Quand La Mort Éclaire La Vie 9782378803384
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Quand La Mort Éclaire La Vie 9782378803384
LA VIE
Sauf mention contraire,
toutes les photos présentes dans cet ouvrage sont de Matthieu Ricard.
T out est amené à disparaître. Tout ce qui naît meurt un jour. Une
eur, un arbre, une étoile, rien ne fait exception. Pas même nous.
Cette évidence, dans son apparente simplicité, n’en est pas moins une
vérité qu’il est parfois difficile d’accepter, surtout si elle nous concerne ou si
elle implique celles et ceux que nous aimons.
Est-il possible de penser la mort a n que cette confrontation devienne le
terreau fertile d’une vie plus riche ? Pouvons-nous faire en sorte que
nos pensées sur la mort nous permettent d’apprécier pleinement notre vie
tant qu’elle est là ? « Tout ce qu’on fait nit par se défaire, je sais. Et dès
l’heure où l’on naît, on commence à mourir. Mais entre la naissance et la
mort, il y a la vie », disait Simone de Beauvoir1.
Dans ce chapitre, nous verrons s’il est possible, bien que la mort soit
souvent associée à la peur et aux émotions difficiles, d’en transformer la
perspective a n qu’elle nous aide à vivre mieux. Pour cela, nous nous
intéresserons à notre relation personnelle et à celle de l’Occident avec l’idée
de la nitude, en passant par l’histoire des rites funéraires et les études en
psychologie et neurosciences qui se sont intéressées au sujet.
« Souviens-toi
qu’il existe deux types de fous :
ceux qui ne savent pas qu’ils vont
mourir, ceux
qui oublient
qu’ils sont en vie. »
PATRICK DECLERCK
Les rites funéraires signent
le passage à la civilisation
L’attitude de l’humanité face à la mort en général et à notre mort en
particulier occupe une place importante dans l’évolution de notre espèce.
D’un point de vue anthropologique, les rites funéraires sont considérés
comme l’un des fondements du passage à la civilisation. Le fait de devoir
affronter notre impermanence est peut-être à l’origine de la structuration de
nos groupes sociaux. Nos ancêtres se posaient probablement les questions
qui nous taraudent aujourd’hui face à l’évidence implacable de la mort :
comment donner un sens à l’existence ? Que se passe-t-il après ?
Comme le rappelle le philosophe Michel Hulin : « Aucune évidence n’est
plus écrasante que la mort. […] au point que la pratique de l’inhumation, la
seule à laisser des traces durables, passe aux yeux de beaucoup – plus que
l’outil et le langage –, […] pour le signe même de l’avènement de la
condition humaine en tant que telle2. »
Les rites funéraires sont un élément essentiel de la culture, intimement lié
à l’histoire de l’humanité. Évoluant tout au long des siècles suivant
l’in uence des modes de vie et des croyances, ils racontent nos besoins de
faire face à l’inconnu, à la douleur de la séparation. Dans de nombreuses
traditions, ils aident à franchir ce passage et à faire perdurer le lien avec l’au-
delà. L’ethnologue Jean-Didier Urbain souligne que « les rites sont un acte
essentiel de représentation pour rendre le mystère de la mort supportable3 ».
La mort en Occident
Aujourd’hui, en Occident, la mort est dissimulée. Comme l’a brillamment
montré l’historien des mentalités Philippe Ariès6, nous sommes
progressivement passés de la mort familière, « apprivoisée », au Moyen Âge,
à la mort refoulée, maudite, voire « interdite » dans les sociétés occidentales
contemporaines.
Au Moyen Âge, la mort fait partie de la vie. On voit ses enfants mourir,
on sait qu’un accouchement peut être fatal. Les maladies comme la peste,
une mauvaise récolte, les pillages invitent la mort au quotidien, et il est rare
d’atteindre un âge avancé.
Aujourd’hui, nous voulons, au mieux, fuir la mort, au pire la faire
disparaître. Certes, elle est omniprésente dans les médias, dans une
débauche d’images qui la rendent à la fois banale et irréelle, surtout quand
elle est lointaine. Mais sur un plan intime, la mort ne fait que peu partie de
nos vies. Trop peu, peut-être ?
Quand elle s’invite au plus près de nous, comme lors de l’épidémie de
Covid avec son macabre décompte quotidien, elle peut être très anxiogène et
affecter négativement notre santé mentale. Peut-être parce que dans notre
culture matérialiste qui rime avec possession et accumulation, la mort
signi e la n de tout, une forme d’effacement que nous voulons à tout prix
éviter.
Nos sociétés cherchent à occulter l’idée de la mort. Nous ne voulons pas
voir ni penser que nous allons toutes et tous y passer. La mort, qui faisait
partie de la vie, est aujourd’hui invisible, tout comme la vieillesse. Quoi de
plus facile que de nier l’évidence et de continuer comme si de rien n’était ?
On embaume, on maquille nos défunts pour effacer les traces de la mort.
Lors des enterrements, il est de bon ton de ne pas embarrasser les autres par
une tristesse trop expressive. On en vient même à cryogéniser les morts en
espérant qu’un jour la science les ressuscite.
Certains parents refusent d’adopter un animal de compagnie a n de ne
pas confronter leur enfant à la mort et au deuil inévitables. Mais quelles
sont les conséquences de ce déni, si ce n’est une augmentation de l’intensité
de la peur autour de la question de la mort ?
Dans la suite de ce chapitre, nous allons examiner les conséquences de la
peur et du déni de la mort avant de voir comment penser la mort peut
éclairer notre vie.
Le déni de la mort
Comme l’ont montré les études scienti ques de la théorie de la gestion de
la terreur, l’idée de notre nitude est menaçante et nous amène à essayer par
tous les moyens d’éviter d’y penser. Nous tentons non seulement d’échapper
à la peur de la mort, mais nous tentons aussi de ne pas la montrer aux
autres.
Un mécanisme neurocognitif a même été découvert, qui intervient dans le
déni de notre propre mort. Une étude en neurosciences a montré comment
notre cerveau réagit à l’idée de la mort8. Confrontées à l’évocation de la
mort d’une autre personne, les zones de notre cerveau impliquées dans la
prédiction des événements futurs (notamment l’insula) s’activent, nous
permettant d’imaginer cette mort. En revanche, ce système de prédiction ne
s’active pas lorsque c’est notre propre visage qui est présenté, nous
permettant d’éviter une information jugée trop menaçante !
La mort est non seulement une donnée indéniable de la vie, mais c’est
aussi un sujet essentiel, pour nos sociétés comme pour chacun et chacune
d’entre nous. Notre rapport à la mort in uence profondément notre rapport
à la vie, à nous-même, aux autres et à la nature.
Dans les prochains chapitres de ce livre, nous explorerons différentes
facettes de la mort comme autant de chemins pour apprivoiser cette grande
question, et transformer la menace de mort en invitation à soigner, savourer
et célébrer la vie.
TROIS QUESTIONS PERSONNELLES
1. Une personne
dont la mort a été inspirante
Ilios
Nombreuses sont les personnes dont la mort a été une inspiration dans ma
vie. Je pense à une amie médecin qui m’était très chère, Véronique. Son
attitude d’acceptation, de générosité et d’ouverture lors de sa n de vie a été
un modèle pour tous ses proches. Malgré l’intense douleur, elle parlait avec
lucidité et avait une présence aux autres incroyable jusqu’au bout. Les
derniers moments passés auprès d’elle à l’hôpital restent inscrits en moi
comme un exemple de la joie et de la générosité que l’on peut transmettre
dans ces moments. La veillée funèbre, organisée chez elle avec beaucoup
d’amour, a été à l’image de cette n de vie : un moment de tendresse, de
lien, de larmes et de rires partagés autour de son cercueil ouvert.
Caroline
Je pense à ma chère amie Mara, qui était mon enseignante de yoga et dont
j’ai accompagné le départ. Une n de vie qui fut hélas très brève en raison
de l’avancée rapide de sa maladie. Je me rappelle nos promenades à tout
petits pas, nos belles discussions à l’hôpital et chez elle.
Mère de deux jeunes lles, elle a tout tenté pour rester le plus longtemps
avec elles. Elle était d’un grand courage et en même temps d’une grande
tranquillité.
Je sens très souvent sa présence à mes côtés, comme une force inspirante
pour donner du sens à mon existence.
Ilios
La naissance de notre lle a été pour moi une expérience fondamentale,
mais elle a également changé mon rapport à la mort. Je suis davantage
conscient de la fragilité et donc du caractère précieux. Vivre au quotidien
avec elle et ma compagne est un rappel simultané de la vulnérabilité et de
l’importance des liens et de l’amour. Mais cela reste pour moi un chemin :
garder à l’esprit que je ne suis pas immortel, éviter de me perdre dans le
super u ou la débauche de projets, me recentrer sur l’essentiel.
Caroline
Sans hésiter, c’est mon voyage en Pologne, et plus particulièrement les
moments intenses partagés lors de la visite du mémorial d’Auschwitz-
Birkenau dans le cadre de Mémoire pour la paix, une magni que initiative
menée par le père Shoufani. C’était en 2003, et je me souviens comme si
c’était hier du tourbillon d’émotions qui ne cessaient de me parcourir. J’ai été
touchée en plein cœur par la présence remplie d’amour et le regard sans
haine de Schlomo, Magda, Irène et des autres rescapés qui nous
accompagnaient.
3. Une lecture,
une ressource qui m’aide face à la mort
Ilios
J’aime beaucoup ce dessin de Charles M. Schulz dans lequel Charlie
Brown dit : « Un jour, nous allons tous mourir, Snoopy. » Snoopy lui
répond : « Oui, mais tous les autres jours, nous allons vivre ! » Puisque je ne
connais pas l’heure de ma mort, puis-je faire autre chose que vivre ma vie de
manière quelque peu joyeuse, aimante, solidaire, et totalement imparfaite ?
