Droit Constitutionnel

Télécharger au format docx, pdf ou txt
Télécharger au format docx, pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 73

Droit constitutionnel

Chapitre 1 : la séparation des pouvoirs

La séparation des pouvoirs a d’abord été élaborée pour mettre fin à l’absolutisme
monarchique mais sert toujours comme arme principale contre tout régime de confusion. Il
s’agit par ce principe de dépasser une contradiction entre le pouvoir être nécessaire et la
liberté qui est nécessaire. Il y a eu dans l’histoire une évolution. D’abord, on a fait référence à
la loi définit comme étant l’expression de la volonté générale. Seule la loi peut poser une
limite aux libertés (article 4 DDHC).
Cette solution ne s’est pas révélée suffisante parce si le législateur était trop puissant, il n’y
aurait plus de protection suffisante pour les libertés.
La solution est donc la séparation des pouvoirs et ça a été historiquement la première
garantie des droits et libertés contre le législateur parlementaire, exprimant une méfiance à
son égard.

La Constitution va avoir pour objet de déterminer cette séparation des pouvoirs, de la mettre
en place et d’expliquer son fonctionnement.
Le pouvoir législatif se définit comme le pouvoir de faire les lois, de les modifier et aussi de
les abroger. Cela couvre les différentes étapes du processus d’élaboration de la loi, c’est-à-
dire l’initiative, la discussion, l’adoption et la promulgation.
Le pouvoir exécutif se définit comme le pouvoir chargé de mettre en œuvre les lois, assurer
la sureté intérieure du territoire, assurer la défense extérieure du territoire et la diplomatie.
Le pouvoir judiciaire consiste à trancher les litiges en appliquant les lois.

C’est l’interprétation de leur séparation qui a pu poser problème.


Affirmation : il y a une hiérarchie des fonctions + la séparation des pouvoirs est un principe
négatif (non-cumul des pouvoirs).
Divergences : conception de Rousseau (autorités hiérarchisées spécialisées enfermées dans
une fonction et dépendance organique des autorités les unes par rapport aux autres) ≠
Montesquieu (pas de spécialisation fonctionnelle des autorités, balance des pouvoirs dans le
législatif, indépendance des autorités les unes par rapport aux autres)

Section 1 : les régimes de séparation des pouvoirs


On trouve deux grands types de régimes : régime dit présidentiel et régime dit
parlementaire.
Il peut exister des aménagements complémentaires destinés à neutraliser le pouvoir et
renforcer la séparation, il en est ainsi du bicamérisme mais aussi du fédéralisme.
Les régimes présidentiels et parlementaire ont tous les deux une collaboration des pouvoirs
mais plus ou moins accentuée. Elle est minimale, limitée dans le régime présidentiel. Au
contraire du régime parlementaire.

Sous-section 1 : le régime présidentiel


C’est un régime qui traduit très rigoureusement la séparation des pouvoirs, on est en
présence de pouvoirs indépendants et égaux.
Exemple : États-Unis. Pas de spécialisation fonctionnelle. On constate cette collaboration
minimale dans la Constitution de 1787 mais également dans la pratique de ce régime.
1
§1 : Les données originelles du régime présidentiel (le texte constitutionnel) aux
États-Unis
La constitution américaine met en place des organes indépendants et un équilibre. 
Montesquieu

A. Des organes indépendants


Ils sont indépendants quant à l’origine de leur mandat respectif et également par l’absence
de moyen d’action politique réciproque.

1.L’origine de leur mandat respectif


Le président et le vice-président d’une part, et le congrès d’autre part, sont désignés par
l’élection mais séparément. Aucun ne participe à la désignation de l’autre. Ils sont élus
chacun par le peuple et ont de la sorte une légitimité quasi équivalente.

a. Le Congrès
Le congrès est composé de la chambre des représentants et du Sénat et sont toutes deux
élues au suffrage universel direct.
Sénat = chambre de 100 sénateurs et il y a 2 sénateurs par état fédéré. Mandat de 6 ans.
Renouvelé par tiers tous les 2 ans. 1/3 renouvelé à chaque élection présidentielle et 1/3
renouvelé lors des élections à mi-mandat présidentiel.
Chambre des représentants = 435 représentants et est renouvelée intégralement tous les
deux ans. La circonscription s’appelle district congressionnel. Chaque état fédéré compte un
certain nombre de districts et ce nombre est proportionnel au poids démographique de l’état
fédéré avec au moins un district par état. La moyenne de la population d’un district est
d’environ 650 000 habitants. Certains états ne compteront qu’un seul district et dans ce cas-
là qu’un représentant (Wyoming). D’autres états fédérés (Californie) renferment 53 districts
congressionnels.

b. Le président et le vice-président
Ils sont élus pour un mandat de 4 ans. Depuis 1951 et l’adoption du 22 ème amendement, ils
ne peuvent assumer plus de deux mandats à la Maison Blanche. (Roosevelt 3 mandats et
mort au cours du 4ème). Ils sont élus au suffrage universel indirect par des collèges de grands
électeurs qui sont répartis par états fédérés.
La structure fédérale des États-Unis avec la volonté de donner un poids important aux états
fédérés.
Grands électeurs élus par scrutin majoritaire à un seul tour.
Chaque état fédéré a droit à un certain nombre de grands électeurs et ce nombre dépend du
poids de chaque état fédéré au congrès, c’est-à-dire du nombre d’élus que chaque état
fédéré compte à la chambre des représentants. C’est ainsi que les plus petits états fédérés
ont un minimum de trois grands électeurs. A l’opposé, la Californie compte 55 grands
électeurs. Les grands électeurs de chaque état de chaque état sont attribués à tel candidat
selon « the winner takes it all). Quand la liste des grands électeurs du candidat A ….+
Pour être président des États-Unis il faut la majorité absolue des voix (870) des grands
électeurs.

2
2.L’absence de moyen d’action politique réciproque
a. Sur l’exécutif
Dans un régime présidentiel, ni le président, ni le vice-président, ni les ministres ne sont
responsables politiquement devant les assemblées. Le Congrès ne peut pas pour des motifs
politiques mettre fin au mandat présidentiel.
Procédure d’impeachment qui s’apparente à une responsabilité pénale et est prévue à
l’article 2 section 4 de la Constitution : le président peut être destitué de ses fonctions sur
une mise en accusation puis une condamnation pour « trahison, corruption ou autres crimes
et délits ». La mise en accusation est de la compétence exclusive de la Chambre des
représentants qui statue à la majorité simple et c’est le Sénat qui a le pouvoir exclusif de
juger et éventuellement de condamner (votée à la majorité des 2/3 du Sénat).
Lorsque le Président est jugé par le Sénat dans cette procédure, c’est le président de la Cour
Suprême qui préside la séance. Exemple : Andrew Johnson 1868 (pas condamné). Exemple :
Richard Nickson 1974 dans le scandale du Watergate. Exemple : Bill Clinton
(parjure/obstruction à la justice = pas condamné).
L’exécutif n’est responsable politiquement que devant les assemblées.

b. Sur le législatif
L’indépendance de l’organe législatif est parfaitement assurée.
Le président ne peut pas clore les sessions du Congrès et ne peut pas empêcher le Congrès
de se réunir. Tout ce qu’il peut faire, c’est convoquer le Congrès pour une session
extraordinaire. Il ne peut pas dissoudre le Congrès ni même une seule de ses deux chambres.

Ces deux pouvoirs n’ont pas de moyen d’action réciproque l’un sur l’autre sur le plan
politique dans un régime présidentiel.

B. Un équilibre dans une collaboration limitée des pouvoirs (Montesquieu)


Répartition des fonctions étatiques entre différentes autorités = non-cumul des pouvoirs.
Chacune de ces autorités va avoir une faculté de statuer dans on domaine de prédilection
mais avec une collaboration avec l’autre autorité.
La Constitution reconnaît à chaque autorité une faculté d’empêcher l’autre et favorise la
collaboration.

1.La faculté d’empêcher du président


Au terme de la Constitution, le président des États-Unis participe à la fonction législative en
assurant la promulgation des lois mais a aussi la faculté d’empêcher en matière législative qui
lui est reconnue par la Constitution par un droit de veto (article 1 section 7 de la
Constitution).
Selon le veto, la loi qui a été votée par le Congrès est ensuite transmise au président pour la
promulgation qui permet son entrée en vigueur. Le Président peut refuser expressément la
promulgation en opposant son veto. Il doit alors obligatoirement renvoyer le texte au
Congrès dans les dix jours avec un message dans lequel il explique les motifs de son refus.
Selon la Constitution, ce veto présidentiel est un veto suspensif, le Congrès a donc les
moyens de l’écarter. Lorsque le texte de loi revient au Congrès pour une deuxième lecture, il
faut que ce texte recueille une majorité des 2/3 des membres composant chaque chambre
pour que le veto présidentiel soit écarté. Si tel est le cas, le président sera obligé de
promulguer la loi.

3
2.La faculté d’empêcher du congrès
Le refus de voter le budget, le congrès a alors une influence notable sur l’action du président.
Par ailleurs, le Sénat (qui représente les états fédérés) donne son accord à différents actes du
président. Il s’agit par exemple de la nomination des ministres, de hauts-fonctionnaires, des
juges à la Cour Suprême. Le Sénat doit autoriser la ratification des traités internationaux
conclus par le président.

§2 : Les données actuelles du régime présidentiel


L’observation du fonctionnement du régime des États-Unis a conduit à s’interroger sur la
procédure d’impeachment vers une responsabilité politico-pénale.
On a constaté un renforcement de la collaboration entre les pouvoirs.

A. Une responsabilité politico-pénale du président ?


La procédure d’impeachment peut-elle dissimuler une responsabilité politique ?
Exemple : Watergate

B. Un renforcement de la collaboration entre les pouvoirs


1.L’interprétation de la Constitution
Le président et le congrès ont des contacts beaucoup plus étroits que la Constitution ne le
laisse penser et ceci par la pratique du droit de message, du veto et par la pratique des
executives orders.

a. La pratique du droit de message


Le président des États-Unis par ce support, on voit apparaître un droit d’initiative
présidentiel en matière législative. Ces messages présidentiels sont souvent accompagnés de
projets de lois entièrement rédigés.

b. La pratique du veto
Cette pratique a fait apparaître une distinction dans l’exercice du veto : le veto explicite ou
exprès (prévu par la Constitution) et le veto implicite ou de poche.
Cela dépend à quel moment le président sera amené à utiliser son droit de veto.
Si on se trouve en fin de session du Congrès et si le texte de loi est transmis au président
dans les dix jours qui précèdent la clôture de la session du Congrès, le président n’est pas
tenu de renvoyer ce texte, il suffit qu’il s’abstienne de promulguer le texte  c’est le veto
implicite (c’est en réalité un veto absolu puisqu’il ne peut pas être écarté). Il faudra alors
reprendre la procédure législative depuis le début lors de la prochaine session du Congrès.
Cette pratique du veto, c’est une arme dissuasive. Sa possible utilisation incite le Congrès à
renoncer de lui-même à certains amendements et conduit à accroître la collaboration
législative entre le président et le Congrès.

c. La pratique des executives orders


Selon la constitution, il s’agit de la manifestation du pouvoir réglementaire du chef de
l’exécutif. Dans la pratique, ce pouvoir se manifeste aussi parfois comme un pouvoir
réglementaire autonome initial.
Ce pouvoir est aussi parfois utilisé à certaines conditions lorsque le Congrès délègue
ponctuellement son pouvoir législatif au président. Le président va adopter un executive

4
order qui sera une norme initiale qui élargie ses compétences. La Constitution en a admis la
constitutionnalité sous conditions.

2.Le jeu des partis politiques


Cela se combine avec le multipartisme.

Deuxième cas de figure : le régime présidentiel se combine avec le bipartisme (scrutin


majoritaire à un seul tour) rigide ou souple. Rigide : clivages idéologiques très marqués et
une organisation interne très structurée. Souple = clivages idéologiques moins marqués et
une organisation partisane peu structurée avec une indiscipline de votes et un faible
militantisme. C’est ce bipartisme souple qui s’illustre aux États-Unis.
1ère hypothèse : le président et la majorité au Congrès sont de même bords politiques  tout
va dépendre de la discipline partisane
2ème hypothèse : le président et la majorité au Congrès ou d’une des deux chambres sont de
bords différents

En raison de l’indiscipline partisane, le président peut avoir des difficultés. Il n’est jamais sûr
de disposer d’une majorité au Congrès même si son parti est majoritaire dans les deux
chambres. Il est toujours obligé de négocier pour faire passer une réforme.

Sous-section 2 : le régime parlementaire


Le point commun entre les deux : un régime d’équilibre des pouvoirs

1ère caractéristique : exécutif bicéphale


Une très large collaboration des pouvoirs
Des pouvoirs qui ont l’un sur l’autre des moyens d’action réciproque
Ce régime parlementaire a pris naissance dans un cadre monarchique en Angleterre. Il s’est
établit progressivement au XVIIIème siècle, il gagnera ensuite des pays d’Europe au XIXème
siècle. C’est ainsi que le régime parlementaire va apparaître au France en 1814 avec la
Restauration.
Plus tard, le régime parlementaire sera transposé en République à partir de 1875 avec la
IIIème République. Il demeure le régime type des états d’Europe occidentale que ce soit dans
des monarchies constitutionnelles (Espagne, Belgique, Pays-Bas) ou dans un cadre
républicain (Allemagne, Italie).
Cependant, on constate que ce régime a profondément évolué même si ses bases restent les
mêmes. On constate aussi qu’à l’époque contemporaine, ses différentes illustrations
montrent des nuances notables.

§2 : Les bases du régime parlementaire


Le régime parlementaire se caractérise par trois traits : un exécutif bicéphale, une très large
collaboration des pouvoirs et l’existence de moyens d’action politique réciproques.

A.Un exécutif bicéphale


Composé d’un chef de l’état et d’un gouvernement qu’on appelle Cabinet ministériel =
équipe solidaire.
Ce bicéphalisme s’explique par les origines monarchiques du régime : en Angleterre le
parlement se trouvait face à un roi inviolable sur lequel le Parlement n’avait pas de prise.

5
Avec le temps, le parlement a réussi à dissocier de la personne du roi celle des personnes qui
l’entouraient afin de pouvoir réussir à contrôler à travers les ministres l’activité du roi.

1.Un chef de l’état irresponsable


Dans un régime parlementaire, le chef de l’état tient ses fonctions soit de l’hérédité soit de
l’élection.
Dans le cadre d’une monarchie constitutionnelle, l’irresponsabilité du chef d’état est
absolue : elle est politique et pénale.
Dans le cadre d’un chef d’état républicain, une responsabilité spéciale exceptionnelle peut
être aménagée par la Constitution mais ce président a une irresponsabilité politique absolue.
C’est-à-dire qu’une fois élu, il est essentiel que les assemblées ne puissent pas avoir une
influence sur le maintien en fonction du chef.
Règle du contreseing ministériel : dans un régime parlementaire tous les actes du chef de
l’état doivent pour produire des effets juridiques doivent comporter la signature d’un ou
plusieurs ministres du cabinet.

2.Cabinet ministériel
a. Composition
Une équipe ministérielle solidaire sous l’autorité d’un chef de gouvernement (Allemagne,
France sous la IIIème et IVème République Président du Conseil).
Le chef de gouvernement est nommé par le chef de l’état et il désignera à son tour les
membres de son gouvernement. Cet ensemble est responsable politiquement devant le
Parlement. Cette responsabilité politique a une double signification : il va répondre de la
politique menée devant la ou les chambre(s) et ce gouvernement ne pourra perdurer qu’avec
la confiance du Parlement. C’est pourquoi lorsque le chef d’état parlementaire va nommer le
chef de gouvernement, il va devoir tenir compte des assemblées et en particulier de la
majorité parlementaire.

b. Les fonctions du cabinet ministériel


En régime parlementaire l’organe de décision politique au sein de l’exécutif, c’est le cabinet
ministériel. Quant au chef de gouvernement, c’est lui qui va diriger la politique du
gouvernement et qui va avoir un rôle déterminant à jouer.

Le chef de l’état a un rôle d’arbitre entre le Parlement

B. un équilibre dans une large collaboration des pouvoirs


Cette marge collaboration des pouvoirs est rendue possible par une absence de
spécialisation fonctionnelle. Les compétences sont réparties de manière diffuses entre les
différents organes. Cette collaboration se noue principalement entre le cabinet ministériel et
le parlement.
Le chef de l’état participe à cet échange mais dans une bien moindre mesure que le cabinet
ministériel

1. Une collaboration dans la fonction législative


L’essentiel de la fonction législative est réservée au Parlement qui peut être monocaméral ou
bicaméral, c’est-à-dire le vote de la loi et notamment le vote du budget. Mais l’exécutif se
trouve associé à la fonction législative. Tout d’abord avec le chef de l’état : il promulgue les

6
lois. Mais à ce stade-là, il faut souligner que cette collaboration est assez formelle parce que
le chef d’état en régime parlementaire n’a pas autant de pouvoir que le chef de l’état en
régime présidentiel, il n’a pas le droit d’opposer son veto.
A côté de cela, la collaboration est surtout le fait du cabinet ministériel. C’est lui qui exerce la
fonction gouvernementale : c’est conduire la politique nationale. Il va le faire sous l’autorité
du chef de gouvernement. Pour déterminer la politique nationale, le cabinet doit intervenir
dans la procédure législative devant le Parlement, à commencer par l’initiative des lois. Le
cabinet ministériel va partager avec les parlementaires l’initiative des loi. Il va ensuite
intervenir lors de la discussion de ses projets devant les assemblées. S’agissant de la loi de
finance, de budget, c’est le cabinet ministériel qui prépare le projet de budget, c’est lui qui
est à l’initiative.

2. Une collaboration dans la fonction exécutive


C’est le cabinet ministériel qui assure l’exécution des lois et qui dirige l’administration. Mais
la fonction exécutive contient également la politique extérieure, la diplomatie. Là, c’est le
chef de l’état qui intervient ici parce qu’il représente l’état à l’étranger. Il négocie les traités
internationaux. C’est encore le chef de l’état qui va ensuite ratifier les traités internationaux,
c’est ce qui va à la fin du processus engager juridiquement l’état vis-à-vis des autres états.
Mais le Parlement va se trouver associé aux fonctions de l’exécutif et particulièrement en
matière de politique extérieur. Par exemple, els traités internationaux les plus importants ne
pourront être ratifiés par le chef de l’état qu’après avoir obtenu l’autorisation du Parlement
par le vote d’une loi autorisant la ratification.
De même, grâce au contrôle politique que le Parlemente exerce sur le gouvernement, il va
être associé aux grandes lignes de la politique du gouvernement.

C. Des moyens d’action politique réciproques


Le régime parlementaire se caractérise par un équilibre des moyens d’action politiques que
chaque pouvoir a sur l’autre comme une égalité des armes.

1.La responsabilité ministérielle et les autres moyens d’action du Parlement


L’action du Parlement sur le gouvernement s’exerce par différents moyens mais parmi ces
moyens d’action, il y en a un qui est le plus radical : la mise en jeu de la responsabilité
politique des ministres.

a. La mise en jeu de la responsabilité politique des ministres


Ce moyen permet au Parlement de renverser le gouvernement en cas de désaccord
politique. Ce moyen d’action est radical et explique pourquoi au moment de la désignation
du cabinet, le chef de l’état doit faire très attention et tenir compte de la majorité
parlementaire et ainsi garantir au mieux la stabilité du gouvernement. Par la mise en jeu de
la responsabilité politique, la confiance dont le gouvernement était investi à sa désignation
va lui être retiré par le vote d’une motion de censure (R-U ; 4ème R en France ; 5 R en France),
on parlait sous la 3ème République en France d’interpellation, en Italie on parle de motion de
défiance. C’est un moyen dont dispose le Parlement ou au moins une des deux chambres
pour renverser le gouvernement. Si une chambre a plus de pouvoirs cela va être un
bicamérisme inégalitaire.
Cette responsabilité des ministres signifie d’abord que le gouvernement en place ne peut se
maintenir que si il a la confiance de la majorité parlementaire. Ensuite, cette responsabilité

7
politique c’est une responsabilité collective, cad qui va frapper l’ensemble du cabinet
ministériel selon le principe de la solidarité ministérielle. La mise en œuvre de cette
responsabilité politique se fait selon des procédés variés
Dans le régime parlementaire traditionnel, de type anglais, la responsabilité politique n’est
pas soumise à une procédure précisément réglementée. Soit la chambre vote en effet une
motion de censure qui constate le désaccord entre le gouvernement et la majorité mais ce
désaccord peut se déduire implicitement d’une simple attitude prise par la chambre un
moment donné.
Dans d’autres régimes parlementaires, la procédure de mise de la responsabilité politique de
gouvernement est codifiée.
Quel que soit le procédé, la responsabilité politique des ministres ne conduit jamais à une
révocation formelle. Les ministres ne sont pas démis d’office de leurs fonctions par le
Parlement. La confiance n’existe plus. A partir de là, le cabinet ministériel va en tirer les
conséquences, il va démissionner parce qu’il n’a plus cette confiance.

b. Les autres moyens d’action


Il existe d’autres moyens d’action qui garantissent l’information du Parlement et du coup en
étant informé, le Parlement peut exercer de manière effective/éclairée son contrôle sur le
gouvernement. Lors des débats législatifs les membres du <parlement ont le droit de
demander au membres du gouvernement de s’expliquer. Ce contrôle a également été
renforcé par l’existence des commission parlementaire qui sont chacune spécialisées dans un
domaine.

2. La dissolution et les autres moyen d’action du gouvernement


Le gouvernement a toute une gamme de moyens pour agir sur le parlement. Le moyen le
plus efficace c’est le droit de dissolution ou encore la question de confiance.

a. La dissolution
On peut définir la dissolution comme le pouvoir de l’exécutif de mettre fin au mandat de la
chambre ou des chambres. Ce droit est l’exacte contrepartie de la responsabilité politique du
gouvernement. Lorsque le parlement est bicaméral, si une seule chambre peut renverser le
gouvernement, c’est alors cette chambre qui peut être dissoute par l’exécutif. Dans un
régime parlementaire, la dissolution est prononcée par le chef de l’état sur la demande du
chef de gouvernement, c’est donc un acte formel. La simple menace de dissolution constitue
déjà un moyen de pression important sur la chambre concernée. Les membres de la
chambre en question auront tendance à donner raison à l’exécutif. Si la dissolution a
vraiment lieu, des élections législatives sont organisées. La dissolution permet donc aux
électeurs d’arbitrer un conflit entre la chambre et la cabinet ministériel.

b. La question de confiance
C’est un moyen très puissant en régime parlementaire. La question de confiance consiste
pour le gouvernement a mettre lui-même en jeu sa responsabilité politique devant le
Parlement. Le gouvernement propose au Parlement ou à une chambre le vote d’une
question de confiance sur tel texte. Si le Parlement refuse de voter ce texte auquel tient
beaucoup le gouvernement, le gouvernement considérera qu’il est en désaccord avec la
chambre et démissionnera. Au moment où il pose cette question de confiance, il menace de
démissionner. C’est un chantage à la démission. Vis-à-vis des citoyens, les parlementaires

8
auront la responsabilité d’une crise politique. Ce n’est pas du tout un acte de faiblesse de
poser une question de confiance, au contraire elle permet au gouvernement de poser ses
conditions.
La responsabilité politique du gouvernement devant le Parlement peut être déclenchée soit
par le Parlement avec la motion de censure soit par le gouvernement avec la question de
confiance. C’est un signe d’équilibre entre les pouvoirs, c’est une originalité du régime
parlementaire.

c. Les autres moyens d’action


Les ministres ont le droit d’entrer dans les Chambres, d’y prendre la parole. Ces droits sont
un moyen pour le gouvernement de défendre sa politique et les ministres ont ce droit
suivant la Constitution soit parce qu’ils ont la qualité de ministre soit parce qu’ils restent eux-
mêmes membres de la Chambre en question.
Enfin, le gouvernement peut intervenir dans la convocation et la clôture des sessions du
Parlement.

On constate qu’il y a un équilibre permanent des moyens d’action réciproques et en


particulier la menace de la dissolution. Ces deux menaces s’équilibrent.

§2 : les modalités du régime parlementaire


Dans la pratique s’est développé une grande diversité de régimes parlementaires. Ces
variantes portent sur le rôle du chef de l’état qui aura selon le cas plus ou moins de liberté
d’action, d’attributions ; sur l’aménagement de la responsabilité gouvernementale et du droit
de dissolution, sur les rapports entre le Parlement et le gouvernement. A travers l’évolution
historique du régime parlementaire, il y a une diversité dans le temps. Il y a aussi une
diversité dans l’espace, il y a des variantes quand on considère les régimes parlementaires
contemporains qui sont actuellement pratiqués par différents états.
Ainsi, on constate qu’il existe deux modalités traditionnelles du régime parlementaire qui se
caractérisent par la place qu’elles accordent au chef de l’état.
A cela se sont superposées de nouvelles modalités du régime parlementaire appelées
modalités contemporaines et qui se caractérisent par les rapports gouvernements/chambre
qu’elles organisent.

A. Les modalités traditionnelles


Historiquement, les premiers régimes parlementaires qui ont été mis en place ont été
qualifiable de régime parlementaire dualiste. Puis, ils ont évolué avec le temps pour devenir
des régimes parlementaires monistes suite à l’effacement du chef de l’état. Ils correspondent
à la définition du régime parlementaire vu auparavant.

1.Le régime parlementaire dualiste


a. Les circonstances de son apparition
Le régime parlementaire s’est formé dans un cadre monarchique d’abord en Angleterre à
partir du XVIIIème siècle. Ensuite, ce sera le régime de la monarchie parlementaire en France
de 1814 jusqu’à 1848. On se trouve alors à une époque où le principe monarchique et le
principe représentatif se font équilibre, ils sont combinés. Comme ils se font équilibre, le
régime parlementaire sera dualiste. Sur le plan historique, c’est la première forme de régime

9
parlementaire, c’est la forme embryonnaire d’un régime parlementaire naissant qui ne
correspond pas exactement à la définition que nous avons aujourd’hui.

b. Les caractéristiques du régime parlementaire dualiste


Un régime parlementaire est dualiste lorsque il y a deux pouvoirs en présence : le roi et le
Parlement et ces deux pouvoirs collaborent activement par l’intermédiaire d’un cabinet
ministériel qu’il y a entre les deux et va être responsable politiquement devant les deux.

On a au sein de l’exécutif une véritable dyarchie donc on n’a pas un exécutif bicéphale mais
dyarchique. Il y a au sein de l’exécutif une intervention active du chef de l’état dans les
affaires politiques et cela se manifeste de plusieurs manières :
- le droit de dissolution que le chef de l’état exerce discrétionnairement et peut
l’utiliser en-dehors de toute crise ministérielle
- il existe une double responsabilité des ministres : devant la ou les chambre(s) et
devant le chef de l’état, le cabinet ministériel doit son existence et ne peut se
maintenir en fonction que s’il a simultanément la double confiance du chef de l’état
et du Parlement, la responsabilité du gouvernement devant le chef de l’état résulte
de la totale liberté dont dispose le chef de l’état pour choisir son gouvernement, cette
responsabilité résulte aussi du pouvoir que le chef d’état a de révoquer les ministres.

