L'Année Sociologique

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L'Anne sociologique (1896)

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L'Anne sociologique (1896). 1896-1897.

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8R i5i62 ~6-1897
i~~<~ 1~~7

J~ /M~
Anne 1
)t BIBUQTHQUE

DH PHtLOSOt'tHM CONTEMPORAtNE

L'ANNEE C

SQCtOLOGtQUE
'~p)L'Bt.t)~SOL'S!.ADHtHCTtO\

MtLE DURKHEIM
~'[ofe<M)Nf de t~ei")''ttkA h t'<tcuh< 'te), tettrtt do )'UaiYet"iit<) <te Bontotmt

AVt!t;MOOLt.ttjO*TtO'<DK!t)f.
6)MM6L, p'ft*M))rMTn)t-etth<<hB<t))<t
BtOHAHC. dMtM<'tt)<ttMt;E. t.EVV.'t"<'<M'<<hTt)haM
aoUOLt. 'Mt'M <t' rmtttMMM t )'Ut.t'<M))< dt MmetjpttBtt
FAUCONWBT,HUeMT~AfX!, MAU66. A. M)t.WAUO,MUFFANQ. PAHOO<
S)M)AM&, )MftMmtt <~(f* <t" r~'t))<'<n)t<

PRENtM ANNE (iMe-tMTy


).-M~MO)M60ft)0'NAUi<
B. Btt~tetXt. ta p~ftiMoK de MMCf~ et wt
et~tMM.
0. ShaMf). CeMM<'x< <et /t)fMtM <M<<t~MM MMht-
MMWt<.
Il.
t).-AMA).YS6S
Des tmvaux du <" ju)))et tXM au M juin 9?. Sec~.
M<'< /o~e c<x~fte. t~tfM~, Mwa~,~'M<' fft'Mf-
Aott'MMt'~M~. P<e)')t.

PARIS
AMtBMKB UBBAtRtB GEttMBK BAtLLtt~B ET C"
FEUX ALCAN, DtTEUR
<08, eoeLKVAttf eAtKT'o6<m*)K) <08

t898
L'ANNE

~'BIOLOGIQUE

r
LIBRAIRIE FLIX ALCAN

AUTRES TRAVAUX DE M. MtLEDURKHEtM

MM.
De la division du travail social. < volume in-8", t893.
Les Rgles de la mthode sooiologique. i volume in-tS,
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Le Suicide (tude sociologique). i vol. in-8", )89~
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LITES, EUROPENS), t vol. in.tS, t898 8 fr. 60

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G. RtCHARD. Le Sooialisme et la science sociale, t vol.
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L'ANNE
SOCIOLOGIQUE
.fUBU~SOUSLA DtKECTtOX C
A
EMtLEOURKHEtM
Pt~fesseur d~tpctoiugie & ta Faeutto de~ tettfcs de t'UniveMtK
deBordcau.

.\Y)!CHCOLHBOMTtOSMi)M.

MCM<mD, dM-tem t.
StMOE)., j'roffMtMft )TBittM)t< de Btriin;
ttttre'! E. ).EWY, <')xtte<t de muM !t )< F)(t)))tt de dm)) de ToMtouK:
BOUO)., mtttre de fonMrcMM t t'L'toMrtiK de Moxtjtt.~tt.r!
FAUCCNMET, HU6EHT, LAPtE, HAUaa. A. Wtt.HAUO, MUfFAttO. PAMO),
8)M)AMO, ))mfMwnf< )tj~<tde )'t'<titcr<)M.

PREMIERE ANNE (M96.MC7)

). MMOREa ORtO)MAU)t
K. B<trh)tet)tt. t ~M/ott/MK </e /'<Mt-M~ et
Of'tj/MC~.
t!. SbMM<'L CoMtMt'<t/ /M /'onMf~ MCta/M * ttXttH-
/tMK<'M~.
Il. ANALYSES
Uea tmvat<![ du )"jui)tct t8B6 mu 30 juin t!!9T..Softo-
<09t'e f/<')t~ff<< tf/'j/tCtMc. MMfatf, jMt-Mx~Ke, <-t'tM)i-
i-
Kf//f, <'CaMeK~Mf. MtMMW.

PARtS
ANC!EXX HBRAtUtE GKKMER BAtLHKE ET C''
FLIX ALCAN, DtTEUR
i08, BOUm'ABO SAtST'CBnMA)!<, <08
i898
Tottt dfoih rfMtt<<.
PREFACE

L'.htKt'c Mf/o~t~Mf n'a pas pour seul ni mme pour


principal objet de prsenter un tabtcau annuel do l'tat o
setrouve lu titt6)'aturo~<'<Mf'M~-oct'a~u<Ainsi circons-
crite, la tache serait trop restreinte et do mdiocre utilit
car les travaux de ce genre sont encore trop peu nombreux
pour qu'un organe bibliographique spcial soit ncessaire aux
travailleurs. Mais ce dont tes sociologues ont, croyons-nous,
un pressant besoin, c'est d'tre rgulirement informs des
recherches qui se font dans les sciences spciaies, histoire
du droit, des tnurs, des retirions, statistiquemoraie. sciences
conomiques etc.. car c'est ta que se trouvent les matriaux
avec lesquels la sociologie se doit construire. Rpondre ce
besoin, tel est, avant tout, le but de la prsente publication.
11 nous a paru que, dans tat actuel de la science, c'tait
le meilleur moyen d'eu luter tes progrs. En e)et, les con-
naissances qu'un sociologue doit possder, s'il ne veut pas se
iivrer un vain exercice de diatectiquo, sont tellement ten-
dues et varies, les faits sont si nombreux, pars de tant do
cts qu'on a grand mai a les trouver et qu'on risque tou-
jours d'en omettre d'essentiels. JI est doue dsirable qu'uu
travail prliminaire les mette davantage ta disposition
des intresss. Sans doute, mesure que lu sociologie se sp-
cialisera, il sera plus facile fi chaque savant d'acqurir lit
comptence et l'rudition ncessaires pour t'ordre particulier
de prohtemes auquel il se sera consacr. Mais il s'en faut que
ce moment soit atteint. !t y a encore trop de sociologues qui
dogmatisentjournellementsur le droit, la morale, la religion
avec des renseignementsde rencontre ou mmo avec les seules
lumires de la philosophie naturelle, sans parattre souponner
'hh.t.~ ,1..t n".
qu'un nombre considrable de documeMts ont t, d'ores et
dj. runis sur ces questions par tes coles ttistoriques et
ethnograpttiques de t'Alternante et de l'Angleterre. Ce n'est
donc pas faire une (cuvre Inutile que de procder priodique-
ment un inventairede toutes ces ressources, eu indiquant, au
moins sommairement, que) profit peut eu retirer in sociologie.
En dehors m~ne des vues et des recherches qu'eiies
peuvent
suggrer, ces analyses muthodiquesd'ouvrages spciaux, mais
qui se compltent les uns les autres, ne sont-elles
pas de
nature a (tut)tter. de ce qu'est lu rcitiitc collective, une im-
pression ptus vivante et mente une notion plus juste que les
generaiitesordinairesauxt)'aitesdep)ti)osop))iesociato?Aussi
esprons-nous t-fussir intresser, non seulement les socio-
logues de profession, mais tous les lecteurs claires
que pt'oc.
cupeut ces problmes. ti importe, eu ellet, que le public se
rende mieux compte de ta prparation qui est ncessaire
pour
aborder ces tudes, u(in qu'il devienne moins compiaisant
aux
coustructious faciles, plus exigeant en fait de preuves et d'in-
formations.
Mais notre entreprise peut tre encore utile d'une autre
manire elle peut servir a rapprocher de ta sociologie
cer-
taines sciences spciales qui s'en tiennent trop loignes
pour
ieur plus i<'rand dommage et pour le Ntre.
C'est surtout l'histoire que nous pensons en partant ainsi.
Ils sont rares, mme aujourd'hui, les historiens qui s'iat-
ressent aux recherchesdes sociologues et sentent qu'elles les
concernent. Le caractre trop gnral de nos thories, leur
insuffisante documentation fait qu'on les considre comme
ngligeables on ne leur reconnat gure qu'une importance
philosophique. Et cependant, l'histoire ne peut tre
une
science que dans la mesure o elle explique, et i'oh ne peut
expliquer qu'en comparant. Sterne la simple description n'est
gure possible autrement; on ne dcrit pas bien un fait
unique ou dont on ne possde que de rares exemplaires parce
~M'OM nr de voit ~<M t'H. C'est ainsi
que Fustet de Coulanges,
maigre sa profonde intelligence des choses historiques, s'est
mpris sur la nature de la ~Hs o il n'a vu qu'une vaste
famille d'aguats, et cela parce qu'i! ignorait les analogues
ethnographiques de ce type familial. Le caractre vritable
du Mcn- romain est bien difficile apercevoir et surtout a
comprendre si on ne le rapproche du ~<w polynsien. Les
exemples que nous pourrions donner sont innombrables.
C'est donc servir la cause de l'histoire que d'amener i'histo-
rien & dpasser son point do vue ordinaire, tendre ses
regards ou del du pays et do la priode qu'ii so propose plus
spcialementd'tudier, se proccuper des questions gn.
rates que son lvent tes faits particuliers qu'il observe. Or, ds
([U'ette compare, l'histoire devient indistincte de la sociologie.
1)'un autre cte, non seulement la sociologie no peut se pas-
ser de l'histoire, mais e)te a mme besoin d'historiens qui
soient en mme temps des sociologues. Tant qu'elle devra
s'introduire comme une trangre dans te domaine historique
pour y drober, en quelque sorte, les faits qui l'intressent,
elle ne pourra y faire que d'assez maigres provisions. Dpay-
se dans un milieu auquel elle n'est pas accoutume, il est
presque invitablequ'elle ne remarque pas, ou qu'eue n'aper-
oive que d'une vue assex trouble, les choses qu'elle aurait le
pins d'intrt a bien observer. Seul, l'historien est assez fami-
iier avec l'histoire pour pouvoir s'en servir avec assurance.
Ainsi, bien loin qu'elles soient en antagonisme, ces deux dis.
ciplines tendent naturellement l'une vers l'autre, et tout fait
prvoir qu'elles sont appeles se confondre en une disci-
pline commune on les lments do t'uno et de t'autro se
retrouveront comhins et unincs. 11 parat galement impos-
sible et que celui dont le rle est de dcouvrir les faits ignore
daus quelles comparaisons ils doivent entrer, et que celui
qui les compare ignore comment' ils ont t dcouverts. Sus-
citer des historiens qui sachent voir les faits historiques en
sociologues, ou, ce qui revient au mme, des sociologues qui
possdent toute la technique de l'histoire, voil le but qu'il
faut poursuivre de part et d'autre. A cette condition, les for-
mules explicatives de la science pourront s'tendre progres-
sivement toute la complexit des faits sociaux au lieu de
n'en reproduire que les contours les plus gnraux, et en
mme temps l'rudition historique prendra un sens puis-
qu'elle sera employe rsoudre les plus graves problmes
que se pose l'humanit. Fustet de Coutanges aimait rpter
que la vritable sociologie, c'est l'histoire; rien n'est plus
incontestablepourvuque l'histoire soit faite sociologiquement.
Or le seul moyen qu'aient les sociologues do prparer ce
rsultat, n'est-11 pas d'aller spontanment l'histoire, d'entrer
en contact avec elle, de lui montrer quel parti peut tre tir
des matriaux qu'elle accumule, de se pntrer de son esprit
et de la pntrer du leur ? C'est ce que nous avons essay de
faire dans les analyses qu'au trouvera plus loin. Quand 00
verra que la sociologie n'imptique aucunement le ddain des
faits, qu'etie ne recule )meme pas devant le dotait, mais que
tes faits n'ont de signification pour l'intelligence que quand
ils sont'~roupfs eu types et eu lois, on soutira mieux, sans
doute, ta possibilit et la ncessite d'une conception nouvelle
o le sens do ta ralit historique, dans ce qu'elle a de plus
concret, n'exclura pas cette recherche Mthodique dessimiii-
tudes qui est ht condition de toute science. Si t'.tHH~ ffocM~o-
~'<yt<(' pouvait coatrihuer, si
peu que ce ft, orienter quelques
bons esprits daus cette direction, nous M'aurions pas regret-
ter uotre peine'.
H. Notre but ainsi dfini, les cadres do notre publication
se trout'aient, par cela ntetnc, dtermines.
Si uotre principe objectif est de runir tes matriaux
ncessaires il ta science, cependant, il nous a paru qu'il serait
bon de montre)' par queiques exemples comment ces mat-
riaux peuvent <)tre mis en (Buvre. Kous avons donc rserve la
premire partie do !t;<Mf'f aux ~Mo'M <M'<M.r. Nous ne
demandons pas aux travaux que nous publierons sous ce titre
de 'se conformer a telle formule dtermine H nous suffit
qu'ils aient un objet dfini et qu'ils soient faits avec mthode.
Eu nous imposant cette"douhie condition, nous n'entendons
nuitemeut exclure la sociologie gcn6ra!e on pourra s'en
assurer plus loin. C'est une branche de lit sociologie, non
moins utile que les autres, et, si eiie prte plus facilement
l'abus des gnralits et ta fantaisie, ce n'est pas par une
ncessit de sa nature. Cependant, nous avouons que nos
.enorts tendront surtout u provoquer des tudes qui traitent
de sujets phts restreints et qui ressortissent aux branches
speeiates de la sociologie. Car, comme lu sociologie gneraie
ne peut tre qu'une synthse de ces sciences particulires,
comme elle ne peut consister que dans une comparaisonde
leurs rsultats les plus gnraux, elle n'est possible que dans
la mesure o elles sont eties-mmes avances. C'est donc
les constituerqu'il faut, avant tout, s'appliquer.

0) Tout < <)ui ))n''r)''dn poon-Mit s'tppthjttcr & tft statistique. Mit~cntK).
mhjuc soit tuomk', t)ui, ei~ fta~N, n'est itMtmctive tju'A cunditiuM d'~tM
Cf)H))))th:Si nns )KH-)<))~ ptus .<)~<-iMiu<Ut;))t t)H i'hi~toim. K'fst ')ttt'. <)tttM
i'etat a'-tuet f)M t-tK~es. <'t)~ eut ))[ i:uU)t't' p)i)K'i))tt)c <)e t'it)VCj)ix<ttion
t!0(-it)h<xi<)Ut' et que. <)'tn)h!UM, elle rsiste plus pai'ttcafitMMent H t'vo)p)ot
de la mthode cmopatttth'e.
La seconde partie de l'ouvrage, et la ptus considrabte, est
consacre aux analyses et aux notices Mbiiographiquea.Mais
comme le domaine de la sociologie est ottcore bien mat dfini,
nous devions, tout d'abord, circonscrire )e cercle des travaux
dont t'/tttnt'f .<!OCM<o~M/)<f entend s'occuper, afin de prvenir
les choix et les exclusions arbitraires. En un sens, tout cp
t~uj est historique est sociotogique.D'un autre ct, tes spcu.
tations de ta philosophiesur ta morate, le droit, ia retigiou,
peuvent n'tre pas sans intrt pour le sociologue. 11 tait
donc ncessaire de nous marquer une double limite.
Du ct de la philosophie, elle tait facile & dterminer.
Toutes testtoctriues qui concernent les mmurs, le droit, les
croyances religieuses, nous concernent pourvu qu'elles
admettent le postult qui est la condition de toute sociologie,
savoir l'existence de lois que la rflexion, mthodiquement
employe, permet de dcouvrir. Par l, nous ne voulons pas
dire qu'il faille nier toute contingence pour tre sociologue
la sociologie, comme les autres sciences positives, n'a pas se
poser ce problme mtaphysique. Elle suppose seulement que
les phnomnes sociaux sont lis suivant des relations intel-
ligibles et accessibles l'investigationscientifique. Par suite,
elle n'a pas tenir compte des systmes qui partent de l'hypo.
thse contraire. Les temps sont passs ou il pouvait tre utile
de les rfuter; si peu avance que soit notre science, elle a
ds A prsent produit assez de rsultats pour n'avoir pas
justifier perptuetiement ses droits l'existence.
Du ct de l'histoire, ta ligne de dmarcation est plus ilt.
tante. Etie ne peut mme tre fixe que provisoirement et
doit, selon toute vraisemblance,se dplacer mesure que la
science ette-mme avancera. Cependant, une rgle tout au
moins peut tre pose..Les seuls faits que nous ayons rete-
nir ici sont ceux qui paraissent susceptibles d'tre, dans un
avenir suffisamment prochain, incorpors dans la science,
c'est'-dire qui peuvent entrer dans des comparaisons. Ce
principe suffit "6Hminer tes travaux o te rote des indivi-
dualits historiques (lgislateurs, hommes d'tat, gnraux,
prophtes, novateurs de tout ordre, etc.) est l'objet principal
ou exclusif de la recherche. Nousen dirons autant des ouvrages"
qui s'occupent uniquement retracer, dans leur ordrechro-
nologique, la suite des vnements particuliers, des manifes-
tatious superficiellesqui constituentl'histoireapparented'un
peuple dtermin (suite des dynasties, guerres, ngociations,
histoires parlementaires). En nu mot, tout ce qui est biogra-
phie -w<f (/M t</<t-<<M, soit ~<'oc<('<f('f!est, actuetiementt
sans utilit pour le sociologue. C'est ainsi, d'aitteurs, que le
biologiste u'accorde pasgrande attentionu t'ttistoire extrieure
des pripties par lesquelles passe, au cours de sou existence.
chaque organisme individuot. Sans doute, nul ne peut dire
que ces diverses parMcutarits soient, jamais, rfractaires
la science mais le temps ou il sera peut-tre possible d'en
tenter une explication, mme partielle, est tellement loign
que c'est perdre sa peine que de s'y attacher. En dfinitive,
ce qu'on appelle un fait scientifique, c'est tout simplement
ua fait mur pour la science. Or, les conditions de cette matu-
rit varient naturellement suivant que la science est plus ou
moins dveloppe. C'est ce qui fait que, un moment donn,
tous les taits u'ont pas ce caractre et c'est pourquoi le
savant est oblig de choisir et d'abstraire ceux qu'il lui parait
utile d'observer.
Ln matire de nos analyses ainsi dlimite, nous devions
nous faire unejnthode de cnttque qui fut eu rapport avec le
but que nous poursuIv6ns."Xousne pouvions nous en tenir
la conception courante qui fait du critique une sorte de juge
qui rend des sentences et classe les talents. La postrit seule
est comptente pour procder ces classilleationsqui, d'ail-
leurs, sont sans utilit pour la science. Xotre rle doit tre
d'extraire )6 rsidu objectif des uvres que nous tudions.
c'est--dire les faits suggestifs, les vues fcondes, qu'ettos
soient intressantes par leur vatour intrinsque ou par les dis-
cussions qu'ellesappellent. Le critique doit se faire le colla-
borateur de son auteur, et son collaborateur reconnaissant;i
car si peu de chose qui reste d'un livre, c'est autant d'acquis
pour la science. Cette part de collaboration est rendue ptus
importante encore et plus ncessaire, en ce qui nous concerne,
par le caractre des ouvrages dont nous avons parler.
Comme beaucoup d'entre eux ne sont pas explicitement socio-
logiques, nous ne pouvions nous contenter d'en inventorier
le contenu, de livrer l'tat brut, pour ainsi dire, les mat-
riaux qu'ils contiennent mais it nous fallait les soumettre,
autant que possible, une premire laboration, qui indiqut
au lecteur quels enseignements s'en dgagent pour le socio-
logue. AUnque ces indications fussent plus sensibles, toutes
les analyses d'ouvrages qui se rapportent une mme ques-
tion ont t groupes ensemble de manire se complter et
A s'eetairer mutuellement. Ces rapprocltements constituent
dj, ptu' eux-mmes, des comparaisons qui peuvent tre
utiles.
Tei est notre programme. Pourt'excuter, ua certain nombre
de travailleurs ont runi leurs efforts aprs s'tre entendus
sur les principes qui viennent d'tre exposes. Et peut-tre
u'estce pus un fait sans importance que cette entente spon-
tane en vue d'une entreprise commune. Jusqu' prsent, ta
sociologie est generatonent reste uvre untinemment per-
sonuelle les doctrines tenaient etroitement t'individuatitc
des savantset u'on pouvait tre detac~tce. Cependant la scieuce,
parce qu'elle est objective, est chose esscntieitement imper.
sonnette et ne peut progresser que grce a un truvait collec-
tit. Pour cette seule raison, et indpendamment des rsultats
utilesqu'elle peut avoir, notre tentative mrite, croyous-Mous,
d'tre accuuittie avec intrt par tous ceux qui ont c'rurde
voir ta sociologie sortir de la phase philosophique et prendre
enfin son rang parmi les sciences

~)~U).')<jUM w~ <)'t":))t)t'uUon ~r lu ~tio~' u ht.ja~)~- m)<)Mr)cn)


tL's t)'a\'uux ttnitty~ Hn prith'ijtc. )ton.< n)tun.< du jtn'tuit'r jHifh't (t'unc
ant)c<' )m jXt'tuit'rjuiUt't <)<' t'tmK<<' <)))! .<ui). Xutt:< (n-o))-. choisi ''<')))'cu).
biotti~-un purcf <)U< p"t)t' d' mi.otU!: d'ontn- intrieur, <-))('fiK-ii!)).- tt; tm-
nti) df tvdm'tiun ~t txms )'<'n)'ttMt)).'pumttr''r~){unt'n')u<'t)tKU(-t)tnn)t'n.
ccnh'nt ')<' <')))[()''nttt)' X"U!: nous n~crvons, (t'aiih'UM. lu tn"t))t)! <)t'
rc'Vf'tUt' un p);u est tn't'h'tt'. s'i) y u )i<'u. pottr t~jnu~t' )<< 'ttnx~i'ot.i invo.
tontuht' qm' nuu< puuM'h)))A t-uttOtK'U~. t) ))')U:. pm-nf). < ctM, uf.
(-ot)tttM' ))"hf but n'est paii df ptfiicah'r ))~tnK)h)t~')t)''nt )t; tdhh':m tfanf
M'it'ttc~ t':ut' Xttus 'h' n'Mttir t<'< tootMt'ioux tx't't'~sitit'M pom' fHirt' ~U<'
iit:k'Mt' t<' n'spcrt t~UjM'r~titK'))): du ))))ttt!t'))))<' est ~n~ t'aix~t) d')~))' L'es.
.<f))ti)') L'.<t t)Vt< )t' plus <'<m)j)h't jxt~ihtt' et <)'' t'ai)')' moo.ttttt'. Mt-c-c uo
iU) ''n n'tard. tout <'<' qui Xt~t-it~' dVttt' fonnu. M~mt- il ;)')))< ''<) tu'rh'<? Ct'ttt'
h)))), dut)!! tt'ut!- <tH t)U)ttm <'Uf;. )h' )'<'tt)ont<'t'jus~ju')) t8'C. Max ce ~unt d('!i
<')n:upti~n'< <tMi pt.'Mt'fttt !i'c\p)i'))h'r um' )<rc)))i')'u attn'c, tuais n'utu'uttt ptu".
nous )'f!!)?n)U<. M .' tt'ttouvftt'rdatts t'ttvoir.
Xott!- ))rius d'utUcur~ ic h'ctf'ur d'' ))c ''t)tt.<i(Mret- t'e pD'fnit'r c'oi qut)
t-otttt))'' U)h' iodicutiun d<' ce <jMf nous voudriun!) fai)'c. S'i) iw r<'nd compte
<h'i< di))i<'u)t<t)ju'' p~sentait uo'' h'tte t'Mtrcpnsc, if Mf st; ~-fu~ra
p~ &
'):user d'itx't'itubtcs ttoxn'Jtttcnti.
L'ANNEE SOCIOLOGIQUE
t897

PREMIERE PARTIE
MMOtRES ORIGINAUX

LA t'ROHtHH'ION DE L'INCESTE ET SES 01(IG!J\ES

)'arM.M)t.6j)CHK)t)M

Pour bien compreudre une pratique ou une institution, une


rgle juridique ou morale, il est ncessaire de remonter aussi
prs que possible de ses origines premires car i~ya, entre
cequ'ette~est ac.tueUejMent et ce qu'eH~j) te~ une f~tejtolt'
darit. Saus doute, comme elle s'est transforme chemin tai'
sant, tes causes dont elle dpendait dans le principe ont elles-
mmes varie: mais ces transformations,a leur tour, dpendentt
de ce qu'tait le point de dpart. H eu est des phnomnes
sociaux comme des phnomnes organiques; si le sens dans
lequel ils doivent se dvelopper n'est pas fataiement prd-
termine par les proprits qui les caractrisent ieur nais-
sance, celles-ci ne laissent pas d'avoir une influence profonde
sur toute la suite de leur dveloppement.
C'est cette mthode que nous allons appliquer au problme
qui fait l'objet de cette tude. La question de savoir pourquoi
la plupart des socits ont prohib l'inceste, et l'ont mme
ctass parmi les plus immorales de toutes les pratiques, a t
souvent agite, sans que jamais aucune solution ait paru
s'imposer. La raison de cet insuccs est peut-tre dans lit
manire dont la recherche a t conduite. On est parti de ce
principe que cette prohibition devait tenir tout entire &
quelque tat. actuellement observable. de la nature humaine
ou de ta socit. C'est dune parmi les circonstances pr-
sentes de ia vie, soit iudividueito soit sociate, qu'on est at)
cherctter ta cause dtenninante do cette rprobation. ()<
A la question aiusi pose, on
ne pouvait gure donner de
rponse satisfaisante car les croyances et les habitudes qui
semblent te ptus propres a expliquer et & justiner notre hor-
reur de l'inceste. ne s'expliquent ni ne se justifient ettes-
mtues, })arc-e que les causes dont elles dpendent et les
besoins auxquels elles rpondent sont daus io passe. Au lieu
donc de procderainsi, nous niions nous transporter d'emble
aux origines mmes de cette volution, jusque ia forme la
plus primitive que ht rpression de l'inceste ait prsente
dans l'histoire. C'est la lui d'exo~antie. Quand
nous t'aurons
dcrite et que nous en aurons reudu compte,
nous serons
mieux en tat do comprendre nos ides et
nos sentiments
actuels.

Ou appetio exogamie la rgie en vertu de laquelle il


est
interdit aux membres d'un mme clan do s'unir sexueitement
entre eux. Mais ce mot de clan a t souvent employ d'une
manire trop indcise pour qu'il ne soit pas ncessaire da te
dfinir.
Nous appelons ainsi un groupe d'individus qui
M consi.
drent comme parents les uns des autres, mais qui
recon*
MtssenJLXctusivement cette parent signe trs parti-
ce
culier qu'ils sont porteurs d'un mme totem. Le totem
tui-mme est un tre, anim ou inanim, plus gnralement
un vgta) ou un animt, dont le groupe est cens descendu
et qui lui sert la fbts d'emblme et do nom cotieciiR Si le
totem est un loup, M~es jnembres du clan croient qu'ils
ont un loup pour anctre et par consquent qu'ils ont
en
eux quelque chose du loup. C'est pourquoi ils s'appliquent
eux'mmes cette dnomination; its sont des toups.j~etan
ainsi dfini est donc une socit domestique, puisqu'il
est
compos de gens qui se regardent comme issus d'une mme
origine. ~ais il se distingue des autres sortes de famiites
par
ce fait que la parente y est fonde uniquement sur la commu-
naut du totem, non sur des relations de consanguinit dH-
nies. Ceux qui eu fout partie sont parents, non parce qu'Ua
sont frres,
portent
cousins tes uns des autres, mais parc&
qu'its tous te nom de tel animal ou de telle plante.
Le ctau ne se distingue pas moins nettement de lu tribu, du
village, en un mot de tous les groupes qui ont une base, non
plus verbaie eu quelque sorte, mais territoriale. Ou bien ces
socits ue connaissent pas du tout l'emploi du totem, ou
bieu.s'ii arrive qu'oiies.en aient un (ce qui est peu frquent)
il n'est plus qu'une survivance et joue uu rle enace. C&
n'est plus lui qui confre ia uaturatisatiou. de'morne que,
aujourd'hui, le fait de porter tel ou tel nom ne nous fait pas,
lui seul, membres de telle ou telle famille. C'est donc t&
totem qui constitue la propritc carac~ftstiquedu ctan.
Ce~pos, ta pratique de t'exogamie est factto comprendre.
L'a homme qui appartient au cian du Loup, paf exemple,
n&
peut s'unir a une femme du mme etan ni mmo une femme
d'un clau dinrent, si ce ctan porte le mme totem. Car si tea~
clans d'une mme tribu ont toujours et ncessairement des
totems distincts puisque c'est par l et par l seulement
qu'ils peuvent se distinguer tes uns des autres il n'en est
pas de mme de ceux qui appartiennent a des tribus dif.

rentes. Par exemple, citez les tribus indiennes de t'Am6riqu&
du Nord, il y a des totems comme le toup, la tortue, l'ours,
le livre, qui sont d'un emploi trs gnrt. Or, quette que-
soit la tribu, entre deux individus du morne totem, toute
relation sexuelle est interdite'.
D'aprs la plupart des rcits, cette interdiction s'applique &
tout commerce sexuel eu gnral. Quelquesobservateursrap.
portent cependant que, dans certaines socits, les mariages
rguliers sont seuls astreints cette rgle; les unions libres
n'auraient pas en tenir compte. Ce serait le cas dans la
tribu de Port-Lincotn, chez les Kunandaburi, chez les peu-
plades du Bas-Murray et du Dariing infrieur Mais, outre
que ces tmoignages sont l'exception, la question, par elle-
meme, a peu d'intrt. A supposer que. un moment donne~
la toi d'exogamie ait distingu entre l'tat de mariage et
ce.

tt) V. Curr. ~tM/<w/M< Nm'm, n* SS.


fta~e el de <e famille, )). t<M. t!htHh).Teu)on.(Mo<OMdu M
(S) FfMar. TofetMMfM. p. 5'.).
qu'on devait appeler plus tard le concubinage, ta distinction,
l'origine, tait Impossible, pour l'excellente raison qu'il n'y
avait aucun critre auquel ou put recouuatre une union rgu-
lire d'une union libre. L'Australien prend femme de toutes
les manires possibles, par achat, par change, par rapt vio.
lent, par enlvement concert, etc. Tous les moyens sont bous
et tous lui sont permis. Quelle difMrence, ds lors, peut-il y
avoir entre une concubine et une pouse lgitime ? Pour qu'il
y ait mariage, encore faut-il que le commerce des sexes soit
tenu de remplir certaines conditions dtermines et dont le
concubinage s'affranchit. Par consquent, ou ne voit pas
comment fa rgle de l'exogamie ne se serait pas applique
toutes les relations sexuettes. Du reste, mmechez des peuples
avancs, en Jude, Rome, ta prohibition do l'inceste est
absolue et sans rserve, JI est donc peu probable qu'elle ait
admis de ces distinctions et de ces tempraments dans les
socits infrieures car c'est cette phase de l'volution
sociale que l'inceste a t le ptus violemment rprouv. Tout
au plus peut-on se demander si parfois il a pu jouir d'une
certaine tolrance quand il tait commis au cours de ren-
contres accidentelles et sans lendemain
Tout manquement cette dfense est trs svrement
rprim. Le plus gnralement,en Australie comme en Ame.
rique, la peine est la mort'. Cependant il arrive qu'un traite-
ment didrent est appliqu aux coupables. Chez les Ta-ta-hi
(Nouvelle-Galles du Sud) l'homme est tu, la femme est
simplement battue ou blesse d'un coup de lance. Chez les
tribus de Victoria, la moindre galanterie entre gens du mme
clan est l'objet de mesures rpressives la temme est battue
par ses proches, et l'homme, dfr au chef, est svrement
rprimand. S'il s'obstine et s'enfuit avec celle qu'il aime, il
est seatp Ailleurs, il ne semble pas qu'une peine eu forme
soit inflige; mais alors c'est une croyance gnrale et iadis.
cute que les coupablessont punis naturellement, c'est--dire
par les dieux. Chez les Navajos, par exemple, on dit que leurs
os se desschent et qu'ils sont vous une mort prochaine.

(t) AUi.i'i. t)<tn.< < )jui s)th)-)t. t't)ipt<ticn)ns-n')t)sh's )t)t~ !)e t)))tr!ag)!.
de reMuM <'<mjtt);td' prM'juc ftmttne i-ynuMymc!! d'Mmut) sf.m)Ho.
(~ V. !)!.<))) et ttwitt. A'M')<!< a"</ A'm</mo<. n. tiS. Cm')'t<M<<-<t<M<
MacM. Ut,
(3) frM'-r. Op. cil.. )). :M'.<:f. )htW!.on./hM<<-a<tanJtoMaMM. McH)oumc,
)8<t.
Ur, pour le sauvage, une telle menace n'est pas un vain mot
elle quivaut a une condamnation dont les effets sont plus
tufi)i))ib)es que si elle nvoit t prononce par des juges
humains. Car, d'aprs les ides primitives, les puissances
redoutables qui peuplent !e monde ragissent contre tout ce
qui les onenso avec une ncessite automatique, tout comme
font les forces physiques. Un acte qui les lse ne peut donc
rester impuni. La conviction que le chtiment ne peut tre
vite est mme tellement abso)ue,.quo trs souvent l'ide
seule do ta faute commise sufut & dterminerchez le coupable
de vritables dsordres organiques et mme la mort. Ainsi,
les crimes dont lu socit ne poursuit pas directonent la
rpression ne sont pas toujours les p)us veuieis. !i en est, au
contraire, qu'elle abandonne icurs consquencesnaturellos
parce qu'ils sont d'une exceptionnelle gravit et que, pour
cette raison, l'expiation doit se produire d'eUe-nx'tne ot
comme mcaniquement'. Les vioiations de la ici d'exogamie
sont dans ce cas; il.est peu de crimes q~i passent alors pour
plus abominables.
Dans ce qui prcde, n<'ns avons
dcrit l'exogamie
sous
sa forme la plus simple: mais eito prsente des modalits
plus complexes. La prohibition s'tend souvent, non pas seu-
lement a un clan, mais plusieurs. Ainsi, dans l'Amrique
du Nord, la tribu des-Ttinkits comprend dix ctans qui se
rpartissent eu deux groupes trs nettement distincts, de la
manire suivante 1
pnK)))Ktt'!))"t.'M ttKL'Xt&MH'.Mn'K
Ctandt'rOtu' (:t<)))d'')it(.t-<'nom)tt'.
<)t')'Ait:h'. dt'i'Uic.
du))<m)'))in.
)tuH''t)ni)).
dt)t.it)nn)M)'i)).
<h)t)ibuu.
d<'rA)gm'. dt)S!H)m"n.
Or, les membres du premier groupe ne peuvent prendre
femme que duns le second et rciproquement. Les unions sont
interdites, non seulement l'intrieur de chaque clan, mais
mme entre clans d'un mme groupe. On retrouve la mme
organisation chez les Choctas et elle tait autreh'is en vigueur

<)) On trouvt'nt dM ('.tit-i mmd)tt!U!:tt~n:' SMot~'t! JS~ttO~Metc {!<u<<tt)t


:MfM/<'a J?!)<H'<cMMMj/</f)' S<M/ tt, p. 3t9 ft suiv.
(:!) Mot'fpm. ~M<'<M)< .focx~. p. tOi. A
<:hM les Iroquois Eu Australie. elle est presque absolument
gnruie. Ctmque tribu est divise en deux sections
que dsi.
lignent des noms spciaux chez les Kumitaroi. l'une s'ap-
pelle Kupathin et l'autre Ditbi; chez les Kiahuru (Queens.
iand), tes noms sont presque identiquement tes mmos chez
les uuandih (Austraiif du Sud Krohis et Kumites; citez tes
Wotjobattuk !Victoria), Krokttch et (.amutcth etc.
Chacune de ces sections est a sou tour divise
en un
certain nomtx'e de ctxus, et le cotmuot'ce sexuel est ixterdit
~utM tous tes c)ans d'une mOue secttou. Du moius cette
interdicUon tait ta rgle dans le pnucipe; aujount'hui. elle
tend u se rehtcher sur certains points, mais elle est
encore
trs frquente, et, mme o elle disparu. la tradition
en
conserve le sot)\'en)r.
Cette extension de )a loi d'exogatnte est simplementdue a
un dveloppement du clan. En effet, quand uactuu ~'accrott
au del d'une certaine mesure, sa population ne peut pas tenir
dans le mme espace: elle essaime donc uutour d'eite des
colonies qui, n'occupant pas le tneme habitat, n'ayant
pas
les mmes intrts que le groupe initia) donteiios sont issues,
finissent par prendre un totem qui leur appartienne
en
propre, et elles constituent ds lors des clans nouveaux.
Nanmoins, tout souvenir de l'ancienne vie commune n'est
pas aboli du mme coup. Tous ces clans particuliers ardent
pendant longtemps le sentiment de.leur solidarit premire
ils ont conscience qu'ils ne sont que des parties d'un mme
clan, et par consquent tout mariage entre eux leur apparalt
comme aussi abominable qu'avant leur sparation. C'est seu-
lement quand ie pass commence Fi s'oublier que cotte rpu-
gnance diminue et qu'on voit nouveau i'exogamiesereo.
termer dans les limites de chaque clan. L'exemple des Sn.
cas Iroquois montre que ie sentiment de l'unit originelle
devait conserver une assez grande vivacit pour produire
ettets. Les huit ciansdont tait forme ia tribu taient ses
encore
rpartis on deux groupes dinrents et l'on savait trs bien
que le mariage avait etf autrefois interdit entre tons les
clans d'un mme groupe. Mais ce n'tait plus qu'une rminis-
cence historique, sansche dans les curs; c'est pourquoi
les unions taient permises de clan clan.

(1) MwtMH. ~<. < )). !tt)~t


~) !nuK't'. ro~MtfW), ().
)<)9.
K~)
Ainsi, cette exogamie plus largo ne dinere pas en nature de
celle que nous avons observe en premier lieu; elle repose
sur le mme principe. Elle dpend des ides relatives au ctan.
11 y a lieu seulement de distinguer, parmi les socits qui
mritent d'tre npnetees ainsi, deux espces diuereutea le
-dan primaire et les ctans secondaires. Ceux-ci sont des frag-
ments du premier qui s'en sont dtaches, mais de telle sorte
que tous tes liens ne sont pas dtruits entre les segments
(unsi formes, Inversement, on appelle primaire le ctan primi-
~U! tel qu'it tait avant d'tre subdivis, ou bien encore i'agr-
gut torm' par ces diffrentes subdivisions, une fois qu'eites
sont constitues. On lui a aussi donn )e nom do phratrie,

avec tes 'i'


parce ')uc la phratrie des tires soutenait le mme rapport
ti n'y a aucun inconvnient se servir de cette
expression pourvu qu'il suit bien entendu que le type social
!ainsi dnomme est identique en nature au ctan proprement
dit.
Plusieurs faits dmontrentque les clans, ainsi runis dans
un mme groupe exogame, ont bien cette origine. 1)'abord,
c'est partout une tradition qu'il existe entre eux des liens par.
ticuliers de parent ils se traitent mutuellement de frres,
tandis que ceux de l'autre phratrie sont seulement tours cou-
sins'. En second lieu,la phratrie a parfois un totom qui lui
est propre tout comme le clan c'est l'indice qu'eite est elle-
m~me, on tout au moins qu'elle a et6 un clan, EnHn, dans
certains eus, le totem des clans fragmentaires est videm-
ment drive de celui do la phratrie ce qui prouve que le
mme rapport de drivation existe entre les groupes cor-
respondants. Par exemple, les Tliukits comptent deux
phratries. La premire a pour totem ie C<x'&<'ftM <t<w; or les
ctans particuliers dont elle est compose sont te Cot'tfaM tM'<\
la Grenouille, t'Oie, etc. La seconde a pour totem collectif le
toM/); les ctaus qu'elle renferme sont le ~~, t'Ours, l'Aigie,
etc. En d'autres termes, le premier clan de chaque phratrie
a pour totem le totem mme de ta phratrie tout entire; c'est
donc qu'il est trs vraisemblablement le clan initiai d'o
tous les autres sont issus, 11 est en efet naturel que son
nom soit aussi devenu celui du groupe plus complexe auquel
il a donn~ naissance. Cette filiation est encore plus apparente
chez les Mohegans. La tribu compr~td trois phratries l'une

(1) Mut')!)tn. Op. cM., p. M.


d'elles a pour totem la tortue; tes c!ans secondaires aoat la
Petite Tortue, la Tortue des marais, la Grande Tortue. Tous
ces totems ne sont que des aspects particuliers do celui qui
sert a toute la phratrie. On trouve des faits analogues chez les
Tuscaruras
Ce processus de seumentatiou une fois connu, les variantes,
en apparence bizarres, que prsente parfois la loi d'exoga.
mie deviennent aisemfnt explicables. Une des plus t'tran~es
est celle que l'ou a observe chez les peuplades de New-Xor.
ciadanst'Austraiieoccidetttaie. La tribu est fornx'e do deux
clans primaires, de ctmcuu dosquets trois ct)u)s secondaires
sont descendus:
t'Mt:)ttKM<;).tH)MAUU: Ut:t\)(:MHC.HXt'KtMA)HE
.MuOtt~n.)). X"!Htf)tuk.
C).m<t'(:umt:mvs,?'f')-t<)' 7~<.f/<'u<
'T))w<'j'. ~d:))'
Nui ne peut se marier dans sou clan mais, de ptus, Tira-
rop ne peut s'uuir ni Mondorop ni Tondorop, taudis que
Mondorop et Tondorop peuvent s'unir outre eux quoiqu'ils
appartiennent & uuem~me phratrie. ))e mente, toute relation
sexuelle est interdite entre Jiragiok d'une part, et ~oiognoket
Palarop de Fautre. mais uon entre ces deux derniers'. La cause
de cette r~tetneutation, qui paratt si orbitraire, est des plus
simples. A l'origine, il n'
avait que deux ctaus. Mondorop
et Koioguok. Ho Atoudorop se dtacha d'abord Tirarop; puis,
aprs un temps plus ou moins iong, Tirarop, son tour.
essaima Tondorop. Tirarop se trouva ainsi en troites rela-
tions de parent avec les deux autres ctans, puisqu'il tait n
do l'un et qu'il avait engendre l'autre; c'est pourquoi toute
union fut interdite entre eux et lui. Mais comme entre Mon-
dorop et Tondorop il n'y avait, au contraire, aucun rapport
de filiation, au moins direct, ils taient trangers l'un pour
l'autre, et la m~me prohibition n'avait aucune raison d'tre en
ce qui les concernait. La situation respective des clans de
l'autre phratrie s'explique de la mme manire
t) V. F)-M')'. f<~fN)Mnt. j).<i).<:t.
(~ Curr. /tM~-a<tM /tafM, ). 3~0.
(:</ Cf. Kuhh'r. ZMf t''<~<'-/c/</<- </f<- A'/tf. )). ;iu.
n
Ainsi l'exogamie est solidaire du clan. Cette solidarit est
mme tellement troite qu'elle est rciproque xotM Hf con-
t)!MO4' /~t<! </(' ('h ~M< t'~MK~ <) ~< ~(0<<<OM <;<</t'M)M <~ qui
/' .fott <M~Mf. C'est dire du mme coup quelle est ou quelle
a d tre la generatitc de t'exogamie; car on'sait H quel point
l'institution du ciau est uuiverseHe. Toutos.Ies.spci~isjcm
sont~assfes eites-tnmes par ceUe organisatioM, ou sont nes
d'autt'fi! socits qui avaient primitivement passe par i&. U
est vroi que quelques auteurs ont cru pouvoir qualifier d'en-
dogames certaines tribus australiennes qui sont pourtant
composes de dans mais c'est faute d'avoir distingue outre
les associations proprement totmiques, qui seules sont des
clans, et tes associationsterritorialesqui se superposent par-
fois aux prcdentes. H est frquent en effet que lu socit
ait une double organisation qu'outre lesgroupes parheisdont
le totem fait t'unite elle encotnprenne d'autres, qui reposent
exclusivement sur la communaut de l'habitat et qui ne se
confondent pas avec les premiers. Une circonscription terri-
toriale do ce genre peut trs bien contenir ou des clans 'ju des
fragments de cians dinerents. Par suite, les habitants d'un tel
district a'out pas besoin d'eu sortir pour observer la loi d'exo-
gamie, car ils y trouvent des femmes auxquelles ils peuvent
s'unir, prcisment parce qu'elles ne sont pas du mme clan
qu'eux. Autrement dit, le district est endogame, mais il doit
cette particularit ce qu'il est fait de clans exogames.
D'un autre ct, il n'est pas douteux que tecian, tout en
ditcrant.de la famille telle que uous t'entendons aujouj'd'Jujd.
ne laisse pas de constttuer une socit domestique. Nou seu-
lement les membres qui le composent se considrent comme
descendus d'un mme anctre, mais les rapports qu'ils sou-
tiennent tes uns avec tes autres sont identiques ceux qui de
tout temps ont t regardes comme caractristiques de la
parent, Pour ne citer qu'un exemple, pendant des sicles la
vendetta a t le devoir familial par excellence l'ordre dans
lequel tes parents taient appets t'exercer tait l'ordre

()) v. CMM'. f. <)< t, ton.


mme des parents. Or, dans le principe, c'est au cian qu'etto
incombe. On peut mmo dire que. daus les socits inf-
rleures, les liens qui drivent du ctaa priment de beaucoup
tous les autres. Si un homm' dit Cunow a doux lemmes,
l'une du chm Nt;otak et t autre du clan Xagarnuk (totems
usits chez tes tribus australiennes du sud.ouest), et s'il de
chacune un eufant, comme la fitiationest ut'rit)e, le premiera
sera un jetait comme sa mre et le second un Xagarnuh.
Or le petit ~otak se sentira beaucoup plus proche parent
d'un X~otak quelconque. mme appartenant
un autre dis-
trict, que de sou demi frre Xagarnuk avec lequel it a t
iev et pourtant, it peut trs bien
se (aire qu'it ait eu tout
au plus l'occasion de rencontrer le premier quelques rares
crmonies re)i{{ieuses. Par coust-queut, puisque l'inceste
consiste dans une union sexuetie entre individus parents
un degr~ prohibe, nous sommes {oud6 t voir dans t'exogamie
une prohibition de t'ioceste.
C'est mme sous cette forme que cette prohibition est
apparue pour la premire fois daus l'histoire. En enct, non
seulementelle est ~'n'-raie dans toutes les socits infrieures
et d'autant plus rigoureuse ((a'eites sont plus rudimentaires,
mais ou ne voit pas quel autre principe aurait pu primitive-
ment donner naissance des interdictions similaires. Car
toute rpression de t'iueeste suppose des relations familiales
reconnues et organises par la socit. Cette-ci ne peut
empocher des parents de s'unir que si elle attribue cette
parente un caractre social autrement, elle s'en dsintres-
serait. Ojt_te_eta~estja_pren)ierc sorlede fami))eqm ait et6
socialement constitue. Sans doute, le clan australien
com-
prend dj dans son sein des familles plus restremtes,
formes d'un homme, de la femme ou des femmes
avec Ja-
quelles il vit, et de leurs enfants mineurs; mais sont des
ce
groupes privs, que les particuliers font ou dfont leur gr,
qui ne sont astreints se conformer aucune
norme dunie.
La socit n'intervient pas dans leur organisation. !)s sont
clan ce que les socits d'amis ou les familles naturelles au
que
nous pouvons fonder aujourd'hui sont la famille lgitime'.3.
Oa-S_~uj~r_djnJionr~de combtei.)Ja..BarMt_du_ctan est
alors supcjjeure & tous jtes rapports de consanguinit..C'est

<t) ~ f<t-M<<M-/ta/'h-0)'aonho<;o))Fn(~- .)M<w<H'~f)'.


p.
(~ V. ptus bas t'at)a)y~ .)M)h-re (t.- Gro~c.
elle qui fonde les seuls devoirs domestiques que ta socit
sanctionne, les seuls qui aient une importance sociato. Si donc
e~~e~ta)L~u~iUvBjnButJa~arontepa~-e)~eHce~'M~H~
ausgjH-.sub'aj)). tputo.Ki'aisetubiuuce, .qd a d douuer-nais-
sance aux premires rgles de t'htcesto; tout au
moins, si d'autres relations n'ont pas tard)' a avoir le mme
ellet, ce ne peut tre que pur analogie avec les prcdentes.
Cependant, nous ne pouvons nous en tenir a ces considra-
tious trop exclusivement dialectiques. En fait, mme parmi
les socits les plus rudimentairesque ('on connaisse, it en est
bien peu ou, ct des interdictions caractristiques de !'exo.
gamie, i) ne s'en rencontre d'outrs qui, au premier abord, pa*
raisscnt tre d'une espce difterente. Il importe donc de tesexa.
miner afin de voit' si reeUement elles ont une autre origine.
Les plus importantes sont <'eites qui tiennent a ce qu'on
appeiie en ethnographie le systt'me des classes.
))ans un trs grand Homhrede tribus australiennes. !a divi-
sion en ctans primaires et secondaires n'est pas seule :)ne''ter
les rapports des sexes. Chaque cian est de phts divise en
deux ctai:ses que dsigne un nom specia). Ces noms sont tes
mmes pour tous les ctansd'uoe mme phratrie: muisiisdit-
ferent d'une pi) rotrieu l'autre, Pour une tribu qui, comme c'est
la rgie en Austratie, comprend deux phratries, il y a donc
en tout quatre classes nominalementdistinctes. Voici, par
exemple, quelle tait cette organisation chez tes Kamitaroi
<:).X!).:Cf<))A)HHi t:U~KS
HonnuM. tt'ntntpt.
iM't)')'iM!t)n.t.()po.su.n..
~"t'hnm-)' J.g..n,o.'iMnm-))!HH.
(Ui)bi)
<
!K.j,
()t'tt'ti--M)t)H.
-i_K..ht.

"iKuhhi-K))).))~!).
':).A.))!CO.\f).UMK!! CUi-SKS

2''I')n'att'ie..1,
Lh.nu. ~jj, HottmM.
tKmnhuXuta.
t'rtttnx".

j,
)K'))))))'))<ata.
J~MaHd.~t..j,~j
(K..p<.t).i..)

c
Le Serpent non..
(KumboHntt.

)V. HiKM et ttttwttt. Op. <-< p. 43.


D'aprs les rgles ordinaires do l'exognmie, un homme
quelconque de la premire phratrie pourrait pouser une
femme quelconque de lit seconde, (lu'elle soit de t'Emu. du
Bandicot ou du Serpent noir. Mais la division en classes
apporte des restrictions nouveties. Les membres d'une classe
de ta phratrie Ditbi ne peuvent pas se marier inditteremment
dans les deux classes de ta phratrie Kupathin, mais dans
l'une d'eties scuiement. Ainsi un Murri, qu'il soit un Opos.
sum, un Kanguroo ou uu Lexard, ne peut pouser qu'une
Huta, et une Mata qu'un Kumbo; de mme, un Kubbi, a quel.
que totem qu'it appartienne, ne peut s'unir qu'a une Ippata.
et une Kubbotaqu'a un Ippai. Mais l'union d'uu Murri une
Ippata, ou d'un fppai a une Mata, ou d'un Kubbi une Buta,
ou d'une Kubbota il un Kumbo, apparat comme aussi abo-
minable que celle qui serait contracte entre deux individus
d'un mtne ciau. Yoiia donc, ce qu'il sembte, uneexogamie
nouvette qui se surajoute a cc)ie du clan et qui limite encore
te champ des slections matrimoniates.
Mais on ne peut comprendre le sens et ht porte de cette
rglementation si l'on no connait ta maniera dont ces classes
sont composes.Chacune dettes correspond une gnration
dinereute du ctun. On sait en cnet que chaque c)an. comme
chaque phratrie, se recrute exclusivement par voie ou de
filiation utrine ou de filiation aguatiquo. L'entant compte ou
dans le groupe de son pore, ou dans celui de sa mre, mais
jamais dans les deux a la fois. Si, comme c'est le cas de beau-
coup le plus gnral, la filiation est utrine, si l'enfant, par
suite, appartient au ctau maternel, des doux classes entre
lesquelles la population de ce clan est rpartie celle . laquelle
il Mf ran<!<)<' M< c<<' </o<~ sa M~'p ~c /<( pas ~'<'. Si celle-
Ct est une Buta, ses Hts seront des Ippai,
ses filles des Ippata.
Est-elle, au contraire, une Ippata? ses enfants seront, selon
leur sexe. ou des Kumbo ou des Buta. C/t~xe ~M<~MK
~Mt'tX'o! ~OHC Il MMP Mft'c c~MP <~)? ~Mt't'<OM p~t'.
<<PMf< et comme dans chaque clan ii n'y
a que deux classes,
it en rsulte qu'elles aiterncnt rgulirement. Supposons
par exemple, pour simpHner notre expos, qu' un moment
donn tout le ctan de t'Emu ne comprenneque des Kumbo-
Buta ]a gnration suivante, it n'y en aura plus. En effet,
les descendants des Kumbo comptent dans l'autre phratrie
parce que c'est celle de leur mre, et les enfants des Buta sont
des ppai et des Ippata. Mais, la troisime gnration, ces
derniers disparaissent leur tour; car )eur& descendants
appartiennent a l'autre classe, c'est--dire que les Kumbo-
Buta renaii'sent. pour s'etacer de nouveau a la quatrime
gnration, et ainsi de suite indnniment. Le tableau suivant
rend sensible ce que devient !e clan cituque gen<t'ation.

t:t.XS
MntmHotM.
<!<ttmHo)M.
)'K t.\ )'))KATH)K UHJ" '< "H 'M"'t: nn'ATHtS
f" Mnt'ri Mata. 1 K)))')b"
hn tt'tt:).
2''
p" Knt'ota.
Kuh))i
Kts1lot~t.
KUIII)I tt'pai
J\ 11111 ))')'!)t!t.
1 jetilitgt.

(Hnfmtttdc'i))itta.)'-ht"j,u.f tKt!htt~<)!d.-t;.)"t!)
Mut-ri MaUt. Kumbu fut!).
()':Mfmt)MKu)mt<t<)<'ht~')~t).) ~)fM<t<)))1"h2'f-)L)
4" Kuhhi Kut"'tu.! !)')'ai )~)'.))u.
(t.f<t))t'"tM~t'dch3-~n.) 'H..fM))Mhu)tt-)<-)a)'e<'n.;

Cette organisation ne so rencontre pas seulement chez les


Kamilaroi sans tre absolument universelle, elle est d'une
trs grande gnralit. Les noms seuls changent d'une tribu
se
l'autre. Par exemple, chex les Koga. les quatre classes
nomment Urgilln et Unburri pour la premire phratrie, Obur
et Wungo pour la seconde
Un Urgilla ne peut pouser qu'une Obur les enfants sont
Wungo.
Un Unbun'i ne peut pouser qu'une Wungo; les enfants
sont Obur.
Un Obur ne peut pouser qu'une t'rgitta les enfants sont
Unburri.
Un Wungo ne peut pouser qu'une Unburri les enfants
sont Urgilla.
Il est inutile de multiplier les exemples; ils se rptent
tous identiquement, aux termes prs
Un arrangement la fois aussi complexe et aussi rpandu
doit tenir videmment des causes gnrtes et profondes.
Quelles sont-ettes ?
La question a fait le dsespoir des ethnographes. Les
uns ont cru rsoudre la difficult en assimilant la classe au
(i) V. Cunw. 0~. <-<< p. t. t'"ur sitt))))it)M. 't'~ n.- <htt<mn~ ')U'- la
fum"! tttttscHtitM' dt-.< )'rt)t''< 'tui ~ct~'ttt & d~ign'-r )'< .-h~<.
?) t)an< seul cas, nuu~ tntuvun:: MtK' o)K!mi<u)")nt'ha'jMc un )t'-tt ditfcMttt'
CtK'! les Wau)'<mM)))(!o. au )i'-u ')<- ')t-ux .-hi~t's <))ms )<)tnt)t! il y
<'n a quatre, suit huit pour t"ut'!
)'t tri'
Mt's )'
pntM'ijt' fxndtuneu-
t<nt!tn'nt h' tes tt)~)))"<. t:ha')"K '-tt~
enfants sont <t'un'' Mire
"c p-'ut
chMi'p
s'unit-
)<')=
qu' un.- (-)ttsiK.
)<UM'M< ).a !'<)'-
<tt't''t-t)tin''<' et ')Ut'
cian Mais il est bien certain qu'elle n'a jamais eu de totem;
elle ne rentre donc pas dans la dfinition du cian. D'autres out
essay d'y voir nue sorte de caste, sans qu'aucun fait justifie
!'hypothese'. Cunow est peut-tre i'uuteur qui a fait l'effort le
plus soutenu pour jeter quelque lumire sur ces tranges
combiuuisous. Pour lui, chaque classe se)'ait un groupe d'ht"
dividus seusihieuteut du mme ge. Il est certain que de
l'ge dopeudeut, en grande partie, ia place occupe par cha-
cun daus le etatt, iu uature et i'eteudue de ses droits comme
de ses devoirs. On ne s'turuit doue s'etouner qu'une uomen-
ctaturc spuciate ait ctt': imagincH pour exprimer ia manire
dont lu population se repartit selou i'~gc; qu'un terme dsigne
ieseufuutsqui n'ont pas encorexubiia ce remaniede t'iuitiatiou;
un autre, les adultes inities et dj maries, ou tout au moins
nubiles: un autre ennu, ceux quinoa seulement sont tnaris,
mais ont dj des enfants maries. Tei serait le sens dos termes
employs pour distinguer, dans chaque clan, les diffrentes
classes. Quaut aux prohibitions matrimoniales attaches
cette organisation, elles seraient simplement dues une sorte
d'iostinctque l'auteur attribue aux primitifs, saus trop on
expliquer l'origine, etqui leur inspirerait unevive rpugnance
pour les mariages contractes entreindividus d'ge trop ingai
Mais si les classes correspondaient l'ge, les individus

)))U'ti<'M))U'it'\ ~'<~t ~)ttt' )~'< p''ti).<))f)m~. t't)X !))).). u)tt Uttt' ctMt!(! (ti~.
tio':t~. Yuif-i, pNt- 'tt!.M)uct)t, nxotttt'ut )<< f{'utiuns st'itUct-Mfnt
''M)ttf:MPHMTMtt: Mt)][<f;Mt!)')t)tAT));)!
UM)))<X'<. t'MtMftt-f. ttotttOtM. t'Ct))t)t)'<.
)"){'~t')'fttim). J~M~M .~MHt-. KatJ) AH<Ht.
S*
t'tt~'mi X)t)tf<tj<')i. ()))<t)u Xarih.
~:Mha~dMXN)ittmMa.) (fMfmhdm (Mmji.)
A)j)t~)ni'rtt)ttj)!tjt);)i.t)')ttj<trd' X)i)M'Kf!aH)i
Kt)rittt)t.)MXMmj..ti.) (KnfMttitdMXtnh.)
<*
A)m!))))))!aX)t))~n')nf<u.
(f.ufot)!: des Tom)mjm)i)
TuMx)i K))nx'')i.
(H))f<))t<d<tN()0t~erdi.)
S' ~<<tma<'a .M~mM<-. A'at~'t ~at(U<.
(KttfOt)h .)M X~MMOtt~.) (E))6M))t (t<t Xn~i.)
Ht )tt~t-it't.Mttt)-n'it
nomt-at) )V. nttwiH,~<-<AM-;Yo/M<)M</te/<M<.
/)~)'aM c/CNrM in ~NMt'ttf~0~ Mf J<)/A<tpo~<ca< //)~<~<<, itMS,
)). M.4!i.
L<'t-a.'iitd'!H))<'M)'<'t'mt<'U![;f)'twittt'Kt'MpMrti<')r):cu))!ttt'utt.)')))f<ju'i)
l'u ttirfcteMMnt obi-cn't;.
))<}

(!) V. Fiiion et X'wit). Op. 0'


p. TO <'t sniv.
(J)n~'t)<t))t'()m'<tit)'t)))iMiM))'))t-i<))t')')tUt-(<N)t't)<<)<UMU)K'tru<
courte nutt- <tU'M ))u))tic~ te Jw~tta~ e/ ~)H//~. /;)~ t~ft.
(3t V. C<ttnw. Op. << )). tM.)<a.
devraientchanger de classe en avanantdans la vie. On devrait
tes voir passer de la troisime la seconde et de la seconde
la premire mesure qu'ils vieillissent, Or, tout au contraire,
la ciasse u laquelle on appartient est immuablement fixe,
une fois pour toutes, des le jour de la naissance. Cunow
rpond que, si les noms des classes avaient change aux difK'-
rentes priodes de l'existence, le but poursuivi n'aurait pas
t atteint. En effet, soit un homme de vingt-cinq ans, corn'
pris par consquent dans la classe intermdiaire entre les
plus jeunes et tes plus ges. Dans ta suite de sa vie, il pourrait
pouser des femmes beaucoup ptus jeunes que lui, pourvu
qu'elles eussentattointt'ugede l'initiation,c'est--direpourvu
qu'elles fussent devenues adultes nvant que lui-mme fut
sorti de ta catgorie des adultes: car elles se trouveraient alors
dans ta classe qui correspond il la sienne et on, par suite, t
peut lgitimement contracter mariage. Pourtant, il y aurait
toujours entre elle et lui ta mme diterenco d'ge que dans le
principe; une union entrejeunes et vieux serait donc permise,
contrairement la rgle que notre auteur suppose avoir t
suivie. Ce serait pour prvenir ce rsultat que les Australiens,
d'aprs Cunow, auraient conventiounettement tabli que la
ciasse de chacun serait nominativementdtermine pour toute
la vie et le suivrait, sans changements, travers toutes les
phases de sa carrire. De cette taon, eu eCet, les diffrents
groupes d'ge ne peuvent plus se rejoindre et 'se confondre
sous une mme rubrique, puisqu'ils portent des tiquettes
distinctes. Seulement. Cunow ue s'aperoit pas que, de cette
manire, il ruine la base mme de sa thorie car alors tes
classes ne correspondentplus ia division par couches d'ge,
puisqu'un tel arrangement maintient dans des catgories spa-
res des gens qui ont galement dpasse l'enfance sans
atteindre encore la vieillesse. Inversement, le mme mot
pourra s'appliquer 'gaiement, ici un enfant, ta un vieil-
lard, puisque ta classe de l'un et de l'autre est dtermine
ds leur naissance et indpendamment de leur ge respectif.
Si le vieillard est n d'une lppatu, il sera un Kumbo, tout
comme le baby qui aura une mre de la mme classe

()) Y. Ct))t\ 0~. <-f/ IH:.


)).
PjAj"u~ttt-t'))t<)m'j<t))ti!! )t'sin!ttitMti"t)'<tK'iK)M,~Mrtt)t)t)''s)))'!titutionit
pritnUiv' n'ont 'h's orix'ne)! au~i dt')i))Crctt)<H)t ttrtitifiL'MM;m't) n't'st ptoK
~oMhtin* it ff ~uf nous xavons <)W dt! )p.< cx)))i<)Ut'r )'ttf <)<!smrnmKOttent!'
c"n<'<'ntiun!)f).'< ''o 'e ~t'Mn', it)!!titU)?<. (k' )Mt)')i pri!' eu vue d'Mtt but pn!cm)';u.
Dira t on que, en euet, ces systcmea ne correspondentpas
la distribution de ta population par ge, mais qu'ils ont
uniquement pour objet de prvenir le mariage entre ascen-
dants et descendants? Mais s'ils s'opposent retiement a ce
qu'un pre pouse sa fille (puisque, par principe, elle M'ap-
partient pas a lu classe oit i) peut prendre fonxne), ils ne
mettent aucun obstacle aux unions entre grands-parents et
petits-enfants. Car, comme chaque classe renait au bout de
deux gnrations, une femme et sa petite-ftiie appartiennent
a !a mme classe, & celle, par consquent, o le grand-pore
peut tibrementchoisir.Soit, pur exemple, un Kubbi qui pouse
une tppata, les (ittes de ceUe-ci seront des Buta, mais testiites
de ces Buta seront de nouveau des tppata que le premier
Kubbi pourra librement pouser, puisqu'il peut lgitimement
prtendre toutes lesfemmes de cette classe sans distinction.
C'est dire que cette organisation doit avoir un autre but que
d'interdire les mariages entre parents en ligne directe. /cr-
fKKfcqxt la ca/'ac~'Mf xc ~<'( .<)h'~)(M' <tUMt.
Le problme, pourtant, ne nous parait pas insoluble. Cette
rglementation, en apparence bizarre, n'est qu'une extension
de la loi ordinaire d'exogamie. Pour s'en convaincre, il suffit
de se reporter certaines particularits que prsente la cons-
titution des ctans australiens.
Posons tout d'abord que la division en classes a du appa-
rattro au plus tard ds que ta tribu Il compris deux clans
primaires. En ellet, partout, sans aucune exception, les noms
desctasses sont rigoureusement les mmesdans tous tes clans
d'une mme phratrie. C'est donc qu'ils taient dj en usage
dans le groupe initiai dont ces groupes partiels sont sortis
successivement. Il est pass des premiers aux seconds. On peut
dire d'aitteurs qu'it n'y a pas de contestation sur ce point.
Pour comprendre comment ces classes ont pris naissance,
reprsentons-nous donc une tribu divise en deux clans pri-
maires, non encore subdivises. Pour faeiiiterl'exposition.nou-!
appellerons l'un A et l'autre B, A~ et A/' les hommes et les
femmes du premier, Bit et B/~ les hommes et les femmes du
second. A la premire gnration, le schma des deux ctaos
sera donc
<.t.X A ':HX )t
Ah' Af Mh' Hf

En vertu de ta toi d'exogamie, AA' s'unira B/'et A~ B/<


La filiation sefaisant en ligne utrine (c'est un postulat que
nous prions le lecteur de nous accorder provisoirement), les
enfants du couple AA' 1}~ seront du dan H, puisque c'est celui
de la mre, et les enfants du couple A/~ BA' seront du ctau A
pour la mme raison. Nous appellerons les premiers, suivant
leur sexe, U/~ et )}/ tes seconds A/t', A/
Jusqu'ici, tout se passe conformmentaux rgies dj con-
nues. Mais voici un fait qui vient eu cotnpHquer et en singu-

po<~ &' ~fm M~'Me< <


lariser l'application. Dans toutes ces tribus, ~Ko/M<' ~<<M<
<'f (/t<o<M'<7 com~f/ ~<~ le f~<~
. w~< celle-ci, a partir du moment o elle est marie, vit
chez son mari, par consquent sur k' territoire occupe par le
clan de ce dct'niet'. C'est l qu't' met au monde ses enhmts
c'est l qu'ils sonifieves, itt que ses tits t'sidenttoute leur vie
et ses filles jusqu' l'poque de leur mariage. Les enfants de
B/~ (c'est--dire HA' et t! na!tt'ont donc en A et y passeront
tout entire
leur existence, ou ou en partie, parce que A est
le cian de leur pre inversement, les enfants de A/~ (c'cst-a
dire A/~ et A/~ nattront en B et y resteront parce que leur
mre y a suivi son mari. ii se produira ainsi un vritable
chasse-crois entre les deux c)ans; il la deuxime gnration,
tous les individusqui portent le totem A et qui perptuent le
ctauA sont dans le cian B, et rciproquement.Le schma des
deux groupes devient
Tt:Htt)T"tKK t)).' ';<< A TKim)T")MK )'r '.L\i H
2" ~n<~atiou. t<)~ Mf Ah' At'*

A lu troisimegnration, nouveau chasse'croise, mais qui


rctabtit les choses comme elles taient en premier lieu. Eu
enet U~ pouse A~ et i'emmune dans le ctan A o il vit. Les
enfants, hritant du totem maternot, sont A/<* et A/ et, cette
fois. iis so trouvent bien etectivementdansleur ctan naturel A.
De mme, parce que A~ a pouse M~ et s'est tabli avec elle
en t) o il habite, c'est en B aussi que naissent et sont levs
leurs enfants B/~ et B/' ceux-ci sont donc galement sur )c
territoire du groupe dout ils portent le totem. Par cons-
quent. la suite des gnrations peut tre ligure de la
manire suivante
i'UCLUTtM )'WL'L.\TtUS
M-cutN))) h' tcttitoin- du (~ht) A. o<cu)m)t fo tcmtwt'tht Chn Il.

f
'tf~ratioM.
.~))' Af
/i'<'nr..)")!f'(-t.U)')1) A~
M'
.~(<'t))'t.(.tM))'
2-

4'
JM'
Ah'
/?'
AP~- APXh'.
HPAh")
J~' ~t )~A)t"
.\h' Af'i- ArH)/
Ainsi, chaque gnration se trouve place dans des condi-
tions tiifrentes de celle qui la suit immdiatement. Si la
premire est teve sur le territoire du clan dont elle porte le
nom, lu suivante vit en dehors, e'est-a-dire dans l'autre clan;
mais lu troisitne se retrouve nouveau chez elle. Puisque
donc les gnrations d'un mme clan passent leur existence
dans des milieux sociauxaussi ditrents, it est naturel qu'on
ait pris i habitude de distinguer entre elles et de les appeler
de noms galement dinerents; c'est pourquoi un mot spcial
fut attribu celles qui naissent etqui restentsur le sol fami-
lial, un autre celles qui, tout en continuant porter les
insignes distinctifs du clan et tout en restant les fidles du
mme culte totemique. ne rsident pourtant pas au lieu o se
trouve le foyer mme de ce culte. Et puisqu'elles sont tour
tour <w/o~'.<, si l'on peut ainsi parler, et tour tour <r<
~Kcs, le mme roulement doit se retrouver dans les denomi*
nations qui leur sont appliques. Autrement dit, chaque g-
nratiou formera une classe M~MWM qui se distinguera par
son nom de celle qui suit; mais cellequi viendra en troisime
lieu aura le mme nom que la premire, la quatrime le
mme que la seconde et ainsi de suite. Voil d'o vient cette
atterntfuce priodique entre les classes, qui parait au pre-
mier abord si surprenante
Les causes qui expliquent la division de chaque clan en
classes alternes vont rendre galement compte des probibi.
tions matrimoniales qui sont attaches cette organisation.
En vertu de la loi d'exogamie, il est interdit aux membres
d'un mme clan de s'unir entre eux. Mais, des deux sries de
gnrations ou de classes dont la suite constitue le clan B par
exemple, il en est une qui vit dans le clan A, ainsi que nous
avons vu. Sans doute, elle n'en a pas le totem et, en un sens,
elle eu reste distincte. Nanmoins, par cela seul qu'elle y a

()) Kooi! avuns rendu i!ensi)))e t't'ttc tUtcntMco dans le !'eMtM<'i.dcii.


~Ms en tt'prmenttmt chttjUf <')<m par de;! MfMMn's difKfents. On voit ))u<
il t'haqut! {s'MnttiMt, tes <ttra<:tt'*rM <'ht)n;nt.
vu le jour, qu'ette y a t leve, elle est on rapports continus
avec les gnrations de A, qui ettes-mmes vivent en A; car
les unes et les autres occupent le mme sot, exploitent les
mmes forets et les mmes rivires, ont reu la mme du-
cation, etc. Par suite, entre ces doux fragments do etnns dif-
frents, mais qui sont rapprochs sur un mme habitat, qui
sont plongs dans !a mmo atmosphre morale, Il se noue
ncessairement des relations trs troites qui, sans tre iden-
tiques celles qui existent entre les porteurs d'un mmo
totem, ne bussent pas d'y ressembler. Si donc ces derniers
liens passent pour tre exclusifs de tout commerce sexuel
futre ceux qu'ils unissent, il est invitable que, par voie
d'extension logique, les premiers, tant de mme nature, aient
fiai par produire le mme effet. Quand on a pris l'habitude
de regarder comme incestueux et abominables les rapports
conjugaux de sujets qui sont nominalementdu mmo ctan,
les rapports similaires d'individus qui, tout en ressortissant
verbalement a des clans diffrents, sont pourtant en contact
aussi ou plus inlime que les prcdents, ne peuvent manquer
de prendre le mme caractre. On peut en elTet prvoir ds
maintenant que la commuuaut du totem n'a de vertu que
comme symbole de ta communaut d'existence si donc celle-
c! est aussi relle, suns que le totem soit commun, le rsultat
sera le mme. Ainsi, par le seul enet de ta toi d'exogamie, la
t'tat-se de A qui est ne en A ne peut pas se marier
avec ta
classe de M qui est ne galement en A, quoique les totems
soient distincts. Mais comme lit mme fraternit n'existe pas
avec la classe de B qui est ne en B et qui, par suite, n~ rien
de commun avec les gens d A, la mme prohibition n'a
pas
de raison d'tre et le mariage est tieite; car non seulement ces
deux clusses ressortissent deux groupes totmiquesdin-
rents, mais leur vie est spare puisqu'elles'coule dans deux
milieux indpendantsi'un de l'autre. Inversement et pour les
mornes motifs, la ctaSse de A qui est ne eu B ne peut s'unir
qu' la classe de B qui est ne en A. D'une manire gnrale,
uue classe d'un clan ne peut contracter mariage qu'avec une

t) t'M tt nouf: <)'' voutuM.'t jMts ttiro <)m' h' tutt'ot nt'uit<jtt'an <))<!), un
")!<;)() vet-tw) il ft-t h- syttttx)))' (te tuut un <'M!-<')uh)t' do t<m))Uo)ts. de
'').)yancf! de pntti')))).'s f-tinit'miM et uutrus. A!tn.< tjtumd tf!! (ti)f)''funte)!
j'.trtitM <)'mt )<)t')MM chu) n't vivt'nt )))M m)!!t'tM))tc d'nnt' )nt)tM vh*. In toten)
<)'!( ptus tML )t)j{nti)('!ttiott (trt'toifn'. qu'Mtju'i) ctUtH-rte
cocon! (n'!i ton~.
t")upif son pMittige pur t'<a"t 'k' )')Mbitude.
seutedesct~ses de t'nutre, c'est u savoir avec celle qui est
place dans des conditions correspondantes cette do A qui
est nue en A avec celle de Ii qui est ne en H. celle do A qui
est Hfe en H avec celle de 13 qui est ne en A. Et comme, cet
gard. deux gnrations successives ne peuvent jamais 6tre
dans la n~me situation, il en rsulta qu'une tctnmo ne peut
jamais prendre mari ni un homme prendre femme dans la
g6n6ration ou ciasse ()ui suit ta ieur.
L'exogatnie des classes n'ciit donc que t'cxognmie dn ctan
qui s'est propage partiutletnent d'uu ctan primaire il l'outre,
et rciproquement; et '-ette propagation a pour cause, en
dfinitive. t'inconsistancc particutire lit constitution du
ctan. C'est en pfet un groupe amorphe, une masse flottante.
sans individualit trs dfinie, dont les contours surtout ne
sont pas materiettement marques sur le sot. On lie peut pas
dire a quel point pt'fcis de l'espace il commeoce, ta quet autre
il finit. Tous ceux qui ont le mme totem en font partie, on
qu'ils se trouvent. X'ayant pas de base territoriale, it lie saurait
rsister aux causes qui tendent le dissocier en groupes ter-
ritoriaiement distincts. Or. t'usage qui v~ut que la femme
aille vivre uvec son mari, joint au principe de la filiation ut-
rine, rend ncessaire cette dissociation. Chaque ctan, sous
l'action de ces deux causes reunies, laisse s'tablir Hors de!ui
une partie des gnrations qui lui reviennent de droitet reoit
dans sou sein des ~nerotions qui lui sont etmngres. Par
suite, ils se mutent les uns aux autres, se pntrent, chan-
gent leur population, et des combinaisons nouvelles prennent
ainsi naissance auxquelles ta toi d'exogamio s'tend, mais
sous des formes galement nouvelles. On comprend du reste
qu'il en rsulte un afaibtissementdu groupe proprement
totentiqne. Car les portions dedans divers qui sont ainsi reu-
nies en un tneme lieu vivent d'une mme vie' et forment par
consquent une socit d'un genre nouveau, indpendantedu
totem. A mesure qu'elles se dveloppent, cites rejettent donc
au second ptan la vieitte,organisationdu clan, qui peu peu
tend disparatre.
Cette explication, it est vrai. s'applique uniquement au cas
lmentaire o la tribu ne comprend encore que deux clans
primaires. Mais, une tois que chacun d'eux s'est subdivis a
son tour en clans secondaires, ceux-ci hritent de la division
en classes qui s'tait tablie dans le groupe initial. Elles s'y
organisent sur les mmes bases qu'elles avaient dans les deux
dans primitifs, puisqu'elles ne sont sous cette forme que le
prolongement de ce qu'e))es taient tout d'abord. C'est ainsi
que se produisent les systmes un peu plus compliques que
nous avous dcrits en premier Ueu (voir p. ) ))
Outre que cette thorie permet d'expliquer, jusque dans ses
dtails, t'organisation des dusses australiennes. elle se trouva
confirme par plusieurs autres fait:!
K))a imptiquc que cette organisation est en partie dter-
mine parte principe do la ntiation ut6rine. Si donc nous ne
nous sommes pas tromp, on doit voir les classes s'etaceri
ou lu filiation se fait, au contraire, en ligue masculine. Dans
ce eus en enet, d'upt'es notre hypothse, elles n'out plus d&
raison d'tre car, comme los onhtuts portent alors le totem,
de leur pre, et Mon plus celui de leur mre, ils naissent et
sont eieves dans le ciun mme dont ils portent )e nom. Chaqn&
gnration se trouve donc place dans les tnemes conditions
que son ainee et que la suivante eiies sont toutes endognes.
Toute matire manque ainsi pour distinguer entre elles. La
dualit du groupe totmique et du groupe territorial a disparu,
soit que les deux ne fassent plus qu'un, soit que le premier
ait cess d'exister. Or c'tait cette dualit qui produisait les
combinaisons alternesauxquelles correspond le systme des
classes. Celui-ci, par consquent, ne peut plus subsister que
comme une survivance sans utilit et destine, par suite,
dcliner progressivement.
Les faits sont conformes la dduction. Howitt lui-mme a
remarque" que partout o le clan se recrute c~ <M<MM/; ft
<Ma<!Ct(<(M, la classe n'existe pas c'est le cas citez les Nar-
riuyeri, les Kurnai, tes Chipara. Curr remarque galement

KMt)' ))' ca-t ut))<)n'' dM \VuttM)tt')t)K" (~ <M. p.


ya')H~n't')ui!t.<(,au)tt'u<h'<tt'ux.<fan!i<-h)U)H)'phntttn'.t!i.trtttt))fn).
t3. n')t'' 2) o il
la <)<fr)-i)'t)u)) <)U\'u u ttuntM'-t; Uowitt )'.<t ('fm-te. )-< <)ui 't
'h'utcux d'ttpfM
h'stcrMt''<tu~n<dt)nttt):U!tt.'t't,t'Ut'M'i[ri<'n')'in<'t)M('it)!t)))t'!t\t't'x)t)i-
<'<ttio)) ()Uf xous venoMs ftf <tnM<'f. On ;))'))), jx))- t"ft')u))t< !.u)'()tMt'r ave
Cunow (0/<. ei/ [). tSO) t)Ut' <;< huit ctn~'s t-ont ttucs & t'e ))Uc <)f))-t
tribt)!<. ttytUtt des c)<t!tM ditMn'tttt's. se sont tonfunttu~ t'M~'tt))f ''hacttne
aurait ttt'jwt't~ ses <)'))<)tuifmtiut)<'j'n'KUttm'ttt <'t~ mitcrvcf's. Mai:. t'ottn'M*
''Ufs ttM ituuvtUt'n) Mtrc qu' t-um)iti(ttt de <)<~i);)h'r <)M f{')'imtit)!' <tif-
f'ircntci!. il t'M tit'mit t\?:ttt)tt! (;tt<' )<'s t<t<')M~ tome)! ne SL'mifnt rt'vcnM
')u'an bout <)'' quatK' t{<'M'?M<ions '(itttf! c)))t<)M'' pht-atHf. Bien d'-x t'ircuoo.
ttMftM, d'aiUeUtt. peuvent avoir dtfnunx! ce ()eu)))f )t cufujtti'jm')' cette
tt'rotitK~iH: ot-c'ei!) !K.'u)M))).'nt j)are<H<: cou~ttication UM )'fu pta~ gMnde
'ju'H <? dhtinftUt! dus autres.
(~ F)'<Ae)' A'o~. p, M.
que la classede l'entant est, en principe, dtermine par cotte
de lu mre'. l,
2" Si, comme nous l'avons admis, ta division des classes
s'est produite au moment o ta tribu ne comprenait encore
que deux ctans primaires, elle doit s'altrer a mesure que le
souvenir de cette organisation primitive tend se perdre.
C'est en effet ce qu'on observe, Chez les Kamitaroi, les liens
qui unissaient autrefois les clans d'une mente phratrie ont
fini par se dtendre, et par suite le mariage a t permis entre
certains d'entre eux. L'n Emu a pu pouser une Bandicot,
quoique tous deux fussent de ia phratrie Kupathin. Mais,
pour cela, il fatiut que te mariage devint licite entre les deux
classes de cette mme phratrie. Ce fut effectivement ce qui
arriva. La rcgtementatiou que nous avons expose plus haut,
d'aprs laquelle un fppai ou un Kuntbo ne pouvait s'unir ni a
une Buta ni une fppata, s'est peu il peu relche, et, en der-
nier lieu, il n'tait plus dfendu un tppai du clan de t'mu
d'pouser une tppata du e).<n Bandicot. Vu KumiM peut
prendre pour femme une Buta dans les mmes conditions.
On nous reprochera peut-tre de faire reposer toute cette
explication sur une hypothse, en admettant que la filiation
avait 616 d'abord utrine et n'tait devenue agnatique que plus
tard. Mais il importe de bien comprendre le sens de notre
proposition,avant de la contester. Nous ne songeons aucune-
ment a soutenir avec Bachofon et Morgan que, dans le prin'
cipe, chaque petit groupe familial eu
pour centre la femme,
non le mari; que c'est chez la mre et sous la direction des
parents maternels que t'entant tait teve. Les faitsdemontrent
avec videncequ'en Australie un tel arrangement est contraire
l'usage gnrt; c'est ce que nous venons nous mme de
rappeler. Nous n'entendons parier que du groupe dont te
totem est la base. Or, nous croyons indiscutahtB..que le totem,
l'origine, se transmettait exclusivement en ligne utrine;
que le ctan, par consquent, n'tait compos que de descen.
dants par les femmes Sans qu'il soit ncessaire de traiter
fond la question, les raisons qui suivent suffisent justifier
notre postult
1 Plus tes socits sont rudimentairementdveloppes, plus
(<) ~M~M<M f<C, ). M d 111.
(2) C'est )')' <)))'; tt'mntxuMt'nt tn~tt' )< Hro)!:i< (jui
pourtant MtmtutUent
de GfoMe).
t' <m(~uf!< t'OMXxe
tM'se< <tc MorgM (t. ptuf tMtii rt<aa)y~t! du ih<
le clan maternel y est frquent. Il est trs gnral en Austra-
lie, o ti se rencontre ~x~'c/OM <f cinq it est dj plus rare
en Amrique, o la proportion n'est plus que de trois ou
mme de deux pour un Or tes Peaux-Rouges sont parvenus
a un tat social sensiblement suprieur cetui des Austra-
liens.
2" Jamais on n'a vu un clan paternel se changer en un clan
utrin on no cite pas un seul cas o cette nn'tamorphose ait
t directement observe. Ou sait, au contraire, avec certitude
que la transformation inverse s'est bien souvent effectue.
3 Un tel changement appara!t d'ailleurs comme inexpli-
cable. Qu'est-ce qui aurait pu dterminer le groupe du pre a
se dessaisir partiellement de ses enfants et leur Imposer un
totem tranger, avec toutes les obligations morales et reli-
gteusesqui en drivent? C'est dans ie cian paternel qu'ils
sont venus au monde, c'est i qu'its passent )cur existence, les
uns en totalit, les autres en grande partie. D'o pourrait tre
venue l'habitude de les faire inscrire une autre socit tot-
mique ? Cunow lui-mme reconoatt que la rponse est a peu
prs impossible
L'volutioninverse est, au contraire, facilement intelligible.
Dj, par le seul fait que t'enfaut grandit chez son pre, au
milieu de ses parents paternels, il est Invitable qu'i) tombe
de plus en plus dans leur sphre d'action, c'est--dire qu'il
finisse par tre totalement incorpor dans leur clan. H y a
une anomalie ce qu'it y rside et ce qu'il n'en porte pas le
nom. Pour que cette rvolution s'accomplisse sans grandes
rsistances, il suffit que les traditions et tes usages qui sont a
la base du vieux totmisme aient perdu leur autorit pre-
mire. Ce sont en effet les seuls liens qui rattachent en par-
tie t'entant & une autre communaut morale et qui, ainsi,
s'opposent une assimilation complte. Par consquent,
mesure qu'ils se relchent, l'obstacle diminue. Or, en fait, il
n'est pas contestable que, l o la filiation agnatique est ta-
blie, le totmisme est afaibli. Chez les Kurnai, il n'y en a
plus it n'existe plus de clan du tout, mais seulement des
groupes territoriaux, diviss immdiatement en familles par-
ticulires. Chez les Narriayeri, it survit encore, mais sous
une forme attnue. Chaque groupe local a un totem, au moins

')) V. Fmxc)'. 7'o/<'tMMM), 69.H.


(~ 0/ <-< )). ):tX.
en gnrt, mois intentent territorial est devenu prpond-
rant chacune de ces divisions est caractrise avant tout par
la portion du sol qu'elle occupe. Aussi est-elle dsigne, non
par le nom de son totem, mais par une expression purement
gographique. Certaines ont mme plusieurs totems, ce qui
est contradictoireaveu la notion mme du ctun un cian vri-
table ne peut avoir deux totems, parce qu'il no peutavoir une
double origine. De plus, t'tre totmique n'est plus, chez les
Karrinyeri, l'objet d'un culte; si c'est un animal, il peut tre
chasse et mange. Les individus ne s'identifientplus avec lui.
Ce n'est plus gure qu'une tiquette conventionnelle
Cunow, il est vrai. tent de soutenir que. si le totmisme
ne s'observe pas dans ces socits, ce n'est pas qu'il y Hit
disparu, c'est qu'il n
y avait jamais existe. Suivant lui, les

Kurnai reprcsentoraieatta (orme la plus intrieure de ta civili-


satiouaustraHenne;tes N:)rrinyeri,tout en dpassantles prc-
dents,n'auraieut pas encore atteint les autres tribus du mme
continent. C'estpourquoi l'organisation totmique semit mme
inconnue des premiers et seulement t'utat naissant ettex tes
seconds. Malheureusement pour cette hypothse, on trouve
citez les Kurnai des vestiges trs vidents d'un totmisme
ancien. Chaque sexe Il son totem et ce totem est l'objet d'une
vritable vnration pour les hommes, c'est une surte d'mu
(yeeruug) pour les (entmes. une espce de fauvette (djeetgu))).
Tous les oiseaux appels yeerung sont considrs comme les
frres des hommes, tous ceux appels djeetgun comme les
Surs des femmes, et ces deux sortes d'animaux taient
regards comme les anctres des Kurnai*. Le caractre tot-
mique de ces croyances et de ces pratiques est d'autant plus
incontestablequ'on les retrouve dans plusieurs socits o le
culte du totem est rest ta base de t'organisation sociale'.
D'un autre ct, il est tout fait impossible d'y voir une forme
premire et comme un premier essai du totmisme; car il est
certain que, l'origine, le totem natt du ctan dont il fait
l'individualit. Ce n'est qu'ultrieurement et par voie drive

()) t:tm'<w. 0~). cil.. M. Cf. Curr. (~. ct< )t. iitt '.un-.
(2) H<"n ''t )~witt. 0~.
t'MWAe)' A'o/M. j). :<! et :mh'.
< p. t!'t, ~Mt <-) .<uh- i)9. Xt:i. nowiU.

<3) V. t'<Mi!t')-. ru~fMX'wt. ['. 51. Cr<m)o}.M'.ttMf Ta&oMin Jo)-M< o/


Me .~M//t. //t~ t8'Ki. )). 2:i. AM~i u'' cmujtrcnonti-MtU:' jttt!tM))))<t'xt Cunw
n pu ditv (p. !i!); ~u'un ne ~[ruuvc pM de totcuM sexut'ti H)t ttcho~ dus
Kurnai.
qu'ii s'est tendu aux groupes forms pur chaque sexe t'iu-
trieurdecbaqueetan'.r.
Ces faits, d'ailleurs, concordent avec ceux que nous avons
tablis tout d'abord. Ce qui tend il renverser te principe de la
niituion utrine, c'est lu toid'exogfftnio combine avec l'usage
d'aprs lequel la femme doit vivre cbex son mari; car ce sont
ces deux rgles qui tont que t'entant est ptac immdiatement
sous ta dpendancede ses parents pnternets. tandis qu'ii est
tenu tuin du ctan de sa mre. Or les mmes causes, nous
t'avons montr, branlent ia socit totmique et y substi-
tuent un agrgat o lit communaut du sol joue un rle plus
important que la communaut du nom. Par consquent,
quand tes groupes lmentaires dont est faite une tribu se
recrutent par voie de descendancemasculine, il est invitable
ou qu'ils n'aient plus rien de (otmique ou que le totmisme
n'y survive qu'auaibii. Ou bien le totem, comme dnomina-
tion collective du groupe, disparalt compltement, ou bien,
ce qui est plus frquent, il devient nue simple tiquette, un
arrangement conveutionnelqui rappelle extrieurementl'ins-
titution disparue, mais qui n'a plus le mme sens ni ta mme
porte. Ce n'est plus te symbole de tou~ un ensemble do tra-
ditions sculaires, de pratiques crgatth&es et maintenues pen-
dant de longues suites degttrations car il a t rduit
prendre cette forme~S~Rte d'une rvolution qui a emport
ces pratiques et
ces~~MtiMts.
"'h
Les explications &n pr~ft~nt s'appliquent presque iden-
tiquement aux qMMques autres interdictions sexuelles que
l'on a signales dans les tribus australiennes et que l'on a
parto~ .prsentes comme trangres & la loi d'oxogamie,
y,
))t'))Ut')')'.)MV')wh'<Ku)'t)u!f)(p)us))n)t-))''st))'!t<))')!<itn'<)M'')<M
MtrMMt)u~uu~tM<Mttt'C''tt''wi''nK)))<t't'Nit~u~)\'t)raMty't)<)'))''
la tiut' dt! ttUM ))t'n' Mu<))tuu)){:. n")M t'\n)<'t)tttt''M) jmn'ttt df cetui tju'i)
<tt)n<' M") t~ro (Mt)MffHt);. Si ()"<)(-. <)it tx'tn' uu[t-ur. lu M'ur du ))'r"
<t tp('<;)<;t' asMundttn) tU)t(''t'tt''). t'st ()<)' jusqu' ))' t'-)ttp.< ttSfH' )wnt!
t')h- t'-t)tit r<i)!))et)MM[ lu )t)f-rt', ft tjUM t')))t<)m- hutnttt' pur t'ttnsMqut.'nt.
t')H)U:MHt su suiMt' e<' 'lui it)diqu).')':ut ('t')-)a!tn'nt!;ttt un <?(Kt "'iat <n'< pfi-
mitif. ))?! e't'st o)t))))t't- t)U'' < '-<))r'si')n)! ))t- i:<')Yt'ht pM" tt dt~))!W'r
t)M ittjtjturt!' do <'un!'<m){'"nMt!. cuntttff ttou~ tf )t)oH<tt'n)n!!j'ttt!- h'iK u pt'u-
))tt< du th-t'o de Kuhb'r et ~tum.'
Cunuw )'- rfcutxttttt tui.ot~tttt' "n n't'n
))cat dune rio cuttetun' n')<tth'nf<Ht Mttx liens <)u tKt))K ))ui UMt~t'nt u
<t))MS)tM)tt)<!< ox'mbre:! <h) ){'f<'p)!. Ko Mutit'?. Mun~n ')''! lu n'~t''m-
tiatt ttMxcutitto du ){mutM' jMtcmc) 'lui est )tt)t)it'it'Mru & c'-th' df t\'t)f<mt.
<'t MutUtnUMg t(t t"n-ti<: K)MiM))M: d<: lu ~ncMUuo 'lui <"it d<tn< les M<'u)M
<;M)t)itiuu<.
'dont e)tes sont pourtant des consquences et des apptica'
tions. On peut les ramener aux deux typessuivants < Quand
le clan est agnatique, les rapports sexuels ne sont pas seule-
ment interdits avec les membres du clan auquel ou upnar-
tient, c'est--dire avec les parents paternels, mais encore~ec
ceux du ctan maternel. C'est le cas, notamment, chez tes
Narrinyeri Eu d'autres termes, l'exogamie est double.
2" Monte quaud le ctan est utrin, on cite des cas o le mariage
est interdit non seulement entre les individus qui on font
partie, mais encore entre eux et certains de leurs parents
pttemeis. C'est ainsi que, chez les Dyorie, un nomme ne peut
pouser ni la (!)te de son frre, ni ta sur de son pre, ni ta
fille de ta stcur de son pre, ni la fille du frre de sa more
Le premier fait se comprend sans peine une fois q'on a
reconnu l'antriorit du clan utrin sur le clan agnatique.
Car, quand ce dernier se constitua, les ides et les habitudes
que l'ancienne organisation avait tixues dans les conscience)!.
ne disparurent pas comme par enchantement. La parent
utrine perdit sa primaut, mais elle ne fut pas abolie, et,
puisqu'elle avait exclu si longtempsle commerce sexuel, elle
continua avoir les mmes eHets. Tout ce qu'il y eut de
chang, c'est que la parent agnatique eut dsormais la mme
innuence. L'ancienne exogamie se maintint cte de !a nou-
velle. Lit prohibition devint bitatrate.
Quant aux interdictions partieites et plus ou moins excep-
tionneitesqu'on a signales chez les Dyerie et quelques outres
tribus, elles correspondent une phase de transition. Elles
ont d s'tablir un moment o ta parent patorneito com-
menait faire sentir son action, sans qu'olle tnt encore
devenue prpondrante. Car une telle transformation n'a pu
s'accomplir qu'avec la plus extrme lenteur. C'est peu peu
que les liens qui rattachaient t'entant au totem maternel se
sont relchs peu peu que les caractres de la parent ma-
ternelle so sont propags l'autre. Dj le systme des classes
avait pour effet d'empcher ie mariage avec la moiti du clan
paterne), puisque, sur deux gnrations, il y en avait une
avec laquelle les relations coujugales taient interdites, tta'
a donc rien d'extraordinaire ce que cette interdiction se
soit peu peu communique d'autres parties du mme clan.

(t) Cunow. 0~. fit.. p. 8t. Curf- n.B~ et 968.


?) Cuttow, il. Ht.i.
Une fois sortie des llmites dnnios dans lesquelles elle tait
primitivement renferme, elle na pouvait manquer de gagner
de proche en proche par une sorte de contagion iogique. Je
ne nuis pouser ias't'ur de mon pre parce qu'elle appartient
a ia%~nrationqui prcde la mienne. partant la classe qui
m'est interdite. Mitis alors, comment te mariage avec la fille
do cette femme apparaitrait-it comme beaucoup moius
odieux? L'itorreur que l'un inspire se transfre natureiie-
ment l'autre, par cela mme que les sentiments de parent
dont l'une et l'autre personne sont l'objet sont sensiblement
de mmo nature. Do mme, je ne puis pouser, si je suis
femme, le frre de ma mre parce qu'il porte le mnx' totem
que moi mais alors n'est-il pas invitable que cette mme
dtente s'tende aux fils de cet homme, qui lui tiennent de si
prs et qui vivent sous le mme toit et de la mme vie que
lui '? Ce qui a du faciliter cette extension, c'est que tous les
membres d'un mme clan se regardaient comme issus d'un
mme anctre et voyaient mme dans cette commune descen-
dance la source principale de leurs obligations rciproques.
!) devait doncapparattrecomme naturel et logique, au bout
d'un certain temps, que ia mme dfense de contracter
mariage s'appliqut des relations de consanguinit diff-
rentes de celles qui passaient pour caractriser le cian.
D'une manire gnraie, mesure que les cians se mlent
et se pntrent de la fa~oo que nous avons dcrite, les diu-
rentes sortes de parent font de mme; elles se nivelleut.
L'ancienne parent utrine ne peut plus, par consquent,
garder sa prpondrance. Mais alors, du mme coup, le cercle
des interdictionss'tend, 11 s'tend mme tellement qu'il en
vient parfois a ne plus avoir de bornes prcises. Non seule-
ment il gagne le clan paternel aprs le clan maternel, mais il
va plus loin; il atteint d'autres groupes, qui n'ont contract
avec les prcdents que des alliances plus ou moins passa-
gres. Surtoutquand le totem tuit dfaut pour distinguer les

(i)!<ua<t prenons ('es t'~jxt'~ioMit tto fH<. fith' frt'rct:. <'tf.. iittns en p)v-
<'i~'r)<'M't)Sj()s<jU<'n<'f<)ttN'vya!<<'Mt'Ur,(~<n)t<)"tK')t'YW!tt)U'
)tHh'u~h'e))''x)''<)tnt)tit)f!tH))n'uttt)Uj<)HM!!)'ttt'M)<H)<)t')'!iit-t'c!!))r<'s-
Muw<)<Mcn('ttt~indh1')usd~tt'n))in'<.)i'<tttt.'Mnt)ttm't'tt'uj<'tt)))i)e!i
t
ttoxHnM Niost dc< n'txtxtt))' ')'* ''onsanKuinit'~ i))''))ti<)U)'s <'cMt'~ <)u<! )K'U)!
ap)M')o)~ <)<< to~mc~ nutu~. ou )<ifn si t'ttci. repundoMt & 'tes ){''uuj)cs d'in-
dh'i<)usc<)tn)m'tmMtfhafUt)))res')Met<)utt'unM)<LM'L<tn't'it<
ftHit u[)sert'atuat't! tmu~ M'niicigncnt trop mtt:)nent sur c<; putut. qui aurait
une itoportanee essentielle.
relations Incestueuses des autres, on ne sait plus o ottes
cessent. C'est ce qui parait s'tre produit chez les Kurnai.
Xutie part la fusion des ctans n'a d tre plus complte,
puisque ie totmisme a disparu. La socit est faite de groupes
dont tous les membres se regardent comme parents, mais qui
n'ont plus d'insigne cofnmuu. Or, nulle part aussi les cas de
prohibition ne sont aussi muitiptis. Ainsi, un Kurnai ne peut
pas pouser une femme qui appartient it un groupe o cer-
tains de ses proches sont dj alls prendre -femmes. 11 eM
rsulte qu'il lui faut trs souvent chercher trs loiu une
femme a taquette il puisse lgitimement s'unir'.
l,
L'exognmie est donc bien ta forme ta plus primitive qu'ait
revtue te systme des pruhiMtiousmatrimoniaiespour cause
d~uce&ie. Toutes les iuterdtetions qu'on observe dans les
socits infrieuresen sont drives. Dans son tat tout fait
6)ementaire, elle ne dupasse pai; le eian utrin. De l elle
s'tend, partieitemeat d'abord et totalement ensuite, au ctan
paternel; quelquefois, elle va plus loin encore. Mais, sous
ses modalits diverses, elle est toujours la mme rgle appli-
que des circonstances diffrentes.
. On conoit ds lors quel intrt H y aurait savoir quelles
causes Font dtermine. Car il n'est pas possible qu'elle n'ait
pas anecte t'votution ultrieure des murs conjugales.

m
Un grand nombre de thories ont t proposes pour
rpondre la question. Ettes se rangent assez naturellement
en deux classes. Les unes expliquent l'exogamie par certaines
particularits spciales aux socits infrieures les autres,
par quelque caractre constitutif de ia nature humaine en
gnrt.
Lubbock, Spencer et Mac Lennan ont attach leurs noms
aux premires. Quoique leurs explications diffrent toutes
dans le dtail, elles reposent sur le mme principe. Pour les
uns et pour les autres, l'exogamie consiste essentiellement
)) Cunuw. < tt~ )'. M. Vuin MtM' itatru prouv).' ')m' t'm')n)!tHiti<M)
t'aotitinh' dM Kurotti x'n ricM de' jtt'itoitif. Bt~'n toin )(u<' Dtot'ft'uf du t'tn-
<:<te suit <'))m fux tt !<(m tMitmuuto. elle n'Mt ttuttu part aus:)! dctotupp<o.
On peut un~tuu dirt: ~u'<;)h! y ttttMiot un tMvvtuppetUfnt Monnat.
dans un acte do violence, dans un rapt qui, d'abord spora-
diquo, se serait peu a peu gnratis et serait, par ceta mme,
devenu obligatoire. Les hommes auraient t amens par dif-
frentes raisons aller prendre leurs femmes dans des tribus
trangres ptutot que dans la leur, et, avec le temps, cette
habitude se serait consolide en rgie imprativo. t'arattte.
ment, elle aurait aussi chang do nature. Tandis que primi-
tivement elle supposait un coup de force, une vritable t'itMia,
elle serait devenue peu il peu pacifique et contractuelle; et
voUa pourquoi c'est sous cette forme qu'on l'observe le plus
gnratement aujourd'hui.
Sur la nature des 'causes qui auraient donn naissance il
cet usage, ces auteurs se sparent. four Mac Lennan', c'est ta
pratique de l'infanticide qui t'aurait rendu ncessaire. Le
sauvage, dit-il, tue souvent ses enfants, et ce sont les filles qui
sont sacrifies de prfrence. !) eu rsulte que tes femmes sont
en nombre insuffisant dans ta tribu il faut douc prendre au
dehors de quoicombler ces vides. Pour Lubbock, c'esl le besoin
do substituer des mariages individuelsaux mariages coiiectifs,
seuls tolrs l'origine, qui aurait jou le rle dcisif. Par-
tisan des thories de Morgan et do Hachofen. il admet en
euet que, dans le principe, tous les hommes do ta tribu pos-
sdaient collectivement toutes les femmes, sans que nul put
en approprier une pour son usage exclusif car une telle
appropriationet t un attentat contre les droits de la corn"
muuaute. Mais il eu tait autrement des femmes qui faisaient
partie des socits trangres sur elles, ta tribu u'avait
aucun droit. Ceiui donc qui avait russi en capturer une
pouvait la monopoliser, s'ii te desirait. Or ce dsir ne pouvait
manquer de s'veittor dans te cur de l'homme, parcequetes
avantages de ces sortes d'unions sont vidents. Ainsi se serait
form un prjug dfavorable aux mariages endogames~.
Enfin, pour Spencer, c'est le got des socits primitives
pour la guerre et le pillage qui aurait t la cause dtermi-
nante du phnomne. L'enlvement des femmes est une
manire de dpouiller le vaincu. La femme capture fait
partie du butin elle est donc un trophe glorieux et, par
suite, recherch. C'est une preuve des succs que t'en a rem-
ports dans la bataille. La possession d'une femme conquise

()) \S/K~t'M<~ .~<tc<fH/ //M<<M't/,<-)). tOft/MMOMt.


