BIP 61 1997 Le Traitement Des Difficultés de L'entreprise

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BIP N° 61

Janvier 1997

LE TRAITEMENT DES DIFFICULTES


DES ENTREPRISES

INTRODUCTION :

Dans notre précédent numéro, nous avons souligné l’importance des changements apportés à
l’ancienne législation de la faillite.

Nous avons ainsi expliqué que le législateur s’intéressait désormais à la détection des difficultés de
l’entreprise en prévoyant des mesures de préventions interne et externe obligatoires.

Cette innovation importante a donc été exposée dans une première partie.

Nous avons ensuite entamé notre seconde partie, intitulée « le traitement des difficultés de
l’entreprise ». Nous avons dans un premier temps expliqué que l’ouverture d’une procédure
judiciaire débouchait nécessairement sur une période de diagnostic devant permettre l’évaluation des
chances de survie de l’entreprise.

Dans un deuxième temps, nous allons aborder la présentation du déroulement de cette procédure.

En effet, nous examinerons dans un premier volet quelles sont les solutions possibles pouvant être
adoptées à l’issue d’une période d’observation (I).

Ces solutions sont intéressantes à explorer car elles démontrent que la liquidation judiciaire n’est plus
automatique dès la constatation de la cessation des paiements.

Un deuxième volet sera consacré aux mesures particulières qui sont le dénominateur commun des
procédures choisies. On retrouvera à cette occasion des dispositions déjà connues du code de
commerce de 1913 (II).

Enfin, nous conclurons dans un troisième volet avec la présentation des sanctions consécutives à
l’ouverture d’une procédure judiciaire (III). Nous avions annoncé l’importance de celles-ci ; en effet,
elles sont révélatrices des préoccupations du législateur d’aujourd’hui : responsabiliser désormais les
acteurs du monde des affaires.

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I. ELABORATION DE LA DECISION JUDICIAIRE :

Le législateur ne prévoit plus uniquement une solution de liquidation judiciaire à la constatation de la


cessation des paiements ; il prévoit désormais des mesures destinées à traiter les difficultés de
l’entreprise.

Dès l’ouverture d’une procédure, le syndic, avec le concours du chef de l’entreprise et l’assistance
éventuelle d’un ou plusieurs experts, doit dresser dans un rapport le bilan financier, économique et
social de l’entreprise (article 579 alinéa 1).

Le syndic peut obtenir communication par les commissaires aux comptes, par les administrations et
organismes publics ou par toute autre personne (banques par exemple) des renseignements de nature
à lui donner une exacte information sur la situation économique et financière de l’entreprise. Il en
rend compte au juge-commissaire (article 581).

Lorsqu’il établit le projet de plan de redressement, le syndic doit communiquer ses propositions de
règlement de dettes au fur et à mesure de leur élaboration, sous la surveillance du juge-commissaire,
aux contrôleurs.

Au vu de ce bilan financier, économique et social, le syndic propose soit un plan de redressement


assurant la continuation de l’entreprise ou sa cession à un tiers (1), soit la liquidation judiciaire (article
579 alinéa 1) (2).

1/ LA SOLUTION DE TRAITEMENT (OU REDRESSEMENT) :

Le sauvetage d’une entreprise en cessation de paiements est désormais organisé. Il peut se traduire
par une prolongation de l’activité sous réserve du respect d’un plan de continuation (A) ; à
l’extrême, l’activité sera maintenue mais sous réserve du respect par un tiers du plan de cession (B).

A. PLAN DE CONTINUATION :

Nous examinerons tant les conditions permettant la continuation que ses conséquences.

a) Conditions de continuation :

Le tribunal décide la continuation de l’entreprise lorsqu’il existe « des possibilités sérieuses de


redressement et de règlement du passif » (article 592 alinéa 1).

Cette formulation a donné lieu en France à une ample jurisprudence qui a jugé ainsi :

ç lorsque, d’une part, l’entreprise pouvait poursuivre son activité, ses frais de fonctionnement et ses
charges fixes étant relativement limitées et son passif privilégié étant inexistant, et d’autre part, les
créanciers chirographaires devaient être payés à 100% en dix ans par échéances égales non
productives d’intérêts (trib. Com. Paris 3 novembre 1986, G.P. 1987. 67) ;

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ç lorsqu’il était envisagé un paiement à hauteur de 60% par trimestrialités égales sans intérêt sur une
durée de neuf ans (Douai 22 janvier 1987, G.P. 1987. 190) ;

ç lorsque le projet de plan prévoyait un règlement du passif dans des limites raisonnables, que la
poursuite de l’exploitation se soldait par un résultat nettement bénéficiaire et que les comptes
prévisionnels, la liste des fournisseurs et celle des clients montraient que l’activité très spécifique
de la société correspondait à un réel besoin d’entreprises spécialisées (Rouen 5 mars 1987, D.
1987. 410 note Derrida) ;

ç lorsqu’il ressort du plan proposé que les fonds propres actuellement négatifs doivent redevenir
positifs à échéance d’un an, que les capitaux permanents doivent excéder les fonds de roulement
et les résultats être supérieurs aux annuités de remboursement du passif (Douai 21 avril 1988,
Rev. Jur. Com. 1990.71 note Gallet).

Mais a été rejeté le plan qui prévoyait un remboursement des dettes sur douze années, non pas pour
cette seule raison, mais parce qu’il supposait que l’entreprise dégagerait pendant cette période de
façon constante des bénéfices suffisants pour assurer le fonds de trésorerie et le remboursement du
passif, l’actif ne devant être pris en compte que comme valeur de réalisation dans le cadre d’une
liquidation (Rouen 19 mai 1988). Il en a été de même d’un plan qui ne dégageait pas les moyens de
réaliser les importants investissements nécessaires (Besançon 24 mars 1989, G.P. 1989.799 note
Martin-Serf).

Le plan de continuation arrêté par le tribunal indique, le cas échéant, les modifications apportées à la
gestion de l’entreprise et les modalités d’apurement du passif déterminées (cf. infra).

Le tribunal peut arrêter le plan de continuation même si la vérification des créances n’est pas
terminée.

Il peut accompagner la continuation de l’arrêt, de l’adjonction ou de la cession de certaines branches


d’activité. Cette cession est soumise au régime du plan de cession.

Les règles prévues dans le code du travail sont applicables lorsque les décisions accompagnant la
continuation précitée entraînent la résiliation des contrats de travail (article 592).

Lorsque le syndic envisage de proposer au tribunal un plan de continuation prévoyant une


modification du capital, il demande au conseil d’administration, au directoire ou au gérant, selon le
cas, de convoquer l’assemblée générale extraordinaire ou l’assemblée des associés. En cas de
besoin, le syndic peut convoquer lui-même l’assemblée dans les formes prévues par les statuts.

Si, du fait des pertes constatées dans les documents comptables, les capitaux propres sont inférieurs
au quart du capital social, l’assemblée est d’abord appelée à reconstituer ces capitaux à concurrence
du montant proposé par le syndic et qui ne peut être inférieur au quart du capital social. Elle peut
également être appelée à décider la réduction et l’augmentation du capital en faveur d’une ou
plusieurs personnes qui s’engagent à exécuter le plan.