Une large collaboration des pouvoirs mais qui implique largement le chef de l’état avec son
intervention active. En effet, dans un régime parlementaire dualiste, le chef de l’état ne se
contente de promulguer les lois, il va aussi partager l’initiative des lois avec le Parlement.

Des moyens d’action politique réciproques. C’est le chef de l’état qui a le droit de dissolution
mais inversement, le parlement peut renverser le gouvernement qui a la confiance du chef
de l’état.

c. Quelles sont les application du régime parlementaire dualiste


Ce régime parlementaire dualiste sera pratiqué en Angleterre à la fin du XVII ème siècle durant
la première moitié du XIXème siècle. En France, le régime parlementaire nait à la
Restauration, toutefois la Charte de 1814 ne contient pas tous les rouages du régime. Le
régime parlementaire dualiste se développera réellement sous la Monarchie de Juillet c’est-
à-dire en vertu du texte de la Charte de 1830. C’est pourquoi le régime parlementaire
dualiste en France est aussi appelé le régime orléaniste du nom d’Orléans qui gouvernait
alors avec Louis-Philippe.
En France on va reprendre ce modèle dans les lois constitutionnelles de 1875, c’est la
Constitution de la IIIème République.
On trouve dans la Vème République, des éléments de régime parlementaire dualiste.

2. Le régime parlementaire moniste


a. Les circonstances de son apparition
Le régime parlementaire moniste est le résultat d’une évolution du régime parlementaire
dualiste. A la fin du XIXème siècle, le régime parlementaire dualiste doit s’adapter aux progrès
de la démocratie et plus particulièrement avec l’apparition du suffrage universel. Cela va
avoir un impact sur les institutions et va se traduire par un déséquilibre au profit du
Parlement qui est censé incarner la volonté générale.

10
Dans certains régimes comme en Angleterre, qui sont restées des monarchies, on assiste
alors à un effacement du roi. En cas d’opposition forte entre le roi et la Chambre sur telle ou
telle question politique, le gouvernement est renversé par la Chambre. Il y a donc la
dissolution de la Chambre par le monarque. La dissolution ne va pas permettre forcément de
mettre fin au conflit. Il est possible que les électeurs renvoient la même majorité que la
précédente à la Chambre. Le roi n’aura que deux solutions : soit le recours à la force soit
céder à la volonté des citoyens c’est-à-dire nommer un gouvernement dont il désapprouve la
politique.

Pour les régimes qui se sont transformés en République, le régime parlementaire dualiste
appliqué à la forme républicaine soulève trois problèmes :
- celui de la désignation du chef de l’état : dans la logique républicaine, cette
désignation est confiée au Parlement.
- celui des attributions du chef de l’état : il va apparaître anormal de donner des
pouvoirs importants, effectifs et réels à quelqu’un qui est irresponsable
politiquement devant le Parlement.
- celui du droit de dissolution : on considère qu’il est une atteinte à la souveraineté
nationale à cette époque. C’est une erreur car en réalité c’est une atteinte à la
souveraineté parlementaire. Au contraire, c’est un appel au peuple.
Le régime parlementaire dualiste en république va évoluer vers un effacement du chef de
l’état et donc vers un régime parlementaire moniste.

b. Les caractéristiques régime parlementaire moniste


Ce régime parlementaire va devenir la forme traditionnel du régime parlementaire actuel.

Un exécutif bicéphale : il n’y a plus de diarchie. Il n’y a une seule volonté politique, celle du
gouvernement. Il devient l’élément moteur. Cela va produire deux conséquences : le droit de
dissolution n’est pas utilisé par le chef de l’état discrétionnairement, ce sera une compétence
liée en se conformant à la demande de dissolution du chef de gouvernement. La deuxième
conséquence : le gouvernement n’est plus responsable que devant la ou les chambre(s). c’est
pour cela que l’on parle de monisme. Si le chef de l’état nomme le chef de gouvernement, il
ne dispose plus de liberté de ce choix. En effet, il doit se conformer aux résultats des
élections législatives. Le chef de l’état ne peut plus révoquer le chef de gouvernement.

La collaboration des pouvoirs se fait essentiellement entre le gouvernement et le Parlement.

Le droit de dissolution est une compétence liée du chef de l’état. Il doit attendre la demande
du gouvernement et ne peut pas refuser de dissoudre. D’un autre côté le Parlement a le
pouvoir de renverser et de mettre en jeu la responsabilité du gouvernement comme il peut
soutenir un gouvernement qui n’est pas conforme aux vœux du chef de l’état.

c. Les variantes du régime parlementaire moniste


Ces variantes peuvent dépendre de différents facteurs en particulier du système des partis
politiques, des modes de scrutin.
1ère variante : régime parlementaire moniste combiné au bipartisme. Le bipartisme est
généré par le scrutin majoritaire à un seul tour et produit une majorité relativement
homogène, stable à la Chambre. Le gouvernement qui va être formé sera l’émanation cette

11
majorité parlementaire. Le gouvernement sera formée de l’équipe dirigeante du parti
politique qui est arrivé en tête aux élections législatives. En conséquence logique, le cabinet
ministériel sera prédominant, c’est lui qui va exercer le pouvoir sur sa majorité
parlementaire. Dans ce contexte, la responsabilité politique du gouvernement devant la
Chambre sera très rarement mise en œuvre en tout cas à l’initiative de la Chambre. Le
gouvernement a de plus grandes chances de rester en fonction et de faire adopter tous ses
projets de loi par la Chambre. Pour cela, le gouvernement et son chef disposent de tous les
moyens de pression sur sa majorité pour faire passer sa politique, ses textes, ses réformes y
compris la question de confiance. C’est la situation au Royaume-Uni depuis la fin du XIXème
siècle. Cette première variante aboutit à un déséquilibre des pouvoirs en faveur du
gouvernement.

2ème variante : régime parlementaire moniste combiné au multipartisme. Le multipartisme est


généré par le scrutin majoritaire à deux tours ou par la représentation proportionnelle. Il y a
au sein de l’Assemblée des partis politiques nombreux et le maintien du cabinet ministériel
va dépendre de la stabilité de la coalition des partis qui a remporté les élections législatives.
La stabilité sera un peu plus assurée i on a un scrutin majoritaire à deux tours mais sera très
fragile c’est une représentation proportionnelle à l’origine. La politique suivie par le cabinet
ministériel sera forcément le résultat de compromis entre les différents partis politiques
membres de la coalition. Si les coalitions sont instables elles ne seront pas un soutien solide
au gouvernement. Elles vont faire et défaire les gouvernements au gré de leurs caprices.
Dans cette variante, il peut y avoir une instabilité gouvernementale chronique et une
prédominance de la Chambre sur le cabinet ministériel, ou plus exactement des partis
politiques sur le cabinet ministériel. C’est ainsi que va évoluer la IIIème République en
France, sachant cependant que dans cette république le système des partis ne sera pas le
seul facteur ayant joué, il y aura en plus la renonciation au droit de dissolution. Ceci
accentuera le déséquilibre en faveur de la Chambre et donc l’instabilité gouvernementale.
On pourra arriver à un régime d’assemblée de fait.

Un régime parlementaire moniste peut perdre même sa nature de régime parlementaire en


évoluant vers un régime d’assemblée de fait comme sous la IIIème République.

B. Les modalités nouvelles du régime parlementaire


Après la 1ère guerre mondiale, les constituants ont tenté de codifier de manière très précise
dans la Constitution les principes régissant les rapports exécutif/législatif en régime
parlementaire. Ceci a donné naissance au parlementarisme rationnalisé. Presque tous les
régimes parlementaires occidentaux d’aujourd’hui sont des régimes parlementaires
rationnalisés. Également, à la même époque, se développement les partis politiques
modernes qui permettent la mise en place du parlementarisme majoritaire

1.Le parlementarisme rationnalisé


L’idée s’est imposée qu’il fallait absolument résoudre ce problème, limiter les dérives, d’y
apporter remède, autrement dit, restaurer un équilibre dans le régime parlementaire. Donc,
de nouvelles constitutions apparaissent et vont mettre en place des mécanisme très
élaborés, des procédures constitutionnelles qui ont pour objet de renforcer l’exécutif face au
Parlement. Ces dérives ont été rendues possibles parce que les textes constitutionnels

12
étaient courts et très peu explicites. La Constitution d’Allemagne de 1949, en France la
Constitution de la IVème République, la constitution de la Vème république en France.
Les règles qui vont être codifiées dans ces constituions rendent beaucoup plus difficiles la
mise en jeu du gouvernement : on va pouvoir engager la responsabilité politique du
gouvernement. Qu’il s’agisse de la motion de censure, de la question de confiance : il ne faut
pas que la défiance soit déduite d’un simple comportement. Ces constitutions vont prévoir
l’organisation d’un scrutin portant explicitement sur la confiance. Ensuite, un délai de
réflexion est prévu entre la demande du scrutin et le vote. Enfin, sont fixée des modalités
particulières pour le vote, c’est-à-dire qu’il faudra une majorité absolue ou même une
majorité renforcée contre le gouvernement pour que celui-ci soit considéré comme renversé.
La restauration du droit de dissolution fait partie de la rationalisation du parlementarisme.
On peut y inclure un certain nombre de moyens donnés au gouvernement pour faire passer
sa politique.
Les résultats de ce parlementarisme rationalisé n’ont pas toujours été efficaces et même
parfois cela a aggravé les défauts du régime parlementaire C’est le cas de la IVème
République en France pour plusieurs raisons : le dispositif de la Constitution du 26 octobre
1946 qui comportait beaucoup d’imperfections et en même temps des exigences bien trop
grandes + le système des partis politiques avec comme mode de scrutin la représentation
proportionnelle qui fragilisera considérablement le régime. Le droit des dissolution en sera
paralysé car les conditions ne seront jamais remplies qu’il soit utilisé.
A côté de la IVème République, il fonctionnera très bien Allemagne, en France sous la Vème
République et assurera une stabilité de l’exécutif incontestable parce qu’on aura dans les
textes constitutionnels des mécanismes quasiment parfaits et aussi parce qu’il y aura des
majorités stables, disciplinés pour soutenir les gouvernements en place.

2. Le parlementarisme majoritaire
La stabilité gouvernementale dépend avant de l’existence d’une majorité parlementaire
cohérente et c’est tout à fait le cas de nos jours au Royaume-Uni, en Allemagne et en France.
Le mode de scrutin y contribue largement mais avec d’autres facteurs qui s’y rajoutent. Le
parti politique vainqueur aux élections législatives devient le parti de la chambre basse soit
tout seul soit avec l’appui d’une force secondaire. Le gouvernement sera alors composé des
membres de ce parti avec quelques membres de la force d’appoint. Généralement, le
gouvernement est assuré d’une majorité disciplinée qui ne le renverser pas et qui adoptera
ses projets de loi. Donc en principe la durée du gouvernement correspond à al durée de
législature. Quant au droit de dissolution, s’il est utilisé, il est le plus souvent détournée de sa
fonction initiative. La dissolution sera principalement destinée à renforcer la majorité
parlementaire. Plus précisément, il s’agit de déclencher des élections législatives anticipées
avant le terme normal de la fin de la législature, cela pour avoir toutes les chances d’accroitre
le nombre de sièges de la majorité existante dès lors que les sondages sont favorables. C’est
comme ça qu’est utilisé le droit de dissolution ay Royaume-Uni depuis très longtemps. La
dissolution peut aussi servir à trouver une majorité, par exemple en France à la suite de
l’élection présidentielle en 1981 et 1988.
Il peut résulter de la combinaison du régime parlementaire avec le bipartisme et
singulièrement le bipartisme rigide : scrutin uninominal à un seul tour avec une majorité
stable, le corps électoral en votant pour l’un ou l’autre des deux grands partis qui dominent
construit des majorités stables et solides qui se succèdent. Pendant un certain temps, le
même parti politique va contrôler l’exécutif et le législatif. Avant l’alternance, pendant un

13
temps, il y a comme une sorte de confusion des pouvoirs temporaire au profit d’un parti
jusqu’aux élections suivantes.
Il peut également résulter de la combinaison du régime parlementaire et de certains formes
de multipartisme qui présentent une certaine originalité : la France sous la Vème République
 scrutin majoritaire à deux tours qui conduit à un multipartisme souple qui favorise des
coalitions électorales et qui sont plus ou moins stables normalement. Il y a une donnée
spécifique en France qui se greffe à cz dispositif qui est l’élection du président au suffrage
universel direct, qui va conditionner toute la vie politique sous la Vème république, tellement
que cela a un impact sur le système partisans. Cela opère une polarisation des forces
politiques en présence et pendant de nombreuses année son a parlé de bipolarisation. Les
partis s’organisent en fonction de l’élection présidentielle.
5min
Autre exemple : Allemagne avec un mode de scrutin mixte qui combine une représentation
proportionnelle personnalisée et qui pendant très longtemps a produit un système de
En conséquence, le parlementarisme majoritaire offre une certaine stabilité, un soutien à
l’exécutif et traduit un renforcement des pvrs exécutifs et qui favorise soit un cabinet soit un
chef de l’exécutif. Ce phénomène ne se produira pas si on a à la base une représentation
proportionnelle normale et que le nbre des partis politiques de force à peu près équivalent
est égal à 5 ou 6, à l’inverse il y aurait une prépondérance du Parlement voire une confusion
des pouvoirs au profit du Parlement.

On ne peut pas considérer la séparation des pouvoirs telle qu’elle est aménagée dans le texte
de la Constitution, il vaut voir comment cela fonctionne dans la réalité politique et on voit
l’incidence du système des partis politiques et donc en amont le mode de scrutin.
En réalité, plusieurs modalités se combinent : le Royaume-Uni est un régime parlementaire
moniste et majoritaire (rationnalisé par le système partisan) ; France Vème République :
régime parlementaire dualiste majoritaire et hyper-rationnalisé.

Section 2 : Les régimes de confusion des pouvoirs


Il y a confusion des pouvoirs lorsqu’un même organe constitutionnel exerce soit de manière
légale soit arbitrairement les principales fonctions de l’état. Il peut être établi soit au profit
de l’exécutif soit au profit d’une assemblée.

§1 : Le régime d’assemblée (=gouvernement ou régime conventionnel)


Gouvernement conventionnel : pour désigner une confusion des pouvoirs au profit d’une
assemblée. Régime conventionnel : cela vient de la Convention qui l’instaura et le pratique
en France de 1792 à 1795.

A. Les caractères du régime d’assemblée


Le régime d’assemblée apparaît comme le régime le plus proche de la démocratie intégrale
parce qu’il postule une hiérarchie des pouvoirs législatif et exécutif au profit du législatif,
autrement dit une assemblée toute puissance et un exécutif collégial qui lui est soumis.

1.Une assemblée toute puissance


a. Sa structure
Un Parlement monocaméral, une assemblée unique qui détient tous les pouvoirs. La
souveraineté étant indivisible, sa représentation ne peut pas être divisée.

14
b. Ses attributions
l’assemblée prend toutes les décisions importantes pour la vie du pays, elle est omnipotente.
C’est l’assemblée qui assume la fonction gouvernementale c’est-à-dire elle détermine et
conduit la politique nationale. Par exemple, dans la Constitution suisse, il est dit que
« l’autorité suprême de la confédération est exercée par l’Assemblée fédérale ». Cette
Assemblée fédérale bicamérale assume le pouvoir législatif et contrôle le pouvoir exécutif et
même le pouvoir judicaire par l’intermédiaire de juges qu’elle désigne. 20min Donc, en
l’absence de division des pouvoirs il n’y a pas de réelle. La toute-puissance de l’assemblée est
justifiée en théorie du moins par sa totale soumission au peuple souverain. Le peuple est
censé la contrôler en permanence par les techniques de la démocratie semi-directe (mandat
impératif ; référendum d’initiative populaire ; référendum de ratification)

2.Un exécutif collégial soumis


L’assemblée ne peut pas assumer toutes les tache, y compris secondaire donc un autre
organe est créé et cet organe est distinct de l’assemblée cependant il tient de cette dernière
son existence et ses pouvoirs de l’assemblée. On pourrait parler d’un pouvoir commis
(commis de l’assemblée), c’est un exécutif au sens propre du terme donc un exécutant.

a. Sa structure
L’exécutif n’est pas remis à un seul individu mais les membres de cet organe collégial sont
égaux entre eux, il n’y a pas de chef, ce qui l’affaibli. Cette collégialité entraine en même
temps une diffusion/dilution des quelques attribution qui sont remises à cet organe. En
outre, les membres de cet exécutif sont désignés et révocables librement par l’assemblée.
Cela marque la prépondérance de l’assemblée sur l’exécutif.
En régime parlementaire le pouvoir de l’assemblée de renverser le gouvernement comporte
une double contrepartie. D’une part, le gouvernement peut poser la question de confiance
c’est-à-dire engager lui-même sa responsabilité politique et d’autre part, le chef de l’état peut
prononcer la dissolution de la Chambre basse.
Dans un régime d’assemblée, la dépendance ne joue que dans un seul sens, l’exécutif est
complètement dépendant de l’assemblée, il n’y a pas de question de confiance et il n’y a pas
de droit de dissolution. Donc l’assemblée n’a jamais rien à craindre de l’exécutif. La
dépendance est unilatérale.

b. Ses attributions
L’exécutif n’est chargé que de l’exécution des lois en devant respecter les orientations de
l’assemblée et sous le total contrôle de celle-ci. Il peut arriver que la domination de
l’assemblée soit telle qu’elle puisse avoir en plus le pouvoir de réformation c’est-à-dire de
réformer les décisions prises par l’exécutif, c’est-à-dire s’immiscer dans la fonction exécutive.
En revanche, jamais l’exécutif ne peut s’immiscer dans la fonction législative.

B. Les applications du régime d’assemblée


De nombreuses illustrations peuvent être exposées. D’abord, il n’est pas possible qu’une
assemblée de plusieurs centaines de personnes puisse prendre toutes les décisions pour le
pays, puisse assumer toutes les tâches essentielles pour le pays. En plus, elle risque d’être
empêtrer dans ses querelles intestines. En face, il existe une équipe restreinte qui se voit
confier la fonction exécutive. Dans la pratique, il est possible qu’au sein de cet exécutif
émerge au bout d’un moment un personnalité assez forte qui va faire la différence et arriver

15
à initier des décisions. Ce régime que l’on a décrit au départ comme étant le plus proche de
la démocratie intégrale peut finir par dégénérer en une dictature de l’exécutif comme en
Angleterre au XVIIème siècle lorsque la Chambre des communes s’opposa au roi et cela finit
par l’exécution du monarque. Ce régime va préfigurer en France la dictature de Robespierre
entre 1792 et 1795.
A côté de ces deux expériences, il faut souligner que le régime d’assemblée sera également
le régime provisoire de différentes assemblées constituantes en France. Cette fois, les dérives
tourneront courts mais il y aura quand même une tentative de l’exécutif de dominer
l’institution : en 1848 au cours de la rédaction de la Constitution de la IIème République.
Au moment de la rédaction de la IIIème République (1871-1875) avec dictature d’Adolphe
Thiers.
Le premier projet de Constitution de la IVème République : projet du 19 avril 1946.
L’assemblée constituante après la guerre élabore un projet de Constitution qui tend à établir
un régime d’assemblée sauf que les français n’en voulaient pas. Le projet est rejeté par
référendum par les français.
Certains auteurs citent la Constitution suisse comme un régime d’assemblée : exécutif
collégial élu par l’assemblée fédérale, cet exécutif exécute les décisions des chambres et ces
deux chambres peuvent réformer ses décisions. Dans le texte de la Constitution il y a d’autres
éléments qui font douter de l’exactitude du nom de régime d’assemblée. Ainsi, cet exécutif
participe à la procédure législative puisqu’il a un droit d’initiative et les membres de l’exécutif
ont aussi un droit d’entrée et de parole pour défendre leur point de vue. Il y a une
collaboration étrangère au régime d’assemblée. L’exécutif participe à la fonction
gouvernementale. Les deux assemblées ont des session plus courtes. C’est pourquoi la Suisse
est plutôt qualifiée de gouvernement directorial.

§2 : Les variantes monocratiques : des monarchies absolues aux dictatures totalitaires


Les monarchies absolues
Les dictatures totalitaires qui ont pour particularité ou le pouvoir de l’état donc du dictateur
est absolu non seulement en intensité mais aussi dans son champ d’application, dans son
étendue.
Les théocraties qui sont fondés non seulement sur la confusion des pouvoirs politiques mais
aussi qui sont fondées sur la confusion du pouvoir politique et du pouvoir religieux.

Dans la réalité, il existe des régimes intermédiaires, mixtes qui mêlent des traits de régimes
parlementaires, présidentiels, qui respectent la séparation des pouvoirs mais s’inspirent des
deux modèles (IIème R 1848 ; Vème République).
La considération du texte constitutionnel est insuffisante, il y a des facteurs qui peuvent
modifier considérablement les rapport entre les pouvoirs tels qu’ils ont été définis dans la
Constitution. Il en est ainsi principalement du système des partis politiques et donc des
modes de scrutin.

16
Deuxième partie : Les régimes politiques français
On peut prendre comme exemple, les États-Unis et qui depuis l’origine est régi par la même
Constitution de 1787. La France depuis 1789 a une histoire constitutionnelle mouvementée
et diversifiée. On a pratiquement essayé tous les régimes. La Vème République c’est le
produit de cette histoire et a en tout cas tiré les leçons du passé.
Titre premier : éléments d’histoire constitutionnelle
Dans cette grand diversité, il y a quand même une assez grand régularité cad qu’on arrive à
distinguer trois grandes phases dans l’histoire constitutionnelle française.
Une première période de 1789 à 1814 : Révolution française + Premier empire. Dans cette
courte période il y a une très grande variété de régimes mis en place sauf le régime
parlementaire.
Une deuxième période : 1814-1870 : Restauration – fin du Second empire. On y retrouve
plusieurs types de régimes mais le trait marquant de cette période c’est la formation du
régime parlementaire en France. Ces deux premières périodes forment chacune une sorte de
cycle constitutionnel parce que les régimes divers vont se succéder exactement dans le
même ordre : monarchie constitutionnelle ; république ; empire.
Une troisième période : 1870-1958 : IIIème et IVème République séparées par le régime de
Vichy.

Chapitre 1 : La IIIème République


Une naissance laborieuse parce que l’assemblée constituante mettre presque 5 an pour
rédiger une nouvelle Constitution.
Sur le plan international, c’est la fin de la guerre avec la Prusse soldée par la défaite de
l’armée française. Napoléon III capitule le 2 septembre 1870. A Paris, la foule manifeste et
veut le rétablissement de la République mais la foule n’est pas homogène. Il y a d’un côté des
républicains révolutionnaires et de l’autre des républicains modérés. Les modérés vont
réussir à former un gouvernement provisoire qui va s’appeler Gouvernement provisoire….
59min30 et va déclarer la république le 4 septembre 1870.
Sur le plan interne, cette période est marqué par l’épisode de la Commune de Paris. C’est
une insurrection et qui va se dérouler de mars à mai 1870. Elle va s’achever dans une
répression sanglante. De plus, un accord semble impossible sur la nouvelle Constitution à
élaborer. Le gouvernement provisoire va inviter les électeurs à élire une assemblée
constituante au suffrage universel masculin. Or, cette assemblée constituante sera au final
divisée entre monarchistes, de républicains et de bonapartistes avec des monarchistes
largement majoritaires. Les monarchistes sont eux-mêmes divisés avec d’un côté les
légitimistes et de l’autre les orléanistes parce que chacun soutient une branche différente de
la famille royale (l : Bourbon et o : Orléans).
Les auteurs de la Constitution de 1875 vont mettre en place un régime parlementaire
dualiste mais une fois le régime mis en place, cela va évoluer assez rapidement vers un
régime parlementaire moniste (équilibre des pouvoirs) puis vers un régime d’assemblée de
fait (confusion des pouvoirs).

Section 1 : L’élaboration d’une Constitution pour une monarchie parlementaire


Le 4 septembre 1870 est proclamée par le Gouvernement provisoire. Ce gouvernement
provisoire organise l’élection d’une assemblée nationale constituante au suffrage universel
masculin. Le résultat est celui d’une assemblée très conservatrice puisque à large majorité
monarchiste.

17
Cette assemblée constituante comporte 645 députés. La droite monarchiste a une majorité
très nette avec 396 députés (182 légitimistes ; 214 orléanistes). La gauche ce sont les
républicains à l’époque qui remportent 230 sièges.
Cette assemblée va avoir deux fonctions : élaborer une nouvelle Constitution et doit aussi
assurer le gouvernement du pays jusqu’à l’entrée en vigueur de la nouvelle Constitution.

§1 : Les conditions d’élaboration


Il faut une organisation provisoire afin d’organiser le prochain pouvoir et la constitution. Il
faut assurer la continuité de l’état.

A. Le régime provisoire de l’assemblée constituante


Par une résolution du 17 février 1891, l’assemblée constituante désigne Adolphe Thiers avec
le titre de chef du pouvoir exécutif de la République française. Ses fonctions doivent être
exercées sous l’autorité de l’assemblée. Il va le faire avec le concours de ministres qui vont
l’entourer et qu’il aura choisi.

Adolphe Thiers a pour mission de pourvoir aux nécessités de gouvernement, c’est-à-dire


assurer la continuité de l’état et conduire les négociations de paix avec la Prusse, en
attendant la mise en place des futurs institutions définitives.
Cette organisation provisoire s’inspire du modèle du régime d’assemblée, mais ce régime va
se dénaturer sous l’influence de certaines circonstances, d’origine externe avec la défaite qui
n’est pas dirigé par tout le monde et d’origine interne, avec la commune de Paris : c’est une
insurrection qui s’inscrit dans la filiation de la révolution de 1848 mais à cela s’ajoute le
ressentiment de la défaite et le refus de faire la paix avec l’Allemagne. De manière plus
fondamentale la Commune de Paris c’est une tentative d’une République très à gauche en
commençant par l’expérience à petite échelle d’une administration municipale autonome, ou
d’autogestion. La nomination de la commune de Paris vient du fait que cette initiative
représente une opposition farouche à l’assemblée constituante à majorité monarchique qui
siège à Versailles et non pas à Paris et qui est considérée comme la capitale de l’ancienne
monarchie.
On a deux France qui s’opposent avec d’un côté une assemblée conservatrice, catholique,
antisocialiste et considérée comme pacifiste qui veut faire la paix avec la Prusse et puis de
l’autre côté, il y a la France des communards, anti-religieux, qui refuse la perte contre la
Prusse et qui est prosocialiste. Cette insurrection des Communards-insurgés éclate le 18 mars
1871. Adolphe Thiers va organiser une répression féroce et sanglante envers les insurgés et
le mouvement prend fin en mai de la même année. C’est un succès pour Thiers qui sert
départ une dépendance de l’assemblée mais cette victoire lui apporte une autorité sur
l’assemblée.

