sur ses
lèvres, semant à travers l'espace les paroles de fécondité surnaturelle qui transformait
l'humanité, la rendait à la justice perdue, à la vérité captive de l'erreur. » Que son
ouvrage soit lu avec attention et droiture et l'action divinement salutaire du Prophète
de Galilée deviendra plus féconde parmi nous.
fondé sur une lecture directe des manuscrits. Dans l'introduction, l'éditeur traite
non seulement de la tradition manuscrite de l'histoire de Théodoret, mais encore des
sources et de la méthode de l'historien, apportant ainsi à l'histoire littéraire une im-
portante contribution.
Dans la collection des textes et documents (3) de MM. Hemmer et Lejay, les livres
V-VIII de l'Histoire ecclésiastique d'Eusèbe, avec une traduction par M. Grapin. Les
notes sont renvoyées à la fin du volume.
Nous sortirions tout à fait de notre domaine en faisant autre chose que de signaler
la splendide concordance de limitation de Jésus-Ch/ist, par Rayner Storr (4).
(1) Lectures évangéliques pour le temps après la Pentecôte, par M. rabl)é A. Dard. Deux volu-
mes in-12de -277 et 28S pages. Paris, Galjalda,ii'Jll.
(-2) Théodoret Kirchengeschichte in-S», cviii-4-27 pp. Leipzig, Hinrichs, 1911.
,
1. L'Hexateuque contient des passages plus récents que le temps de Moïse et de Jo-
sué. 2. L'Hexateuque est une œuvre composite, dans laquelle quatre documents ^au
moins) peuvent être distingués. 3. Les lois contenues dans le Pentateuque se repartis-
sent en trois codes différents qui appartiennent à difTérentes périodes de l'histoire
d'Israël. Les arguments sont ceux qu'on a coutume délire dans ces sortes d'analyses
littéraires, la diversité des noms divins, la diversité du style et du vocabulaire, l'exis-
tence de récits sous une double forme, s'il s'agit de l'histoire; la comparaison des
lois, en particulier sur le lieu du culte, les temps sacrés, les différentes sortes de
sacrifices, le statut des prêtres et des Lévites, s'il s'agit des codes. Les documents
déterminés au moyen de cette analyse ne sont pas moins connus : J, E, D et P.
La discussion est vraiment très bien menée, et cela est d'autant plus remarquable
que l'auteur, n'écrivant pas pour les érudits, ni même pour les élèves des Univer-
sités, s'est abstenu presque complètement de caractères hébraïques. Elle est suivie de
Pour savoir ce qu'en pensent les exégètes les plus conservateurs, on lira la seconde
partie de l'ouvrage du même M. Mangenot, ou MM. Hoberg (3), Allgeier (4), Wie-
ner i5'. etc. On sait que le R. P. Briicker ne fait pas mauvais acceuil à une solution
plus conciliante [6} Il se peut donc que les trois ou quatre écrits rédigés sous la
: <<
direction de Moïse, et correspondant aux quatre documents des critiques, aient existé
longtemps séparément. Et il n'est pas interdit de retarder le moment de leur fusion
complète et définitive jusqu'à l'exil de Babylone ou jusqu'à l'époque d'Esdras. »
que, mais elle ne se contentera pas de cette concession: elle avouerait plutôt que le
principal argument qui lui permet de distinguer les documents, surtout dans l'ordre
législatif, c'est la ditrérence des lois, coïncidant précisément avec les étapes d'une
longue évolution historique. Puisque M. Hoberg lui-même admet des changements
assez considérables depuis Moïse, il donc eq^dét,erminer l'étendue. Ce n'est
faut
pas ici le lieu. Disons cependant que M. Chapman
a diminué beaucoup trop le rôle de
Moïse : l'antiquité israélite l'aurait regardé plutôt comme un prophète que comme
un législateur! Le problème du Pentateuque ne sera jamais résolu si l'on n'attache
pas plus d'importance à la véritable tradition. Peut-être l'auteur gagnerait-il aussi à
étendre un peu ses lectures. Sur la méthode dont usent les Sémites en écrivant l'his-
toire, l'article de M. le Professeur Guidi, écrit ici même, en 19u6, n'était pas inférieur
à celui de M. Bevan, dans les Cambridge biblical essays de 1909, qui est seul cité
p. 265.
Dans cette même collection, T/c- Camhridf/c Bible for Hchouh nml ('<jUi''j>:-i, la Ge-
nèse n'a point encore paru, mais nous avons VExode du Rév. S. R. Driver 1 1. C'est
dire que l'introduction et le commentaire sont traités de mains d'ouvrier. LVsprit gé-
néral est un peu plus traditionnel que celui de M. Chapman: le Rév. S. R. Driver écrit
que Moïse fait trop corps avec les récits du Pentateuque pour être autre chose qu'une
personne historique; sur sa vie et son caractère, nous possédons mainte tradition
digne de foi (p. xlv Tout en adhérant en gros aux théories littéraires de Wellhau-
.
sen, Driver le suit de moins près pour ce qui regarde la religion d'Israël avant les
Prophètes, et opine que le Décalogue, pour le fond, sinon
les histoires primitives. Il
peu. trop peu; mais il s'agit de rendre do'nipte de la position de M. Driver, et. pour
être juste, il faut ajouter que. dans sa conviction, les résultats critiques auxquels il
représentée dans la Bible. Quoique les noms anciens aient trop souvent disparu de
une partie des Hébreux, par exemple la tribu d'Aser. tandis que les tribus d'Éphraïm
et de Juda auraient gagné ce pays les unes par l'est, les autres parle sud. Sous cette
forme il est malaisé d'établir cette conjecture, et nous voudrions encore moins nous
1 The Book of Exodus in the Uevised Version, witli Introduction and Notes, by the Rev. s. R.
Dkivef;, D.D. Regius professor of Hebrew. etc. In-IG de X. lxxii et 443 pp.: 19M.