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L’exécution des engagements pris par les actionnaires ou associés, ou par de nouveaux souscripteurs
est subordonnée à l’acceptation du plan par le tribunal. A défaut, les clauses d’agrément sont
réputées non écrites.

b) Effets de la continuation :

Le plan de continuation a pour objectif de conserver les moyens permettant à l’entreprise de


fonctionner. En conséquence, le législateur a prévu les règles suivantes :

à Suspension de l’interdiction d’émettre des chèques :

Lorsque l’entreprise a fait l’objet d’une interdiction d’émettre des chèques en raison de faits
antérieurs au jugement d’ouverture, le tribunal peut prononcer la suspension des effets de cette
mesure pendant la durée d’exécution du plan et du règlement du passif.

La résolution du plan met fin de plein droit à la suspension de l’interdiction.

Le respect des échéances et des modalités prévues par le plan vaut régularisation des incidents
(article 593).

à Inaliénabilité de certains biens :

Dans le jugement arrêtant le plan ou le modifiant, le tribunal peut décider que les biens qu’il estime
indispensables à la continuation de l’entreprise ne pourront être aliénés sans son autorisation ; il doit
fixer la durée de cette mesure (article 594 alinéa 1).

C’est ainsi qu’ont été déclarés inaliénables :

ç pour la durée du plan (dix ans), un immeuble appartenant à l’entreprise en redressement judiciaire
afin de garantir les intérêts des créanciers (Trib. Com. Lyon 30 juillet 1986, J.C.P. (éd. E)
1986.14 786 obs. Haehl) ;

ç toujours pour la durée du plan (cinq ans), un fonds de commerce appartenant à l’entreprise (Trib.
Com. Paris 2 mars 1987.482 note Marchi).

L’inaliénabilité des biens est inscrite au registre du commerce de l’entreprise.

Tout acte passé en violation de cette inaliénabilité est annulé à la demande de tout intéressé,
présentée dans le délai de trois ans à compter de la conclusion de l’acte ou de sa publication.

Le plan mentionne les modifications des statuts nécessaires à la continuation de l’entreprise.

Le syndic convoque, dans les formes prévues par les statuts, l’assemblée compétente pour mettre en
œuvre les modifications prévues par le plan (article 595).

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Enfin, aux termes de l’article 597, une modification dans les objectifs et les moyens du plan ne peut
être décidée que par le tribunal à la demande du chef de l’entreprise et sur le rapport du syndic.

Le tribunal statue après avoir entendu ou dûment appelé les parties et toute personne intéressée. Il
peut aussi prononcer la résolution du plan (cf. infra).

Délais et remises :

Le plan de continuation peut comprendre des délais et des remises dans les conditions suivantes :

1) Créanciers acceptants. Le tribunal donne acte des délais et remises acceptés par les créanciers
au cours de la consultation. Il peut, le cas échéant, réduire ces délais et remises (article 598 alinéa
1).

2) Créanciers réfractaires. Le tribunal peut imposer aux créanciers qui n’ont pas consenti de
délais ou de remises -qu’ils soient munis de sûretés ou simplement chirographaires- des délais.

Ces délais doivent être uniformes, sous réserve pour les créances à terme des délais plus longs qui
auraient pu être convenus par les parties avant l’ouverture de la procédure. Ces délais peuvent
excéder la durée du plan. Le premier paiement doit intervenir dans le délai d’un an (article 598
alinéa 1 et 2).

La jurisprudence française a confirmé cette solution et a ainsi jugé que le tribunal ne peut pas fixer
des délais différents entre les divers créanciers (Douai 22 janvier 1987, G.P. 1987. 190 ; Versailles
3 mars 1988 D. 1988. IR. 102), même si les différences sont destinées à tenir compte du fait que
certains d’entre eux bénéficient d’un privilège (Pan 24 février 1988, Rev. Jur. Com. 1988. 314 note
Lyonnet ; Rion 28 avril 1988, Bull. Inf. C. cass. 1988 n°845).

En revanche, les créanciers réfractaires qui doivent obtenir le remboursement intégral de leurs
créances peuvent être soumis à des délais plus longs que les créanciers ayant accepté des remises
(Versailles 19 mai 1988, D. 1988.572 concl. Challe). Par suite, le traitement des créanciers
privilégiés réfractaires peut être moins favorable que celui des créanciers privilégiés acceptants,
puisque leur sort doit être aligné (sur celui des créanciers chirographaires réfractaires (Versailles 19
mai 1988).

Le montant des échéances peut être progressif. Dans ce cas, leur montant annuel ne peut être
inférieur à 5% de leur montant total retenu par le plan (article 598 alinéa 3).

L’inscription d’une créance au plan et l’octroi de délais ou remises par le créancier ne préjugent pas
l’admission définitive de la créance au passif. Les sommes à répartir correspondant aux créances non
encore admises ne sont versées qu’à compter de l’admission définitive au passif.

à Vente de biens de l’entreprise :

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En cas de vente d’un bien grevé d’un privilège spécial, d’un nantissement ou d’une hypothèque, les
créanciers bénéficiaires de ces sûretés et les créanciers titulaires d’un privilège général, sont payés
sur le prix après le paiement des créanciers qui les priment (article 600).

En cas de besoin, une substitution de garantie peut être ordonnée par le tribunal à défaut d’accord
entre les parties (article 601).

à Inexécution des engagements financiers du plan :

Curieusement, le législateur marocain n’a pas prévu les modalités d’exécution des engagements du
plan (cf. article 103 du décret français n° 85-1388) mais seulement leur inexécution.

C’est ainsi que si l’entreprise n’exécute pas ses engagements fixés par le plan, le tribunal peut
d’office ou à la demande d’un créancier et après avoir entendu le syndic, prononcer la résolution du
plan et décider la liquidation judiciaire (ce qui exonère les juges marocains à la différence de leurs
homologues français de l’ouverture d’une nouvelle procédure de redressement même si celle-ci ne
peut tendre qu’à la cession ou à la liquidation judiciaire).

Les créanciers soumis au plan doivent alors déclarer l’intégralité de leurs créances et sûretés,
déduction faite des sommes déjà perçues (article 602 alinéa 2). Les paiements des créances nées
antérieurement au jugement d’ouverture étant interdits et les poursuites individuelles suspendues, ils
ne peuvent plus encaisser les dividendes prévus par le plan ni agir à propos des créances incluses
dans le plan (Paris 19 janvier 1991, R.J.D.A. 5/91 n°434).

Les créanciers dont le droit a pris naissance après le jugement d’ouverture du plan de continuation,
déclarent leurs créances. Si l’entreprise exécute le plan de continuation, le tribunal prononce la
clôture de la procédure (article 602 alinéa 3 et 4).

B. PLAN DE CESSION :

a) Conditions de la cession :

à Décision de cession :

Le tribunal peut ordonner la cession de l’entreprise, laquelle « a pour but d’assurer le maintien
d’activités susceptibles d’exploitation autonome, de tout ou partie des emplois qui y sont
attachés et d’apurer le passif » (article 603 alinéa 1).

La jurisprudence française déduit de cette disposition que les trois finalités prévues par la loi sont non
pas égales mais hiérarchisées. Il est donc possible de mettre en place un plan qui permette
d’abord la sauvegarde de l’entreprise, ensuite le maintien partiel de l’activité et de l’emploi ;
enfin et subsidiairement le paiement d’une partie du passif (Versailles 9 juillet 1986, G.P.
1986.570 note Martin).