L’assemblée va essayer de reprendre la main et de limiter l’autorité d’Adolphe Thiers, ainsi la


majorité monarchique de l’assemblée souhaite sauvegarder toutes les chances d’instaurer
une monarchie constitutionnelle. Le problème pour cette majorité monarchique qui veut
après établir une constitution de monarchie parlementaire, le problème étant qu’Adolphe
Tiers va se rapprocher des républicains modérés qui veulent une république
constitutionnelle. Les monarchistes sentent le danger dès juillet 1871, il y a des élections
partielles qui ont consacré la victoire des républicains.

18
En conséquence, l’adoption de la loi du 31 août 1871, qu’on surnomme « Constitution rivet »
(nom du député qui en a eu l’initiative) et par cette loi l’assemblée accorde à Thiers le titre
de Président de la République à titre provisoire. Mais cette loi institue des ministres
responsables politiquement devant l’assemblée pour diviser l’exécutif. Les députés
limiteraient Thiers par le fait qu’ils sont responsables, afin de réduire l’autorité de Thiers. Qui
en réalité n’est pas vraiment réduite, puisqu’il est resté député, il a donc accès à la chambre,
il peut donc prendre la parole et continue à avoir une grande autorité puisque c’est un
orateur très talentueux.

En 1872, il s’adresse à l’assemblée pour manifester sa préférence pour l’instauration d’une


république constitutionnelle.
Une nouvelle loi est par conséquent adopté la loi du 13 mars 1873 « Constitution de
Broglie » : cette constitution a pour objet de limiter l’accès de Thiers à la tribune de
l’assemblée dû notamment à son talent d’orateur, elle prévoit une procédure
particulièrement compliquée, une procédure si complexe que l’on va la surnommer le
« cérémonial chinois », on espère que le président sera neutralisé et qu’il laissera jouer la
responsabilité provisoire de ces ministres. On essaye de mettre en place un régime
parlementaire. Mais Thiers tient bon et ne s’efface pas derrière ses ministres (sachant qu’il
n’avait pas encore de cabinet ministériel et pas de principe de solidarité).

Le 19 mai 1873, une demande d’interpellation est initiée par les monarchistes et
précisément le Duc de Breuil contre Adolphe Thiers qui soutient un projet de constitution
républicaine.

Le 24 mai 2873, la majorité monarchique révoque le président de la République (360 voix


contre 344 (suffrage exprimé)). Le même jour l’assemblée élue à majorité monarchiste
désigne le maréchal Mac Mahon à la présidence de la république. Le nouveau président de la
République et ses ministres vont exercer leurs fonctions dans les mêmes conditions
juridiques que précédemment, sous le contrôle de l’assemblée et en se conformant au texte
précité jusqu’en 1875.

B. L’opposition sur la nature du régime


La loi du 20 novembre 1873, loi sur le septennat, dont les effets vont se prolonger jusque
dans les années 2000 « le pouvoir exécutif est confié pendant 7 ans au maréchal de Mac
Mahon ». Cette loi fixe une durée limitée du mandat président et fait du président un chef
d’état politiquement irresponsable.

Ce délai de 7 années représentait un délai suffisant pour consolider le futur régime. Cela
convenait aux monarchiques qui avaient besoin de temps pour résoudre une querelle
dynastique entre les Bourdons et les Orléanistes, entre les deux il y a une conception
différentes de la monarchie à rétablir (orléanistes : souveraineté nationale et drapeau
tricolore et Bourdon : drapeau blanc…). Le comte de Chambord (Bourdons) était d’un âge
très avancé, on attendait donc son décès en espérant que son décès permette de résoudre le
conflits.

Un coup de théâtre va avoir lieu qui a l’air anodin mais qui l’est pas du tout. C’est l’adoption
par l’assemblée constituante d’un amendement déposé au cours des débats sur la nouvelle

19
constitution, déposé par un député du centre droit - républicains modérés, Henri Wallon -
adopté le 30 janvier 1875 qui prévoit que « le président de la république à la majorité
absolue des suffrages par le Sénat et la Chambre des députés réunis en assemblée
nationale », cet amendement est adopté par 353 voix contre 362 c’est-à-dire a une seule de
majorité. Cet amendement rend le septennat impersonnel (on ne parle pas du Général de
Mac Mahon mais du président de la République) et donc il établit la république dans la
future constitution. Pour le reste, les députés étaient d’accord c’est-à-dire favorables à un
régime libéral et de forme parlementaire.

En conséquence, les lois constitutionnelles seront ensuite rapidement adoptées et la


République adoptée suivant ces textes.

§2 : Les caractères dominants de la nouvelle constitution


Dans sa forme c’est un texte décousu et dans sa substance c’est un texte de compromis.

A. Un texte décousu
Les textes de 1875, présentent cette originalité de ne pas être réunis en un seul document
mais de former trois lois constitutionnelles.
La première, la loi du 24 février 1875 est dédié au Sénat, la Seconde chambre du parlement.
La loi du 25 février s’intitule loi sur l’organisation des pouvoirs publics.
La troisième loi (constitutionnelle) du 16 juillet sur les rapports entres les pouvoirs publics.

Ces lois sont assez courtes et succinctes, elles se contentent d’organiser les compétences et
les procédures de manière très peu détaillée. Il n’y a pas de déclaration des droits, cela dit
cela n’empêchera pas que cette IIIème République sera souvent appelé la République des
libertés parce que de grands textes législatifs seront adoptés par le Parlement de la IIIème
République, texte législatif garantissant des libertés fondamentales comme la liberté de
réunion, d’association etc.

B. Une constitution de compromis


Il est assez étonnant que l’amendement Wallon ait pu être adopté en dépit de la majorité
monarchiste de l’assemblée constituante. C’est parce que la Constitution de la
IIIème république est une Constitution républicaine d’attente monarchique.
En effet de légères modifications du texte permettait aisément de transformer la république
en monarchie parlementaire et à cela s’ajoute une procédure de révision constitutionnelle
assez facile à mener.

Quelle était cette procédure de révision ?


Il fallait d’abord le vote d’un vœux de révision dans chaque chambre, puis dans un second
temps il suffisait que la majorité absolue des deux chambres réunies en assemblée nationale
approuve la révision.
Cette situation d’attente durera jusqu’en 1884 et se termine par une loi de révision
constitutionnelle adopté le 14 août 1884. Cette loi de révision constitutionnelle est
extrêmement importante. Elle opère une révision des lois constitutionnelle de 1875 qui
consacrent la victoire des républicains, il se trouve qu’ils sont alors majoritaires dans les deux
chambres (assemblée + Sénat), ce qui n’était pas le cas dès 1875. Cette révision
constitutionnelle dispose que la forme républicaine du gouvernement ne peut pas faire

20
l’objet d’une révision et que les membres des familles ayant régner sur la France sont
inéligibles à présidence de la république (touche les Bonaparte et les membres de famille
royale).
C’est ainsi qu’apparaît en France la première variante républicaine du régime parlementaire.
Cette loi constitutionnelle du 14 août 1884, on en retrouve les termes dans la Constitution
du 27 octobre 1946 de la IVème république, article 95 et en retrouve les termes à l’article 89
alinéa 5 de la Constitution de la Vème république : limites formelles du pouvoir de révision.

Section 2 : L’organisation d’un régime parlementaire dualiste


Les lois constitutionnelles mettent en place un régime parlementaire dualiste par l’équilibre
des pouvoirs qui est posé et par les rapports entre les pouvoirs qui sont prévus.

§1 : L’équilibre des pouvoirs


Réalise un équilibre entre un exécutif diarchique et un Parlement bicamérisme égalitaire. Il y
a en effet 3 équilibres :
- Équilibre au sein de l’exécutif.
- Équilibre au sein du parlement.
- Un équilibre entre un exécutif dyarchie et un parlement qui se caractérise par un
bicamérisme égalitaire.

A. Un exécutif bicéphale
Dans la perspective de restaurer une monarchie, la nouvelle constitution s’inspire du régime
parlementaire de la charte de 1830, régime parlementaire orléaniste.
Voyons les éléments de cet exécutif (1 + 2).

1.Le président de la République


a) Son statut
Selon la loi constitutionnelle du 25 février 1875 et plus précisément son article 2, le président
de la République est élu pour 7 ans par les deux chambres réunies en assemblée nationale et
à la majorité absolue des suffrages. Il est précisé que le président est rééligible.
Le président n’est responsable qu’en cas de haute trahison mais cette notion de haute
trahison n’est pas définie juridiquement. En tout cas le président de la République est
irresponsable politiquement donc c’est tout à fait conforme au statut du chef d’état
parlementaire.

b) Ses attributions
Au terme de la même loi du 25 février 1875 dans son article 3, il est dit que le pouvoir
exécutif appartient au président de la République, il est chef du pouvoir exécutif mais aussi
chef d’état.
Ses attributions exécutives :
- Il est titulaire du pouvoir réglementaire général qui à l’époque consiste à prendre
des mesures de portée générale à l’application d’une loi et ses actes se nomment des décrets
réglementaires mais ses attributions exécutives ne se limitent pas au pouvoir réglementaire
générale
- Il assure aussi la direction de l’administration, il nomme aux emplois publics, assure
le commandement de la force armée et il négocie et ratifie les traités internationaux. Tous

21
ses actes doivent être contresignés par le ou les ministre(s) chargé(s) de leur application. Ce
contreseing c’est la manifestation de l’irresponsabilité politique du chef d’état parlementaire.
- Enfin, le président de la République préside le conseil des ministres qui est la
réunion la plus solennelle de l’exécutif où sont prises les décisions les plus importantes.

Par ailleurs c’est le président de la République qui collabore avec les chambres de multiples
manières : il a le droit de convoquer et d’ajourner les chambres, il a le droit communiquer
avec elles par voie de message et il participe à la fonction législative de manière significative
avec : le partage de l’initiative des lois avec les chambres, il a la faculté de demander aux
chambres une seconde délibération aux chambres et par la promulgation des lois.
Notamment, il partage avec les chambres l’initiative de la révision constitutionnelle.
Tous ses actes quels qu’ils soient sont contresignés.

2. Le cabinet ministériel
Conformément au régime parlementaire dualiste, les lois constitutionnelles prévoient que les
ministres sont nommés et révocables par le président de la République. Donc il y a une
responsabilité politique des ministres devant le chef de l’état.
Ces ministres sont en outre responsables politiquement devant le Parlement, donc
double responsabilité, devant le président et le Parlement.

Dans la pratique le président va choisir le chef du gouvernement et ce dernier soumettra à la


signature du président la désignation des autres membres du cabinet.
Les lois constitutionnelles de 1875 ne prévoyaient pas l’existence d’un chef de
gouvernement, mais dans la pratique ce dernier est immédiatement apparu comme étant
nécessaire. D’abord pour coordonner l’action des membres du cabinet et aussi pour assurer
la représentation collégiale du cabinet devant le Parlement.

Son existence est le corollaire de l’irresponsabilité politique du chef de l’État. Le chef de


gouvernement va apparaitre comme étant une coutume constitutionnelle et va être nommé
président de conseil et cela est très maladroit car ça prête à confusion or le conseil des
ministres n’est pas présidé par le président de conseil mais par le président de la République,
le conseil des ministres reste et restera présidé par le chef de l’état.

Juridiquement, le président du conseil n’a pas de prérogatives propres, selon la formule


consacrée il serait « primus inter pares » soit le premier des ministres, mais dans la pratique
va avoir une prédominance sur les autres ministres. Il va veiller à ce que les ministres suivent
exactement la politique gouvernementale prédéfinie, il va devenir également le chef de la
majorité parlementaire et son rôle est particulièrement important sous la IIIème république
pour une autre raison c’est que très souvent il sera à la fois chef de gouvernement et aussi
détiendra un ministère prestigieux (ministère des finances ou des politiques étrangères).
C’est toujours lui qui en premier va contresigner les décisions du président.
Cet exécutif dyarchique est équilibré par un parlement bicaméral.

B. Le Parlement
Au terme de la loi constitutionnelle du 25 février, dans son article 1er, il est dit que le pouvoir
législatif s’exerce par deux assemblées : la chambre des députés et le Sénat, c’est un
bicamérisme égalitaire, singulièrement dans la fonction législative.

22
L’existence d’une seconde chambre, le Sénat, doté d’importantes attributions, une condition
posée par les monarchistes au vote de la nouvelle Constitution.

1.Le statut de la Chambre des députés et du Sénat


La Chambre basse, la Chambre des députés : élue pour une durée de 4 ans au suffrage
universel direct.
Le mode de scrutin a varié mais sur l’ensemble de la IIIème république le mode de scrutin
dominant sera le scrutin uninominal majoritaire à deux tours.
—> Exception : la loi électorale du 12 juillet 1919 qui prescrit un mode de scrutin mixte,
scrutin majoritaire et la représentation proportionnelle

Le Sénat jusqu’en 1884 comprendra deux catégories de sénateurs :


D’un côté 225 sénateurs élus pour 9 ans au suffrage universel indirect, un collège électoral
qui est formé de conseillers généraux du département et de représentants des conseils
municipaux
Deuxième catégorie de sénateurs : 75 sénateurs inamovible, nommés à vie par l’Assemblée
nationale constituante au départ et se renouvellent par cooptation c’est-à-dire ensuite
choisis par le Sénat lui-même.
Une loi du 9 décembre 1984 supprimera les sénateur inamovible, ils seront remplacés au fur
et mesure des décès par des sénateurs élus. Dans le même temps, la composition du collège
électoral sera modifiée pour renforcer la représentation des petites communes, d’où la
qualification donnée alors au Sénat de « grand conseil des communes de France », ou encore
on l’appellera la « chambre des seigles et de la châtaigne ».

2. Les fonctions des assemblées


Les deux chambres sont alors à égalité non seulement en ce qui concerne la fonction
législative et le contrôle du gouvernement.

a) La fonction législative
Les deux chambres ont une compétence législative pleine et entière. S’abord l’initiative
des lois appartient aux députés et aux sénateurs mais en outre l’adoption de la loi exige
l’accord des deux chambres et pour parvenir à cet accord le texte va d’une chambre à l’autre
par le système de la navette. Il y aura navette jusqu’a accord, la loi doit être adoptée en
termes identiques par les deux chambres.
Le Sénat peut s’opposer à la formation de la loi.

§2 : Les rapports entre les pouvoirs


Ces rapports se traduisent par une très large collaboration des pouvoirs, les différentes
fonctions de l’État sont assumées conjointement mais également ces rapports se traduisent
par des moyens d’action politique réciproque.

A. Une large collaboration des pouvoirs


En ce qui concerne la fonction législative, le Parlement et le président de la République ont
l’un et l’autre un droit d’initiative des lois.
Par ailleurs, si le Parlement vote la loi, le gouvernement va participer aux débats et va le
diriger. Enfin, le président de la République intervient à nouveau pour demander une
nouvelle délibération sur la loi et puis pour promulguer la loi.

23
En ce qui concerne la fonction exécutive, le président négocie et ratifie les traités mais la
ratification des traités les plus importants est subordonnée à l’autorisation du Parlement.

B. Des moyens d’actions politiques réciproques


Ces moyens sont propres au régime parlementaire, il y a ici une particularité propre à la III ème
République : c’est la prépondérance du Sénat dans le dispositif des moyens d’action
réciproque. En effet, les moyens d’actions ne sont pas parfaitement équilibrés et on constate
la prépondérance du Sénat.

1.La responsabilité politique du cabinet ministériel devant les deux chambres


Régime parlementaire dualiste donc une double responsabilité à la fois devant le chef de
l’état et la Chambre basse du parlement, mais les lois constitutionnelles de 1875 prévoient
aussi la responsabilité politique des ministres devant le Sénat qui se trouve donc renforcée
de la sorte. Sous la IIIème république, 6 cabinets ministériels tomberont dans ces conditions
par ce désaveux du Sénat.
Le premier sera en 1896, et autre exemple en 1938 : Leon Blum qui se verra refuser
l’investiture par le Sénat, avant même d’entrée en fonction.
Les textes constitutionnels ne précisent pas la procédure de la mise en œuvre de la
responsabilité politique et c’est donc la pratique qui dégagera deux procédures :
- L’une à l’initiative des parlementaires qui sous la IIIème République prendra le nom
d’interpellation.
- L’autre à l’initiative du gouvernement sous le nom de question de confiance.
Ces deux procédures seront consacrées dans les constitutions de la IVème et Vème
République avec un changement de nom pour l’interpellation qui deviendra motion de
censure dès 1946. Donc une responsabilité politique du cabinet devant les deux chambres.

2. La dissolution de la Chambre des députés


C’est ici véritablement que la prépondérance du Sénat se manifeste. On peut dire qu’il y a un
déséquilibre des moyens d’action politique réciproque favorisant le Sénat.
Cette prépondérance du Sénat se justifie pour deux raisons :
- D’abord on le voit si le Sénat peut mettre en jeu la responsabilité politique du
gouvernement, il peut le faire en toute impunité, il est à l’abris de toute dissolution et cela
pose un problème au regard de la définition même du régime parlementaire car un régime
parlementaire c’est un régime d’équilibre des pouvoirs et si le Sénat peut renverser le
gouvernement cet équilibre exigerait qu’en contrepartie il puisse être dissout ou alors que le
gouvernement ne peut pas être renversé par le Sénat. Cela pose un problème au regard de
du schéma du régime parlementaire.
- Deuxième élément qui montre la véritable prépondérance du Sénat : la constitution
reconnait au Président de la République, le pouvoir de dissoudre la chambre des députés ce
qui est normal en régime parlementaire. C’est le chef d’état parlementaire qui prend le
décret de dissolution et en l’occurrence de la chambre des députés. Seulement, ce pouvoir
qu’a le chef de l’État est en réalité une compétence liée parce que les lois constitutionnelles
de 1875 nous disent que le Président de la République peut dissoudre la chambre des
députés qu’avec l’avis conforme du Sénat. Ce pouvoir présidentiel est lié par l’avis conforme
du Sénat, il faut qu’il recueille en quelque sorte l’accord du Sénat pour pouvoir dissoudre la
chambre des députés.

24
En effet sur le plan juridique il y a différentes catégories d’avis, il y a l’avis simple qu’on
qualifie aussi d’avis consultatif qui ne lie pas l’autorité qui le recueille. Et il y a l’avis conforme,
là au contraire cela veut dire deux choses : non seulement il faut consulter mais en plus il
faut suivre l’avis, c’est-à-dire la substance de l’avis lie l’autorité qui consulte, et donc ça se
rapproche de la codécision. Là, le Sénat a un pouvoir extrêmement important par cet avis
conforme qui d’ailleurs refusera à plusieurs reprises cet accord au Président de la République
et donc le Sénat se trouve en position d’abriter les conflits entre l’exécutif et la chambre des
députés.

Section 3 : L’évolution vers un régime parlementaire moniste déployé


Dévoyé = sorti du chemin/dérivé  ce titre suggère qu’il y a deux phase dans l’évolution.

La IIIème République est remarquable par sa longévité, elle a fonctionné de 1875 à 1940.
De dualiste on est rapidement passé à un régime parlementaire moniste, première phase
d’évolution, puis deuxième phase d’évolution de régime parlementaire moniste (régime
d’équilibre des pouvoir) ça a évolué vers un régime d’assemblée de fait (plus aucun équilibre
des pouvoirs). En dépit d’une tentative de renforcement de l’exécutif (car pas prescrit par la
Constitution), un régime où il n’y a plus d’équilibre du tout, un régime de quasi-confusion des
pouvoirs.
Face à cette situation, la classe politique va essayer de rétablir un certain équilibre, de
redonner au régime son caractère parlementaire.

Comment redresser la situation face à un parlement hypertrophié ?


On va essayer de renforcer l’exécutif de différentes manières donc il y aura des tentatives de
renforcement de l’exécutif qui ne réussiront pas véritablement et le régime très affaiblit
abdiquera alors que le territoire est occupé par une force étrangère.

§1 : L’instauration d’un régime parlementaire moniste : la crise du 16 mai 1877


A. L’instauration de ce régime
Les élections des sénateurs restants ont lieu le 13 janvier 1873, les conservateurs l’importent,
tout catégories confondues. 151 conservateurs contre 149 républicains.
S’agissant de la chambre des députés, les premières élections législatives se déroulent par un
scrutin uninominal majoritaire à deux tours en février et mars 1876 et se traduisent par la
victoire des républicains avec un majorité significative : 360 républicains contre 200
conservateurs. Un premier cabinet ministériel est formé mais ne dure pas longtemps et est
mené par Jules Dufaure. Celui-ci est en difficulté avec la chambre des députés, il va
rapidement démissionner.
La maréchal de Mac Mahon va désigner à la présidence du Conseil un certain Jules Simon, un
républicain modéré, un conflit va éclater.

B. Le conflit et ses conséquences immédiates


Le conflit a lieu le 16 mai 1877. Le président de le République adresse à Jules Simon une
lettre dans laquelle il lui signifie qu’il n’a plus sa confiance, parce que la chambre des députés
vient d’abroger une loi autoritaire sur la presse, loi que soutenait le président qui reproche
au président du conseil de ne pas avoir fait le nécessaire pour empêcher l’abrogation (en
quelque sorte il va lui reprocher de ne pas avoir les mêmes convictions politique).

25
Jules Simon, en tire les conséquence et démissionne de lui-même.
Le 18 mai Mac Mahon adresse un message aux chambres dans lequel il annonce la formation
d’un nouveau cabinet ministériel avec comme président du Conseil Albert de Breuil, un
monarchiste. Le nouveau président du conseil va affronter un ordre du jour de défiance à la
chambre des députés et avec un vote massif contre le lui (363 voix hostiles).
La réponse du président de la République, ne se fait pas attendre, il demande au Sénat son
avis conforme pour dissoudre la chambre des députés, dissolution le 25 juin. Peu de temps
après des élections législatives sont organisées, elle élit en majorité les républicains.
Alors le Président de la république se trouve devant le choix, que résumera un grand homme
politique de la 3ème république le député Leon Gambetta « se soumettre ou se démettre ».

Le président va se soumettre à la majorité, c’est-à-dire qu’il va former un cabinet ministériel


républicain et qui donc ne partage pas ses personnels, il s’en rejet à la volonté de la chambre
de députés. C’est l’échec du parlementarisme dualiste, parlementarisme orléaniste.
En 1879, les républicains remportent les élections sénatoriales donc le Sénat devient à
majorité républicain et là Mac Mahon démissionne mais déjà trop tard le régime a évolué
C’est devenu un régime parlementaire moniste.
Traduit par un effacement du chef de l’État.

§2 : La déformation du régime parlementaire moniste : son évolution vers un régime


d’assemblée de fait
En effet, la IIIème République va bientôt dériver vers un régime d’assemblée de fait
caractérisé par une instabilité ministérielle chronique face à la toute-puissance du Parlement.
Les gouvernements se succèdent à un rythme accéléré.

Comment on est-on arrivé là ?


C’est la conjonction de trois facteurs qui explique cette évolution-là :
- Le renoncement de l’exécutif du droit de dissolution, la désuétude du droit de
dissolution
- Les défauts du texte constitutionnel
- Le jeu des partis politiques

A. La désuétude du droit de dissolution ou « la Constitution Grévy » du 6 février 1879


Après la démission de Mac Mahon, vont reprendre l’échec personnel. Jules Grévy le
Président de la république suivant va adresser un message a deux chambres dans lequel il
déclare « qu’il n’entrera jamais en conflit avec la volonté nationale », il s’engage à ne jamais
utiliser le droit de dissolution. L’importance de ce changement fait qu’on parle de
« constitution » pour cette loi, elle opère une transposition de la souveraineté nationale à la
souveraineté parlementaire. Désormais, la dissolution est considéré comme anti-
démocratique a tort puisqu’elle ouvre des élections.
Par exemple, en 1924 le président de la République Alexandre Millerand tentera de recourir
à la dissolution de la chambre des députés seulement il se heurtera à l’opposition du Sénat
qui lui refusera l’avis conforme et il démissionnera.
Confirme l’effacement avéré du chef de l’état mais surtout cet abandon du droit de
dissolution rompt l’équilibre des pouvoirs entre l’exécutif et le parlement. Favorise une
instabilité ministérielle chronique et assure une domination des chambres.

26
B. Les défauts du texte constitutionnel
En conséquence, le gouvernement peut être interpellé à tout moment, peut voir sa
responsabilité politique engagée à tout moment.
Cette responsabilité politique du gouvernement peut être engagée par un seul ministre,
n’importe lequel ce qui sera le cas, sans délibération gouvernementale préalable et c’est
comme ça que parfois les ministres apprendront que le gouvernement a renversé dans la
nuit et qu’ils ne sont plus ministres.
Enfin, le texte ne prévoit aucune majorité, c’est-à-dire que le gouvernement pourra être
renversé à la majorité simple, c’est-à-dire à la majorité absolue des suffrages exprimés, la
majorité la plus courte (par exemple : 6 sur 10).

C. Le jeu des partis politiques


Le jeu des partis politiques se caractérise à la fois par une multiplicité des formations
politiques et par un clivage principal droite/gauche, qui permet la création d‘alliance/des
coalitions au moment des élections. Mais les élections passées au sein de la chambre, ses
coalitions sont instables parce que les composantes sont multiples et diverses et les
coalitions finissent par rompre. Donc les crises ministérielles sont alors provoquées parce
qu’un parti de cette coalition décide de retirer son soutien au gouvernement en place.
Si bien que plutôt de dire que le gouvernement est responsable que devant les chambres, il
est surtout responsable devant chaque parti politique qui compose la
majorité gouvernementale.
Le parti radical qui est un parti centriste sera le pivot de toutes les combinaisons et sera
toujours là.
En 65 ans de fonctionnement, la IIIème république connaitra 104 gouvernements. Face à cette
situation catastrophique on va tenter de renforcer l’exécutif.

§3 : Les tentatives de renforcement de l’exécutif


Elle se manifeste de deux manières :
- D’abord par la consolidation de la présidence du conseil
- La pratique des décrets-lois

A. La consolidation de la présidence du conseil


Cette désuétude du droit de dissolution a confirmé l’effacement du chef de l’État non
seulement dans l’ensemble du dispositif des pouvoirs publics mais aussi son effacement au
sein même du pouvoir exécutif.
Les pouvoirs qu’avait le Président de la république en vertu des lois constitutionnelles de
1875, ses pouvoirs sont devenus purement formels, il ne refusera jamais sa signature au chef
du gouvernement (président du conseil) et toute ses décisions sont contresignées.

