La Reeducation de Pitesti - Le Documentaire Demascarea
La Reeducation de Pitesti - Le Documentaire Demascarea
La Reeducation de Pitesti - Le Documentaire Demascarea
Mircea Stanescu, Reeducarea in Romania comunista , Vol I, Ed. Polirom, Bucarest, 2010, p.23
communiste a abord un tel processus rpressif pour la rducation. Les tmoignages sont
frappantes et expressives et indiquent une volont du rgime de faire les tudiants se rompre
radicalement de la tradition, des toutes les valeurs (Purcarea). Mais, pourquoi les
tudiants ? Les victimes ont leurs propres rponses cette question : soit une revanche
pour ce que les gnrations ont fait avant (Lucinescu), soit dtruire le noyau dur de la
socit (Gheorghiu), la jeunesse, qui pouvait assurer le pouvoir politique du pays dans le
future (Stanica) et qui tait le secteur conomique de la socit (Cojocaru).
La logique du film sinscrit beaucoup dans la logique du scnographe, Alin Muresan,
qui a fait, lui-mme, une entire base des donnes sur le Phnomne Pitesti et sur la
rducation, par exemple les livres Maison de la terreur. Documents sur la prison de Pitesti
(1947-1977) et Pitesti. Chronique d'un suicide assist . Ainsi, le film reprsente une
transposition des arguments prsents dans les livres de Muresan et un support en mme
temps par les entretiens qui sont plutt semi-dirigs, mais trs coups pour sencadrer dans
la ligne dcrite par Alin Muresan.
Dun ct, le fil rouge du documentaire est reprsent par le processus de
dmasquage et les tapes par lesquelles le processus tait construit. Malgr lagression
physique, les novices, bien que les mains nues, opposaient de la rsistance. De cette faon, la
rptition des sances de chtiment simposait. Les tapes d'action sont galement bien
joues. La premire a t appele dmasquer de l'extrieur, et consistait dclarer des
faits inconnus pour la Securitate, tandis que dans la seconde, appele lexposition interne
(Stanica), vous aviez d'obtenir des autos dmasquages (Purcrea), cest--dire de
dclarer propos de vous et les vtres que vous tes les plus grands criminels, pervers et
mchants. Les victimes sont donc les deux faces la lumire du processus: le type rel de la
Securitate et de la destruction de la personnalit fictive et renomm par l'un des victimes
la vraie rducation (Purcrea). En fait, la procdure utilise tait trs sophistique. Elle
consistait en quatre tapes2 :
La premire phase tait larrachage du masque lextrieur. Se dmasquer par
rapport lextrieur, savoir, raconter des dtails concernant la priode davant larrestation,
et cachs pendant les enqutes de la Securitate (un ventuel rseau, des complicits). La
torture est dj suppose pour lobtention de ce genre dinformation. Ctait la sous-disant
exposition extrieure. Un garon a apport son pre et son frre en prison , complte
Gheorghe Stnic. Tu arrivais fabuler, a dire de tes parents quils ont t de tes amis,
tes connaissances quelles ont tsur les filles quelles sont dpraves. A un moment
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donne, tu ne savais pas quel est la vrit. Tu arrivais des contradictions pour lesquelles
Turcanu te maltraitait., explique Purcrea.
Se dmasquer par rapport lintrieur, savoir par rapport la prison, confier les
informations obtenues des autres dtenus, dvoiler la coopration avec dautres reclus ou
ventuellement avec ladministration ou un enquteur, tous cela reprsentait la deuxime
phase. Ces sances de dmasquement concernant lactivit lintrieur de la prison taient
effectues en public, devant toute la cellule et sous la surveillance du rducateur qui
supervisait chaque dtenu. Les dtenus qui y assistaient devaient y participer, en posant des
questions au dmasqu. Quand ils observaient que celui-ci avait tendance omettre ou
cacher quelque chose, ils taient tenus dintervenir. travers cette manire de procder, le
but des rducateurs tait double : ils cherchaient connatre en profondeur lactivit
lintrieur de la prison et ils observaient ceux qui participaient la rducation. Les
dmasquements de lintrieur taient cantonns dans le domaine de la parole, mme si les
dtenus notaient sur papier les lments les plus importantes, mais seulement aprs la
sance.
Se dmasquer par rapport soi-mme, taler son intimit il est question de
dsavouer les relations avec sa famille (qui doit tre traite par des injures, des insultes),
renier sa foi en Dieu, et en gnral, rejeter toutes les valeurs auxquelles la victime avait cru.
Il fallait aussi confesser des infamies et des turpitudes inavouables, inventer des
monstruosits, des perversions sexuelles, des histoires incestueuses. Si ces histoires ne
tenaient pas la route, ce qui tait la rgle, la torture recommenait. Ce que ma beaucoup
impressionne a t le fait que certains ont reconnu, ont affirm quils ont vit avec leur sur,
leur mre. Ces sont des choses qui chappent mon esprit, dit Petre Cojocaru.
Devenir le rducateur de son meilleur ami, tre tortionnaire aprs avoir t victime.
Ce dernier lment, le plus difficile pour les dtenus comptait pour un signe de confiance de
la part de ladministration, de son point de vue pour les victimes il tait le plus humiliant.
Au moment o le processus tait finit et la rducation tait complte, le rduqu devenait
un tortionnaire. Il existait un cercle vicieux qui poussait les gens soit cder, soit mourir,
soit se comporter bizarre (Purcarea), le prisonnier devenait un homme nouveau 3.
Un personnage qui ne doit pas tre oubli dans le paysage macabre de la prison de
Pitesti est Eugen Turcanu4. Il est devenu le vrai chef de la prison, le principal tortionnaire, il
pouvait entrer ou il voulait cause du fait quil dtenait toutes les cls des cellules. Les
3
4
Lucian Boia, Mitologia stiintifica a comunismului, Ed. Humanitas, Bucarest, 1999, p. 122
Une autre question qui nest aborde dans le film, cest la question pourquoi grouper
les dtenus partir des critres socio-professionnelles et non pas par des critres lgales,
selon leur type de condamnation et dure ? Il y avait la prison de Trgusor pour les lves,
Pitesti pour les tudiants, Gherla pour les travailleurs et paysans, Aiud pour les intellectuels
et Mislea pour les femmes5.