(•2 M. le Dr. Musil estime avoir découvert la véritable moatag^ne biblique du Sinaï dans un vol-
can éteint du pays de Madian. al-Bedr. situé au sud-t>uest de la station de DOr al-Hamra, au
sud de Tebouk Comptes rendus de l'Acadéniie des sciences de Vienne, loil. p. 139).' La décou-
verte aurait eu lieu le -2 juillet 1910. Il convient d'attendre les preuves.
624 REVUE BIBLIQUE.
faire garant des hypothèses de M. l'abbé de Moor: on peut rappeler cependant que,
dès 1892, il écrivait dans la Rtr^r un article intitulé : « les Hébreux établis en Pales-
tine avant l'Exode ». Ce n'est donc pas d'aujourd'hui qu'est ouverte cette question,
demeurée si obscure.
Ce ne sont pas seulement les questions géographiques qui ont appelé spécialement
l'attention du Prof. Driver: il a consacré, en dehors du corameotaire, des notes plus
étendues à l'explication du nom divin (Ex. 3, 14^, à l'endurcissement du Pharaon, à
la manne, à l'arche^ à l'éphoi. etc., ainsi que des appendices à la Pâque, à la date
A l'Exode se sont joints aussitôt les jSombres (1), expliqués par M. Me Neile. Il suit la
distinctiou des sources de M. Chapman, sous réserve d'une dissection plus complète.
Moins réservé que Driver, il place le Sinai à Cadès, après avoir conduit les Iraélites
à l'est du golfe d"AqabaI Les raisons ont, paraît-il, été données ailleurs. Cependant
le site de Phounon continue à être passé sous silence (2). Disons d'abord ce qui est
certain, avant de donner comme certaines des conjectures! Cette observation, que
nous répéterons autant de fois qu'il sera nécessaire, n'a pas pour but de dénigrer les
qualités de l'agréable petit volume.
récit très attrayant et très suggestif des circonstances, et assigne aux principales un
fragment prophétique. Et il est eu effet assez facile d'établir une concordance vrai-
semblable entre certains faits et les textes du prophète. Si jamais l'histoire ne re-
commence tout à fait, elle offre de temps en temps des périodes semblables. Les
campagnes des Séleucides contre les Ptolémées, avec les dissensions intérieures des
Égyptiens, ont leurs précédents dans les invasions de l'Egypte par les .Assyriens.
Jérusalem a été prise par Xabuchodonosor et par Antiochus. Les lidèles de lahvé
ont eu de tout temps à lutter contre l'idolâtrie, toujours réprouvée par les prophètes.
M. Kennett un savant trop distingué pour n'avoir pas tenté de fournir des dé-
est
tails caractéristiques, s'appliquant à l'époque grecque et ne convenant qu'à elle. On
peut douter qu'il y ait toujours réussi. Ce n'est pas qu'on puisse opposer à la thèse
une fin de non-recevoir absolue. Tout en respectant l'authenticité d'Isaie, on pour-
rait admettre que tel passage a été ajouté à la collection, même à une époque très
tardive (4). Au ii*' siècle, vers l'an 140, c'est certainement bien tard. Pourtant l'exé-
gèse est bien séduisante, qui explique par des cultes grecs le chapitre 65. Encore
(3; The composition of the Book of Isaiah in tlie Light o( History and Arcliaeology by the ReT.
Uoberl H. Kennett, D. D. Regius Professer of Hebrew etc. London, publislied for tlie British Xca-
demy, by Henry Frowde, 1910.
{i)'cf. RB., 1900, p. 207.
BULLETIN. 625
tiochus Épiphane. Rien ne caractérise l'époque grecque, exclue par le sacrifice des
enfants (57, 9j M. Kennett en est réduit à dire qu'on a repris là un vieux verset!
;
clous des Macédoniens, plutôt que des sandales orientales. Les bas-reliefs assyriens
donnent cependant aux guerriers, quand ils ne vont pas pieds nus, d'assez solides
brodequins. Si l'auteur fixe une époque récente sans se laisser arrêter par des traits
plus anciens, un autre proposera avec plus de raison de rayer telle glose qui déno-
terait des temps modernes, comme, dans ce cas, la Galilée des nations. M. Kennett
ne nous paraît pas heureux en plaçant à une époque aussi basse les admirables la-
mentations sur la destinée du serviteur de lahvé. Ce serviteur, ce seraient les gens
pieux {hasîdim), morts pour la foi durant la persécution d'Antiochus, qui ont ramené
la nation à son Dieu par le sacrifice de leur vie.
des Macchabées.