Toutefois la personnalité de celui qui est Président de la république et aussi son expérience
politique devront être prises en compte (comme Raymond Poincaré) afin permettre
au Président de la république d’exercer une certaine influence même si il est affaibli et cette
magistrature d’influence va se manifester au sein du conseil des ministres avant tout dans le
choix du président du conseil et là le Président de la République a une marge de manœuvre
limitée parce il faut qu’il choisisse dans la majorité parlementaire mais il s’agit de majorité de
coalition, donc il a quand même une petite marge de manœuvre. Il doit faire des choix

27
judicieux. Il faudra choisir des personnalités politiques capables de maintenir une stabilité
gouvernementale, la cohésion de cette coalition, faire preuve de sens-politique.
Quant au président du Conseil, la solidité de la coalition qui le soutient dans les chambres
dépendra de son autorité et de sa personnalité donc on aura aussi en président du Conseil
des hommes politiques de 1er plan (comme Raymond Poincaré, Georges Clemenceau,
Aristide Briand…).

Par ailleurs, la situation aussi bien nationale qu’internationale fera prendre conscience le rôle
que doit jouer le président du conseil qui va se voir doter d’un service extrêmement étoffé à
l’hôtel Matignon à partir de 1934.

06/02/2024

B. La législation par un décret-loi


A l’issu de la première guerre mondiale, la situation économique de la France, est très
mauvaise, l’initiative privée n’est pas en état d’assurer le redressement économique du pays
donc l’état doit prendre les choses en main et des décisions rapidement. Il est nécessaire de
légiférer dans le domaine économique et social. Or, le Parlement qui devrait légiférer, en
apparence tout puissant est déchiré par des querelles partisanes et il n’y a pas de majorité
stable et cohérence. Cette absence stable et cohérente empêche de légiférer.
En face, il y a un exécutif faible et instable donc tout est bloqué du côté du Parlement et de
l’exécutif. C’est pourquoi la France comme d’autres états européens ont recouru à la pratique
des décrets-lois dès la fin du premier conflit mondial.
Cette pratique apparait à la fin de la guerre de 98 et elle va perdurer et se développer et cela
jusqu’aux dernières années de la IIIème République pour prendre des mesures impopulaires.
Les parlementaire ne vont pas hésiter à se décharger sur le gouvernement de la prise de
décision d’austérité.

—> De quoi s’agit-il ?


La loi c’est l’expression de la volonté générale, la loi c’est un acte juridique normatif qui pose
des règles de portée générale. Il revient au Parlement élu du peuple de la voter et quant à
l’exécutif les seuls actes qu’il est habilité à prendre ce sont des actes réglementaires qui sont
aussi des actes de portée générale mais ils ont pour seul objet la mise en application des lois
dont ils doivent respecter les termes sans rien y ajouter, donc ce sont des décrets
réglementaires subordonnés par rapport à la loi ou dérivée de loi, on parlera de pouvoir
réglementaire secondaire ou de pouvoir réglementaire dérivé parce qu’il s’agit seulement de
la mise en application des lois. Sous la IIIème République, ils sont pris par le Président de la
République et ces décrets réglementaires sont contresignés par un ou plusieurs ministre(s).

Au plan juridique, un décret-loi résulte d’une délégation du pouvoir législatif du Parlement


au profit du gouvernement c’est-à-dire cette délégation du pouvoir législatif est votée par le
Parlement, sous la forme d’une loi qui va prendre le nom de loi de plein pouvoir.
Par cette loi de plein pouvoir, le Parlement autorise le gouvernement à prendre des décrets
qui pourront modifier les lois en vigueur  ce qui est une aberration juridique au regard de
la hiérarchie des normes puisqu’en droit seule une loi peut modifier une autre loi.

28
Comme ces décrets pris par le gouvernement modifient les lois on va les appeler des
décrets-lois. Ils entrent en vigueur dès leur publication, quand on parle de décret on parle de
publication pour leur entrée en vigueur et quand il s’agit de loi c’est promulgation.

Et ces décrets-lois restent des actes réglementaires jusqu’à ce que le Parlement les ratifient,
les reprennent à son compte.

La procédure de ratification est la suivante : le gouvernement va devoir déposer un projet de


loi de ratification des décrets-lois dans un certain délai sur le bureau des assemblées, ce
délai a été prévu dans la loi de plein pouvoir.

Et si le Parlement ratifie les décrets-lois, ces textes deviennent des lois mais si le dépôt du
projet de loi de ratification n’est pas fait dans les temps les décrets-lois deviennent caducs,
c’est-à dire qu’ils cessent de produire des effets juridiques pour l’avenir. Cette caducité
signifie que pour l’avenir ces mesures ne produiront plus d’effets et en l’occurrence ici ces
décrets-lois cessent de produite des effets juridiques à partir du jour où ils auraient dû être
soumis au Parlement, c’est-à-dire à partir de la fin du délai fixé au gouvernement pour
déposer un projet de ratification.

Ce dispositif c’est une incursion de l’exécutif dans la fonction législative, incursion qui est
encadrée, qui est doublement limitée par la loi de plein pouvoir qui délimite les domaines
dans lesquels le gouvernement est autorisé à intervenir. Donc, une délimitation matérielle
de cette incursion et aussi une limite temporelle en générale c’était de l’ordre de 2 à 3 mois,
ça a été jusqu’à 6 mois. En tout cas, il y a quelques limites qui sont fixées par la loi de plein
pouvoir.
Seulement, ces limites proviennent d’un texte législatif et par conséquent ces limites
peuvent être modifiées, extensibles au gré du législateur parlementaire lui-même, donc le
législateur parlementaire peut très bien adopter un nouveau texte législatif qui modifiera ou
qui élargira ses limites.

La Constitution ne prévoit absolument rien en ce qui concerne ces procédures et c’est


pourquoi le vocabulaire utilisé est très important on parle bien de délégation à l’instigation
du législateur parlementaire, de délégation par la loi de plein pouvoir. Il ne s’agit en aucun
cas d’une habilitation constitutionnelle, c’est-à-dire habilitation si tout ce dispositif avait été
organisé par la Constitution ce qui n’est pas le cas, les lois constitutionnelles n’ont rien
prévu. Il est impropre de parler d’habilitation, on parlera de délégation à l’initiative de
législateur parlementaire.

Dans la pratique, les décrets-lois étaient bien utiles, ils permettaient au gouvernement de
prendre immédiatement les mesures nécessaires, mesures qu’imposaient les circonstances,
généralement c’étaient des mesures d’austérité destinées à redresser l’économie du pays
suite à la guerre ou des crises économiques. Et comme c’étaient des mesures impopulaires,
les parlementaires y trouvaient leur compte, pour des raisons électorales les parlementaires
étaient contents de ne pas endosser la responsabilité de ces mesures-là, des mesures
impopulaires, donc cela arrangeait bien les parlementaires de se décharger sur le pouvoir
exécutif pour prendre de telles mesures.

29
 D’un point de vue institutionnel, cette pratique de la législation déléguée
contribuait à renforcer l’exécutif parce que ses compétences étaient élargies, ça lui
permettait de mettre en œuvre sa politique. Mais ce n’était pas sans contrepartie, parce que
pendant ce temps, le Parlement désaisit de sa fonction législative pouvait alors consacrer
l’essentiel de son temps à son autre fonction : la fonction de contrôle politique du
gouvernement, ne serait-ce que pour justifier sa présence. Et donc, il en est résulté un
accroissement de l’instabilité gouvernementale. On arrivait à une situation un peu
paradoxale, le gouvernement ayant des pouvoirs fort, des pouvoirs d’actions incontestable
mais qu’il exerçait pendant des durées très brèves puisque des gouvernements seront
renversées aussitôt après.

 Du point de vue constitutionnel, la constitutionnalité et aussi le caractère démocratique


de cette pratique ont été contestés par la doctrine de l’époque. Quelles sont les principales
critiques formulées à l’encontre de cette pratique des décrets-lois ?

- Cette pratique est une remise en cause de la séparation des pouvoirs telle qu’elle a
été établie par les lois constitutionnelles. Comment cette séparation des pouvoirs est
remise en cause ? Quelle est l’origine de ces décrets-lois ? Aucun texte ne prévoyait
la possibilité des décrets-lois, aucun texte ne prévoit que le Parlement puisse adopter
des lois de plein pouvoir pour se dessaisir, ça arrangeait les parlementaires qui
n’avaient pas à prendre des mesures impopulaires et le gouvernement qui pouvait
prendre les mesures qui s’imposaient c’est-à-dire on a affaire à un accord inter-
institutionnel (convention de la Constitution). La séparation des pouvoirs telle
qu’aménagée par la Constitution qui est remise en cause par un accord inter-
institutionnel.

- Cette pratique des décrets-lois est contraire à un principe juridique du droit public
qui est le suivant : en droit public français les compétences s’exercent et ne se
délèguent pas. Une compétence c’est un pouvoir qui est reconnu par le droit, en
l’occurrence un pouvoir qui est prévu et reconnu par la Constitution à tel ou tel
organe, c’est une charge, une mission qui comporte des obligations. À ce titre, la
compétence doit être assumée par l’organe désigné par la constitution et qui doit
l’exercer dans les conditions fixées par la Constitution. Les lois fixées par la
constitution de 1875 ont conféré le pouvoir législatif au Parlement parce qu’il était
l’élu du peuple. C’est une compétence que le Parlement ne peut pas librement
aliéner, il doit l’exercer lui-même, une compétence est une charge qu’on doit
assumer.
Ces arguments très forts n’auront aucune portée parce que les lois de plein pouvoir
étaient insusceptibles de contestations, parce qu’à l’époque il n’y avait pas de
contrôle de la constitutionnalité des lois qui aurait permis de censurer les lois de
plein pouvoir. Néanmoins, ces critiques porteront leurs fruits puisque le 27 octobre
1946 lorsque sera rédigée la Constitution de la IVème république, on interdira dans le
texte formel les décrets-lois.

§4 : La fin du régime
On pourrait dire que la fin de la IIIème République juridiquement peut résulter d’une sorte de
transposition au plan constitutionnel de la pratique des décrets-lois. Cela parce que, une loi

30
de révision constitutionnelle adoptée par le Parlement le 10 juillet 1940, délègue son
pouvoir constituant dérivé (pouvoir de révision) à un homme Philippe Pétain alors chef du
gouvernement. Dès lors, ce chef de gouvernement a tous les pouvoirs pour promulguer une
Constitution sous réserve de sa ratification par la nation de cette nouvelle Constitution.

La loi constitutionnelle du 10 juillet 1940 porte un changement idéologique radical car la


République est supprimée et remplacée par un nouveau concept « l’État français » qui ne
repose plus sur les mêmes valeurs républicaines, ce ne sont plus « liberté égalité fraternité »,
ce sont d’autres valeurs qui sont posées : le travail, la famille et la patrie.

Un tel changement est opéré alors que le territoire national est occupé par une puissance
étrangère, son invalidité est manifeste. En vertu de la loi de révision constitutionnelle du 10
juillet 1940, Pétain va adopter des actes constitutionnels qui établissent un régime de
dictature totalitaire et là le pouvoir va s’exercer dans la collaboration avec l’occupant. Ce
régime s’est distingué par une application particulièrement zélée de la politique raciale
allemande et de la mise en œuvre de la déportation et allant même au-devant des désirs de
l’occupant. La Constitution nouvelle de l’État français ne fera pas l’objet d’une ratification
populaire comme prévue initialement et plus tard ce régime de l’État français a été une
parenthèse dans l’histoire et à la fin de la seconde guerre mondiale alors officiellement la
IIIème République prendra fin le 21 octobre 1945.

31
Chapitre 2 : La IVème République
 Le 18 juin 1940 : le Général de Gaulle a lancé depuis Londres un appel à la poursuite des
hostilités, un appel à la résistance, il prend la tête des FFL (forces françaises libres). Un
embryon du gouvernement est alors créé à Londres qui est formé en 1941 et prend le nom
de comité français de libération nationale (CFLN) en 1943 établi alors à Alger qui est le
premier territoire français à être libéré, à sa tête le Général de Gaulle.

 À la vieille du débarquement en Normandie qui aura lieu en 1944, ce comité prend le


nom du gouvernement provisoire de la république française (GPRF) et s’installera à Paris lors
de la libération de la capitale en aout 1944.

 Une fois installé à Paris, un autre acte très important c’est l’ordonnance du 9 août 1944
qui rétablit la légalité républicaine, c’est-à-dire rétablir la IIIème République, elle ferme la
parenthèse de l’État français. Cela étant, le gouvernement provisoire du général de Gaulle va
demander au corps électoral d’élire une assemblée mais aussi parallèlement à cette élection,
une votation est organisée on demande au corps électoral de se prononcer sur l’avenir des
institutions, et le choix est le suivant : soit se prononcer en faveur du maintien de la III ème
République, soit se prononcer en faveur de la rédaction d’une nouvelle Constitution. La
consultation référendaire a lieu le 21 octobre 1945 et ce jour-là plus de 96 % électeurs
rejetteront la IIIème République qui est rendue responsable de la défaite de 1940.

En conséquence, l’assemblée nouvellement élue ne sera pas une nouvelle chambre des
députés, elle sera constituante, et elle engage alors la procédure d’élaboration d’une
nouvelle constitution. La futur Constitution aura de grandes ambitions, celle de réformer les
institutions républicaines mais la pratique du régime marquera l’échec du parlementarisme.

Section 1 : L’élaboration d’une Constitution républicaine


§1 : L’échec du projet de Constitution du 19 avril 1946
L’assemblée constituante a été élue à la représentation proportionnelle et cela était
particulièrement légitime à l’issue de la guerre, il fallait que les différentes forces politiques
soient représentées malgré ce mode de scrutin (qui produit un éparpillement des forces en
présence). Les deux partis de gauche (communiste et SFIO) de l’époque obtiennent
ensemble la majorité absolue des sièges au sein de l’assemblée. La gauche va donc pouvoir
imposer ses conceptions constitutionnelles, ses conceptions se traduisent dans le projet de
Constitution voté par l’assemblée le 19 avril 1946.

Ce projet instaure un régime marqué par la suprématie de l’assemblée, donc il s’agit d’un
système monocaméral qui est censé désigner un président du conseil et un président de la
République dépourvu de tout pouvoir. Possède le pouvoir législatif et l’exécutif se retrouve
placé dans l’entière dépendance de l’Assemblée (régime d’assemblée qui est proposé dans
ce projet).

Ce projet de constitution est vivement combattu par le général De Gaule et aussi par un parti
politique appelé MRP (mouvement des républicain populaire) démocratie chrétienne. Ce
projet est soumis à référendum et il est rejeté par 53% des suffrages exprimés.
En conséquence, une nouvelle assemblée constituante est élue et cette fois la gauche perd la

32
majorité absolue mais fait quand même un bon score. Le MRP devient le premier parti de
l’assemblée en termes de représentation. On se retrouve avec 3 forces équivalentes donc le
nouveau projet sera un texte de compromis entre ces trois formations. Finalement ce
nouveau projet est adopté par référendum mais avec une petite majorité, 53% de Oui.

La Constitution de la IVème République est promulguée le 27 octobre 1946.

§2 : L’esprit de la nouvelle Constitution


La nouvelle constitution confirme la restauration de la légalité républicaine avec tout ce
qu’elle implique.

D’abord, c’est l’esprit républicain de la révolution qui est honoré de 1789 mais pas
seulement, c’est l’esprit républicain de 1848 et de 1875 de la constitution de la III ème
République. Donc c’est la défense des libertés et droit fondamentaux. Dans son article 2 elle
rétabli les valeurs républicaines, celles issues de la révolution de 1789, c’est la liberté et
l’égalité, ces deux valeurs-là qui sont un héritage de la révolution de 1789 auxquelles
s’ajoute la fraternité qui est l’héritage de 1848, préambule de la Constitution de 1848.

Ces trois valeurs sont reprises et sont renforcées dans le préambule de la nouvelle
Constitution de 1946. En effet, le préambule de 1946 fait référence à l’héritage de la DDHC
de 1789, il rend aussi hommage au législateur de la IIIème République à travers une notion qui
sera la suivante : les principes fondamentaux reconnus par les lois de la république.

Quant à l’héritage de 1848, la fameuse fraternité. La fraternité ce sont des droits de créance
que les individus ont sur l’État, c’est-à-dire l’État va être amené à consacrer des droits et les
garantir pour corriger les inégalités pour accéder à l’égalité réelle. Ce qui était très
ponctuellement consacré en 1848 là est vraiment largement étayé puisque le préambule de
1946 va dérouler une liste de droits créances qui complètent les libertés classiques, les
principes économiques et sociaux particulièrement nécessaires à notre temps et qui est
l’expression de la fraternité. L’idée est de garantir à tous une égalité réelle sociale et
économique.

La République ce n’est pas que la défense des droits et libertés mais la république c’est aussi
l’idéal démocratique et cet idéal va être dans cette nouvelle Constitution affirmée dans une
formule assez remarquable qui fait la synthèse des deux conceptions de la souveraineté
nationalité et la souveraineté populaire. A son article 3, on en trouve l’expression « la
souveraineté nationale appartient au peuple français ». Pourtant, la nouvelle constitution ne
réalise pas pleinement cette synthèse. En effet, le référendum n’est prévu qu’en matière
constitutionnelle et en plus le Parlement peut éviter ce référendum en matière
constitutionnelle en réunissant une majorité qualifiée qui dispense de recourir au
référendum c’est ce qu’est dit dans l’article 90 de la Constitution.

Enfin l’article 3 précise qu’en tout autre matière, c’est-à-dire en-dehors de toute révision
constitutionnelle : le peuple n’exerce sa souveraineté que par l’Assemblée nationale élue au
suffrage universel direct.

33
En réalité, la Constitution de 1946 renoue ici avec la pratique de la III ème République, en
mettant toute les conditions en place pour restaurer la souveraineté parlementaire, ce qui
n’a pas manqué d’arriver.

La République c’est la défense des droits et des libertés fondamentales, c’est la défense de
l’idéal démocratique. La République c’est aussi le gouvernement pour des lois fixes et
établies, c’est-à-dire la République c’est la garantie de la séparation des pouvoirs. La
Constitution de 1946 organise le pouvoir d’état conformément au principe de la séparation
des pouvoirs, pas de régime d’assemblée donc un régime parlementaire dont les règles sont
pour la première fois très précisément codifiées.

La IVème République c’est le premier régime parlementaire rationalisé que connait la France.
On peut tirer toute les leçons des dérives de la IIIème République en reformant de la sorte les
institutions républicaines, mais là encore le régime ne sera pas du tout à la hauteur des
ambitions du texte.

Enfin, la République c’est non seulement la garantie des droits et libertés, c’est aussi l’État
de droit et là, la nouvelle constitution tente d’instaurer un État de droit par la création, au vu
de l’article 91, d’un comité constitutionnel. Mais en réalité, ce comité n’exerce pas de
véritable contrôle de constitutionnalité des lois donc c’est un faux semblant, l’état légal se
trouve alors maintenu.

Section 2 : La réforme des institutions républicaines


La Constitution du 27 octobre 1946 instaure ce qu’on pourrait appeler un régime
parlementaire moniste mais avec prépondérance du Parlement sur l’exécutif. Ce n’est pas un
régime d’assemblée mais pas non plus un régime parlementaire moniste pure. Un régime
parlementaire est un régime d’équilibre des pouvoirs. La Constitution commence
l’énumération des pouvoirs publics par le Parlement.

§1 : L’organisation des pouvoirs


Les organes prévus par la Constitution de 1946 sont ceux d’un régime parlementaire avec un
parlement bicaméral et un exécutif bicéphale. Il y a une très nette prédominance du
Parlement. Il y a d’emblée un déséquilibre des pouvoirs instauré dans le texte
constitutionnel même si on ne peut pas parler de régime d’assemblée, c’est entre les deux,
entre le régime parlementaire moniste et le régime d’assemblée. On s’aperçoit que face à
cet exécutif bicéphale au sein du Parlement il y un déséquilibre très marqué à tel point que
c’est un monocamérisme tempéré qui se cache derrière.

A. Le Parlement : un monocamérisme tempéré


Une des causes de l’échec du projet du 19 avril 1946, la constitution nouvelle devait
restaurer le bicamérisme mais ce n’est qu’une apparence.

1. Le statut de l’Assemblée nationale et du Conseil de la République


 L’Assemblée nationale : élue pour une durée de cinq ans au suffrage universel direct. Elle
comprendra 627 députés.
La nouveauté par rapport à la IIIème République c’est le mode de scrutin, ici c’est la
représentation proportionnelle, mode de scrutin qui favorise le multipartisme avec des

34
cohabitations instables. Pourtant, à l’aube de la IVème République on constate une stabilité
avec l’existence d’un tripartisme qui au début de la IVème République est né de l’accord entre
les trois grands partis du moment : parti communiste, la SFIO, et le MRP, un accord entre ces
trois partis pour gouverner. On sort de la seconde guerre mondiale plein de bonnes
intentions mais les choses ne vont pas tarder à se corser.

Dans le cadre d’un contexte international très chaud, en 1947 éclatera la guerre froide entre
le bloc de l’est et de l’ouest mené par les Etats-Unis, l’union soviétique, et à partir de la
guerre froide en 1947, les communistes vont entrer dans une franche opposition au régime.

Un parti s’est créé appelé les gaullistes (général de Gaulle a constitué une formation
politique) avec le RPF (rassemblement du peuple français) avec les communistes français
représentent les deux partis les plus contestataires. En raison de leur poids électoral
respectif, ils sont tous deux capable de renversé le gouvernement mais ils ne peuvent
toutefois pas gouverner ensemble.

C’est dans ce contexte politique qu’est votée une loi électorale le 9 mai 1951, dite loi sur les
apparentements. Cette loi a pour objet de limiter la représentation des gaullistes et des
communistes en donnant une prime aux alliances électorales. Effectivement, aux élections
de 1951, cette loi va assurer la victoire d’une alliance entre les trois formations politiques :
les socialistes, le MRP, et les radicaux.

 2nd chambre : le Conseil de la république : composé de 320 membres (conseillers) qui sont
élus pour 6 ans renouvelables par moitié tous les 3 ans. Ils sont élus au suffrage universel
indirect par les collectivités territoriales locales. Quant au mode du scrutin, une loi du 23
septembre 1948 met au point un dispositif un peu compliqué selon lequel certains
conseillers sont élus sur des listes à la représentation proportionnelle tandis que d’autres
sont élus au scrutin uninominal majoritaire à deux tours.

2. Les fonctions des assemblées


Le Conseil de la république fait partie intégrante du Parlement, c’est ce que rappelle l’article
5 de la Constitution : le Parlement est composé de l’Assemblée nationale et du Conseil de la
république. Cependant, ce Conseil de la république est dépourvu d’autorité représentative.
En effet, pour preuve l’article 3 de la Constitution qui affirme que le peuple exerce sa
souveraineté par l’intermédiaire de ses députés de l’Assemblée nationale. De manière
générale, par ses fonctions, il se distingue fondamentalement du Sénat de la III ème
République et cela vaut aussi bien concernant la fonction législative que pour la fonction de
contrôle de l’exécutif.

a) La fonction législative
Pour apprécier la part de chaque chambre dans la fonction législative, il faut distinguer deux
périodes avant et après la loi constitutionnelle du 7 décembre 1954 qui va réviser la
Constitution appelé la réformette.
 Durant la première période de 46 à 54, l’Assemblée nationale est la seule chambre à
posséder une compétence législative pleine et entière.

En effet en ce qui concerne l’initiative des lois, le Conseil de la république n’a pas
véritablement l’initiative des lois. En effet, il ne peut pas débattre immédiatement les
35
propositions de ses membres et ses propositions sont transmises immédiatement à
l’Assemblée nationale. Pas de débat possible au Conseil de la république. Concernant le vote
de la loi au terme de l’article 13 de la Constitution c’est l’Assemblée nationale qui vote seule
la loi.

En effet, le Conseil de république sur l’article 20 de la Constitution est cantonné à un rôle


d’organe simplement consultatif, rien de plus. La compétence du Conseil de la république se
limite à donner un avis sur chaque texte.

Selon la procédure suivante :

- Un texte de loi est voté en première lecture par l’Assemblée nationale


- Le texte voté est transmis au Conseil de la république pour avis
- Le texte revient en deuxième lecture à l’Assemblée nationale

Toutefois, la Constitution a attribué au Conseil de la république une sorte de veto suspensif.


En effet, si le Conseil de la république émet un avis défavorable à la majorité absolue de ses
membres qui le compose. En deuxième lecture, l’Assemblée nationale ne pourra adopter le
texte de manière définitive qu’à la même majorité, c’est-à-dire à la majorité absolue de ses
membres alors que normalement une loi est adoptée à la majorité simple, majorité absolue
des suffrages exprimés. Elle devra renforcer en deuxième lecture sa majorité (l’Assemblée
nationale).

La loi de révision constitutionnelle du 7 décembre 1954, la réformette va restituer au Conseil


de la république les prérogatives traditionnelles d’une chambre haute. En effet, le Conseil de
la république recouvre son droit d’initiative en matière législative, il pourra débattre
immédiatement des propositions de ces lois. Le Conseil de la république a le droit aussi de
voter la loi parallèlement à l’Assemblée nationale, autrement dit une navette est établie
entre les deux chambres.

Cependant, en cas d’opposition sur le texte entre les deux chambres, la navette n’est pas
indéfinie comme c’était le cas sous la IIIème République, l’Assemblée nationale va pouvoir à
un moment donné passer outre l’opposition du Conseil de la république au bout d’un certain
délai, aura le dernier mot au bout d’un certain délai. Ce délai est de 100 jours, mais il est
réduit à 1 mois pour les textes budgétaires et même à 15 jours pour les affaires urgentes.

L’Assemblée nationale aura donc le dernier mot et pourra adopter son texte à la majorité
habituelle, c’est-à-dire à la majorité des suffrages exprimés (majorité simple).

Si la réformette permet au Conseil de la république d’intervenir dans la procédure législative,


elle retire au Conseil de la république ce qu’il avait avant : le veto suspensif, il ne l’a plus
puisque l’assemble nationale peut adopter le texte définitivement à la majorité des suffrages
exprimés alors même que le Conseil de la république est contre.

Le Conseil de la république reste essentiellement une chambre de réflexion, il n’est pas en


mesure de s’opposer à la volonté de l’Assemblée nationale. Cette assemblée est plus
légitime que le Conseil car elle est élue au suffrage universel direct. La Constitution de 54

36
n’est pas en mesure de tempérer cette assemblée nationale et par voie de conséquence, il
ne peut pas contribuer à rétablir un certain équilibre entre le Parlement et l’exécutif.

b) La fonction de contrôle de l’exécutif


En ce qui concerne la responsabilité du Président de la République pour haute trahison, et
en ce qui concerne la responsabilité pénale des ministres pour crimes et délit commis dans
l’exercice de leur fonction, la procédure qui est prévue témoigne de la primauté de
l’Assemblée nationale.
En effet, c’est l’Assemblée nationale qui met en accusation par un vote à la majorité de ses
membres et quant au jugement proprement dit. Quant au jugement qui est rendu par la
Haute Cour de Justice dont les membres sont élus par l’Assemblée nationale et parmi les
députés de l’Assemblée nationale.