< V. U/tHef d< t''t<tf!a<KM, )<. Mt.
ta guerre devint ainsi une sorte de distinction sociale, un titre
de respect, i'ar contre-coup, le mariage que l'on contracte
pacifiquementau sein de lu tribu (ut considre comme une
tachet et )!6tri. De la utrissuro la prohibition formelle i)
u'y a qu'un pas
Nous ne mentionnons que pour mmoire ces explications
trop sommairemcut construites. On ne voit pns pomquoi,
dans le seul but d'obvier & l'insuffisance des femmes indi-
gnes, tes hommes se seraient interdit, et sous peine de
mort, d'utiliser celles qu'ils avaient sous la main. D'ailleurs,
il u'ost prouve ni que i'iutauticide des filles ait en cette gu-
ratit6, ni qu'il ait pu produire les effets qu'on lui attribue, tt
est vrai qu'il est frquent en Australie; ntais on cite bien des
puys o il n'est pas pratique Kn tout cas, il y a uu fait qui
devrait retahHr t'quitibre entre les sexes, alors mme qu'il
serait ainsi rompu au tendonain de la naissance c'est que,
tneme dans les pays civilises, tu mortalit naturelle des gar-
ons dpasse celle des (i)!es. A plus forte raison, en doit-il
tre ainsi dans les socits primitives o un tat de guerre
chronique expose l'homme bien des causes de mort qui
menacent moins directement les femmes. Et en edet, d'une
enqute faite par les soins du gouvernement anglais sur dit-
frents points des ttes Fidji, o l'infanticide tait en usage,
ii rsulte que si, pendant t'enfance, le nombre des garons
dpasse celui des filles, le rapport est Inverse pour ce qui con-
cerne tes adultes'.
3.
Les thories de Lubbock et de Spencer sont encore plus
dnues de tout fondement. La premire repose sur un pos-
tulat qui u'est plus actuellement soutenable. Ii n'est pas uu
seul fait qui dmontre ta ralit d'un mariage collectif. Quoi
de plus trange, d'ailleurs, que cette tribu o tes hommes
dlaisseraient obligatoirement toutes tes femmes parce qu'ils
eu ont la pleine proprit ? Ajoutez a ceta que les femmes
faites prisonnires ta guerre devaient', comme le butin
fait en commun, appartenir collectivement a la communaut
et non leur ravisseur. Quant Spencer, a l'appui de son
hypothse, il cite en tout quatre faits', desquels il rsulte
(t) <'<'tM<'t/)M f<f wt'Mo~'f. )). j). iMtC ''t ~uh'.
()
.:MM.
t' fai~ th)n!. W<<)'')-'M!)ft'):./<'</<)'<'</ M';<o.~<' At/MMO), p. 9!)T-

(3) V. fi<M)t' '-t ))"wiU. <f<'tt< oxf A'u'Mitan)!, p. i7t.:T)i.


(t; /~<t<-<~Mde -s'of-t~ )f. ~!9.
que, chex les sauvages, oa exige parfois des preuves do cou-
rage comme condition prliminaire au mariage. Mais est-ce
que le seul moyen de tmoignerde sa bravoure est de prendre
des femmes? On trouve au moyen ge des usages analogues;
le chevalier devait mriter sa nanco par quoique bel exploit.
Pourtant, il ne s'est alors rien produit qui ressemblt a
t'exogamie. Que) cart, enfin, entre le uiobiie auquel ou attri-
bue cetto rgietneutation et !a peine terrible qui frappait le
violateur de la ici
Mais le vice radical de tous ces systmes, c'est qu'ils repo.
sent sur une notiun errone de l'exogamie. Us entendent eu
effet, par ce mot, l'obligation de n'avoir de rapports sexuels
qu'fff ~ /<'Mm<* MO~MMf~tff' <<!H~)'c; c'est le mariage
''Mffv ttx'o~fvx la )''' ~'<<"< qui serait prohib. Or i'exo-
f<<*
,tmie jt'a jamais eu ce caractre. Elle dfend aux individus
d'un mcme ciitt) de s'unir entre eux ttt.ns. trs~cncratement,
t;'e'.t dans un autre cian de la tncme tribu, ou tout au moins
de la mme confdration, que les hommes vont prendre
tours femmes et que les femmes trouvent leurs maris. Les
clans qui s'aiiient ainsi se considrent mme comme parents,
loin d'tre en tat constant d'hostilit. Cette malheureuse
confusion entre le clan et la tribu, due une insuffisante
dcnnitiun de l'un et de l'autre. n contribu pour une large
part a jeter tant d'obscurit sur la question de l'exogamie. On
ne saurait trop rpter que si )e mariage est exogame par
rapport atx groupes totmiqucs dans primaires ou secon-
dai.resj~t! est gnralement endo~ame par rapport a la socit
politique (tribu).
Mac Lennan. it est vrai, reconnait que l'exogamie, telle
qu'elle existe aujourd'hui, se pratique l'intrieur de la
tribu. Mais suivant lui, cette exogamie intrieure serait une
forme ultrieure et drive, dont il explique la gense assez
ingnieusement. Soient trois tribus voisines A, B, C qui pra-
tiquent l'exogamie de tribu tribu. Les hommes de A, ne
s'unissant qu'aux femmes de B et de C, s'eu emparent de
force et les emmnent chez eux. Quoique captives, elles gar.
dent leur nationalit; elles restent des trangres au milieu
de leurs nouveaux matres. En vertu de la rgle qui veut que
l'enfant suive lu condition de la mre, elles communiquent
ce caractre aux enfants qui naissent d'elles. Ceux-ci sont
donc censs appartenir la tribu maternelle, soit B, soit C,
quoiqu'ils continuent vivre dans la tribu A o ils sont ns.
Ainsi, au sein de cette dernire socit, nagure ttomogne.
se forment deux groupes distincts, l'un B' compos des
femmes de 13 et de leurs enfants, l'autre C' qui comprend les
femmes de C et leurs descendants des deux sexes. Chucun de
ces groupes constitue un clan. Une (ois qu'ils sont tonnes pat'
ce procde violent, ils se recrutent regutieremeut par la voie
de )a genuratiou. les enfants qui naissent ressortissant au
ctan materne). Ils surviveut donc aux causes urtificiettes qui
leur avaient donne naissance. s'organisent et fonctionnent
comme des t'tcments normaux de lu socit. Quand ce rsultat
est atteint, t'exogamio extrieure devient inutile. Les hommes
de M* n'ont plus besoin d'aller conqurir hors de lit tribu des
femmes d'une autre nationalit; ils en trouvent chez eux
dans le ctaa C
Muis nous sin'uxs aujourd'hui que tes ctans se sont forms
d'une tout autre manire. Dans ta piupart des tribus austra-
liennes et fnefnc indiennes, i) n'est pas douteux qu'ils sont
ns de deux souches primitives par voie de gnration spon-
tauee. Il:; Me sont. donc pas dus une importation vioieute
d'lments t''tran~crs et dj diffrencies. L'itypothese de
Mac Lonnan pourrait tout au plus s'appliquer aux deux
cians primaires ()ont les autres sont sortis par segmentation.
Mais il est bien unprobabte que ces doux sortes de clans
resuiteut de deux processus aussi diffrents, alors <tu'ii M'y a.
pas entre eux de diffrence fondamentaie. Pourquoi d'uil-
leurs J'introduction de femmes trangres aurait-elle donn
naissance, dans tant de cas, i( deux groupes heterog-enes et
deux seutement? Il faudrait donc admettre que chaque tribu
a regutierement emprunte a deux seulement de ses voisines
les femmes qui lui manquaient. Mais pourquoi se serait-elle
ainsi limite? Pourquoi enfin cette importation aurait-oHe
subitement cesse des que les deux ctans primaires commen-
crent. a apparaitre sur le fond primitivement homogne de
la peuplade' On ne voit pas davantage comment l'exogamie,
ainsi transforme, aurait pu se maintenir si elto avait les
causes qu'on lui attribue. Car ce n'tait pas uu moyen de
diminuer la disette de femmes dont on pouvait souffrir que
de faire passer celles qu'on avait d'un ctan daus l'autre. Ces
virements ne pouvaient avoir pour effet d'accroitre, si peu
que ce ftlt, le totat de la population fminine.
0 ) t/<'xt))icatit)tt n ''['' n')'ti' )))n' t:)Mttsh\. tfemxM. t. Xt), p. &?, et ))M
neitwu)'). ~MfMwA/'cAcfM<(7f'e, p. )!f7t't suit.
Plus digne d'examen est la thorie de Morgan L'exogamie
aurait pour cause le sentiment dos mauvais rsultats qu'on
a
souvent imputes aux mariages entre consanguins. Si,
comme
on t'a dit, la consanguinit est par etie-mme une source de
dgnrescence, n'est.it pas nature)
que tes peuples aient
interdit des unions qui menaaient d'affaiblir ia vitatitujreue.
raie ?
Mais quand on cherche dans l'histoire comment tes hommes
se sont explique & eux-mmes ces prohibitions, a quels
mobites paraissent avoir obi les lgislateurs,
ou constate
que, avant ce sicle, les considrntions utilitaires et physio.
logiques semblent avoir t presque compltement ignores.
Chex les peuples primitifs, il est bien dit
et l que ces
unions ne sauraient prosprer. Quand
un homme se
uni it sa tante, dit le Lvitiquo', ils porteront la peinesera de
teur ptiehe et n'auront pas d'enfants. Mais cette steritite
est
prsenK'e comme un chtiment intUg
par Dieu, non comme
la consquence d'une toi naturelle. La
preuve, c'est qu'au
verset suivant les mmes expressions sont employes dans le
cas d'un mariage qui par iui-mme ne saurait avoir de mau.
vais ettets organiques il s'agit d'un homme qui s'unit
la
femme de son frre. Dans l'antiquit classique, les
raisons
les plus diverses sont allgues~ Pour Ptaton, te croisement
serait surtout un moyen de meier les fortunes et les
tres et de raliser une homognit dsirable curac.
de t'Ktat'. Pour ((autres, il s'agit d'empcher
pour le bien
que i'atection
ne se concentre dans uu petit cercle ferm*. Suivant Lulher,
si la consanguinit n'tait pas un obstacle,
ou se marierait
trop souvent sans amour, uniquement pour maintenir l'int-
grit du patrimoine (amitiat C'est seulement vers le
xvtt" sicto qu'apparat cette ide que ces unions afaibtissent
la race et doivent tre prohibes pour ce motif;
encore reste-
t-ette assex indcise'. Montesquieu ne semble
pas la soup-

(t) M")'(!'t". /t))fM<)< .S'M'tC~, p. M)..


S) L. XX. !?.
(3) O~KM~Mf. Y. 9; /.t,M, V). )< 1'1 \')H. <
W C't~t ).' mi. (t'Ari~t')). (t.. ifttittt .U~u~titt. Voit )..<)..). ,-i(At <)M~
ttuth. !e .WnfW<t.?<- c/xM)- Kin ip. ?.).
)'-<

(S) V. Jiot)), j). 9(i.


(0) Y. BMr).)n. ~')<t/.M.yo/'j)f<McA< f)~)-.)n).
))))f)p))<t.~eMoM<!)fA)~)<tMtco,<6K).)h-.XY.
)(ii, tt). M. Ctt,
onner'. Mais ce qui est plus intressant, c'est qu'elle parait
avoir t presque trangre la rdaction de notre Code. Por-
talis, dans sou expose des motifs, n'y fait pas aitusion. On la
trouve indique dans le rapport fait au Tribunal par Gillet,
tnais elle y est relgue au second phu. 0~'<' ~et~MM !<<<'M
~'oh~/M ' / ~<<'f~Y/f'f<' p/t~t'/Mf, il y a, dit-il, un motif
moral pour que l'engagement rciproque du mariage soit
impossible ceux entre qui le sang et t'attinite ont dj tabli
des rapports directs ou trs prochains. Il est donc bien
invraisemblableque les Australiens et les Peaux-Hougesaient
eu comme une anticipation de cette thorie qui ne devait se
faire jour que beaucoup plus tard.
Cependant, cette premire considration n'est pas sufRsam-
ment dmonstrative. On pourrait supposer que les hommes
ont eu confusment conscience des mauvais enets de la con-
sanguinit. sans pourtant s'en rendre clairement compte, et
que ce sentimentobscur a t assez fort pour dterminer leur
conduite. Il s'en faut en effet que nous connaissions toujours
avec clart tes raisons qui nous tout agir. Mais, pour que cette
hypothse ft recevable, encore faudrait-il que les maux dont
on accuse les mariages consanguins fussent rels, incontes-
tables et mme d'une vidence assez immdiate pour que des
mtettigeoces grossires pussent en avoir au moins te senti-
ment. tt~audrait mme qu'ils fussent de nature frapper
vivement l'imagination, de quelque manire d'ailleurs qu'on
se les expliqut car, autrement, l'extrme svrit des
peines que l'on dit tre destines a les prvenir serait inin-
teUigibte.
Or, si l'on examine sans parti pris les faits allgus contre
la consanguinit, le seul point qui paraisse tabli, c'est qu'ils
u'ont aucunement ce caractre dcisif Sans doute, on peut
citer des cas o elle parait avoir t nfaste mais les exemples
favorables la thse oppose ne sont pas moins nombreux.
On connatt de petits groupes sociaux dont tes membres, pour
des raisons diverses, ont t obligsdo se marier entre eux,
et cela pendant de longues suites de gnrations, sans qu'il en

(); &p~<</<MtoM, XX\). tt.


(S) Nous ne pouvons riter tou~ h~ oovmtt' ))<nn< sur lu question. On
trouvem une t)ib)iuf!t'aphi<' cmttpM)' ttittsi que tous les faits iHtportentii
Mttt'gMM~ de part et d'autfe <t<tnii te )hrc de Huth <Mj& tiM (Londres, i<a7).
Une petite t)ruchnrt'd<'8)t''r)M't.BAt:frM<'AMtB<M~t~<'t<;eH~M, Bet'tin.iSW.
cunticot auMi un aMM bon t'x{)0it! de t'etOLt <)<} la question.
fut rsult aucun anaibtissement de la race H semble, it est
vrai, ressortir de certaines observations que lu consanguinit
accrott la tendance aux affections nerveuses et & la surdi-
mutit mais d'autres statistiques tablissent qu'elle diminue
parfois ta mortalit. C'est ce que Neuviiie a tabli pour les
Juifs
Ces con dictions apparentes prouvent que la consangui-
nit, par ette-mme, n'est pas ncessairementmalfaisante. La
o il existe des tares organiques, mmosimptementvirtuettes,
elle les aggrave parce qu'elle les additionne. Mais, pour la
mme raison, elle renforce les qualits que prsentent gale-
ment les parents. Si elle est dsastreuse pour les organismes
mal venus, elle confirme et fortifie ceux qui sont bien dous.
!t est vrai qu'en donnant un relief exceptionnel certaines
dispositions, mme avantageuses, elle risque de troubler
l'quilibre vital; car c'est une condition de la sant que toutes
les fonctions se balancent harmoniquement et se main-
tiennent mutuellementdans un tat de dveloppement mo-
dr. Mais d'abord, si ces ruptures partielles d'quilibre
sont morbides au regard do la physiologie individuelle, si,
dans une certaine mesure, .elles mettent le sujet qui en est
atteint dans des conditions moins favorables pour lutter
contre le milieu physique, elles sont souvent pour lui une
cause de supriorit sociale. Il retrouve d'un cot ce qu'il
peut avoir perdu de l'autre, et parfois davantage car l'homme
est double et ses chances de survie no dpendent pas seule-
ment de la manire dont it est adapt aux forces cosmiques,
mais encore de sa situation et do son rle dans la socit.
Ainsi, l'incontestable tendance des Juifs toutes les varits
de !a neurasthnie est peut-tre due, en partie, une trop
grande frquence des mariages consanguins or, comme elle
a pour consquence une mentalit plus dveloppe, elle leur
a permis de rsister aux causes sociales de destruction qui
les assaillent depuis des sicles. Surtout, on ne voit pas pour-
quoi les socits condamneraient d'une manire absolue cette
culture intensive de qualits dtermines; car ettes en ont
besoin. Les aristocraties, les lites ne peuvent pas se former
autrement. En tout cas, tes phnomnes de dgnrescence

(); Y. )M Mtit dtUM. Math. p. )M-t8<t.


Mf)M<foe)'MH~ T'<M~<'M<<fM, )''M)x.'f<)ft. t85X, p. tS-jO et i)t-U3.
Lcif chiffre! sont reproduits dtne Huth, l. ifc.n?.
qui peuvent se produire ainsi, & quelque degr qu'ils soient
nuisibles, ne sont sensibles que si ces sortes d'unions se sont
reptes pendant plusieurs gnrations. H faut du temps pour
que l'nergie vitale s'puise force d'tre spcialise. Les
consquences de cette spciotisation outre ne peuvent donc
tre atteintes que par une observation patiente et prolonge.
En rsume, s'i) semble bien que tes mariages consanguins
crent toujours un risque pour les individus, s'il est sage de
ne les contracterqu'avec prudence, ils n'ont certainement pas
les effets foudroyants qu'on leur a parfois attribus. Leur
influence n'est pas toujours mauvaise, et, quand elle est mau-
vaise, elle ne devient apparente qu' la longue. Mais alors,
on ne peut admettre que cette nocivit limite, douteuse et
si malaisment observable, ait t'aperue d'emble parle
primitif, ni que, une fois aperue, elle ait pu donner naissance
a une prohibition aussi absolue et aussi impitoyable. L're
des discussions souleves par ce problme est loin d'tre
close; les thories les plus opposes sont encore en prsence~t
la question mme n'est souponne que depuis peu les faits
ne sont donc pas d'une vidence et d'une nettet teties qu'ils
aient pu saisir l'esprit du Muvuge. Lui qui d'ordinaire sait
si mal distinguer les causes, relativement simples,qui dter-
minent journellement la mort, comment aurait il pu isolerl'
ce facteur si complexe, enchevtr au milieu do tant d'autres,
et dont l'action, lentement progressive, chappe par cela
mme & t'observation sensible ? Surtout, il y a une frappante
disproportion entre les inconvnients rels de la consan-
guinit et les sanctions terribles qui punissent tout manque-
ment la loi d'exogamie. Une telle cause est sans rapport avec
l'olfet qu'on lui prte. Si encore on voyait les peuples se
comporter d'ordinaire avec cette rigueur dans des circons-
tances analogues Mais les mariages entre vieillards et jeunes
filles, ou entre phtisiques, ou entre neurasthniques avrs,
entre rachitiques,etc., sont autrement dangereux,et'pourtant
ils sont universellement tolrs.
Mais MKe t'a~OM ~M.< <~C&<PP encore, c'est que ~'M'O~tNM tt<'
KoM<<f)t<
<;'? rapport m<Mt<!< et M('<))t<<<'r<' arec la coHso~ttt-
t)M< Sans doute, les membres d'un mme clan croient issus
se
d'un mme anctre; mais ii yaune norme part de fiction dans
cette croyance. En ratit, on appartient au clan ds qu'on en
porte le totem, et on peut tre admis le porter pour des rai-
sons qui ne tiennent pas la naissance. Le groupe se recrute
presq ue autant~aradon.tiotLque~Mr.gn.ratJQU. Les prison-
niers faits~&la guerre, s'ils ne sout pas tus, sont adoptes
trs souvent mme, un eian eu incorpore totalement ou par-
tiellement un autre. Tout le monde n'y est donc pas du m6m&
sang. D'aitleurs. on y compte trs souvent un minier d'indi-
vidus, et, dans une phratrie, plus encore. Les unions ainsi
prohibes ne se nouaient donc pas entre proches parents, et
par suite n'taient pas de celles qui risquent de compromettre
gravement une race. Ajoutez cela que les mariages au
dehors n'taient pas interdits, que des femmes taient cer-
tainement importes des tribus trangres alors mmo que
l'exogamie n'tait pas de rgie; il se produisait donc, en fait,
des croisements avec dos lments trangers, qui venaient
attnuer les effets que pouvaient avoir tes unions conclues
entre trop proches parents. Ainsi noys dans l'ensemble, il ne
devait pas tre facile de les dmier.
Inversement, l'MOjsjjtL~cM'~Jf~c~N~.foKM~Mt'Hs
<~j'a~'oc~. Les enfants du frre de ma mre apparte-
nant, sous le rgime de la filiation utrine, a une autre phra-
trie que ma mre et que moi, je puis les pouser. 11 y a plus:
partir du moment o le souvenir des liens qui unissaient
entre eux les clans d'une mme phratrie eut disparu et o.le
mariage eut lieu d'un clan l'autre, frres et surs de pre
purent librement s'pouser. Par exemple, chez les Iroquois,
un membre de la division du Loup. peut trs bien s'unir
une femme de la division de la Tortue, et avec une autre de
la division de.l'Ours. Mais alors, comme l'enfant suit la con-
dition de la mre, les enfants de ces deux femmesressortissent
deux clans dinrents l'un est un Ours, l'autre une Tortue,
et par consquent, quoiqu'ils soient consanguins, rien ne
s'oppose ce qu'ils s'unissent. Aussi, mme des peuples rela-
tivement avancs ont-ils permis le mariage entre frres et
swurs de pre. Sarah, la femme d'Abraham, tait sa demi*
sur', et il est dit au livre de Samuel que Tamar et pu
pouser lgalement son demi-frreAmmon'. On retrouve tes
mmes usages chez tes Arabes , chez les Slaves du Sud qui
pratiquentle mahomtisme A Athnes, une fille de Thmis-

()) Gcntsc. x!t. )S


Samuel, Xtt), t3.
<~ Smith. KOt~/t'p <!))<<Ma<')'f< Li f<fy .tt'a&to, p. XKt.
(~ KnmM. Sille <M<<BfftMcA (/< Sa<M(tt'<'K, )). 1.
tocie a pous son frre consanguin Che!: tous ces peuples,
pourtant, Hnceste tait abhorr6 c'est doue que la rproba-
tion dont il tait l'objet ne dpendait pas de !a consanguinit.

!V

H resterait dire que t'exogamie est due un loignement


instinctif que ressentent les hommes pour les mariages con-
sanguins. Le sang, a-t-on souvent rpt, a horreur du sang.
Mais une pareille explication est uu refus d'explication.Invo*
quer l'instinct pour rendre compte d'une croyance ou d'une
pratique, sans rendre compte de l'instinct qu'on Invoque,
c'est poser la question, non la rsoudre. C'est dire que les
hommes condamnent l'inceste parcequ'il leur parait condam-
nable. Comment croire d'ailleurs que cette rprobation
paisse tenira quelque tat constitutif de la nature humaineen
gnral, quand on voit sous quelles formes diverses et mme
contradictoires elle s'est exprime au cours de l'histoire. La
mme cause no peut expliquer pourquoi, ici, ce sont surtout
les mariages de parents utrins qui sont interdits, tandis
qu'ailleurs ce sont ceux de parents consanguins; pourquoi,
dans une socit, la prohibition s'tend & t'innui, tandis que,
dans l'autre, elle ne dpasse pas les collatraux les pluspro-
ches. Pourquoi, chez les Hbreux primitifs, citez les anciens
Arabes.cheztesPheniciens.chextesCrecs.chezcertainsStave:
cette aversion naturelle n'empeehait-etie pas un homme
d'pouser sa sur de pre? Mme, il est des cas nombreux ou
ce prtendu instinct disparut compltement. Les mariages
entre pres et filles, frres et surs, taient frquents chez les
Mdes, chez les Perses tous les auteurs de l'antiquit. Hro-
dote, Strabon, Quinte'Curce, sont d'accord pour dire que,
chez ces derniers surtout, l'usage tait gnrt En Egypte,
mme les gens du commun pousaient souvent leurs sours';
c'taitaussi ta rgle en Perse. On signale la mme pratique dans
les classes leves du Cambodge'; les crivains grecs l'attri-
(t) Comelius Xt'pM, Citout), 1.

(~ Y. nutatomott Lu.-nit), M<m< VUt. t)M. Quinte-CaMt-,Yfn,') et t<).


(3) Diodurc, t. Cf.Ma~pem. CMt/f~o~af)~ ~e <)<~ aoctCNMe. p. SS.
(4)V. MondittM. Me<M<'t~HCM)eK<! <<' / Coc/<t<w in BM~<H de la
SM. <f~H</tMp. de fttt'M, iKS.
huaient peu prs tous les peuples barbares d'une manire
gnrale Enfin, pour nous en tenir la seule exogamie, com-
meut rattacher unedisposition congnitale de l'individu un
sentiment (lui dpend d'un fait aussi minemment social que
le totmisme? L'instinct a ses racines dans l'organisme; com-
ment une particularit organique quelconque pourrait-elle
produire une aversion pour le commerce sexuel entre deux
porteurs d'un mme totem '?
Puisque te totem est un dieu et le totmisme un cuite,
n'est-ce pas plutt dans les croyances religieuses des socits
infrieures qu'il convient d'aller chercher ta cause de l'exo-
gamie ? Kt en effet, nous allons montrer qu'elle n'est qu'un
cas particulier d'une institution religieuse, beaucoup plus
gnrale, qu'on retrouve ta base de toutes les religions pri-
mitives, et mme, en un sens, de toutes les religions. C'est le
/~o.
On appelle de ce nom un ensemble d'mtordtcUpns
rituettesqut ont pour objet de prvenir tes dangereux eNets
d'une contagion magique eaempechant.tou.t contact entre
une chose ou une catgorie de choses, o est cens6 rsider
un principe surnaturel, et d'autres qui n'ont pas ce mme
caractre ou (lui ne font pas au mmo degr. Les premires
sont dites taboues par rapport aux ~coudes. Ainsi, il
est svrement dfendu un homme du vulgaire de
toucher soit un prtre, soit un chef, soit un instrument du
culte. C'est que, on ces sujets d'lite, habite un dieu. une
force tellement suprieure celles de l'humanit, qu'un
homme ordinaire ue peut s'y heurter sans on recevoir un
choc redoutable une telle puissance dpasse ce point les
siennes qu'elle ne peut se communiquer lui sans te briser.
D'autre part, elle ne peut pas ne pas se communiquer lui
ds qu'elle entre en contact avec tu! car, d'aprs les

tt)Kuripid<H(/<'Mt)<t~Ke,Y.t7S..
(!) PoWtro <'o)np)<'t. )Ment)t)))ons un'' hypothse de W''s(t'nnan'k (On-.
</iMt~MM<!r)<!)/<p.307):)'))on'u)'<)t')'in<teM'r<tittn!!UM('tivcctc<'t
instinct serait ut< fft't't de la cohtthittition. Cc))c-i fiu~'t'Uut'raiL te d)!))'
sono). L'i'teo <tv<nt etc dj <'))! par Morit: \Vtf{nct' (in A~<MHH<Mt,t8M,
)). SO). Mat< c)t<* ne Mmnut )!'ap)))i<)Ut't' t'<'xonmui< pux'jttc les pnrtBUf!'
')'nn n)'~n)o tnimn ne cohtthitent pt)!i ''niSt'tnhh' <'t vivt'nt nx~ttu' pertoit!dans
')<< distnets torritorianx ttiMtients. Nous vcn'<)t)s p))~ ))M <)uc feUf e)t))U-
catiun ne vaut pas dtvanta);c pour tes formes plus ~centei: de rinceittc.
(3) Lo mot est entpnttttc t la langue potynthiicnne mais la chose est
anh'o'Mttc.
croyances primitives, les proprits d'un tre se propaget
contagieusemont, surtout quand elles sont d'une certaine
intensit. Si dconcertanteque puisse nous parattre cotte con-
ceptiou, le sauvage admet sans peine que ia nature des choses
est capable de se diffuser et do se rpandre l'infini par voie
de coutage. Nous mettons quelque chose de nous-mmes par-
tout o nous passons; l'endroit o nous avons pos le pied,
o nous avons mis la main, garde comme une partie de notre
substance, qui se disperse ainsi sans pourtant s'appauvrir. JI
en est du divin comme du reste. I1 se rpand dans tout ce qui
J'approche; il est mme dou d'une contagiosit suprieure a
celle des proprits purement humaines, parce qu'il a une
bien plus grande puissance d'action. Seulement, it faut des
vases d'lection pour contenir de telles nergies. Si elles
viennent passer dans un objet que ia mdiocrit de sa
nature no prparait pas un tel rle, elles y exerceront
de vritables ravages. Le contenant, trop (aible, sera dtruit
p. son contenu. C'est pourquoi quiconque du commun a
).,n. t. !'o tre taboue, c'est--dire o habite quoique pareeiie
<t( dignit. se condamne de tui-mme la mort ou des
maux divers que lui infligera tOtou tard le dieu sous l'empire
duquel il est tomb. De ia vient la dfense d'y toucher, d.
fense sanctionne par des peines qui tantt sont censes s'ap-
ptiquerd'ettes-memesau coupable par une sorte de mcanisme
automatique, de raction spontane du dieu. tantt lui sont
appliques par la socit, si elle juge utile d'intervenir pour
devancer et rgutariser le cours uaturel des choses.
On aperoit le rapport qu'il y a entre ces interdictions
et l'exogamie. Celle-ci consiste galement dans la prohibition
d'UH contact ce qu'elle dfend, c'est le rapprochementsexuel
entre hommes et femmes d'un mme ctan. Les deux sexes
doivent mettre s'viter le mme soin que le profane a fuir. le
sacr, et le sacr le protane; et toute infraction t{trg)e
soulve un sentiment d'horreur qui ne diffre pas en nature
de celui qui s'attache toute violation d'un tabou. Comme
quand il s'agit de tabous avrs, la sanction de cette dfense
est une peine qui tantt est due a une intervention formelle
de la socit, mais tantt aussi tombed'ette-mme sur la tte
du coupable, par t'efet naturel des forces en jeu. Ce dernier
fait surtout suffirait dmontrer la nature religieuse des sen-
timents qui sont la base de l'exogamie. Elle doit donc trs
vraisemblablement dpendre de quelque caractre religieux
dont est empreint t'un des sexes, et qui. terendant redoutable
l'autre, (ait te vide entre eux. Noua attans voir que, eiecti-
vement, les femmes sont alors investies par J'opiniond'un
pouvoir isolant en quoique sorte, qui tient distance ta
population masculine, non seulement pour ce qui concerne
les relations sexuettes, mais dans tous les dtails de l'exis-
tence journalire.
C'est surtout quand apparaissent les premiers signes de ia
pubert que se manifeste cette trange innuenco. C'est dans
ces socits une rgle gnrale que, & ce moment, la jeune
fitte doit tre mise dans l'impossibilit de communiquer avec
les autres membres du clan et mme avec les choses qui peu-
vent servir ces derniers. On l'isole aussi hermtiquement
que possible. Ktte ne doit pas toucher le sot que foulent les
autres hommes et les rayons du soleil ne doivent pas parve-
nir jusqu' elle, parce que, par leur intermdiaire, elle pour-
rait entrer en contact avec le reste du monde. Cette pratique
barbare se retrouve dans les continents les plus divers, en
Asie, en Afrique, en Oeeanie, sous des formes peine dine-
rentcs. Citez les ngres du Loaugo, les jeunes filles, la pr.
mire manifestation de la pubert, taient confines dans
des cabanes spares, et il leur tait dfendu de toucher le sol
avec uue partie dcouverte de teur corps. Chex les Zoulous et
les tribus du sud de l'Afrique, si les signes apparaissent
pour la premire fois au moment o la jeune ntte est aux
champs ou dans la fort, elle court la rivire, 'se cache
dans les roseaux de faon n'tre vue par aucun homme,
et se couvre soigneusement la tte avec un voile, afin que
le soleil ne la touche pas. La nuit venue, elle retourne
la maison et oito est enferme dans une cabane pour quelque
temps. A la Nouvette-Ztande, il y a un btiment spcial
rserv pour cet oMce. A t'entre, est suspendue une botte
d'herbes sches; c'est le signe que l'accs d'un lieu est strie.
tement tabou. A trois pieds du sol, se trouve uue ptate-forme
de bambous; c'est l-dessus que vivent ces jeunes filles qui
se trouvent ainsi sans communicationdirecte avec la terre.
Ces prisons sont si troitement closes que la lumire n'y
pntre pas. C'est a peine s'it y arrive un peu d'air respirante.
On retrouve xactement la mme organisation chez les Ot
Uanoms de Borno. Leurs parents ne peuvent mme pas par-
ter ces malheureuses recluses une vieille esclave est pr-
pose Jeur service. Ce confinement dure quelquefois sept,
<ms aussi leur croissance est-elle arrte pnr ce manque pro-
long d'exercice, et leur sant reste cbrantee. Mme usage,
avec des variantes insignifiantes, a la Xouvette-Cuinee,
Ceram, chez les Indieusde l'lie de Yaneouver, chex les Tjinttits.
tes Hadas, les Chippcouais, etc., etc.
Chex les Macusis de la Guyane anglaise, la jeune fille est
hisse dans un ttamac au point le plus eteve de la maison.
Pendant les premiers jours, elle ne peut en descendre que la
nuit etelle observe un jeune rigoureux. Quand les symptmes
commencent disparatre, elle se retire dans un comparti-
ment de ta maison, construit spcialement pour otto dans le
coin le plus obscur. Le matin, elle peut faire cuire sa nourri-
ture, mais sur un feu et avec des instruments qui ne servent
qu' elle. C'est seulement au bout de dix jours qu'elle
recouvre sa libert, et alors toute la vaisselle qu'elle a em-
ploye est brise et les morceaux en sont soigneusement
enterres. L'emploi du hamnc. en pareil cas, est trs frquent
cette suspension entre ciel et terre est en ellet un moyeu
commode d'obtenir un isolement hermtique, it est galement
:jsit< h.
les Indiens du Rio de la Ptata. dans certaines trl-
wottvie,
f'tts'! du Brsil. Otex les premiers, on va mme
jusqu' ensevelir la jeune ntto comme si elle tait morte on
ne lui laisse que la bouche de libre
Cette pratique a cte tellement rpandue et cite est si persis
tante qu'on en trouve des traces trs apparentes dans le t'oth.
lore d'uu trs grand nombre de socits. Fraxer* a a recueilli
plusieurs lgendes populaires de lu Sibrie, de la Grce, du
Tyrol, qui toutes s'inspirent de la mme ide. Oa y prte au
soleil un got particulier pour de jeunes mortettes que leurs
parents tiennent reufermes pour les soustraire ses atteintes.
L'antique histoire de Danac n'est peut-tre que l'un do ces
ressouvenirs. On s'explique en eftet qu'au bout d'un certain
temps on ait donn ce sens aux prcautions traditionnelles
qui taient prises pour isoler les jeunes NUes des rayons
solaires.~
Mais ce n'est pas seulement au moment de la pubert que

)Y. [Mtur ).' th'hti) <h's foits. Fmxt'r. ~MfM No~/t. tt. ).. MM38:
Kohtfr.M' ~ec/t/e < f~ot-Mw A'<Mf/ ~tNprMfM ht M~c/f. y. Mt-~Mc/f.
HMA<ttet.M<.i)t-/t/'<,XH, <))!)?; Muss. t U'f.ttM t~Vo<f- M</ )-'e<<'
AMK~. t. ni3.t6<).
<2) Pmxcf. Op. c)< tt. !?.
13) ?/ tt. 236.
les femmes exercent cette espce d'action rpulsive qui rejette
loin d'elles l'autre sexe. Le mme phnomne se reproduit,
quoique avec une moindre intensit, u chaque retour mensuel
des mmes manifestations. Partout, te commerce sexuel est
alors svrement interdit. Citez les Maoris, si un homme
touche une femme dans cette situation, it devient tabou, et le
tabou est encore renforc s'ii a eu des rapports avec elle ou
s'il a mang des aliments cuits par elle. Un Australien, trou-
vant que sa femme, en priode de menstrues, a couch sur sa
couverture, la tue et meurt tui.memo de terreur femme La
est oblige do vivre part. Elle ne peut partager le repas de
personne et personne ne peut manger des aliments qu'elle a
touches'. Les hommes ne doivent mme pus mettre le pied
sur tes traces que les femmes ont pu laisser sur le chemin, et,
inversement, ettes doivent fuir les endroits frquentes par les
hommes. Pour prvenir un contact accidentel, elles doivent
porter ua signe visible qui avertisse de leur tat". Pour
atteindre plus srement ce rsultat, elles sont contraintesa
une rclusion do plusieurs jours. Parfois, elles sont tenues
d'habiter en dehors du village, dans des cabanes spares,
au risque d'tre surprises par tes ennemis i.
D'aprs le Zend-
avesta, elles doivent se tenir dans un lieu spar et foin de
tout ce qui est eau et feu. afin que la vertu redoute qui est
en elles ne se communique rien de ce qui sert t'atitnenta-
tion. Chez tes THnkits, pour s'isoler du soleil, elles sont obli-
ges de se noircir la figure". L'usage s'est maintenu dans la
lgislation mosaque. Pendant sept jours, ]a Juive ne devait
avoir de contact avec personne, et aucun des objets qu'elle
avait touchs no pouvait tre touch par d'autres Quant aux
rapports sexuels, ils taient svrement interdits; la peine
tait celle du retranchement*. De l tant de prjugs qui
rgnent encore dans nos campagnes sur la dangereuse
influence que la femme exerce alors autour d'elle.

Crawtey.<)tM< f&etM, in J- )8' p.


~) Ct'ttwtcy. p. tt.
t3) )')<jfi!. Op. <-< t. (<. t70.
(t) LM titits M'nt innumbmbte~. Y. )')<)!?. toc. <-<<.

(5) Pluss. Op. Cf~ l. Ht.


(6) KohhT. Me ftecA/f d. r<-M,cM'. </<? \Mt~-Mw, )<. )?.
t?) Mvititju' xv, t9 et suiv.
(<) Lvitique, <)t, 18.
Les pratiques sont les mmes au moment de l'accouche-
ment. C))M les Esquimaux, la femme en couches doit rester
entormedaus lu maison, quelquefois pendant deux mois. A
sa premire sortie, elle doit mettre des vtements qu'elle n*a
jamais portes. Ct<ex les Urontandais, elle no doit pas manger
a l'air libre et nul ne doit se servir de ta vaisselle qu'etto a
employe. Chez tes Chippeouais. le foyer sur lequel elle fait
cuire ses aliments no doit tre ulilis par personne. Des jeunes
gens, ayant par mgardo mang d'un piat qui avait t pr-
par sur le feu d'une accouche, erraient il travers champs
en se tameutant des douteurs qu'ils ressentaient dj. Dans
un grand nombre de tribus, ta femme est exile dans des
cabanes loignes o une ou deux femmes vont ta servir
Chez les Damaras, t'homme ne peut mme pas voir sa femme
en couches~. D'aprs le Lvitique, ta squestrationdela more
durait cluarauto ou quatre-vingtsjours, selon te sexe do l'en-
tant. Pendant les premiers sept jours, la rclusion tuit aussi
complte qu'en temps de menstrues -l.
Un sentiment d'horreur religieuse qui peut atteindre un tel
degr d'intensit, que tant de circonstances rveillent, qui
reuait rguHet'ement chaque mois pendant une semaine au
moins, ne pouvait pas manquer d'tendre son influence au
del des priodes o il avait primitivement pris naissance et
d'aflecter tout te cours de ta vie. Un tre qu'on loigne ou dont
on s'loigne pondant des semaines, des mois ou des annes,
selon les cas, garde quelque chose du caractre qui l'isole,
mme en dehors de ces poques spciales. Et en effet, dans
ces socits, la sparation des sexes n'est pas seulement inter-
mittente, elle est devenue chronique. Chaque partie de la
population vit part de l'autre.
C'est tout d'abord un usage trs rpandu que les hommes
et les femmes ue doivent pas manger la mme table, ut
mme en prsence l'un de l'autre. Chaque sexe prend ses
repas dans un endroit spcial. Le fait, pour une femme, de
pntrer dans ta partie de ta maison qui est rserve au repas
des hommes, est parfois puni de mort La
nourriture des
uns n'est mme pas celle des autres. Chez les Kuraai, par

V. dus f<tit< tn'ii nutubfcux dans )'toss, Op. c<< If, t56 et suiv.
(: Crawtt'y, p. Mt.
t~ L);vitit)tM', XM, 1 et suiv.
(~ Cmwtey, M8.
exemple, les garons doivent ne manger que des animaux
mtes, les filles que des (mettes'. Les occupations sont
rigoureusement distinctes; tout ce qui est fonction de lu
femme est interdit l'homme, et rciproquement.Ainsi, dans
certaines tribus du Nicaragua, tout ce qui concerne le marche
est affaire de femmes; uus~i un homme ne peut-il pntrer
dans un mareh6 sans risquer d'tre battu'. Inversement, la
femme ne peut toucher uux vaches, aux canots, etc. H y a
galement deux vies religieuses, parattetesen quelque sorte.
Citez tes Ateoutiens, il y a une danse nocturne clbre p!)r tes
femmes, d'o les hommes sont exclus, et rciproquement.Aux
lies ttervey, les sexes ne se meteut jamais dans tes danses'.
Ce qui dmontre mieux encore cette dualit de ta vie reli-
gieuse, c'est cette duatite des totems dont ))ous avons eu dj
l'occasion de mentionner l'existence. Car le totem, en mme
temps qu'il est t'ancetre, est aussi le dieu protecteur du
groupe. C'est le centre du cutte primitif; dire que chaque
sexe a son totem spcial, c'est donc dire que chacun a son
culte. A d'autres gards encore, ce mme fait dmontre com-
bien est alors profonde la sparation des deux sexes. On sait
on ettot que le clan s'identifie avec son totem; chaque indi-
vidu se croit fait de la mme substance que t'tre totmique
qu'il vnre. L donc o il existe des totems sexuels, les sexes
se considrent comme faits de deux substances difft'entes et
comme issus de deux origines distinctes. C'est mme une tra-
dition assez gneraio que les deux totems en prsence sont
rivaux et mme ennemis. Cette hostilit ne symbotise-t-ctte
pas l'espce d'antagonisme qui existe entre les deux parties
de ta population ??
Ce n'est pas seulement dans les occasions solennelles
qu'hommes et femmes sont tenus de s'viter; il arrive que,

(i) CMwh-y. <~t t-t Mt.t32.


<) MM.. 2~7.
(3)7tM..S26.
(t) A\'fe h' ton))! il )n<;su)'<' que h vie tt'))K"s)' ttt'vint ch')M' c~~ftttic)-
)em<'n) n)M'M)in< cette <hm))M abnutit & <'< n~ottat <;Mt' la fcHttttt! se
tt~uvtt <<) grande partie cxctup <)e la )t'ti)!)"t<. Mt' <'ctt)' cxctusion n'tt
pas d t~tn' le fait t)t'i)))itif. putsqm' nous Vt'yun:! que pritottivetucot tu
h'ttttU)' m une vie n')tH"'use c))p. Si )'n n'))mr<)M~' qu'' <'<< <-u)h'. pour s<-
dMrobft' aux regardsdes hutnttK' s'fnt-ctupjmit t)atnt'<')h't)h'utdu tuyitKirp,
on en vient il < (k'mmndpr si co ne serait p<H! )')it(i'"i 't'*)! tuyres
Matinitts, fmottM' ott en ohiM'n't' dans un grand numtx'c de j'ay! Nous
nous contcntuns de pM"fr lu question.
mme dans les circonstances les plus ordinaires de la vie
journalire, le moindre contact est svrement prohib. Chez
les Samoydes, tes Ostiaks, tes hommes doivent s'abstenir de
toucher ti un objet quelconque dont une femme s'est servie
quiconque a enfreint cette dfense par mgarde doit se puri.
fier par une fumigation. Aiiieurs, je seul fait d'entrer dans
une hutte de femme entrane la dgradation la tribu
Wiraijuri. il est dfendu aux garons de jouer avec les flUes
A
Citez les Indiens de la Californie, en Mtansie, ia Nouvelle-
Caldonie. en Core, etc., frres et surs, partir de la
pubert, ne doivent plus causer ensemble. A Tonga, un chef
tmoigne sa sur atne te ptus grand respect et no pntre
jamais dans sa tente. A Ceylan, citez les Todas, un pre ne
doit mme ptus voir sa fille ds qu'ciie est pubre. Chez les
Lethas de Burma, garons et filles, quand ils se rencontrent,
dtournent leurs regards pour ne pas se voir. Dans tes ites
Tenimber, il est dfendu a un jeune homme de toucher la
main ou la tte d'une jeune fille, et celle-ci do toucher la
chevelure du premire
Ces deux existences sont tellement distinctes que chaque
sexe finit dans certains cas par se faire une langue spciale.
Chez les Cuaycurus, les femmes ont des mots et des tours de
phrase qui leur appartiennent en propre et qui ne peuvent
pas tre employs par les hommes. De mme Surinam. En
Micronsie, beaucoup de mots sont tabou pour les hommes
quand ils conversent avec des femmes. Au Japon, il y a deux
sortes d'alphabet, un pour chaque sexe Les Carabes ont
deux vocabulairesdistincts Ou signale des faits semblables
Madagascar.
Comme consquence et en quelque sorte comme cons-
cration de toutes ces pratiques, il arrive, dans un trs grand
nombre de tribus, que chaque sexe a son habitat spcial.
Aux tics Mortlock, par exemple, il y a dans chaque clan une
grande maison o le chef passe la nuit avec tous les habitants
mates. Cette maison est entoure de petites huttes o. vivent

(t) Cntwtt'y, tu.


(~ /tM., t2t.
(3) /&M.. ~ti.
(t) /M< ~M.
(St Y. Lucien Athuo. /7 p~t'/c;- (~ A<w)MtM </M ~a~' f/M ~MM~
<~a'M <<! /<tM~e <'a't)!tf. t'ari)!, ))!'?.
les femmes et les jeunes filles du clan. Les premires y
habitentavec tours maris; ntMc<'M~<'tM<f(<<')(Me~Ht'<<'(tn~<
Les deux sexes d'un mme ctan sout donc strictement sparas.
La mme organisation se retrouve aux ttes Yiti. aux Mes
l'ataos', aux tics de l'Amiraut, chez certains Indiens de la
Californie, aux lies Satomon, aux tics Marquises, etc. Dans
ces dernires, toute femme qui pntre dans le local rserv
oux hommes est punie de mort*.

A la lumire de ces faits, h) question de t'exogamie change


d'aspect. H est vident en effet que tesjjniBfdiciions-SBXuatles
ne dinreut pas ou natnre.des-interdictions rituelles que
nous venons~ie rapporter, et doivent s'expliquer de la mme
manire. Les premires ne sont qu'une varit des secondes.
La cause qui empche hommes et femmes d'un mme clan
de contracter des relations conjugales est aussi celle qui tes
oblige rduire au minimum possible leurs relations de
toutes sortes. Par consquent, nous ne la trouveronspas dans
telle ou telle proprit des rapports matrimoniaux; seule,
quelque vertu occulte, attribue l'organisme fminin en
gnrt, peut avoir dtermin cette mise en quarantaine rci-
proque.
Un premier fait est certain c'est que tout ce systme de
prohibitions doit tenir etroitement'aTfx ides que le primitif
se fait de la menstruation et du sang menstruel. Car tous ces
tabous commencent seulement l'poque de la pubert; et
c'est lorsque les premires manifestations sanglantes appa-
raissent qu'ils atteignent leur maximum de rigueur. Nous
savons mmo que, dans certaines tribus, ils sont levs aprs
la mnopause Le renforcement qu'ils subissent lors de l'ac-
couchement n'a rien qui contredise cette proposition car la
dlivrance, elle aussi, ne va pas sans une mission sanglante.
Les textes mmes du LWtique qui se rapportent cette
matire indiquent que c'est dans la nature de ce liquide que

(t) HcUwtt).). ~MtM/<<tcAefatM)<,)'. ~)8.2tt.


~) Y. CmwK'y.
(:t) CMwtt'y. M).
se trouve ta raison de l'isolement prescrit'. De mmo, nous
savons que, dons un certain nombre de cas. ce sang est l'objet
de tabous particutierementgraves. Les hommes qui le voient
perdent tours forces ou deviennent incapables de combattre'.
Commenta-t-on pu lui attribuer un pareil pouvoir?`!
Nous ne nous arrterons pas a discuter l'hypothsed'aprs
laquelle il inspirerait un tel eioignemont cause de son
impuret. Sans doute, au bout d'un certain temps, une (ois
que le sens origine) de ces pratiques fut perdu. c'est ainsi
qu'un se les expliqua mais ce n'est certainement pas sous
t'innuence de simples proccupations hyginiques qu'elles se
constiturent. Outre que, par elles-mmes, les proprits
mnterioites de ce sang n'ont rien d'exceptionnellementdan-
gereux, les ngres de l'Australie ou de )'Amerique ne sont
pasteitementdeticats qu'un pareil contact puisse teurpara!tre
aussi into)<irab!e,.a)Ante quand il est trs indirect. Ce n'est
pas parce que ce sang leur rpugne qu'ils refusent de poser le
pied ta o uue femme a mis le sien, de manger en sa prsence
ou do vivre sous le mme toit. Surtout, une telle cause ue sau-
rait rendre compte des peines sevcres qu'encourent souvent
les violateurs de ces interdictions. On ne condamne pas
mort un individu parce qu'il s'est expos il une maladie pat'
un contact malpropre.
Mais ce qui doit faire dennitivement carter cotte explica-
tiou, c'est que toute espce de sang est l'objet de sentiments
analogues. Tout sang est redout et toute sorte da.tahou&soat
institues pouFen'prevcnir le contact. Certains Esthoniens se
refusent toucher du sang et ils en donnent comme raison
qu'i) contient un principe surnaturel, t'amo du vivant, qui
pntrerait en eux s'iis s'en approchaient et qui pourrait y
causer toute sorte de dsordres. Pour le mme motif, quand
une goutte de sang tombe sur la terre, cette force mystrieuse
qui est en lui se communique au sol contamine et en fait un
endroit tabou, c'est--dire inabordable. Aussi, toutes les fois
que l'Australien verse du sang humain, toute sorte de prcau-
tions sont prises pour qu'il ne s'coule pas par terre Alors
que cet usage a disparu pour ce qui concerne le commun des
(t) Si lu f'.ttttoe <'nfuot'' un ))tA)f, '')t<* !nt !<"ui))M' t'ottttnt' uu tOMpi
<)e Mii moi! et t't)'* tk't<n'ur''nt ))'*n<)ant tn'ntc-tn)i< juMM pMtt' '~tt' pufiMe
<)e KM Mnt!. tL'h' X)), <'t t.)
? Fmzff. ~oMM Bet~/f, tt, 338. Ctttwicy,t2t, 2t8. Cf.f. ~M< tV, StS.
(S) fJeMeM Be<~<, ), f. tM.
hommes, it se maintient encore quand il s'agit d'un roi ou
d'un chef. C'est uu principe que le sang royat ne doit pas tre
rpandu sur le sot 1. Certains peuples usent des mmes pr-
cautions quand ii s'agit de simples animaux. La bte est
otoufo ou assomme afin que le sang ne s'coule pus.
Mais ce qui est surtout dfendu, c'est d'employer te sang
comme atiment. Prcisment parce (lue dans ce cas le contact
est plus intime, il est aussi plus svrement prohibe. Chez-
certains Peaux-Houges de l'Amriquedu Nord, c'est une abomi
nation que de manger le sang des animaux: on passe le gibier
a la itammo pour que le sang eu soit dtruit. Aittours, on le
recueittodans ta peau mme de ta bte que t'enenseveliteusuite.
Chez les Juifs, )a mme interdiction est sanctionne par la
peine terrible du retranchement, et te texte en donne comme
raison que le sang contient le principe vital La mme
croyance existait chex les Homains chez les Arabes etc.
Il est probable que ta dfense de boire du vin, que l'on
observe dans un certain nombre do socits, a pour origine la
ressemblance extrieure du vin et du sang. Le vin est regard
comme le sang du raisin. Trs souvent, dans les sacrifices, le
vin parait tre employ comme un substitut du sang. Aussi
tait-il dfendu au Ftamen Diatis de passer sous une vigne,
parce que ta proximit du principe qui tait cens y rsider
pouvait constituer un danger pour une aussi prcieuse exis-
tence. Pour la mme raison, il lui tait interdit de toucher et
mme do nommer de h) viande crue'. 1.
Enfin, toutes les fuis que le sang d'un membre du clan est
vers, il en rsulte un vritable danger public car uue force
redoutable est ainsi libre qui menace le voisinage. C'est
pourquoi divers procds sout employs pour )a contenir ou
la dsarmer. Ces expressionssi souvent employes < Le sang
appelle le sang. Le sang de ta victime crie vengeance.
doivent tre prises dans leur sens tittra). Parce que le prin-
cipe qui est dans chaque goutte de sang rpandu tend de lui-
mme produire dans l'entourage immdiat des effets des-

th Mf/M Bot~A. j). )?!' '-) snh'.


f~) t~viti')a< xv)). te.) t. ))<'ut<'runu)t't). :M,:Ki.
(:)) Sftvin! 7f '-t t. C7.
~t'M.. V.
(t) V. WcMtxHUt't). Mrn~ </m .t~t~cAfM HfMcn/KW'M.~)7.
(5) rtuttn~a". CtMM<. M.. ))~; Auht.t!t-)). X. tH '-t t!). t/ttypotM~'
est de Friiter; y. CoMeo NeM~/t. ), p. t8t et suh'.
tructifs, le seul moyen de tes viter est d'aller chercher au
dehors une victime expiatoire qui les supporte. En d<'timtive,
veuger le sang, c'est anticiper les violences que le sang
engendrerait de iui-mme si un le laissait taire, et it est
ncessaire do tes anticiper pour pouvoir les diriger avec dis-
cernement et les canaliser.
On commence entrevoir les origines de t'exogumie.J~-
saugest tabou d'une manire gencruh) et il taboue tout ce qui
entre en rapports avec lui. 11 repousse le contact et lait te
vide, dans un rayon ptus ou moins tendu, autour des points
o il apparat. Or ta femme est, d'une manire chronique, le
thtre de manifestations sanglantes. Les sentiments que le
sang veille se reportent donc sur elle; nous savons en ellet
avec quelle facilite extraordinaire la nature du tabou se
propage. La femme est donc, elle aussi, et d'une Manire
galement chronique, tabou pour les autres membres du
clan. Une inquitude plus ou moins consciente, une cer-
taine crainte religieuse ne peut pas n'tre pas prsente a
toutes les relations que ses compagnons peuvent avoir avec
elle, et c'est pourquoi elles sont rduites au minimum, Mais
celles qui ont un caractre sexuel sont encore plus fortement
exclues que les autres. D'abord, parce qu'elles sont plus
intimes, elles sont aussi plus incompatibles avec l'espce de
rpulsion que les deux sexes ont t'uu pour l'autre la barrire
qui les spare ne leur permet pas de s'unir aussi troitement.
Puis, l'organe qu'elles intressent immdiatement se trouve
justement tre le foyer de ces manifestations redoutes. tt est
donc naturel que les sentiments d utoignement que la femme
inspire atteignent sur ce point particulier leur pins grande
intensit. Voita pourquoi, de toutes les parties de l'organisme
fminin. eette-t est le plus svrement soustraite tout
commerce De l viennent l'exogamie e). les peines graves
qui la sanctionnent. Quiconque viole cette toi se trouve dans
le mme tat que le meurtrier. !t est entr en contact avec le
sang et les vertus redoutables du sang sont passes sur lui
il est devenu un danger et pour tui-meme et pour les antres.
Il a viole un tabou.
<t ) K<*<)')tit-t'fp!isH icx MixinM <t<* ) pudeur M')tt))vc aux parUM MtmcUe~
On & <) ft'!i voitct' trfs ftnp~hfr
Mt ))uur k's t'tHay's <hm)!WM f~t s'en
<)<'gttj.tt')tt d'att''indn' rcutom-a~f. Lf toitt- f.<t :!f)u\t'nt un Myo)) d'tntM'-
ceptMr une Mtiun tuHK")' L'u'' foi'. ) pmti'jUH nMtstttucc. cOc xe ocmit
maintenue on s'' tKtnstorntant. Nous lie MM)t)<- <)'xiUfHM <ju't')nc(tM t'hy-
j,f)UK'H'. qui t~i.tc & v~ritit')'.
moques attribues au sang expliquent
Mais si les vertus
l'exogamie, d'o viennent-elles ettes mmes? Qu'est-ce qui a
pu dterminer tes socitt''s primitives prter au liquide san-
guin de si tranges proprits' La rponse cette question

se trouve dans le principe mme sur lequel repose tout le
systme religieux dont l'exogamie dpend, a savoir le tot-
misme.
Le totem, avons-nous dit, est l'anctre du ctan et cet
anctre n'est pas une espce animate ou vgtale, mais tel
individu en particulier. tel loup, tel corbeau dtermin'. Pat-
consquent, tous tes membres du chu), tant drives de cet
tre unique, sont faits de la mme substance que lui. Cette
identit substantielle est mme entendue dans un sons beau-
coup plus littral que nous ne pourrions imaginer. En enet,
pour le sauvage, les fragments qui peuvent se dtacher d'un
organisme ne laissent pas d'en faire partie, maigre cette spa-
ration matrietto. Grce et une action u distance dont la ralit
n'est pas mise en doute, un membrecoup continue, croit-on,
a vivre de la vie du corps auquel il appartenait. Tout ce qui
atteint l'un retentit dans l'autre. C'est que ln substance vi-
vante, tout en se divisatit, garde sonunU. Elle est tout entire
en chacune do ses parties, puisqu'n agissant sur la partie on
produit tes mmes enets que si l'on avait agi sur le tout. Toutes
les forces vitales d'un homme se retrouvent dans chaque par-
celle de son corps, puisque t'enchi'ntcur qui en tient une (les
cheveux, par exemple, ou les ongles) et qui ta dtruit peut,
pense-t-on, dterminer la mort c'est le principe de la magie
sympathique. H en est de mme de chaque individu par rap-
port t'tre totmique. Celui-ci n'a pu donner naissance sa
postrit qu'en se fragmentant, mais il est tout entier dans
chacun de ses fragmenta et il reste identique dans toutes ses
divisions et subdivisions t'innni. C'est donc ta lettre que
les membresdu clan se considrent comme formant une seule
chair, une seu)e viande un seul sang', et cette chair est
celle de t'tre mythique d'o ils sont tous descendus. Ces con-

ft) Il faut c'n cfft't M' t<!U'')''t' <)<onf"n'h'<' reipf'L'f tminmtt- nu \'cgu(<t)'
)ttaquctte est ccuiiv <ip))'t)-tctUt' i'Mr<' t<tui')Mv. et cft <tr)' )ai-)tt(-)n< C"
demK't', c'e~t t'Mct'tre. t'tfrc tuythi'ju' t)'")'t !!f)t)t sorf~ H );; fois et les
tnftxhres <)u elnn ('t/tc~ )U)it)'Mt mu )t'~ phoUM '))' t'Mpf't'c tott')nii)t!<
C't.'titdoncun in'tivittu. mais~ui cottticnt uH lui, en pui~sanc' fcHf ciiptee.
et M) outt'e tout to lan.
(i) SidtM'y Hat-Uan't. Me tf~H~ of FeMOM. tt, ft). xx et xm. Cf.
Smith, ~t'MAtpaK<M<!n'MjirCM Jt'W~atx!, p. tUt.
ceptions, si tranges qu'elles nous paraissent, ne sont pas
d'ailleurs sans fondement objectif; car elles ne font qu'ex-
primer, sous une tonne materieUo, t'unit collective qui est
n'existe
propre au c!nn. Masse homo~ne et compacte o il
vit
pas, pour ainsi dire, de parties dittrenciees, o chacun
commf tous, ressemble tous, un tel groupe se reprsente il
lui-mme cette tuibte individuatiop. dont !t a contusment
conscience, en imaginant que ses membres sont des incarna-
tions peine ditMrentes d'un seul et mme principe, des
aspects divers d'une mme ralit, une mme me en plusieurs
corps.
Une pratique, eu particulier, dmontre avec vidence 4'hn-
portnnce qui est alors attribue a cette cansubstantiaht. et,
com-
en mme temps, eHe.va nous {aire voir ce qu'est cette
mune substance. L'unie physiologique du clan est, nous
l'avons dit, loin d'tre absolue c'est une socit o t'pn peut
entrer autrement que par droit de naissance. Or, la formante
te clan
par laquelle un tranger est adopt et naturalis dans
consiste introduire dans ies veines du nophyte quelques
gouttes du sang (atni'.iai c'est ce qu'on appette, depuis les
san~ante'. l,
travaux de Smith, to~oo~ffWtHf, t'atHaneo
C'est donc que !'on ne peut appartenir auc)an
si~'on n'est fait
d'une cet-taiue matire, la mme pour tous d'un autre ct,
puisque la communaut du sans sunit fonder cette identit
de nature, c'est donc que le sang contient minemment te prin-
cipe commun qui est fume du groupe et de chacun de ses
membres. Rien d'uitkars n'est plus logique que cette con-
ception. Car les {onctions capitales que le sang remplit dans
Forganisme le designaien.t pour un tel rle. La vie finit quand
il s'coule; c'est donc qu'il en est le vhicule. Comme dit la
Bible, le sang, c'est la vie, c'est t'ame de la chair
Par
suite, c'est aussi par son intermdiaire quta vie de l'anctre
s'est propage et disperse it travers ses descondarntsy.
AinsiJ~M4et<H~ue..(iSt.imnMuentjtttc;an; il est incarn
d.nR <.hnq.M ~djivtdujBtc'est dans le sanx qu'it rside. H est
lui-mme le sang. Mais, en'mme temps qu'un anctre ~est
un dieu protecteur n du groupe. il est l'objet
d'un vritable
culte il est le centre de la religion propre au clan. C'est de
lui que dpendent les destines tant des particuliersque de la

0) Y. rAfM'9'ox of</S<'Mt<-<.p. ~0 et suiv.


tit L<?vi<ttju' xvu. it.
cottectivitc'. Par consquent, il y a un dieu dans chaque
organisme individuel (car H est tout entier dans chacun;, et
c'est dans le sang que ce dieu rside; d'o it suit que le sang
est chose divine. Quand il s'coute, c'est te dieu qui se rpand.
D'un autre etS, noussavons que le tabou est la marque mise
suc tout ce qui est divin it est donc naturel que le sang et ce
qui !e concernesoient galement tabous, c'est--direretirs du
commercevulgaire et de ta circulation. C'est un principe dans
toutes les socits totmiques que nul ne doit manger d'un
animal ou d'une plante qui appartient tu mme espce que
le totem on ne doit pas mme y fouetter parfois il est
dfendu d'en prononcer te nom'. Puisque te sang soutient
avec t<' totem des relations tout aussi troites, it n'est pas
surprenant qu'il soit l'objet des mmes prohibitions. Voil
pourquoi il est dfendu d'en manger, d'y toucher, pourquoi
le sol ensanglant devient tabou. Le respect religieux qu'il
inspire proscrit toute ide de contact, et, puisque ta femme
passe pour ainsi dire une partie de sa vie dans le sang, ce
mmo sentiment remonte jusqu' elle, la marque de son
empreinte et t'isole.
Une raison accessoirea. probablement contribue renforcer
encore ce caractre religieuxde la femme et l'isolementqui en
rsultait. Dans les clans primitifs, ta Mtiation tait exclusive-
ment utrine. C'est le totem de ta mre que recevaient les
enfants. C'est donc par les femmes et par elles seules que se
propageait ce sang dout ta commune possession faisait l'unit
du groupe. A cet gard, ta situation de l'homme tait pou
prs cette que le droit romain fit plus tard ia femme le clan
dont it faisait partie s'arrtait lui il tait /!M<x M~OMM)!
/<!?<<<?<!?. Donc, puisque ie sexe fminin servait seul per-
ptuer le totem, le sang de ta femme devait sembler plus
troitement en rapport avec la substance divine que celui de
l'homme par consquent, il est vraisemblable qu'il acquit
aussi une valeur religieuse ptus haute, qui se communiqua
naturellement la femme elle-mme et la mit compltement
part.
On peut maintenant s'expliquerd'o vient que les interdic-
tions sexuelless'appliquent exclusivementaux membres d'un

() Voit- sur le <'o)te tntOttfquf t'- fivrc <)<! Fraia't-. yo~m~m. tM)i<u'
hou));, ttMtf.
ro<<'MM<M, H et t7.
mme clan. Le totem, en cttet, n'est sacr que pour ses fidles;
ceux-ta seuls sout tenus de le respecter qui croient en des-
cendre et portent ses insignes. Mais un totem tranger n'a
rien do divin. Un homme qui appartient au clan du Livre
doit s'abstenir de manger de lu viande de livre et se tenir &
distance de tout ce qui rappelle mme la forme extrieure de
cet animt mais il u'a aucune obligation vis--vis des ani-
maux qui sont adors par tes ctans voisins. Il ne reconnat
pas leur divinit, parceia seul qu'il n'y voit pasdesanctres.
U n'a rien en craindre, de mme qu'ii n'a rien en attendre.
JI est hors (te leur sphre d'action. Si donc l'exogamie lient,
comme uous avons essay de le prouver, aux croyances qui
sont la hase du totmisme, il est naturel qu'elle aussi se soit
renferme dans l'intrieur du clan.
Sans doute, avec le temps, surtout quand les raisons pre-
mires de ces prohibitions cesseront d'tre senties par les
consciences, le sentitn"nt qu inspiraient spcialement les
femmes du ctau se gnralisa en partie et s'tendit, dans une
certaine mesure, jusqu'aux trangres. Les manifestations
menstruelles des unes et des autres sont trop sensiblement
les mmes pour que les unes apparaissent comme indiffrentes
et inoneusives quand les autres sont ce point redoutes.
C'est pourquoi plusieurs des interdictions qui concernent tes
premires se communiqurent aux secondes, et la femme
en gnerai, quel que fut son ctan, devint .l'objet do certains
tabous. Cette extension se produisit d'autant plus facilement
que ces consciences rudimentaires sont un terrain de prdi-
lection pour tous les phnomnes de transfert psychique les
tats motionnels passent instantanment d'un objet un
autre, pourvu qu'il y ait entre le premier et le second' le
moindre rapport de ressemblance ou mme de voisinage.
Mais, prcisment parce que cette assimilation tait due un
simple rayonnement secondaire des croyances qui taient
la racine de l'exogamie, elle ne fut que partielle. La spara-
tion des sexes ne fut complte qu'entre hommes et femmes du
mme ctau notamment, ce tut seulement dans ce cas qu'elle
atta jusqu' l'interdiction de tout commerce sexuel.
On objectera peut-tre que gnralement te sang menstruel
passe pour tre plutt en rapports avec des puissances mal-
faisantes qu'avec des divinits protectrices; que le primitif,
en s'cartant de la femme, se donne tui-meme comme raison
qu'elle est un foyer d'impuret, loin qu'il en fasse un tre
sacre. Mais il faut se garder de prendre In
lettre les explica-
tions populttires que les hommes imaginent pour se rendre
compte des usages qu'ils suivent, mais dont tes causes reoDes
leur chappent. On suit comment ces titeories sont construites
on leur demande, non d'tre adquates et objectives, muis de
justifier ia pratique. Or des raisons trs contraires peuvent ga-
lemeut donner un sens ri un mme systme do mouvements.
Quand le primitit, pour pouvoir comprendre le culte qu'il
voue son totem, en foit l'anctre do son clan, nul Ho songe
a admettre la ralit de cette gnalogie. U n'est pas plus digne
de crdit quand il dote la femme de tello ou telle vertu pour
s'expliquer l'isolement o il ta tient. En l'espce, il avait le
choix entre deux interprtations Il fallait voir dans la femme
ou une magicienne dangereuse ou une prtresse ne. La situa-
tion infrieure qu'elle occupait dans )a vie publique ne per-
mettait gure qu'on s'arrtt u la seconde hypothse; la pre-
mire s'imposa donc Encore y a
il nombre de peuples qui,
quand on leur demande quelles sont les origines de ces pro-
hibitions, se contentent de rpondre qu'ils n'en savent rien,
mais que c'est une tradition respecte de tout temps. Du reste,
tout ce qui se rattache it la religion totemique subit, par t'eCet
du temps, une dchance analogue. Quand on no sut plus
pourquoi il tait dfendu de manger de la viande de tel ou
tel animal, on imagina qu'il devait tre impur. C'est ainsi
que des tres dont on fuyait le contact par respect religieux
finirent par apparatrecomme immondes, et les rites existants
s'accommodrenttout aussi bien de la seconde conceptionque
de la premire.
Si donc nous voulons savoir quelle est la cause vritable
des interdictions dont le sang menstruel est l'objet, il nous
faut les observer en elles-mmes, abstraction faite de toutes
les thories forges aprs coup pour en rendre la survivance
intelligible. Or, ainsi considres, bien loin qu'elles dnotent
je ne sais quel dgotit et quelle rpulsion, elles apparaissent
comme absolument indiscernables d'autres pratiques qui
pourtant concernent des tres manifestement privilgis et
<t) Cmwtfy. i~ms. ~tf' ff qui ))f''c'dt'. i) est inoti)'* 'h' di~'oter ['<-)[.

Ii )'h')))t)<)t'.
& La
1'11011111110,Lm(Mti)tt'! 414! la
clilloititif <)<' f"/IIIII< )'n
ht f''t)))M)\ ng~
~Hctti'tn ))n))n))ieu p)t)' Untw)'') )Mi-tt'<')M< <)a)Ht's lui, <'M pr<)hit)i(i"M
tmntx'ttt pour "))j)'t <)'f't)t[M~'))''r la f.t)h)('S!M' f't))it)in<* ttc eu rotntouttiquct'
t?ll M.'
tttinp)' h tttort M ta utMi'' cmnme h) fait tout ntunquKtnent & ces prohi'
bitioo):. Co n'Mt pus 0) tant (ju'ftt-M d~bih' t)m' ht f<;u))' e<t tabou, nxtis
IIltllrulllll,r-
III! tnt)MtMftt)mt,n" MOftiit d<!t<*r-

rn tant qu'elle t~t tt source (fane action m<t({i<jm.


vraiment divins. Cette mme rgle qui dfend la jeune fille,
parvenue & la pubert, de toucher le sol ou de se laisser tou-
cher par les rayons solaires, s'applique identiquement des
rois, (tes prtres vnrs. Le Mikado, au Japon, ue doit pas
fouler le sol avec ses pieds; autrement, il encourrait h) dgra.
dation, tt ne doit pas davantage laisser les rayons solaires
arriver jusqu' lui, ni exposer sa tte l'air fibre. L'itritier
du troue de ttogota, en Cototnhie,doit, partir de seize ans,
vivre dans une chambre obscure o le soleil ne pntre pas.
Le prince qui tait destin devenir un tnca, au Prou, tait
tenu de jener pendant un mois sans voir ta lumire. Comme
le Mikado, le souverain pontife des Xapotecs, Mexico, ne
pouvait entrer en contact ni avec ln terre ni avec la tnmicre
solaire. l,a premire dfense s'applique lment au roi et
la reine de Tahiti, et jadis elle s'appliquaitau roi de Perse
De mme dans toute ta t'utynesie, les chefs et les nobles
doivent, tout comme la femme a l'poque des menstrues,
prendre leurs repas part, ne se nourrir que d'alimeuts cuits
sur un leu spdai. etc. Or, ces tabous n'ont videmment pas
pour cause la rpulsion que peut inspirer quelque odieuse
impuret on n'est donc pas fond attribuer & une telle
origine les tabous similaires dont la femme est l'objet.
D'ailleurs, le sang menstruel tait trs souvent employ
comme une utile mdication. On s'en servait contre toute
espce de maladies,maladiesde peau, furoncles,gte. gourme,
fivre de tait. inHammation des ~tandes sativaires.etc. mais
c'est surtout contre la tpre qu'il passait pour tre efficace.
Strack a bien montr que cette pratique avait t aussi gn-
rale que persistante. On ta retrouve en Arabie aussi bien
qu'en Germanie ou en Italie, et elle tait encore trs en vogue
pendant te moyeu age~. On employait galement le sang qui
s'coule au moment de la dlivrance et l'on cherchait de pr-
frence celui d'une primipare. De mme aussi le premier
sang qui apparaissait h la pubert passait pour avoir des ver-
tus curatives tout fait exceptionnelles, en mme temps qu'il
donnait lieu, comme nous t'avons vu, des tabous parti-
culirement svres. C'est donc que, mme sans s'en rendre

f))RaMt'MN"</S/<t).Rt-
(~t'ht~Mtt'Wt.).)~.
~:t) Strm-k. ~<-rWM/<!tf<Y//aM&f/<MfKf!<'A/f<'f/.MMtti')),)8NS.p. )t-M.
Cr.t:rttw).'y.j).!U.
compte, ces peuples y voyaient autre chose qu'une source
d'eiltuves Impurs et dvirHisauts.
Quant aux raisons qui tout que le divin a pu donner nais-
sauce un systme d'interdictions de ce genre (que nous
serions tent d'attribuer l'aversion plutt qu'au respect),
elles sont de deux sortes, tt en est de communes toute l'hu-
manit, d'autres qui sont spciales aux peuples primitifs.
D'abord, tout ce qui inspire un respect exceptionnel tient le
vulgaire distance, tout comme les tres ou les objets dont
le contact est odieux. C'est que dans le respect il entre de
la crainte et t'tre respecte lui-mme, pour entretenir tes
sentiments qu'il inspire, est oblig de rester d'accord avec.
son caractre et de se tenir a part. En se metant aux autres
tres, il leur connnuftiquerait sa nature et participerait la
leur il tomberait donc au niveau commun. Ainsi, quelque
dincrcnce qu'il y ait au regard de la conscience entre ces
deux motions, le dgot et la vnration, elles se traduisent
par les mmes signes extrieurs. Vues du dehors, ou peut
difftcitement tes distinguer. Mais la confusion tait surtout
facile dans les socits intrieures, cause de l'extrme am-
bigut qu'y a la notion du divin. Comme t'a montr Smith,
les dieux sont des forces redoutables et aveugles; elles ne
sont lies par aucun engagement morat suivant tes circons-
tances ou leur simple caprice, elles peuvent tre bienfaisantes
ou terribles. On conoit ds lors qu'on ne les aborde qu'uvec
les plus grandes prcautions c'est par des dtoursqu'on peut
sans danger entrer en relations avec cites. L'abstention est
ta rgle, tout comme s'il s'agissait d'tres abhorres. Or le
tabou n'est pas autre chose que cette abstention organise et
leve la hauteur d'une institution.

Vi 1

Telles sont tes origines de l'exogamie.


Ainsi dtermines, elles paraissent d'abord tre sans rap-
port avec notre conception actuelle de l'inceste. Il nous
rpugned'admettre qu'un principe de notre morale contem-
poraine, un de ceux qui sont le plus fortement invtrs en
nous, puisse tre plac sous la dpendance, mme lointaine,
de prjugs absurdesdont l'humanit s'est depuis longtemps
affranchie. Cependant, en fait, il n'est pas douteux que les
dispositionsdo nos codes relatives aux mariages entre parents
ne se rattachent aux pratiques exogamiques par une srie
continue d'intermdiaires, de mme que notre organisation
domestiqueactuelle se roUe ceile du cian. L'exogamie, en
effet, a volua comme la famille. Tant que colle-ci se contond
avec le clan, et plus spcialement avec le ciau utrin, c'est
la parent utrine que s'appliquent ou exclusivement ou
priucipaiement les interdictions sexuelles. Quand le clan
paternel fait recounattresesdroits, l'exogamie s'tendjusqu'
lui. Quand le totmisme disparalt, et avec lui iu parente sp-
ciale auclan, t'exogamiedevient solidairedes nouveaux types
do famille qui se constituent et qui reposent sur d'autres
JMses, et comme ces familles sont plus restreintes que n'tait
le clan, elle se circonscrit, elle aussi, dans un cercle moins
tendu le nombre des individus entre lesquels le mariage
est prohib diminue. C'est ainsi que, par une volution gra.
duelle. elle en est arrive t'tat actuel o les mariages entre
ascendants etdesccndants, entre frres et surs, sont peu
prs les seuls qui soient radicalement interdits. Mais, s'il en
est ainsi, si notre rglementation de l'inceste n'est qu'une
transformation de l'exogamie primitive, il est impossible que
les causes dterminantes de celle-ci aient t sans influence
sur ceiic-iM. Ces deux institutions, nes t'une do l'autre,
doivent ncessairement tenir l'une l'autre.
Les raisons mmes qu'on a donnes pour justifier notre
rprobation prsente de l'inceste, vont nous aider trouver
le lien qui tes unit.
Oa s'accorde gnralement aujourd'hui pour reconnaltre
que si le droit et les mmurs s'opposent aux mariages entre
parents, ce n'est pas cause des inconvnientshyginiques
que peuvent avoir ces unions mais c'est, dit-on, qu'elles
seraient subversives de l'ordre domestique. On entend d'or-
dinaire par l que, comme la vie de (amiti, cause des rap-
prochements dont elle est l'occasion, risque d'veiller les
dsirs sexuels en mme temps qu'elle en facilite la satisfac-
tion, le dsordre et la dbauche y seraient t'tat endmique
si l mariage entre proches tait licite. On ne voit pas qu'on
prte ainsi aux lgislateurs le plus trange raisonnement;
car ce serait un singulier moyen, pour prvenir les unions
irrgutieres entre parents, que de refuser ces derniers le
droit de s'pouserrgulirement.On ne combat pas le conu'
binage eu dfendant le mariage c'est plutt l'inverse qu'il
et faitu faire. Or, justement, dans presque toutes les tgisla-
tions, c'est surtout le mariage qui est considr comme ineon-
ciliuble avec la parent. Le simple commerce sexuel, quoique
souvent putti. est plus frquemment l'objet d'une certaine tot-
rance notre droit pnai l'iguore si notre morale !e condamne.
D'ail teurs, l'loignement que nous inspire l'inceste est trop
spontan et trop irrflchi pour tenira des catcuisaussisavaats.
Les repercussions probtmatiques que pourrait avoir, sur le
bon ordre de la famille, la suppressionde toute rgle restric-
tive, sont choses complexes et lointaines que le vulgaire aper-
oit mai et qui le touchent faibtemout. Des considrations
aussi gnrales ne sauraient donc avoir dtermin un senti-
ment aussi universel et d'une telle nergie. Knftn, cette tho-
rie prte a la loi un pouvoir qu'elle n'a pas. La toi ne peut
empcher les choses de produire tours consquences natu-
relles; si vraiment lu vie do famille nous inclinait l'in-
cesto, les dfenses du lgislateur resforaient impuissantes.
L'action du milieu domestique est trop forte et trop continue
pour que le prcepte abstrait de la loi puisse en neutraliser
les eiets.
Cependant, la proposition qui sert de base cette explica-
tion ne doit pas tre rejete. Elle exprime, quoique d'une
manire Inadquate, ce sent.iment obscur de !a foule que, si
l'inceste tait permis, la famille ne serait plus la famille, do
mme que le mariage ne serait plus le mariage. Seulement,
cet tat de l'opialou vient de ce que la vie domestique nous
semble repousser naturellement l'inceste, loin qu'elle passe
pour le stimuler. Sans que nous rflchissions, sons que nous
calculions les effets possibles des unions incestueuses sur
l'avenir de la famille ou de ta race, elles nous sont odieuses,
par cola seul que. nous y trouvons confondu ce (lui nous
parait devoir tre spar. L'horreur qu'elles nous inspirent
est identique celle qu'prouve le sauvage & l'ide d'un m-
lange possible entre ce qui est tabou et ce qui est profane; et
cette horreur est fonde. Entre les fonctions conjugales et les
fonctions de parent, <eM ~x'e~ MMf acfxcH<'n)~K<cotM-
<M~, il y a en effet une relle incompatibilit, et par suite
on ne peut en autoriser la confusion sans ruiner les unes et
les autres.
Tout ce qui concerne la vie de famille est domin par
l'ide de devoir. Nos rapports avec nos frres,
nos sars,
nos parents, sont troitemeut rgts par ta morale; c'est un
rseau d'obligations dont nous pouvons nous acquitter avec
joie si nous sommes sainement constitus, mais qui ne
laissent pas do s'imposer nous avec cette imporsonuntit
imprative qui est la caractristique de la toi morale. Assu-
rment, la sympathie, les inclinations particuliressont loin
d'en tre bannies cependant les affections domestiques
ont toujours cette proprit distinctive que t'amour y est
fortement color de respect. C'est que l'amour, Ici, n'est
pas simplement un mouvement spontan de la sensibilit
prive c'est, en partie, un devoir. t) est exigible, dans la
mesure o un sentiment peut t'tre: c'est un principe de la
morale commune qu'on n'a pas le droit de ne pas aimer ses
parents. Une nuance de respect se retrouve jusque dans le
commerce fraternel. Quoique frres et Sfcurs soient gaux
entre eux, ils sentent bien que ce qu'ils prouvent tes uns
pour les autres ne dpend pas seulement, ni mme principa-
lement, do leurs quatits individuelles,mais tient avant tout
quelque influence qui les dpasse et qui les domine. C'est la
famille qui exige qu'ils soient unis; c'est elle qu'ils aiment
en s'aimant, qu'ils respectent en se respectant. Prsente
toutes tours relations, elle teur imprime une marque spciale
et les lve au-dessus de ce que sont de simples rapports
indivMuets. Yoi) aussi pourquoi te foyer a toujours, aujour-
d'hui comme autrefois, un caractre religieux. S'il n'y a plus
d'autels domestiques, ni de divinits familiales, la famille
n'en est pas moins reste tout imprgne de religiosit!
ette est toujours t'arche sainte a laquelle il est interdit de
toucher, prcisment parce qu'elle est t'cole du respect et
que le respect est le sentiment religieux par excellence,
Ajoutons que c'est aussi le nerf de toute discipline collec-
tive.
lien est toutautrement des rotations sexuettes,<eM<M~MtKMM
<M conrecons. L'homme et la femme qui s'unissent cherchent
dans cette union leur plaisir, et ta socit qu'ils iorment
dpend exclusivement, au moins en principe, do leurs an!-
nits lectives. Ils s'associent parce qu'ils se plaisent, alors
que frres et surs doivent se plaire parce qu'ils sont asso-
cis au sein de la famille. L'amour, dans ce cas, ne peut tre
lui-mme qu'a condition d'tre spontan. !t exclut toute ide
d'obligation et de rgle. C'est le domaine de la libert, o
l'imagination se meut sans entraves, o l'intrt des parties et
leur bon plaisir sont presque la loi dominante. )~ l o
cessent l'obligation et ta rgle, cesse aussi la morale. ~ussi,
comme toute sphre de l'activit humaine o l'ide de devoir
et de contrainte morale n'est pas sutUsammeut prsente est
une voie ouverte au drglement. il n'est pas tonnant que
l'attrait mutuel des sexes et ce qui en rsulte ait t souvent
prsente comme un danger pour ta moralit. 11 est vrai qu'il
n'en est pas tout fait ainsi de cette union rglemente qui
constitue le mariage. Le mariage, en elTet, vient de ce que,
comme le commerce des sexes affecte la famille, oelle-ci,
son tour, ragit sur lui et lui impose certaines rgles,
destines le mettre en harmonie avec les intrts domes-
tiques. Elle lui communique ainsi quelque chose de sa nature
morale. Seulement, cette rglementation atteint les cons-
quences du rapprochement sexuel, non ce rapprochement
iui-meme. ite oblige les individus qui se sont uuis il certains
devoirs, elle ne les oblige pas s'unir. Surtout, tant qu'its ne
sont pas encore lgalement et moralement tics, ils sout dans
ta mme situation que des amants et ils se traitent comme
tels. Le mariage suppose donc une priode prliminaire ait
les sentiments que ies futurs poux se tmoignent sont iden-
tiques en nature & ceux qui se manifestent dans les unions
libres, Mme l'influence morale de ta famille ne peut gure
se laire sentir que quand le couple conjugal est devenu une
famille proprement dite, c'est--dire quand les enfants sont
venus le complter. Aussi, le mariage a beau tre la lorme
lu plus morale de ta socit soxuelle, it n'est pas d'une autre
nature que les socits de ce genre il met en jeu les mmes
instincts. Mais alors, si ces deux tats tl'esprit s'opposent
entre eux aussi radicalement que te bien et le plaisir, le
devoir et la passion, le sacre et le profane, it est impossible
qu'ils se confondent et s'abtment t'un dans l'autre sans pro-
duire un vritable chaos moral dont ta pense seule nous est
intolrable. Parce qu'ils se repoussent violemment t'uo l'autre,
nous repoussons aussi avec horreur t'ide qu'ils puissent se
combiner en un innomabto mhmge, o ils perdraient tous
deux leurs qualits distinctives et d'o ils sortiraient gale-
ment mconnaissables. Or, c'est ce qui arriverait si une seule
et mme personne pouvait les inspirer la fois. La dignit
du commerce qui nous unit a nos proches exclut doue tout
autre lien qui n'aurait pas la mme valeur. On ne peut cour-
tiser une personne qui on doit et qui vous doit une respec-
tueuse affection, sans que ce dernier sentiment se corrompe
ou s'vanouisse de part et d'autre. En un mot, tant </ottM~
MO): ides <'t<'<un homme ne peut faire
sa femme de sa
\Bur sans qu'eue cesse d'tre sa smur. C'est ce qui
nous fuit
reprouver i'inceste.y
Seulement, cette rponse n'est pas une solution, la question
n'est que recule. ti reste a chercher quelle est l'origine de ces
ides. Comme nous ysomutesitabitus, eiies nous semblent
trs naturettes; elles n'ont pourtant rien de logiquement
ncessaire. Assurment, tant donn que notre amour pour
nos femmes nous pf~'a~ <'oH(t'f<<<'t'<! ce point avec celui que
nos surs doivent nous inspirer, nous ne saurions admettre
que ces df'ux personnages se confondent en un seul. Mais
le contraste que nous voyons entre ces deux sortes d'auec-
tiomest si peu command par leur nature intrinsque qu'il
y a eu bien des cas o il n'a pas t reconnu. Nous savons
en effet que, chez nombre de peuples, non pas primitifs,
mais parvenus un lissez haut degr de civilisation, t'inceste
a t permis et mme prescrit c'est dire que ia fusion
des rapports de parente et (tes rapports conjugaux y tait
une rgle presque obligatoire. Ailleurs, si frres et smurs ne
peuvent pas s'pouser, le mariage entre cousins et cousines
est au contraire recommande les exemptes sont innom-
brables. Pourtant, s'i! y avait une antipathie conjugale, relle-
ment irrductible, entre coiiateraux du premier de~r.oUe ne
se transformeraitpas en une sorte d'aHinito au degr imm-
diatement suivant. Ue mOne Athnes, quand la fiite tait
hritire, elle tait tenue de prendre pour mari son plus
proche parent. Le ievirat, c'est--dire l'obligation pour un
beau-frre d'pouser sa beiie-sur devenue veuvo, la potyau-
drie fraternelle sont des phnomnes du mme genre. Car, si
la parent par alliance n'implique pas la consanguinit, elle
a tous les caractres moraux de !a parent naturelle; or l'in-
compatibilit dont il s'agit ici est toute morale. Elle devrait
donc se produire dans un cas comme dans t'autro*. Enun,
bien des faits tendent prouver que, au dbut des socits
humaines, l'inceste n'a pas t dfendu. Hien en effet n'auto-

?.
)t) 'v. p)u!i haut, )).
<) thuM )f' <'M th- )K))\n)n))-ic fmU't'nt-Uc. ')'' tfvifa). )<-< M~s vivent.
t'ttM'ttthh' <)tt))~ i'indh i)!it)t) tf plus jt'mx' <t <)'))' \'Mt) an ''ontpagom (t<!
)<t )))'))'<)'u)'. tt h<)uc))<' il s'unit )' tuuttf'n) Y<)u, ("ut antaot c( de la
t~tnu matttft'c <tu xw =i<t'Ent'.
rise supposer qu'il ait t prohibe avant que chaque peu-
plade se fut divise en deux ctans primaires au moins; car la
premireforme de cette proinbition que nous connaissions,
savoir l'exogamie,apparat partout comme corrlative cette
organisation. Or, cetie'ci n'est certainement pas primitive.
La socit a du former une masse compacte et indivise avant
de se scinder en deux }<t'oupes distincts et certains des
tableaux de nomeneiature dresss par Morgan confirment
cette hypothse. Mais alors, si tes relations familialeset tes
relations sexuelles ont commence par <!tre indistinctes, et si
elles sont retournes tant de fois cet tat d'indistinction, on
n'est pas fond croire que, d'elles-mmes et pour des rai-
sous internes, elles taient ncessites a se diffrencier. Si
l'opinion les oppose, il faut que quelque cause, traugre
leurs attributs constitutifs, ait dtermin cette manire de
voir.
Et on effet, on no voit pas comment cette diffrenciation se
serait produite, si !e mariage et ta famille n'avaient t pra-
lablemeut contraints de se constituer dans deux milieux dif-
frents. Supposez que, en rgle (;<*n6rafe, les hommes se
soient unis n leurs procites parentes, notre conception du
mariage serait tout autre; car la vie sexuelle ne serait pas
devenue ce qu'elle est. Elle aurait uu caractre moins pas-
sionnel, par cela seul que le got des individus y jouerait un
moindre rle. Elle laisserait moins de place aux libres jeux
de l'imagination,aux rves, aux spontanits du dsir, puis-
que l'avenir matrimonial de chacun serait presque tixe ds sa
naissance. En un mot, par cela seul qu'il se serait labore au
sein de la famille et que la raison do famille lui et fait la
loi, le sentiment sexuel se serait tempre et amorti il eut
pris quelque chose de cette impersonnalit imperative qui
caractrise les sentiments domestiques, li en serait devenu un
aspect particulier. Mais, par cela mme, il s'eu serait rap-
proche, et, tant a peu prs de mme nature, il n'aurait ou
aucun mal se concilier avec eux. Qu'est-ce donc qui a pu
mettre obstacle cette assimilation ? Certes, la question ne
se pose pas une fois qu'on suppose l'inceste prohibe car
l'ordre conjugal, tant ds lors excentrique l'ordre domes-
tique, devait ncessairement se dvelopper dans un sens
divergent. Mais on ne peut videmment expliquer cette prohi-
bition par des ides qui, manifestement, en drivent.
Dira t on que, de lui-mme, ce penchant se refuse ces tem-
praments? Mais ce qui prouve bien qu'il N'y est nullement
rh'actaire, c'est qu'il les a docilement subis toutes les fois
que cela s'est trouv ncessaire, c'est--dire toutes les fois que
l'inceste a t permis et usit. Car certainement, dans tous
ces cas, ce ou sout pas les relations domestiquesqui out cd
et qui se sont mises au ton des relationssexuelles la famille,
ne pouvant s'accommoder d'une discipline aussi retche,
n'et pu se maintenir dans cesconditions,ui, parconsequent,
la socit. Ht d'aittcurs d'o viendraient ces rsistances)' On a
dit parfois, il est vrai, que l'apptit sexuel fuit instinctive-
ment la famitte parce que )a cohabitation prolonge a
pour euet de t'endormir. Mais c'est oublier que l'accoutu-
mance n'est pas moindre entre poux qu'entre parents Elle
ne devrait donc pas produire ptus d'effet dans un cas que
dans l'autre Et puis qu'aurait pu cette vague veiteit du
dsir contre les raisons imprieuses qui poussaient lu famille
se recruter dans son propre sein'? Car on a trop perdu de
vue les complications et les difficults iufinies au milieu des-
quelles l'humanit a du se dbattre pour avoir prohib
l'inceste. I! (attut d'abord que les familles s'arrangeassent
pour changer mutuellement leurs membres. Or des sicles
se passrent avant que cet change tt devenu pacifique et
rgulier. Que de vendettas, que de sang verse, que de ngo-
ciations laborieuses furent pendant longtemps la cons-
quence de ce rgime! Mais alors mme qu'il fonctionna
sans violence, il eut pour effet de rompre, chaque gnra-
tion. l'unit matriettc et morate de la famille, puisque les
deux sexes, parvenus ta pubert, taient obligs de se sparer,
et que i'ua d'eux (ce fut gnralement la femme) s'en allait
vivre chez des trangers. Cette scission priodique mit notam'
ment les socits en prsence do cette douloureuse alterna-
tive ou refuser la femme toute partdu patrimoine commun,
et ta laisser par consquent la charge et sous la dpendance
de la famille o elle entrait ou, si on lui accordait des droits
plus ou moins tendus, la soumettre un contrlelaborieux,
a une surveillance complique, pour empcher que tes biens
dont elle avait la jouissance pussent passer dnutUvemeat

)t; Xo))t. oupt'uoto))!' )'id<h; M. SimMtt.'), ~fe H't'ftMMM~ox'/te (UMcttt:


du \'uss. 3 Mt lU jum ttM)4).
ji!) U ui))'*ur! un )t pu, ttvt'e ttutant tt'ojtpan'nrt', fuMtt'nh' ))t thuso con-
)min', n sa~voit- ')Ut' h' contact ')f tous ~'s iuitant~ stimule tes d<)rs eo
leur utfnmt des uccastune.
aux parents de son mari. La tutelle des tignats, l'obligation
pour ta fille picire d'pouser son plus proche parent, la
constitution du douaire, t'oxttrdation pure et simple et
sans garantie)! d'aucune sorte, avec ta situation incertaine qui
eu rsultait pour la femme, telles turent tes combinaisons
diverses par )esquet)es on essitya de concilier ces ncessits
opposes. Or toutes ces oppositions et tous ces coMHits, tes
hommes se les seraient pargns, s'ils ne s'taient pas tait
uue loi de chercher leurs femmes en dehors de leurs parontei).
Ainsi, d'une part, pour que les rotations sexuettos aient pu
s'opposer aussi radicalement aux relations do parent, it a
fallu qu'elles fussent pralablement rejetes hors de cette
atmosphre morale oa vit la {amiti; de l'autre, il n'y avait
rien en elles qui rendit ncessaire cette sparation. I) semble
mme quta ligne do la moindre rsistance tait dirige dans
un tuut autre sens. H faut donc bien que cette dissociation
leur ait t impose par une force extrieure et particulire-
ment puissante. Autrement dit, t'incompatibitit morale au
nom de laquelle nous prohibons actuellement l'inceste est
eiie-tnemo une consquence de cette prohibition, qui par con-
squent doit avoir exist d'abord pour une tout autre cause.
Cette cause, c'est l'ensemble de croyances et de rites d'o
l'exogamie est rsulte.
En effet, une fois que les prjugs relatifs au sang eurent
amen les hommesa s'interdire toute union entre parents, le
sentiment sexuel fut bien oblig de chercher en dehors du
cerete familial un milieu o it pot se satisfaire ot c'est ce
qui le fit se diffrencier trs tt des sentiments de parent.
Deux sphres diffrentes furent ds lors ouvertes t'activit
et & ta sensibilit humaine. L'une, ie clan, c'est--dire la
famille, tait et resta le foyer de la moralit l'autre, lui tant
extrieure, ne prit de caractre moral qu'accessoirement,
dans la mesure o elle affectait les intrts domestiques. Le
clan, c'tait te centre de la vie religieuse, et toutes les relations
du clan avaient quelque chose de religieux par cela seul que
les rapports des sexes durent se contracter au dehors, ils se
trouvrent en dehors du domaine religieux et furent classs
parmi les choses profanes. Par suite, toute l'activit passion-
nette, qui ne pouvait se dvelopper d'un ct cause de la
svore disciplinequi y rgnait, se porta de l'autre et s'y donna
libre carrire. Car l'individu no se soumet la contrainte col-
lective que quand c'est ncessaire ds que ses apptits natu.
rels trouvent devant eux une pente qu'ils peuvent suivre
librement, ils s'y prcipitent. Ainsi, gr&co & l'exogamie, la
sensualit, c'est-a-dirc t'ensemble des instincts et des dsirs
individuels qui se rapportent aux relations des sexes, fut
affranchie du joug de la famille qui l'eut contenue et ptus ou
moins touffe, et elle se constitua part. Mais, par ceta mme,
elle se trouva en opposition avec la moralit familiale. Avec
le temps, elle s'enrichit d'ides et de sentiments nouveaux
elle se compliqua et se spiritualisa. Tout ce qui, dans l'ordre
intellectuel ou dans l'ordre motif, est naturellement impa-
tient de tout frein et de toute rgle, tout ce qui a besoin de
libert vint se greffer sur cette base premire; c'est aiusi que
les ides relatives u la vie sexuelle se sont troitoment iies
au dveloppement de i'art, de la posie, tout ce qui est rves
et aspirations vagues de l'esprit et du cffur, toutes les mani-
festations individuelles ou collectives o l'imagination entre
pour la plus large part. C'est pour cette mme raison que la
femme a t si souvent considre comme le centre de la vie
esthtique. Mais ces additions et ces transformations sont
des phnomnes secondaires, maigre leur importance. Ds
qu'il fut interdit aux membres d'un mme clan do s'unir
entre eux, la sparation fut consomme.
Or, une fois entre dans tes murs, elle dura et survcut
sa propre cause. Quand les croyances totmiques qui avaient
donn naissance l'exogamiese furent teintes, les tats men-
taux qu'elles avaient suscits subsistrent. Les habitudes,
prises et gardes pendant des sicles, ne purent pas se perdre
ainsi, non seulement parce que la rptition tes avait fortifies
et enracines, mais parce que, chemin faisant, ettes s'taient
solidarises avec d'autres habitudes et qu'oo ne pouvait tou-
cher aux unes sans toucher aux autres, c'est diretout. Toute
la vie morale s'tant organise en consquence,il et fallu la
bouleverserpour revenir sur ce qui avait t (ait. Ni l'homme
ne pouvait aisment renoncer ces libres joies dont il avait
conquis la jouissance, ni il ne pouvait les confondre avec les
joies plus svres de la famille, sans que les unes ou tes
autres cessassent d'tre eites-mmesi~D'unautre cot, comme
l'organisation base de clans a t un stade par lequel parais-
sent avoir pass toutes les socits humaines, et que l'exo-
gamie tait lie troitement la constitution du clan, il n'est
pas tonnant que l'tat moral qu'elle 1 issait derrire elle
ait t lui-mmegnrt dans l'humanit Du moins il fallut,
pour en triompher, des ncessits sociales particulirement
pressantes; c'est ce qui explique et comment l'inceste fut
lgitim chez certains peuples et comment ces peuples sont
rests l'exception.
!t ne semble pas que rien soit survenu dans l'histoire qui
puisse rendre cette totrance plus gnrale dans l'avenir que
dans le pass. Ce n'est certes pas sans cause qu'une religion
aussi rpandue que !o catholicisme a formellement mis l'acte
sexuel en dehors de la morale, s'i) n'a pas la famitto pour fin.
Ht encore, mme sous cette forme, le dclare t-etto inconci-
liable avec tout ce qui est investi d'un caractre sacr'. Un
sentiment comme celui-l, dont dpendent tant d'usages et
d'institutions qui se retrouvent chez tous les peuples euro-
pens, est trop gnrt pour qu'on puisse y voir un phno-
mne morbide, d je ne sais quelles aberrations mystiques.
t) est plus naturel de supposer que la nature amorale de ta
vie sexuette s'est rellement accentue, que la divergence
entre ce qu'on pourrait appeler l'tat d'esprit conjugal et
l'tat d'esprit domestique est devenue plus marque. La cause
en est peut-tre que la sensualit sexuelle s'est dveloppe
alors que la vie morale, au contraire, tend de plus en plus
exclure tout lment passionnel. Notre morale n'est-elle pas
celle do l'impratif catgorique?
Toujours est-it que, si les peuples ont maintenant une
raison nouvelle pour s'opposer aux mariages entre proches,
cette raison est en ralit une rsultante de la rglementa-
tion qu'elle justifie. Elle en est un effet, avant d'en tre une
cause. Elle peut donc bien expliquer comment la rgie s'est
maintenue, non comment otte est ne. Si l'on veut rpondre
cette dernirequestion, il faut remonter jusqu' l'exogamie,
dont l'action par consquent s'tend jusqu' nous. Sans les
croyances dont elle drive, rien ne permet d'assurer que
nous aurions du mariage t'ide que nous en avons et que
l'inceste serait prohib par nos codes Sans doute, t'ter-
nelle antithse entre la passion et le devoir et toujours

(ti Nous ne fai~oni. pas seulement allusion au <'<!fiht <)M pn'tnM, mais
ft la t<'f<)'! canonique qui d~fcud le mpprufhetncntdcs sexes dans ]<!sj')an<
'on~cn'tt.
?) En faisant cette ));'potM':w, not)~ n'cntcndonj! pas dire f))te l'exogamie
ait )itt! un accident contingent. Elle est Irop ~troitmotint lie (tu t~MtnitnM
~-tau chu, qui sont de!! pMnnn~nmunivet'M)!pour qu'on pui~Mt.'an'Me)'
M une tcUe supposition. Qu'on ne voie nonc dans nott'e fonnuie qu'on
)'roevd)! tt'titpoemon, destin Il isoler la part de chaque facteur.
trouv moyen de se produire; mais elle et pris une
autre forme. Ce n'est pas au sein do la vie sexuette que ta
passion aurait pour ainsi dire tabti sou centre d'action.
Passion et amour des sexes ne seraient pas devenus syno-
nymes.
Ainsi, cette superstition grossire qui faisait attribuer au
sang toute sorte de vertus surnuturelles, a eu sur le dvetop-
poment moral de l'humanit une influence considrante. On
a mme pu voir au cours de ce trayait que cette action ne
s'est pas seulement fait sentir dans lu question de l'inceste.
!t est un autre ordre de phnomnes qui est plac sous la
dpendance de la mme cause ce sont les moiurs relatives a
la sparation des sexes en gnral. Le lecteur n'a pus pu
n'tre pas frapp do la ressemblance qu'il y a entre les faits
que nous avons rapports plus haut et ce qui se passe encore
aujourd'hui sous nos yeux. Suivant toute vraisemblance si,
dans nos coles, dans nos runions mondaines, une sorte
de barrire existe entre tes deux sexes, si chacun d'eux a
une forme dtermine de vtements qui lui est impose par
l'usage ou mme pur la loi, si l'homme a des fonctions qui
sont interdites ta femme ators mme qu'elle serait apte
les remplir, et rciproquement; si, dans nos rapports
avec les femmes, nous avons adopt une langue spciale,
des manires spciales, etc., c'est en partie parce que, il y
a des milliers d'annes, nos pres se sont fait du sang en
gnra), et du sang menstruel en particulier, la reprsenta.
tion que nous avons dite. Non sans doute que, par une
inexplicable routine, nous obissions encore, sans nous en
rendre compte, ces antiques prjugs, depuis si longtemps
dpourvus de toute raison d'tre. Seulement, avant de dispa-
ratre, ils ont donn naissance des manires de hure qui
leur ont survcu et auxquelles nous nous sommes attachs.
Ce mystre dont, tort ou raison, nous aimons entourer
la femme, cet inconnu que chaque sexe est pour l'autre et
qui fait peut-tre le charme principal de leurcommerce,cette
curiosit trs spciale qui est un des plus puissants stimu-
lants de la brigue amoureuse, toute sorte d'ides et d'usages
qui sont devenus un des dlassements de l'existence pour-
raient difttcitement se maintenir, si hommes et femmes
mlaient trop compltement leur vie; et c'est pourquoi l'opi-
nion rsiste aux novateurs qui voudraient faire cesser ce dua-
lisme. Mais, d'un autre cot, nous n'aurions pas connu ces
besoins' si des rtilsons depuis longtemps oublies n'avaient
dtermin les sexes se sparer et & tonner en quelque sorte
deux socits dans la socit; car rien, ni dans la constitu-
tiou de t'uu ni dans celle de l'antre, ne rendait ncessaire une
semblable sparation.
La prsente tude, en dehors do ses rsultats immdiats,
peut donc servir montrer, par lui exemple topique, l'erreur
radicale de ta mthodequi considre les faits sociaux comme
le dveloppement logique et ttoiogique do coucopts dter-
mines. Ou aura beau snaiyser les rapports de parente, t' a<M-
~'t'<o, on n'y trouvera rien qui implique entre eux et les
rapports sexuels uue aussi profonde incompatibilit. Les
causes qui ont dtermine cet antagonisme leur sont ext.
rieures. Assurment, on ne saurait trop le rpter, tout ce
qui est social consiste en reprsentations, par consquent
est un produit de reprsentations. Seulement, ce devenir des
reprsentations collectives, qui est la matire mme de la
sociologie, ne consiste pas dans une ralisation progressive
de certaines ides fondamentales qui. d'abord obscurcies et
voiles par des ides adventices, s'en afranchiraient peu
peu pour devenir de plus en plus compltement eties-mmes.
Si des tats nouveaux se produisent, c'est, en grande partie
parce que des tats anciens se sont groups et combins.
Mais nous venons de voir, et dans des cas essentiels,comment
ces groupements pouvaient avoir une tout autre cause que la
reprsentation anticipe de la rsultante qui s'en dgage.
L'ide de cette rsultante n'est donne que quand la combi-
naison est faite; elle no peut donc eu rendre compte. C'est un
euet plus qu'une cause, quoiqu'elle puisse ragir sur les.
causes dont elle drive elle a besoin d'tre explique plus
qu'elle n'explique". 11 n'y a rien dans les proprits du sang
(t) Hi~t n'' dit d'ai)t<m'! ')u'- '< ))'Muin< tM- ~oifttt ))U!) <tf<tiuM rt ~tm
<'onh)iir'"). Ils sutMt)t<'Mt ))! ~[t-< omms j)t'o-
n''utra)i'!<~ par ')M bciiuins
fund!! qMc coux qui ttxnt !t )'t )':< <)'"< i'h''M n'tiUivc~ & rhK'Mt'
)a) Les titats nouveaux pNU'cn) <~n' (hx uussi aux <'))an){fm''nts f;nt sn
jtfoduiM'nt (t)in< )e eub~Mt su<-iu) <?t'n'hx' ptus Krandf du ~-n-ituin'.
)f<tpo))tti"n ptui! numttn'Ui't', phts d'n!it', ~'tt'. !<ou< huions de ''t'i ('e<
)'uu!<ea de n"uvaut<i Mxqucfh' h' t'on~idt'tttUutM
cxpo~c~ ci-dessM
!app)i<)oent Mteofo plus t'vidt'nxMfnt.
(3) Voil co <)an nou:! avot):; voutu dire, <tnand nous avo)!
)<'</<<? </e /a .M/f. mcM.. p. 30) 't'h- notn: iduo de ta.
't
nx'm)'-
a)))t'un)
v"'nt 'tes
n'xte< tnomtM qui fonctiontx'nt ~<ms nos yeux. Ces n'-ft)' sont dunu<!B<
daix dM n'pn'Mttttttion! mai!) tmtn' concuption f~ncmto (te la <))om)')
MM pr~idc pas )& co)M.h'u''ti))ndt* ces
r''prt's'n)atit)n< e~mcntairt's, u))
qui le prdestine ncessairement acqurir un caractre reli.
gieux. Mais la notion vulgaire du liquide sanguin, ou s'asso-
ciant avec les croyances totmiques, a donn naissance aux
rites dont nous avons parl. Ces rites, tt leur tour, associs
avec lu notion courante du commerce sexuel, ont engendr
les ides relatives t'exogamic. Sur la base de t'exogamie,
toute sorte d'habitudes se sont prises qui font maintenant
partie de notre tentperameut moral. Aucune analyse dialec-
tique ne saurait retrouverles lois de ces synthses la forma-
tion desquelles aucune dialectique humaine n'a prside. Sans
doute, mesure que le jugement collectif se dveloppe et
vient clairer davantage ta volont sociale, celle-ci devient
aussi plus apte diriger le cours des vnements et leur
imprimer une marche rationuetto. Mais les fonctions intellec-
tuelles suprieures sont encore beaucoup plus rudimentaires
dans la socit que dans l'individu, et les cas o leur iuftueuce
est prpondrante n'ont t jusqu' prsent qu'une infime
exception.
NtU! DUKKHNM.

n~utt'! df foMt'cutxbinai~jn, & ntcstnv ~tt'<'))(' x~ funt~'ut. !)u tuotns. si,


une f'ttsht'ttttk'. c))('exerce une )n't!un!!Uf)t'<tU'd'ue)h')t'sutt)',
KCtte n'Mtion est sm'ondaht). Ht fe tjuo nous <ti<!)t)~ de la notiun j{t''n~<'ft)c
du la moralit [Mtt' tuppft-t il <'tt<t'tU<')TL'(t)e )'<trti<'u)it'tf ))cut M ttit't' de <'ht')))<*
rtgk' parU':u)i'')t;pt)'M)'puFtMUXtvpr~t'otaHott~h'tWtttitinM d'oftette n<'
sulle.
J1

COMMENT LES FOHMES SOCIALES


SKMAtNTtHNNKNT

t'xrM.i-fMMKf.