Un plan de cession peut valablement être arrêté même si les créanciers ne reçoivent qu’un règlement
partiel, voire insignifiant, dès lors que la liquidation judiciaire n’aurait pas amélioré leur situation (Aix

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2 octobre 1986, D. 1987. Som. 9 obs. Derrida ; Paris 6 février 1987, G.P. 1987. 197 ; Toulouse
16 Avril 1987, Petites Affiches 20 juin 1988 p.5 ; Rouen 2 février 1989, inédit ; dans le même sens,
Com. 26 juin 1990, Bull. IV p. 130).

La cession peut être totale ou partielle. Dans ce dernier cas, elle ne doit pas diminuer la valeur des
biens non cédés (condition négative) ; elle doit porter sur l’ensemble des éléments de production qui
ferment une ou plusieurs branches complètes et autonomes d’activités (article 603 alinéa 2).

C’est ainsi par exemple qu’a été arrêté un plan de cession d’une entreprise en redressement
judiciaire prévoyant la reprise des activités de la division travaux sous-marins, d’une part, de la
division ingénierie, d’autre part, par deux groupes différents (Trib. Com. Paris 20 mai 1986, Rev.
Jur. Com. 1986. 265 note Marchi) ou la reprise de l’activité de recouvrement de créances d’un
établissement financier auquel l’agrément permettant de traiter des opérations de crédit ou de banque
avait été retiré (Trib. Com. Paris 22 janvier 1991, R.J.D.A. 4/91 n°339).

En revanche, le droit au bail ne saurait être assimilé à l’entreprise elle-même ni constituer à lui seul
une branche complète et autonome d’activité (Metz 13 février 1990, D. 1991. Som. 13 obs.
Derrida).

Enfin, jugé que dès lors qu’un plan de cession partielle est arrêté, le débiteur ne peut pas être mis en
liquidation judiciaire dans la même procédure (Limoges 13 août 1986 G.P. 1986.724 note Martin).

à Biens non compris dans le plan :

En cas de cession partielle de l’entreprise, sans que soit arrêté un plan de continuation, les biens non
compris dans le plan de cession sont vendus et les droits et actions sont exercés par le syndic selon
les modalités et les formes prévues pour la liquidation judiciaire.

En conséquence de ce qui précède, la jurisprudence a admis que les dispositions relatives à la


réalisation du gage sont donc applicables. Ainsi, dans un cas où la cession portait sur tous les
éléments du fonds de commerce de l’entreprise en redressement judiciaire, ce qui excluait la
possibilité d’un plan de continuation, et où des marchandises remises en gage à une banque n’étaient
pas comprises dans la cession, la banque a été réputée avoir le droit de recevoir en paiement ces
marchandises à concurrence du montant déclaré de sa créance sous réserve de restitution (en nature
ou en valeur) si le montant définitivement admis de cette créance s’avérait inférieur (Paris 4 mai
1988, B.R.D.A. 1988/13 p.14).

à Modalités de la cession :

Toute offre doit être communiquée au syndic dans un délai qu’il fixe et qu’il porte à la connaissance
des contrôleurs.

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A défaut d’accord entre le chef de l’entreprise, le syndic et les contrôleurs, un délai de quinze
jours doit s’écouler entre la réception d’une offre par le syndic et l’audience au cours de laquelle le
tribunal examine cette offre.

Contenu : Tout offre doit comporter l’indication :

ç des prévisions d’activité et de financement ;


ç du prix de cession et de ses modalités de règlement ;
ç de la date de réalisation de la cession ;
ç du niveau et des perspectives d’emploi justifiés par l’activité considérée ;
ç des garanties souscrites en vue d’assurer l’exécution de l’offre ;
ç des prévisions de vente d’actifs au cours des deux années suivant la cession.

Le syndic en informe les contrôleurs et les représentants du personnel.

En outre, l’auteur de l’offre peut être tenu d’établir les documents relatifs aux trois derniers
exercices.

Le juge-commissaire peut demander des explications complémentaires et le syndic doit donner au


tribunal tous les éléments permettant de vérifier le caractère sérieux de ces offres (article 604).

à Choix du ou des repreneurs :

Au vu des offres qui lui ont été soumises dans les conditions visées ci-dessus, le tribunal retient l’offre
qui permet dans les meilleurs conditions d’assurer le plus durablement l’emploi attaché à l’ensemble
cédé et le paiement des créanciers.

b) Effets de la cession :

à Obligations du cessionnaire : Paiement du prix de cession

Le cessionnaire doit payer le prix de cession fixé par le plan. Tant que ce paiement n’est pas intégral,
il ne peut ni aliéner ni donner en garantie ou en location-gérance les biens corporels ou incorporels
qu’il a acquis, à l’exception des stocks.

Toutefois, le tribunal peut, sur rapport du syndic, autoriser leur aliénation totale ou partielle, leur
affectation à titre de sûreté, leur location-gérance. Le tribunal doit alors tenir compte des garanties
offertes par le cessionnaire (article 610).

Le tribunal peut assortir le plan de cession d’une clause rendant inaliénable pour une durée qu’il fixe
tout ou partie des biens cédés (article 611).

Tout acte passé en violation des dispositions ci-dessus est susceptible d’être annulé sur demande de
tout intéressé ; cette demande doit être présentée dans les trois ans de la conclusion de l’acte ou de
sa publication s’il est soumis à publicité (article 612).

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Le cessionnaire est tenu de rendre compte au syndic de l’exécution des dispositions prévues par le
plan de cession à l’issue de chaque exercice suivant la cession. Si le cessionnaire, n’exécute pas ses
engagements, le tribunal peut, d’office, à la demande du syndic ou d’un créancier, prononcer la
résolution du plan. Dans ce cas, les biens sont réalisés dans les formes de la liquidation judiciaire et
leur prix affecté au paiement des créanciers admis (article 613).

En cas de défaut de paiement du prix de cession, le tribunal peut, d’office, à la demande du syndic
ou de tout intéressé, nommer un administrateur spécial ; il détermine sa mission et la durée pour
l’accomplir, celle-ci ne pouvant excéder trois mois.

Le cessionnaire doit être convoqué par le greffier pour être entendu en chambre du conseil (article
614).

à Droits des créanciers :

La cession emporte nécessairement le règlement des créanciers. Le principe est énoncé par l’article
615 alinéa 2 : le jugement qui arrête le plan de cession totale de l’entreprise rend exigibles les dettes
non échues, la jurisprudence ajoutant que peu importe que la procédure, antérieurement ouverte et
au cours de laquelle le plan a été arrêté, ait été annulée, pour irrégularité de la saisine du tribunal
(Montpellier 31 juillet 1991, D.1991.474 note Derrida).

Le syndic répartit le prix de cession entre les créanciers selon leur rang (article 615 alinéa 1).

Lorsque la cession porte sur des biens grevés d’un privilège spécial, d’un nantissement ou d’une
hypothèque, le tribunal doit affecter une quote-part du prix de cession à chacun de ces biens pour
la répartition de ce prix et l’exercice du droit de préférence (article 616).

Le complet paiement du prix emporte purge des inscriptions ; jusqu'à cette purge, les créanciers qui
bénéficient d’un droit de suite (en pratique les créanciers hypothécaires) ne peuvent l’exercer qu’en
cas d’aliénation du bien par le cessionnaire (article 617 alinéa 1). Celui-ci doit, avant l’aliénation, en
informer le syndic qui avertit les créanciers bénéficiant de ce droit (article 618).

