Dissert Droit Constitutionnel

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BA Ndeye Marieme Groupe

La théorie de la séparation des


pouvoirs.

“Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée ni la séparation
des pouvoirs déterminée, n’a point de constitution”.
Article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

Elevée au rang de principe constitutionnel, la séparation des pouvoirs ou Trias


Politica est l’attribut indispensable à toute démocratie. Cette théorie suppose la séparation
des trois grandes fonctions de l’Etat en organes: le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif et le
pouvoir judiciaire, chacun représenté par une instance différente.
Élaborée par John Locke (1632-1704), philosophe anglais dans son “Second traité
du Gouvernement civil” en 1690, elle est théorisée par Montesquieu (1689-1755) dans
“L’esprit des Lois” en 1748.
Montesquieu énonce “C’est une expérience éternelle que tout homme qui a du
pouvoir est porté à en abuser; il va jusqu'à ce qu’il trouve des limites”. C’est dans cette
affirmation que réside la raison d'être de cette théorie: la relation perverse de l’homme et du
pouvoir.
L’enjeu est donc d’éviter la réunion de tous les pouvoirs entre les mains d’un seul
homme car c’est là la garantie de retomber dans un régime despotique. L’histoire nous l’a
démontré, par exemple sous le roi Louis XIV qui symbolise l’apogée de l’absolutisme. Il était
en possession des trois pouvoirs: exécutif, législatif et judiciaire.
Il convient donc de les séparer car “l’histoire est une galerie de tableaux où il y a peu
d’originaux et beaucoup de copies” (Tocqueville).
Il s’agit d’assurer la limitation du pouvoir et, par conséquent, de protéger les droits
des citoyens.
La théorie de la séparation des pouvoirs est donc une doctrine constitutionnelle qui
divise le pouvoir de l’Etat en trois organes. Le pouvoir législatif, dévolu aux assemblées
représentatives correspond à la fonction de faire les lois. Le pouvoir exécutif, détenu par le
gouvernement est l’autorité qui fait exécuter ces lois. Enfin, le pouvoir judiciaire assuré par
les juridictions applique ces lois pour régler les litiges.
Exposée ainsi, cette répartition des pouvoirs dresse le tableau de pouvoirs
harmonieux et complémentaires. La pratique est bien plus complexe. En effet, pour la rendre
applicable, cette doctrine a fait l’objet de deux interprétations.
La théorie classique correspond à une distinction et à une spécialisation des trois
organes. La séparation est stricte, aucun des deux pouvoirs, legislatif et executif (car là est
la véritable distinction) n’a de moyen d’action sur l’autre, sinon peu. Les organes disposent
d’une totale autonomie dans les missions qui leurs sont confiées.
La théorie moderne a elle tempéré cette théorie classique en mettant en place une
séparation souple des pouvoirs, voire floue certaines fois, notamment en France sous la
cinquième République. En effet, les pouvoirs legislatif et executif disposent de moyens
d’action sur l’autre. Le pouvoir législatif, en plus de sa mission de faire les lois, contrôle
l’action du gouvernement et la sanctionne si nécessaire. De plus, le pouvoir exécutif partage
l’initiative des lois avec le législatif et peut également dissoudre le Parlement.
La question de savoir si la séparation des pouvoirs est une notion dépassée ne se
pose pas: la théorie de la séparation des pouvoirs est un rempart contre l’absolutisme qui ne
saurait souffrir du temps qui passe. Cette notion fait corps avec celle de démocratie, et son
aspect indispensable ne peut être remis en question. Confier l’exercice du pouvoir a
plusieurs organes apparaît nécessaire à l’établissement d’une démocratie pérenne.

La question qu’il convient de se poser, en revanche, est de savoir qui, de la théorie


moderne ou de la théorie classique est la plus adaptée à notre monde contemporain?

Maintenant que la nécessité de l’application de la théorie séparatiste au sein d’une


démocratie est établie, il convient d’analyser de quelle manière les deux théories sont
appliquées dans notre monde contemporain et laquelle paraît le plus adapté. Pour y
parvenir, nous allons étudier la question de l’indépendance des pouvoirs au sein des deux
formes de séparation (I), avec, d’une part la séparation stricte au sein du régime présidentiel
américain (A) et, d’autre part la séparation souple au sein du régime parlementaire français
(B). Nous étudierons ensuite de quelle manière la théorie séparatiste est un moteur de
liberté politique (II), avec la Chambre des députés aux Etats-Unis, dans l’ombre du Sénat (A)
et enfin, L’Assemblée nationale française, bénéficiaire d’un bicamerisme inégalitaire (B).

I) La question de l’indépendance des pouvoirs au sein des deux formes de


séparation.

“Les pouvoirs reconnus distincts doivent avoir des titulaires, non seulement distincts
mais indépendants les uns des autres, en ce sens qu’un des pouvoirs ne puisse pas
révoquer à volonté le titulaire d’un autre pouvoir. C’est là, dans l’irrévocabilité réciproque,
que gît le principe actif et bienfaisant”. Adhémar Esmein (1848 - 1913) juriste français.