Les sciences en voie de formation ont le privilge, mdio-


crement enviable, de servir comme d'un asile provisoire a
tous les problmes qui flottent dans l'air, sans avoir encore
trouv leur vritable place. Par l'indtermination et l'accs
facile de leurs frontires, elles attirent tous les sans patrie
de la science, jusqu' ce qu'elles aient pris assez de force
pour rejeter hors d'elles tous ces lments trangers t'opra-
tion est parfois cruelle, maiselle pargne bien des dceptions
pour l'avenir. C'est ainsi que la sociologie, cette science nou-
velle, commence se dbarrasser de la masse confuse de
problmesqui s'attachaient elle; elle prend le parti de ne
plus naturaliser le premier venu, et. quoiqu'on discute encore
sur l'tendue de son domaine, d'vidents euorts sont faits
pour en marquer les contours. Pendant longtemps, il semblait
que le mot de sociologie eut une vertu magique; c'tait la
clef de toutes les nigmes de l'histoire comme de la pratique,
de la morale comme de l'esthtique, etc. C'est qu'on donnait
pour objet la sociologie tout ce qui se passe dans la socit
par suite, tous les faits qui ne sont pas de l'ordre physique
semblaient tre de son ressort. Mais cela mme dmontre
l'erreur qu'on commettait en procdant ainsi. Car c'est vi-
demment un non-sens que de runir tous les sujets d'tude
dont traitent dj l'conomie politique et l'histoire de la civi-
lisation, la philosophie et la politique, la statistique et la
dmographie, dans une sorte de pio-mte auquel on accole
cette tiquette de sociologie. On y gagne un nom nouveau,
mais pas une connaissance nouvelle. Sans doute, H n'y a pas
de recherche sociologique qui n'intresse quelqu'une des
sciences dj existantes; car, dans ce qui fuit la matire df
ia vie humaine. il n'est rien qui uo soit dj l'objet de quei-
qu'une de ces sciences. Alais c'est justement la prouve que,
pour avoir un sens dfini, ia sociologie doit chercher ses
problmes, non dans la matire de la vie sociale, mais dans sa
tonne et c'est cette forme qui donne leur caractre social :t
tous ces faits dont s'occupent les sciences particulires. C'est
sur cette considration abstraite des formes sociales que
repose tout te droit que ia sociologie a d'exister c'est ainsi
que la gomtrie doit son existence a ta possibilitd'abstraire,.
des choses matcriettos, leurs tonnes spatiales. et la linguis-
tique ta sienne, la possibilit d'isoler, des penses qu'expri-
ment tes hommes, la forme mme de l'expression.
Les formes qu'anecteut les groupes d'hommes unis pour
vivre les uns it cte des autres, ou les uns pour tes autres, ou
les uus avec les autres, voil donc le domaine de ta sociologie.
Quant aux fins conomiques, religieuses, politiques, etc., en
vue desquelles ces associations prennent naissance, c'est a
d'autres sciences qu'il appartient d'en parler. Maisators.
puisque toute association humaine se fait en vue do telles
fins, comment connaitrons-nous les formes et les lois propres
de l'association? Kn rapprochant tes associations destines
aux buts les plus difereuts et eu dgageant ce qu'elles ont de
commun. Do cette faon, toutes les diffrences que prsentent
les (ius spciales autour desquels los socits se constituent,
se neutraliseront mutuellement, et la forme sociale sera seule
ressortir. C'est ainsi qu'un phnomne comme la formation
des partis se remarque aussi bien dans le monde artistique
que dans les milieux politiques, dans l'industrie que dans la
religion. Si donc on recherche ce qui se retrouve dans tous
ces cas en dpit de la diversit des fins et des intrts, ou
obtiendra les espces et tes lois de ce mode particulier de
groupement. Lu mme mthode nous permettrait d'tudier
de la mme manire la domination et la subordination, lu
formation des hirarchies, la division du travail, ta concur-
rence, etc. Quand ces nombreuses formes de l'association
humaine auront t tablies inductivement et qu'on aura
trouv leur signification psychologique, alors seulement ou
pourra penser rsoudre la question Qu'est-ce qu'une
socit ? Car il est bien sur que la socit n'est pas un tre
simple, dont la nature puisse tre exprima tout entire dans
une seule formule. t'uur en avoir ia dfinition, il faut sommer
toutou ces formes spciales do l'association et toutes los forces
qui en tiennent unis les lments. n ne peut pus y avoir de
socit o ces combinaisons varies ne se rencontrent. S'~ns
doute, chacune d'elles, prise part, peut disparattresans que
le groupe total disparaisse mais c'est que, citez tous les
peuples connus, il un subsiste toujours un nombrf sufMsant.
Que si ou tes supprime toutes par la pense, il u'y Il plus de
socit du tout'. l,
Afin d'illustrer par un exempte la mthode ainsi dfinie,
jo voudrais,dans cet urlicle, rocttorciter les formes spcifiques
par iesfjueties les socits, en tant que telles, se conservent.
Par socit, je n'entends pas seulement t'enscmbte comptexe
des individus et dos groupes unis dans une mme commu-
naut politique, Je vois une socit partout on des hommes
unit )
se trouvent en rciprocit d'action et constituent une
permanente ou passagre. Or, dans chacune de ces unions
se produit un phnomne qui caractrise gnlement h vie
individneUe; chaque instant, des forces perturbatrices,
exterues ou non, s'attaquent au groupement,et, s'H tait livr
leur seule action, eties uo tarderaient pas a le dissoudre,
c'ost-a direa on transfrer les lments dans des groupements
('trangers. Mais a ces causes de destruction s'opposent des
forces conservatrices qui )))!)intiem)C))t eusetnbte ces t-
monts, assurent leur cohsion, et par l garantissent l'unit
du tout jusqu'au moment o~'t, comme toutes les choses ter-
restres, ils s'abaudoum'Mttaux puissances dissolvantes qui les
assigent.
A cette occasion, on peut voir combien il est juste de pr-
senter lu socit comme une unit ~t ~t't'<'< distincte de
ses lments individuels. Car les nergies qu'elle m'<t on jeu
pour se conserver n'ont rien do commun avec l'instinct de
conservation des individus. EUe emploie pour cela des pro-
cds tellement diffrents que trs souvent ta vie des indi-
vidus reste intacte et prospre aiors que celle du groupe
s'afaibHt, et inversemeut. Pins que tous les autres, ces faits

0) Cf. <t)t' cott" nom")' ')'' ))~.'r t''))tbt''ttt<' stM'itt)ttK)'f<<))t)n<n'ti<'t')


~ttt- <<- ~'o&MKtc <fe < wM~ic in ~ft-MC </c <W<~A.. t. t), li. M7. t))t
tMMVcrit t)MH)')u<'))t()))))i):)ttiun!t<)<' <-t' ))ntK'ip<: <)(m.< tx't ~ocMt P)~)~M-
:<)'t<t)~. Lt'i)<<){. 'M. V. t')M)vt))''Mt /tKK<e< de <M/M< de <toe)<<~i<
vol. t, <'t .~H'f<c<!7e''< o~ecta/o~y, vol. U, n'" ~ct3.
ont contribu faire tenir la socit pour un tre d'une ra-
lit autonome,qui muerait, suivant des tois propres, une vie
indpendantede celle de ses membres. Et eu rattte, si t'on
considre ht nature intrinsque et l'volution des langues et
des murs, de t'Ugiise et du droit, de l'organisation politique
et sociate, cette conception s'impose. Car tous ces phnomnes
apparaissent comme tes produits et les fonctions d'un tre
impersonnel auquel les individus participent sans doute,
comme un bien public, mais sans qu'on puisse designer
Nommment un particulier qui en soit la cause productrice
ou ta raison dterminante pas un tnme dont on puisse dire
quelle part prcise il a prise leur production. Eites se posent
en face des particuliers comme quelque chose qui les domine
et qui uo dpend pas des mmes conditions que la vie indivi-
duelle.
D'un autre cote, il est certain qu'il n'existe que des indivi-
dus, que les produits humaius n'ont do ralit en dehors des
hommes que s'ils sont de nature materieito, et que les cra-
tions dont nous parions, tant spirituelles, ne vivent que
dans des intelligences persouncites. Comment donc, si les
tres individuels existent seuls, expliquer te caractre supra-
individuet des phnomnes collectifs, l'objectivit et l'auto-
nomie des formes sociales? tt n'y a qu'une manire de
rsoudre cette antinomie. Pour une connaissance parfaite, il
faut admettre qu'il n'existe rien que des individus. Pour un
regard qui pm'trerait le fond des choses, tout phnomne
qui parait constituer au-dessus des individus quelque unit
nouvelle et indpendante, se rsoudrait dans les actions rci-
proques changes par tes individus. Malheureusement, cette
connaissance parfaite nous est interdite. Les rapports qui
s'tablissent entre les hommes sont si complexes qu'il est
chimrique de les vouloir ramener leurs lments ultimes.
Nous devons plutt les traiter comme des ralits qui se
suffisent cits-mmes. C'est donc seulement par un procd
de mthode que nous parlons de l'tat, du droit, de la
mode, etc., comme si c'taient des tres indivis. C'est ainsi
encore que nous parlons de ia vie comme d'une chose unique,
tout en admettant qu'elle se rduit un complexus d'actions
et de ractions physico-chimiqueschangesentre tes derniers
lments de l'organisme. Ainsi se rsout le conflit soulev
entre la conception individualisteet ce qu'on pourrait appeler
la conception moniste de la socit cette-! correspond ia
ralit, celle-ci i'tat born de nos tacuits d'analyse l'une
est l'idal de la coanaissuace, l'autre exprime sa situation
actuelle.
Cela pos, de mme que le t)totogiste a dj pu substitue)'
lit force vitale, qui paraissait planer au-dessus des diff-
rents organes, l'action rciproque de ces derniers, le socio-
logue, son tour, doit chercher de plus en plus & atteindre ces
processus particuliers qui produisent retiement les choses
sociales, quelque distance d'ailleurs qu'il doive rester de
son idat. Voici donc, pour ce qui concerne l'objet spcial
de cet article, comment le problme doit se formuler. Nous
croyons voir que les associations les plus ditrentes mettent
en jeu, pour persvrer dans leur tre, des forces spcifiques
en quels processus plus simples ce phnomne peut-il se
rsoudre? Bien que le groupe, une fois qu'il existe, paraisse
faire preuve, dans ses efforts pour se maintenir, d'une nergie
vitale etd'uno foreede rsistancequi semblent provenir d'une
source unique, elle n'est cependant que la consquence, ou
mieux la rsuitante do phnomnes, particuliers et varis, de
nature sociale. Ce sont ces phnomnes qu'il faut recher-
cher.

Ce qui pose le plus ordinairement le problme de la per-


manence propre aux groupes sociaux, c'est ce fait qu'ils se
maintiennent identiques eux-mmes, tandis que leurs
membreschangent ou disparaissent. Nous disons que c'est le
mme tat, la mme arme, la mme association qui existe
aujourd'hui et qui existait dj il y a des dizaines et peut-
tre des centaines d'annes cependant, parmi les membres
actuels du groupe, il n'en est pas un qui soit le mme qu'au-
trefois. Nous avons affaire ici l'un de ces cas o ta disposi-
tion des choses dans le temps prsente une remarquable
analogie avec leur disposition dans l'espace. Le fait que les
individus sont & cot les uns des autres, par consquentext-
rieurs les uns aux autres, n'empche pas l'unit sociale de se
constituer l'union spirituelle des hommes triomphe de leur
sparation spatiale. De morne, la sparation temporelle des
gnrations n'empche pas que leur suite ne forme, pour
notre reprsentation, un tout ininterrompu. Chez les ott-es
que l'espace spare, l'unit rsulte des actions et dos ractions
qu'ils cttangent entre eux car l'unit d'uu tout complexe
Me signifie rien autre chose que la cohsion des tments, et
cette cohsion ne peut tre obtenue que par le concours
mutuel des forces en prsence. Mais pour un tout compos
d'lments qui sont spars par !G temps, l'unit peut tre
ne
ralise de cette manire, parce qu'i) n'y a pas entre
eux de
rciprocit d'action; tes plus anciens peuvent bien agir
sur
ceux qui viennent ensuite, mais non ceux-ci sur ceux-l.
C'est pourquoi lu survivance de l'unit sociale
au milieu du
flux perptuel des individus reste un problme & rsoudre.
alors mme que la gense de cotte unit a dj t explique.
Le facteur dont l'ide se prsente le plus immdiatement
l'esprit pour rendre contpte de la continuit des tres collec-
tifs, c'est la permanence du sol sm- !eqnet ils vivent. L'unit,
non pas seulementdo t'j~at, mats de la ville et de bien d'autres
associations, tient d'abord au territoire qui sert de substrat
durable tous les changements que subit t'eneetit de la
socit. A vrai dire, la permanence du lieu ne produit
pas
elle seule la permanence de l'unit sociale; car, quand la
popntation est expulse ou asservie par un peuple conqu-
rant, nous disons que l'tat a change, bleu que le territoire
reste le mme. En outre, l'unit dont il s'agit ici est toute
psychique, et c'est cette unit psychique qui fait vraiment
l'unit territoriale, loin d'eu driver. Cependant, une fois que
celle-ci s'estconstitue, elle devient son tour un soutien pour
la premire et l'aide se maintenir, Mais bien d'autres con-
ditions sont ncessaires. La preuve, c'est que nombre de
groupes n'ont aucun besoin de cette base matrielle. Ce sont
d'abord les petites socits comme la famille qui peuvent
rester sensiblement identiques elles-mmes, tout en chan-
geant de rsidence; mais ce sont aussi les trs grandes,
comme les associations internationales de lettrs, d'artistes
et de savants, ou comme ces socits commercialesqui s'ten-
dent tout l'univers, et qui consistent essentiellement dans
une ngation de tout ce qui attache la vio sociale des loca.
Mts dtermines.
En dfinitive, cette premire condition n'assure gure
que
d'une manire formelle la persistance du groupe travers le
temps. Un facteur incomparablement plus efficace, c'est la
liaison physiologiquedes gnrations, c'est la chane forme
entre tes individus par les relations de parent en gnral.
Sans doute, la communaut du sang ne suffit pas toujours
garantir bien longtemps l'unit de la vie collective; il faut
trs souvent qu'elle soit complte par la communaut de
territoire. L'unit sociale des Juifs, malgr tour unit physio-
logique et confessionnelle, s'est singulirement dtendue
depuis leur dispersion; elle ne s'est plus jamais solidement
renoue que tu o un de leurs groupes est rest fix pendant
assez longtemps sur un mme territoire. Mais, d'un autre
ct, partout o les autres tiens fout dfaut. Je lien physiolo-
gique est )'~<wKm y'M~'M de ):) continuit sociale. Ainsi,
quand ta corporation allemande '~t<<) dgnra et s'aftaihtit
intrieurement, elle se ferma d'autant plus troitetm'nt au
dettors que sa force de cohsion se remettait davantage de l
vint lit r<)e que les fits de mattre, les gendres de mattre,
tes maris de veuve de mattre pourraient seuls tre admis
la mattrise.
Ce qui fait l'efficacit de ce facteur, c'est que les gnrations
ne se remplacent pas d'un seul coup. De cette faott, l'im-
mense majorit des individus qui vivent ensemble un mo-
ment donn existent encore au moment qui suit, et le passage
de t'un l'autre est continu. Les personnes qui changet entre
deux instants voisins, soit qu'ettessortfnt de la socit, soit
qu'elles y entrent, sont toujours en trs petit nombre, com-
pares :t celles qui demeurent. Le fait que l'homme n'est pas,
conxne tes animaux, assujetti une saison d'accouplement,
et que par suite ses enfants peuvent natre en tout temps,
est ici d'une particulire importance, it en rsulte en effet
qu'on ne peut jamais fixer un moment dtermin ou une
gnration nouvelle commence. La sortie des lments
anciens et l'entre des nouveaux s'oprent si progressi-
vement que le groupe fait t'onet d'un tre unique, tout
comme un organisme au mitieu dci'couiemontincessant do
ses atomes. Si cette substitution s'effectuait d'un seul coup,
si une sortie en masse succdait brusquement une entre en
masse, alors on ne serait gure fond dire que le groupe,
malgr la mobilit de ses membres, subsiste dans son unit.
Mais que, chaque moment, les nouveaux venus soient une
infime minorit par rapport ceux qui composaient dj la
socit au moment antrieur, voil ce qui lui permet de res-
ter identique elle-mme, quand m&me.deux poques plus.
loignes, le personnet social serait entirement reuouvet.
Si cette continuit est surtout frappante l ou elle a pour
base la gnration. elle ue laisse pas d'exercer une action trs
sensible dans certains cas ou pourtant cet iotermdiaire
physique mamjue totutement. C'est ce (lui arrive pour te
clerg eatttotique. Lu continuit y rsulte de ce {ait qu'il
reste toujours assez de membres anciens en fonctions pour
initier les nouveaux. L'importance de ce p))nomnesocioto-
giqueestcousidrabte, car c'est ce qui rend si stables, par
exemple, les corps de fonctionnaires; c'est ce qui tour permet
de maintenir invariable. a travers tous les changements indivi-
duels, l'esprit objectif qui fait leur essence. Dans tous ces cas,
le fondement ptiysiotogique de la continuit sociale est
rem-
place par un fondement psychologique. Sans doute, parler
ta rigueur, cette continuit n'existe qu'autant que les
individus ne changent point. Mais, en fait. tes membres qui
composent le groupe a un moment donn y restent toujours un
temps suffisant pour pouvoir faonner leurssuccesseurs leur
image, c'est--dire selon l'esprit et les tendances de lu socit.
C'est ce renouvellement lent et progressifdu groupe qui en
fait t'immortatite. et cette immortalit est un phnomne
sociologique d'une trs haute porte. La conservation de
t'unie collective pondant un temps thoriquement muni
donne t'tre social une valeur qui, cefct'M pHt'~Ms. est inn-
niment suprieure celle de chaque individu. La vie indivi-
duelle est tout entire organise pour finir dans un temps
donn, et, dans une certaine mesure, chaque individu com-
mence tui-meme, a nouveaux frais, sa propre existence. La
socit, au contraire, M'est pas enferme f< priori dans une
dure limite elle semble institue pour l'ternit, et c'est
pourquoi elle arrive totaliser des conqutes, des forces, des
expriences qui Ftvent bien au-dessus des existences par-
ticulires et de leurs perptuels recommencements. C'est l
ce qui fit ta force des corporations urbaines de l'Angleterre,
depuis le moyen ge. Ds cette poque, dit Stubbs, elles
avaient le droit < de perptuer leur existence en combtant,
au fur et mesure, les vacances qui se produisaient dans
leur sein Sans doute, tes anciens privilges ne visaient
que tes bourgeois et leurs hritiers. Mais, en fait, ce principe
fut appliqu comme confrant le droit d'adopter des mem-
bres nouveaux. C'est pourquoi, quel que fut le sort de ses
membres et de leurs descendants proprement dits, la corpo-
ration, en tant que telle, se conservaittoujours <H <H~ro.
Toutefois ce rsultat n'est obtenu que par t'enacenx'nt de
l'individu son rle personnel est eu effet rejet au second
ptau par les fonctions qu'il remplit comme reprsentant et
continuateur du groupe. Car h socit court d'autant plus de
risques qu'ai )o dpend davantage de l'phmreindividualit
de ses membres. Inversement, ptus l'individu est un tre
impersonnel et anonyme, plus aussi il est apte prendre tout
uniment ta piacc d'un autre et assurer ainsi la conservation
ininterrompue de la personnalit collective. C'est ce prcieux
privilge qui, dans la guerre des deux Roses, permit aux
Communes d'abaisser la suprmatie de !a Chambre haute.
En effet, une bataille qui supprimait ia moiti de ia noblesse
du pays enlevait aussi la Chambre des iords ia moiti do sa
puissance, parce que celle-ci tait tie au sort d'un certain
nombre de personnalits particulires. Au contraire, les
Communes taient soustraites cette cause d'aitaibtissement
comme elles jouissaient d'une sorte d'immortalit grce au
nivellement de tours membres, elles devaient finir par s'em-
parer du pouvoir. Cette mme circonstance donne aux
groupes un avantage dans les luttes qu'ils soutiennent avec
les particuliers. On a pu dire de la Compagnie des Indes que,
pour fonder sa domination sur les indignes, elle n'avait pas
employ d'autres moyens que le Grand Mogot. Seulement
die eut cette supriorit sur les autres conqurants de l'Inde
qu'ette ne pouvait jamais tre assassine.

Il

Ce qui prcde explique pourquoi, dans tes cas contraires,


c'e8t-a-dire'.quand la vie sociale se trouve tre intimement
lie cette d'un individu, directeur et dominateur du groupe,
des institutions trs spciales sont indispensables pour qu'il
puisse se maintenir. Quels dangers cette forme sociotogiquo
peut faire courir a la conservation des socits, l'histoire de
tous les interrgnes est l pour nous l'apprendre. Mais ces
prils sont naturellement d'autant ptus grands que le souve-
rain concentre plus compltement entre ses mains les fonc-
tions par lesquelles se recre chaque instant l'unit collec-
tive. C'est pourquoi il peut tre assez indiirent que l'exercice
du pouvoir soit un instant suspendu ta o la domination
du prince n'est que nominale, o it rgne, mais ne gouverne
pus; au contraire, un tat d'abeilles tombe dans une anar-
chie complte ds qu'on t'a priv de sa reine. Sans doute, ou
ne doit pas se reprsenter cotte royaut sous la forme d'un
gouvernement humain, puisqu'il n'eu mane pas d'ordres. a
proprement parier. Cependant, c'est ia reine qui est le centre
de l'activit de h) ruche; car, se tenant par ses antennes en
communication perptue) ie avec les travailleuses, elle est au
courant de tout ce qui se passe dans son royaume, et c'est ce
qui permet la socit de prendre conscience do son unitf.
Mais aussi ce sentiment s'vanouit des que cet organe cen-
tral, grce auquel il s'labore, a disparu.
L'inconvnient du cette concentrationn'est pas seulement
de subordonner ia conservation du groupe l'existence con-
tiugente d'un individu; !e caractre personne! que prend
alors le pouvoir peut, par lui-mme, devenir un danger. Par
exemple, si ta socit merovingienue maintint intactes,
bien des fgards. tes vieilles institutions romaines, cependant,
sur un point essentiel, elle innova la puissance publique
devint chose personnelle, transmissible et partageable. Or ce
principe, sur lequel se fondait le pouvoir du roi, se tourna
contre lui car les grands, qui contribuaient lu constitution
de l'empire, rclamrent eux aussi une part porsonneUe de
domination.
Les socits politiques ont essay de conjurer ces diffrents
dangers, surtout ceux qui rsultent des interrgnes, en pro-
clamant te principe que le roi ne meurt pas. Tandis qu'aux
premiers temps du moyen ge la paix du roi mourait avec
!f roi. grce a ce principe nouveau, lit tendance du groupe .'<
persvrerdans son tre prit corps. En effet, une ide, trs
importanteau point de vue sociologique, y est implique, c'est
que le roi n'est pas roi en tant qu'individu. Au contraire, sa
personnalit est par elle-mme indiuerente. Elle n'a plus df
valeur que comme incarnation de la royaut abstraite,.imp('-
rissable comme le groupe mme dont elle est ta tte. Celui-ci
projette son immortalit sur le prince, qui en revanche ta
renforce par cela mme qu'il la symbolise.
Le procd le plus simple pour exprimer la permanence du
groupe parcelle du pouvoir, c'est la transmission hrditaire
de la dignit suprme. La continuit physiologique de ta
famille souveraine renchit alors celle de la socit. Celle-ci
trouve son expression, aussi adquate que possible, dans cette
toi qui fait succder au pre le Ois dsign depuis longtemps
pour le trne et toujours prt l'occuper. En tant qu'il se
transmet hrditairement, le gouvernement est indpendant
des qualits personnoiies du prince or, c'est le signe que la
cohsion sociale est devenue une ralit objective, pourvue
d'une consistance et d'une dure propres, et qui n'est plus
subordonne tous les hasards des existences individuelles.
Ce qu'on a justement trouv d'absurde et de nuisible dans le
principe de l'hrdit, savoir ce formalisme qui permet
d'appeler au pouvoir aussi bien le moins capable que le plus
mritant, cela mme a un sens profond car c'est la preuve
que la forme du groupement, que le rapport entre gouver-
nants et gouverns s'est nx et objective. Tant que la consti-
tution du groupe est incertaine et vacillante, les fonctions
directricesexigent des qualits personnelles trs dtermines.
Ainsi, le roi grec des temps hroques ne devait pas seulement
tre brave, sage et loquent; il fallait encore qu'il fut un
athlte distingu et mme, dans ia mesure du possible, excet-
lent laboureur, charpentier et constructeur de vaisseaux.
D'une manire gnrale, l o l'association est encoreinstaMe,
elle veille, comme c'est son intrt, ce que le pouvoir ne
soit donn qu'aprs une lutte et une concurrence entre les
individus. Mais l o ia forme de l'organisation sociale est
dj solide et dfinitive, alors les considrations personnelles
deviennent secondaires. C'est le maintien de cette forme
abstraite qui importe, et le meiHeur gouvernement est celui
qui exprime le mieux la continuit et l'ternit du groupe
ainsi constitu. Or c'est le gouvernement hrditaire, car il
n'en est pas qui ralise plus compltement le principe d'aprs
lequel le roi ne meurt pas.

Ht

Un autre moyen pour l'unit sociale de s'objectiver est de


s'incorporer dans des objets impersonnels qui la symbolisent.
Le rle de ces symboles est surtout considrable quand, outre
leur sens figur, ils possdent encore une valeur intrinsque,
qui leur permet de servir, en quelque sorte, de centre de rallie-
mcnt aux intrts matrieis des individus. Dans ce cas, il
importe tout particulirement la conservation du groupe de
soustraire ce bien commua toute cause de destruction,
peu prs comme on soustrait le pouvoir personne! aux acci.
dentsde personnes en proclamant l'immortalit du prince. Le
moyen le pius frquemment employ dans ce but c'est la
mainmorte, ce systme d'aprs lequel les biens de l'associa-
tion, qui, en tant que tels, doivent tre ternels, sont dclars
inaiinabies. De mme que la nature phmre de l'individu
se reflte dans le caractre prissable de sa fortune, la pren-
nit du groupe correspond l'inalinabilit du patrimoine col-
lectif. En particulier, le domaine des corporations ecclsias-
tiques ressembla longtemps la caverne du lion on tout peut
entrer, mais d'o rien ne sort. L'ternit de leurs biens symbo-
lisait l'ternitdu principe qui faisait leur unit. Ajoutez cela
que les biens de mainmorte consistaient essoutietiement en
biens fonciers. Or, contrairementaux meubles et, en particu-
lier, l'argent,lesbiens en terre jouissentd'unestabilit,d'une
perptuit qui en faisait la matire dsigne de la mainmorte.
En mme temps, grce leur situation dtermine dans
l'espace, ils servaient comme de point fixe autour duquel gra-
vitaient tous leurs copropritaires, tant par dvouement la
chose commune que parsoucideleursintrts bien entendus.
C'est ainsi que la mainmorte n'tait pas seulementune source
d'avantages matriels; c'tait encore un procd gnial pour
consolider l'unit collectiveet en assurer la conservation.
Cette objectivit que la mainmorte et le ftdicommis
donnent aux biens collectifs en les soustrayant l'arbitraire
des individus, les associations modernes essaient de la raliser
par d'autres moyens, mais qui tendent au mme but. Ainsi,
nombre d'entre elles lient leurs membres en tablissant que,
s'ils se retirent de l'association, ils ne pourront recouvrer ce
qu'ils auraient vers la caisse commune. C'est la prouve que
la sphre des intrts sociaux s'est constitue en dehors de
celle o se meuvent les individus, quele groupe vit d'une vie
propre, qu'il s'approprie dfinitivement les lments qu'il a
une fois reus et rompt tous les liens par lesquels ils se rat-
tachaient des propritaires individuels. Dsormais, 11 ne
peut pas plus les rendre ces derniers qu'un organisme ne
peut restituer les aliments, qu'il s'est une fois assimils, aux
tres qui les lui ont fournis. Ce mo<<)M ~'of~fK<<t ne favorise
pas seulement par ses rsultats directs l'auto-conservation
de la socit, mais il y aide aussi et surtout en faisant vivre
dans l'esprit de chacun de ses membres l'ide d'une unit
sociale, suprieure aux particuliers et indpendante des
caprices individuels.
Cette mmo technique sociologique se retrouve, mais encore
reuforce, dans une autre rgle adopte par certaines associa-
tions eu cas da dissolution, elles s'interdisent de partagerla
fortune commune entre leurs membres, mais la lguent
quelque socit qui poursuit un but analogue. De cette
manire, ce n'est plus seulement l'existence physique du
groupe qui se maintient, c'est son ide, qui se rincarne dans
le groupe hritier et dont la continuit est garantie et, pour
ainsi dire, manifeste par cette transmission des biens. C'est
particulirement sensible dans un assez grand nombred'asso-
ciations de travaiHeursqui se formrent eu Franco lors de la
rvolution de 1848. Dans leurs statuts, le principe on vertu
duquel le partage est dfendu reut une extension nouvelle.
Les associations d'un mme mtier formaient entre elles un
syndicat auquel chacune lguait ventuellement ce fonds
qu'elles ne pouvaient pas partager. Ainsi se constituait un
nouveau fonds social of) les contributions des socits particu-
lires venaient se fondre en une unit objective d'un genre
nouveau, comme les contributionsdes individus taient venues
se perdre dans le fonds particulierde chaque association. Par
l, l'ide qui tait i'me de ces groupes lmentaires se trou-
vait comme sublime. Le syndicat donnait un corps et une
substance ces intrts sociaux qui, jusque'ta, n'avaient eu
de ralit que dans ces associations plus restreintes; le prin-
cipe sur lequel elles reposaient tait iov une hauteur o,
si des forces perturbatrices ne s'taient rencontres, il se
serait maintenu invariable, au-dessus de toutes les fluctua-
tions qui pouvaientsurvenir dans les personnes comme dans
les choses.

!V

Nous avons considr les cas o les formes sociales, pour se


maintenir, se solidarisent soit avec une personne, soit avec
une chose. Voyonsmaintenant ce qui arrive quand elles s'ap-
puient sur un organe form par une pluralit de personnes.
Dans ce cas, l'unit du groupe s'objectiveelle-mme dans un
groupe c'est ainsi que la communaut religieuse s'incarne
dans le cterg la socit politique, dans l'administrationou
dans l'anne selon qu'it s'agit de sa vie intrieure ou de ses
relations avec le dehors' )'arme, son tour, dans le corps
des officiers, toute association durable dans son comit, toute
runion passagre dans son bureau, tout parti politique dans
sa reprsentation parlementaire.
La constitution de ces organes est le rsultat d'une division
du travail sociologique. Les rotations inter-individuettes.qui
sont la trame de la vie sociale et dont ta forme spciale dter-
mine le caractre du groupe, s'exercent primitivement sans
intermdiaire, de particulier a particulier. L'unit d'action
se dgage alors de dbats directs entre tes agents et d'une
mutuelle adaptation dsintrts; t'unit religieuse, du besoin
qui pousse chacun communierduns une croyance; l'organi-
sation militaire, de l'intrt qu'a tout homme valide soit se
dfendre, soit attaquer; ta justice publique, des sentences
immdiates de la foule assemble; ln subordination politique.
de ta supriorit personnelle d'uu Individu sur ses associes:
l'harmonie conomique, des changesdirects entre produc-
teurs'. Mais bientt, ces fonctions, au lieu d'tre exerces par
tes intressseux-memes,deviennent l'office propre dgroupes
spciaux et dtermines.Chaque individu, au lieu d'agir direc-
tement sur tes autres, entre en relations immdiates avec ces
organes nouvellement formes. En d'autrestermes, tandis que,
l ou ces organes ne se sont pas forms, tes lments indivi-
duels ont seuls une existence substantielle et ne peuvent se
combiner que suivant des rapports purement fonctionnels,
leur combinaison, en s'organisant ainsi, acquiert une exis-
tence .<)' ~H~'M elle est dsormais indpendante, non pas
seulement des membres du groupe auxquels cette organisa-
tion s'applique, mais encore des personnalits particulires
qui ont pour tache de la reprsenter et d'en assurer le fonc-
tionnement. Ainsi, la classe des commerants, une fois consti-
tue, est une ralit autonome qui, en dpit de la mobilit des
individus, remplit d'une manire uniforme son rle d'inter-
mdiaire entre tes producteurs. Le corps des fonctionnaires
apparat plus clairement encore comme une sorte de moule

~)t J'' tt~-eux )'.< xtThmer <)ue cet ~tat. )<: p)u~ situ)))*' tt))ji')Me<ttfnt,<tit
t'tf rM)<t)Mntpat-tout tt- point ttf dpart hhtm'ittUM '<<! toat tiMVet~exMot
ti'K-iut uHt'rieur. Mais, pour uetenniner m ')ui ''t-t dt jt la eoMtitntio))
tt'rf{)mt-s mctau): <tifr<Sr<n''iM. i) faut Mj.pMO)' cet t'tat anMriear.
ne ft-it
tju'ttnt- fft-tit-n. Ht. dans bien tles cai!. c'e~t uno t~atitc.
objectifo los individus ne font que passer et qui rduit assez
souvent a rien leur personnalit. De mme, i'tat se charge de
faire collectivement les sacrifices pcuniaires que les dif-
rentes parties de lu socit exigent les unes des autres et,
inversement,par l'intermdiaire d'agents spciaux, il astreint
les unes et les autres aux mmesobligations fiscales. De mme
encore, l'glise est un organisme impersonnel dont les fonc-
tions sont exerces par les prtres, sans tre cres par eux.
En un mot, l'idequ'on a crue fausse desotres vivants, savoir
que iesinter-actionsde molculesmatrielles, dont l'ensemble
constitue la vie, ont pour support un principe vital distinct,
cette ide est expressment vraie des tres sociaux. Ce qui,
l'origine, consistait simplementenchanges inter-individueis,
se faonne la longue des organes spciaux qui, en un sens,
existent par eux-mmes. Us reprsentent ies ides et les forces
qui maintiennentle groupe dans telle ou telle forme dtermi-
ne et, par une sorte de condensation, ils font passer cette
forme de l'tat purement fonctionnel celui de ralit subs-
tantielle.
C'est un des faits les plus caractristiques de l'humanit et
des plus profondment invtrs dans notre nature que cette
facult qu'ont les individus comme les groupes de tirer
des forces nouvelles de closes qui tiennent d'eux-mmes
toute leur nergie. Les forces vitales du sujet prennent
souvent ce dtour pour mieux servir sa conservation et
son dveloppement elles se construisent un objet fictif d'o
elles reviennent, en quelque sorte, sur io sujet d'o elles
manent. C'est ainsi que, dans certaines guerres, on voit un
des belligrants contracter une alliance, mais en prtant au
pralable son alli les forces avec lesquelles il en sera
secouru. Qu'on se rappelle ces dieux que les hommes ont
crs en sublimant les qualits qu'ils trouvaient en eux-
mmes, et dont ils attendentensuite et une morale et la force
de la pratiquer Qu'on se rappelle ces paysages dans lesquels
nous projetons nos tats d'me de toute sorte, pour en
recevoir un peu aprs des consolations et des encoura-
gements Combien de fois encore des amis, des femmes ne
nous paraissent-ils pas singulirement riches de sentiments
et d'ides, jusqu'au moment o nous nous apercevons que
toute cette richesse morale vient de nous et n'est qu'un reflet
do la ntre 1 Si nous nous dupons de la sorte, ce n'est sure*
ment pas sans raison. Beaucoup des forces de notre tre ont
besoin de se projeter, de se mtamorphoser, de s'objectiver
ainsi pour produire leur Mt~t'Mxw d'ellet; il faut
les placions une certaine distance de que nous
nous pour qu'elles
agissent sur nous avec leur plus grande force, et l'illusion o&
nous sommes sur leur origine a justement pour utilit de no
pas troubler leur action. Or les organes diffrencis que cre
la socit sont souvent des produits de
ce genre. Les nergies
collectives s'y trouvent concentres sous
une forme spciale
qui, en vertu de ses caractres propres, rsiste
dans son ensemble si l'intrt social l'exige, des au groupe
forces wt
generis semblent s'en dgager, qui ne sont pourtant qu'une
transformation de ces forces lmentaires
sur lesquelles elles
ragissent.
Quelle est l'importance de ces organes
pour la conservation
des groupes ? C'est ce qu'un exemple
va montrer. La dca-
dence des anciennes corporations de l'Allemagne vint
tie de ce qu'elles ne surent pas se constituer d'organes. en par-
Eties
resteront identiques la somme de leurs membres elles
ne
parvinrent pas lever au-dessus des individus organi-
une
sation objective en qui s'incarnt l'unie sociale. Elles avaient
bien des reprsentants, munis do pouvoirs spciaux, mois
qui avaient un caractre trop troitement individuel c'taient
simplement des personnes sures qui l'on confiait )es fone.
tions les plus indispensables l'existence
commune. Sans
doute, il arriva c et lir que ces dlgations transformrent
se
plus tard eu organes permanents de la vie publique mais,
a l'origine, cette transformation n'eut
pas lieu. L'unit du
groupe resta sous la dpendance immdiate des inter-actions
individueiies elle ne se condensa ni
en un t:tat dont l'ide
aurait plan au-dessus des gnrations appeles successive.
ment le reprsenter, ni en organes particuliers qui. chargs
de fonctions dtermines, en auraient, du moins, dbarrass
l'ensemble des travailleurs. Or, les dangers qui rsultent de
cette situation peuvent tre classs sous trois chefs
t" L of) il y a des
organes diffrencis, le corps social est
plus mobile. Tant que, pour chaque
mesure politique.
juridique, administrative, il doit tout entier
se mettre
en branle, son actiou pche par la lourdeur, et cela dou-
blement. 1)'abord, en un sens tout matriel. En enet.
pour
que le groupe entier puisse agir collectivement, il faut, avant
tout, qu'il soit assembl et la difncult, parfois mme l'im-
posstbiiit d'un rassembiement total empchemille dcisions
ou en diffre d'autres jusqu'au moment ou il est trop tard.
Mais supposons leve cette difficult extrieure de la concen-
tration physique, alors se dresse celle de la concentration
monde. Comment arriver, dans une masse si considrable,
l'unanimit? Quand uuo foule se meut, ses mouvements sont
alourdis par toute sorte d'hsitations, de considrationsqui
tiennent soit la divergence dos intrts particuliers, soit
l'indiffrence des individus. Au contraire, un organe social
peut s'affranchir de tous ces <mp<'<MM'K<. parce qu'il est fait
pour un but dfini et qu'il est compos d'un nombre de per-
sonnes relativement restreint, et ainsi il contribue la con-
servation du groupe en rendant l'action sociale plus prcise
et plus rapide.
C'est ces difticults que doit tre attribue l'inaptitude de
la foule agir dans les cas on, pourtant, l'action n'exige ni
connaissances ni qualits spciales. Par exemple, un rgle-
ment d'administration, rendu vers la fin du xv. sicle pour
le cercle de Durkheim, parle d'affaires a trop nombreuses et
trop compliques pour pouvoir tre traites par la commune
tout entire; huit personnes capables avaient alors t choi-
sies dans le sein de la commune et charges d'agir en ses lieu
et place Ainsi, dans un grand nombre de circonstances,
l'intrt qu'il y a faire reprsenter une multitude par une
minorit vient tout entier de ce qu'un groupe plus restreint,
simplement parce qu'il est plus restreint et indpendamment
de toute supriorit qualitative, a plus de libert dans ses
mouvements, plus de facilit pour se runir, plus de prci-
sion dans ses actes.
La mme cause peut ralentir les relations conomiques
quoique, dans ce cas, le groupe n'ait pas besoin de se runir
en corps pour agir. Tant que l'achat et la vente ont lieu direc-
tement entre producteurs et consommateurs, les changes
sont considrablement gns par cette ncessit o sont les
individus de se rencontrer en un mme lieu. Mais une fois
que le commerant commence jouer son rote d'interm-
diaire. une fois surtout que la classe des commerants, syst-
matisant l'change, met les intrts conomiques en contact
d'une manire continue, la cohsion sociale devient beaucoup
plus forte. L'organe nouveau, qui s'intercale ainsi entre les
lments primaires du groupe, est. comme ia mer eutre deux
pays, principe d'union, non de sparation:car, par ta manire
dont elle agit, la classe des commerants met chacun plus
troitement en rapports avec tous. De plus,
en durant, cette
activit donne naissance un systme de fonctions rgulires
qui se balancent burmonlquement,sorte de forme abstraite
qui enveloppe les faits particuliers de consommation
et
de production, mais les dpasse, comme t'tat dpasse les
citoyens et l'glise les croyants. L'a cadre est ainsi constitu
danstequet les relations conomiques se dveloppent et qui
est susceptible d'une extension presque indfinie et la
manire dout ces relations se multiplient, jointe a la persis-
tance de cette organisation mesure que le mouvement
conomique s'acclre, prouve assez combien
ces organes
spciaux importent a la dure de l'unit collective et combien
sont insuffisantes, dans ce but, des inter-actions purement
individuelles.
En second Heu. dans tous les cas ou la totalit du
groupe
doit se mettre en mouvement pour chaque (tu sociale parti.
cutire. sans qu'aucune de ses parties soit encore diffrencie, i
des tiraillements intrieurs ne peuvent manquer de
se pro-
duire, car, comme tous les lments ont a pnoW la mme
valeur et la mme influence, tout moyen de dcider entre
eux
fait dfaut. Cet tat se trouve ralis d'une manire tout fait
typique dans ces socits o la majorit elle-mme n'a pas
le pouvoir d'imposer ses volonts, o chaque opposant le
a
droit ou d'empcher par son n'fo toute rsolution commune
d'une faon gnrate ou de ne pas s'y soumettre personnelle-
ment. A ce pril qui menace jusqu' l'unit intrieure du
groupe, la cration d'orgaues spciaux remdie, pour le
moins, de deux manires. D'abord, un corps de fonction-
)
naires, une commission aura plus de connaissances spciales <
que ta foule et, par ce moyen dj, les frottements et tes con-
flits qui rsultent simplement de l'incomptence seront
attnus. L'action est toujours plus une quand une connais-
sanee objective de la situation ne laisse pas de place aux
hsitations de l'agent. Mais un autre avantage, li pourtant
au premier, est moins ais dcouvrir. Si une insufflsante
objectivitempchesouvent la multitude d'agir avec ensemble
(car les erreurs subjectives sont en nombre infini, tandis
que la vrit, tant une, ne peut tre l'objet d'opinions diver-
gentes), lacause n'en estpas toujoursla pureet simpte incom-
ptence. Un autre facteur, fort important, peut intervenir. La
division des partis, qui se fait d'abord sur un petit nombre de
questions essentielles, s'tend ensuite d'autres qui sont sans
liens avec les prcdentes, et l'accord des esprits devient
impossible eu principe. Ainsi, les partis politiques forment
propos des questions religieuses, esthtiques, etc., des camps
opposs, quaud mme leur opposition sur ce terrain serai
sans rapport avec l'objet de leur opposition premire. Les
luttes des partis ont donc pour consquence un monstrueux
gaspillage de forces qui cesse ds que, au lieu d'abandonner
toutes les questions aux discussions confuses de la foule, on
les fait rsoudre, toutes les fois qu'elles s'y prtent, par des
organes particuliers.
3" Hnfin, un troisime avantage de cette organisation con-
siste dans la meilleure direction qu'elle donne aux forces
collectives.
En eiet, les foules, dans leurs manires d'agir, ne peuvent
jamais s'lever au-dessus d'un niveau intellectuel assez bas,
car le point o se rencontrent un grand nombre d'esprits ne
saurait tre situ trs au-dessus de celui o s'arrtent les
plus mdiocres. Qui peut le plus peut te moins, dit-on mais
la rciproque n'est pas vraie, et c'est pourquoi ce sont tes
lments tes plus intrieurs, et non les plus levs, qui
donnent le ton l'ensemble. Cette rgle, il est vrai, ne s'ap-
plique pas ce qui concerne l'intensit de la vie afec-
tive car, dans une foute assemble, il se produit comme
une nervosit collective, une surexcitation mutuelle des indi-
vidus qui peut momentanment lever la passion commune
au-dessus de l'intensit moyenne des passions individuelles.
Mais les sentiments ainsi renforcs sont-ils ou non adapts
telle fin, sont-ils sages ou fous? C'est une tout autre question.
Le caractre plus ou moins intelligent des dcisions prises
ainsi ne peut pas dpasser une moyenne o les mieux dous
viennent rejoindre les moins capables. La runion des indi-
vidus peut bien accroltre les puissances du sentiment et du
vouloir, non celles de l'entendement. Sans doute, quand la
socit, pour se maintenir, n'a besoin que des actions et
ractions directement changes entre individus, il sunit que
chaque intelligence particulire donne tout ce qu'elle peut
donner. Mais il en va tout autrement quand te groupe doit
agir comme unit. L, c'tait d'un mouvement molculaire,
ici, c'est d'un mouvement en masse qu'il s'agit dans te
premier cas, il n'tait ni possible ni dsirable que les indi-
vidus se fissent reprsenter dans le second, cette reprsen-
tation devient possible et ncessaire.Quand un groupe tendu
veut conduire iui-meme et directement ses affaires, il est
indispensable que chacun de ses membres comprenne et
approuve, dans une certaine mesure, tes rgles d'action qu'U
suit elles sont donc condamnes une sorte de trivialit.
C'est seulement lorsque tes questions sont laisses
une
organisation compose d'un nombre restreint do personnes,
que ie talent peut se donner carrire. A mettre les choses au
mieux, comme tes aptitudes spciales et tes comptences ne
sont jamais communes qu' uue minorit, quand elles se
produisent au sein d'une assemble un peu vaste, it leur faut
conqurir do haute lutte une influence qui leur est accorde
sans conteste dans un organe difrenci
Ces inconvnients runis n'ont pas seulement
pour rsultat
de livrer une socit, dpourvue d'organes dinrencis,
aux
causes de dissolution que toute structure sociale porte en
ette-mcme; ils la mettent aussi en tat d'infriorit toutes les
fois qu'elle entre en lutte contre de puissantes individualits.
C'est co qui perdit ces vieilles corporations allemandes dont
nous parlions tout a l'heure elles furent incapables de tenir
tte ces pouvoirs personnels qui, pendant ou aprs le
moyen a):e, se constiturent soit au centre du pays soit sur
des points secondaires. Elles prirent parce qu'il leurmanqua
ce que seules des forces individuelles, constitues l'tat
d'organes sociaux, peuvent assurer une socit, je veux dire
la rapidit des dcisions, la concentration absolue de toutes
tes puissances de l'esprit, et cette intelligence suprieure
dont tes individus sont seuls capables, que ce soit l'ambition
qui tes pousse ou le sentiment de leur responsabilit.
Toutefois, it importe galement la conservation du groupe
que ces organes ne se spcialisent pas au point de parvenir
une absolue autonomie. Il faut qu'on sente toujours avec
force, au moins d'une manire sourde, ce qu'ils sont vrita-
blement; savoir, qu'ils ne reprsentent en dfinitive que dos
abstractions ralises, que tes inter-actions individuelles en

(tt Sans dnutc. )'-s t'hu~ n'' pa'!<n( ))M< )o))j'))tt< <tin<i. nttns an
<'W))<! f)<- f"t)'-)h'nnait-<. )a ja)"nsi.; <'<)).-' .<.n\)'~ )Ht tutt'Ht t')M<)Ut'n<'<'
(lui dft'ruit lui f~t-ttit-. tuM'ti~ fj)t'ut)M fou)' r"W)n<:tmt t tout jt)f:ftu<'nt
pM')t)H'). suh't-it )t)i''))<t')tt Mn tot-nt'tt)' <)'' f{.'ni< nf~t in<!vit)tbt<; qu'un''
s'-it'xH' at)!.tt'.)it' <-)))<)))' lit !.ut'i<t)t)~i. x'; )tMi" )t<t!i puiser lu
ptuxiM d)' f<tit.< h~tontjtx'i!. Qm'Uu ))u<' -ixit lit f'~titM <)<'< )ux (ju'xtjeeut))-
t'ttt-
)')it. f<< <!n!nt'n)''nt.< t-f)n<-n:ts i)t))))i<)m'nt))t tuojoxM <)<'< !nex d'ttutn's
(-M~<< <)<)))t t'int)uc(t'-c pt'ut, dans t'ftret lutal, ')i~it)tu)ft' raction d)' la
))r<')))i'r<
sont tout le contenu concret, qu'Ils sont simplement lu (orme
sous laquelle se sont pratiquement organises ces forces te-
meutaires, au cours de leur dvetoppement.Tout ce qu'ils
expriment, c'est la manire dont les units primaires du
groupe mettent en ouvre leurs nergies latentes, quand elles
atteignent leur plus grande puissance d'action. Si donc, en
se diffrenciant, ils se dtachent de l'ensemble, leur action,
de conservatrice, devient destructive.
Deux raisons principales peuvent dterminer cette trans-
formation. D'abord, si l'organe dveloppe avec excs sa vie
personnelle, s'il s'attache moins si l'intrt social qu'au sieu
propre, ses ettorts pour se conserver entreront natureiiement
en conflit avec ceux de la socit. La bureaucratie nous offre
do cet antagonisme un exemple, relativement inutfensif, mais
significatif. Les bureaux, ces organes ncessaires de toute
administration un peu tendue, forment par eux-mmes un
systme qui entre souvent en collision avec les besoins
variables de la vie sociale, et cela pour plusieurs raisons.
D'abord, la comptence des bureaux ne peut s'tendre la
complexit de tous les cas individuets, mme de ceux qui sont
de leur ressort. Ensuite, entre le temps employ il mettre en
branle la machine bureaucratique et le caractre urgent des
mesures a prendre, il y a souvent une criante disproportion.
Si donc un organe, qui fonctionne si lourdemeut, en vient,
de plus, oublier son rote d'organe et se pose comme une fin
en soi, alors il n'y a plus seulement diffrence, mais opposi-
tion directe entre ses intrts et ceux de ta socit. La partie
ne peut plus se maintenir qu'aux dpens du tout, et rcipro.
quement. On pourrait comparer sur ce point la forme bureau-
cratique aux formes logiques de l'entendement. Ceites-ci sont
la connaissance du ret ce que cette-ta est si l'administra-
tion de t'Htat; c'est un instrument destin a organiser les
donnes de l'exprience, mais qui, prcisment, n'en peut ctre
spar sans perdre tout sens et toute raison d'tre. Quand la
logique, perdant le contact avec la matire des faits dont
elle n'est que l'expression schmatique, prtend tirer d'elle-
meme une science qui se suffise, le monde qu'elleconstruit et
le monde rct se contredisent ncessairement.Par elle-mme,
elle est seulement un moyen pour arriver la connaissance
des choses; si donc, oubliant son rote de moyen, elle veut
s'riger en un systme complet de la connaissance, ettc devient
UH obstacle aux progrs de la science, comme la bureau.
cratie, quand elle perd de vue sa vritable fonction, devient
une gne pour la socit dontetie est l'organe.
Le droit lui-mme n'chappe pas toujours cette excessive
cristallisation. Primitivement, il n'est rien de plus que la
forme des inter.actions individuelles; il exprime ce qu'elles
sont tenues d'tre pour que le lien social puisse se maintenir.
A lui seul, il ne suffit nullement assurer ia vie et,
encore
moins, le progrs de la socit; mais il est le minimum indis-
pensable il la conservation du groupe. Il rsulte d'une orga-
Nisation a deux degrs. D'abord, des actes que les individus
rctamcut les uns des autres et qu'ils accotnpiissent relle-
ment, au moins ia plupart du temps, se dgage ie prcepte
juridique, forme abstraite de la conduite, qui en devient, dans
t'aveotr, la norme rgulatrice. Muis ce premier organe, tout
idal en quelque sorte, a besoin, pour pouvoir rsister aux
forcesqui t'assaiiient, de se comploter par un autre, plus con-
cret et plus matriel. Des raisons purement techniques
mettent Ou cet tat d'homognit primitive o c'tait soit
le p<w<7M soit ia foula assemble qui disaient le droit;
ds lors, il devient ncessaire qu'une classe se constitue pour
imposer ces normes aux relations individuelles. Mats si utile,
si indispensable mme que soit cette double organisation,elle
expose les socits un grave danger la fixit d'un tel sys-
tme peut se trouver en opposition avec la complexit crois-
sante des rapports individuels et avec les besoins plus mo-
biles de la socit. Tant par sa cohsion interne que par le
prestige de ceux qui l'appliquent, le Droit acquiert plus que la
juste indpendance qui est conforme sa fin par un vritable
cercle vicieux, il s'arroge tui-mme je ne sais quel droit
rester tel que), envers et contre tout. Or il peut se faire qu'au
mme moment la socit, pour se maintenir, ait besoin que le
droit varie; c'est alors que naissent ces situations fausses dont
les formules connues ~'<f /<, pereat MK(/<M, ou ~MMMm
~tM, iWMMM t'M/'tn-M sont l'expression. C'est
pour assurer au
droit la plasticit indispensablea son rle d'organe,qu'on laisse
au juge une sorte de marge dans l'interprtation et l'applica-
tion des lois; et c'est la limite de cette marge que trouvent
se
les cas o il faut rsolument choisir entre le salut du droit et
celui de i'Htat. Nous n'en rappelons ici l'existence que pour
montrer, par un nouvel exemple, comment un organe social,
en s'immobilisantdans son autonomie, en se considrant lui-
mme comme un tout, peut devenir un danger pour le tout.
Qu'il s'agissede la bureaucratie ou du formalismejuridique,
cette transformationd'un moyen en fin est d'autant plus dan-
gereuse que le moyen est, d'aprs les appareuces, plus utile
la socit. La situation sociale des militaires nous eu offre un
exemple. Institue pour des fonctiousspciaies,t'arme, pour
des raisons techniques, doit former un organisme aussi ind-
pendant que possible. Pour obtenir de ses membres les qua-
lits qu'elle rclame et, principalement, une troite solida-
rit, il faut qu'elle tes spare radicaiemeut de toutes tes autres
classes c'est quoi servent et l'uniforme et l'honueurspcial
au corps des officiers. Or, quoique cette indpendance soit
exige par l'intrt gnerai, elle peut devenir tellement abso-
lue et exclusive que l'arme finit par constituer un tat dans
l'tat, dtach du reste de la nation, sans contact, par cons-
quent, avec la source dernire de sa force. C'est ce pril que
l'on cherche conjurer aujourd'hui par l'institutiond'armes
nationales; le service temporairede tous les citoyens est cer-
tainement un bon moyen pour obliger l'arme se renfermer
dans son rle d'organe.
Mais pour viter les antagonismes possibles entre le groupe
et ses organes, il ne suffit pas do ne laisser ces derniers
qu'une indpendance limite; il faut encore qu'en cas de
ncessit ils puissent rtrocder l'ensemble la fonction
qu'ils en ont, en quelque sorte, dtache.
L'volution des socits a ceci de particulier que leur con-
servation exige parfois la rgression momentane d'organes
dj diffrencis. Cette rgression, toutefois, diffre de celle
que subissent les organes des tres vivants la suite de chan-
gements dans leurs conditions d'existence, comme l'atrophie
des yeux chez les animaux qui restent longtemps dans des
lieux obscurs. En effet, dans des cas de ce genre, c'est l'inu-
tilit de la fonction qui entrane la disparition progressive de
l'organe; au contraire, dans le cas des socits, c'est parce
que la fonction est ncessaire et l'organe insuffisant qu'il faut
revenir aux actions et ractions immdiatement changes
entre les individus. Parfois mme, ta socit est, ds l'origine,
constitue de manire ce que la mme fonction soit alterna-
tivement exerce par les lments primaires et par l'organe
diffrencie. Telles sont les socits d'actionnaires dans les-
quelles la partietechnique des affaires est remise des direc-
teurs, que l'assemble gnrale a pourtant le droit de dposer
et auxquels elle peut prescrire certaines mesures dont ils
n'auraient mme pas eu l'ide ou qu'Ils n'taient pas autori-
ss prendre spontanment. D'autres associations, plus
petites, tout en confiant nu prsident ou un comit le soin
de leurs atlaires, prennent leurs dispositions pour que, au
besoin, do gr ou de force, ces fonctionnaires se dmettent de
leurs fonctions ds qu'ils ne sont plus en tat de s'en acquitter.
Toutes les rvolutions par lesquelles un groupe politique,
renversant son gouvernement, replace la lgislation et l'ad-
ministration sous la dpendance immdiate des initiatives
individuelles, sont des phnomnes sociologiques du mme
genre.
H est vident, d'ailleurs, que de pareilles rgressions ne
peuvent se produire indiffremment dans toute espce de
socits. Quand les socits sont trs grandes ou trs com-
plexes, ce retour du gouvernement la masse est absolument
Impossible. L'existence d'organes ditrencis est un fait sur
lequel il n'y a plus moyen de revenir; tout ce qu'on peut
souhaiter, c'est qu'ils restent assez plastiques pour permettre
la substitution d'autres personnes celtes qui sont eu fonc-
tion, si ces dernires se montrent incapables. Toutefois, ii y a
des socits qui sont dj parvenues un assex haut dvelop-
pement et o, nanmoins, on observe de ces faits d'volution
rgressive, mais seulement a titre transitoire et tandis qu'une
organisation nouvelle est en train de s'laborer. Ainsi.
l'glise piscopaie, dans l'Amrique du Nord, souffrit jus-
qu' la fin du sicle dernier de l'absence d'voqu. L'gUse
mre d'Angleterre qui, seule, pouvait en consacrer, se refu-
sait le faire pour des motifs politiques. Alors l'urgence
extrme, le danger d'une dispersion irrmdiabie dcidrent
les lidles se tirer d'anaire eux-mmes. En i78t, ils nom-
mrent des d!gus, prtres et laques, dont la runion cons-
titua uue glise suprme, organe central et directeur de
toutes les L-'glises particulires. Un historien de l'poque dcrit
la chose ainsi Ce fut un spectacle vraiment trange, et
sans analogue dans l'histoire du christianisme, que cette as-
semble d'individus constituant d'eux-mmes une unit spiri-
tuelle sous la pression de la ncessite. Dans tous les autres cas,
c'est l'unit de l'piscopatqui faisait celle des fidles; chacun
ressortissait manifestement la communaut dont i'veque
tait la tte. Ainsi l'union des croyants, qui jusque-l avait
trouv dans l'organisation piscopale une sorte de substrat
indpendant, retourna son essence primitive. Les lments
ressaisirentcette force qu'ils avaient tire d'eux-mmeset qui
paraissait maintenant leur revenir du dehors.
Le cas est d'autant plus intressantque la qualit ncessaire
pour maintenir l'unit dos fidles, rvoque la reoit par la
conscration, c'est--dire d'uue source qui parat situe en
dehors et au-dessus de toutes les fonctions sociales. Mais le
fait qu'elle a pu tre remplace par un procd purement
sociologique montre bien d'o elle venait en ralit. Ce fut
simplement une preuve de la merveilleuse saut politique
et religieuse de ces populations que la facitit avec laquelle
elles remplacrent une organisation aussi ancienne, en se res-
saisissant des forces sociales qui avaient servi a la faire et en
les mettanten n~n're sans intermdiaire. Beaucoup de socits
ont, au contraire, pri parce que les relations entre leurs
forc-os lmentaireset les organes qui en taient sortisn'avaient
pas gard assez de plasticit pour que les fonctions de ces der-
niers pussent, en cas de disparition ou de dcadence, faire
retour la masse.

Les organes dinrencis sont comme des substrats qui


aident la consolidationdesgroupes; ta socit, en les acqu-
n.nt, s'enrichit de membres nouveaux. Mais, si l'ou se place
au point de vue de la fonction et non plus au point de vue
de l'organe, comment l'instinct de conservation des groupes
dtermine-t-illeur activit? C'est une tout autre question.
Que cette activit s'exerce par la masse indistincte des indi-
vidus ou par des organes spciaux, c'est, cet gard, un point
secondaire. Ce qui importe ici, c'est la tonne gnrale et le
rythme selon lesquels ont lieu les processus vitaux de la so'
ciet. Deux cas principaux se prsentent. Le groupe peut se
maintenir soit en conservant le plus fermement possible sest
formes, une fois fixes, de telle sorte qu'il oppose une rsis-
tance quasi matrielle aux dangers qui le menacent et garde,
au milieu des circonstances les plus varies, la mme consti-
tution interne. Mais il peut arriver au mme rsuttatcn variant )1
ses formes, de telle sorte qu'elles rpondent aux changements
des circonstances externes par leurs changements intrieurs et
puissent, grce cette mobilit, se plier il tous les besoins.
Cette dualit de procds correspond sans doute quelque
trait gnrai de la nature, car on en retrouve l'aualogue
jusque dans )e monde physique. Un corps rsiste & ta disper-
sion dont le meaaceut tes chocs, soit par sa duret et une
cohsion tettement massive de ses clments que l'assaut des
forcesextrieures ue change rien a leurs rapports, soit par sa
plasticit et son lasticit, qui cde, sans doute. & la moindre
pression, mais, en revanche, permet au corps de reprendre
aussitt aprs sa forme premire. tudions donc t'un et
l'autre de ces procds d'auto.euuservation sociale.
Le procd purement conservateur parait surtout convenir
aux socits faites d'lments disparates et travaiiies par des
hostilits latentes ou dclares. t)ans ce cas, toute secousse,
d'o qu'elle vienne, est un danger; mme tes mesures tes plus
utiles, s'il en doit rsulter un bramement quelconque,
doivent tre vites. C'est ainsi qu'un t~tat trs compliqu et
dont l'quilibre est perptuetiemeut instable, comme l'Au-
triche, doit tre, en principe, fortement conservateur, tout
changement pouvant y entratuer des troubles irrparables.
C'est mme, d'une manire gnrale, l'effet que produit i'h-
trogunit destonents dans tes grandes socits, tant que
cette htrognit ne sert pas, au contraire, a renforcer.
grce une harmonieuse division du travail, l'unit int-
rieure. Le danger vient de ce que, dans les couches dii!reotes,
et parfois mme de tendances opposes, dont est fait un
pareil tat, le moindre brantementdoit ncessairement avoir
tes contre coups les plus varis, t'ius la cohsion intrieuredu
groupe est faible, plus aussi toute nouvelle excitation de la
consciencesociale, tout appel a ux rformes publiques, risquent
d'augmenter encore tes oppositions; car il ya a mille routes
par o tes hommes peuvent diverger tes uns des autres et,
trs souvent, une seule qui leur permette de se rencontrer.
C'est pourquoi, ators mme qu'un changement,par tui-mme,
pourrait tre utile, it aurait toujoursi'mconvaientde mettre
en relief l'htrognit des lments, comme la simple pro-
longation de lignes divergentes rend plus sensibleleur diver-
gence'.1.
t)) Que t')''))ran)en)t't)t ))rm)H)t pur h"! t!t)''tn'.< ~'r\'e souvent & f'itMfcr
ta <-t)ht'.<ion ~<M-im)<!t't. par fonsutjm.'nt. ?)ttatnt''nir )tM fot'tne!' ')'' )'Ht!tt.
)')'t-t'))ti')nn't'st <)u'Nj)pa<t'ntf <4, '-t) tvatit' <'u))()rt)n' lu ti't;)t;. Car ta
ftM)'))' fait jtt\i''t'<ftt'nt ttj))') aux <i<K'r!;it' qui sottt '-tutnanc!! aux <!)'
)t.'nts, tn~xte )<'s p)t< o)())'t.~ du t{')" )" M'tt't c)t'' nift si bien en
tamitw h'ur catm'tcn' vitul fjue' stftjU! Sofia)); annutM <)'e))e-nx'tt)e.
la
Le mme conservatisme s'impose toutes tes fois qu'une
forme sociale survit tout en ayant perdu sn raison d'tre et
quoique tes lments, qui en taient la matire, soient tout
pr'~ts & entrer dans des combinaisons sociales d'autres sortes.
A partir de ln fin du moyen ge, les corporations, en Atte-
magne, turent peu peu dpouilles do teur influence et do
teurs droits par tes progrs des puissances centrales. Elles
perdirent ta force de cohsion qu'elles avaient eue jusque-l
et qu'elles devaient & l'importance de leur rle social mais
elles en gardaient encore t'upparence et le masque. Dans ces
conditions, elles ne pouvaient attendre leur salut que d'un
exclusivisme troit qui en fermt l'accs. En effet, tout accrois-
sement quantitatif d'une socit entratuo des modifications
qualitatives, ncessite des adaptations nouvelles qu'un tre
social vieilli ne peut supporter, Les formes des groupes dpen-
dent troitement du nombre des lments; telle structure qui
convient nue socit d'un effectif dtermine, perd sa valeur
si cet effectif augmente. Mais ces transformations internes et
tout le travail ncessaire pourassitniler les membres nouveaux
ne vont pas sans de grandes consommationsde forces. Or des
groupes qui ont perdu toute signification n'ont plus de force
disponible pour une pareille tache: ils ont besoin de tout
ce qui leur en reste pour protger contre tes dangers du dehors
et ceux du dedans la forme sous laquelle ils existent. Voil
pourquoi les corporationss'interdirentd'accepter des membres
nouveaux. Ce n'tait pas seulement pour fixer directement
tes dimensions du groupe en le limitant aux membres alors
existants et leur postrit mais encore pour viter ces chan-
gements de structure qu'impliqueindirectement tout accrois.
sement de grandeur et qu'une socit sans raison d'tre est
hors d'tat de supporter. Quand une association quelconque
est dans cette situation, l'instinct de conservation suffit la
rendre troitement conservatrice.
Cette tendance se rencontre surtout dans des groupes inca-
pables de soutenir la concurrence de leurs riv aux. Car, pendant

'))t))A ci' <t.<. <-< ')ui lu f'ttd dMM~'MU! & ~avw la dit'ct'K'm'c d':s t-
tts~
<n''nts. Mai:! ht ou ';))<: ))'<<)))'. fort'* pour tri'xnphL'rdes dissensioM
in(<'nt''<, alors ht XMctw Merct; la tot'tno tietiun 'ju'' tous les (mtfM ~t)ran-
tement'' iMK'iitu'c. Quo <h' fuis cUf a ftonn~ h' demi'ff coup & de;) Htati!
int)?rieurc)))<'))t tth'iiit~ Qt' d~' ft"P~s. tn~tt' en dehort dt!!) soeieMx
()o)iti<jM)'se snnt trouv' )nu' tuit); de teuM connits tntCrteur: dans
'-cUe ttttct'nttiv'n))d'onbtier. pum'eptohaHte, )eurs (;aeMt)es intestines, ou
'tf <c ttiMCt'tnuttt'ir sans r'ii~tM~~H~y/
h
quteur forme est en train de muer, qu'ils sont en vole de
devenir, ils prtent le ttanc aux coups de l'adversaire. C'est
dans la priode intermdiaireentre deux tats d'quitibro que
les Mciets, comme les individus, sont le moins en tat de se
dfendre. Quand on est en mouvement, ou ne peut pas se
protger de tous etes comme quand on est au.repos. C'est
pourquoi un groupe, qui se sent menace par ses concurrents.
vitera, pour se conserver, toute espce de transformation.
~f'~tt OH Morcrf sera sa devise.
Nous arrivons maintenant l'examen des cas o c'est, tout
au contraire, l'extraordinaire plasticit des formes sociales
qui est ncessaire a leur permanence. C'est ce qui arrive, par
exemple, Aces corcles (tout l'existence, au sein d'un groupe
plus tendu, n'est que toiree ou mme ne se maintient que
par des procds illicites. C'est seulement grce A une
extrme lasticit que de pareilles socits peuvent, tout en
gardant une consistance suffisante, vivre dans un tat de per-
ptuelle dfensive ou mme, l'occasion, passer rapidement
de ta dfensive l'offensive et rciproquement. Il faut, en
quelque sorte, qu'elles se glissent dans toutes les fissures,
s'tendent ou se contractent suivant les circonstances et,
comme un fluide, prennent toutes les formes possibles. Ainsi,
les socits de conspirateurs ou d'escrocs doivent acqurir la
facutt de se partager instantanment et d'agir par groupes
spars, de se subordonner pleinement tantt un chef et
tantt a un autre, de conserver le mme esprit commun, que
tous leurs membres soient immdiatementen contact ou non,
de se reconstituer sous une forme quelconque aprs une dis-
persion, etc. Yoit comment elles arrivent se maintenir avec
une persistance qui faisait dire aux Bohmiens < Inutile de
nous pendre, car nous lie mourrons jamais. Ou a tenu le
mme langage propos des Juifs. Si, dit-on, le sentiment de
solidarit qui les rattache si troitement tes uns aux autres,
si cet esprit d'exclusivisme t'gard des autres cultes, qui
leur est propre quoiqu'il se soit souvent retach, si tous ces
liens sociaux ont perdu, depuis l'mancipation du Judasme,
leur couleurconfessionneite, c'est pour eu prendre une autre
c'est maintenant lecapitalisme qui les unit. Leur organisation
est indestructible prcismentparce qu'elle n'a pas de formes
dfinies et tangibles. On aura beau, rpte-t'on, leur retirer
!a puissance de la presse, celle du capital, l'galit des droits
avec les autres citoyens; la socit juive ne sera pas abattue
pour cela. Ou pourra bien lour enlever ainsi leur organisation
politique et sociale mais on restaurera du mme coup leur
union confessionnelle.Ce jeu de baseute,qui leur a russi sur
plus d'un point, est parfaitement susceptible de se gnraliser.
On pourrait encore aller plus loin et montrer dans ia plasti-
cit personneiie du Juif, dans sa remarquante aptitude se
faire aux tacites les plus diverses, a s'adapter aux conditions
d'existence les plus opposes, comme un rollet individuel des
caractres gnraux du groupe. Mais quoi qu'il ou soitet que
ces affirmations s'appliquent retiement ou non l'histoire
du peuple juif, le fuit qu'on a pu les croire vraies est dj
pour nous un enseignement. H nous rappelle que lu mobilit
des formes sociales peut tre une condition do leur porma-
nence.
Si nous cherchons maintenant quels rapports ces deux
procdes contraires soutiennent avec les (orn)es les plus
gnrales de t'organisation sociale, nous ations voir se
drouler une srie d'oppositions caractristiques. On sait que
l'existence d'un groupe est souvent fie il celle d'uue classe
dtermine, au point de ne pouvoirse maintenir si cette classe
ne se maintient et avec tous ses caractres spcifiques c'est
tantt la plus leve, tantt la plus nombreuse, tantt enfin
la classe intermdiaire qui joue ce rle. Or, dans les deux
premiers cas. c'est l'immobilit des formes sociales qui s'im-
pose dans le troisime, c'est, au contraire, leur lasticit.
Les aristocraties sont gcneraiemcnt conservatrices. Suppo-
sons, en cifet, qu'elles soient rellement ce que leur nom
signifie, c'est--dire la domination des meilleurs; elles
expriment alors sous la forme la plus adquate possible l'in-
galit de fait qui existe entre les hommes. Or, dans ce cas
je ne recherche pas s'il s'est jamais ralis, sauf trs par-
tiellement l'aiguillon qui pousse aux rvolutions fait
dfaut; c'est, savoir, cette disproportion entre la valeur
intfinsque des personnes et leur situation sociale, qui peut
susciter aussi bien les plus nobles que les plus folles entre-
prises. Par consquent, mme dans cette hypothse, c'est--
dire quand l'aristocratie est place dans les conditions .tes
plus favorables o elle puisse tre. elle ne peut durer qu'en
fixant d'une manire rigide et l'tendue de ses cadres et leur
mode d'organisation. Le moindre essai de drangement mena-
cerait, sinon en reaUte, du moins dans l'esprit des intresss,
cette rare et exquise proportion qui existe par hypothse entre
les qualits des individus et leur place dans la socit par
suite, un premier germe de rvolution serait constitue. Mais
ce qui sera toujours, dans toutes tes aristocraties, tu cause prin-
cipale de ces rvolutions, c'est que cette absolue justice dans
la distribution des pouvoirs ne se rencontre pour ainsi dire
pas. Quand une minorit est souveraine, la suprmatiequ'elle
exerce repose presque toujours sur do tout autres principes
que cette proportiouuaiit idale. Dans ces conditions, la classe
dirigeante a tout intrt viter les nouveauts, car elles
veilleraient les prtentions, justes ou soi-disant telles, des
classes diriges, et il y aurait craindre alors non seulement
un changement de personnes, mais, et c'est ce qui importe a
l'objet de notre recherche, un changement de constitution.
Dj le seul fait que l'ou a parfois change violemment le
personnel gouvernementul avec l'appui de la masse, suffit a
donner l'ide que le principe mme de l'aristocratie pourrait
tre renverse pur la mme occasion.
Ainsi, la meilleure faon de se maintenir, pour une consti-
tution aristocratique, est de s'immobiliser le plus possible.
Cette proposition ne s'applique pas seulement aux groupes
politiques, mais aux associations religieuses, aux socits
familiaies ou mondaines qui peuvent prendre la forme aris-
tocratique. Partout o elle s'tablit, ce n'est pas seulement
pour le maintien de certaines personnes au pouvoir, mais
pour le maintien de son principe mme qu'un conservatisme
rigide est ncessaire.C'est ce que montre clairementl'histoire
des mouvements rformistes dans les constitutions aristocra-
tiques. Quand ces socits s'eiorcentde s'adapter des forces
sociales nouvelles et un idal nouveau, quand, par exemple.
elles adoucissent l'exploitation laquelle taient soumises
les classes infrieures, on rglementant les privilges par la
loi au lieu de les abandonner M l'arbitraire, toutes es
rformes, dans la mesure ou elles sont volontairement cou-
cdes, ont pour but final, non les changements mmes qui
en rsultent, mais la stabilit qu'elles donnent aux institu-
tions qui sont conserves sans changement. La diminution
des prrogatives aristocratiques n'est qu'un moyen pour
sauver le rgime dans son ensemble. Mais une fois que les
choses en sont arrives l, ces concessions sont, d'ordinaire,
insuffisantes. Toute rforme met en lumire de nouveaux
points rformer et le mouvement, auquel on avait accd
pour maintenir l'ordre existant, mne, comme par une
pente douce, la ruiue de tout le systme. Dans ce cas, la
seule chance de salut est que, les prtentions nouvelles ne se
laissant pas rduire au silence, une raction radicale se pro-
duise et qu'on revienne mme sur les changements antrieu-
rement concds. Le bouleversement gnrt auquel s'expose
ainsi t'aristocratie, quand elle se laisse modifier, explique
qu'un immobilisme outrance soit pour elle le meilleur
instrument de dfense.
Lorsque la forme du groupe est caractrise, non par la
suprmatie d'une minorit, mais par t'autonoinio de la
majorit, c'est encore une stabilit radicale qui en assure le
mieux la survie. Cela tient d'abord M ce que les masses,
quand elles forment une unit sociale durable, ont un esprit
essentiellement conservateur. Par l, elles s'opposent aux
groupes temporaires que forment les foules assembies.
Cettes-ci, au contraire, montrent, dans leurs dispositions
comme dans leurs dcisions, lit plus grande mobilit; a ta
moindre impulsion, cties passent d'un extrme l'autre.
Mais quand la masse M'est passons le coup d'une excitation
immdiate, quand une stimulation mutuelle de ses membres
et une sorte de suggestion rciproque ne la met pas dans un
tat d'instabilit nerveuse qui read impossible toute direc-
tion ferme et la laisse la merci de la premire impulsion,
quand, en un mot, ses. caractres profonds et durables peu-
vent produire leurs cnets, alors on la voit domine par la
force d'inertie; etto ne change pas d'ette-meme son tat
de repos ou de. mouvement, mais seulement quand des
forces nouvelles entrent en ligne et l'y contraignent. C'est
pourquoi, quand des mouvements sociaux sont t'ouvre des
masses et leur sont abandonnes sans direction, ils vont faci-
lement jusqu'aux extrmes, tandis qu'inversement un qui-
libre social qui repose sur les masses se rompt difficilement.
t)e l cet instinct salutaire qni les pousse, pour garantir leur
unit sociale contre la mobilit des circonstances, garder
leurs formes telles quelles, dans une immobilit opinitre, au
lieu de les plier incessamment tous les changements du
milieu.
Dans les socits politiques, une circonstance particulire
contribue produire.cersultat c'est que celles qui ont pour
base la classe la.plus nombreuse et o t'gattt des individus
est la plus complte, sont surtout des socits agricoles. C'est
le cas de la socit de paysans que formait la Rome primitive
et des communes d'hommes libres qu'on rencontre duns
l'ancienne Germanie. Ici, la matire de la vie sociale dter-
mine la manire dont la forme se comporte. L'agriculteurest
un conservateur a pn'o~. Son travail, pour produire ses fruits,
a besoin de temps et, pa)' consquent, d'institutions durables
et d'une stabilit parfaite. L'impossibilit de prvoir ces
caprices de la temprature (tout il est si troitement dpen-
dant, l'incline-vers une sorte de fatalisme qui se traduit par
une rsignation patiente vis--vis des forces extrieure!; plu-
tt que par de la dextrit viter ieurs.coups. Sa technique,
d'une manire.gnrale, no peut rpondre aux variatious du
milieu par des variations correspondantes avec ia prompti-
tude dont sont tapantes l'industriel et le commerant; et
ainsi, par suite des conditions mmes de l'art agricole, une
organisation sociale qui s'appuie sur une vaste classe d'agri-
culteurs tend naturellement i'immobiiit~-
Mais il en est tout autrement quand la classe directrice.est
la ctasse moyenne et.que d'elle dpend la forme du groupe.
La raison en est dans une particularit qui lui est spciale
seule, elle a, la fois, une limite suprieure et infrieure.
Par suite, elle reoit sans cesse des lments de la classe
infrieure comme de la classe suprieure et elle en donne
son tour et l'une et l'autre.' II en rsulte qu'elle a pour
caractristique un tat de flottement- qui fait que, pour se
maintenir, elle a surtout besoin d'une grande aptitude
s'adapter, varier, se plier aux circonstances car c'est
cette condition qu'elle peut diriger ou prvenir les invitables
mouvements de l'ensemble,de manire garder intact, maigre
les changements qu"elle traverse, tout l'essentiel de ses
formes et do ses forces.
t!ne socit do ce genre a pour caractre distinctif la coHft-
?))<)< Elle n'implique, en enet, ni une galit absolue entre
les individus, ni la division du groupe en deux parties radi-
calement htrognes, l'une suprieure et l'autre infrieure.
La classe moyenne apporte avec e,lle un lment sociologique
entirement nouveau. Ce n'est pas seulement une troisime
classe ajoute aux deux autres et qui n'en ditere qu'en
degrs, comme elles diffrent elles-mmes l'une de l'autre. Ce
qu'elle a de vraiment original, c'est qu'elle fait de continuels
changes avec les deux autres classes et que ces fluctuations
perptuelles effacent les frontires et les remplacent par des
transitions parfaitement continues. Car ce qui fait la vraie
continuit de h) vie collective, ce n'est pas que les degrs
de l'chelle sociale soient peu distants les uns des autres
ce qui serait encore de la discontinuit c'est que les indi-
vidus puissent librement circuler du haut ou bas de cette
chelle. A cette seule condition, il n'y aura pas de vides entre
les classes. H faut que les carrires individuelles puissent
successivement passer par les plus ltitutes et par les plus
basses situations, pour que le sommet et in base do la hi-
rarchie soient vraiment relis l'uu a l'autre. H est ais de voir
qu'it en est de mme l'intrieur de la classe moyenne elle-
mmo; qu'il s'agisse de considration, d'ducation, de for-
tune, do fonctions, les conditions n'y sont continues que dans
ia mesure o une mme personne peuten changer.facitement.
Telles sont les raisons qui font qu'une socit o lit classe
moyenne est prdominante se caractrise par une grande
lasticit c'est que, les lments y tant trs mobiles, il lui
est plus facile de se maintenir en variant si le milieu varie,
qu'en restant obstinment immuable. Inversement, on pour-.
rait montrer qu'un groupe o les conditions sont nombreuses
et rapproches les unes des autres doit rester plastique et
variabie, s'il ne veut pas qu'il se produise d'importantes rup.
tures dans sa masse. L. o les situations possibles sont inn-
uiment diverses, les chances pour que chacun soit sa vri-
table piaco sont bien moindres que dans une socit ou il
existe un systme de classes nettement dfinies et o, par
suite, chaque individu est encadr dans un groupe tendu et
l'intrieur duquel ii peut se mouvoir avec une certaine
libert. Dans ce dernier cas, en enet, comme la socit ne
contient qu'un petit nombre de conditions tranclies,
chacun, au moins en rgle gnrale, est naturetiement
dress eu vne du cercle particulier dans lequel it doit
entrer. Car comme ces cercles sont assez vastes et n'exigent
de teurs membres que des qualits assez gnrtes. l'hrdit,
l'ducation, l'exemple snnisent a y adapter par avance les
individus, ttse produit ainsi une .harmonie prtablie entre
les qualits individuelles et tes conditions sociales. Mais ta
au contraire o, grce l'existence d'une classe moyenne, il
y a toute une gamme de situations varies et gradues, ces
mmes forces ne peuvent plus prdterminertes particuliers
avec la mme sret; l'harmonie qui, tout l'heure, tait
prtablie, doit, maintenant, tre retrouve a p<M<M'<on et,
par des moyens empiriques pour cela, il faut que chaque
individu puisse sortir de sa situation si elle ne lui convient
pas et que l'accs de celle laquelle il est apte lui soit ouvert.
Par consquent, dans ce cas, ce qui est ncessaire au main-
tien du groupe, c'est que les frontires des classes puissent
tre aisment dptaces. constamment rectifies, que les
situations n'aient rien de dfinitivement fix. C'est seulement
de cette manire que chacun pourra arriver a rencontrer la
position spciale qui convient ses qualits spciales. C'est
pourquoi une socit o la classe moyenne domine doit
empioyer, pour se conserver, des procds contraires ceux
qui servent a une aristocratie.

