Identité Sociale Et Identité Discursive, Le Fondement de La Compétence Communicationnelle
Identité Sociale Et Identité Discursive, Le Fondement de La Compétence Communicationnelle
Identité Sociale Et Identité Discursive, Le Fondement de La Compétence Communicationnelle
le fondement de la compétence
communicationnelle
Patrick Charaudeau
Recebido 20, jun. 2006/Aprovado 20, ago. 2006
Résumé
La question identitaire est une question complexe.
D’une part parce qu’elle résulte d’un croisement de
regards: celui du sujet communiquant qui cherche à
la construire et à l’imposer à son partenaire, le sujet
interprétant, lequel ne peut s’empêcher, à son tour,
d’attribuer une identité à celui-ci en fonction de ses
propres a priori. D’autre part parce qu’on a beau vouloir
éviter le piège de l’essentialisation, tout sujet a le désir
de se voir (ou de voir l’autre) constitué en une identité
unique, c’est-à-dire une essence.
Mots clefs: identité, sujets du discours, acte de
communication
A - Mais je n’ai pas dit que j’allais lui parler, j’ai seulement dit
que je le connaissais.
B - Non, mais je n’ai pas dit non plus que tu allais lui parler,
j’ai seulement dit qu’il fallait être prudent.
Ici, il s’agissait entre autres, pour B, de montrer qu’elle (il
s’agit d’une femme) connaissait mieux FP que A, qu’elle était plus
sage ou lucide que A, prenant une position haute par rapport
à A de «conseilleur». Si l’on sait en plus que, dans ce groupe, B
est la supérieure hiérarchique de A, on comprend que sa visée
était de rappeler à A, et au groupe, quel était son statut. L’identité
construite par les actes de langage sert ici à réactiver l’identité
sociale.
3° exemple:
La situation politique
S’agissant du sujet politique, la question serait: “Je suis là
pour défendre quelles idées, et pour comment faire adhérer à
ces idées”. En effet, le sujet politique se trouve dans une position
double: d’une part, il doit être le porteur et le garant de valeurs
fondatrices d’une certaine «idéalité sociale», d’autre part, il doit
faire adhérer le plus grand nombre de citoyens à ces valeurs.
L’homme politique est donc pris entre «le politique» siège d’une
pensée sur le comment vivre en société, et «la politique» qui
concerne la gestion du pouvoir.
On comprend du même coup que le résultat de cette combi-
naison produise un «Je-nous», une identité du singulier-collectif.
L’homme politique, dans sa singularité parle pour tous en tant
qu’il est porteur de valeurs transcendantales: il est la voix de tous
à travers sa voix (“Ensembles, nous bâtirons une société meilleu-
re”). Mais en même temps, il s’adresse à ces «tous» comme s’il
n’était que le porte-parole de la voix d’un tiers énonciateur d’une
idéalité sociale. Dès lors, il établit un «pacte d’alliance» entre ces
trois types de voix (la voix du Tiers, la voix du Je, la voix du Tu-
tous) qui finissent par se fondre dans un corps social abstrait,
souvent exprimé par un «on» qui joue le rôle de guide (“On ne
peut accepter que soient bafoués les droits légitimes de l’indi-
vidu”) ou par un «nous» (“Si nous voulons pouvoir défendre
nos intérêts et sauvegarder notre indépendance…”).
L’identité sociale de l’instance politique se définit à travers
un principe de légitimité qui lui-même se fonde en souveraineté.
Cela dit, la légitimité par souveraineté institutionnelle n’est pas
une. Elle varie en fonction de la «position» et des «rôles» que les
acteurs sont amenés à tenir selon les situations d’échange social
dans lesquelles ils sont engagés, ce qui fait varier les discours
qu’ils sont amenés à tenir. On peut considérer qu’il existe deux
situations bien distinctes: celle de candidature au suffrage des élec-
teurs et celle de gouvernance. La première place le sujet politique
dans une position d’avoir à défendre et promouvoir un projet
de société idéal qui doit s’inscrire dans le droit-fil de certaines
valeurs, d’avoir à proposer un programme de réalisation de ce
projet, et de devoir s’engager sans faille pour la réalisation de
ce projet. La seconde place le sujet politique dans une position
d’avoir à décider (prendre des mesures concrètes, édicter des
décrets, faire appliquer les lois, engager des actions de défense,
d’hostilité, de répression) et d’avoir à justifier le bien fondé de ces
décisions. Ce qui fait que les types de discours qui s’attachent
à cette position sont pour une part performatifs, puisque dans la
décision “dire c’est faire”, et pour une autre part de justification
puisqu’il faut produire des explications soit par anticipation
(prévoir des objections), soit a posteriori (répondre à des critiques
et autres réactions de protestation).
Resumo
A questão da identidade é complexa porque resulta
de um entrecruzamento de olhares: o do sujeito
comunicante que busca construí-la e impô-la a
seu parceiro, o sujeito interpretante; este, por seu
turno, não pode deixar de atribuir uma identidade
ao comunicante em função de seus olhares, a priori.
Em contrapartida, todo sujeito deseja ver a si mes-
mo (e ao outro) constituído com uma identidade
única, ou seja, uma essência.
Palavras- chaves: identidade, sujeitos do discur-
so, ato de comunicação.
Referências