En attribuant aux temps ma'chabéens la portion de beaucoup la plus considé-
rable du livre d'Isai'e(l),M. Kennett nous semble avoir déplacé son centre de gravité.
Aussi est-il assez empêché d'expliquer le texte du prologue grec du petit-fils de Jésus.
On voit, par les étranges fluctuations de la critique, que nous sommes encore bien
loin d'une analyse raisonnée chronologique des prophéties d'Isaïe qui puisse être
proposée avec quelques chances de succès. C'est rendre justice à M. Kennett de no-
ter que lui-même ne prétend pas être arrivé à des résultats définitifs.
Il serait malaisé d'indiquer une critique textuelle plus hardie que celle à laquelle
M. Paul Riessler, professeur de théologie à l'Université de Tùbingen, a
soumis le
livre des douze petits prophètes (2). Peu
apparemment]de la modération con-
satisfait
servatrice de M. van Hoonacker, il s'est lancé dans une voie nouvelle ou plutôt,
comme il le dit, sur trois chemins. Le premier le conduit à admettre la supériorité
du texte des Septante, auxquels il donne la préférence quand leur lecture lui paraît
appuyée par le contexte. Cela, en principe, n'est pas une nouveauté. Sur le second
chemin, on est plus exposé à tomber dans le subjectivisme les textes, dit-on,
:
1; 1, -i'»-31; 2, 1-5, -2-2; 4, 2-6; 8, 19--2-2; 9, 1-7; 10, 20--27, 33-3i; 11; 12; 16, 13-14; 17, 4-14; 18:
19; 23, 13-18; 24-27; 29: 30; 32-35; 41. 8-20; 42: 44, 1-8. 21-23; 45, 14-25; 48, 1-11, 16-19, 22;
49-66. D'ailleurs l'auteur concède que telle de ces prophéties peut être ancienne, modifiée
dans les temps nouveaux. Il serait plus juste alors de les rendre à Isaïe, comme le ch. 30 qui
parle des voyants et des prophètes comme on ne le faisait sans doute pas au temps d'Antiochus.
M. Kennett parle de « modification and re-editing of the old propheciesagainst Egypt contained
in Isa. XXX, XXXI » (p. 63;. C'est insinuer en passant un aspect tout autre de la question.
(2) Die kleinea Propheteu oder das Zicôlfprophetenbuch nacli dem Urtext ùhersetzt und erklârl,
von Dr. Paul Riessler Professor der Théologie an der Universitât Tùbingen, 8" de vi-294 pp. Rot-
tenburg, Bader, 1811. Avec l'imprimatur de l'Ordinaire.
REVUE BIBLIQUE 1911. — N. S., T. VIU. 40
626 REWE BIBLIQUE.
Voici un exemple des résultats que Riessler atteint par sa méthode. Dans Amos 1,
1, on lit : « deux ans avant le tremblement de terre ». M. Riessler traduit : [Va-
riante dans l'interprétation de « ils tremblèrent (1)]. » Il suppose que le glossateur
ayant écrit en abrégé tint qu'il fallait entendre .scnot, on a résolu l'abréviation en
scnâtaym. Ensuite pe?u? signiflerait ^ genre d'exégèse et d'interprétation » et hârâ'as
serait un mot indice (Stich^vort) faisant allusion à Joël 4, 16 auquel le début du verset
suivant a été emprunté. C'est de la même manière que le traducteur rend : [c'est à
identiûer avec une tribu de Beth Eden] [et en marge on lit : Peuple de Syrie[ (.4m.
1, 5) ce que tout le monde a traduit jusqu'à présent : « ainsi que celui qui tient le
sceptre de Beth Eden; et le peuple d'Aram émigrera à Qîr ». Pour le dernier mot,
le grec est appelé à l'aide, parce que in(/.Xr,-o; qui représente « à Qîr » semble au
traducteur une traduction de qân\ mal Assurément on ne peut refu-
lu pour qaruh'.
ser d'admettre l'existence de pareilles gloses ou abréviations 2) mais il semble que ;
rendu les deux fois comme il a pu, d'après le contexte; l'adaptation au contexte
n'est pas synonyme de leçon primitive.
La critique littéraire de M. Riessler n'est pas moins osée que sa critique textuelle.
Les gloses éliminées, — et elles sont nombreuses, — il distingue l'ouvrage primitif
des prophètes et les passages parallèles dans lesquels est encadré. Ces passages il
parallèles ne sont pas toujours plus récents que l'auteur principal. Ils peuvent donc
être de lui; d'autres fois ils ont été composés et ajoutés par des auteurs plus récents,
mais ils peuvent aussi être plus anciens. M. Riessler, évidemment résigné d'avance à
paraître très origiual, voire paradoxal, admet ce dernier cas pour Zacharie, même
pour les chapitres 12 et 14, dont le caractère apocalyptique est si marqué et qu'il
A propos de Jonas, il s'étonne qu'un juif ait osé attribuer à un ancien prophète de
Juda des idées aussi imparfaites sur la divinité que celles que le héros du livre laisse
paraître. Le nom de Jonas, qu'il rapproche de Ionien, lui paraît indiquer que le
principal acteur était un prosélyte. Le livre serait un récit édifiant, composé en vue
des prosélytes. Comme la prière de Jonas suppose qu'il était battu par les vagues
plutôt que renfermé dans le ventre d'un poisson, M. Riessler pense que l'antinomie
vient du double sens d'un mot qui signifiait d'abord « épave » et qui a pu être tra-
duit « poisson ». Il reconnaît d'ailleurs que le poisson figurait déjà dans le texte
avant les temps chrétiens. Pour l'allusion contenue dans les évangiles (Mt. 12, 40 et
Le. 11, 29), on renvoie à l'exphcation donnée par M. van Hoonacker.
