Utilisation Des PAEK en Odontologie Prothétique
Utilisation Des PAEK en Odontologie Prothétique
Utilisation Des PAEK en Odontologie Prothétique
Contact : [email protected]
LIENS
THÈSE
pour le
DIPLÔME D’ÉTAT DE DOCTEUR EN CHIRURGIE DENTAIRE
par
Lorraine BAUDOUIN
Née le 3 Octobre 1991 à Épinal (88)
Examinateurs de la thèse :
1
« Par délibération en date du 11 décembre 1972, la Faculté de
Chirurgie Dentaire a arrêté que les opinions émises dans les
dissertations qui lui seront présentées doivent être considérées
comme propres à leurs auteurs et qu’elle n’entend leur donner
aucune approbation ni improbation. »
2
Président : Professeur Pierre MUTZENHARDT Doyen : Professeur Jean-Marc MARTRETTE
3
À notre Président de Thèse,
4
À notre Juge et Directeur de Thèse,
5
À notre Juge et Directrice de thèse,
6
À notre juge,
7
SOMMAIRE
CONCLUSION
8
LISTE DES FIGURES
9
Figure 16 : a) lingotins de pressée Pekkton® ivory, b) disques à usiner Pekkton® ivory.
(Source : Cendres+Métaux, 2015) ..................................................................... 43
Figure 17 : Organigramme récapitulatif du processus de pressée de Pekkton® Ivory.
........................................................................................................................... 44
Figure 18 : a) PEKKtherm. b) PEKKpress. (Source : Cendres+Métaux, 2015) ........ 45
Figure 19 : usinage d'une armature en PEKK. (Source : Gobert, 2013) ................... 45
Figure 20 : armature de bridge en PEKK. (Source : Gobert, 2013) .......................... 50
Figure 21 : a) dent 65 cariée, b) dent 65 après pose d’une coiffe pédiatrique en
BioHPP® vue intraorale, c) vue vestibulaire de la coiffe pédiatrique en BioHPP®
sur 65. (Source : Ritterbusch et Waschek, 2014) .............................................. 53
Figure 22 : Vue vestibulaire, situation initiale des dents mandibulaires. (Source : Zoidis
et Papathanasiou, 2016) .................................................................................... 54
Figure 23 : a) Vue occlusale, essayage de l’infrastructure en PEEK. b) Vue occlusale,
après collage du bridge collé transitoire. (Source : Zoidis et Papathanasiou, 2016)
........................................................................................................................... 55
Figure 24 : Vue vestibulaire après collage de la pièce prothétique transitoire. (Source :
Zoidis et Papathanasiou, 2016) ......................................................................... 55
Figure 25 : a) Vue occlusale après chirurgie réparatrice. b) Vue vestibulaire de la
plaque de Hawley avec le remplacement de l’incisive latérale droite manquante.
(Source : Andrikopoulou et coll., 2016) .............................................................. 56
Figure 26 : a) Vue occlusale lors de l’essayage de la maquette en résine acrylique. b)
Vue occlusale du résultat final avec la prothèse collée en PEEK comportant la 12
manquante. c) Vue vestibulaire du résultat final. d) Vue vestibulaire montrant le
passage des brossettes interdentaires. (Source : Andrikopoulou et coll., 2016) 57
Figure 27 : coupe sagittale de la répartition des forces de contraintes sur l’ensemble
des composants de la dent, selon le modèle d’étude. (Source : Lee et coll., 2017)
........................................................................................................................... 60
Figure 28 : Photographie d’un Inlay-core à clavette en PEKK. (Source : Pham, 2014)
........................................................................................................................... 61
Figure 29 : restauration coronaire extensive avec une infrastructure en PEEK (partie
blanche) recouverte d’une résine composite indirecte esthétique. (Source : Zoidis
et coll., 2017) ...................................................................................................... 62
Figure 30 : radiographie de la molaire maxillaire droite (17) avant les étapes
prothétiques. (Source : Zoidis et coll., 2017) ...................................................... 62
10
Figure 31 : a) vue vestibulaire de la préparation pour une endocouronne avec réduction
occlusale. b) vue occlusale de la chambre pulpaire et de sa préparation. (Source :
Zoidis et coll., 2017) ........................................................................................... 63
Figure 32 : a) vue vestibulaire lors de l’essayage de l’infrastructure en PEEK. b) vue
vestibulaire après la pose de la prothèse. (Source : Zoidis et coll., 2017) ......... 64
Figure 33 : Image 3D des scans du maître modèle (jaune) et du montage directeur
(rouge) et visualisation de leur superposition. (Source : Gerard, 2016) ............. 66
Figure 34 : a) Image du choix de l’axe d’insertion de la prothèse, après le tracé des
limites. b) Visualisation tridimensionnelle de l’infrastructure en PEEK (blanc) et de
la coque cosmétique (jaune). (Source : Gerard, 2016) ...................................... 66
Figure 35 : a) Infrastructure en PEEK après son usinage. b) Coque cosmétique après
son usinage. (Source : Gerard, 2016) ................................................................ 66
Figure 36 : a) Assemblage des deux structures. b) Découpe incisale et caractérisation
esthétique. .......................................................................................................... 67
Figure 37 : Bridge complet après finitions, vue vestibulaire (a), vue palatine (b).
(Source : Gerard, 2016) ..................................................................................... 67
Figure 38 : Vue de l’intrados d’une prothèse amovible complète sur infrastructure en
PEKK et des dents en disilicate de lithium. (Source : Dawson et coll., 2017) .... 71
Figure 39 : Comparaison entre un châssis classique en Cobalt-Chrome (a) et un
châssis en PEEK épaissi (b). (Source : Fages et coll., 2016) ............................ 71
Figure 40 : a) Vue linguale de l’ancienne PAPIM. b) Vue linguale de la PAP à
infrastructure en BioHPP®. (Source : Zoidis et coll., 2016) ............................... 74
Figure 41 : Vue vestibulaire en occlusion avec la PAP en PEEK. (Source : Zoidis et
coll., 2016) .......................................................................................................... 75
Figure 42 : Vue palatine d’une prothèse amovible partielle à infrastructure en PEEK
maxillaire. (Source : Hosten, 2017) .................................................................... 75
Figure 43 : Cas particulier avec des axes d’insertion divergents au niveau des
molaires. La rigidité des crochets en Cr-Co n’aurait pas permis leur bonne mise
en place. La flexibilité des crochets en PEEK permet de passer les contre-
dépouilles sans forcer sur les dents. (Source : Hosten, 2017) ........................... 76
Figure 44 : Cas d’une prothèse complètement biocompatibilité non irritante pour une
patiente allergique à la résine. L’intrados est totalement recouvert de PEEK.
(Source : Hosten, 2017) ..................................................................................... 76
11
Figure 45 : Prothèse complexe avec une couronne céramo-métallique sur 23 et
attachement extra-coronaire. La partie femelle en téflon est inclue dans l’intrados
de la PAP en PEEK. Ce procédé est également utilisé en full zircone avec un
attachement, type glissière, également en zircone, pour une prothèse combinée
entièrement biocompatible. (Source : Hosten, 2017) ......................................... 76
Figure 46 : Vision schématique des différentes structures de la prothèse amovible sur
coiffes télescopiques. (Source : Rösch et Mericske-Stern, 2008) ...................... 77
Figure 47 : a) Piliers implantaires télescopiques et infrastructure de la prothèse
amovible télescopique en PEKK Pekkton® Ivory. b) Vue de l’intrados de la
prothèse. (Source : Park et coll., 2017) .............................................................. 79
Figure 48 : Photographie de la situation initiale. (Source : Hirmer et Kather, 2015) . 79
Figure 49 : Schéma de la prothèse amovible sur coiffes télescopiques et ses
matériaux. .......................................................................................................... 80
Figure 50 : Visualisation numérique des parties primaires sur les dents piliers
maxillaires. (Source : Hirmer et Kather, 2015) ................................................... 81
Figure 51 : a) essayage de la maquette en cire. La dimension verticale est augmentée,
la 33 n’est plus dans le plan fonctionnel. b) Montage wax up de 33. (Source :
Hirmer et Kather, 2015) ...................................................................................... 81
Figure 52 : Second essayage validé, avec intégration de 33. (Source : Hirmer et
Kather, 2015) ..................................................................................................... 82
Figure 53 : a) Assemblage des segments en PEEK de la partie tertiaire. b) Résultat
final de la prothèse amovible télescopique à infrastructure en PEEK. (Source :
Hirmer et Kather, 2015) ...................................................................................... 82
Figure 54 : Résultat final de la prothèse mandibulaire. (Source : Hirmer et Kather,
2015) .................................................................................................................. 82
Figure 55 : Mise en place des parties primaires sur les dents piliers et de la facette sur
33. (Source : Hirmer et Kather, 2015) ................................................................ 83
Figure 56 : Photographies après mise en bouche finale des prothèses télescopiques
à infrastructure en PEEK maxillaire et mandibulaire. (Source : Hirmer et Kather,
2015) .................................................................................................................. 83
Figure 57 : a) Photographie de la perte tissulaire après chirurgie avec une
communication bucco-sinusienne. b) Ancienne prothèse maxillo-faciale
inesthétique et non fonctionnelle. (Source : Costa-Palau et coll., 2014) ............ 85
12
Figure 58 : Vue palatine de l’essayage intrabuccal de la structure en PEEK. (Source :
Costa-Palau et coll., 2014) ................................................................................. 86
Figure 59 : Obturateur maxillo-facial final. (Source : Costa-Palau et coll., 2014) ...... 86
Figure 60 : de gauche à droite : vis en PEEK 20% dioxyde de titane, vis en PEEK 50%
fibre de carbone et vis en titane grade 5. (Source : Schwitalla et coll., 2016) ... 89
Figure 61 : image d’un corps de scannage en PEEK de la marque Straumann®.
(Source : Straumann®, 2015) ............................................................................ 90
Figure 62 : Photographie montrant un pilier de cicatrisation en PEEK (gauche) et un
en titane (droite). (Source : Volpe et coll., 2008) ................................................ 92
Figure 63 : a) Vue occlusale des piliers de cicatrisation en PEEK à trois mois. b)
Radiographie à trois mois. (Source : Koutouzis et coll., 2011) .......................... 93
Figure 64 : a) Vue occlusale de pilier de cicatrisation en titane à trois mois. b)
Radiographie à trois mois. (Source : Koutouzis et coll., 2011) .......................... 93
Figure 65 : Schémas d’un pilier préfabriqué (gauche) et d’un pilier personnalisé
(droite). (Source : Gobert, 2013b) ...................................................................... 95
Figure 66 : a) Piliers préfabriqués selon la taille et l’angulation en BioHPP®. b) Pilier
personnalisé doté d’une base en titane, après une céroplastie le pilier en
BioHPP® est pressé. (Source : Bredent, 2013) ................................................. 95
Figure 67 : a et b) Modélisation de piliers personnalisés en PEEK BioHPP® par
procédé CAO. c) Obtention des piliers personnalisés en BioHPP® usinés par le
procédé FAO. (Source : Gerard, 2015) .............................................................. 96
Figure 68 : a) Photographie pré-opératoire avec une fracture de 12. b) Vue vestibulaire
après la mise en place du pilier préfabriqué en PEEK. (Source : Tetelman et
Babbush, 2008) .................................................................................................. 97
Figure 69 : a) Vue vestibulaire lors de la préparation du pilier. b) Photographie du
résultat final avec la couronne provisoire en place. (Source : Tetelman et
Babbush, 2008) .................................................................................................. 98
Figure 70 : a) Céroplastie du pilier sur sa base en titane. b) Pilier en cire sur sa tige de
coulée à gauche, et pilier personnalisé en Pekkton après pressée. (Source :
Gobert, 2013b) ................................................................................................... 99
Figure 71 : a) Photographie vue vestibulaire après la pose du pilier. b) Vue vestibulaire
après la pose des couronnes provisoires en résine composite. (Source : Gobert,
2013b) .............................................................................................................. 100
13
Figure 72 : a) Vue vestibulaire du pilier en PEKK après trois mois de « maturation »
gingivale. b) Photographie prise deux mois après la pose des couronnes
définitives céramo-céramiques. (Source : Gobert, 2013b) ............................... 100
Figure 73 : Photographie du montage directeur. (Source : Gerard 2014) ............... 101
Figure 74 : a) Modélisation de la barre transvissée sur logiciel de CFAO. b) Essayage
de la barre usinée. (Source : Gerard 2014) ..................................................... 102
Figure 75 : a) Collage des facettes sur la barre. b) Résultat après assemblage et
polissage. (Source : Gerard 2014) ................................................................... 102
Figure 76 : a) Vue de la prothèse finie sur articulateur. b) Pose de la prothèse fixée
complète implanto-portée. (Source : Gerard 2014) .......................................... 103
Figure 77 : a) Schéma du système Novaloc®. b) Photographie de l’intrados d’une
PACSI avec deux matrices et deux éléments de rétention de couleur bleue.
(Schittly et coll., 2008) ...................................................................................... 104
Figure 78 : a) Visualisation sur le modèle en plâtre des matrices Novaloc® en PEEK
(blanc) et en titane (gris). b) Visualisation de la position très vestibulée de la
matrice Novaloc® en PEEK dans la prothèse. (Novaloc®, 2016).................... 105
Figure 79 : a) Radiographie de la situation initiale avant la réalisation de la prothèse
maxillaire. b) Modèle en plâtre doté des répliques des piliers Locator®. (Source :
Adler et coll., 2015) .......................................................................................... 106
Figure 80 : Montage directeur sur cire avec les logements des piliers, vue de l’intrados
(a), vue occlusale (b). (Source : Adler et coll., 2015) ....................................... 106
Figure 81 : a) Infrastructure en cire sur les tiges de coulée en vue de la pressée. b)
Photographie de l’infrastructure en PEEK revêtue d’une couche d’opaque.
