La fascinante ascension de Théodora, la courtisane devenue épouse de l'empereur byzantin Justinien 1er
Ascension fulgurante et beauté rare : la courtisane, devenue épouse de l'empereur byzantin Justinien 1er, a marqué son époque. Une histoire racontée par Virginie Girod*.
Passer la publicitéAutrefois, elle inspirait les péplums et hantait les théâtres, campée par une Sarah Bernhardt laissant rouler dans sa bouche les mots tragiques que le dramaturge Victorien Sardou lui prêtait. Mais le temps a passé et cette prostituée des bas quartiers, épouse d'un empereur, lui-même héritier d'un petit militaire des Balkans ayant réussi un coup d'État, a été oubliée. Qui pour se souvenir de sa volonté de sortir les filles de joie des griffes des souteneurs ? Qui pour admirer le changement d'étiquette qu'elle a imposé en obligeant les fonctionnaires à la saluer par un baiser donné sur la pointe de son soulier ? Certes, personne. Mais, nous, nous rendrons au moins hommage à sa beauté.
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«Petite catin sortie du ruisseau»
La meilleure source dont nous disposons sur Théodora est Procope de Césarée, un rhéteur proche de la cour. Il a écrit des ouvrages de commande où il chante les louanges du couple impérial, puis un second où il donne sa véritable opinion. En réalité, il déteste l'impératrice, petite catin sortie du ruisseau qui se plaît à humilier l'aristocratie byzantine. Sa haine est le corollaire de sa fascination. Aussi s'emploie-t-il longuement à décrire la beauté de Théodora, qu'il ne peut critiquer sans passer pour un menteur tant elle est proverbiale. Il la décrit comme une femme petite, menue, au teint pâle mais légèrement mat, ce qui ressemble fort à cette belle carnation propre aux femmes de la rive orientale de la Méditerranée. L'ovale de son visage est parfait, ses cheveux bruns, son nez délicat, sa bouche merveilleusement ourlée et ses yeux sombres ont une intimidante intensité. Théodora n'est pas seulement belle. Son charisme et son esprit piquant subliment la splendeur de ses traits.
L’accès au pouvoir
L'accession au pouvoir a transformé son charme provocant en beauté hiératique. Selon Procope de Césarée, elle accorde alors trop de temps à s'occuper de son corps, mais moins qu'elle ne l'aurait voulu, ajoute-t-il. Elle passe ses matinées au bain, ce qui inclut l'épilation, les massages et les soins émollients. Ensuite, elle déjeune et fait une sieste qui n'entame en rien la longueur de ses nuits. On pourrait supputer que tous ces soins, y compris le sommeil que l'on sait précieux aujourd'hui, ont permis d'entretenir sa beauté. Mais la description de la «routine» de Théodora a pour but de montrer au lecteur contemporain de l'impératrice qu'elle était de nature molle, comme toutes les femmes, selon les préjugés de la médecine antique, et que cette mollesse est accrue par les bains et le sommeil. Impossible de gouverner correctement quand on vit entre la salle de bains et son lit !
Procope exagère pour discréditer l'impératrice. Il n'empêche que sa beauté le subjugue. Elle a déjà la quarantaine lorsqu'il la côtoie au palais. Elle meurt de maladie à 50 ans, sans que sa beauté ne soit flétrie. Il reste d'elle un portrait en mosaïque dans la basilique Saint-Vital, à Ravenne, en Italie. Les grosses tesselles de marbre et mosaïque employées à l'époque ne rendent pas grâce à son visage. Mieux vaut encore lire Procope de Césarée et se laisser bouleverser comme lui par l'étourdissante beauté et le charisme de Théodora.
(*) Virginie Girod est docteure en histoire. Découvrez d'autres personnages historiques avec Virginie Girod dans le podcast Au cœur de l'histoire , et tous les week-ends à 15 heures sur Europe 1.
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