Caroline
Les récits graphiques de L’Homme étoilé15, qui parlent de la mort d’une
façon lumineuse et grâce auxquels nous avons eu de très belles discussions
sur la mort à la maison.
Un triple paradoxe
Le souci de tout philosophe occidental, depuis les origines de la discipline,
est de dé nir les mots qu’il emploie, de préciser ses concepts. Or
le problème avec la mort, c’est qu’il s’agit d’un concept « vide ». Plus
exactement, c’est un concept « sans expérience », une réalité par intuition, et
je dirais même que cette intuition est aveugle. « La mort est une surprise
que fait l’inconcevable au concevable », disait Paul Valéry.
Même en s’accrochant au grand wagon des sciences, en leur empruntant
une dé nition « scienti que », donc objective, ce concept de la mort ne
résonne pas dans la pensée subjective. Aborder la mort clinique comme on
aborde la réfraction ou la gravitation, donc dans une perspective universelle,
ne rend pas compte de l’essentiel pour le sujet vivant.
Le concept même de la mort, c’est la première difficulté.
J’en termine avec une question, que je vous pose comme je me la pose
depuis longtemps sans y avoir trouvé de réponse satisfaisante : si l’on sait
qu’on va mourir, on ne le croit pas. Pourquoi ? La croyance, quelle qu’elle
soit, peut-elle apporter une réponse acceptable à une question
philosophique ?
Et vous m’objecterez à raison que, si la mort n’apporte aucune réponse, elle
emporte… toutes les questions.
Offrandes de lampes, le soir qui suivit la crémation du grand maître tibétain Dilgo Khyentsé Rinpoché
(1910-1991), en 1992, au Bhoutan. Il mourut en 1991, mais son corps fut conservé pendant un an pour
permettre à ses disciples du monde entier de venir lui rendre hommage.
TROIS QUESTIONS PERSONNELLES
1. Une histoire qui m’inspire :
la mort de Louis Le Sage
Je suis mort deux fois, en n… presque. Bon, je sais que c’est d’une
banalité absolue, au moins pour la seconde fois : un carrefour peu avant le
paradis. Avec mon épouse et deux de mes petits-enfants, nous étions
en voiture sur une route de campagne. Des chemins creux puis un carrefour
sans visibilité, aucune autre voiture rencontrée, juste l’espoir de ne pas
croiser un tracteur sur ces routes étroites. Pourquoi me suis-je arrêté ? Un
bolide a surgi sur la gauche et coupé notre route à une vitesse folle, sans
souci du carrefour. Mon épouse et moi nous nous sommes regardés, livides.
Mais c’est banal en effet…
Alors il me faut évoquer la première fois. J’étais encore jeune et j’avais
emmené mes enfants (pourquoi ai-je besoin d’associer la mort à ceux que
j’aime et au plaisir ?) dans un parc d’attractions aquatique. Emporté par
l’enthousiasme des petits, je les accompagnais tout en haut d’un
interminable toboggan-tunnel d’eau qu’il fallait dévaler assis sur une bouée.
La descente infernale m’a paru très longue, mais l’arrivée n’a été qu’un
éclair : j’ai vu en une fraction de seconde un maître-nageur, chargé sans
doute d’évacuer les arrivants dans la piscine de réception avant les suivants,
écarter les bras pour arrêter mon vol. Car je volais : la bouée s’était pliée sous
mon poids et le choc de l’arrivée, et s’étant muée en catapulte m’avait projeté
horizontalement. Je suis passé à côté du Christ sauveur et suis allé me
fracasser la tête sur l’escalier de la piscine. J’ai survécu, à mon grand
étonnement et à l’admiration des enfants présents devant mon immense
bosse sur le front. Mourir en slip dans un parc aquatique, ça l’aurait fait, sur
le faire-part d’un philosophe. Je ne suis pas sûr de faire aussi bien la bonne
fois (pour toutes).
Mais il n’y a pas qu’au moment du diagnostic qu’on peut se tromper sur
cette question : il m’est arrivé de me retrouver face à un patient convaincu
d’être mort, et c’est tout aussi étrange, je vous l’assure.
Je me souviens de ce cas : un homme persuadé d’être mort m’avait été
envoyé d’Angleterre. Il souffrait doublement d’une dépression majeure et du
syndrome de Cotard, qu’on appelle aussi le syndrome du zombie. Nous
avons étudié son cerveau, et les résultats ont fait l’objet d’une publication
scienti que2. L’étude a montré que les perturbations de l’expérience du
patient étaient liées à des altérations au niveau cérébral.
Quels sont les critères de la mort cérébrale ? Ils sont au nombre de trois :
1.l’absence de réponse à la douleur,
2.l’absence de ré exes du tronc cérébral,
3.l’absence de respiration (test d’apnée)5.
La mort de mon père, à la suite d’un cancer du poumon causé par son
travail dans la poussière d’amiante. Il a travaillé dur toute sa vie en rêvant de
sa retraite bien méritée, et il n’a pas pu en pro ter. Carpe diem. Saisissons
chaque jour, pro tons de la vie.
Dans mon poste de neurologue travaillant avec l’équipe des soins intensifs
et en neuro-revalidation, la n de vie et la mort sont omniprésentes. Je reste
marqué à vie par une multitude d’expériences personnelles. Un exemple qui
a frappé toute l’équipe est celui d’un jeune homme dans un coma après
intoxication, qui a évolué vers un « état végétatif persistant » (actuellement
appelé « éveil non répondant »). Alors que tout le monde attendait sa mort,
il a recouvré sa conscience. Par la suite, il m’a même raconté son expérience
de mort imminente. Nous avons pu étudier son activité cérébrale avec nos
scanners, depuis son coma jusqu’à sa guérison, ce qui nous a permis de
mieux comprendre la capacité de neuroplasticité cérébrale et la possibilité de
refaire des connexions dans le cerveau sévèrement blessé. Son histoire a
changé notre vision et notre connaissance médicale, et nous a permis de
développer de nouveaux traitements6.
3. Une lecture,
une ressource qui m’aide face à la mort
1. https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/c/c5/Eisenbrandt_coffin.jpg
2. V. Charland-Verville, M. A. Bruno, M. A. Bahri, A. Demertzi, M. Desseilles, C. Chatelle, … &
A. Zeman, « Brain dead yet mind alive: a positron emission tomography case study of brain
metabolism in Cotard’s syndrome », Cortex, 49(7), 2013, p. 1997-1999.
3. Steven Laureys, « Science and society : death, unconsciousness and the brain », Nature Reviews
Neuroscience, vol. 6, no 11, 2005, p. 899-909.
4. Voir Steven Laureys, Joseph J. Fins, « Are we equal in death ? : Avoiding diagnostic error in brain
death », Neurology, vol. 70, no 4, 2008.
5. E.F. Wijdicks, « e diagnosis of brain death », New England Journal of Medicine, vol. 344, no 16,
2001, p. 1215-1221.
6. Voir Steven Laureys et al., « Restoration of thalamocortical connectivity after recovery from
persistent vegetative state » e Lancet, vol. 355, no 9217, 2000, p. 1790-1791 ; A. ibaut et al.,
« erapeutic interventions in patients with prolonged disorders of consciousness », e Lancet
Neurology, vol. 18, no 6, 2019, p. 600-614.
© MICHEL HOUET
4.
LA SCIENCE DES EXPÉRIENCES
DE MORT IMMINENTE
Charlotte Martial
Flash-back
Depuis quand parle-t-on des expériences de mort imminente ? C’est un
phénomène assez récent pour le grand public, et encore plus nouveau pour
la recherche scienti que, mais cela fait très longtemps que des EMI sont
relatées. Platon, notamment, rapporte les propos d’un guerrier qui a frôlé la
mort et qui raconte avoir voyagé dans un autre monde. On pense également
à cette fameuse toile de Jérôme Bosch, Visions de l’au-delà. Montée des
bienheureux vers l’empyrée, qui représente clairement une EMI, alors qu’elle a
été peinte au début du XVIe siècle.
Toutefois, c’est seulement en 1975, grâce au best-seller La Vie après la vie,
écrit par le Dr Moody1, un intensiviste américain, que les EMI ont été
popularisées, générant un large intérêt du grand public. Dans son ouvrage,
le Dr Moody relate des centaines de témoignages recueillis au chevet de
patients en unités de soins intensifs. À la suite de cette publication, des
milliers d’ouvrages sortent les uns après les autres. Certains recueillent la
parole de personnes ayant vécu une expérience de ce type, d’autres discutent
de ces EMI et de ce qu’elles peuvent représenter.
Pour certains, les EMI sont une preuve de vie après la mort, ce qui suscite
de nombreux débats au sujet de la relation entre cerveau et conscience.
Cependant, à l’heure actuelle, il n’existe aucune preuve scienti que d’une vie
après la mort. En fait, ce ne sont probablement pas les EMI qui nous
aideront à répondre à cette question, étant donné que les personnes qui
témoignent de ces expériences n’ont pas été dans un état de mort cérébrale.
Ce qui est assez particulier et excitant pour la recherche scienti que, c’est
que, bien qu’il existe des milliers d’ouvrages sur les EMI, peu d’études ont
été effectuées sur le sujet. Trois cent cinquante-deux publications seulement
apparaissent dans le moteur de recherche Pubmed, l’outil de référence pour
les articles scienti ques, avec le mot « near-death experience » (« expérience
de mort imminente », en anglais).
Cependant, depuis 2014, un réel engouement se fait jour : de plus en plus
de chercheuses et de chercheurs étudient le sujet, dans le monde entier.
Popularisation de l’expression « expérience de mort imminente » dans la littérature scientifique au cours
des dernières décennies. Source : adapté de A. Barra et al., « From unconscious to conscious : a spectrum
of states », in M. Overgaard et al., Beyond Neural Correlates of Consciousness, Londres, Routledge, 2021.
Les EMI sont moins rares que ce que l’on pourrait imaginer. Quelques
chiffres pour mieux comprendre le phénomène : environ 10 à 12 % des
patients qui ont vécu un arrêt cardiaque rapportent une EMI. Dans la
population générale, cela signi e que 4 à 5 % de personnes en témoignent.