En ce qui concerne la responsabilité politique du gouvernement, seule l’Assemblée nationale


est impliquée. L’Assemblée nationale investit le président du conseil sur la base de l’article
45 de la Constitution et seule l’Assemblée nationale contrôle le gouvernement, sur la base
des articles 48 et 49 de la Constitution. Contrairement au Sénat de la IIIème République, le
Conseil de la république est hors-jeu.

B. L’exécutif : la prééminence du Président du conseil


On a affaire à un exécutif qui se lie à un régime parlementaire classique, on a un exécutif
bicéphale avec en son sein une seule volonté politique.
Structurellement, on a un gouvernement collégial et un chef de l’État. À cet égard, le texte
de la Constitution de la IVème République constitutionnalise le Président du conseil qui n’était
qu’une coutume constitutionnelle sous la IIIème République et en outre elle affirme
clairement sa prééminence au sein de l’exécutif.

1. Chef de l’état
a) Son statut
Comme sous la IIIème République, le Président est élu pour 7 ans par les deux chambres du
Parlement réunies en Congrès pour la circonstance. Cette élection se fait à la majorité des
suffrages exprimés. En principe, il fallait plusieurs tours de scrutin, généralement deux, sous
la IIIème République.
Ce sera pareil pour le premier président de la IVème République il s’agit de Vincent Auriol mais
les choses vont se compliquer un peu sur le plan politique. D’abord parce qu’au sein du
Parlement, malgré la loi sur les apparentements, les alliances électorales restent relatives,
ne se maintiennent pas au sein des chambres et il y a toujours l’opposition des communistes
et le RPF. Si bien qu’au bout du compte, en 1953, lorsqu’il faudra élire un nouveau président
de la République, il faudra 13 tours de scrutin à l’issue duquel le second président de la IV ème
République sera élu dans ces conditions-là. Ce président de la République est responsable
pour haute trahison dans les conditions signalées précédemment et il reste irresponsable
politiquement.

b) Ses attributions
Les attributions sont radicalement différentes de celles qui étaient prévues dans les lois
constitutionnelles de 1875 pour le président de la IIIème République et là, l’effacement du
chef de l’État que l’on a pu constater dans la pratique de la IIIème République est retranscrit
dans le texte de la nouvelle Constitution.
37
D’abord, le président de la République perd presque toutes ses attributions exécutives, c’est-
à-dire qu’il perd sa qualité du chef de l’exécutif, il est juste chef de l’état c’est tout, et cela se
traduit par la perte du pouvoir réglementaire, il ne détient plus le pouvoir réglementaire
général.
 Autre illustration de cela : s’agissant des relations extérieures de la France, il est
simplement tenu informé des négociations internationales, ce n’est pas lui qui les mènent et
il se contentera de signer et de ratifier les traités internationaux : article 31 de la
Constitution.

Il lui reste quelques pouvoirs de décisions ponctuels, mais ses pouvoirs de décisions sont
purement formels. Il en est ainsi en particulier du droit de dissolution de l’Assemblée
nationale prévu à l’article 51 de la Constitution.

En tout état de cause, ça ne change pas par rapport à la IIIème République, tous les actes du
Président doivent être contresignés par le Président du conseil et un ministre sur la base de
l’article 38 de la Constitution.

Quant à sa collaboration avec les chambres, elle se limite à un droit de message qu’il peut
adresser aux chambres sans droit d’initiative en matière législative, également un droit à
demander une nouvelle délibération de la loi et la promulgation des lois. Cette promulgation
qui est une compétence liée par la volonté générale qu’exprime la loi.

Ainsi démuni, tout ce que le Président de la République peut espérer, c’est exercer une
certaine influence sur le jeu politique en usant de sa seule expérience et de sa personnalité.
Ce sera vraiment la cas, V Auriol et R. Coty, ce sont des hommes d’expérience, qui ont une
certaine personnalité et ils vont effectivement exercer une sorte de magistrature d’influence
au sein de l’exécutif. Ils vont user de cela pour essayer de limiter au maximum l’instabilité
ministérielle qui va caractériser la IVème République.
 en usant des maigres attributions qu’il lui reste, et en particulier parmi ces maigres
attributions le Président de la République a le pouvoir de désigner le Président du conseil.

Ce pouvoir est en effet amoindri comparé à la IIIème République.

Au terme de l’article 45 de la Constitution, le Président de la République n’a plus qu’un droit


de présentation d’un candidat, Président du conseil, donc il propose un nom et l’intéressé
doit obtenir l’investiture de l’Assemblée nationale, alors le président pourra le nommer. Il
appartiendra au Président de la République de faire une propitiation judicieuse pour être
quasiment sûr que le candidat puisse obtenir l’investiture de l’Assemblée nationale.

Autre influence sur le jeu politique, les Président de la République de la IV ème République
pourront dans certains cas refuser la démission de certains Présidents du conseil, possible
lorsque ces derniers ne seront pas constitutionnellement renversés, c’est-à-dire lorsque les
conditions fixées par la Constitution ne seront pas remplies. Cela se produira assez souvent
sous la IVème République et ce refus sera destiné à limiter l’instabilité ministérielle.

 Autre moyen du Président de la République d’exercer une influence sur le jeu politique,
comme sous la IIIème République, le Président de la République sous la IVème République
préside le Conseil des ministres sur la base de l’article 32 de la Constitution. Le Président de
38
la République pourra exercer une magistrature d’influence ou de mémoire politique parce
qu’il est élu pour 7 ans et ce septennat fait que c’est le seul élément stable de l’exécutif.
Sous la IVème République, la durée moyenne du gouvernement sera de 8 à 9 mois et donc il
sera en mesure, étant donné sa longévité, de rappeler l’aptitude ou la décision de tel
gouvernement précédemment donc de bien conseiller le gouvernement en place et le
Président du conseil. Il va donc devenir l’allié du président du conseil, son meilleur conseiller.

On a une situation paradoxale sous la IVème République, c’est-à-dire que selon la Constitution
comparée à la IIIème République, le Président de la République perd l’essentiel des pouvoirs
qu’il avait au profit du Président du conseil et pourtant il devient son principal allié.

2. Le Président du conseil
À la base, c’était une coutume constitutionnelle dans la nouvelle Constitution. Les auteurs de
la Constitution ont voulu s’inspirer du Premier ministre britannique en instituant un véritable
chef de gouvernement, un premier ministre à l’anglaise, capable de remédier à l’instabilité
ministérielle telle que connue sous la IIIème République.

S’agissant de la Constitution, les ministres qui l’entourent sont choisis par le Président du
conseil sur la base des articles 45 et 46. Le Président de la République n’a plus que le pouvoir
formel de les nommer par décret.
Par ailleurs, l’article 47 de la Constitution transfère au Président du conseil les compétences
exécutives détenues par le Président de la République de la IIIème République. Par
conséquent, outre sa qualité de chef de gouvernement, le Président du conseil devient le
seul chef de l’exécutif. Ainsi, par exemple, c’est lui qui est le seul titulaire du pouvoir
réglementaire général pour l’exécution des lois, aussi c’est lui qui est chargé de la
nomination aux emplois civils et militaires de l’État sauf exceptions. C’est lui qui dirige les
forces armées et c’est encore lui qui négocie les traités internationaux.

Il en résulte une situation complexe pour le Conseil des ministres.


On a la situation suivante au sein du conseil des ministres qui est vraiment l’enceinte clef de
l’exécutif : ce n’est pas le Président du conseil qui préside le Conseil des ministres c’est le
Président de la République qui préside le Conseil des ministres mais c’est le chef du
gouvernement qui va fixer l’ordre du jour en Conseil des ministres et qui le convoque.

En outre, compte tenu de ses nouvelles attributions exécutives, c’est le Président du conseil
qui signe les décrets en Conseil des ministres, le chef de l’état se bornant à donner un avis
généralement, cela est vrai sauf pour certaines nominations ou pour la dissolution de
l’assemblée nationale pour lesquelles le Président de la République a un pouvoir de décision
mais ce pouvoir de décision là est purement formel. Même dans ces derniers cas, c’est le
Président du conseil qui a la réalité de la décision. Enfin, il contresigne tous les actes du
Président de la République.

En ce qui concerne la collaboration avec le Parlement, le Président du conseil peut


demander au Président l’Assemblée nationale sa convocation en session extraordinaire et
également la Constitution reconnait officiellement au Président du conseil le droit d’initiative
législative.

39
§2 : Les rapports entre les pouvoirs
Ces rapports traduisent une nette prééminence du Parlement et en particulier de
l’Assemblée nationale sur l’exécutif, en ce qui concerne la collaboration des pouvoirs mais
aussi en ce qui concerne les moyens d’actions réciproque. Cela en dépit de la rationalisation
du parlementarisme, l’idée d’une rationalisation du parlementarisme est normalement
guidée par un souci de renforcer l’exécutif, de rétablir un équilibre mais ce n’est pas le cas
ici.

A. Une large collaboration des pouvoirs qui défavorise l’exécutif


On n’est pas dans un régime d’équilibre, on n’est pas dans le schéma de régime
parlementaire moniste.

S’agissant de la collaboration dans la fonction législative. Le Président du conseil partage


avec les parlementaires l’initiative des lois (article 14 de la Constitution), mais les projets de
lois venant du chef du gouvernement sont bien moins traités que les propositions de loi. En
effet, la discussion devant chaque chambre fait d’abord intervenir des commissions, or les
commissions ont le pouvoir de rédiger un nouveau texte. Donc, le projet de proposition
passe d’abord par des commissions, et la commission va pouvoir examiner ce texte et
rédiger un texte nouveau à partir de là. Et c’est le texte de la commission qui sera ensuite
mis en discussion en séance plénière.
Ce dispositif est particulièrement gênant pour les projets de loi émanent de l’exécutif et de
son chef. Ces projets seront quasiment tout le temps remaniés par la commission.

Par ailleurs, le Président de la République peut demander une nouvelle délibération aux
assemblées et il promulgue les lois. Seulement, à propos de la promulgation des lois, si le
Président de la République ne promulgue pas dans les délais fixés par la Constitution, le
Président de l’Assemblée nationale se substitue au Président de la République.

La collaboration dans la fonction exécutive fait encore une large place à l’Assemblée
nationale. Par exemple : la Constitution nous dit que le Parlement autorise la déclaration de
guerre mais c’est là encore l’Assemblée nationale qui a un poids plus important, l’assemblée
nationale à cet égard émet un vote tandis que le Conseil de la république n’émet qu’un avis.
En matière budgétaire (loi de finance), ce n’est pas l’exécutif mais c’est bien l’Assemblée
nationale qui a l’initiative des dépenses, normalement c’est le pouvoir exécutif qui prépare
le projet de loi de finance.

B. La rationalisation des moyens d’action politiques réciproque


Sous la IIIème République, du fait de la nature coutumière de la présidence du conseil, les
moyens d’actions du Parlement sur le gouvernement était régis par les règlements intérieurs
des assemblées parlementaire.
La Constitution de 1946 organise très précisément les moyens d’action réciproque du
gouvernement. Le premier objectif est destiné à lutter contre l’instabilité ministérielle et on
va constater qu’il existe une procédure d’investiture très précise et une procédure de mise
en jeu de la responsabilité politique. La Constitution veut aussi se prémunir des abus de
l’exécutif, ceci pour lutter contre l’instabilité ministérielle, mais il a aussi une organisation
minutieuse de la procédure de dissolution de l’Assemblée nationale, là pour éviter des abus
éventuels de l’exécutif.

40
1. L’investiture
Par cette procédure d’investiture destiné à limiter l’instabilité gouvernementale, les
rédacteurs de la Constitution ont voulu renforcer la position du Président du conseil face à
l’Assemblée nationale.

Au terme de l’article 45, le Président de la République va désigner après consultation


d’usage le Président du conseil. Mais ce n’est qu’un droit de présentation d’un candidat rien
de plus. En effet, l’intéressé ne sera finalement pas nommé par le Président de la République
qu’après avoir obtenu l’investiture de l’Assemblée nationale. Donc, on a une désignation en
trois étapes, le Président de la République intervient en amont et en aval de l’Assemblée, il
propose un nom. L’intéressé se présente alors à l’Assemblée nationale qui lui remet une
investiture, et cette investiture obtenue le Président de la République va prendre le décret
de nomination pour enregistrer la décision de l’Assemblée nationale.

Et le Président du conseil est investi seul par l’Assemblée nationale, après avoir communiqué
à cette assemblée son programme politique. L’Assemblée nationale va accorder sa
confiance.

Cette investiture d’après le texte de la Constitution, article 45, est acquise à la majorité
absolue des membres composant l’Assemblée nationale ce qui est donc une majorité forte.
L’Assemblée nationale compte à l’époque 637 députés et donc la majorité absolue c’est 314.
Les absents, les abstentionnistes refusent l’investiture, cette exigence de majorité est censée
garantir la stabilité du futur cabinet que va former ensuite le Président du conseil et cette
majorité est censée donner l’autorité au Président du conseil et doit donc garantir la stabilité
du futur cabinet.

2. La responsabilité politique
Elle est régie par les articles 49 et 50 de la Constitution, l’idée des constituants c’est de
garantir au mieux la stabilité ministérielle. Pour ce faire deux procédures de mise en jeu de
la responsabilité politique :

- La motion de censure : est déposée par un député de l’Assemblée nationale puis elle
fait l’objet d’un vote au scrutin public mais le vote a lieu après l’écoulement d’un
délai de réflexion de 24h. Si la motion de censure recueille la majorité absolue des
membres composant l’Assemblée nationale le gouvernement est renversé.

- La question de confiance : s’agissant de la question de confiance, sa rationalisation


par la Constitution va tenir compte de l’expérience de la IIIème République. Seul le
Président du conseil peut poser la question de confiance et ceci qu’après délibération
du Conseil des ministres. En outre, l’article 49 exige là encore un délai de réflexion
avant le passage au vote sur la question de confiance, ce délai était d’un jour franc*
avant la réforme de 1954, et il est réduit à 24h à partir de la réforme. Si la confiance
est refusée par la majorité absolue des membres composant l’Assemblée nationale le
gouvernement est renversé.

* un jour franc est un peu plus long que 24h : si la question de confiance est posée à 14h il
faudra attendra 00h du jour suivant, 10h de plus il faut rajouter.

41
9/02/2024

3. La dissolution
Les rédacteurs de la Constitution ont été marqués par le souvenir de la dissolution de Mac
Mahon. L’article 51 de la Constitution de 1946 pose des conditions très strictes au
déclenchement de la dissolution. Tout d’abord, la dissolution de l’assemblée nationale ne
peut pas être prononcée au cours des 18 premiers mois de la législature. L’idée étant de
laisser le temps à cette législature de consolider sa majorité. Passé ce délai, l’assemblée ne
peut être dissoute que si au cours d’une même période de 18 mois consécutifs, deux crises
gouvernementales sont survenues dans les conditions prévues par la Constitution, c’est-à-
dire la chute d’un gouvernement à la suite d’un vote d’une motion de censure ou du rejet
d’une question de confiance et dans les cas aux conditions de la Constitution c’est-à-dire à la
majorité absolue des membres composant l’assemblée nationale.

Section 3 : L’échec de la réforme du parlementarisme


Supposons une assemblée de 500 députés : la majorité absolue ce sera la moitié plus une
c’est-à-dire 251.
La majorité absolue des présents (majorité simple) : s’il n’y a que 400 députés présents, ce
sera 201.
La majorité absolue des suffrages exprimés (majorité simple) : s’il n’y a que 400 députés
présent, au cours du vote, 100 s’abstiennent, ce sera 151.

Dans la pratique, il y a eu un détournement des pratiques rationalisées, cela va se traduire


par un retour aux dérives de la IIIème République. Il y aura plusieurs tentatives de réactions.
La plus importante est le projet Félix Gaillard

§1 : Le détournement des procédures rationalisées


Les pratiques qui vont se développer vont être appelées la pratique de la double investiture
et la pratique de la pseudo question de confiance.

A. La pratique de la double investiture


Cette procédure d’investiture telle que prescrite par la Constitution fut un échec très
rapidement. Le tout premier président conseil Paul Ramadier établira la pratique de la
double investiture selon laquelle le président du conseil une fois investit par l’assemblée
revenait une deuxième devant l’assemblée nationale pour lui poser la question de confiance
sur la question de son gouvernement.
Ce qui provoqua des crises à répétition, certains présidents du conseil étaient renversés à ce
second scrutin parce qu’un certain nombre de députés souhaitaient faire partie du
gouvernement pour espérer être choisi dans le prochain.
On va tenter de corriger cette dérive on rationalisant cette procédure. Cette rationalisation
est opérée par la réformette, la loi constitutionnelle du 7 décembre 1954. Elle supprime
l’investiture personnelle qui portait sur le président du Conseil et donc il commençait par
former son cabinet et en donner connaissance à l’assemblée nationale avant de se présenter
devant elle pour obtenir l’investiture.
En outre, la réforme de 1954 prévoit désormais que cette investiture sera accordée à la
majorité simple, et en l’occurrence la majorité absolue des présents.

42
B. La pratique de la pseudo question de confiance
D’après le texte de 1946, il fallait une majorité absolue pour renverser le gouvernement.
Dans la pratique, la majorité simple la plus courte suffira car elle suffisait à refuser des
projets de lois et donc un gouvernement pouvait se retrouver paralysé mais sans être
renversé constitutionnellement. C’est ainsi que les présidents du conseil dépourvus de tout
moyen de mettre en œuvre leur politique, donnait quand même leur démission au chef de
l’état.
La question de confiance était posée sur un projet de loi auquel le gouvernement tenait
beaucoup. Les députés votaient et le texte pouvait être refusé mais il n’y avait pas
constitutionnellement retrait de la confiance. Mais le gouvernement présentait sa démission.
De nombreuses crises ministérielles résulteront de la démission volontaire des
gouvernements qui n’étaient pourtant pas renversés constitutionnellement.
Le président était parfois en mesure de refuser cette démission dans de telles circonstances.

§2 : Le retour aux dérives de la IIIème République


On retrouve comme sous le régime précédent, l’instabilité ministérielle chronique. On
constate à nouveau le rôle déterminant des partis politiques dans l’évolution du régime ainsi
que de nouvelles tentatives de renforcement de l’exécutif.

A. L’instabilité ministérielle
Cette instabilité est principalement due à la paralysie du droit de dissolution. En effet, l’article
51 conditionne le droit de dissolution à deux crises ministérielles en 18 mois consécutifs.
Cette exigence fait que l’article 51 va laisser finalement la maitrise des conditions de
dissolution à l’assemblée nationale dans la pratique.

En effet, cette paralysie s’est produite pour deux raisons :


- dans la pratique, la procédure de la motion de censure n’est jamais allée à son
terme ou rarement utilisée car l’assemblée avait d’autre moyens de provoquer la chute du
gouvernement.
- s’agissant de la question de confiance, il suffisait à l’assemblée nationale de doser
ses voix, c’est le recours au vote calibré qui consistait pour les députés à refuser le texte à la
majorité simple sans que le gouvernement soit constitutionnellement renversé.

Fin 1955, Edgard Faure, président du conseil, pourra recourir à la dissolution, le 1er décembre
1955. Les conditions à ce moment-là seront remplies : deux gouvernements avaient été
renversé à la majorité absolue dans moins de 18 mois consécutifs. Le premier le 5 février
1955 et le second le 29 novembre 1955.
En 12 années de régime, il y a aura 21 présidents du conseil.

B. Le jeu des partis politiques


L’erreur des rédacteurs de la Constitution de 46 a été de croire que le président du conseil
pouvait être fort, chef d’une majorité parlementaire. Or, la cohérence des coalitions n’a
jamais existé sous la IVème République.

43
Les querelles entre partis politiques auront pour conséquences non seulement l’absence de
majorité constitutionnelle pour retirer explicitement la confiance au gouvernement mais
aussi l’absence de majorité plus courte pour adopter des projets de lois.
En outre, l’instabilité des coalitions a eu des conséquences au sein même des
gouvernements. Il suffisait que la politique suivit par le gouvernement déplaise à un seul
parti membre des coalitions pour que les ministres membres de ce parti se désolidarisent et
démissionnent (exemple : ministres communistes en 1947).

C. L’extension des compétences de l’exécutif


Sous la IVème République, le critère de la loi est le même c’est le critère organique. La loi c’est
l’acte juridique normatif votée par le Parlement. Par conséquent, le domaine de la loi est
illimité, le Parlement peut légiférer en toute matière. Quant au gouvernement, il est
cantonné à la compétence règlementaire générale qui est le pouvoir d’application des lois
par voie de décrets d’application des lois.
Le Parlement et en particulier l’assemblée nationale est divisée par des querelles partisanes
et il fut nécessaire au gouvernement d’obtenir des moyens juridiques d’agir.
Cependant, l’article 13 interdit la pratique des décrets-lois de la IIIème République. Par
conséquent, on a imaginé de nouveaux artifices pour étendre les moyens d’action du
gouvernement.
Le procédé dit de la loi cadre : par lequel le législateur se contentait d’adopter une loi qui
contenait des principes essentiels en termes généraux pour laisser ensuite au gouvernement
le soin de les compléter.
Le procédé de la délégalisation : elle est initiée par une loi du 17 août 1948 dite loi André-
Marie. Par cette loi, le Parlement acceptait de retirer le caractère législatif à un certain
nombre de lois existantes. Les textes en question restaient en vigueur mais avaient
désormais la valeur de décrets. Le gouvernement pouvait ainsi modifier ses textes par
d’autres décrets. La délégalisation était sans limitation de délai. Au bout d’un moment, le
Parlement pouvait décider de voter une nouvelle loi abrogeant la loi de délégalisation.

La loi de 1948 ne fut pas la seule, suivirent d’autres lois de délégalisation et outre ces deux
procédés, malgré la prohibition de l’article 13, la pratique des lois de plein pouvoir va être à
nouveau utilisée.

Le gouvernement demanda au Conseil d’état son avis pour savoir dans quelles mesures il
était possible de concilier la nécessité d’intervenir en matière législative. Le Conseil d’état
rend l’avis du 6 février 1953 et dans cet avis le Conseil d’état rappelle que les décrets-lois
sont formellement interdits. Concernant, la délégalisation, il l’admet mais à deux conditions :
il ne faut pas qu’elle touche des matières qui sont réservées à la loi par la Constitution et la
tradition républicaine + cette délégalisation doit aussi être précise et limitée. Le Conseil
d’état, dit que pour les matières réservées au législateur parlementaire, le procédé de la loi
cadre est possible.
Par la suite, ces règles ne seront pas respectées.
§3 : Le projet Félix Gaillard
L’échec du régime est attribué à l’inadaptation des institutions et nombreux sont ceux qui
estiment nécessaire de réviser la Constitution après celle de 1954. Il y aura plusieurs
propositions en ce sens.

44
Le projet Félix Gaillard est déposé le 16 janvier 1958 et sera adopté par l’assemblée le 21
mars mais le Conseil de la république n’aura pas le temps de l’examiner car la IVème
République a pris fin avant. L’objectif de ce projet est d’améliorer la rationalisation du régime
parlementaire en modifiant le mécanisme du vote de confiance et en redonnant à l’exécutif
un pouvoir de dissolution effectif.

A. Le vote de confiance
Les articles 49 et 40 sont modifiés et consistent maintenant à établir un lien entre la question
de confiance et la motion de censure. Une fois la question de confiance posée sur un texte,
l’opposition devait répondre par le dépôt d’une motion de censure. La motion de censure
devait comporter un programme de gouvernement et indiquer le nom d’un candidat
président du conseil, cela ressemble à la motion de censure constructive en Allemagne.
Le scrutin avait lieu alors sur la motion de censure et devait remporter la majorité absolue
des membres de l’assemblée. Les absents et les abstentionnistes étaient réputés contre la
motion de censure.
Si aucune motion de censure n’était déposée ou n’était pas votée, le texte sur lequel le
gouvernement avait posé la question de confiance, le texte était considéré comme adopté
sans vote.

B. La dissolution
Cette dissolution était facilitée en multipliant les procédures. Le projet va concevoir deux
procédure pour la dissolution.
- Première procédure : la dissolution pouvait être décidée en Conseil des ministres sur
la proposition du président du conseil et prononcée par décret présidentiel contresigné. Les
deux limites : attendre l’expiration des 18 premiers mois de la législature + le gouvernement
ne doit pas être préalablement mis en minorité par l’adoptions d’une motion de censure.
- Deuxième procédure : la dissolution pouvait être prononcé par décret du président
de la république contresigné après un simple message adressé à l’assemblée et cela dans
deux cas : deux crises ministérielles en moins de 18 mois ou dans l’impossibilité de constituer
un nouveau gouvernement (plusieurs refus d’investiture successifs).

Malgré l’intérêt de cette réforme, on pouvait douter de son efficacité dans la pratique dès
lors que l’on ne touchait pas au système des partis politiques, on ne changeait pas les modes
de scrutin.

45
Titre 2 : La IVème République
Introduction
Section 1 : Les conditions politiques et juridiques de la nouvelle Constitution
§1 : Les conditions politiques
Le conflit algérien met en évidence l’inefficacité de la IV République ; La France est divisée
entre partisans de l’indépendance de l’Algérie et ceux qui défendent une Algérie française.
Les partisans de l’Algérie française sont l’armée et une partie de la police.
La France est au bord de la guerre civile.
Pour succéder à Félix Gaillard, le président de la République pressent de multiples
personnalités mais sans succès. Pierre Pflimlin est institué le 13 mai 1958. Les partisans de
l’Algérie française manifestent à Alger contre cette institution et des généraux vont constituer
un Comité de Salut Public.
Ce Comité de Salut Public est une rupture et le nouveau président du Conseil n’est pas du
tout en mesure d’éviter le risque d’un coup d’état militaire. Son gouvernement n’est pas
obéit en Algérie ou en métropole.
Depuis 1946, le Général de Gaulle a quitté la vie politique. Il se déclare prêt à assumer le
pouvoir s’il devait être appelé. Il fait une conférence de presse le 19 mai 1958 et paraît
comme l’homme de la situation (hostilité au régime de la IVème République). L’opinion
publique est de son côté. Pour calmer le jeu à Alger, il laisse croire qu’il est pour l’Algérie
française mais est en fait convaincu du caractère inéluctable de l’indépendance de l’Algérie.
René Coty va présenter de gaulle comme président du conseil. Coty adresse un message à
l’Assemblée nationale et disant qu’il démissionne si De Gaulle n’est pas choisi. Ce chantage
va porter ses fruits puisque le 1er juin 1958, le général De gaulle et son gouvernement
obtiennent l’investiture de l’assemblée nationale et c’est ainsi qu’il revient au pouvoir en
étant le dernier président du conseil de la IVème République.
Il avait posé comme condition de son retour, l’élaboration d’une nouvelle constitution

Le 2 juin, le général de gaulle fait adopter 3 textes par le Parlement :


- loi de plein pouvoir permettant à son gouvernement de prendre par voie
d’ordonnance les mesures nécessaires pour établir l’ordre public dans le pays.
- loi constitutionnelle qui modifie la procédure de révision de la Constitution de 1946
- résolution par laquelle les deux assemblées acceptaient de se mettre en congé

§2 : Les conditions juridiques


La loi constitutionnelle du 3 juin 1958 : elle opère un transfert du pouvoir constituant au
profit du gouvernement. Elle comporte des conditions de fond et de forme qui encadrent la
marge de manœuvre du gouvernement pour éviter toute dérive arbitraire.