(Source : Adler et coll., 2015) ........................................................................... 107
Figure 82 : a) Assemblage des dents prothétiques sur l’infrastructure à l’aide de la clé
de vérification en silicone. b) Vue de l’intrados de l’infrastructure avec les
logements des parties femelles des piliers Locators®. (Source : Adler et coll.,
2015) ................................................................................................................ 107
Figure 83 : a) Photographie de la PACSI après finitions. b) Photographie du résultat
final après mise en bouche de la prothèse maxillaire et visualisation des rapports
occlusaux avec la prothèse antagoniste. (Source : Adler et coll., 2015) .......... 108
Figure 84 : Photographie du montage directeur en cire validé par le praticien et le
patient. (Source : Pisseloup, 2017) .................................................................. 109
14
Figure 85 : Photographies des piliers sculptés en cire, vue palatine avec les analogues
et les bases en titane (a), vue vestibulaire sur la fausse gencive (b). (Source :
Pisseloup, 2017) .............................................................................................. 109
Figure 86 : Photographie des piliers pressés en BioHPP® et la clé en silicone (a) qui
guide le repositionnement du montage directeur (b) pour le scannage. (Source :
Pisseloup, 2017) .............................................................................................. 110
Figure 87 : Images du modèle scanné avec le montage esthétique (vert) et la
conception de l’infrastructure (jaune) avant son usinage. (Source : Pisseloup,
2017) ................................................................................................................ 110
Figure 88 : a) Vue palatine du collage des dents prothétiques, la clé en silicone aide
au bon repositionnement. b) Vue vestibulaire du résultat final après finitions.
(Source : Pisseloup, 2017) ............................................................................... 111
Figure 89 : Photographies prises après la mise en bouche de la prothèse amovible
d’usage sur piliers télescopiques. (Source : Pisseloup, 2017) ......................... 111
Figure 90 : a) Radiographie panoramique deux ans après la pose d’un all-on four à
armature en PEEK. b) Infrastructure/suprastructure implantaire en PEEK
BioHPP®. (Source : Zoidis, 2017) .................................................................... 112
Figure 91 : Photographie de la prothèse fixée complète sur implant. (Source : Zoidis,
2017) ................................................................................................................ 112
Figure 92 : Photographie de la situation initiale lors de la première visite (a) et
radiographie panoramique (b). (Source : Oh et coll., 2017) ............................. 113
Figure 93 : a) Photographie de la prothèse fixée d’usage. b) Radiographie
panoramique après pose de la prothèse fixée mandibulaire sur implants. (Source :
Oh et coll., 2017) .............................................................................................. 113
Figure 94 : a) Photographie, vue vestibulaire, après la pose de la prothèse d’usage. b)
Photographie de face après la mise en bouche de la restauration. (Source : Oh et
coll., 2017) ........................................................................................................ 114
15
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Température de transition vitreuse et de fusion des différents PAEK.
(Source : Giraud, 2011) ...................................................................................... 22
Tableau 2 : comparaison du module d’élasticité. (Source : Rho et coll., 1993) ........ 27
Tableau 3 : Tableau récapitulatif comparant la résistance à la flexion. ..................... 28
Tableau 4 : Tableau récapitulatif comparant les propriétés mécaniques du PEEK et du
PEKK. ................................................................................................................. 32
Tableau 5 : Propriétés mécaniques et chimiques des PEEK et PEKK commercialisés
en odontologie. (Source : Jacquot, 2017) .......................................................... 33
Tableau 6 : Tableau récapitulatif des procédures d’assemblage de BioHPP® ......... 42
Tableau 7 : Tableau récapitulatif des procédures d’assemblage de Pekkton® ivory 47
Tableau 8 : Comparaison des propriétés des matériaux communément utilisés en
prothèse provisoire. (Source : Lugagne Delpon, 2017) ..................................... 52
Tableau 9 : Moyennes des valeurs de rétention (en Newton) des crochets en PEEK,
PEKK et Co-Cr selon leurs sections, la profondeur de la contre-dépouille et le
nombre de cycles subis. (Source : Tannous et coll., 2012) ............................... 73
16
INTRODUCTION
Aujourd’hui, ces matériaux entrent peu à peu dans notre arsenal thérapeutique, en
implantologie ainsi qu’en odontologie prothétique, ils restent cependant encore
méconnus.
17
CHAPITRE 1 : LES POLYARYLETHERKETONES
(PAEK)
1. Définitions utiles
18
Homopolymère
Monomère A-A-A-A-A-A-A-A
A
Homopolymère linéaire
A-A-A-A-A-A-A-A-A-A
19
Phase de transition vitreuse
Phase de fusion
Figure 2 : schéma des différentes phases de transition thermique d’un polymère
thermoplastique.
20
2. Présentation de la grande famille des PAEK
Les propriétés des PAEK dépendent de la distribution des fonctions éthers et cétones.
En effet, le ratio influe sur leurs résistances thermiques et leur température de mise en
forme. Plus la quantité de cétone est grande, plus la rigidité du matériau est importante,
et leur température de transition vitreuse et de fusion augmentent également.
(Salamone, 1998) Le tableau 1 résume les caractéristiques thermiques de certains
PAEK liées à leur composition chimique, plus particulièrement le rapport (N) entre le
nombre de fonctions éthers et cétones. En effet, le PEEK, avec deux fonctions éthers
21
pour une fonction cétone (N=2), possède des températures de transitions thermiques
plus basses que celles du PEKK, composé de deux fois plus de fonctions cétones.
22
4. Dérivés des PAEK utilisés en odontologie
4.1. PEEK
4.1.1. Présentation
Le Polyétherétherkétone, dit PEEK, est le plus connu de la famille des PAEK. Il s’agit
d’un matériau polymère synthétique de faible poids moléculaire, très résistant aux
hautes températures, à la corrosion et aux produits chimiques, qui en fait un matériau
très intéressant dans de nombreux domaines industriels. Breveté en 1963 puis
commercialisé en 1978 par la société Imperial Chemical Industries (ICI), il est depuis
utilisé dans les secteurs de l’aérospatial, l’automobile, les transports ferroviaires, le
nucléaire et également très prisé dans le domaine médical comme matériau bio-
implantable.
Appelé poly(oxy-1,4-phénylèneoxy-1,4-phénylènecarbonyl-1,4-phénylène) en
nomenclature universelle, sa structure chimique est très similaire à celles de ses
homologues PAEK avec deux fois plus de fonctions éthers que cétones. Sa formule
est présentée ci-dessous (Figure 5).
23
4.1.2. Biocompatibilité et potentiel allergène
24
4.1.3. Propriétés chimiques et thermiques
Dans certains cas, cette couleur blanchâtre peut avoir un avantage esthétique,
notamment avec le système Novaloc® en PEEK, qui sera détaillé dans la quatrième
partie de ce travail.
Les PAEK sont radiotransparents et n’engendrent pas d’artefacts. Un pâle halo est
visible sur la radiographie. Cette propriété pourrait éventuellement aider à détecter
des caries sous couronnes ou encore du ciment de scellement résiduel. A contrario,
la radiotransparence peut également rendre difficile la vérification radiographique de
25
la bonne adaptation d’un élément prothétique (mise en place d’un pilier implantaire
en PEEK, …) (figure 7). (Al-Rabab’ah et coll., 2017; Zoidis et coll., 2017)
4.1.5. Propriétés mécaniques
Les propriétés mécaniques du PEEK répondent aux normes ISO 10477 relatives aux
matériaux à base de polymère utilisés dans l’art dentaire.
• Densité
Le PEEK possède une densité très faible de l’ordre de 1,3 g.cm-3. À volume égal de
matériau, le titane, utilisé dans les piliers supra-implantaires et les suprastructures, est
environ 3,5 fois plus lourd que le PEEK avec une densité de 4,4 g.cm-3. Les alliages
non précieux, tels Nickel-Chrome (Ni-Cr) et Cobalt-Chrome (Co-Cr), sont environ six
fois plus lourd que le PEEK à volume égal, avec une densité de 7,5 g.cm -3. (Gregoire
et coll., 2009; Dejou, 2009)
C’est donc un matériau très léger, et cette caractéristique est tout à fait intéressante
en prothèse amovible notamment et permet de concevoir une prothèse légère pour
plus de confort en bouche.
26
• Module d’élasticité
Le module d’élasticité, aussi appelé module de Young, est une constante qui relie la
contrainte de traction appliqué à un matériau et la déformation (allongement) de ce
matériau qui en résulte.
Plus le module d’élasticité est élevé, plus le matériau est rigide. Le module de Young
du PEEK se situe entre 3 GPa et 4 GPa.
Le tableau 2 compare le module d’élasticité du PEEK à d’autres matériaux utilisés en
odontologie prothétique, comme le titane, les alliages Cobalt-Chrome et Nickel-
Chrome, ainsi qu’à l’os cortical. Il nous permet de déduire que son module est faible
et se rapproche de l’os cortical et de la dentine (15 GPa). Etant aussi élastique que
l’os, le PEEK peut alors agir comme un « interrupteur de contraintes », aussi appelé
« Off-Peak » et réduire les forces transférées de la restauration aux structures
dentaires en les absorbant. Son utilisation pourrait être intéressante dans le cas de
racines faibles et être un atout dans les armatures de grande portée. (Zoidis et coll.,
2017)
150
110
100 79
50
14
4 5
0
PEEK PEKK Os cortical Or Titane Co-Cr Ni-Cr
27
• Résistance à la flexion
Le test de flexion est un essai mécanique utilisé dans le but de connaître la résistance
à la flexion d’un matériau et sa résistance à la rupture. La flexion est la courbure
obtenue sur une éprouvette posée sur deux appuis à ses extrémités, après l’action
d’une force exercée en son milieu.
La résistance à la flexion est principalement exercée sur le groupe incisvo-canin lors
de la mastication. (Jacquot, 2009)
La résistance à la flexion du PEEK est de l’ordre de 180 MPa selon les données de
BioHPP® de Bredent. (Bredent, 2013) Le tableau 3 montre qu’elle se rapproche des
valeurs de l’os, de l’émail et de la dentine, qui sont respectivement de 150 MPa, < 180
MPa et < 207 MPa. (Perelmuter et coll., 2009)
La résistance à la flexion du titane (grade 5) est de l’ordre de 950 MPa. Dans le cadre
de restauration implantaire, la résistance à la flexion est très élevée et le risque de
résorption osseuse est grande autour de l’implant. De ce fait, la résistance à la flexion
du PEEK semble plus adaptée que celle du titane. (Rocchi, 2016)
28
• Résistance à la traction
L’essai de traction consiste à appliquer une force de traction sur une éprouvette
standardisée du matériau à évaluer. Il permet de connaître le comportement
mécanique du matériau. (Jacquot, 2009)
La résistance à la traction est de 80 à 100 MPa. Elle se rapproche de la résistance à
la traction de l’os cortical (120 MPa). (Tannous et coll., 2012; Najeeb et coll., 2016)
• Résistance à la compression
L’essai de compression consiste à placer une éprouvette sur une presse et à exercer
deux forces axiales opposées.
La résistance à la compression s’exerce essentiellement sur les faces occlusales des
dents postérieures lors de la mastication.
Selon les données de Victrex®, le PEEK pur non renforcé en fibre de carbone est de
125 MPa. La résistance à la compression de l’os est d’environ 190 MPa et celle de la
dentine est d’environ 300 MPa, plus élevées que le PEEK. Ce dernier possède donc
une résistance en compression relativement faible. (Bolla et coll., 2009)
• Résistance à la fatigue
La fatigue est la diminution des propriétés mécaniques d’un matériau soumis à une
charge cyclique.
Le PEEK possède une bonne résistance à la fatigue, enregistrée à environ 1 million
de cycles, selon les données Victrex®.
La littérature semble corroborer ces données, cependant aucune étude scientifique
sur la résistance à la fatigue du PEEK n’a été trouvée.
29
C’est ainsi qu’il existe un PEEK renforcé en fibre de carbone, plus dur à travailler mais
dont les capacités mécaniques seraient accrues. Ce dernier est plutôt utilisé en
comme implant dentaire. Récemment, des tenons en PEEK renforcé en fibre de
carbone sont mis à l’étude dans le cadre de restaurations corono-radiculaires, en
alternative au traditionnel tenon en fibre de verre. Cependant, ces modifications
pourraient peut-être remettre en question la parfaite biocompatibilité du PEEK,
notamment par l’utilisation du dioxyde de titane aujourd’hui controversée. La recherche
se poursuit sur les améliorations à apporter à ce jeune matériau de l’arsenal dentaire.
(Dubois, 2015)
4.2. PEKK
4.2.1. Présentation
30
En odontologie, le PEKK est disponible sous le nom de Pekkton®ivory de
Cendres+Métaux, un dérivé de OXPEKK® utilisé depuis plusieurs années comme
matériaux implantable en médecine (arthrodèse cervicale en PEKK).
4.2.2. Biocompatibilité
Tout comme ses semblables de la famille des PAEK, la structure chimique de PEKK
lui confère une grande stabilité chimique, il est insoluble dans de nombreux solvants
et une bonne résistance à l’hydrolyse à température ambiante et élevée.
(Cendres+Métaux, 2015; Adamzyk et coll., 2016)
Le PEKK est un matériau récent, les propriétés citées dans les articles scientifiques
sont régulièrement celles des fabricants.
• Densité
Tout comme le PEEK, PEKK est un matériau très léger avec une densité moyenne de
1,4 g.cm-3. (Cendres+Métaux, 2015)
• Module d’élasticité
Son module d’élasticité est de l’ordre de 5 GPa pour Pekkton® ivory. (Jacquot, 2017)
Il est proche de celui de l’os cortical (14 GPa) et de la dentine. Cette caractéristique
importante, lui permet de jouer un rôle « d’interrupteur de contraintes » et réduire les
forces transférées aux structures dentaires, à l’instar du PEEK.
31
• Résistance à la flexion
La résistance à la flexion est comprise entre 140 et 200 MPa selon les données de
OXPEKK®, et de 200 MPa pour Pekkton® ivory. (Jacquot, 2017) Ces valeurs sont très
similaires au PEEK et donc aux valeurs de l’os, la dentine et l’émail.