L'ouvrage de M. Riessler est avant tout une traduction; le commentaire et les
notes sont destinés à la justifier, quoique le commentaire contienne aussi de bonnes
indications exégétiques et même historiques. Le tout est rédigé avec une concision
extrême, et ne peut être suivi que par des personnes déjà exercées. Le principal
mérite du livre est très probablement dans les conjectures esquissées pour expli-
quer le texte des Septante. M. Riessler y fait preuve d'une ingéniosité et dune vir-
tuosité philologiques peu communes; il y a là un effort très sérieux dont il faudra
tenir compte, rsous avons déjà dit que, selon nous, il se laisse entraîner trop loin sur
les trois voies qui constituent sa méthode. Afin d'éviter tout « malentendu », il a
soin de prévenir que sa critique littéraire n'a rien à faire avec l'intégrité ou l'inspi-
ration des Écritures. Le livre des petits prophètes a pu être rédigé à la manière de la
seconde édition de Jérémie, après que première eut été jetée au feu ;36, 32). 11
la
est certain qu'avant déjuger M. Riessler trop sévèrement, on devra se rappeler que
les livres des Israélites ou des Judéens n'étaient point composés comme les nôtres.
Il faut convenir, d'autre part, qu'en entrant dans cette quatrième voie on ne peut
atteindre à des résultats bien assurés. L'auteur ne le prétend pas non plus. Il a
indiqué, quoique trop brièvement selon nous, ses raisons qui pourront être discutées.
Il est d'un très grand intérêt pour les Anglais et assurément aussi d'un certain
intérêt pour tout le monde, de pouvoir comparer aisément les versions anglaises
protestantes de laBible. C'estl'avantage qu'a voulu procurer pour lePsuutierd). M. W.
A. Wright, en mettant sur six colonnes d'un très bel in-quarto, les six versions
anglaises de Coverdale (1535), de la grande bible (1539), de Genève (1560). des évê-
ques (1568;, la version autorisée il611), puis la version revisée (1885). Des appen-
dices contiennent des leçons marginales ou des variantes.
L'Académie royale des sciences de Gottingen a conçu le dessein de publier une édi-
tion des LXX. Son ambition est plus haute que celle des savants de Cambridge qui
se contentent de reproduire un manuscrit avec l'indication des autres sources d'in-
formation. A Gottingen, on prétend retrouver, dans la mesure du possible, le texte
primitif des Septante. C'est le labeur héroïque auquel de Lagarde avait convié sa
génération et les suivantes. Afin d'éclaircir le sujet et de déblayer les alentours, la
recension lucianique n'est pas représentée pour toute la Bible par les mêmes mss.
Naguère notre collaborateur, M. Tisserant, rappelait ici même il911. p. 384 que pour
Ezéchiel les mss. lucianiques sont ceux qui sont chiffrés dans Holmes-Parsons 22.
36, 48, 51, 231. Il notait cependant que ce groupe ne compte que pour une unité en
face de Théodoret joint à 23 et au palimpseste Zuqninensis qu'il vient d'éditer, et,
deux mss. avec celui que citaient les Pères antiochiens, spécialement Théodoret.
Loin de coïncider avec le texte de 19 et 108. les Pères sont plutôt d'accord avec les
(1) The Hexaplar Psalter being tlie book of Psalms in six english versions edited by William
Aldis Wright, M. A., iu-4' de vi-389 pp. Cambridge, University Press, 1911.
(2) Der Lukianlext des Oktateuch, 8" de i-28 pp. BerlLn, Weidmann, 1910.
628 REVUE BIBLIQUE.
mss. 54 et 75. Il faut voir dans la brochure de M. H. les détails et les modalités qui
nuancent ce jugement.
Le second essai marque un progrès encore plus signalé dans les études septua-
gintavirales.
Dans les prolégomènes de ses Hexaples. Field se demandait (p. lxxxii-lxxxiv) :
<' quid sibi velit to IaiJLap£i-r/.6v ». Et il distinguait 1) des passages traduits en grec,
probablement par Origène lui-même, d'après le Peotateuque hébreu samaritain, et
qui manquaient à la traduction des LXX, restreinte au Pentateuque des Juifs; 2) des
passages provenant d'une traduction antérieure, apparentés au Targum samaritain.
