Déclaration Association Des Ingénieurs Des Mines-Convention Sinosteel
Déclaration Association Des Ingénieurs Des Mines-Convention Sinosteel
Déclaration Association Des Ingénieurs Des Mines-Convention Sinosteel
Préambule
Le 6 mai 2022, une convention minière a été signée entre l’Etat du Cameroun et la Société
SINOSTEEL CAM S.A relative à l’exploitation industrielle du gisement de fer de Lobé à Kribi,
portant ainsi à quatre (04), le nombre d’actes similaires signés par les autorités camerounaises
pour l’exploitation industrielle du fer sur notre territoire national. Au vu de l’actualité nationale
suite à la signature de ce contrat, l’Association des Ingénieurs des Mines du Cameroun
(ASSIMIC), en tant qu’acteur du secteur des industries extractive, juge nécessaire de s’exprimer
à ce sujet. Cette sortie vient après appropriation et analyse profonde de la convention rendue
publique afin d’éviter toutes spéculations possibles. Elle sera donc basée uniquement sur les
données rendues officiellement publiques par le gouvernement. Dans cette communication,
l’ASSIMIC reviendra tout d’abord sur les différents types de contrats miniers, ensuite elle fera
une appréciation de cette convention minière signée entre l’Etat du Cameroun représenté par le
Ministre des Mines de l’industrie et du Développement Technologique et la société chinoise
Sinosteel Cam S.A.
Le contrat minier est un accord entre l’Etat et une entité privée pour le développement des
ressources minières, la production, le traitement, le transport et la commercialisation des
produits issus des ressources extraites.
Il traite des problématiques absentes du Code minier et du décret d’application. C’est un
partenariat permettant de rassurer les investisseurs et au gouvernement d’assurer ses intérêts.
La question qui découle le plus souvent de ces accords est celle de savoir : COMMENT
L’ETAT PEUT-IL TIRER UN MEILLEUR PROFIT DE SES RESSOURCES MINIERES
AFIN DE LES METTRES AU SERVICE DE SON DEVELOPPEMENT ?
Le contrat minier donne aux investisseurs des garanties et permet au gouvernement au regard
des normes, d’assurer la sauvegarde des intérêts des divers acteurs le système légal et
réglementaire.
Un contrat minier peut couvrir un large éventail de questions telles que : les obligations
opérationnelles, les questions de développement économique et financier, les questions
environnementales et sociales, la résolution des différends, l’emploi et l’approvisionnement
local, les changements de propriétaire ou les contrôles de gestion, pour ne citer que quelques
exemples.
Il existe plusieurs types de contrats miniers en fonction de la politique minière d’un Etat, parmi
lesquels :
Au Cameroun selon la loi Nº 2016/017 du 14 décembre 2016 portant Code minier, le contrat
minier reconnu et appliqué est la convention minière. Nous allons de ce fait, nous attarder sur
ce dernier afin d’expliquer d’avantage l’actualité minière qu’est la nôtre.
2) La convention minière
Selon le Code minier Camerounais, la convention minière est un contrat de partenariat entre
l’État et le titulaire d’un permis de recherche, définissant les dispositions relatives au
développement et à l’exploitation d’une découverte minière, y compris les opérations de
fermeture et de remise en état du site.
La convention est non dérogatoire du Code minier, elle règle de façon contractuelle les rapports
entre l’Etat et la société minière pendant la durée des opérations, elle définit les droits et
obligations de l’investisseur et de l’Etat ainsi que leurs garanties. D’une manière générale, elle
complète le Code minier et le Décret d’application et est approuvée par décret et non par une
loi puisque non dérogatoire du droit commun.