• Résistance à la traction
La résistance à la traction du PEKK est de l’ordre de 110 MPa à 115 MPa, selon les
données de OXPEKK® et Pekkton® ivory. (Jacquot, 2017)
• Résistance à la compression
• Résistance à la fatigue
32
5. Dérivés spécifiques adaptés à l’art dentaire
Il existe différents PEEK et PEKK commercialisés pour la pratique dentaire. Selon les
fabricants, ils ont chacun leurs caractéristiques propres bien qu’ils soient assez
semblables, comme nous le montre le tableau 5. Nous développerons uniquement le
PEEK BioHPP® de Bredent ainsi que le PEKK Pekkton® de Cendres+Métaux, les
matériaux les plus avancés dans la littérature scientifique et sûrement les plus utilisés
malgré leur relative jeunesse dans notre domaine.
33
différentes, par pressée, par moulage par injection ou encore par le procédé de
Conception et Fabrication Assistées par Ordinateur (CFAO).
a) b)
c)
Figure 9 : a) granules de BioHPP®, b) pellets de BioHPP®, c) disques à usiner
BioHPP®. (Source : Bredent, 2013)
• Procédure de pressée
La figure 10 présente le système For 2 Press de Bredent, conçu pour la mise en œuvre
de BioHPP® en utilisant la technique de coulée à cire perdue.
34
Figure 10 : Système For 2 Press de Bredent. (Source : Bredent, 2013)
a) b)
Figure 11 : a) Photographie représentant la mise en revêtement de la maquette en cire
(bleu) montée sur une tige de coulée (vert) dans un cylindre de pressée. b)
Photographie montrant le BioHPP® fondu, l’aspect doit être crémeux et homogène.
(Source : Bredent, 2013)
35
Le processus de pressée dure environ 35 minutes, le prothésiste peut ensuite
procéder au démoulage.
Les résidus de matériaux de revêtement pourront être éliminés lors d’un sablage à
l’oxyde d’alumine sous pression de 2 à 3 bars.
Le contrôle de l’ajustage de la pièce prothétique peut se faire à l’aide d’une fraise en
carbure de tungstène. Les retouches par meulage ou polissage sont facilement
réalisables sans risque de modifier les propriétés mécaniques, à l’inverse de la zircone
par exemple. On peut ensuite procéder au conditionnement. (Bredent, 2013; Gerard,
2015)
La figure 12 résume les étapes de mise en œuvre de BioHPP® lors de la procédure
de pressée.
36
• Technique d’usinage par CFAO
BioHPP® peut également être usiné en Conception et Fabrication Assistées par
Ordinateur, dans un appareil de fraisage standard, en utilisant des disques de fraisage
breCAM.BioHPP® associés à des fraises breCAM.cutter spécialement conçues à cet
effet tout en suivant les recommandations du fabricant (fraises et vitesses de coupes).
Cette technique est utilisée pour la réalisation de pièces prothétiques unitaires,
d’infrastructures de bridges, de piliers personnalisés ou encore de barres supra-
implantaires.
Dans un avenir où la numérisation prend une place de plus en plus grande dans nos
thérapeutiques, la capacité d’usinage du PEEK est un de ses atouts majeurs et fait de
ce matériau un rival potentiel du titane pour les années à venir. En effet, l’usinage du
titane est particulièrement cher alors que les matériaux thermoplastiques sont
beaucoup moins coûteux à mettre en œuvre. Par exemple, d’après les données
industrielles, la marque Invibio® a estimé devoir changer de fraise à usiner après la
réalisation de 10 bridges de trois éléments en céramique, alors que les fraises étaient
encore utilisables après avoir usiner 50 bridges de trois éléments en PEEK. (Invibio®,
2011)
Peu utilisé dans la mise en œuvre du PEEK, le système Thermopress 400 de Bredent,
conçu pour la mise en œuvre de résines thermoplastiques, permet toutefois la
réalisation de châssis en Bio XS® (PEEK) par la technique de coulée par injection.
Afin de compenser la contraction de prise pendant le refroidissement, il faudra utiliser
un plâtre spécial à expansion pour la conception du modèle en plâtre. Lors de la
réalisation de la maquette en cire, il faudra également veiller à sur-dimensionner
l’épaisseur des crochets, les faire plus courts et s’appuyer sur le collet des dents. Lors
de la mise en moufle, la maquette est reliée par des tiges d’injection de 10mm de
diamètre. Les granules de Bio XS® sont fondus lors du préchauffage du Thermopress.
Vient ensuite le temps de l’ébouillantage des moufles et une fois placées dans
l’appareil, on pourra lancer l’injection. Après refroidissement, on pourra démouler et
contrôler l’ajustage de la pièce prothétique.
37
5.1.3. Procédure d’assemblage
La couleur blanche à grisâtre du PEEK ainsi que sa faible translucidité, limitent son
utilisation, notamment dans le cadre des restaurations monolithiques en secteur
antérieur. Afin de palier ce désavantage esthétique, le PEEK sera recouvert de résine
composite. Aujourd’hui encore, de nombreuses études sont menées sur les capacités
adhésives du PEEK. En effet, sa grande résistance à la plupart des solvants
chimiques, due à sa structure moléculaire particulière, et sa faible énergie de surface
sont un défi pour l’amélioration de sa liaison au composite cosmétique, et à son collage
aux tissus dentaires.
• Conditionnement
a) b)
Figure 13 : a) Retouches de la pièce prothètique. b) Sablage de la pièce coulée.
(Source : Bredent, 2013)
38
On applique ensuite un primaire d’accroche spécifique de la marque Bredent, visio.link
(PMMA), afin d’obtenir une cohésion suffisante entre le composite cosmétique et
l’infrastructure en BioHPP®. L’ensemble est alors revêtu d’un composite. Selon
Bredent, toutes les résines composites peuvent être utilisées, avec une préférence
pour la résine de cette même gamme visio.lign®. Pour finir, un polissage minutieux est
effectué (figure 14). (Bredent, 2013)
a) b)
Figure 14 : a) Mise en place d’une couche de composite cosmétique. b) Polissage de
la pièce prothétique. (Source : Bredent, 2013)
39
Le meilleur traitement de surface n’a pas encore été trouvé, il est ainsi difficile d’établir
des recommandations générales.
• Revêtement cosmétique
40
Figure 15 : coupe schématique des différentes structures d'une prothèse avec une
armature en BioHPP® et une partie esthétique en résine composite. (Source : Bredent,
2013)
• Scellement ou collage
41
Du côté des dents supports de la prothèse, elles sont traitées par acide
orthophosphorique à 37%. Pour finir une colle dual, type PANAVIAÔ, est appliquée.
(Andrikopoulou et coll., 2016)
Le tableau 6 résume les différentes procédures d’assemblage actuellement
recommandées pour le BioHPP®.
• Résine composite
Revêtement • Résine acrylique
cosmétique • PMMA
• Céramique
• Conditionnement : sablage
Scellement ou • Oxyde de zinc sans eugénol (provisoire)
collage
• Collage : primaire + colle adhésive (Bredent, 2013)
42
Malgré les perspectives qualitatives de Pekkton® ivory, une question reste en
suspens. En effet, le terme « sans métal » est parfois lisible sur le site internet de
Cendres+Métaux, cependant la présence de dioxyde de titane suggère un apport,
même infime, de métal : Peut-on tout de même utiliser le label « sans métal » ?
a) b)
Figure 16 : a) lingotins de pressée Pekkton® ivory, b) disques à usiner Pekkton® ivory.
(Source : Cendres+Métaux, 2015)
Les mises en œuvre de Pekkton® décrit ci-dessous est celle recommandée par le
fabricant.
• Technique de pressée
43
Les programmes de pressée diffèrent également selon le poids du cylindre, de 100 à
600 g, la pression peut varier de 0 à 6 bars. Enfin, après une phase de refroidissement,
le prothésiste procède au démoulage et aux finitions. (Cendres+Métaux, 2015) La
figure 17 résume les étapes de mise en œuvre de Pekkton® ivory par la technique de
pressée.
réalisation de la Préchauffage du
Mise en revêtement
maquette en cire cylindre à 850 °C
Après
refroidissement,
Finitions
démouler et
détourer
44
a) b)
Figure 18 : a) PEKKtherm. b) PEKKpress. (Source : Cendres+Métaux, 2015)
45
5.2.3. Procédures d’assemblage
Par sa jeunesse, à notre connaissance, Pekkton® a été l’objet d’une seule étude
portant sur ses capacités d’adhésion et de son conditionnement. De plus, cette étude,
menée par Fuhrmann et coll., décrit un intérêt avec son fabricant. Dans cette partie, la
plupart des données exposées est présentée par Cendres+Métaux.
• Conditionnement
Fuhrmann et coll. sont les premiers à étudier les effets de différents traitements du
PEKK afin d’améliorer ses capacités d’adhésion. Ils en concluent que les méthodes
de conditionnement ont une réelle influence sur les forces de liaison. Ils démontrent
également que les meilleurs résultats ont été obtenus en combinant un revêtement de
silice (RocatecÔ Soft) avec un primer (Monobond® Plus) puis un adhésif contenant
des monomères de méthacrylates (Luxatemp Glaze & Bond). La liaison établie s’élève
à 23,6 MPa. (Fuhrmann et coll., 2014)
D’autres études seront nécessaires afin d’évaluer les effets du temps sur les capacités
d’adhésion du matériau et de les améliorer.
• Revêtement cosmétique
Pekkton® ivory peut être recouvert par différents matériaux cosmétiques comme des
dents en résine, des facettes, des résines composites esthétiques ou encore des
céramiques pressées collées, afin d’optimiser le rendu esthétique de la pièce
prothétique. Dans tous les cas, un sablage à l’oxyde d’aluminium de 110 µm de
diamètre à une pression de 2 ou 3 bars, puis l’application d’un primer d’accroche et
d’un adhésif. (Cendres+Métaux, 2015)
• Scellement ou collage
46
Dans le cas de restauration définitive, un sablage de l’intrados est toujours
recommandé, tout comme l’application d’un silicate et d’un silane. Un ciment verre
ionomère, auto-adhésif ou une colle adhésive peut être utilisée. (Cendres+Métaux,
2015)
• Résines composites
Revêtement • Résines acryliques
cosmétique • PMMA
• Céramiques
• Oxyde de zinc sans eugénol (provisoire)
Scellement ou • Ciment verre-ionomère
collage • Ciment auto-adhésif
• Colle adhésive (Cendres+Métaux, 2015)
47
Ce qu’il faut retenir :
48
CHAPITRE 2 : APPLICATIONS DES PAEK EN
PROTHÈSE FIXÉE
Les polymères de hautes performances trouvent aujourd’hui leur place dans les
réhabilitations de prothèses fixées. Les fabricants proposent un panel d’indications,
s’approchant de l’utilisation des matériaux traditionnels. La littérature suggère que les
PAEK trouvent leur intérêt dans les prothèses transitoires et la recherche se poursuit
dans le cadre des prothèses d’usage, pour lesquelles le manque de recul clinique
oblige les fabricants à rester prudents.
Les indications en prothèse fixée restent tout de même intéressantes. Ces matériaux
peuvent être utilisés comme infrastructures de prothèses fixées unitaires ou plurales,
pour la fabrication de bridge collé, provisoires ou définitifs, en secteur esthétique ou
postérieur.
Ces matériaux sont surtout utilisés comme infrastructures de prothèses fixées unitaires
ou plurales, pour la fabrication de bridge collé, provisoire ou définitifs, notamment en
secteur esthétique. Les restaurations monolithiques en PAEK sont également
envisageables en secteur postérieur uniquement, dû à l’aspect blanchâtre.
Les avantages sont, sans doute, peu connus des praticiens. À l’ère du numérique, les
techniques de Conception Fabrication Assistées par Ordinateur (CFAO), de plus en
plus prisées des praticiens, sont ici particulièrement adaptées pour la réalisation des
chapes de couronnes en PAEK.
- Cendres&Métaux propose une durée en bouche de douze mois maximum
pour le port d’une couronne ou d’un bridge provisoire. Ce dernier doit se limiter à trois
éléments (figure 20). Les couronnes unitaires d’usage devraient se limiter à la zone
antérieure. (Cendres+Métaux, 2015)
- Bredent limite moins les applications de BioHPP® en prothèse fixée plurale en
autorisant jusqu’à deux éléments intermédiaires.
En ce qui concerne la préparation des dents, une préparation en congé ou en
épaulement est indiquée, selon Bredent. Les dimensions des sections de bridge et les
49
épaisseurs de revêtement conseillées par les fabricants doivent être respectées afin
de garantir la stabilité de la prothèse dans le temps.
Différents cas cliniques seront envisagés dans ce chapitre afin d’élargir nos horizons.
2. Contre-indications générales
Le manque de recul clinique incite les fabricants à restreindre les indications de leur
matériau, notamment dans les traitements de prothèses fixées plurales, pour lesquels
certains recommandent de ne pas dépasser un élément intermédiaire, notamment en
zone postérieure. Lorsque l’espace inter-occlusal est insuffisant (<1,3 mm), la
réalisation d’une prothèse en PAEK n’est pas conseillée car la pièce prothétique ne
respecterait pas les dimensions idéales garantissant les propriétés mécaniques du
matériau. (Cendres+Métaux, 2015)
Dans les cas de fortes parafonctions tel que le bruxisme, la pérennité de la prothèse
ne serait peut-être pas garantie, bien que la résistance à l’abrasion des PAEK est
proche de la dentine et les dents antagonistes pourraient être ainsi mieux protégées.
50
Pour ce type de restauration, les résines directes ou indirectes (PMMA, acryliques,
etc.…) sont les matériaux les plus utilisés, bien qu’elles soient parfois difficilement
polissables et irritantes pour le tissu parodontal. L’utilisation des matériaux
thermoplastiques tels que les PAEK peut s’avérer être une alternative intéressante par
leur biocompatibilité et leur mise en œuvre facile.
3.1. Avantages
Les principaux atouts des PEEK et des PEKK sont leur biocompatibilité ainsi que leur
très bonne intégration dans le milieu buccal. L’utilisation de ces matériaux peut être
particulièrement intéressante dans le cadre de restaurations transitoires à long terme.