Une découverte fort intéressante vient de faire un peu de lumière sur ce dernier
point. Parmi les fragments d'origine égyptienne attribués à la bibliothèque de l'Uni-
versité de Giessen (1), se trouve un parchemin qui contient quelques passages en
grec du Deutéronome (fragments échelonnés de chap. 24 à 29). Ils ont été publiés avec
beaucoup de soin par MM. PaulGIaue et Alfred Rahlfs (2).
Après la description dumanuscrit, probablement iMiquatcrnio du v'^ ou du vi" siècle,
les deux savants, transcrivent le texte, en indiquant, comme il convient, ce qui est
grec suive l'hébreu lui-même et non un targum, cela ressort de sa fidélité à ce texte ;
que ce soit l'hébreu de l'édition samaritaine, cela est prouvé par l'emploi du Gari-
zim aulieudel'Ébal etsous laforme bloquée Apy^p'^'f^ (Dt. 27, 4. 12). Les éditeurs
:
n'excluent pas toute influence des LXX, soit indirecte, soit même littéraire, mais
ils constatent que leur traducteur tantôt rend l'hébreu d'une manière plus servile,
tantôt, et beaucoup plus souvent, se préoccupe d'écrire un grec plus correct. Il n'est
pas douteux que cette traduction soit plus récente que celle qui est connue sous le
nom des Septante ; elle doit être antérieure à Origène. Un de ses traits les plus carac-
elle exige beaucoup de temps et d'efforts, on peut dire dès maintenant que ce temps
et ces efforts ne seront pas perdus.
M. Rahlfs a fourni lui-même la preuve de l'extrême complexité du problème dont
il cherche la solution, en étudiant la recension de Lucien pour les deux livres des
Rois (3) (d'après le texte massorétique, Vg. III et IV Reg.). Incontestablement on
sort de cette lecture en se disant que la solution est moins avancée qu'on ne croyait
(1) Cf. RB., 1910, p. 4G0, où l'on corrigera la coquille Glane qu'il faut lire Glaue.
(2) Fragmente einer Uebentlzung des samarit. Pen<a<et«c/!s, 8» de 306et68pp. Weidoiaon 1911.
(3 Septuaginta Sludien herausgegeben von Alfred Raulfs. 3 Heft. Luciaiis Rezension
BULLETIN. 629
mais c'est encore un progrès que de dire non liquet après une connaissance plus pré-
cise des faits. L'enquête nous conduit, à travers la description des mss. qui représen-
tent le mieux pour ces deux livres la recension de Lucien, à l'examen de leur valeur,
Rahifs conclut que le groupe 82 et 93 est supérieur au groupe 19 et 108. Lagarde,
dont l'édition n'est pas irréprochable, donne un résultat semblable, plus par suite de son
instinct critique que par l'emploi d'une méthode arrêtée. Josèphe est interrogé, mais
ne fournit pas grande lumière, car pour les livres des Rois il s'attache beaucoup plus
au texte hébreu qu'à la traduction grecque. On admettait assez couramment que
l'ancienne version latine avait de nombreux points de contact avec la recension de
Lucien-, comme on datait ce latin du ii*^ ou tout au plus du iii<' siècle commençant,
c'étaitdonc du Lucien avant la lettre. En d'autres termes, les particularités du texte
des mss. lucianiques seraient antérieures à Lucien et prendraient ainsi une singulière
valeur comme expressions du plus ancien état de la version grecque. Il faut en ra-
battre, du moins pour ce qui regarde les deux livres des Rois. D'abord on constate
que les Pères orientaux, Théophile d'Antioche, Clément d'Alexandrie, Origène, la
Didascalia syrienne, ne trahissent en aucune manière l'existence de ces leçons spé-
ciales. En Occident, Hippolyte, Tertullien et Cyprien sont dans le même cas.
Les leçons vraiment lucianiques n'apparaissent en Occident qu'avec Lucifer de
CagUari. Or ce dernier écrivait environ quarante-cinq ans après la mort de Lucien. Il
est peu probable qu'il ait subi directement en Orient l'influence du critique grec,
mais de quel temps datait la version latine qu'il a suivie? Certaines parties de la Bible
ont été traduites à une époque que nous ignorons, des textes mélangés ont pris nais-
sance. On fera sagement de renoncer à cette hypothèse, d'ailleurs assez étrange,
des leçons lucianiques avant Lucien. Ce n'est pas que M. Rahifs ne reconnaisse dans
les mss. lucianiques des leçons fort anciennes. Dans l'ensemble, c'est bien de l'an-
cienne traduction grecque qu'il s'agit, et c'est précisément lorsqu'il corrige que Lu-
cien fait la preuve qu'il travaille sur le vieux fond, puisque les expressions anciennes
demeurent à côté des termes plus semblables aux LXX (doublets). L'argument est
bon, mais il doit être bien entendu. On ne conçoit pas du tout l'état d'esprit d'un re-
censeur qui se rendrait lui-même responsable de ces doublets. C'est bien Lucien qui
a mis les termes nouveaux, plus semblables à l'hébreu il a dû les mettre à la place ;
celui d'un traducteur nouveau. Mais plus souvent encore il a amélioré le grec —
à son point de vue — sans se rapprocher de l'hébreu. Il entendait donc plutôt ré-
former et corriger que refaire. Aussi bien peut-on déterminer à quel groupe appar-
tenait le texte grec qu'il prenait pour base. C'est au ms. Vatlcanus (B) et à la ver-
sion éthiopienne qu'il ressemble le plus. M. Rahifs ne nous explique pas comment
cette conclusion se concilie avec son opinion que B représente une recension hé-
sychienne. Il parle sans doute de B abstraction faite des leçons qui viendraient
d'Hésychius. Quoi qu'il en une nouvelle confirmation de la haute valeur
soit, c'est
du texte de B, du moins, répétons-le, pour ces deux livres, quoique Lucien fournisse
parfois une leçon plus ancienne et meilleure.