Toutefois, la charge des sûretés immobilières et mobilières spéciales garantissant le remboursement


d’un crédit consenti à l’entreprise pour lui permettre le financement d’un bien sur lequel portent ces
sûretés est transmise au cessionnaire. Celui-ci sera alors tenu d’acquitter entre les mains du créancier
les échéances convenues avec lui et qui restent dues à compter du transfert de la propriété sous
réserve des délais de paiement qui pourront être accordés (cf. article 606) ; ces dispositions peuvent
être écartées par un accord entre le cessionnaire et les créanciers titulaires des sûretés (article 617
alinéa 2).

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2/ LA SOLUTION DE LIQUIDATION :

a) Conditions de la liquidation judiciaire :

à Décision de liquidation judiciaire :

La procédure de liquidation judiciaire est ouverte lorsque la situation de l’entreprise est


irrémédiablement compromise (en droit français, lorsque la continuation ou la cession de
l’entreprise se révèle impossible).

Le jugement prononçant la liquidation judiciaire est exécutoire de plein droit (article 728). Il est
toutefois susceptible d’appel (article 730) ou de pourvoi en cassation (article 731) dans le délai de
dix jours à compter de la décision de la juridiction.

L’opposition et la tierce opposition doivent être fournies par déclaration au greffe dans les dix
jours à compter du prononcé de la décision ou de sa publication au Bulletin Officiel si cette
publication est prescrite (article 729).

b) Effets de la liquidation judiciaire :

La liquidation judiciaire emporte de graves conséquences que l’on examinera point par point.

à Dessaisissement du débiteur :

Le jugement qui prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit dessaisissement du


débiteur pour l’administration et la disposition de ses biens, même de ceux qu’il a acquis à quelque
titre que ce soit, tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée.

Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la
liquidation judiciaire par le syndic (article 619 alinéa 2).

Toutefois, le débiteur peut se constituer partie civile dans le but d’établir la culpabilité de l’auteur
d’un crime ou d’un délit dont il serait victime ; les dommages-intérêts qu’il obtiendra, éventuellement,
bénéficieront à la procédure ouverte (article 619).

à Cessation d’activité :

La liquidation judiciaire met fin en principe à l’activité de l’entreprise. Toutefois, si l’intérêt général ou
celui des créanciers l’exige, le tribunal peut autoriser la continuation de l’activité pour une durée qu’il
fixe, soit d’office soit à la demande du syndic.

Dans ce cas, l’administration de l’entreprise est assurée par le syndic. Les créances nées pendant
cette période suivent le même sort qu’en cas de redressement judiciaire. Les contrats en cours
peuvent être continués comme en cas de redressement judiciaire (article 620).

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La liquidation judiciaire n’entraîne pas de plein droit la résiliation du bail des immeubles affectés à
l’activité de l’entreprise.

Le syndic peut continuer le bail ou le céder dans les conditions prévues au contrat conclu avec le
bailleur avec tous les droits et obligations qui s’y rattachent.

Si le syndic décide de ne pas continuer le bail, celui-ci est résilié sur sa simple demande. La
résiliation prend effet au jour de cette demande.

Le bailleur qui entend demander ou faire constater la résiliation pour des causes antérieures au
jugement de liquidation judiciaire doit, s’il ne l’a déjà fait, introduire sa demande dans les trois mois
du jugement (article 621).

à Vente des immeubles :

Les ventes d’immeubles ont en principe lieu aux enchères publiques suivant les formes prescrites en
matière de saisie immobilière. Toutefois, le juge-commissaire, après avoir recueilli les observations
des contrôleurs et entendu (ou dûment appelé) le chef de l’entreprise et le syndic, fixe la mise à prix
ainsi que les conditions essentielles de la vente et détermine les modalités de la publicité (article 622
alinéa 1).

Lorsqu’une procédure de saisie immobilière engagée avant l’ouverture du redressement ou de la


liquidation judiciaire a été suspendue par l’effet de cette dernière, le syndic peut être subrogé dans
les droits du créancier saisissant pour les actes que celui-ci a effectué, lesquels sont réputés
accomplis pour le compte du syndic qui procède à la vente des immeubles. La saisie immobilière
peut alors reprendre son cours au stade où le jugement d’ouverture l’avait suspendue (article 622
alinéa 1).

Dans les mêmes conditions, le juge-commissaire peut, si la consistance des immeubles, leur
emplacement ou les offres reçues sont de nature à permettre une cession amiable dans les meilleures
conditions, autoriser la vente des immeubles :

ç soit par adjudication amiable à prix qu’il fixe ;


ç soit de gré à gré aux prix et conditions qu’il détermine.

En cas d’adjudication amiable, la surenchère est toujours possible.

Le syndic répartit le produit des ventes et règle l’ordre entre les créanciers, sous réserve des
contestations qui sont portées devant le tribunal (article 622).

à Vente des unités de production :

Des unités de production composées de tout ou partie de l’actif mobilier ou immobilier peuvent faire
l’objet d’une cession globale (article 623 alinéa 1).

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La jurisprudence française a précisé la notion d’unités de production qu’elle définit comme «un
ensemble de biens de production qui, nécessairement associés à une force humaine de travail
concourt par elle-même soit à transformer de la matière première en produit fini ou semi-fini soit plus
généralement à générer de la valeur ajoutée hors le seul profit de la vente » (Trib. Com. Lyon 29
juillet 1986, D.1987. som. 93 obs. Derrida).

Le syndic suscite les offres d’acquisition et fixe le délai pendant lequel elles seront reçues. Toute
personne intéressée peut lui soumettre son offre, à l’exception du débiteur, des dirigeants de droit ou
de fait de la personne morale en liquidation judiciaire, ni aucun parent ni allié de ceux-ci jusqu’au
deuxième degré inclus.

Toute offre doit être écrite et comporter les indications prévues aux 1 à 5 de l’article 604. Elles
doivent être déposées au greffe du tribunal, où tout intéressé peut en prendre connaissance, et
communiquées au juge-commissaire (article 623 alinéa 3).

Après avoir consulté le chef d’entreprise, les contrôleurs et, éventuellement, le propriétaire des
locaux dans lesquels l’unité de production est exploitée, le juge-commissaire choisit l’offre qui lui
paraît la plus sérieuse et qui permet dans les meilleures conditions d’assurer durablement l’emploi et
le paiement des créanciers. Le syndic rend compte de l’exécution des actes de cession.

Une quote-part du prix de cession doit être affectée à chacun des biens cédés pour la répartition du
prix et l’exercice du droit de préférence.

à Vente des autres biens :

Le juge-commissaire ordonne la vente aux enchères publiques ou de gré à gré des autres biens de
l’entreprise après avoir entendu (ou dûment appelé) le débiteur et recueilli les observations des
contrôleurs. En cas de vente amiable, il peut demander que le projet lui soit soumis pour vérifier si les
conditions qu’il a fixées ont été respectées (article 624).

Le syndic peut, avec l’autorisation du juge-commissaire et le chef de l’entreprise entendu ou dûment


appelé, compromettre et transiger sur toutes les contestations qui intéressent collectivement les
créanciers même sur celles qui sont relatives à des droits et actions immobilières. Si l’objet du
compromis ou de la transaction est d’une valeur indéterminée ou excède la compétence en dernier
ressort du tribunal, le compromis ou la transaction est soumis à l’homologation du tribunal.

à Biens gagés :

Sur autorisation du juge-commissaire, le syndic peut, en payant la dette, retirer les biens constitués
en gage par le débiteur ou les choses retenues.

A défaut de retrait, le syndic doit, dans les six mois du jugement ordonnant la liquidation judiciaire,
procéder à la réalisation du gage ; il doit notifier l’autorisation au créancier quinze jours avant la
réalisation.