Il est donc probable qu’une partie des lectrices et lecteurs de cet ouvrage,
peut-être vous, ont vécu une expérience qui s’y rapporte.
L’activité cérébrale en fonction de l’état du patient. Source : adapté de Steven Laureys, « Traumatic brain
damage : severe brain damage : coma and disorders of consciousness », in Donald Pfaff, Nora Volkow (éd.),
Neuroscience in the 21st Century : from Basic to Clinical, New York, Springer, 2016.
Si vous avez vécu une EMI et que vous souhaitez témoigner, n’hésitez pas
à nous écrire à cette adresse : [email protected]
L’Échelle de contenu des expériences de mort
imminente (C-EMI)
Nous vous invitons à répondre à chacune des vingt propositions ci-dessous selon vos émotions et vos
pensées au moment de l’expérience (ni avant ni après), en choisissant la réponse qui vous semble la
plus appropriée (UNE SEULE réponse par proposition est admise).
Toute expérience ou sensation étant vécue plus ou moins intensément, nous vous invitons à préciser
l’intensité ressentie à l’aide de quatre choix de réponses (allant de 1 à 4) à chacune des propositions.
Si, au contraire, vous n’avez pas fait l’expérience du phénomène présenté dans la proposition, veuillez
cocher « 0 – Pas du tout ; absence ». Si vous avez vécu un même phénomène à plusieurs reprises
durant l’expérience, nous vous invitons à répondre selon le phénomène le plus marquant.
Choix de réponse :
0 – Pas du tout ; absence
1 – Légèrement
2 – Moyennement
3 – Intensément ; équivalent à toute autre expérience intense vécue jusqu’à présent
4 – Extrêmement ; plus qu’à tout autre moment de ma vie et plus intense que 3
0 1 2 3 4
6. Vous avez eu une sensation d’harmonie ou d’unité, comme si vous faisiez partie d’un
tout
7. Vous avez vu ou avez été entouré par une lumière brillante sans origine matérielle
déterminée
8. Vous avez eu des capacités sensorielles inhabituelles (vue, ouïe, odorat, toucher
et/ou goût)
9. Vous étiez conscient de choses au-delà de ce que vos sens peuvent habituellement
percevoir
10. Vous avez acquis des connaissances sur l’avenir
12. Vous avez eu la sensation de quitter le monde terrestre ou d’intégrer une nouvelle
dimension et/ou un nouvel environnement
14. Vous avez fait la rencontre d’une présence et/ou d’une entité (il peut s’agir d’une
personne décédée)
16. Vous avez fait l’expérience d’une frontière et/ou d’un point de non-retour
17. Vous avez pris la décision ou avez été contraint de revenir de l’expérience que vous
viviez
19. Vous avez vu ou êtes entré dans une zone de passage (par exemple, un tunnel ou
une porte)
20. Vous avez l’impression de ne pas disposer des mots adéquats pour décrire votre
expérience
TROIS QUESTIONS PERSONNELLES
1. Une personne dont la mort
a été inspirante
Pour moi, toute personne se sacri ant pour une cause (politique) noble est
inspirante.
1. La Vie après la vie. Ils sont revenus de l’au-delà, trad. de Paul Misraki, J’ai lu, 2003.
2. Charlotte Martial et al., « e Near-Death Experience Content (NDE-C) scale : development and
psychometric validation », Consciousness and Cognition, vol. 86, 2020.
© JEAN-PIERRE DEVORSINE
5.
S’INSPIRER DE LA MORT POUR UNE VIE
PLUS PRÉCIEUSE
Matthieu Ricard
La conscience de la mort
et le rapport au temps
Tout cela n’a rien de morbide. Le philosophe Patrick Declerck écrivait :
« Souviens-toi qu’il existe deux types de fous : ceux qui ne savent pas qu’ils
vont mourir, ceux qui oublient qu’ils sont en vie. » Il est vrai que, s’il ne me
restait que trois jours à vivre, je ne repriserais pas mes chaussettes. Quand
on a la chance de pouvoir pratiquer, de faire des retraites dans un ermitage
ou ailleurs, le temps prend une tout autre valeur. On a presque l’impression
qu’il s’écoule comme une rivière d’or fondu : chaque moment est
éminemment précieux.
En lien avec ce que nous a dit Charlotte Martial dans le chapitre IV, peut-
être certains d’entre vous connaissent-ils le témoignage de Yongey
Mingyour Rinpoché, qui est parti pendant plusieurs années d’errance dans
les montagnes de l’Himalaya en Inde. Au tout début de son errance, il arrive
à Kushinagar, le lieu où le Bouddha est passé dans le parinirvana (c’est ainsi
que l’on nomme la mort du Bouddha). Yongey Mingyour Rinpoché
mendiait sa nourriture dans les restaurants et, en mangeant des aliments
avariés, il est tombé extrêmement malade. Il est parti dans un parc et, là, il
s’est vu mourir.
Même un général qui dispose
d’une immense armée ne peut
arrêter la mort.
Même celui qui possède une fortune
considérable ne peut la soudoyer.
Étant un pratiquant avancé, il avait connaissance de tous les textes qui
parlent du bardo, cet état intermédiaire entre la mort et la renaissance. Il a
donc vécu très clairement et consciemment les différentes étapes de
dissolution qui se produisent au moment de la mort. On dit par exemple
que lorsque l’élément Terre se résorbe, le corps ne peut plus bouger. Lorsque
l’élément Air se résorbe, la respiration cesse. Il a vécu toutes ces étapes et est
resté pendant une partie de la nuit dans cet état intermédiaire de mort
imminente. À un moment donné lui est venue l’idée de revenir à cette vie. Il
en a fait l’expérience et a très clairement décrit la succession en ordre inverse
de tous ces états de dissolution. Il s’est réveillé. Quelqu’un a pris soin de lui,
et il a survécu.
Mon ami Francisco Varela, qui a fondé l’institut Mind & Life, a souffert
d’un cancer très grave. J’ai pu le rencontrer peu de temps avant sa mort, et,
lors de notre discussion, il me disait que ce qu’il craignait le plus, c’était
d’avoir un esprit confus et brumeux au moment de la mort et de ne pas
pouvoir être lucide pour sa pratique spirituelle. Son épouse Amy m’a con é
plus tard qu’il avait pu mourir en parfaite lucidité. Il était assis en
méditation, et elle-même était placée derrière lui pour le tenir. Jusqu’au
dernier moment, il a préservé cette présence ouverte, cette clarté de la
conscience éveillée. C’est ce qu’on peut souhaiter de mieux pour celui qui est
engagé sur le chemin spirituel : mourir en pleine conscience.
1. Voir Michel Bitbol, La conscience a-t-elle une origine ? Des neurosciences à la pleine conscience : une
nouvelle approche de l’esprit, Flammarion, 2014.
2. Voir la quatrième session des XXVIes rencontres Mind & Life, « Mind, Brain and Matter »
(visionnable à l’adresse mindandlife.org), ainsi que la transcription de ces entretiens : Wendy
Hasenkamp, Janna R. White (éd.), e Monastery and the Microscope : Conversations with the Dalai
Lama on Mind, Mindfulness, and the Nature of Reality, New Haven, Yale University Press, 2017.
3. Christoph Koch, Consciousness : Confessions of a Romantic Reductionist, Cambridge, MIT Press,
2017.
4. La question fondamentale que le philosophe Leibniz pose dans son livre Principes de la nature et de
la grâce (1740) est : « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? »
© CÉLINE NIESZAWER
6.
LA VIE EST LA SEULE CONSOLATION
FACE À LA MORT
Christophe André
MÉDECIN PSYCHIATRE, CHRISTOPHE ANDRÉ EST L’UN DES PREMIERS PRATICIENS À AVOIR INTRODUIT
LA MÉDITATION À L’HÔPITAL. IL EST ÉGALEMENT AUTEUR ET CHRONIQUEUR À FRANCE INTER.
L a mort ? Voici ce que Pascal, dans ses Pensées (fragment 405), propose
à notre ré exion : « Qu’on s’imagine un nombre d’hommes dans les
chaînes, et tous condamnés à la mort, dont les uns étant chaque jour
égorgés à la vue des autres, ceux qui restent voient leur propre condition
dans celle de leurs semblables, et, se regardant les uns les autres avec douleur
et sans espérance, attendent à leur tour. C’est l’image de la condition des
hommes. »
La condition humaine
La vision que Pascal veut dresser de la condition humaine est tranchante
et impitoyable. Se savoir mortel et voir régulièrement nombre de ses
semblables quitter ce bas monde serait une condition effroyable, une
situation sans solution autre que Dieu. Trois siècles plus tard, Camus écrit,
dès les premières lignes du Mythe de Sisyphe1 : « Il n’y a qu’un problème
philosophique vraiment sérieux : c’est le suicide. Juger que la vie vaut ou ne
vaut pas d’être vécue, c’est répondre à la question fondamentale de toute la
philosophie. »
Pour moi qui ne suis pas philosophe, il me semble qu’il y a un autre
problème, encore plus délicat : comment vivre en sachant qu’on va mourir ?
Je veux dire : comment vivre heureux ? À cette question, il n’est pas de
réponse dé nitivement satisfaisante et sécurisante, il n’est pas de solution.
Juste des consolations. Qui ne peuvent sans doute pas être généralisées : la
mort est universelle, mais ce qui nous en console est bien souvent personnel.
