Demo7 8 20-23 Version Finale

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 4

Démocratie n° 7/8 • Juillet-août 2020 • 20

Nadia NSAYI
INTERVIEW Politologue, curateur et auteur du livre
Dochter van de dekolonisatie.

Frantz FANON, Peau noire, masques blancs, Coll. Points Essais, Points, Paris, 2015
(réédition de 1952), 240 pages.

Décoloniser les esprits


Dans cette période où le meurtre de George Floyd ravive les questionnements liés au
racisme, nous avons interrogé Nadia Nsayi sur la nécessité de mener le processus
de décolonisation jusqu’à son terme pour que nous puissions, tant en Belgique qu’au
Congo, regarder l’histoire de la colonisation sans fard. Et pour que nous puissions
envisager la construction d’un futur commun plus juste pour toutes et tous.

Le 30 juin dernier, le Congo fêtait ses 60 ans par exemple les dispositions relatives à l’acquisition
d’indépendance. Comment expliquer qu’on de terres limitant les intérêts étrangers. Récemment,
parle encore de décolonisation ? juste avant les élections, il y a eu un nouveau code
Le Congo a été une colonie pendant 75 ans. En1960, minier pour anticiper la demande croissante en co-
il y a eu une décolonisation formelle. Le Congo est balt. Là aussi la pression a été forte pour maintenir les
devenu un pays souverain. Mais déjà là, on ne pouvait intérêts de la communauté internationale. Il est donc
pas parler de décolonisation économique. Comme le toujours important de parler de décolonisation parce
dit le politologue Jean Omasombo, l’État indépendant qu’il faut une indépendance économique pour que le
a été assassiné. La Belgique et ses entreprises ont tout peuple congolais puisse aussi bénéficier de ses res-
fait pour que l’État et le gouvernement de Lumumba sources naturelles. Potentiellement, c’est un des pays
ne puissent pas avoir de force économique. Il suffit les plus riches du monde, mais la population est parmi
de se rappeler la sécession katangaise. Aujourd’hui, les plus pauvres. C’est un paradoxe scandaleux.
60 ans après, nous devons continuer à parler
de la décolonisation par rapport à la situation On assiste en fait à une forme
économique du Congo. Ce pays ne maîtrise de néocolonialisme ?
toujours pas ses ressources naturelles et reste Oui. La colonisation a introduit au Congo une logique
© Michel Wuyts

dépendant de la communauté internationale. de pillage qui est encore à l’œuvre aujourd’hui et qui
Les ressources naturelles notamment minières implique une alliance de la communauté internatio-
y sont exploitées, mais la valeur ajoutée ne s’y nale, des multinationales et d’une partie de l’élite
fait pas. La nouvelle loi agricole est un autre congolaise. Tout cela au détriment de la population.
exemple de cette dépendance à la communau- Nous sommes dans un système néocolonial qui a com-
té internationale. Il y a eu des pressions ter- mencé dès 1960 avec l’assassinat de Lumumba. En ce
ribles, de la Belgique y compris, pour changer point, on peut dire que l’État colonial a une influence
qui se ressent encore aujourd’hui sur l’État congolais.
EXPOSITION « 100 x Congo - L’influence de la Belgique n’a donc pas cessé en 1960.
Un siècle d’art congolais à Anvers » Elle garde une certaine mainmise sur la situation poli-
Il y a exactement cent ans, la collection congolaise de la tique, économique et même militaire du Congo.
ville d’Anvers a vu le jour en pleine période coloniale. 100
X Congo met à l’honneur cent pièces phares. Quelles histoires Quand on parle de décolonisation dans
s’y cachent ? Comment sont-elles arrivées ici ? Quelle était leur signi- le contexte belge, qu’est-ce que cela veut dire ?
fication pour les peuples congolais ? Et qu’en est-il de la présence Pour coloniser, la Belgique a dû mettre en place toute
africaine à Anvers ? Par cette exposition, le musée nous invite à me- une propagande qui a trouvé un terrain d’expression
ner une réflexion sur l’image des Africains et sur le passé, le présent dans les médias, dans l’enseignement. Beaucoup de
et l’avenir de la collection congolaise.
gens ont grandi dans un contexte où on racontait que
Informations pratiques : du 2/10/2020 au 29/03/2021 au MAS
les Noirs étaient sous-développés, qu’ils étaient des
(Museum aan de Stroom) à Anvers - https://www.mas.be/
primitifs qu’il fallait civiliser. L’appel à décoloniser
Démocratie n° 7/8 • Juillet-août 2020 • 21