La technique de fabrication indirecte assure une adaptation marginale et occlusale
plus précise de la prothèse transitoire et la maitrise de la rétraction de prise lors de la
polymérisation. Les couronnes monolithiques en PAEK sont tout à fait indiquées dans
les zones non esthétiques, bien qu’elles soient très peu utilisées. Pour une restauration
en zone antérieure, une infrastructure en PAEK recouverte d’une résine composite
cosmétique sera plus appropriée. La couleur blanchâtre de l’infrastructure en PEEK
combinée au composite stratifié évite l’aspect grisâtre d’une armature métallique. De
plus, les forces de liaison unissant une infrastructure en PEEK et le revêtement
composite indirect est suffisamment élevée, selon plusieurs études. (Rzanny et coll.,
2013; Keul et coll., 2014)
L’association des faibles modules de Young des PAEK et des résines composites,
semble réduire le stress occlusal, en agissant comme interrupteur de charges et ainsi
amortir la transmission des forces. Cette technique pourrait alors prévenir les
surcharges occlusales et les fractures sur les dents et les racines faibles. (Zoidis et
coll., 2017)
Des études ont comparé les propriétés mécaniques des matériaux utilisés en prothèse
provisoire, notamment les PMMA, les résines bis-acryliques et les polymères hautes
performances (PEEK, PEKK). Les PHP semblent bénéficier des meilleures propriétés
mécaniques. En effet, ils possèdent une meilleure résistance à la flexion, ils sont moins
solubles dans l’eau et leur état de surface est comparable voire meilleur (tableau 8).
De plus, les prothèses en PHP ne sont pas concernées par la présence de monomères
résiduels nocifs, contrairement aux prothèses composées de résines bis-acryliques.
(Abdullah et coll., 2016; Liebermann et coll., 2016)
51
Tableau 8 : Comparaison des propriétés des matériaux communément utilisés en
prothèse provisoire. (Source : Lugagne Delpon, 2017)
3.2. Inconvénients
52
Bien qu’ils soient faciles à mettre en œuvre et à usiner, le prix du matériau reste élevé
pour une prothèse provisoire, pour cela une prothèse transitoire à long terme voire
d’usage pourrait être plus appropriée.
a) b)
c)
Figure 21 : a) dent 65 cariée, b) dent 65 après pose d’une coiffe pédiatrique en
BioHPP® vue intraorale, c) vue vestibulaire de la coiffe pédiatrique en BioHPP® sur
65. (Source : Ritterbusch et Waschek, 2014)
53
3.4. Exemples de prothèse fixée plurale transitoire en PEEK
3.4.1. Cas clinique n°1
Figure 22 : Vue vestibulaire, situation initiale des dents mandibulaires. (Source : Zoidis
et Papathanasiou, 2016)
Dix jours après la pose des implants, une empreinte en polyvinylsiloxane (en silicone)
est réalisée. Le modèle en plâtre qui en résulte est scanné en 3D avec un scanner de
laboratoire. La maquette en cire de la future infrastructure en PEEK est ensuite
élaborée par CFAO, en respectant les recommandations du fabricant, puis pressée
dans le système For 2 Press (Bredent). Cette infrastructure comprend trois
intermédiaires et s‘appuie sur les faces linguales de 42, 43 et 33. L’adaptation
marginale de la pièce prothétique est vérifiée en bouche avant la procédure de collage
du revêtement esthétique (Gradia®, GC). Un dernier ajustage occlusal et un polissage
final concluent la réalisation du bridge transitoire. Il est finalement collé à l’aide d’une
colle dual (PANAVIAÔ 21, Kuraray) (figures 23 et 24).
54
Pour le suivi, le patient a été éduqué au bon nettoyage de sa prothèse. Durant les
quatre mois de cicatrisation implantaire, aucun descellement n’a été évoqué. (Zoidis
et Papathanasiou, 2016)
a) b)
Figure 23 : a) Vue occlusale, essayage de l’infrastructure en PEEK. b) Vue occlusale,
après collage du bridge collé transitoire. (Source : Zoidis et Papathanasiou, 2016)
Ces matériaux ont été choisis dans le but de diminuer le risque de décollement de la
prothèse. En effet, selon une étude, le descellement augmenterait en fonction du
module d’élasticité du matériau et de la mobilité des dents supports. L’important
module de Young d’une infrastructure métallique combiné à la mobilité des dents
supports, pourraient compromettre la pérennité de la prothèse transitoire, en créant un
excès de stress sur l’interface cimentaire. (Dunne et Millar 1993; Keulemans et coll.,
2015) En suivant les recommandations de collage du PEEK sur l’émail, le recours aux
matériaux de hautes performances est censé assurer une bonne rétention, en limitant
les risques de décollement de la prothèse, et permettre une option prothétique
transitoire esthétique et non invasive.
55
3.4.2. Cas clinique n°2
a) b)
Figure 25 : a) Vue occlusale après chirurgie réparatrice. b) Vue vestibulaire de la
plaque de Hawley avec le remplacement de l’incisive latérale droite manquante.
(Source : Andrikopoulou et coll., 2016)
Une solution alternative fixe, plus confortable et esthétique a été choisie en attendant
la fin de la croissance faciale et la possibilité de poser un implant en 12. Il s’agit d’une
prothèse à infrastructure en PEEK comportant l’incisive manquante en résine
composite qui sera collée sur les faces palatines des dents adjacentes à l’incisive
latérale droite.
Des empreintes maxillaire et mandibulaire sont réalisées afin d’obtenir des modèles
d’étude montés sur articulateur à l’aide d’un arc facial. Une maquette en résine
acrylique de l’infrastructure est ensuite obtenue à partir d’un wax up, selon les
exigences du matériau PEEK (BioHPP®).
L’essayage en bouche de cette maquette permet de s’assurer qu’aucune retouche des
dents n’est nécessaire, et de vérifier l’occlusion par l’absence de contacts prématurés.
Il est décidé d’étendre la prothèse jusqu’aux premières prémolaires pour garantir une
bonne stabilisation.
56
Une empreinte définitive maxillaire est réalisée en silicone ainsi qu’un second wax up
de l’infrastructure. Cette dernière est finalement coulée à la cire perdue avec le
dispositif For2Press.
L’infrastructure en PEEK est essayée et validée puis la dent manquante en résine
composite est ajoutée sur l’infrastructure et photopolymérisée (figure 26 a, b et c).
L’étape finale consiste à conditionner l’intrados et les faces palatines des dents
supports pour le collage de la prothèse. (PANAVIAÔ, Kuraray)
Le patient est éduqué et encouragé à avoir une hygiène interdentaire impeccable
(figure 26d). (Andrikopoulou et coll., 2016)
a) b)
c)
d)
Figure 26 : a) Vue occlusale lors de l’essayage de la maquette en résine acrylique. b)
Vue occlusale du résultat final avec la prothèse collée en PEEK comportant la 12
manquante. c) Vue vestibulaire du résultat final. d) Vue vestibulaire montrant le
passage des brossettes interdentaires. (Source : Andrikopoulou et coll., 2016)
57
4. Utilisation des PAEK pour la prothèse fixée d’usage
Les PAEK se prêtent bien à la prothèse unitaire d’usage. Les couronnes sont alors
composées d’une infrastructure en PEEK ou en PEKK puis recouverte dans un second
temps par une résine composite esthétique, selon les recommandations des
fabricants.
4.1. Avantages
4.2. Inconvénients
L’inconvénient majeur des PAEK est leurs propriétés optique et esthétique qui ne
permettent pas de réaliser des couronnes monolithiques en secteur antérieur. Ainsi, le
recours aux résines composites est essentiel afin de recouvrir les infrastructures en
PAEK. Bien qu’esthétiques, les résines sont moins pérennes que les céramiques.
58
Il faudra probablement rebaser la résine cosmétique. Un kit de réparation, prévu à cet
effet, est disponible chez certains fabricants.
Le manque de recul clinique ne nous permet pas d’évaluer avec précision l’impact du
temps sur les couronnes fixées définitives.
Depuis des décennies, les réhabilitations prothétiques sur dents dépulpées font très
souvent appel à un ancrage radiculaire (le plus souvent un inlay-core métallique) et
une reconstitution coronaire afin de garantir la rétention de la couronne. Pourtant, le
recul clinique rapporte de nombreux cas de fractures radiculaires sur ce type de
traitements. Plusieurs études s’accordent à dire que la distribution du stress autour du
tenon radiculaire est une cause majeure des fractures radiculaires. (Dilmener et coll.,
2006; Komada et coll., 2006)
La différence considérable entre les modules d’élasticité de la dentine (»18 GPa) et du
tenon intraradiculaire, en alliages métalliques par exemple (»100 GPa), entraine un
excès de stress autour du tenon, responsable des fractures radiculaires et menant à
l’avulsion de la dent. (Fraga et coll., 1998; Akkayan et Gülmez, 2002)
Depuis quelques années, les tenons en fibres de verre accompagnés d’une
reconstitution en résine composite ont fait leur apparition. Leur module d’élasticité
( » 50 GPa), plus faible que les métaux, offre une meilleure distribution du stress autour
du tenon radiculaire. (Pegoretti et coll., 2002; Okada et coll., 2008)
Une étude a récemment comparé, par une analyse numérique 3D, trois systèmes
d’ancrage et la répartition du stress qu’ils engendrent sur l’ensemble de la dent. Un
inlay-core en alliage métallique, un second en PEKK et un tenon fibré préfabriqué avec
un faux moignon en résine composite ont été étudiés. Cette expérimentation virtuelle
menée sur une incisive centrale maxillaire, a ainsi établi différents modèles de
répartition des forces, s’exerçant sur la dentine radiculaire, le ciment de scellement,
l’inlay-core lui-même et sur la restauration coronaire. De manière globale, les
contraintes semblent moins importantes dans le cas du PEKK.
59
Pour l’alliage métallique et le tenon en fibre de verre, la répartition des forces est
généralement plus élevée que le PEKK, notamment dans la zone cervicale de la racine
et au péri-apex.
Ainsi, le PEKK présenterait une répartition favorable des contraintes, et pourrait alors
réduire le risque de fracture radiculaire par rapport aux matériaux conventionnels. Ceci
serait dû à son module d’élasticité, plus faible que celui de la dentine. Il semblerait
également que, malgré ses propriétés mécaniques relativement faibles, le PEKK
possède une résistance à la fracture relativement élevée, comparée aux autres
matériaux. Cependant, l’inlay-core en PEKK présenterait apparemment les contraintes
les plus élevées au niveau de l’interface cimentaire et de la restauration coronaire et
cela pourrait augmenter le risque de descellement, de la couronne et de l’inlay-core
lui-même (figure 27). (Lee et coll., 2017)
Cette étude sur ce nouveau type d’inlay-core reste théorique et à notre connaissance,
aucun essai n’a été effectué en bouche, à ce jour.
60
Figure 28 : Photographie d’un Inlay-core à clavette en PEKK. (Source : Pham, 2014)
4.3.2. Exemple d’une restauration coronaire extensive en PEEK
L’endocouronne, décrite pour la première fois en 1995, est définie comme une
restauration adhésive monolithique, le plus souvent en céramique, type disilicate de
lithium. (Zoidis et coll., 2017)
Elle est parfois recommandée pour restaurer une molaire avec des racines courtes,
calcifiées ou dont la courbure ne permet pas la mise en place sécurisée d’un tenon
radiculaire. (Biacchi et Basting, 2012) En effet, la préparation d’une couronne
classique avec un système d’ancrage radiculaire est une technique délabrante, et n’est
pas sans risque lorsque la dent est déjà très atteinte. L’endocouronne offre une
approche adhésive plus conservatrice et parfois plus esthétique, n’impliquant pas de
préparations de rétention trop lourdes. Des études in vitro rapportent que
l’endocouronne génère moins de stress sur la dentine comparée aux restaurations
conventionnelles, et de surcroît, les dents seraient potentiellement plus résistantes à
la fracture par rapport à une restauration par inlay-core métallique ou par tenon fibré.
(Chang et coll., 2009; Dejak et Młotkowski, 2013) Cependant, le recours à un matériau
moins rigide que la céramique pourrait peut-être diminuer encore le risque de fracture.
Ainsi, dans le but de diminuer les contraintes subies par une dent déjà fortement
endommagée, Zoidis et coll. présente un autre genre d’endocouronne en PEEK. Il
s’agit, en réalité, d’une infrastructure d’endocouronne en PEEK, reposant sur la
chambre pulpaire préalablement préparée, recouverte d’une résine composite
esthétique (figure 29). Ainsi, le terme « restauration coronaire extensive » semble plus
adapté que « endocouronne », faisant référence à une prothèse monobloc. Ce cas
clinique combine donc la technique de l’endocouronne, préservant au maximum les
61
tissus dentaires restants, avec des matériaux, dont leur faible module d’élasticité
permettrait de réduire le stress occlusal en absorbant les forces transmises à la dent.
Un patient de 35 ans présente une molaire 17, ayant déjà subie plusieurs traitements
endodontiques qui se sont soldés par une perforation du canal mésial et une résorption
radiculaire apicale (figure 30). Cependant, la dent étant asymptomatique depuis le
dernier retraitement radiculaire, le choix d’une restauration coronaire fonctionnelle se
pose. L’option d’un tenon radiculaire a été écartée au profit d’une « endocouronne »
en PEEK, en raison de la perforation et de la préparation extensive des canaux.
La dent a été préparée avec une réduction occlusale de 2 mm et une finition en
chanfrein. La chambre pulpaire a été aplatie et dépourvue de contre-dépouilles (figure
31).
62
Après une étape de restauration provisoire basique en résine, une empreinte au
silicone a été réalisée, permettant la fabrication de l’infrastructure en PEEK (BioHPP®,
Bredent) par coulée à la cire perdue. Cette infrastructure a ensuite été validée par un
essayage en bouche, puis conditionnée pour le collage de la résine composite de
recouvrement, à savoir l’utilisation d’un primer (visio.link, Bredent) puis la mise en
place et la photo-polymérisation, par couches successives de la résine composite
(Gradia®, GC). Un second essayage de la pièce prothétique avec des ajustements
occlusaux ont été effectués suivi d’un polissage méticuleux, avant son collage définitif
à l’aide d’une colle dual en résine composite (Variolink® Esthetic, Ivoclar Vivadent)
(figure 32).