Voici donc, dans les lignes qui suivent, quelques éléments de ce qui, pour
ma part, m’a souvent aidé et consolé…
Il me semble que ce genre de décision touche à peu près tous les humains
qui ont échappé, sans savoir comment, à une adversité extrême. L’histoire
incroyable de l’écrivain Dostoïevski en est l’une des illustrations les plus
connues : en raison d’écrits jugés politiquement criminels par le pouvoir
absolu du régime impérial russe, il fut condamné à mort, puis gracié au tout
dernier moment, alors qu’il se trouvait déjà devant le peloton d’exécution, et
envoyé au bagne en Sibérie. Il rapporte ces instants dans son roman L’Idiot,
par la voix d’un de ses héros, le prince Mychkine : « Mais je préfère vous
raconter l’histoire d’une autre rencontre que je s l’année passée. Il s’agit
d’un cas fort curieux par sa rareté. L’homme dont je vous parle fut un jour
conduit à l’échafaud avec d’autres condamnés et on lui lut la sentence qui le
condamnait à être fusillé pour un crime politique. Vingt minutes plus tard,
on lui noti a sa grâce et la commutation de sa peine. Pendant les quinze ou
vingt minutes qui s’écoulèrent entre les deux lectures, cet homme vécut dans
la conviction absolue qu’il allait mourir dans quelques instants. » Et le
prince continue : « Cet homme me déclara que ces minutes lui avaient paru
sans n et d’un prix inestimable (…) il déclarait que rien ne lui avait été
alors plus pénible que cette pensée : “Si je pouvais ne pas mourir ! Si la vie
m’était rendue ! Quelle éternité s’ouvrirait devant moi ! Je transformerais
chaque minute en un siècle de vie…”2 »
Sans avoir traversé semblable épreuve, voici ce qu’écrit à ce propos Léon
Tolstoï dans une lettre à son épouse, en octobre 1910, alors qu’à 82 ans,
sentant la mort venir, il vient de renoncer à tous ses biens et de s’enfuir de
chez lui : « La vie n’est pas une plaisanterie et nous n’avons pas le droit de la
traverser ainsi. Il est irraisonnable de la mesurer suivant la durée du temps ;
les mois qui nous restent à vivre sont peut-être plus importants que toutes
les années vécues ; il importe de bien les vivre3. »
Consolation
Le risque, dans les prises de conscience radicales de cette dimension de la
vie humaine, c’est le « tragique inadéquat », la peur constante de la mort, le
sentiment de dépression, la conviction de l’inutile et du dérisoire de toute
action. Cela ne nous aide en rien, pas plus que le déni, et cela fait même
plutôt moins bien que le déni ; à tout prendre, mieux vaut adopter l’attitude
du causeur de Valéry, inconscient, adossé à sa cheminée, et prenant plaisir à
la soirée, plutôt que celle du cynisme et de l’amertume.
Notre plus grand théoricien du tragique, le philosophe André Comte-
Sponville, le dit de manière limpide : « Le tragique, c’est la vie telle qu’elle
est, sans justi cation, sans providence, sans pardon ; c’est la volonté de
l’affirmer toute, de l’accepter toute, avec la souffrance dedans, avec la joie
dedans, sans ressentiment, sans mauvaise conscience, sans nihilisme4. »
Retrouver la joie, donc, après la révélation charnelle de notre mort à venir.
Comme dans ce clin d’œil de l’humoriste Pierre Desproges, qui proposait ce
programme dans son spectacle Vivons heureux en attendant la mort5.
La vie est tragique et la vie est belle. Qu’elle soit belle n’est pas une
solution au problème de la mort, mais cela apporte une consolation. La
consolation, c’est la petite lumière d’amour, d’espérance et de soulagement
qui nous est offerte dans la nuit du chagrin et du malheur. Elle ne répare pas
ce qui est cassé ni ne fait revenir ce qui est perdu, elle ne supprime pas
l’adversité, mais elle nous aide à faire face, à tenir bon, à ne pas désespérer.
Dans son bel essai L’Inconsolable, André Comte-Sponville, encore lui,
écrit : « Philosophie de la consolation, toujours nécessaire et toujours
insuffisante… » C’est exactement ça : sans la consolation, la peine, la peur, le
désespoir peuvent nous submerger ; avec la consolation, nos détresses sont
toujours là, mais elles ne nous submergent pas, on sent qu’on va – peut-
être – tenir le coup. La vie est la seule consolation à la mort. À condition de
la vivre en pleine conscience.
Méditer
Lorsqu’on médite en pleine conscience, il arrive que l’on rencontre
spontanément des ressentis imprévus, comme ces expériences étranges et
assez fréquentes de dissolution de soi, accompagnées de sentiments de paix,
de sécurité, de certitude étonnante, d’autant plus que les repères habituels
(les mots pour les décrire) ne sont plus là ; nous les avons laissés derrière
nous au fur et à mesure que l’exercice avançait…
La vie est tragique et la vie est belle.
Qu’elle soit belle n’est pas une
solution au problème de la mort,
mais cela apporte une consolation.
Souvent, nous éprouvons aussi un sentiment d’appartenance au monde
environnant, plutôt que la conscience de nos différences, de ce qui nous
sépare de lui, cette conscience de ce que nous appelons notre
« personnalité », notre « individualité ». Dans ces instants très particuliers,
nous n’avons plus peur, de rien. Nous ne comprenons pas tout de suite que
c’est notre peur la plus profonde, celle de notre disparition même, qui a
disparu, et qui provoque en nous cette paix immense, sans nuages. Et que si
nous ne craignons pas de disparaître, c’est peut-être parce que nous avons
déjà disparu ? Du moins parce que notre ego a disparu ? Et que le meilleur
de nous-même, ou de notre humanité, est toujours là…
Ainsi, tout exercice méditatif permet de se familiariser avec ce qui nous
fait peur au lieu de l’éviter, puisque la règle de la pleine conscience est de
tout accueillir, de tout observer, de tout laisser vivre en nous, avant même de
vouloir l’analyser, le comprendre, le modi er. Lorsque ce qui nous vient est
angoissant ou même effrayant – au sens où l’effroi est la peur de ce qui est
inévitable – comme l’est la peur de la mort, alors l’expérience est, au début,
très pénible et douloureuse.
Vivre et savourer
Aucun de nos efforts ne nous rendra l’idée de la mort bénigne ou agréable.
Ce n’est ni le but à atteindre ni la conséquence à attendre. Face à la mort, on
vise simplement à remplacer la peur non par l’indifférence mais par
l’intelligence : l’intelligence de la vie telle qu’elle est, avec un début et une
n, et ses insondables mystères de l’avant et de l’après.
Il ne nous reste plus alors qu’à vivre comme un équilibriste sur sa corde
raide. Pour éviter la bascule dans le vide, il ne doit jamais oublier qu’il est en
danger, mais il ne doit pas non plus se focaliser sur le risque de chute. Ainsi
en est-il pour nous, les vivants : ne jamais oublier la mort possible à tout
instant, mais ne jamais nous focaliser sur elle.
Et nous souvenir de cette phrase attribuée à Spinoza : « L’idée de cercle
n’est pas ronde, et l’idée de chien n’aboie pas. » De même, l’idée de mort ne
tue pas : à cet instant, nous sommes bien vivants…
TROIS QUESTIONS PERSONNELLES
1. Une personne qui m’a inspiré
face à la mort
Dans les maladies sévères, il n’y a pas seulement la peur de la mort, mais
aussi les souffrances, les handicaps ; ces « menus maux », comme l’écrit
Montaigne, peuvent provenir de la maladie, de ses traitements ou des
examens. Parmi les menus maux liés à mon cancer, je me souviens d’une
scintigraphie – on vous injecte une substance radioactive qui se xe sur le
squelette, permettant de révéler d’éventuelles métastases osseuses. L’examen
se passait dans le sous-sol d’un hôpital. Je commence à descendre le petit
escalier, et j’aperçois en bas un panneau indiquant deux services : la èche
de gauche dirige les visiteurs vers la « Médecine nucléaire », celle de droite
signale la « Chambre mortuaire ». Première onde de détresse et
d’inquiétude. Et début de rigolade : quelle bonne idée d’associer ainsi les
deux services ! Quel bel accueil, à même de remonter le moral des patients !
Puis, la salle d’attente de ladite médecine nucléaire : ambiance très triste, les
visages des personnes présentes sont tendus, une dame se tient le visage
dans les mains, comme effondrée. Et, bien sûr, je ne parle pas de
l’inquiétude causée par l’attente des résultats.
Dans ces moments, on se sent entre deux mondes : pas encore mort, bien
sûr, mais plus tout à fait comme les autres vivants. On se sent morituri :
destiné à mourir, comme on le disait des gladiateurs romains saluant
l’empereur et la foule avant leurs combats…
On comprend que la vie ne nous est pas due, que la longévité et la santé
ne sont que des cadeaux, des options, pas des obligations. Puis, quand on
s’en est sorti, on n’oublie jamais (en tout cas en ce qui me concerne) : 1) que
la mort n’est jamais loin, 2) que la vie est belle. On comprend
instantanément ce que veut dire Christian Bobin, le poète, quand il écrit
(dans Une bibliothèque de nuages6) : « La mort est à côté de la vie quotidienne
comme une bougie à côté d’une meule de paille. Cette proximité terrible fait
la vie merveilleuse. » Comme le t la proximité, moins élégante, des deux
panneaux de l’hôpital…
1. Gallimard, 1942.
2. Traduction d’Albert Mousset.
3. Extrait d’une lettre à sa femme, Sophie Andréïvna, d’octobre 1910.
4. André Comte-Sponville, Dictionnaire philosophique, PUF, 2021 (3e éd.), p. 1322.
5. Texte disponible dans la collection « Points », 2018.
6. Lettres Vives, 2006.
7. Traduction de Jean-Wladimir Bienstock, Œuvres complètes, Stock, 1912.
© ASTRID DI CROLLALANZA
7.
CE QUE L’ON APPREND AU BORD DE LA
MORT
Christophe Fauré
Mon parcours,
entre médecine et spiritualité
Le besoin de soulager la souffrance s’inscrit très tôt dans mon existence.
Lorsque mes parents se séparent, j’ai 7 ans. Je suis bouleversé, je sombre
dans la dépression. Je veux comprendre l’expérience humaine, je me pose
toutes sortes de questions, je souhaiterais saisir le sens de la vie. À 13 ans,
je dévore le livre du Dr Moody, La Vie après la vie, le premier ouvrage publié
sur les expériences de mort imminente. C’est un deuxième choc : cette fois,
je m’interroge sur l’essence même de la conscience et de la réalité.