Dans ce type de contrat minier, peu de clauses sont soumises à négociation. Celles qui le sont
concernent : les droits et obligations de chacune des parties, lorsqu’elles sont spécifiques ; la
durée des autorisations, des permis de recherches et d’exploitation, étant entendu, qu’elles ne
peuvent excéder la durée maximum prévue par le code minier ; les obligations de travaux et de
dépenses ; les engagements spécifiques de l’opérateur notamment dans le domaine social et
environnemental ; les conditions et les modalités de participation de l’Etat dans le cas d’une
augmentation de celle-ci au-delà du minimum imposé par le Code minier. Lorsque non prévue
dans le Code minier ou dans une annexe fiscale spécifique, la convention précise la stabilisation
des régimes fiscaux et douaniers sur la base du principe selon lequel "le contrat est la loi des
parties" qui exprime le principe de la force obligatoire du contrat. Etant entendu que les
conditions d’octroi des permis, les délais maximums des permis, les régimes fiscaux, douaniers,
les réglementations de changes et autres clauses relevant spécifiquement de la loi ou clairement
définies dans le décret d’application, ne sont pas négociables. Une convention minière présente
des avantages mais aussi des inconvenants :
La convention minière signée entre l’Etat du Cameroun et la société Sinosteel Cam S.A ne
déroge pas au code minier, toutes les dispositions liées aux recettes budgétaires, au contenu
local et à la réhabilitation du site ont été prises en compte ; ainsi que celles liées à l’emploi et à
la représentation des locaux au sein de l’entreprise. L’Etat du Cameroun représenté par le
Ministre des Mines de l’Industrie et du Développement Technologique s’est appliqué à en
profiter de manière optimale des retombées de l’exploitation de la ressource minière objet du
contrat. Dans les négociations, l’Etat du Cameroun est allé au-delà de ce qui est prévu par le
code minier afin d’avoir plus d’avantage, notamment en s’accordant avec la société
SINOSTEEL Cam S.A de l’attribution d’une part (1%) du concentré du fer produit. Tenant
compte du caractère non dérogatoire du code minier par cette convention, le projet selon les
données rendues officiellement publiques jusque-là aura une grande envergure économique
(recette budgétaire, 600 emplois directs et 1000 emplois indirects, les infrastructures etc.) pour
l’Etat du Cameroun s’il est implanté. L’Association des Ingénieurs Miniers du Cameroun
(ASSIMIC) voit en cet acte, à la lumière du code minier du 14 décembre 2016, la mise en
perspective de gain économique pour le Cameroun, notamment avec l’amélioration de la
balance commerciale, la création des emplois, et la promotion tous azimuts du développement
de l’industrie minière en général.
L’ASSISMIC constate toutefois que les données utilisées pour le gisement à savoir la teneur,
le tonnage, la valeur enrichie et autres, sont celles provenant de l’étude de faisabilité menée par
l’entreprise SINOSTEEL Cam S.A. L’on pourrait s’interroger sur le degré de fiabilité de ces
informations. Les inquiétudes à ce sujet peuvent être réconfortées par certains incidents très
souvent liés au marché des métaux ou des minéraux. Les spéculations sont parfois récurrentes
dans ce secteur d’activité dans le but d’attirer des bailleurs de fonds ou des Etats détenteurs de
la ressource. Ainsi, selon les cas et les intérêts mis en jeux, les ressources peuvent parfois être
surestimées ou sous-estimées par les sociétés d’exploration. Il revient uniquement au camp d’en
face de mener une contre-expertise afin de s’assurer de la véracité des données présentées dans
l’étude de faisabilité, dans le cas présent, ce rôle revient à l’Etat qui est ici invité à plus de
vigilance. Une contre-expertise rassurerait d’avantage l’opinion sur la fiabilité des informations
présentées par les sociétés étrangères. Elle permettrait d’éviter des scandales boursiers comme
ce fut le cas avec le gisement de diamant de Mobilong. Mais aussi, cela empêchera la signature
de contrat à effet d’annonce, sans décollage ou non aboutis comme les cas avec des gisements
de fer de Mbalam (Camiron) et nickel cobalt de Lomié (Geovic).