V!I

Dans ce qui prcde, ia variabilit des groupes a t tudie


comme un moyen pour eux de s'adapter aux ncessits de ia
vie elle consiste plier pour empcher que tout
ne se brise,
et cette souplesse s;impose toutes les fois que les .{ormes
sociales ne sont pas assez fortement consolides pour dfier
toutes les forces destructives. La socit rpond ainsi aux
variations qui se produisent dans les circonstances, tout en
maintenant sou existence propre. Mais on peut se demander
maintenant si cette aptitude passer par des tats varis, et
mme opposs, ne sert a la conservation du groupe que
comme un moyen do ragir contre les changements du
milieu, ou si elle n'est pas galement implique dans le prin-
cipe mme de sa constitution interne..
En effet, abstraction faite de ce que peuvent tre les cir-
constances extrieures, ta sant du corps social considre
comme le simple dveloppement de ses nergies internes, ne
rctame-t-eiie pas sans cesse des changements de conduite,
des dplacements d'intrts, de continueiies variations de
formes? Dj les individus ne peuvent se conserver qu'en
changeant; ils ne maintiennent pas l'unit de leur vie par un
quilibre immobile entre le dedans, et le dehors, mais, pour
des raisons d'ordre interne, ils sont dtermins un mouve.
ment perptuel qui les fait passer incessamment non pas seu-
lement de l'action la passion et rciproquement, mais
encore d'une form de l'action ou de la passion une autre.
De mme, il n'est pas impossible que les forces d'o rsulte
la cohsion de la socit aient besoin de changement pour
garder toute leur action sur les consciences. C'est ce qu'on
peut notamment observer toutes les fols que l'unit collective;
est devenue trop troitement solidaire d'un tat social dtet-
min, ce qui arrive par cela seul que cet tat dure depuis~
trs longtemps et sans changement. Qu'un vnement ext-'
rieur vienne alors l'branler, et l'unit sociale risque d'tre
emporte du mme coup. Parexemple,lorsque les sentiments
moraux ont t, pendant longtemps, intimement unis cer-
taines conceptionsreligieuses, le libre examen, en ruinant la
religion, menace la morale. I)e mme, l'unit d'une famille
riche se brise parfois, si cette famille s'appauvrit, comme,
d'ailleurs, l'unit d'une famille pauvre qui vient il s'enrichir.
Me mme encore, dans un, tat jusqu'alors libre, les'pires
divisions clatent si la libert vient se perdre (qu'on se
rappelle Athnes l'poque macdonienne) mais le mme
phnomne se produit dans les tats despotiques qui devien-
nent libres brusquement, comme i'histuire des rvolutions
l'a souvent prouv. Il sembledpncqu'uue certainevariabilit
empche le groupe do se solidariser trop compltement avec
telle ou telle particularit. Les changements frquents par
lesquels il passe, l'immunisent, pour ainsi parler; beaucoup
de ses parties peuvent tomber, sans que le nerf de la vie soit
atteint, sans que le maintien du groupe soit en pril.
Xous sommes, il est vrai. port croire que la paix, l'har-
monie des intrts servent seuls dans ce but; toute opposi-
tion nous parat crer un danger et gaspiller strilement des
forces qui pourraient tre employes une ouvre positive ae
coordination et. d'organisation. Et cependant, l'opinion coq-
traire semble mieux fonde les socits ont intrt ce que
la paix et .la guerre alternent d'aprs une sorte de rythme.
Cela est vrai-ds guerres trangres succdant & des priodes
de paix Internationale, comme des guerres intestines, des
conflits de partis, des oppositions de toute sorte qui se font
jour au sein mme de l'entente et de l'harmonie toute la
diffrence entre -ces deux ordres de. faits, c'est que, dans le*e
premier cas, l'alternance est successive, dans le second, simul-
tane. Mais le but poursuivi est le mme; seuls, les moyens
par lesquels 11 se ralise sont .diirents. La lutte contre une
puissance trangre donne au groupe un vif sentiment de
son unit et de l'urgence qu'il y a la dfendre envers et
contre tout. La commune opposition contre un tiers agit
comme principe d'union, et cela beaucoup plus srement que
la commune alliance avec un tiers; c'est un fait qui
se vri-
ne presque sans exception. !t n'est, pour aiusi dire, pas de
gMUpe, domestique, religieux, conomique. politique, qui
fuisse se passer compltement do ce ciment. La conscience
Htus nette qu'une socit prend do sou unit, par l'effet de lu
tutte, renforc~cette unit,.et rciproquement. Ou dirait que,
pour nous autres hommes, dont fi facutte essentielle est de
percevoir des difrences'. le sentiment de ce qui est- un et
harmonique ne puisse prendre de .forces que par contraste
avec le sentiment contraire. Mais les antagonismesqui spa.
t'eut testmeuts mmes du groupe peuvent avoir les mmes
effets; ils donnent plus de fetief a son unit, parce que, eu
teudant, eu resserraut les liens sociaux, ils tes rendent plus
sensibles, Il est vrai que c'est aussi un moyen de les briser;
mais tant que cette limite extrtne n'est pas atteinte, ces con-
ilits, q.ui, d'ailleurs, supposent un premier fonds do solidarit,
lit rendent plus agissante, que les sujets eu aient
ou non cons-
cience. Aiusi, les attaques auxquelles les diffrentes parties
d'une socit se livrent les une'; contre les autres ont souvent
pour cqn~quence des mesures lgislatives qui sont destines
a y mettre un terme et qui. tout en ayant pour origine i'egofstHc
et la guerre, donnent ia communaut un sentiment plus
vit de son unit et de sa soiidaritt' Aiusi encore, ia coucur-
rence conomique, par les actions-et les ractions qu'elle
dtermine, met plus troitement eu rapports les clients et les
marchandsmme qui so font concurrence,et elle accroit leur
dpendance rciproque. utin &t surtout, le dsir de prvenir
les oppositions-et d'en adoucir les consquences conduit
des ententes, a des conventions .commerciates ou autres qui,
quoique nes d'antagonismes actuets ou latents, contribuent.
d'une manire positive a la cohsion du tout.
Cette double fonction de l'opposition, selon qu'elle est tour-
ne vers le dehors ou vers le dedans, se retrouve dans les
relations les plus intimes des particuliers et elle y a tous les
caractres d'un phnomne sociologique; car les individus
eux aussi ont besoin do s'opposer pour rester unis. Cette
opposition peut so manifester galement, ou bien par te con-
traste que prsentent les phases successives de leur corn'
merce, ou bien par la manire dont le tout qu'ils forment
sedittrenciedu milieu moral qui les enveloppe. On a sou-
vent dit que l'amiti et l'amour ont besoin parfois de diC6.
rends, parce que la rconciliation leur donne tout leur sens
et toute leur force. Mais ces mmes associations, sans prsen-
ter de ces dit!rences externes, peuvent deveuir plus cons-
cientes de leur bonheur, en s'opposant au reste du monde,
A tout ce qui s'y passe et tout
ce qu'on ou sait. Cette seconde
forme d'opposition est certainementta plus haute et la plus
efficace. La premire a d'autant moins de valeur
que les
priodes attentes d'accord et de conflit sont plus courtes et
se suivent de plus pn''s. A son degr te plus bas, elle est
caractristique d'un tat o la nature des relations internes
entre les individus n'a, pour ainsi dire, plus d'importance,
o leurs dispositionsrespectives sont la merci des accidents
extrieurs, qui tantt les rapprochent et tantt les tournent
les uus contre les autres. Et cependant, mme alors, elle a
quelque chose de profondment utile la conservation du
lieu social..Car l o les parties sont rarement incites a
prendre conscience de leur solidarit et o, par suite, elles
n'en ont qu'un faible sentiment, rien ne peut tre plus propre
l'veiller que ces chocs et ces conflits perptuels, suivis
de perptuelles rcoucitiatiMts. C'est de la lutte mme que
natt l'unit.
Nous revenons ainsi au point de dpart de ces considra-
tions. Le fait que l'opposition peut servir it la conservation
du groupe est t'exempte le plus topique de futilit que pr-
sente, dans ce mme but, la variabilit sociale en gnrt.
Car s'il est vrai que l'antagonisme ne meurt jamais ompte-
tement, il est cependantdans sa nature do n'trejamais qu'un
intervalle entre deux priodes d'accord. Par dfinition, ce
n'est qu'unecrise, aprs laquelle l'union sociale se reconstitue
par suite des ncessites mme do la vie; et il eu est ainsi
sans doute, parce que, ici comme partout, ce qui dure n'a
de relief et ne prend toute sa force au regard de la conscience
que par contraste avec ce qui change. L'unit sociale est
l'tment constant qui persiste identique soi-mme, alors
que les formes particuliresqu'elle reoit et les rapports qu'elle
soutient avec les intrts sociaux sont infiniment mobiles et
cette constance est d'autant plus accuse que cette mobilit
est plus grande. Par exemple, la solidit d'une union conju-
gale varie certainement, ce/M M y<'<&)M, suivant la diversit
plus ou moins grande des situations par lesquelles ont passe
les poux car ces changements mettent en saillie l'inaltra-
bilit de leur union. 11 est dans la nature des choses humaines
que les contraires se conditionnent mutuellement. Si la varia-
bilit importe tellement la conservationdu groupe, n'est
ce
pas seulement parce que, il chaque phase dtermine, l'unit
s'oppose ces variations passagres, mais parce
que, dans
toute suite de ces transformations, qui ne sont jamais les
la
mmes d'une fois l'autre, elle seule se rpte sans change.
ment. Elle acquiert ainsi, vis--vis de ces tats discontinus,
ce caractre de fixit et cette ralit que la vrit possde par
opposition a l'erreur. La vrit n'a pas, dans chaque cas par-
ticulier, une sorte de privilge, un avantage mystique
l'erreur; et oependant elle a ptus de chances de triompher. sur
pour cette raison qu'elle est une. tandis que les erreurs pos-
sibles propos d'un mme objet sont en nombre infini. Elle
revient donc plus souvent dans le cours des penses, Mon ox*'
<'<'<T<'tu' << ~t<<r<, MtaM
~Mc ~p fn-< (.M ~-ct<<<'< C'est
ainsi que l'unit sociale a des chances de se maintenir et de
se renforcer il travers toutes les variations, parceque celles-ci
diffrent toujours l'une de l'autre, tandis qu'eito rparait
toujours identique. Par suite de cette disposition des choses,
lesavantagesde la variabilit,qui ontt-numres pius haut,
peuvent tre conservs, sans que les variations qui se pro-
duisent entament srieusement le principe mme de l'unit.
Nous terminons ici cette tude qui, de par la nature mme
du sujet, ne vise nullement tre complte, mais plutt
pour but de donner un exemple do la mthode, qui seule,
d'aprs nous, peut faire de la sociologie une science indpen-
dante, et qui consiste abstraire la tourne de l'association des
tats concrets, des intrts, des sentiments qui eu sont le
contenu. Ni la. faim. ni l'amour, ni le travail, ni la religiosit,
ni la technique, ni tes produits intettectuets ne sont par eux-
mmes de nature sociale; mais c'est le fait mme do l'associa-
tion qui donne toutes ces choses leur ralit. Quoique ia
rciprocit d'action, l'union, l'opposition des hommes n'ap-
paraisse jamais que comme la forme de quelque contenu con-
cret, ce n'est-cependant qu'cn.isotant cette forme par, l'abs-
traction, qu'on pourra constituer une science de la socit,
au sens troit du mot. Que le contenu ragisse toujours sur
le contenant, cela ne change rien la question. L'tude go-
mtrique des formes des cristaux est un problme dont ta
spcificit n'est nullementdiminue par ce fait que ta manire
dont ces formes se ralisent dans les corps particuliersvarie
suivant la constitution chimique de ces derniers. La quantit
de problmes que ce point do vue permet de dgager paratt
hors de doute. Seulement, tant donn que, jusqu' posent,
on n'a pas encore su le faire servir dterminer un champ
d'tudes qui soit sprint la sociologie, il importe avant
tout d'habituer les esprits a discerner, dans les phnomnes
particuliers, ce qui est proprement sociologiqueet ce qui res-
sortit d'autresdiscipiines; c'est lu seule tnaniore d'empcher
notre science de glauer perptuel lenietit dans !e chantp des
voisins. C'est ce but propcdeutique que repond tu prsente
recherche.
(!. StMME).
DEUXIME PARTIE
ANALYSES

PnEMtM)-: SECTION

SOCIOLOGIE GMNHMALH
PnrM.tmL'GL

Que peut tre une sociotogie proprement dite? C'est ce que


nous uous proposons de meUre en lumire, en rsumant les
rcentes publications de sociologiegnrale. Nous irons doue
des auteurs qui entendent ta sociologie ~o .wt.f. comme une
philosophie (tes sciences sociales particulires ou comme une
philosophie de l'histoire, ceux qui l'entendent ~'~o wn~x,
comme une science spciale, devant se dgager des analogies
biologiques pour envisager directement les phnomnes qui
lui appartiennent en propre, phnomnes qui sont encore

en leur fond, sans doute, des phnomnes psychologiques,
puisqu'ils rsultent de )' c inter-uctioa des consciences indi-
viduelles, mais qui sont du moins des phnomnes psycholo-
giques d'une espce spciale, puisqu'il faut, pour en rendre
compte, considrer les consciences, non pas part et en tant
qu'individueDes, mais dans leurs rapports mmes.
Ainsi s'expliquent les troisctasses d'tBuvressocioto~iques
que nous distinguonset l'ordre dans lequel nous les rangeons
) sociologie philosophique 8" sociologie biologique 3"
so-
ciologie psychologique et spcifique.

t. 8Ut:tO).0<UR t'tUt.OSOt'ntQL'K
C. TARDE. L'oppositionuniverselle. Essai d'une thorie
des contraires. 4!!)-vm p., Alcan, Paris. 1897.
C'est par accident, si t'ou peut dire, et sans la prmditation
de son auteur que le nouveau livre de M. Tarde revient la
sociologie. M. Tarde se proposaitd'chapper aux < questions
sociales en suivant, o elle voudrait le conduire, 1 ide
gnraie d'opposition elle n':) pas tard A le ramener a ses
proccupations habitue))es, accident heureux et d'uilleurs
facile a prvoir.
Xous laisserons les mathmaticiens, les physiciens, les
naturalistes et les psychologues suivre pas a pas l'auteur dans
cette < promenaded'esprit' pendant iaquelie il regarde passer,
a tous les tages superposes de la raiit physique, vivante,
mentate, !a procession de couples enchans de contraires qui
s'y droute eterneiiement Ce qui importe lu sociologie,
c'est la dfiance que cette revue gnrale doit lui inspirer.
selon l'auteur, tant a l'gard de la ncessit qu' l'gard de la
fcondit de l'opposition. Trop souvent, qu'il s'agisse des
quantits imaginaires,de la loi de la reaction gale l'action,
ou de l'anabolisme et du eatabolisme, on a forg des opposi-
tions toutes subjectives, pour repondre au < vu de sym-
trie. on a imagin que toute volution tait suivie d'une
dissolution inverse, que tout progrs tait du l'entrecboc
soit physique, soit physiologique, soit mental: l'examen
rapide des faits sur lesquels on a bti ces hypothses conduit
M. Tarde cette conclusion qu'on a fait, tort, honneur
l'opposition de ce qui est i'uvre de l'adaptation et de la
variation.
La mmeconclusion se dgagera, plus vidente encore, des
faits sociaux directement interrogs. Examinons en enot les
difrentes espces d'oppositions sociales, les oppositions c de
sries celles de degr et enfin, les plus importantes
vrai dire. racines des prcdentes, les oppositions de sens
Parce que la croissance d'une langue, d'une religion, d'une
constitution s'est effectue suivant un certain ordre, doivent'
elles ncessairementdcrotre dans l'ordre inverse ? En un
mot, les volutionssociales sont-elles assujetties, comme on le
croit souvent sur la foidcl'ided'opposition.larversibilit?
Au contraire, la rversion n'est dans tous les ordres de
phnomnes sociaux qu'un accident ou, pour mieux dire,
qu'une apparence; et plus leur trac est logique et orient
vers un but, moins il y a de chances pour qu'ils reviennent
sur leurs pas (p. 303). Imagiue-t-on que, dans une soctte en
train de se dissoudre, la perte graduelle des connaissanceset
des thories s'oprerait dans l'ordre prcisment inverse de
celui de leur acquisition? Le travail de dcompositiondes
formes grammaticaleset syntaxiques n'est, do mme, nulle-
ment t'inverse de celui qui les a etaboreit. La succession des
nuances de beaut qu'on gote chez tes grands crivains ou
des aspects de vrit qu'on dcouvre chez les grands phito.
sopttes Ne parait pas susceptible de se retourner. C'est enfin
s'en tenir aux apparences ou mme aux concidencesde mots
que de croire que les transformations conomiques nous
ramnent au collectivisme ou au troc primitif. Eu ralit,
l'ordre des phnomnes conomiques, comme celui de tous
les phnomnes sociaux, est dtermin par l'ordre de l'appa-
rition des dcouvertes et par celui de leur propagation imi-
tative (p. 324) or it n'y a aucune raison pour que les imi-
tations cessent, ou pour que les inventions se perdent dans
l'ordre inverse de celui de leur adoption ou de leur cration.
Ce sont les initiatives fcondes et leur rayonnement imitatif,
et non les oppositions striles, qui mnent rvolution ou
plutt les volutions sociales (p. 33~).
La rgression est-elle plus ncessaire que la rversibilit?
Considrons les quantits sociales, et demandons-nous s'il
est indispensable, comme l'ide d'opposition tendrait te
faire admettre, qu'aprs avoir cra elles dcroissent? Sui-
vant li. Tarde, les deux principalesquantits sociales sont ies
< lumires. et tes richesses ou encore ta < vrit dis-
tincte de la conviction personnelle,et ta < valeur a, distincte
de l'utilit individuelle. Eties sont vraiment sociales en ce
sens qu'on pourrait, mme s'it n'y avait rien dans les indivi-
dus eux-mmes qui tut mesurable, mesurer au nombre des
individus qui s'entre-renteut les variations propres de la
valeur ou de la vrit. Si la valeur est, en fait, plus aise
mesurer, c'est que la nature mme des richesses, qui ne peu-
vent s'changer que moyennant le sacrifice des unesaux autres,
a exig ta constitution d'uu mtre sur lequel ou s'accorde pour
rgler l'tendue de ce sacrifice, tandis que la nature des vri.
ts, qui s'additionnent (ou se contredisent), mais ne s'chan-
gent pas, n'a pas fait prouver le besoin d'une mesure qui leur
soit commune (p. 340). Il n'empche que la quantit des
vrits est au moins aussi importante aux socits que la
quantit des richesses. L'une comme l'autre tendent norma.
lement s'accrotre, en vertu de cette ambition universelle
qui pousse toute invention se propager et, autant qu'il est
en ette, conqurir le monde. Si elle est arrte dans sa
marcheconqurante,ce n'estnullement en vertu d'une nces-
sit interne. qui la contraindrait & dcliner par cela seul
qu'elle a progress, c'est qu'elle est heurte et refoule par
quelque autre lu dcadencede la premireest la consquence
et l'image t't'tn'ersec, non de sou propre progrs, mais du pru.
grs de lit secoude. C'est ainsi que le dclin de la consomma-
tion du seigle correspond au progrs de la consommation du
froment, et ledctin de ta marine a voile, ait progrs de ta
marine vapeur. En un mot, qu'il s'agisse du progrs des
lumires ou de celui des richesses, la progression a sa cause
interne; ta rgression, quand ettealieu, a une causeextrieure.
La progression est la rgie, ta rgression l'accident p. 348~.
Si l'on passe enfin de ta considration de ces oppositionsde
degr celle de ces oppositions de sens dont toutes les autres
drivent, fuut-it croire que la lutte sous toutes ses formes est
absolument ncessaire et, en tout cas, minemment utile ta
vie des socits? Question vitale, puisqu'elle nous amne a
nous interrogersur la valeur de la concurrenceet de lit guerre.
Et d'abord la concurrence ne cre rien par elle-mme. C'est
par l'invention des procds nouveaux, qui n'est pas toujours

dtermine par la concurrence, l'invention de la charrue,
par exemple. n'a pas jaitti certainement de la concurrence des
agriculteurs primitifs, que progresse l'industrie (p.~70). Et
c'est encore ta propagation imitative de ces procds comme
des besoins qu'ils suscitent qui rend !a concurrence possible.
Sans l'imitation et d'abord sans l'invention imite, dues, en
somme, non la mle des gosmes, mais l'instinctive
sympathie qui rend l'homme sociable, la concurrence est
impuissante ou malfaisante, tandis que, mme sans concur-
rence, l'invention et l'imitation sont toutes puissantes et
finalement bienfaisantes (p. 37~. Loin, par suite, que le pro.
grs ne puisse s'accomplir que par l'exaspration de la con-
currence et l'entrechoe des intrts, le progrs consiste
substituer, la rivalit confuse des intrts qui s'opposent,la
dlimitation prcise des droits qui s'accordent.
Si !a lutte, sous cette forme attnue qui est la concurrence,
nous paraitdja infconde en elle-mme, que dirons-nousde
la guerre < confluent et consommation de toutes les opposi-
tions sociales pousses bout et s'exprimant par toutes les
oppositions physiques '? A un certain point de vue, la
guerre apparat bien comme une osuvre directe de la sociali-
sation elle-mme. Une passion commune de nombre d'indivi-
dus pour un mme objet, et la conscienc vive de cette com-
munaut de passions, telles paraissait'ntbtcutrc,encuft, tes
conditions de lu conversion des conflitsd'individus en conflits
de masses. Mais pourquoi ces conflits sociaux prenm'ut.its,
encore aujourd'hui, la forme de guerres proprement dites
fi n'y a l, suivantM.Tardp.aucnne ncessite, mais uneha))!-
tude. Ou se but parce qu'on s'est battu. La guerre est une sur-
vivance (p. 3!t0). Mais, du moins A l'origine, ce proccd sau-
vage n'tait-it pas ncessaire? Sans la guerre, mre de la dis.
ciptine, le progrs humain tait-il possible? Pourquoi
non ? La religion, aussi bien et mieux que la guerre, fait les
socits. Si t'humanit.autieude prfrer dcidment la pre-
mire a la seconde, a us ta fois de l'une et de l'autre par
un compromis fcheux, c'est l, suivant fauteur, une sorte
d'accident qu'on peut supprimer par la pense sans avoir
supposer du mme coup ta marche des socits arrte.
En fait. ta o la guerre n'entrane pas, comme elle te fait le
plus souvent, cet largissement du groupe social qui est le
vrai progrs de t'hunumite, elle ne fait que consacrer, et sou.
vent en les mutilant, les pacifiques conqutes opres par
l'expansion imitative de la religion combine avec celle de la
langue, des usages, des mmurs (p. 40~.
En un mot, le progrs social n'est pas d a t'hostitite,
quelque forme qu'ctie revte, mais l'ambition et a t'amour
pres de l'invention et de l'imitation. La lutte en elle-mme
n'est paf plus utile que n'taient ncessaires la rgression ou
la reversion. Ce n'est donc pas daus l'opposition, c'est dans
la variation dont l'opposition est parfois une cause occa-
sionnelle, mais dont elle n'est nuttement ta raison suttisante,
et dans la rpetttion dont l'opposition est un cas parti-
culier, mais non la forme gnerate qu'il faut chercher les
principes bienfaisants des transformations de l'univers.
Et ainsi le nouveau livre de M. Tarde se trouve apporter une
preuve indirecte et inattendue, mais par ta, sembte-t i), d'au-
tant plus probante, de la vrit des ides dfendues par ses
livres antrieurs.
Danscetui-ci,aussi bien que dans les prcdents, les tec-
teurs savent d'avance qu'ils trouveront une profusion.d'indi-
cations fcondes, de remarques pntrantes, de vues larges et
hardies. En mme temps, dans cetui-ci peut-tre plus encore
que dans les prcdents, il leur sera parfois dtnicitede distin-
guer nettementles hypothses des vrits, les rapprochements
des explications,l'utopie de l'histoire, et l'idal de la ralit.
Ceux qui souhaitent la constitution d'une sociologie propre-
ment scientifique, objective et spcifique, ne trouveront pas
toujours leur compte ce sduisant entre-croisementd'ides
et de rves qui caractrise l'O~MtOM MM<rc~p<
Toutefois ceux-ci mme sauront gr M. Tarde d'avoir
montr nettement, sinon en quoi les faits sociaux se dis-
tinguent des faits individuels, du moins en quoi ies faits
sociaux se distinguent des faits biologiques. En dnonant,
maintes reprises, t'ailiance du naturalisme et du militarisme,
en rappelant & quelles erreurs la fois thoriques et pratiques
entralne i'ide que les socitssont des organismes, ncessai-
rement soumis, comme les organismes individuels, une
volution prdtermine qui, aprs un dclin inverse de
leur croissance, aboutirait a la mort, M. Tarde contribue,
pour sa large part, a dissiper les quivoques qui rsultent,
le plus souvent, des transpositions sociologiques de concepts
tout biologiques.

P. BARTH. Die Philosophie def Geschichte fts Sooio-


logie. (/.<t pAt'~o~tx' ~c <<o)r<' f/K po<Mt f/f n' itoc<o<o.
~Mf.) Erster Teil. Einleitung und Kritische Ubersiclit.
396-n- p. Reisland, Leipzig, )897.

Pour M. Hnrth, la sociologie et ta philosophie de l'histoire


se confondent. Les vritables objets de l'histoire sont, non
les accidents individuels mais les transformations sociales.
Ainsi la philosophie de l'histoire, qui n'en est aprs tout que
la science leve une plus haute puissance, n'ayant pour
spcialit que l'universalit mme des phnomnes histo-
riques, ne saurait expliquer l'volution de l'humanit, sans
connatre les transformations des socits, Inversement, la
sociologie ne saurait expliquer les transformations des
socits sans connaltre l'volution de l'humanit. C'est en
vain que Wundt prtend rduire la sociologie une sorte de
statique des socits dont la philosophie de l'histoire consti-
tuerait la dy namique outre que c'est mconnatre le carac-
tre fuyant et tout relatif de la distinction tablie entre le sta-
tique et le dynamique, c'est rduire arbitrairement la socio-
logie un rle descriptif, et lui refuser d'avance ce pouvoir
explicatif sans lequel il n'est pas de vritable science. Il
importe donc de runir sociologie et philosophie de l'histoire
pour obtenir cette explication la fois prcise et complte de
toutes les transformationssociales que tu tes phiiosophieB de
l'histoire d'une part, ni les systmes sociologiquesde l'autre,
n'ont pu jusqu'ici formuler.
M. Harth. pour le prouver, examine les unes et les autres.
tt commence l'exanten des systmes sociologiques, par le
rsum de celui de Comte (dont il note les tendances plus
d'une fois tiotogiques'. C'est en effet de la sociologie de
Comte, qui ne fait d'ailleurs que dvelopper et systmatiser
les ides de Saint Simon, que drivent les principales ten.
dances des sociologies contemporaines. C'est sur le modle
de sa classification des sciences que la sociologie ctassinante
(Littr. Itoberty, de Greef, Lacombe, Wagner) cherche ta-
blir la hirarchie des forces sociales. La sociologie biologique
'Spencer, Litienfetd, SchiUne, t-'outtiee. R. Worms) poursuit
lit comparaison qu'il a institue eutre l'organisme et la socit.
Rnnn, de la sociologie dualiste elle-mme (Ward, Mackenzie,
ttauriou. Giddings),qui nat de la raction contre la sociologie
naturaliste, on pourrait peut-tre dire (bien que l'auteur
ne le dise nulle part expressment) qu'elle met encore en
valeur une ide comtiste, puisque, quelles que fussent les
opinions de Comte sur tes rapports de la psychologie avec
la biologie, sa toi des trois tats mettait en relief l'impor-
tance sociale des transformations de l'esprit. Que ces
trois sortes de sociologies n'aient pas d'ailleurs donn une
explication satisfaisantedes transformationssociales, l'auteur
le prouve, et par des critiques de dtait et par des objec-
tions de principes. Les premiers systmes n'ont offert que
des classifications descriptives, ou, si elles ont prtendu
tre reconstructives, elles se sont montres contraires
l'histoire. Les seconds ont mconnu le rle propre de
l'esprit, par suite l'importance des ides qui unissent les
hommes, et qui crent entre eux des distinctions toutes
spciales. Les troisimes, s'ils ont eu conscience plus
nette de cette importance, n'ont pas su montrer comment
l'esprit, dans la ralit historique, a constitu ta socit ils
n'ont pas su user de cette mthode historique que l'auteur
appelle, avec Vanni, la route royale de la sociologie. En
somme, aucune de ces sociologies n'est suuisammentexplica-

tive, parce qu'aucune n'a su unir intimement la psychologie
et l'histoire.
Plus manifeste encore est t'insutisancede ces conceptions
unilatrales do l'histoire que l'auteur tudie aprs les
'systmes sociotogiques Passant en revue les thories indi.
viduatistesfBourdeau, Tarde), anthropo-gographiquestnitter
Hutze), Mougeotie, ctttootogiques (Gobineau, Putt, Cum-
ptowicx). puis celles qui fout tout dpendre du progrs de ta
culture (Humbo)dt, Tytor), ou des transformations do t'~tat
''Lorenz, Schafer), ou du mouvement des ides (hanke, Laxa-
rus, Steinthat), il n'a pas de peine a montrer qu'elles
prennent la partie pour le tout, et que, faute de distinguer
nettement les ditlrcutes forces concourantes de l'histoire,
chacune d'entre elles laisse inexptiqm'e une grande part des
transformationssociales.
Le chapitre le pins remitrquabie, et de cette partie et du
livre tout entier, est celui daus lequel M. Barth tudie la
conception conomique de i'histoire 'p. ~S-H64). Aprs avoir
briventent rfut, comme trop extrieures et manquant de
psychologie, les thories de M. Durkheim et celles de M. Put-
teu. il s'attaque enfin a cette philosophie de l'histoire dite
matrialiste, qui prtend confrer au socialisme la vateur d'un
systme scientifique fond sur les faits eux-mmes. M. Barth
ta soumet nue critique, non plus toute dialectique, comme
l'avait fait Stanuntcr, mais historique et psychologique.
Les preuves, peu nombreuses, comme on sait, aphorismes,
mtaphores ou exemples jets en passant sur lesquels Marx
tablit ta thorie, sont d'abord rassembls, puis passs au
crible. En parcourant un un les tages de eetto < super-
structure juridique, politique, religieuse dont, suivant
Marx et Kngets, les phnomnesconomiques formeraient ta
base, ou s'aperoit que, si les transformationsdes moyens do
production sont une des conditions de certaines transtornoa-
tions sociales, ettcs sont toia d'en tre la cause unique. Dj
elles ne sont pas seules agir sur les formes du droit de pro-
prit. Ce n'est pas un progrs techniquequi a chang la pro-
prit collective dt' lit yfMs en proprits individuelles ou tes
latifundia en proprits parcettaires. Les institutions de la
fodalit obissent l'influence des souvenirs romains aussi
bien qu' ta pression des rapports conomiques Et ce
sont des ides gatitaires bien plutt que des procds tech-
niques qui ont amen leur ruine. A fortiori, si l'on cherche
les raisons de t'votutiou du droit criminel, et, par exemple,
de l'adoucissement progressifdes peines, est on oblig de tes
demander l'histoire des ides. Que si l'on essaie enHn de
dduire, de la considration des transformationsconomiques,
ASAMiM. SOCtOUKU t'tKMSOt'MQU)! tt9
l'histoire des retigiotM
religions ou encore celle des mathmatiques,
matMmattques,
t'troitessedeta thorie clate. Si l'giisc a possd au moyen
ge uu tiers des biens fonciers, la moiti des revenus et deux
tiers des capitaux, c'est l une preuve, donne par des faits
couotniques, de la puissance des ides.
Mt qu'on ne dise pas (lue ses ides sont suggres l'homme
par le seul milieu conomique. C'est bien plutt du milieu
naturel (lue drivent ces ides des hommes pnmitifs qui,
synthtises dans les religions, doivent exercer tant d'action
sur ta marche des socits. D'aitteurs, des impressions qu'il
reoit de l'extrieur, l'esprit tire des synthsesoriginales qui
assurent justement t'hotnme lu forcede rsister l'intluonce
des milieux soit naturels, soit conomiques. Htptus les soci.
ts sont dveloppes, plus elles portent en elles-mmes de ces
(Buvres de t'espht qui, transmises de gnration en gnra-
tion ou transportes de groupe en groupe, persvrant elles
aussi daus leur tre et accroissant leur force parleur mouve-
ment, assurent l'homme cette indpendance l'gard des
choses (lue lui refuse cette sorte d'a utomatismeconomique'.
A vrai dire, ce sont e!ies qui,
parce qu'elles seules unissent
vritablement les individus, fuut la vritable force des soci-
ts des socits fondes suriesseuts rapports conomiques
sont forcment caduques, tant il est vrai que cette philoso-
phie dite matrialiste, exprimant des proccupations tout
actuelles et pratiques, cdant l'influence de l'heglianisme
en mme temps qu'elle ragit contre lui, n'unifie l'histoire
qu'en la simplifiant abusivement. Tenant pour l'Ocan tout
entier de l'histoire un seul de ses courants, c'est une abstrac-
tion qui s'ignore et qu'on peut qualifier de < simpliste
(p. 303).

Par ces critiques et celles qu'il adresse tant aux autres con-
ceptions uaiateraies de l'histoire qu'aux systmes de socio-
logie, l'auteur a dmontr lu ncessit d'une nouvelle uvre
systmatique, destine uuir la sociologie avec la philosophie
de l'histoire, Il lui reste prouver qu'elle est possible. C'est ce
qu'il fait brivement en discutant les opinions de Ditthey, qui
lui aussi a fait une Introduction aux sciences sociales'. Que
les philosophies de l'histoire aient en effet le plus souvent
us de concepts mtaphysiquestrop gnraux, cela no prouve
pas qu'on ne puisse, ea tenant compte mthodiquement des

() t'</<'</t)~ <)) </<<' tM~MK't'Me/tt'M/~t. Lcip:!g, )8M.


transformationssociales, dgager scientifiquement ce qu'elles
ont de commun. Que les systmes sociologiques aient le plus
souvent, par leurs tendances naturalistes, mconnu ta valeur
et les caractres propres de l'esprit, cela ne prouve pas qu'on
ne puisse dterminer scientifiquement le rle social de cet
esprit mme. H importe seulement de distinguer ici les cou-
cepts et les mtitodes des sciences naturelles. Lorsqu'il
reproche aux sociologues de transposer sans critique, duos le
domaine de l'esprit, les concepts qui ne valent que pour celui
de la nature, M. Ditthey a raison mais non lorsqu'il leur
reproche de vouloir appliquer aux sciences de l'esprit les me.
thodes des sciences natm'eiies, cor les mthodes coM)pat'ative,
inductive et deductive peuvent et doivent s'apptiquer aux
choses de l'esprit, sans impliquer ia mconnaissance de leur
originalit.L'insuffisancedes phitosophiosde t'histoire comme
des systmes sociologiquesqu'on a passes en revue, ne tient
donc pas la nature des choses, et par exemple aux carac-
tres propres de leur objet M. Barth peut enfin entreprendre,
la conscience tranquille, son uvre propre, aprs en avoir
dmontr non seulement la ncessit, mais ia possibilit.
De cette (cuvre. le voiutne que nous analysons nous donne
seulement un avant.gout dans les quinze dernires pages ou
l'auteur esquisse sa thorie personneiie. La horde, iaqueite
correspond h) croyance aux esprits, puis le ctan conu sur le
type des familles dcrites par Morgan (des (cuvn's duquel
rauteurpantit faire grand cas) auquei correspondi'animistne,
puis ia ~c~s. laquelle correspond le potytiteisme, telles sont
les premires phases de t'organisation sociaie. L'intervention
des tegisiateurs substitue les divisions par classes aux divi-
sions par ~c~cs, en mmo temps qu'elle substitue les reli-
gions tgates aux religions naturelles. Cette socit de classes,
l'absolutismeta dissout, dissous il sou tour par le libralisme.
Et, danses dissolutions successives, il faut reconnaitre que
le patrimoine deseroyaneescomntunes, sans lesquelles il n'est
pas de vritable socit, s'est singulirement amoindri. C'est
pourquoi la socit moderne attend un nouvel idalisme qui,
unissant les esprits et les volont", lui rende sa force d'action
morate, en mme temps que de cration esthtique. Et,
vrai dire, il est difficile de voir jusqu'ici, dans cette rapide
esquisse, autre chosequ'uaede ces descriptions schmatiques
de rvolution sociale comme l'auteur en a tui-meme pass
beaucoup en revue; on n'y aperoit pas qu'ette soit plus expti-
cativcque beaucoup d'autres, et elle ne ncessite pas rigou-
reusemeut la suite des types sociaux qu'elle numere. Mais
jusqu' ce que l'auteur ait tabur sou systme, destin
prouver sans nul doute ce que son esquisseaMrme, et expli-
quer ce qu'elle constate, il n'est que juste de retouir tout
jugement sursit sociologie.
A prendre ce premier volume
pour ce qu'il veut tre, c'est.
-dire pour un expos critique des conceptions sociologiques
actuelles, on reconnattra sans peine que le rsume de
M. Barth, ramenant les systmes a leurs principes,
en m~me
temps qu'il donne une ide de leur dtait, indiquant presque
chaque phrase, tant pour l'analyse que pour t'apprcciutioa
des auteurs, les pages auxquelles il fait allusion, est
un des
mieux ordonns en mme temps qu'un des plus prcis
que
noua possdions.
Toutefois, puisque l'auteur paratt se piquer d'tre complet
et de faire juste place aux auteurs les plus rcents, propor-
tinnnettement leur importance pour l'histoire gnrale des
conceptions sociologiques, on pourra naturettcment lui cher-
cher chicane. Si l'on ne saurait lui en vouloir de n'avoir
pas
cit aprs Cobinoau, dans le chapitre de t'ethnoto~e. des
auteurs comme Vacher de Lapouge ou Otto Ammon, qui pour-
tant, aprs tout, ont des lves et manifestent une tendance
assez dfinie, ou lui reprochera pfut-trc avec plus de raison
de n'avoir pas justement marqu le sens d'muvres
comme
celles de Simmel ou de Tarde ou de Durkheim.
PourSimmet.on regrettera que M. Barth ne l'ait cit qu'en
note. et encore pour t'earter sommairement en une seule
phrase (p. )2S). La .~cwW~njwwfy mritait mieux. II
n'et pas t !uutHe de rappeler, entre tant de recherches
d'ingale valeur, celle qui, appeiant l'attention sur les
pro-
grs de la dinrenciationqui correspondent eux-mmes il la
multiplication et t'entre croisement des socitsauxquelles
appartientun mme individu, axpiique. par un fait rellement
social, beaucoup de faits sociaux, et donne ainsi l'exemple
d'une thorie qui veut tre proprement sociologique.
Pour Tarde, bien (lue M. Barth lui ait fait meilleure mesure,
on se plaindra qu'il n'ait pas doun une ide exacte de la
fcondit de sa thorie de l'imitation. C'est la rtrcir
que de
la prsenter en effet comme consistant essentiellement dans
l'adoration de l'homme de gnie, de l'inventeur, et comme
reprsentant par suite, peu prs seule contre l'esprit cottec.
tiviste des ides rgnantes en France p. 2)!i), l'esprit indivi-
dualiste. ft ue faut pas oublier que si Tarde fait une place
u part l'invention, h mettant l'origine des mouvements
sociaux, comme les naturalistes la variation A l'origine des
mouvements biologiques,c'est pour mieux dlhniter ce qui,
dans les phnomneshistoriques, reste objet de science sueiate;
et, sans parle)'desessaisd'expiicatiou qu'il propose des inven-
tions mtMes.en tes reprsentant commedes croisementsd'imi-
tation qui se fcondent, les phnomnes qu'il juge sociologi-
quement explicables, et qu'ii explique en fait, restent assez
nombreux et varies pour qu'o puisse dire qu'il a apport une
thorie acheve (v. p. ~t ) de la socit.
Pour M. Durkheim eniin, on jugera, avec quelque soin que
M. Barth l'ait critique, que c'est mat caractriser ses concep-
tions, que de les ranger d'emble parmi les conceptions co-
notuistes de l'histoire. H est craindre ici que le titre mcme
de l'ouvrage do M. Uurhheitn, ia/rt'<w </ 7'~<t-f~ ait fait
illusion. Parce que ce sont surtout les conomistes qui ont
mis ce phnomne en lumire, il n'est pas dit que. de prouver
son importance sociale, ce soit forcment adopter leurs con-
ceptions. Cela est si vrai que M. Durkhoim dclare ds t'abord
tudier, non la fonction conomique, mais plutt la fonction
morale de la division du travail, et montrer que celle-ci con-
siste essentiellement, non dans la production de biens mat-
riels, mais dans la cration d'une nouvelle forme de ta soli-
darit. Et, bit'u toiu de se reprsenter la socit comme n'ayant
d'autre but que ta production des biens, il rfute au contraire
la thorie des conomistes te dsir de l'accroissement
des biens matriels qui serait, suivant eux, le but dter-
minant de tout le mouvement social, est bien plutt pour
lui un rsultat qu'une fin de la division du travail ce
qui ta provoque, c'est l'accroissement de Ja densit et du
volume des socits, foraut les hommes dinrencier, non
pas seulement, comme parait le penser M. Barth. leur activit
conomique, mais leur activit scientifique, artistique, poli-
tique. Ainsi, ni les consquences de la division du travail'ne
sont pour M. Durkheim purement conomiques, ni ses causes.
On peut donc juger que sa thorie reste extrieure ou mca-
niste, non qu'elle est conomiste elle veut tre purement
sociologique.

\t~ M;K!(0<) << ~(t)-M<<, )'. ~M'U.


Si nous avons relev ces quelques erreurs d'interprtation,
c'est qu'elles ont peut-tre plus d'importancedoctrinale qu'on
ne le croirait au premier abord. Et est enet, nos brves
remarques ont suffi le rappeler deux au moinsdes auteurs
en question, M. Simmel et M. Durkheim, semblent caract-
riss par un vit souci de mettre en lumire ce qu'il y a de
proprement social dans le compiexus des phnomnes his-
toriques. et de spcifier le point de vue particulier a la socio.
logie. Pour eux, il semble que ia tacite propre du sociologue
ne soit pas de faire une sorte de synthse des sciences parti-
cuiicres, mais de dmler, dans tous les ordres de phno-
mnes historiques, conomiques ou politique! l'influence
spcifique de la socit, c'est--dire le rsultat des rapports
qui unissent les individus, et l'action de tous sur chacun.
Hn un mot, il semble que ces auteurs dont il plus

ou moins
mconnu le roie sont justement ceux qui reprsentent cette
conception de ia sociologie que M. Barth devait par-dessus
tout dfinir, car elle est tout justement l'antipode do ia
sienne c'est la conception suivant laquelle il faut autant que
possible spcifier, dlimiter l'uvre propre de la sociologie,
au lieu de l'identifier avec la philosophie de l'histoire elle-
mme. C'est avec cette conception de la sociologie proprement
dite ou spcifique qu'il eut d& engager uu corps a corps.
Hussira-t-it en triompher, en prouvant par le fait qu'une
sociologie synthtique, expliquant l'volution de l'humanit
en mme temps que les transformations des socits, est ds
a prsent possible ? Son prochain volume nous le dira.

Tx. FUNCK-BREXTA.KO. La Science sociale, morale,


politique, 47K.XH p. Ptou, Paris, 1897.
On trouvera mlanges dans le livre de M. Brentano des
vues sur la question sociale dans l'histoire et des rflexions
sur les principes de la science sociale.
Pour M. Brentano, la dsorganisationdes peuples s'explique
par le dclassement des classes moyennes si l'on veut
viter la fois l' < anarchie d'en haut et l' anarchie d'en
bas il faut relever ces classes et, on les instruisant, les
rendre vraiment directrices~
Elles devront, naturellement, perfectionner surtout leur
connaissance scientifique des phnomnes sociaux. Celle-ci
progressera, non par la prpondrance abusive, soit de l'in-
duction, soit de la dduction, mais par l'usage de jugements
justes c'est--dire de jugements dans lesquels le sujet soit
pris dans toute son extension et l'attribut dans toute sa com-
prhension. Ainsi ta science des faits sociaux passera du rang
de science spculative celui de science exacte Ce ne
sera plus une sociologie (l'auteur parait mettre la sociologie
sur le mme plan que l'astrotogie); mais une science
sociate
It est difficile de classer les tendances de ce livre, tant les
prescriptions,soit pratiques, soit mthodologiques, qu'il nous
ottre sont gnrtes et indtermines. Peut-tre le caractrp
mme du Collge libre des sciencessociales o les concep-
tions les plus diffrentes devaient tre exposes cte cte,
et ou M. Brentano a donn, en confrences, les principaux
chapitres de son livre, l'obligeait-il cette sorte d'clectisme
sociologique.

M. VtUXES. La Solence sociale, d'aprs les prin-


cipes de Le Play et de ses continuateurs, 3 vol. 4tM).
4SS p. Bibliothque sociologique internationale. Giard et
Brire, Paris, )8U7.
M.Vignes s'est propose de mettre en lumire, dans leur
principe et dansquetques-uaesau moins de tours principales
applications, un certain nombre d'ides dont l'importance
historique et sociale ne lui parait pas toujours suffisamment
comprise les ides de Le Play et do ses continuateurs.
Conformment tet.rs principes, auxquels d'ailleurs it ne
s'astreint pas servilement (Voyez t. Il, p. te, ce qu'it dit de
i'gaiit; il montre comment l'volution des modes de
production du pain quotidien traversant trois phases, qu'il
appeite < t'age des productions spontanes !'age des
machines < l'ge de la houiito a dtermin tes transfor-

mations de la famille et, par suite, la famille tant, comme
on sait, pour l'cole de Le Play la vritable unit sociale,
les transformationsde la socit tout entire.

Et il n'tait peut-tre pas Inutile en euet de concentrerdans
un expos d'ensemble, en les appuyant d'ailleurs d'exemples
emprunts aux plus rcentes publications, des ides dj&
anciennes, et dont l'influence s'est fait sentir dans un si
grand nombre de monographies.
Cet expos est prcd de quelques considrations tho-
riques. L'auteur y essaie de dfinir le domaine propre do la
sociologie < philosophie gnrale des sciences sociales parti-
culires a (t, p. M), elle tudierait les socits non pas sous
un seul de leurs aspects, comme le font la potitique, ta
morale, l'esthtique par exemple, .mais sous tous leurs
aspects & la fois. Dfinition qui reste ambigu car comment
la sociologie serait-elle autre chose alors que la collection
des sciences sociales particulires? Ht comment concilier
eetto obligation d'tudier < tous les aspects de la socit la
fois (t, p. 32) avec ce culte de." l'observation analytique
(t, p. 19) que nous recommande fauteur? Ses ides, sur la
mthode paraissent d'ailleurs sujettes caution il assimile
au pur raisonnementa priori la mthode dductive prconise
par St. Miti et lui reproche d' carter systmatiquement
l'observation (, p. <2). Mais on sait qu'en montrant que les
lois des phnomnes sociaux devaient tre autant que
pos-
sible rattaches aux lois plus gnrtes do la nature
humaine, St. Miti n'a nullement voulu dire qu'il fallait
cons-
truire priori les sciences sociales la dduction, suivant lui,
ne peut rien sans l'observation qui, ici, la vrifie, et, ta, la
suggre; sans compter que la science taqueite elle doit
emprunter ses prmisses, la psychologie, est elle-mme,
St. Mit) le dit expressment (p. 71 de la traduction Belot), une
science exprimentale.

STUART MtLL. La Logique des soienoes morales.


Traduction nouvelle, par G. Belot, 2t8-xo p. Delagrave,
Paris, 897.
Il faut citer ici cette petite dition scolaire du Vf livre de
ia Logique de St. Mill. Car, d'abord, ces chapitres restent
en
somme, suivant la remarque de Giddiugs, les fondements
solides de la mthodologie sociologique on viterait, en s'y
reportant, bien des discussions par lesquelles on oppose
vainement dduction et induction, abstraction et exprience.
De plus, l'introduction et les notes que M. Belot a ajoutes
sa traduction nouvelle onrent plus d'une indication utile
aux sociologues. M. Belot y montre, par exemple, plus nette-
ment qu'on ne le fait d'ordinaire, sur quel principe devrait
reposer la distinction entre une sociologie gnrate
science d'ensemble, sorte de philosophie de l'histoire oprant
autant que possibte la combinaison concrte des lois sociales
spciales (p. mxv', et une sociologie < pure isolant le cte
proprementsocial desphnomneshistoriques,etqui ne serait
ni la somme ni mme la synthsedes sciences sociales particu-
lires p. t~); contre h sociologie qu'it appelle < mecaniste

it insiste sur le rle de la psychologie dans la constitution des
sciences sociales (p. 8~), tout en imposant une limite l'ex-
ptication individualiste du tout social par les lments p. t t.
tt9) puisque, jusqu' un certain point, les lments eux-
mmes, dans toute organisation, s'expliquent par le tout

E. MtGOLACE. La sociologie par Aug. Comte.


Rsume, 472-x\' p. Atcan, Paris, )8U7.
Rsume aussi < objectif <jne possible, suivant, dvetoppe-
ment par devetoppement,l'ordre du Co)M-j< (/<- p/x/(Mop/t<e posi-
tire. Si t'en se souvient de la lourdeur avec laquelle le fonda-
teur du positivisme y prsente trop souvent ses propres
ides, on conviendra que, mat~r6 ta rdition rceutc de ce
CoMr.< dition, 't8!)3), te rsume de M. Kigoiage, clair et
prcis, n'est pas sans quelque utilit. On se rappettera, eu le
lisant, tout ce que la sociologie contemporaine doit .& Aug.
Comte (voir plus haut, p. ii). Et sans doute on ue. pourra
s'empcher de remarquer en mme temps le caractre souvent
hypothtique des f~enraiisations du fondateurdu poshivisme.
Mais. ainsi que tui-memo l'a plus d'une fois not, il est peut-
tre la fois invitable et indispensable que l'esprit; pour
prendre possession d'un domaine encore Inexplor, com-
mence par un systme d'hypothses gnrtes. It importe
seulement qu' cet ge de la sociologie philosophiqueet gn-
rate. qui a vraisemblablement rendu la plupart des services
qu'on pouvait en attendre,succde enfin t'age de la sociologie
spcifique et positive.

H.S<)t:)).<H:tKMtO).<'<:t~CH
t:

J. NOVtCOW. Conscience et volont sociales, 380 p.


Bibliothque sociologique internationale, Ciard et Brire
Paris, i8;)7.
Le livre do M. Xovicow prsente, juxtaposes, des rHexions
sur la thorie organique des socits et des considrationssur
la psychologiesociale.
On pouvait croire que la thorie organique avait, en ces
dernires annes, dit son dernier mot, et qu'en se poussant
jusqu' l'extrme. elle s'tait elle-mme rfute par l'absurde.
M. Xovico\v te reeounatt. t)es analogies tat-tic!) d'une faon
trop superficielle, trop factice, et parfois mme un peu pu-
riie, l'out beaucoup dconsidre. tt tient cependant que le
salut de ta sociologie est en elle. Par elle seule la sociologie,
rattactte enfin a une science ptus gnrate, cessera de
ptauer dans le vide et de nager dans la fantaisie.
En vain on rappelleque les units sof.iates sont discontinues
et conscientes, et les cettutes du corps contigues et incons'
cientes. Ces oppositionssont toutes relatives et se fondent en
diffrences de degrs.
Mais, dira-t-on, tandis que. dans ta socit, toutes les
units, qu'ettes appartiennent t'etite ou la masse, sont de
mme nature, tandis que dans le corps, tes cellules crbrales
diffrent totalement des autres? Kttes teur ressemblaient pri-
mitivement, elles ne s'en sont diffrencies que petit petit
p. ~4). De mme devra se diffrencier t'tite de la masse. Si
l'opration n'est pas encore faite, ceta prouve que les socits
sont des organismes moins parfaits qute corps humain par
exemple, et non qu'elles ne sont pas des organismes. Leur
effort devra justement tre de se perfectionner l'image des
organismes les plus tevcs, en se constituant" un sensorium
social.
C'est l'importance de ce sensorium que M. Novicow se
propose de mettre en lumire. Demandons,nous en effet ce
qu'est une volition vraiment sociale. C'est une votition portant
sur l'ensemble de ia soeit.)', ayant pour objet, par exemple,
non telles rformes locales, mais tettes transformations
gnrtesdes lois, des murs, des ides. A quelle condition
est-on capable de pan'ittes volitions? A la condition de pos-
sder, au pralable, une reprsentation d'ensemble de la
socit, et non pas seulement de sa place dans l'espace et
dans le temps, de sa gographie et de son histoire, mais, jus-
qu' un certain point, de sa structure. Le rayon des volitions
sociales se mesure celui de cette vision interne des socits.
Or, de pareilles visions, toutes les units sociales parti-
cipent-elles? On ne trouverait dans les consciencesde la plu-
part, que des vues bornes, toutes locales et matrielles.
Seule une minorit a assez de loisir, de libert et de largeur
d'esprit pour embrasser du regard tout l'horizon social. C'est
l'lite, c'est l'aristocratie. Et sans doute ces deux tenues
ne
sont pas synonymes. Ou peut tre richf et notable suns agir
sur les ides sociales, comme ou peut agir sur les ides
sociales sans tre riche et notable. Cependant, l'lite et raris-
tocratie se ctoient constamment. Si l'aristocratie a besoin
d'une lite qui labore la culture intellectuelle, l'lite ne peut
presque pus vivre et produire sans le secours matriel d'une
aristocratie. Celle-ci ne doit assurment reposer ni sur i'ex-
clusivisme, ni sur le privttge. Une aristocratie ferme est
une contradiction t ~'w(M p. La vritabte aristocratie
devrait avoir horreur du privilge comme d'une souillure
p. 48). II n'en est pas moins vrai que, eu s'unissant aussi
troitement que possible l'lite. textes deux doivent former
une classe aussi < nettement dinrencie que possible du
reste de la nation. Le sensorium social les comprend en
mme temps et dans une mesure semblable. Mais le gouver-
nement proprement dit est loin d'y tenir la mme place.
Sans doute, leur mtier mme donne bien forcemeut aux
gouvernants certaines vues d'eusemble sur la structure
sociale. ii est rare cependant que les gouvernants soient on
mme temps les laborateurs de ces ides sur lesquelles les
socits vivent. Dans le cerveau, les cellules qui laborent la
pense et le sentiment ne se confondent pas avec celles qui
prsident aux mouvements des corps les cellules sensitives
sont distinctes des cellules motrices (p. 66, 100). Ainsi
devons-nous distinguer le gouvernement de l'tite.
Pour mesurer l'importance des fonctions de ce cerveau
social, analysons te mcanismede l'action sociale. Sensation,
perception, ide, dsir, volition, action consciente, puis
renexe, tel est le cycle du phnomne psychique Pour
que telle action s'impose ta socit, il faut donc que la
socit ait pratabiement agr telle ide. Or, qu'il s'agisse
d'un mot nouveau, d'une thorie philosophique ou d'une
mesure politique, une ide ne sera agre de la masse que si
elle a t consacre par une tite. Et sans doute une ide peut
na!tre partout, l'esprit souflle o it veut, mais en tout cas il
faudra qu'elle monte jusqu' FUte pour devenir action
sociale, consciente ou rflexe. Ce sont ainsi les o~<<M)e(M qui,
grce leur notorit mme, dictent la masse le vrai et le
faux, le juste et l'injuste, le vulgaire et le distingu. L'idal
social est leur uvre.
Que leur action, en ce sens, soit singulirement plus etu.
caeo que J'action des gouvernements,que cette-ci mme sup-
pose toujours cette-ta, on ne s'en rend pas assez compte. On
parattcroireque, par ta force dont ils disposent, les gouverne-
ments sont capables de modifier tes socits & leur ide. Mais
d'abord cette ide mme, i)s ta reoivent ptus qu'ils ne la
crent: ta tradition ou la mode la tour impose. Et puis, cette
force son tour ne peut exercer une action sociale que si elle
est aide par certaines ides reues dans la socit. Comment
les gouvernements pourrnient-ils rprimer les rbellions, si
l'ide n'tait tacitement admise par l'ensemble, qu'il faut
obir aux autorits. En ce sons il est vrai do dire que les.
muscles lie sont nullement les moteurs des actions sociales
~p.~0~); toute action sociale s'accomplit par t'intermdiaire
de la persuasion, directe ou indirecte (p. i42;. Us se trompent
donc ceux qui, pour agir sur la socit, regardent ta coercition
comme le moyen le plus sur et le plus rapide. Hn ratit, par
la rsistance qu'elle provoque, et le choc qu'elle donne & la
conscience sociale, elle retarde le succs de ce qu'elle veut
imposer. La force ne peut rien suus les ides, presque rien
sur les ides.
Si l'on est parfois port oublier leur primaut sociale, c'est
qu'en effet il vient un moment of) les ides se cachent en
quelque sorte: sans cesser d'agir, elles descendent dans t'in-
conscient. Lorsque t'ttte a fait accepter dfinitivement, tant
par la foi que par le raisonnement, une opinion au groupe
social tout entier, cette-ci. ne rencontrant plus de discussion,
continue de pot-ter ses enets, sans veitter dsormais la sensi-
bilit publique. Elle parat juste, c'est--dire conforme
l'ordre des choses, et l'on ne comprend plus qu'elle oit pu ne
pas rgner. Les individus lui obissent alors sans raisonner,
instinctivement, automatiquement. C'est un rflexe social.
Par l'adoption pleine et entire de la masse, l'ide retourne
la nuit dont l'lite l'avait un instant tire. Ainsi, de l'incons-
cience l'inconscience, tel est le cycle complet des ides
sociales. Le sensorium de la socit qui est t'eiite s'attache
elles, puis il s'en dtache, soit parce qu'elles ont t dmon-
tres fausses, soit parce qu'elles ont t universellement
admises comme vraies.
Ainsi l'ide du fdralisme europen, chre t'autour, qui
ne proccupe aujourd'hui qu'un trop petit nombre de gens,
seuls capables d'avec une reprsentation complte de l'Eu-
rope et une science exacte de ses vritables intrts, s'impo-
sera peu peu tous les esprits, et un jour viendra o elle
ne proccupera plus personne. Elle ne fera plus question. Ce
sera. pour ainsi dire une affaire entendue. L'ide aura vcu.
Cette volution peut d'aitteurstre plus ou moins rapide.
Cela dpend et des caractres intrinsques des ides, de leur
simplicit ou de leur complexit relatives, et des moyens
extrieurs de propagation dont elles disposent. Toutes les
inventions industrielles, depuis ta locomotive jusqu' la
presse, par lesquelles l'homme s'tulranehit progressivement
de t'espace et du temps, contribuent en mme temps qu' la
dure de la mmoire a la vitesse de la pense sociale.
Mais, plus encore (lue la quantit et lu qualit de ces
moyens matriels, importent a ta vitesse des ides sociales ta
quantit et la qualit des cousciences capables de les former
ou de les comprendre, c'est -dire, en mme temps que ta
proportion numrique de l'lite au regard de l'ensemble,, la
faon dont cette lite entend ses devoirs l'gard de cet
ensemble.
Il n'y n pas de volitions proprement sociales, et par cons-
quent, vrai dire, il n'y a pas de vie collective l o les
socits n'ont pas la force de se constituer ou cette de se con-
server une aristocratie assez nombreuse qui leur serve de
cerveau. La mme anmie crbrale se produit quand l'or-
gane, bien qu'existant, no fonctionne pas, c'est--dire quand
l'aristocratie est carte par les constitutions politiques de
son uvre naturelle, ou quand, ce qui est pis encore, elle s'en
dtourne d'ette-mme, perdant la notion de ses devoirs. C'est
ainsi que toutes les conqutes de la civilisation moderne ont
t faites contre l'aristocratie. Le sensorium social a mal
compris son rle; l'organe s'est atrophi.
Et c'est en vain (lue, pour remdier cette atonie de la
conscience sociale abandonne par l'aristocratie, tes gouver-
nements s'vertuent. Les cettutes de l'organe rgulateur ne
sauraient se substituer aux cellules de t'organe sensoriel.
L'hypertrophie de celles-l, loin de remdier . l'atrophie de
celles-ci, t'aggrave, et l'organisme gnral se trouve deux fois
malade. Un gouvernement qui entend bien ses fonctions doit
se borner faire respecter la justice. Dans un monde de
liberts rgles par la seule justice, une lite saura bien se
former et prendre la direction de la masse.
Ce n'est pas seulement le nombre et la vitalit des units
acttves de la conscience sociale (lui varie; c'est encore la
nature des objets auxquels elle s'applique, et ta connaissance
des variations de ces objets principaux, aussi bien que celle
des variations de ses lments constituants, est ncessaire a
l'explication de l'histoifG. Comme ta conscience individuelle,
quoique a un moindre degr, la conscience sociale, est con-
damne ne concevoir clairement qu'une grande ide ia
fois. C'est pourquoi elle < srie tout spontanment les
diftreates questions qui nttcndont leur tour, en quelque
sorte, pour passer a l'ordre du jour. Suivant M. Novicow,
Il serait possible do formuler d'une faon gnrale ia loi de
leur succession devant l'esprit de l'humanit. L'volution
biologique lve peu peu les tres du physique au mental.
Ainsi rvolution sociale substitue peu & peu, aux questions
d'ordre matriel qui occupent d'abord tout le premier plan
de la consciencepublique, les questions d'ordre moral. Les
volitions conomiques cdent le pas aux volitions politiques,
celles-ci aux volitions intellectuelle! L'auteur, repreuaut ici
et illustrant a nouveau les ides avec lesquelles ses livres
sur les 7.M~M <'~'<' socM<~ /tMM'HM et sur les ~Mpt~M
f/M .for~~ HtOf~f'Mp.t nous ont fantiiiarises, en dduit le
sens des volitions de l'avenir. Les socits poursuivront
toujours leur intrt, car c'est une loi de nature, mais elles
l'entendront enfin raisonnablement. Elles abandonneront
enfin la folie protectionniste ou la folie kilomtrique,
elles se tasseront enfin d'lever des barricres inutiles et
coteuses, comme de s'annexer des territoires coteux et
inutiles. Elles comprendront que les vraies luttes fcondes
sont les luttes mentales, et qu'il faut abandonner, pour les
mener, les procds grossiers tels que les guerres coups de
tarifs ou coups de canon, bons tout au plus pour les phases
infrieures de la lutte. Il appar:)!traalors que les nationalits
ne sont que des ensembles d'institutions conomiques, poli-
tiques et judiciaires au service d'une culture inteliectuelte
(p. 33)). Et l'on peut mme prvoir le moment o la culture
intellectuelle gnrale, devenant enfin sa fin & ette-mme, se
dbarrassera do la tutelle des nations et rejettera dfinitive-
ment leurs lisires dans le pass. Alors l'humanit tout
entire agira enfin scientifiquement, guide par une lite de
gentilshommessociologues (p. 61,3t!2).
Et qu'on ne voie pas l un idal quasi surhumain ou du
moins surnaturel, qu'on ne pourrait atteindre qu'en combat-
tant, comme dit Huxley, le processus cosmique. Cette rforme.
de l'humanit rencontre bien des obstacles, mais dans les
ides humaines, et non dans les lois naturelles. C'est un con-
traire imiter servilement ht nature que de transformer l'hu-
manit dans le sens que nous avons marque; car c'est cette
transformationqui fera d'elle uu vritable organisme, dont
toutes les parties seront solidaires, en mme temps que son
cerveau sera nettetneatdinrencidurestedesoncorps. Veut-
on savoir eu un mot sur quel modle rgler les rapports inter-
nationaux comme ta structure interne des socits ? Il suMt
d'en revenir la thorie organique (p. 358).
Tel est, dans ses grandeslignes, l'ouvrage de M. Novicow.
Mais, s'il a pu en indiquer l'esprit, notre bref rsum n'a
donn aucune ide ni de l'ingniosit des aperus que l'au-
teur propose en passant, ui de l'aisance avec laquelle il se
meut travers l'histoire et la gographie, depuis les consi-
drations sur l'antiquit jusqu'aux statistiques modernes, ni
de la verve enfin avec laquelle il met au service d'une ide
gnreuse les matriaux les plus divers. 11 faudrait analyser
chaque chapitre en dtail pour rendre justice cet ensemble
de qualits qui font de M. Novicow, aprs M. Tarde, un des
plus vivants, on pourrait dire en l'entendant, bien, un des
plus amusants parmi ies sociologues contemporains.
Il nous reste seutemeut nousdemander,puisque M. !<ovi-
cow nous a annonc qu'il voulait, en les appuyant la biolo-
gie, fonder scientifiquement, ses considrations sociologiques
et rattacher ainsi la sociologie a cette science plus gnrale
sans laquelle elle flotterait dans le vide, si vraiment la tho-
rie organique lui a rendu les services qu'il en attendait.
Et d'abord, on regrettera peut-tre que, en le proccupant
en effet de vrits plus gnrales elle ait dtourn son
esprit de la recherche des vrits spcifiques, propres & la
sociologie. Si c'est en efet une chimre que d'essayerdo cons-
tituer de pied en cap une sociologie indpendante puis-
que, quel que soit leur objet, les sciences no peuvent s'lever
qu'en s'appuyant, it un certain moment, les unes sur les
autres, ce n'en est peut-tre pas une que d'essayer de dlimi-
ter une sociologie distincte capable de dfinir, avant de
le rduire, son objet propre. Il n'et pas t mauvais, par
exemple, que dans un livre traitant de la conscience et
volont sociales, on trouvt un efort pour formuler avec pr-
cision ce en quoi une volont soriale se distingue des volonts
purement individuelles, si elle en est seulement une somme
ou nue synthse .<<)'~KCt'M, pouf classer mthodiquement les
influences que les formes proprement Mc<~, c'est--dire,
par exemple, le nombre ou la densit des individus mis en
relation, le degr ou la nature de leur organisation, peuvent
exercer sur )a gense et l'orientation de ces mmes volonts.
C'et t sans doute une dmarche scientifique que la recher-
che pralable de ces rotations spcifiques.
Et que ces relations spcifiques, qu'on pourrait peut-tre
dcouvrir, par exemple, en comparant mthodiquement la
marche des volonts sociales dans les socits de formes ana.
togues et diffrentes puissentet doivent tre leur tour expli-
ques par des lois plus gnrtes, nous on sommes pour notre
part persuades. Mais il reste savoir si, ces lois plus gne.
rates, explicatives des lois sociologiques, il faut les chercher
dans la biologie.
Demandons-nous donc en quoi les connaissances biolo-
giques dont il s'est servi ont prcise les conceptions sociales
de l'auteur et explique les faits qu'il constatait. Est-ce
expliquer scientifiquement le fait qu'une reprsentation nette
de ta patrie provoque ordinairement le patriotisme que de
rappeler que la reaction du muscle est en raison directe de
l'nergie de l'excitation (p. 2H)? Est-ce donner une raison
suffisante pour commander la distinction du gouvernement
et de ftitc que d'affirmer la distinction des cellules motrices
et des cettutes sensitives? Est-ce prciser les ides que d'as-
similer l'aristocratie an cerveau pour prouver que cette-t,
comme celui-ci, doit tre < nettement diffrencie du reste
de l'organisme ? Par cette diffrenciation nette fauteur,
puisqu'il ne veut pas entendre parler de privilges ot de
castes, comprend-il donc que les individus composant l'lite
sont, ou doivent tre physiologiquement diffrents des autres
comme sont diffrentes des autres les cellules qui composent
te cerveau ? Ses comparaisons biologiques ne nous renseignent
nullement ni sur ia faon dont on doit distinguer dans la
socit l'lite de la masse, ni mme sur la ncessite de la dis.
tinguer. Et lorsque l'auteur, mtant la constatation des faits
avec l'indicationde t'idai, nous dit que les tats de l'Europe
doivent so fdrer parce que dans les organismes en gnrai
toutes les parties sont solidaires, ou que, dans les nations
modernes, les aristocraties doivent se diffrencier de plus en
plus, parce que, dans certainsorganismes, te cerveau est trs
distinct du reste du corps, il e<t difficile de voir dans ces
comparaisonsquirelient des phnomnes sociaux quelconques
avec des phnomnes biologiques quelconques, autre chose
que ces choix arbitraires que fauteur se promettait justement
d'viter par son recours u ta thorie organique.
C'est que les phnomnes biologiques sont trop etoigos
des phnomnes sociaux pour sunire tes dterminer. Entre
eeux-t& et ceux-ci se trouvent des intermdiaires dont la con-
naissance peut dcouvrir au sociologue des causes plus pro-
chaines des relations qu'il constate, et ce sont les phno-
mnes psychologiques. Par cela mme que les phnomnes
proprement sociaux rsultent directement des relations qui
s'tablissent entre les consciences individuelles, c'est la
science des faits de conscience qui importe le plus au socio-
logue. Et de fait, notre auteur en a le vif sentiment. Sans
compter les nombreuses explications toutes psychologiques
dont son livre est rempli, n'affirme-t-it pas tui-meme, en
principe, que les phnomnes sociaux sont conditionns
directement par des phnomnes psychiques, non par des
agents chimiques ou physiques (p. 356;, que le moteur imm-
diat des actions sociales restera toujours un acte psychique ?
Ne va-t'it pas mme beaucoup plus loin que n'iraient tels
sociologues, persuades pourtant de l'importancede ta psycho-
logie sociale, lorsqu'il anirme que tout acte social se rsout
en un certain nombre d'actes psychiques (p. 3H4), ou encore
que les ides proprementdites mnent le monde comme ettes
votent 'p. MC)? Ne sommes-nous donc pas obligs de cons-
tater la juxtaposition dans le livre de M. Novicow de deux
tendancescontraires, l'une qui t'entrane rattacher la socio-
logie la biologie, l'autre, la rattacher la psychologie?
Contradiction, dira-t-on, pour qui regarde la psychologie
comme distincte de la biologie,mais non pour qui les regarde,
ainsi que le fait sans doute M. Novicow, comme identiques.
Nous rpondrons que cette identification des faits de cons-
cience avec leurs conditions organiques suppose une thorie
mtaphysique laquelle lit sociologie n'a nul besoin de s'in-
foder, et dont elle a au contraire toutes sortes de bonnes
raisons de se dfendre, comme tant matressede vague et de
confusion. Le livre de M. Novicow tui-meme en donne plus
d'une fois la preuve. Pour n'avoir pas regard les phnomnes
psychologiques en face, pour ainsi dire, et cherch leurs
caractres propres, a combien de notions vagues n'est on pas
expos?
Est-ce dfinir la nature propre de l'erreur que do dclarer
qu'ett est < un discordance entre le monde externe et le
moi interne, doucunosoufh'unce '(p.)2~? Ou encore sommes-
nous bien avancs (M. Novicow parait prt se le demander
lui-mme) quand on nous M dit du sentiment qu'il est un
tat particulier du cerveau (p. tt)K.? Ht rciproquement,
cette identification de la psycitoiogieavecla biologie, celle-ci ne
perd-elle pas souvent en prcision ? Quand M. Novicow affirme
que chaque cellule do notre corps possde un certain degr
de cousctence 'p, t6), n'est-ce pas confondre les vrits mta-
physiquement vraisembtaMesavec tes vrits scientifiquement
dmontres?Et quand il affirme encore, plusieurs reprises
(p. 93, 97, <13.que le triomphe d'une ide dans le cerveau
dpend do l'adhsion d'une cellule qui fait pencher la balance,
comme ta victoire d'une proposition dpend de l'adhsion
d'un dput qui lui assure la majorit, ou peut se demander
si labiologie surtaquettoM.Novicowveut fonder scientifique-
ment sa sociologie n'est pas eiie-mme plus mtaphorique
que scientifique.
En un mot, outre qu'elle fait oublier les caractres distinc-
tifs des phnomnes sociaux, cette bio-psycho-sociologiefait
oublier encore ici les caractres distinctifs des phnomnes
psychologiques,et ta les caractres distinctits des phnomnes
biologiques. Ktte aboutit un mlange de notions dont ne
voudraient sans doute ni les spcialistes de la psychologie,
ni ceux de la biologie. Pourquoi ds lors les spcialistes de la
sociologie s'en contenteraient-ils?

DEMOOR, MASSART ET VANDERVELDE. L'volution


rgressive en biologie et en sociologie. 3~4 p. Atcan,
Paris, 1897.
Ce livre a t prsent l'Institut des sciences sociales de
Bruxelles, dont le fondateur, dt. Ernest Sotvay, attendait,
nous disent les auteurs, du retentissement des progrs des
sciences naturelles sur les sciencessociales, les plus fructueux
rsultats. MM. Dcmoor, Massart et Vandervetde ne nient pas
ce qu'on a appel la banqueroute de la sociologie biolo-
gique mais ils l'attribuent au fait que trop souvent les
recherches bio-sociologiquesont t poursuivies,soit par des
naturalistes peu au courant des questions sociales, soit par
des sociologues dont les connaissances biologique! taient
incompltes et superficielles. C'est pour obvier ce danger
<)u'its se sont associes, coordonnant fes rsultats de leurs
recherches spciales.
Sans s'arrter a cette question de n)ots < Les socits
<toivpnt-ettes tre considres comme des organismes, ou les
organismes comme des socits", ils se contentent de cons-
tater que les organismes et les socits prsentent des carac-
tres communs en mme temps que des caractres ditren-
tieis. Cttex les unes comme chei! les autres, il y a concours
entre les units composantes. Mais, tandis que dans les
agrgats organiques il y a entre ces units continuit physio-
logique, dans les agrgats proprement sociaux leur concours
est exclusivement dti A des relations d'ordre psychique.
t)e ta dcoulent d'importantes diierences. Tandis qu'en
biologie la notion d'organisme correspond, au moins en
gnrt, quelque chose de prcis, en sociologie il n'y a
gure de dmarcations prcises entre les groupes sociaux
coexistants. Tandis qu'une cellule ne peut pas faire partie de
deux organismes, rien n'empche les membres d'un groupe
social d'appartenir en mme temps d'autres groupes. Plus
vite enfin et plus aisment que les organismes se trans-
forment les socits, leur structure dpendant, non des liens
physiologiques, mais des liens contractuels qui existent
eutre leurs membres. Et c'est pourquoi les mthodes com-
paratives, en sociologie, doivent cder le pas il ia mthode
historique.
On voit que les auteurs abandonnent lestement la plupart
des thses chres la thorie organique, tts n'en jugent pas
moins qu'il peut tre utile de comparer mthodiquement, sur
un point spcial, les organismes et les socits la lumire
de cette comparaison, ils prouveront cette ide qui, partie
de la Motogie, a si rapidement envahi la sociologie, l'ide
de l'volution rgressive.
L'examen, soit des organes homodynames dans un mme
individu, soit, chez des individus diffrents, des organes
homologues prouve que toute transformation proprement
dite de certains tments entrulne ncessairement ta rgres-
sion de certains autres. Hn s'adaptant, les uns ta mastica-
tion, les autres ta prhension, les appendices de l'crevisse
voient se rduire, les uns leurexopodite. les autres leur basi-
podite. En s'adaptant, qui au vol, qui a la course, qui au
rouissage, diffrentes espces animtes voient se rduire qui
leurs avant-bras, qui leurs ongles, qui leurs poils. Qu'on
examine maintenant tes transformations d'institutions simi-
laires dans une mme socit, ou les transformationsd'une
mme institution dans des socits ditferentes. on aboutit a
des constatations anatogues. Le dveloppement progressif des
impts et des taxes en Mexique Il t accompagttK d'une
rgressioncorrlative du domaine communal. La rgression
de ta proprit (amiiiate dans le Montngro, de la proprit
vittageoiseen Hussie. communaie en Suisse, a partout accom-
pagne le progrs de t'individuutisme 'tivre t, t'* partie'.
Mais, dans l'ordre biologique, lorsqu'un organe tend ainsi
disparatre, il arrive souvent que. sans disparatre compl-
tement, il laisse des traces, images rduites de tui-mOne.
Tous les organismes portent ainsi des organes rduits tels
sont, chez l'homme, ht glande pineate, le ntum terminale,
l'appendice vermiforme, le tubercute de Darwiu. L'examen
non pas seulement des plus ttautes. mais des plus basses
classesdes animaux et des vgtaux eux-mmes prouve que
l'existence de ces organes rduits n'est pas l'exception, mais la
rgle. Ainsi eu est-il, dans les soci''tes. pour les survivances.
Il est possible de prouver que, de mme que les groupes
sociaux les plus primitifs, comme les hordes des Fuegiens
ou des Veddahs, portent dj en eux des reliquats du passe.
les groupes les moins nusoncistes.connne les tats-Unis, en
portent encore, tt suffit d'aiiteurs d'un coup d'mii sur tes us
et coutumesdu mariage, par exemple, dans i'Hurope moderne,
pour se rendre compte des traces qu'y laissent encore les
formes de mariage les plus primitives. Dans les socits
comme dans les organismes, les survivances sont de rgie,
prouves vivantes de t'universatite de la rgression (livre
'2' partie
Mais ce phnomne universel obeit-ii a une loi ncessaire.
et, comme son nom parait l'indiquer, suit i), dans son evoiu-
tion, l'ordre exactement inverse de celui de l'volution pro-
gressive ? En un mot. cette ide que les psycho-physioiogistes
et aprs eux les sociologues ont rcemment mise en honneur
on se rclamant do la biologie, et suivant laquelle les phuo.
mnes tendraient a disparatre dans l'ordre inverse de leur
ordre d'apparition, les derniers s'eftaant les premiers, est-
elle veriuee par les faits? Si, dans l'ordre biologique, elle
parait s'appliquer il quelques cas, comme la rgression de
l'organe pinai chez les Lacertiliens, elle est bien plus sou-
veut dmentie chez les crustacs abyssaux, par exemple, la
rgression des organes visuels ne s'est nullement faite en
sens inverse de leur volution phytogntique. Les organes
les derniers acquis ne sont pas toujours, quoi qu'on en ait
dit, les moins stables, et s'ils se trouvent tre les plus utiles,
la slection naturette, bien loin de les liminer, les conserve
soigneusement.
Dans l'ordre sociologique, l'ide que le < regrs comme
dit M. de Greef, s'aecomptitdans l'ordre inverse du progrs
est encore plus difficile tablir. Pour quelques faits qui
semblent i'autot'iser. comme la disparition des cours do jus-
tice des dizaines, des centaines et des comts en Angleterre,
qui s'est accomplie en ellet suivant l'ordre renvers de leur
apparition, ou la dgnrescence de certaines corporations
dans la West-Flandre, dont les dernires nes ont t en
ellet les prenures mortes, combien lui sont dfavorables!
Les lois les plus rcentes sont loin de tomber toujours les
premires en dsutude. Les usages survivent aux ides qui
les out pourtant entantes. La noblesse meurt avant les titres
et les armoiries qui sont ns d'elle. Maint systme religieux
ou politique, ou juridique, postrieur cependant telle
organisation sociale, vit encore longtemps aprs qu'elle a
vcu. Eu un mot, il n'est pas vrai que les institutions sociales
les plus rcentes soient toujours les plus fragiles incons-
ciemment ou consciemment, capables d'ajouter la situation
naturelle la slection artificielle, les socits se rglent, pour
conserver ou abandonner leurs institutions, sur le degr de
leur utilit, non sur l'ordre de leur anciennet (livre JI,
P" partie).
Si donc les structures organiques ou sociaios les dernires
acquises ne sont nullement toujours les premires perdues,
rien n'autorise penser que l'volutiondes organismes et des
socits soit rversible et que les uns ou les autres doivent
ncessairement, en partant des formes les plus rcentes,
revenir leurs tonnes primitives. Et, en effet, dans le rgne
auimal ou vgtt, sauf quetques exceptions qui ne paraissent
aucunement montrer dans la rversibilit une ncessit natu-
relle, on ne voit pas un organe disparu rapparatre, ou un
organe rduit reprendre sa fonction primitive. La socio-
logie devra se montrer plus dfiante encore l'gard de ces
apparents <wo<'<t de l'histoire. Les phnomnes en ralit les
plus diffrents peuvent se cacher sous l'identit des noms.
Les snats modernes n'ont avec les snats antiques que le
nom de commun. Au fond, rien n'est plus teigne du com-
munisme archaque que tecotkctivisme moderne, du troc que
le cteariug-house. Si parfois quelques institutions antiques
rfapparaissent rettement. comme le contubernium des
ttonains chez les esclaves des Antittef), ce sont l des cas de
convergence l'aualogie des conditions a produit dos institu-
tions analogues. Pour que de pareilles reviviscencesfussent
une rgie gnrale, il faudrait que les milieux sociaux rede-
vinssent exactement ce qu'ils taient jadis, ce qui est
impossible (livre tt, partie;.
On s'expliquera aisment cette indtermination relative de
l'volution rgressive si t'en recherche les causes soit de
l'atrophie, soit de la survivance des organes ou des iustitu-
tions, et si l'on se rend compte qu'elle ne se droule pas fata-
lement suivant une loi fixe d'avance, mais qu'elle fait,
ne ou
se dveloppant, qu'obira t'actionde difrents facteurs, don-
ns ou non suivant les circonstances. Ainsi l'atrophie des
organes s'expliquera tantt par le dfaut de place, comme
dans le cas des dents, dont le nombre et le volume diminuent.
chez certains animaux, par l'amoindrissement des maxil-
laires, tantt par le dfaut d'usage, comme dans le cas des
arcs branchiaux chez les mammifres ou des muscles flchis-
seurs et extenseurs de la main chez les ctacs, tantt par

le dfaut de nutrition, comme dans le cas du pistil et des ta-
mines chez certaines fleurs. Si. malgr qu'Usaientt exposs
ces causes d'atrophie, certains organes rduits subsistent
cependantt'tatrduit et sans fonction, c'est, ou bien qu'au-
cune variation individuelle ne s'est produite pour assurer un
avantage ceux qui se seraient dbarrasss de ces organes, ou
bien qu' raison de leur insignifiance la slection a pour ainsi
dire oubli de les liminer.
Des causes analogues d'atrophie et de survivance poussent
et retiennent dans leur rgression les institutions sociales.
Dans la socit aussi, le dfaut d'usage atrophie voyez la
dcadence de ta corporation des dbardeurs dans le port de
Bruges, ou celle des cours forestires en Angleterre. Dans la
socit aussi, atrophie le dfaut de ressources voyez la dca-
dence desadministrations locales la fin de t'Hmpire romain,
ou des zadrugas dans le Montngro. En revanche, reconnais-
sent nos auteurs (p. 27S), il faudrait sacrilier au dsir des
analogies quand mme pour trouver dans les socits quoi que
ce soit qui ressemble a l'atrophie par dfaut dplace. Ils font
d'aitteurs remarquer,d'une faon plus gnrale, que lit socit
emploie souvent, pour atrophier les institutions, des moyens
propres dont lu nature ne dispose pus; ses inventions sont
plus riches que les variations accidentettes, ses imitations
plus souples que les transmissions ttrditaires ses seiee-
tions artificielles eaHn plus complexes que les stections
naturelles, De mme donc qu'eHeest capable de condamnera
mort, brutalement, telle institution, de mme la socit est
capable de prolonger artificiettement t'agoaie de telle autre.
Et s'il eu est qui se maintiennent parce qu'elles sont insigni-
fiantes, comme le rgime des substitutions la Martinique,
d'autres parce qu'elles ont une utilit indirecte, comme ces
sincures qui ne sont qu'un mode dtourn de rmunration
pour les artistes ou les savants, il en est aussi qui se main-
tiennent, comme la plupart des pratiques crmonielles, pur
le seul amour (tes traditions, ou, comme les avoueries ta tin
du moyen ge, par la seule contraintede t't~tat. En un mot Ja
socit modine & sa manire, dans certains cas, Ja vie de ses
institutions. ti n'en est pas moins vrai que, prendre les
choses en gros, les causes qui entratnent leur volution
rgressive sont les mmes que celles qui entratnent l'volu-
tion rgressive des organes elles se rduisent en dernire
analyse lit limitation des moyens do subsistance qui, provo-'
quant la lutte des lments en prsence, amne la rgression
de certains d'entre eux.
tt est donc prouv et expliqu, par t'nonc de ces causes
mmes, que la rgression, pour universelle qu'elle est, ne
s'opre cependant pas dans un ordre dtermin, inverse de
celui de 1'volution progressive, et en ce sens on peut dire
que le livre aboutit, en somme, dmontrer que son titre
l'volution rgressive est un terme impropre (p. ~())et
propice aux quivoques.
Si nous avons fidlement indiqu danse rsumt'ordrect
la marche des ides de MM. Demonr, Massartet Yandervetde,
on a pu se rendre compte que l'association de ses diffrents
auteurs n'a nullement nui la clart du livre. Cette division
du travail a au contraire contribu, sans doute, la nettet
des divisions de ffauvre, dans laquelle apparaissent tour
tour, mthodiquement compars propos de t'universa!it.
puis de l'ordre, puis des causes de l'volution rgressive, les
organes, puis les institutions. Si parfois tes observations qui
concernent celles-ci nous paraissent moins riches ou moins
prcises que les autres, il est juste d'attribuer tant l'tat
actueiqu' l'objet propre del sociologie,cotte intriorit rein-
tive. Les faits constates de part et d'autre suffisent d'uiiieurs
amplement prouver la ralit desanalogiesque les
auteurs
se proposent d'tablir.
Il importe seulement de s'entendre sur ia porte scientifique
de pareils rapprochementset de rappeler
une fois do piusque
si mthodiquement qu'elles soient conduites, les
comparai-
sons ne sont pas des raisons. Ce n'est pas parce qu'il y a
des organes atrophisdans ia nature qu'il
y a des survivances
dansiu socit. Et i'anatogie peut sans doute, ici
comme
tout, mettre sur le chemin de l'explication en sucrantpar- des
hypothses directrices de la recherche mais elle saurait
ne
se substituer l'explication mme. Apres comme avant la
constatation de l'analogie, il reste a chercher les
causes des
deux phfnomnea compars et il n'est pas dit
que les
de l'uu et de l'autre soient forcment identiques, ii fautcauses
Jouer
nos auteurs de l'avoir plus d'une fois signal eux-mmes,
reconnaissant que, dans lit socit, certaines en
causes d'atrophie
ou de survivance oprent, qui n'oprent pas dans la nature,
et rciproquement. Toutefois un peut se demander si la pr-
occupation des analogies ne ies a pas empchs, parfois, de
saisir, sous tes causes gnrales, les causes plus prochaines
des phnomnes sociaux. La survivance d'un grand
nombre
d'institutions ne s'explique+elle pis tout naturellement
cette loi du transfert psychologique, dont la biologie
par
ne
nous donne aucune ide et suivant laquelle ce qui n'tait que
moyen devient peu peu, aux yeux des hommes, fin en soi?
C'tait donc la psychologie bien plutt qu' la biologie qu'il
fallait s'adresser directement, pour trouver les
causes pro.
chaines des transformationspropres aux socits humaines.
Quoi qu'il en soit, et tout en regrettant
que la poursuite des
analogies biologiques leur ait fait plus d'une fois perdre de
vue les explications psychologiques, il faut savoir gr
aux
auteurs d'avoir tent l'analyse des causes de l'volution qu'ils
tudiaient. En montrant que cette volution
ne s'opre
suivant un ordre dtermin, fix d'avance parTvotution pas
pro-
gressive, maiss'inflchit dans un sens ou dans l'autre, s arrte
ou s'acclre suivant que certaines causes sont prsentes ou
absentes, ils contribuent dissiper cette confusion des lois
d'volution avec les lois de causation qui si souvent dvoy
a
la sociologie. Dcrire les phases du dveloppementdes socits
n'est pas expliquer leur succession et croire que leurs phases
se succdent suivant un ordre ncessaire, en quelque sorte
prdterminedans leur germe, c'est encore se laisser abuser
par une ide biologique malcomprise outre que c'est oublier
l'influence des milieux sur les organismes, c'est assimiler
tort, ces organismes que t'brdite astreint en enot, dans
une certaine mesure, uu cursus dtermine, ces tres singu-
lirement plus variables et plus souples, qui ont leurs faons
propres de natre, de vivre et de mourir, et qui sont les soci-
ts.
En un mot, tant par sa partie ngative que par sa partie
positive, le livre de MM. Demoor, Massart et l'andervelde
nous parat fait pour rappeler le danger en mme temps, ou
peut-tre plus encore que la fcondit du rapprochementdes
sciences naturelles avec les sciences sociales il prouve on
enet que si ce rapprochement, mthodiquement conduit, nous
rvle des analogies lointaines, nous risquons, en nous y
fiant, d'oublier tes explications prochaines. Et en ce sens, de
mme qu'il dmontre l'improprit de son titre, < t'evotution
rgressive il nous parat, dmontrer l'iitgitimite de cette
croyance sous l'invocation de laquelle ses auteurs le plaaient
pourtant, la croyance t'heureuse influence de la biologie
sur la sociologie.

V. SAXTAMARtA bi-: PARRDES. E! Concepto de Or~a.-


nismo social .<' <'onccp< (ror~oxfiMtf Mc<a<,t, ~to p. Fer-
nando Fe. Madrid, )89C.
i~tude la fois historique et critique du concept de l'orga-
nisme social. Aprs avoir brivement rappel tes avatars de
ce concept et signale son apparition dans le code de Mauou,
dans les dialogues de Ptaton, dans les epttres de saint Paul,
l'auteur le montre renaissantdans toute sa torce au milieu de
notre sicle, comme au point de convergencede la plupart de
nos tendances thoriques et pratiques, tt est l'aboutissant
naturel de tant d'efforts dilIreuts pour concilier l'individuel
et te social, le rationncl et l'historique, le physique et le
moral (p. 15). La raction contre le libralisme abstrait de ia
Rvolution, les influences combines de l'cole historique et
de l'cole philosophique allemandes, des sciences naturelles
et du positivisme devaient le mettre en honneur. !1 n'est pas
tonnant par suite que les penseurs les plus difrents
eu
aient galement use.
Quel usage en ont fuit les Btuutsehti, les Sctt'ifHe, les
Spencer, les Fouitte. et jusqu'aux plus rcents sociologues,
comme do Greef et Kovicow, Benjamin Kidd et Hen Worms,
l'auteur )e rappelle avec patience, en des rsums clairs et
corn modes.
JI se demande ensuite ce qu'il faut garder de
ce concept st
rpandu. I) coustate d'abord que ta muttipticit des types
sociaux, comme la multiplicit des types organiques que les
diffrents auteurs ont essay d'assimiler, donne dj
penser
que !a socit n'est pas rductible tel ou tel terme de la
srie des organismes biologiques, mais qu'elle a sa structure
propre (p. )'!<)). Mais peut on qualifier cette structure d'orga-
nique ? Oui, si t'on se souvient que l'ide d'organisme n'im-
plique nullement celle de l'existence spare d'un tre
unique, mais celle d'un concours entre diverses parties dont
chacune sert te tout qu'elle reprsente, eu un mot une vie
com-
mune d'etmentsdiffrents. Un ce seus.quaiinertasoeitd'or-
ganisme, ce n'est nullement iufoder la sociologie lit biolo.
gie, c'est user d'une sorte de catgorie trs gnrale qui peut
s'appliquer aux objets les plus di)Mrents. Le concept d'orga-
nisme apparatt ds lors comme un concept xou plus spciale-
ment biologique, mais plutt mtaphysique (p. HH). Kt, si
l'on passe du point de vue thorique au point de vue pratique,
on s'aperoit que cette ide pure de l'organisme social
n'exclut nullement l'ide de la libert indtvidette (p. ~<)f)).
telle qu'elle convient la vraie nature de l'homme et a
sa
place privitgie dans l'univers.
Et il est bien vident que si l'on largit ainsi le concept
d'organisme, jusqu'au point o it n'est plus autre chose,
vrai dire, que l'ide mme d'un rapport quelconque cotre des
lments quels qu'ils soient, il n'y a plus aucun inconvnient
a traiter les socits d'organismes. Nous rappelons seulement
qu'une science spciale ne saurait se constituer
par la seule
application d'ides si gnrales. Entre l'excs des gnralits
qui la confondrait avec la philosophie et l'excs des particu-
larits qui la confondrait avec l'histoire, la sociologie doit
trouver un moyen terme, en cherchant dnnir ce qui con.
vient en propre aux socits et ne convient qu' elles.
))).S()t:hj ).<<(:))-: t'SYt:Hut.<)<:)~tH HT iU'Ctt'tQt-H
t''HANKL!X Il. CiDMNtiS. The Principles of Sooio.
logy, 4fH.v)t p. Macmiiian et C' Xow-Yorit-London, i89M.
Traduits par ie vicomte Combes de Lestrade /<t<e<pM </<'
M(.')'ojo~tc, St)~-xt p. Uiard et Brire, Paris, !?)'!

M. Giddiugs est un des sociologues les mieux pntres de


la nfcessite de spt'ciner ia sociologie. Elle doit bien tre, sui-
vant lui, ia science gnraie de la socit, mais cela ne veut
nullement dire qu'elle ne puisse tre que lit collection des
sciences sociales particulires. Elle peut faire sa spcialit de
l'tude de ce qui est commun aux phnomnes qu'tudient
l'conomie politique, la science politique, l'histoire des reli-
gions. Elle prendra comme problmes ce que celies-ci pren-
nent comme donnes, i'associatiou en eite-meme avec ses
consquences et ses causes propres; elle sera une science de
principes, isolant les phnomnes proprement sociaux pour
en faire la description, l'histoire et l'explication.
Ni l'alliance, ni le contrat, ni l'imitation, ni ia contrainte
ne sunisent il les deunir. Car il y a des socits sans alliance
et sans contrat, comme il y et, hors des socits, des imita-
tions et des contraintes. Le chat-huant imite le rouge-gorge.
Le serpent impose son vouloir l'oiseau, sans qu'H y ait
entre eux de lien social. Le lien social lmentaire et original
est constitue par lit < conscience d'espce (consciousness of
kind). Un tre en reconnait un autre comme tant de ta mme
espce que lui cet tat de consciencespcial peut bien tre
un ettet de l'imitation ou de la contrainte, mais n'en est pas
le scuieitet. H peut bien tre cause de contrats ou d'alliances,
mais d'autres choses en mme temps. En un mot, plus gnra!
que le contrat et l'alliance,plus spcial que l'imitation et la
contrainte, le phnomne de lit conscience d'espce parait
propre dthur, par un caractrequi convienne tl toutes ses
formes et no convienne qu' elles, ia socit.
Mais n'est-ce pas lit un phnomne psychologique, et par
suite votre sociologie ne va-t-etie pas se confondre avec la
psychologie ? La sociologie est bien en eiet une partie de
la psychologie, mais une partie qui s'en dUTrencie comme

(t) Sus fitttmn!! renvoient au tMt<- on~ioa), lit tntttactiut) taisant )M)tt-
heareaMt))t!nt<t dusitof. (V. Rer. p/tt/MO~A., tifST, p. SM.)
cotte-ci se diirencie de la biologie, Elle tudie part ces
phnomnes psychologiques plus complexes et crateursd'un
milieu spcia!, qui rsultent de i'intcr.action des consciences
Individuelles. Elle est la science de l'association des esprits,
tandis que la psychologie t'esto la science de l'association des
ides (p. du texte)..
Intermdiaireentre les sciences organiques et les sciences
historiques, et usant d'ailleurs, comme toutes les sciences
concrtes, d'une mthode ia fois dductive et inductive,
elle est capable de dcrire les lments et la structure de la
socit, de retracer les phases de son dveloppement, d'en
indiquer enfin ia loi et tes causes. Ainsi se formera une socio-
logie gcnrate et pourtant spcifique
historique et explicative.
science descriptive,

La premire condition de la formation des socits est


l'agglomration prenable des individus, tt faut, pour que
puissent s changer entre eux ces miiie actions psychiques
qui constituent ia vie sociale, qu'ils soient matriellement
runis dans un mme lieu et forment une population Les
conditious extrieures de toutes sortes, l'altitude, le climat,
l'orientation des lieux, et par-dessus tout la fertiiit du sol,
dterminent la place comme l'tendue des agglomrations
humaines. Les sables sahariens, les montagnes rocheuses, ne
peuvent porter que des populations ciairsemes. tandis que
les riches vaiies du Xii, de t'Huphrato ou les ptaines du Pu
font vivre les populations les plus denses. Le mode de dve-
loppement des populations est d'ailleurs double ou bien elles
rsultent de lit croissance biologique de groupes qu un mme
sol nourrit, c'est--dire de la muttipUcation de ses individus
par la reproduction c'est i' agrgation gntique ou bien
elles rsuitent de ia rencontre d'individus non apparents
qu'un mme lien attire c'est ia congrgation Celle-ci
n'est d'ailleurs pas moins normale quecette'i elle a pu ds
les origines contribuer au rassemblementdes hommes, puis-
qu'elle contribue dj parfois, ou fait, celui des animaux.
Mais cette agglomration n'est encore que la condition phy-
sique de la socit. L'association apparait avec t'inter-action
psychique des individus. Et c'est sans doute par un conflit
car M Giddings pense, contrairement M. Tarde, que le
conflit est partout, et que l'hommede science n'a pas perdre
son temps discuter avec ceux qui cherchent liminer la
lutte des choses humaines (p. t(M), que commence l'action
de t'homme sur t'bomme. Mais, dans ce conflit mme, les
individus de morne espce apprennent se reconnatre et
prendre conscience de teur similarit. Kt puis, du sein du
conflit natt l'imitation qui largit cette conscience d'espce.
Et sans doute encore l'imitationne saurait dtruire les causes
persistantes d'antagonisme bien plus, par la diversit
ou
l'opposition de ses courants, on peut dire qu'elle en cre de
nouvelles. Mais l'antagonisme se limite lui-mme et se ter-
mine dans l'quilibre. Les forces opposes, ne pouvant se
supprimer, apprennent se tolrer. Par lit tolrance, fonde-
ment de t'organisation juridique, sont rendues possibles ia
coopration, fondement de l'organisation conomique, et
l'alliance, fondement de l'organisation politique une veri-
table association est ne. Toutefois elle n'est parfaite
que
lorsqu'elle est sympathique. H faut que les individus trou-
vent ptaisir au dveloppement de cette conscience d'espce
qui natt de leur rencontre. C'est :') quoi servent les jeux et
les ftes, sous toutes leurs formes. Leur utititf sociale est la
culture de ces sentiments sociaux par la vertu desquels le
groupement n'apparat pas seulement aux individus comme
utile, mais comme agrable.
A mesure que l'association se constitue, elle transforme les
esprits individuels, par cela seul qu'elle les socialise. Mais lit
ne se borne pas son action. Elle donne, de plus, naissance a
un esprit d'une nouvelle sorte c'est l'esprit social. qui ne
sige pas sans doute en dehors des consciences particulires,
qui cependant tes domine et les maltrise. It comprend les
ides et les impressions communes toutes, et qui s'imposent
chacune d'elles. Dj le simple assemblage des individus
en foule provoque parfois spontanment cette intgration des
sentiments qui est lit condition de l'esprit social. Mais cette
intgration peut aussi se faire dlibrment par une discus-
sion rationnelle, aprs laquelle chaque individu pensera et
agira avec la pleine conscience que ses associs penseront
et agiront comme lui. Tout contact intellectuel la favorise; et
c'est pourquoi la concentration des Individus dans un mme
lieu, ou, par le progrs des moyens de communication,le rap-
prochement moral des individus matrieHement tes plus loi-
goes. contribueront la gense d'une opinion publique. Par
elle, la communautprend pour ainsi dire conscience d'elle-
mme, et trouve dans cette auto-conscience un lien nouveau,
une nouvelle raison d'tre.
A vrai dire, le lien serait fragile si cette auto-conscience
tait toute momentane. Mais l'esprit social a une mmoire.
Au-dessous des ides qui unissent les hommes au moment
prsent, se retrouvent celles qui tes ont uni:* dans les sicles
passs, la tradition sous toutes ses fonnes. Traditionsd'uti-
lisatiou ou traditions conomiques, traditions de totrance
ou traditions juridiques, traditions d'attianco ou traditions
politiques, puis, sur ce trpied des traditions primaires, i'en-
seMbtecomptoxe dos traditions secondaires, celles qui disent
ce qu'il faut penser de l'individu, do la nature, de lit divinit,
tout un monde de croyances anciennes vient pntrer le monde
des opinions courantes. JI se fait une perptuelle intgration
des ides traditionuettes et des ides nouvelles qui cons-
tituent ia vie, incessamment mobile, do l'esprit sociat ;p. ~4~. J.
tant donns, d'une part ta population, d'autre part l'esprit
social, d'une part les conditions physiques, d'autre part les
conditions psychiques de la vie des socits, comment vont-
elles s'organiser? Il importe de distinguer nettement deux
types d'organisation,!a composition et la constitution
t'ne socit sera dite < compose iorsqu'otte n'unira ua
nombre plus ou moins gt'and de groupes similaires, runis-
sant eux-mmes des individus diffrents runion d'ailleurs
naturettement produite par tes activits physiotogiquos et
psychotoniques des individus, et sans intervention rHechie
de l'esprit social. Les hordes des Fugiens et des Mincopis,
tes tribus des Potatucks ou des Onondagas, les confdrations
des Iroquois ou des Tougans, enfin les grandes socits
modernes, non plus ethniques,mais dmotiques, et qui ne se
composent dj plus sans l'intervention d'un esprit social,
allient ainsi, en quantits trs diverses, des groupes sociaux
semblables a l'intrieur desquels des individus dissemblables
se totereut.
Tout autres sont les socits < constitues Dans celles-ci,
organises eu vue d'un but, les individus, non plus introduits
par un hasard de naissance, mais admis aprs un droit cons-
ciemmentdonn et reu. sont plus semblables entre eux que
ne le sont entre elles les socits dont ils font partie. Entre
elles il n'y a plus seulement runion, mais distribution et
coordination des fonctions. Non seulement les tats, mais les
associations particulirespoursuivent,sous l'impulsion direc-
trice de la conscience d'espce, des fins soit conomiques,
soit politiques, soit juridiques, soit morales, donnant ainsi
l'exemple de tu coordination de groupements dissemblables
qui se tolrent, lundis qu' l'intrieur de ctmeun d'entre eux,
les individus semblables s'aHient. Ainsi, tandis
que les
socits composes sont connue les cettutes vivantes d'un
grand organisme, les socits constitues sont comme ses
tissus et ses organes spcialises. Et psychotoRiquementelles
sont l'inverse les unes des autres, la composition runissant
des individus dissemblables en des groupes semblables, ta
constitution, des individus sembtabtes eu des groupes dis-
semblables (p. 70, tHOi.
En tudiant ainsi, tour tour, les lments, physique
ou
psychique, et la structure, composante ou constituante de ia
socit, il se trouve que nous avons, en gros, indiqu du
mme coup les phases de son dveloppement l'ordre de
uotre analyse, un ordre historique correspond. Et en ellet
c'est bien peu peu, du sein de t'aggtomration mme, grce
aux contacts qu'eite provoque et par lesquels c l'homme
aiguise l'homme comme le fer aiguise le fer
que nous
voyonsse former t'espritsociat pariui, la socit, si puissante
dj comme instrument de conservation, de variation et de
slection dans le monde animal, devient vraiment humaine
l'association devient, de < zoognique
, < anthropognique
De mme, c'est eu faisant prdominer lit constitution
sur lit
composition, qu'ette devient, d' < ethnogenique
< dmo-
gnique . La civilisation substitue aux confdrations plus
ou moins spontanes de tribus homognes l'organisation
plus ou moins dlibre de socits dinerencies, intgres
en de grands tats. Elle fait prdominer l'ordonnance volon-
taire sur l'arrangement spontan. Elle efface les diffrences
ethniques pour tendre vers la dmocratie.
S'interroge-t-on maintenant sur les causes de cotte volu-
tion dont on a dtermin le sens? 11 importe de n'oublier ni
l'aspect objectif ni l'aspect subjectif du processus social. La
vritable association commence la naissance de la
cons-
cience d'espce. Et ce sont les impulsions de cette mme
conscience qui, agissant soit sur les tendances spontanes
soit sur les choix volontaires de ces personnahts qui
se
constituent dans et par la socit, dterminent les transfor-
mations de cette socit mme. En ce sens la socit, qui n'est
pas un organisme, mais une organisation rsultant, en
parue d'une volution inconsciente, en partie d'un plan
conscient, obit un processus psychique. Mais it faut
ne pas
oublier que sa vie n'est qu'une phase de l'volution eos'
mique. et que, comme telle, elle est assujettie aux conditions.
naturelles. D'abord les lois gnrales de la persistance et d&
la distribution de la force dterminent les mouvements de la
population, sa cohrence ou sa dispersion et le rythme
mme de son activit. Puis, alors mme que les socits s'or-
ganisent sous lit direction do choix volontaires, guids par les.
valeurs subjectives, c'est encore la nature qui, assurant ou
contrariant leur succs, dcide de la valeur objective de telle.
ou telle organisation, et, par ses processus physiques, choisit
a son tour entre elles. Et enfin, ces choix volontaires eux-
mmes ne sont pas hors la loi naturelle ils no sont causes
que parce qu'ils sont euets. Ce ne sont que des modes parti-
culiers de ta force totale. Et en ce sens on peut dire que toute
nergie sociale est une nergie physique transforme. En un
mot, la sociologie peut et doit rattacher les causes propres de
la vie sociale aux causes les plus gnrales du mouvement
mme de l'univers et apparat alors comme une science non
plus seulement descriptive, mais rellement explicative.
On le voit, si M. Giddings se fait une ide prcise de la
sociologie, it s'en fait en mme temps une ide extrmement
large; et son. livre, ordonnant par rapport aux phnomnes
proprement sociaux les matriaux les plus divers, prouve
que, pour s'en tenir un point de vue particulier, la socio-
logie n'entend nullement se condamnera t'troitessedevues.
Gonsidrora-t ette toutefois comme des acquisitions dfi-
nitives et sur lesquelles on puisse dornavant btir, sans
avoir chercher de fondements nouveaux, ces distinctions
essentielles que nous propose M. Giddings, celle de la
composition et de la constitutionsociales, par exemple, ou ta:
conception mme-de la conscience d'espce *?-
Au premier abord, on peut croire que, en distinguant fOtM-
~<M(7<oK et eot)~xo)t sociales, M. Giddings entend peu-
prs la mme chose que M. T<innies lorsqu'il disting)t&
CemeoMc/M~et GM<'<bcAa~.et Ai. Durkheim lorsqu'ildistingue
ffoMtu'tM Mtt'Mn~Me et M<~'<ff' or~H~uf, et qu'on se trouve
enfin en prsence d'une de ces distinctionsvraiment univer-
selles, consacres par l'accord imprvu de sociologues dif-
rents. Comme M. Giddings, MM. Dnrkheim et T&nnies dis-
tinguent peu prs du type des socits non dinreneies~
dont les lments ressemblent aux cellules homognes des
organismes primitifs, celui des socits diffrencies. dan&
lequel les lments spcialiss pour des fonctions diffrentes
ressembteut plutt des organes htrognes. Mais, par l-
ments de la socit, M. Giddings parat entendre les groupes
composas ou reconstitues l'intrieur d'un groupeutent plus
large. Quant au rapport des individus t'intrieur des
groupes. il ue le cousit pas du tout de la mme manire que
les prcdents sociologues il s'eu fait mme. semble-t-il, une
conception prcisment inverse de lu leur. t) tient les indi-
vidus pour ptus dissemblables t'mtrieur des groupes qui
font partie d'une socit compose, pour plus semblables
l'intrieur des groupes qui font partie d'une socit cons-
titue. En quoi. il faut reconnatre que sa distinction parait
moins conforme aux faits que .cette de M. TOnuies ou de
M. Dut'kheim. Car, s'il.est vraisemMaMe qu'on parfois
a exa-
gr, en cdant un penchant la symtrie favoris .par
l'insuffisance des documents i'honto~encitt! primitive des
individus il l'intrieur des groupes, il n'en est pas moins
vrai que le progrs de ta civilisation, correspondant la
substitution des socits constitues aux soci6ts composes,
a partout eu pour rsultat de difrenciertes individus eux-
mmes. Et, dans ces socits organises en vue d'un but
soit conomique, soit morat que M. Giddings nous prsente
comme le type des socits constitues, il n'est pas rare que
la spcialisation des fonctions, avec lit diffrenciation inous
ne disons pas l'ingalit) des individus qui en rsulte, soit
commande par lit consciencede ce but Jui mme et croisse a
mesure que les socits deviennent pins auto-eonseientes.
Nous sommes donc en droit de suspecter lit vrit de l'auti-
these a taquet te aboutit M. Giddings .lorsqu'il nous prsente
les individus des socits composes plus dissemblables, las
individus des socits constitues plus sembtabies que le
ne
sont entre eux les groupes dont la runion forme ces socits.
Peut-tre cette antithse a-t-elle t, d'ailleurs, incons-
ciemment construite par M. Ciddings pour les besoins.de
sa
conception centrale, la notion de la conscience d'espce. En
effet, cherchant le fondement mme de la socit dans cette
conscience et, dans son dveloppement, la mesure du progrs
social, il devait tre naturellement port admettre
que la
substitution de la constitution sociale la composition, autre
aspect du progrs, augmente entre les individus cette ressem.
blance qui favorise la conscience d'espce.
De cette conscience mme, dont il signale justement t'im-
portance, on et voulu que l'auteur dfinit plus nettement
l'essence et distingut les formes. Il parat le plus souvent
l'entendre comme une ressemblance on quelque sorte ext-
rieure.autre, parexempie, que la ressemhtance des croyances
religieuses ou des opinions politiques, et comme s'it fallait,
pour que rellement les individus fussent associs, qu'ils se
sentissent rellement de mme espce, au sens presque phy.
siquedu mot. Mais it importe de remarquer quasi, l'origine,
les ressemblances extrieures et comme sensibles dter-
minent en effet l'attitude des hommes vis--vis les uns des
autres, si mme elles conservent, jusque dans les socits les
plus civilises, une influence prpondrante

prouve cette rpugnance presque physique des Amricains
comme le
pour les ngres, et dont il est permis de penser que le spec-
tacto a influe sur les conceptions de notre auteur, it n'en
est pas moins vrai que la vie sociale elle-mme habitue les
hommes juger importantes tes ressemblances intrieures
plus que les ressemblances extrieures, les morales plus
que
tes sensibles; et c'est ainsi qu'il arrive que le sentiment de la
communaut des opinions fonde, malgr les diffrences d'es-
pces biologiques, une conscience d'espce nouvelle. En un
mot, la conscienced'espce ne s'targit pas seulement, elle se
transforme, et les caractres que les hommes prennent en
considration pour se dclarer semblables varient avec le
temps et les lieux. La conscience d'espce n'est donc pas un
phnomne social immuable demeurant identique lui.
mcme et ne variant que quantitativement au milieu de la
diversit des socits it varie, dans une certaine mesure,
qualitativement,comme varient leurs phases et tours formes.
la, d'ailleurs, est-il davantage un phnomne social univer-
sel, c'est--dire tel que, sans lui, il n'y ait pas de socit ?
Accompagne t-il toujours les relations qui s'tablissent entre
les individus? N'arrive-t-il pas que des sujets considrent
leur mattre comme c d'une autre espce En s'ont ils moins
lis lui par des rapports sociaux constants et dfinis? Et,
sans s'arrter & ces rapports de subordination, ne voit-on pas
maint rapport de coordination s'installer entre individus
sans s'appuyersur la conscienced'espce? Elle intervient
peu,
de l'aveu de M. Giddings, dans les associations conomiques.
Que dire d'une dnnition de la socit qui n'englobe
pas tes
formes conomiques de l'association, et qui, d'autre part,
nous oblige regarder les indigents comme hors la socit?
Malgr t'ef!ort mtttodiquo de M. (..iddings pour trouver le
fait social ft ta fois universel et spcifique, il semble donc
bien que, si la conscience d'espce n'est pus, comme lu con-
trainte ou l'imitation, plus gnrale que la socit, elle est &
son tour, comme t'attianee ou le contrat, plus spciale.
Peut-tre, si l'on veut chapper a cette troitesso des
concepts pur lesquels ou essaie de dfinir, eu mme temps
que ce qui convient aux seuls faits sociaux, ce qui convient
tous les faits sociaux, faut-il remonter jusque l'ide m6me
de rapport, et teuir pour un fait social tout ce qui resntto des
rapports quels qu'ils soient qui s'tablissent outre les indi-
vidus. Quelles que soient les ides que les individus se font
les uns des autres, les sentiments qu'ils prouvent vis--vis
les uns des autres, qu'ils se regardent comme de la mme
espce ou comme d'espces diffrentes, qu'ils s'imitent ou se
contredisent, qu'ils se contraignentou cooprent librement,
du mutneut que leurs tats d'esprit sont modifis par leur
coexistence mme et leur inter-aetion nous tenons un
phnomne dont les individus sont le thtre sans en tre,
en tant qu'individus, la raison suffisante. En partant des
formes tes plus gnrales de ces inter-actions, seuls phno-
mnes vritublerneut communs toutes les espces de
socits, peut-tre serait-it possible d'expliquer, de driver1,
plus d'un fait social que l'on semble tenir pour premier, et
de prouver par exemple que lit conscience d'espce est bien
plutt une consquence que la cause mme de la vie sociale.