Ma dépression infantile, mon désir d’aider les autres et les interrogations
sur la vie me conduisent à entamer des études pour devenir médecin
psychiatre. À l’époque, l’épidémie de sida fait rage. Je m’engage comme
bénévole dans l’association AIDES et, pendant dix ans, j’accompagne les
malades, souvent stigmatisés, pour lesquels aucun traitement n’existe encore.
Cette expérience me connecte avec une profondeur et une humanité que je
n’avais pas trouvées sur les bancs de la faculté de médecine.
« Quand on souffre, on s’ouvre » : une autre dépression, identi ée comme
telle et traitée, représente un nouveau tournant dans ma vie, un moteur pour
chercher d’autres chemins. Je me tourne vers la spiritualité et rencontre le
bouddhisme. Je passerai trois ans dans un monastère.
L’art sera une autre manière de me connecter avec le moment présent.
Quand je peins, tout s’arrête. Le dessin et la peinture sont des temps très
riches de connexion avec l’éternité de l’instant présent.
Ce que j’ai vécu avec mes patients, je l’ai partagé au l des années dans
mes livres. Ces êtres humains en rupture, en deuil et en n de vie sont en
quelque sorte mes premiers enseignants. J’ai eu la grande chance de les
accompagner en n de vie. Et quand on prend le temps de s’asseoir auprès
de ces personnes et de les écouter, on s’aperçoit qu’un certain nombre d’entre
elles ont beaucoup à nous apprendre sur cette vie qui va se terminer.
Bien évidemment, les gens en soins palliatifs n’ont pas tous la capacité
d’échanger avec leur entourage, parfois à cause de douleurs trop
importantes, parfois en raison de troubles neurologiques ou d’autres
symptômes de n de vie. Mais lorsque ce partage et cette con ance sont
possibles, alors on peut faire l’expérience de moments extrêmement précieux
dont j’aimerais vous livrer ici quelques enseignements.
Ce chapitre aborde plusieurs dimensions : d’abord les leçons de vie que j’ai
puisées auprès de ces personnes qui étaient sur le point de partir. Ensuite ce
qu’elles nous disent de « l’après » tel qu’elles le perçoivent. En n, je voudrais
vous guider dans vos échanges avec elles ; beaucoup d’entre vous êtes
démunis et ne savez pas quoi dire ou ne pas dire au seuil de la séparation.
Voici ce que mes patients m’ont appris.
Cérémonie de crémation de Khandro Lhamo (1913-2003), l’épouse de Dilgo Khyentsé Rinpoché, au
monastère de Shéchèn, au Népal.
Les leçons de vie de celles
et ceux qui s’en vont
Au moment de quitter cette vie, on va à l’essentiel : l’inutile et le super u
n’ont pas leur place. Dans l’urgence de la situation, six enseignements
émergent, souvent issus de constats, de regrets ou de prises de conscience.
Ce sont ces clés, si utiles à une vie plus pleine, plus riche, plus accomplie,
que j’aimerais partager avec vous.
Ayez une vie en phase avec vous-même
La première clé pour guider notre existence consiste à être aligné sur soi-
même : soyez profondément intègre avec vous-même et dans votre vie. Que
signi e « être intègre dans sa vie » ? Cela veut tout simplement dire qu’il
vous faut essayer de vivre en accord avec ce que vous pensez être juste et bon
pour vous.
Chacun possède sa dé nition de ce qui est juste et bon, et il n’y a donc pas
de norme en la matière, mais il nous faut essayer d’être clair sur le type de
boussole qui va indiquer le nord de notre vie pour ne pas nous perdre en
chemin.
Combien de personnes ne m’ont-elles pas dit en n de vie : « J’ai peur de
la mort », ou « Comment lutter contre la peur de la mort ? » Au bout du
compte, par-delà la souffrance physique, bien souvent plus forte encore que
la peur d’être séparé des proches ou des gens qu’on aime, il y a une prise de
conscience : « Je n’ai pas vécu ma vie », « Je n’ai pas choisi ma vie », ou « On
a choisi la vie qu’on voulait pour moi. »
De nombreux patients en soins palliatifs font ce douloureux constat : « Je
n’ai pas eu la vie que je souhaitais au fond de moi », « J’ai vécu la vie que les
autres voulaient pour moi ». Ils se rendent compte de ce décalage :
« Finalement, j’ai répondu aux attentes des autres en négligeant mes propres
besoins et mes propres aspirations. Je n’ai pas réalisé mon accomplissement
personnel, en négligeant ce qui était bon pour moi. » « J’ai vécu une vie où je
croyais que, pour être aimé des autres, je devais adopter tel comportement
ou telles habitudes. » Comment garder son identité et son intégrité dans ces
situations où l’on pourrait se perdre complètement soi-même ?
Vivre une vie en accord et en intégrité avec soi est fondamental. De cela,
nous pouvons tirer une leçon essentielle pour notre vie aujourd’hui, et nous
ajuster à nous-même avant qu’il ne soit trop tard pour le faire.
Ne vous mettez pas en situation de regretter
De nombreuses personnes en n de vie m’ont interpellé pour me dire :
« Monsieur, les regrets sont terribles. Ne regrettez rien. » J’ai eu un jour une
conversation avec un homme qui m’a dit : « Ne vous exposez pas au fait de
regretter ce que vous dites ou ce que vous ne dites pas, ce que vous avez fait
ou ce que vous n’avez pas fait. »
Pour mener une vie sans regret, il faut donner de la valeur à la façon dont
nous incarnons nos actes, sans nous trahir. Combien de fois ne nous
trahissons-nous pas ? Parfois nos regrets concernent des choses que nous
n’avons pas accomplies, parfois nous regrettons d’avoir trop travaillé, de ne
pas avoir consacré suffisamment de temps à nos proches. Certains regrettent
de ne pas avoir pris plus de temps pour eux-mêmes.
Cette clé semble très simple. Mais sommes-nous certains que, dans la vie
que nous menons, nous ne faisons pas le lit d’un futur regret, en remettant
les choses à plus tard ? Un jour, « plus tard » deviendra « trop tard ».
Lorsque l’on est en n de vie et qu’il ne reste que deux ou trois semaines
devant soi, il est fréquent de regretter de ne pas avoir dit telle parole ou fait
telle chose. Beaucoup m’ont con é : « Pourquoi ai-je attendu, alors que
c’était certainement la chose ou la relation la plus importante de ma vie ? »,
« Je n’ai pas osé dire à cette personne que je l’aimais ». Et maintenant que
c’est ni, il reste tous ces regrets, qui sont source d’immenses souffrances.
Vivez dans le présent
La troisième clé est une invitation à vivre l’instant présent. Cela aussi peut
sembler évident, mais mettons-nous vraiment en œuvre cette proposition ?
S’il est une vertu à la maladie, c’est de contraindre les individus à ralentir, à
se poser, à regarder ce qui se passe en elles lorsqu’elles sont juste là. Pour une
fois dans la vie, on s’arrête, on se pose et on observe. Il ne s’agit pas
seulement d’être là, mais également de se poser la question suivante : « Ce
temps où je suis présent, qu’est-ce que j’en fais ? »
Le verre d’eau
Connaissez-vous la métaphore du verre d’eau ? Lorsqu’on regarde un verre rempli d’eau, il est clair,
limpide. Mais si l’on verse de la terre et que l’on remue avec un bâton, l’eau devient opaque ; on ne voit
plus au travers. Il suffit de poser le verre, d’attendre, et les particules en suspension se déposent peu à
peu au fond du récipient. L’eau redevient claire. La terre ne disparaît pas, mais elle reste au fond.
De la même façon, on a parfois l’impression que notre vie est sombre, opaque. Mais si l’on s’arrête et
que l’on attend, les pensées et les tourments se déposent et révèlent la clarté naturelle de notre esprit.
Cette clarté naturelle, qui est tout le temps présente, ne peut se révéler que si l’on se pose.
Pour mener une vie sans regret,
il nous faut donner de la valeur
à la façon dont nous incarnons
nos actes, sans nous trahir.
Nous passons notre temps à nous demander qui nous sommes, cherchant
généralement la réponse à l’extérieur, alors qu’il suffit de se poser et de
laisser décanter les émotions et les pensées. On ne les fait pas disparaître,
mais on les regarde, et, spontanément, cette limpidité naturelle de notre
esprit apparaît. Là est l’invitation : vivre l’instant présent, c’est ne pas
gaspiller notre temps à chercher le bonheur dans le monde extérieur : il est
déjà présent en nous.
Parfois, les patients en n de vie ne découvrent cette ressource qu’une ou
deux semaines avant de mourir. Ce qui leur apparaît, c’est que tout était déjà
là. N’est-il pas dommage de ne s’en rendre compte qu’à la n de nos jours,
justement parce que la maladie nous a contraint à nous poser ?
Apprenez à aimer
Le quatrième enseignement peut paraître simpliste tant il est évident mais
puissant : apprendre à aimer. Les gens qui sont en n de vie me disent :
« Apprends à aimer. » Ce qui est intéressant, c’est que l’on trouve dans ces
témoignages de n de vie les mêmes éléments que l’on retrouve dans les
expériences de mort imminente (EMI), qui ont été explorées au chapitre IV
avec Charlotte Martial : la décorporation, la lumière et la vie qui dé le.
Et souvent, les questions qui émergent à ce moment-là sont de deux
ordres :
• De quelle façon as-tu aimé ?
• Qu’est-ce que tu as appris du monde, de toi, de la réalité ?
Trois enseignements
sur la conscience de « l’après »
Les personnes en n de vie nous révèlent parfois des choses troublantes
sur l’après. J’aimerais évoquer ici trois situations qui nous parlent de la
conscience et de ses énigmes.