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Janvier 1997
Le créancier gagiste peut, même si sa créance n’est pas admise, demander l’attribution judiciaire du
gage. Si la créance est rejetée en tout ou en partie, le créancier gagiste doit restituer le bien ou sa
valeur au syndic, sous réserve du montant admis de sa créance.

Jugé que « l’attribution judiciaire du gage est passible même si le gage n’a pas emporté dépossession
du débiteur et droit de rétention » (Com. 6 mars 1990, D. 1990.311 note Derrida).

En cas de vente par le liquidateur, le droit de rétention est de plein droit reporté sur le prix.
L’inscription éventuellement pour la conservation du gage est radiée à la diligence du syndic (article
626).

à Règlement des créanciers :

Le jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire rend exigibles les créances non échues, c’est à
dire entraîne la déchéance du terme (article 627).

Si le liquidateur n’a pas entrepris la liquidation des biens grevés de sûretés spéciales (privilège
spécial, privilège du Trésor public, hypothèque et nantissement) dans les trois mois qui suivent le
jugement de liquidation judiciaire, les créanciers titulaires de ces sûretés peuvent exercer leur droit de
poursuite individuelle dès lors qu’ils ont déclaré leurs créances et même s’ils n’ont pas encore été
admis (article 628).

Le juge-commissaire peut, d’office ou à la demande du syndic ou d’un créancier, ordonner le


paiement à titre provisionnel, d’une quote-part de la créance définitivement admise (article 629).

Le produit de la liquidation judiciaire fait l’objet d’une répartition des créanciers privilégiés et
hypothécaires, pour l’essentiel suivant leur rang.

à Clôture des opérations :

Le tribunal peut prononcer à tout moment et même d’office la clôture de la liquidation après avoir
appelé le chef d’entreprise et sur rapport du juge-commissaire (article 635) :

ç lorsqu’il n’existe plus de passif exigible ou que le syndic dispose des sommes suffisantes pour
désintéresser les créanciers (clôture pour extinction de passif) ;

ç lorsque la poursuite des opérations de liquidation judiciaire est rendue impossible en raison de
l’insuffisance de l’actif (clôture pour insuffisance d’actif).

Le syndic procède alors à la reddition des comptes (article 636).

II. LES MESURES D’ACCOMPAGNEMENT DE LA DECISION :

Il s’agit ici de présenter des règles dont la finalité est la protection du patrimoine de l’entreprise
soumise à une procédure. Si ces mesures étaient déjà connues du texte de 1913 dans leur principe,
elles ont été rénovées et précisées par le nouveau texte.

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BIP N° 61
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On examinera donc d’une part les mesures destinées à protéger le patrimoine de l’entreprise et,
d’autre part, les mesures destinées à identifier la réalité de ce dernier.

1/ MESURES DESTINEES A PROTEGER LE PATRIMOINE DE


L’ENTREPRISE :

Deux types de mesures ont été instituées. Elles visent à faire respecter le principe d’égalité entre les
créanciers d’une part (a) et à dissuader l’organisation de l’insolvabilité du débiteur principal, d’autre
part (b).

a) Nullités de période suspecte :

Le législateur présume suspecte la période qui s’étend de la date de cessation des paiements
jusqu’au jugement d’ouverture de la procédure, qui peut donner lieu au désintéressement de certains
créanciers en violation du principe de l’égalité instauré par la loi. On retrouve ici un principe déjà
existant dans l’ancienne législation.

La nouvelle législation a conservé également le principe suivant lequel la date de cessation des
paiements est déterminée par le tribunal qui, à défaut, de détermination spécifique est réputée être
intervenue à la date du jugement. Le nouveau texte apporte une précision de taille en précisant que
dans tous les cas, cette date ne peut être antérieure de plus de 18 mois à celle de l’ouverture
de la procédure (sous réserve de l’alinéa 2 de l’article 681).

De plus, la date de cessation des paiements peut être reportée une ou plusieurs fois à la demande du
syndic. Cette demande doit être présentée au tribunal avant l’expiration du délai de quinze jours
suivant le jugement qui arrête le plan de continuation ou de cession, ou si la liquidation judiciaire a été
prononcée, suivant le dépôt de l’état des créances (article 680).

à Nullité obligatoire :

Sont nuls, lorsqu’ils auront été faits par le débiteur après la date de cessation des paiements tous les
actes à titre gratuit (article 681 alinéa 1).

à Nullité facultative :

La loi a supprimé les nullités obligatoires concernant les actes à titre gratuit faits dans les six mois
précédant la date de cessation des paiements (article 681 alinéa 2). En effet, le texte prévoit que
le tribunal « peut » annuler ces actes.

De même, le tribunal peut annuler tout acte à titre onéreux, tout paiement, toute constitution de
garanties ou sûretés, lorsqu’ils auront été faits par le débiteur après la date de cessation des
paiements (article 682).

Dérogation :

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Les garanties ou sûretés de quelque nature qu’elles soient, constituées antérieurement ou
concomitamment à la naissance de la créance garantie ne peuvent être annulées (article 683).

Paiement des effets de commerce :

Le nouveau code conserve l’exception aux dispositions susvisées relatives à la validité du paiement
d’une lettre de change, d’un billet à ordre, d’un chèque ou d’une créance cédée en application des
dispositions régissant la cession de créances professionnelles (cf. article 529 et s.).

Toutefois, le syndic peut exercer une action en rapport contre le tireur de la lettre de change ou, dans
le cas de tirage pour compte, contre le donneur d’ordre, ainsi que contre le bénéficiaire d’un chèque,
le premier endosseur d’un billet à ordre et le bénéficiaire d’une créance cédée, s’il est établi qu’ils
avaient connaissance de la cessation des paiements au moment de l’acquisition de l’effet
de commerce ou de la cession de la créance (article 684).

à Exercice de l’action en nullité :

L’action en nullité est exercée par le syndic (article 685). Elle « constitue une action en matière de
redressement et de liquidation judiciaire » (ch. Mixte 6 décembre 1985, D. 1986.185 note Derrida).
Elle est donc de la compétence du tribunal qui a ouvert la procédure.

Elle est susceptible d’être exercée antérieurement comme postérieurement au dépôt de l’état des
créances et, partant, de remettre en cause des décisions préalablement arrêtées par le juge-
commissaire quant à l’admission des créances (Douai 8 juin 1989, D. 1989.371 obs. Honorat).

Elle n’est soumise à aucun délai de rigueur (Paris 18 février 1992, R.J.D.A. 5/92 (n°515,
recevabilité de l’action introduite postérieurement au dépôt de l’état des créances).

à Effets de la nullité :

La nullité a pour effet de reconstituer l’actif de l’entreprise (article 685). Les biens ou fonds
correspondants sont donc réintégrés dans le patrimoine de l’entreprise pour être utilisés
conformément au plan de redressement ou dans le cadre de la liquidation de l’entreprise.

« Le créancier dont la sûreté est déclarée nulle est ramenée au rang de créancier chirographaire »
(Com . 15 juillet 1968, Bull.IV p.214 ; Rouen 19 mai 1983, G.P. 1984. Som. 39).

Une fois que la nullité a été prononcée, tout tiers intéressé peut s’en prévaloir (Req. 19 mars 1945,
D. 1945.329 note Percerou).

b) Droits du conjoint :

Le conjoint est un allié suspect en cas de procédure touchant son partenaire chef d’entreprise. Aussi
le législateur a prévu la règle ci-après.