U. SiMMEL. Superiority and subordination %s


subject-matter of Soclology .s'M~'n'on7<' .<fM<wv/<M~'oM
<< ~ocif )'<' ;KM'<o/o~)'), M p. Extrait de t'~m<'r<ctt
~MMM<o/s<M'~t/. Cttica~o, )8{)C.

Plus encore que M. Ciddings, M. Simmel panttt avoir


ccBur de prouver qu'une sociologie ~'<c! MH<:tt a droit H
l'existence. Elle n'a pas besoin, pour se donner un champ
d'tudes, de se forger des ralits substantielles il lui suffit
d'tudier spcialement tes formes dans lesquelles s'exerce
l'action (tes individus les uns sur les autres. Et sans doute,
ces iuter-actions, naissant des impulsions et tendant vers les
fins les ptus diverses, ne s'exercent pas toutes dans un mme
domaine ettes diffrent par leurs contenus, par tes objets
auxquels elles s'appliquent. Les diffrents contenus de ces
inter-actious, les sciences sociales spciales les tudieront
individuellement. Mais on peut en concevoir une qui, de
mme que lu gomtrie fait abstraction de la matire des
cubes pour ne considrer que leur figure (p. 168), fasse abs.
traction de ces matires de l'activit sociale pour s'atta-
cher l'observation des formes suivant lesquelles elle se
ralise ce sera la sociologie proprement dite.
C'est ainsi qu'elle pourra tudier part la supriorit et
ia subordination, formes sociales gnrtes qui se rencontrent
aussi bien dans les socits conomiques ou morales que
dans les socits religieuses ou politiques, et prouver que,
quelle que soit lit matire iaquette ils s'appliquent, les
dinerents types de supriorit ou do subordination qu'elle
distinguera entraneront diffrents effets qui leur sont
propres.
La supriorit peut tre exerce soit par un individu, soit
par un groupe, soit par un principe collectif suprieur aux
individus.
La subordination d'un groupe a un seul individu, que
cet individu reprsente d'ailleurs les aspirations du groupe
ou les contrarie. a pour consquenceordinaire t'uninca-
tiou du groupe. Par l s'explique le principal avantage des
monarchies elles font l'unit des peuples. La dcadence des
cits grecques fut peut-tre duo l'absence d'une autorit
suprieure qui eut unin leurs partis en les dominant.
Cette unit peut d'ailleurs s'oprer de deux faons soit par
nivellement, soit par gradation. Tantt l'individu domina-
teur s'efforce d'imposer a tous ses sujets un abaissement uni-
forme ainsi s'explique la relation bien connue du despotisme
avec t'gatitarismo. Tantt les diverses couches de la popu-
lation, ingales en largeur, participent, des degrs ingaux,
ta puissance, soit que son dtenteur leur en ait octroy des
parcelles, soit qu'elles lui en aient arrache par leur propre
progrs. Dans les deux cas, sa supriorit s'explique par le
fait que, tandis que les individus subordonns ne lui subor-
donnent qu'une partie de leur personnalit, l'individu domi-
nateur les domine avec sa personnalit tout entire. Suprio-
rit et personnalitsont intimement lies.
Lorsque la domination est exerce non plus par une per-
sonne, mais par un groupe de personnes, le caractre des rela*
tions entre suprieurs et subordonns en est notablement
modiM. Ceux-ci s'en trouvent parfois plus durement traits,
parfois aussi plus justement. La domination d'un groupe est
impersonnette comme telle, moins arbitraire, elle tient aussi
moins de compte de la personnalit mme des subordonnes.
Lorsqu'elle s'exerce par l'intermdiaire d'un agent, phno-

mne sociologique trs particulier et qui n'apparatt que dans
les socits dj dveloppes la subordination revt un
caractre tout spcial la domination se fait, ici, plus raide
et ta, plus retaehe en s'exerant administrativement.t
Lorsque la supriorit appartient non plus un groupe
d'individus, mais a deux, alors les subordonns diminuent
ptus aisment le poids de leur dpendance. Et sans doute, s'ils
sont absolument privs de toute initiative, il arrive qu'ils
ptissent davantage de la dualit de leurs suprieurs < H ne
fait pas bon servir deux matres. Mais pour peu que
quoique libert d'action leur soit laisse, il leur est toisibte
d'utiliser les divisions mmes de leurs suprieurs < o&xs
/<~<~f( ~M ~<f~ Le tiers Htat sous l'ancien rgime,
entre ta royaut et la fodalit, a t ce tertius gaudens .
ft est d'ailleurs rare que les groupes suprieurs un autre
groupe soient absolument gaux entre eux; le plus souvent
ils sont subordonns eux-mmes les uns aux autres; alors se
produit ce phnomne sociotogique essentiel, ta hirarchie
par le recours qu'elle donne au subordonn contre son sup-
rieur immdiat, tes subordinations s'adoucissent en mme
temps qu'elles se rgularisent.
La supriorit d'un principe, d'un idal impersonnel, qui
s'tve au-dessus de tous les individus, reud d'ailleurs lit
sujtion moins pesante aux assujettis. Elle a en euet pour
rsultat de faire passer les suprieurs eux-mmes au rang de
subordonns ils deviennent eux-mmes obligs envers
l'ordre qu'ils font respecter le prestige se dtacite en quelque
sorte d'eux-mmes pour s'attacher l'ide qu'ils repr-
sentent, la fonction qu'its remptissent. Sous l'empire, de
plus en plus dvelopp, de t'ide que les supriorits ne sont
que des fonctions commandes par t'ouvre commune, l'inf-
rieur a le sentiment de collaborer avec son suprieur le rap-
port de subordination se change, subjectivement, en rapport
de coopration.
Lorsque, surtout, le dveloppement des socits est tt
que, d'une part, les mmes places suprieures pourraient tre
remplies et le sont en fait par des individus diffrents, que
d'autre part, comme it arrive par la multiplication des
cercles sociaux, les mmes individus sont, un certain point
de vue, suprieurs, et, a un certain autre, subordonns, on
comprend que les individus en arrivent se sentir (;aux.
Ce n'est pas dire que le rapport de subordination doive,
ou mme puisse disparatre car il est essentiel a la consti-
tution des socits il perd seulement et on peut esprer qu'il
perdra de plus en plus ce qu'it peut avoir d'humiliant pour
les infrieurs, puisque la supriorit s'abstrait en quelque
sorte de la personnalit taquetteettetaitoriginairementtie.
Telles sont autant du moins qu'on peut. les rsumer

les ingnieuses considrations que M. Slrnmel tire de l'tude
directe des diftrents types de supriorit et de subordina-
tiou. Les lecteurs qui rclament des faits regretteront
peut-tre qu'elles ne soient pas toujours illustres d'exemples
historiques assez prcis, dats, tocatiss et comme patents.
Mais il faut se souvenir qu'il n'y a rien d'tonnant ce que
la sociologie, telle que l'entend M. Simmel, ne puisse pas
toujours montrer, raliss dans l'histoire l'tat de puret,
les rapports dont elle fait ses objets propres i p. tT?'. Ette n'a
pas lit prtention en effet d'expliquer tout ce qui arrive dans
ta socit mais seulement ce qui arrive par la socit
c'est--dire ce qui est du l'influence dtermine de telles ou
telles formes sociales. Elle a donc conscience de n'tudier
qu'un des facteurs de l'histoire, dont il n'est pas tonnant
que l'action soit souvent, en fait. obscurcie par celle des fac.
teurs collatraux interfrences dont Il faudrait tenir compte
si J'on voulait expliquer l'volution totale de l'humanit, mais
dont it faut faire abstraction si t'en veut constituerune science
spciale de la socit fp. 413). En ce sens, on peut dire que.
pour M. Simmel, la sociologiedoit tre une science abstraite.
Cette expression, pourtant claire, a un inconvnient elle
veille des associations d'ides toutes faites recherche des
<
quintessences culte des ides a priori retour a la
<
mtaphysique mpris des < faits etc., telles sont les
accusations qu'on ne craint pas de rditer contre ceux qui
insistent sur la ncessit de l'abstraction en sociologie, its ne
fout pourtant que recommanderun procd commun tontes
les sciences en rappelant que lit sociologie, pour se cons-
truire, doit, non pas spculer sur des ides en l'air, mais
<
isoler du complexus de la ralit historique les faits qui
lui sont propres. En ce sens la sociologie doit tre abstraite
pour tre spcifique.
C. BOUCL. Qu'est-ce que la Sooioloarie ? dans la
~<
/<Muc </<' du t~ aot t8;)7, p. 3:M-SS(!.
Avec M. Simmot. l'auteur de cet article estime
que la soeio.
logie, devant tre, non pus toute une philosophie de l'histoire,
mais une science sociale spciale, se constituera en dgageant
des diiJrentes matires dans lesquelles elles se ralisent, les
< formes sociales Capables de rester identiques lors mmo
que changent les individus qu'elles unissent, ces diffrentes
formes aot des ralits propres, que l'abstraction peut isoler
de l'histoire. Mais une science ne saurait se contenter de clas-
ser des formes, elle veut dcouvrir, entre certains phno-
mnes donns, certaines relations constantes, et prouverque
les uns varient en fonction des autres. C'est pourquoi le
sociologue devra tudier d'une part tes consquences et
d'autre part tes causes des formes qu'il aura une fois dunies.
Ainsi il se trouvera amen mesurer l'inl1uence que peuvent
exercer la densit des socits, leur homognit ou leur
htrognit, te degr et la nature do teur organisation sur
l'conomie, sur le droit, sur tes mmurs, sur tes religions, sur
tes arts,
gographique
et inversement. Se placer au point de vue
c'est observer tes formes terrestres, leurs
consquences et leurs causes observer les formes sociales.
leurs consquences et leurs causes, ce sera se placer au point
de vue sociologique

StMos N. PATTEX. The relation of Sooioto~y to


Psychology. fltelutious < la Sociologie et <~ ~c/<h.
~'f. ) Extrait
des .tMMah o/'<A<' a<M~-t<'<~lca~emf/ o/' po/<7<.
?
cal <t<t<< social .fc'Kt-c, p. Philadelphie, t896.
Pour M. Patten la mthode analogique dont la sociologie a
tant us jusqu'ici, n'est fconde qu'en quivoques. Elle peut
avoir ses avantages dans l'enfance de la science lorsqu'il
s'agit d'habituer les esprits t'ide que les socits humaines
sont, elles aussi, soumises des lois naturettes; mais, cette
ide une fois acquise, tes notions empruntes aux autres
sciences ne peuvent qu'entraver la marche de la sociologie.
II faut la dlivrer, non seulement do la biologie, ce qu'on
paratt gnralement admettre aujourd'hui (une des prc-
dentes brochures de l'auteur est intituto ~<<Mt-f o/Mo~~
Socto~), mais, ce qui paratra plus difficile admettre aprs
les f<'<MC<~ de Giddings, de la psychologie mme.
A vrai dire, nous ne trouvons pas, dans l'article do M. Pat.
ten, la distinction formelle et prcise entre faits sociaux et
faits psychotoniques que suppose cet effort pour riger la
sociologie, non seulement eu science spciale, mais en science
indpendante.
M. Patten entend-il rappeler que lit sociologie n'est pas
rductibledirectement la psychologie individuelle, et qu'il
ne nous suturait pas, par exompie, pour dcouvrir les formes
des Institutions, d'un simple examen de conscience? Nous
sommes alors d'accord avec lui puisque nous tenons que lit
mise en rapport des individus fait apparatre des phno-
mnes originaux. Mais veut-il dire que ces phnomues ne
supposent rien de psychique, et que faction des milieuxr
s'exerce directement, sans l'intermdiaire des faits de cons-
cience? Alors faction de ces milieux nous parait aussi inex-
piicabie que ia ralit de ces phnomnes est indfiuissabie.
Les mitieux, quels qu'ils soient, n'agissentpas sur tes rotations
dos individus autrement que par les impressions qu'ils font
sur teurs consciences. Ce qui unit les hommes, nous dit
M. Patten, ce n'est pas quelque ide subjective, mais une
condition objective ~p. 13i; ce n'est pas la communaut de
race ou d'ides, c'est la communaut du lieu dans lequel ils
se rfugient. Mais cette communaut d'habitat peut etie exer-
cer une action sociale autrement que par tes sentiments rci-
proques auxquels elle invite les individus qu'ette rapproche'?
Et lorsque, pour maintenir leur association, s'organise cette
contrainte sociale (social control) taquette M. Patten attri-
bue une si grande importance, ne nous dit-il pas que sa puis-
sance repose sur les plaisirs qu'elle est capable d'assurer ou
de retirer aux individus? Si l'on se souvient d'ailleurs que
M. Patten explique l'volution sociale par le passage do
l' conomie de la peine f l' conomie de la jouissance
passage iui-mme expliqu,sembte-t-ii, par la prpondrance
que prennent les fonctions motrices sur les fonctions sensi-
tives, on s'tonnera qu'il veuille dtacher radicalement la
sociologie de la psychologie, alors qn'it a construit, pour sa
'Ae<M')/ o/'jMC<f<< ~rrc~, tout un systme psychologique.
Pour notre part, il nous parait sans doute impossible que
le soriologue explique les relations qu'il constate, entre les
formes de l'conomie par exemple et les formes de ia famille,
ou entre la densit de la population et la division du travail,
sans faire de la psychologie. Tout phnomne social, rsul-
tant dece que Ciddings ou Simme) appellent t' < intercourse
ou i* inter-action des individus, suppose une communica-
tion pratubte des oons'-iences. C'est pourquoi on a r:)ison de
dire que la simple juxtaposition des individus ne constitue
pas en ette.meme uue socit pour qu'une socit se consti-
tue il faut que les individus juxtaposs aient ragi tes uns

sur les autres et que par cette raction rciproque t'hacun
d'entre eux se soit trouv modifi.
Mais est-ce & dire que t'analyse des faits de ]a conscience
individuelle rende inutile l'tude spciale de ceux qui resut-
tent de l' u interaction des consciences? Que la psychologie
rende inutile tu sociologie ? Depuis quand une science, parce
qu'elle se laisse rattacher une science plus gnrale, perd-
elle toute raison d'tre ? On reconnat qu'on ne peut pas faire
la biologie sans physique et sans chimie est ce dire pour
cela qu'on dnie il )a biologie son droit a l'existence ? Hxiger,
pour qu'une science se constitue a part, qu'elle prouve qu'elle
n'a pas besoin des autres, ce serait mconnatre tout l'en sei-
gnement de l'histoire des sciences elles s'lvent en s'ap-
puyant les unes aux autres. Les plus complexes n'ont nul
besoin, pour se constituer, de couper les ponts entre elles
et les plus simples il leur suffit do montrer que, de !a com-
binaison des phnomnes tudis par celles-ci, rsultent des
phnomnes nouveaux, dont il faut chercher directement les
ellets propres et les causes prochaines.
C). Hernard t'a dit avec la plus grande nettet Quand on
runit des tments physiologiques, on voit apparattre des
proprits qui n'taient pas apprciables dans ces lments
isols. Des phnomnes tout fait spciaux peuvent tre le
rsultat de l'union ou de l'association de plus en plus com-
plexe des lments organiss. Leur union exprime plus que
l'addition de leurs proprits spares. Ainsi, la connais.
sance de t'homme isol ne nous apporterait pas la connais-
sance de toutes les institutions qui rsultent de son associa-
tion et qui lie peuvent se manifester que par la vie sociale.
La connaissance de l'homme isol la psychologie indi-
viduelle ne saurait donc suffire nous renseigner sur les
formes, les consquences et les causes sociales do la subor-
dination par exemple, ou de la cooprationou de l'opposition.
Et sans doute on peut dire que ces phnomnes sont encore
en dernire analyse des phnomnes psychologiques mais
ce sont du moins des phnomnes psychologiques originaux,
que ta simple inspection des donnes de !a conscience indi-
viduelle ne pouvait faire prvoir, ti importe don'' de les tu-
dier a part 'est pourquoi nous pensons que la sociologie
peut et doit tre il lu fois psychotonique et spefifique.

XHMAXQUHS FtX.~LKS

A quelles lois obt'it le mouvement des socits et le con-


sensus de leurs parties? Sont-ettes soumises dans leur
cnscmbteauneevotution qui sera ncessairement rgressive
aprs qu'elle aura t progressive? Ou la rgression n'atteint-
elle que certains de leurs tments? Ht) devenant plus denses,
plus complexes, mieux organises deviennent-elles, ou non.
plus semblablesles unes aux autres? La transformation de
leur structure a-t-elle pour rsultat d'assimiler les indivi-
dus qu'elles rcunissent, ou de les diffrencier? Cette trans-
formation est eifo i'uvro de la pression quasi mcanique
des faits conomiquesou de l'influence des ides ? Leur orga.
nisation s'labore-t-elle tout inconsciemment, ou se con-
forme't-eite des volonts sociales conscientes? Tous les
individus participent-ils galement ces volonts, ou la
socit ne prend-ette jamais conscience d'etto-meme que par
une lite? La subordination des masses aux otites est-elle un
fait passager ou un fait constant, essentiel la constitution
des socits? Dans quelle mesure tes formes de cette subor-
dination ragissent-ettes sur les individus qu'elles mettent en
rapport ?
Mieux qu'aucunediscussion de mots, t'6num6ration rapide
de ces diffrentes thses, qui se dgagent des travaux que
nous avons rsumes, nous paratt propre prouver qu'il existe
bien toute une srie de problmes, intimement lis d'ailleurs
les uns aux autres, qu'aucune science spciato ne s'est jus-
qu'ici attache et que ta sociologie doit spcialement s'atta-
cher rsoudre. Ce sont ceux qui rsultent des formes origi-
nales, des consquences propres et des causes prochaines des
rapports qui s'tablissent entre les individus pour faire
nattre, de leur juxtaposition, une association.
DEUXiRMESHC'DOX
SOCIOLOGIE MLI&tMUSH

h TKArr~t:~t:K.\t.'X,)')ttt.t'St)t'n));, )))::)-))<)))).'
)'?)')). MACiiii.

F. BYRO?!,JEVONS. An Introduction to the History


of Religions. (/M/o~Ke//o/i ~7s/on'<' des ;'e/~t'OMS.) Me-
thuenand Co, !8!<C, tV, 44!<p.
M.J. nous donne un vritabte manue) de la science des
religions telle que la conoivent les savaots de la nouveitc
cote anthropologique H. Smith, MA!. Tyior, Lang, t-'raxer.
< Il veut rsume)' IHS rsultats de t'anthropofogie rcente,
apprcier leur xnportaHce pour les pt'obtmnes retigieux.
Ainsi, le livre s'adresse d'abord aux tudiants en histoire des
retigions; mais H prsente encore de riuteret pour les folk-
ioristes, et en gnerai pour le grand public. Exposer l'tat
actuel des questions, et, propos de chacune, montrer dans
quel sens la recherche devra s'orienter, voita les deux buts
de l'auteur.
M. J. rsume et a joute sa mthode est exactement celle de
ses prdcesseurs ses principes sont ceux qu'ils ont adop.
ts. H iui arrive de se proclamerleur disciple (ex. p. 2oQ). Il
est donc rest Mets ce qui est l'esprit mme de ce que nous
pouvons appeler t'Hcote anglaise, ou plutt encore (car elle a
dj souvent dpass tes Jhnites de la science anglaise) l'cole
anthropologiquede ta science compare des religions. Il serait
long d'exposer les rsultats gnraux de tous ces travaux.
Mais il est indispensable de montrer, grands traits, pour le
public socioiogique et propos de ce livre, ce qu'est essen-
tiellement cette cole. Historiquement, elle drive de
J'volutionnismeSpencerien, et la continuit de l'volution
religieuse est un de ses thmes favoris. Scientifiquement,
d'une part, elle s'oppose & l'coio philologique allemande et
fraauise (tout particulirement avec M. Lang), et, d'autre
part elle se rattache la science rcente de l'anthropologie.
Elle tacite de retrouver les principes humains, et non plus
historiquesot philologiques, des faits religieux. L'explication,
comme toutes les explications de l'anthropologie, consiste
dcouvrir ie fond psychique de l'humanit tout entire sous
la varit des phnomnes. Eu .troits rapports avec tes
recherches sur les origines de la famitto, de la socit, du
droit, l'anthropologie religieuse a donc consist introduire
l'tude des religions primitives dans le cadre des anciennes
tudes historiques, phitotogiques et fotktoristes. Les faits
qu'tudiaient l'histoire classique ou bien la philologie com-
pare, ou bien le folklore, reoivent, eu effet, un jour tout
nouveau de leur constant rapprochement avec les faits des
religions primitives. Alors l'identit fondamentale do ces trois
ordres de faits apparatt religious primitives, religions des
anciens peuples civiliss, survivances des croyances et des
rites dans les usages locaux et les traditions de l'Europe et
de l'Asie.
Mais ce sont l, en quelque sorte, les procds extrieurs
de l'cole. L'esprit en apparait avec deux caractresconstants
depuis M. Tylor jusqu' MM. Harttand et Jevons. L'anthro-
pologie est une science vague, sous grande prcision, o la
comparaison n'est pas gouverne par des canons rigoureux,
o la recherche du fait contraire n'est nullement capitale.
L'tude des concordances est tout, celle des diffrences est
secondaire, fi y a cela une raison l'anthropologie est une
branche de la psychologie individuelle; la mthode de la
religion compare est donc du mme genre. 11 s'agit toujours
de retrouver les processus mentaux individuels qui sont & ta
base des faits croyances ou actes religieux. La dcouverte
des principes psychiques puise la recherche et l'explication.
Quand on a rapproch les rgies du tabou et tes lois de l'asso-
ciation des ides, quand on a rapport l'origine des cultes et
de la magie une notion primitive de la causalit, le but est
atteint. Un certain intellectualismeest le principe cach de
cette mthode. Les actions de l'homme sont censes dpendre
de ses vues sur le monde. Ce n'est pas par les besoins sociaux,
ni par les institutionsconcomitantes qu'on explique la forme
des phnomnes religieux, mais par des conceptions tout
individuelles.Je sais bien que R. Smith a fait la part plus
grande aux rites qu'aux croyances, que M. Fraxer a ambi-
tionn surtout de constituer uue science des rites. Mah) tou-
jours et partout, mme chez notre auteur, comme on .verra,
ce sont encore les Ides qui gouvernent tout.
Le caractre gnrt des rsultats s'en ressent. L'emploi
principal de la psychologie individuelle et de l'anthropologie
aboutit surtout & constituer des schmes trs gnraux, o
tous les faits fusionnent les uns avec les autres, mme avec
leurs opposs, de telle sorte qu'on aboutit a une sorte d'image
gnrique, et non pas un systme rationnel des phnomnes
constates. Certes rien ne se rpte plus, et chez les divers
peuples et aux dittrents moments de l'histoire, que les faits
religieux. La constitution de genres n'est nulle part plus
facile et sur bien des points, les travaux des savants anglais
ont abouti du moins cela, Mais l'intrt consiste prcis-
ment voir l'volution, la dformation de ces genres, leur
division historique en espces distinctes. En rsum, tous
les caractres de ces travaux proviennent d'un mme fait la
mthode n'est pas sociologique. En tout cas, des considra-
tions de cet ordre ne sont qu'accidentelles ou accessoires. Or
c'est en rattachant, une fois pour toutes, les faits religieux
leur substratum social, qu'on leur donnera leur vritable
physionomie. leur place, et qu'on les verra do la faon relle-
ment objective qui convient.
Le souci de l'histoire, la direction de l'tude vers les pro-
blmes de l'votutiou religieuse, los tendances vers une vue
volontariste et sociologique (p. S.40U. 4t )) sont des. qualits
prcieuses de la pense de M. J. Il est un des savants de
l'cole anthropologiquequi ont le plus rnchi aux principes
de leur science. Il a apport soit des critiques des thories
admises, soit des conclusions nouvelles. Comme ou n'analyse
pas uu manuel, nous allons nous borner l'tude des ques-
tions les plus importantes o M. J. nous semble avoir
innov, savoir les rapports do la religion et de la magie, le
totmisme, la thorie du tabou.

I. M. Frazer avait abouti cette conclusion gnrale,


d'uue identit foncire de la religion primitive et de la magie
dite sympathique, qui subsiste dans le folklore identit
d'origine puisque toutes deux drivent d'une mme concep.
tion de la nature, oa n'existent ni la notion du naturel, ni
celle du surnaturel,o tout se mio, et o un dpart n'est pas~
fait entre les pouvoirsmagiquesdes hommes et les puissances
divfues identit de nature, puisque la magie et le culte sont
des applications du mAme principe, suivant lequel le sem-
blante engendre le semblable. L'acte du sorcier ou du prtre
est cens, on etet, produire sympathiquementuu phnomne

similaire, correspondant et attendu (Ct. p. 281). Contre une..
telle thorie M. J. s'lve avec la plus grande nergie. Loin
d'tre lu source de lit religion, ou de lui tre identique, la
magie, pense-t-il,en estl'oppos. Elle est diffrente d'origine.
Cette conception de ia nature que AI. Frazer dcrit, o hommes
et dieux M confondaient, o le mlange du surnaturel et du
naturel fournissait de l'action divine et humaine des notions
fantasmagoriques, cette conception, soutient M. J., n'a jamais
exist. Au lieu d'avoir pour principe les capricespossibles de la
nature. la magiedu primitif repose sur la croyance i'unifor*
mit de ses lois(p. L'animisme, suivant lequel tout dans te
monde est anim, n'est nullement une vue religieuse c'est une
thorie scientifique des choses. La magie sympathiquen'est
que la science applique du sauvage (p. 33). Si le primitif
croit son efficacit, c'est qu'il a la certitude que des lois
naturelles et uniformes existent (p. 291, 4 H). La religion a
toujours eu une autre origine. Sans parler de ses causes sen-
timentales et de ce sens religieux qui est au fond mme de
l'humanit, la religion repose sur la foi en des tres surnatu-
rels. Leur existence est dduite de la constatation de faits ou
de choses surnaturels, e'est'a-dire situs en dehors du pou-
voir de l'homme. La ncessit d'entrer en relations amicales
avec eux, par un culte ou une religion, drive de l. Ds l'ori-
gine les deux notions semblent avoir exist. Les confusions
que, dans l'histoire, les peuples ont souvent faites entre elles,
en Chalde, Rome, ont constitu de vritables rgressions

dans l'volution religieuse (40-42). La diffrence de nature
n'est pas moins radicale. Quand elle a t religieuse, la magie
n'a t qu'une parodie de la religion, une imitation funeste.
La religion a pour but le bien de la communaut; il s'agit de
concilier ces tres suprieurs qui peuvent tre terribles faute
d'accord avec eux. La magie a, au contraire, pour but, le mal
de tel ou tel individu, mme d parents. Souvent elle est une
vritable infidlit l'gard des dieux du clan; elle se sert
d'autres esprits, emploie un autre culte (p. 179). Enfln la
magie a un caractre minemment coercitif tes esprits sont
forcs d'agir dans le sens qu'indique te sorcier ou le partici-
pant aux actes magiques. Or l'attitude de l'homme envers les
dieux M'a pu tre primitivement coercitive (p. 43,343,t"r).
Ds l'origine, la religion tut une vritubte alliance avec des
tres suprahumains c'est ce que dmontrent les rites
d'alliance, de communion qui sout le fond mme du tot.
misme.

tt. Dans ~a rcrie du totmisme, M. J. complte plu-


tt qu'il necritique les rsultats auxquelsl'cole tait parve-
nue. Il laisse intactes les principales conclusions et suit a peu
prs l'exposition de M. Frazer. H admet que cette forme de
religion a du tre universellement rpandue. Il nous en
montre et le cot social et le ct religieux. Le totmisme
correspond aux plus anciennes organisations socia!es~!)u
clan; il est le principe de t'atiiauce. do lu communion par le
sang, du systme de parent dans le clan; il est le motif de la
vengeance du sang p. tOO, 99). Le respect moiti moral, moi-
ti superstitieux, du aux tres totmiques, s'tend aux mem-
bres du clan, puisque les uns et les autres sont supposs de
mme origine (p. 107-9) de ta le respect d'autrui l'intrieur
du ctan. Le totmisme est le centre de la vie morale. Au point
de vue religieux, c'est toujours une espce, animale ou vg-
tale, considre comme un tout, et jamais tel ou tel individu
de cette espce qui est le totem cette espceconstitue donc
un vritable clan d'tres divins, dont on se venge l'occa-
sion (p. 100). mais avec lesquels, par dos rites communie!s.
on tablit une union religieuse. La fusion idale d'une com-
munaut animal et d'une communaut humaine, voii i'es.
sence du totmisme. De l, d'une part, la notion du pch;
dont M. J. met en lumire l'origine les offenses au totem
sont devenues non seulement des actes dangereux, mais de
vritables pchs (p. 112). Do l, d'autre part, le sacrifice
totmique (129) o le clan communie avec ses dieux, et s'unit
eux en mangeant la chair d'un tre totmique (p. 220,2). De
ce sacrifice viennent les caractres du sacrifice animt tui-
mme, tel que l'a conu l'antiquit, et qui n'est qu'une con-
centration du totmisme (ch. x et xt) la nature sacre de
t'autet. les formes du rite qui s'y pratiquent, le repas qui suit
d'ordinaire, tout cela drive, par volution, du totmisme
primitif.
A cette thorie, presque classique d'ailleurs, M. J. ajoute
une hypothse neuve et presque inattendue sur les origines
du totmismeetd'introssantsdveloppements sur t'inftuence
qu'il a eue pour le progrs matriel et religieux de l'huma-

nit. Le totmisme est le plus ancien type de religion his-
toriquoment ou etimotogiquement connu. Mais, si ia dif.
rence entre le surnaturel et le naturel a t de tout temps
sentie par l'homme (p. 18), et si le totmisme consistedans !a
recherche d'une attiaoceavecces tres divins, c'est qu'il doit
provenir (M. J. prsente cette ide avec toutes les restric-
tions ncessaires),d'une religion ptusanciecnedontitneserait
qu'une rgression (p. 393). Cette religion serait une sorte de
monothisme, antique et vague, ou une conscience religieuse
rudimentaire (p. 414) sentait tout simplement la prsence de
la divinit, sou caractre terrible et bienfaisant, ne faisait
que tendre vers elle (p. 4)3) il tu cherchait (p. i09.HO) pour se
concilier par des cultes l'amour d'un tre tout-puissant sur
la nature (p. 4M Le totmisme a t une erreur et sur le choix
du symbole qui reprsentait cet tre suprme (on l'adora
dans une espce animale), et sur les moyens qui pouvaient
assurer l'homme contre les caprices de cet tre, puisqu'on
acquit l'alliance par un repas sacrificiel. Le monothisme
juif (ch. xxv), quelque discute que soit son origine, pour-
mit bien tre la persistance extraordinaire, dans une nation
et dans une religion, de cet tat prtotmistiquede la pense
(rvlation) religieuse.
Quant ses eitets, le totmisme a eu une influence consid-
rable sur rvolution conomique de l'humanit. Reprenant
une conclusion de M. Frazer, M. J. met, avec des raisons
trs ingnieuses, l'ide que c'est le totmisme, culte d'une
espce animale ou vgtaie. qui est l'origine de la domestica-
tion des plantes et des animaux (p. ~5), qui est donc le
premier moteur du progrs matriel (p. 1)3~. L'instinct du
primitif,du nomade chasseur ou pcheur, n'est, en effet, rien
moins qu'un besoin de rserver pour l'avenir le sauvage
actuel dilapide toujours. D'autre part, la chasse pousse, non
pas a conserver, mais dtruire, Il fallait donc de bien puis-
sants motifs pour aboutirgarderles semencesd'une rcotte,
laisser se reproduire les animaux. Ces motifs, seul le tot-
misme pouvait les fournir (p. ~7, ~9). tt dfend, en etet, do
manger, saut dans certains cas exceptionnels,un aliment qui
provienne du totem. Aussi trouvons-nousque la plupart des
animaux domestiques ont t sacrs, que, jusqu' une poque
rapproche, ce fut un sacrifice que de tuer uu animal quel-
conque. Et, setou M.J., si les cultes de la nature, les cultes
agraires surtout, sont d'origine totmique (p. 3~), c'est parce
que !a culture ctte mme des plantes n'a pu avoir d'autre ori-
.ginefp.MO,M7).
Enfin M. J. drive, comme R. Smith, du repas totmique
sacrificiel le sacrifice expiatoire; mais sur ce point M. J.
propose uue ide qui, plus prcise et plus dveloppe, eut pu
tre fconde (p. 1)5. tH, ~60). Le totmisme obtient ia protec.
tiou des tres surnaturels par un culte essentiellement com.
muuie); mais cette protection n'tait ncessaire qu'en cas de
dtresse nationale ou individuelle. Or, les pc))s individuels
sont plus frquents que les dsastres publics, et mme, on
imagina bientt que les malheurs du clan provenaient de la
faute de tel ou tel de ses membres le sacrifice totmique,
puis expiatoire, a donc eu pour but non seulement de rame-
cet' les dieux vers la socit, mais aussi de rapprocherun cou-
pabte des dieux et de ta socit, la fois. AI. J. soutient donc,
peu clairement il est vrai, l'origine expiatoire d'un certain
nombre des rites du repas sacrificiel. Il a le sentiment que les
savants de t't~cote n'ont pas tout dit sur cette question. Mais
une telle indication est loin d'tre suffisante, et je crois que
M. J. et bien fait de soutenir la coexistence primitive du
sacrifice communie! et du sacritke expiatoire, et de constituer
deux espces distinctes du sacrifice.

!!t. La thorie du tabou que NI. J. propose est des plus


.originales. La moratit est, son origine, troitement lie
Ha religion (p. )<?, t H), au totmisme. La source de la morale
) <st, pour ainsi dire, religieuse, ouplutt, l'institutiondu tabou,
qui n'est spcifiquement ni moral, ni social, ni religieux
(p. KO), qui est tout eusembie, mais est plutt d'aspect reli-
gieux, est la forme rellement primitive sous laquelle tes
prceptes moraux se sont prsents l'humanit. Les rgles
sociales, morales ou religieuses, ont t surtout prohibitives.
< Ne fais pas, disent les plus anciennes coutumes et les plus
anciennes lois. Ce caractre ngatif de la morale lmentaire
est prcisment celui du tabou est tabou ce qu'on ne doit
pas toucher. Cette ide de devoir, elle-mme centrale dans
toute morale qui a fonctionn, c'est le systme du tabou qui
l'a fournie il est la forme primitive < de l'impratif catgo'
tique (p. 84). 11 est a priori, n'tant nullement dict par
l'exprience, mais pos au nom de principes religieux, ou
observ inconsciemment. !) est purement formel et sans
contenu. I) est mme la source de t'obtigation morale pure;
et voici comment. Le caractre essentiel du tabou, c'est sa
contagiosit Les faits, sur ce point, sont bien connus. Cette
contagiosit est, d'ailleurs, rgle par les principes mmes de
l'association des ides (p. 67). tJoe chose tabou en touche une
autre. le tabou passe de l'une a l'autre; un individu touche
un cadavre, il devient tabou comme le cadavre tui-mme.
Telle est l'origine, non seulement d'un grand nombre de faits,
mais encore do tout l'aspect de la morale primitive.La crainte
des morts, de prononcer leur nom (60-1 le serment (C4-S),
les ftes (8S'. etc., ont pour motif te tabou des morts, celui des
places et objets saints, celui des jours dtermins, la crainte
de leurs eiets: et il y a aussi des raisons de croire que, dans
les socits primitives, les seuls criminels sont les violateurs
d'un tabou, et que le crime amne le chtiment avec soi,
puisque, dans le cas de rupture d'un tabou, te coupable devient
tabou tui-mtne La crainte de devenir tabou est le motif
pour lequel le primitif s'abstient de tel ou tel acte. L'vo-
tution du tabou, seconde par une vritable slection parmi
les divers tabous, rejetant les uns. sublimant les autres, a t
la vritable cause des dinrentes rgles morales aujourd'hui
en vigueur. Le systme du tabou fonctionne encore aujour-
d'hui derrire les actes qui semblent les plus teignes d'une
telle origine; la saintet, la religiosit rationuellea (p. 368)
sont la simple exaltation de ce processus sentimental primi-
tif par lequel l'homme vitait telle ou telle chose tabou.
Cette thorie, M. J. ne la prsente que comme une digres-
sion, elle est pourtant la partie matresse de son livre. Le
reste consiste en une srie de dveloppements,tous suggestifs;
sur le ftichisme (xm) qui s'est dveloppquand les dieux de
la tribu n'ont plus suffi l'individu, et qu'il lui a fallu des
dieux et des rites pour lui; sur les dieux familiaux et indivi-
duels (x'v). sur le culte des aucetres (xv) que M. J. drive
aussi des anciens cultes totmiques sur le sacerdoce (xx),
effet de la concentration de la religion et du culte sur tel indi-
vidu et dans ses mains; sur le syncrtisme et le polythisme,
produits, d'une part par la fusion des cultes tribaux dans un
culte national, et de l'autre par la raction de la civilisation
-matrielle sur la religion qui l'avait cause. L'existence de
l'agriculture, due au totmisme, et, par suite, celle des rites
et cultes agraires,donnent un srieux appoint au polythisme.
Eu outre, te dveloppement conomique de t'humaniteaboutit
& faire de la religion
une sorte de commerce et de contrat
avec les dieux, tandis que lit fable crait une mythologie (xtx),
explication de l'univers et des rites, totalement oppose
une saine religiosit (p. M'!). tt eut fallu dsesprer de l'avenir
de la religion si, en mme temps qu'agissaient des
causes
historiques, n'tait intervenue au sein du vieux monde
(vr' sicle av. J..C.), une vritable renaissance religieuse,
cause par un rveil des croyances concernant la vie et ta
mort (v), la vie future (xx<), devenues de plus en plus morales
et religieuses fxxn). A ce moment, dans l'antiquit grecque,
une pousse de mysticisme so produisit i'ide smitique du
sacrement et de la communion se rapprocha du sentiment
qu'il fallait s'assurerds cette vie le bonheur j'outre-tombepar
des actes religieux et une vie morale de ta les mystres,
ceux d'Eleusis en particulier (xxm, xxtv), qui prparrent
l'avnement du monothisme (xxv). M. J. adjoint
son livre une dissertation philosophique sur volution de
la croyance.
On voit sur combien de problmes s'est exerce la pn-
trante rHexion deM.J. Un certain nombre de questions trai-
tes'dans ce livre n'avaient pas mme t touches par l'~cote
anthropologique.Toute lit dernire partie, sur lit vie future,
les mystres, est originale. Peut-tre mme domine-t-elle,
dans lu pense de l'auteur, le plan de l'ouvrage. En cela, M. J.
est bien dans la tradition anglaise pour laquelle une tude, si
gnrale qu'elle soit, a toujours pour but l'explication d'un
ordre spcial de faits. C'est pourtant, notre avis, la partie la
moins suggestive la conclusion n'a pas une gnralit pro-
portionne celte des propositionsqui servent t'tablir. H y
a l un dfaut qu'on retrouverait mme dans l'admirable
Gotden Bough de M. Fruzer. Au fond, chez Ai. J., l'intrt
qui est port ces tudes de < religion compare est d'une
part (comme chez MM. Fraxer et liartland), historique et phi-
lologique, et il s'agit d'expliquer tel ou tel fait de l'histoire,de
la posie ou de l'art grecs ou romains; et, d'autre part (comme
chez M. Lang), religieux, et il s'agit de distinguer soigneuse-
ment ce qui est rellement religieux de ce qui ne l'est pas, te
mythe de la croyance, la magie du culte intrieur. Des consi-
drations, en quelque sorte extrieures, guident le savant
dans le choix du problme, des principes, des dnnitions.
Le dfaut de ce mode de penser est particulirement appa-
rent dans la discussion que M, J. a Institue sur les origines
du totmisme. La question a t pose par des proccupa-
tions oxtrasciontifiques, < dans la conviction que les intrts
de la vrit et de la religion sont fondamentalement iden-
tiques (Prface). Nous ne devons donc pas nous tonner
quand nous voyons M. J. supposer une phase prtotmistique,
monothiste et pure de la religion. Cette hypothse gratuite,
invrifiable, nous semble, jusqu' nouvel ordre, de nature
plutt mtaphysique. Que l'amour soit la base du totmisme
comme du christianisme, personne ne i'a jamais ni. Mais Il y
est a l'tat d'lment composant, non pas l'tat de principe
originel dont te totmisme ne serait qu'une dchance.
La mme vue thoiogique a conduit M. J. dans sa critique
des thories de i'eoie sur la magie et le surnaturel l'exis-
tence pour le primitif d'tres bons, tout-puissants sur la
nature, en relations fixes avec une communaut (p. ~04),
serai),seioniui.enetde lu conception originellede la divinit.
Mais s'ensuit-il que ces tres aieutt ncessairementconus
comme surnaturels? Sans doute j'admettrai avec M. J. (et
j'imagine que M. Lang ni M. Frazerncferaient ici dedifncuits)
que les notions de naturel et de surnaturel ne sont pas des
concepts religieux, mais des concepts mtaphysiques. Elles
appartiennent plutt l'ordre do la connaissance sociale qu'
l'ordre de la religion. Nanmoins leur coloration est originai-
rement religieuse. L'animisme est un moyen d'explication
pour le primitif, mais les esprits sont non seulement des
causes, ce sont aussi des formes religieusesdes choses, ce sont
des tres auxquels ia socit, l'individu croient, et doivent
s'adresser l'aide de cultes. Quoi qu'en dise M. J. qui, sur ce
point, n'invoqueaucunfait nouveau, les dieux ont, l'origine,
fait partie intgrante de ce systme, ni naturel, ni surnaturel,
qui tait le mondetfoit et vague du sauvage. Le progrs social
seul spara les dieux de ce qui n'tait pas eux, oprant entre
eux et la nature une division du travail pareille cette qui
s'opraitdans la socit o la religion se difrenciait des faits
de la vie conomique ou juridique. Les dieux sont devenus
des tres surnaturels quand t'ide de nature a pu s'opposer
eux. Mais ceci n'est qu'un phnomne infiniment tardif le
caractrenaturaliste de la plupart des religions dites aryennes
ne pourrait s'expliquersi, ds l'origine, iadivinitet la nature
s'taient exclues.
M. J. distingue de la mcme faon lit magie et le culte, le
prtre et le dieu, et soutient que leur fusion n'est qu'un ph-
nomne secondaire; la magie a pntre la religion, le prtre
.n'est devenu qu'accidentellement uu Dieu. Si, sur ce dernier
point, nous croyons qu'en ellet lit thorie de M. Frazer
demande une revision et qu'il faut bien sparer le prtre-dieu
.du prtre possd du dieu. il est impossible de trouver, en
tait.. aucun culte pur de tout rite magique, et dont les cultes
magiques ne seraient que des altrations. Est-ce des cultes
totmiques que veut parier M. J.? Mais leur forme commu-
nielle embrasse tout un fond de magie sympathique, puisque
lit communion est essentiellement l'acte mystique par lequel
une partie du Dieu est ussimite au tout du clan. Est-ce des
cultes 1)rtot-miques? Mais il est impossible d'en parler. Le
caractre magique des quelques crmonies australiennes
connues, celui des cultes polynsiens et des ftes agricoles des
Indiens do l'Amrique du Nord est tellement marque qu'il
semble impossible de prouver qu'il y ait eu des types )men.
taires de culte qui n'aient pas eu une forme de rite magilue
bien dessine. Les faits sout bien loin de cndreravec le tableau
qu'en trace M. J.
Mais ce qui nous semble rester du livre de M. J.. c'est sa
bien intressante ide que la domestication des plantes et des
animaux a une origine totmique; elle sduite premire vue,
surtout quand, par l'habitude qu'on a d'observer les faits reii-
gieux, on sait toute teurinnuencesurla vie conomiqued'une
socit, et qu'ainsi, ponrbiendes paysans encore, tes semailles,
la rcolte, sont des actes presque religieux. Certes les objec-
tions naissent en foule. Entre autres opinions, ou pourrait
soutenir que t'tre totmique est souvent tel, prcisment
parce qu'il est la principale source d'alimentation du c)an;
ainsi la vache aux Indes, ainsi te gteau de raisins secs de
certains clans arabes. Mais l'ide est mise, on n'a plus qu'a
cherchersi tes faits, dans leur ensemble, la confirmentou t'in-
firment dcidment. En second lieu, M. J. nous semble
avoir bien mieux vu que M. Frazer la nature du tabou il a
senti que c'tait l'origine de la moralit mme, la forme pri-
mitive de l'obligation morale il a bien montr que la sanc-
tion du tabou tait ta vritable sanction originaire des pres-
criptions morales. Quelque imparfaite que soit l'analyse des
faits, M. J. a apport l'indication dcisive.
Les suggestions nouvelles foisonnentdans. le livre de M. J.
propos des faits tes ptus divers. Un index fort complet secourt
heureusement le lecteur. L'auteur crit d'ailleurs de cette
agrabte faon anglaise, o presque toutes tes articulations du
raisonnement sont masques par des faits. Ces faits, il est
vrai, sont loin d'tre puiss a premire source. M. J. n'eu a
nullement l'ambition (Prface) et les emprunte & sesdevan.
ciers. pour )a plupart. L'rudition de M. J. est extrmement
agrable, qu'il nous soit permis de regretter qu'elle n'ait pas
t plus critique. M. A. Nutt (p. ~0) n'est pas une autorit en
ce qui concerne l'Inde et le livre de M. Le Page-Henouf sur la
religion gyptienne est bien dpass ne pas ae fier ainsi aux
tmoignages indirects eut pargn des erreurs de dtait
M. J. comme de confondre l'herbe kusa rpandue sur le sol
du sacrifice avec le sol mme ~p. 74, n 2), d'assimiler les !<~
aux aserot smitiques ~p. )34\ de nier l'existence dveloppe
du totmisme au l'erou fp. H!0). Ce sont de petites choses,
d'ailleurs. Le nombre des hypothses, des interprtations dis-
cutables, est ncessairement trs grand dans un livre de cotte
tendue. Peut-tre un tel ouvrage etait-U un peu prmatur;
un mauuet d'une science no vient que lorsque cette science
est classique, et la science compare des religions est bien loin
de t'tre. Mais la (ouied'ides que l'auteur rpand est telle que
d'ici longtemps, tous, nous lui aurons de relles obligations.

A. SARATtER. Esquisse d'une philosophie de la. reM.


glon d'aprs la Psychologieet l'Histoire, in-8". Paris,
Fischbacher et C", 1897.
Le livre de M. 8. intresse le sociologue plus d'un titre.
D'abord son apparition est uu fait; la pense religieuse pro-
testante y est analyse do telle faon que nous possdons ds
maintenant un document historique important sur la nature
du protestantismelibral. Ensuite, bien que NI. S. critique en
passant la sociologie(p. ~), il ne laisse pas d'y avoir apport
quelque contribution.
Certes le point de vue thotogique domine; ta considration
des rformes possibles dans t'Hgtise protestante est l'un des
buts de l'auteur (p. t8f), p. t43). C'est une critique de la con-
naissance religieuse, faite dans un esprit kantien et menant
un nouveau symbolisme (p. 408). qui forme la partie dia-
lectique de l'ouvrage. De ptus, les proccupations d'une me
sincrement prise de sa religion compromettent l'emploi de
la mthode. La dfinition mme de la religion s'en ressent
< la religion, c'est un rapport conscient et voulu dans lequel
l'me en dtresse entre avec la puissance mystrieuse dont
elle sent qu'elle dpend et que dpend sa destine (p. 24,
p. vm). Selon M. S. rame humaine, des les temps prhisto.
riques a toujours senti la contradictioninitiale, entre )a pen-
se et le monde, entre les menaces de la nature et lit soumis-
sion de lit science, et lit force de l'esprit qui s'insurge. Ce
conflit, t'homme n'a pu le rsoudre qu'en se rtugiant vers un
tre suprieur lui et au monde, vers Dieu, que la pit lui
prsentait dans sa conscience. Le commerce avec Dieu se
ralise par lit prire; < ta prire, voil la religion on acte

(p. 24, p. 14). La prire est un mouvement de l'me en-
trant en rotation personnelle et intrieure avec Dieu. C'est
l'expression immdiate de la pit, radicalement individuelle
et subjective.
Mais M. S. n'est pas seulement thologien, il est encore
psychologue et historien. Sa psychologie est bien souvent, il
est vrai. uu peu personnette, et l'histoire est loin d'tre un
appui constant pour ses dmonstrations. Cependant, il ne
laisse pas d'avoir employ, dans plus d'une occasion, une
mthode ta fois historiqueet comparative. Il a bien vu l'l-
ment social dans la religion (p. 103-8) et t'a traite comme
un phnomne social et historique. Selon lui. elle a t, dans
toute la suite de l'volution sociale. te < vritableciment de
la vie collective (<0~. La communion des mes, uu des plus
tonnants phnomnes de la vie morale, n'est parfaitement
ralise que dans la religion et par ette. D'ailleurs, de mme
que dans le moi sentiment, votont, intelligence, manifesta-
tions extrieuresdestats de rame sont troitementsolidaires,
de mme il est impossible que la pit ne se traduise pas par
des rites, des doctrines, des institutions (p. 309), dans des
formes religieuses, historiques,uvresdeia socit (~, que
nous pouvons connatreet dcrire comme des faits extrieurs
(p. 408). I) est donc bon de faire une esquisse de l'volution
religieuse dans l'humanit. Et, pour cela, l'histoire des reli-
gions, encore ses dbuts,entreprend de constituer une flore
religieuse. (p. 1 H) o les faits seraient dcrits et catalogus.
Mais l'uvre est peine commence. Le philosophe ne pourra
que retracer < en plerin pieux l'histoire religieuse de l'bu-
manit (p. )(?;.
La recherche de l'auteur est donc guide par sa pit. Celle-
citui fournit deux principes directeurs.Le premier dcoute de
la nature inne de la religion, c'est l'identit fondamentale du
principe religieux dans toute l'humanit pas de diitrence
essentielle entre les premires motions de la vie religieuse
lmentaire et celles qu'prouvent les consciences les plus
hautes et les plus pures (p. 105). Le second, c'est que le
dveloppement de la civilisation ayant eu pour parallle le
dvetoppementde la contradiction initiale entre la conscience
et le monde, a eu, pour consquence et pour principe & la
fois, un progrs religieux d'une intensit proportionnelle,
aboutissant directement au christianisme. Ou bien t'volu-
tion religieuse n'a ni sous ni but, ou bien il faut reconnaitre
qu'elle doit aboutir t'vaugiie comme& son termesuprmo
(p. ~32-i'?S). Mais la consciencescientifique de M. S. est assez
belle pour que de telles prnotions ne t'aient pas empch
d'arriver des ides intressantes sur l'volution religieuse,
sur l'origine, l'essence et l'histoire du christianisme, sur la
nature et la vie des dogmes.
L'volution religieuse, selon M. S., rsulte d'un triple
mouvement:t"Un largissementdes cadres religieux. D'abord
locaux et familiaux, les cultes deviennent nationaux sous
l'action de causes historiques puis, les religions deviennent
universelles de par les crations gniales de quelques indivi-
dus le Bouddha, Mahomet. Seul, d'aitieurs, le christianisme
est vritablement universaliste, puisque seul il est une reli-
gion d'galit et d'amour (t. IV. 2). 2v Un progrs dans
les reprsentationsdu divin. L'volution gnrale des notions
et des images religieuses a toujours suivi les notions de plus
en plus prcises que l'humanit s'est faite de l'esprit (t20).
Les premires religions ont toutes t nettement spiritistes
esprit et corps y taient confondus en une ide vague. Puis
s'est fait jour une tendance vers le monothisme naturaliste,
o l'esprit divin, quoique distingu, ne se sparait pas de la
nature (Grce). Par une purification de ces notions, par une
ide de l'essence morale de l'esprit, te monothisme hbreu
s'est tabli. Mais Dieu tait encore extrieur a l'me et au
coeur. C'est le christianisme qui, depuis l'exprience reli-
gieuse de Jsus, a fait de Dieu cet tre spirituel que la cons-
cience retrouve en eite mme, et sur lequel elle s'appuie pour
considrer le monde (t, IV. 3). 3 Un progrs dans la
prire. A l'origine celle-ci et, en gnral, les rites n'ont de
religieux que la croyance en leur cnieacit l'esprit divin
est en quelque sorte eu servage. Puis dans le ftichisme et le
polythisme une sorte de contrat s'tablit entre l'homme et
ses dieux il prie et sacrifie pour recevoir. Dans la retigiou
juive ta pit et la morale fusionnent do ta une prire de
confiance, d'abandon et de joie. Mais un monothisme
farouche laissait subsister ia crainte et la peur de Dieu. Ici
encore, l'avnement de l'vangile a donn son achvement
t'voiution religieuse, et depuis Jsus-Christ l'homme peut
s'adresser Dieu comme son pre (I, IV, 4).
Le christianisme avait donc t prpare par toute l'huma-
nit. Mais s'il est n en Isral, il doit y avoir l des causes
particulires. Or, ni l'organisation sociale des Hbreux (IL
I, ~), ni le caractre divin attribu par la Bible aux vne-
ments historiques ne fournissent de suffisantes explications,
puisque ce sont des faits communs toute la race smitique.
Au contraire, le prophetisme fut spcialement isralile. Ce
fut une srie de crations morales par des individus de plus
en plus inspirs, qui se dgagrent, par une vritable lutte, et
des procds ordinaires et du milieu o ils vivaient, qui trou-
vrent en eux-mmes lu rvlation divine. Au retour de l'exil,
les prophtes achevaient leur osuvre. t La pit jointe un
svre idal do justice dans la notion de Dieu, la moralit
introduite dans la religion par la subordination du rite
!a droiture du cur. enfin l'esprance d'un avenir de
bonheur et de paix par la ralisation de la justice, voil
les trois grandes ides lgues par le prophtisme l'van-
gile "(p. ]u8). Mais le pacte entre Dieu ett'hommeetait encore
national l'glise juive, qui se constituait alors, n'aboutissait
qu'au pharisasme, au Talmud le prophetisme ne persistait
que daus les rves apocatyptiques.Pour crer, dans de telles
conditions, la religion souveraine, il fallut l'action divine du
Christ.
L'essence du christianisme, M. S, la retrouve par une
mthode surtout d'analyse interne. Ce qui fait le chrtien
(p. t7S), c'est d'abord qu'il sait en conscience que sa religion
est une religion parfaite, puisque Dieu est prsent en son
me (176). que c'est une religion d'esprit libre et de pure
moralit c'est ensuite la conviction que sa pit, le senti-
ment de son rapport avec Dieu et avec l'univers, vient direc-
tement de Jsus-Christ. La conscience religieuse de Jsus-
Christ est la source premire d'ou le fleuve chrtien est sorti.
C'est Jsus-Christ qui rendit Dieu prsent dans le for intrieur
des hommes. Us sont chrtiens dans la mesure o la pit
liliale de Jsus-Christ se reproduit eu eux. c La prire de
Jsus-Christ doit tre leur prire a (H)t), son attitude frater-
nelle t'gnrd des hommes doit tre leur attitude.
recherche psychologique aboutit distinguer dans le chris-
Cette

tianisme sou essence et ses ralisations historiques. Dans son


principe interne et idai, le christianisme ne saurait tre
perfectible. C'est un idal qui n'est jamais atteint et une
force intime, toujours identique, qui nous pousse toujours
nous dpasser car la religion chrtienne est merveilleuse-
ment vivante, et qui dit vie, dit altration, change et rpa-
ration. L'influence de la vie sociale a fait varier ses formes
historiques; la pit vritable eut donc lutter contre des
lments trangers qui l'eussent perdue si, chaque instant,
le principe chrtien n'avait repris le dessus. Sous sa forme
messianique ou juive, le christianisme dut combattre !a
tradition juive, conqurir son indpendance, sortir, avec
Paul, du cercle du formalisme national. Le messianisme
apocalyptique, d'autre part, rgna longtemps mme dans le
cur de Jsus, puis daus les ides des aptres, jusqu' ce que
la vie chrtienne pure se fut substitue a uue attente du
retour du Christ. Le christianisme catholique fut l'effet
des attaques de l'lment paen se modelant sur l'empire
romain, t'lise eut son administration, ses lois, ses dogmes,.
et tenta de rattacher l'me Dieu par l'glise seule. Le catho.
licisme fut une matrialisationdu principe chrtien les rites,
les pratiques, les uvres extrieuresdevinrent le tout de la
religion. L'autonomie de la foi individuellefut abolie le lien
entre t'lment religieux et l'lmentmoral, rompu. Heureu-
sement, le protestantisme vint. La Rforme, dj souvent
tente, russit enlin. Elle consista surtout en une nouvelle
exprience religieuse des rformateurs,qui constatrent, une
fois de plus, l'inanit du systme des wuvres pies Le germe
du christianisme tait retrouve, aussi vivant qu'a l'origine.
La nature interne de la foi fut de nouveau consciente; la
subjectivit radicale du protestantisme dcoule et de l'es-
sence du christianisme et de son histoire.
Mais si la foi est tout, si elle est, pour le protestant, la seule
chose essentielle, il s'ensuit que tout ce qui est extrieur,
tout ce qui est institution et dogme, ne peut tre immuable et
doit changer suivant les exigencesde la vie religieuse (p. 253,
p. 2SS). Le dogme, c'est--dire ta doctrine admise par une
glise, n'est qu'un phnomne de la vie sociale. il n'y
a pas
d'glise sans dogme ai de dogme gtise mais le dogme
sans
n'est ni le principe ai le fond de la religion. L'me de la
religion, c'est la piet, tes dogmes et les rites n'en sont
que
le corps. La prire s'oppose au dogme (p. 300) elle est
la foi eite-mme, il n'est que c la langue que parle la foiLes
divers essais de fixation des croyances religieuses ne sont que
le troisime terme d'une srie car c'est la rvlation interne
de Dieu qui engendre la piet subjective, laquelle s'exprime
en rites, en formules de foi, en livres sacrs. Aussi existe-t-il
t'intrienr des dogmes une vritable puissance d'volution
qui tait leur vie, leur mort et leur renaissance (p. 297-8). Ils
apparaissent, dans leur gense et dans leur histoire, comme
essentiellement mobiles et vivants. Leur vie est comparable
celle des mots ils disparaissent par dsutude, ainsi la
notion du dmon ils se renouvellent par intussusception,
par l'introduction de nouveaux sens dans les formules an-
ciennes il s'en cre de nouveaux, ainsi l'ide de la justifi-
cation par ta foi. La variabilit est, d'un certain point de vue.
le caractre mme du dogme. Son autorit est toute condition.
neite et pdagogique. Il est ncessaire l'existence de l'glise,
parce qu'il est le moyen do propagation de la vie religieuse et
de son dification mais, pour le protestant, la valeur d'une
croyance quelconque est toute momentane. 11 n'y a que lu
prire et lu pit qui relient vraiment t'homme Dieu. La
forme des dogmes doit donc tre toujours prte se renouve-
ler, et l'glise vangtique, doit tre en constant progrs.
On voit comment, chez M. S., la pit, ia proccupation
de l'avenir reprennent toujours le dessus, quelle que soit la
franchise des aspirations scientifiques. D'ailleurs, en ce qui
concerne la thorie historique des dogmes, cette foi t'aflt
de toute nouveaut a rettement servi l'auteur, tt a, mieux
qu'on n'a jamaisfait, mis en retief te caractresocial, extrieur
du dogme, de la croyance religieuse formule. I! a montr,
en mme temps, que la constitutiond'une glise tait rendue
ncessaire par la propagation d'une croyance internationale
et individuelle. tt y a l une dduction dont l'importance
sociologique n'chappera personne. Je suis mmo persuad
qu'en tudiant comparativementla formation de l'orthodoxie
musulmane, la composition des canons bouddhiques, la cons-
titution des glises chrtiennes, on arriverait des rsultats
qui confirmeraient ceux de M. Sabatier.
Nous no saurions critiquer l'esquisse large et facile que
l'auteur donne de t'votution religieuse. Ce serait mme
injuste. C'est une phitosophie et non une science que M. D.
voulu taire. Mais le rsume des formes historiques du chris-
tianisme n'est pas sans une relle valeur scientifique. L'au-
teur nous montre bien les deux grandes oscillations du mou-
vement chrtien, qui trop individualiste l'origine, devient
trop social dans le catholicisme et redevient individualiste
avec la reforme. Enfin, bien que ce soit par une observation
personnetio que M. S. y soit parvenu, it a suuisamment vu
l'importance d'une thorie de la prire pour uue science des
religions. Mais c'est une erreur fondamentale que de croire
que la prire est le tout de la religion elle a pris cette impor-
tance, elle no l'avait pas, et je crois pouvoir assurer qu'il y a
des religions (australiennes! o la prire n'existe aucun
degr. C'est encore une erreur de fait de dire que la prire a
toujours t un lan individuel de t'amo il est des religions
o la prire individuelle est interdite quiconque n'est pas
prtre (brahmanique) et d'autres religions o seules existent
des prires formules ou rcites en commun. Le caractre
tardif et social des premires formes de la prire semble bien
tabli par les faits la prire Individuelle, la mditation
religieuse, la tendance pure de )'ame vers Dieu. sont des faits
rcents, des crations du bouddhisme et du christianisme.

Dr E. KOCH. Die Psychologie in der Religions.


wissenschaft. Grundioguag. (~. ~cAo~<e dans la
Mx'HCf des )'<<oK.) Freiburg im Brisgau. J.-C.-B. Mohr.
1896, in-8", 140 p.

L'auteur veut dfendre contre certains phi!osophes et


thologiens allemands les droits de la psychologie pntrer
la science religieuse, c'est--dire la thologie. Pour cela il
faut rendre la psychologie indpendantesoit d'une mtaphy-
sique morale, soit d'une mtaphysique qui en proclamait
l'absolue subjectivit on arrivera ainsi une conception
phnomniste(subjektlosen)du moi, qui seule permet la for-
mation d'une psychologie religieuse ~41). On peut ds lors
trouver parmi les phnomnesde ce moi exprimentalement
donn une certaine catgorie de faits, objectifs comme les
autres, qui sont les sentiments et croyances religieuses(3. g 4).
Est religieux ce qui, dans l'esprit, revt l'aspect de t'eter-
nit les ides de Dieu, de !a rvlation, du Christ, la
votante religieuse contiennent toutes ce caractre de l'absolu.
Mais quelle espce de fait de conscience est ce phnomne
religieux? M. K. repond que c'est comme reprsentation,
comme objet de perception possible (98j que les choses reli-
gieuses sont en nous.
Le livre de M. Koch est une raction contre les tendances
symboliqueset anti-rationalistes(p. 81) et est une honorable
tentative de deHnition rationnelle des faits religieux. Mais il
l'essaye du point de vue d'une science religieuse, non pas
d'une science des religions. Il reste toujours que M. K. a bien vu
quelle mtaphysique tait ta condition praiabie d'une tude
rationnelle des faits religieux, et qu'il fallait pour arriver
une notion objective, admettre qu'on pouvait tudier comme
faits, des choses qui n'existent que dans la conscience.

XOTtCES
M.~x

MUH.KR. Contributions to the Soienoe ot Mythology.
Lond. Longmansand C", <8M7, a vo). in-8".
Xous rendrons compte de la traduction franaise qui paruttra cette
anne ta librairie Atean d'aittcurs. autour de c<; livre, uue pote-
mique importante s'<"it <!tet')~ <;n An(j)et<'rt' nous re~'n'ons donc
une tude de ia question pour !<' prochain votunte d'' )'~f'f .s'ot'f'o.
f'~t'~xe.

JotM BEA TTIE CROZtEK. Hiotory of ImteUectual Develop-


ment. 1. Lond. j.ongmans and (.'u, i896.
Histoire rapide de la pense hindoue, grecque, judaque aboutis-
sant une apologie du plutonisme.

HtKRv OSBORX TAYLOK. A study of ateUeotual and Spiri-


tual Growth trom Eariy Timea to the EstaNMtunentof Chris-
tianity. Xew-York. Putnam's Sons, 1890, 2 vot. in-8 (]:)46t p.
Vt)t-Mt) p.).
Etude (!<'neraic d'histoire religieuse et phitosophique sur le dve.
toppement des dit&reuts idaux des grands peuples, aboutissant
tous, seiun l'auteur, l'idal chrtien. Le livre se compose d'une
srie de dveloppementssur la plupart des grandes religions anti-
ques d'une tude trs pousse sur la prparation du monde ancien
au christianisme. Le livre de Il. T., quoiqu'il soit plutt un livre de
vulgarisation reposante, ne laisse pas de prsenter certaines parties
utiles et une rudition de bon aloi.
t.ons Mt~AKD. SymboUque des BeUgioM anpiennee et
modernes. Leura rapports avec la civilisation. (Revue d'ltis-
toirc des HcUgions, t. XXtV, n 2, septembt'f'.octobref89B, p. <7tt-
SOt. Paris, Leroux.)
Article de g<'u)'runtf~, sur la place de l'histoire des religions dans
t'histoire universelle (p. it2); M. M. emett'ide que le mme symbo.
)i:<me anime tf dogme cht'etien et )u mythotogie Mt (t9~ indique
<)UMtque6 cctKot'dtmccs des religions et dus funnes potitiques.

Th Study in Psyohology of BeMgioua fhemomena. (A meri-


can Journal o/Ao/o~, Vil, n" 3.)
HEMHMG. Religion M'd V61ketkunde.(Glubus, V, '!<, n<" 7 et 8.)

H. HE).!CtOi<S PatMtTtVRS RN Gt~ttAt.


)'<n-M.MAt'ss.

MARY H. KINGSLEY. Trave!a ta West AfMctt, Congo


Franais, Corisoo and Camerone, (Voyage dans <4/r~Me
occ/~<t<e.) Macmillan and C", ~97, ia-8" (xn-743 p.).
Cette retat!on de voyage est captivante par la simplicit du
style et le naturel avec lequel sont exprimes les motions de
l'intrpide voyageuse. Mais c'est, de plus, un livre d'une vri-
table valeur scteatiuque. Depuis tes travaux du colonel Ellis,
il n'y a pas eu d'aussi importante tude sur les religions et
les socits ngres. M" K. ne raconte que ce qu'elle a vu, ou
bien ne nous donne que des renseignements qu'elle tient
d'anciens rsidents, connaissant bien les indignes, leurs
langues et leurs moeurs. Une grande partie de ces informa-
tions proviennent du D' Nassau (p. 395), ie plus ancien des
missionnaires de la cte, et sont certainement de premier
ordre. De plus, elle met toute sa conscience localiser stric.
tement les usages et tes traditions qu'elle nous dcrit. Enfin
elle s'abstient d'interprter, sauf pour rapporter l'explication
que d'autres, indignesou observateurs, lui donnent comme
naturelle.
Le livre de M K. contient, pars vrai dire, mais non
moins prcieux, un certain nombre de renseignements qui
intressent d'autres sociologuesque l'historien des religions.
Une tude approfondie du commerce chez les ngres forme
un long appendice, et pourrait servir grandement des co-
nomistes. Une dissertation peu banaie (p. (MM suiv.) sur ta
mentalit des ngres, leurs ditrentes aptitudes, sur les tan-
gages, tes gestes, l'imagination (p. C04) forme un vritable
essai de psychologie sociale. Les juristes auraient se servir
de ce que M" K. nous dit du fonctionnement des lois du clan,
des ordalies, des punitions pour i'aduitero et le vol, de
l'organisationde ta proprit (4!M suiv. Cf. p. ~(!S;. lis auraient
remarquer la structure maternelle de la famiite le droit
desuccessionde l'oncle (483-29~), te fait que chez les M'pougwe,
on achte la fiance i'oncie et la mre (p. :MS) en sout des
preuves suffisantes le caractre pour ainsi dire conomique
du mariage, dans ia plupart dos peuplades, sauf chez les
Fans o il a uu aspect religieux (3~t;; la cou tume du mariage
des enfants rsultant plutt de ia dgnratiou des tribus
(403-404); l'organisationde la polygamie dpendant de causes
conomiques et sociales (21U-6M;; voil une srie de faits
que M' K. verse dans le courant sociologique.
Mais tout cela n'est que par surcrot l'tude gnrale du
itichisme est la partie centrale du livre. Naturellement
M'' K. refuse de reconnatrel'exactitude et la valeur du terme
de ftiche, qui dsigne tout au plus certaines amulettes;
naturellement aussi, elle s'en sert constamment ainsi que du
mot joujou (franats, employ par les indignes), parce que
c'est un mot commode. Comme, sur ce point, les recherches
de Me K. ne semblent pas avoir abouti dissiper toute con-
fusion, je me permets de ne pas utiliser exclusivement sa
terminologie. C'est le tableau absolument gnra) des reli-
gions ngres, sauf de certaines religions Bantu, que M K.
nousoure, en se rservant de le complter. Certaines institu-
tions sont tudies plutt citez telle tribu que chez telle autre,
suivant que M" K. a eu des rapports plus ou moins troits
avec elle, et que son sjour l'a mise en contact avec telle ou
telle coutume plutt qu'avec une autre. Au point de vue
ethnographique pur, il n'y a certes rien dire. Au point de
vue sociologique, le plan suivi doit tre critiqu. Il n'est pas
possible de complter par un fait emprunt aux Guinens
une description dont la plupart des termes sont congolais et
rciproquement. M" K. aurait eu une faon bien simple de
garder les ditlrences relles, tout en marquant les ressem-
blances, c'tait de comparer. Le champ tait assez vaste pour
que la chose fut possible. M' K. a d'ailleurs procd d'aprs
cette dernire mthode pour les croyances concernantla vie
d'au del. Pourquoi n'a-t-elle pas fait do mme pour le reste '?1
Cette critique gnrale faite, je n'en vois pas d'autre nces-
saire.
M K. ne constate pas, comme le t)~ Ellis, l'existence dtt
totmisme chez les Ngres. Ceci n'enlve, d'ailleurs, aucune-
ment leur valeur aux renseignementsde ce dernier mais un
certain nombre des faits qu'il invoquait devront dornavant
se ranger soit parmi les pratiques des socits secrtes, soit
parmi les interdictionsreligieuses individuelles. En effet, les.
cultes thriomorphiquessemblent assez spciaux aux nom-
breuses associations religieuses tout (ait comparables aux
associations mlansiennes. itesont, il est vrai, un but poli-
tique et commercial mais, comme elles se constituentautour
d'un esprit (crocodile ou lopard, p. 836 et suiv., p. M6 et
suiv.), que l'on cherche dans la brousse ou sur la mer et que
l'on amne au milieu de mystres dont les femmes sont soi-
gneusementcartes comme, dans ces mystres, s'excutent
des meurtres accompagns ou non de scnes de cannibatisme,
et, en tout cas, des initiations, le caractre religieux en est
excessivement marqu. Seulement, par leur liaison avec ces
pratiques, les socits secrtes semblent bien n'tre qu'une
concentrationdu totmisme. D'autre part, certaines interdic-
tions, que l'on a cru d'origine totmique, sont rigoureusement
individuelles chaque individu a son < 0<'MH</ particulier.
tt est dfendu un tel de manger du poisson (p. 4S6), & un
autre de cuire sur le bateau ou en voyage. Le faire serait
vouloir mourir. C'est le devin, ou bien l'individu iui'mme t
son initiation, qui ont fix cet Orunda. Ainsi, dans toutes les-
retigions ngres, fonctionne cette pratique, thme gnrt des.
contes de fes, de la chose interditespcialement par tes esprits
tel ou tel individu.
Pour le reste, les caractres normaux sont des plus accen-
tus la vertu magique du sang (4M-S~8), de la salive (288),
l'action curative du sacrifice sanguinaire (4S't suiv.), le carac-
tre sacr de certains lieux qui servent d'asiles (4S6), la divi-
nit du chef et de sa famille (497), ont de nombreux quivalents
dans les religions les moins avances l'tude de M" K. con-
tribuera grandement en complter le tableau que la science
cherche dresser. Tout fait remarquable nous semble la
distinction faite, d'aprs les faits, entre la prire et l'incanta-
tion (43~ dont l'une accompagne et dfinit le but du sacrifice
et dont l'autre a une vertu magique propre soit que le sor-
cier, appel prs d'un malade, cherche enchanter un esprit
qui s'est introduit dans le corps et le ronge, pour l'expulser,
soit qu'il tente de ramener l'Ame qui s'chappe (46t).
La partie du livre o sont tudies les croyances concernant
rame aprs la mort est la plusconsidrabio pour te nombre et
l'importancedes faits. Pour les ides guinennes, on peut dire
que M" K. a trouv la formule l'esprit est caractris par
son intgrit, son ternit, t la vie et la mort ne sont que des
ombres (p. 820). L'me existait avant la mort, et continue
mener la mme existence aprs. Ou bien elle se rincarne
(Bantu, Delta du Niger), ou bien, venant d'au del de la mer
et de la rivire, elle retourne au lointain pays des morts
(p. 488.49S). De rcompenses et de peines on en trouverait
peu le chtiment divin est plutt immdiat que futur (404).
L'me eu effet est trs mobile, elle habite mme quelquefois
hors du ::orps (p. 439), une souillure entralne par elle seule
le dpart de l'me et la mort. Le dfunt, en mme temps qu'il
habite le monde futur, hante les siens, la veuve surtout
(483-8) lesesprits d'enfants s'emparent a l'occasion des corps
des petits enfants vivants, et les font mourir pour prendre
leur place; aussi certains enfants mchants, les jumeaux, les
infirmes, sont-ils exposs (p. 473.4T?). Pour prvenir cette
hantise on accomplit des rites funraires complexes, qui
tantt ont pour objet de fixer le corps et de congdier l'esprit,
tantt de rattacher t'me au cadavre et de l'enterrer avec lui,
tantt de dtruire, en le mangeant, l'esprit et le corps d'un
individu particulirement mchant (Fans, p. 430). H faut
donner toute satisfaction au dfunt immoler, en guise de
vengeance, ses femmes si elles sont prsumesl'avoir envot
ou empoisonn (p. 468-88j tuer sur sa tombe ses femmes et
ses esclaves pour qu'il ait une socit dans le monde futur
(Tshis, Bengas, cte de Calabar) lui oirir du sang d'animaux
pour qu'il puisse renatre (Delta). Le cadavre est d'ailleurs
un objet magique de la plus grande puissance. Le mort est
souvent un esprit tutlaire de la maison et est enterr sous
la porte (p. 494, Cf. 476). De l des cultes ancestrauxnaissants.
et la nourriture offerte pendant. quelque temps aux aieux
dcdes.
La vie qui anime le rcit de M" K., fait que cette numra-
tion parattra sche auprs de la lecture des chapitres courts
mais denses que l'auteur y consacre. Mais elle parattra aussi
plus systmatique. L'esprit de M" K., merveilleusement dou
pour l'observationconcrte, a un peu brouitt les d! vers ordres
de faits que l'analyse nous a forc de sparer.

J. WELLHAUSEN. Reste des AMtMsohen Holdea.


tmms. f t~tt~ea <<tt pa~aKtitmefM.if'a&t'f.) 3' Ausg. Uert. Georg.
Reimer, ~?7, in-8", 3M p.
Le livre do M. W. est de ceux dont on reparle la seconde
dition. Non seulement rien n'y a vieilli, mais encore on
en voit mieux la porte, la grande place qu'il tient dans
la science. Point de dpart de ia < Y<e~<oM o/' s<'n!!<M de
R. Smith, premier essai de cette fconde tude des religions
smitiquescompares, indication d'un des plus beaux champs
de travail pour l'historien des religions, voii ce qu'a t,
depuis dix ans, cette partie de l'muvre de M. W. Car, pour
la religion comme pour la langue, l'unit de la civilisation
smitique est vidente. La mthode logique, qui recherche
par comparaisonles causes est infiniment facilite par l'iden-
tit fondamentaledes dialectes. L'tude du pagauisme arabe
est lumineuse pour le monothisme arabe, en mme temps
qu'elle est dcisive pour les antcdents du monothisme
hbreu, puisque, au rapprochement, les mmes connexions
apparaissent. Avant M. W., Renan avait senti te problme,
mais la fantaisie et la gnralisation rapide ne l'avaient con-
duit qu' de vagues dveloppements sur le monothisme eth-
nique du smite nomade, et personne ne s'y tait rattach.
La composition serre, le dveloppement fait surtout de
textes rigoureusementtraduits, relis par un minimum d in-
terprtation, donnent l'ouvrage de M. W. une incompa-
rable densit. Cette mthode strictement historique est d'ail-
leurs ce qui fait la valeur du livre en face de celui de
R. Smith. On dirait que M. W-, en rditant ainsi ce volume
sans l'augmenter sensiblement et sans presque rien changer
aux conclusions, en se contentant de t'amtiorer partielle-
ment, a voulu montrer et sur quel fond soiide.s'appuieat les
thories de Smith et le point o commencent les inductions
et les hypothses. En tout cas nous avons ici, pour le paga-
nisme smitique en gnrai, arabe en particulier, un rper-
toire, mis jour, des faits et une systmatisation d'autant
plus durable qu'elle a t faite avec la meilleure connais-
sance des textes et avec un vif sentiment de ce qu'est la
fonction sociale de la religion (p. H4, p. 94, cf. p. 214).
L'existence antislamique d'un polythisme arabe no peut
tre nie. Lu frquence des noms tbophores duns les pomes
antrieurs l'hgire, dans les inscriptions, dans les textes
grecs, les analogies nombreuses du smitisnM. les renseigne-
ments que nous donnent les historiens de h) vie de Mahomet
et les gographes, les fragments du livre arabe sur te renver-
sement des idoles, fournissent des preuves plus que suffi-
santes (p. 1-64). Multiplicit des noms des dieux, des lieux
sacres, des cultes, rien n'y manque. Une remarque s'impose
si le caractre naturaliste des grands dieux, si l'adoration du
soleil et de la lune, de l'toile du matin ne sont pas douteux
(p. )43). ceta n'empche nuttentent qu'il y ait eu lit plustroite
alliance entre le dieu et te c!an qui porte sou nom et qui est
possesseur de son culte (p. ~tS~. En somme, suivaut M. W.,
les dieux du polythisme arabe et aussi smitique ont t
tribaux mais leur caractre totmique est difficile tablir.
Kn tout cas, tes textes ne nous mettent certainement pas,
comme le croyait Smith, en prsence d'un tat o les dieux
n'auraient t que des esprits (~x) suprieurs. lis sont de
na tu recleste.sinon purementspirituels. C'est une rgression,
que le monothisme a fait subir aux dieux, qui les transforma
en diables (p. ')!!?) il ne peut tre dmontre que les dieux en
aient t drivs. LosytKM~ sont des esprits terrestres ou sou*
terrains.deseaux, des serpents,de la matadie; ils sont encore
aujourd'hui l'objet, ou l'instrument des sorts, des charmes,
des exorcismes; ils ont toujours des noms. Mais, dj au
moment o lesArabes arrivent l'histoire, ils faisaient partie
du < paganisme infrieur
La mythologie ne nous fait donc assister qu' un stade
avanc du potythismo arabe puisque les trs anciennes
croyances n'existent plus qu' l'tat de survivances.Le culte,
au contraire, est profondment primitif tes lieux sacrs, le
rituel sont le plus simples possible. Ce dernier ne consiste
gure qu'en circumambulatious,en jets de pierre quand on
passe prs d'une place sainte le rle de la prire est secon-
daire. La naturedu sacrifice montrequ'il confineaux origines
vertu attribue au repas eu commun, petit nombre de sacrifices
non sanglants, rle du sang qui doit tre rpandu, non pas
parce qu'il est une offrande au dieu, ce qui ne serait qu'un
phnomne driv, mais ptrce qu'il lui est consacr et qu'il
opre la communion entre le sacrifiant et la divinit, tous ces
faits tmoignent qu'on est en prsence de rites sacrificiels
lmentaires. L'individu commena par laisser couler son
sang sur la pierre du dieu puis il y substitua le sang de la
bte que l'on mangeait ensuite, devant et avec la divinit.
L'ide du sacrifice offrande est bien postrieure.
Le sacerdoce a une organisation rudimentaire l'interven-
tion du prtre n'est nullement obligatoire. Un certain nombre
de cultes sont mme de vritables proprits prives, telle
famille a, son service, un esprit puissant, et vend ses bons
offices, tout comme dans l'histoire de Mikah que conserve la
Hibte. L'troite relation entre le prtre, le devin, le sorcier
est vidente comme dans tout l'ancien smitisme.
Enfin, un troisime ordre de faits vient nous dvoiler les
assises mmes des religions smitiques. Ce que les Arabes
appellent lit Fitra (religion naturellej est pass directement
dans te Coran, tout comme le mmo ensemble est fondamen-
tal dans la lgislation mosaque ce sont ces prescriptions
qui concernent le <yo<t hbreu, le t'A~M arabe, en un mot
toutes les interdictions rituelles. Ce sont les rgles de la con-
scration du premier n, des premiers fruits, d'une partie
du troupeau, des biens du dieu (M. \V. voit ici, p. 113, l'une
des origines de la proprit individuelle dans le monde smi-
tique), c'est la donation du cheveu au Dieu, l'alliance qui doit
tre scelle avec lui par la circoncision ce sont les multiples
prohibitions auxquelles doit se soumettre quiconque a fait
vu de sacrifier.comme celles auxquellessera soumist'homme
pieux dans le monothisme postrieur enfin, ce sont les
prescriptions qui dterminent la puret et l'impuret, et dont
la dernire paratt spcialement applicable aux femmes,
leurs poques, leur pubert, tours couches. Ces phno-
mnes religieux sont certainement les plus primitifs qu'on
puisse trouver.
C'est sur ce fond que se prpara et naquit, spontanment,
sous l'Influence de causes sociales diverses, le monothisme
mahomtan. A la Mecque, devenue un centre commercial de
premier ordre, un vritable Panthon seconstitua,o les dieux
se transportrent, voisinrent et se confondirent un peu. Le
polythismeperdit de ses artes vives. Les cultes de la Mecque
sont bien, en fait, les anciens cultes paens. La A'a'~a tait
originairement la pierre dont Atlah tait l'esprit le temple
se btit autour d'elle et se peupla d'autres dieux. Le /~<~ tait
un sacrifice du mme genre que les autres; le mois sacr, de
~a~t (Ramadan), correspondait la Pques hbraque. Seu-
lement tes pterinagesettesarrivesdecaravanes concidaient,
les {tes taient en mme temps des marchs (comme cela se
passe encore dans nos campagnes). Ces cultes perdirent ainsi
de leur caractre local mesure que l'on venait de plus loin
pour y participer. Le monothisme, d'ailleurs, ne fut pas
oblig, pour se constituer, de les exclure violemment; ii n'eut
aucune peine pactiser avec eux, les laisser subsister. Leur
peu de prcision, de signification sociale (puisqu'ils taient
trs primitifs), facilitaient singulirement leur appropriation
d'autres besoins religieux et moraux. D'un autre cte, au
mme moment, la religion, par opposition au culte, prit une
importance sociale considrable et immdiate. On ta voit alors
rgler les rapports politiques dos tribus par les rites d'alliance,
fournir des sanctions aux contrats, sanctifier les mariages et
la mort, entourer la vie de tout ce qui la fait pure et bonne. De
ta vint avec son caractre moral le monothisme mahomtan
ou hbreu, car l'agent religieux par excellence tait la divi-
nit (AHah), comme chez les Hbreux tes dieux (Etohim~.
Allah tait le tmoin invisible de toutes les conventions, de
toutes les actions des hommes, chtiait le tratre son hte
et l'impur. La vertu cratrice du mot agit ici, son tour. Les
noms propres des dieux ne pouvaient, pour la plupart, tre
dits sans danger. On invoquait donc le dieu en gnrt
L'usage et le rituel figrent l'expression, on l'expliqua par
une personne divine, Atiah, l'unique et le vrai dieu. La rvo'
tution mahomtane, souvent tente avant Mahomet tui-mme,
dpendit d'iuttuences chrtiennes et juives (p. 234) et ne fit
qu'accentuer la sparation entre le monothisme et ses ant-
cdents.

NOTICES

Les tudes les pius diverses se trouvent dans

ADou* BASTtAX. Zum Festgruss zn seinem 70 jehrigen


Qeburtstag.Bo-Hn. 1896.
A..H. KEAXE. Ethnology. Cambridge.University Press (Geogr.
Series), 2 vol. in-S", i890.
Utiles renseignements ncessairement sommaires.
MONOCKAt'MtES DE TtUBL'S
/t.MAL.\)!t)K
ic

r')t~\i: KttOXHCKHH. Von Javas Fouerbergen. tu-8", 30 )'.


OtdeMburg-Leip:!ig,Schut)!e,i89'?.
Kenscignemcnts sur les Tenggereses.

M. C. SCHADHE. B~drage tt de Kennis van de Ethnographie


der Westerafdeeling van Bormeo (in /<t<eM~<)'oMa< /t<'c/t<'<' /<'
t\
~Atto~tt'f. Leiden, Hfit!). thOO. Il, 6~ suiv.; i). if8 et suit.
VETH (J.). Java. 2" Mit. Uaarten), Uohr (<89-)).
Tt'ii complet et trt's utile.

W. KUKE~THAt.. Foreohungsreise im den Molukken und In


Borneo. t't'ankf. a. M., i896, i)t-4' 3St p. (Kayans de Hornt'o!. l,
CHU~WEnEL. Notiten aus den Reieem von Hrolfs Vaughan
Stevema in Malaka (iu /~At)ob.Mfc/(M y~~A~~. hcrgg. v. d.
t)ircMiun d. Kgl. Museums fr Votkskundc. t, 3 (t898~. Haack,
Bet'Hn.
Faits remarquables de culte totmique du tigt'c (p. 1-12).

L.-Ttt. MEYEH. Ein Blik in hot javaaMohe VoUeleTea.


(2~deet).Lciden,Brin.t89)!.

Cu'. COOL. (Tranal. by . Taytor). Bali, Lombok and the


Saaaaka. 1890, it)-8", Lcnd.
H. UKC ROTH. The Natives of Sarawak and British North
Borneo, i896,Z v. it)-8",Trus)ove and Manson.
Extrmement important et dont nous regrettons de n'avoir pu
faire une tude suffisante. M. A. Lang a crit une prface & ce livre.

n. TtUBUS KO!) OVtUStStS Me !tKt)<! KT CE t.'txoO-CM)X)t

< SCOTT ROBERTSO?!. The B.nrs of the BinduKush. Lond.


!~wrence and Bullen. tn-t", xx-658 p. (ittuittrat. et cartes).
Dans ce livre sont sems des renseiftnements sur les rites d'ai-
iiance et d'adoption (p. 3<, S03, St3,3)8), sur t'organimtion du etan,
les vendettas, la tribu, la famille, la proprit, les murs et le droit
(derniers chapitres). M. Scott nous dcrit, comme y ayant assist,
nu certain nombre do ceretnonies, consistant surtout en danses
~i6, 220. 3'!5).Mn outre, deux c)Mp)tt'ft importants donnent lu
premierexpose que t'en ait Ut- ta religion et du lu mythologie (XXtit,
XXtV). L'organisatioH du sacerdoce et des castes aristocratiquesfait
l'objet d'un autre chapitre. Les informations sont de premire
valeur, M. S. tant le premier Huropen qui ait sjour))'! pu ces
relions, et les tenant du j~rand prtre tui-metne auquel ii s'tait attie;
elles seront vite prcieuses, parce que dans ces contres t'tstam fait
les j'tus rapides progrs.

Maj. W. UHOADFOOT.
Kaartstams and th Kaara (in M't<t'oo<<<
.t/ytt'Mf, tM~.nMt's).

t.HKTKLu~ M. CUUDHX. NgA and other Frontier TribM of


North East India (/oxt'M<t< o/' <A<' ~X/tropoh~t'faf Mo(e o/'
/.oM</o<t), XXVt, n" t<tt)-2Ut.
HMeiiente conpitatioH desdoeuments existant sur ces poputatioas.

Co). R.-C. WOUUTHOtU'r:. Some Aooount of the Shama and


HUl Tribes of the States on the Mkong (~''M. o/' </)<' ~M<A)'.
/n.!<. o/ow/fMt), XXV), n" ), p. M suiv.
tmportantsn'nseignetnextssurt'orgunisation sociale et les cutter;
particuiierement intressantes sont les croyance!! concernant lu
nature de t'Ame.
t.. OPi'KHT. Ueber die Toda in den Nilagiri oder den
Blauen Bergen 'iM Zeitschr. f. Ethn., p. N13 suiv., tMtt).
Quelques renscij~netnents sur cette population dont le totmisme
estbien connu.

C. Af)t)Ot;E

S.-H.-H. JOHKSTOX. Brist.sh Central Afrioa. Methuen a<td <,


t897,in.8".
Honnc d'uliles renseignonents (teneraux.

K. WUi.E. Zum Fetisohwesen der Ewe (~<. A'o'Ma,


t8M, t. p. 29-38.)
D'aprs les renseignements de M. Baumann.

H.-M. COXXOLLY. Sooial life in Fanti Land (~KM. o/' the ~M<A)-.
/M~. o/ow/.j, XXVt. ? 2, i29.t83.
p.
KUDOH-' PHtETZH. Beitrege zur Erforsohnng von Spraohe
MndVo!ksgeistin der Togo-kolonie (<?<'t~ /)/)'<taHMcAtun~
OtMtNMcAe ~M'/M). Mertin, 3" anne, in-K", p. 6t.
~.Uc~AXtK
STE!~)!Af:H. Einige Schadet von der nsel Nauru (~f~t<
/<t~t)</).(~<c/t.A'</tM~<8M.Y).)).SM~uiv.)

J.-t)..t:. SCHMKLTX. BeMrge zut Ethnographie Yon Neu-


Guinea. (/"<- -t''< ~</tM., <Si)6, H), p. U3-t2:i.:

/t'. Ast)! Stit'TKXTKtOXAt.K

A. SKRXY~t:m.Jakutenbrattcho iAm.-t'rqm't), Xeue Fo~ tY.


t"'<'t2")h't'fHMus).

)t. !))! WtXnTS. Reison an der Beringatratse.Tsohuktsohis


titt C<~<M, Ht'unsMck. Vx'wpj;. ).XX), t9-Ui mui f897, SM suiv.
p.

?{..Y. STE~t~. -Die Fermier fi)' S et tBjuitt <89'! (p. 349 et 3?t ).
SEttOCMEVSK! (V. T.). (Kn rus-ie.) Yakoutee.SMiht-t'<'tc)"ib.,t8!'6,
n~O. tmpt'imerif'des Apanugt's, {if. in-S".

<:HUBE. Daa SchamaBenthum bei den GoMen <Q~&<M, LXXt


AXO))!XS t'KH'H! tXt'O-EfttOt'~KXS
E. S!ECKE. Die UrreUgionder Oennanem. t896, io-S". Bo')itt.
Mayer und MuUcr.

FM. STA)X. Die VoUteMtmme der Germanen nach roe-


miacher Daratellung, 1896, SchwcinfttrU).Stocr.
UFALVY. Les Aryens au nord et au sud de nmdou-KoNoh.
!n-8, Paris, Masson, <896.

SU)t\')VA!<MS DES HKUUtOXS FK!))mYt!S C))t!X UM CtYttJSb.

J. EUTtKH. Tagbuoh einer Beise in Inner Arabien. Drill,


L<!iden,<890,in-tt'vnt-SMp.
Quelquesrenseignements sur lu vie retigieusoactueHe,les supers-
titions courante: et paennes chez les Bdouins en Arabie coutumes
de mariage ou funraires; ce sont de ccsinfbrntationsquc tout voya-
geur rapporte d'un pays o il ne rside pas, mais qui ont la valeur
que donne aux travaux de M. E. sa haute autorit de smitisant.
MAHX. Ka~kasiache Beisenumd Stadien. (A'fMc ~<~<. j:),t.
~MM~tM~M~K~MC/tfM ~,M</jt).Duncker uud Humbtot. t.eiuzit!
<896.)))-)Y.29)ti).
H dans ee votunte une description de curieuses coutumes de
y M
ttuu-iagc d<'s T:tHtt'< df lu Kabftrda une importante tude,
ncuw o)
bien des puints, sur les urbn't) et buis sacrs chez les peuples du
Caucase. (H) sur les grands sacrifices agraires des Oss~cs de
Digor (Ht), d'utiles renseignetnents sur les peuplades du t)aghe!!t<u)
et les sectes r<!eent<'s.

Bt!)txu utu 8TE\. Zwieohen Kaspi und Pontue. KauJtMitche


SMzzen. Hre~au, SchotttSnder, t89t, x\'t.2M p.
Un certain nombre de renseignements,
sur h famille, le mariage,
tes rites de ta naiiotance. Une srie de lgendes de saints
et un nou-
veau contn du cycte d'Atexandre intresseront vivement les foik-
loristes.

L. STjDA. Referate aus der Rutstsohem L1teratur. Abhand.


lungen denKaukasus betreffemd(inAn;/<~ /'t:t- ~tt~ro~o~m'e
1897, XXtV, Brunsw. Yiewcg).

Bibliographie excellente des ouvrages russes sur le Caucas'

!H. t:t').TE hOMKSTtQUE


Par M. MANM.

ATTtUO DE MAUCH!. -n culte Privato dl Roma Antioa.


I. La ReH~lone nella vita domestioa. Iscrizioni e
oCerte votive, (Le CM<te pncd de la /!oMM M~oxe.) Hoepli,
Milan, ~896, in.4", xvt-30'? p.