Premièrement, nombre d’entre elles en soins palliatifs restent dans le coma
sans mourir, comme si elles attendaient le moment, un signal peut-être…
Ainsi, cette femme plongée dans un coma profond. On lui annonce que son
ls va venir de Sidney, et qu’il sera là dans deux jours. Le ls arrive et dit :
« Maman, je suis là. » Quinze minutes plus tard, elle meurt. Il y a de très
nombreux exemples comme celui-là. Qu’est-ce qui se passe ? Qu’est-ce qui,
dans cette personne, a conscience de ce moment ? Qu’est-ce que cela nous
dit de l’après ?
Être conscient que la mort peut survenir d’un instant à l’autre est mon
plus grand moteur de vie pour me pousser sans cesse à aller à l’essentiel et à
ne pas perdre ce précieux temps de vie dans de vaines errances. C’est un
rappel constant à l’amour, la joie, le partage, la quête de la sagesse.
1. In Mes indépendances. Chroniques 2010-2016, éditions Barzakh, Alger, 2017 ; Actes Sud, 2017.
SOUFFLES
Birago Diop
(1906-1989)
est un écrivain et poète sénégalais qui a retranscrit de nombreux contes de la
tradition orale africaine, notamment d’après les récits du griot Amadou.
Écoute plus souvent
Les Choses que les Êtres
La Voix du Feu s’entend,
Entends la Voix de l’Eau.
Écoute dans le Vent
Le Buisson en sanglots :
C’est le Souffle des ancêtres.
1. Gallimard, 2015.
CAR LA VIE ET LA MORT
NE FONT QU’UN
Khalil Gibran
(1883-1931)
est un poète libanais. En 1923, il publie Le Prophète. Ce livre, traduit dans
quarante langues, a inspiré des générations de lecteurs et de lectrices. On y
découvre un sage,
Al-Mustapha, qui, avant de repartir vers sa terre natale, répond aux grandes
questions du peuple d’Orphalèse sur la conduite de l’existence. La voyante et
prêtresse Al-Mitra l’interroge sur la mort.
Alors Al-Mitra reprit la parole, en disant : « À présent nous aimerions
t’interroger sur la Mort. »
Et il répondit :
« Vous voudriez percer le secret de la mort,
Mais comment y parvenir sans aller le chercher au cœur de la vie ?
Le hibou qui vit à l’orée de la nuit est aveugle au jour ; ses yeux ne peuvent
dévoiler le mystère de la lumière.
Si vous brûlez de voir l’esprit de la mort, ouvrez grand votre cœur dans le
corps de la vie.
Car la vie et la mort ne font qu’un, comme ne font qu’un la rivière et la
mer.
Et quelquefois il me suffit
D’être couchée ici sur la terre
Près de nos vénérables ossements :
1. Traduction C. Meyer.
IL N’Y A PLUS QUE L’AMOUR
Christiane Singer
(1943-2007)
est écrivaine et essayiste. En 2006, atteinte d’un cancer, son médecin lui annonce
qu’il lui reste six mois à vivre. Elle écrit le journal
de ces derniers moments.
C’est au fond de mon lit que je vous parle […]
Ma dernière aventure. Deux mois d’une vertigineuse et déchirante
descente et traversée. Avec surtout le mystère de la souffrance. J’ai encore
beaucoup de peine à en parler de sang-froid. Je veux seulement l’évoquer.
Parce que c’est cette souffrance qui m’a abrasée, rabotée jusqu’à la
transparence. Calcinée jusqu’à la dernière cellule. Et c’est peut-être grâce à
cela que j’ai été jetée pour nir dans l’inconcevable. Il y a eu une nuit
surtout où j’ai dérivé dans un espace inconnu. Ce qui est bouleversant, c’est
que quand tout est détruit, il n’y a pas la mort et le vide comme on le
croirait, pas du tout.
Je vous le jure. Quand il n’y a plus rien, il n’y a que l’Amour. Il n’y a plus
que l’Amour. Tous les barrages craquent. C’est la noyade, l’immersion.
L’amour n’est pas un sentiment. C’est la substance même de la création…
[…]
Je croyais jusqu’alors que l’amour était reliance, qu’il nous reliait les uns
aux autres. Mais cela va beaucoup plus loin ! Nous n’avons pas même à être
reliés : nous sommes à l’intérieur les uns des autres. C’est cela le plus grand
vertige… de l’autre côté du pire t’attend l’Amour. Il n’y a en vérité rien à
craindre. Oui, c’est la bonne nouvelle que je vous apporte.
Christiane Singer, Derniers Fragments d’un long voyage1
En un espace
naître et mourir.
Comme une grande matrice
où le corps peut se faire chair
et où l’être peut laisser sa chair.
Comme une cheminée d’énergie.
Comme un lieu pour passer, se passer,
se transmettre la vie, le souffle,
reçu, donné, transmis
de corps à corps, d’âme à âme
dans une communauté de vivants.
Un lieu porteur de ces transformations,
Mutations, métamorphoses.
En maison de naissance
L’accompagnement est centré sur les rythmes, besoins et singularités de la
femme, du couple ou de la famille en émergence. La maison de naissance
souhaite cultiver la con ance :
• dans la puissance des femmes à enfanter ;
• dans la sagesse des bébés à se mettre au monde ;
• dans le monde de demain, capable de privilégier la bientraitance
obstétricale ;
• en soi et dans les autres.
La maison de naissance accorde de l’attention à chaque être dans le respect
et l’estime de ce qu’il est, et souhaite permettre un choix éclairé autour de
l’accueil de l’enfant. Elle répond à un besoin de promotion de la santé par la
salutogenèse1.
Les sages-femmes assurent en autonomie le suivi médical des femmes, en
lien avec un réseau périnatal et dans une démarche de collaboration avec un
hôpital de référence.
En maison de mourance
L’accompagnement est centré sur les rythmes, besoins et singularités de la
personne en n de vie et de son entourage. La maison de mourance souhaite
cultiver la con ance :
• dans la puissance des personnes à vivre leur n de vie ;
• dans la sagesse des proches à traverser le deuil ;
• dans le monde de demain, capable de privilégier la bientraitance
médicale ;
• en soi et dans les autres.
La maison de mourance accorde de l’attention à chaque être dans le
respect et l’estime de ce qu’il est, et souhaite permettre un choix éclairé
autour de la n de vie.
Les in rmiers et in rmières en soins palliatifs assurent en autonomie le
suivi médical des personnes en n de vie, en lien avec leurs proches et avec
un réseau de soins.
1. Concept développé par le sociologue de la médecine Aaron Antonovsky pour désigner une
approche qui se concentre sur les facteurs favorisant la santé et le bien-être, plutôt que sur les causes
des maladies (pathogenèse).
LE CORPS ET LA MORT
Des rituels pour le grand passage
Juliette Cazes, archéologue et anthropologue, chercheuse en thanatologie
et autrice, s’efforce de vulgariser la mort sous tous ses aspects : rites
funéraires, objets mortuaires, étude des défunts. Elle explique que la joie qui
semble émaner de certains rituels ne signi e pas qu’il n’y ait ni peine ni
tristesse : l’expression des émotions liées à la douleur de la séparation est
différente d’un endroit à un autre. La sacralité du mort, du corps, et les us et
coutumes autour de la mort varient aussi selon les cultures.
Quant à la conduite des funérailles, elle est marquée par les religions et les
codes des défunts et de leurs proches. Mais on retrouve des gestes et des
habitudes qui dépassent les croyances et traduisent une appartenance
culturelle bien plus ancienne. Souvent, l’œil non exercé jugera les rites
funéraires mouvementés ou même désordonnés, mais en travaillant sur le
sujet on se rend compte que tout est millimétré.
Dans son travail, Juliette Cazes montre que les traditions funéraires ne
sont pas gées et méritent d’être étudiées et surtout protégées, car elles ne
sont pas à l’abri de disparaître avec la culture de leurs protagonistes. En bref,
étudier les rites, c’est s’intéresser aux vivants, c’est apporter une traduction à
tous les codes tacites et explicites que l’on observe.
lebizarreum.com
La coopérative funéraire :
l’humain au centre, pas le profit
Une coopérative funéraire a pour mission de prendre soin du vivant dans
la mort et de donner une place à la mort dans nos vies, d’accompagner, de
proposer des services funéraires avec une vision dans la durée. Au-delà de la
prise en charge du corps, des aspects organisationnels et administratifs, la
démarche inclut tout service qui aide à mieux vivre le deuil. Cela prend
forme par des services avant le décès d’une personne, au moment de sa mort
et dans les mois qui suivent. La coopérative est garante d’une démarche
d’information et d’accompagnement des familles à toutes les étapes de
l’organisation des obsèques.
Quelques sites utiles :
cooperativefuneraire.be
sypres.fr
cooperative-funeraire.coop
cooperativefunerairedelille.fr
Q « ue la terre lui soit légère. » Cette formule fait partie des paroles
de soutien que l’on entend ou que l’on prononce, parfois de
manière un peu automatique, lors d’une cérémonie funéraire. « Ce
n’est pas tant le chant qui est sacré, c’est le lien qu’il crée entre les êtres », dit
très justement Philippe Barraqué, créateur de la musicothérapie. Quand le
religieux est moins présent ou fait moins sens dans nos vies, ce sont aussi les
rituels qui disparaissent. Comment rendre hommage à un disparu sans les
repères habituels ? Comment se souvenir et se soutenir ? Comment trouver
un accompagnement qui fasse sens et soit peut-être plus léger qu’autrefois,
moins austère et plus humain ? Les initiatives suivantes en font le pari.
Gauthier de Pierpont :
cheminer autour du deuil autrement
Pour ce Belge qui a perdu son père à 18 ans, la mort a toujours fait partie
de la vie, un peu comme une évidence. Il faut dire qu’avec une mère et une
sœur actives dans les soins palliatifs… Pourtant, ce n’est que récemment,
après une première vie dans la formation en entreprise, que Gauthier
de Pierpont se forme pour devenir célébrant funéraire. Il constate que dans
la « tempête émotionnelle » qui survient lors du décès d’un proche, il n’est
pas facile de préparer une cérémonie. C’est alors que sa présence peut
s’inviter pour construire, pas à pas, un au revoir riche de sens.