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S’il prouve que les biens acquis par le conjoint ou par les enfants mineurs l’ont été avec des valeurs
fournies par le débiteur, le syndic peut demander que les acquisitions ainsi faites soient remises à
l’actif de l’entreprise. Cette preuve peut être apportée par tout moyen (article 678).

L’innovation est importante car cette règle inverse la charge de la preuve prévue par le dahir de
1913. En effet celui-ci prévoyait une présomption légale suivant laquelle les biens acquis par la
femme du failli appartiennent à son mari (le failli) et doivent être réunis à la masse de son actif. Pour
combattre cette présomption, la femme devait fournir la preuve du contraire.

2/ MESURES DESTINEES A IDENTIFIER LE VERITABLE PATRIMOINE DE


L’ENTREPRISE : LA REVENDICATION DES BIENS MOBILIERS :

Les mesures ici prévues par le législateur tendent à clarifier la véritable situation patrimoniale de
l’entreprise. En effet, un volume de stock entreposé dans les entrepôts d’une entreprise en liquidation
est artificiel si le stock est impayé.

Aussi le législateur prévoit que la revendication des meubles impayés doit être exercée dans les trois
mois du prononcé du jugement ouvrant la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire.

Pour les biens faisant l’objet d’un contrat en cours au jour de l’ouverture de la procédure, le délai
court à partir de la résiliation ou du terme du contrat (article 667).

Pour que son action puisse aboutir, le revendiquant doit donc impérativement saisir la juridiction
compétente dans le délai imparti même s’il a par ailleurs engagé des pourparlers avec
l’administrateur (ou le débiteur) ou s’il lui a manifesté son intention d’exercer son droit de
revendication (Paris 23 janvier 1991, R.J.D.A. 3/91 n°245 ; Colmar 24 avril 1991, R.J.D.A. 12/91
n°1079). Il en est ainsi même dans le cas où, pour lui permettre de prendre position sur la poursuite
du contrat en cours, l’administrateur a obtenu du juge-commissaire une prolongation de délai, telle
qu’il s’en est suivi un dépassement du délai de trois mois (Caen. 14 février 1991, R.J.D.A. 8-9/91
n°745).

Le respect de cette obligation est d’autant plus important que le vendeur qui s’est abstenu d’exercer
la revendication dans les délais requis ne peut pas se retourner contre la personne qui s’est portée
caution des engagements de l’acheteur envers le vendeur.

Par ailleurs, le législateur prévoit les conditions de la revendication de la marchandise vendue.

La revendication est possible lorsque la vente a été résolue (article 669) :

ç avant le jugement d’ouverture, soit par décision de justice, soit par le jeu d’une condition
résolutoire acquise ;

◊ la jurisprudence française a jugé que pour qu’il en soit ainsi, il suffit que le vendeur, sauf
clause contraire de la convention liant les parties exigeant la constatation judiciaire de la
résolution, ait manifesté de façon formelle et non équivoque sa volonté irrémédiable de se

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prévaloir de la clause (Civ. 12 décembre 1938, D.H. 1939.146 ; Civ. 28 juillet 1952, Rev.
Trim. Com. 1953.211 obs. Honin ; Aix 28 mai 1976, D. 1977. IR. 217).
◊ de même elle a considéré que la connaissance par le vendeur de l’état de cessation des
paiements de son débiteur ne fait pas obstacle à l’exercice de l’action en revendication, du
moment qu’il n’y a pas entre eux d’entente frauduleuse, les dispositions relatives aux nullités
de période suspecte n’étant pas susceptibles de s’appliquer en cette matière (Paris 22 avril
1976, G.P. 1977. 1.14).

ç après le jugement d’ouverture lorsque l’action en revendication ou en résolution a été intentée


avant ce jugement pour une cause autre que le défaut de paiement du prix ;

ç à condition, dans les deux cas, que la marchandise existe en nature, en tout ou partie (article
669).

On distinguera les conditions de la revendication suivant le sort des marchandises vendues :

à Marchandises en cours de transport :

Peuvent être revendiquées les marchandises expédiées au débiteur tant que leur « tradition » (c’est à
dire leur remise matérielle) n’en a pas été effectuée dans les magasins de celui-ci ou dans ceux du
commissionnaire (1), chargé de les vendre pour le compte de l’entreprise. Toutefois, la revendication
n’est pas recevable si, avant leur arrivée, les marchandises ont été revendues sans fraude, sur
factures ou titres de transport réguliers (article 670).

Cette règle a donné lieu, en France, à une ample jurisprudence.

La revendication demeure possible malgré la livraison des marchandises en gare de départ ou en


gare d’arrivée à la condition dans ce second cas que le débiteur n’en ait pas pris possession de
manière effective, c’est à dire qu’il n’ait pas procédé à la réception de la marchandise (Paris 7
janvier 1987, B.R.D.A. 1987/4 p.22) ou malgré leur chargement sur un bateau (Dijon. 26 janvier
1899, D.P. 1899.102).

Elle est en revanche impossible lorsque les marchandises sont entreposées dans les locaux d’un
transitaire en douane au nom et pour le compte de l’acheteur, ces marchandises devant être alors
réputées entrées dans les magasins de l’intéressé (Com. 10 octobre 1960, Bul. 111 p.286) ou
lorsqu’elles sont en cours de réexpédition par l’acheteur qui les a revendues (Com. 24 janvier 1989,
Bull. IV p.23).

Même si les conditions ci-dessus sont remplies, le débiteur peut, en application des dispositions
relatives à la poursuite des contrats en cours (cf. BIP n°60), faire obstacle à la revendication en
exigeant la livraison des marchandises moyennant paiement du prix convenu (Com. 26 juin 1972, D.
1972.639).

à Marchandises consignées :

1
Voir BIP n°57 p.43.

17
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Peuvent être revendiquées, à condition qu’elles se retrouvent en nature, c’est à dire « identifiables et
individualisées » (Com. 9 janvier 1990, Bull. IV. P.6), les marchandises consignées au débiteur à
titre de dépôt ou pour être vendues pour le compte du propriétaire (article 671).

Pour que son action puisse aboutir, le requérant doit établir qu’il est bien propriétaire des
marchandises en cause. Cette preuve est libre (Com. 14 février 1973, Bull. IV. P.67 ; Com. 25
février 1981, Bull. IV. P.82).

Toutefois, dispose l’article 668, le propriétaire d’un bien est dispensé de faire reconnaître son droit
de propriété lorsque le contrat portant sur ce bien a fait l’objet d’une publicité.

à Marchandises vendues avec réserve de propriété (2) :

Les marchandises vendues avec réserve de propriété peuvent être revendiquées, si elles se
retrouvent en nature, les marchandises vendues avec une clause subordonnant le transfert de
propriété au paiement intégral du prix lorsque cette clause a été convenue entre les parties dans un
écrit établi, au plus tard, au moment de la livraison (article 672).

La jurisprudence française a précisé que le vendeur peut exercer la revendication alors même qu’il a
demandé le paiement de la marchandise vendue à l’acheteur, cette demande ne constituant pas une
renonciation au bénéfice de la clause de réserve de propriété (Versailles 22 février 1996, D.1991.
som. 43 obs. Perochon), qu’il n’a pas déclaré sa créance (Com. 29 janvier 1991, R.J.D.A. 5/91
n°435) ou que l’acheteur lui oppose l’exception de non-conformité de la marchandise vendue (Com.
12 février 1991, B.R.D.A. 1991/12 p.20).