A) Une théorique ferme indépendance des pouvoirs: le cas du régime


présidentiel .

Les Etats unis d’amérique sont un Etat fédéral. De ce fait, la séparation des pouvoirs
ne se fait pas uniquement au niveau des trois organes mais également entre l’Etat central et
les Etats fédérés. Dans cette forme d’Etat, l’impact des décisions nationales est beaucoup
plus lointain pour les citoyens. En effet, certaines fonctions régaliennes en France comme la
police ou l’éducation secondaire et universitaire sont gérées au niveau de l’Etat fédéré,
même si cela ne change pas le rapport entre les trois pouvoirs au niveau national.
S’agissant des moyens d’action, il n’y a pas de droit de dissolution, le législatif ne
renvoie pas l'exécutif. Il existe bien une procédure de mise en accusation du président ou du
vice président: la procédure d’impeachment. La Chambre des représentants est compétente
pour mettre en accusation, et le Sénat, érigé en juge, doit se prononcer à la majorité des
deux tiers. Si on considère que cette responsabilité est strictement pénale, elle ne perturbe
pas la lecture que l’on fait des relations entre les pouvoirs. Or, la sentence émane d’un
organe politique qui sanctionne un autre organe politique. De ce constat, on peut supposer
que les visées politiques ne sont jamais éloignées.
A première vue, cet agencement laisse apparaître une certaine étanchéité des
pouvoirs. Or, il s’agit de théorie et la pratique est souvent bien différente. Sous le regime
presidentiel americain, on retrouve quelques entorses à cette théorie classique. Deux en
particulier illustrent ce propos: le président possède un droit de veto suspensif, ce qui
constitue une immixtion de l'exécutif au sein du législatif. De plus, en matière de traités ou
de nomination aux emplois publics fédéraux, l’accord du sénat est requis, ce qui constitue
une immixtion du législatif au sein du pouvoir exécutif.
En effet, ce caractère strict de la séparation des pouvoirs a été atténué du fait de la
pratique. Il n‘est toujours pas question d’une collaboration entre les pouvoirs, mais bien d’un
contact plus intime entre eux.
S’agissant des moyens de désignation, les représentants et les sénateurs sont élus
au suffrage universel direct dans le cadre des etats fédérés. Jamais un organe fédéral, qu’il
s’agisse d’un président ou d’une cour, ne pourra s’immiscer dans cette désignation.
S’agissant de la perte du mandat, le constat est le même: en aucune circonstance,
les autres organes fédéraux ne sauraient procéder a une destitution des membres du
Congrès. Ils ne peuvent être démis de leur mandat qu’avec l’accord de la chambre à
laquelle ils appartiennent.
S’agissant de la désignation du troisième organe, les juges fédéraux ne sont pas
élus, ils sont désignés par les deux premiers organes. Leur destitution obéit aux règles de
l’impeachment, elle est donc de la compétence du Congrès.
De ces éléments, on peut conclure que du point de vue de la désignation et de la
révocation, seuls les membres du Congrès sont à l’abri de tout immixtion des autres
organes. En revanche, le président, son vice président et les juges fédéraux dépendent
largement du Congrès, tant pour leur désignation que pour leur destitution éventuelle: la
séparation des pouvoirs dans le régiment présidentiel américain n’est pas “rigide” au sens
littéral.

B) Le régime parlementaire, régime de “collaboration” des pouvoirs: le cas


du régime parlementaire français.

A la différence des Etats Unis, la France est un état unitaire. De plus, c’est un régime
parlementaire dualiste: il s’y exerce un double jeu de responsabilités. Dans ce régime, on
recherche l’équilibre entre les pouvoirs du cabinet ministériel, et ceux du parlement.
Une séparation trop stricte des différents pouvoirs peut empêcher l’Etat d’exercer ses
prérogatives, c’est pourquoi sans atteinte à leur indépendance, la pratique aboutit davantage
à une collaboration des pouvoirs entre eux. Elle prend la forme de moyens d’action les uns à
l’égard des autres. Par exemple, le président de la République peut dissoudre l’une des
chambres du Parlement ; les députés peuvent, sous conditions, demander la démission du
gouvernement via la motion de censure. Aussi, la pratique politique amène régulièrement le
gouvernement, lorsqu’il dispose d’une majorité, de proposer des lois (Projet de loi) au
Parlement. En réalité, la plupart des lois votées au Parlement sont des projets de loi, donc
proposés par le pouvoir exécutif.
Dans cette séparation dite “souple”, certaines entorses sont faites au principe
séparatiste. Par exemple, le mode de désignation des juges du conseil constitutionnel: trois
membres sont nommés par le Président de la République, dont le Président du Conseil
constitutionnel, trois par le Président de l’Assemblée nationale et trois par le Président du
Sénat. De plus, les anciens présidents de la République sont membres à vie. Cet exemple
illustre le cas d’un organe judiciaire, jouissant d’un important pouvoir et d’un certain prestige,
dont les membres sont nommés directement par les deux premiers organes.
Néanmoins, pour garantir l’impartialité de ses membres, leur mandat de neuf ans n’est pas
renouvelable.
De plus, la procédure du “49-3” qui permet à l'exécutif de forcer l’adoption d’une loi
peut elle aussi être considérée comme une entorse à la séparation des pouvoirs.
De façon générale, la théorie ne pourra jamais fonctionner telle qu’elle nous est
donnée par Montesquieu. L’histoire nous l’a démontré: une séparation stricte des pouvoirs
entraîne une paralysie des institutions, comme sous le directoire par exemple. Sans tomber
dans le régime d’assemblée ou dans toute autre dérive, il est nécessaire de l’adapter de
manière à le faire correspondre à la réalité de la vie politique et des institutions modernes.