Gauthier travaille dans un écosystème de personnes engagées avec cœur
pour soutenir les personnes qui restent et leur permettre de cheminer avec
présence autour du deuil.
gauthierdepierpont.com
Happy End :
Et si on vivait en paix avec la mort ?
Dans la même perspective laïque, Happy End se présente comme une
plateforme d’informations, de ré exion et de soutien qui parle sans tabou de
la mort et donne les informations nécessaires aux familles pour organiser un
enterrement qui leur ressemble. Lancée par Sarah Dumont, elle recense les
professionnels du secteur funéraire pour organiser sereinement les obsèques
d’un proche ou préparer sa propre n de vie, avec bienveillance et sérénité.
L’idée est d’aider les personnes à se paci er vis-à-vis de la mort.
happyend.life
Fleurs de Funérailles :
la consolation de la poésie
En Belgique « Poète national » est une institution qui valorise les échanges
littéraires et culturels entre les trois communautés linguistiques belges. En
2020, quand éclate la crise sanitaire, Carl Norac, alors poète national1,
s’interroge sur la meilleure manière d’adoucir ces instants difficiles. Il trouve
déchirant que des êtres humains soient inhumés sans cérémonies,
enterrements, ni cortèges. Découvrant De eenzame uitvaart (« l’enterrement
solitaire »), une initiative du poète hollandais Bart FM Droog, il décline
l’idée en Belgique avec le soutien de toute la profession. Les poétesses et
poètes du pays se mettent à composer des textes pour accompagner les
enterrements.
Pendant toute la période de la crise, l’objectif est d’offrir à chaque défunt
(décédé du Covid-19 ou non) dont la famille en fait le souhait un texte
d’adieu poétique. Le site du Poète national propose également, en libre
accès, des poèmes écrits spécialement pour cette action.
Plus de soixante-dix artistes belges soutiennent ce projet dont Laurence
Vielle, Yves Namur, Françoise Lison-Leroy, Colette Nys-Mazure, Lisette
Lombé, Caroline Lamarche, Vincent olomé, William Cliff, Jean-Pierre
Verheggen, Karel Logist, Luuk Gruwez, Charlotte Van den Broeck, Paul
Bogaert, Maud Vanhauwaert, Geert Van Istendael, Mustafa Kör et Peter
Holvoet-Hanssen.
www.poetenational.be/fleurs-de-funerailles
1. Le Poète national est nommé pour une période de deux ans, avec pour mission d’écrire des poèmes
sur l’histoire et la culture belges.
PARLER DE LA MORT NE TUE PAS
Enfant, je n’aimais pas les cimetières. J’y accompagnais de temps en temps mes
parents. On me demandait de m’y taire, et le caveau familial, minéral et froid,
me faisait peur. Plus tard, jeune adulte, une très chère amie est décédée et a été
incinérée. Son rire éclatant a été troqué pour une boîte en métal (une urne).
Après quelques visites déprimantes devant son armoire fermée à double tour (un
columbarium), j’ai décidé de plutôt en ler mes chaussures de marche pour aller
dialoguer avec elle en forêt. Et là, la magie a opéré. J’ai pu en n réentendre le
souvenir de son rire éclatant. Il y a encore eu par la suite d’autres deuils
douloureux autour de moi, mais toujours ce même constat : c’est lors de balades en
forêt que nous arrivions le mieux à parler de la mort et de nos défunts. Comme
si la nature nous y aidait.
Les arbres pourraient-ils être un lien entre la terre et le ciel, la vie et la mort ?
Est-ce que les forêts, quand on s’y promène, nous aideraient à nous connecter à
nos défunts, à l’au-delà ?
Petit à petit a alors germé en moi le rêve d’un lieu où la mort ne serait plus
isolée de la vie. Une forêt où l’on pourrait faire de grandes promenades pour
avoir ce temps de parole en famille autour de nos défunts et de nos défuntes. Une
forêt où les enfants ne devraient plus se taire mais pourraient s’exprimer autour
de la mort, y rire et y faire des cabanes. Une forêt où la mort ne serait pas
taboue.
J’ai concrétisé ce rêve en 2015, en créant la fondation Les Arbres du Souvenir et
en faisant l’acquisition d’une jolie forêt de 11 hectares. Elle est à Soleilmont, au
centre de la Wallonie.
Depuis, j’aime y accompagner les familles en deuil. J’aime déambuler le long des
sentiers pour les aider à trouver l’arbre qui leur correspond a n d’accueillir les
cendres de l’être qui leur manque. J’aime être à l’écoute de leurs souhaits pour lui
rendre un magni que hommage. J’aime à cette occasion les entendre chanter, rire
et parfois danser. J’aime la simplicité des enfants lorsqu’ils parlent de la mort, et
qui me demandent même parfois d’inhumer ou de disperser les cendres à leur
place. J’aime voir les visages éprouvés repartir apaisés et lumineux, car la forêt
est une inépuisable source d’inspiration pour accueillir nos émotions et les
transformer. En résumé, j’aime cette forêt qui soigne, cette vie au cœur de la
mort.
Aux Arbres du Souvenir, on se souvient des défunts et on célèbre la vie.
Témoignage d’Alexia Willems, cofondatrice des Arbres du Souvenir
2 m2 d’éternité : les tombes paysagères
Les cimetières sont des espaces traditionnellement très minéraux. Après
une reconversion à 180 degrés, Laurence Gar eld et Nathalie Houdebine
proposent depuis 2012 aux familles la création de sépultures paysagères,
comme alternative à la traditionnelle pierre tombale. Elles créent des
tombes paysagères sur mesure qui, tels de petits contes euris, évoluent au
l des saisons et racontent autrement l’histoire de la personne disparue.
Leur approche ne plaît pas à tout le monde, en choque certains. Pour elles,
il est question de changer les codes et de s’inspirer d’autres pays où les
cimetières ressemblent davantage à des lieux de promenade. Les cimetières
anglais ou allemands, par exemple, sont de vrais jardins, des lieux où il fait
bon vivre… après la mort !
2m2deternite.com
La Mémoire nécropolitaine
Fondée par Anne Fuard et André Chabot, La Mémoire nécropolitaine est
une association culturelle qui se propose de donner un futur au passé en
sauvegardant le patrimoine funéraire. Ethnographe des cimetières, André
Chabot constitue un fonds iconographique en perpétuel développement –
deux cent cinquante mille photos prises à ce jour à travers le monde. À
travers l’image, l’association recueille et transmet les coutumes et les rituels
et nous parle des appartenances religieuses et philosophiques qui
soutiennent la vie des humains.
lamemoirenecropolitaine.fr
Collectif Mère Lachaise
Les allées du Père-Lachaise sont une promenade parisienne
incontournable, le cimetière du XXe arrondissement étant très populaire en
raison des hommes célèbres qui y sont enterrés.
Camille Paix, journaliste, met en avant depuis plusieurs années
maintenant des portraits de femmes illustres, écrivaines, peintres,
comédiennes, cinéastes, acrobates, mathématiciennes, résistantes ou encore
militantes féministes, qui ont pour dernière demeure le cimetière parisien.
Elle souhaite ainsi rendre visible « le matrimoine funéraire ».
instagram.com/merelachaise
Passeur de mots
Née en septembre 2007 dans le service d’onco-hématologie du centre
hospitalier Louis-Pasteur de Chartres, l’association Passeur de mots a
essaimé dans toute la France. Elle forme notamment des passeuses qui vont
récolter les récits de vie de personnes malades et les mettent en mots pour et
avec elles. « Grâce au livre, je suis éternelle et je serai toujours vivante ! »,
tels sont les propos d’une personne gravement malade qui a été
accompagnée dans cette démarche.
À partir d’épisodes de vie recueillis à la maison ou à l’hôpital, le ou la
biographe crée un très beau livre relié par un artisan d’art. C’est avant tout
une histoire de relations et de rencontres.
L’association forme et vise à faire reconnaître ce nouveau métier qu’est la
carebiographie (du mot anglais « care », ou soin, et biographie), un véritable
soin de soutien, aux yeux des passeurs, pour les personnes gravement
malades. En 2021, vingt-sept passeurs et passeuses avaient déjà été formés,
et quatre collectifs émergeaient en France, en Suisse et en Belgique.
La Mélodie des mots, un documentaire de Marie Halopeau réalisé sur ce
sujet en 2016, a été primé de nombreuses fois.
passeur-de-mots.fr
É
Tissant des liens entre arts, nature et contemplation, Émergences
participe régulièrement à l’organisation de soirées de méditation ouvertes à
tous à l’abbaye de Villers-la-Ville, en marge du sentier méditatif inauguré
en 2018, auquel nous avons contribué.
Un sentier méditatif a été créé à Rochefort, un troisième est en
préparation à Enghien.
Formations et outils pour les associations
Nous soutenons des associations et organismes qui fournissent un travail
remarquable sur le terrain comme le SAMU social ou encore Team4Job, en
leur proposant des formations et outils inspirés de la pleine conscience.
C’est dans ce cadre que nous menons également des activités de
méditation en milieu carcéral, à destination des détenus et gardiens. Depuis
2014, nous proposons ainsi des cycles de pleine conscience à la prison de
Leuze-en-Hainaut, sur la base du volontariat. L’objectif de ces sessions est
d’aider les individus à prendre conscience de ce qui est important pour eux,
de leurs difficultés et de leurs ressources, a n de préparer une réinsertion
réussie dans la société. Parallèlement, nous sommes en train de réaliser une
plateforme de suivi a n d’accompagner les détenus dans leur pratique
quotidienne et de pérenniser les béné ces des séances.