A. Les conditions de fond


La loi constitutionnelle du 3 juin 1958 pose 5 principales que la Constitution doit respecter :
le suffrage universel comme source de pouvoir, la séparation des pouvoirs, la responsabilité
du gouvernement devant le Parlement, l’indépendance de l’autorité judiciaire et l’association
de la Républiques avec les peuples d’outre-mer.
Le futur régime devait nécessairement une démocratie parlementaire.

46
B. Les conditions de forme
Elles sont au nombre de 3 : la Constitution sera révisée selon les principes précités par le
gouvernement investit le 1er juin (du général De Gaulle), création d’un comité consultatif
constitutionnel (Parlement en réduction, 2/3 de parlementaires, 1/3 personnalités choisies
par le gouvernement) et le projet de révision sera soumis à référendum (De gaulle limité par
le Comité consultatif constitutionnel et le peuple).

13/12/2024

Section 2 : les conditions de rédaction et d’adoption de la Constitution


Contrairement à la tradition française, la rédaction de la Constitution de la Vème n’a pas été le
fait d’une assemblée constituante. Son adoption reprend une formule utilisée en 1946 à
savoir la ratification par référendum.

§1 : Une rédaction originale


Le texte procède de différentes sources d’inspiration. Cette rédaction va faire intervenir
différents organes.

A. Les sources d’inspiration de la Constitution


Elles sont au nombre de trois.

1.La pensée de Raymond Carré de Malberg


C’est la plus ancienne puisqu’elle remonte au début du XXème siècle. Elle est entretenue par
un courant doctrinal jusqu’à arriver à la moitié du XXème siècle au moment de la seconde
guerre mondiale où un de ses juristes va exposer ces conceptions constitutionnelles au
Général de Gaulle, il s’agit de René Capitant. Ce courant doctrinal critique vivement la
pratique du régime parlementaire que l’on a connu en France, c’est-à-dire le
parlementarisme absolue ou encore la « souveraineté parlementaire ». Par conséquent,
l’idée est d’empêcher que cette pratique ressurgisse. Pour cela, il faut essayer de compenser
cette tendance en redonnant la parole au peuple, c’est-à-dire au souverain lui-même, li
permettre de s’exprimer directement et cela en instituant le référendum (constitutionnel et
législatif).
Un autre levier pour éviter le monopole du Parlement : il faut instituer un organe fort
capable d’arbitrer entre les pouvoirs.

2.La pensée du Général de Gaulle


Cette pensée sera formulée pour la première fois au moment où la Constitution de la IV ème
est rédigée dans le discours de Baïeux prononcé le 16 juin 1946. Par ce discours, il va
indiquer les grandes lignes du schéma constitutionnel qu’il préfère. A l’époque, ce discours
n’aura pas d’influence sur la classe politique, il ne sera pas entendu.
C’est en grande partie la trame de la Constitution de la Vème Constitution.
Il nous dit qu’il n’est pas question de mettre fin au régime parlementaire avec toutefois des
nuances. Il défend un bicamérisme pas parfaitement égalitaire. Le Parlement pris dans sa
globalité doit pouvoir assumer pleinement sa fonction législative mais dans un contexte de
parlementarisme rationnalisé.
Pour le Général de Gaulle, c’est surtout l’absence d’un chef fort qui explique la chute de la
IIIème République. Pour que cela ne se reproduise plus jamais il faut reformer les institutions

47
en ce sens. Cela va donner l’article phare la fonction présidentielle c’est-à-dire l’article 5 : le
chef de l’état devra être l’arbitre nationale capable de garantir la continuité de l’état et
l’indépendance de l’état. Il doit avoir les moyens d’assumer cette fonction d’arbitrage. Cela va
dépendre à la fois de son statut et de ses attributions.
S’agissant de son statut, le Général de Gaulle dit que le président devra être au-dessus du jeu
politique quotidien, au-dessus des contingences, donc il devra indépendant des partis
politiques. Cela ne sera possible que s’il bénéficie d’une légitimité incontestable. Par
conséquent, il faut que le Président de la République soit élu par un corps politique plus large
que le Parlement et ses combinaisons partisanes. Cela donnera le futur article 6 de la
Constitution.
Ne dépendant plus du Parlement par sa désignation, le Président doit avoir aussi des
attributions importantes. Cela donnera le futur article 19 de la Constitution. C’est au
Président de la République de pouvoir choisir effectivement le chef du gouvernement. L’idée
est que l’exécutif doit procédé exclusivement du chef de l’État. Même si le premier ministre
est pris dans la majorité parlementaire, il n’est plus question d’investiture par une des
chambres du Parlement. Le gouvernement devra représenter le chef de l’État donc ce
gouvernement sera responsable devant le chef de l’État (futur article 8 de la Constitution). Si
le gouvernement, choisi par le Président de la République, est renversé, le droit de
dissolution doit être logiquement un pouvoir propre du chef de l’État. C’est lui et lui seul qui
en dispose pleinement, sans contreseing. Ce sera le futur article 12 de la Constitution. La
dissolution doit être un des principaux instruments de la fonction d’arbitrage du Président de
la République. Par la dissolution, il va inviter le peuple à faire connaître sa décision
souveraine pour trancher à un conflit entre l’exécutif et le Parlement.
En période de circonstances exceptionnelles, lorsque la patrie est en danger, c’est au
Président de la République d’être le garant de l’indépendance nationale et de disposer à
cette fin de pouvoirs exceptionnels. Cela donnera le futur article 16 qui va forcer le Président
à assurer sa tâche.
Avec un Président de la République indépendant du Parlement, un gouvernement
responsable devant le Parlement et le chef de l’État, le régime s’inspire du régime
parlementaire dualiste mais largement rénové.

3.L’apport des autres membres du gouvernement


Le gouvernement qui est chargé par la loi constitutionnelle du 3 juin de rédiger une nouvelle
Constitution comprends des figures importantes : Michel Debré (ministre de la justice), Félix
Gaillard, Pierre Pflimlin et Guy Mollet (anciens présidents du Conseil).
Ils vont repenser la rationalisation du parlementarisme. L’idée étant notamment de ne plus
commettre les erreurs des rédacteurs de la Constitution de 1946.
Michel Debré est à l’origine d’une réduction du domaine de la loi qui contrairement au
régime précédent ne sera plus définie sur un critère organique. La loi sera définie sur la base
d’un double-critère : critère organique et critère matériel. Le législateur parlementaire ne
pourra plus légiférer que dans un certain nombre de domaines. Il y a la consécration dans la
Constitution d’un pouvoir règlementaire autonome, c’est-à-dire que le pouvoir exécutif va
avoir un certain pouvoir normatif initial. Cette délimitation sera garantie par le contrôle du
Conseil constitutionnel. On lui doit aussi les principaux mécanismes de la procédure
législative permettant au pouvoir exécutif d’avoir une belle maitrise de cette procédure
législative.

48
Quant aux anciens présidents du Conseil de la IVème République, ils vont contribuer à la
réforme des procédures de mise en jeu de la responsabilité politique du gouvernement,
c’est-à-dire règlementation de la question de confiance et de la motion de censure. Ils
contribuent à une réforme du parlementarisme rationnalisé. Futurs articles 49 et 50 de la
Constitution. Ces différents mécanismes seront mis au point en 1958 avec l’idée que les
gouvernements de la Vème République ne bénéficieraient pas d’une majorité stable au
Parlement (élections législatives : scrutin uninominal à deux tours). Or, les gouvernements
bénéficieront en plus de majorités disciplinées même s’il s’agira souvent de majorités de
coalition. Dans ce cas, cela va renforcer l’effet encadrant de ces procédures. Le Parlement
sera donc très limité.

B. L’intervention de divers organes


Un avant-projet est rédigé tout d’abord par un comité d’experts réunit autour de Michel
Debré. Il sera ensuite soumis à un organe politique, il s’agit d’un comité interministériel
présidé par le Général de Gaulle. Ce comité comprend des ministres et représente les
différentes forces politiques avec lesquelles le Général de Gaulle est obligé de compter.
Cet avant-projet sera ensuite adoptée en Conseil de cabinet, donc en-dehors de la présence
du Président de la République (René Coty).
Cet avant-projet est transmis au Comité consultatif constitutionnel pour recueillir son avis. Le
projet est modifié en tenant compte en parti de l’avis de ce Comité. Il sera ensuite soumis au
Conseil d’État, organe exécutif de conseil composé de juristes professionnels, qui va proposer
des amélioration d’ordre techniques.
Le projet définitif sera adopté en Conseil des ministres le 3 septembre 1958. Le lendemain
s’ouvrait la compagne pour le référendum constituant.

§2 : L’adoption par référendum


Ce référendum va dépasser l’approbation de la Constitution. En effet, il s’agit aussi pour les
citoyens de manifester leur confiance au Général de Gaulle. Les forces politiques existantes à
l’époque appellent à voter ‘oui’ et certaines à voter ‘non’.
Les partis politiques qui appellent à voter ‘oui’ sont la SFIO, le parti radical, les radicaux
socialistes, le MRP et les gaullistes. Le parti communistes français et le parti socialiste
autonome et certaines personnalité de gauche comme Pierre Mendes France ou François
Mitterrand appellent à voter contre.
Le référendum se déroule le 28 septembre 1958, près de 80% des électeurs vont voter ‘oui’.
Dans les territoires d’outre-mer, le ‘oui’ va l’emporter encore plus massivement, entre 90 et
95% des voix et le score maximal est obtenu en Algérie avec 96% des voix.
La Constitution de la Vème République est promulguée le 4 octobre 1958. Suite à cela, le
gouvernement est autorisé par l’ancien article 92 de la Constitution à prendre des
ordonnances ayant tout de suite force de loi pour mettre en place les nouvelles institutions.
C’est une habilitation constitutionnelle directe.
Les élections de la chambre basse (assemblée nationale) se déroulent fin novembre au
scrutin uninominal majoritaire à deux tours et amènent une majorité de coalition (nouveau
UNR, ceux qui avaient appelés à voter ‘oui’).
Les élections sénatoriales se dérouleront un peu plus tard.
L’élection présidentielle a lieu le 21 décembre 1958. Le Général de Gaulle est élu au suffrage
universel indirect dès le premier tour en obtenant 81% des voix. Il nomme Michel Debré
comme premier ministre.

49
La Constitution de la Vème République tire les leçon du régime précédent en intégrant des
apports positifs. Elle s’inscrit dans la tradition républicain et parlementaire. Elle présente des
traités originaux.

La première originalité est le mode d’aménagement de la séparation des pouvoirs. Cela a fait
l’objet d’interrogations puisqu’il s’est avéré impossible de le classer dans les catégories
existantes. Régime parlementaire dualiste avec une prépondérance de l’exécutif. Certains
traits, en particulier le mode d’élection du Président de la République, s’inspirent du régime
présidentiel. Si on y ajoute la pratique institutionnelle, on constate un prépondérance accrue
au sein de l’exécutif du Président de la République.
Le texte, par certains de ses articles, donne lieu à une lecture présidentialiste. Cette
ambivalence peut-être été une des plus sûres garanties de sa durée et cela explique aussi le
consensus dont ce régime a fait l’objet pendant de nombreuses années.

La seconde originalité est de poursuivre et d’amplifier l’œuvre républicaine des III ème et IVème
République avec enfin l’édification d’un état de droit substantiel.

Par conséquent, cette nouvelle Constitution se distingue par l’instauration d’une


prépondérance de l’exécutif ce qui implique corrélativement un abaissement du Parlement.
Elle institue un organe spécifique chargé de garantir l’état de droit : le Conseil
constitutionnel.

50
Chapitre 1 : La prépondérance de l’exécutif
L’exécutif est composé d’un Président de la République et d’un gouvernement sachant que
les rapport entre ces deux éléments de l’exécutif ne correspondent à rien de connu jusqu’ici.
En 1958, on parlera d’un parlementarisme dualiste rénové mais la pratique institutionnelle
va encore accroître l’originalité de ce phénomène.

Section 1 : Le Président de la République


C’est l’organe le plus revalorisé conformément au souhait du Général de Gaulle. Cette
prééminence n’est pas seulement le fait des nouveaux pouvoirs présidentiels mais c’est aussi
le fait du statut du chef de l’État.

§1 : Le statut du chef de l’État


A. L’élection du Président de la République
Sous les IIIème et IVème République, il était élu par les assemblées. Sous la Vème République, le
mode d’élection mis en place en 1958 correspond à un collège électoral présidentiel
beaucoup plus marge que le Parlement pour éviter que le Président soit l’otage des partis
politiques. Cela rapproche l’élection présidentielle de celle des sénateurs. Il comprends 80
000 grands électeurs : les parlementaires, les conseillers généraux et les représentants des
conseils municipaux.
Il est élu au suffrage universel indirect.

Il y a plus d’habitants dans l’empire colonial que dans la métropole. Dans la perspective de la
décolonisation, le suffrage universel direct aurait posé problème pour la représentativité du
Président de la République.
Une révision constitutionnelle sera adoptée par référendum, promulguée le 6 novembre
1962 et modifie les articles 6 et 7 de la Constitution. Le Président de la République sera
désormais élu au suffrage universel direct et au scrutin uninominal majoritaire à deux tours.
Cette réforme est appliquée pour la première fois pour l’élection présidentielle de 1965 et va
avoir des conséquences déterminantes sur le plan politique et institutionnel.

1.Les causes de la réforme de 1962


La première cause a été formulée par le Général de Gaulle au cours d’une conférence
presse : c’est la volonté d’assurer l’indépendance organique totale de l’exécutif par rapport
au Parlement. L’élection du chef de l’État doit lui assurer une liberté totale par rapport au
Parlement et aux partis politiques. Les rapports avec le Parlement vont se détériorer dans les
années 60. Le Parlement va manifester son désaccord avec le Président de la République sur
plusieurs points.
Le Président de la République va choisir un nouveau premier ministre et ne sera pas du tout
un parlementaire mais pas un politicien : Georges Pompidou.
La politique européenne très méfiante du Général de Gaulle va également déplaire.
Le Président de la République réalise alors qu’il lui faut prouver sa légitimité populaire pour
pouvoir s’opposer avec succès à l’Assemblée nationale car elle est élue au suffrage universel
direct.
L’attentat du Petit-Clamart du 22 août 1962 : il s’agit d’un commando de soldats de l’armée
pro algérie-française qui ne digèrent pas l’indépendance de l’Algérie réalisée par le Général
de gaulle. Cet attentat est dirigé par Jean Bastien-Thiry. Ces risques d’attentat soulève le
problème de la légitimité de ses successeurs qui n’ont pas son aura ou son passé historique.

51
Il faut qu’ils soient entièrement en mesure et complètement obligé d’assumer le pouvoir
suprême. C’est le suffrage universel direct qui donnera à ses successeurs l’autorité suffisante.
Le projet de révision constitutionnelle sera soumis directement à référendum suivant une
procédure dont la constitutionnalité est des plus contestables. C’est l’article 11 qui sera
utilisé et non l’article 89.
D’abord, il s’adresse au peuple souverain en annonçant ce projet de révision par une
allocution télévisée. Quelques jours plus tard, il annonce aux assemblées qu’il va faire
approuver ce projet par référendum. L’Assemblée nationale, en réponse, renverse le
gouvernement du Georges Pompidou par une motion de censure adoptée le 4 octobre 1962.
Jusqu’à présent, c’est le seul gouvernement de la Vème République à avoir été renversé. Le
projet de révision est adopté le 22 octobre 1962 à la majorité de 62% des suffrages
exprimées. La loi constitutionnelle est promulguée le 6 novembre. En conséquence, le
Général de Gaulle rappelle Pompidou pour former un nouveau gouvernement.

2. Les conséquences de la réforme de 1962


a. Les conséquences institutionnelles
Cette réforme entraîne un changement de nature du régime de la Vème République. La
doctrine a parlé de Constitution de 1962. Cette réforme a rempli les attentes de Gaulle avait
mis en elle. Cette réforme donne au chef de l’État une légitimité propre, démocratique qui
renforce incontestablement son autorité y compris au sein de l’exécutif.
Par ce mode d’élection, les candidats à la présidence proposent aux électeurs un véritable
programme de gouvernement. C’est le Président de la République qui devra en assumer la
réalisation.

Ce mode d’élection était attendu car il va donner toute sa logique au texte constitutionnel,
tout son sens au pouvoir présidentiel prévu par la nouvelle Constitution. Le Président de la
République dispose des pouvoirs propres (dépourvus de contreseing) et des pouvoirs
partagés (avec contreseing).
De 1958 à 1962, les pouvoirs propres ne répondent à aucune responsabilité. Avec cette
réforme il va en répondre politiquement devant les électeurs. Le contreseing pour les
pouvoirs partagés sera une simple formalité. Le Président va même absorber les pouvoirs du
premier ministre.
Même en période de cohabitation, cette élection populaire va permettre au chef de l’état de
ne pas être complètement effacé. Il n’aura pas les mêmes pouvoirs mais il va se recentrer sur
les pouvoirs que lui donne la Constitution. Il va utiliser les pouvoirs avec contreseing.

b. Les conséquences politiques


La première conséquence politique est que ce mode d’élection va redonner aux partis
politiques une vigueur nouvelle. Les partis politiques jouent un rôle impotatn d’abord dans la
sélection des candidats puis dans l’animation et le financement de la campagne électorale. Ils
vont continuer à jouer un rôle après l’élection. Le Président de la République a besoin de son
parti politique d’origine ou de la coalition qui va soutenir son programme pour discipliner le
groupe parlementaire de sa majorité pour pouvoir faire adopter son programme à travers le
vote des lois.
Ces partis ont une fonction différente d’avant. Ils n’existent que par l’élection présidentielle,
que par leur capacité à présenter un candidat à l’élection présidentielle. Le ou les parti(s)

52
majoritaire(s) sont au service du Président et de son gouvernement pour faire passer les
réformes.
La deuxième conséquence politique est la bipolarisation de la vie politique. En 1958,
l’adoption du scrutin uninominal majoritaire à deux tours pour les différentes élections
nationales produit un multipartisme limité. A partir de 1962, l’élection présidentielle va être
le moment le plus important de la vie politique nationale. Le deuxième tour de l’élection
présidentielle entraîne un regroupement en deux camps pour soutenir chacun des deux
candidats. C’est de là que vient cette bipolarisation.

B.Le mandat présidentiel


La durée du mandat présidentiel qui était de 7 ans, était très long pour un chef d’État dans
une République parlementaire.
Par ailleurs, la Constitution, s’agissant du mandat, envisage le cas de l’interruption de ce
mandat.

1.La durée du mandat


Cette durée de 7 ans a été fixée dans des circonstances particulières, il y a 151 ans,
nombreux sont ceux qui l’on considérés comme anachronique, et ont estimé nécessaire de
raccourcir le mandat présidentiel.

a. Le septennat et sa remise en cause


Rappel : la loi du septennat date du 20 novembre 1873. Voter pour permettre la restauration
d’une monarchie parlementaire. Par la suite ,les républicains l’ont maintenu et qui figure
dans l’amendement Wallon (l’article 2 de la loi du 25 février 1875) qui rendait le septennat
impersonnel et établissait la République. Le maintien de cette durée de 7 ans a été confirmé
par la suite sous la IIIème République, d’autant plus que le Président de la République était
devenu inoffensif pour le Parlement à partir de 1879.
Le septennat se trouve confirmé par l’article 6 du 4 octobre 1958, car on lui trouve cette fois
une nouvelle justification. Le Président de la Vème République a en charge les intérêts
supérieurs de la nation avec à l’appui des pouvoirs forts. Pour cela, il lui faut la durée, la
continuité.

En conséquence, son mandat doit être plus long que celui de l’Assemblée nationale (5 ans)
qui elle a en charge le quotidien comme c’est le cas du gouvernement qui a également en
charge le quotidien.
En conséquence, en 1958, les constituants décident de maintenir le septennat indéfiniment
renouvelable comme c’était le cas sous la IIIème République.

Son application sous la Vème République, sous François Mitterrand, seul lui a fait 2 septennats
en étant élu pour le premier et réélu au second, au suffrage universel direct et en faisant
deux mandats complets (1981 à 1988 et 1988 à 1995). Le Général de Gaulle avait été élu
pour la première fois en 1958 au suffrage universel indirect et élu en 1965 au suffrage
universel direct (sauf qu’il démissionnera au bout de 4 ans en 1969).
Le successeur sera Georges Pompidou, qui ne fera qu’un seul mandat (interrompu par son
décès), élu en 1969 et décède en 1974.
Le suivant est Valérie Giscard D’Estaing, il fait un septennat complet et un seul, de 1974 à
1981.

53
Et ensuite Jacques Chirac qui fait un septennat et ensuite un quinquennat.

Le septennat a été largement contesté et peut-être à tort, plusieurs arguments contre le


septennat :
- 7 ans c’était beaucoup trop long, avec la possibilité d’être réélu plusieurs fois. Aucun
chef de l’exécutif à l’étranger (Président ou ministre) n’est élu pour une durée aussi longue et
les intéressés doivent revenir vers les électeurs pour regagner la confiance populaire (au
bout de 4 ou 5 ans).
- Le septennat de 1968 était inadapté depuis l’élection du président au suffrage universel
direct. Cette élection qui a renforcé la légitimité du chef de l’État, entraîne la responsabilité
politique du Président de la République devant les électeurs. Cette responsabilité politique
exige dans une démocratie que le peuple puisse prononcer à échéance rapprochée.
- La légitimité du Président peut s’essouffler avec le temps face à une assemblée
nationale dont la légitimité se renouvelle à échéance plus rapprochée avec le risque d’être
confrontée à une crise type 16 mai 1877.

A cet égard, le Général de Gaulle aurait bien été conscient du problème entre le septennat et
les élections du suffrage universel direct et il aurait trouvé une parade, celle appelée celle du
« septennat à géométrie variable ». C’est-à-dire un dire un septennat ponctué de référendum
sur les questions importantes et graves, par lequel le peuple renouvelait sa confiance dans le
chef de l’État. Il le présentait comme une question de confiance, donc il concevait le
référendum comme une élection présidentielle renouvelée. Le Général de Gaulle y aura
recours en 1962 (sur la révision du mandat présidentiel) et aussi recours le 27 avril 1979. Son
premier mandat réel aurait duré 4 ans de 1958 à 1962. Le deuxième mandat aurait
commencé en 1962 et prend fin en 1965 (3 ans). En 1965, de Gaulle est réélu pour 7 ans
mais engage sa responsabilité politique clairement par le référendum de 1969 et quitte le
pouvoir après son échec mais quitte son mandat après 4 ans.
Le quinquennat était inutile, la question du renouvellement de la légitimité présidentielle
était ainsi résolue et si chaque successeur avait ainsi procédé en engageant leur
responsabilité politique par référendum à mi-mandat, la réforme du quinquennat n’aurait
pas été nécessaire.

Il y aussi la possibilité d’utiliser un autre instrument qui est la dissolution.


Mais la Constitution ne pose aucune obligation au chef de l’État de recourir au référendum et
la dissolution, a fortiori la Constitution ne pose aucune obligation d’en faire une question de
confiance, c’est-à-dire à cette occasion d’engager son mandat.

Quand est-il des successeurs du Général de Gaulle ?


 Georges Pompidou n’a utilisé qu’une seule fois le référendum mais sans s’en servir
comme une question de confiance. Il décédera 5 ans après son élection (il était un défenseur
d’un quinquennat).
 Valérie Giscard D’Estaing sera le seul Président à avoir appliqué un véritable
septennat sans référendum, sans dissolution et sans cohabitation mais il aurait payé en
n’étant pas réélu en 1981.
 François Mitterrand, ses deux septennats se sont déroulés identiquement. Chacun
commence par un quinquennat de plein exercice (1981-1986 et 1988-1993), car les
mécanismes de la Vème République produisent leur effet. L’Assemblée nationale élue quelques

54
semaines après le Président de la République et lui donne une majorité présidentielle et
donc un régime de présidentialisme majoritaire.

Puis, il y aura des périodes de cohabitation d’abord 86-88 puis 93-95. A partir de 1986, qui
ouvre à la première cohabitation, le Président garde les pouvoirs inscrits dans la Constitution
et de 86 a 88 Mitterrand va se comporter comme chef d’opposition, ça lui sera profitable car
il sera réélu en 88.

 Quant au septennat de Chirac, 1995-2002, deux périodes, cette fois inversées, d’abord
deux ans de pleine présidence, la majorité parlementaire était issue des élections législatives
de 93 mais en 1997 une cohabitation de 5 ans commence, mais déclenche cette fois par une
dissolution des élections législatives anticipées pour éviter la défaite du camp présidentiel un
ans plus tard, annoncée par les sondages (éviter les dégâts mais défaite).

Ces exemples montraient que la combinaison du septennat et du suffrage universel direct


n’est pas réaliste, le septennat compromettrait la légitimité du Président de la République en
l’exposant au risque d’une cohabitation.

b. Le quinquennat
Il y a eu une première tentative de révision constitutionnelle, qui fut initiée par le Président
de la République Georges Pompidou en avril 1973. La procédure suivie par l’intéressé était
celle de l’article 89 de la Constitution mais il l’interrompra car la révision risquait d’échouer
en raison de l’hostilité d’un certain nombre de parlementaires centristes et gaullistes.
Pourtant, cette réforme fera l’objet d’un consensus entre la droite et la gauche et sera faite
au cours de la 3ème cohabitation sur la base d’un accord entre le Président de la Républicaine
de la droite républicaine (Jacques Chirac et le premier ministre de la cohabitation socialiste
(Lionel Jospin), ils sont tous les deux d’accords pour cette révision constitutionnelle.
La révision est adoptée par un premier vote des deux assemblées parlementaires, puis
l’adoption est acquise par le référendum de ratification organisé le 24 septembre 2000, le
score est de 73% de suffrages exprimés (OUI) et 70% d’abstention du corp électoral.
La Constitution est alors modifiée par la loi 2000.
Il s’agit d’abord d’un quinquennat renouvelable indéfiniment et ceci sera modifié par une
nouvelle révision de la Constitution, celle du 23 juillet 2008 qui dit « nul ne peut exercer plus
de deux mandats consécutifs ».
Une fois la réforme faite, il fallait en tirer tous les fruits car il faut éviter les cohabitations,
donc il fallait mettre en place la coïncidence des mandats présidentiels des députés de
l’Assemblée nationale donc la coïncidence des deux quinquennats (conjoints) et ceci fut.