Comment Lucien s'y est-il pris pour modifier sa base ?
Rahifs, très prudent comme toujours, n'ose pas même
conclure que Lucien cor-
rigeait directement d'après le ne se souciait pas de suivre
texte massorétique. Il
les Hexaples, puisque tantôt il se tient plus près du texte massorétique, tantôt il en
demeure plus indépendant, dans l'ensemble moins féru qu'Origène d'affection pour
der Kônigsbùcher, 8" de 298 pp. Sur les deux premiers fascicules, cl. EB-, .'JC6, p. 338 et 1007,
P.4S6.
630 REVUE BIBLIQUE.
aussi des autres versions 'grecques qui nous sont demeurées inconnues. Pour tout
dire, les principes directeurs de Lucien demeurent dans le vague. Il allait dans le
sens de l'atticisme, mais sans méthode arrêtée; il prétendait améhorer le grec, mais
On voit que les hypothèses sont ici plus aisées que les solutions. Ajoutons encore
une conjecture c'est que plus d'un trait commun aux mss. lucianiques pourrait
:
bien émaner de disciples qui n'étaient plus des recenseurs responsables et qui se
croyaient peut-être plus autorisés à faire des changements que de simples copistes.
'
Pays voisins. —
Nous pouvons placer dans les « Pays voisins » le nouveau fas-
cicule des Forschungen zur Religion und Literatur des A. und N. Testaments de
MM. Bousset et Gunkel (1). C'est simplement la traduction et le commentaire de la
Geste de Gilgamès par MM. Ungnad et Gressmann (2). Le premier donne une tra-
duction allemande (sans transcription) de toute l'épopée babylonienne. Le second en
fait l'analyse détaillée et en recherche l'influence sur le folklore général. La partie
qui intéressera le plus les bibhstes est le récit du déluge (onzième tablette de l'épo-
pée). La traduction de M. Ungnad utilise tous les travaux déjà parus et serre de très
près le texte assyrien. M. Gressmann ne se contente pas d'analyser l'épisode; il en
fait ressortir les procédés littéraires et le compare avec les autres récitsdu déluge.
Pour ce qui en particulier du récit biblique, il s'en tient
est généralement aux con-
clusions de Gunkel dans son commentaire de la Genèse. On lira avec profit la cri-
tique de la méthode suivie par Jensen dans le bizarre ouvrage qu'il publiait en 1906
sous le titre Das Gilgamesch-Epos inder Weltliteratur [Z).
Haupt consacre la plus grande partie de son Xortrag. 11 s'attache à montrer ce qu'il
y a de fondé objectivement et ce qui est de pure imagination dans l'histoire de
Sémiramis, telle que l'ont répandue les écrivains classiques. C'est pour cela que sa
brochure a pour titre « La Sémiramis historique et son époque ». C'est une série de
:
en Mésopotamie.
théon; répoque^ sumérienne durant laquelle le dieu Enlil supplante Anou: Tepoque
Amorrite-babylonienne, à partir de la dynastie hammourabienne, qui donne la pré-
séance au dieu Mardouk: enfin l'époque assyrienne qui exalte par dessus tout le dieu
national Asour nature des documents qu'il publie, l'auteur insiste plus
4 . D'après la
élevées de la théologie chrétienne. Ou nous parle sans cesse du rôle joué par le Fils
dans la Trinité. Remarquez que cette Trinité n'est, en fait, qu'une triade qui com-
prend le Père, le Fils, la Mère. Nous avons déjà crié casse-cou 5i à propos des spé-
culations de M. Radau. Disons tout de suite que, lorsqu'il s'agit d'interpréter les
te.xtes, l'auteur est beaucoup plus objectif que lorsqu'il s'agit d'en tirer des conclu-
sions sur l'histoire des religions. Il a réussi à coordonner les différents fragments
qui
exaltent les prérogatives du dieu Ninib. Les hymnes nous le présentent successive-
naturellement celles de Job 7;. » Dans un long article du Journal of hiblical litera-
ture (1906, p. 135 ss.), M. Morris Jastrow, jr, recherchait les moindres analogies
entre le texte babylonien et le livre biblique pour aboutir à la conclusion que ce der-
nier avait été uifluencé directement par l'autre, si bien que l'article était intitulé A
habylonian parallel to the story of Job. Le P. Landersdorfer , O. S. B.. déjà connu
duction, lecommentaire des divers fragments qui nous sont parvenus du poème
babylonien. L'auteur se comporte très loyalement avec les traductions qui ont pré-
cédé la sienne et donne les raisons philologiques pour lesquelles il préfère telle inter-
prétation à telle autre. On voit qu'il est du métier et qu'il ne se laisse guider que par
des motifs d'ordre objectif. Il eût été plus pratique de faire figurer la traduction en
regard de la transcription au lieu de les mettre bout à bout. Les notes auraient pu
aussi s'aligner au bas des pages, de façon que le contrôle de l'interprétation proposée
se fasse au premier coup d'œil. Après avoir fourni au lecteur le texte qui servira de
base à la discussion, le P. Landersdorfer analyse longuement les idées émises par le
poète babylonien et les procédés qu'il met en œuvre pour toucher ses auditeurs. Il
remarque avec justesse qu'on ne se serait pas attendu à trouver dans la littérature
cunéiforme un morceau d'aussi belle envolée, tant au point de vue de la philosophie
religieuse que de la facture esthétique. Mais le problème de la relation entre le mal-
heur et le péché, posé d'une façon poignante dans ce texte, n'y reçoit pas de solution.