Engagement citoyen
Émergences est membre de la Coalition Climat et, à ce titre, s’engage
pour que soient entendues les demandes de la société civile belge pour plus
de justice sociale et climatique. Parmi nos actions, des événements organisés
au béné ce d’associations ou de mouvements, tels que la projection d’un
lm pour la Plateforme citoyenne de soutien aux réfugiés (bxlrefugees.be)
ou des activités de méditation avant les marches pour le climat.
MamanCercle
Ce projet vise à recréer la chaleur d’une communauté de village pour
soutenir les mamans, bien souvent en première ligne dans les moments de
crise. Tous les quinze jours, à chaque pleine lune et nouvelle lune,
MamanCercle propose un moment de méditation et de reconnexion en
ligne.
La prochaine saison démarre en mars 2023.
Inscriptions : mamancercle.love
Mères au front Belgique
Cette association d’inspiration écoféministe est née à l’invitation du
mouvement québécois des Mères au front. Les mères se soulèvent pour que
nos dirigeantes et dirigeants prennent en n les décisions qui s’imposent
pour faire gagner la vie. Diverses actions sont organisées, dont une chorale
écoféministe qui se réunit tous les quinze jours le mercredi matin, mais aussi
des projections, des ateliers et des activités en soutien à toutes les luttes qui
font sens.
LES AUTEURS ET AUTRICES
Christophe André
Psychiatre et psychothérapeute français spécialisé dans la prise en charge
des troubles anxieux et dépressifs, particulièrement dans le domaine de la
prévention des rechutes, Christophe André est l’un des chefs de le des
thérapies comportementales et cognitives en France. Il a également été l’un
des premiers à y introduire l’usage de la méditation en psychothérapie.
Marié et père de trois lles, il a dirigé une unité spécialisée dans le
traitement des troubles anxieux et phobiques à l’hôpital Sainte-Anne, et y a
animé des groupes de méditation de pleine conscience dans le cadre de la
prévention des rechutes dépressives. Il enseigne par ailleurs à l’université
Paris-Nanterre, et est aussi l’auteur de nombreux articles et ouvrages
scienti ques, ainsi que de livres destinés au grand public.
Christophe Fauré
Christophe Fauré est psychiatre et psychothérapeute, spécialisé dans
l’accompagnement des ruptures de vie : deuil, maladie grave et n de vie,
séquelles post-traumatiques, séparation, divorce, transition du milieu de la
vie. Que ce soit à la suite de la disparition d’un être cher ou de la perte
d’une relation d’amour, il existe un processus de deuil dont il est important
de connaître les clés pour traverser cette souffrance le mieux possible. Le
cœur de son travail se fonde sur la conviction que chacun d’entre nous porte
en lui d’insoupçonnables ressources pour se libérer de l’étau de la peine et
parvenir en n à l’apaisement. Il est l’auteur de nombreux ouvrages qui sont
devenus des références.
Michel Gergeay
Né en 1949, Michel Gergeay a vécu au Burundi jusqu’à ses 13 ans. Puis ce
furent la Belgique et les études. Licencié de philosophie de l’Université libre
de Bruxelles, il a consacré une vie itinérante à l’enseignement.
Il retourne d’abord en Afrique quelques années (Congo, Niger) pour
enseigner, apprendre et découvrir. Y accompagner, aussi, les premiers pas de
ses deux enfants.
Son amour de l’enseignement et du nomadisme le ramène en Europe, en
Belgique puis en Italie où il enseigne une dizaine d’années à l’École
européenne de Varèse.
Le reste de sa carrière est belge, dans différentes écoles secondaires ou
supérieures et comme assistant en philosophie à l’Université libre de
Bruxelles.
Il est profondément convaincu du pouvoir libérateur et démocratique de la
connaissance critique. Sa passion de la communication veut dépasser la
froide transmission, sans s’évaporer dans la chaleur d’une communion : il
s’agit d’abord de chercher les mots pour s’exprimer, d’établir avec l’autre le
lien qui permet l’écoute mutuelle. Il a tenté de formaliser cette approche
dans de nombreux articles et conférences, dans un roman aussi (Ève en avait
rêvé, Descartes, Éditions Antya, 2014), mais c’est bien l’enseignement,
fondé sur l’oralité, donc le débat, qui en est pour lui la voie privilégiée parce
que toujours ouverte et jamais gée.
Ilios Kotsou
Docteur en psychologie et maître de conférences à l’Université libre de
Bruxelles, Ilios Kotsou s’intéresse aux interactions entre science
fondamentale et pratique sur le terrain. Membre de Mind & Life Europe, il
a aussi fondé, avec Caroline Lesire et le soutien de Matthieu Ricard,
l’association Émergences, qui œuvre pour une société plus solidaire et
consciente et qui nance des projets humanitaires. Il est intervenu pendant
de nombreuses années dans le domaine des émotions et de la gestion des
con its, notamment pour Médecins sans frontières ou encore la Croix-
Rouge. Passionné par la science des émotions et par la méditation, il
consacre son travail au lien entre connaissance de soi et engagement citoyen.
Il est aussi co-créateur de l’application de méditation Prezens (prezens.app),
la première plateforme de méditation solidaire. Son dernier livre, écrit avec
Matthieu Ricard, Les Folles Histoires du sage Nasredin (Paris, L’Iconoclaste,
2021), explore le versant espiègle et paradoxal de la sagesse.
Steven Laureys
Neurologue et professeur de clinique au département de neurologie du
CHU de Liège et directeur de recherche au Fonds de la recherche
scienti que-FNRS, Steven Laureys a acquis une renommée mondiale pour
ses travaux sur la neurologie de la conscience et le coma.
Il a dirigé le Coma Science Group au sein du centre GIGA-
Consciousness, à l’université de Liège. La majeure partie de ses travaux de
recherche est consacrée à l’étude des altérations de la conscience chez les
patients sévèrement cérébro-lésés, mais aussi durant l’anesthésie, le sommeil
ou encore la méditation…
Steven Laureys est l’auteur de plus de trois cent cinquante articles
scienti ques et de plusieurs ouvrages, dont Un si brillant cerveau, les états
limites de conscience (2015) aux éditions Odile Jacob. Il est également lauréat
de nombreux prix scienti ques, dont le prix Francqui (2017), prix
scienti que belge le plus prestigieux.
Caroline Lesire
Rebelle dans l’âme, infatigable militante à l’enthousiasme contagieux,
Caroline a suivi un cursus en sciences politiques et aide humanitaire
internationale avant de se former pour transmettre la pleine conscience,
pratique qui a transformé son regard sur la vie et qui la soutient au
quotidien.
Après avoir coordonné des projets d’accès aux soins de santé dans
différents pays d’Afrique pendant sept ans, elle s’est engagée à (plus que)
plein temps dans Émergences. Partager la pleine conscience et le travail qui
relie la nourrit et la met en joie, tout comme le fait de créer du lien entre les
personnes qu’elle aime et qui l’inspirent.
Elle est l’autrice de plusieurs contributions à des ouvrages collectifs et
vient de terminer un master de spécialisation en études de genre.
Charlotte Martial
Charlotte Martial est chercheuse post-doctorale au Coma Science Group
(GIGA-Consciousness, université de Liège) et neuropsychologue au Centre
du cerveau (CHU de Liège). Dans cette équipe, elle dirige les études sur le
phénomène des expériences de mort imminente. Plus généralement, elle
s’intéresse aux épisodes de conscience « déconnectée » (vivre une expérience
subjective, sans expérimenter l’environnement extérieur). Elle explore les
conditions dans lesquelles les individus sont non-répondants à
l’environnement, comme lors d’une anesthésie générale ou d’un arrêt
cardiaque, mais faisant l’expérience d’une conscience « déconnectée »,
comme peuvent en témoigner les récits recueillis au réveil. Elle explore
également les corrélats neuronaux d’autres états altérés ou modi és tels que
les troubles de la conscience.
Matthieu Ricard
Matthieu Ricard, né en France en 1946, ls du philosophe français Jean-
François Revel et de l’artiste peintre Yahne Le Toumelin, est moine
bouddhiste, auteur, traducteur et photographe. C’est en 1967, lors d’un
premier voyage en Inde, que Matthieu rencontre plusieurs êtres inspirants,
parmi lesquels Kangyour Rinpoché, qui deviendra son premier maître
bouddhiste. De retour en France, en 1972, il achève sa thèse en génétique
cellulaire à l’Institut Pasteur sous la direction du Prix Nobel François Jacob,
avant de s’établir dans l’Himalaya, où il vit maintenant depuis plus de
quarante ans. Ordonné moine bouddhiste en 1978, il est l’interprète
français du dalaï-lama depuis 1989. Parallèlement, il photographie la vie
dans les monastères ainsi que l’art et les paysages du Tibet, du Bhoutan et
du Népal. Il est l’auteur de nombreux ouvrages et consacre l’intégralité de
ses droits d’auteur aux projets de Karuna-Shechen, qu’il a contribué à
lancer. Depuis 2000, il fait partie du Mind & Life Institute, qui facilite les
rencontres entre la science et le bouddhisme. Il participe activement à des
travaux de recherche sur l’in uence de l’entraînement de l’esprit à long
terme sur le cerveau. Matthieu a aussi contribué à créer les Journées
Émergences, auxquelles il participe depuis leur création.
REMERCIEMENTS
Rue Jacob diffusion : Élise Lacaze (direction), Katia Berry (grand Sud-Est), François-Marie
Bironneau (Nord et Est), Charlotte Jeunesse (Paris et région parisienne), Christelle Guilleminot
(grand Sud-Ouest), Laure Sagot (grand Ouest), Diane Maretheu (coordination),
Charlotte Knibiehly (ventes directes) et Camille Saunier (librairies spécialisées)
Distribution : Interforum
Cette édition électronique du livre Quand la mort éclaire la vie de Christophe André, Christophe
Fauré, Michel Gergeay, Steven Laureys, Charlotte Martial et Matthieu Ricard a été réalisée le 5
septembre 2022 par Soft Office.
Cet e-book contient un filigrane (watermark) et une identification:
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