c’est donc d’abord décoloniser les mentalités for- LIVRE


matées souvent d’une manière inconsciente : voir Dans « Fille de la décolonisation » (ouvrage en néerlandais), la politologue
les Noirs, mais surtout se voir différemment. Et les Nadia Nsayi aborde la colonisation belge et l’injustice qui est fondamentale-
Congolais·es qui considèrent la culture des « bano- ment inscrite au coeur de ce système. Face à notre héritage colonial, elle insiste
ko » 1 comme supérieure doivent décoloniser aussi sur l’importance des excuses belges, mais aussi sur l’indispensable processus
leur mentalité. Il s’agit principalement d’un travail de décolonisation à mener, soixante ans après l’indépendance du Congo. Son
de décolonisation mentale. L’héritage colonial est plaidoyer final à ce propos est éloquent.
aussi palpable dans la coopération au développe-
ment qui n’est autre que la prolongation de ce qui propre vision qui soit inspirée de cette période colo-
était nommé jusqu’en 1960 le travail de civilisation. niale, mais aussi de celle qui l’a précédée. Le fait que
Le ministère de la colonie est devenu le ministère de le français soit toujours la langue officielle, doit être
la coopération au développement... discuté, car pour beaucoup de Congolais·es, ce n’est
Ce passé colonial est inscrit dans nos rues et dans pas leur langue maternelle. C’est un héritage colo-
vies. Je pourrais aussi citer la présence de la grande nial. Dans les mentalités, être développé c’est bien
diaspora congolaise en Belgique qui n’est évidem- parler français. Mais comment faire comprendre un
ment pas le fruit du hasard. La colonisation c’était programme électoral en français à une population
une migration des Belges vers le Congo et après qui ne parle pas la langue ? La seule façon de s’en
1960, ce sont des Congolais·es qui sont venu·es ici, sortir pour le Congo c’est de trouver son propre mo-
d’abord pour les études et puis comme réfugié·es po- dèle à tout point de vue, y compris linguistique.
litiques. C’est important d’expliquer cela aux jeunes
belges. Il faut leur expliquer que la présence de cette Cette nouvelle génération semble aussi plus
diaspora est la conséquence d’une décision politique déterminée à faire revendiquer ses droits.
prise dans le passé, à savoir la colonisation. Le mouvement pour la décolonisation semble
être plus fort qu’auparavant...
Et ce récit occultait la résistance noire. C’est vrai. C’est lié aux injustices qui sont vécues
Là aussi, il y a une décolonisation par les afrodescendant·es. Depuis les manifestations
des mentalités à opérer ? après la mort de George Floyd, nous observons que
Ce sont des Blancs qui ont décidé la manière dont on nous sommes dans un processus d’émancipation. De
voit l’Afrique et l’histoire coloniale. Mais ça, c’est la même manière qu’il y a eu un processus d’éman-
en train de changer. Il y a une nouvelle génération cipation ouvrière, des femmes, de la communauté
d’afrodescendant·es qui exigent la décolonisation LGBT, nous avons enclenché un processus d’émanci-
de la société. Il·elles veulent qu’on arrête d’essayer pation des minorités ethnoculturelles. Nous sommes
d’effacer ce pan de l’histoire. Que ce soit dans l’en- à la troisième génération depuis les premières migra-
seignement, dans les médias, il faut rouvrir ce pas- tions. La première génération, celle de mes parents,
sé… parce qu’il est toujours présent dans la société. était très silencieuse. Il·elles ne revendiquaient pas
Il·elles veulent aussi que l’on en parle différemment. à grande échelle. Il·elles avaient en fait une menta-
Notamment en n’occultant plus le point de vue des lité d’immigré·es. Les deux générations suivantes
Noirs. Une statue de Léopold II aujourd’hui ne quant à elles, sont nées ici, ont grandi ici et que re-
suscite pas les mêmes ressentiments chez une per- marquent-elles ? Que malgré leur citoyenneté belge
sonne d’origine congolaise que chez une personne de naissance, il n’y a pas grand-chose qui change entre
d’origine belge, alors que nous sommes tou·tes ci- la situation socio-économique de leurs parents et la
toyen·nes belges ! Ce n’est pas normal de ne pas leur : très bien formées (60 % sont diplômés de l’en-
aborder l’histoire du Congo à l’école ou d’en parler seignement supérieur dont la moitié universitaire),
en reproduisant le discours qui légitime la colonisa- elles sont quatre fois plus discriminées sur le marché
tion. Il faut créer des espaces pour avoir d’autres nar- de l’emploi 2. Les jeunes vivent ça dans leur famille.
ratifs sur l’Afrique, le Congo et les Congolais·es. Et Leurs parents bien formés restent dans une situation
les Congolais·es et afrodescendant·es doivent avoir de déclassement professionnel. Cela les frustre énor-
une influence sur ces narratifs. mément. Quand il·elles s’attaquent aux statues ce ne
S’il y a un débat en Flandre et en Communauté sont pas seulement les statues qu’il·elles visent, mais
française à ce propos, au Congo, pas. Il n’y a pas aussi ce qu’elles symbolisent c’est-à-dire l’exploita- 1. Oncles en Lingala, terme
de politique de l’enseignement. On ne fait qu’un tion, la domination, le racisme, l’injustice avec la- utilisé pour parler des Belges.
copier-coller de la Belgique. Il n’y a pas de vision. quelle les afrodescendant·es sont traité·es… Les vrais 2. Voir l’étude de la
Beaucoup de références au Congo se situent dans la enjeux aujourd’hui pour eux·elles ont trait à la justice fondation roi Baudouin à
ce propos : https://www.
période coloniale et c’est assez dramatique. Pour- socio-économique. Les gens veulent participer plei- kbs-frb.be/fr/Virtual-
tant, la seule façon de s’en sortir, c’est de créer sa nement à la société. Ça commence notamment avec Library/2017/20171121_CF
Démocratie n° 7/8 • Juillet-août 2020 • 22