Pourquoi SINOSTEEL aurait investi sur ce gisement de faible teneur (33%) et s’accorde à céder
une part (1% du concentré) en plus de ce qui est prévu dans le code minier à l’Etat du
Cameroun ? Pourquoi ce « petit » gisement de fer de Lobé (considérant son tonnage 638
millions de tonnes, sa teneur 33%, sa superficie 138.5 km2 et sa production annuelle, 10 millions
de tonnes de minerais soit 4 millions de tonnes de fer enrichi à plus de 60%) suscite autant
d’intérêt pour ce partenaire ? Ces questions ont toutes leurs importances.
La société chinoise Sinosteel Cam S.A prévoit entre autres extraire 10 millions de tonne de
minerai par an et une fois enrichi, le concentré serait estimé à 4 millions de tonnes à plus 60%
de teneur en fer. Tenant compte d’un enrichissement à 60% de fer, cette opération va produire
6 millions de tonnes de déchet contenant 15% de fer donc une perte d’environ 0.9 million de
tonne de fer pendant le traitement. La publication de l’étude de faisabilité et du plan de gestion
environnementale, serait nécessaire afin de savoir, de façon concrete comment ces rejets seront
gérés et disposés dans la nature afin de permettre au public de faire sa propre opinion sur les
dégâts susceptibles d’être causés sur l’environnement et surtout les mesures prises pour inhiber
leurs effets sur la natures te les populations riveraines.
Les interrogations et les inquiétudes posées plus haut sont des inquiétudes citoyennes mais aussi
du souci de l’encadrement de l’activité au bénéfice des populations riveraines. Cela ne met pas
en doute l’envergure économique que pourrait engendrer ce projet telle que présentée dans la
convention rendue publique. Le probable lancement de l’exploitation du gisement de fer de
Lobé va générer des revenus (recettes) à l’Etat et aux Collectivités Territoriales Décentralisées
mais également de nombreux emplois (600 emplois directs et 1000 emplois indirects). Les
premiers bénéficiaires de cette manne seront les ingénieurs des mines qui jusqu’ici peinent à
trouver un emploi décent à la sortie des écoles de formation au Cameroun. Le souci majeur qui
pourrait se poser est celui de gestion responsable des retombées de cette exploitation, le respect
des clauses de la convention et du cahier de charges. L’ASSIMIC exhorte au gouvernement
Camerounais la rigueur managériale nécessaire à un projet de cette envergure, afin que l’Etat
et le peuple Camerounais puissent bénéficier de toutes les retombées économique et sociale qui
vont en d’écouler ; mais aussi à prévenir les effets néfastes généralement observées dans une
exploitation minière à savoir : la destruction non contrôlé de l’environnemental, le non-respect
du contenu local, la corruption, la destruction du tissu social et la génération des conflits. Elle
exhorte également la société SINOSTEEL CAM S.A au respect scrupuleux du cahier des
charges et des normes RSE en vigueur..
Comme on le sait, des ingénieurs miniers sont formés au Cameroun depuis 2011, soit plus de
dix (10) ans déjà, notamment à l’Ecole de Géologie d’Exploitation Minière (EGEM) de
Meiganga, à l’Ecole Nationale Supérieure des Mines (ENSM) de Kaélé ainsi que dans d’autres
universités publiques et privées au Cameroun. L’Ecole de Géologie d’Exploitation Minière
(EGEM) de Meiganga à elle seule, a déjà formé 738 diplômés en mines entre 2011 et 2020,
tandis que l’Ecole Nationale Supérieure des Mines (ENSM) de Kaélé en est à plus de 500 ; sans
compter les que d’autres universités publiques et privées au Cameroun forment aussi des
techniciens et délivrent des Master Professionnels en rapport avec le domaine minier.
Le président de l’ASSIMIC
Osman Aoudou
Ingénieur des Mines