Depuis !e livre de Fustet, en dehors des grands manuels


allemands, rien de systmatique n'avait t fait
sur la ques.
tion traite dans cet ouvrage. La mthode
en est tout fait
!ouaMe. La bibliographie de fauteur est peut-tre incomplte
nous serons les derniers l'en Marner. Mais son livre repose
sur une profonde connaissance des textes littraires impor-
tants, et sur un dpouillement consciencieux des documents
pigraphiques. M. de M. n'est donc pas embarrasse
tradition scientifique trop lourde, et, d'un autre ct.
par une
comme
son livre est surtout une classification des documents, c'est, en
grande partie, l'esprit mme des faits qui prside leur dis-
position. M. de M. cite en entier les textes dont ii se sert. C'est
une habitude que t'ou voudrait voir se rpandre et qui seule
permet le contrle incessant du lecteur.
L'auteur diimite son sujet en suivant l'opposition que font
les juristes (Cicron et Digeste) entre les M~'a ?<'<' et les
M~'s pf<f~<. Appartient au culte public tout acte religieux
accompli pour io bien de t't~tat, aux frais de l'tat fout partie
du culte priv tous les actes faits par les individus ou par
ies associations pour eux-mmes, quelque tendus que soient
les intrts privs en jeu. Il suit do l que les actes individuels
envers les grands Dieux, objets de cuites publics, seraient des
actes privs, et que ies actes de t'tat surveiiiant l'excution des
obligations religieuses des particuliers ressortiraient au culte
priv (p. p. M). Nous reviendrons plus loin sur ces dnni-
tions contestables. Dans ce premier volume M. de M. n'tu-
die que les cultes domestiqueset individuels. Le second sera
consacraux cultes desjj~M, des collges, des corporations,
et de toute association sanscaractere politique. Cette division
presque extrieure en recouvre une, plus profonde. Dans le
culte public l'individu n'a que peu de part tout se passe entre
les prtres, hors de lui (p. 15). Le culte priv, le culte domes..
tique en particulier, permet, au contraire, desaisirce que fut,
dans t'ame individuelle, la pit, la religion romaine, la faon
dont elle s'attachait tous les moments de la vie. Cette dvotion
primitive ne fut pas sans jouer un rle historique trs impor-
tant elle a concouru prparer les esprits l'influence des
religionsorientales. En etiet, elle rpondait dj, mieux que lit
religion officielle, ces besoins mystiques dont toute pratique
doit s'alimenter et qui firent les succs des grands cultes
orientaux.
La religion dans la vie domestique peut s'tudier suivant
l'expression de M. de M-, un triple point de vue 1 les
dieux domestiques, 2" le matriet et les formes du culte,
3" les actes religieux dans la constitution et la vie de la
famille.
Les dieux domestiques sont d'abord et surtout les lares. La
dissertation que M. de M. leur consacre, est des plus intres-
santes et des meilleures. A l'origine (et la religion trusque
fournirait des quivalents), le tt- existait probablementseul
fp. 48) il tait l'esprit possesseur de la maison, il l'habitait, il
tait son me. Puis en vertu d'une confusion avec les pnates,
qui. eux, turent probablement toujours multiples, et aussi
parce que le culte du/:a'<-tait troitementti au culte du
foyer et des mnes, tares, pnates et mnes se confondirent
les uns avec les autres en mmo temps que fusionnaient les
rites destines aux diHt'eutes divinits de la famille, Les
pnates furent en principe, les esprits du pfHtM, du fond de
) maison o l'on conserve le grain auquel ils conservaient
sa
force et sa bont. Ils devinrent les protecteurs domestiques
en gnral, et les grands dieux eux-mmes purent tre appo.
ls Pnates; mais jusqu'au bout les p~M/M ~' furent
proprement les gardiens du patrimoine et des membres de la
famille (p.?'. frtait la flamme. la vie de lit maison.
le feu qui brute sur t'autet domestique; celui-ci tait le
centre de lu famille. le symbole de sa perptuit. Enfin,
lgrement part, le gnie domestique. Les ~t't taient ces
esprits qui accompagnent chaque individu ds avant sa
naissance; chacun rendait hommage au sien, mais toute la
famille adorait le ~PKOM </OM))M(p. 74) confondu avec te ~tt'tH
~'~tMx'/KM. image de la puissance gnratrice de lit famille
ette-meme. Le gnie est souvent reprsent, Pompi
en
particulier, sous la forme d'un serpent, esprit infernal de la
fcondation.
La place que les divinits occupaient dans la maison
correspondait aux croyances dont elles furent l'objet. Quand
celles-ci varirent, te sanctuaire changea de forme et de lieu
les images furent d'abord auprs des portes, dans le vesti-
bule, puis au centre de t'a/nxMt (o tait souvent plant
un
arbre), ou bien au mitieu de t'tMx~t plbienne, pauvre agglo-
mration qui ne possdait qu'un autel pour une masse de fa-
milles. Enfin les dieux domestiques furent relgus dans
un
coin, une nicbefp. 89) ;soust'innuencedescultes mithriaques
et de la superstitionconcernant les rites souterrains, les <am.
n'a furent transports la cave. D'ailleurs, fait
remarquer
M. de M., il y a une vritable dinicutt distinguer, les
pour
poques sur lesquelles nous possdons des monuments figurs.
cequ'il ya, danses reprsentations,d'artistique et de littraire
d'une part, de religieux et de populaire de l'autre
Les
instruments du culte taient le foyer, la table, la salire, la
patre libations, les vases parfums. C'tait d'ordinaire
le pre de famille qui o(t!ciait. et lui seul en avait le droit
lors des grandes ftes domestiques mais il dlguait
ses
pouvoirs sa femme pour les petites offrandes journalires
aux mnes sur le foyer (p. 109). La famille tout entire,
esclaves compris, assistait aux crmonies. L'accs de l'autel
tait libre chucuu chacun cabrait pour soi son </'<
M<<t<M, et les esclaves eux-mmes taient admis & tous les
actes gnraux d'adoration.
Tel tait te matriel et les agents du culte, les formes en
taient ncessairement correspondantes. En premier lieu la
prsence constante des dieux domestiques ncessitait certains
rites frquemment rpts ainsi on devait, au retour d'une
assez longue absence, avant tout. saluer les pnates (p. 32S).
En second lieu, un des instruments du cuite, essentiel, dter-
minait la forme d'un bon nombre de rites: c'tait la table.
Le repas lui-mme, pris devant les dieux domestiques, et o
les morts de !a famille avaient aussi leur part, tait chose
minemmentsacre (p. 1)5, Mt'ra MCMM'j puis le repas servi
aux dieux lors d'un <ff<M<fn)()M, te festin oilert au mor
lors des funrailles taient des actes religieux de la plus
haute importance. Pour le reste, les offrandes taient surtout
des couronnes de fleurs dont on dcorait la statue du dieu,
du gnie des grains et du vin taient rpandus sur le foyer,
pour Vesta et les mnes (p. 2~0;. Mais les sacrifices sanglants
taient rares, ils consistaient surtout en porcs, dont quelques
morceaux seulement taient consacrs aux dieux.
Dans lu troisime subdivision, M. de M. semble confondre
deux genres de faits dont lu sparation eut ajout son livre
quelque intrt. Et) ellet, un certain nombre d'actes religieux
de la vie de famille correspondent dos pratiques religieuses
pures, ont des buts, des fonctions, des poques dtermins
ce sont ce que nous pourrons appeler les ftes les autres ne
sont que t'euregistremeut religieux de certains vnements,
tts sont ncessits par eux mariage, naissance, mort, anni-
versaires et nous pourrions les appeler des sacrements.
M. de M. suit plutt la vie du Romain qu'il ne rpartit les
institutions. Qu'il nous soit donc permis de nous carter, sur
ce point, du plan suivi par notre autour.
Les ftes sont caractrises par le repos religieux de toute
la famille, y compris les esclaves en vertu de la dfinition de
la /<HM<<! romaine (p. 145, cf. p. HO). Ce sont des jours
consacrs l'accomplissement d'actes religieux priodiques.
Elles sont ou familiales, ou agraires, ou ottes clbrent sim-
plement le retour do certaines dates. Les ftes de la
famille sont au nombre de trois la caristia, offerte aux <<
j~tWM, est proprement une fte o se runissent,
en agapes
fraternelles, les agnats; les MM~-o<M<M sont des ttes des
matrones et de la maternit. cabresen l'honneur de Lucine
enfin viennent les M<)u-tM~t dont aucune explication suni-i
sante n'a t donne, et on, aprs te sacri(!ce d'un
banquet oflert par le pre de famille runissait, porc, des uu
comme
gaux, les esclaves et les hommes libres. D'autres crmo-
niesavaient, de leur ct, pour but d'associer )a vie do famille
ataviedes champs (p. 128 suiv.). M. de M. fait
en une tude trs
soigne, et partant de l'ide gnralement admise du caractre
agricole de la vie des anciens Romains, il nous montre, soit
dans les rites agraires eux-mmes (vendange,conscration du
btait), soit dans les rites qui en ont perdu l'aspect, des survi-
vances de rites agraires. Le troisime genre de ftes tait
consacr marquer certains moments de l'anne, ides
calendes, le neuve! an, les anniversaires du pre de famille, ou
mme ceux d'un ami, ou ceux du prince.
Outre ces ftes, des chmages nombreux, de multiples
obligations au culte domestique, enserraient le Romain d'un
bout l'autre de sa vie. Des !a naissance, des rites
breux assuraient son entre heureuse dans le monde, nom-
milieu d'un cortge d'esprits adonnes spcialement au
cette
fonction. L'enfant tait pr~nt l'autel, ri Hercule guris-
seur, aux dieux domestiques on le mettait, par de curieux
rites, a l'abri du Sylvain et sous la protection des divini-
ts de la culture fp. 117). Cette fte de naissance tait
renouvele chaque anne, et pendant toute la jeunesse,
on
suspendait dans les temples les vtementsdes enfants. Puis
t'phbe revtait, au champ de Mars, la robe prtexte,
et
dposait devant les dieux les insignes de jeunesse; la
sa pre-
mire barbe tait aussi consacre et souvent soigneusement
conserve(p. 179). L'anne du Romain s'encombrait alors
d'une srie d'anniversaires, de commmorations publiques
et
prives naissance et mort des anctres les plus proches,
services pour les mnes des morts qui n'ont
pas d'hri-
tiers, etc. Le christianisme hrita d'ailleursde
ces pratiques.-
Le mariage, peu prs obligatoire
au dbut, eut, au moins
dans les familles patriciennes, un caractre strictement
religieux et sacramentel le mariage par co/arrfa<M fut
probablement le type primitif. !t ne pouvait tre clbr
dant certainsjours et certains mois. La clbration exigeait pen.
en
un sacrifice divinatoire que l'usage remplaa par la consutta-
tion des auspices, et qui semble avoir aussi servi de conscra-
tion religieuse au mariage par foewptm. Lc/hm<w<<<<M assis-
tait a la crmonie. et il n'y avait probablement pas d'autre
sacrince que le premier. Le rituel de ce mariage est bien
connu, et nous n'avons pas l'exposer de nouveau: l
comme ailleurs la revue des textes que fait M. de M. est fort
complte. Il faut remarquer ce que l'auteur dit propos de
la<<'a//o )o mariage par co~n'fa/<o tait a peu prs
indissoluble. Pour le rompre, il faHait des crmonies
terribles d'une solennit extrme. Nous sommes malheu-
reusement peu renseignes sur lit nature de ces rites, qui cou-
sistaient probablement, soit dans la rupture symbolique du
lien cr, soit dans des actes inverses de la coM/ar/-<'<to.
M. de M. se borne a interprter les textes et l'inscription qui
ont trait & cette institution. Les rites funraires sont,
comme ceux du mariage, de ces pratiques religieusesqui ont
une efncacit par elles-mmes, sans qu'il soit besoin de t'inter-
vention d'un dieu, ft-it domestique. La coutume gnrale-
ment suivie tait l'enterrement, avec ses phases bien connues.
Au retour, avaient lieu des lustrations pour purifier la
famille; un repas funraire Mt'fcf'KtMm), renouvel le troi-
sime jour, puis le neuvime (fu-na not-fm~o/M), faisait dispa-
ratre la souillure qui pesait sur la famille (/~(M /Mm<<<fp
/MHM<f<!). Le lieu de spulture tait
un < <oc<M sac~' c< rWt.
~MM< consacr d'ailleurs aux mnes par le sacrifice d'un
porc. Il fattait rendre t'aneetro de lgitimes honneurs.
D'abord ce culte amliorait la condition du mort (p. t8~
dans son tombeau comme dans les Enfers. Puis leur ngli-
gence eut entran pour ta famille et pour la cit les plus
graves dangers. Aussides sacrificesexpiatoiressvres taient-
ils imposs quiconque contrevenait ces devoirs. Un court
dveloppement que M. de M. consacre aux croyances
concer-
nant l'autre monde, parattra tous un peu sommaire et
superficiel une tude archologique de la forme des tom-
beaux, des inscriptions et monuments figurs qui s'y trou-
vaient manque cette partie du livre, et l'on aurait souhait
voir traite ici la question des rapports, Rome, de l'ense-
vetissement et de la crmation.
La seconde partie du prsent volume consiste dans
une
tude des inscriptions et offrandes votives, autrement dit, des
actes de pit individuels l'gard des dieux, quels qu'ils
soient, domestiquesou publics ces inscriptions relatent
sur-
tout des couseerations d'autels, des dons a un temple. Par
un excellent depouitiement et une intelligente ciassification
des documents du Co~tM ~w~oKtOM /~'MrMt, M. de M.
recherche 1 ce qu'tait le donateur celui-ci pouvait tre
un
homme, une femme, un esclave mme queite tait lit
divinit invoque d'ordinaire il y eu avait plusieurs, lit for-
mule tait assez vague et s'adressait tous les dieux qui
avaient mme fonction, locale ou sociale ip. j60; 3" quels
sen-
timent expriment les ddicaces c'tait gnralement cette
ide qu'il y avait une sorte de contrat (pcM<w,- dont t'aceutn-
plissement du vmu tait l'excution. M. de M. tudie
encore.
a ce propos, la faon dont l'individu rernerciuit le dieu
eu
change du service rendu, ou exposait ses dsirs dans la
prire votive fp. ?"). Toute cette partie de l'ouvrage est trs
neuve et sera trs utile.
M. de M. s'est pos au commencement de
son livre (p.
et la question de i'autriorit du cutte domestique
sur le
culte pubiic et, aprs Fustei, il t'a rsolue dans le
sens
de la priorit du premier. Comme le savant franais.
XI. de AI. voit dans le culte fondamental de t'tat romain, le
culte de Vesta, la transposition du culte domestique ia
grande famille qui est la cit. C'est la seule question d'ordre
rellement gnral iaqueiie ~f. de M. se suit attache. Nous
nousdemandoussi elle n'est pas insoluble, et peut-etreoiseuse.
Certes le culte de la Vesta romaine et celui. de la resta des
foyers patriciens ont prubabiemeut t identiques. Mais, au
fond, quelle raison autorise dire que l'uu vient de l'autre ?
Le culte de la Vesta domestique est celui de l'esprit de la
maison, comme le culte de Vesta est celui de l'esprit de la
cite. L'ne tude compare des faits de ce genre ne permet
pas
de poser une antriorit quelconque et l'histoire ne permet
pas de remonter si haut. Toute agglomration, toute habitation
semble avoir t sous la protection d'un esprit qui la symbo.
lise et la protge les cultes de la famille et ceux de la cit
coexistcut et se ressemblelit comme ont coexist les rites de
la fondation des villes et ceux de la constructiondes maisons.
D'autre part, une objection peut tre faite la dfinition
admise on ne peut appeler rellement cultes prives
que ceux
de la famille, des individus, des associations, qui s'adressent
aux dieux de ces diferents agents religieux. Les actes indivi-
duels l'gard des dieux de t'tat ressortissent au culte
public, puisqu'ils s'adressent aux grands dieux, protecteurs
ln fois de la vit!eet do chaque citoyen. I)e ce que l'volution
religieuse a permis l'individu d'avoir sa part au culte et
des mouvementspersonnelsde piet, il ne s'ensuit nuttement
que le culte n'ait pas gard son caractre pubiic. Ce fut pr-
cisment, M. de M. le montre bien plusieurs reprises, ce
dveloppement de l'individu dans les cultes puhtics et domes-
tiques qui favorisa ia prompte expansion du christianisme.
Les connaissancesde grammaire et mythologie compare
de M. de M. sont peu sures. Je ne crois pas qu'il existe de
mot sanscrit Alika == mre (p. HO, n.), et l'tymologie Yesta de
<M. briiter. est ordinairement rejete; on la rattache plutt A
la forme cas, rester, sanscrit <'~, demeure.

XUTICKS
M. HAXTHLS. Mittheiluagen aus demFrauenlebomderOrang-
BAlondas', der Orang-Djakuna. der Orang-L&ut. )<'uf't''s
))t-o)fVtUt(!h!u) Stcvens, in~<!c/< /:7/<M., tSuc.IV, t62-202.
A n'marquct' les intcnHctions <'nn';f'n)ant icx r<'m)n)'s, k'tu's
f~-t'indt's, i'uccouctK'moX,et tout pMtticuiif'rententtes t-it'-s d'' put-i-
))cation(n"t':2~uh'.).
H.-H. MATftHWS. The Burbung of the Wiradthuri Tribes.
J. A. t. t897, X\'t, u'' 3. ()). 2':2 suiv. MUMt-tjUubtes K~n''tnoni''s
d'iHittatio)).

t)..V. ).) SCXA)'. BeMrag zur Kenntniss der TattowierungiM


Samoa (~c/<. y. /</<., )8M), \)-SS)).
i.

A. SKHXYXCKt. Das KInd in CHaubeund Brattoheder Vlker.


<.tM r~~. x. F. t\. \,u<" i t.[ a.;

J. K. !'tS)\. Ctebrattche beiderGeburt und Behamdluagen


der Neugeborenen bei dea Albanesern. (,t/<f<A. < ~~0.
CM< U'w<,XXY!.t<),p. <4tsuiv.)iTa)!uu~ d<' t'afcoucMe.)

!)' n.-t'. KAMfK. Haus und Hof bel den Huzulen, oin Bei-
trag zOr HausfoMchtmg im Oesterreich. f/AM.. V, p. t~,
<86.;
h'. CUt~'AXCHS ET t'BA'nuL'HS KUSCKKXAXT ).KS MuttTS
t'arM.MAtss.
R. STEIX~tKTZ. Continnittoder Lohn und Strate im
Jenseits der WUden ~'uHN'Ht<~ ox pc<MM et <'t'<'OMtpf)tj!M
(/f~ h r'<<'OM~'<to~<' chez <? ~Kra~M). (~'<~tf. /<'~H-
</<ro/)o~ 189?, p. S77.68.)
Cet article est plus important que tel ou tel gros livre, et
par la preuve et par le rsultat par la preuve, car l'auteur
y rassemble presque tous les renseignementsque nous avons
sur les conceptions que les sauvages se font des peines et
recompenses dans l'autre moude par le rsultat, car il s'agit
de la question de savoir si les sauvages ont ou non cru que la
moralit en ce monde pouvait anccter leur existence au del
du tombeau, ou si cette croyance ne serait pas plutt de cra-
tiou rcente. La discussion est eu cilet ouverte, et c'est dans
une rfutation de la monographie de M. MariUier sur le mme
sujet (A ~of<N'f </<' <'<!Mtc et ~'fWf </c;~<c<' <'; ~M ~<'p~
t!OH c<f <<!<&() que consiste le prseut travail.
M. Marillier a divis les faits eu ciuq groupes t" chez
certainspeuples, il ne trouve aucune ide des peines et rcom-
penses; chez d'autres, les dinereutes conditions de t'ame
aprs ta mort lie sout que ta continuation de la coudition ter-
rostre ou en dpendent ailleurs, elles varient avec le genre
de mort 4" dans d'autres cas, des embches,des ordalies sont
censes attendre i'ame au sortir de la vie et son sort dpend
de la faon dont elle triomphe de ces preuves (de l l'impor-
tance de certains rites funraires o l'on munit le mort pour
le grand voyage;; S" enfin, il arrive que l'influence des ides
morales commence se faire sentir, ou que des emprunts au
christianisme introduisent l'ide de justice dans les notions
de l'autre vie. Tels sont les faits dont M. St. critique avec le
plus grand soin lu nature, la source et la classiticattou. M. St.
en effet avait soutenu ailleurs 'A'</)Ho<o~MF/' .S'<)/<e, )894)
une thorie qui lui semblait rsulter des faits et qui allait
l'encontre des ides de M. Marillier, et, ajoutons-le, contre la
thorie presque classique de la continuation de la vie de
l'me. C'est donc avec une certaine passion qu'il maintient
son opinion, eu attaquant, sur certains points avec suces,
les conclusions de ses adversaires.
Il semble que M. St. ait raison ( ~) de maintenir que les
faits du second groupe no sont pas dnus de caractre moral.
Si, dans l'autre vie, la condition, la fonction sociale ou reli-
gieuse importent et classent les individus en heureux et mal-
heureux, elles correspondent ds cette vie une hirarchie
tnoraie. Car pour le sauvage i'tat de fait correspondexacte-
menta l'tat moral, et le riche est pour lui ncessairement
meilleur que le pauvre (surtout en Mtausie). Pour les faits
du troisime groupe, si les diffrentes conditions de t'ame
correspondentau genre de mort, c'est qu'il y a une sorte de
mrite il mourir plutt d'une faon que d'une autre. En qua-
trime lieu la victoire des preuves du passage qui attendent
les mes au sortir de ce monde dpend non seulement do la
force physique, mais de ta vertu, du courage, de la pit du
mort et des droits que sa conformation aux usages sociaux lui
a acquis envers les hommes et les dieux. Pour ce qui con-
cerne l'emprunt possible, M. St. critique l'opinion de
M. Mariitier, suivant laquelle les Indiens de l'Amrique du
Kord auraient, dans leur conceptiondes champs de citasse des
bienheureux, reu l'influence des missionnaires chrtiens, t)
remarque avec raison que les jsuites auraient introduit en
mme temps qua l'ide d'un Paradis celle d'un Enfer (p. 896)
dont on ne trouve pas trace; il soutient le caractre autoch-
tone des mythes amricains du monde futur. M. St. se rat-
tacite donc l'explication de Waitz, laquelle nous nous
rallions galement. Quant l'ordre de faits que M. Marinier
avait mis en tte de sa classification, M. St. t'affaiblit en rdui-
sant le nombre des observations sres et en montrant qu'elles.
sont faites sur des peuples de culture trs ingale.
Cette discussion minutieuse et cette monographie critique-
d M. Marittier et de M. St. montrent reitement la voie o
l'ethnologie doit s'engager. Mais si dcisifs que semblent
certains gards l'argumentationet les faits de M. St., il reste
tabli que, logiquement, et en quelques cas, l'ide de la sur-
vivance de l'me est indpendante de la notion de justice.
C'est par fusion entre ces deux ides de la conscience sociale
que l'ide actuelle du monde futur s'est produite. Mainte-
nant, M. St. peut dire que dans la majorit des cas nous
trouvons la fusion opre, et que la faon dont l'individu
est moralement jug influe sur la faon dont les survivants
s'imaginent sa vie d'au del. Enfin M. St., dans un para-
graphe remarquable ( 6), montre que cette combinaison tait
possible et mme ncessaire dans certaines circonstances
sociales, et comment la contiuuit physiftue. suppose entre
le monde des morts et celui des vivants, entranait aussi ta
continuit morale. U semble avoir satisfait aux exigences les
plus rigoureuses de la preuve, et on ne peut lui. refuser
d'admettre qu'il y a eu, ds l'origine, troite association des
ides morales et des croyances concernant les morts, mais il
faut maintenir que dans de nombreux cas l'association ne
s'est pas produite.
D'ailleurs quelques considrationssociologiques seraient
introduire dans le dbat. La premire serait, pour parler
comme M. St., cette du rapport des peines surnaturelles
clestes aux peines terrestres du mme genre o, et, pour
employer des termes plus exacts, celle du rapport de l'obser-
vation des interdictions rituelles et de la vie d'outre-tombe
le pch, le sacrilge sont les premiers crimes punisdans l'au-
del, ce sont aussi eux qui affaibtissent t'me assez pour que
l'individu meure ou qu'il disparaisse ou qu'il erre partout au
lieu d'arriver dans le monde des bienheureux. La seconde
serait celle du rapport des sacrifices et du sort de t'me aprs
la mort. Car les actes religieux ne fortifient pas seulement la
sant et la situation sociale de l'individu, ils assurent encore
sa vie ternette, et la doctrine que le salut vient des uvres
pies est un des tmeuts des ides qui prsident au sacrifice
mme.

Dr W. CALAND. Die AItindisohea Toten-und Bes.


ta.ttQngsgebra.&che,mitBenutzungH&ndachritUcher
OueMeadargestent(/.M WfM nt~tMtt'Mp~/xK~'a~'M~Hx
f/Mc aKCtt'MMf). (t'~7<HK</f/<H~t'M der AcMt~. Akad. <:M
H~pMcAap. ~~f~/aM. Afdeet. Letterk. Deet. l, n" 6.)
Amst., J. Mutter, t8M!, in-8", xtv-~t p.
Les rites ttindous sont peut-tre encore plus intressants,
pour le sociologue, par leur dtail que par leur physionomie
gnrale. La faon admirablement vivante dont les textes nous
ont conserv le rituel suivi, en fait les plus prcieux docu-
ments pour quiconque tente d'tudier d'une faon gnrale
ua ordre prcis de faits religieux. Les rites funraires de
l'Inde ancienne (antbouddhique;ont un intrt de ce genre.
Le sens des actes accomplis tait rest tellement clair, la cor-
respondance extraordinaire de la prire l'acte auquel ette
est attache est telle, les formules (maK~'ajt) ont une expres-
sion tellement saisissante que le livre de M. C. sera un
indispensable tmeut d'une explication sociologique des
rites funraires. Ce livre, M. C. l'intitule modestement
expos, et en effet, presque toujours, les textes se suivent
et leur traduction coordonne constitue le dveloppement.
Mais nous savons quel travail ncessitent et une traduction
et une systmatisation de textes encore peu connus, pour la
plupart indits. Le livre de M. C. (ait d'ailleurs partie
d'une srie. L'auteur s'est fait pour ainsi dire une spcialit
de l'tude du culte des morts dans t'tade antique. Son opus-
cule L'c~r die 'o<CMW<'tt~ /w wt~cH </f<- Moy<TmatM.
c/tfM t'C~ (<889) est comme l'introduction d'abord de
son
second livre .t/<<n<<Mc/t<t/)M<'n<'M~(t8M),ensuite du prsent
ouvrage.
Le plan et lit mthode de travaii de M. C. ont un douMe
mrite. La personnalit de fauteur s'enace devant les faits.
Or it se trouve que les rdacteurs des rituels brahmaniques
avaient dj pris conscience d'une distinction qui nous appa-
rat fondamentale entre le culte des anctres et les cultes
funraires. M. C. l'a suivie il a ajout la valeur philolo-
gique de son travail par i'intrt scientifique du principe. En
second lieu (p. H!4), M. C. est rsolument sorti de la voie de
t'tude indfinie du Higveda. Les Hoth, les Wcber s'taient
exclusivement servis de ces indications vagues que donnent
les hymnes. Les progrs de l'Indianisme permettent main-
tenant do travaittcr dans une tout autre direction et de
s'attaquer a ce bloc de textes dont le Rigveda n'est qu'une
partie minime; mthode plus philologique, qui semble, jus-
qu' nouvel ordre, correspondre mieux et il la tradition
hindoue et aux faits. Dans ie livre de M. C., comme dans
celui de M. Ilillebrandt dont nous parlerons plus loin, la
recherche est plus exhaustive qu'etto ne t'a jamais t.
M. C. a une exacte notion de l'importance de son travail
pour c l'ethnographie comme ii dit (n ~). I! connat
l'article de Frazer sur les coutumes funraires {p. 6; et, au
fond, adopte son interprtation gnrale (App. H, p. t7t ). U
ne s'est pas fait faute de donner les quivalents ethnogra-
phiques dont il disposait, et surtout ii s'est rellement attach
a faire connatre ce qui tait encore aujourd'hui en usage aux
Indes. Ces rapprochements ajoutent encore l'intrt du
livre. Les anciens cultes funraires paraissent avoir, en effet,
plus persista que lit plupart des autres pratiques des vieilles
religions hindoues.
Les textes distinguent, dans les rites funraires, quatre
moments et M. C. adopte leur division (p. xu). Pour lu commo-
dit de l'exposition et pour ta logique des choses, distinguons.
eu un de ptus I, rites antrieurs lu crmation 11, rites de
ta crmation III, assemblage des ossements t\
te ;-aK~w
(crmonie d'apaisement) V, l'rection du monument {une.
raire. Un principe domine tous ces rites, c'est la ditrencede
traitement entre l'individu qui, pendant sa vie, a pos les
feux des grands sacrifices (tt~a~ et celui qui ne les a pas
poss (atM/M~f<). Aux Indes, plus que partout ailleurs, est
vidente cette relation entre la vie future et les sacrifices
accomplis ici-bas. Comme le rituel qui concerne t'~'<<h~<est
plus complexe et plus intressant, n'indiquons que celui-l.
I. Si les moyens magiques de rappeler la vie ont chou,
si mme l'achvement des sacrifices qui ont pu tre ngliges
n'a servi de rien, alors il faut avoir soin de rpter certains
hymnes ( 4), de ne pas laisser le mourant expirer dans son
lit ( N) et aussitt aprs lit mort on doit rciter des textes
sacrs, faire des libations. Viennent ensuite le bain et la toi-
lette du mort auquel ou lie les deux pouces ensemble. Le
cortge se met en marche, les feux d'abord, portas dans les
vases du sacrifice, le mort, puis viennent la victime (vache),
les parents en deuil, couverts de poussire. A des intervalles
rguliers, ditterents suivant les coles, dtermines soit par la
distance soit par les lieux, sont pratiques des rites pour
carter t'ame ( 13 et n" tu6).
II. On arrive au terrain fix rituellement pour la crma-
tion, on purifie la place, on la consacre au mort. On et&ve le
bcher, on fait une dernire toilette du cadavre, soit qu'on
t'asperge d'eau, soit qu'on le baigne encore une fois on lui
coupe teseheveux et les ongles, moins que l'on procdeseu-
lement cetteoperationaprest'accomptissementdesritessym-
boliques suivants. tts consistent eu une curieuse crmonie
d'expiation la vache est amene, tous les parents formant
une fite, o les plus jeunes sont tenus par derrire par les plus
vieux, et le plus jeune embrasse les pieds de derrire de la
vache. L-dessus, on fait faire la vache le tour des feux, et,
ou bien on la laisse partir, ou bien on la sacrifie, et on en
dispose les morceaux cuits autour do l'autel. Puis vient ua
rite qui jette un jour tout nouveau sur le lvirat. La veuve se
couche ct du cadavre, et le prtre dit au mort < Dottue-
lui postrit et biens sur la terre. Le frredu mari s'approche,
lit prend par lit main, lui commande de se lever, de revenir au
monde de lit vie Tu es devenue )a femme de l'poux, tui
dit-il ( ~K. 9t;. H est impossible de mieux exprimer la
substitution d'un frre & l'autre. On dispose le cadavre sur le
bcher, ou met de l'or sur ses yeux, on arrange les vases et
les instruments du sacrifice, et t'en habille le mort avec la
peau de la vache (p. S4). On fait, suivant des prescriptions
dtailles, des tibations, des circumambutations autour du
bcher, et aprs diverses crmonies expiatoires on excute
la crmation cit-mme. Les prires expliquent le but des
actes eux-mmes, qui est, non pas de dtruire le mort, mais,
bien plutt de le confier a Agni (le feu) qui le mne dans le
monde des anctres. Mais si la mort est partie, la souillure
reste. Des tustrations doivent tre faites sur-le-eliamp (g 36,
p. 73). Un grand nombre d'interdictions psent sur les gens
en deuil ( 39). Daus le cas o le mort tait un Ka/<<~<t<,
certaines pratiques fout dfaut. Si le mort tait hors de sa
maison, il faut y ramener le cadavre. Si ce derniertait introu-
vable, on lui substitue, pour l'incinration, une ngure~faitede
tiges d'arbustes. Une exception des plus remarquables ce
rituel concerne l'ascte si ou l'incincre, il faut au pralable
faire sortir de lui, par une crmonie symbolique, les grands
feux qu'il est cens avoir absorb pendant sa vie asctique
(!; 46). Ou bien on ne l'incinre pas puisque ses actes lui ont
acquis par eux-mmest'ternit.
itt. - rassemble ainsi les os retrouvsparmi les cendres,
On
on les met dans une urne, pendant qu'on fait des libations et
des invocations 1'tlme pour qu'elle s'loigne.
IV. Le~M~arma, ou apaisement(6t, p. 4i~), consiste
en une srie de pratiques ou l'on purifie le feu qui vient
de dvorer le mort et o on en allume un autre, o on relve
des tabous d'enterrement la veuve et les parents ( 67, voir
les formules). Enfin par diffrents actes symboliques on raf-
feriiiit la famille prouve ( 65).
V. Pour tout autre que t'a/tt/~Kt, l'urne qui contient les
os est simplement dpose au milieu d'un bois; seul celui qui,
par ses sacrifices constamment rpts ou par sa pit extra-
ordinaire, s'est acquis des droits la vie future est honor
d'un monument funraire t~ construction, le site eu sont
dtermins par des instructionsaussi minutieuses que celles
que les textes donnent pour ta construction de t'autet ( 87.
?)) ou toboure te champ, on le sme de grains de ssame
on sort de )'urne les os du mort, on les arrange en le priant
de les colliger lui-mme t03), et on les recouvre alors de
mottes de terre en nombre fix par lu toi. Les devoirs tune.
raires les plus absorbants ont t rendus,
M. C. a ajoute app. Ht, p. )Tt suiv.) diverses explications
pour quelques-uns de ces rites, tt remarque excellemment
leur caractre gnrt, dont les Hindous ont d'llilleurs eu
conscience ta mort est le contraire de la vie. les rites {une.
raires sont donc le contraire des rites de ta vie, c'est--diredu
sacrifice aux dieux. Le sens dans lequel ou (ait h' tour des
feux, la manire dont on porte le cordon du sacrifice, les
nombres impairs, la couleur noire de la victime, l'orienta-
tion, tout est exactement inverse. M. C. fait encore une
remarque dcisive, que les textes taisaient dj ( t4, cf. p. 174)
les rites funraires ont essentiellement pour fonction reli.
gieuse d'assurer au morlla vie d'au-del, de conduire l'esprit
dans le monde du cie). rgion des Ames des morts.
Tel est en effet le principe mme de ces pratiques. M. C. a,
nous semble-t-il, rendu un inapprciable service la socio-
logie religieuse en signalant ce fait. La thorie de M. Frazer
n'est que partiellement vraie; les rites funraires n'ont pas
seulement, comme it croit, pour but d'carter t'tne du mort.
its tendent lui assurer une existence relle et heureuse.
C'est dans l'intrt du vivant et dans celui du mort que les
rites sont accomptis. De plus, le mort satisfait devient un

anctre, objet de culte, divinit tuttaire du foyer. Une tude
qui ne rentrait pas dans le cadre que s'tait trac M. C., sur
les notions de prc/n. et de c'est--dire sur les ides que
les Hindous se font de l'tat de t'ame avant et aprs les rites
funraires, montreraitcertainementqne tous ces rites ont pour
objet do transformer un esprit vague et mchant en un anctre
puissant et ami. Esprons que M. C., plus comptent que
personne, fermera sur ce point le cercle de ses monographies.

0) Cf. n. )'i.<h''t ('J~/tM~Mc/M ~<-<f .):~fK.


h- .-o)))j)tc tt-n'tu <)t'
jui)t''mt'n, p. Nit). M. )'i,<c))t') t'X)))h)U<' jxmr'juoi. aux )))')'<, h'~ t!rui)M <)f
sA-attM' font partit, du ntttt~w) tuH<'tTtin: ils !.unt nuir~, et h- ncit' fiit lu
''MttfUr des ototH.
PEMCY CAHDNER. Soulptured Tombe of Het!M
< ~t't<<pft-t' /t<'<' </c<! ~f'WMM). Londres, Macmittau,
i896,iu-4".xx-239p.
L'ouvrage do M. G. ne prtend Il rien de plus qu' tre un
livre de vulgarisation et d'tnstoire de l'art. Splendidement
imprim et illustr, il est fait pour mettre sous les yeux, et
d'une faon intelligente, les plus beaux monuments do la
sculpture funraire hettne. Mme les ambitions explicatives
semblent rduites & teur minimum. Et pourtant, comme l'au-
teur est uu des archcotogues les plus distingus de i'Angte-
terre, comme le sujet est un de ceux qui n'ont gure t tu-
dis jusqu' prsent, il nous faut soigneusementsignaler ce
livre tel qu'il est.
f/archeotogie et t'epigraphie nous apprennent chaque jour
plus sur ta vie relle des cits et dos familles grecques. Les
monuments littraires ne se rapportent qu' une lite intet-
lectuelle; s'ils nous donnent des renseignements prcieux, ce
n'est que par contre-coup, et souvent les faits qu'ils prsen-
tent sont idalises l'excs. Mme les documents les plus
prcieux, Hesychius. Sorvius, nous font counattre la thorie
des choses, telle que les esprits reRechis l'avaient imagine.
non pas les choses ettes-metnes. Au contraire, les monuments
figures nous permettent de saisir les institutions vivantes et
agissantes. Encore que les plus importants aient t pour ta
plupart t'uvre de cits, de patriciens, ou traduisent des v-
nements rares, ils portent, mieux que les vers dos potes ou
les travaux dos philosophes, l'empreinte du milieu qui les
entourait, des ides et des sentiments moyens concernant les
morts. C'est pourquoi le livre de M. G. venait son heure.
Evidemment il a tous les dfauts des livres de vulgarisa-
tion la discussion, par exemple, sur l'identit de t'ttades et
desChamps.Etysees,est bien acadmique [p. ~8). Despithetes
que les archologues semblent affectionner sont constantes
et l'explicatiun des faits par le caractre < mesure des uvres
du gnie grec est frquemment employe. Mais ce n'est
pas l que se trouve l'essentiel de l'ouvrage; ces chapitres
sur les croyances et les cuites ne sont qu'une introduction
une tude des mmes faits vus travers la forme du tom-
beau.
Un premier renseignementgnera) est ta raret des inscrip-
tions faisant allusion aux peines et rcompenses aprs la
mort (p. 40). A part certaines peintures de vases, empruntes
plutt une pure mythologie ou drives de tubteaux fameux,
on ne voit aucune de ces reprsentations de tourmentset de
batitudes auxquelles le christianisme ou le bouddhisme ont
habitu t'Ot'ient et l'Occident. En moyenne, si la rnoraie d'ici-
bas n'tait pas absolument indinerente aux ides grecques sur
la vie future, celle-ci tait loin d'tre le centre des proccu-
pations. Les inscriptionsnoncent plutt simplement le nom
du mort, de l'auteur du tombeau, de celui qui l'a fait cons.
truire etmmetespigrammes les ptusiittrairesdel'poque
alexandrine ne (ont. que dire des adieux au mort ou que le
iouer de sa sociabilit.
Mais la description mme des formes des monuments fun-
raires, l'tude de leur rpartition gographique, de leur
transformation suivant l'volution de l'art et des ides, sont
le centre mme du livre de M. G. Les plus anciens monu-
ments de la civilisation mycnienne sont certainement les
tombeaux royaux. Le mort y dut tre longtemps l'objet d'un
culte; c'est ce que prouve la vaste disposition de t'entre du
tombeau. Le roi y tait enseveli au milieu de ses trsors; l,
comme dans toute l'antiquit grecque, on entourait le mort
de ses objets familiers. Ainsi on retrouve souvent des enfants
enterresavec leurs jouets, des guerriers avec tours armesou tes
images de leur cheval et de leur chien (de l la reprsentation
frquente du cheval dans les bas-reliefs, p. 83, p. US). Les
quelques sculptures, lions, chasses aux lions qui ornent ces
tombes, en mme temps qu'elles rappellent des pisodes des
moulages assyriens, montrent que, des ce moment, le carac-
tre des figurations tombales est de rappeler la vie du dfunt,
de le fixer dans son attitude favorite, plutt conventionnelle,
et non pas de prjuger la vio qu'il va mener au del du tom-
beau. A Sparte, le mort est nettement hros et l'histoire

mme nous relate, comme les tombes, des changements de
nom aprs la mort (p. SO). Mais ce qui est bien symptomatique
c'est que, mme dans le cas o il n'est pas douteux que telle
sculpture nous reprsente des morts, on les voit figurs dans
leur vie passe. Et c'est ainsi que la place qu'occupe la femme
cte de son mari sur ces tableaux semble correspondre la
place releve qu'elle occupaitdans sa vie d'ici.has (p. 81).
A Athnes, l'origine, on voit exister deux sortes de tom-
beaux le tumulus, avec une ouverture o l'on rpandait le
sang des victimes, et la stle qui marquait remplacementdu
cadavre les deux taient souvent runis. Avant te:< guerres
mdiques et pendant !'poque classique, sur la stle se devc
loppretit un certain nombre d'ornements un troit portrait
conventionnel du dfunt, surtout pour les jeunes gens (p. 1M
Puis )a stle s'agrandit; elle contient un grand bas-retief,
reprsentantsoit le dfunt, soit ses attributs (vase de mariage
pour les jeunes filles). A un stade ultrieur, des sortes de
petits temples s'rigent, ou apparait la statue questre ou
isole du mort. Cette niche mme finit par dlsparaltre et la
statue resta seule, mais seulement dans certains cas assez
rares. Un autre dveloppement de la stle est constitu par
les images non plus du mort isol, mais du mort dans sa
famille, comme si sa vie passe fournissait le type des espoirs
possibles pour un autre monde. Les reprsentations du mort
recevant dans son tombeau les hommages des siens, ou assis-
tant leur repas funraire, semblent rares. Une troisime
srie d'ornements est constitue par la reproduction, au som-
met de la stle, soit des feuilles d'acanthe dont les Assyriens
fournissaient le modle, soit de sphinx et de sirnes, esprits
chargs, suivant M. G., d'carter les mauvais gnies de l'me
qui habitait le tombeau. On trouve aussi figurs des ani-
maux simplementsymboliques du nom que portait le dfunt.
Quelque insuffisantes que soient les preuves exposes, le
livre de M. G. ne laisse pas de s'appuyer sur une rudition
extrmement solide. On pourra refuser bien des identifica-
tions, par exemple de voir dans les sirnes des xno-;po!M(<,
alors qu'il s'agit videmment, comme le montrent les figures
mmes reproduites par M. G., d'esprits chargs d'emporter
et de protger l'Ame du mort.

XOTtCKS
/t. PK<))).TO)U)~L't:
A..P. MAnSEX. Ch'avhje og GravfuNd A'a Sten&deren i Dam
mark. De oattige Danmark, 38 p.. 50 p). Kjbt'nhavn. <:y)-
dendft!, <89C, in-fo)io. (Tombes du Dancmm-k )
W. COt'ELAXU BOHLASH. Th Dolmens ofiretamd. 3 v.ni-8",
Chnpmanand HaH, )M6. (Mistribution <'t mpprocht-utFnts.)

WOLFCAXG HELBfG. Ein ~yptiMheoOrabgemidound die


Myoenische Frage..Siti'hct-. der ).))U. phitot. u. hist. K)ass< d.
k.t!.Ak.d.Wi<s.,)89U,)V.)
<j. t'A't'ttUXf.
La OiviUeation primitive dans la Sioito orien-
tale (Attthtupoj~it-.t'ans.M.~san~Vt)),S, p. t~, 29~
S. XHfXACt). (tt. p. ~-7-34t.) Le prhistorique en Egypte
d'aprs de rcentes publications. t<utn<' )a <tm'stiun discuta'
ptn':
).-t.tXt)).:)!S )'t.r)'tUH. St't'XXHt.L KT m.'tXMK).).. X~attas atht XaX.tx.
Luod., ?6;
MAS)'H)<O.Bt-Y.critif}Ut',)89'),)).):'Nsui~.Cotn).t.'r..ndud(!(.-('
dct-nh'r )m'<

/<.PK'')').H;<<(). t:tY)t.).-t'.<
n

S. K. Kt SXHXUW. Ueber den Glauben vom Jenseits und den


TodtenouttusdorTsoheremissen.Oxt.Arctt.f.Kthtt.JSM, f\,
t5<(.Uiv.)

C.A~T)))tOt'Ot'M.)KMf!t.)<:)t:L't!
F.

A tufjuv~tiutt dt's cuttt's fm)t''t-!)in-s -.<' t-attactx- .;<'))(.' du repas o p~t


t))<n)~)L'dcfu)tt,(.'t''<'))('dfta M'rtuntit~i'jm'uojmscdtt))!'un F
)'ft)asdt'<tu-c.
H. MADCQKA. Anthropophagie in der pr~historisohen
Ansiediun~ bei Knovize und in der prfahistorisohen Zett
uberhaupt. (Mitth. d. anthr. f~M)). W.. X\V), t\' p. <29.)
L'auteur :i''mttat't))'a)'i))t('t-p)'<)at)')nfmi)niste.
)). KKt~. MenschenneiMh akArznei !i. Hthnopt-aphischeHci- j
i
t)-a)! )''t'~t){t-t)ss! ~-i.'t-d'-s ~0" t.churtst. A. Banian).(Supp!.
h)t.Ar(-h.f.)-:[))))o.,p.M.)
(Coutumes chittuisc! hindoues, ccttf's.)

S. KXAt-'SX t.. K. S)')tt-:X):j-:H. Menschenneischessen,


Umjtrage (A. [.'r<)u<-t) X. F. H. S;.
eine .

~.AXT)UL')TtS CMCQLt!

H.v. FBtTXE. ZudenGriochischemTotenmahiretiefa. (~'AH?.


tM~M <~ ~at'Mr/K'Ae~ /)fM/M/<M ~<-c/?'~o~Me/teM/<M<f/M~ ~<A<
McA<-.4A<Ae)7)t~), t896, p. 34S suiv.
Les feprfxentution!!si frquentes de repus funraire symbotiitp-
raient, non pf))t un souvenir ttun'pas de fitmiDe, ou bien la faon
dont le mort se nourrit dans le tombeau des mets qu'on lui apporte,
mais la )a<;on dont il assiste au repas fu)t<irair<- t-t s'y rjouit.

Die Atttftohen Grabeliefs.Merggb. im Auftrage d. k. Ak. t. Wien,


i8M,)iv.Vt)t,tX.
C.-M. KA! FFMAKX. Die Je&eeitshofhtMajren der Orieohem
und Rcemer naoh den SepaUtratinschriften. i8C7, F. i. B.,
He'rdpr, in'8", \n-8!i p. Excellente tuono~raphie.

nE Kt!)!)E)t. L'ide de lamort en Grce l'poque classique.


Paris. Fontcmoinf:,1897, in-8".
Exposa d<; r~votution des id<cs cnnt:<'r)mnt ta mort et rautre vh',
au tv" si~'fjf. )) est rf'(;r<*ttcr que fauteur, capable des mcittearcs
tudes archcotogiques, se soit born< a une tude philosophiqueet
littraire qui ajoute peu au livre de itohde P~c/.

~.CM)XB
D'ENJOY. Le culte des mcrta en Chine (Reu. /K<. de Socio.
~t'f.rnarstSM).

EOYt'Tt!
(:. MASPERO. La table d'offrande des tombeaux eerypttena
(~. <<?<. /M~ XXXV, 3, p. 275, 350).
Article qui ne sera Mhev que dans le tome suivant, dpasse d'au-
leurs tes timites mmes du culte des morts; nous en ferons une tude
dans ta prochaine anne.

C.OtV)X)!!AT)0;< ns HOKTS KT DES t'KtSCEB

Die Begrnadun~ des Alexanderund Ptolemcer-


J. KAEMST.
cultus ln ~rypten ~/'<MeAM~t<MM, V, S, f )ivr.).

G. MASt'HKO. Oomment Alexandre devint dieu en Egypte


(Annuaire de ~o/c des ~<!M<M ~<M<~M. Paris, lmp. Xat., tM7).

FttAXZ CUMOXT. L'ternit des Empereurs romains (~ec.


<fHMf. et de ~'M. religieuse8, <890, t, p. 43S.M2).
tude sur le titre d'ternit des empereurs. M. Cumont rappro-
che MtMnite de l'empereur et cette de la ville; il montre ensuite
comment, sous FinHucnce des ides religioso-politiques orieutale)!,
t'eternitM des astres, du soleil ea particuiier, fut mise en n'tatiun
avec la personne de i'e)n)'<)'eut'. Le rituel net'' persiste d)ms le cere.
moniat bymatiu. Le tMVuii de M. C. tnuotfe MHeXonmentla hxiondM
institutions n'tigieu~M et d~sittstitutions potitiqm's qui s'est fuite au

fut )n nature divine du princf ):


profit de t'etnpet'eur. )\'ut-t!t)'o M. C. aurait-U mieux saisi ce que
avait chereh'! du cta de la cotMf-
cf<t'o, de t'apotheose, cet'Ononie (lui lui faisait acqurir, de son
vivant, l'eteruite des dieux.

f<KA.'<0)!!f KeLtOO~

R. HOLDZIHEH. Aua dem Mohammedamiaohen HeUigen-


cultue in ~Egypten (G~AtM. ).XX). n" <3<S).

S.-S.-J. DAHLMAXX. Nirvana. /f~~<fM<- M<t- Vo~McAt'eA~~M


~M<MA)'MtM.(Her).. DamMS, t89<) l'eu de r~suttats. (Cf. C. M. p<n'
Jalcobi fMtt. Cet. At))! avril t89')
Nous ne mentionnerons que pour mmoire le grand dbat ouvert
ces dernires anodes pour savoir si i'inscnption d'Abercius (Asie
Mineure) apparti''ntau':u)tc funcraire prec ou chrtien. La question
est loin d'tre trancMe.

St:tt\'tVAXMS n'*XC~SX)!S CROYAXCt!!). CHAMAM MAXTtis, etc.

WtLKOWSKt. Sagen vom ScMoaaberge Mehlken (Xeitsch. f.


Et))n., i897, !), 63, cf. 68 suiv.)

V. CULTES POt'tJLAHtKS KN GN~BAL


PUS PAKTtKUt.)t:ttR!)tHST A<!RA!RES
Par AI. MAMs.

W. CROOKE. The popular ReMerionN and Folklore of


Northern Indta. (~~Wts popM&M et Folklore de l'Inde
<epH<WoH<!<<'). i896, Westminster, Constable, 3 vo!. in.8".
.vt!t-294p.;H.!i.3S9p.
La seconde dition du livre de M. C. sera encore plus pr-
cieuse aux travailleurs que la premire. Considrablement
enrichi de documents indits, de rapprochementsnouveaux.
rendu extrmement commode par un index complet et une
bibliographie remarquable, le livre de M. C. doit faire partie
de toute bibliothquede science compare des religions.
Certes les plus graves objections peuvent tre faites au plan
du livre, la mthode, la dlimitationmme du sujet. Mais
il est rare de voir une tude plus indispensable que celle-ci.
D'abordelle constitue un rsum de toute une masse de livres
trs vastes et d'un accs diniciie. Ensuite, nulle question
n'avait plus besoin d'tre traite. Rien de plus faux que les
ides courantes sur t'tatactuei des religions hindoues, mme
les travaux les plus recommandables, le livre de 8. Monnier
Williams, Nfa/ttoaM~m Kf< M<K~MM), ne nous donnent
que l'tude d'un petit groupe de faits l'enqute premire
restait faire. Il fallait appliquer aux religions le procd
dont s'est servi M. Risley dans l'tude des castes. Rsidant
dans l'Inde, aimant et connaissant les indignes de tous les
rangs de la socit, sachant admirablement l'ethnographie
du pays, tout fait au courant dos questions que se pose la
science comparedes religions, s l'anthropologie religieuse
enfin, dou d'un rel talent de classification et d'organisation,
M. C. tait tout dsign pour cette premire assise de tout
travail futur sur ce mmo sujet. H n'est pas d'ailleurs de
problme plus attachant. Les faits sont, dans l'Inde actuelle,
la fois si simples et si complexes; ils sont le produit d'une
histoire tellement vaste et d'une telle stagnation en mme
temps, ii y a la un pareil coudoiementdu primitif et du raf-
fin, d'institutions religieuses en rgression et d'autres en
formation, et dans tout cela une telle continuit que nulle
part une tude de ce genre ne sera plus fructueuse. M. C. a
eu le bonheur et l'honneur d'avoir commenc le dfriche-
ment d'un si vaste champ.
Les religions populaires de l'Inde septentrionale font soi-
disant partie de l'hindouisme. On entend par hindouisme la
dgnrescence de l'ancienne religion brahmanique clas-
sique, pendant iaqueiie des pratiques multiples se grenrent
sur les anciens rituels o les dieux les plus grands, Indra,
Brahma, s'abaissrent, tandis que Visnu, tva, Kti, etc.,
devinrent le centre de la mythologie.L'ensemble des cultes
populaires rentrerait dans ce systme & titre de drivs des
anciens cultes brahmaniques.M. C. s'levait dj contre cette
vue, dans une communication au Congrs des orientalistes
deLondres. L'hindouisme, selon lui, recouvrait un londs primi-
tit et lescultes populairestaient tout autre chose que des r-
gressions; ils taient ce fonds mme. C'est la dmonstration
de cette thse que le prsent ouvrage est en quelque sorte des-
tin. Non pas qu'il y ait ici une discussion en forme ce sont
des procds Inconnus aux mthodes anglaises. Mais deux
ordres de faits militent par leur simple prseuce. D'abord,
c'est l'extrme diversit, lecaractrelocal des usages religieux
ils changent de village village, de district district, comme
si la vague hindouiste avait simplement recouvert les religions
tribales. Ensuite, c'est le caractreprimitit de tous ces usages
et de toutes ces croyances les quivalentsqu'on en peut indi-
quer dans le folklore, dans les civilisationslmentaires, dans
les socits les plus infrieures, sont innombrables et les reli-
gions populaires hindoues apparaissent sur le mme plan.
D'ailleurs, la comparaison incessante des tribus dites ana-
ryennes, dravidieunes ou autres, avec les villages et villes
dits aryens, claire et montre la parent intime de ces cou-
tumes, soit qu'elle ait pour cause la similitude spontane des j
deux civilisations, soit que, comme on peut l'apercevoir chez
certaines tribus qui se convertissent l'hindouisme, il y ait
eu assimilation d'une race et d'une socit par une autre.
Dans les deux cas, le fonds reste aussi primitif.
Ce qui caractrise non seulement les grandes mythologies,
mais mme les religions populaires de la civilisation indo-
europenne, c'est laspect naturaliste. Tout le monde sera
frapp des analogies profondes qui existent entre le folklore
europen et ce qu'on pourrait peut-tre appeler le folklore
hindou il y a correspondance de rites, correspondance de
croyances, comme il y a eu symtrie de langues. Tout un t
vaste ensemble de superstitions europennes rpond aux
notions desitindousconcernantla natureetlesesprits et forme
une sorte d'aire religieuse, gographiquementdtermine.
Sans doute, certaines d'entre elles drivent des caractres
gnraux du type religieux auquel elles appartiennent i
savoir, d'une thorie animiste du monde et d'une source
ftichistedes cultes. Mais l'identit presque complte des rites
agraires, la rgression relle du totmisme, la nature du poly-
thisme, singularisent les peuples indo-europens parmi les )
autres si cette conclusion n'est pas dans le livre de M. C.,
elle en drive. D'ailleurs, si M. C. tient prouverque le fonds
primitif est le mme dans toute l'humanit, il ne laisse pas
d'ajouter que certaines formes furent particulires certains
groupes de peuples.
M. C. fait une excellente distinction entre les grands dieux
personnelset omniprsents de l'hindouisme, et tes < divinits
(~oM, f/eca<()), petits dieux de la nature et des champs,
locaux, spciaux, occasionnels. Parmi ceux-ci, les uns sont
les esprits des tres clestes. du soleil (l'ancien ~n/, devenu
.<!;'<), de la lune, des toiles, des clipses. Puis, particulire.
ment rpandu est le culte de la Terre mre. Celle.ci, dont le
caractre sacr est bien vident (depuis le Vda, ajouterons-
nous),est la sourcede la vie des plantes; on luttait desonrandes
des prmices, et aussi des propitiations, au premier coup de
charrue ou de pioche (p. M, p. X~, cf. Il, p. 387, i8a suiv.).
Mals la terre n'a pas t seule l'objet de cultes agraires. Le
dveloppement de ceux-ci est, aux Indes, colossal. M. C. n'en
don ne qu'un court rsum, et, par exemple, les trs curieuses
coutumes du Bihar, pour la culture de la canne a sucre, n'y
sont pas mentionnes mais ce rsum est infiniment prcieux
par la varit et la nettet des faits qu'il nous fournit. Tous
les actes qui ont trait la vie des plantes semblent avoir au
moins un commencement religieux. Les semailles et les plan-
tations, lit cueillette des fruits, la rcolte et la manire dont
est rserveou partage la dernire gerbe (H, 80i), le vannage
du grain, la faon dont on le mesure ont un caractre reti-
gieux au dernier chef; il s'agit de rserver, en quelque sorte,
ia force spirituelle que l'on suppose rsider dans la terre, les
plantes, les grains. Cette notion de l'esprit de la vgtation est
aussi l'origine des cas trs nombreux du culte des arbres, des
bosquets sacrs, et eu particulier de la coutume remarquable
du mariageauxarbros. Celui-ci prcdete mariage des fiancs
entre eux, comme si on voulait, d'une part, associer la ferti-
lit des plantes celledu mariage, ce qui est, je crois, l'inter-
prtation vraie; et d'autre part, dcharger sur ies arbres les
pchs possibles et les maladies du coupte, ce qui est l'opi-
nion de AI. C., mais ne parat tre qu'un fait secondaire. A ces
rites purement agraires viennent naturellement se joindre
des .pratiques drivant de cultes solaires, et, en particulier,
cette fte gnrale aux Indes, parallle la Saint-Jean en
Europe (11, 3<S), des feux de la Holl. On y voit des bataillesde
femmes, des rondes autour du feu, des sauts par-dessus ce
dernier, des luttes et des courses entre les hommes on y prend
des cendres fertilisantes, toutes sortes d'usages, qui ont vi'
demment pour sens d'assurer du soleil en suffisance au cou-
rant de l'anne, et peut-tre, en vertu de la coincidence avec
le &<?MMt (nouvel an), de bruter une anne et d'en allumer une
nouvelle. D'autres rites procurent de la pluie, d'autres la fer-
tiiit, ce sont plus particulirement ces usages si intressants
o des femmes nues accomplissent des actes symboliques
prcis (i, 69, Les montagnes. l'Ilimalaya o habitent les
grands dieux, sont le sjour de divinits. D'autres sont mai-
tresses de l'air, du temps, comme Bhima, Bhimsen (anciens
hros du Maitabharata), des sources, des tangs. Les rivires,
le Gangeen particulier, sont divines; les confluents,les marais,
les puits, sont habits par des esprits plus ou moins puissants,
et sont adors parce que ta semble se manifester plus qu'ail-
leurs la vie de la nature. Le caractre naturaliste des religions
populaires hindoues est ainsi extrmement marqu.
D'autres dieux remplissent diverses fonctions spciales les
uns sont les protecteurs du village, ainsi Hauumau, le dieu
singe; les autres sont les esprits qui prsident au mariage,
la bonne saut. Mais le culte, tout local quand ii ne consiste
pas en rites agraires, est aussi lmentaire que celui des tribus
sauvages environnantes. Comme elles, les villageois vont
enduire du sang des victimes lit pierre du sacrifice (t, p. 98),'),
ou lui offrir, aprs quelques actes religieux, dbris de la pit
brahmanique, un petit nombre de grains de riz. D'autres divi-
nits sont les esprits de la maladie, de la petite vrole, etc. A
celles-l on doit s'adresser soit par la magie, soit par de htives
propitiations. H va de soi que les cultes de ce genre portent
avec eux leur caractre d'universelle simplicit. Il s'agit en
effet d'apaiser ou d'expulser le dieu dangereux, ce qui est
quivalent. L'acte, alors, consiste ncessairement dans l'obser-
vation de certaines interdictions, du silence (II, 3t2), dans des
danses d'exorcisme, de flagellations pour faire sortir du corps
le dieu mchant, sonner des cloches (ti, 167) ou bien on
transporte le charme et la souillure sur un bouc expiatoire,
on fait mangerlespchs par un brahmane, on va pendre des
habits du maiade un arbre sacr. On emploie aussi des
moyens oraux d'exorcisme (t, 146). Les maladies-dieux, en
effet, ont des noms, et si le sorcier, Brahmane ou sauvage,
les connatt, il faut s'en rendre matre. A cet usage on emploie
souvent des ma~nM vdiques incompris.
Ces cultes confinent videmment la magie et la dmo.
notatrie. En effet, te monde tout entier est peupl d'esprits, la
plupart mauvais, que l'Hindou le moins pieux doit carter. Le
sang, la couleur rouge, les mettent en fuite (H, 70) le premier
a donc une vertu curative. Le {eu, le soleil, l'or, la coulour
jaune sont aussi des prservatifs contre les esprits et !e mau-
vais it (H, p. 16). Les objets sacres, bnits, les amulettes, les
reliques de saints (survivance du bouddhisme) sont employs
dans le mme but. Enfin, se rattacher quelque sanctuaireen
y consacrantune partie de soi, cheveux,ongles,etc., est encore
un moyen de s'assurer la sant. LesHindous,comme la popu-
lation dite dravidienne, croient aux bons et aux mauvais
prsages, aux porte-bonheur (main d'un mort, p. 3, Cf. I,
!i!44). La sorcellerie est au fond la mme chez les tribus abo.
rignes que chez les Hindous mais, chez ces derniers, on se
trouve souvent en prsence d'anciennes pratiques brahma-
niques, auxquelles les brahmanes n'ont pas d'ailleurs
renonc. La magie se pratique < sans l'aide des dieux, l'acte
agit par lui-mme. Mme, chez certains brahmanes de Bom.
bay, les fonctions de prtre, de devin, de magicien, ne sont
gure plus incompatibles entre elles que chez les Baigas des
Gonds. Les procds d'initiation du sorcier (qui consistent
le mettre en communication avec des morts), les modes
d'enchantement par les cheveux, les traces de pas, l'envo-
tement par des prires prononces en sens inverse (tt, 270),
sont employs partout de la mme faon qu'aux Indes.
Mais M. C. croit possible de retrouver sous ces institutions
une sorte de culte encore plus primitif le totmisme. Ici, il
et peut tre t do rigueur d'observer la distinction, dans
l'expos mme, entre les faits emprunts aux nations non
hindouises, et ceux qui proviennent des populatious hindoui-
ses. M. C. ne t'a pas fait, et cela eu)6vo bien de la valeur sa
dmonstration. Ji semble pourtant en rsulter que, pour les
deux races, l'exogamie et le totmisme sont troitoment lis
l'organisationdu clan; que les clans totmiques non hindous
sont nombreux (H,i46); qu'un)certain nombre de clans hin-
dous portent des noms d'animaux, les respectent, n'en man-
gent pas, ne les sacrifient que solennellement,les imitent dans
un certain nombre de crmonies.L'hindouisme,suivantM. C.,
n'aurait fait que recouvrirces culteslmentaires, faisant par
exemple passer le porc-totem pour un avatarde Visnu. Mais
un trs grand nombre de ces faits pourraient aussi s'expliquer
par un culte d'animaux qui ne serait pas ncessairement
totmique. Tt te culte du tigre, cet animal si rpandu dans
toute l'Inde, dont on ne peut prononcer le nom et dans lequel
on voit souvent un homme mtamorphos, un sorcier (21t,
MO,). Tel aussi le culte du cheval, reprsentant le principe
mate, ta puret, la ertitit (p. 301). Daus tous ces cas, i! est
d'autant moins ncessaire de faire intervenir le totmisme
que l'ensemble des tmditions, hindoues ou non, concernant
les btes, oiseaux, poissons, insectes, est presque indfini.
D'autre part, le stade ftichiste est toujours celui o s'est
arrte la plus grande partie de la population qui rvro cer-
taines pierres, certains rochers, certaines places, des autels
o se font des cures merveilleuses, des marques de pieds
divins, et le ftichisme pourrait expliquer bien des faits ratta-
chs au totmisme. Au contraire, dans le cas du culte de la
vache, on se trouve en prsence, non pas d'un culte rcent,
comme croit M. C., mais d'un trs ancien culte totmique,
qui a persist tonnamment, t'ne tude suffisante des textes
vdiques les plus anciens prouverait que ta vache fut le totem
des premiers c!ans hindous et je n'en voudrais pour preuve
que le nom f.o~-a, vacherie. du clan brahmanique.
Dans le culte des morts, M. C. distingue bien les deux cat-
gories cultes funraires, cuites ancestraux. Les rites fun-
raires, dont l'extension est gnraledans le nord do i'lude, ont
pour but l'expulsion ou lu fixation de l'esprit du dfunt, dont
il s'agit d'empcher le retour (H. SS, 68Aussi, enterre-t on le
cadavre avec ses objets familiers; on brise lu vaisselle, etc.
Mais les cultes ancestraux sont spcialement aryens. La plu-
part des esprits passent pour mchants telles sont les mes
des petits enfants, de ceux qui ont t enterrs sans les rites
(~), de ceux qui sont morts de mort violente, des pendus
(B/tt!f<t, sscr. BhCta). lis hantent les habitations, les cimetires,
certaines places dangereuses et causent des maladies (cf. L
380j, s'incarnent dans les animaux de nuit, deviennent les
dmons les plus malins qu'ait imagins l'Hindou. D'autres
deviennent, au contraire, des divinits tutlaires ainsi tous
les pres de famille enterrs rituellement (les Pi/'x, sscr. J"<
r<M), qu'on nourrit rgulirementpar les offrandesde gteaux
et de grains, et lors des repas funraires bimensuels ou anni-
versaires ceux-l sont des protecteurs de la famille. A leur
culte se rattache probablement, te culte des serpents domes-
tiques (M, p. 133), devenu, par extension, un phnomnereli-
gieux extrmementimportant. D'autres mes sont hono-
res par tout le village et mme par de nombreux pterius. Les
tombes de saints (souvent.musulmans,car les Ilindous maho-
mtanscontinuent teursaneiennespratiques) sont l'objet d'une
grande vnration. Trs souvent, le caractre historique du
personnagedivinis n'est pas douteux (t, p. <96). La difica-
tion dpend donc, suit du genre de vie du saint (s'il fut un
grand ascte, un voleur renomm, un terrible magicien, qui
continue ses exploits) soit de la faon dont ii est mort (c'eft
le cas des satt, femmes qui se sont fait bruier avec le corps de
leurs maris) soit encore, ajouterai-je, du genre de conduite
qu'un dfunt adopte vis-a-vis des vivants. Si, sur sa tombe,
des miracles se produisent, s'il amige le village de maladies
pidmiques, il est bon, ou ncessaire, de lui rendre un culte
qui l'apaise ou l'utilise, et c'est ce culte qui en fait un dieu.
Car non seulement il doit tre saint aprs et pendant sa vie,
mais ii a du t'tre aussi de tout temps, dans tout le cercle do
ses naissances antrieures.
On voit quelle est l'importance des sujets traits. J'ai,
dessein, omis les thories de M. C. qui sont d'ailleurs celles
des savants de l'cole anglaise; les similitudes qu'il signale,
les explications qu'il fournit sont extraites des ouvrages de
MM. Letand, Frazer, S. Hariiand. Il faut pourtant mentionner
la notion que M. C. s'est faite du ftichisme en gnrt, hindou
en particulier. Il fait consister cette forme de religion dans
l'invention d'autant de dieux qu'il y a de classes de choses
intressant l'action c'est ce qui ressort avec vidence des cha-
pitres qui ont trait aux divinits , Ii est regretter que
M. C. pensant de cette faon anglaisequi ne se peut dtacher
des faits bruts, n'ait pas mieux russi en dgager le carac-
tre. Je crois que s'il et fait porter ses observations sur les
dieux des castes infrieures et des corporations, il eut trouv
de ce ct des faits importants. Mais l'attention des folkloristes
est plutt dirige vers les campagnes que vers les villes.
Mme en ce qui concerne les cuites locaux, un certain nombre
de lacunes se laisserait dceler. L'tude des plerinages, en
particulier des <n'</M, si nombreux au Kashmir, semblait
assez indique.
Eu second Heu, si M. C. a toute la comptencevoulue pour
traiter des religions populaires, sa comptence spciale en ce
qui concerne l'Inde est d'autant moins grande que ses tudes
des anciennes religions hindoues ont t moins dveloppes.
Ainsi l'usage de faire des libations avec des jarres perces
par le bas, et tout en tournant autour du bcher funraire,
date certainement de la plus haute antiquit. De mme, les
textes qui concernent les vertus magiques des plantes, la
connexion des anciens rites agraires et des cultes solaires ou
lunaires, ne sont pas moins intressants pour ta science com-
pare que les survivances actuelles de ces mmes pratiques.
Leur sens est beaucoup plus clair et ce sont eux qui consti-
tuent le fait originel dont les usages observs aujourd'hui ne
sont plus que la trace; la force de la dmonstration de M. C.
edt t bien plus grande si certains rites tout (ait anciens et
encore vivaces avaient t claMs comme primitifs.
Enfin l'indication trop constante des similitudes produit, l
comme ailleurs, cette impression que les faits tudies n'ont
rien de spcifique. On trouverait des rubriques sous lesquelles
M. C. ne range presque aucun fait hindou (H, 66) ainsi quand
it s'agit du sacrifice de la chevelure au mort. C'est la mme
mthode qui a amen M. C. & faire cette grave confusion que
nous lui avons dj reproche plusieurs fois, entre ce qui est
hindou et ce qui est sauvage dans i'tnde. Les diffrents faits
relats ne sont pas suuisamment leur rang, les uns de cou-
tumes survivantes, les autres de coutumes en voie de rgres-
sion, les autres do coutumes en voie de formation, les autres
de faits absolument primitifs. Mais n'oublions pas que nous
sommes en prsence d'un beau travail inaugural.

M" J.-H. PHILPOT. The Sacred Tree ortheTree ta Re-


ligion and Myth (t'r<)/'e s<w< oit <'af&f<* </<!<)<! le c~c <'t
<faM le Mt~/tc). Lond., Macmillan, 1897, xvbd79 p., in-8.

L'auteur, sans ambition scientifique, ne se vantant d'au-


cune ide originale, ne cherche qu' collectionner les faits,
sans mme prtendre tre complet. Ce livre, si modeste, a
pourtant de rels mrites compilationclaire, utilisation judi-
cieuse des documents rassembls par Mannhardt, Frazer, Fol-
kard, Goblet d'Alviella, il est dj utile par cela, et la prudence
des conclusions fait qu'on peut relativement s'y fier. Malheu-
reusement le dtail des preuves est moins solide que les
rsultats et nous allons tre oblig d'en faire de suite la cri-
tique.
M" P., par une revision aussi complte qu'elle a pu la
faire, a cherch prouver l'universalit du culte des arbres.
Comme les recherches ultrieures ne pourront certainement
pas manquer de confirmer cette hypothse, il se trouve que
M' P. a eu une juste vue des choses. Mais une grave lacune
rgne dans tout son livre: c'est l'absenced'tudes suffisantes
des religions les moins dveloppes. Celtes ci eussent pourtant
fourni M"" P. h plus ample moisson de faits. D'autre part,
l'incomptence philologique de la plupart des folkloristes
leur fait admettre des hypothses comme des faits dmon-
trs; ainsi la nature de t'(Mc~' biblique est controverse, et
il n'est nullementcertain qu'elle tt un cas de culte sylvestre;
l'arbre de la <'o~! (p. 41) n'est honor que parce que l'illu-
mination (&o~t) du Buddha se produisit son ombre. Ces
faits d'ailleurs se laissent trs bien remplacer; le culte des
arbres (M<n<Mp<tt<) est encore vivace aux !))des comme au
temps du Rigveda, et les bosquets d'Astart furentfrquents
par Isral tout entier. Le nombre d'exemples qu'on peut y
ajouter est Indfini.
La division que M"" P. propose semble juste et raison-
nable. Elle distingue le dieu de l'arbre, et les esprits des.
arbres et des bois (p. 3~). Peut-tre edt-elle pu, on mettant
simplement mteux en lumire une des ides de Mannbardt
qu'elle connat bien (p. 00), dcouvrir une troisime catgorie
de faits du mme ordre. L'esprit de la vgtation et les cultes
agraires forment en effet une classe spciale, les dieux sy!-
vains et les cultes sylvestres en forment une autre, et il y a
les dmons des arbres auxquels sont offertes des propitiations
occasionnelles et qui constituent une espce dtermine. C'est
de ce point de vue que je vais analyser le livre de M" P.
Avec Mannhardt et M. Frazer, M"" P. attribue en effet
aux croyances qui concernent la vie de la nature et de l'uni-
vers, son renouveau, l'entretien de la vgtation qui som-
meille, les ftes de Mai ou do Saint-Jean, d'une part (vu)) de
l'autre, les ftes de Mai ou de Saint-Sylvestre ()x). Au prin-
temps, pour que la moisson soit bonne, qu'il y ait suffisamment
de soleil et de pluie, on cherchait au bois l'esprit de la
vgtation sous forme d'un arbre de Mai; on le menait au vil-
lage, devant chaque maison. A l'hiver, c'tait une plante tou-
jours verte, houx. gui, cyprs ou sapin (t'arbre de Noet est
une institution rcente) qui tait cense contenir les forces de
la nature et que l'on introduisait chez soi. Le caractre spci-
fique de cette croyance une vie universelle, de ces cultes
qui l'assurent et l'accompagnent,participant au rythme des
saisons, les empched'tre confondus avec les cultes sylvestres
proprement dits. C'est le dieu de la vgtation qui est ador,
et non pas le dieu de tel ou tel arbre en particulier, ou de tel
coin du bois. On peut d'ailleurs le reprsenter soit par une
gerbe, soit par un bton enrubann, soit par un jeune homme
dguis de feuillage. !)e mme, je rattacheras volontiers ce
culte de la nature le mythe do l'arbre universel, supportant
le monde et lit source de'ta vie (v<), et c'est ici que pourraient se
placer, croyons-nous, les diireuteslgendes des Pnradis(vn),
jardins d'arbres merveilleux ou de l'arbre merveilleux.
Tout autres sont les dieux sylvestres et leurculte. Le dieu (n)
est ici, comme on le voit sur certaines peintures gyptiennes
ou grecques, indpendantes d'ailleurs, l'esprit de l'arbre. Il
y habite comme l'Ame habite le corps. Ou habille l'arbre des
vtements du dieu, ou y suspend des M'.ro<o, parce que le
dieu est l. C'est cet arbre qu'on arrache la branche sacre
que l'on promne la fte du dieu. L'arbre, tant le sige
d'un esprit souvent puissant, devient facilement un oracle (v),
soit qu'il rende ses rponses par tui-meme ou par l'interm-
diaire des prtres, soit qu'il fournisse la baguette divinatrice
(p. iOH).
L'arbre pouvait d'autant mieux servir do place un esprit
rendant des oracles, qu'il pouvait tre associ lui-mme, d'une
part la vie humaine, de l'autre un esprit ou dmon, de
rang intermdiaire,et plutt malfaisant (tvetp. tt et suiv.).
Les arbres sont en effet, en vertu des ides sur < t'me ex-
terne lis au sort de tel ou tel individu. L'me de celui-ci,
mobile, dont une partie rside dans l'arbre, est l'esprit mme
de ce dernier. Si elle peut s'y rfugier, en cas de danger, la
vie est sauve: de ta tant de contes et de mythes o le hros
se transforme en un chne ou une plante, o la destine d'une
famille dpend de celle de son arbre. Mais d'autres esprits
que des esprits humains (gnies, feux follets, etc.) peuvent
hanter les arbres, les animer, protger leur existence, s'irri-
ter si on tes coupe etlesfait saigner (m); its exigent des propi-
tiations pour qu'on puisse porter la hache un ehcae vn-
rable ou un coin sacr du bois. Sur ce point M"" P. aurait
pu trouver de curieuses analogies entre lit superstition des
bcherons ngres et celle des paysans germains.
Plus profondment organiss, les faits dont M' P. dis-
pose lui eussent peut-tre permis de rpondre la question
qu'elle pose franchement, mais dont elle refuse do tenter la
solution (p. 23) quelle est la thorie la mieux prouve, celle
de M. Spencer, suivant lequel tous les cultes.de la vgtation
proviennent et des vertus mdico-religieuses des plantes et
des histoires de revenants, ou celle de R. Smith, suivant
lequel ce seraient des forces spirituelles de la nature, dont
l'image et le rle se seraient peu & peu dgags de leur gangue
matrielle. qui auraient t plus ou moins personnifies, do
faon & devenir, les unes les esprits favorabtes des champs. les
autres los esprits maiveiitants dos forts? Les faits paraissent
difticiiement conciliables avec l'un comme avec l'autre de
ces systmes exclusifs, et nous doutons qu'une combinaison
clectique rsolve la difficult. La vrit, c'est que partout on
constate la coexistence de ces trois espces de cultes sylves-
tres de l'esprit de la vgtation, des dieux sylvains, des
esprits follets des bois. Ils correspondent trois formes d'une
mme ide l'ide de la vie spirituelle des plantes et de ses
liens avec la vie de la tribu et celle des individus.

NOTICES
MOXOUMAPMt)!0)VBKSt!S

H!CHAMD AKDHE. BrauMchwet~r VolkBkande (Bruns.


wick, Vieweg, i896, in-8", vn-S85 p.).
Documentsde premire main, mis en uvre par un mattre. Sans
compter tous les renseignements que M. A. donne sur la vie int-
rieure, conomique, mot'ate, du paysan du duc.he de Brunswictt,
mentionnons un catalogue des inscriptionstrouves sur les mai-
sons (p. <t8-9); des informations sur uoe ccrtaincfjuantiMd'usages
et traditions concernant la naissance, le baptme, le mariage et la
mort; une tude reettement importante sur les diffrentes ftes popu-
laires, sur certaines coutumes agraires, ta /)/u<'&)-aM<(p. M8),la chasse
aux drapeaux (853), celles qui concernent ta moisson, la dernire
gerbe (26<-8<), tes ftes d'hiver. Les pratiques semblent avoir mieux
persist que les croyances, dont peu sont rellement curieuses.

A. GOETZ. VoUMthamUchea von Siegeiau (Alemannia, i897.


XXV, t).
Excellente monographie.

WtUtem SCHWARTZ. VoUMthumMchM aus Lauterberg am


Karts (~-/<. y. /?</<KO., t896, tY, tBO-tea). Contientdes rapprcctte-
ments trs justes, donne des dtails intressantssur les foux de
la Saint-Jean, de la Saint-Sylvestre.

V. SCHULEXBEM.- BeitmBgezur Volkekande (/& tY).


Etudes de folklore compar.
F.t:cfy D. BERCEE. Ourrent Superatitiona. CbMec~ ~'om <Ae
0)'< Tradition ~My<M/< <pMA<~ /oM, with Notes and an Jutro-
duction by W. WeHs ~!ewet, Host. a. X.-York. (Amer. Folklore
~cc~). Moughton,XuH-Hart'assowiti!,1890, gr. !u-8", i6i p.
M. ~). a doam! une prface ce livre, o il le r~ume et l'apprcie
au point d<! vue de l'cole aut))t'opotogittue. La pubHcation est tr~
soigne les notus des informants tnanqucnt. Lci! usages qui pr<ii-
dent a la nai!MMce, aux exurcismes, aux tlanailles, sont intressants.
Mais le folklore aitiricaiii est de date rcente, de provenances
dherses; son tude doit tre entoure des plus grandesprcautions.

E. tUHSS. On&noieataupeMtitions. Trf<Me~MMo/Af ~men.


<-;< ~/()7o/o~t'M<tMocM/t'oM.Hoston, Grimme and t. t899, XXYt.
Etudf !)Ur [M mthode de recherches.

<
P.-G. SCOTT.
tion
Thodcvilamdhismps.anetymologioalinquiai-

K. tUHHSS. Superstitions and popular beliefa in Ctreek Tra-


gedy(/A.).
BHAXOEH FRAL'D.Superstittonaetam'vivanoea.Y'. Leraux,
1890, in-8'
Sans critique, quetquM renseignements utiles.

\OSSH)LO. MeoMemburgiacheVolkaOberlieferung. Ratset.


Weimar, Hinsturff, in-8", i896.
Tris bon )C. H. du Literariscttes Centratbtatt).
M. t'LALT. Dentaohes liand und Volk in Volksmunde. tn.8~,
Brestau, t897, Uirt.

Rrv. W. WESTO~ Oustomsand Superstitions im th High-


tands of Central Japan ~<. </<<- An</n'. /M<. o/on~ XXVt, t).
A n'tnarquet' surtout les crmonies de magie sympathique pour
produirelit pluie (p 30).

W..A.-P. MARTtX. A oycle of Oathay. Otiphant, Anderson,


Ferrier, Lond., t897, in-8".
tudes sur les populations du nord et du sud de ) Chine.

CMB.: LESt~E MACKAY. From far Formosa. tta atand, ita


People and Missions, etc. (7&.).
L'auteur a fte tongtemps missionnaire dans te pays.
S.-C. WtLSOX. Persian Lita and Oustoms (2 dit., <&.).
P. KHMAXX. VolksthamUche VorsteUungen tu Japan (in
M<A<<M~M /)etwA''M CMc~tcAo/ /*<!<* -Va/Mt'
<~<')' MM<< t'<)<A<~
<-M</e ~t<'<'H< ~t yoAt'e, i8t)' V, Vt, Et!" tivr.).
Contient des rcnsfitjut'<ue))ts utiles sur tes croyance!! concernunt
les animaux.

J.-U. E. SCHMHt.TX. /))<-. /t<'<t. f. 7:'<Aw. !X, p. 213. Note sur


f! VA?! HE~EPP. Bijdrage tt de Kennie van Kangean
ArchipcL /A'!A<'M<'//M(i)) /<)'y(/)'o~< tui </e A'M)Kt<(M)t~fMTaal,
/M<< Mt t'oMo)<!'x/f MM A'<'<~r<<(M</'/t./n~<e). Y), Il, p. 89 suh'
t96).

SCHLEGEL. La fte de fouler le feu (Inl. ~)'c/<. y. ~<An.,


t8M, V, p. tfS-S).
tVte du fiotsticc d'<?t~, <'n Chine et u Jova.

J. SCHKEUL. Phallus OultasinJapan.Yokohama, 1896.


C.HAHX.Dmler undBaubo,i))-8",),ubeck,t896,che fauteur

A. KOHTE. Zu Attischen Dionysos Feston (MM'MM~M


J/MMMM), X. F., 52. 2).

t). v. !'HOTT. Buphonien (/&.).


M. BLOOMFtEL!). On the Frog
Hymn of the Rigveda (Joter-
nal /'</ /tMtf)'t'M<M ot')'MMa< S<'c'<y). C. M. des sance! t898, XVII,
p. n3. Dcrit un charme pour attirer la pluie.
M. VORDEMAXX. Animistische Ansohauungen der Javaner
befh'effa einiger Pflanzen ~c&<M, n'" < et 2~.

HBattMAx~GOSZLEH. Altheilige SteineinderProvinzSachaen


(in A~ex/aAM&MMer, Hergg. v. d. itistor. Kommiss. d. Prov.
Sacttsen). Ma)te, Otto Hende), 1896.
tude fort compX'te.

H. LKOHCY. OoUieraceltiques. Origine, histoire et supersti-


tions. Suint-Mcuc, <8<M, in-8".

t). LtBLEtX. -Le culte des animaux en Egypteetle ftichisme.


~'o~M rtWW/)., <897.
C. TEMPLE. A glossary ofndianterms relating to reUgion,
oustoms, goverament, land. Lond., i897, t.uMc.
H.-C. BOt.TOX. The langage ueed in talking to domesttc
animais (~Mfft'MM /h~/t~M<o~<). W<tsh., tSM.

Il. CHAXT. La superstition dans le HigMand cossais


(~/tM<!H, Louvain, avril <8a?),

Kous tte pouvons que !!ign:))<if les numht'eux tt'nsogncmcnts que


l'un trouvpra sm')cs pratiques dont t'~tudcn'X're duFoftdoredanstM
priodiques suivants VoMma~ of ~f /o/A/wp ~oct'~ (Lond.).
!<cvu'' des traditions populaires(Paris).

M<!)usitte (Paris) o nous
remarquons

M. TL'COMAX~. La Fascination. Continuation d'une enqute


dj longue, mais d'une rudition norme (in ~/e<tMt'<te).

Vt.).)!)UTCK).
~'ar M. )hm!)
Moxs. FRANCESCO MAGAN!. I.'a,attc& Liturgla Romana
(/<!Mn'~f' /.<<x~' fomat'He). VoL I, Mitano. Kpo~ra/M
poH~/MM, J. Giuseppe, t897, in-8', x-2H8 p.

Quoique faite dans un esprit exclusivement catholique, ta


contribution que A. M. apporte l'tude d'une question fort
controverse ne laisse pas d'tre importante. Contre la doc*
trine classique de la science protestante et mme des histo-
riens catholiques, M. M. vient soutenir l'unit primitive,
fondamentale de toutes les liturgies chrtiennes anciennes
et, cela va sans dire, l'identit de toutes avec la liturgie
romaine, qui leur servit toutes d'exemple et d'archtype.
La diversit du rituel des diffrentes fractions de la chrtient
pendant les premiers sicles serait, suivant M. M.
plus
apparente que profonde. Et si une tude compare des dtails
pousse admettre les divergences, un rapprochement des
moments importants des services liturgiques des diffrentes
gtises, montre que la structure de l'office chrtien fut partout
la mme, au dbut. Et sur ce point, sinon sur celui du primat
romain, Il se pourrait que l'histoire dsintresse et mieux
informe donnt, un jour, raison M. M.
Ce premier volumefait partie d'une srie o seront tudies,
outre l'histoire de f office chrtien eu gnrt, celle des difte-
rentes parties de l'office et celle des accessoires de l'office.
Mais on est, ds maintenant, suflisammentectairesur les ten-
dances, les principes, ta mthode de l'auteur. Je prfre ne
pas exposer certains raisonnements par trop thologiques,
o l'origine romaine de ta liturgie est dduite < en droit
pour constater le caractre historique de l'tude de M.-M.
la faon trs consciencieuse (tout sont tudis et critiqus les
textes, l'lgante et vaste rudition de fauteur. Son livre sera
trs prcieux pour les dbutants, au moins. Do plus, comme
it s'agit d'un des phnomnes do sociologie religieuse les
plus importants, de ta fixation du culte chrtien, il importe
que le sociologue soit tenu uu courant de l'tat actuel de la
question.
L'ensemble des travaux qui ont t faits sur ce point se
rduit, en fait, une critique des textes et des essais de
classifications de documents rituels ou historiques,de valeur,
do provenance, de dates diffrentes. Nulle part tes institutions
n'ont t tudies pour elles-mmes. On dirait que chez les
plus illustres des ritualistes contemporains, les de Mossi, les
Kraus, les Duchesne, l'histoire des sources prime celle des
faits, alors qu'elle ne devrait tre qu'un moyen. Le livre de
M. M. n'chappe pas la tradition classique. Des travaux
d'historien, de sociologue, sont d'une ncessit urgente dans
ces sortes de matire. Mais suivons, en mettant leur rang
les questions philologiques, l'histoire que nous donne M. M.
de l'antique liturgie chrtienne.
vequo et ne doutant pas de fauthenticite absolue des
vangiles, M. M. n'a pas de peine dmontrer que, ds l'ori-
gine, il y eut un ordre liturgique, tabli par le Christ, admis
et prescrit par les aptres (p. H, p. K) que ce systme fut
prcisment transporte par Pierre a Antioche d'abord, puis
Rome (p. 63) que Paul tui-meme eut proclamer la nces-
sit d'observer les rgles divines. La messe, des l'origine, eut
une sorte d'unit substantieUe (p. iS). Elle fut le noyau
mme du culte chrtien. Sa structure(prparation la messe
conscration, communion)dut, mme avant la constitution
d'un rituel detaitt, former comme un bloc sur lequel les
actes liturgiques vinrent se grefer mais ils ne firent que la
suivre et l'analyser sans l'altrer.
Le sacrifice de l'Eucharistie est donc le principe du rituel
des premiers ges. Quelle fut son origine? Provenant du
milieu immdiat o vcut le Christ, le modle du service
divin fut certainement juif. La prire, hbraque pendant
quelque temps !p. 40), grecque ensuite, conserva toujours tu
marque de ses auteurs. Les actes symboliques, eux-mmes,
furent emprunta a deux laits du rituel judaque aux rites
du repas domestique,aux rites de lit Paque. t)aus les premiers,
avant chaque repas, une sauctiucatioudu pain et du vin avait
lieu :qidds) ce fut l'origine de la conscration, au moment
de t'ctvation. Et, d'autre part, la crmonie do tu t'aque. de
la communion par le repas en commun servit de modle a
la communion apostotique. Ce fut par une fusion du sacrifice
de la Paque juive et de tu bndiction synagoguate de la table
journalire, que se forma ce foyer du culte chrtien, lit Cent',
telle que la reproduisent les plus anciens documents, et telle
que le Christ l'institua probablement lui-mme.
Les petits groupes des premiers chrtiens, s'ils adoptrent
cet ordre, n'y restrent pas toujours fidt'tes. Des distinctions
profondes se firent entre les diffrents moments du service.
qui persistent aujourd'hui. Des les premiers sicles, la prire
et l'action de grce, t'une avant, l'autre aprs le saint sacrifice,
furent distingues (p. CH). L'ossature tait donc nettement
accentue. Des variations se produisirent, se fixrent. Les
diffrentes glises rpartirent diffremmentles divers lments
du rite. Mais les Hottementsqui subsistent encore n'empchent
pas que le dessein central ne soit reste constant (t!, 3-f3).
La diffrence des formulaires, qui variaient a l'infini, n'est
qu'une difrence de dtail, suggre par les inspirations
personnelles. L'unit do lu liturgie chrtienne, la relative
puret de la liturgie romaine, sont partout videntes et fon-
damentales. Mme la diversit tant vante du rituel gulliean
ou ambroisien et du rituel romain se rduit en somme u
des diffrences d'applications spciales d'un mme principe
(App. t).
Mais si le plan liturgique futle m&medans toute tachrticnt
~p. )77), comment se fait-it que des diffrences s'y soient
introduites ? Les premires qui se produisirent furent pour
ainsi dire quantitatives. Des le dbut, ta messe soicnnelte
(aujourd'hui la messe chantc) s'opposa la messe prive
(basse) Hmportance attribue soit aux services journaliers,
soit aux services de telle ou tette fte, varia ncessairement
avec les glises. Ensuite, on voit trs bien l'origine historique
de chaque liturgie, et comment, sous l'action de causes
diverses, le ptan dvie, sur des points secondaires. La cause
de ces divisions, qui ne dpassrent jamais certaines timite~
(p. t8~), ce furent les liberts hisses, aux temps hroques
do t'gtise, a chaque voque, sous sa responsabilit et sou&
la garantie de sa pit; f'e fut encore la constitution de natio-
nalits rivales la place de l'Empire romain ce furent les
besoins nouveaux du christianisme, son caractre public et.
solennel de religion d'Htat. Les divergences turent ainsi'
ncessaires. Mais si, plus tard, i't~Iise romaine russit &
imposer la rgle catholique, ce ne fut pas, comme le prten-
dent les auteurs protestants, par une sorte d'envahissement
de dpossession des gtises diverses; ce fut par une restau-
ration, claire et consciente, de la pure tradition chrtienne,
laquelle les autres rituels n'avaient apport que de lgres
modifications.
Nous n'avons qu'une comptence infime pour discuter de
pareilles conclusions. It parat cependant au sodotogue que
le culte chrtien M eu ncessairement une stillisante unit~
pendant les premiers sicles. Les formes rituelles sont en
efet plus rigides que les parties intellectuelles et dogmatiques
d'une religion. C'est par le culte surtout qu'on est d'une
socit religieuse. Ces actes matriels constituent le point
d'appui, le centre mme du mouvement de propagation d'une
grande religion. Les mystres auxquels se complaisaient et
taient forces les premiers chrtiens, et qui constiturent trs
tt la messe des fidles, par opposition la messe des cat-
chumnes, durent former un tout organis et suntsammont
identiquedans toute la chrtient. Mais si M. M. doit avoir
raison sur ce point, il n'eu subsiste pas moins contre lui
qu'il y eut, ds le m" sicle, une diversit extrme des tradi-
tions chrtiennes et une indpendanceabsolue des dinrente~
formes que revtit un mme rituel. En somme, la vrit his-
torique cadrera probablement avec les inductions socioto-
giques elle consistera peut-tre dire que le fond du culte
fut uniforme, mais que l'volution du christianisme, son
extension, son organisation en glises locales, furent la cause
de divergences aussi profondes que celles qui existent entre
le rituel catholique et le rituel grec et orthodoxe.
A. HtLLEBRANDT. Ritual Litteratur. Vedtsohe
Opter and Zttuber (&<c~/<CM c< ma~tf r<MM),gr. in-8",
Strasbourg, Trubner,18U6, in <;n<H~'<M~M<trM<t<'M
Philologie M~ .i~r</<MMA'<u/c /<p<'<n<<;t<'K
von Georg
Buhter,Ht"B.,2"Heft,t86p.
Le livre do M. Il. fait partie de cette publication trs
importante du Trait de philologie et d'archologieindienne
que tout uu ensemble de savants ont entrepris sous lu direc-
tiou d'uu des mattres les plus connus, M. le professeur
Biihier. Quoique tous ces traits soient rdigs dans un esprit
strictement historique et philologique, quoiqu'ils aient sur-
tout en vue de prparer uue intelligence plus comptete.des
textes, des langues et des monuments de l'Inde, ils n'en
contiennentpas moins une immense quantit de faits dont la
connaissance plus prcise devra faire partie de tout matriel
sociologique, De mme que le livre de M. Jotty, dont nous
rendons compte ici, doit tre considr comme celui auquel
il taut se rfrer, en ce qui concerne t'inde antique, dans
une tude compare de la famille, de mme c'est au livrer de
M. H. qu'i) faudra recourir, pour les cultes Vdiques,
dans un travail sociologique sur le rituel. Les faits y $ont
recueillis dans les textes mmes, tesdinerentes monographies
qu'il contient sont souvent de simples traductions coordon-
nes. Une connaissance profonde de la bibliographie des
questions, un souci constant d'tre complet, sont des qualits
qui font de ces livres une source do renseignementsde pre-
mier ordre.
L'importance gnrale de la littrature rituelle de l'Inde
n'a pas chapp M. H. H sait tout ce qu'une science compa-
re des religions et de la civilisation pourra retirer de cette
tude (p. I, !h. Il sait aussi tout ce qu'une comparaison avec
les usages correspondants et des peuples aryens et des autres
pourra ajouter de lumire aux explicationsfournies par une
6tudecritiqucdestextes.Ungroupedetravaiiteurs,MM.Ca)and,
Otdenberg, Winternitz, partage les mmes opinions, et l'on
doit, ds maintenant, esprer beaucoup de leurs recherches.
Les quelques exemples, que M. H. nous donne des travaux
possibles dans cet ordre d'ides, sont faits pour exciter l'int-
rt le plus vif. Les rites du mariage vdique, par exemple,
sont rellement typiques, et admirablement dcrits par les
textes pleurs de la marie au dpart, port d'un cordon
rouge, tours faits par les flaucs autour du feu domestique,
jet de semences sur le couple, tous ces usures ont leurs
quivalents indo-europens, qu'ils clairent et dont ils
reoivent de la lumire fp. 4'. Les rites de l'initiation, le
mode de coupe des cheveux, io culte.des mnes, les rgles de
la construction que l'ou retrouve dans t'tnde, sont communs
toute l'humanit (p. 6, 8). Or il se trouve que, daus t'tnde
seule, nous possdons des descriptions compltes, dtaxes
de tous ces actes, que nous pouvons, dans les textes, assister
a un sacrifice vdique, aussi bien, voire mieux, qu' une
messe chrtienne du moyen ge. Combiende fois, en ellet, les
formules ne dounent-ettes pas immdiatement, le sens mys-
tique des actes auxquelles elles se rattachent! L'importance
d'une tude, mme purement philologique des rituels in-
dous est doue capitale pour une science gnrate des retigions.
Je ne crois gure excder ta vrit, ni les opinions de M. H.
en disant que t'tnde est appele uous donner, en ce qui
concerne les religions,, des faits cruciaux au point de vue
sociologique.
It est peine besoin do dire que M. Il. a dbut par une
tude pbitotogique des textes dont il va nous rsumer le con-
tenu. La premire partie du livre consiste en une srie de
dissertations sur l'poque du Migveda, et ladescription que ce
recueil nous donne du sacrince vdique; sur le caractre,
l'origine (p. 20) des livres proprement rituels de t'tnde brah-
manique, tes~YM(tils conducteurs~ sur la composition des
dinreuts ~X~M, leur rpartition dans les dinrentes coles
vdiques, la faon dont ils sont rdigs, la valeur de leurs
informations; enfin.sur les commentaires dont l'rudition
brahmanique do l'poque classique les a accompagns. On
donnerait dinicitemeutide de la sret avec laquelle tous les
renseignements sont classs, les opinions des philologues
discutes et les conclusions prsentes.
M. H. renonce, avec raison croyons-nous, a donner une
exacte description du rituel du Higveda. Malgr la varit des
textes contenus dans cotte collection, malgr la pauvret des
renseignements, il est permis de croire, d'une part, que ds
l'poque vdique une partie du rituel futur existait dj, et,
d'autre part, qu'il fallut une longue priode pour que le mme
rituel arrivtata fixit et lu complexit dont les Stras nous
rendent tmoins. Particulirement suggestif nous scmMe le
paragraphe 4, o M. Il. montre quelle valeur pourrait avoir
unecottection des allusions que la littrature bouddhique fait
au sacriftco brahmanique.
Les satras se divisent eu '/<'A</xt)/<'<t<,en ;TaM~t~<.i!; les
derniers sont les rituels des grandes crmonies (''mxfrH,
rvles) les premiers sont les rituels des crmonies jour-
nalires et domestiques '~('Ay, maison).
De ces deux ordres de textes, M. U. va nous esquisser suc-
cessivement le contenu, et ce plan est excellent. Les Indous, en
ettet, ont tellement rHchi a leurs actions religieuses que, sur
bien (tes points, les divisions qu'ils ont tablies entre les faits
mritent d'entrer directement dans ta science. Eu ralit, rien
n'est plus distinct que les actes du culte domestique et ceux
des cultes des grands dieux. M. t!. suit mme te ptun gnrt
des sntras, sauf en ce qui concerne les j~ft/tM~n~, ou it adopte
un plan voisin de l'exposition ds ''<~<t'< ~tuis de Manou
par exempte et reproduit t'histuire de la vie du brahmane,
depuis sa conception jusqu' sa mort et sou autre vie !p. 4t).

I. Particulirement intressants pour le sociologue et


relativement faciles lire, semblent les expossdes actes
& nous
suivants la crmonie pour l'obtention d'un fils, o le brah-
mane, entre autres rites, donne manger certains grains la
femme qui rpond qu'elle avale une cration d'hommes
l'tabtissement du feu de t'accouche, car pendant l'accou-
chement il faut un toyer spcial pour carter les mauvais
gnies et on doit tonner le feu domestique (p. 4!!) le ~a.
Aot'HMK, pratiqu immdiatementaprs la naissance du gar-
on, o le pre donne le sounte & son fils, assure son exis-
tence heureuse, demande aux dieux de lui donner la sagesse,
lui impose des noms, l'un vulgaire, l'autre secret (p. 47) pour
que (p. m) ce nom ne soit pas employ dans des formules
d'envotement et do magie ( I'/)f<K<!f/M, initiation
faite de huit seize ans, on, pendant et aprs un sacrifice
libatoire, on revt l'enfant de l'habit de sa caste, du cordon
brahmanique s'il est un brahmane. L'enfant entre alors chez
son maitre aprs une srie d'actes qui ont pour but d'assurer
sa fidlit, sa sagesse, son me ette-mme (p. M). A partir de
ce moment, le jeune ~AmftfaWM apprend et rcite la grande
prire brahmanique, la .'Mr<~7, remplit les devoirs de l'lve,
tudie le Vda suivant les rites et les temps dtermins,jus-
qu' sa sortie de t'cote; alors il prend un bain solennel,
revt les dernires insignes brahmaniques, et vit suivant les
rgles morales de sn caste, jusqu' son mariage (~ H~ dont
les sntras indiquent les conditions religieuses. Le fianc et la
fiance doivent n'tre pas de mme clan de pre, ni tre
parents (M~<(<a) do mre (au (!" dfgre), mais tre de mme
caste et de mmo village, avoir certains noms, certMinesqua-
iites. Parmi les nombreux rites. signalons le bain de la
fiance, lit parure de la fiance, la conduite, le sacrifice nup-
tial, ou, A un moment donne, auprs d'un autel domestique
spcial, le mari prononce une formule curieuse c Que la
jeune fille soit carte de ses aeux les rites du retour la
maison, et des premiers jours de cohabitation ( 36 et suiv.).
Le mari tablit le feu domestique avec des rites dtermins,
doit t'entretenir rgulirement, le saluer & chacun de ses
retours. Seul l'homme peut faire les sacrifices domestiques
qui sont tous des p~t/M/M~ (sacrifice cuisson), dont les
plus eiementuiros sont de simples lihations de beurre fondu
et dont les plus rares sont des sacrifices d'animaux f 44,j. Les
sutras fixent soigneusement les moments, lieux, matriaux
de chaque sacrifice tous les jours ( 46) des sacrifices sont
faits pour les dieux, pour les aliments. pour les tres vivants,
pour les mnes, pour le Vda (consistant en la rcitation
d'hymnes', pour les hommes. A chaque nouvelle et pleine
lune celui qui n'a pas pos les trois feux des grands sacri-
uces, oltre un sacrifice spcial. A certaines poques, le rite
varie, au printemps, au commencement de la saison des
pluies (ottrande aux serpents), au moisd'Avina (crmonies
pour le bien des chevaux et du betait).
En outre de ces sacrifices priodiques, des sacrifices
marquent chaque moment de la vie domestique la rception
d'un hcte (S S3), la construction d'une maison ( 54), rites
particulirementintressants pour le folkloriste (p. 8t). Une
srie d'actes symboliques assurent ta prosprit des trou-
peaux. La maladie, lit mort, la crmation, l'enterrement des
cendres, etc., sont galement l'objet de crmonies dont nous
avons rendu compte ici mme, propos du livre de M. Caland.
L'me devient objet de culte, et chaque jour, et a la nouvelle
tune, et certaines poques de l'anne signalons que la
cireumambutationdu foyer se fait de droite gauche au lieu
de se faire de gauche droite comme dans le sacrifice ordi-
naire (Cf. p. l':S) et que les onrapdes du f<-a<M< funraire
sont faites d'ordinaire de g&teaux (pt~a).
H. Les grands sacrifices que nous dcrivent les <'raMh!
xf)<)'aft ont une nature tout autre. L'intervention du prtre
est caractristique. Le brahmane est indispensable. Il y a
plus, le maitrode ia maison loin d'tre l'officiant, est, en tunt

sacrifice, se soumet, donne, paie aux prtres leur <a


que sacrifiant. yy'~f!<w, un simpie comparse, Il assiste au
(sa.
laire!, qui diffre avec cttaqucsacrifice. Les prtres, en nombre
variable, fonctiondtermine, accomplissent les actes mate-
riels, oratoires, mystiques, soustasurveittanco de l'un d'entre
eux, le ~<Y</tM<M. Le sacrifice est un vritabledrame (p. 107),
chaque instant ayant son prtre spcial, chaque prtre sa
mlodie et sa prosodie,qui n'a pu tre ainsi fixe que par une
longue volution religieuse. Tous ces sacrifices supposent
l'tablissement des feux qui y sont ncessaires. H faut lire
les minutieuses prescriptions qui entourent la construction
de faute) < 83 la faon dont doivent tre allumes les
trois feux. et les premires tibations faites, pour voir toute
la richesse du rituel vdique. Aulel et feux servent ds lors
aux sacrifices lillatoires rguliers. H y en a chaque jour (~ (!t),
d'autres se pratiquent a ta pleine et ta nouvelle tune. M. M.
qui avait dj tudie ces derniers dans une monographie
remarquable, les rapproche Cf. p. 111) des culles lunaires
universettenx'nt rpandus, t) y a encore le sacrifice aux
maues, tes sacrifices des mois, des saisons, dont t'un pr-
sente des caractres singuliers, qni dnotent une origine
populaire on y tuait un blier recouvert de mamelles et de
testicules, et t'en faisait se confesser ta femme du sacrifiant.
D'autres sont occasionnels A'"M~<M!, suivant les dsirs du
sacrifiant, par exemple des sacrifices pour l'obtention, ta
multiplication du betait 67).
Mais ptus grands, ptus solennels, plus importants et par le
temps qui y est cousacn' et par le nombre de prtres, et par
la difficult des actes, sont encore les sacrifices o est offert
le M~tf!, lit liqueur sacre que les brahmanes offrent en nour-
riture aux dieux. Avanttout sacrificef' sont faits des pressu-
rages de soma, interviennent des rites de jene, de conscra-
tion, qui constituent lu ~?Aw ''intronisation) du sacrifiant.
Tout le grand sacrifice indou est domin par la nature de ce
rite. L'individu dvou aux dieux, ou achte et on apporte le
.t<MM en grande pompe le prtre le porte, suivi de la famille
entire (restes d'un iMcnoM ~<t~'<'<M), dit M. li. (p. t36).
Viennent alors, dans le sacrifice type, t'~Ht-~ooM, les trois
pressurages, du matin, de midi et du soir, qui, avec les
offrandes et sacrifices d'animaux qui s'y rattachent, tonnent
un comptoxus d'un profond intrt. Le sacre du roi, le grand
sacrifice du chovat, le sacrifice humain bien souvent tudie,
sont aussi trs riches est rites remarquables, Signalons sim-
plement une expression des ritologues indous ils disent
d'un certain sacrifice qu'il a pour effet de < taire monter de
rang te sacrifiant (~'o/<o r~< <'<~f<<'f//<Le livre de CodriHg-
ton sur la Metansie onrirait sur ce point do curieux parati.
tismes. Enfin ie sacrifice universel (x<'f<~M<'<)< 78) est
accompli par le brahmane l'exemple de //tMMK Srf~OHtMtt
qui en se sacrifiant, en 8e retirant de tout, anima toutes
choses on reconnat ta les ides qui formrent ie fond de la
doctrine bouddhique du sacrifice de l'individu au monde.
A cette tude du rituel religieux proprement dit, M. H. a
adjoint un rsum fort court, quoique prcis qu'i) soit, de la
magie vdique. Le sacrificeenenet passe insensiblement dans
le domaine de la superstition. La distinction du mimique et
du religieux n'a jamais t vraiment faite par les ludous.
Mme le rituel des sacrifices les plus levs mle aux actes
religieux les plus purs les actes de ia magie ia plus lmen-
taire conjuration des sorts, maldictions des ennemis, rites
pour s'assurer la victoire, la pluie, etc. Les moyens magiques
se divisent en moyens oratoires, et t'n actes symboliques
)~ les formules de bndiction, les souhaits de sant fp. t(M,
'?()); la valeur particulire attribue a certains mots; les for-
mules de tnatediction; les MxntO'fM vdiques employs, dans
ce but, mais en guise de pures mutopces et sans avoir de sens
bien dtermine; ta rcitation t'cnvers de certains offices:
2" ( 89), l'emploi des rites symboliques pour avoir du soleil,
des amis, une amante, pour envoter, etc., t'emptoidusang
(p. i7). Xaturettement. de mme que les dieux sont meies
au sacrifice, de mme les mimes ( fU), tes dmons (p. H~
sont les excuteurs des ordres des enchanteurs. !i vit sans
dire que la magie et la mdecine ne sont pas distingues
( 92, n" H) et que les brahmanes ont toujours pratiqu la
science des prsages et des oracles.
Peut-tre M. H. eut-ii bien fait de rattacher plus troite-
ment encore la magie au rituel. 11 est eu enet bien exact que
les textes ne distinguent pas eux-mmes, que les faits se pn-
trent. A cette poque, comme a l'poque classique, comme
aujourd'hui encore, le pouvoir magique et le pouvoirreligieux
du brahmane semblent bien n'en faire qu'un. Prcisment,
ce qui rend si utile pour le sociologue l'tude des religions
indoues, c'est cette coexistence tonnante des types les plus
avances des institutionsrelieuses,avec leurs formes les plus
primitives ou les plus absolument dgnres. Les textes eux-
mmes donnent cette impression, que le livre de M. H. ne
rend pas absolument. Les diffif'utts d'un travail do ce genre,
le peu de place laiss ce livre dans tout un ensemble sont
d'ailleurs de bien suffisantes excuses pour l'auteur.
Enfin une remarque peut tre faite d'un caractre aussi
philologique que sociologique. M. H. s'est servi, pour son
expos, surtout des stras. Or, dans ces textes, l'essence, le
principe. t'ettet du sacrittee ne sont pas mis suffisamment en
relief. La lettre du rituel en a, sur bien des points, tue l'es-
prit. Dans les Brahmanas.au contraire, c'est--dire dans la
srie de textes immdiatement antrieurs, les caractres gn-
raux du sacrifice apparaissent infiniment mieux. C'est dans
les Hrahmanas qu'i) faut apprendre pourquoi l'on spcrille, dans
quel but, dans quelles occasions, quel enet on en attend sur
la nature, sur les dieux, sur soi. Une tude suffisamment
gnrale du sacrifice indou ne peut tre faite en dehors des
Brhmanas. Heureusement, une tude faite dans ce but, et par
un mattre, va bientt combler le vide que laissait encore le
livre de M. H.
Nous souhaitonsqu'un(~fjn')'MMi, en allemand,o seraient
traduits les termes sanscrits, vienne faciliter, ceux qui ne
savent pas le sanscrit, le maniement de cette prcieuse col-
lection qu'est le Ct'xs~'Ms (/c<- Mo-.4n'MA('K P/t<<o~<e.