un travail digne. Si la classe politique n’apporte pas belges et internationaux de créer cette dynamique.
de réponses, la situation pourrait empirer, se radica- Les Congolais·es doivent avoir leur propre vision
liser et au final, cela constituera un sérieux problème par rapport à l’agriculture, à la protection sociale,
pour la stabilité de la société. etc. Comme le disait Joseph Ki-Serbo : on ne déve-
loppe pas, on se développe. Cela impose aussi de
Mais à Bruxelles, l’activisme n’est pas neuf ? réfléchir sur la façon de faire financer ces activités...
C’est vrai. Mais ce qui est nouveau, c’est sa présence Ce que les organisations belges peuvent faire par
de plus en plus prégnante en Flandre où les nouvelles contre, c’est renforcer la société civile congolaise.
générations qui y ont grandi sont bilingues et se sentent Parce que c’est cette société civile qui va pouvoir re-
belges. Il·elles se disent même Flamand·es. C’est vendiquer et changer son propre système et représen-
une nouvelle dynamique. On voit que l’activisme à ter la population. Les petits projets dans les villages, je
Bruxelles est beaucoup plus avancé qu’en Flandre, avec ne crois pas à leur durabilité. Les paysan·nes forment
de grosses structures telles que Mémoire collective. un groupe qui a un avantage démographique fort,
Mais dans les grosses villes flamandes, cet activisme mais il n’est pas structuré. C’est la même chose pour
se développe et les alliances avec d’autres groupes ex- les femmes, les jeunes. S’il y avait un soutien structu-
térieurs se créent via notamment les réseaux sociaux. rel pour renforcer leurs mouvements, on pourrait créer
La manifestation à Bruxelles début juin était le résultat ce nouveau rapport de force dont le Congo a besoin.
d’une alliance maghrébine, africaine, subsaharienne, Lucha par exemple, je ne comprends pas qu’il ne
flamande, bruxelloise, etc. Cette jeune génération ne se soit pas encore un mouvement de masse, quand on
laisse pas limiter par des différences linguistiques. sait que 65 % de la population congolaise a moins
de 25 ans. Si Lucha pouvait être présent dans les 26
Et au Congo ? provinces, former une jeunesse critique, les choses
Au Congo, il existe depuis 2012 un mouvement ci- pourraient changer. Ce serait intéressant serait
toyen : Lucha. Il se préoccupe principalement de d’avoir des échanges d’expériences entre les organi-
thématiques socio-économiques (accès à l’eau, élec- sations de jeunes belges et congolais. La Belgique a