Les avantages du quinquennat : d’abord permettre au peuple d’élire le Président de la


République plus souvent comme les autres démocraties européennes et aux États-Unis. Et
aussi l’avantage qu’offre le quinquennat conjoint, c’est qu’il rationnalise le calendrier des
principales élections et permet de raréfier considérablement le risque de cohabitation.
Cependant, il y a tout de même des évènements qui peuvent produire des disjonctions des
deux quinquennats comme le décès présidentiel, une démission du président ou encore la
dissolution de l’Assemblée nationale qui peut s’imposer soit parce que la majorité
parlementaire renverse le gouvernement soit pour prévenir la dislocation de la majorité
parlementaire.

55
En tout état de cause, la concordance des mandats s’est rétablie par une nouvelle dissolution
consécutive à l’élection présidentielle suivante.

Le quinquennat présente des inconvénients…

20/02/2024

Le principal inconvénient est le risque de banalisation de la fonction présidentielle puisqu’il


devient une sorte de super premier ministre, on le confond avec lui. Il est difficile pour lui de
se présenter au-dessus des parties. Il y a une surexposition du président sur le plan
médiatique et sur le plan de la responsabilité politique vis-à-vis des électeurs. Il y a le risque
d’une instabilité présidentielle et non plus gouvernementale.

2. L’interruption du mandat
C’est une question que prévoit et règle la Constitution. La principale solution prévue par
celle-ci pour procéder au remplacement du chef de l’État en cas d’interruption du mandat
est l’intérim qui est prévu à l’article 7 alinéa 4. L’intérim est assuré en cas d’interruption
temporaire du mandat présidentiel (maladie passagère) mais il peut aussi être assuré en cas
d’interruption définitive du mandat présidentiel.
L’empêchement temporaire doit être constaté à la demande du gouvernement par le Conseil
constitutionnel qui statue à la majorité absolue de ses membres (article 56 alinéa 2 de la
Constitution.
L’interruption définitive couvre deux cas :
- peut être due à un empêchement définitif, c’est-à-dire une maladie chronique qui
ne permet plus l’exercice des fonctions. Il est constaté suivant la même procédure que pour
une interruption temporaire.
- vacance de la présidence : décès du Président en exercice (Pompidou), démission
du Président de la République en cours de mandat (De Gaulle) ou la destitution sur la base
l’article 68 de la Constitution. Il n’y a pas de procédure particulière, la vacance est avérée à
l’heure de la mort, à l’heure de la démission ou à l’heure de la destitution. Dans ce cas, le
remplacement du Président de la République est assuré par l’intérim le temps d’organiser
une nouvelle élection présidentielle.

L’intérim est assuré par le Président du Sénat. Mais pendant le temps de l’intérim, il ne va
pas pouvoir exercer tous les pouvoirs présidentiels prévus par la Constitution. Elle fait une
distinction.
En cas d’interruption temporaire, le Président du Sénat ne peut pas recourir à l’article 11 de
la Constitution (référendum législatif) ni à l’article 12 qui fonde le droit de dissolution
l’Assemblée nationale.
En cas d’interruption définitive, le Président du Sénat ne peut pas recourir à l’article 11 ni à
l’article 12. Le gouvernement ne peut pas engager sa responsabilité politique (articles 49 et
50), l’Assemblée nationale ne peut pas le renverser, le Premier ministre ne peut pas remettre
la démission de son gouvernement et la Constitution ne peut pas être révisée (article 89).

L’intérim a été appliquée en 1969 (démission) et en 1974 (décès).

56
Que se passerait-il si le Président du Sénat se trouvait empêcher ? L’intérim serait assurée
par le gouvernement.

C. La question de la responsabilité du chef de l’État


L’irresponsabilité du chef de l’État est un principe monarchique : c’était le cas en France sous
l’Ancien régime puis ce fut le cas dans le cadre d’une monarchie constitutionnelle.
Aujourd’hui, les monarchies constitutionnelles européennes sont des régimes
parlementaires et maintiennent ce principe d’irresponsabilité du chef de l’État comme étant
un principe absolu (sur le plan politique et pénal).
Ce principe a été transposé en République parlementaire et c’est ainsi que les constitutions
des III et IVème républiques consacrent l’irresponsabilité politique du Président de la
République. Ses attributions étaient plus ou moins importantes. Tous ses actes étaient
contresignés et les ministres assumaient la responsabilité politique de ses actes devant le
Parlement.
A partir de 1877, l’irresponsabilité politique du chef de l’État aura une nouvelle justification :
la perte de ses pouvoirs.
En revanche, par exception au principe de l’irresponsabilité du chef de l’État, il y aura une
responsabilité exceptionnelle qui sera aménagée par la Constitution pour haute trahison. Le
texte de la Constitution de 1958 réaffirme ce dispositif. Ce dispositif va être modifié.

Sous la Vème République, la reconnaissance de pouvoirs propres au chef de l’État et


l’instauration d’une démocratie semi-représentative à la faveur de l’élection du président au
suffrage universel direct, d’un référendum en matière constitutionnelle et législative, cela a
créé et multiplié les possibilité d’engagement d’une responsabilité politique du chef de l’État
devant les électeurs. Cette responsabilité politique a donné lieu à une pratique très
fluctuante qui a sans doute été une des raisons de la révision constitutionnelle vers le
quinquennat.

1.La responsabilité du Président de la République devant les électeurs


Un certain nombre d’articles de la Constitution doivent être pris en compte pour aborder
cette question.
Un premier groupe d’articles font référence au régime parlementaire. D’abord, des
dispositions constitutionnelles qui réaffirment le principe de l’irresponsabilité politique du
Président devant le Parlement, selon l’article 68. Les articles 20, 49 et 50 qui posent la
responsabilité politique du gouvernement devant le Parlement. L’article 19 qui prescrit des
pouvoirs présidentiels avec contreseing.
Ils doivent être considérés en lien avec d’autres dispositions constitutionnelles qui instaurent
une présidence forte qui donne un autre éclairage à l’ensemble du texte constitutionnel et
qui dépasse ce que serait un régime parlementaire dualiste. L’existence et l’apparition de
pouvoirs propres dépourvus de contreseing sur la base de l’article 19. Le nouvel article 6 tiré
de la révision de 1962 c’est-à-dire l’élection du Président de la République au suffrage
universel direct. Ces deux dispositions établissent une responsable politique du Président
devant les électeurs, attachée à des pouvoirs réels et qui découle de la légitimité
démocratique du chef de l’État. Cette élection au suffrage universel direct justifie a posteriori
les pouvoirs propres reconnus en 1958 au chef de l’État et va renforcer les pouvoirs
présidentiels avec contreseing.

57
Quant aux périodes de cohabitation, les pouvoirs propres vont demeurer même si certains
seront désactivés mais cette responsabilité politique demeurera.
La responsabilité politique peut être mise en jeu suivant différents mécanismes et sa
pratique va évoluer avec le temps.

a. Sa mise en jeu : les mécanismes envisageables


L’initiative peut avoir trois sources possibles : du chef de l’État, du peuple et de l’Assemblée
nationale.

La mise en jeu à l’initiative du Président : il a trois possibilités. Le premier cas est le recours
au référendum de l’article 11, il est déclenché à son initiative mais c’est à condition que le
Président décide de poser à cette occasion une question de confiance aux électeurs. Le
deuxième cas est le recours à la dissolution de l’article 12 décidée par le Président qui
provoque des élections législatives anticipées mais qui peut être aussi utilisée comme un
appel au peuple. Le troisième cas est sa candidature à une réélection.

La mise en jeu à l’initiative du peuple : cela peut être le cas lors d’élections législatives dont
le résultat créé une situation de cohabitation.

La mise en jeu à l’initiative de l’Assemblée nationale : c’est lorsqu’il y a vote d’une motion de
censure contre le gouvernement du Président de la République. Cette motion de censure
s’adresse indirectement au Président de la République. Cette hypothèse n’a pas de sens en
période de cohabitation.

b. La pratique fluctuante de la responsabilité politique


La période gaullienne jusqu’à 1969, se caractérise par l’émergence et le développement de la
responsabilité politique du Président devant les électeurs. Cette responsabilité est engagée
principalement par le chef de l’État et une seule fois par l’Assemblée. Le Président va utiliser
trois de ses prérogative pour engager sa responsabilité politique : il va être candidat à sa
réélection en 1965, il va recourir référendum question de confiance en 1962 et 1969 et il va
recourir au droit de dissolution comme étant la riposte à une crise ministérielle. Le président
va demander aux électeurs d’arbitrer le conflit qui l’oppose à l’Assemblée. Il y a aussi une
dissolution utilisée en 1968 après les événements de mai et n’était pas précédée d’une crise
ministérielle, elle visait une assemblée qui n’était pas du tout hostile au chef de l’État. Par
cette dissolution il s’agissait pour le chef de l’État de renforcer son pouvoir face à la rue.
Pendant cette période, les trois mécanismes d’engagement de la responsabilité politique
sont utilisés.
Les conséquences que le président de la République en tire : à chaque fois il fait savoir qu’il
en tirera toutes les conséquences. Elle aura pour sanction ultime notamment sa démission.
Un seul de cas de mise en jeu à l’initiative de l’Assemblée est la motion de censure contre le
gouvernement de Pompidou en 1962.
Cette période s’accompagne de l’effacement de la responsabilité politique du gouvernement
devant le Parlement.

58
Après la présidence de De Gaulle, la responsabilité politique va évoluer dans sa mise en jeu
et ses conséquences.
D’abord, l’Assemblée nationale ne parviendra plus à censurer le gouvernement du Président
de la République, aucune motion de censure n’aboutira.
Par contre, la responsabilité du chef de l’État sera mise en jeu à l’initiative des électeurs lors
de l’échéance normale des élections législatives (en 1986 et 1993), ce qui produira deux
cohabitations. Lors de ces deux élections législatives, il y a la victoire de la droit républicaine
marquant un désaveu de politique menée par le Président de l’époque (Mitterrand).
Enfin, un recul de la mise en jeu de la responsabilité politique du Président à son initiative.
S’agissant du référendum, il n’y aura plus de référendum question de confiance. Il y a aura de
très rares recours à la procédure référendaire.
Les conséquences que tirent les successeurs du Général de Gaulle : aucun ne s’est considéré
comme désavoué par le peuple, aucun n’a donné sa démission. Ils ont voulu voir dans ce
résultat un désaveu vis-à-vis de la majorité parlementaire et non pas une désaveu du
Président lui-même. Ils se sont appuyés sur leur élection au suffrage universel direct et sur le
septennat. En 86, en 93 et en 97, le désaveu populaire a quand même été entendu, c’est-à-
dire que le Président de la République a acceptée de jouer le jeu parlementaire en désignant
un premier ministre conforme au vœu de la nouvelle majorité à l’Assemblée nationale et en
acceptant que les pouvoirs présidentiels soit temporairement réduits. Mais la conséquence
ultime n’a pas été tirée (démission).
Il résulte que sauf changement de pratique dans le futur, aujourd’hui la candidature à une
réélection est le seul procédé par lequel le Président serait censé engager sa responsabilité
politique.

Pendant une période de cohabitation, la responsabilité politique du Président est maintenue.


Du point de vue de ses pouvoirs, il n’en a plus l’intégralité mais n’est pas complètement
démuni. Ce sont les pouvoirs partagés qui vont jouer à plein. Avec ceux-ci il a un pouvoir de
négociation, un pouvoir de blocage dans ses rapports avec le premier ministre. Son
comportement en donnant ou non sa signature est soumis à l’appréciation des électeurs.
Cela peut s’analyser comme une soumission tactique en comptant sur l’usure inévitable du
premier ministre. Le Président peut profiter alors de cette situation, de sa moindre
exposition, de ses distances prises par rapport aux contingences pour préparer sa nouvelle
campagne présidentielle. Une réélection intervenu juste après une période de cohabitation
s’est déjà produite (1988, 2002), à chaque le Président sortant qui candidate à sa réélection
l’a emporté sur son rival et son rival était son premier ministre de cohabitation ou un
représentant de ce camp.

Cette responsabilité politique vient de son mode d’élection et couvre tous les aspects de la
fonction présidentielle c’est-à-dite toute l’étendue de son arbitrage.

2.La justiciabilité du Président de la République


Il ressort des dispositions constitutionnelles initiales de 1958 et de l’interprétation qui en a
été faite que la Constitution a consacré une responsabilité pour haute trahison, l’absence de
toute responsabilité pénale du chef de l’État pendant toute la durée de son mandat
(inviolabilité présidentielle). Ce dispositif a fait l’objet d’une révisions constitutionnelle du 23
février 2007.

59
a. De 1958 à 2007 : l’exception d’une responsabilité pour haute trahison
(l’ancien article 68)
Dans version initiale, l’article 68 disposait que le Président de la République « n’est
responsable des actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions qu’en cas de haute trahison,
il ne peut être mis en accusation que par les deux assemblées statuant par un vote identique
au scrutin public et à la majorité absolue des membres les composant, il est jugé par la Haute
Cour de Justice ». Cette disposition rappelle le principe d’irresponsabilité du Président
devant le Parlement pour tous les actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions. Une
exception : la haute trahison. La notion de haute trahison n’a jamais été définie par aucun
texte (Constitution, loi…). N’étant pas définie par le Code pénal on ne pouvait pas la
considérer comme un délit pénal. La doctrine a essayé de cerner cette notion en donna tune
définition matérielle : manquement du Président au devoir de sa charge, une violation grave
et délibérée de la Constitution.
De même, la Haute Cour de Justice de par sa nature renforçait cette interprétation politique
de la haute trahison car elle n’était pas une juridiction véritable mais était une assemblée
politique. Elle n’était pas composée de juges mais d’hommes politiques à parité de
parlementaires issus des deux chambres désignés par leurs pairs. Elle devait constater la
haute trahison et en tirer les conséquences.
La responsabilité du Président pour les actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions était
une responsabilité spécifique, la Constitution elle-même ne la qualifiant pas de pénale.

b. L’absence de responsabilité pénale ou l’inviolabilité présidentielle


Lorsqu’on lit l’article 68 de la Constitution dans son ancienne version, on constate qu’il ne
portait que sur les actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions. Un raisonnement a
contrario permettait d’en déduire que le Président devait être considéré comme un citoyen
ordinaire devant répondre de ses infractions pénales comme tout citoyen ordinaire dès lors
qu’elles étaient commises en-dehors de ses fonctions. Pourtant, ce n’est pas l’interprétation
qui fut donnée du texte constitutionnel.
L’interprétation du Conseil constitutionnel figure dans une décision rendue le 22 janvier
1999. Pendant la durée de ses fonctions, la responsabilité pénale du Président de la
République ne peut être mise en cause que devant la Haute Cour de Justice et selon les
modalités fixées par l’article 68 de la Constitution. Pour le Conseil constitutionnel, le
Président pouvait voir sa responsabilité pénale engagée pour des faits extérieurs ou
antérieurs à la fonction présidentielle parce que le Président était alors en exercice il devait
bénéficier d’une sorte de protection à savoir un privilège de juridiction.
La Cour de cassation a été amenée à se prononcer plus directement sur cette question à
propos d’une série d’affaires qui impliquaient le Président Jacques Chirac. Ces actes auraient
été commis antérieurement à la présidence mais aussi au cours du premier mandat
présidentiel. Dans un arrêt du 10 octobre 2001, la Cour de cassation considère que la Haute
Cour de Justice n’est compétente que pour connaître des actes de haute trahison dans
l’exercice de ses fonctions. Les poursuites pour tous les autres actes doivent être exercés
devant les juridictions pénales de droit commun mais ces poursuites ne pourront pas être
exercées pendant le temps où le Président est en poste. La prescription est alors suspendue
pendant toute la durée du mandat présidentiel. Il y a une immunité temporaire de juridiction
lorsqu’il est en exercice. A la fin du mandat présidentiel, redevenu un citoyen ordinaire,
l’ancien Président devrait répondre de ses actes devant le juge pénal ordinaire.

60
La position de la Cour de cassation est capitale car elle est la juridiction suprême en manière
pénale.

c. La révision du 23 février 2007 : les nouveaux articles 67 et 68 de la


Constitution
A la suite de ce débat, une réflexion a été conduite à la demande de Jacques Chirac par une
commission créée par un décret, composée de spécialistes. Ces réflexion ont été reprise dans
une révision constitutionnelle.
La révision confère au Président de la République, durant son mandat, une immunité
juridictionnelle absolue mais il va y avoir des contreparties et il va falloir les actes de la
fonction présidentielle et les actes hors-fonctions.
Le nouvel article 67 dans ses alinéas 2 et 3 vise les actes hors fonction présidentielle. L’alinéa
2 dit que le Président de la République ne peut durant son mandat et devant aucune
juridiction ou autorité administrative française être requis de témoigner ni faire l’objet d’une
action, ni faire l’objet d’une instruction ou d’une poursuite. Tout délai de prescription ou de
forclusion est suspendu. L’alinéa 3 de l’article 67 ajoute que les instances et procédures
peuvent être reprises ou engagées contre lui à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la
cessation de ses fonctions présidentielles.
Pour les actes commis dans l’exercice des fonctions présidentielles, la révision
constitutionnelle met en place une procédure de destitution. C’est une procédure
exceptionnelle qui est annoncée à l’article 67-1 qui dispose que le Président n’est pas
responsable des actes accomplis en cette qualité sous réserve des disposition des articles 53-
2 et article 68.
La procédure 68 nouvelle version : la Haute Cour de Justice et la notion de haute trahison
sont supprimées. Il y a une procédure nouvelle qui est mises en place. Selon elle, le
Parlement constitué en Haute Cour peut destituer le Président de la République en cas de
« manquement à ses devoirs manifestement incompatibles avec l’exercice de son mandat ».
Il faut d’abord que l’Assemblée nationale comme le Sénat votent chacun une résolution pour
la réunion de la Haute Cour. Cette première résolution doit être adoptée à la majorité des
deux-tiers des membres composant chaque chambre. Puis, les deux chambres constituées en
Haute Cour statuent sur la destitution et la décision doit emporter la majorité des deux-tiers
qui composent cette Haute Cour. A bulletin secret et il n’y a pas de délégation de vote
possible.
Les reproches au Président : manquement à ses devoirs manifestement incompatibles avec
l’exercice de son mandat. C’est une notion plus large que la haute trahison. Cela peut être
une violation grave de la Constitution, une infraction pénale…
La majorité demandée est très difficile à atteindre. Si elle est inférieure, le Président sera
considérablement affaibli.
Ce qui interpelle est que cela vise un Président qui est élu au suffrage universel direct et qui
au bout du compte est destitué par un collège électoral réduit.

L’existence de cette procédure ferait peser de grosses pression sur le Président de


cohabitation. La menace de destitution pourrait suffir à le faire plier.

61
27/02/2024

§2 : Les attributions présidentielle


L’importance des attributions présidentielles traduit la prépondérance du Président de la
République dans les institutions. Le titre premier de la Constitution est consacré à la
souveraineté et le titre deux est consacré au Président de la République.
En ce qui concerne les attributions, plusieurs articles de la Constitution doivent être
considérés : surtout l’article 5 qui constitue la définition générale de la fonction
présidentielle sous la Vème République « le Président de la République assure par son
arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’état. Il
est garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire et du respect des traités. »
Le terme ‘arbitrage’ qui est ambiguë était destiné en 1958 à rassurer les nostalgiques du
régime parlementaire, et plus précisément du chef d’état parlementaire avec en particulier la
référence à un penseur du XIXème siècle, Benjamin Constant qui présentait le pouvoir du Chef
de l’état comme un pouvoir neutre.
Sauf que très vite, ce terme a aujourd’hui une dimension bien plus significative et plus
importante. Cet arbitrage, il l’exerce seul quelle que soit la majorité parlementaire et les
circonstances politiques. Ce terme d’arbitrage est un terme à géométrie variable.

Cet arbitrage sous la Vème République a une autre dimension car il se concrétise par un
certain nombre de pouvoirs, des pouvoirs qui sont une innovation de la Vème République,
appelée par la doctrine des pouvoirs propres qui ont pour caractéristique des pouvoirs
présidentiels dépourvus de tout contreseing du Premier ministre et de n’importe quel
ministre. Mais l’arbitrage repose aussi sur un autre pilier, des pouvoirs qui s’inscrivent dans la
tradition du chef d’état parlementaire et que la Vème République conserve, des pouvoirs que
la doctrine a appelé des pouvoirs partagés, pouvoirs avec contreseing qui correspondent à la
logique parlementaire.
Cet arbitrage peut varier avec l’évolution des rapports des forces politiques. Lorsqu’il y a
coïncidence des majorités parlementaire, le Président de la République va avoir le maximum
d’instruments entre ses mains ou assumer cet arbitrage, il s’agira de ses pouvoirs propres,
des pouvoirs partagés ou avec contreseing et aussi il va, au fur et à mesure des pratiques
successives, maîtriser les attributions du Premier ministre.

En revanche, en période de cohabitation, il pourra assumer cet arbitrage mais avec moins
d’instruments entre ses mains.
Les pouvoirs partagés vont servir de moyens de résistance entre les mains du chef de l’État.
Le pouvoir primo-ministériel sera remis au Premier ministre.
Ce terme d’arbitrage est donc à géométrie variable suivant les rapports de force politique.

A. Les pouvoirs propres


L’existence de pouvoirs dépourvus de tout contreseing sont prévus à l’article 19 de la
Constitution. Ils correspondent à des actes très importants et des décisions prises rarement.
La Constitution de la Vème République rompt clairement avec la tradition des républiques
parlementaires précédentes dans lesquelles de tels pouvoirs n’existaient pas.
Donc, dans la IIIème et la IVème de la République tous les actes du Président de la République
étaient contresignés par les ministres responsables. Pour exercer son arbitrage, le Président
de la République dispose de certains pouvoirs à l’égard du Premier ministre, du Parlement,

62
du peuple, du Conseil constitutionnel et enfin il dispose de pouvoirs de crise en cas de
circonstances exceptionnelles.

1.Le président de la République et le Premier ministre


L’article de référence est l’article 8 alinéa 1er de la Constitution, il dispose que « Le Président
de la République nomme le premier ministre, il met fin à ses fonctions sur la présentation par
celui-ci de la démission du gouvernement ». Elle suppose aucune investiture préalable de la
part de l’Assemblée nationale. Donc  article 49 alinéa 1er

a. La nomination du premier ministre


ème
Sous la IV République, le Président du Conseil était proposé par le Président de la
République, et finalement l’intéressé n’était nommé par le Président de la République
qu’après l’investiture de son gouvernement par l’Assemblée nationale. L’article 8 alinéa 1er de
la Constitution ne pose aucune condition à cette nomination.
Le Premier ministre procède de la seule volonté du chef de l’état, il n’y a pas de consultation
préalable, aucune obligation de choisir un parlementaire, aucune obligation de choisir un
chef de parti et de choisir un homme politique déjà connu. Donc le Président de la
République choisi qui il veut comme premier collaborateur à condition quand même que ce
dernier puisse durant ses fonctions, disposer de la confiance de la majorité parlementaire.
Confiance en laquelle le Premier ministre ne pourrait pas se maintenir.
En période normale, de coïncidence des majorités présidentielles parlementaires, le choix du
Premier ministre relève donc du pouvoir discrétionnaire du chef de l’État comme au cours de
l’histoire de la Vème République (exemple : Georges Pompidou en 1962).
En période de cohabitation, la marge de manœuvre du Président de la République se
retrouvait réduite car il faut tenir compte des nouvelles contraintes parlementaires et de la
nouvelle majorité qui a été propulsée à l’Assemblée nationale. Il y a l’arrière-plan
parlementaire qui ressurgie.

b.La procédure de l’article 49 alinéa 1er


L’article 8 alinéa 1er ne fait pas du tout mention d’une procédure d’investiture devant
l’Assemblée nationale.
L’article 49 alinéa 1er dispose que le Premier ministre engage devant l’Assemblée nationale la
responsabilité du gouvernement sur son programme ou sur une déclaration de politique
générale. La confiance sera acquise à la majorité absolue des suffrages exprimés (la plus
courte). Vote sur la confiance.
En réalité, cette procédure n’est pas obligatoire, il utilise l’indicatif présent « le Premier
ministre engage », selon le contexte il peut être interprété comme un impératif ou une
faculté. Ici, c’est une faculté car aucun délai n’est exigé, aucune précision sur le moment où
cette responsabilité s’engage. En outre, le texte dit qu’il faut une délibération préalable en
Conseil des ministres ce qui montre l’absence d’automaticité de cette procédure.
Le gouvernement qui est nouvellement formé par le Président de la République est présumé
avoir la confiance de l’Assemblée nationale, cette absence d’obligation montre que la
légitimité du Premier ministre procède bien du Président de la République essentiellement et
surtout depuis la révision de 1962 (élection du président au suffrage universel direct). Ici, on
voit l’évolution du régime parlementaire dualiste rénové. Le Premier ministre tient sa
légitimité du chef de l’État.

63
L’utilisation du 49 alinéa 1er n’est pas automatique et n’est pas une obligation. Il sera utilisé
régulièrement pour marquer la différence du gouvernement vis-à-vis de l’Assemblée. Cela
relève de la simple opportunité politique qui appartient au Premier ministre d’apprécier
selon les circonstances (pas d’obligation). Aucune intervention obligatoire de l’Assemblée
dans ce cas-là.

2.Le président de la République et le Parlement


Le Président de la République dispose de trois pouvoirs à l’égard du Parlement : d’abord le
droit de message ensuite, le droit d’entrée et de parole devant les parlementaires et enfin, le
droit de dissolution.

a. Le droit de message
 C’est l’article 18 de la Constitution, précisément alinéa 1er.
C’est un procédé traditionnel en France, généralement cela se pratique juste après l’élection
du Président de la République. Un message dans lequel le Président de la République expose
les grandes lignes de son programme. Il peut aussi y recourir à des occasions importantes et
particulières (exemple : push Alger en 1961 par des généraux de l’armée française, 1991 lors
du déclenchement de la guerre du Golfe et aussi en 1986 par Mitterrand qui expose les
règles de la cohabitation en s’appuyant sur la Constitution). C’est une pouvoir qui permet au
Président de la République de marquer sa présence dans des moments importants. Ce
message portera la seule signature du Président de la République. Ces messages de l’article
sont lus par les Présidents des deux assemblées ou bien par un ministre (le Premier ou le
garde des sceaux (ministre de la Justice)).

b. Le droit d’entrée et de parole


 C’est l’article 18 alinéa 2.
Il peut diminuer l’importance de l’alinéa 1er. Jusqu’ici le Président de la République ne
pouvait pas se rendre physiquement dans aucun des deux hémicycles (Assemblée Nationale
ou Sénat).
En France, cette interdiction remonte à la loi du 13 mars 1873 appelée « la Constitution de
Broglie ou Breuille » quand il s’agissait de contrecarrer l’influence d’Adolphe Thiers sur
l’Assemblée. Appelé le cérémonial chinois qui deviendra une interdiction pure et simple
d’entrée en vertu d’une des trois lois constitutionnelles de 1875, la loi du 16 juillet 1875.
L’interdiction perdure jusqu’à la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.
Cette révision maintient le droit de message écrit mais y ajoute un deuxième moyen du
Président de la République avec les chambres (alinéa 2). C’est un accès direct. Le Président
de la République a un droit de s’exprimer, le Parlement est réuni à cette occasion en Congrès
(2 assemblées) et cette intervention orale faite en personne par le Président de la
République peut donner lieu à un débat mais pas de vote pour sanctionner le débat. Ce n’est
pas un pouvoir majeur mais cela va dans le sens de la présidentialisation du régime et aussi
dans le sens d’une banalisation de la fonction présidentielle liée au quinquennat.
C’est le Président de la République qui détermine la politique de la nation et non pas le
gouvernement. Donc il pourrait présenter, à cette occasion, son programme de
gouvernement qu’il a défendu lors de la campagne présidentielle, les électeurs savent qu’il
en est responsable, il peut le présenter au gouvernement ce qui concurrence avec l’article 49
alinéa 1. Mais il peut aussi utiliser l’article 18 alinéa 2 de manière plus ponctuelle en fonction
de l’actualité (quand il le veut).