De même, si les marchandises ont été revendues, elle s’exerce sur le prix, même à l’égard du
cessionnaire (selon un bordereau Dailly, cf. la cession de créances professionnelles articles 529 à
536 du code de commerce) auquel l’acquéreur-revendeur a cédé la créance correspondante (Com.
20 juin 1989, D. 1989.431 note Pérochon).

Pour que l’action en revendication puisse aboutir, il faut que les marchandises « se retrouvent en
nature » (article 672), ce qui implique qu’elles soient identifiables et individualisées chez l’acheteur
(Com. 9 janvier 1990, Bull.IV p.6 annulant une clause qui prévoyait que les marchandises encore en
possession de l’acheteur seraient présumées à tout moment être celles encore impayées).

La revendication en nature peut s’exercer dans les mêmes conditions sur les biens mobiliers
incorporés dans un autre bien mobilier lorsque leur récupération peut être effectuée sans dommage
matériel pour les biens eux-mêmes et le bien dans lequel ils sont incorporés, et sans que cette
récupération entraîne une dépréciation excessive des autres actifs de l’entreprise.

La revendication en nature peut également s’exercer sur des biens fongibles lorsqu’ils se trouvent
entre les mains de l’acheteur des biens de même espèce et de même qualité (article 673).

Jugé qu’existaient encore en nature :

2
Voir notre « Point Sur » du précédent BIP N°60 (rédiger un contrat de vente 2ème partie).

18
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ç des ventilo-convecteurs bien qu’ils fussent des éléments d’un système de chauffage-climatisation
d’un immeuble en construction et qu’ils fussent dissimulés derrière un faux plafond car, loin
d’avoir fait l’objet d’un scellement qui aurait interdit leur retrait sans dommage, ces appareils
étaient séparables de l’ensemble du système par simple dévissage et ouverture de la trappe du
faux plafond (Paris 2 décembre 1986, B.R.D.A. 1987/5 p.13) ;

ç des tôles qui correspondaient aux bons de livraison, qui n’avaient été ni transformées ni
incorporées dans des ouvrages et qui étaient détenues par l’acheteur au moment du jugement
d’ouverture (Com. 12 décembre 1984, Bull.IV p.282) ;

ç des batteries d’accumulateurs dès lors que chacune d’elle étaient identifiée par un numéro de
série et que la reprise du matériel, malgré son intégration dans un ensemble fonctionnel, ne
nécessitait qu’un simple démontage (Com. 29 janvier 1991, R.J.D.A. 5/91 n°436).

Lorsque le prix est payé immédiatement, il n’y a pas lieu à revendication.

Le juge-commissaire peut, avec le consentement du créancier revendiquant, accorder un délai de


règlement. Le paiement du prix est alors assimilé à celui d’une créance née régulièrement après le
jugement d’ouverture (article 674).

Si le bien dont le vendeur a réservé la propriété est revendu, peut être revendiqué le prix ou la partie
du prix qui n’a pas été payé ni fait l’objet d’une remise de lettre de change, de billet à ordre ou d’un
chèque, ni inscrit en compte courant entre le débiteur et l’acheteur à la date du jugement ouvrant la
procédure (article 676).

Cette revendication n’est donc possible que pour le prix des marchandises vendues avec réserve de
propriété, seules visées par l’article 676.

III. LES SANCTIONS CONSECUTIVES A L’OUVERTURE D’UNE


PROCEDURE :

Les sanctions prévues par le législateur sont applicables aux dirigeants de l’entreprise individuelle ou
à forme sociale ayant fait l’objet d’une procédure qu’ils soient de droit ou de fait, rémunérés ou non
(article 702). Le texte prévoit donc l’élargissement du champ d’application des sanctions puisque
l’ancien droit de la faillite ne prévoyait l’application de sanctions qu’aux seuls commerçants. En
même temps, le nouveau texte prévoit des sanctions d’un type nouveau. En effet, s’il conserve la
sanction de la banqueroute (1), la distinction entre banqueroute simple et banqueroute frauduleuse
est abandonnée. Par ailleurs, le texte prévoit de nouvelles sanctions : l’action en comblement du
passif (2), le redressement par la liquidation judiciaire du dirigeant (3) et la déchéance commerciale
(4).

1/ LA BANQUEROUTE :

Le nouveau code de commerce supprime la distinction entre banqueroute simple et banqueroute


frauduleuse.

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La banqueroute s’applique désormais aux dirigeants de l’entreprise individuelle ou à forme sociale
ayant fait l’objet d’une procédure qu’ils soient de droit ou de fait, rémunérés ou non ayant commis
les faits suivants :

ç si, dans l’intention d’éviter ou de retarder l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire,


ils ont soit fait des achats en vue d’une revente au-dessous du cours, soit employé des moyens
ruineux pour se procurer des fonds ;

ç s’ils ont détourné ou dissimulé tout ou partie de l’actif ;

ç s’ils ont frauduleusement augmenté le passif du débiteur ;

ç s’ils ont tenu une comptabilité fictive ou fait disparaître des documents comptables de l’entreprise
ou de la société ou se sont abstenus de tenir toute comptabilité lorsque la loi en fait obligation
(articles 6, 7, 11 et 19 du code de commerce).

à Sanction :

L’auteur des faits susvisés peut être puni d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de
10.000 à 100.000 dirhams ou de l’une de ces deux peines seulement. La peine est portée au double
lorsque le banqueroutier est dirigeant, de droit ou de fait, d’une société dont les actions sont cotées à
la bourse des valeurs.

Le texte prévoit une disposition très dangereuse par les partenaires de l’entreprise soumise à une
procédure : « encourent les mêmes peines, les complices de banqueroute, même s’ils n’ont pas la
qualité de dirigeants d’entreprise » (article 722).

Les personnes coupables de banqueroute encourent également, à titre de peine accessoire, la


déchéance commerciale (cf. infra).

à Autres infractions :

Sont punis des peines de la banqueroute :

1) ceux qui ont, dans l’intérêt des personnes mentionnées à l’article 702, soustrait ou dissimulé tout
ou partie des biens, meubles ou immeubles de celles-ci ;

2) ceux qui ont frauduleusement déclaré dans la procédure, soit en leur nom, soit par interposition de
personne, des créances fictives.

Est puni des mêmes peines tout syndic ayant commis l’un des faits ci-après :

1) a porté sciemment et de mauvaise foi atteinte aux intérêts des créanciers, soit en utilisant à des fins
personnelles les sommes perçues dans l’accomplissement de sa mission, soit en attribuant à autrui
des avantages qu’il savait n’être pas dus ;

20
BIP N° 61
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2) a fait illégalement des pouvoirs qui lui sont dûment conférés un usage, autre que celui auxquels ils
sont destinés et contrairement aux intérêts du débiteur ou des créanciers ;

3) a abusé des pouvoirs dont il dispose aux fins d’utiliser ou d’acquérir pour son compte des biens
du débiteur soit personnellement soit par personne interposée.

Est puni également des mêmes peines, le créancier qui, après le jugement d’ouverture de la
procédure de redressement ou de liquidation judiciaire a passé un ou plusieurs contrats lui accordant
des avantages particuliers au détriment des autres créanciers (article 724).

à Saisie de la juridiction :

La juridiction répressive est saisie soit sur la poursuite du ministère public soit sur constitution de
partie civile du syndic (article 726).