Il n'en va pas de même dans le hvre de Job. Le P. Landersdorfer montre bien la
différence énorme qui sépare les deux conceptions du mal, celle du poète babylonien
et celle de l'auteur inspiré. Sans se laisser éblouir par quelques ressemblances de
détail, attribuablesau sentiment de la douleur qui est partout le même, il conclut
nettement en faveur de l'indépendance de Job par rapport au « Juste souffrant ».
Cela ne veut pas dire que les Cananéens et par eux les Hébreux n'aient pu connaître
le poème babylonien. Mais, même en envisageant cette possibilité, l'originalité du
texte sacré est telle que toutemprunt reste invraisemblable. « Le juste souffrant »
est la lamentation d'un individu qui se sent accablé par la douleur et la maladie, le
livre de Job est la discussion serrée, sous la forme la plus dramatique , de tout le
Palestine. —S. A. R.le prince Jean-Georges, duc de Saxe, est depuis longtemps
connu dans les cercles scientifiques par ses excellents mémoires sur l'histoire de l'art
byzantin et ses découvertes d'iconographie chrétienne. Traversant naguère l'Orient
bibli(ine, du Sinaï aux confins extrêmes de la Haute Syrie, l'illustre explorateur a
recueilli, dans les monastères, dans les bibliothèques, dans les vieilles églises et dans
(1) Eiiie bahyloni&che Quelle fur das Buch Job ? Eine lilerar-geschichtliche Sludie von P. Dr.
SiMo:» LAND£i;sDiiiiFEn, 0. S. B. In-8 de xii-138 pp. Freiburg im Brcisgau, Herder. 19H. Dans les
Biblische Studien, XVI, 2.
(2) Dans la Zeilschrift fur chrisUiche Kunst, 1910, n» 12 et 1911. n° 4.
(3) Internation. Woctienschrift fur Wissenschaft, Kunsi, und Tcchnik, juin 1911.
(4) Zeitschr. fur christl. Kunst, 1911, n» 4.
(o) Op. laud., col. 117, fig. 1; cf. col. 113 s.
BULLETIN. 633
PEFund, Quart. Stat., avril 1911. — M. Diincan Mackenzie : L'aticien site d'Ain
Shems avec un mémorandum en vue des fouilles. Notice très substantielle accom-
pagnée de bonnes vues photographiques, qui permettront aux lecteurs de se faire
une idée du site et de l'importance de la ville biblique de Beth-Shemes que
M. Mackenzie est en train de fouiller avec le concours de M. l'architecte Newton. —
S. R. Driver : Les découvertes à Samarie (1). — Joseph Offord H. H. ClilTord
et
Gibbon : Inscriptions récemment découvertes, 7-elatives aux camjmgnes romaines en
Palestine. Le principal document est un titre juridique concernant un certain Qua-
dratus, vétéran de la X*^ Légion Fretensis qui a servi à Jérusalem et a été renvoyé
dans ses foyers par Sex. Hermetidius Campanus. légat d'Auguste pro-préteur. Ce
monument épigraphique découvert dans une maison romaine au Fayoum, en Egypte,
a été publié pour la première fois par M. Lefèbvre, dans le Bulletin de la Société
archeolosique d'Alexandrie N. S., III, 1910, p. 39'. M. Mispouleten a fait l'objet d'une
communication à l'Institut dans laquelle il a fait ressortir le haut intérêt d'un pareil
document qui « contient quatre dates consulaires concernant les années G8, 69, 93 et
94 de notre ère, un précieux renseignement pour la topographie de Rome à cette
époque, le nom d'un nouveau gouverneur de Judée sous Domitien et une formule
nouvelle de privilèges accordés à des militaires, à des légionnaires, une catégorie de
soldats considérée jusqu'ici comme ne jouissant pas d'une pareille faveur 2; .