Une évaluation, deux ans après la pose de la prothèse, a attesté de sa bonne rétention
ainsi que l’absence d’infiltrations. (Zoidis et coll., 2017)
a)
b)
Figure 31 : a) vue vestibulaire de la préparation pour une endocouronne avec réduction
occlusale. b) vue occlusale de la chambre pulpaire et de sa préparation. (Source :
Zoidis et coll., 2017)
63
a)
b)
Figure 32 : a) vue vestibulaire lors de l’essayage de l’infrastructure en PEEK. b) vue
vestibulaire après la pose de la prothèse. (Source : Zoidis et coll., 2017)
Cette technique d’endocouronne associée au PEEK, pourrait éventuellement protéger
davantage les structures dentaires restantes et préserver les racines faibles. D’autres
études à plus long terme seront cependant nécessaires pour démontrer l’utilité réelle
du PEEK comme matériau alternatif.
Un récent article de revue fait part d’une technique de mise en œuvre de prothèse
fixée plurale, utilisant la technologie CAD/CAM. Cette technique consiste à réaliser
puis à assembler deux infrastructures, l’une en PEEK qui servira d’armature, et l’autre
en composite qui recouvrira l’ensemble pour le rendu esthétique. Dans cet exemple,
64
un bridge complet maxillaire sera réalisé sur huit dents piliers préalablement
préparées, les empreintes et les modèles en plâtre ont été réalisés.
Pour commencer, une analyse rigoureuse permet de réaliser un montage directeur,
qui sera validé selon l’occlusion et l’esthétique. Le modèle en plâtre et le montage
directeur sont tous les deux scannés, puis à l’aide d’un logiciel adapté, ils peuvent être
assemblés en 3D (figure 33). Les limites des préparations et l’axe d’insertion de la
prothèse sont décidés et validés. Ce logiciel crée un montage en cire virtuel calqué sur
le montage directeur. Selon les recommandations des matériaux et une réduction
homothétique du montage directeur, l’ordinateur virtualise l’infrastructure et la couche
cosmétique (figure 34).
Après validation, les deux parties sont usinées ; L’infrastructure dans des disques à
usiner BioHPP® (Bredent), et la coque esthétique dans un disque de composite de la
gamme Bredent (HIPC) (figure 35). Puis ces parties sont sablées et une couche de
primaire d’adhésion (visio.link, Bredent) vient recouvrir l’infrastructure et l’intrados de
la structure composite avant d’être photopolymérisée. Une couche d’opaque sur
l’armature est également appliquée et polymérisée afin de renforcer l’adhésion et
l’esthétisme. Une colle composite duale (combo.lign, Bredent) est appliquée dans
l’intrados de la partie cosmétique avant son insertion sur l’armature en PEEK, puis
photopolymérisée. Après ces étapes, nous obtenons un bridge complet. Afin
d’optimiser le rendu esthétique, une technique de stratification est réalisée en résine
composite chargée en céramique (crea.lign, Bredent). Après le collage des structures,
un ressablage, et une nouvelle couche de primer, les zones cervicales sont
recouvertes d’une couche de composite « dentine ». À l’aide d’une clé en silicone, une
technique de cut-back permet de créer des découpes dans le composite pour l’étape
de caractérisation avec des pigments et des maquillants ainsi qu’une couche de
composite « incisal » (figure 36). Pour finir, un polissage minutieux est indispensable
afin d’éliminer tous monomères résiduels et d’obtenir une surface parfaitement polie
résistant à la plaque dentaire (figure 37). (Gerard, 2016)
65
Figure 33 : Image 3D des scans du maître modèle (jaune) et du montage directeur
(rouge) et visualisation de leur superposition. (Source : Gerard, 2016)
a) b)
Figure 34 : a) Image du choix de l’axe d’insertion de la prothèse, après le tracé des
limites. b) Visualisation tridimensionnelle de l’infrastructure en PEEK (blanc) et de la
coque cosmétique (jaune). (Source : Gerard, 2016)
a) b)
Figure 35 : a) Infrastructure en PEEK après son usinage. b) Coque cosmétique après
son usinage. (Source : Gerard, 2016)
66
a) b)
Figure 36 : a) Assemblage des deux structures. b) Découpe incisale et caractérisation
esthétique.
a)
b)
Figure 37 : Bridge complet après finitions, vue vestibulaire (a), vue palatine (b).
(Source : Gerard, 2016)
67
Ce qu’il faut retenir
Les Polyaryletherketones trouvent peu à peu une place parmi les matériaux
conventionnels de prothèse fixée. Ils sont principalement utilisés pour des couronnes
unitaires ou bridges de trois éléments. Le manque de recul clinique oblige les
fabricants et les praticiens à rester prudent sur la pérennité de ces prothèses.
Cependant, de nouveaux articles, mettant toujours plus ces matériaux à l’épreuve,
sont régulièrement publiés dans la littérature scientifique. Les prochaines années nous
diront si les polymères haute performance peuvent être considérés comme des
matériaux d’avenir pour la prothèse fixée.
68
CHAPITRE 3 : APPLICATIONS DES PAEK EN
PROTHÈSE AMOVIBLE
2.1. Avantages
69
Utilisé depuis plusieurs années déjà dans les capuchons de cicatrisation implantaires,
le PEEK est non iatrogène, non irritant, biocompatible et possède une conductivité
thermique et électrique négligeable. (Tetelman et Babbush, 2008)
Au moins six fois plus léger que les alliages Ni-Cr et Co-Cr, c’est un véritable atout
pour le confort des patients. Le « goût » et l’aspect métallique dans l’esthétique de la
prothèse, doléances fréquemment rencontrées au cabinet dentaire, sont absents dans
la prothèse amovible en PEEK.
Plusieurs études sur des châssis comparent les plaques conventionnelles en Co-Cr
avec une plaque en PEEK et évoquent l’hypothèse d’une réduction du stress exercé
sur les dents supports de crochets. En effet, les dentistes ayant testé la PAP en PEEK,
confirment une insertion et désinsertion plus douce due à sa flexibilité et pourrait
diminuer les forces scoliodontiques exercées sur les dents. Cet aspect est intéressant
dans le cadre de réhabilitation sur un terrain parodontal limite. (Fages et coll., 2016)
Dans le cas où les dents restantes présentent des versions ou des malpositions, un
châssis en PEEK pourrait être une bonne solution ; par sa flexibilité, il pourrait
s’adapter à des axes d’insertion complexes et les crochets pourraient passer sans
difficulté les contre-dépouilles. (Hosten, 2017)
Grâce à l’usinage aisé du PEEK, la conception de plaque en PEEK à l’aide de la
technologie CFAO pourrait simplifier le travail du prothésiste. En effet, très peu de
retouches sont nécessaires sur la plaque base, le polissage final peut être effectuer
en même temps que la résine. (Hosten, 2017) La méthode conventionnelle de coulée
à cire perdue est également possible, cependant des études ont mis en évidence
certains avantages dans la procédure de CFAO non négligeables tels que la
diminution du temps de travail pour le prothésiste et la diminution de la porosité de
surface, critère important pour réduire l’agglomération des micro-organismes et la
pérennité de la pièce prothétique. (El Mekawy et Gad, 2016)
D’autre part, dans le cadre de la fabrication de prothèse amovible complète (PAC),
l’apport d’une infrastructure en PAEK permettrait également de renforcer la base de la
prothèse afin de diminuer le risque de fracture de la PAC (figure 38). En effet, face à
une arcade dentée ou dotée de nombreuses couronnes en céramique, le différentiel
entre les propriétés mécaniques de la structure dentaire ou de la céramique d’une part
et la résine acrylique d’autre part peut entraîner un affaiblissement de la pérennité de
la PAC en résine.
70
Figure 38 : Vue de l’intrados d’une prothèse amovible complète sur infrastructure en
PEKK et des dents en disilicate de lithium. (Source : Dawson et coll., 2017)
2.2. Inconvénients
a) b)
Figure 39 : Comparaison entre un châssis classique en Cobalt-Chrome (a) et un
châssis en PEEK épaissi (b). (Source : Fages et coll., 2016)
71
Afin de garantir une bonne stabilité de la plaque, il peut être intéressant d’étendre les
limites de la prothèse. Certains fabricants préconisent une connexion principale en
bandeau lingual, plutôt qu’une barre linguale, pour plus de rigidité et de stabilité, et
ainsi éviter des rotations de la plaque, bien que quelques cas cliniques fassent
référence à des connexions en barre. Cependant, il faudra veiller à sélectionner les
patients pouvant bénéficier d’un bandeau lingual afin de ne pas entraîner ou aggraver
d’éventuels problèmes parodontaux dus à cette connexion.
Une étude a comparé les forces de rétention des crochets en PEEK et ceux en Cobalt-
Chrome, sur le même patient 24h après la pose de l’appareil. Il a été démontré que
les crochets en PEEK sont moins rétentifs par rapport aux crochets Co-Cr. (El Mekawy
et Gad, 2016)
Tannous et coll ont par ailleurs étudié la rétention et la fatigue des crochets en fonction
de leur épaisseur et de la profondeur des contre-dépouilles. Cette étude compare des
crochets en PEEK et en PEKK de 1 mm puis de 1,5 mm d’épaisseur sur des
profondeurs de contre-dépouilles de 0,25 mm et 0,50 mm, par rapport à des crochets
en Co-Cr de 1 mm d’épaisseur. Il ne semble pas y avoir de différences significatives
entre les valeurs de rétention pour les matériaux PEEK et PEKK, bien qu’ils soient très
inférieurs aux crochets Co-Cr. Néanmoins, pour une épaisseur de 1,5 mm, la rétention
des crochets PEEK et PEKK pourrait être suffisante et ne semble pas plus affectée
que le Co-Cr dans le temps. Les meilleures valeurs sont obtenues pour des contre-
dépouilles de 0,50 mm de profondeur (tableau 9). (Tannous et coll., 2012)
De plus, deux études ont suggéré qu’une force de rétention de 5N serait appropriée
pour une prothèse amovible partielle et des forces de rétention comprises entre 3,7 N
et 7,5 N peuvent être admises dans le cadre d’une réhabilitation d’un édentement
postérieur bilatéral. (Frank et Nicholls, 1981; Sato et coll., 1997)
Si les crochets en PAEK sont trop flexibles et n’offrent pas une rétention aussi bonne
que les crochets conventionnels, ils peuvent cependant s’engager dans de fortes
contre-dépouilles et ainsi éviter des préparations délabrantes sur les dents supports.
Les crochets et les bras de rétention doivent donc être épaissis et un élargissement
de la queue des crochets en forme de boule, et non en pointe comme pour le métal,
peut augmenter la rigidité, pour un meilleur maintien. (Hosten, 2017)
72
Tableau 9 : Moyennes des valeurs de rétention (en Newton) des crochets en PEEK,
PEKK et Co-Cr selon leurs sections, la profondeur de la contre-dépouille et le nombre
de cycles subis. (Source : Tannous et coll., 2012)
Zoidis et coll. ont publié un article présentant une patiente de 70 ans qui souhaite
bénéficier d’une alternative à sa prothèse amovible partielle à infrastructure métallique
mandibulaire (PAPIM) (figure 40a). La sensation d’un goût métallique, le poids de sa
prothèse ainsi que l’aspect esthétique des crochets gris sont ses principales
doléances. Elle ne souffre apparemment pas d’allergie aux métaux ni aux résines. La
patiente présente un édentement postérieur libre mandibulaire. Sa PAPIM est
composée d’une barre linguale, de deux crochets en T de Roach situés sur 44 et 35
ainsi que trois taquets occlusaux en appuis sur la face mésiale de 44, la face linguale
de 33 et les faces distales et mésiales de 34 et 35.
Le plan de traitement, validé par la patiente, consiste à réaliser une prothèse amovible
partielle à infrastructure en PEEK (BioHPP®), recouverte d’une résine acrylique
thermodurcissable ainsi que des dents acryliques. Après avoir réalisées les étapes
classiques précédents la réalisation de la prothèse, à savoir : prise d’empreinte,
modèle d’étude, réalisation du PEI, et empreinte secondaire à l’aide d’un polysulfure,
l’infrastructure en PEEK est réalisée selon la technique de coulée à cire perdue.
73
Toutefois, la plaque est légèrement adaptée afin d’optimiser les propriétés du
matériau. Un bandeau lingual remplace à présent la barre linguale, les taquets
occlusaux ne sont pas modifiés, seul l’appui sur 33 a disparu. Les crochets en T de
Roach sont remplacés par deux crochets en C, s’engageant dans une contre-dépouille
de 0,50 mm sur 35 et 44.
L’essayage de l’infrastructure et l’enregistrement du rapport intermaxillaire en relation
centrée étant validés, le prothésiste procède à la mise en place des dents acryliques
et de la résine (figure 40b). Après un ajustage occlusal, la prothèse est livrée. La
patiente est étonnée de « l’absence de poids », et satisfaite de la couleur blanche
« saine » de sa nouvelle prothèse. La rétention est évaluée et semble équivalente bien
que plus « douce » (figure 41). (Zoidis et coll., 2016)
a)
b)
Figure 40 : a) Vue linguale de l’ancienne PAPIM. b) Vue linguale de la PAP à
infrastructure en BioHPP®. (Source : Zoidis et coll., 2016)
74
Figure 41 : Vue vestibulaire en occlusion avec la PAP en PEEK. (Source : Zoidis et
coll., 2016)
2.3.2. Exemples de plusieurs cas cliniques
75
a) b)
Figure 43 : Cas particulier avec des axes d’insertion divergents au niveau des
molaires. La rigidité des crochets en Cr-Co n’aurait pas permis leur bonne mise en
place. La flexibilité des crochets en PEEK permet de passer les contre-dépouilles sans
forcer sur les dents. (Source : Hosten, 2017)
a) b)
Figure 44 : Cas d’une prothèse complètement biocompatibilité non irritante pour une
patiente allergique à la résine. L’intrados est totalement recouvert de PEEK. (Source :
Hosten, 2017)
a) b)
Figure 45 : Prothèse complexe avec une couronne céramo-métallique sur 23 et
attachement extra-coronaire. La partie femelle en téflon est inclue dans l’intrados de
la PAP en PEEK. Ce procédé est également utilisé en full zircone avec un
attachement, type glissière, également en zircone, pour une prothèse combinée
entièrement biocompatible. (Source : Hosten, 2017)
76
3. La prothèse amovible en PAEK sur coiffes télescopiques
3.1. Présentation
Les polymères PAEK peuvent être rencontrés dans un autre type de restauration
prothétique. La prothèse amovible sur coiffes télescopiques permet d’intégrer les dents
restantes encore saines à l’entité prothétique et ainsi de les préserver tout en comblant
d’importants édentements.