La prescription de l’action publique ne court que du jour du jugement prononçant l’ouverture de la


procédure de traitement lorsque les faits incriminés sont apparus avant cette date (article 725).

à Information du ministère public :

Le ministère public peut requérir du syndic la remise de tous les actes et documents détenus par
celui-ci (article 727).

2/ L’ACTION EN COMBLEMENT DU PASSIF :

L’expression « action en comblement du passif » est née de la doctrine française et correspond à la


définition reprise par le législateur marocain.

Cette action sera donc intentée en cas de faute de gestion du débiteur ayant contribué à une
insuffisance d’actif, le tribunal peut décider que cette dernière sera supportée, en tout ou en partie,
avec ou sans solidarité par tous ses dirigeants ou seulement certains d’entre eux.

Une double exigence doit cependant être satisfaite : la preuve d’une faute de gestion et la
démonstration d’une causalité entre ce comportement fautif et l’insuffisance d’actif.

La faute de gestion, qui peut être simplement légère, est variée ; faute d’action : aventurisme ou
témérité, entêtement dans une diversification malheureuse ; faute d’omission : défaut de surveillance
des cadres supérieurs ou du président, lancement d’opérations sans étude préalable sérieuse.

Quelques exemples de faute de gestion justifiant une condamnation en comblement de passif ont été
cernés par la jurisprudence française.

ç embauche de salariés alors que le passif est principalement dû aux lourdes charges sociales
pesant sur l’entreprise (Aix-en-Provence, 8e ch., 19 février 1992 : Juris-Data n°40361) ;

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ç erreurs d’appréciation sur les investissements (Cass.com. 18 février 1992 : RJDA 1992, p.367) ;

ç absence de tenue régulière de la comptabilité, création d’un passif important en trois ans (Paris, 3e
ch., B, 23 janvier 1992 : Juris-Data n°020457) ;

ç défaut d’attention suffisante portée à la gestion d’une entreprise naissante et fragile, n’être présent
qu’un jour par semaine (Cass. Com. 11 juin 1991 : BRDA 30 sept. 1991, p.14) ;

ç retard dans la déclaration de cessation des paiements (Cass.com. 14 mai 1991 : BRDA 30 juin
1991, p.17) ;

ç erreur grave d’appréciation sur la viabilité d’une nouvelle chaîne de télévision (Trib. Com. Paris,
1ère ch. A, 23 novembre 1992 : Bull. Joly 1993 p. 255 note Campana) ; dans cette affaire la
société Hachette a été condamnée à supporter une partie du passif de la « cinq », l’éphémère
chaîne de télévision ;

ç lourdes erreurs d’appréciation sur le financement des investissements, sous-estimation des risques
financiers, laxisme dans la gestion courante, diversification désordonnée de l’activité sociale...
(Paris 3e ch. A, 18 juin 1991, aff. Nasa Electronique : JCP 91, ed.E,I, 87, n°4, obs. VIANDIER
et CAUSSIN).

La doctrine française a dégagé, à partir de ces décisions, des lignes de force : « les dirigeants sociaux
doivent être prudents, réfléchis, assidus, employer les instruments comptables de contrôle et de
prévision ».

à Prescription :

L’action « en comblement de passif » se prescrit par trois ans à compter du jugement qui arrête le
plan de redressement ou, à défaut, de la date du jugement qui prononce la liquidation judiciaire.

3/ L’ACTION EN EXTENSION DE REDRESSEMENT OU DE LIQUIDATION


JUDICIAIRES :

Le nouveau code de commerce prévoit qu’en cas de redressement ou de liquidation judiciaire d’une
société, le tribunal doit ouvrir une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire à l’égard
de tout dirigeant contre lequel peut être relevé un des faits ci-après :

1) avoir disposé des biens de la société comme des siens propres ;

2) sous le couvert de la société masquant ses agissements, avoir fait des actes de commerce dans un
intérêt personnel ;

3) avoir fait des biens ou du crédit de la société un usage contraire à l’intérêt de celle-ci, à des fins
personnelles ou pour favoriser une autre entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou
indirectement ;

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4) avoir poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait
conduire qu’à la cessation des paiements de la société ;

5) avoir tenu une comptabilité fictive ou fait disparaître des documents comptables de la société ou
s’être abstenu de tenir toute comptabilité conforme aux règles légales ;

6) avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l’actif ou frauduleusement augmenté le passif de la


société ;

7) avoir tenu une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière (article 706).

L’action se prescrit dans les mêmes conditions que précédemment.

Dans les deux cas, le tribunal se saisit d’office ou est saisi par le syndic.

4/ LA DECHEANCE COMMERCIALE :

La déchéance commerciale consiste en l’interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler,


directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, et toute société
commerciale ayant une activité économique (article 711).

• A tout moment de la procédure, le tribunal doit se saisir en vue de prononcer s’il y a lieu, la
déchéance commerciale de toute personne physique commerçante, ou de tout artisan
contre lequel a été relevé l’un des faits suivants :

1) avoir poursuivi abusivement une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu’à la
cessation des paiements ;

2) avoir omis de tenir une comptabilité conformément aux dispositions légales ou fait disparaître
tout ou partie des documents comptables ;

3) avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l’actif ou frauduleusement augmenté son passif
(article 712).

• A tout moment de la procédure, le tribunal doit se saisir en vue de prononcer, s’il y a lieu, la
déchéance commerciale de tout dirigeant d’entreprise contre lequel a été relevé l’un des
faits ci-après :

1) avoir exercé une activité commerciale, artisanale ou une fonction de direction ou


d’administration d’une société commerciale contrairement à une interdiction prévue par la loi ;

2) avoir dans l’intention d’éviter ou de retarder l’ouverture de la procédure, fait des achats en
vue d’une revente au-dessous du cours ou employé des moyens ruineux pour se prononcer
des fonds ;

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BIP N° 61
Janvier 1997
3) avoir souscrit, pour le compte d’autrui, sans contrepartie, des engagements jugés trop
importants au moment de leur conclusion, eu égard à la situation de l’entreprise ;

4) avoir omis de faire dans le délai de quinze jours, la déclaration de l’état de cessation des
paiements ;

5) avoir procéder de mauvaise foi, au paiement d’un créancier au détriment des autres
créanciers pendant la période suspecte (article 714).

Le jugement qui prononce la déchéance commerciale emporte l’incapacité d’exercer une fonction
publique élective. L’incapacité s’applique également à toute personne physique à l’égard de laquelle
la liquidation judiciaire a été prononcée. Elle prend effet de plein droit à compter de la notification qui
en est faite à l’intéressé par l’autorité compétente.

Le jugement prononçant la déchéance commerciale est publié au Bulletin Officiel (article 718).

La durée de la déchéance et de l’incapacité d’exercer une fonction publique élective ne peut être
inférieure à cinq ans . Le tribunal peut ordonner l’exécution provisoire de sa décision. Le jugement
de clôture de la procédure pour extinction du passif rétablit le chef d’entreprise ou les dirigeants de
la société dans tous leurs droits. Il les dispense ou relève de la déchéance commerciale et de
l’incapacité d’exercer une fonction publique élective (article 719).

Dans tous les cas, dispose l’article 720, l’intéressé peut demander au tribunal de le relever,
en tout ou partie, de la déchéance commerciale et de l’incapacité d’exercer une fonction publique
élective s’il a apporté une contribution suffisante au paiement de l’insuffisance d’actif (article
720).

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