Le texte est écrit sur une planchette en bois ayant appartenu à un diptyque. Voici
le passage qui a trait plus spécialement à la Palestine : o ... IV^eteranorum cura uxo-
ribus et liberis s{uis) in œre incisi (?) aut si qui cœlibes sint cum is quas postea
duxissent dumtoxat singuli singulas, qui militarerunt Eierosolymnis in leg'ione, X
Fretensi, dimissorum honesta missionc stipendis per Sex. Hermetidivm emeritisi
Campanum leg. Aug. pro prœtore V. Kal. Jan., Sex. Pompeio Collega, Q. Peducœo
Priscino COS. qui militare cœperunt P. Galerio Trachalo, Ti. Catio, et T. Flavio, Cn.
Andeno Cos. Ex permism M. Juni Rup. Prœfecti .Egypti, L. Nonio Caipurnio Tor-
quato Asprenate, L. Sextio Magio Laterano cos. K. Julls. amio XIII imp. Cxsaris Do-
mitiani Aug. Germanici mense epip. die VII. » Note de M. Mackenzie sur le kh. —
Adaseh. L'éminent archéologue ne croit pas pouvoir placer Gibeah au kh. Adaseh.
ces rumes étant jugées postérieures au christianisme. Juillet 19U. Dans une — —
conférence tenue à la réimion annuelle du Comité, M. le col. Sir Ch. Watson, retour
de Palestine, résume les transformations de Jérusalem depuis vingt ans ; il annonce
les résultats féconds d'une mission accomplie par MM. Mackenzie et Newton en
Transjordane et à Pétra, donne les dernières nouvelles des fouilles et fait espérer la
fondation prochaine d'un institut archéologique anglais à Jérusalem. Premier —
compte rendu provisoire de M. Mackenzie sur ses fouilles, avec un bon plan de
M. Newton. —
H. Vincent. 0. P. Evocation archéologique d'un site bibUqur .notes
:
d'une \isite au chantier de Beth Sémès, avec des photographies dues à l'obligeance de
M. le col. Watson. —
M. l'arch. A. Dickie L'église de la Nativité à Bethléem, compte
:
rendu judicieux d'une publication récente dont la Revue ne se hâtera point de parler.
n'ayant pas grand bien à en dire. — M. le D"" E.W.G. Masterman Observations à : la mer
Morte. — Notes de M. Gray sur le calendrier de Gézer — pour maintenir sa lecture
waw au lieu de noun dans tous les cas où revient le fameux controversé —
sigle de et
M. Birsch — pour maintenir contre M. Mackenzie l'équation Gaba'a de Saul : Adaseh.
Mittheilungen... des DP. Ve reins, 1911, n* 3. —
Guthe Aphek, Apheka. Il s'agit
:
combattre contre Israël. Ce nom est rapproché de celui d'une certaine forteresse
d'Apheca, mentionnée par Josèphe [Bel.jud.^W, 19, I) et qu'il convient de localiser
aux environs de Medjdel-Yâbâ, à l'est de Qala'at ras el-'Aïn l'ancienne Antipatris.
Medjdel-Yâbâ pourrait donc égaler Aphek.
— R. Verkade O. S. B.
P. Willibrord La révolte du Kérak. Récit intéressant des
:
événements qui se sont déroulés au Kérak l'hiver dernier. M"" Gertrude Nassar —
termine son travail surles femmes musulmanes de Galilée par quelques détails sur
leur vie religieuse. P. Ad. Dunkel— A propos du Saint-Sépulcre, une relation
:
remanié pour devenir la tombe d'Hérode... Celle d'Hélène était à «trois stades » de
la ville et d'après l'arpentage du topographe improvisé le monument en question serait
à « huit stades ou un raille ». L'erreur n'est que de moitié, mais M. Minos n'y regarde
pas à 700 mètres près. Du reste une page plus loin vous apprendrez que ces « huit
stades » sont la distance depuis «le palais royal ». Pourquoi cette salade.'* Et en voici
bien d'une autre, dans l'exégèse archéologique de la célèbre façade. Grâce à un sym-
bolisme cabalistique à faire peur, ce n'est pas seulement le double caractère des rois-
prêtres hasmonéens, mais toute l'histoire de la dynastie qui est « résumée laconique-
ment » —
oh combien! —
Sans compter qu'il y a, pour l'œil perspicace de cet ardent
symboliste, bien d'autres choses encore écrites dans ces sculptures. Par une effrayante
vivisection M. Minos sépare dans cette harmonieuse façade les éléments juifs, les élé-
ments grecs, les éléments romains et conclut au remaniement qu'on a dit ; tant pis
si cette enfilade de contresens archéologiques s'aggrave de quelque méprise sur des
textes fort clairs. Chemin faisant l'heureux explorateur a trouvé des traces « des mas-
sives portes de marbre tournant sur des pivots dans la roche vive » qui fermaient le
portique. Mais que ne découvrira pas le Rév. P. J. 0. Minos en soumettant tous les
monuments de Jérusalem à l'interprétation dont le secret lui est propre? [H. V.]
Très sensible au témoignage de haute estime adressé à son Directeur, la Revw bi-
ANNÉE 1911
N° 1. — Janvier.
Pr.eos.
N° 2. — Avril.
N" 3. — Juillet.
VI. RECENSIONS. — P. Vogt, S. J., Der Stammbauni Chriati bei deii heili-
gen EvangelistenMatt/iàus inidLukas. —
J. M. Heer, Die Sfammbàume
N" 4. — Octobre.
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