Cette technique associe étroitement la prothèse fixée et la prothèse amovible, et
impose donc le respect des principes de réalisation de chacune d’elle.
Elle s’établie sur trois étages prothétiques principalement :
Ø Une couronne primaire solidaire de la dent restante qui peut être vivante
ou dépulpée et préparée selon les critères de prothèse fixée.
Ø Une partie secondaire qui viendra parfaitement s’insérer sur la couronne
primaire. Cette suprastructure est incluse dans la partie tertiaire. C’est la
coiffe télescopique.
Ø Cette partie tertiaire correspondant à l’infrastructure de la prothèse
amovible.
C’est la friction entre les éléments primaire et secondaire qui garantit la rétention de la
prothèse amovible. (Berman et Lustig, 1960) La figure 46 schématise ces différents
étages prothétiques.
77
Différents matériaux peuvent être utilisés pour chaque partie de la prothèse. Des
alliages métalliques, en Co-Cr ou à haute teneur en or sont souvent employés dans
les parties primaires et secondaires. L’apparition de la zircone évite les phénomènes
d’électro-galvanisme entre des pièces prothétiques métalliques d’alliage différent.
Des études in vitro se sont intéressées à l’utilisation du PEEK pour la réalisation de
chaque structure. La rétention entre les éléments primaire et secondaire a été
comparée selon les matériaux et différents degrés de conicité. Ainsi, Stock et coll.
suggère que le PEEK pourrait être un matériau convenant à l’élaboration de couronne
primaire, quel que soit le degré de conicité ou le matériau de la chape secondaire,
zircone ou Co-Cr. (Stock et coll., 2016a)
Une seconde étude évoque la possibilité d’utiliser le PEEK pour les coiffes
télescopiques. En effet, il semble que la rétention entre une couronne primaire en
zircone et une coiffe télescopique en PEEK soit suffisante pour ce type de restauration.
(Merk et coll., 2016) De plus, l’association de ces deux matériaux évite tout échange
ionique et l’apparition de tatouage gingival. Elle offre également une prothèse presque
entièrement biocompatible, dépourvue de métal. D’autres études ont évalué l’influence
de la méthode de fabrication des coiffes télescopiques en PEEK sur les valeurs de
rétention. Il semblerait que les coiffes en PEEK obtenues par pressée parviennent à
des forces de rétention élevées et stables et ne subissent aucune différence de
rétention selon le degré de conicité de la couronne primaire. Ceci ne s’est pas vérifié
pour les coiffes usinées en PEEK, mais leurs valeurs restent tout de même
intéressantes. De plus, le procédé de fabrication des coiffes est plus aisé par usinage
CFAO que par une technique de pressée. (Stock et coll., 2016b; Wagner et coll., 2018)
Un récent cas clinique a utilisé le Pekkton® ivory pour la fabrication en CFAO des
piliers télescopiques implantaires ainsi que de l’infrastructure d’une prothèse amovible
complète sur coiffes télescopiques (figure 47). Tous les éléments supra-implantaires
sont donc en polymères haute performance et pourraient ainsi répartir au mieux les
forces transférées autour des implants afin de les pérenniser. (Park et coll., 2017)
78
a) b)
Figure 47 : a) Piliers implantaires télescopiques et infrastructure de la prothèse
amovible télescopique en PEKK Pekkton® Ivory. b) Vue de l’intrados de la prothèse.
(Source : Park et coll., 2017)
D’autres investigations seront nécessaires afin d’analyser les effets du temps sur le
vieillissement et la rétention des éléments en PAEK.
Une patiente de 79 ans présentant une ancienne prothèse amovible n’est pas satisfaite
du résultat esthétique et fonctionnel de sa bouche (figure 48). L’anamnèse complète,
buccale et posturale, a mis en évidence un désordre cranio-mandibulaire ainsi qu’une
occlusion défavorable se répercutant sur la colonne vertébrale, avec des douleurs
cervicales et diverses tensions musculaires, notamment au niveau des épaules. Dans
le but d’une réhabilitation globale, la cavité buccale est associée au corps dans son
intégralité.
79
Le choix d’une restauration télescopique a été réalisé afin d’intégrer les dents
restantes à la prothèse malgré leur positionnement désavantageux et un édentement
important. De plus, la prothèse télescopique procure au patient une hygiène buccale
plus aisée par la facilité d’insertion et de retrait de la prothèse.
La patiente souhaitant bénéficier d’une restauration dépourvue de métal, le choix des
matériaux s’est posé. La réalisation des couronnes primaires en zircone aurait été une
option valable. Cependant, la présence de diverses tensions musculaires, a orienté le
choix vers des matériaux plus souples, inertes et légers. Ainsi, les polymères haute
performance tel que le PEEK et des composites renforcés ont été désignés comme
matériaux de choix pour ce cas complexe.
La figure 49 permet de visualiser l’ensemble de la restauration prothétique
télescopique avec les matériaux utilisés.
Après le dépose des anciennes couronnes et les traitements conservateurs
nécessaires, les dents 13, 21, 23 et 24 sont désignées pour servir de piliers pour la
restauration maxillaire et 36, 34, 43, 45 comme piliers au niveau mandibulaire. La
canine mandibulaire gauche (33) saine sera laissée intacte.
La préparation des dents, selon les impératifs de prothèse fixée, est suivie par la prise
d’empreinte. Les modèles obtenus sont scannés et les huit parties primaires sont
usinées dans un composite renforcé en polymères (PMMA HIPC, Bredent) (figure 50).
80
Figure 50 : Visualisation numérique des parties primaires sur les dents piliers
maxillaires. (Source : Hirmer et Kather, 2015)
a) b)
Figure 51 : a) essayage de la maquette en cire. La dimension verticale est augmentée,
la 33 n’est plus dans le plan fonctionnel. b) Montage wax up de 33. (Source : Hirmer
et Kather, 2015)
81
Figure 52 : Second essayage validé, avec intégration de 33. (Source : Hirmer et
Kather, 2015)
a) b)
Figure 53 : a) Assemblage des segments en PEEK de la partie tertiaire. b) Résultat
final de la prothèse amovible télescopique à infrastructure en PEEK. (Source : Hirmer
et Kather, 2015)
82
Les parties primaires et la facette de 33 sont insérées avant la mise en bouche des
prothèses finales (figure 55). La patiente est grandement satisfaite, aussi bien par son
aspect visuel que sa fonctionnalité (figure 56).
Figure 55 : Mise en place des parties primaires sur les dents piliers et de la facette sur
33. (Source : Hirmer et Kather, 2015)
a) b)
c)
Figure 56 : Photographies après mise en bouche finale des prothèses télescopiques
à infrastructure en PEEK maxillaire et mandibulaire. (Source : Hirmer et Kather, 2015)
83
4. Utilisation des PAEK en prothèse maxillo-faciale
4.1. Présentation
84
4.2. Cas clinique
Ce cas clinique présente une patiente de 58 ans, soignée pendant plusieurs années
d’une tumeur rhinosinusale, qui a subi une ablation totale des os du nez et partielle de
l’os maxillaire gauche. Sa prothèse obturatrice, réalisée en résine acrylique après la
chirurgie, a été rebasée de nombreuses fois et ne convient plus fonctionnellement ni
esthétiquement (figure 57). La perte de substance tissulaire a entrainé une
communication bucco-sinusienne importante et la perte de la phonation, déglutition et
mastication. Le plan de traitement consiste donc à réaliser un obturateur maxillo-facial
partiel au maxillaire et une prothèse amovible partielle mandibulaire afin de rétablir les
fonctions orales et répondre aux exigences esthétiques de la patiente.
a) b)
Figure 57 : a) Photographie de la perte tissulaire après chirurgie avec une
communication bucco-sinusienne. b) Ancienne prothèse maxillo-faciale inesthétique
et non fonctionnelle. (Source : Costa-Palau et coll., 2014)
Afin de saisir les limites exactes de la future prothèse, l’obturateur d’usage a été rebasé
avec un produit de rebasage et de conditionnement tissulaire. Quelques jours après,
la prothèse a été retirée avec des limites propres et nets, puis dupliquée en résine. À
l’aide du modèle répliqué, une machine de précision est utilisée afin de réaliser la partie
palatine et sinusale, à partir de disques à usiner en PEEK. Un essayage en bouche a
permis d’évaluer l’ajustement de l’obturateur. Une empreinte de transfert en silicone a
été faite pour la réalisation de la prothèse partielle maxillaire en résine ainsi qu’une
empreinte classique pour la prothèse partielle mandibulaire. La rétention mécanique a
été privilégiée lors de l’assemblage des différentes parties de la prothèse. Une rainure,
de 3 mm de profondeur sur 1,5 mm de largeur, a été réalisée sur tout le pourtour de la
pièce en PEEK, ainsi qu’un traitement par micro-abrasion (figure 58).
85
L’application d’un adhésif biocompatible assure une rétention chimique avec la résine
acrylique.
D’autres ajustages en bouche ont été nécessaires afin d’obtenir une phonétique
correcte. Après les étapes de finitions, les prothèses ont été mises en bouche. Les
tissus mous ont réagi favorablement au contact du PEEK. La patiente a été satisfaite
de l’amélioration du maintien, de l’esthétique et du confort qu’elles lui procurent (figure
59).
86
Ce qu’il faut retenir :
87
CHAPITRE 4 : APPLICATIONS DES PAEK EN
PROTHÈSE IMPLANTAIRE
PEEK pourrait trouver une place dans le choix des matériaux implantaires, notamment
dans la fabrication des vis implantaires, traditionnellement en titane. L’élasticité du
PEEK, bien plus proche de celle de l’os cortical que le titane, présenterait un avantage
sur ce dernier.
Une étude a comparé quatre types de vis de 1,6 mm de diamètre en PEEK par rapport
à un groupe test représenté par des vis en titane de grade 5. Le premier groupe
présente des vis usinées en PEEK modifié avec 20% de poudre de dioxyde de titane.
Le second en PEEK renforcé contenant 15% de fibres de carbone, puis 40%, ces deux
groupes de vis sont obtenus par un procédé de coulée par injection.
88
Le dernier groupe présente des vis usinées en PEEK renforcé contenant 50% de fibre
de carbone unidirectionnelle (figure 60). Ces vis ont été soumises à des tests de
traction afin d’évaluer leur résistance maximale. Les résultats ont montré une
différence significative entre les groupes en PEEK et le groupe contrôle en titane.
Ainsi, la résistance de traction maximum obtenue pour le groupe PEEK modifié
contenant 20% de poudre de dioxyde de titane s’élève à 76,08 MPa. Les deux groupes
de vis en PEEK renforcé à 15% et 40% de fibre de carbone ont des résultats plutôt
similaires de l’ordre de 155 MPa. Enfin, le groupe en PEEK renforcé à 50% de fibre de
carbone obtient les meilleures valeurs de l’ordre de 191 MPa. Ces résultats sont très
loin derrière le groupe contrôle en titane qui est évalué à environ 1190 MPa.
Cependant, en fonction du torque appliqué, de la disposition des fibres de carbone au
sein du matériau PEEK, parallèle dans le sens du grand axe de la vis et donc parallèle
aux contraintes, le PEEK pourrait être utilisé pour la fabrication de vis implantaires à
condition qu’il soit renforcé d’au moins 50% de fibre carbone afin de garantir la stabilité
mécanique requise par cette application. (Schwitalla et coll., 2016)
Figure 60 : de gauche à droite : vis en PEEK 20% dioxyde de titane, vis en PEEK 50%
fibre de carbone et vis en titane grade 5. (Source : Schwitalla et coll., 2016)
89
Cependant, pour réaliser une empreinte optique en technique CFAO, le pilier de
transfert est remplacé par un corps de scannage (scanbody). Il est également vissé
dans l’implant, puis numérisé, permettant de connaître précisément l’emplacement et
l’orientation de l’implant. Il existe différents types de corps de scannage, en fonction
du type d’implant et du type d’acquisition des données numériques. Le logiciel
reconnaît ensuite le profil du corps de scannage et donc celui de l’implant, il est alors
capable de reproduire et placer l’implant correspondant sur le modèle numérisé.
(Lugagne Delpon, 2017)
L’utilisation des PAEK dans ce type de pièce implantaire est déjà d’usage depuis
quelques années. Le corps de scannage est souvent composé d’une coiffe ou d’un
pilier de scannage, en PEEK ou en PEKK selon les fabricants, et d’une vis en titane
(figure 61).
Des corps de scannage en titane, par exemple, peut entrainer certaines erreurs
d’acquisition dues aux surfaces brillantes réfléchissantes, qui nécessite l’application
d’un spray anti-reflet. (Jung et coll., 2017) Le recours aux polymères thermoplastiques
donne apparemment de très bons résultats dotés d’une acquisition précise, grâce à
leur radio-opacité, nul besoin d’un traitement particulier de la pièce. (Straumann®,
2015)
90
4. Suprastructures implantaires en PAEK
4.1. Piliers implantaires en PAEK
Le pilier implantaire établit le lien entre l’implant dans l’os et la prothèse en surface. Il
doit maintenir les tissus mous péri-implantaires, sa compatibilité est donc un critère
requis. Il doit également supporter et transmettre les forces masticatoires de manière
homogène autour de l’implant, il est important que ses propriétés mécaniques soient
garanties afin d’éviter tout risque de fracture au niveau du dispositif implantaire.