LA LUCHA
« La Lucha » est un mouvement citoyen congolais non-partisan & non-violent qui a été
lancé le 1er mai 2012 à Goma, en République démocratique du Congo. « 60 ans après,
les jeunes veulent voir un Congo unis et prospère, où on sera fier d’être appelé congolaise
et congolais, où il sera bon vivre pour tous et non pas pour un nombre facile à compter; les
jeunes veulent voir un Congo débout et un congolais soucieux de l’avenir car le Congo nous
appartient, notre présent et avenir peut être radieux si nous le voulons. »
www.luchacongo.org/

tricité, etc.) et de citoyenneté (élections, sécurité, etc.). vécu plusieurs processus d’émancipation qui pour-
Lucha ne se prononce pas vraiment sur la colonisation, raient inspirer les jeunes au Congo. L’émancipation
car la situation au Congo est focalisée sur d’autres ur- ouvrière par exemple. Comme celle-ci a été menée ?
gences. En fait, le débat sur la décolonisation n’est Comment les gens se sont-ils organisés pour obte-
pas très présent au Congo sauf peut-être dans certains nir plus de droits, etc. ? C’est intéressant de partager
milieux (culturels, artistiques, activistes...). De plus, cela avec les partenaires congolais. Le souci, c’est
ces débats ont déjà eu lieu. Sous l’ère Mobutu dans que la coopération au développement s’enferme
les années 70, il y a eu un processus de décolonisa- dans des critères et indicateurs tuant la créativité.
tion culturelle : les statues ont été retirées de l’espace Nous sommes dans un contexte sociétal où cha-
public et mises dans les musées, les noms de rue, de cun et chacune doit questionner sa position dans
villes ont également été africanisés, les noms chré- la société. Cela vaut aussi pour les structures. In-
tiens retirés. Et puis, les gens ne sont tout simplement terroger l’Histoire pour construire à l’avenir des
pas au courant. Les médias n’en parlent pas. rapports plus équitables. La colonisation a eu un
impact, des conséquences par rapport à l’inégalité
Quel sens donnez-vous à la coopération dans le monde. Ces inégalités sont là et nous devons
au développement dans cette vision ? changer notre façon de penser, de voir les choses
Je crois à la solidarité internationale, mais à une so- et d’agir. C’est la seule façon d’essayer de créer un
lidarité qui va dans les deux sens. Je suis convain- monde un peu plus juste. #
cue que le Congo aussi peut apporter à la Belgique. Propos recueillis par Stéphanie BAUDOT
Je pense également qu’on ne peut soutenir une dy-
https://www.mas.be/fr/page/pr%C3%A9vu-100-x-congo
namique que si elle existe. Ce n’est pas aux acteurs
Démocratie n° 7/8 • Juillet-août 2020 • 23