W. SIMPSON.TheBuddhist Praying-wheel. A <'o/<<-c/!OH


o/' .t/afp<-M< <w<WH~ x~tt llre x~w~o~m o/'</<e ?/)?<. aM</ c<t'-
''M~- tHo<-H't<<f! ttt ('tMfot)t << t'cft'gtoxit WfMtff. (La
roue
prires bouddhique.)Londres,t8')6,Macmiiian~94p.tn-8").
A proprement parler, l'auteur ne tend qu'ai nous fournir un
ensemble de faits. On dirait un collectionneur qui met les
pices qu'il a rassembles ta disposition du pubtic. La cons.
cience qui a d'ailleurs prside la runion de ces matriaux,
et l'ardeurqui y a t mise pendant une longue srie d'annes,
sont notables. M. S. est arriv condenser dans ce livre
presque tous les faits connus sur la roue symbolique et la
croix gamme, eten rassemblerune somme trs respectable
sur les mouvements circulaires dans la plupart des religions.
t) a, pourtant, des omissions. M. 8. oublie qu'il y a eu une
y
croix gamme au Mexique. 1)'autre part, l'numration des
eircumambutationsdans les diffrents rituels est loi d'tre
exhnustive processions catholiques, promenade de la loi
dans les synagogues, etc., sont ngliges, sans compter les
choeurs antiques et les dauses que M. S. reconnatt tui-mme
n'avoir pu tudier.
Le titre c La roue prires bouddhiques indique plus
l'occasion que le sujet de l'ouvrage. M. S. a t, dans le
temps, pendant un sjour ta frontire thibtaiuo, fortement
intresse par les moulins prires si nombreux qu'il y t'en*
contrait il en a achet deux; it a rnchi. s'est informe des
autres cas bouddhiques du mme usage 'Chine, Japon, Vit).
Puis Il a remarqu que le nom thibtain et sanscrit en signi-
fiait <' la roue de la loi Le soi-disant moulin n'tait donc
qu'un cas de la roue symbolique. U remarqua encore le
sens toujours identique des mouvements de la roue, qui
tourne constammentde droite gauche (p. 4~ dans le sens du
mouvement du soleil, dans celui de presque tous les mouve-
ments circulaires des tndousetdes Celtes autour d'unaute)
(p. H); de l cotte tude gnrale.
La roue prires consiste essentiellementdans un cy.
lindre mis en marche, soit par une ficelle que tire le lama,
soit par tout moyen, l'eau, les passants. Ette porte une for-
mule uniforme, exprimant t'adoration au Buddha. On ta tourne
dans le mme sens que celui o les lamas dansent, ou font
leurs tours do la statue du divin ascte. Or cette roue, bien
qu'elle n'apparaisse dans le rituel qu' une poque tardive,
existait dj dans la mythologie bouddhique la plus ancienne.
Reprsente sur les piliers des )!(OpM de Barbut et de Sanehi
(n"siecto av. J.-C.), elle est la roue do lit loi, celle que tourna
le Buddha lors de sou enseignement, celle qui est < te grand
cercle du pouvoir et de la rgle Hien d'tonnant si dans la
dgnrescence du Bouddhisme, dans ce mouvement o il se
rduisit aux pratiques extrieures, l'imitation matrielle de
l'acte mythique du Buddha devint chose salutaire. Ce sym-
bole do la roue avait t centrt dans le bouddhisme, la
forme du temple s'en dduisait et les <:<wp<M les plus fameux
affectaient la forme de disques et de croix gammes (ch. n~.
L'analyse des origines de ce symbole va nous indiquer sa
signification. La roue de la loi faisait, avant le bouddhisme,
partie du systme brahmanique lui-mme; et c'est a celui-ci
que les Jainas aussi t'empruntrent. D'autre part, le sous des
mouvements circumambutatoires, leur vertu, sont les mmos
que dans le bouddhisme ou doit tourner autour de l'autel
suivant lu ~w/ftA-~M, c'est--dire eu ayant i paule droite au
centre et d'est en ouest, dans le cas o une orientation serait
ncessaire. Or tel est videmment le chemiu du soteit les
tours faits ainsi sont faits sou imitation. ))e mme, la roue
est aussi un symbole du soleil roue illumine, roue de
bonheur, elle est le signe et la productrice de la victoire et de
la fcondit. Heprescntee d'abord comme un disque plein,
puis comme une roue avec ses rayons, en nombre pair,
variable, multiple de quatre. elle vit ses rayons se restreindre
ce dernier nombre; puis, le tour de la roue se fractionna,
il y eut un vide avant chaque rayon, et ce fut la .tM.<'< la
fameuse croix gamme, le porte-bonheur comme dit son nom,
reste du disque qui reprsente le soleil (ch. n).
En t'~ypte, en tsraP). dans le culte de la Mecque, citez les
Grecs, les Celtes, M. S. retrouve la mme orientation des
marches rituelles. Kn Grce, comme les dcouvertes chaque
jour plus nombreuses le dmontrent, en Gaute comme le beau
livre de AI. Gaidox (/ </')< ~<~ << .wM et le .~M)/w<wMe
de <'oc) t'tablit, dans lit mythologie germanique,dans le
folklore europen, tu roue (souvent enflamme), le disque,
la croix gamme, la croix reprsentent le soleil victorieux.
!n fait pour ainsi dire dcisif, presque gnrt, c'est que,
si les mouvements circulaires accomplis en t'honueur des
dieux se faisaient d'est en ouest, et de droite & gauche, les
dmarches accomplies en l'honneur des morts, ou au courant
d'actes de magie, se pratiquaient d'ouest en est et de gauche
droite. La gauche fut toujours de mauvais prsage: les
messes noires furent gaucheres, comme si les circumambuta-
tions rituelles correspondaient au monde de la lumire et de
la vie et les circumambutatious contraires correspondaient au
monde des tnbres et do lu mort.
Tels sont les faits que l'on peut extraire de l'expos de
M. S. La dernire partie me semble plus durable que ta pre-
mire. L'auteur avait pour se guider le livre de M. Goblet
d'Alviella sur la .M<<!(Htdes jtt/w/M~. Le problme en tout
cas est intressant. L'imitation des mouvements, non seule-
ment solaires mais encore astraux, a du faire partie do tout
culte de la nature un peu dveloppe. Ce qui donne une grande
vraisemblance cette hypothse, c'est que la division du
monde en rgions suivant les points cardinaux est probable-
ment une ide fondatnentate parmi les notions religieuses.
Sans compter que les sauvages ont ou ont d avoir un sens
de t'orientation extrmement prcis, la conscience sociale
attribuait telle ou telle nature religieuse a telle ou telle par-
tie de l'univers. Une place du cie). de l'atmosphre, de !a
terre, des eaux, tait le monde des dieux, une autre le monde
des dmons, une autre le pays des morts. Cette rpartition du
monde en rgions plus ou moins favorables l'homme qui les
contemple est mme un de ces cas o fonctionnent immdia-
tement les lois psychologiques des reprsentations sociales.
L'acte religieux qui eut partout pour but d'assurer lit vie
et te bien de la nature, des hommes et des dieux, devait
s'associer ces bonnes rgions et aux mouvements des
astres; l'acte magique, terrible et funbre, devait s'associer
au contraire aux mauvaises rgions, aux esprits mchants,
aux morts.
Mais si les faits reunis par M. S. sur ce point ont cette
valeur, la connexion qu'il tablit entre le moulin a prires
bouddhique, la roue de la loi, les mouvements circulaires
paraltra extrieure. Sans doute il y a une confusion dans
le rituel thibtain sans doute aussi le sens du mouvement
de la roue est bien le sens religieux des mouvements mais
la tradition ne se trompait pus, qui partait d'uu moulin
prires et non pas d'une roue de la loi. D'abord, c'est tou-
jours un cylindre, et non pas une roue. Ensuite, sur ce cylindre
est reproduite la formule vocatrice du Buddha, le OH< indou
qui fait atteindre au Jaina le ciel, au brahmane le Hrahman,
au bouddhiste le Nirvana le mouvement constitue donc une
prire. D'autre part le bouddhisme thibtain ou chinois
fourmille de faits similaires l'arbre prires dont les feuilles
s'agitentau vent pouradorer le Buddha, les drapeaux prires
dont les villes s'entourent pour chasser les mauvais esprits,
les clochesqu'il est mritoire de sonner, tous ces instruments
sont l pour assurer la constance de la prire. Le bouddhisme
a voulu que toute la nature prit, puisqu'elle est tout entire
anime. Le moulin & prires n'est qu'un des moyens invents
pour raliser cette ide. Et d'un autre point de vue, en mme
temps qu'un ramnement, le moulin a prires est une rgres-
sion de celle-ci elle s'y est matrialise, et le bonze et. le
lama qui, maintenant, tournent pendant leur vie un moulin
prire acquirentles mt'ites qu'autrefois,dans le bouddhisme
classique, lit muditution religieuse seule procurait:

XOTtCHS
~t')t)!:)tHSt:TH)Tt'Kt.

< MAX M)').).Htt. On Anoient Prayers (in


A'fwt'f/c ~t/t'M <
MCMOt'y uy/<<-< ~t~ A'H/f< m), hy U..A. Kohut. H'r)in, S. Cat-
vat-yand<<X9T,in-ii",p.i<;tsuiy.).
ttans o'ttc h''))'; et )itt~rair<' h'un d'uuvt'rturc d'un cours sur lu
prit'r<M.M.chut'<;h''at'))M<)ui.<<'t'ra)ad<')nM))tt'~vo)utio)),<'ti' i!
d~t!(t)!<;r les traits f~mtnuus d''s diu~n'ntM furo)' (;u*)t'' M rcYt'-
tues. A('[di<tU:mtsa divifion <k'.< t'<;)tjduus est t'thnn)tn" natiuntdt!
individm'ttcs. )'i)tust)' f'm'tat''Ut' d'' ht scioto' compitn'')' df.< t'cti-
gion:: d~tnutttr' ';)t ~tudiaot tfs t'c)i{!tons du pt'onh')' !)'?< t'Utti-
versuli~ de la pt'ict'e-dctntmde fp. 13), qu'etto s'adtesi)', cumm'* e))
t.W'ct' <'t cho! h'~ HoUt'ntots. aux fSjtrits mattres d'
)it'ands ph~nc'
mnes nitturfis uu hi<'n, Mottut)~' en ~tau~ie, aux esprits tut(''tuix"'
des uttt;(''t)'t's (;)).
Mais )M pt'ie)'~ <'st, & c'' stad' ittt~~t'ativf'sitnj'if !tcco)npa):))t'tn<'t)t
df i'iK'tc n')ij<i<'U![ fjui, lui, fu)'t:f )'' dieu A at!ic duos un s<:)ts d~tct-
minu. Datis les rcti~iutts uatx'Mitips, t'n <tt't'(;e, A Munn', aux tttdt's,
t'))t')')'f,)a)'t'it''t't't:u)Ht)'))'aatuit'un''valeur:tt'th'<<'tau~i
une Yu~'ut' )nft'!))t'. t'n 't'm';nt hmniun t'st pn'st'ni. tians tuut
ttynu)'' titu)');i')U' )<'s )))'if'r<'< drs j'r~tt't's. ccth's des h''rsd'n<)t)))''rM
Mprhm'nt, il est yrai, uu'' sortf d<' cuntrat. t))ai<; auMi lit cunviHtion
et la j'i~tc (p. 25 suiv.. Mai" lu v~)'itM)'h' tt"raison df in prifrc se
produit d:)))s )''s D'ti~iuns indhidu<;)h's. Uud))istn~ Chriii'taniiitm'
c<' sottt ')h's o )'tM<' d';mat)d<; d<< i'or';<'s pour ia tutte, pt'h' pouf
)at)~ttte de la vif, et surtout devient humhh'et''onOaxte. En
somute, cuuctut M. M. Muttct', t'~ohttion tuut enticre consiste dans
c<'ttf oppositiot) ftttn; la pri'')' pritnith'c 'tt)i curr~pund a ccUn fur-
muh! < <)U' )na vutuntt' soit fait'' ''t ta sph'ndide~xprcsiiionjud~u-
t;hrt!tiet)n'' que lit vutunt<! soit faite
0. STt MEL. SamoanischeTexte. Unter BehMfevonEtNge-
borenen geaammeit und (tbersetzt. Hfr~. v. t- W. K. Miifh-).
(t'ern~. M. < ~<. j/<M. t't!M< n' M., a-t n. )!< in4". Bc<-)iu
Dich'it'h ht'imt'r, iMM.)i'u)))i''atiun tr~'s hnpo)tat)t<' tant au poia)
de vue mythui~iqu'? qu'au puiut de vue de lit religion, des
cultes, des prit-rc: cht' h: Satnoaos.
G. WOHHEHMtX. ReUgionsgescMchtUcheStudien zu Frage
derBeeinOuasaog desUrchristentuma duroh das ant&eMye-
terienwesen. Bt'tti)), mx'rittff, 1890, in-8". \)))-iSO p.
Fait en mme temps que le tin'e d'Anrich sur le m~me sujet et
Mmve aux mt'-)))<'s)-n)tuts.th'<'t-h'rht ptt)'<'ttt)?qu:t-xi!it'Mun-
les ntyst.')-('A.('))n''t!<'n.<<-t)<.s))jystwst:r<cs;t-tc()u<ut
a
iun'u'ncf'histuritjm'.t'ufi'onnfdiss'rtutiottsurtt'motJtY!');.un<-
Htif~ XASSH')'.
Les Apocryphes thiopiens, tmduits frm)-
':< (-tt-H.HttS('itttn'tjt).-ntd<'J.-C.A.('sdist;i))h'<'t))ri''rM <-<)

mat!i<)m's.pHt-is~)<i))t.du)!))(!(t)t('Sci!'))t'c),)8M,3<i().it)-)8.
)'<'s)'rh'-r)'<))t!)M")u<'<t))t(.M.))!t<s'-tn<tt)sd~))t)''h~<h(nsunftr{"i
t'eitett'itdttctio)),et suivant mtt;hn)xtn''s)h'ur''ux.'t'ntjt)usitnmM-
diat<-)t)<-)tt))tt't'<'s<)nt<'s(jUt-h's..j.:))st')t;n'-m('nt~t.L)'s))ti!t-ps,
surtout :tp!tt-tir du ht )V'n')-cntd.'s<;x(-)nt)tes.:M'k-)).'fd<)tnti.).
nis)nt'd<-i'it)voc!ttitj)t)'td''iut'itr<)nd()t)t)!t)<m's<'(-thttnystittu<'
n'ont foit,en .\byssini<(ju''r<'cuun'iruu)u)td('rin)iti)'.

<S. H.UOtTT. Th EarUest Christian Hymn. ).ond., iM7,


iu-8".

HEv. [.S. WAHXKX. The Dies rso. t. y/te /M. ).on()., <89U.
Sk''tttt)).:tonandS<')js.
F.-K. BHR.ttTM. ))onnf mu- <ditiun )'etU!n~tmbt<- des textes
Ittm-)!i~m'!i. Ox)'. (:)!tt'<'n<to)t t'tt's.'.

H. WE))'tt'r. Das Shinto Gobet der Grossen Roinigung.


(.)/t/i. < f/fM~t-Aft) CM~. /'<Vff~Mr KM<< !Mw<)tf/c ~t-M<
M 7'oAt'o, N8" th'r.)
t'B. t:M()XT. -Textes et monuments figursrelatifs aux mys-
tres de Mithra. t'!ic. Ht et t\ <40), 18MC.
ncuA t'LAtX):. -De iaitiishumUibusmirabilibusqtteper secula
incremontis oultus B. Mari Virginis, disquisitio historioo-
liturgiea (in Slud. ..<<. M.! ~<-M/t't-/<MM-M</ </<) Ct~fr-
</<'
o'<-<M!<'t).uu. X\'ttt, th. t.
J. WATTEtUCH. Der Consecrationsmomentim heUigenAbend-
mahl und seine Gesohiohte. th-idcthft-t!, (:. Wioto-, tSM, in-8".
Il. SCH.\t't<.
Das HorrenmaMnach Ursprung und
tung. BcrtctstniU))), <!itt<'Mtu)t''i)t), )8i)*? ;t)~u)ojti(tu<'j.
Bedea-

~MA~K f.

LE t!LAXT. ?80 Inscriptions do pierres graves, )896, Leroux,


Paris.
Htabtit t'existetMM d'un fot-tnuhmc mo8"tuc.
K. Ku-:S)':WHTT)-:H. Der Oco~ttsmus des Alterthume, H.ctc.
t.pip!t8M.F)')'d'r)L-h.
t.. KHn.):XH):CK. Der OceultismuB der Nordamerikanischen
ndianor, ib.

\t<.MYTHKM
fw MM. MAms et th)'t:M.

H.UZEXER. Gottern~men ~M Moms des ~<'ffu-). Versuch


einer Thorie der Meiigiosen Begri<sbi!dung. Bonn,
Cohen, !??.
Nous sommes heureux qu'un concours fortuit de circons-
tances nous oblige dpasser, eu faveur du livre de M. f. le
miHsime prescrit en principe aux collaborateurs do l'~t~c
j!0f!'0~/<
Ce livre est le chef-d'uvre de IH science compare des reli-
gions pendant t'aanee passe. La profondeur, la sret y
egatentta generaiite des vues. L'auteur tui-mme a conscience
de la mthode qu'il suit Plus profondment on fouille, dit-
il, plus les rsultats auxquels on parvient sont gnraux
(VU). L'exploration presque comptto d'un ensemble de faits
qui apparaissent bien limites, mais que l'analyse ramne
leurs principes, conduit aux thories les plus neuves et les
plus justes sur la nature du polythisme, ses causes, son vo-
lution et sa tendance vers le monothisme. En fait, le sujet
prcis qu'a choisi l'auteur est plutt tel par mthode que par
intention c'est la vie des notions religieuses qui est tudie
travers les noms des dieux c'est la manire dont elles se
multiplient, s'agrgent, disparaissent. M. U. sait la place
qu'occupe cette recherche daus une thorie gnrale des faits
religieux 'Vf) elle constitue un essai sur la formation des
concepts religieux.
D'autre part, la mthode ette-mme est suffisamment gn-
rale. Le champ des investigations, c'est tout le groupe des faits
religieux que prsente la civilisation indo-europenne. Non
la dsire
pas que la science compare des religions, comme
M. U-, soit la mythologie de M. Muller et de KHhn. Elle ne pr-
tend nullement reconstituerla pense religieuse des Indo-
Europensavantteursparation. L'cole phitotogiquoachou
en tentant de retrouver des faits historiques
l o il n'y avait
que des concordances (g f). Mais on peut en appeler d'une phi.
lologie une philologie mieux informe. La parent des
con.
cepts religieux ou autres, paraltte a la parente des langues,
favorise certainement les comparaisonsdansie domaine indo.
europen. On est sur de rapprocher des phnomnes de mme
Heure )a dfinition et l'analyse d'une part, te groupement
des faits et l'induction de l'autre, peuvent tre garantis
chaque instant, au moins par des quivalentsphilologiques
C'est doue sur un terrain solide que M. U. s'appuie
pour tenter
une histoire des reprsentations religieuses, qui soit une des
chevilles ouvrires de ce grand difice d'une histoire '< de
l'volution de l'esprit humain On pourrait, en forant
peut-tre un peu les choses, aiter jusqu' soutenir que H. U.
suivi une mthode profondment sociologique. Il tendu a
a en
effet a dcouvrir, non pas tes notions religieuses individuelles,
mais tes notions sociales. A'o&M t-M xoc~ M~M r<M rt'A<'
telle est lit maxime que M. U. u mise en exergue de
son livre.
Le moyen qu'it a choisi do parvenir aux choses sociales tait
admirablement adapt. < Le langage, a dit un autre philo.
togue, M. Meitiet, est une ratit sociale.. Rien de plus tgi-
time que d'tudier un fait social dans ses connexions
avec un
autre.
L'tude du langage est d'ailleurs un des biais
par o l'on
peut le mieux considrer les reprsentations religieuses
comme des faits objectifs. Eminemment social, le mot prte
aux notions sa massivit, sa fixit; on le voit s'attrer avec
elles, et ses flexions suivre leurs diverses applications
on le
voit rester vide de sens, puis s'adapter l'expression de
velles ides, s'associer & d'autres mots
uou.
comme les ides
s'associent aux ides. L'tude des notions religieuses faite
travers les noms des dieux devra donc,
par une sorte
d'analyse progressive des couches philologiques et intellec-
tuelles, essayer d'abord de retrouver sous ta multiplicit
dos noms l'unit de l'ide, < rechercher ta carcasse du
con.
cept sous ses superftations; puis, les diffrentes ides
religieuses dcomposes et les lments retrouvs, arriver
une classificationet une dduction gnrale;enfin voir l'vo-
lution de ces ides, leurs fusions, leurs rgressions, la faon
dont eties prludent de nouveaux progrs ou persistent dans
d'autres systmes.
Une sorte d'hypertrophie conceptuelle entoure la plupart
des notions mythologiquesque l'antiquit nous prsente. En
le 0.-
effet, les noms apparaissentd'ordinaire groupes soit que des
divinits fminines aient t symtriquement opposees & des
divinits masculines. probablement identiques M l'origine
soit que, autour d'un nom ~ 3), une srie de patronymi-
ques se soient disposes .ainsi dans le cas d'Hypers. Hyp-
riou, Hyprionide) ( ~), ou que la pense populaire ait inter-
prt pur un nom aucestrat des noms supposspatronymiques
(ex. ,t</(, mre des .t(M(/(M). D'autre part, les mots et les
ides viveut. Ils tombent en dsutude, ont besoin de renou-
vellements venus de l'extrieur. Souvent nue mme ide rap.
parat rajeunie, sous un nouveau mot. Et deux noms de
dieux qui semblent fort distants l'un de l'autre ne corres-
pondent qu'a une seule et mme ide religieuse, a un seul fait
social. Ainsi l'analyse superbement conduite par M. il. nous
fait voir comment la mme ide du Pampuas, celui qui illu-
mine tout, s'exprima par de trs nombreux personnages
divins. Dans tous les cas. c'est un mme concept qui se ramifie
ea personnifications secondaires (~ 8).
Toutes ces appellations multiples, ces homonymes et ces
synonymes,'uesontdoucpas desfaits de suraddition. Cequi les
rend possibles, c'est l'obscurcissement de la notion primitive.
Si celle-ci tait reste claire, si le seus du mot tait rest plein,
aucune prolifration,aucune adjonctiontrangre ne se fussent
produites. Or les noms des dieux ont t absolument compr-
hensibles l'origine. La signification du mot correspondait
l'ide, et l'ide avait une fonction dtermine. En d'autres
termes, chaquedieu correspondait auue classe dtermine de
faits, rpondait un ordre spcial d'vnements, naturels ou
humains, y prsidait, tait l'objet du culte qui donnait
l'homme pouvoir sur eux. Les dieux furent primitivement,
autant que les dductions philologiquespermettentdetedire.
des dieux spciaux (A'oH<~ti~<T). Ceci est le plus vident pour
le plus grand nombre des dieux romains, surtout pour les
petits dieux des <H<~t<nmfK< qui se rpartissent entre eux
toutes les chosesde !a nature et des hommes dieu du premier
coup de charrue, dieu des mauvaises herbes ? 6). Do mme,
les renseignementssi imparfaits que nous possdons sur les
dieux Lithuaniens nous les montrent avec des noms parfaite-
ment ctairs, des attributions nettes qui embrassent pour ainsi
dire tous les faits qui peuvent intresser l'homme et exciter
ses besoins religieux ( 7). Le fait est moins patent en ce qui
concerne la Grce et doit tre dcote par l'analyse. Mais ds
qu'une recherche un peu attentive s'exerce, les cas de
ce genre
s'aperoivent en fouk. L'Attique comme Home eut
ses petits
dieux spciaux. On ai)nit adorerdesdivinits charges de faire
pousser les Heurs et mrir les fruits. Ces divinits formaient
peut-tre le fond de toute lu tgende d'Athnes, de Cf'crops
etde sesnttes, d'Hrechtheuset d'Erectttttion, qui, eux.mmes.
taient de ia mme nature, i) y eut le Mdecin, le dieu
Mdecin ( 10; dont le nom d'Ashtpios. tui-mmeanatysabte
(p. )G8!, n'est qu'une des multiples xppettations, dont les
autres formes sont Juson, Jasos, Paian 'te purificateur), Chi.
ron. et toute cette srie de divinits a nom en :i-
Modes, o se constatent toutes les variations imaginables
Mdos,
drivations adjeetives Mde), particuies ajoutes Potvmede
D'autres dieux furent desprotecteurs spciaux du bien pubtic
(Soter, Sosipotis, Soxon) et de ta cite (i; -)~. Leurs
noms dsi-
gnent leurs actions; les textes et les inscriptions les men-
tionnent comme indpendants des noms des dieux auxquels
la mythologie savante les a accotes,
comme des qualificatifs.
Ainsi, un certain nombre de surnomsdesdieux sont des restes
de petits dieux spciaux ( 13). Mme certains qualificatifs
purement locaux qui semblent designer simplement le carac-
tre tocai du culte adresse tel grand dieu, cachent
au fond
un ancien dieu local auquel ce nom tait propre. Ainsi, avant
une 'n~ 't~ il dut y avoir Argos une 'nv,
D'autres, devenus de simples esprits comme Faunus (Phaon)
(p. ~34).

(p. 3~, ont t certainement de vritables dieux, ont


occup les champs et les bois. D'autres qui ont t depuis
considrs comme des dmons et des hros, ne furent
pas a
l'origine des mes de morts ce furent des dieux dont le
cutte fut expliqu plus tard par t'hrosation
ou la divini-
sation d'un individu.
Non seulement les diffrents genres d'vnements, mais
encore les diffrents moments de ta vie furent domins pat-
des divinits diffrentes. II y eut des divinits occasionnelles
(.4M~<'N.(-~<), en plus des dieux spciaux. A Rome, en
Lithuanie, dans les coutumes do la moisson de
presque tous
les peuples europens, ils furent rvrs certains moments.
lors de certains actes, pour certains besoins. En Grce,
t'Eiresin fut t'quivalent de la dernire gerbe du folklore
germanique, comme Mannhardt t'a montre. De mme,tes Eros
furent les esprits protecteurs de chaque amour en particulier
( tK). La dissertation que fait ici M. U.
sur la notion du o~
de son intervention momentane, de la faon dont i) peut
saisir et guider les hommes est un modle du genre (p. 192).
Il est possiMemaintenant de chercher le fond commun sur
lequel se dtache ia personnalit vague de ces dieux. Or, der-
rire toute cette foule de dieux, d'esprits, de dmons, qui
peuplent t'espace et occupent le temps, c'est un mme et
unique phnomne que le cuite cherche il atteindre la
lumire, qui, elle aussi, remplit et vivifie l'atmosphre et
mesure letemps ) i2). L'adorationdes phnomnes lumineux
est un fait dominant c'est la marche du soleil (lui dtermine
les moments o doivent s'accomplir les actes; c'est l'orienta-
tion, la distinction du droit et du gauche, du levant et du
couchant, qui dterminent le lieu du cuite (p. t9t). II y a plus.
les cuites naturalistes eurent pendant longtemps la plus vive
innuence sur la moralit, et ils turent, jusqu' des jours trs
proches de nous, les agents tes plus actif." de la morale reli-
gieuse. Le soleil et le jour taient pris tmoin lors des ser-
ments ils pntraient la conscience mmedu mchant, taient
prsents aux sances solennellesde justice (1!)4-18! Ht, pour
invoquer un ordre spcial de faits, tous ces caractres se
trouvent runis dans le concept de Zeus (le ciet et aussi dans
le concept analogue de Aux' dieu de ta lumire et de ta jus-
tice.
Ainsi, ni l'animisme et ta notion de la persistance des mes
aprs la mort, comme le voulutli. Smith ni le monothisme
primitif, comme t'ont prtendu \etckeret Schelling. ne sont
ta base du polythisme )~ Le fond en est un polythisme
primitif, caractre naturaliste, fort peu religieux. Les dieux
n'avaient que des formes vagues, avec leurs noms a la fois
trop taches et trop prcis, signification trop troite et trop
peu vive. A vrai dire, il n'y avait tu qu'un minimum de
croyances. Celtes et Ibres pouvaient tre dits < athes et
les Grecs pouvaient croire, comme le raconte Hrodote, qu'ils
ont ct<' longtemps sans nommer les dieux et ont appris des
Phniciens le faire. Toute la race indo europenne dut pas-
ser par nn stade religieux on ni les noms, ni les notions des
grands dieux personnels et actifs n'existaient et o la vie des
choses et la morale des hommes n'taient garanties et sur-
veilles que par cette foule indfinie et peu forte des petits
dieux. Les religions celte, romaine, K''<*cque, ne sont qu'a
des dc~r'~s plus ou moins loignes de ce type religieux.
Mais, de mmequele progrs linguistiqueconsistait passer
de termes trop spciaux ou trop vagues des termes plus
gnrauxet plus prcis, substituer par exemple & un tan-
gage trop concret et d'un emploi vague horade ses restreintes
acceptions comme le tangage des chasseurs), uue langue de
termes abstraits, suffisants pour une analyse prcise (t8); de
mmo le progrs des notions religieuses consista dans ia for-
mation et le dveloppement de reprsentations distinctes et
gnrtes et qui fussent on mme temps des reprsentations
de dieux personnels. Ici encore, le rle principal fut jou par
l'ide de ia lumire. Apollon, par exempte, fut celui qui chasse,
talumire qui purifie (p. ~H') il devint alors le sauveur, l'car-
teur, et le divin latros devint ou son fils, ou un simple hros,
ou un de ses attributs. Mais ceci n'tait possible qu' une
condition qui dpendait de l'tat de la langue il fallait que le
sens primitif en vertu duquel la notion religieuse s'appliquait
une classe d'objets, fut perdu. Le nom put alors devenir un
nom propre. Ht ta divinit, jusque-t engage dans les choses,
fut un esprit indpendant d'elles, personnel et dominateur.
Ds que ces notions furent formes, il leur suffit d'exister pour
se dvelopper. Elles exercrent une vritable attraction sur
les reprsentations des quelques dieux dont te nom n'avait
pas perdu sa valeur primitive et dont la fonction tait encore
claire. Les notions d'esprits vagues, spciaux ou occasionnels
ne pouvaient rsister des notions ainsi constitues. Elles
fusionnaient,donc. En vertu mme des lois de la pense, le
syncrtisme eut prcisment pour but d'attribuer chaque
grand dieu les fonctions des petits. Le polythisme tendit
ators vers le monothisme. Le syncrtisme est ainsi l'un
des stades de transition les plus importants de l'histoire
religieuse, il est la prparation la croyance en un Dieu
(p. 340). Ces notions elles-mmes ries grands dieux, combi-
nes avec celles de tout ce gigantesque systme de petits
dieux, fusionnrent en effet dans des concepts nouveaux
celui du dieu qui est tous les dieux Panthe, Pan, et, d'un
autre ct, celui du dieu qui t'est, ptus que tous les autres,
le Of:; ~<!Tt. dont le culte favorisa tellement la propaga-
tion du monothisme vanglique.
Mais, dans le christianisme, les anciennes notions persis-
trent, rapparurent. Les saints du catholicisme avec leurs
attributs et leurs pouvoirsspciaux ne furent pas autre chose
que le retour ouensif des dieux spciaux des anciens paga-
nismes (S). Mentionnons, pour terminer, les deux disser-
tations de M. L'. sur les noms titeophores dans l'antiquit, ot
sur les concepts abstraits divinises.
Lu dcouverte par M. L'. do ces deux genres de dieux, dieux
spciaux, dieux oceasiounets, est une de celles qui passeront
dans ht traditiot scientifique. C'est elle qui forme le centre
du livre et qui eu est le vritable gain. Les faits que l'on
pourra considrer dans le mme esprit ne puurrout pas man-
quer d'en tre de nouvettes et clatantes confirmations. Les
auges du judasme sont, eux aussi, d'anciens petits dieux,
et l'tude de leurs noms, suivant ta mthode inaugure par
M. L' sera certainement fconde. De mme un bon catalogue
des dmons auxquels crurent les Indous, uue liste (comme
cette de M. Crooke; des diffrentes < divinits qui prsident
tel ou tel fait dans l'Inde actuelle, fourniraient une am-
plification importante de la thse de M. f. Celle-ci est d'au-
tant plus juKtequ'etteso trouve d'une application universelle.
Le polythisme consiste prcisment dans cette muttipticatiou
des dieux pour tous les besoins de la vie humaine. Ainsi les
Ngres adorent lit petite veroie, comme font aussi les Hin-
dous, et ils ont des dieux gurisseurs comme les Romains eu
avaient. Lefaitest donciucoutestabte. Peut-tre mme devra-
t-on donner encore plus d'importance aux dieux occasion-
ueis. Il y a des dieux pour tout, disaient les Romains et
les Cres c'est prcisment le caractre du polythisme. Mais
ces moments de ta vie sont aussi nombreux que les diffrents
actes, il dut donc y avoir de plus nombreux dieux occasion-
nefs que M. r. n'en indique. fJc plus, deux classes de dieux
devrontprobabiement treajoutees, irreductibiesaux autres
les dieux locaux, esprits de telle ou tette place, bois, vitte ou
maison, et les dieux individuels: car ieor: feCeuius et
la Juno ne sont pas du tout des dieux momentans ils suivent
l'individu toute sa vie, ils sont son double et sou frre diviu.
Ils correspondent au totem individuel, au flicite protecteur
que chaque Xegre se choisit son initiation. Ceci fait. ou aura
peut-tre une classification des divinits du polythisme.
Mais une iacune existe dans le livre de M. U. Les noms des
dieux ont, M. f. ne l'a pas remarque, une fonction religieuse
qui a d les allecter. Un nom est, religieusement, une partie
de t'tre qui le porte. Le conua!tre et le prononcer, c'est avoir
un pouvoir sur cet tre, homme ou dieu. De l, le rle du
uom dans l'invocation etta prire. D'autre part, prononcer le
nom d'un dieu puissant, dangereux, c'est vouloir sa prsence,
et cette-et est redoutable. l<o nom est sacr comme le diou;
aussi lie peut-il tre dit hors des crmonies ncessaires, H
(Mut mme tre bien sur de la bienvoiltaneede la divinit pour
oser h) convoquer. Do ta l'interdiction de prononcer }e nom du
dieu. L'tudede ta valeur ritueiic du nom eut pu mener M. U.
des vues importantes sur la relation du rite et de la notion
religieuse. Tant que le rite agit par lui seul, sympathique-
ment, il n'existe pas d'agent diviu distinct des choses elles-
memes ainsi les sauvages qui assurent par des crmonies
magiques la fertilit de leurs champs n'ont pas ou besoin
d'imaginer et de nommer un esprit qui y prsidt. Puis, avec
te progrs sociat, intellectuel et religieux, la liaison du rite et
de l'effet attendu cessa d'tre conue comme immdiate. Le
Heu sympathique lut figur sous les espces d'un esprit qui
imprimait aux choses la forme que le rite exigeait qu'il leur
donnt; il tait la chose mme et le rite la fois, mais divini-
ss. Cet esprit eut donc un nom correspondantexactement au
rite et a son objet. Ainsi les crt'monies, destines assurer ta
vie des plantes, s'adressrent uueNutrix, uueK~
C'est quand, par une nouvelle division du travail entre les
notions et les pratiques, le dieu, le rite, la chose se dtach-
rent totalement l'un de l'autre, c'est aiors que ta notion du
dieu devint indpendantede celle du rite et de celle de l'objet.
La divinit porte un nom propre devenue une personne libre,
elle n'agit plus que votontnirement. C'est alors qu'on la
prie et qu'on tache de lui donner tous tesattributs ncessaires
et favorables, et c'est ainsi que le rituel acclra le syncr-
tisme mmedes ides.
Je me refuse voir dans les dductions de M. U. sur le rote
de la lumire autre chose que l'un de ces systmes de mytho-
logie qu'une philologie svre, une sociologie scrupuleuse, qui
comprennent et n'interprtent pas, doivent laisser de cot.
XtAXCHt. MAUSS.

Eowts S!M<EY HARTLAXf). The legeud of Perseus.


A Study of Tradition in Story, Custom and Bellef
ft ~tM~ vot. Ht, Andromeda, Mdusa.
/'<'M<t'),
D. Xutt, Lond., t896, in-t~, xxxvn.244 p.

M. H. termine, avec ce troisime volume, son tude de la


lgende do Perse. Un index tout l'ouvrage, un supplment
bibliographique la liste des livres contenus dans le premier
volume, ajoutent encore l'utilit gnrale du livre. Ici,
fauteur entre sur le terrain plus prcis de ta mythologie. Un
enet, la naissance surnaturette du fils de Dana )~' voL), la
faon miraculeuse dont sou existence tait relie certains
objets (~' vol.) avaient couduit ~t. S. H. a rechercher !a
thorie gnrale de ta vie sociale et imtividuette qui est le
principe de toutes ces ides, et de toutes les coutumesqu'elles
synthtisent (1!I. p. 1S~. Les croyances concernant le systme
de la parent expliquent la naissance surnaturelle du hros;
celles concernant la magie, les ptuitt'es et la sorcellerie, les
rites du. mariage et les rites funraires, te lien du sang, expli-
quent comment l'cime est indpendante de certains objets
extrieurs, peut vivre en eux, tre aCectee par eux. Et tout
ceta, y compris l'pisode de ta lgende o des animaux K'e-
riques et bons viennent aider le hros auquel ils ont <H.e le
plus souvent lis ds la naissance fp. 184, n2, table A), tout
cela a t rattache par l'auteur a cette conception de la nature
et de lit vie, universellement rpandue, qui est ta base du
totmisme, et qui est encore la couette profonde sur laquelle
repose le mythe chrtien p. i88-t9!. La recherche, jus-
qu'ici, avait donc eu surtout une importance pour t' < his-
toire de ta constitution mentale de l'humanit et celle des
institutions. Avec le troisime volume le problme se cou-
centre. H ne s'agit plus que de mythologie compare, et, qui
plus est, de mythologie et de folklore classiques. Les deux
pisodes qui restaient a tudier dans ta lgende sont ceux
de la dlivrance d'Andromde et celui du pouvoir de ta
Mduse.
La Mduse se prsente avec trois traits principaux t" sa
tte fhevde le pouvoir qu'elle a de ptrifier 3" par un
seul de ses regards. Or le rapprochement des divers contes ou
lgendes qui s'occupent un peu partout des sorcires et de
leurs enchantements de toute espce, permet de rattacher
tous ces caractres a une origine rRtativement commune. Les
cheveux sont, en effet, dans une masse norme de traditions,
les dpositaires de la puissance du magicien souvent c'est
avec un de ses cheveux, 'mi grossit au point de devenir une
chane, que la sorcire s'empare du hros. Rien d'tonnant
donc ce que la Mduse soit figure avec uno tte terrible.
En second lieu la ptrincation, la mtamorphose d'un hros
en rocher, soit par une incantation, soit par un coup de
btonmagique, est un desthmes favoris du folklore, et pro-
bablement ajouterai-je, un thme gnral des mythes tiolo-
giques de telle ou telle particularit rgionale. Eu troisime
lieu, que le regard ait prcisment cette puissance, cela s'ex-
plique naturellement par les superstitions concernant le
mauvais mit (p. !43). La (uscination peut aussi bien ptrifier
que tuer sur-le-champ, ou rendre malade. Remarquons, d'ait-
leurs, que la croyance au mauvais i) est toujours vivace
daus le bassin de la Mditerrane, o justement la lgende
semble avoir le mieux persist sous sa forme classique. Les
trois lments du mythe de ta Mduse s'expliquent donc
tacitement, et fout partie d'un systme tout fait primitif.
L'pisodede ta dtivranee d'Andromdeestd'une tout autre
complexit, t'ne particularit le signale. L'aire gographique
o ou lui trouve des thmes similaires est restreinte t'aneien
monde seul en prsente, contes ou sagas, o une jeune fille
ollerte & une bte mythique est sauve par un hros. Cette
lgende existe aux Indes, au Cambodge, dans le Folklore
europen, mditerranen, asiatique. Elle ne se rencontre donc
que dans les civilisations avances (le conte iroquois n'est
qu'une importation Que le hures soit un jeune ptre, ou un
fils de roi dguis (Contes du berger, p. 9, suiv.), qui dlivre
la fille du roi expose; ou que le sauveur aitte, avec t'aide de
ses animaux bienfaisants, t'arracher aux enfers (Hercute,
Thse, p. suiv.); qu'il ait ou non a combattre avec un
imposteur qui prtend avoir tu le dragon; ou enfin que la
lgende se rduise ta lgende de Saiut'<!eorges, la Saga
islandaise qui eu drive, le fond du mythe est te mmo sous
des aspects diffrents, c'est un hros qui abolit un sacrifice
humain. Certaines pratiques amricaines et africaines (p. '?<),
82, 83) nous apprennent en effet qu'on offre, dans les dbuts
de l'volution religieuse, une victime humaine aux animaux-
dieux, souvent une jeune fille de race royale, comme dans la
lgende. Ces monstres sont pour la plupart marins ils
reprsentent l'esprit terrible de la mer, du lac, du fleuve ou
des marais qui rpandent l'inondation, la fivre, la mort. Une
reforme religieuse s'imposa ds le commencement de la civi-
lisation contre une coutume d'une telle barbarie. Le mythe,
le combat fabuleux o ces dieux sont dtruits, retrace proba-
blement selon M. S. Il. un (ait historique qui s'est produit
dans diffrentes nations de l'ancien monde et o disparurent
ces cuites. Puis la lgende, par son caractre potique et
humain, eut tt fait de se propager. La lgende de Perse,
comme un tout artistique et littrxire o l'pisode d'An'
dromde est capitai, est certainement asiatico-europeenne.
Des signes uou douteux de transmission existent (p. ~79).
Ainsi ta jeune fille veille le plus souvent le sauveur qui
attend le dragon en laissaut tomber sur lui des larmes
(table 1). Un dtail d'une telle constance prouve des emprunts
vidents. Un rsufn, trois des lments de la lgende de
Perse appartiennentau fond anthropologique de ta pense
ttumuine et des institutions sociales. Le quatrime a une
origine et une extension bieu marques; il est le produit
d'une civilisation immdiatement antrieure aux ntres, et
la lgende entire ne s'est rpandue que dans les socits
trs civilises du vieux (Monde.
Les trois volumes de M. H. sout d'une telle vaieur d'en-
semble qu'ils deviendrout rapidement indispensables uu
mythologue comme au sociologue. Les vues originales abon-
dent dans le second volume. Xecessairement 'tes erreurs de
dtail se {{tissent dans des synthses aussi vastes. M. Il. parle
fp. 75) du sacrifice humaiu comme prescrit par les lois in-
doues, ce qui est en partie inexact. Ht je crois qu'i! oublie
Pegaso quand il dit que i pisode des animaux secourables est
absent de la te~eade classique. D'autre part, cette faon de
concentrer l'intrt, non pas sur la recherched'ensemble,mais
sur l'explication speciate d'un ordre trs restreint de faits,
nuit a ia gnralit, la sret de ia mthode. En somme,
AI. H. btissant sur une dizaine d'pisodes mythiques, une
encyclopdie des usages et des croyances prhistoriques de
l'humanit, semble considrer les mythes comme des docu-
ments sociologiques et non comme des faits sociaux. it en
tudie le contenu et non la fonction. Or le mythe est une
croyance religieuse, et non pas une tradition historique le
mythe d'Andromde, par exemple, est autre chose qu'un
souvenir de la suppression du sacrifice humain. En tout cas,
l'pisode du meurtre du dragon, de la lutte des bons et des
mauvais esprits, fait partie de toute grande mythologie, cons-
titue par tui-meme un fait religieux. Mais M. Il. pouvait
dinieiiement faire la recherche que nous aurions souhaite
en prenant la lgende de Perse toute forme et dj trs
complte en Grce. S'il en eut fait l'analyse histonquc, ets'it
l'etlt tudie comme un tout mythique et non pas littraire, il
et pu trouver, croyons nous, la raison de sa naissance et la
loi de sa fructification. Au lieu de cela M. 11. dcrit fort bien
tes thmes de lu tgeado. en multiplie les exemplaires H
se
it
soucie mdiocrement d'eu dterminer lu place, nous donne
unejotie collectioud'pisodes semblables. Ce qui uous instrui-
rait plus encore, ce sont los diffrences des pisodes quiva-
lents. C'est dj quelque chose d'avoir trouv des similitudes;
seulement on perd de vue la varit des faits et des conditions.
Tout finit en une analyse assex vague et des apprciations
quelquefois subjectives (Ex. p. U4 Je sujet rvoltant du
sacrifice humain Mais it ne faut pas trop nuus plaindre
que M. H. ait t pote quelquefois. Le travail d'imagination
qui a abouti a la cration do tout ce systme sociologique,
greff sur la lgende de Perse, a eu dos rsultats scientifiques
assez considrables.
M.tHCHt. MAUM et ifKXM ffuBHRT.

ItEV, EuAS 0\EX. Weah Folklore. A Collection of


the Fotk-ta-ea and Legende of North Wales, ~96.
Owestry aud Wrexham. ~M'/orf ~<o)' (Print. a. pubi.
by \oddai) Minshaii et C', in-
vi.3~ p.)
La coitectiou de tegendes et contes populaires gallois du
Rev. E. 0. est un simple mmoire; mais le caractre de l'au-
teur, le choix de ses sources d information, le soin avec lequel
il nous renseigne sur lu localit, le moment on ses contes ont
t recueillis, la conscience avec laquelle il recherche les dif-
frentes versions d'une mme histoire, doivent inspirer ia
plus haute confiance. Au point do vue documentaire, le livre
de M. 0. est certainement de relle valeur. Comme le folklore
de tous les pays celtiques, celui du Pays de Gallos est infini-
ment riche, inupuisabie presque 'V. Prt.); la varit des
contes que M. 0. a enregistres sur une aire trs petite de
pays, est vraiment tonnante. Un certain nombre se trouvent
dj dans ie beau livre du prof. Rhys ))ck/t F<!tt'<r<M.
L'ouvrage de M. 0. a pourtant sa place ct de ce travail
magistrat, parce qu'il donne la physionomie complte de la
pense populaire do tout un coin du Pays de Galles.
La srie de lgendes qui nous prsentent des fes est d'un
rel intrt. Les anecdotes que l'on rpte encore sur la faon
dont ettes apparaissent, dont elles s'occupent des anaires des
gens, les noms qu'on teur donne, tout cela, M. 0. l'expose
trs simplement et avec beaucoup do sret. Dans le pays
de Uaites ou dit que les fes forment un peuple, une tribu
(p. K). Ettesont un payso certains hommes peuvent pntrer;
quelques-uns en reviennent. mais, teur retour, meurent, des
qu'ils mangent. D'autres ont eu pour femmes des fes, et les
familles de rebouteux doivent, comme on dit, le plus souvent
pareille origine leurs dons tirditaires. Mais ces mariages
sout tout il fait instables, une infraction a une rgle bizarre
quelconque et la fe disparat (p. ~C, 29). 11 y a des fes
qui ont t prises d'autres sont des esprits frappeurs dans
la miue et le rocher (p. tt4-t!M;. Httes hantent surtout cer-
taines piaces dans les bois, o elles dansent pendant la nuit,
et elles y attirent des ttommes qui restent ta. enchantes,
sans savoir le temps qui passe. M. 0. croit que ce sont d'an-
ciens lieux sacres. Ettes se mlent d'ailleurs intimement A la
vie humaine, elles frquentent les maisons propres, tra-
vaittent dans les fermes, font la charit; mais aussi elles
volent les enfants des hommes, les chungent contre les
leurs qui sont mchants, laids, malingres, et qu'it faut jeter
u l'eau ou exposer, un signe quelconque de prcocit
(p. !!4 et suiv.), si t'en veut retrouver le vritable enfant.
Tout ce tableau est fortanim et fort complet. Et si on ajoute
cela ce que M. 0. nous dit concernant les animaux fantas-
tiques 'p. t24 et suiv.), dont il faut rapprocher l'ensemble
des croyances sur les animaux et les btes, il ne restera rien
dsirer, je pense, pour avoir une ide assez nette du monde
o se meuvent les imaginations des paysans gallois.
Les histoires que t'on raconte sur le diable ont moins d'in-
trt, quelque importance qu'elles aient dans le fo~o;'<{<<-
loi, (p. t44;. Leur caractre local n'est pas prononc. Les
lgendesqui nous dcrivent ses transformations,ses formes
habituelles, comment il acquiertles mes, saisit les pcheurs,
sont trop traditionnelles et ont un caractre trop chrtien,
pour qu'on n'y voie pas un lment rcent de la tradition cet-
tique. Peut-tre les lgendes relatives aux lieux hants, au
dplacementfantastiquedes glises sont-elles des restes d'an-
ciens cultes (p. t74;. Des revenants, on ne dit rien de ptusque
dans toute l'Europe celtique; ils apparaissent chargs de
chanes, ils font dcouvrir des trsors, on les exorcise, etc.
Les sorciers, d'aprs M. 0., sont l'objet de nombreuses
pratiques, de superstitions encore vivaces. Que ta sorcellerie
se perptue dans certaines famittes, que le don de magie soit
souvent achet par la vente de t'me au diable (p. SH), que
les sorciers puissent se mtamorphoser souvent en animaux
(p. 2~4. S!T! il n'y a l rien que de trs ordinaire. Mais la
faon dont se jettent les sorts sur le btail, etc., la faon dont
on les conjure, ou dont on les rompt, ou dont on s'en prserve
(p. ~48), sont souvent curieuses, quelquefois mme ventabte-
ment Importantes. Les indications trs brves que M. 0.
fournit sur la notion de l'ttme et de la mtempsycose, et
comment on voit i'ame s'chapper de ia bouche du mourant,
nous font dsirer qu'il les conptte bientt.
Quant aux explications historiques que M. 0. donne des
faits qu'il rapporte, elles ne nous paraissent pas avoir le
mme intrt, et nous les avons ncgiigees.

XU'DCHS
.t. - MtTHOt.OutK COMt'.Utt!)!
M.tx ML't.LHtt. ct't~MM.

S. \()USK(' ~jaeledyrkelsoog Naturdyrkelse. Bidrag til


BeetemmoloDafdenmytologiskMetode af. t. Xgvdf) o~ Hddu.
Xupt-uhit~ut; t,fh)omm ''t ng' t89U-

Ouvntftt' ')'n )':tm!t cncut'e en HYt'ftisoos, et dont nous nous n'cr-


tuf)s tk' foit'c h' co)uj)tc rendu.

)'K)')').t:S SAt'YAt.KS
W.~M. MATTHHWS. Navaho Legends, oolleoted by. (~Mff/fM
~u)'<.Soc' "ton. )8M,iu.8".
d.-HAMtLTOXCL'SH)Xt:. OutUnes ofZuoi oreation myths (TVtc
<3"' .)M)f/ /<<<or< y <At' BMf(''(t< o/'7:'</'/w/ J.'W t'uwct), dit..
<89t-S. (Smiths'tniun txstitutc Wash., <896. <:ov. t'tint. utT.. )!<
in4,)'. 39S-4t7.)
Tn's itttpottuntt' tnuno~t'apht' ).'aut<'u)'j't'st''dt'tt'~ ))i<t) t'ttistoi)'
''( tHt'nx* lit jx'~histoin' de tu jx'uphtdt' d"))t il tmitc. L'tt d<v<)o)))'c-
tnott, n)a))x''n'<'))!)n''nt court tuais tout afait ~'t))!n'')U!thh',sur)'or-
)<!t)tisMtiu)t n)yt)))'sf)eiutoj<i<)Uf' xuf!i, <st-a-di)'<' t~t~miqu< sur
icut <:uit<'s a~mitM un fxposo d<tai))~, j'rot):d)I''n)''nt <)'' ~raudc
vateu)' ti)))!uisti)jm',des mythes <'t d''scuhcs foom'MS, voit ce que
t'utttieutccttt' )'at'ti<* tle cf bom voiump.

)).-< MM)M'OX. -The myths ofthe New World, A treatise on


th aymboUsm and mythologyof the Rod Race of America.
3'' cd. )890. Phitadcttdna.
C..M. PLEYTK. An uapubtiahed Batak cration Legead.
(~t'M<!<o/'Mf.4M/Af./M~.), tttMT. XX\), 2, )'. tU3.tO'

TM. AC))M.tS. Der Gott Tan. Bim Kapitel aue der Polyne-
siMhen Mythologie, t8''7, ix-S
t). H)ti~(:K):X. Die Sage der Ovambo vom Kaluaga. Bed.
St<;itc)))n)sc)).,)897.

M" t.LU)t PAHKKX. AuatraMaa Tales ()t)'tudn.-tiu<t pat


)..tt)){;. Luxt)., )8M, Xutt, it)-8".
Uuth.'ctiot) i))t<?t'<ss)ntp d'' cont)' inAtit-
D' H. <t)<AX))S't'):TT):X. Malayo-PotyaesischeForsohungeN.
Die Or<tnduajjr von Wadjo. ).U!rt). His<n)ittt;, )8H6. ht-4", )8 ;).
Tr:n)ucticu d'Utt texte a-ssex ))tt~n"<stmt.

i)' Heu. f.H~X. Araukanische Meerohen und EriM9hlumgeN.


S<undnj!tt':t
mi))<t)x'i)t ''<')) 'K~b'm), <t''s!))t)t)tt')) uott iit't't-Sf'ti!).
Y.t)))tn-!tiso.t)))pr'nt:tth'iuMh'<')'sit)ud,t;.))e))'ttiimnJ8U'i.in-8")t).
t)';stit"' aux t~udf' futkton' c<jm)Mu's. )) <;um(
d<' tnythuh'i!)*' et
t'~sttu~ ')<' )a n'ti~i'Ut !U':m'ut' ht's ''as tt'r.s '-mh'ux d'' cu)n))at
t
ntythiqm' J'un )t''tus:ni'<' un t"-pt'it. t't df )t:t))ti' df ):t fiftttct'-c jt:u
~ot) !tt)XU)( mufL

A. St-:H)K).. Geschichten und Lieder der Afrikaner, ttofit).


{696, SMtmU uod t.mm), 340 i))-'2. p.
G<j))cctiuu t)'<'))spn)t'tf <)'' <tnt!'s )'t d<' t'ntt'ndus )))' )'i[u-
<')<itu~
h'ur, uu t'xtntit-')'< t'ruci)s ft-)'h)s)'A-t'<tt!i. )')t <'<')-(H))t ncmht't'ttt'
i'<'ns<'it:t)t'tu<'n(!< <tu))t)'s .ut' i'AMtjm- a)))-tt)!uh)'; t't:u''nt itt'dit!i. ).<'
tm'). tiaus )'t'<'t';ntiu)), )'<~<'))ttaux ))~<'<sit<s d'm' hutUtc criti'ju'

C.- S)'KY)VA.L':f)H."YTO)!S

LY)')A S<:UfS<:m)AXUt-'t' Lgendes religieuses bulgares, tt;<-


duitt's)):n')'!t)i<,L'-t'ottx,<896.i))-tC,\)))-OU)).
A iit~uttkr tt's contes su)' Cm-i~inc ou h's murs <).'s animaux, ce)))'
<tfs t)))t!t''s, un cMt:)it) m'mt))'' d<' <utts d~peoda))) pt'ut-t'-tt-); J'iot-
cit'nncs(;ustt)0{!0t)i<i.

V.-A. t !)KCtHA. Lgende Romane.Viate in Treout. Reminis-


cente di. 3''<?d. Mucaf-Mt, Succeci). t89C, iu-)0, SOO p.
/MYTtt <)).') <.)K!f)'))U)-)t(!Mt;<Tt))THS

H. STt CK):X. Astraimythen der


Bgyptor. t Th. Abraham.
Hebraer, Babylomer und
KeUerionsgeaohiohtUchoUnterau.
changea, t.)' t-:d. t'ft'tn'cr., tSuc.
H'dt'MyU).)~ic![!.tt'')))<'tt)i'(u''<())))))!))'.?<)))..)))(..
d'-st-M))))~).
cht-mL-n).<,(<.sp)us))rt'-cit-ux('tttr<-h-s faits ))-sp)t)s.t.)i~).~()Ut-)'.tu-
t'-urcotumO )'))it()io)ti'(u<-m<t)t.Lu th~i< ~u'-t'uh- tin thn' it tooit)-;
'h'v:dcut'()m'it'dt''tait.

):. HUtXEt.. Die Homonymie der Griochischen Gotter naoh


der Lehre antiker Theologen (~ft'.)~' <'t~' ~tf <</ d.
A's'Mc/M. ~M. tt't'.t.<t7. 7/t' A7f~f. t89' ))t. ).<)'
R(~)('<)'('spnhhnstt-~)t(-t <)))[<?(<')-'?dtf:St-('sj)Ut't)<'s'))'s~uyn)):f's
soit 'te CiL-~t'ot) et .)<'s pttHosuph' su~ des (tt-umntait-k'ns. ([ni son)
!.i[)r)~'i''nst"!i)uxn)ytim));m"

hm~
Il. (!KLXHH. Zur ArmeniecheaGoattertehre <'A.).
L'!)ut<ut'('h<'n'))<')<"itt)fr~)'"))t')'))as)".df-
UM~mmUMn~q~yf~~t~p~
d<'tMt)h- imniL-nm-. syt-it-nm', ~rcctjtK-. t't df)n<)''
)!. !)t) )49.

ft- ))u<- fut ht


)))ythu)u)!i<'uaUuuu)c.

A. i.EH~ )<):.Mars, dieu du printemps, de l'orage et do la


feondit(/<<-<)/Mj!.</('<(-f~<'(('~M//o-f~f,,~7, nn8:i.
j).
Htudc j'u tm'-H)()iqtt)' ([<- fo)k-)u~- et de )h)guisti.;)n- cutMjon'-t'.
t'. t'E!U))t)Xt-)'. Mon fi). AM~<M <~ M~M~t~M~ /tc/w/w,
)896, p. S4-t00suiv.t.

D. MMf:X!(:<) BASS). Saggio di StMiograna mitologioa.


ApoUo. Torinu, ).c<'st;)'r, tMO.
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nMBischon Handschriften der Kgl. BibUotek Berlin. Wt'i- zu
n):n', i''t't)'<'r, t8im. Aussi .uns te fit) M /~<'<'<<w~:M' t'oM'wt~ r<i<-
~wAfM'/c.
'rt'adu':tio)td''t<'xt''s)m)))it~)'!u')'MUtt'm't'Urt'si)))crfss!t))ts.

W.\).HSRt'tX;K. Th laughaMeStories.:u<f. .Va<- Rr~f~


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<8~.in-8".
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into th origin and history ofthe symbol eventuallyadopted
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ti<'))t!t''))'<)tt't)M))!.)')ttm):mit~,))t)tc)')t'U)<'<tUc)ni.tiutii<if)t'(<;)).xv.x!{).
))'m)(')):tt't il t)'t~!)')dut<!UtttiUntH'')nf')c 'x'j~t.nxjmt)
Jt'').usfM(j!f'ndu:ti)(')t)!th')n)t'<run''ct'<'ix&h).)si)x'');au.)t.M
t)'!mttvj'ittt)t'<'h<'isti:)ni<m<')t'<i).-t)")))i'f))))'<<')t)t')''<'))f)'n'ntcs
))m))i'tt"'t)<'))t!)n'r<s)!i't)').!)''t-n)!(')~"))''i)i<'tt)tttf')nprunt
:'t un sy))))"u':ih''(tu'-ut)'))(te )tttit'tt'h't'y)nh')h'')U))t~vu)u~
~~t~~M~U~m~tt~~UMY~t~
t'st()<'v('))H!tin''it'HrtH'iutt~nt)'t<'du)n;'Hx'.

)~<tU'XXH. StudionzurvergletohemdemReUgionswiaseNS-
ohaft, ))f. Das Zoiohon des Menohsenohaeaund der Doppel-
sinn des Jonazeichens. <.)nss''tt nu') Mak'ri:)th')t xm' EHdNnm),
tt''))~'):'))-.j't'ii''))t'v"tHX''h;ht'u.H<'t')i<),)f(~.(t!t''t'tn''[',t3!ip.
)')i)<'<~t)))'ihuth't):'t)a''un'')i)ttti"t)d'm)'i('t)C)'<)cstny)h''scht't'-
)it'ns,quuhj))t'f:u)''<)!)ns)ut<)'t'it<~t'uit)')m.'ntphHt))ut:i([U<Anutcr
t'~)t<'p:)t'ti~t').~(.)t.)n)t"'tacun)'Ui.io))<)ui.stf!tit''t'tttt't'))'
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qui!i)'[~it!'un~i)H'dt'):tn')~)t)Mt)")tt)!tun''<ttnSM)nt-K<)~i(.

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HtOMtn!Mt't'))tt't.<u<'hu))~it)!t'')''<))<i)')i'h''t)C\)ihts<)'')
'tna!()''inth-)))tm]n;)u'))Kut!))<u))))"'n.i.ip!Vt'i)n.<<89<
itt-8"f-~j).
t'!)t'un'tm)''<'t)mt'('ht<siji)':ttio))<)(".j))'it))))t'<dL'sc!t(!)t't')n))('s
<n<)tt)f.M.n.)tnus)n<)))tt<'cntn)t)''t)t)')))M~i)):ttiun)'")'ui:ti<'<'r'
t't'at't:titah')'.<t<'< (th't-t's~pisuth' d'')u tt'fHtitiun hi))ih)U'ty\nyaHsur
t('utd''s[):)t'!t)'nt')'!)Wi('uii'ti'ut<'ntint')'<tttt'))"))<t'tt)h)<')t))<):S
t~tKtcs t'ctath's!m.Ht)ci).'nn''< rP)!r<nt:)tiun!i')u<;u!)c (j). 200 i-uiv.).

Y)t).UM'.AXtSATtuXttt'Ctt.TK. MCXAOnSMH
Dr 0. ZOCKLER. Askese und Mnchtum. ~vt~ <y))j
lich Kftt &<w<'f~c/<' ))(/ .<</'& cM'Hx'/tt'tf .tM~<</ff< Kri-
tischen Geaohichte der Askese 'Ascetistne et Mona-
chsme). r' v. Frankf. a. M. Heyder u. Zimmer, 18!)~, in-8".
vut-3Mp.
Le livre de M. Z. s'adresse expressment aux sociologues.
L'auteur espre que son livre excitera quelque bieuvciHaut
intrt chez les represeutants de la science uujourd'itui par.
ticutierement en vogue, la science sociate Sans aucun
doute, ceux-ci lui doivent ds maintenant plus que de l'in-
trt. Ils lui doivent la plus vive attention. En premier Heu. la
mthode suivie est la mthode sociologique mme. Les institu-
tions sont plus l'objet de la recherche que les individus qui
les ont vcues ou faonnes. Car M. Z. tudie ce que le besoin
asctique de l'humanitest devenu dans les diffrentes condi-
tions sociales, ce quoi ses (ormes ont correspondu.Ensuite la
mthode est strictement et srement comparative. Les mani-
festations asctiques de la vie religieuse des diffrents peuples
y sont soigneusement rapproches, les ressemblances mar'
ques, les dinrences observes. Entin, cette comparaison
s'tend a toute l'humanit. L'tudedes sauvages, des religions
du nouveau monde avant la conqute tient une place impor-
tante dans ce livre. Aussi l'auteur peut-il ahontir a un clas-
sement, une sorte de hirarchie des types d'asctisme reli-
gieux raliss par l'humanit. Tels sont les trs grands
mrites de l'ouvrage de M. Z. notre point de vue. D'un
autre ct, ce livre sera pour tout le monde la source
d'excellents renseignements bibliographiques, et, dans toute
la seconde partie de ce premier volume, l'ouvrage est fait
d'pres les textes eux-mmes, tablis et dpouills avec une
critique judicieuse.
Le premier volume ne met le lecteur en prsence que d'une
partie des faits. Tout ce qui concerne l'Europe occidentale et
catholique, d'avant et d'aprs la rforme, sera l'objet du
second volume. Mais )e premier forme dj un tout complet,
et dcrit l'origine et la naissance du monaehisme.
M. Z. dbute, en bonnemthode, par une dfinition. Certes,
il procde plutt par une recherche du sens du mot asctisme
et des dinrentes acceptions qu'il a eues au cours de l'his-
toire il dfinit tymologiquement l'asctisme comme tant
l'exercice corporel et spirituel au cours d'une vie religieuse
qu'il s'agit de perfectionner.
Drivant immdiatement, selon lui, dece besoin d'expiation
et do cette sensation d'imperfection qui est la base de la
pense humaine sous toutes ses formes religieuses, l'asc-
tisme est universel comme la religion elle-mme. Lo pro-
blme de son origine historique ne se pose pas. Dans toute
religion un lment de privation et d'amliorationa exist, tl
n'y a aucune raison de croire une propagation d'un pareil
besoin (p. i, p. S Cf p. 13, p. 3) Telle est l'extension et telle
est la nature du fait. Les formes s'en peuvent facilement
classer. L'asctisme est ou individuel ou social. L'asctisme
individuel est toujours ngatif, il consiste dans des douleurs
que l'individu s'inflige dite, privation de rapports sexuels,
familiaux, recherche de la douleur. L'asctisme, quand il
est ti la fois individuel et social, est toujours positif et vise
une amlioration lit fois de !a religion et des individus
augmentation de la vie religieuse, de ta part faite la prire.
augmentation de la piet intrieure. Ennn, l'asctisme soeia)
est positif eu tant qu'il prescrit le travail, la prdication, la
contemplation ou n~ittif en tant qu'il aboutit a des rgles
de puret monacate. de pauvret, d'humilit. C'est sous ces
diffrentes rubriques que M. X. classe avec soin les divers
systmes asctiques qu'il tudie.
AI. X. sait l'universalit des principes asctiques. )[ais,non
content de la dduire, ii la prouve. A vrai dire, on n'en trouve
naturellementchez les peuples primitifs que les rudiments
mais les privations, les motions douloureuses infliges au
nom des principes religieux n'en sont pas moins frquentes.
Les pratiques sauvages d'initiation, les preuves qui accom-
pagnent le mariage ou le deuil, la circoncision, les lustrations
nombreuses, sont les manifestations de ce besoin de douleur
et d'humilit que la nature imprime a l'homme. Au Mexique,
au Prou, nous voyons poindre des organisations asctiques.
Des groupes d'hommes et de femmes sont consacrs au culte et
soumis des privations svres (p. Mi et suiv.). Mais ia terre
classique de l'asctisme fut t'tode. Non seulement le christia-
nisme n'en a pas le privilge, mais encore le monaehisme
mme fut reprsent, organis, rgularis chez les Indous
bien avant l'poque chrtienne. Dans la priode antboud-
dhique, l'asctisme fut, ou bien un acte momentan, par
exemple tors des prparations au sacrifice, ou bien une habi-
tude constante des brahmanes qui se retiraientdans les bois
pour mditer et rciter les livres sacrs, et supplaient par
leurs privations et leurs prires aux actes matriels du sacri-
fice et de la pit extrieure. Certains d'entre eux surtout,
pendant la lutte avec le bouddhisme, les gymnosophistes
que nous dcrivent les voyageurs grecs, parvinrent a nn
asctisme fanatique. La rforme bouddhique eut au contraire
un caractre modr (p. M!). La vie du Bouddha, celle qu'il
recommande ses disciples, n'a rien d'absolument mortifiant.
Mais la nouveaut importante du bouddhisme, ce fut la
cration d'une communaut, la distinction des moines et
des laques, ta constitution d'une rgle monastique, t'tabtis-
sement de monastres. Les excs qui se produisirent pro-
vinrent plutt de ia tuttedu brahmanisme et du bouddttismc.
On sait comment te premier a triomphe aux Judes et quelles
sont les pratiques actuelles des faqirs. Quant au bouddttisme
finnois et japonais, it n'a pas fait pntrer bien avant l'asc-
tisme dans la vie des fidles ai mme dans la vie monastique
et peut-tre, dans l'organisation du bouddhisme tamaque
du Thihet et de la Mongolie. se trouve-t-on en prsence
d'influences chrtiennes dont t'tnstoire s'aperoit de plus en
plus.
L'Occident prsente des phnomnes infiniment moius iso-
ls les uns des autres. Eti'on se trouve ici en face d'influences
historiques multiples et entre-croises. Les romains ccunu-
rent, pour ainsi dire, un minimum d'asctisme. Les seuls cas
reiiement nets taient ceux de ces prtres qui, comme le
~OMff/i'.f J/.n~. iesVestates. taient accabis d'une srie de
prescriptions de puret. ))e mme chez les Cres, l'esprit reli-
gieux n'tait que secondairement asctique if devin tait
soumis a des rgles de jeune, de mmo le sacrifiant, t'initi
de certains mystres, mais le tout tait peu grave. Ce fut sous
l'inlluence de l'Orient que t'Orphisme, probablement,se dve-
loppa et proclama que t'ame tait la prisonnire du corps
'p. tuf)). Ce fut a l'imitation de i'}typte que Pytha~urc fonda
une vritable secte asctique. Poursuivie par Platon, ie Por-
tique, et surtout le noplatonisme, lu tendance asctique
persista dans la philosophie grecque et finit p:)r t'absorber

entirement, l'poque de Porphyre. Pendant ce temps, !e
groupe smitique faisait une part de plus en plus grande
fi l'asctisme. Nous ne savons que peu de choses des cultes
phniciens ou syriaques, mais ils faisaient certainement
subir a leurs croyants de suflisantes preuves. Sur ce fond.
tes pratiques juives se dtacheut. Ce n'est pas qu'etics aient
t en aucune faon diriges vers autre chose que vers le bien
moral et pratique de l'individu. Mais la Hibte eonnait t'<HM(!A,
la peine inflige t'ame, le jene l'occasion du vu. des
ftes expiatoires, ia veitte des fetesde communion.La lgis-
lation tvitique impose au prtre de nombreuses rgles
de puret sexuelle et autre. Avec le dveloppement du ju-
dasme et de ta synagogue, tes jeunes se multiplient. L'exalta-
tion do toutes ces expiations accomplies cause des malheurs
d'Isral donne naissance t'Essenisme, qui, partir de la
destruction du temple, se voue (p. <2S) ne plus manger
d'aucune chair. Le judasme extra-palestinien avait dj pro-
duit, Alexandrie, sous l'influence combine du t'ythxgo-
rismo et des groupements cryptions, t'hilon, le Traite do la
vie contemplative (que M. X., avec les derniers chercheurs,
reconnat authentique) et ia secte philosophiqueet religieuse
des titerapeutes, qui. soutnise a des rgles prcises d'absti-
nence et de pit, fut le prototype de l'organisation monacale
thbaine.
Le monacbismemme n'estdonc pas spcialement chrtien.
Mais, d'autre part, il est vident que les formes do ia vie
asctique les plus parfaites ont t ralises par le christia-
nisme. M. X., de conviction fortement chrtienne, fait de
celui-ci l'aboutissant de toute l'volution antrieure. L'asc-
tisme chrtien est le dernier en date, le premier en achve-
ment. Citez les musulmans il consiste en de simples priva-
tious, et les quelques associations religieuses qu'on y ren-
contre proviennent d'imitations chrtiennes (p. 309 suiv.). H
ne s'agit donc que de savoir en quoi consiste le progrs que
la religion chrtienne lit faire l'asctisme.
Or, chose curieuse, il est impossible, selon M. X., d'ad-
mettre que le christianismeait t l'origine, au temps du
premier amour une religion asctique (p. 1H7). Lesdisciples,
le demi-frre de Jsus taient maris. La mortincation de la
chair, Paul mme ne le considre pas comme essentielle.
L'humilit, le ddain des biens extrieurs sont prches; mais
le jeune n'est admis qu' un rang secondaire, les privations
excessives sont blmes. L'asctisme fut donc le produit d'un
dveloppement ultrieur, et non pas un fait originel. Les
jeunes rptes apparurent les premiers, ds avant l' Ensei-
gnement des Aptres livre du <r sicle, mais peut-tre
y a-t-il l une influence montaniste. La sparation des sexes,
ta chastet dans le mariage ne furent que plus tard des faits
frquents. De mme pour le vlement, ce (ut par un rench-
rissement mystique toujours plus fort dans l'imitation du
Christ, que certains chrtiens arrivrent ce goure d'asc-
tisme. Enfin, les ncessites de prier furent longtemps mod-
res, les veilles et les nuits passes en prires furent rares
pendant les deux premiers sicles (p. 1G8 suiv.).
Mais les besoins ascetiquesaugmentaicnt; l'influence mani-
chenne agissait vivement.L'existence.Hierapotis. Alexan-
drie, de nombreuses sectes d'asctes, d'individus pieux, exci-
tait et prparait les exalts. Le monachismedbuta sous des
formes diverses. D'abord ce furent des asctes agissant indi-
viduellemeut, sans rgles, pour leur salut propre. Puis un
certain nombre de tentatives sociales ouvrirent la voie au
mouvement. Ce furent !a secte d'Origene, moyen terme entre
une glise, une congrgation et un simple groupement; les
asctes voyageurs qui, eux, eurentdes rentes rigides, mais ue
se runirent point; les moinesd'Kusebe qui eurent une orga-
nisation, mais menrent une vie sculire; puis, cesertnites
qui partaient au dsert et y menaient la vie anachortique,
l'imitation de saint Jean-Baptiste. C'est sur ces dinreuts
mouvements que vinrent agir, combinant les traits de cha-
cun, saint Pakhme et saint Antoine, dont l'histoire ne nous
est parvenue que moiti authentique et moiti lgendaire,
mais qui certainement grouprent et rglrent les volonts
pieuses, tout en les retirant du monde.
Le caractre doux, profondement cuobitiquo du moua-
chisme thebain (p. ~0)-3), se perdit rapidement. Ues excs
d'rm~tisme furent frquents (p. 234~. L'isolement, ta mys-
tique, aboutirent des raffinements asctiques (stytites la
prire envahit toute la vie, absorba le sommeil, en mme
temps quelle devenait mcanique et vide. On tendit par
l'extase au nant. Surtout ou supprima tout travail, tout
commerce avec te monde. La vie mouacaie et contemplative,
l'ardente qucreite dogmatique qui se poursuivait dans le
monde chrtien surexcitrent te fanatisme de certains moines;
de l de terribles rivalits d'coles, des accusatious de
schisme. Le nestorianisme se constitua alors, avec ses vertus
d'expansion et d'ardeur dogmatique. L'intervention des em-
pereurs byzantins dut rgler tout, relations avec les pouvoirs
temporels, ou avec t'gtise sculire; le cnobitisme fut favo-
ris. Et c'est de l que vient le caractre gnrt du moua-
chisme oriental, russe ou anatolien, ou grec de grandes
communauts. ceiledumontAthospar exemple, vivantabsotu-
ment isoles, absorbant toute t'intettectuaiite du culte !p.309),
eu satisfaisant tous les besoins gnraux et purement reli-
gieux tandis que le clerg sculier, trop engag dans la vie
du peuple, ne peut avoir sur lui d'influence morale.
Du point de vue sociologique, le livre de M. Z. ne peut tre
considre que comme un essai, si fructueux qu'il soit.
Quoique toute conviction religieuse soit permise au savant, la
science ne tolre ni tes dfinitions a ~M'M-<, ni les vues a ~'<nr<
sur la linalit de l'volution. Or, la dfinition donne pour
.l'asctisme est en somme la dfinition chrtienne, et les vues
de fauteur sur t'votution historique sont aussi thotogiques
i) so trouve qu'en procdant ainsi. M. X. a confondu des
choses qui doivent tre distingues. L'asctisme ne fut que
tardivement la manifestation du besoin d'expier un pche, et
le monachismo ne lui est reli que dans un petit nombre de
religions. L'asctisme comme tel, c'est--dire eu tant qu'acte
conscient de privation ou d'exercice religieux, est plutt
rcent. En rgle gnrale, Il est toujours indivtdue!, et ne se
fait jour que lorsque l'individu a acquis une valeur sociale
et religieuse sufisantes. Aussi n'a-t-il t ratis que dans
les Indes, dans les socits smitiques et chrtiennes. Il
importe, en effet, de refuser te nom d'asctisme toute
cotte classe de faits qu'on appellerait mieux les interdictions
rituelles. Celles-ci ne sont nullement infliges par la socit
a l'individu cause d'un besoin mystique de la douleur et
d'une croyance la vertu de celle-ci. Tel ou tel aliment, le
porc chez les juifs, par exemple, fut interdit, non pas en vue
d'une privation pnible, mais parce qu'il tait marqu d'un
caractre religieux. De mme, la circoncision, les preuves
de l'initiation furent bien intentionnellement douloureuses;
mais la douleur n'tait pus le but, elle tait l'accessoire de
rites qui avaient pour fln l'admission de l'individu dans la
socit religieuse. L'asctisme proprement dit fut l'exalta.
tion de cet accompagnementordinaire de tous les actes reli-
gieux. Les interdictions multiples qui rgiaient la vie du
grand prtre, des lvites; celles qui enserraient, Home, la
vie du /~M<-K </t~. servirent de modle la constitution et
l'organisation de la vie sainte. La vie la plus religieuse fut
celle qui supportait le plus d'interdicliuus; elle fut asctique,
mais l'asctisme n'est qu'une fructification du systme des
interdictions rituelles; celui-ci n'en est pas une partie.
Une chose ressort du livre de M. Z., particulirement des
dernires pages de ce volume c'est une thorie socioiogique
de la formation des groupements monacaux. Une socit
religieuse tendue, comme le bouddhisme, le christianisme,
embrasse ncessairement des individus de religiosit diverse,
les uns mts perptueHement la vie du sicle, les autres
attachs leur direction. H n'y a pas, l'origine, d'organe
qui prenne sur lui de concentrer la vie religieuse, de prire
et de mditation. Des individus isols, seuls, pouvaient le
tenter; ce turent tes asctes brahmaniques, les ermites chr-
tiens. La formation d'un organisme religieux assumant pour
lui le travail d'expiation ncessaire cause des pches des
autres membres det'Hgtise. supplant par la constance de ses
prires a l'ancienne perptuit des sacrifices, voi) quelle fut
la cause sociologique du monaeitisme. Al. X., si je t'ai bien
compris,t'indique. Mais, ici encore, la considrationdes inter-
dicUous rituetteseut pu tre dcisive. La conscration reli-
gieuse de tout un cottege de prtres, ou de jeunes filles, ou de
jeunes gens. u un dieu, est un fait d'une extrme gnralit.
Ce fut videmment un prenuerpas vers l'organisation monas-
tique. M. X. connaitces faits, il ne les metpas teur vritable
place. Ils sont l'institution mme. et cette-ci n'eut qu'a tre
adapte des besoins mystiques nouveaux, a servir a une
division du travail nouveau. Ceci pennet de comprendre com-
meut le cotise du Serapemn put Mrc imite par la secte des
Thrapeutes, et celle-ci par les premiers moines chrtiens.

XU'nCHS
M. t-'KHf~A~. Sexuahnystik der Vergangenheit. i8t)U.
in-8". fC. Il. in tt'f)t'/te<Mt'/<)'t'< /N<- C7<M.<'j<' /Vj)'h~. xtv-2~ p.;
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kathoUohen Kiroho. SchunioMh. )':hh'r))'j<'n, tsu~ t'ettiK~ 'tans
un csjtt'it cattu'ii'jm-
WOOUH')) SR ~f. MonastioiNn, anoiemt
in-8' t:at'dt)(T Darton und C", i.oxd., )~7.
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XUTtCHS btVtiHSES
SL'M LES (.)t.~UHS HKH'.foXS HX <:XHA).
/<.Co~ST)T<'Tf"X KT OKYKt.OO'KUKXT t)t: eoUMS
H~UKAt~L't! t:T )SKAt:LtTK
JACUHS. JewishIdeals and other lasays, )896. (.oud. Xutt,
in-8, xvm-242
Contient un pssai d'histoit'e phitoMphi'ftcet rapide des ;))tases par
lesquelles a passe ta notion de Uieu et) tst'at (p. 28-6~! un autre
sur ta fa'on dont tes Juifs servirent A lu ditTusion des contex popu.
tairesd:t))s)')tntiqui)~<-)au moyen .~e()<.<3t,tSS).
M. m<A)-:TXSC))MA. Die BundeevorsteUung im Alten Tes-
tament in ihrer geaohiehtiichen Bntwiokelung. Miu'hurx.
Hh't.'rt.iM6,in-8').23tp.
L'auteur tudie d'tt)) point de vm'expressetnenttiteuto~ifjueet
j)))t)<))t~i<;o<' co)t)tt't)t .-i'it t)<h'(')(f~;j~'<'ft f'.df'sttfK- ):) ootioft de )':<)-
)m))CMMV''cMt.'n.C't"i)d'a))ur<tun('")ttr!ttat'<'u)uj['!mn!tnt)m)'it<'d'a)-
iMnc<nt)-U<)nt-,h-))tus.<otm-)ttf'at-tt'.s:u)K.
Puis ct'th'institution
s'Mtd(''V(')upjn''<'('nut)<'a)tinncf'd'it)tt''t~tss))i)'itm't!i<tM('t'j't'<')))it')'s
)))'uptt't('.<H('ro)))tut'ntpas,tt)!ti')ui!i'<tcunstituc<'i)ucuUMdt'kt
rdaction du Ucut't'ot)t))t'<t du t~viti'ju'

D' H. SHH.)'<. Boitrae~e zur israeUtisohom und Judiechea
BeIigioN9~Bohiohto(H.)). JahwoBVerhltntsBzumaraeUti-
sohen Volk und ndMduum, nach altisraelitischer Vorstel.
lung. Lf-ip: th-it'hcrt, t8M, Ytn-StO p.
Le ~t'it'nx int~t'~t de ce )i\n' f'oo'ii.stt- il )n"tttt'<'r t)u'ii n'y n )<:ts eu
d'' Ja )'f)i~i<')< {'uftthtit' ft d<' lu n'Ji~iun des
dh'f')'.<it)?<)'i)).<))irit)it'))
;)t'"t'h'tt's.!h''s)'tt)'));it)')att-Mditiunh'))nu't)tK'tnut)tr!utd!U~Di<'u
Ut)'t)(')))n)-id''tnf'nt))ttiMS<.)upt'))ptf'tn).2))t!tr)m)icn~rit)utir.
Le jn'a~W's :[ cunsistt'- a mtfinK'tttft- le c:u':n'tf't')' tUt't'itt de ce lieu, Mms
tjtt'i) soi) )n~.<i)))<'dt')):u'i'')'d'tt))<')'<u)uti<)ttp)'")'t'enx'))t dite. J)p
m.i(n'')'<mt-)<?c)Uin;t'n-)))unttdei!tt-e)i);iot):!tt)-Mt!;itn'y!)Il
don'' :)U<'nm' diOexince de uatm f, il n'y eut ([(te des din'et'encex de
degt'e!. entre les divers toomeots df )'))et))'a!s)ne.

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Die Propheten in threr urspramglichen
Form. Die Grnndgesotze der ursomitischen Posie, etc. t. B.
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~K-/<ft< /.)'~<?~-, )) Ttn'i).~

Outt'c <jtt'i) Mt un adtoiraht'' in'.trumfntdM travaii, ce )iv)'<' it plus


qu'un intMt histm-hjtt.' un phitu)u)!i')U(-. Car suut~-nit', ct'tnmc fait
M. !)., contt't' toute )<t rtithjm' bibH'jm' d'"} cithtuantc dcn)if'rc"<
aHUccs, );( n~'it'~ histt'ntfu'' de ht tmditiutt an 0- (jui t'mtt't't-n'' les
textes et leur .mciftmet~. c'fst n'txfttt-f h's ~tud''s en c'-ntact ovt'c
t''s htits j'tus <(u';tv<-c h", tcxt'-s, t't par ce)!) mme ubji~'t u voir
dans!fc)u'istii)tu-))te M)K-i';n autn- <'))<jst't)u'unt'nch'tt'f)nctttde
duettim' et d<' tt'iuJitu.'))~, <j)t'uu chut' d'id~ htditidut't)'<, mmA
bien <;)' <{u'i) fut, un imn)''n' tnuuvt'tncnt puputaiff duut )t'.< tfXtfx
ne font tjtu'.t')'tr:K't' t'!ts)n'ct intcttcctm').
Die Griechischen ChristUohen Schriftsteller der esten drei
Jahrhunderte. //<')' < rf. ~MMt'M. < A'~<. /'<-<'.!<t~/. <
7M.) )t'-)-ti)), )897.
Sontt'mu'i Hiptutytus \t'k' t it. t tt:i)te. ftonM'tsch. Il natftc.
Ach<-)~.
Orij~em's Wcrk' H. t'. Kot~-hau.
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neosch~'in.

AfAnox A.UJ.. Oeschichte der Logosidee in der Orlochi-


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M. Aatt iiuutit'ttttjtn: c\t ():)) )fsit)))'tcd'~f)o))j~'ntc))tdu concept
grccduLfgo~ (jue ~'(.~t)~<')M<'ec)ifz t'hiJuttia ~Mti~H, <tS(.'ttt!ci<c <httM
h'christitmismfdu Lu~, divin. Il posw piutt la qm'stiou qu'it m; ta
t~fouL t.ur~m; fera rusutuc c'-ttc tpx'sUon d'histoirt', il ft'ra, uturs
:!t'u)f)))''nt, j)G)')nis df partt'r en ~ucioiotiie de )tt fot'MMtiot) du dogtn''
c))n*'<it'n.

A. LOtSY. -< Le prologue au quatrime vang~Uque. (/<<


<<< ef </<' /.t' ~W.. <M'r tt, t, janvier, p. 43-(H; nta)'!), 2,
)'.i4t-tOt,3,t)tM),t'.2~-268.)
L'auteur montre les notions bibtiques et apostoti~UMS du )<<)j:o'
rt'joi~uattt les jfriucipK!! de lit phitusophie H'qu<

H.-L. OTTLHY. The Dootrin of Incarnation. Mt'thm'a aud C'.


<8~, Lund., in-8'.

e
C. FutmATfOX-! ET FtX.tTtUX~ UKS K'.UfiKS

!L\MSAY. TheOlUM andBishopriosofPhrygia.t!ht.8",


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Ouvrage cupitM), pum' t'~tudc du lu fornmtit'tt d<'s '~tisfii ''t))'
tit'ntx.'s d'Asie Mineure; montn' h.'s cunttit.s t't )< it~e)'ft''t'(.'nt;t."i(pii
produisin'nt t'ntt'f h"! Mtn'x.'ns cu)t<'s f't h' ou~'an ()'<'nst')Mt)<
tncnts disst'-tuittt' ntuis de pt'onK're vaieur).
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A. M)-:Yt-;t<. JeauMutterspraoho,t~ti, ht-t'. )-'r''it). i. )t. Motn-.

tt.M.MutUIMKtt. H'CK"<:K FootpriNtsof th apostats. Lunx-


)))mx,t8&
L.-L. t!or!tf:t-:0(S. Martyrs de Rome. t'atis, )St)7, L:unuth' et t'uis-
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/XXX)V. M-8S. t4:n:i. 296-3)5 t'it t'hi.Onirt-, d'apt'f's
)t<<.t'd';t!t''<)))Y<')~iu)t<t)'sA))).!):)i.<:tm.')))')!.tiMni'.tn<Utf!troudont
celui-ci s'est as~n))))'~ )'
:)))' i'-tts t'utt'*s, <)"t)t t'
convt't'tis cuviM
~<m'nt)HLr'')t)!)u))))<juv)'))'!('.<t)!![tticn)i('Tt'm<;ntmt'fessante.

/))')'))))))).<))t:

/'),
H. KEH\. Manual of tndiaa Buddhims. (CrMo~ /w/.
)nH.2)).S))-a.=bou)K.Tm)'))t't,f8ft!.
Je )')'t!r('tt<'<((tf )<* )'):tn d<)*.tMtt''F.<M'M(~t~Mf rende difficile Utt
ex[)0!d~tuit)<th'stt-!t)t's'.Ut-i'histtHti'<:<')np)H<d'nnt'n'iit!iou.Jf
nK'<))tt''))tt'(tun('<tt'i):na)t't')<')it't'd)'M.K.nnmeu)t't')')us
ti~ibtfi du CfXM~'t'M.Ua dt"! ptus )))!U))!)b)''s,CtftttMi dM ptus UttifS.
On y trouvera 'te t)C(nbt'uses n''f('r<'))ccs)tux textes: un cxpos'S tffs
<!tfg!mt de lu n'' du MuddtM. te))<; qu<- la tradition nou~ la dcrit;
enOtt tout ce qu'un rcsuntL' jtct'tnft (t<! dire sur la nu?t:))d)y<i~U)' f't )a
tnomte du Hnuddhismp (!))). sur )'' <;u)h'. )'< snints, )'Kdi~ )<"< cnn-
({t'~gittiuns (tV;, sur sou histt)it'<'d)m!' t'tnd' s~u MXj'ftn'.io)), su d'~e-
ttMrMSCfncc dans )c Mah!iyanistm'. puis tf T.mtrismc, qui pt'cparcnt
iaToi':itt'Mindoui')mM;soncx)tu)si))df)'h)d't'ttafM':ondonti!il
s'est refugM au Xcpa) Ct'ytaH et (\
M. WASSH.tKM'. Le BouddMame dana son plo!m dvetoppe-
mont d'aprs lea VinayaN (tt')'t. par S. ).yi. d'un artic)*' .)'"<
.~u~'s()t'i('nttt)t".tdt')itt''i)c.<)t"-).!tt)~u''s<)t-i''nt:')'~dcS!tint-
t'tst~m)! itt ~e". (~ /7/~<. XXXtV. )'. :H8-M!
S't't'-()t'h~t(')''s<)<)t')))n<')'! <))!))(')< )'t')u')n')i''t')!tt'<n')))!))i"t)
du)!tdi.')Cij!)it)''t)n'ttiH.)t''humtd)))~U('tt!t!)U)'<tituti')td'))n<'v)''
~'))v<'))tth')i')m)''vi('!tSt't''ti')u<'<')T!U)t'

J. 'tAKAKt S)'. A record of th BuddMBt ReUgioa aspracti-


sed in ndia and th Malay Archipetago 'A. )).. o~t-Citi; ).
T.-i))~, tuntuit put- Oxf. Ont-. ?)'< <89t), )!t. i))-4" ).)\-2K)('.
H.fccHcntc tt'adm'tinn fC. K. d'' A<'r. </7/ ~e. /<<)'H) ))(": n't)-
':<'i!im'n)''n)'ju')''ti~irt)x<'hit)'t)<'u'!<tt)t)))~))r)\t:(t()<'t!tdis-
'');'))))'')!ou<)'t)<i')tn'im\')t'xi'<
H.-W.CAV)' TheRainedOitiesofCeyIon. L")K).. Santp~'n ).ow.
Mdt'stutt uad C", )8t)7, K' <S6 )' iHus~'ittion.
/MAHOM~T)!<M)!

T.pagation
AH?<0).D.
The preaching of Islam. A History of the Pro-
of MuaUm Faith. )M6. \Yfstmiti~m-Cm)-.)!tht<m-8",
.\))-<)<)).
Les <h'-i)n)-!)t(-nshtn)')t)t.<'<~)nn)''t<'nt('))))))-.<()))'<ttiriM'-sYc)'.<
t'<')tthuusi:t'.)nt')'r<M')\'ti()tt<)")t'<'ct~d<')')'')att)<jU''M.A.nuu<
)ttu))trcthu)su))Mctud<'d't!ns<')t))jt'Mu)'t't)U)n)'j)')t')ms,vu)'Httuut'
uttt)!t(!tt's!t~'))tsdt'<'('U(:t<'t)')f(n<Atmt<'rp:u'tit'u)i<')'<'t)'nt)''
<:h<t))i~'<t't fauteur''xp('s<'('<))t)m't)(,dut)s)')mt')'i.s):u)u'-tnt'
~n))ct))OM'Mi'hinduttisntt'etcommcntt'Ot'pt'M'.)"))des castes )'on~
:mxcu)ncrsiu))')uitit"t'')tt)'iut)h'idt).
V. CHAUVE. La dtenae des images chez les Musuhnans.
'~MKa~M /'Ac<H)t'f <4<'<fM/('<; <~ /M< tX, 4.)
TROSH~m SECTtCX
SOCIOLOGIE MOKALE ET JURIDIQUE

t. T)~:OKtKS US(:HA).KS SC)( t. UH<'H' t:T LA Mt'HALK

t'MM.LAt'tt:.