Il existe différents types de piliers implantaires, ainsi, le choix de cette pièce est
essentiel pour assurer la pérennité et le succès de la réhabilitation prothétique. Les
matériaux couramment utilisés pour la fabrication des piliers implantaires sont le titane
et la zircone.
L’atout principale des PAEK est sûrement de pouvoir absorber en partie les forces
occlusales et ainsi réduire les contraintes transférées aux implants. Cette particularité
est particulièrement intéressante pour des éléments supra-implantaires afin de
pérenniser les restaurations implantaires.
Le second atout est, sans doute, la biocompatibilité de ces matériaux et leur excellente
intégration dans le milieu buccal. Depuis quelques années déjà, la plupart des piliers
de cicatrisation dispose d’une coiffe en PAEK.
Des études ont été menées sur l’utilisation des PAEK pour la fabrication de piliers
implantaires et les ont ainsi comparés aux piliers en titane et en zircone. (Courtin,
2012)
Hahnel et coll ont ainsi comparé la formation du biofilm bactérien autour de piliers
implantaires en zircone, titane, PEEK et PMMA. Les résultats de cette étude in-vitro
ont suggéré que la formation de biofilm autour des piliers en PEEK était égale voire
inférieure qu’à la surface des piliers conventionnels en zircone ou en titane. Les
auteurs estiment également que « d’un point de vue microbiologique, le PEEK pourrait
convenir à la fabrication de pilier définitif ». (Hahnel et coll,. 2015) Les recherches
concernant l’usage des matériaux hautes performances en implantologie se
poursuivent, de nouveaux articles apparaissent régulièrement dans la littérature
scientifique.
91
4.1.1. Piliers de cicatrisation
Une seconde étude clinique a évalué la réponse tissulaire du parodonte aux piliers de
cicatrisation sur une période de 3 mois. Seize patients, ayant au-moins une dent
absente en secteur postérieur ou canine maxillaire ou mandibulaire, ont été inclus.
Les patients ont été séparés en deux groupes, un groupe test doté des piliers en PEEK
et un groupe contrôle recevant des piliers en titane (figures 63 et 64).
92
a) b)
Figure 63 : a) Vue occlusale des piliers de cicatrisation en PEEK à trois mois. b)
Radiographie à trois mois. (Source : Koutouzis et coll., 2011)
a) b)
Figure 64 : a) Vue occlusale de pilier de cicatrisation en titane à trois mois. b)
Radiographie à trois mois. (Source : Koutouzis et coll., 2011)
Les patients ont été éduqués à l’hygiène buccale avec un protocole identique à
respecter. Des mesures, de plaque dentaire, de saignement au sondage et de
profondeur de sondage, ont été réalisées deux semaines et trois mois après la pose
des piliers. Les résultats n’ont montré aucune différence significative entre les
matériaux. Les auteurs en ont donc conclu que l’utilisation du PEEK pour la fabrication
des piliers de cicatrisation implantaire « n’augmente pas le risque de perte osseuse ou
de récession gingivales lors de la période de cicatrisation » par rapport au titane.
(Koutouzis et coll., 2011)
93
4.1.2. Piliers provisoires
Ces pièces supra-implantaires peuvent être modifiées afin d’y sceller une prothèse
provisoire. Disponibles en PEEK et en PEKK depuis quelques années déjà dans le
commerce, la biocompatibilité de ces matériaux est la principale cause de leur
utilisation en implantologie. En effet, cela permet de minimiser les risques de réponse
inflammatoire des tissus mous autour du dispositif implantaire encore en période de
cicatrisation. Cependant, leurs propriétés mécaniques et l’usure de ces matériaux sont
encore remises en cause.
Santing et coll ont évalué la résistance à la fracture des couronnes en résine vissées
sur trois types de piliers provisoires différents, un en PEEK et deux autres en titane.
Chacun de ces piliers a été testé en zone esthétique au niveau de 11, 12, 13 et 14.
D’après les résultats de cette étude in-vitro, il semblerait que la résistance à la fracture
des couronnes vissées sur les piliers en PEEK n’ait été significativement plus faible
qu’au niveau de l’incisive centrale, environ 95 N pour le pilier en PEEK et 785 N à
1009 N pour les piliers en titane. Pour les autres localisations, la résistance à la fracture
était statistiquement similaire entre les matériaux. (Santing et coll., 2012)
Les fabricants mettent à disposition des praticiens des piliers préfabriqués en PEEK
ou en PEKK (figure 65 et 66). Dotés d’une base en titane, ces piliers sont disponibles
à diverses tailles et angulations. Ils sont modifiables avec une mise en œuvre assez
simple et un résultat esthétique satisfaisant pour un coût raisonnable. (Tetelman et
Babbush, 2008) Cependant, leur utilisation peut être restreinte en fonction de la
difficulté du cas clinique (profil d’émergence des tissus mous et épaisseur du
parodonte…). Afin de parer à ces éventualités, des piliers personnalisés sont
également envisageables. Sur une base en titane, les piliers sont sculptés en cire puis
pressé en PEEK ou en PEKK pour un meilleur maintien des tissus mous ainsi qu’un
meilleur aspect esthétique (figure 66). (Gobert, 2013b)
94
Figure 65 : Schémas d’un pilier préfabriqué (gauche) et d’un pilier personnalisé
(droite). (Source : Gobert, 2013b)
a)
b)
Figure 66 : a) Piliers préfabriqués selon la taille et l’angulation en BioHPP®. b) Pilier
personnalisé doté d’une base en titane, après une céroplastie le pilier en BioHPP® est
pressé. (Source : Bredent, 2013)
Dans la littérature scientifique, quelques cas cliniques présentent également des piliers
implantaires d’usage en PEEK.
Pour l’heure, il est également possible de procéder par une technique d’usinage CFAO
pour la fabrication de pilier personnalisé en PAEK. Après scannage et modélisation de
l’élément, une machine à usiner réalisera le processus de Fabrication Assistée par
Ordinateur (FAO) afin d’obtenir une pièce entièrement sur mesure (figure 67). (Gerard,
2015)
95
a)
b) c)
Figure 67 : a et b) Modélisation de piliers personnalisés en PEEK BioHPP® par
procédé CAO. c) Obtention des piliers personnalisés en BioHPP® usinés par le
procédé FAO. (Source : Gerard, 2015)
4.1.3. Cas cliniques
Une femme de 73 ans ayant une fracture radiculaire de l’incisive latérale droite (12)
bénéficie d’une chirurgie implantaire (figure 68a). Après quoi, une vis de cicatrisation
est placée, puis la patiente est dirigée vers son chirurgien-dentiste pour procéder à la
fabrication d’une restauration provisoire. La vis de cicatrisation est ensuite retirée afin
d’y placer un pilier préfabriqué en PEEK (figure 68b) et procéder au début de sa
préparation ; à l’aide d’une fraise diamantée et d’une irrigation abondante, le praticien
procède à la réduction occlusale et établit grossièrement le niveau de finition cervicale
et des parois proximales (figure 69a). Pour réaliser les finitions du pilier, ce dernier est
retiré de l’implant et mis en place sur un analogue. La vis de cicatrisation est
temporairement remise en bouche pour le maintien des tissus.
96
Une fois le pilier fini et poli, il est une nouvelle placée sur l’implant pour contrôler
l’ajustage et faire d’éventuelles retouches. Puis le praticien procède à l’élaboration de
la couronne provisoire. L’accès à la vis est bouché à l’aide d’une boulette de coton, le
pilier est recouvert de vaseline afin de faciliter le retrait de la couronne provisoire et
finalement la résine de rebasage est placée dans la couronne provisoire et mis en
place sur le pilier. Après la prise du matériau, le tout est retiré de l’implant, puis
retouché, ajusté et parfaitement poli, avant la remise en place définitive pour la période
de cicatrisation. Un réglage occlusal minutieux est primordial afin d’éliminer tous les
contacts prématurés et latéraux s’exerçant sur la couronne. Cette dernière est enfin
scellée à l’aide d’un ciment provisoire (figure 69b). L’élimination de tout débris de
résine ou de ciment est contrôlée minutieusement. Durant quatre mois, la patiente
s’est présentée à plusieurs contrôles mensuels afin d’évaluer la stabilité de la
restauration. (Tetelman et Babbush, 2008)
Ce cas clinique est un exemple d’utilisation du PEEK pour l’usage d’un pilier
préfabriqué lors d’une mise en esthétique immédiate.
a)
b)
Figure 68 : a) Photographie pré-opératoire avec une fracture de 12. b) Vue vestibulaire
après la mise en place du pilier préfabriqué en PEEK. (Source : Tetelman et Babbush,
2008)
97
a)
b)
Figure 69 : a) Vue vestibulaire lors de la préparation du pilier. b) Photographie du
résultat final avec la couronne provisoire en place. (Source : Tetelman et Babbush,
2008)
• Pilier personnalisé en PEKK
Le patient a subi un traumatisme sur les incisives centrales maxillaires. Après une
fracture radiculaire de 21, celle-ci a été extraite et après cicatrisation un implant a été
posé. La 11 quant à elle peut être conservée mais la fracture impose de la couronner.
Un pilier personnalisé en PEKK est fabriqué pour la 21. Pour cela, une céroplastie est
réalisée sur la base en titane sur le maître modèle en plâtre (figure 70a). Le titane a
été préalablement sablé pour garantir une bonne adhésion au Pekkton®. Puis en
suivant rigoureusement les recommandations du fabricant, le pilier modelé est pressé
(figure 70b). Le pilier est ensuite sablé et poli avant de réaliser les couronnes
provisoires à l’aide de facettes en résine composite. Le pilier est vissé sur l’implant et
enfin les provisoires sont mis en place (figure 71).
98
L’empreinte définitive sera réalisée par la suite pour la fabrication de deux couronnes
céramo-céramiques. Dans ce cas clinique, le pilier personnalisé en PEKK est utilisé
comme pilier provisoire et d’usage (figure 72).
Il semblerait que la réponse tissulaire au matériau Pekkton® soit très favorable pour
la cicatrisation et « l’intégration » gingivale à la restauration. (Gobert, 2013b)
a)
b)
Figure 70 : a) Céroplastie du pilier sur sa base en titane. b) Pilier en cire sur sa tige de
coulée à gauche, et pilier personnalisé en Pekkton après pressée. (Source : Gobert,
2013b)
99
a)
b)
Figure 71 : a) Photographie vue vestibulaire après la pose du pilier. b) Vue vestibulaire
après la pose des couronnes provisoires en résine composite. (Source : Gobert,
2013b)
a) b)
Figure 72 : a) Vue vestibulaire du pilier en PEKK après trois mois de « maturation »
gingivale. b) Photographie prise deux mois après la pose des couronnes définitives
céramo-céramiques. (Source : Gobert, 2013b)
100
4.2. Suprastructure implantaire pour prothèse complète transvissée
Une patiente va disposer d’une prothèse fixée complète sur six implants au maxillaire,
afin de remplacer son ancienne barre en titane, nous allons présenter les grandes
étapes de la conception de cette restauration.
Après avoir réalisé toutes les étapes initiales indispensables à l’élaboration d’un
montage directeur, l’occlusion, la phonation et l’esthétisme sont vérifiées lors de
l’essayage en bouche puis ce montage est finalement validé par le duo
praticien/patient (figure 73). Les retouches nécessaires sont ajustées et une clé en
silicone transparente est fabriquée et servira par la suite de modèle de vérification.
101
Puis la barre est modélisée sur logiciel informatique avant d’être usinée dans un disque
de fraisage en BioHPP® (figure 74). Les facettes utilisées pour le montage directeur
sont mises en place dans la clé en silicone afin de vérifier l’homothétie de la barre.
Les bases en titane ainsi que la barre sont conditionnées afin d’être assemblées par
collage ; pour cela, les bases sont sablées puis silanisées, du côté de la barre,
l’intrados est sablé puis recouvert d’une couche de primer d’accroche. Enfin, le
prothésiste procède au collage des éléments un à un. Un essayage de la barre s’est
imposé afin de valider sa conception. Les dents sont alors collées sur la barre à l’aide
d’un composite de scellement. Cette étape doit suivre scrupuleusement le protocole
d’assemblage du fabricant (figure 75). La morphologie des dents doit être contrôlée
car elle peut être déformée par les puits d’accès aux vis de rétention. À l’aide d’une
résine composite, les faces occlusales peuvent donc être retravaillées autour des
puits.
a) b)
Figure 74 : a) Modélisation de la barre transvissée sur logiciel de CFAO. b) Essayage
de la barre usinée. (Source : Gerard 2014)
a) b)
Figure 75 : a) Collage des facettes sur la barre. b) Résultat après assemblage et
polissage. (Source : Gerard 2014)
102
Après des étapes de rebasage et de personnalisation de la restauration, la prothèse
complète fixée sur implant est minutieusement polie avant d’être finalement vissée sur
les implants (figure 76). Un contrôle a été effectué six mois après la pose, il semblerait
que la restauration soit intacte. La patiente est apparemment satisfaite du rendu
esthétique et du confort que lui procure cette nouvelle prothèse. Sa légèreté l’a tout de
suite agréablement surprise, par rapport à l’ancienne barre en titane. (Gerard 2014)
a)
b)
Figure 76 : a) Vue de la prothèse finie sur articulateur. b) Pose de la prothèse fixée
complète implanto-portée. (Source : Gerard 2014)
103
Par la mise en place d’au-moins deux implants, la réhabilitation implanto-portée
améliore le confort, la capacité masticatoire et la stabilisation d’une prothèse amovible
complète (PAC).
