TP Droit Pénal Militaire2

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Depuis la nuit de temps, tous les justiciables étaient entendus dans les juridictions purement

civiles, et comme cela se dégradait de plus en plus avec une série d’intimidation, de trafic
d’influence, abus de pouvoir, de chantage, … Au détriment des autorités civiles de ces
juridictions .
C’est suite aux raisons et arguments évoqués ci-haut que les juridictions militaires appropriées
et compétentes d’ordre militaires ont pu voir le jour .
L’infraction militaire est d’abord un manquement au devoir de soldat, manquement qui
constitue aussi une faute disciplinaire ne pouvant être commise que par un militaire :
Le Code de justice militaire, dans son livre III, distingue « les infractions tendant à soustraire
leur auteur à ses obligations militaires » (ex : insoumission, désertion), « les infractions contre
l’honneur ou le devoir » (ex : capitulation, complot, pillage, outrage au drapeau), « les
infractions contre la discipline » (ex : insubordination), « les atteintes aux intérêts
fondamentaux de la nation en temps de guerre ».

L’infraction militaire peut être, ensuite, une infraction de droit commun, telle qu’un vol ou
des coups et blessures, si elle est commise par un militaire dans le service et dans bien
d’autres circonstances.
La question de compétence partagée entre les juridictions militaires congolaises et les
juridictions civiles depuis la promulgation de la loi organique du 11 avril 2013, mérite
effectivement une étude approfondie qui évalue l’évolution de la jurisprudence de ces deux
systèmes, au regard des attentes du Peuple congolais, mais aussi des exigences du Droit
international des droits de l’homme.
Le droit pénal militaire est, par sa définition, un droit particulier. Il est né de la nécessité de
régler la situation particulière que constitue l’Armée dans un Etat, et de régir une catégorie
particulière des personnes, celle des citoyennes et citoyens qui servent dans les Forces
Armées.

La règle fondamentale imposée à ces personnes, c’est la discipline, en vue d’une défense
efficace contre toute agression. Une discipline telle qu’elle ne saurait être la règle commune
de tous les citoyens.
Mais voilà que la tendance dominante de dernières interventions du législateur militaire est de
quitter le domaine qui lui est propre, pour aller à la conquête des domaines qui lui sont tout à
fait étrangers, et faire du Code pénal militaire le siège du droit pénal ordinaire. Telle est la
situation lorsqu’il incrimine les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité, le génocide ou
le terrorisme.
Non seulement le Code pénal militaire comporte des infractions qui devraient figurer au Code
pénal ordinaire, mais aussi il ne procède pas toujours de la manière la plus appropriée.
Cela fait plus de quatre ans que la Loi portant organisation, fonctionnement et compétence des
juridictions de l’ordre judiciaire a été promulguée et les juridictions civiles n’ont rendu qu’un
arrêt, tandis que les juridictions militaires continuent de juger des civils.
Et l’un des arguments les plus couramment évoqués est l’article 111, alinéa 2 du Code
judiciaire militaire, en ce qu’il dispose comme suit : « Elles sont en outre compétentes à
l’endroit de ceux qui, sans être militaires, commettent des infractions au moyen d’armes de
guerre ».
Ainsi, la Cour militaire de Kinshasa-Gombe , après avoir affirmé que les personnes étrangères
à l’Armée ne sont pas justiciables des juridictions militaires, elles le deviennent « lorsqu’elles
commettent les infractions à l’aide, au moyen, par ou avec des armes de guerre » .
La Loi de 2013, en disposant que les Cours d’appel sont compétentes pour connaître au
premier degré « 1. Du crime de génocide, de crime de guerre et de crime contre l’humanité
commis par les personnes relevant de leurs compétences et de celles des Tribunaux de grande
instance » n’a entendu soustraire qui que ce soit à la compétence de ces juridictions. Sinon
elle l’aurait expressément prévue.
A supposer que l’article 111, alinéa 2 du Code judiciaire militaire soit en contradiction avec
l’article 91 de la Loi de 2013, il n’y aurait même pas lieu à évoquer un conflit de Lois dans la
mesure où les deux textes n’ont pas la même valeur juridique, le Code judiciaire militaire
étant porté par une Loi alors que l’article 91 est porté par une Loi organique, donc applicable
parce que supérieure à une Loi ordinaire.
- Bien plus, à supposer même que les deux dispositions aient été d’une même valeur
juridique, c’est encore la Loi de 2013 qui recevrait application car elle est postérieure.
- Si la compétence des juridictions militaires demeure vis-à-vis des crimes contre la
paix et la sécurité de l’humanité commis par des militaires et de policiers, c’est parce
que cette compétence est portée par la Constitution et qu’une Loi, fut-elle organique,
ne peut modifier celle-ci.
Donc, aucun argument de droit ne devrait permettre aux juridictions militaires de continuer à
juger les civils sous quelque prétexte que ce soit. Mais, malheureusement, force est de
constater que depuis la promulgation de la loi de 1991, une seule décision a pu être rendue par
une Cour d’appel, en l’occurrence, la Cour d’appel de Lubumbashi, dans l’affaire
MUKALAY WA KUMBAO etc, par son arrêt du 30 septembre 2016.
Cet arrêt, qui a retenu le crime de génocide, a subi certaines critiques, notamment en ce que :
- Les faits ne sont pas clairement résumés dans l’arrêt ;
- La qualité des parties est complexe dans la mesure où certains accusés sont en même
temps victimes ;
- Le juge applique directement les dispositions du Statut de Rome sans préciser le
fondement d’une telle démarche ;
- Le juge aurait pu faire application de nouvelles dispositions du Code pénal portées par
les lois du 31 décembre 2015 ;
- Les éléments constitutifs du génocide ne sont pas établis, notamment les éléments
généraux tels que l’existence préalable d’un contexte particulier ou la détermination
du groupe protégé.
Si l’article 91 de la loi du 11 avril 2013 a des difficultés à recevoir application, ce n’est pas
parce qu’il n’est pas clair. Les motifs de l’inapplication résident certainement, d’une part,
dans la résistance des juridictions militaires à se délester d’un contentieux auquel elles se sont
habituées et, d’autre part, au manque de moyens conséquents pour entreprendre les enquêtes
et des poursuites complexes et onéreuses, notamment quand il s’agit des faits remontant loin
dans le temps.
Une bonne information sur l’état du Droit international des droits de l’homme permettrait de
déployer de nouveaux efforts pour mettre en question les pratiques actuelles et créer les
conditions d’une véritable réforme.

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