Dissert Droit Constitutionnel
Dissert Droit Constitutionnel
Dissert Droit Constitutionnel
“Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée ni la séparation
des pouvoirs déterminée, n’a point de constitution”.
Article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
“Les pouvoirs reconnus distincts doivent avoir des titulaires, non seulement distincts
mais indépendants les uns des autres, en ce sens qu’un des pouvoirs ne puisse pas
révoquer à volonté le titulaire d’un autre pouvoir. C’est là, dans l’irrévocabilité réciproque,
que gît le principe actif et bienfaisant”. Adhémar Esmein (1848 - 1913) juriste français.
Les Etats unis d’amérique sont un Etat fédéral. De ce fait, la séparation des pouvoirs
ne se fait pas uniquement au niveau des trois organes mais également entre l’Etat central et
les Etats fédérés. Dans cette forme d’Etat, l’impact des décisions nationales est beaucoup
plus lointain pour les citoyens. En effet, certaines fonctions régaliennes en France comme la
police ou l’éducation secondaire et universitaire sont gérées au niveau de l’Etat fédéré,
même si cela ne change pas le rapport entre les trois pouvoirs au niveau national.
S’agissant des moyens d’action, il n’y a pas de droit de dissolution, le législatif ne
renvoie pas l'exécutif. Il existe bien une procédure de mise en accusation du président ou du
vice président: la procédure d’impeachment. La Chambre des représentants est compétente
pour mettre en accusation, et le Sénat, érigé en juge, doit se prononcer à la majorité des
deux tiers. Si on considère que cette responsabilité est strictement pénale, elle ne perturbe
pas la lecture que l’on fait des relations entre les pouvoirs. Or, la sentence émane d’un
organe politique qui sanctionne un autre organe politique. De ce constat, on peut supposer
que les visées politiques ne sont jamais éloignées.
A première vue, cet agencement laisse apparaître une certaine étanchéité des
pouvoirs. Or, il s’agit de théorie et la pratique est souvent bien différente. Sous le regime
presidentiel americain, on retrouve quelques entorses à cette théorie classique. Deux en
particulier illustrent ce propos: le président possède un droit de veto suspensif, ce qui
constitue une immixtion de l'exécutif au sein du législatif. De plus, en matière de traités ou
de nomination aux emplois publics fédéraux, l’accord du sénat est requis, ce qui constitue
une immixtion du législatif au sein du pouvoir exécutif.
En effet, ce caractère strict de la séparation des pouvoirs a été atténué du fait de la
pratique. Il n‘est toujours pas question d’une collaboration entre les pouvoirs, mais bien d’un
contact plus intime entre eux.
S’agissant des moyens de désignation, les représentants et les sénateurs sont élus
au suffrage universel direct dans le cadre des etats fédérés. Jamais un organe fédéral, qu’il
s’agisse d’un président ou d’une cour, ne pourra s’immiscer dans cette désignation.
S’agissant de la perte du mandat, le constat est le même: en aucune circonstance,
les autres organes fédéraux ne sauraient procéder a une destitution des membres du
Congrès. Ils ne peuvent être démis de leur mandat qu’avec l’accord de la chambre à
laquelle ils appartiennent.
S’agissant de la désignation du troisième organe, les juges fédéraux ne sont pas
élus, ils sont désignés par les deux premiers organes. Leur destitution obéit aux règles de
l’impeachment, elle est donc de la compétence du Congrès.
De ces éléments, on peut conclure que du point de vue de la désignation et de la
révocation, seuls les membres du Congrès sont à l’abri de tout immixtion des autres
organes. En revanche, le président, son vice président et les juges fédéraux dépendent
largement du Congrès, tant pour leur désignation que pour leur destitution éventuelle: la
séparation des pouvoirs dans le régiment présidentiel américain n’est pas “rigide” au sens
littéral.
A la différence des Etats Unis, la France est un état unitaire. De plus, c’est un régime
parlementaire dualiste: il s’y exerce un double jeu de responsabilités. Dans ce régime, on
recherche l’équilibre entre les pouvoirs du cabinet ministériel, et ceux du parlement.
Une séparation trop stricte des différents pouvoirs peut empêcher l’Etat d’exercer ses
prérogatives, c’est pourquoi sans atteinte à leur indépendance, la pratique aboutit davantage
à une collaboration des pouvoirs entre eux. Elle prend la forme de moyens d’action les uns à
l’égard des autres. Par exemple, le président de la République peut dissoudre l’une des
chambres du Parlement ; les députés peuvent, sous conditions, demander la démission du
gouvernement via la motion de censure. Aussi, la pratique politique amène régulièrement le
gouvernement, lorsqu’il dispose d’une majorité, de proposer des lois (Projet de loi) au
Parlement. En réalité, la plupart des lois votées au Parlement sont des projets de loi, donc
proposés par le pouvoir exécutif.
Dans cette séparation dite “souple”, certaines entorses sont faites au principe
séparatiste. Par exemple, le mode de désignation des juges du conseil constitutionnel: trois
membres sont nommés par le Président de la République, dont le Président du Conseil
constitutionnel, trois par le Président de l’Assemblée nationale et trois par le Président du
Sénat. De plus, les anciens présidents de la République sont membres à vie. Cet exemple
illustre le cas d’un organe judiciaire, jouissant d’un important pouvoir et d’un certain prestige,
dont les membres sont nommés directement par les deux premiers organes.
Néanmoins, pour garantir l’impartialité de ses membres, leur mandat de neuf ans n’est pas
renouvelable.
De plus, la procédure du “49-3” qui permet à l'exécutif de forcer l’adoption d’une loi
peut elle aussi être considérée comme une entorse à la séparation des pouvoirs.
De façon générale, la théorie ne pourra jamais fonctionner telle qu’elle nous est
donnée par Montesquieu. L’histoire nous l’a démontré: une séparation stricte des pouvoirs
entraîne une paralysie des institutions, comme sous le directoire par exemple. Sans tomber
dans le régime d’assemblée ou dans toute autre dérive, il est nécessaire de l’adapter de
manière à le faire correspondre à la réalité de la vie politique et des institutions modernes.