Le système Novaloc® est une connexion rétentive conçue pour stabiliser une PACSI
sur des piliers Locator®, en exerçant un effet « bouton-pression ». La matrice
Novaloc® est composée d’un boîtier, en titane ou en PEEK, fixé dans l’intrados de la
prothèse, et d’une unité de rétention également en PEEK. (Figure 77)
a)
b)
Figure 77 : a) Schéma du système Novaloc®. b) Photographie de l’intrados d’une
PACSI avec deux matrices et deux éléments de rétention de couleur bleue. (Schittly
et coll., 2008)
Dans certains cas, la résorption osseuse est telle que la position des éléments supra-
implantaires sont très vestibulées et deviennent visibles au travers de la résine. C’est
ainsi que la couleur blanchâtre des PEEK devient un avantage. En effet, l’utilisation
des boîtiers en PEEK (blanc) permet d’éviter l’apparition d’une ombre grise du boîtier
en titane à la surface de la prothèse. (Figure 78)
104
a) b)
Figure 78 : a) Visualisation sur le modèle en plâtre des matrices Novaloc® en PEEK
5.2. Infrastructure et armature de prothèse amovible sur implant
Il est possible de concevoir une infrastructure à la PAC sur implants (PACSI). Cette
infrastructure, qui devient également une suprastructure implantaire, permet de
renforcer la base de la PAC. De plus, il semblerait qu’une infrastructure en PAEK, avec
un module d’élasticité faible, combinée à un matériau de recouvrement également de
faible module, comme la résine composite ou les résines PMMA, pourrait amortir
d’autant plus les forces occlusales et avoir un effet bénéfique sur la pérennité des
restaurations. Cette capacité est particulièrement recherchée pour les réhabilitations
implanto-portées où l’absence de desmodontes et la présence d’espaces inter-
implantaires larges engendrent un manque de proprioception. (Zoidis, 2017)
Un cas clinique présente un patient de 80 ans, édenté total, qui souhaiterait refaire des
prothèses adaptées à la situation buccale actuelle. Après une anamnèse rigoureuse
sur l’état de santé générale du patient, ses motivations, la résorption osseuse au
maxillaire et à la mandibule, il est convenu avec le patient de réaliser une prothèse
fixée complète stabilisée sur implants à la mandibule et une prothèse amovible
complète sur implants et piliers Locators® au maxillaire dotée d’une infrastructure en
PEEK (par convention en Allemagne, quatre implants sont posés au maxillaire).
Seules les étapes de conception de la prothèse maxillaire seront détaillées, la prothèse
mandibulaire a déjà été réalisée.
105
Les empreintes primaires sont réalisées et à l’aide des transferts, le positionnement
des implants est retranscrit précisément dans le maître-modèle. Les piliers locators®
sont vissés sur les implants, et leurs répliques sur le modèle (figure 79).
a) b)
Figure 79 : a) Radiographie de la situation initiale avant la réalisation de la prothèse
maxillaire. b) Modèle en plâtre doté des répliques des piliers Locator®. (Source : Adler
et coll., 2015)
Pour la suite, une maquette en cire est réalisée comportant des « inserts » imitant les
parties femelles des piliers Locators® (figure 80). Ce montage est essayé en bouche ;
l’esthétisme, la phonation et l’occlusion sont testés puis validés. Le résultat est
enregistré à l’aide d’une clé en silicone.
a) b)
Figure 80 : Montage directeur sur cire avec les logements des piliers, vue de l’intrados
(a), vue occlusale (b). (Source : Adler et coll., 2015)
Avant d’être pressée en PEEK, l’infrastructure est montée en cire, avec les logements
prévus pour les parties femelles des piliers. L’infrastructure ainsi obtenue est polie puis
revêtue d’une couche d’opaque et d’un primer d’accroche afin d’y coller les dents
prothétiques (figure 81). La clé en silicone, préalablement effectuée, permet de vérifier
le montage des dents.
106
a) b)
Figure 81 : a) Infrastructure en cire sur les tiges de coulée en vue de la pressée. b)
Photographie de l’infrastructure en PEEK revêtue d’une couche d’opaque. (Source :
Adler et coll., 2015)
a) b)
Figure 82 : a) Assemblage des dents prothétiques sur l’infrastructure à l’aide de la clé
de vérification en silicone. b) Vue de l’intrados de l’infrastructure avec les logements
des parties femelles des piliers Locators®. (Source : Adler et coll., 2015)
107
a)
b)
Figure 83 : a) Photographie de la PACSI après finitions. b) Photographie du résultat
final après mise en bouche de la prothèse maxillaire et visualisation des rapports
occlusaux avec la prothèse antagoniste. (Source : Adler et coll., 2015)
108
Pour commencer, un montage directeur sur cire est réalisé à l’aide des anciennes
prothèses, puis essayé et validé par l’équipe soignante et le patient (figure 84). Une
clé en silicone est alors modelée sur ce montage afin de conserver les paramètres
esthétiques et fonctionnels, pour la suite du travail.
Sur le modèle en plâtre disposant des analogues des implants, les piliers sont sculptés
en cire sur une base en titane (figure 85). Ils sont ensuite pressés avant d’être
assemblés par collage sur ces bases. L’étape suivante permet d’obtenir l’infrastructure
de la prothèse amovible, également en BioHPP®. Pour cela, le montage directeur est
mis en place sur les piliers, puis le modèle est entièrement scanné et modélisé par
ordinateur. Le processus de CFAO élabore l’infrastructure avant de procéder à son
usinage (figures 86 et 87).
a) b)
Figure 85 : Photographies des piliers sculptés en cire, vue palatine avec les analogues
et les bases en titane (a), vue vestibulaire sur la fausse gencive (b). (Source :
Pisseloup, 2017)
109
a) b)
Figure 86 : Photographie des piliers pressés en BioHPP® et la clé en silicone (a) qui
guide le repositionnement du montage directeur (b) pour le scannage. (Source :
Pisseloup, 2017)
Le prothésiste peut alors conditionner les éléments (infrastructure, dents prothétiques)
en vue de leur collage. L’utilisation d’un primaire d’accroche (visio.link, Bredent) et
d’une colle duale est essentielle afin de garantir une bonne adhésion. Enfin, la mise
en place d’une fausse gencive et les étapes de finitions assurent la personnalisation
de la prothèse finale (figure 88). La figure 89 présente le résultat final après la mise en
bouche de la prothèse amovible d’usage sur piliers télescopiques.
110
a) b)
Figure 88 : a) Vue palatine du collage des dents prothétiques, la clé en silicone aide
au bon repositionnement. b) Vue vestibulaire du résultat final après finitions. (Source :
Pisseloup, 2017)
a) b)
Figure 89 : Photographies prises après la mise en bouche de la prothèse amovible
d’usage sur piliers télescopiques. (Source : Pisseloup, 2017)
Philippe Pisseloup évoque de grands avantages en combinant la prothèse
télescopique et le matériau BioHPP®, notamment l’acquisition d’une bonne friction
entre les étages prothétiques, garantissant ainsi la rétention de la prothèse amovible.
De plus, ce type de restauration facilite la maintenance au fauteuil ainsi que l’hygiène
buccale du patient, plus complexe dans le cas de bridge transvissé par exemple.
(Pisseloup, 2017)
111
a) b)
Figure 90 : a) Radiographie panoramique deux ans après la pose d’un all-on four à
armature en PEEK. b) Infrastructure/suprastructure implantaire en PEEK BioHPP®.
(Source : Zoidis, 2017)
112
a)
b)
Figure 92 : Photographie de la situation initiale lors de la première visite (a) et
radiographie panoramique (b). (Source : Oh et coll., 2017)
a) b)
Figure 93 : a) Photographie de la prothèse fixée d’usage. b) Radiographie
panoramique après pose de la prothèse fixée mandibulaire sur implants. (Source : Oh
et coll., 2017)
113
a)
b)
Figure 94 : a) Photographie, vue vestibulaire, après la pose de la prothèse d’usage. b)
Photographie de face après la mise en bouche de la restauration. (Source : Oh et coll.,
2017)
114
Ce qu’il faut retenir :
Aujourd’hui, les PAEK sont surtout connus des praticiens pour leurs utilisations en
prothèse implantaire, notamment dans la fabrication des coiffes de cicatrisation et de
pièces supra-implantaires comme les piliers provisoires.
Cependant, cette aptitude particulière, d’amortir les forces occlusales transférées à
l’implant, étend l’usage de ces matériaux à la confection de barre implantaire et
d’infrastructure de prothèse implantaire fixée ou amovible.
La facilité de scannage et d’usinage des PAEK est d’autant plus intéressante en
prothèse implantaire et permet de réaliser des pièces prothétiques personnalisées
d’une grande précision à moindre coût par rapport au titane.
La fabrication de vis implantaires en PAEK est actuellement possible, cependant les
propriétés mécaniques plus faibles que celles du titane, traditionnellement utiliséés,
ainsi que le manque de données au long terme de ces matériaux nous obligent à rester
prudents. Les études se poursuivent, notamment sur les améliorations à apporter afin
d’augmenter ses propriétés mécaniques et dépasser le stade de la restauration
transitoire.
115
CONCLUSION
116
D’autre part, à l’ère de la CFAO, il est très intéressant d’opter pour un matériau
facilement scannable et usinable afin de réaliser des pièces prothétiques
personnalisées de qualité et peu coûteuses. Cette capacité étend les possibilités
d’utilisation et les méthodes de travail traditionnelles. C’est ainsi que l’on découvre la
perspective d’usiner directement des châssis de prothèse amovible, des couronnes
transitoires, des armatures de prothèses fixées ou encore des suprastructures
implantaires sur mesure en PAEK. Le plan de traitement se verrait alors simplifié dans
sa mise en œuvre avec des délais de conception nettement raccourcis.
Aujourd’hui, nous savons que cette technologie est possible et envisageable avec ces
matériaux, mais le chemin est encore long, la recherche se poursuit afin de
revendiquer une place importante dans notre arsenal thérapeutique et des
perspectives d’avenir dans le tout numérique.
117
« Bon écoute-moi bien, espèce de pompe à merde.
Quand tu vas chez le dentiste, tu lui dis pas comment faut faire, tu lui fais confiance.
Octave, 99F
118
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127
TABLE DES MATIÈRES
SOMMAIRE ................................................................................................................. 8
INTRODUCTION ....................................................................................................... 17
128
• Module d’élasticité ............................................................................... 31
• Résistance à la flexion ......................................................................... 32
• Résistance à la traction ....................................................................... 32
• Résistance à la compression ............................................................... 32
• Résistance à la fatigue ........................................................................ 32
5. Dérivés spécifiques adaptés à l’art dentaire .............................................. 33
5.1. BioHPP® : un exemple de PEEK développé pour l’odontologie ............. 33
5.1.1. Présentation ......................................................................................... 33
5.1.2. Mise en œuvre ..................................................................................... 34
• Procédure de pressée ......................................................................... 34
• Technique d’usinage par CFAO .......................................................... 37
• Coulée par injection ............................................................................. 37
5.1.3. Procédure d’assemblage ..................................................................... 38
• Conditionnement .................................................................................. 38
• Revêtement cosmétique ...................................................................... 40
• Scellement ou collage .......................................................................... 41
5.2. Pekkton® Ivory : un exemple de PEKK ................................................... 42
5.2.1. Présentation ......................................................................................... 42
5.2.2. Mise en œuvre ..................................................................................... 43
• Technique de pressée ......................................................................... 43
• Technique d’usinage par CFAO .......................................................... 45
5.2.3. Procédure d’assemblage ..................................................................... 46
• Conditionnement .................................................................................. 46
• Revêtement cosmétique ...................................................................... 46
• Scellement ou collage .......................................................................... 46
129
3.4. Exemples de prothèse fixée plurale transitoire en PEEK ........................ 54
3.4.1. Cas clinique n°1 ................................................................................... 54
3.4.2. Cas clinique n°2 ................................................................................... 56
4. Utilisation des PAEK pour la prothèse fixée d’usage ............................... 58
4.1. Avantages ............................................................................................... 58
4.2. Inconvénients .......................................................................................... 58
4.3. Cas cliniques de prothèse fixée unitaire d’usage .................................... 59
4.3.1. Etude d’un inlay-core en PEKK ........................................................... 59
4.3.2. Exemple d’une restauration coronaire extensive en PEEK ................. 61
4.4. Exemple d’une technique de réalisation en prothèse fixée plurale ......... 64
130
• Piliers préfabriqués en PEEK .............................................................. 96
• Pilier personnalisé en PEKK ................................................................ 98
4.2. Suprastructure implantaire pour prothèse complète transvissée .......... 101
4.2.1. Barre transvissée usinée en BioHPP® .............................................. 101
5. Éléments de liaison pour PACSI ............................................................... 103
5.1. Système Novaloc® ................................................................................ 103
5.2. Infrastructure et armature de prothèse amovible sur implant ................ 105
5.3. D’autres exemples d’applications des PAEK en prothèse implantaire .. 108
131
~ UNIVERSITÉ FACULTÉ
W DE LORRAINE
D'ODONTOLOGIE
DE LORRAINE
Université de Lorraine· 24·30 rue Lionnois • BP 60120 · 54003 Nancy Cedex - France Tél : +33 (0)3.83.68.20.00
132
BAUDOUIN Lorraine – Utilisation des PAEK en odontologie prothétique :
applications cliniques actuelles et perspectives
Résumé
Les PAEK (polyaryletherketones) sont des polymères ayant déjà de nombreuses
indications dans le domaine biomédicale. Ils commencent à émerger pour un usage
en dentisterie et notamment en ce qui concerne les réhabilitations prothétiques
qu’elles soient supra-implantaires ou supra-dentaires, fixées ou amovibles.
Le but de ce travail est d’exposer les applications actuelles des PAEK en odontologie
prothétique, de dresser un bilan de leur usage, et de dégager quelques domaines pour
lesquelles leurs perspectives sont particulièrement intéressantes.
Après avoir énoncé les principales caractéristiques de cette famille de polymères, en
particulier des PEEK et des PEKK, nous nous concentrerons, à l’aide de cas cliniques,
sur leurs différentes indications en prothèse fixée, amovible et implantaire, ainsi que
leurs avantages et inconvénients par rapport aux matériaux conventionnels.
Membres du jury :
Adresse de l'auteur :
BAUDOUIN Lorraine
295 chemin de la batterie
88390 CHAUMOUSEY
133