64
Toutefois cette procédure selon laquelle le Président de la République s’exprime devant le
Congrès des deux chambres, serait moins envisageable en période de cohabitation.

c. Le droit de dissolution
 C’est l’article 12 de la Constitution.
C’est l’acte par lequel le Président de la République par décret, met fin au mandat de
l’Assemblée nationale (chambre basse) avant son terme normal. Ce qui entraîne la
convocation des électeurs pour élire une nouvelle assemblée (donc élection législative). Le
Sénat ne peut pas être dissout et cela est conforme à la tradition parlementaire selon
laquelle seule peut être dissoute l’assemblée qui peut renverser le gouvernement.
Ce droit de dissolution, il est rédigé en prenant compte de l’expérience passée (IVème
République avec paralysie du droit de dissolution en raison des conditions de l’article 51 qui
avait accru l’instabilité gouvernementale), donc aucune condition à la dissolution. Elle peut
intervenir à tout moment, elle n’est pas conditionnée par l’existence d’une crise ministérielle
donc c’est un pouvoir discrétionnaire du chef de l’État. Il l’exerce par décret sans aucun
contreseing. Il y a des conditions de forme à respecter.

3 conditions de formes :
- Le Président de la République doit satisfaire à une obligation de consultation
préalable, il doit consulter le ministre, le président de chaque assemblées, mais leur
avis est simple.
- Le Président de la République ne peut pas dissoudre dans un délai inférieur à 1 an
après des élections législatives consécutives à une précédente dissolution pour
éviter les dissolutions à répétition.
- Après la dissolution, des nouvelles élections législatives devront avoir lieu dans un
délais de 20 à 40 jours après la dissolution.
Ce sont des conditions de forme assez faibles.

Mais il existe aussi des limites de fonds destinées à éviter tout risque d’excès du Président de
la République :
- Le président intérimaire (du Sénat) n’a pas le droit de dissolution des autres
chambres.
- Le Président de la République ne peut pas dissoudre en période d’application de
l’article 16 (lorsqu’il prend et qu’il exerce les pouvoirs de crise). C’est donc un faible
encadrement.

La dissolution sous la Vème République est multifonctionnelle :


- Première fonction : la « dissolution sanction », qui est la fonction classique en régime
parlementaire. C’est donc l’hypothèse d’une crise ministérielle, c’est-à-dire un
gouvernement qui a la confiance du Président de la République et qui est censuré par
l’Assemblée nationale. En réalité sous la Vème République c’est l’expression d’une
défiance à l’égard du Président de la République, un défi à l’autorité présidentielle.
Dans ce cas l’alternative que dispose le Président : soit le Président nomme un
nouveau gouvernement conforme au vœu de la majorité parlementaire ou soit il rend
le peuple arbitre du conflit entre lui-même et l’Assemblée nationale, donc il décide de
dissoudre avec des nouvelles élections. Permettant au peuple d’arbitrer. La

65
dissolution apparaît comme une arme contre l’Assemblée nationale et c’est ainsi que
fut dissoute l’Assemblée nationale en 1962 après la censure poursuivie par le
gouvernement de Georges Pompidou.
- Deuxième fonction de la dissolution : appelée la « dissolution référendum » ou
« dissolution question de confiance ». Elle pourra être déclenchée non pas en raison
d’une crise ministérielle mais plutôt pour résoudre une crise en opinion. Elle permet
le recours au peuple pour établir la preuve de l’existence d’une majorité
présidentielle au sein du peuple. La dissolution est un substitue d’élection
présidentielle, une question de confiance que le Président de la République adresse
au peuple pour résoudre une crise politique nationale. C’est l’équivalent d’un
référendum question de confiance.
Ce fut le cas de la dissolution de 1928 suite aux évènements de mai. A ce moment-là
le Président De Gaulle voulait utiliser un référendum, son Premier ministre Pompidou
l’en dissuada en préconisant la dissolution. En effet, en raison du contexte politique
de l’époque, la dissolution était beaucoup moins risquée pour le Président. En
revanche, son Premier ministre est le parti Gaulliste (populaire). Les élections
législatives renvoyèrent une majorité absolue au profit du seule parti Gaulliste jamais
eu jusqu’ici, majorité de coalition. Le parti s’appelait UDR (Union des Démocrates
pour la Vème République) crée en 1967 pour remplacer l’UNR (Union pour la Nouvelle
République).
- Troisième fonction : appelée la « dissolution tactique » ou « dissolution à
l’anglaise ». C’est une dissolution destinée à renforcer la majorité favorable au
Président en avançant la date des élections législatives. Mais il y a un risque que
l’opinion le ressente comme un calcul, cela pourrait être contre-performant entraîné
par une perte de voix qui est contraire au but recherché. Exemple : dissolution de
1997.
- Quatrième fonction : « la dissolution consécutive à l’élection présidentielle »
Utilisée à l’époque du septennat présidentiel et a permis au Président, nouvellement
élu, de faire coïncider majorité parlementaire et majorité présidentielle, pour lui
permettre d’appliquer son programme. Ce fut le cas de la dissolution de 1981 par
Mitterrand en face d’une assemblée à majorité de droite républicaine issue des
élections législatives de 1878. Il obtient une majorité écrasante pour le parti socialiste
avec majorité absolue. Mais aussi en 1988, Mitterrand après un bina de cohabitation,
c’est-à-dire une assemblée nationale issue des élections législatives de 1986 ayant
apportée à l’assemblée une majorité de droite républicaine. Il se fait réélire en 1998,
deux ans après, et dissout à nouveau.

Ce cas de figure pourrait à nouveau se reproduire en dépit du quinquennat conjoint, il


suffirait qu’il y ait un décalage des deux quinquennats (destitution, démissions, décès).

La dissolution remplie pleins de fonctions différentes, elle ne répond pas à une logique
parlementaire et s’inscrit dans un régime présidentialiste en ne se limitant pas à résoudre
une crise ministérielle. Sous la Vème République, la dissolution remplie bien sa fonction de
correcteur d’instabilité gouvernementale, le petit nombre de dissolution jusqu’ici montre
que la simple menace de dissolution suit à discipliner la majorité (majorité relative comme
en 1998 ou une majorité de division de coalition).

66
3.Le Président de la République et le peuple : le référendum législatif de l’article 11
Le référendum est prévu dans différentes dispositions de la Constitution, il faut citer l’article
3 « la souveraineté nationale appartient au peuple qu’il exerce par ses représentants et par
la voie du référendum ».
A côté de cela, il y a l’article 72-1 consacré au référendum local issu de la révision
constitutionnelle du 28 mars 2003. Il y a l’article 53 référendum d’autodétermination, l’article
89 référendum en matière de révision constitutionnelle et l’article 11 en matière législative.

L’article 89 ne fait pas partie de ses pouvoirs propres mais du contreseing.

L’article 11, lui illustre un pouvoir propre du chef de l’État. Cet article sur le référendum en
matière législative, constitue une des grandes innovations de la Vème République. Le Président
de la République sur proposition du gouvernement ou sur proposition conjointe des deux
assemblées peut soumettre au référendum tout projet de loi portant sur l’organisation des
pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique, sociale,
environnementale ou tendant à autoriser la ratification d’un traité qui sans être contraire à la
Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions.

a. L’objet de l’article 11
Cet article 11 permet de cour circuiter le Parlement, il fait voter directement par le peuple un
projet de loi sans intervention préalable des assemblées. C’est un référendum de
substitution, c’est une procédure parallèle d’adoption des lois. Ce référendum concerne le
domaine de la loi ordinaire mais aussi le domaine de la loi organique. Mais cela ne concerne
pas les lois constitutionnelles qui relèvent elles de l’article 89. Sa consécration dans la
Constitution de la Vème République apparaît comme un correctif pour éviter le retour au
parlementarisme absolu, à la « souveraineté parlementaire » qu’on a connu sous IIIème et
IVème République.
Cette consécration s’inspire des écrits de Carré De Malberg.
C’est un instrument de démocratie semi-directe greffé sur une démocratie représentative et
qui contribue avec l’élection du Président au suffrage universel direct qui contribue avec
l’élection du chef de l’État directement par le peuple, à faire de la Vème République une
démocratie semi-représentative.
La Vème République a pour particularité d’avoir fait de ce procédé référendaire un instrument
d’arbitrage entre les mains du chef de l’État.

b. Le déclenchement du référendum
S’agissant de l’initiative référendaire, elle n’appartient pas juridiquement au Président de la
République mais appartient au gouvernement et aux assemblées
1ère Hypothèse : elle appartient au gouvernement mais durant les cessions
parlementaires, cette exigence est destinée à permettre aux assemblées de prendre position
sur le référendum. Et même permettre à l’Assemblée nationale de voter une motion de
censure contre le gouvernement qui ne fait la proposition au chef de l’État. Une révision
constitutionnelle du 4 août 1995 a exigé qu’à cette occasion le Premier ministre fasse une
déclaration suivie d’un débat devant l’Assemblée nationale et le Sénat. Mais cette déclaration
n’est pas sanctionnée par un vote. Cela dit, si d’après le texte le gouvernement a l’initiative,
l’expérience et la pratique institutionnelle, les projets gouvernementaux en la matière
étaient tous d’origine présidentielle. L’initiative gouvernementale est juste ramenée à une

67
règle de procédure.
Toutefois en période de cohabitation, les forces s’équilibrent au sein de l’exécutif ou les
forces de paralyse. Le Premier ministre de cohabitation peut ne pas tenir compte du vœux
exprimé du Président de la République (référendum) et inversement le Président de la
République peut ne pas donner suite à la demande du Premier ministre.
Par ailleurs, l’article 11 dit que l’initiative référendaire appartient aussi aux
assemblées sur motion conjointe (proposée et votée par chacune des deux assemblées). Il
prévoit que le référendum ne peut porter que sur des projets de loi et non pas des
propositions de loi. En d’autres termes, l’initiative parlementaire ne peut porter que sur des
projets d’origine gouvernementale, un texte présenté par le Premier ministre. Il faut rajouter
que c’est un référendum de substitution, qui va empêcher le Parlement de voter quoi que ce
soit. Les parlementaires accepteraient de se faire court-circuiter ?
Enfin, il faut que les deux assemblées soient d’accord (proposition conjointe).

A supposer que toutes ces conditions soient remplies, encore faudra-t-il que le Président de
la République soit d’accord lui aussi, et en effet si l’initiative n’apportait pas juridiquement au
Président, il en va différemment de la décision finale de soumettre à référendum. En effet, au
terme de l’article 11 la décision finale de soumettre un référendum appartient au Président
et cette décision est dispensée de tout contreseing, elle constitue un pouvoir propre du chef
de l’État qui peut librement décider de donner suite ou pas à l’initiative gouvernementale ou
parlementaire. Il PEUT soumettre à référendum.

c. Le domaine du référendum
Le référendum de l’article 11 a un champ d’application restreint car il ne concerne que trois
domaines :
- Premier domaine : l’organisation des pouvoirs publics (ambigu), cette expression
posera un moment donné un problème d’interprétation et de combinaison avec
l’article 89.
- Deuxième domaine : le référendum pourra porter sur un projet de loi demandant
l’autorisation au peuple de ratifier un traité qui aurait des incidences sur le
fonctionnement des institutions. L’article 11 renvoi à l’article 54 de la Constitution, il
sera utilisé en 1972 pour l’élargissement de la communauté économique européenne
(CEE), et utilisé en 1992 ratification du traité de Maastricht sur l’union européenne, et
aussi le 29 mai 2005 sur la ratification du traité portant sur la Constitution
européenne, celui-ci sera un référendum négatif.
- Troisième domaine : révision constitutionnelle du 4 août 1995 qui prévoit les cas de
réforme relative à la politique économique sociale ou environnementale de la nation
et au service public. Cette révision de 1995 avait pour objet d’élargir le domaine du
référendum avec la question relative à l’emploi, santé, éducation, fiscalité. Mais en
réalité, cet élargissement n’est pas véritable parce que c’est un élargissement très
faible. Car il s’agit de réforme relative à la politique économique sociale et
environnementale.

En 1984, avant cette révision le Président Mitterrand avait proposé de réviser l’article 11
pour élargir son champ en y incluant les garantie fondamentales des libertés publiques. Elle
fût un échec en raison de l’opposition du Sénat. Jusqu’à présent les questions de sociétés
n’appartiennent pas au domaine de l’article 11.

68
d. L’utilisation du référendum de l’article 11
Jusqu’ici il y a eu 8 referendums organisé sur la base de l’article 11.
4 par le Général de Gaulle :
- D’abord du 8 janvier 1961 sur l’autodétermination de l’Algérie avec 75% des suffrages
de oui.
- Le référendum du 8 avril 1962 sur l’approbation des accords déviants avec presque
91% de oui.
- Puis le référendum du 28 octobre 1962 de l’élection du Président de la République au
suffrage universel direct avec 62,2% de oui.
- Et aussi du 27 avril 1969 avec création des régions et transformation du Sénat pour le
rapprocher du Conseil de la République ou le rapprocher du Conseil économique et
social, négatif avec 53% de non  Général de Gaulle démissionne

Un référendum sous la présidence de Pompidou, 23 avril 1972, c’est l’entrée du Royaume-Uni


de l’Irlande et du Danemark dans la CEE (Communauté Économique Européenne). Les
français favorables avec plus de 67% des suffrages exprimés.
Ensuite, il y en aura 2 sous la présidence de Mitterrand. D’abord un référendum du 6
novembre 1988, disposition relative à l’autodétermination en Nouvelle-Calédonie avec 80%
de oui. Ensuite, le référendum du 20 septembre 1992 sur la ratification du traité de
Maastricht avec 51% de oui.
Le dernier est sous Chirac du mai 2005, sur la Constitution européenne avec un échec de
55% des suffrages exprimés rejetant la ratification de ce nouveau traité.

Le référendum de l’article 11 est une arme démocratique et anti parlementaire mais très
efficace en termes de légitimité pour celui qui en a la maitrise c’est-à-dire le Président de la
République. C’est aussi un instrument d’arbitrage entre ses mains.
Depuis l’échec de 1969, la pratique référendaire est beaucoup moins fréquente et c’est
devenue une pratique objective. Les successeurs du Général de Gaulle ne s’en sont pas servis
comme question de confiance.
En période de cohabitation, le recours au référendum de l’article 11, il n’aurait pas la même
dimension, les deux responsables de l’exécutif devraient s’entendre sur une telle consultation
mais aucun des deux ne pourrait en tirer profit contre l’autre. Sous réserve quand même
d’une hypothèse, en cas de tension le gouvernement pourrait saisir le Président de la
République d’une proposition officielle pour le mettre en difficulté dans l’hypothèse où le
Président voudrait s’abstenir de provoquer un référendum.

4.Les pouvoirs exceptionnels de l’article 16


a. Ses justifications
Il y a 3 justifications :
- Le général de Gaulle s’est référé aux expériences passées, celle de la fin de la IIIème
République, la démission d’Albert Lebrun en 1940, qui n’avait pas en été en mesure
de s’opposer à l’armistice. Afin que ça ne se reproduise pas, il est indispensable de
donner au Président un pouvoir de décision propre lui permettant de faire face
lorsque la nation est en péril.
- La deuxième permet d’actualiser cette disposition, ces pouvoirs de crise aujourd’hui
pourraient fonctionner dans différentes circonstances, la première est la perspective
d’un conflit conventionnel qui redevient probable. En ce qui concerne le nucléaire, ce

69
n’est pas dans l’article. Et puis il y a d’autres possibilités, certains cas de subversions
internes, d’attaques terroristes, par lesquelles le territoire français serait menacé
directement, car il faut que les conditions posées à l’article 16 soient satisfaites.
- Il s’agit pour l’article 16 de restaurer une sorte de dictature à la romaine, d’opérer une
concentration de tous les pouvoirs entre les mains d’un seul mais de manière
temporaire. Un délai de l’ordre de quelque mois, le temps de rétablir la situation. A
cet égard, l’article 16 présente un double intérêt, le premier est qu’il fournit un cadre
juridique ou encore une rationalisation des pouvoirs de crises dans leur
déclenchement. Le deuxième intérêt c’est qu’il vise des cas où le droit qui est
applicable en temps normal est dépassé, où il est nécessaire de prendre des mesures
adaptées et exceptionnelles. Donc L’article 16 est là encore un cadre juridique
d’exception destiné à éviter l’arbitraire, éviter le non-droit pendant sa durée
d’application. Ces dispositions ne doivent donc pas être supprimées.

b. Les conditions de sa mise en œuvre


Conditions de fond et des conditions de formes qu’il pose.
D’abord envisageant les conditions de fonds, qui sont cumulatives, qui rend plus difficile son
déclenchement.
- 1ère condition de fond : il faut une menace grave et immédiate et cette menace doit
porter soit sur les institutions de la République soit sur l’intégrité du territoire,
l’indépendance de la nation ou encore l’exécution des engagements internationaux
de la France. Cette menace peut être subjective.
- 2ème condition de fond : cette menace doit s’accompagner d’une interruption dans les
fonctions régulières de la République des pouvoirs constitutionnels.
Le gouvernement ou le Parlement ne pourrait plus statuer. C’est une interprétation littérale
mais cette exigence peut être appréciée plus ou moins strictement dans les faits. C’est là
encore au Président d’apprécier si l’une ou l’autre condition de fond est réalisée. Ou le
président intérimaire (du Sénat).

Lorsque l’article 16 a été appliqué c’était lors du putsch d’Alger.


Aucun contrôle juridictionnel n’existe à cet égard pour le déclenchement de l’article 16, sur
l’appréciation présidentielle de ces conditions de fonds.
Le Conseil constitutionnel intervient pour le déclenchement de l’article 16 pour juste pour
donner son avis. Il peut apprécier l’existence de ces conditions mais ne peut pas de décision
juridictionnelle. Le Conseil d’état, juridiction administrative suprême, s’est déclaré
incompétent pour apprécier la décision présidentielle de déclencher l’article 16 en
considérant que c’est ce qu’on appelle un acte de gouvernement, catégorie d’acte hautement
politique que le juge administratif suprême est incompétent.
 Arrêt du 2 mars 1962 Rubin de Servens.

L’article 16 posent des conditions de formes, 2 conditions cumulatives :


- 1ère condition : réside dans la consultation du Premier ministre, des Présidents des 2
assemblées et du Conseil constitutionnel. Mais ces avis ne lient pas le Président dans
leur substance. Toutefois, l’avis du Conseil constitutionnel est publié au Journal
officiel, et cela est quand même une contrainte. S’il s’avère que c’est contraire, le
déclenchement de l’article 16 pourrait plus tard, engager la responsabilité du
Président sur l’article 68 de la Constitution. Cela a une importance. Mais il reste

70
l’hypothèse de l’impossibilité matérielle de procéder à ces consultations en raison de
la paralysie de ces autorités. Dans ce cas, il existe une théorie « la théorie de la force
majeure » sur la base de laquelle le Président serait dispensé d’accomplir ces
formalités prévues à l’article 16.
- 2ème condition : après ces consultations si le Président veut toujours recourir à l’article
16 il doit en informer la nation par un message. Dépourvu de tout contreseing.

c. L’application de l’article 16
Cela pose plusieurs problèmes :

Quelles sont les décisions que peut prendre le Président une fois l’article 16 déclenché ?
L’article 16 réalise une confusion des pouvoirs entre ses mains, il peut prendre des mesures
qui ne relèvent pas de sa compétence en temps normal et peut se substituer au Parlement
en intervenant dans le domaine de la loi, il va pouvoir se substituer au gouvernement en
usant des pouvoirs règlementaires dans son intégralité, et peut même se substituer à
l’autorité judiciaire. Les différentes mesures qu’il prendra ne nécessitent pas le contreseing
du Premier ministre. La seule formalité prévu pendant le temps de l’article 16, est que le
Conseil constitutionnel doit être consulté pour chaque mesure à prendre mais les avis qu’il
rend ne sont pas publiés. Par conséquent, l’opinion publique ne sera pas directement
informée des actes constitutionnels. Toutefois, ces avis seront publiés plus tard et pourront
permettre d’établir la responsabilité du chef de l’État sur la base de l’article 68 (destitution).
C’est donc une constitution dans la constitution.

Le président se trouve-t-il alors en situation de porter atteinte aux libertés et aux droits
fondamentaux ?
En réalité le Président ne peut pas prendre n’importe quelles mesures, l’article 16 pose des
limites destinées à garantir un minimum d’état de droit.
- 1ère limite : aux termes de l’article 16 le Président prend les mesures exigées par les
circonstances. Ce n’est pas DES mais LES mesures. Son seul objectif doit être
exclusivement de rétablir la situation antérieure, donc le Président ne peut pas tout
faire. Il ne pourra pas modifier la Constitution, car une telle modification ne
permettra pas le retour à l’ordre constitutionnel préexistant.
- 2ème limite : durant la période d’application de l’article 16 le Président ne peut pas
dissoudre l’Assemblée nationale (dernier alinéa).
- 3ème limite : les mesures prises par le Président peuvent faire l’objet d’un certain
contrôle juridictionnel. S’agissant des mesures qui relève du domaine de la loi (PDR se
substitue au Parlement), elles sont contrôlées par le Conseil constitutionnel mais le
Conseil constitutionnel contrôle seulement sur son domaine consultatif mais pas
juridictionnel. Les mesures qui relèvent du domaine réglementaire, elles sont
susceptibles d’être amenées par le Conseil d’état dans l’exercice de sa compétence
juridictionnelle.
- 4ème limite : si le Président s’aventurait à prendre d’autres mesures que celles
qu’exigent les circonstances, il fait un usage arbitraire, il engagerait sa responsabilité
sur la base de l’article 68.

71
Quels sont les conséquences de l’application de l’article 16 sur les rapports entre les pouvoirs
publics ?
Le Parlement se réuni alors de plein droit, l’Assemblée nationale ne peut pas être dissoute
(alinéa 5). Garantie destinée à permettre aux assemblées de mettre en cause le Président
pour manquement à ses devoirs.

Quel doit être le délai d’application de l’article 16 ?

**

19/03/2024

3.La direction de l’administration


Il s’agira de voir le pouvoir de nomination du Premier ministre, sa qualité de responsable de
la défense nationale (article 21 de la Constitution) et du pouvoir réglementaire

a. Le pouvoir de nomination du Premier ministre


Le Premier ministre nomme à certains emplois civils et militaires de l’État sur la base de
l’article 21 de la Constitution. Ce pouvoir ne s’exerce que sous réserve des nominations
relevant de la compétence du Président de la République qui a en la matière la compétence
de principe sur la base de l’article 13 de la Constitution.

b. Le pouvoir réglementaire général


Les articles 13, 21 et 37 concernent le pouvoir réglementaire général. Le pouvoir
réglementaire général consiste à prendre des décisions de portée générale applicables à tous
et sur l’ensemble du territoire national. Le Premier ministre va l’exercer par décret
réglementaire avec le contreseing du ou des ministre(s) chargé(s) de la mise en application
de ces règlements.
Sous la IIIème République, le titulaire du pouvoir règlementaire général était le Président de la
République et sous la IVème République c’était le chef du Conseil. Sous la Vème République il y a
une répartition du pouvoir règlementaire général entre le Président de la République et le
Premier ministre. Cette répartition est favorable au Premier ministre.
L’article 21 dispose que le Premier ministre exerce le pouvoir règlementaire général sous
réserve des dispositions de l’article 13 de la Constitution, lequel précise les cas dans lesquels
le Président de la République a un pouvoir règlementaire général décrets et ordonnances
délibérés en Conseil des ministres).
Le pouvoir règlementaire du Premier ministre peut se manifester de différentes manières. En
vertu de la Constitution, il est permis de distinguer deux catégories de règlements que le
Premier ministre a compétence d’édicter.

La première catégorie c’est le pouvoir règlementaire d’application des lois : le Parlement ne


peut pas dans loi préciser toutes les mesures de détails donc ce sera confier au pouvoir
règlementaire. Il est également appelé le pouvoir règlementaire dérivé ou pouvoir
règlementaire secondaire. Ce pouvoir est fondé sur l’article 21 de la Constitution.

La deuxième catégorie ce sont les règlements qualifiés d’autonomes basés sur l’article 37 de
la Constitution. Ils sont la conséquence de la limitation du domaine de la loi qui est pour la

72
première fois opérée par la Vème République. Ils ont la particularité d’intervenir dans les
matières autres que celles de la loi. C’est un pouvoir normatif parallèle qui est détenu par
principe par le Premier ministre. Ils ne sont pas conditionnés par une loi d’où le terme
d’autonome.
Loi André Marie du 17 août 1948 : première ébauche de délégalisation qui n’était pas
définitive car il suffisait au législateur d’adopter une nouvelle loi l’abrogeant.
À partir de 1958, ce n’est plus la loi mais la Constitution qui opère une délégalisation et qui
ce faisant, va définir la loi sur la base de nouveaux critères. Désormais, la loi se définit sur un
double-critère : le critère organique et formel et un critère matériel (= le législateur ne
pourra légiférer que dans un certain nombre de domaines). Les matières qui relèvent du
domaine de la loi sont énumérées à l’article 34 de la Constitution. Pour la critère organique
et formel c’est l’article 24 qui le dit.
La compétence de principe s’agissant d’un pouvoir normatif c’est celle du Premier ministre.
La distinction des matières législatives et des matières règlementaires est surveillée dans la
Constitution par une protection du domaine règlementaire du Premier ministre contre les
empiètements du Parlement mais pas l’inverse (article 41 de la Constitution). C’est une
nouvelle manifestation de la prépondérance de l’exécutif sur le Parlement.

Il faut ajouter un pouvoir règlementaire particulier qui est consacré par la jurisprudence du
Conseil d’État. C’est un pouvoir règlementaire autonome spécialisé. C’est le pouvoir de
prendre des règlements de police administrative générale afin d’assurer le maintien de
l’ordre public sur l’ensemble du territoire national. Ce pouvoir a été consacré sous la IIIème
République par un arrêt du Conseil d’État du 8 août 1919, l’arrêt Labonne. Cet arrêt
reconnaissait alors au Président de la République le pouvoir de prendre des règlements de
police administrative.

73

Vous aimerez peut-être aussi