BOUGER CET ÉTÉ

CULTURE ET DÉTENTE
BRUXELLES - EXPOSITION
« VOS TOILETTES PROPRES, NOS PROPRES PAPIERS ! ».
Venez découvrir cette exposition de photographies sur la Ligue des travailleuses domestiques.
Cette ligue regroupe des femmes sans-papiers vivant dans notre pays dans l’isolement, la
peur et des conditions de vie précaires. Aujourd’hui, elles sortent de l’anonymat pour révéler
au grand public leur situation et pour revendiquer, entre autres, une régularisation par leur
travail. L’exposition est visible jusqu’au 30 août à l’intérieur de l’église du Béguinage (place du
Béguignage) au centre de Bruxelles. Un projet initié par la CSC, le Mouvement Ouvrier Chrétien
(MOC) de Bruxelles et le projet House of Compassion porté par des chrétiens de la paroisse.
Exposition gratuite. Heures d’ouverture : mardi au dimanche ( 11h à 17h).

CHARLEROI - STREET ART : PARCOURS « ASPHALTE »

Amateur·trice de street art ? Ce parcours « Asphalte » est fait pour vous !


Il vous fera découvrir des fresques murales dont la plupart ont été réa-
lisées dans le cadre de la biennale d’art urbain «Asphalte» en 2014. Des
stars internationales du street art ont ainsi investi Charleroi : leur projet
comprend onze fresques monumentales, réalisées au centre-ville, ainsi
que des dizaines d’autres interventions plus petites.
Pour télécharger l’itinéraire du parcours : https://www.cm-
tourisme.be/fr/a/parcours-asphalte - longueur de l’itinéraire :
4km - Difficulté : facile - Convient aux poussettes

NAMUR - EXPOSITIONS « PAS SON GENRE ! LA QUESTION


DU GENRE EN ARCHÉOLOGIE » & « ARCHÉO-SEXISME »
Cet été, rendez-vous au Musée archéologique de Namur pour découvrir deux expositions ayant
pour thématique les discriminations en archéologie.
Au fil de l’exposition « Pas son genre ! La question du genre en archéologie », les visiteurs et
visiteuses découvriront comment la question du genre peut être abordée par la discipline de
l’archéologue. « Pas son genre ! La question du genre en archéologie » - du 11/07 au
25/10 - Musée archéologique de Namur
L’exposition « Archéo-Sexisme » compile de témoignages illustrés sur les discriminations en
archéologie, du sexisme majoritairement mais également du racisme, de l’homophobie et la
transphobie. « Archéo-Sexisme » - du 11/07 au 7/10 - Musée archéologique de Namur

ANVERS - ZOMER VAN ANTWERPEN


Des envies de vacances sans quitter la Belgique ? Rendez-vous tout l’été au « Zomer van
Antwerpen », ce festival anversois qui vous a préparé un été culturel que vous n’êtes pas
prêt d’oublier ! Au programme : théâtre, danse, concerts, ateliers, projections cinématogra-
phiques... Sans oublier le magnifique « Zomerbar », véritable oasis urbaine avec palmiers,
hamacs, transats et sable fin pour les grands et escalade, jeux en bois et manège fantôme
pour les petits.
Ce bar d’été sera le lieu idéal pour découvrir les jeunes talents de l’univers circassien : chaque
jour y sont données de petites représentations où acrobates et jongleurs émerveilleront pe-
tits et grands.
Toutes les informations pratiques ici : https://www.zva.be

Vous aimerez peut-être aussi