II) La théorie séparatiste, moteur de la liberté politique.

“La liberté politique ne se trouve que dans les gouvernements modérés”.


Montesquieu, “De l’esprit des lois”.

Par liberté politique, on entendra la faculté du peuple à faire entendre sa voix. En


effet, la théorie séparatiste a pour but d'empêcher les excès de pouvoirs, et donc de mettre
en fonction des administrations qui gouvernent pour l’interet general, et non plus “Car tel est
notre bon plaisir”.
Au sein d’une démocratie qui est, rappelons le, “le gouvernement du peuple, par le
peuple, pour le peuple” (Abraham Lincoln), la voix des citoyens est généralement portée par
la chambre basse d’un parlement. C’est le cas des Etats-unis d’amérique avec la chambre
des représentants, c’est également le cas pour la France avec l’Assemblée nationale.
Il s’agit de déterminer laquelle des deux lectures de cette théorie permet à la
chambre basse du Parlement d’exercer ses fonctions, de manière à ce que ce
“gouvernement du peuple par le peuple pour le peuple” puisse effectivement s’exercer.

A) La chambre des représentants aux Etats-Unis, dans l’ombre du Sénat.

Instituée par la Constitution des États-Unis d'Amérique de 1787, la Chambre des


représentants est l'un des deux organes, l'autre étant le Sénat, qui détiennent le pouvoir
législatif et qui, pris ensemble, forment le Congrès.
La composition et l’étendue de ses pouvoirs figurent à l’article premier de la
Constitution. Cette place de choix démontre son importance considérable et sa forte valeur
symbolique.
Quant à la répartition des sièges entre États, elle s'opère suivant les termes de l'article
premier, section 3 : “Chacun des différents États membres de l'Union, affirme la Constitution
de 1787, bénéficiera d'une représentation proportionnelle à sa population”.
La Chambre des Représentants vote les lois fédérales, possède l’initiative pour le
vote du budget, procède à l’élection du président si aucune majorité n’a été établie et enfin
est a l’initiative de l’impeachment.
Au sein du Congrès, les sénateurs disposent d’un prestige plus important que les
représentants. En effet, il est le porte parole des Etats et non de la population, au sein d’un
Etat fédéral. Là, il est important de prendre en compte qu’il s’agit d’un Etat fédéral.

B) L’assemblée nationale française, bénéficiaire d’un bicamérisme inégalitaire.

En France, dans le cadre de la Constitution de la Ve République, c'était aussi le cas


sous la IVe République, l'Assemblée nationale, ou chambre des députés, est l'assemblée
élue au suffrage universel qui dispose, avec le Sénat, du pouvoir législatif. Les deux
chambres forment le Parlement. En cas de désaccord entre elles sur un projet de loi, c'est
l'Assemblée nationale qui a le dernier mot. En outre, elle a seule le pouvoir de renverser le
gouvernement.
L'Assemblée nationale, dont le siège est au palais Bourbon, est composée de 577
députés élus pour une législature de 5 ans. Elle peut être dissoute par le Président de la
République, selon l'article 12 de la Constitution. Cette procédure rentre dans le cadre des
moyens d’action réciproques entre les pouvoirs, ce qui est caractéristique d’un régime
parlementaire.
L’Assemblée nationale vote la loi en collaboration avec le sénat mais c’est elle qui a
le dernier mot; elle contrôle l’action gouvernementale avec des outils tels que les questions
au gouvernement, le vote des questions de confiance et le vote des motions de censure.
En France, les pouvoirs de l’Assemblée nationale sont supérieurs à ceux du Sénat,
de plus, c’est toujours elle qui a le dernier mot. Nous sommes dans un situation de
bicamérisme inégalitaire, qui penche en faveur de la chambre basse. Contrairement aux
Etats-Unis, le Sénat représente des collectivités territoriales au sein d’un Etat unitaire et
“indivisible”, ce qui explique qu’il ait un rôle moindre face à la chambre représentant tous les
citoyens de l’Etat.
Là, il est important de prendre en compte qu’il s’agit d’un Etat unitaire.

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