ANTON tO LABR!OLA. Essais sur la. conception mat-


rialiste de l'histoire. Paris. (.iard et Brire, tM'7. vol.
in-H, 348 p.
La conception matrialiste de l'histoire est en faveur a
chaque page de f~M<'f Mc<o~t~t'on en aura la preuve, car
il s'est trouv, dans chaque branche de )a science, des cri-
vains proccupes d'tudier au point de vue conomique les
autres lments des socits. Or, expliquer le droit, la poli-
tique, la famille, la science, t'art, la reiigion et la morale par
l'tat de l'agriculture, de l'industrie et du commerce, voila
ce que, suivant l'opinion courante, Kari Marx nommait le
matnatismehistorique. L'originalit de M. Labriola consiste
restreindre la porte de cette thse pour viter des objec-
tions, il arrive lui enlever tout caractre paradoxal.
D'abord, le rapport qui unit l'conomique aux autres ph-
nomnes sociaux n'est plus un rapport ncessaire. C'est seu-
lement pour < ectairer tes manifestations sociologiques qu'on
les c place sur leurs supports conomiques H (p. 7); on ne
veut pas dire que l'tat de la technique < dtermine les
autres tats sociaux. Du moins cette premire restriction est-
elle apporte il la thse par M. Soret qui prsente au public
franais le livre de M. Labriola. Mais tel est bieu aussi l'avis
de l'auteur mme il se demande si la morale, l'art, la reli-
gion, la science ne sont que des produits des conditions co-
nomiques des effluves, des ornements, des irradiations et des
mirages des intrts matriels Et il rpond nettement par
la ngative seuls <
les niais pourraient rduire toute i'his-
toire l'arithmtique commerciaie et U ne sunit pus, pour
interprter !a Divine Comdie, de l' illustrer avec les fac-
tures des marchands itorentius <p. 34~, 24S). Hutre ie sup-
port conomique des faits sociaux et ces faits eux-mmes il
n'y a donc pas de relatiou causale leur rapport, c'est le rap'
portdet'embryonctde t'tre vivant bien que!'entbryon con-
tienne i'bomme en puissance,on doit, pour expliquer t'hotntne,
connaitre non seulement l'embryon, mais les causes qui lui
permettent do se dvelopper. C'est ce qu'exprime encore
M. Sorei, dans sa prface, lorsqu'il dit que l'tude des faits
conomiques ne dispense pas de l'tude des autres faits:
ceux-ci, bien qu'ils soient solidaires deceux-ta, ardent leur
nature et leur valeur propres. Les faits sociaux ne sont pas
tous de nature conomique; ils ne sont pas tous causes par
des faits conomiques, telle est ta premire et capitale restric
tion apporte par M. Labriota la thse du matritdismo his-
torique.
Si les faits conomiques ne sont ni l'essence ni la cause des
faits sociaux, quoi est le sens de ia doctrine? A en croire
M. Labriola, elle signifie seulement que tous tes faits socioto-
giques sont solidaires les uns des autres. Elle signifie que
l'histoire doit tre prise dans son intgralit, et que chez
elle le noyau et t'ecoree ne font qu'un, comme Gthe le disait
de toutes choses < (p. 134). H y a action rciproque de l'co-
nomiquesur le reste et du reste sur l'conomique(p. 140, )4*!).
L'tat, par exempte, fond pour dfendre des intrts, ragit
sur la production et sur la rpartition des richesses (p. MS).
On no peut pas isoler l'un des facteurs pour en faire le
principe unique de l'histoire. C'est dnaturer le matrialisme
historique qued'en* tirer une nouveite philosophie de l'his-
toire systmatique,c'est--dire schmatique et tendancieuse
(p. )S4). La vraie doctrine qui porte ce nom est un effort pour
embrasser dans sa complexit la rcaiit sociale.
Par suite, on ne peut pas reprocher au matriaHsme ainsi
entendu d'oublier l'idal, de ramener la mentalit et ses con.
squences sociales un simplepiphnomne. Il n'oublie rien
puisqu'il prend l'histoire dans son intgratit rien, pour
lui, n'est piphnomne < tes desseins prmdits, les vues
politiques, les systmes de droit, etc., drivent de conditions
et de situations dtermines. Mais cela no veut pas dire que
ce soient de pures apparences, des bulles de savon. Si ce sont
ldes choses devenues et drives, cela n'implique pas que ce
ne sont pas des choses rcites (p. iS~, et. p. ~). M. Labriota
va plus loin qui penseratt que le matriatisme historique put
reconnaitre t'inttuence des grands ttommes dans t itistoire '?
Pourtant, de mtne qu'il n'adtnet pas que Dante suit un pro-
duit ccononique, de mme il soutient que i'individuatit des
g rands ttonunes a jou dans l'histoire un rote ori~iuat que
ce Csar dtermine que {ut Xapoton soit ne tette anne, ait
suivi telle carrire, ut se soit trouv prt le )X hruttUtire, tout
cela est comptetemeut accidentet par rapport au cours ncnrat
des choses qui poussait la uouvetie classe, tnaitresse du ter-
raiu, & sauver de ia revoiutiuu ce qui lui paraissnit neces-
sairf. Mais queccqui e'-tarriveeu rcatite arrivt de ta faon
que nous connaissons, cela a dpendu de ce fait que ce fut
~apoicon qui a men t'entreprise, et nou un pauvre Monck
ou uu ridicule fioutmt~er. Et dfs ce montent t'at'cident cesse
d'tre accident, prcisment parce que c'ost cette personne
dtermine qui donne t'empreinte et la physionomie aux v-
neiiieiits (p. :H4). L'inteitiKence individuelle avec ses aspi-
rations et son idal, sous toutes ses formes, n'est donc pas
bannie de l'histoire par iemateriansnteecoaonuque.
C'est que, en dpit de son nom, cette doctriue ne s'oppose
pas l'idalisme. Elle s'oppose ptutt a t'ideotogie. Coqu'eHe
combat, c'est surtout < l'interprtation de t'histoire par des
vues subjectives, que ces vues soient dans l'esprit des acteurs
de l'histoire ou dans celui des spectateurs. Les acteurs croient
que les vnements s'orientent vers la Un qu'ils dsirent
mais, pousses par des causes qui chappent al la conscience
des individus, les faits dvient, ds l'origine, de !a route que
les hommes leur ont trace. Et de mme la philosophie de
l'histoire cherche il retrouver le sens des vnements, mais
elle a le tort do leur prter une loi de fillalita taquene ils ne
sauraient obir. Les faits sociaux ont leurs causes dtermi-
nantes qui dpassent les consciences individuelles.Sans doute,
ils prennent l'empreinted'un Luther ou d'un Xapotcon. mais
ils ne prennent pas le caractre qu'aurait voulu leur donner
Luther ou Napolon. Le matrialisme historiquerecherche les
causes extra-individuellesqui dterminent les fuits sociaux
il exclut les interprtations subjectives il veut objectiver
ou naturaliser l'histoire'. Son vrai nom no serait pas

0) Voyez p. t26. 131, t47. t9.


celui de matrialisme que M. Labriola lui conserve; ce serait
celui de positivisme ou de naturalisme historique.
Si profondes que soient les restrictions apportes par
M. Labriola a ta thse marxiste, il n'en conserve pas moins
l'opinion que les faits conomiques ont sur tous tes autres faits
sociaux une influence prpondrante.Cette influence est tan-
tt directe, tantt indirecte. Elle est directe sur les relations
juridiques et politiques, indirecte sur fart, la religion et la
science. En premier iieu,de ia structure conomique de ta so-
cit dpendent fexistenceet les rapports des ctasses. En parti-
culier, ia division de la socit en capitalistes et proltaires
correspond & l'ge manufacturier de l'industrie. Et i'i~tat
n'est qu'une institution destine a maintenir les rapports de
subordination qu'tablit entre les hommes notre rgime co-
nomique. Aussi, dans le cas o ce rgime chaulerait, les
relations juridiques et politiques seraient ncessairement
modifies. Et fadirmationdnsocialisme n'est autre que cette
ci actuellement, depuis l'apparition des machines et de lu
grande industrie, la situation conomique change sans que
varie le droit ou l'tat mais cette anomalie ne durera pas: il
est ncessaire que la contradictionqui existe entre les forces
productives de la socit et les rapports de la production
disparaisse rapidement :ia rvolution sociale est uue ncessite
dtermine par la rvolution conomique.
Eu second lieu, la religion, la morale, la science et l'art
sont indirectement influencs par l'tat conomique. M. La-
brioia est timide en ce qui concerne ia religion. Il se borne
noter que Luther ne sut jamais que le < mouvement de la
Rforme tait un moment du devenir du tiers tat, et une
rbellion conomique de la nationalitallemande contre t'ex
pioitation de la cour papale (p. t3~ Encore ne ferait-il pas
diuicutt, j'imagine, d'avouer (lue la Rforme fut autre chosf
qu'une rvolution politico-conomique. Do mme il n'explique
pas sans prcautions les rapports de l'thique et de l'cono-
mique il rejette avec nergie l'ide que ia morale de chacun
est proportionnelle sa situation conomique individueitc
(p. ~49). tt se borne montrer que, dans des situations diff-
rentes, les hommes, pris < en masse ont des murs et des
croyances morates diffrentes. La morale subit donc des
influences externes la morale ne se pose ni ne s'engendre
elle-mme. ip. 24S). Pareittcment, t'histoire des ides ne
consiste pas dans le cercle vicieux des ides qui s'expliquent
ettes-ntmes (p. 2B9) elles subissent t'tnnuenee de t'etat
conomique. Sur l'art et sur ta science. l'auteur n'insiste pas
c'est qu'il veut, comme toujours, se garder du paradoxe.
La doctrine, ainsi depouitte de sou caractre provocant,
est peut tre moins sduisante pour les esprits audacieux; il
faut avouer qu'elle est plus vraie. L'effort tente par At. Labriota
pourtnettre eu tumiere ta solidarit des faits sociaux n'aura
pas t'te vaiu l'conomique agit sur te politique et le politique
sur l'conomique, et il en est de mmo de tous les tements
sociaux que t'abstraetion peut dcouvrir. Montrer i'unit des
< facteurs
historiques, c'est rendre ia sociologie un service
aNato~ue a celui qui fut rendu la psychologie quand on
dmontra que les trois (acuits de t'ame ne sont pas des per-
sonnes spares, tuais des classes de faits mal d)j!in)it''es. De
mme. le droit, la morale, l'conomie politique, toutes les
cat~orics que distingue t'auatyse sont relies les unes aux
autres par des intermdiaires nombreux et par des mftuenees
rciproques. On ne peut croire la sociologie sans croire it
t'uuite des faits sociaux.
On peut mme accorder ai M. Labriola que, dans le t'Mw-
xtM des forces sociales, l'conomique joue un rle plus impor-
tant que ne croit le vulgaire. Aristotedisaitdj que la richesse
est une condition de la vertu c'tait affirmer, entre t'econo*
mique et l'thique, un rapport devant lequel M. Labriota
parait reculer. De mme est-il besoin d'tre socialiste pour
dcouvrir des causes conomique!; aux vnements poli-
tiques? Ceux mmes qui, comme la Rvolution franaise,
paraissent provoques par un rveil des consciences, ne sont-ils
pas occasionnspar la rvolte des intrts? tt n'est pas jusqu'
la religion qu'un crivain peu suspect de collectivisme ratta-
chait rcemmeut t'economique en disant que le sentiment
religieux n'est que le besoin conomique renvers il mon-
trait qu'en effet le sentiment religieux varie on raison inverse
du bien-tre matriel on est d'autant plus mystique qu'on
est plus misrable; les priodes de calamits sont des priodes
de (oi c'est que le sentiment religieux est le substitut du
besoin conomique'. Ainsi, sans rechercher le paradoxe, on
peut se montrer plus hardi que M. Labriola les besoins phy-
siques de l'homme ont sur la vie sociale une influence consi-
drable.

()) LtKMttbf. ~<* <7fM~<'<t'e COMttWtt'f fOMMMCjM'*MCf, p. )~6.


Cette influence est-elle prpondrante ? Dans le livre mmo
de AL Labrioia on trouve des raisons de le nier. Uu (ait pri-
mordial reste Inexpliqu l'homme, au moment o le prend
l'auteur, ne vit pas l'tat de nature, mais sur un terrain
artiftcie) dans un milieu qu'il a contribue u former. Mai&
comment l'a-t-il {orme?Est-ce sous l'impulsiondu besoin co-
nomique? On peut l'admette', bien que l'auteur ne le prouve
pas; mais encore faut-il que ce besoiu ait t servi par l'intel-
iigence. L'intelligence a donc joue, ds le dbut, un rote aussi
ncessaire que celui du besoin.
En second lieu, on ne trouve nulle part, dans le livre de
M. Labrioia, une explication conomique de la famille, deses~
varits et de ses transformations, N'est-ce pas une grave
lacune? On la trouvera plus grave encore si t'eu constate que
l'auteur admet, avant la priode dans laquelle ii coustate la
preponderauce de l'conomique, l'existence d'une socit fon-
de sur la famille on etet, le peuple sur lequel il tudie
l'action des forces conomiques n'est pas une masse quel-
coHque d'individus, mais un plexus d'hommes organiss de
telle et telle faon par des rapports naturets de consanguinit,
ou suivant tel ou tel ordre artificiel ou coutumier de parent
et d'affinit. (p. !?;. Consanguinit, parent, affinit, voil
donc des relations qui sont donnes avant les relations de
mattre et d'esclave, avant les relations do l'homme et de la
terre la famille ne dpend doue pas de l'conomique puis- ).
qu'elle lui est antrieure. Et le texte mme que nous venons
de citer prouve qu'elle apporte avec elle un certain droit,
qu'elle implique des coutumes ou des rgies juridiques tran-
gres u l'ordre conomique.
Enfin, M. Labriola ne peut pas proclamer la fois l'unit
des faits sociaux et la prpondrance de l'conomique. Ou
bien il faut prendre la lettre ses mtaphores l'conomique
est le < support des autres phnomnes mais alors il n'est
pas le plus important, a moins qu'on ne soutienneque le socle
est plus important que la statue et, d'autre part, les faits
sociaux, dans cette hypothse, sont juxtaposs, mais non soli-
daires. Ou bien, l'conomique est partie intgrante d'un com-
plexus de faits solidaires; mais alors il n'est'pas plus impor-
tant que tel autre lment du mme comploxus les membres
et l'estomac sont gateatent ncessaires la vie de l'orga-
nisme une solidarit de ce genre suppose que les lments
sont coordonns et non subordonns.Telle que M. Labriola la
prsente, la conception matrialiste est donc incomplte et
inconsquente.
Faisons abstraction de ces dfauts ta doctrine est-elle cou'
forme aux faits? A ce point de vue, ou lui a dj adress
de graves reproches. ~!ut n'a encore montr, remarque
M. Durkheim, sous quelles influences conomiques le natu-
risme tait sorti du totmisme, par suite de quelles modidcn-
tions dans lu technique il tait devenu ici le monothisme
abstrait delahv, l le polythisme greo.tatin On montr
que la charrue n'a gure varie depuis des sicles et que cepen-
dant les murs ont change ta proprit mme, dont ta forme
devrait tre lie a l'tat de lu technique agricole, a pass, sans
changementcorrespondant dans cette technique, de l'tat col-
lectif & l'tat individuel. On a montr que plusieurs socits
possdant la mme technique pouvaientavoirdes institutions
et des croyances fort diffrentes. Mais il est inutile d'accu-
tnuter les taits. M. Labrioht se drobe provisoirement au juge-
ment do l'exprience Je prie le lecteur, dit-il, d'attendre
les exemples que je donnerai dans d'autres essais, dans une
vritable narration historique (p. 27~).
A dfaut de cette preuve exprimentate, c'est a la mthode
qu'on peut s'attaquer. Est-il lgitime de faire abstraction des
vues de l'esprit dans l'interprtation de l'histoire? Accordons
que l'historien ne doit pas imposer aux faits ses ides a
p<'<or<, mais tirer des faits eux-mmes ses conceptions, Est-ce
dire que tes ides des hommes d'action n'ont sur tes vne-
ments aucune influence?' Accordons encore que ces ides ue
sont que trs rarement le rsultat d'un choix critique ou
d'une votont raisonnante peu importe leur origine; la
question est de savoir quels sont leurs effets. A-ton prouv
que ces effets sont nuls quand on a montr qu'ils diffrent des
prvisions de quelques hommes ? Sans doute Luther ne voyait
pas le mouvement politique et conomique qui accompagnait
son mouvement religieux. Mais Lutherest-il le seul auteur de
ta Rforme*? Tout grand vnement historique esH'uvre de
volonts innombrables qui, peut-tre, ne cherchent pas toutes
le mme but, mais qui toutes cherchent un but. Que de l'en-
semble de ces tendances il rsulte un mouvement tranger
ou contraire aux intentions de l'initiateur ou du principal

t!i' )'.<<). Cf. At;!))t'). <-)<' </c


~h Hft'Mf~/ff/MO/j/tt'f/Mf.ftt')'. M)('/<t;)/t.
M/<M'j)t.ttM'r,)).<iMt:t!iUH'.
meneur, cela M'M rien d'tonnant, mais ue prouve pas que les
consciences individuelles soient pour rien dans l'vnement.
Il ne suffit pas, pour expliquer la Reforme, de faire la psycho-
logie de Lutlrer, mais cela ne prouve pus que !a Rforme ne
puisse pas s'expliquer par des ides et des courants d'ides.
Naturaliser l'histoire, puisque dans l'histoire, de l'aveu
mme do M. Labriota, les ides et les sentiments ne sont pas
des buttes do savon ce n'est pas exclure les ides, c'est
les considrer comme desfaits. Lu sociologie est tu psycho-
logie ce que ta sciencedu complexe est la science du simple
elle tudie les rsultantes que produit ta composition des
forces psychotoniques; ettone doit pas commencer par nier
l'existence et la vateurdescomposantes, mme si la rsultante
estdinerente des composantes. De ce que l'eau n'a pas tespro.
prits de t'oxygne et de l'hydrogne. il ne suit pas qu'on
doive, dans i'tude de t'oau, ngliger l'tude de ses lments
de mme tes faits sociaux ont beau possder des proprits
distinctes de eettes des faitsindividuels: it n'en est pas moins
vrai qu'ils trouvent leur explication dans ces faits. Entre le
naturalisme matrialiste et l'idologie, il y a place pour un
naturalisme psychologique.
Au moment ou il parait la modo, le matrialismehisto-
rique s'assagit il a conserve son nom de guerre, mais il est
devenu prudent. Pourtant il n'est pas t'abri des objections
attendons, pour le juger dfinitivement, que M. Labriota nous
ait apport ses preuves exprimenttes.

S. FRAGAPANE. Il proNemttdelle origint del diritto.


(Le pt'ob~mf (<f.t origines <<t( <<ro)<) Home, Lscher, t896,
t voi. in-8", 2!U pages.
Le titre mme de l'ouvrage de M. Fragapane annonce une
doctrine votutionniste. En effet, l'histoire du droit (livre I'")
aboutit, suivant l'auteur, l'avnement des doctrines volu-
tionnistes et la logique des sciences juridiques (livre Il) lui
conseille d'appliquer a l'tude du droit une mthode gn-
tique. C'est pour cette double raison qu'il pose le problme
des origines du droit la loi d'volution est pour la socio-
logie comme pour les autres sciences le postulat des pos-
tulats. (p. H6,.
Ce n'est pas dire que, pour expliquer le droit, M. Fraga-
pane remonte la nbuleuse il raille mmo ceux qui,
comme M. Letourneau, trouvent le fondement des fortna-
tious juridiques dans l'irritabilit de lu cellule nerveuse
(p. ~!)). Pour lui, l'inconscient ne joue aucun rote en socio-
togie(p.!(!Oetsu)v.aussi))ect)Grt'he-t-itpasd:)nsune
priode antrieure t'apparition de lu conscience l'origine
de lu justice. Le droit est le rsuttat d'une double voiutton
pour qu'il y ait un droit, il faut t'a effet que des personnalits
se soient formes et distingues les unes des autres mais il
<aut aussi qu'un r;tat rglemente et sanctionne les rapports
de ces personnalits. Une volution sociale aboutissant lu
formation de l'tat, une vottt~on mentute~atoutissant la
formation de ta personnalit, telles sont les deux conditions
<<e la justice.
M. r'ragapanetudie successivement dans les deux derniers
livres de son ouvrage chacunede ces deux volutions. D'abord
l'volution sociale par quelle suite d'tats une socit passe-
t-elle avant de possder un droit? La cohsion sociale appa-
ratt tout entire connue une trame d'obligations et de sanc-
tions. Mais toutes ces obligations et ces sanctions n'ont pas
un caractre juridique certainesen effet sont inconscientes
or, une coutumequi reste inconsciente, qui n'est pas explici-
tement formule, n'a pas force de toi. < Le droit est le moment
conscient pour tous les rapports qui naissent incessamment
du jeu des forces sociales '(p. f! 4). t':t quand vient ce moment
conscient? Quand les actes sont imposs et sanctionnes par
le pouvoir. Ce n'est pas dire que le pouvoir soit la source
unique du droit et que ta justice soit dcrte par les souve.
rains ou les testateurs. Le pouvoir n'est tui-memo que
t'cho de lu conscience sociate le pouvoir est tel que le
groupe le fait ~p. t93). Mme lorsque les institutions repr-
sentatives font dfaut un peuple, le pouvoir politique
demeure soumis l'opinion publique il est l'esclave de la
tradition parce que l'opinion publique est ette.mme fidle
au pass. Ainsi, le droit n'est ni t uvre de la volont collec-
tive seule ni i'uvre du seul pouvoir politique il est le
rsultat de leur collaboration < un acte du pouvoir corres-
pondant certaines exigences mondes communes aux cons-
ciences associes (p. ~Ot!, voil la seule dunition complte
de la justice.
Nous ne suivrons pas M. Fragapane dans l'analyse des
transformations au cours desquelles cette double condition
se serait ralise cette partie de l'ouvrage est trop pauvre en
documents et en faits bien tablis pour que les conclusions
puissent tre retenues. Ce qui prcde suffit & montrer Je
principe de ta thorie t'Htat et ta personnalit sont pour
l'auteur les deux potes de l'ide de droit. Aussi nie-t-it l'unti-
nomie qu'on prtend dcouvrir entre )a personne et l'tat. Et
il nie que t'un de ces deux termes doive, dans l'avenir, tre
sacrifia l'autre. Toute l'volution juridique montre la trace
d'une lvation croissante de ta personne humaine. Aussi le
progrs juridique est-il senti par l'individu comme une libert
croissante. Une sanction n'est pas seulement un tien qui
attache l'individu au tout, mais c'est le sceau d'une uouvetle
libert. l'investiture d'un nouveau droit (p. 280). Le pass
nous garantit l'avenir mesure que frtt se constituait, la
personnalit grandissait que t'tat perfectionne sa constitu-
tion et ta personnalit grandira. C'est sur cette pense opti'
miste que M. Fragapane ferme son livre.
l'rise en cite mme, cette prvision n'a rien d'invraisem-
blable M. Fragapane n'est pas le premier montrer que le
nombre des rglements grandit paralllementau nombre des
liberts t'ar cela mme que le droit de reunion notait pas
reconnu, dit quelque part Henan. il n'tait pas limite il en
est de mme pour tout droit. Mais l'analyse de l'ide de droit
que propose M. Fragapane prte davantage ta critique. Pour
lui, un droit doit tre accept par tous les individus associes.
Mais ne peut-il arriver que l' exigence morale. qui donne
naissance au droit ne soit sentie que par quelques consciences
d'lite? KesuMt-it pas que les esprits de la toute ne contieu'
nent rien de contraire au droit nouveau pour qu'il s'tablisse ?
Nous avons reproche M. Labriota de supprimer le rle de la
couseiettcedans la vie sociale ne peut-on pas reprocher
M. Fragapane de t'exagrer? Sans doute, une rgle juridique,
pour tre pose, doit tre consciente au moins dans un esprit;
pour subsister, elle doit tre tacitement accepte par tous, ou
du moins elle ne doit rencontrer aucune opposition (ormeito
mais est-il ncessaire qu'ette recueille l'adhsion explicite de
toutes les consciences,qu'elle rponde des exigences cont-
MtXHM & tous les membres de ta socit ? Un droit qui aurait

pour lui uue telle unanimit raliserait un idal dans t'his'


toire, le droit ne contient pas l'lment qu'y dcouvre M. Fra-
gapane.
t reste vrai, si nous en croyons l'volution du droit con-
tettporaiu, que les rgles juridiques drivent des rcgtes
morales. Ou commence par protester contre J'esclavage au
nom de la couscieuce. puis les lois sanctionnent F exifteace
monde On proclame les droits de l'homme dans les livres
avant de tes reeonuattre daus les institutions. Un mouvement
d'opinion precMe le vote de toute loi nouvettt'. On peut donc
accordet- M. Fragapaue que ta naissance d'un droit positif
est le terme d'une volutiou morale.
Les rgles mondes, a leur tour, drivent-elles des instincts?
La discussion de ce problme serait hors de propos dans
r~<t~' sm-M~<(/t'. Mais, pour fauteur, l'instinct qui donne
naissance a l'obligation n'est autre que l'instinct social, car
toute socit est un tissu d'obti~tions et de sanctions. L'ide
de droit aurait donc une extension gale celle de l'ide de
socit tout fait social tant moral et toute rgie morale
pouvant devenir juridique, tout fait sociat pourrait donner
naissance une rgle juridique. Mais tous les faits sociaux
preseutettt-ils un caractre morai ? tous nous eugagent-ils
envers quelqu'un? tous nous imposent-ils des sanctions? A
premire vue, il semble du moins que l'art et ta science, en
tant que faits sociaux, peuvent tre indpendants de l'thique.
Ajoutons cependantqu'au dbut des socits, l'art et la science
mme obligent les individus ta danse n'est-elle pas re~e.
meutee et les mouvements contraires au rythme ne sout-its
pas parfois punis de mort ? Quant ta science, elle se confond
avec la reiigion dont !e caractre impratif n'est pas discut.
H est donc possihic de dire avec M. r'ragapane qu' l'origine
au moins tout fait social a une valeur morale. Cette ide,
une des plus intressantesdu livre, aurait gngue tre tablie
par des fuits plus nombreux et mieux critiqus.

D' FRD BOX. Grtmdzttge der wissenaohaftiichen


und technisohen Ethik (~.fM <<'))<- (~f m<~<t/!yM<'
t't ~Y<(jw). Leipzig, Kngehnanu, t896, vo). m-8",
I()U pages.
La morale, pour M. Bon, Il la double mission de fixer !e
but de nos actions et de donner les moyens de t'atteindre. t)e
mme que, dans l'tude de la nature, on peut distinguer la
science, qui observe et dfinit, et la technique, qui utilise
pour les besoins des bonxnes les vrits dcouvertes par la
science; de mme, daus l'tude de la couduite humaine, ou
peut distinguer une science qui observe les actions, et une
technique qui utilisera pour le bien de l'homme les vrits
dcouvertes par la science moraie.
La science morale est une science d'observation. Hito cons-
tate l'volution des murs humaines et s'etorce d'eu djuger
la loi. R'abord a son iusu, puis avec conscience, l'homme
passe de l'gosme l'altruisme < t'votution morale
s'accomplit par la prdominance progressive des intrts qui
unissent (conciutorisch! sur les intrts qui sparent
(isotatorisch). En induisant l'avenir du passe, M. Bon conclut
que nous tendons vers un tat o les conflits individuels
seront rduits au minimum, o non seulement l'intrt de la
cit l'emportera sur celui des particuliers, mais o l'intrt
de la socit cit-mme sera prime par celui de l'humanit.
Cette victoire de l'altruisme sur taosme est d'abord incons-
ciente. Les hommes se sont groupes, sans savoir pourquoi,
sous ia pression des ncessites extrieures. Mais peu peu
la consciences'est veille. Ds lors l'homme se rend compte
des ordres que lui doune la socit, en comprend les raisons,
devient un facteur de sa propre volution. L'heteronomie se
change en autonomie.
On voit que M. Mon prend pour accord le principe spen-
cerien d'aprs lequel i'etat idal est cetui vers lequel nous
eutratne l'volution, et cela sans examiner les normes difll-
cuits que soulev ce postulat. D'ailleurs ia ici mme qui
domino toute la thorie est-elle bien etnbiie? A lire le titre
de l'ouvrage on s'attend trouver des inductions rigoureuses;
mais on rencontre plus de citations do Spinoza et de Nietzsche
que de faits et de raisonnements. Cette mthode mrite t-eile
le nom de scientifique f ? ?

E. DE HObERTY. L'thique. Le Psychisme social,


f/fM.f''M)t' <'Mf ~t' h Wn/'< C(~Mft~t''f fOWMtC Mt'tO~tt' <?-
M)<'M<<< Paris, Aican, ~8U7, i vol. iu.i8,2)8 pages.
Par ses ouvrages prcdents, surtout par un premier essai
sur la morale considre comme sociologie lmentaire
on sait dj que AI. de Roberty, eu thique, se place au point
de vue positiviste ia morale est une science, c'est la science
sociale.
La morale est une science elle m'a pas donner d'ordres,
elle doit enseigner des vrits. Elle est la science du surorga-
nique comme la biologie est la science de l'organis. La force
qui se dploie dans l'univers, aprs s'tre manifeste sous
forme de matire et de vie prend une forme nouvette.t'ette
du psychisme social et cette forme nouvelle est l'objet de
l'thique. Les banalits qu'on rpte sur le dictamen de lu
loi naturelle suis tort, et sur les prceptes de la loi morale
sois prudent, vertueux, charitable, etc., prouvent, dit fauteur,
combien ou mconnat encore ta vraie nature du psychisme
collectif. On se refuse,a voir dans la socialit un mode nou-
veau de la force universelle ou ne veut pas comprendre quf
nous donnons le nom de vertu a t'uurgie transforme, devp-
uue, de mcanique ou vitale, morale ou sociale; et que nous
appelons prudence ou sagesse l'conomie de cette mme
force, sa dpense rgle par le principe de ta moindre rsis-
tance tp. )~. Ainsi lu vertu est un phnomne aussi nces-
saire que la ebateur ou l'lectricit. Le vice de mme
< quant
la prtendue primaut de la force brutate sur le
droit, il est manifeste qu'une telle formule ue signifie rien, it
moins qu'elle ne serve a indiquer une transformation rtro-
grade de l'nergie, une dcomposition rapide d'un mode
suprieur de l'existence et un brusque retour au modo imm-
diatement infrieur (p. tH) Le mat mural, c'est une chute
dans le monde organique, comme le mat physiologique, ia
mort, c'est une chute dans le monde inanim. Mais ces deux
dcompositions sont ~gaiement produites par des lois
ncessaires. La morale, ainsi entendue, est donc une science
comme ta biologie ou ta physique.
La morale est la science du surorganique. Mais qu'est-ce
que le surorganique ? C'est, pour M. de Roberty, le mo-
rat, le conscient, le social, le rationne) tous ces termes
sont synonymes. En somme, le surorganique, c'est tout ce
qui dpasse la vie pure et simple. Ce n'est pas dire que la
sociologie et la psychologie individuelle se confondent il y
a entre elles la mme diffrence qu'entre l'abstrait et le con-
cret. La psychologie tudie les tres vivants sur lesquels
s'appliquent les lois sociales. Un individu humain, c'est un
groupe de faits biologiques et de faits sociaux, le lieu o
s'entre-croisent tes lois de la vie et les lois de la socit
faites abstraction des premires, et il reste l'objet de la socio-
logie. M. de Hoberty semb)e distinguer parmi les faits de
conscience deux groupes de phnomnes ceux qui sont pro-
duits par le corps vivant,-et ceux qui sont produits par ta
socit H distingue une psycho-physique (ou psycho-physio-
logie, p. M,S8)qui rentre dans ta biologie, et une psycho-
logie proprement dite avec laquelle t la sociologie descriptive
doit confondre ses limites (p. 0:!). On voit doue comment,
pour lui, conscient et social sont tonnes synonymes.
De cette proposition sort un corottaire intressant. l'ar cela
mme que le social est un des tments constituants de
l'individu, l'homme est altruiste uvant d'tre goste
l'egosme n'est chez lui qu'une sorte d'atrophie du sens
social. tt ne faut donc pas dire avec La Rochefoucauld que
l'altruisme est ua gosme dguise, ou a\'cc Spencer que
l'altruisme est n do l'gosme c'est au contraire t'gosme
qui natt. par volution rgressive, de l'altruisme primitif. Ou
plutt, M. de Roberty parait distinguer deux gosmes comme
il distingue deux conscieuces. Nous avons une conscience
physiologique et une conscience sociale; de mme il existe
un gosmed'origine physique et un gosme d'origine sociale
le premier, c'est la bte dans l'homme le second c'est une
dviation de t'attruisme; eu tant qu'animal t'homme est
goste eu tant qu'tre social il est {oHeirement altruiste,
mais il devient goste par t'avurtement de son altruisme.
Sous ces deux formes t'egosme est le mal.
Ces opinions sur les rapports du psychique et du social et
sur les origines de t'egosme sont des indications ingnieuses.
Quant aux thses fondamentales de l'ouvrage elles ne com-
portent pas de discussion, car elles sont simplement uon-
ces sans dmonstration mthodique. Elles ne se distinguent
pas, d'aitieurs, des thses classiques d'un volutionnisme un
peu dmod.

MAMEt. BERKS. Sociologie et morale. Deux annes


d'enseignement sociologique. Paris, Giard et Briere,
)896,1 vot. ia.8", i6S pages.
Le livre de M. Berns est un < programme de cours
aussi les thses qu'il renferme sont-ellesprives du dvelop-
pement et des dmonstrations qu'elles comportent elles
chappent, par suite, en partie, et l'analyse et la critique.
Ettes peuvent se ramener deux propositions essentielles la
morale fait partie intgrante de la sociologie la sociatite fait
partie intgrante de la moralit.
Au gr de M. Berns, la sociologie demeure trop thorique.
Elle oublie qu'elle traite de faits humains et qu' ce titre elle
ne doit pas se dsintresser des aspirations des hommes. Elle
est, eu gnera), naturaliste elle devrait tre idaliste. Eu
effet, la morale est la science w~wc/fcf (p. K) qui correspond
a la sociologie, science descriptive. Mais, dans ce domaine, lu
rel et l'idal sont insparables une socit, c'est a la fois
une chose et une ide 'p. KM., uu ensemble de faits don-
ns et d'volutions inacheves vers les fins qui attirent les
hommes. La sociologie a pour objet l'tude d'actions hu-
maines or, toute action, mme lu plus insignifiante eu
apparence, est quaiiflable (p. 8C, 8H; moratetnent. et
i'uppreciatiua que les hommes eu douoeut est uu fait social
important. Doue, la thorie et ia pratique doivent se rcon-
cilier sur ce terrain (p. M La sociologie sans la morale
reste mutiiee p. S
En revanche, lu morate devient abstraite et morte si elle
perd de vue la reatite sociale et ne fait pas aux sentiments
sociaux une place importante. L'histoire de la morate en est
la preuve. Lu morale primitive est une moraie sociate
p. ~O?) l'individu n'y est gut'o reconnu; il n'a pas de
valeur c'est la vie sociale qui est la fin do l'activit de ses
membres. Mais quaud la rflexion s'evciile, le sentiment
social perd sa prpondrance c'est ce qui s'est produit en
Grce, au temps de Socrate. Par bonheur, Socrate conserve
encore le sens de la ralit concrte et de la vie sociale, mais
ses successeurs accentuent les tendances individualistesde sa
morale, en mme temps qu'ils s'Oloigneut de la vie relle.
L'individualisme est la marque de la morale hellnique. Et la
morale chrtienne, mature' son dsir de s'opposer la morale
antique, se dtourne, elle aussi, des ralits sociales. Ce n'est
qu'au xvm" sicle, avec Kaut et tes philosophes franais, que
la solidarit reprend sa valeur aux yeux des moralistes. En
dpit des interprtations ordinaires, M. Bornes trouve dans le
kantisme et dans les matres de la Mvolution franaise
l'bauche d'uue morale contraire l'individualisme. Repre-
nant une ide exprime par M. Henry Michel dans son livre
sur l'/fA'f </f ~f,il montre que l'individualisme banal est
une < dviation de l'individualisme du xvnf sieetc. Et celui-
ci, comme le kantisme, est la transition du pur individua-
lisme qui rgne dans la morale antique, la morale sociolo-
gique fonde sur le sens de la solidarit (p. t43). L'avenir
nous rserve donc et il faut s'en fliciter selon M. Bernes
une morale de la solidarit. Ce n'est pas dire que nous retour-
ncrons la morale primitive l'auteur se dfend de vouloir
prendre son idal en arrire It va mme jusqu'& dire
que t'idat n'est pas de < consolider in socit prsente
t'idai, ce n'est pas i'' ordre'(p. tGS), ta stabilit. Kous ne
devons pas nous piaindredei'anarcttieactuettedes consciences
ni iuttereontre elle par une rgression vers le pass. Mais < ia
morale n'est pas rduite cette alternative d'tre sociale et
tradittonnaHste en tonnant l'individu, en mettant une con-
trainte lit place d'un idat, ou de placer dans l'individu le
principe unique de l'action morale, et, en se faisant subjec-
tive, de renoncer tre sociale fp. )M). Il existe une troi-
sime solutiou qui consiste, si l'on comprend bien 11. Bornes,
a chercher ta solidarit par des enorts individneis. Lit morale
de l'avenir ne consistera pas obir de force lit loi sociale,
ni chercher chacun pour soi ta tache accomplir elle
ordonnera chacun de se solidariservolontairement avec tous
(p. )G4). Ainsi il ia solidarit force des ges primitifs, au
libre individualisme des philosophesantiques et modernes,
doit succder ta solidarit volontaire, conforme aux donnes
de la sociologie et aux aspirations de ia morale.
A vrai dire, aucune des deux thses principales de M. Ber-
ns ne parait trs neuve. On souponne, en lisant son pro-
gramme, qu'elles sont dveloppes dans son cours avec beau-
coup d'ingniosit les paradoxes qu'il met sur la morale
de Socrate, sur t'individuaiismehellnique et sur l'thique
de Kantodgent des dmonstrations dont le dtail doit tre
piquant. Mais il est bien difficile de discuter, mme sommai-
rement, des indications aussi brves. Et celle discussion
serait mieux sa place dans une histoire de la philosophie
que dans une .UtHf Mt'M/o~oe. Quette que soit en etiet
l'importance sociale des doctrinesd'un Socrate ou d'un Kant,
ce n'est pas faire uvre de sociologue que les tudier pour
eites-mmes. Ne cherchons donc pas querelle M. Berns sur
les moyens qu'il emploie pour dmontrer sa thse et ticcor-
dons-lui que les sentiments sociaux, en gnrai, et le senti-
ment de ia solidarit, en particulier, jouent un rle important
dans la vie morale.
Sans tre plus neuve, l'ide d'unir la sociologie et la morale
est plus discutable que ta thse prcdente, Il est vrai que la
sociologie s'occuped'ides et d'aspirations autant que de faits
matriels. Mais ces aspirations mmes sont donnes dans
l'observation sociologique. Le sociologue n'a pas s'interroger
sur leur vateur morale H n'a qu' constater les courants
d'opinions qui entranent les socits dans un sens ou dans
uu autre. Du ce que les faits sociaux sont des tendances plus
que des tats, il ne suit pas qu'il faille joindre l'observation
scientifique l'apprciation morale de ces faits les tendances
s'observent plus diuiciiemeut peut-tre, mais par les mmes
mthodes que les tats. Ou n'a pas tudi les mmurs actuelles
si i'on s'est born dcrire nos actions il faut y joindre nos
croyances et nos dsirs mais ces dsirs eux-mmes sont des
faits qui se traduisent par des paroles ou des actes obser-
vables ne serait-il pas imprudent de joindre leur tude
des jugements sur leur valeur ? Ne serait-ce pas s'exposer a
perdre t'hnpartiaHte qui est la premire condition do la
recherche scientifique? Nos passions ou nos prjugs poli-
tiques ou moraux ue risquent-ilspas de troubler notre regard ?
Ainsi, l'union de la sociologie et de la morale ne nous parait
ni impose par la nature des faits sociaux ni exige par l'in-
trt de la sociologie d'une part, il est vrai qu'eu agissant,
les hommes se proposent des fins idales et qu'on ne peut pas
sparer la connaissance de leurs actions de la connaissance
de ces fins mais ces {tus sont donnes au sociologue non
comme des fins mais comme des faits. D'autre part, l'appr-
ciation de ces fins suppose que le savant les considre non
comme des faits, mais comme des fins, c'est--dire qu'il
renonce ia mthode scientifique et la vrit.
Pourtant, M. Berns a raison de montrer que la thorie et
la pratique sont insparables. Mais teur rapport n'est pas le
rapport d'identit qu'it veut tablir c'est un rapport de suc-
cession. La pratique suit ta thorie une connaissance con-
fuse succde l'instinct: & une connaissance distincte succde
l'activit rflchie. La sociologie sans la morale ne serait pas
mutile, n'aurait perdu aucun de ses membres, mais elle
serait deouronne. Si des vrits sociologiques sont deou-
vertes, nul doute qu'elles ne se transforment en rgles pra-
tiques elles uous donneront le moyen d'atteindrei'idat fix
par la conscience. Mais ce n'est pas dire que la sociologie
doive se proposer pour tche essentielle la dcouverte de ces
moyens. De mme que dans les sciences de la nature les
applications pratiques ont souvent suivi les dcouvertes tho.
riques sans avoir t l'objectif des savants, de mme la
sociologie nous fournira peut-tre des rgles de conduite
imprvues des thoriciens. Si nous admettons donc que la
morale et ta sociologie sont, en fait, intimement unies, nous
croyons qu'en droit il reste lgitime de sparer leurs disci-
plines. Lu morale, dit M. Mmes, est tu science normative
a taquetia correspond ln sociologie. Mais pourquoi ces deux
sciences ne demeuroruient-ettes pas spares comme ta logique
est spare de la psychologie du raisonnement ou comme
l'art de t'iogenicur est spare de la mcanique ? Qu'il soit ou
non ditncite pour un sociologue de s'abstenir de juger les
faits qu'it observe, la distinction n'en garde pas moins sa
valeur logique.

Prot. Dr M. LAZARUS. D&a Leben der


Seete in Mono.
graphten uber seine Eracheimun~en und Gesotze (/.
fft' </t' ~(iMtf; '~ pAf'MOH<<)Mel ses lois ~<t<t(~ i(0<M /b<'H)e de
Mt<)<t<)~/ap/t<M), m" vo)., H" dition. Bertia, Dummter, t897,
1 vol. in 8, xvt'44) pages.

Le livre de Lazarus n'est pas nouveau aussi nous borne-


rons-nous signaler, sans l'analyser, la troisimedition du
troisime volume.
Le dernier chapitre de l'ouvrage traite de l'origine des
m'rurs Les mmurs sont des coutumes gem'r~tes et cons-
cientes elles fondent ce qu'il y a de < gnrt et d'objectif 1
dans les consciences la psychologie des peuples qui tudie
ce qu'il y a de commun aux consciences iudividuettes d'une
nation doit donc tudier les moeurs.
Les murs sont i'uboutissementd'unprocessus psychique1
dont le premier terme est !e sentimentmoral par l, fau-
teur entend tout sentiment accompagne soit d'une approba-
tion, soit d'un blme or, une < proprit et une ncessit
fondamentale do notre nature psychiqueconsiste < perce-
voir toute action humaine accompagne d'un sentiment d'ap-
probation ou de Marne" Ce sentiment est d'abord incons-
cient, mais it-dtermine une action, et la conscience de cette
action, c'est la conscience morale. < L'homme primitif per-
oit sa nudit cette perception est accompagne d'un senti-
ment de desapprobation; il n'a pas conscience de son senti-

0) BouKM. /.M ~cf'mcM ocf'a/m fK .t//<*M)~Mf; ). Lazaru~. p. 39.


(~) )'<tK'* ~t' XuUi! avons <Mj~ r';n<'m)t~ <()<' thuorit* <'h''x M. Fro~~xn"
)'t che:! M. Uenn's sans <)U'"tt pui!: dire !<i ces deux auteur t'uot ou non
t'M)[))'u))t''e & Ltuarui.
ment comme nous avons aujourd'hui conscience des ntres
mais son sentiment se traduit immc'diatetneat en action
l'homme se couvre et dans cet acte il saisit son sentiment
p. 3"!S). Comme, a cette poque, tous les individus se ressem-
btent, ils prouvent tous, duos les mmes circonstances, les
mmes sentiments pur suite, l'action de l'un est rpte par
tous tes autres. Les mmurs s'expliquent donc par !a loi de
la qualification des actes et par la loi de l'identit des cons-
ciences primitives deux lois psychologiques.
Ces deux lois ne sont pas dmontrespar des faits fauteur
n'a prtendu tracer qu'une esquisse semblable une figure
mathmatique Mais cette mthode schmatique convient.
elle une histoire?

t).t:Tt'UHS(HUK<:T)\KSS(')tt.KSM.U'MS
ParM.t.u'tt:

At-tREU VIERKANDT.
Ein Beitrag zur
Sociatpsyohologie.
Naturvoelker undKctturvlker.
(~('Mp~ ~M<f</x
pt ~<*M;)/M ftf<<Mf<; fMM~M~OM fi la ~j((/fAo/0<y<<' Mft'H~C.)
Letpzit;, Duucker et Humblot, t8')M, 1 vo). !u 8", xt49'! p.
Prix 1U M. 80.

Disciple de Wundt plutt que de Lazarus, M. Vierkandt


s'occupe moins de psychologie des peuples que de psy-
chotogie sociale H ne dcrit pas les traits communs
aux consciences individuelles d'une nation, mais dans rame
humaine en gnera! il trouve des phnomnes dont les lois
expliquent les phnomnes sociaux.
Ds les premires pages, l'auteur s'engage dduire s
d'un caractre psychologiquetesditterences qui sparent sau-
vages et civiliss et i't ramnera des problmespsychotogiques
les problmes sociaux relatifs h lu cirilisatiou. Ce n'est pas
qu'il ait ia prtention d' < exptiquer p. )2); i) ne cherche
qu'un point de vue permettant de grouper systmatiquement
les faits sociaux qu'il tudie. Son livre n'est donc pas une
philosophie de l'histoire, mais une cotiection de faits sociaux
rgulirementdisposes autour de leur centre psychologique.
Ce centre psychologique, c'est t'activite.. On peut distinguer
dans Factivit deux degrs l'instinct et la volont, l'activit
irrflchie et l'activit rettechie. La premire caractrise la vie
des sauvages, ta seconde celle des civiliss telle est l'ide
muttressedu livre. Il suffit, en eltet, suivant l'auteur. d'ana.
tyser t'instiuct et ta volont pour voir quels caractres doit
prendre la vie physique, intellectuelle, moraic et religieuse
d'tres soumis chacut) de ces modes d'activit. Ainsi les cuu-
tumos, les mmurs, les sciences, les arts et les religions varie-
raient comme varie l'activit des hommes.
L'acte instinctif est violent mais de courte dure dter-
min par une excitution physique, i) a ia force Ht ta dure de
cette excitation. Il est aveugle puisque sa causeest mcanique;
il ne suppose qu'un minimum d'activit intellectuelle. Ces
caractres psychologiques, que tout le monde accordera
fauteur, lui suflisent. La vie des sauvages, voues ~'ius-

tinet, sera une vie de passion leurs actes seront violeuts,
tuais leur activit vite lasse; leur vie est une succession de
crises passionnettes. Et leur vie sociale ressemble il leur vie
individuciie: c'est une srie d'vnementssans lieu puisqu'ils
se succdent au hasard des impulsions. En dpit de ia couti-
nuit que la force do la coutume donne leur existence, on ne
peut pas dire (lue les peuples sauvages aient une histoire
i! ne peut tre question pour eux que d'une chronoloKie

L'instinct est aveugle, il ue voit pas l'avenir et n'est pas
guide par des fins prvues les sauvages ne prvoient pas;
leur conomie politique demeure rudimentaire parce qu'ils
ne connaissent ni l'pargne ni la production prventive ils
consomment leurs richesses mesure qu'ils les produisent.
De mme leur droit poai est imprvoyant il rprime,
mais ne prvient pas le crime. 11 est vrai que cette impr.
voyance enieve aux sauvages des soucis leur humeur est plus
gaie et leur flicit plus parfaite que celle des civiliss. Leur
activit, se dployant sans but, est une activit de < jeu
elle va au hasard, cite se gaspille ses produits sont par suite
plus nombreux que ceux de l'activit civilise les langues
des sauvages sont plus riches que les ntres et (tans tous les
domaines de leur activit on remarque le mme luxe. Mais ce
luxe est strile. L'activit de jeu des sauvages ne produit pas
un art vritable il n'y a pas de < cration citez eux, car
pour crer il faut agir en vue d'une fin. L'instinct, purement
mcanique, ne donne donc naissance qu' un art passif,
imitateur, mais non crateur. La mme strilit se note
dans l'intelligence. Aux deux degrs de l'activit corres.
pondent en eilet deux degrs d'intelligence t'assm'iatiou et
t'aperception. l'une passive, l'autre uctive les sauvages ne
connaissent que ia premire leurs penses, comme ieurs
actes, se sucefdent donc au ~r des circonstances. Us ne
peuvent s'lever l'ide de la science leur tour d'esprit est
mythologique en etiet, dans ia formation des mythes,
l'analogie, la mtaphore jouent ie rote essentiel or, 1 anaio-
t ;ie et ia mtaphure ne sout que des espces d'associations.
D'autre part. cet tat d'inconscience dans toque! l'instinct

laisse l'me humaine ne permet pas a la personnalit de se
reconuattre l'individu ne se distingue pas de ses voisins
par suite, il ne peut pas trouver en lui-mme des raisons
d'agir et de bien a~ir. La moraie est tout extrieure non
seuiement elle ne propose pasa l'individu de se prendre pour
nn, mais eiie n'it~it sur les hommes que par ia voix de l'opi-
nion publique et de ht religion. La conscience morale ne
s'veille pas. Mutin, l'instinct a sa cause en dehors de
l'homme l'tre soumis il l'instinct ne se sent donc pas matre
de sa destine il pius forte raison ne se sent-ii pas maitre de
la nature; au contraire, il en est l'esclave et ii reconnatt cet
esclave'* le sentiment religieux est un sentiment de crainte
et de dpendance. Des coutumes conomiquesimprvoyantes,
nn droit rpressif, une morale extrieure, nn art impuissant,
une science mythologique et une religion de )a peur, voii
donc ce que l'homme, a l'tat de nature, doit il la prdomi-
nance de i'in-tiuct.
four avoir le portrait du civilis. il sunit de remplacer
chaque trait du sauvage par son contraire l'activit caract-
ristique du civilise est en pftet l'activit libre qui est '<! con-
traire de l'instinct. 11 en resuite que les peuples civilises
seront capables de < grands desseins et de vastes penses
ils ne s'an'ett'ront pas quand l'impulsion, venue du dehors,
aura cesse d'agir; leur histoire dpendra de leur volont
et tout* volont est tenace parce qu'elle est raisonnec. Leur
vie prsente donc de ia continuit et les vnements
en sont t'eues par des ides on peut dire qu' ils ont une
histoire
D'autre part, les civitiss sont des prvoyants. Le souci de
l'avenir, voila peut-tre le critre le plus sur de la civilisa-
tion or, il ne peut prendre place qu'en (lsmes soustraites
aux impulsions de l'instinct. L'conomie politique en drive
l'asrieutture et l'industrie produisent des objets non seule-
meut pour les besoins du jour ou du lendemain, mais pour
ceux (les annes futures. Un oc vit pas nu jour le jour on
fait des rserves, on pargne, on capitalise pour t'avenir.
Assurcment, ce souci de l'avenir n'est pus sans inconve.
nieuts. Il tue, dans l'esprit des civiiises, lu bonne humeur des
sauvan''s; partout ia civilisation amen avec ettet'iaquietude.
Mai!), mai~n' ce pessimisme, la civiiisation n'est pas iufe.
cunde. L'activit volontaire est une activit conomique elle
permeta i'hommed'obteuira moins de frais plus de rsultats
la hm~uG anK~'ise est moins riche eu synony)m"i que les
tangues des sauvages, et pourtant elle jternx't de mieux
exprimer la pense. )':t il en est de mme dans les autres
domaines de l'activit. < Organise, l'activit des civilises
est moins gaspiiiecque l'activit de jeu des snuvages.
Elle est aussi plus cratrice notre art n'est. plus passif ce
n'est pas une simple imitation de ia nature c'est une cration
de Ja beaut. Elle imprime son <-araetere & l'entendement
mme la science des civiliss n'est pas < mythologique
elle n'est pas une srie d'associations d'ides, mais un sys-
tme d'aperceptions solidement oncttatnees. Plus active, la
conscience s'cvcitie et se revte etie-meme I'individu:))it6
se distingue des individualits voisines ia di~'if'' person-
neUe devient le motif morat de nos actions. ]!:)bi)uee a deii-
herer, c'est-dire peser ia r<~<'<' de nos actes, la voionte
applique a elle-mme cette notion de valeur, et l'homme
comprend qu'il a une destine morale a remplir. Aux ordres
tout extrieurs de l'opinion publique et de la religion se joi-
gnent tes prescriptions de la conscience morate.
Enfin, cette morale influe sur ia rtinien mme. L'homme,
par ia vujonte. s'aperoit que ia nature externe n'est pas la
seule cause de ses actes, qu'il est lui-mme l'ouvrier de son
tre il est indpendant de la nature, il en est le maitre. Des
lors il n'a pius il emindre cette nature ni les tres terribtes
que ia < pense mythologique des premiers a~es voyait der-
rire les forces naturelles. Dieu, c'est t'ideai morai sur lequel
ia voionte se modle. Moral et religieux sont toujours syno-
nymes mais dans ia civilisation les actes ne sont pas moraux
parce qu'ils sont dicts par les dieux au contraire, un ordre
parait divin quand il est moral. L'ue conomie politique pr-
voyante, un art crateur, une science explicative, une cons-
cience claire sur sa propre vaieur et une religion moraie,
voita donc ce que l'homme civitisu doit la prdominance de
la volont sur l'instinct.
L'auteur n'oppose pas ces deux portraits sans reconnattro
qu'it existe entre eux de:} intermdiaires. Mntre t'etatde nature
et ta civilisation itptace lu demi'civitisation.Le genre ch'itise
tui-memecomprend des vitt'ietes. Cependant, il est peu tendu
car ta civitisation est, selon ~t. Vierkandt. un fait exceptionnet
et presqueauormat.t'ourtui,unettet. deux exemptes desocietes
civitisees peuvent seuls tre produits ta socit bettenique
du v' sicle et la socit europenne des temps modernes. Les
Chinois, les gyptiens, les Phniciens, les Homains mmes
dans l'antiquit, tes Arabes et les Europens du n;oy<'n ge
n'ont t que des demi-ch'itises. A deux reprises seulement,
ta civilisation est ne eu (h'ece au Y" siecte, eu Hurope a la
Heuaissance. Connnent expliquer cette t'arete d'uu pheuo
men aussi intportaut'C'est que t'ucth'ite instinctive est
favorahte a ta vie sociale tandis que l'activit reHeettie lui est
nuisible. Ce qui pousse les hommes a s'unir en socits, ce
D'est pas ia conscience ci.tirc, mais c'est un instinct.Que la
votante l'emporte sur l'instinct, et le sentiment social tend a
disparatre uue socit qui tend a se civiliser tend doue se
suicider, t'at'tout, rciproquement, o le sentiment social
reste fort, ta civilisation avorte. L'auteur insiste sur ce point
et dmontre son opinion par des arguments varies (p.5, N4
~t!, Les actes instinctifs, dit-il encore, sont plus
simples que les actes votontaires; par suite, ils peuvent tre
conus par un plus ~rand nombre d'hommes a la fois les
cotnbinaisons eomptiques ont moins tic chances do se pro-
duire que les combinaisons ptus simples; les aspirations ins-
tinctives sont donc pius gnrtes que les tendances votou-
tuires; par les instincts un plus ~rand nombre d'hommes
conttnunient que par tes penses ciaires t instinct unit, la
votontu divise o cetui-ta t'emporte dans la bat'ba.'ie
la socit est forte; oit celle-ci predumine dans ta civilisa-

tion la socit s'anaibtit il y a doue comme une antinomie
entre socit et civilisation. Sans doute la morale et la civili-
sation sont en harmonie car la morale, telle que l'entend
M. Vierkandt, est inseparubte de la dignit personnctte tout
ce que ~"c la conscience de soi est j;e par ta moralit.
Mais le triomphe de la morale, assur par ta civilisation, n'en
est pas moins ta ruine de ta socit. Comme l'homme est un
<
animt social il n'est pas un animt ch'itise c'est
pourquoi ta civilisation n'est dans son histoire qu'une excep-
tion.
Pour cette raison, la civilisation est perpetueiiement en
tat d'equiiihre instable. Les vrais civitiin's sentie petit
nombre m6me (tans les socits civitisces. Et d'ailleurs ta
civilisation ne peut pas tendre indfiniment son empire saua
faire courir un danger a l'humanit, car si eiieretnet eu
question toutes les coutumes ou toutes les croyances tradi-
tionm'ifes, si elle veut tout passer a i'preuve de ia critique,
si elle renonce a agir sous prtexte de dlibrer. n'est.it pas
craindre qu'elle n'aille sa ruine en ruinant lu vie sociale?
La civilisation est donc une Heur rare et phmre dans
l'histoire de mme que l'activit volontaire dans ia vie indivi-
duelle.
On ne saurait dissimuler le piuisir que procure l'esprit
l'ingniosit de toutes ces dductions. Quelques-unes d'entre
elles choquent bien le lecteur, et s'ii t'tait dans lu logique du
systme de considrer, comme le veut Fauteur, les savants et
les marchands comme des reprsentants d'un mme type do
civilisation, ou ne pourrait que plaindre le systme une telle
consquence ne sullirait-elle pas le condamner ? Mais. outre
que d'autres remarques de l'auteur lui-mme tendent faire
rentrer les marchands dans une classe moins* intellectuelle
on sera moins tent de lui reprocher ia bizarrerie de la pre-
mire assimilation si l'on remarque les transformations que
)a science moderne introduit dans ia technique c'est par le
caractre scientifique de son industrie, de son commerce et
de sou agriculture plus que par leur extension que se dis-
tingue notre civilisation. Mme dans les dductions les plus
oses, on peut donc trouver des vues exactes.
Pour ce quiestdu principe gnerai de ia thorie, si l'on en
juge d'aprs ses rsultats, it prte ia critique. Il exige que
la rciigion primitive soit une religion de )a peur. mais on
verra, par d'autres chapitres de i'.tKx~ combien est discu-
table cette conception des premiers cultes. La famiiieet i'tat
s'expliquent moins bien encore dans lit thorie de M. Yier-
handt. L'auteur dit, i) est vrai, que, en raison de la prpond-
rance de l'instinct, les peuples sauvage'' sont diviss en deux
classes, taudisqu'une troisime, cciiede i'intei!igence,s'ajoute
aux deux premires citez les civiliss. Mais c'est la seule expli-
cation qu'il donne des faits d'ordre politique. On peut bien
combier en partie cette lacune, montrer, par exempte, que
le parlementarisme est le gouvernement propre aux tres
dont l'activit est reMehic, tandis que l'autoritarisme convient
a des sujets impulsifs. Mais pourquoi telle forme de t'autori-
tarisme est-ette adopte ptut')t que telle autre ? La tttorio
semble impuissante a le dire. Kt de mme on ne voit gure
comment la polygamie serait lie il Fimputsivite, la monoga.
mie la ruflexiuu. Deux groupes d'institutions sociates. et
uon des moins itnportantes tes institutionspolitiques et sur-
tout les institutions domestiques, paraissent donc chapper
lit dductionde M. Vierkandt il n'a pas cuordonnfau point
de vue psychologique tous les faits sociaux.
D'autre part, sa classification des faits sociaux est rudimeu'
taire. Placer d'un ct les Grecs du V sicle et les Europens
modernes, et de l'autre tout le reste de l'espce humaine. c'est
donner une classification plus grossire que celle qui pluce
d'uucdtet'hommeetde l'autre tes animaux, car, entre t'homme
et l'anima) il a, au moins en apparence, une ditTerence
essentietie, tandis que, de l'aveu de i'auteur. les sauvages et
les ch'i)iscs ne sont spares que par des degrs. Des tors, ne
tattait'it pas distinguer quelques-uns de ces degrs'Hst-ii
d'une honne mthode de t'anger sous ta mmo rubrique les
Chinois et les Arabes, ou mme les Australiens et tes Siuux `?I
Si imparfaits qu'ils soient, les documents que nous posse.
dons sur ces socits nous permettent d'tablir des classifi-
cations plus prcises. Mais M. \'ieri<audt, ayant voutu tout
dduire des modes de l'activit et n'ayant distin~Uf que
deux de ces modes, ne pouvait distinguer que deux espces
de socits.
Il en rsulte que les explications de M. Vierkandt demeu-
rcnt abstraites elles rendent compte des aspects les plus
gnraux de la vie des socits infrieures; mais elles ne
dterminent pas avec prcision les institutions caractris-
tiques de ces socits. C'est que fauteur omet un facteur
important l'association.Uu mode d'association, de ta manire
dont les individus reagissent les uns sur les autres dpendent
en effet tes coutumes et tes croyances. Hieu qu'elle se nomne
sociate lit psychologie de M. Vierkandt demeure trop voi-
sine de ia psychologie individuelle.
Pourtant, cette psychologie repose sur un postulat dont lit
valeur n'est pas douteuse elle suppose que i'amc humaine
est partout semblable et que par suite les lois de ta psychologie
gnrale sont partout appliques. Et sans doute ce principe
n'est pas neuf M. Vierkandtcite, en pigraphe, une phrase
de Kadaiitac qui dit Toujours et partout nous trouvons
citez les races humaines en apparence si ditt'rentos tes mmes
t;uts, les mmes ettorts, les mcmes tendMnccs. tes mmes
conceptions. tt aurait pu citer aussi la pense de Taine < Do
mme qu'en miuernto~ie, les cristaux, si divers qu'ils soient,
drivent de quelques formes corporettes simples, de mme,
en histoire, les civilisations, si diverses qu'elles soient, dri-
vent de quelques formes spirituelles simples. Ht sans doute
aussi ce principe, chex M. Yierhandt, est bien plutt un pos-
tulat qu'une induction. Pourtant, il donne qnetques exemples
prcis i'appui de sa thse des coutumes en apparencf con-
traires. et dont la contradiction apparente rejouirait nn Mon-
taigne, s'expliquent par le mme sentiment la naissancede
deux jumeaux est considre par certains peuples comm<?
un vnement heureux, par d'autres comme un vnement
malheureux y a-t-il contradiction' La tnemc cause a-t-elle
produit des encts contraires? Xon la cause de l'opinion est
dans les deux cas ta raret du phnomne il attire l'atten-
tion et comme tous les faits exceptionnels, il est considre
comme un signe de bon ou de mauvais augure. Pourquoi de
bon augure ici, de mauvais augure tu 7 Cela dpend de causes
locales,d'associationsd'ides accidenteites. Mais le phnomne
essentiel, celui qui se retrouve partout, a pour cause un fait
psychotogiquugalement ~nerat. Ainsi, en distinguant dans
les faits sociaux t'accidentet et t'essentiet, on arriveu tes expli-
quer par leurs causes psychotoniques. cHes-m~mes partieu-
tieres ou universettus. M. Vict'kandtdonne donc des exemples
l'appui de ta thorie de l'uniformit de l'aime humaine et il
fournit une mthode permettant d'interprter dans le mme
sens un ~rand nombre de faits. Mais admettons mme que
cette thorie demeure citez lui a i'etat hypothtique. Cette
hypothse est le postulat ncessaire non seulement de toute
science sociologique,mais de toute science humaine. Si l'on
n'admet pas qu'it existe entre les ides et les sentiments de
tous les hommes une parente et mme une homognit rota-
tive, on s'interdit de rechercher une loi ayant !a valeur des
lois de ta nature. Et des lors il est inutile de cottecUouner
des faits en vue d'inductions futures il ne saurait y avoir
d'inductions sociologiques. Mture tous ses dfauts, le livre
de M. \'iert<andt a donc le mrite de poser un postulat indis.
pensable a la sociologie en proclamantl'uniformit dosmes
humaines.
t)' Hx:))A)<D tHL!)EBRAXD. Recht und Sitte auf den
verschiedenen wirtschaftUohen Kulturstufen Ers.
ter Theil. /.f <</ < Mo'/< x~- <f<~M pAfMM </<'
vu),
/'f''f~f<~fw ~fnn~Mtff/Mt'.) lena, t-'ischer, )?< ) iu-8',
tv-IUu pajfes.

M. ttiidebrand se propose d'tudier le droit et les mtunrs


dans les diverses ci viiisations,ctassecs au point de vue cono-
mique. Ce n'est pas qu'il reconnaisse formeiiement lu prpon-
deraucc de i'eiottent conomique sur les autres etetnents de
la civitisittio)); mais, pour lui, les institutions conomiques
passent pin-tout et toujours par les mmes priodes d'volu-
tion eUes tournisscut par suite un n)o;'t'n de dater tes autres
institutions sachant que telle coutume juridiqueest content-
pot'aiue det'itgc pastor!)). par exempic. nous pourrons fixer sa
date dans t'histoire,cat't'etat pastorai n'a pu se prsenterqu'a
un moment dtermin de ('volution. Les institutions cono-
miques sont dune le cadre dans k'qnet viennent se piacer tes
autres faits sociaux. M. ttiidehrattd n'unit les textes princi-
paux qui nous renseignent sur les diverses socits et il les
classe suivant le principe que nous venons d'indiquer.
C'est seuien)ent la premire partie de son travui! qu'i)
publie aujourd'hui elle concerne les peuples chasseurs et
pcheurs, les pasteurs, enfin les agriculteurs primitifs et les
premiers propritaires fonciers.
Les hommes vivent d'abord de chasse et de pche leurs
institutions conomiques sont alors rudimentaires. Ils errent
la recherche de leur proie; ils ne sont pas nomades, mais
ils sont vagabonds. La raret de la nourriture les force en
outre demeurerisols: la famille est le seul groupe social;
ii n'y a mme pas cm'ore de horde. Par suite. il n'y a pas de
pouvoir politique le seul pouvoir est celui de l'homme sur
!a femme et t'entant, et ce pouvoir tant unique n'est limite
par rien tout te travail tombe donc sur ia femme. Ce n'est
pas a dire que la fcnune soit une esclave ravie ou achete si
grossier qu'i) soit, le mariage rsulte, cette poque, du con-
sentemeut des deux parties les parents donnent seulement
leur assentiment, tacite ou explicite, et ils reoivent, eu gn.
rai, des prsents de t'pouseur mais ces prsents lie sont pas
un prix d achnt. A ta vrit, M. Hitdebrand lie donne pas de
sa thse une dmonstration positive il se borne dire qu'a
une poque o l'ide de la proprit est encore incouune, la
femme ne peut pas tre la propre de son mari, et l'intrt
n'est pas encore le motif exclusif des actions des hommes.
C'est seulement a t'age pastoral que nous trouvons des textes
relatifs u rapt ou rachat des femmes & ce moment, en
effet, la femme est devenue unericttesse; ses parents ne la
cdent qu'a tu condition d'tre indemnises le mariage se fuit
par achat. Et tes pauvres, qui ne peuvent acheter une femme,
sont rduits soit vivre cetibatah'es, suit a voter leur femme;
puis les riches, par uvaricc, imitent tu coutume des pauvres
le mariage par rapt suppose le mariage par achat comme le
vot supposelu proprit, Il faut donc renverser l'ordre admis
souvent dans l'volution du mariage on place le mariage par
consentement mutue) aprs le mariage par achat et celui-ci
aprs le rapt pour M. Hitdebrand, le consentement mutuel
(d'ftitteurs aussi peu formute que possible' prcde t'achat et
celui-ci prcde le rapt.
L'homme n'en est pas moins, des l'origine, te souverain
absolu de ta famille. et ce n'est pas pour placer le matriarcat
l'origine des socits que fauteur retenue le rapt au troisime
rang. Comme il n'y a pas encore de groupe comptexe, ta pro-
miscuit ne saurait exister citez tes chasseurs et tes pcheurs.
En outre, t'iuteret n'est pas eMcm'e le motif prpondrant
personne n'est encore assez avare pour que la possession
exclusive d'une femme lui paraisse tre un luxe. Les passions
et les instincts naturels ou lmentaires commandent encore
sans restriction p. t4); or, parmi ces instincts naturels, se
trouve )a jalousie. Dire que ta monogamie est tu forme primi-
tive de ta famitte serait ambigu, car ta famille n'a pas encore
de forme stable et prcise a cotte date: mais ce qui est sur,
c'est que la famille ne dbute pas par la promiscuit. C'est
seulement chez les pasteurs qu'apparait la polyandrie; citez
ces peuples o ta femme est achete, le pauvre, s'il n'est pas
assez fort pour la ravir et s'it ne veut pas se rsigner au ceti-
bat, doit s'associer a ses frres ou parents pour acheter une
femme. Et les riches font, par avarice, ce que les pauvres font
par besoin. ))e mme que ta polyandrie, le matriarcat n'appa-
rat qu' l'ge pastoral ou a ragf agricole, Il arrive, eu enet,
ces poques, que ce ne soit pas la femme qui est achete par
le mari, mais le mari par la femme. Dans ce dernier cas, le
mari ne joue qu'un rote secondaire et ses enfants n'hritent
pas de lui, mais de leur oncle maternet. Le matriarcat et le
patriarcat ne sont donc pas deux phases successives, mais
deux modes contemporains de tu famille. Les riches adoptent
le mode patriurca), tes pauvres doivent subit' te matriarcat. U
ne faut donc pas voir t'ori~ine des socits mi tat (t:)ns
lequel la femme prvaudrait sur t'ttomme. En rsume, :'t
t'a~e de ta citasse. tes institutions sont encore dans un tat
amorphe le pouvoir politique n'existe pas; et si ):) famitte
existe, elle n'a pas in forme prcise que lui donnent tes thori-
ciens on n'y trouve ni promiscuit ni matriarcat. ni rapt ni
achat tout ce qu'on en peut dire, c'est que deux individus de
sexe diffrent se trouvent associas et que t'un, tu femme, est
sous l'autorit absolue de l'autre.
Les chasseurs sont des < proltaires a; les pasteurs, qui
leur succdent, sont deju des capitalistes Us ont des ri-
chesses eu rserve, teur betait. Le btail, en effet. ne sert pas
la consommation courante; c'est seulement pendant les
disettes ou pendant les ftes qu'on ubut un animt. Au dbut
de t'uge pastot'a). tes hommes continuenta chasser pour vivre,
et le b6taii ne sert quedanstes circonstancesexceptionnfttes;
plus tard. on apprend a tirer du btait un revenu le lait on
peut consommer ce revenu sans toucher au capital t'ctat
pastorat devient une industrie laitire le pasteur est un :;atac-
tophage
Quel droit et quelles murs correspondent a cet tat co-
nomique? D'abord, les pasteurs sont nomades; mais beau-
coup d'entre eux se bornent il possder deux rsidences fixes
l'une pour t't, t'.tutre pour ta saison des pluies. En second
lieu, les dimensions du troupeau dterminent les ditnensious
du{j'roupe)nent humain charge de la surveillance. Si le trou-
peau grandit, plusieurs famittes s'unissent pour en prendre
soin. S'itgt-andit encore, s'il prend des proportions excessives.
la famille, ait contraire, se divise, et ses fractions vont cher-
cher pture dans des directions diflercntes c'est ainsi qu'A-
braham et Lot)) se sparent. Comment sout organises ces
familles ainsi formues par t'etat conomique L'ide de
valeur tant ne avec ta proprit du betait, un t'applique
a ta femme; la femme a une valeur qui s'estime ft) ttes de
bctait le mariage se fait par achat. L'autorit dans la
famille appartient donc au pre et ta parent- paternette pr-
vaut. Pourtant, le pouvoir paternct ne dure pas plus long-
temps que lu jeunesse de t'cnfant;du vivant d'tsaac, Jacob
et sau sont maitres dans teur maison, distincte de celle de
leur pre. Au~si ne peut-on pas encore parler do famiite
patriarcale, tt n'y apasdavantitgededroit d'ittnusse. en dt'pit
de l'anecdote relative aux mmos Jacob et Ksai) t'aloe n'
do privii~e sur ses frres que dans les cas o te pre meurt
avant lu majorit des autres enfants on d'autres termes, le
droit d'anesse n'entrane pus une ingale distribution des
biens aprs lit mort du pre; mais c'est un pouvoir exefption-
net (lui est reconnu a t'atne pour que lu famitio no soit pas
prive de citef. !) n'y Il pas davantage, comme ou t'a cru, de
droit du plus jeune; mais il peut arriver qu' ta mort du
pre les ptus jeunes hritent seuls, si tes atJtet, arrives ta
majorit du vivant de leur pre, ont reu de lui ta part qui
leur revient. La famille, a cette poque, comprend des
esclaves ce sont des prisonniers ou des pauvres.
La famitte est eacore l'unique socit il n'y a pas d'Htat;
si certains personnagesout de l'autorit, sur plusieurs fantittes
n'unies, c'est une autorit toute moraie, que leur confre soit
teor naissance, soit leur jfe, leur intetti~ence, teur force ou
leur richesse. Ils ne donnent pas des ordres. m:'is des con-
seils :itn'yadonc pas encore de toi. L'ai;t!tmstoratnous
fait assister la naissance des murs elles sont dj plus
distinctes et plus relies que dans i'a~G prcdent; tnais ces
rgles viennent de la coutume: le droit n'est pas ne.
Kf'ttra-t-ii t'age agricole? L'auteur distingue, au dbut
de cette priode, deux stades celui dans lequel apparatt la
culture, celui qui. voit poindre ta proprit foncire, tt ne faut
pas croire, en cnet. que i'agricuiturc entrane immdiate-
ment ta proprit du sot. Tant qu'il y a de la terre en abon-
dance, elle est, comme l'air et t'eau, '.f <(t<~t<M. Ht celui qui
ta dfriche n'a pas encore sur elle de droit exclusif: il n'a de
droit que sur les fruits que sou travail a fait mth'ir. Le sol,
eu tant que sol, n'est pus eucore approprie. C'est a ce stade
qu'appartiennent tes Germains que nous dcrivent Csar et
Tacite. Aussi M. Hitdebrand entre-t-ii dans un examen
minutieux des textes de ces auteurs pour rtablir, contre
certains interprtes, )a physionomie exacte des Uermains do
cette poque. Nous ne pouvons pas le suivre dans les dctaits
de son travail parfois plus philologique que sociologique. Hn
voici les rsultats. Les Germains sont encore peu agricul-
teurs autour de leurs rsidencesde vastesetendue~demeurent
dsertes et incultes. Aussi ta proprit n'existe-t-elte pas
encore nous verrons en effet que, suivant fauteur, lu pro-
prit du sol ne peut apparatre qu'au moment o les terres
de culture deviennent rares. Les Cfrmains ne connaissent
qu'un droit de jouissance on a le droit de rcolter ce qu'on
a sem, mais on n'a pas de droit sur le sol; it y a trop de
terres pour que la terre ait une valeur, et puisqu'on ne lui
reconnait pas de valeur on ue son~e pus a se l'approprier.
Hst-t-e a dire que la proprit soit collective Mais it M'y a ni
proprict);' ni cottectivite cd'mment parler d'une proprit
cottcctive? 11 n'y n pas de cottcctivitc, pas d'tat sauf eu
temps de guerre, i) n'y apas de gouvernement, donc pus de
droit pubtic. L'individu n'est pas considre comme citoyen.
ni, :') pius forte raison, comme homme il est membre d'une
famille et le seul droit de cette poque comprend ies rgles
qui n'gissGnt ses rapports avec les autres membres de sa
famitte. Ht puisqu'il n'y apas de droit collectif, il ne saurait
y avoir de proprit collective. Conunent exptfquer, dans
cette hypothse, les textes fameux d'aprs lesquels les Cer-
mains se partageaient les terres et refaisaient chaque anne
le partage? Ces textes, selon M. Hitdebrand, qui reprend ici
l'opinion de Fustel de Coutanges, ont t mat compris
Mn' </t<f/~ dit Tacite; et on a lu f~'r't xt/c Mt</<u)f.
C'est uu contresens. Les Germains changent de champ, parce
qu'ils ont devant eux d'immenses espaces incultes, parce que
la terre n'est pas encore rare (~ </w<</ ~cr mais cela ne
veut pas dire qu'ils changent
vetit pliS tours chumps,
chungelltleurs champs.<Mpf-f<t<H/M/
.I!J"o,pl/"l'l/Illl",
dit encore Tacite mais rien ne prouve que ce soit la cottecti-
vite qui fasse ce partage entre ses membres; l'examen minu-
tieux des textes prouve qu'il s'agit d'une repartition des
terres d'un individu entre ses divers tenanciers. Et cet indi-
vidu tui-mcme ne peut pas encore tre appel propritaire
du sol il ne reconnatt pas de valeur la terre il t'aban-
donnera bientt pour une autre. Mme ait temps de Tacite, )a
proprit foncire n'est pas encore ne chex tes Germains le
seul propres qui se soit accompli depuis l'poque de Csar,
c'est celui-ci on reste plusieurs annes sur la mme terre
au lieu de t'abandonner aprs chaque rcolte la possession
'je ne dis pas la proprit) devient plus stable.
Quand la population s'accrott, les terres deviennent rares;
elles prennent alors de la valeur, mme si elles ne sont pas
cultives le fonds par tui.memcdevientune richesse: iapro-
prit'te foncire apparat. M. Hitdebrand montre les transfor-
mations sociales qui t'accompagnent la division des classes,
l'institution du colonat, puis du servage; !a naissance de
les
t'Htat ou de ta eoiiectivitqui interdit :)ux trangers de pos.
seder et femmes pour viter l'immixtion des
trangers. Mais il s'attache surtout a dmontrer, toujours
la suite de t-'ustet de Cotants. que cette proprit primitive

n'est pas une proprit coiteetive. ~ous avons maintenant tes


deux lments qui nousman<)uaienttunt t'iteurepour
constituer mie proprit cottectivc ta proju'it et )a <'oitef'-
tivit. Pourtant la proprit demeure indivi.duette. L'opinion
contraire repose, dit l'auteur, sur nue quadruple confu-
sion t Elle confond r<'< cuM)HU<K< avec <'M )</<<.<: de i'exis-
tence de terres qui ne sont personne, ette couciat a t'exis-
tence de proprits qui seraient tout le monde. Elle
confond ~'f~<'< m~fc~cc et ~<'o/''<</ t.~fc/.w. Or, dans les
socits ou t'indivisiou est d'usage, elle u'est pas du tout de
droit l'indivision estcotntnode, pitree qu'eiie permet tous
les copropritaires,sauf uu grant,de percevoir les fruits de
ta proprit sans travaitier; ta division, surtout t'ofi~ine.
est un contraire incommode, car les premiers agriculteurs,
habitues, dans t'age pastoral, se partager tes troupeaux,
trouvent moins tacite de pat'tager le terrain mais nulle
part, ni chez les Kabytes de ttauoteau et Letourneux, ni chez
les Indiens de Sumuer Maine, on n'est tenu de rester dans
l'indivision 3" L'ne trnisiemeconfusion consiste prendre
un droit de~<t~MM''<' pour un droit de /<~<W. De ce que
certains individus font.pattre tours troupeaux sur un sol qui
aie leur appartient pas en propre, on conclut que ce sol
appartient tout le monde mais il peut trs bien appartenir

et il appartient reettement un autre individu qui cou-
cde aux premiers un droit de jouissance sur su proprit.
4" Enfin, on confond uu droit purement (/M/M<~<de t'Htat

avec un droit de proprit. t)e ce que t'tat teve des impts
fonciers, ou conclut qu'il est le propritaire l'impt serait un
fermage. Mais l'existence des impts fonciers et mme du
droit d'expropriation dans nos socits ne prouve pas que
ta proprit soit chez nous collective. Ainsi, ta thorie do lu
primaut du communisme reposant sur tant do confusions
doit tre abandonne ia proprit primitive est individuelle.
C'est ce point que s'arrte le volume de M. Hitdebrand,
sans qu'il ait le loisir de montrer dans le dtail quelles ins-
titutions domestiques, politiques, quelles coutumes morales
correspondent ce stade conomique. U rserve sans doute
cette tude pour les volumes ultrieurs.
Nous avons rsum avec quelque dtni) le livre de ){. ttit-
(iebrund parce qu'il est fitit avec metttode et avec critique.
C'est un des rares livres traitant des origines do )a socit
qui n'accueitto pas de confiance tous les rcits des voyageurs
les premiers venus sur les premiers venus des sauvages.
Aussi ses conclusions, mme lorsqu'elles ue concordent pas
avec les ides reues dans la sociologie contemporaine,
paraissent-ettes plus solidementtablies que ces ides reues.
Un reprochera peut-tre l'auteur d'avoir abus des vues
subjectives dans son interprtation de certaines origines. Par
exemple, torsqu'it dit que la promisfuite n'est pas le premier
Ctat de )a famiite parce que ta jalousie est un instinct plus
naturel et plus ctemeataire que t'intert, on lui detnandera les
preuves objectives de son ufirmatioH. t)e nteme lorsqu'il
a)!inne que le jnaria~e par rapt est une institution invente
par tes pauvres et imite par les riches. 11 rpondrait sans
doute que ces vues subjectives ne sont pas contredites
par les textes, qu'aucun cas de promiscuit ou de rapt n'est
signa)' t'~c de la chasse, qu'ou n'a donc pas le droit de
considrer ces coutumes comme primitives et qu'il faut ds
lors les considrer comme drives de i'interet. Atais i) reste
qu'aucun texte ne confirme positivement son hypothse. En
outre, elle n'explique pas tous les faits de l'a~e pastoral que
des frres pauvres puissent s'associer pour acheter une
femme, c'est admissible mais on ne comprend pas que
cette possibilit devienne un devoir le caractre obligatoire
du ievirat par exemple n'est pas explique par cette cause
purement conomique ta polyandrie ne s'explique pas
entirement par la richesse ou la pauvret des individus.
L'imitation des pauvres par les riches aurait aussi besoin
d'tre dmontre. En gnrt, ce sont ptutot les pauvres qui,
de gr ou de force, imitent les riches. Ht. puisque M. Hitde-
brand assimile le rapt un vol ordinaire, ou voit bien que
des pauvres sont pousss au vol par leur misre; maison
voit rarement des riches imiter cette pratique par avarice.
Avouons d'ailleurs que. si arbitraire qu'Gttesoit.t'hypothcse
demeure fort ingnieuse.
A mesure que M. HHdebrand avance dans l'histoire et se
trouve en prsence de textes plus prcis, l'arbitraire dispu-
rat aussi ses conclusions relatives a l'tat de la proprit
chez les Cennains ainsi qu' l'individualisme de ta proprit
primitiveparaissent-elles trs plausibles. H est vrai que sur
ce point son origioaiite est moindre puisqu'il suit presque par-
tout t'opinhm de i-'ustei de Couianges. Mais peu importe
t'esprit critique dont il fait preuve dans ces chapitres promet
pour )a suite de t'ouvre des thories fortement prouves.
L'a doute subsiste c'est que M. iiiidebrand puisse tirer du
point de vue conomique au.quet il se p)ace tous les avantages
qu'il en attend.))n'est pas dit un mot du sentiment religieux
des peupics dcrits pourtant, )a rtinien existe chex ces
peuples et eiie itmue.sur )eur droit et sur leurs murs. Com-
ment n'est-ciie pas mme nomme ? Xe serait-ce pas parce
qn'etieextassexindpendante des faits conomiques pour que
le principe de classification adopte par M. ititdebrand soit
mauvais? Je sais bien qu'il ne dit nuf)e part qu'ii .veut ratta.
cher a l'conomique .toutes les formes sociales. Mais sa
metttodc lui permettra-t-eite d'arriver mme a dater les faits
sociaux' L'volution des faits conomiques est-elle aussi
immuaidequ'ii iedit dans sa prface? t) remarque iui-meme,
au dbut du chapih'e consacre ~ux premiers u~ricutteurs,
qu'on a pu passer de i'a~e de ta citasse a t'it~c agricote sans
connatre t'etat pastorat. iJes tors, comment acccpte-t-i) son
principe?)';t sonJivre peut-it dmontrer ta thse qu'it
annonce? Mme s'il y choue, il demeure un rpertoire prcis
et metitodique des textes relatifs aux peuples primitifs; et

surtout on nesaurait trop insister sur ce point ce recueil
n'est pas un amas de documents quetconques, mais une col-
lection de documents critiques.

GROSSI. La. Morale pratica. degti (mtiohi


Vtx<:Hxxo
Messioani: ricerche e documenti etnograact '7.~ Mw~c
~<<~f'(/<<a<f<'')f.,V<f'x'ut.< r<'f/<('<t< el </MCt<M'M<<'</tNn-
~~~/~)<t'.<~f<r/4'~<t'c'~/' <M (/<<<f~, apriie t8U7.)

M. Grossi met en tumiere le contraste qui existe entre !a


cruaut du droit pena) et n'tevation de ta !nora)e pratique
chez les ancicnsMexicains. D'une part, en cnet. les peines les
plus terribtes sont dictes contre le voleur et t'adutterc;
d'autre part, i'ivresse et le mensonge sont condamnes plus
svrement que dans nos socits.
C'est surtout dans les coutumes domestiques que se revte
!a puret de cette morale. La monogamie est de rgtc, sauf
pour les chefs. La femme est respecte on trouve, chez les
anciens Mexicains, cette formule evangtique Regarder
une femme avec une curiosit excessive, c'est commettre
t'adultre avec tes yeux. La femme ne s'occupe pas des tra-
vaux trop fatigants. Eu revanette, elle participe aux fonctions
sacerdotates.Ce n'est pas seulement io respect de la femme,
c'est aussi l'ducation de t'entant qui prouve combien est vit
citez les anciens Mexicains le sentiment murt. Mais sur ce
point M. Grossi se borne & citer de tondues pa~ps de Oavi-
gero .s7f)<'!<t~n<f/f/ J/M.t'o) et a traduire, d'aprs ta version
franaise de Hmi Simeon', t'exttortationd'un pre mexicain
son fils et lu rponse du fils son pre. Ce luu; morceau
n'est pourtant pas d'une originalit profonde il contient plus
de rgles de savoir-vivre que de prceptes moraux, et t'on ue
comprend gure l'admiration qu'il excite dans i'ame de
M. Crossi pour lui, il n'y aurait riena retrancher, et presque
rien ajouter ces conseils. Kt il s'tonne, une fois de plus,
du contraste que prsente cette morate avec la bartjarie des
Axteques. Comment les mmes hommes peuvent-its se pas-
sionner pour les sat'rifices humains et concevoir en mme
temps un idat moral aussi pur?
Le problme n'est peut-tre pas insotubte. D'une part, en
ctet, M. Grossi exagre la puret de cette morate c'est sur-
tout par ta crainte que le pre mcxieaia agit sur t'esprit de
son fils Si tu trompes les hommes, tu ne seras pas bien vu,
tu passeras tes jours sur ta terre dans ta douteuret les larmes;
quand tu mourras, ta fin sera misrable; tes tvreset ta langue
seront dvores par le (eu. Qu'y a-t i! de si pur dans ces
menaces ? Ht qu'y a-t-it de si eieve dans tes rentes de civilit
pueriie qui tiennent une place importante dans ce morceau?
Les Aztques ne sont pas les seuls hommes qui, pratiquant
des sacrifices humains, recommandaient leurs fits de satner
les gens en tout lieu D'autre part, est-il bien sur que le
texte cit soit d'une autiquitetres recule? M. Grossi se con-
tente d'affirmer, d'aprs un auteur franais. Chevalier, que
t'on s'est born n remplacer dans ce morceau le nom des diviui-
tes aztques par le nom de Kotre-Seigneur ou de Jsus-
Christ Mais on voudrait une dmonstration plus complte
est-il vraisembtabteque les auteurs de cette substitution t'aient
considre comme suffisante ? N'auront its pas t tents d'in-
srer dans le texte des prceptes chrtiens ? H est donc pos.
~); ~Yf<))M)Ht'<f (/<' ht ~;'/m' M/ttM//o Mr.r-ff;'n< f'uttjxMc'' t'n t!itT.
))<n' h; t'tttnci~'ain Attdf'' df <)))))".<, <') jmhti~ av.' tt'ttr", <~rtuit'i~
)H);ut! etc.. )):u' H'~ni t'ittt'u. t'itti", ho~t'ittu'fiL' Uittmtmk, tK!<.
sihte que le problme pos par M. Grossi se ramen & un pro-
blme d'rudition l'cart rel entre la morale des Aztques
d'une part, leur droit et leur religion de l'autre, serait moins
grand qu'it n'apparat dans des textes altrs.

!)' Ptttt.n'p PAtJUTSCttKH. Ethnographie Nordost AM-


kas. Die geistige Cultur der Daa&kU, Galla und
Somal (~Att~'ap/x'c ;/<t tM~(/-OM< (/<- <t/h'~Mf. Cx~Mre
!(<'<'d('<' (/M ~atM~th, (~ GathM pt tff<! SoM((<)!). Ber-
!iu, Reimer, 1896. 1 vat. in-S', xvn-3t 2 pages.
M. Pautitschke s'est livr une tude complte des Uana-
kils, des CaHas et des Somalis la premire partie a t publie
dans un volume traitant de leur civilisation materieiic i'au-
teur publie maintenant ses recherchessur la civilisation intet-
lectuelle des mornes peuples.
Aucune thorie n'est soutenue l'auteur se borne noncer
les faits H a contrl par tui-meme les faits rapports par
d'autres crivains, voyageurs ou missionnaires et il se cou-
tente de dcrire. H se place, en outre, au point do vue ethno.
graphiquequ'il prend soin do distinguer du point de vue de la
psychologie des peuples. Aussi la sociologie ne peut-ette pas
chercher dans ce livre des hypothses nouvelles; mais elle y
trouvera de nombreux documents pour dtendre ou attaquer
d'anciennes hypothses. Ce livre est un recueil de matriaux
choisis avec soin ce titre il est prcieux. U entre dans les
dfaits les plus minutieux sur l'organisation de t'ihat et les
attributions des fonctionnaires, sur l'organisation des reti.
gions et le rle de leurs prtres nous ne pouvons pas rsumer
ces chapitres quant aux autres, Ils n'appartiennent pas la
sociologie morale, car l'auteur y parle des facults psycholo-
giques, du langage, de l'art et de la science de ces trois peu-
plades.
Avec ses rfrences et ses index, ce livre sera un instrument
d'enqute trs commode. Au point de vue qui nous occupe,
c'est tout ce que nous en pouvons dire nous le regrettons,
car cette note n'est pas proportionne l'importance de l'ou-
vrage. Mais elle sera peut-tre suttisaate pour attirer sur lui
l'attention des sociologues.
)<). t.A tAJOD.h
t;
)'J)'M.)H')t)iMK)it.

t'rof. J. KOHLEM.
mismus,
Zur Urgoschtchte der Ehe. Tote.
Gruppenohe, Mutterreoht. CoM~tf'nx rt
<'!fo~'<'~'//<)'<' '/ Mn'<f~ '')/~<)('.<H', wart'f~e M<<'<<
<<'<fmf~c/-ttf'<.)Stuttpu't, Hntke, t vut. in-K".
j. Ou suit comment Morgan, aprs avoir observ les
termes employas dans un grand nombre de tribus difMreutes
pour destituer tes divers degrs de parente, a cru pouvoir
conciure de ''M numenctatures a l'existence d'une or~anisa-
tioti tanuHtttc ou t'entant suivrait la condition de la mre et
o le mariag'e se contracteratt, non entre individus, mais
entre gruunps. Tous les honuues d'une socit domestique
determint'e tl'pouset'aient cottectivement toutes les femmes
d'une autre socit du mme genre, et rciproquement. Apres
:n'o}r t, pendant longtemps, acceptes par la (;enera)h< d<'s
socioto,;ues, ces conclusions ont etc rcemment l'objet dat-
taques vives et rptes. C'est Starckc qui u connnence puis
sout venus les frres Sarasin, qui prtendirent avoir trouve
chez les Weddas de Ccytau une organisation matrimoniale
trs re~utiere et mme une vritable monogamie, quoique lu
civilisation y fut trs primitive'. Westermarck, dans un
ouvrage toutt) et quoique pou difus, reprit les objections de
Stareke et runit, pour les appuyer, un nombre assez respec-
table de documents ethnographiques'. Enna, tout dernire-
ment, Mucke tout en combattaitles thories deWcstcrmarek
et de Stareke et tout en reconnaissant l'importance des faits
observes par Morgan, entreprit de prouver que cet auteur
n'en avait pas compris le sens et en proposa une interprta-
tion nouvel te.

(t) Me /')'(fnt/)'t'c f'nmf/f'c fo t'/o'f'r HM'/<M. Mnf/ /i'H/")f<-<t;M.y.


Lt'ipxif;. ~M. Lu tradttction fhtn~is.' M j'.u'u <-)K'x At'-nn. t'ftn~. ))t't'.
t~ t'tMt n)n) Frit!! S triton. Me tt'oMa~t'onff/fo)) ));< ffteftiftttM.fbnxff
<<<j'c/<M/<'M.fit) \'<t-).ur)t <))'- in 'h'r )'hy)"K' 't' Mcns<;h'')tti'<M!h.')t
mnh'K;< der L~<Ut<!< n!t)f.'r xu )!rit)!u. Wit'<)'a<)'-n.
?) T/tf t)):(t)t-~ M/' At)t<tM t)tt')'<t){)< t.M<M~ ix'.)t. 'rtmt. )f. (nu )). ))M
\'<tt-ixny. t'Ut-is. <8'tu.
~) M~'f/f )f~ ~'Mft/ff t !/<'ft' M<~Mt-/tt<'A~'f t'M/X-x'tc/M))~. Stut)}t!i)'t,
<??.
Le Hvre de M. Kobier a pour objet de ragir contre cette
tendance. Suivant iui, si ces auteurs ont ce point mconnu
i'uvrede Morgan, c'est qu'Us ne tiennent pas compte des faits
ou qu'ils tour appliquent une mauvaise mtitode. Ils croient,
t'n efet, avoir dmontr )e caractre primitif du mariage et de
ht famiiie patriarcate en faisant voir que i'un et l'autre se
rencontrent mme chez des peuples dont ta civilisation est ou
leur parait tre trs rudimentaire. Or, outre que les critres
d'pres lesquels on dcide ainsi du de~re de civilisation d'un
peuple sont, le plus souvent, arbitraires/ta question pose
dans ces termes est insoluble. Car il n'y a aucun moyen de
prouver qu'une institution quelcontlue est primitive, absolu-
ment partant. Tout ce qu'on peut rechercher,c'est si telle pra-
tique est !a furme primitive de telle autre ou en est drive.
On ne peut situer tes stades de l'volution historique que les
uns par rapport aux autres; et, pour y arriver, <'e ne sont
pas les circonstances ambiantes qu'i) faut considrer, mais
les faits mmes dont on veut dterminer la relation causate
et chronologique.
Mais cette tude mme ne doit pas se faire sans mthode.
fi est des principes dont on ne doit pas se dpartir. M. Kohior
nonce les suivants qui, s'ils sont apptiques avec circonspec-
tion, nous semblent en effet irreprochabtes
1" Quand on constate, dans un certain nombre de cas, que
l'institution est issue de l'institution b, sans que jamuis la
relation inverse ait t observe, il est logique d'admettre que
la seconde est la forme origineHe de ia premire.
Divers procdes peuvent donner :'< cette conclusion un
surcroit d'autorit
f<. Si t'on parvient trouver queis sont tes facteurs qui ont
dtermine rvolution a se faire dans ce seus, et surtout si l'on
peut tablir que ces (at'tcurs se retrouvent identiquement
dans toute socit humaine
Si, l ou est en pleine floraison, ou trouve des traces
de & qui sont en train de s'ettacer, mais ne peuvent s'expliquer
que comme des survivances du pass.
Pour savoir ce qui doit tre quatin do survivances. il con-
vient de prendre pour point de repre ia forme que prsente
l'institution considre ia o elle est parvenue il son plus
entier dveloppement. L'observation des peuples o l'on peut
eu suivre le deciin jusqu'au moment o elle n'est plus qu'une
Simple formalit sera plus dmonstrativeencore.
H" Enfin, quand deux institutions se rencontrent constam-
ment ensemble, maigre la diversit des races et des civili-
sations, on sera fond supposer qu'i) existe entre elles un
tien interne. surtout si l'on peut faire voir quelles sont les
causes psychotoniques ou sociologiques qui font cette soli-
darit*.
t.
C'est lu mthode ainsi formule'quel'auteur va appliquer
la question du mariage et de la famille primitive.


H. Ou u vu plus haut eu quoi consiste le totmisme'
Pour rappeler
ne les faits les plus essentiels, te totem est
que
t'tre anim ou inanim qui sert d'emblme au clan etiui
donne son nom. Ce nom cottecUf est aussi celui des individus.
Or, suivant M. Kohter, c'est sur le totmisme que repose
t organisation primitive do la famille. En etet, c'est l'institu-
tion sociale ta plus ancienne que nous connaissions. D'un
autre cte, elle soutient avecla famille des rapports vidents
car l'animal qui sert do totem est honore comme t'anctro du
groupe. Tous les membres du clan sont donc censs descendre
d'une mme origine, tre faits de la mme chair et du mme
sang; autrement dit, ils sont tous parents.
De cette premire proposition sort aussitt un important
corollaire. Si le totmisme est la pierre angulaire de la
famiiie, celle-ci a du ncessairement commencer par tre
maternelle,c'est--direque la famille de l'enfant a t d'abord
celle de sa mre, et non celle de son pre.
En effet, c'est un principe gnrt que nul ne peut avoir
deux totems la fois. Car quelqu'un qui participerait simul-
tanment deux tres totmiques serait un hybride, un
monstre inconcevable on ne peut tre en mme temps un
loup et un livre, une tortue et un serpent. D'autre part, nous
savons que, en vertu de l'exogamie, deux poux ne sont
jamais d'un seul et mme totem. Par consquent, l'enfant
doit appartenir exclusivement soit au totem de son pre, soit
celui de sa mre; et comme du totem dpend la parent,
celle-ci ne peut tre qu'troitement agnatique ou purement
utrine; elle doit s'tablir uniquementf.r Ma<:f<M f< ~r m<M-

tt) CcUc ')u<<ti()n tt'' t)t'th'")'' ft ctc j))ns )H)))<h')))<;nttni)U':<' jtart'ank'nr


<tttt).< )<*JM)'M/M<)M ~.t/<<ft~M<'t/K, \'n, tMT.
<~ On trunvMt'a <)<' di.<<'M.<.<i"n ')'' <s r)')''< 'fat)'' un <t)'ti''h* ')'' W~"t
tt'r<)tHtv){. ~tf)'. tM/o'. '/f <'''f~ )!?*.
~3! Voym p. ~-3 <-t !<).
ctt<<M,ou bien, au contraire, ~.f /i:'w<KMr < p<'r /cw<MN~. Parce
qu'on no peut pas ressortir deux totems, ou ne peut pas
avoir deux familles. La filiation sera ncessairement uni-
tatrate.
De ces deux systemcsopposs, tequei est le ptus ancien ? `l
Si l'ou s'en tient aux faits directementobserves, il semble-
rait qu'aucun d'eux n'eut prcd l'autre; car c'est tantt le
premieret tantt te second qu'on rencontre chez les ditlrentcs
socits qui, en Australie et eu Amrique, pratiquent le
plus manifestement le totmisme. Mais comme t'unit d'ori-
gine des tribus indiennes n'est pas douteuse, non plus que
celle des peuplades australiennes, et que deux rgimes
familiaux aussi contradictoires n'ont pu coexister dans le
groupe originel, il est certain que l'un d'eux doit tre ant-
rieur l'autre. Or l'auteur opte pour l'antriorit de la filia-
tion utrine. !i est inutile de reproduire ici les raisons par
lesquelles il prouve sa thse, car nous les avons nous-meme
exposes un peu plus haut tt a toutefois le tort de ne pas
distinguer nettement entre ta famille totmique ou le ctau, et
les petites familles de fait qui se forment au sein du clan.
S'il est certain que, t'origine, la premire ne se composait
que de parents utrins, il n'est pas prouv qu'il en ait t
de mme des secondes. Cette confusion nuit a l'argumen-
tation.
Eu mme temps qu'a ta famille maternelle, le totmisme,
suivant M. Kotttor,devait ncessairement conduireau mariage
collectif.
En effet, la loi d'exogamie implique qu'un totem dtermin
en pouse un autre, non moins dfini. C'est dire que les
hommes du premier pousent collectivement toutes les
femmes du second et rciproquement. Tout individu mate
qui porte les signes du totem A est, de droit, t'poux de toute
femme qui porte les signes du totem B.
Mais M. Kohterne s'en tient pas ces considrations gn-
rtes. Pour prouver la ratit de ces unions collectives, il
invoque des faits nouveaux, emprunts aux nomenclaturesde
parents.
C'est dj cette source que Morgan avait puis ses princi-
paux arguments. Voici, ramene ses traits essentiels, en quoi
consistait sa dmonstration. Dans une multitude de tribus,

(t) Voyci! p. A! et <aiv.


t'enfnnt dsigne par le mente nom sa mre et les smurs ut-
rines de s:) tnere. si la ntiatiou se fuit exclusivement en ti~nc
maternette:itappette les unes et les autres ses mres. De
mme, itappette pres, outre sou pre proprement dit. tous
les frres utrins de sou pre'. n se considcre dune comme
issu de l'union contracte entre ce groupe d'itonnnes et ce
groupe de femmes, sans que. ni dans l'un ni dans l'autre, it
distinnue d'individusdetcrmith's qutraite persouMeitenK'nt
comne ses parotts. <est dire. concluait Murpm, <)ue ces
deux groupes sont unisconectivement.tt trouvait unecunfir-
tnatiott (te cette hypothse dans ce fait f)uu, )a o t'exogatuic
est etahHe depuis ioogtetxps. t'enfant. <)ui confond sous une
tuerne rubrique sa mre et les su'urs de sa mre, desigae, au
contraire, parun mot di)'reut iess'eurs utrines de scu pre',
il les nomme, non pas ses inres, mais "es tantes. C'est doue
qu'i) ne peut pas se croire ned'ettes. ii prucedede mme pour
les frres utrins')e sa n)et'e:iites traite, non de pre-
tnais d'unctes. Or c'est bien ce qui doit arriver par suite de
t'pxo~))nie.);t'tfe-ci,e)) euft. prohibe ieconxnercesexut'i
entre frres et surs de tnere sous le re}{it))e de la fittnitte
maternetie. t'itr consquent, je ne puis pas dt'voir tf jour
ni aux {rt'res de tna mre ni aux s'jjurs de mon peru. L'exis-
tence de dnominations distinctes, seiun que des rapports
de filiation suut ou non possibles entre t'enfant et l'indi-
vidu dt'si~ preuve que tout ce vocabutaireexpritne bien
des t'etations de consanguinit et de parente et puisque
tesvocat'iesf'mptoyt'-s sont cotiectifs.it faut bien quta
parente ette-mOne ait le m~tnc caractre. Mais comment la
titiation pourrait-etiu tre cottective. si le )))anat;<: ne t'tait
pas?
C'est cette argumentation qu'ont attaque Starckeet \es-
termarck. H'i ont prtendu que ces nomenclatures n'expri-
ment pas des rapports de parente que tes termes dont ettes
sont faites sont de simples formutes, etc. Sans repondre direc-
tementtcurs critiques, M.Kohier entreprend de les rfuter
en s'attachant a mettre en retiff certaines jtarticuiarites, ou
rcemment observes ou insunisamment remarques, de tu

!hf~'<t!'Mt~'< d''jt''t't')''tu''r't)t~n''<))<t''<t"i'j!n)!h)~
tit'!tt)')<U'i)n!'j!~Ut'mit-t'ttiht~-ri)'a))<<r~tt'X))~Kt) <'?').ttYrttudtt
j<)'i))''ij~f)Mtr)'<'n')tat'<h'r')tnttt')t!h'f!".)<<!'tn*<h'<ttti''rr !<))''
a)~)''th'~hm'<ti))'<h'nti!')~jUi.))!n-tti~M!t)) )!tnwit.
La)tt'')!tr<t''))?iu)<Mfi''n~n'tt'));t)~)'ti').
terminoiogie usite che:! les Omaitas et chez les Choctas et ou
il croit trouver une confirmation dunith'e des titMories do
Morgan. J) insiste surtout sur les premiers qui ont t l'objet
d'une exce))ento tude de Dorsey
\ous sovons par cet observateur que, dans cette peuplade,
o ta filiation se fait en ti~ne patcrnetic, i'humme pouse ou
peut pouser, outre sa fenune et les smurs de ceHe-ei, les
tantes et les nices des prcdentes en !i~ne agnatiqne, c'est-
-dire les filles du frre de ia femme et les su'urs de son
pre. Or ce qui, d'aprs Kohier. dmontre catgoriquement
que le vocabulaire conteste correspond bien a des relations
de parent, c'est que ces conditions particuiires du mariage
rendent compte de tous les dtails de ta nuinenctatm't' qui est
usite chez ces mmes peuples; et pourtant ils sont d'une
extrme complication, cti metne tcmpsqu'its formeut uti sys-
tme d'une remarquabte unit tonique.
En etet, si mon pre se considre comme ie mari, non seu-
fementdc sa femme et des surs de sa femme, mais encore
des tantes et des nices de ces dernires, je devrai dunner
aux unes et aux autres ie nom de mres. Ht en enet, elles sont
toutes dsignes dans la hu)~ue des Omahas par )u tnme
tenne '<M<f<). Cette expression s'tend mme plus foin, et cela
conformment aux lois de ia togiqm' la plus rigoureuse. En
cflet, si )a nice do ma mre, tant ia femme de mon pcre,
est ma mre, la nice de cette nice < toujours en !is"c
tique), c'est--dire la )i))e du fiis de mon oncie, se trouve tre,
u~
elle aussi. )a nice d'une personne que j'appeHe tnre; par
consquent, eu vertu du mme principe, je dois t'appeler
galement du mme nom et c'est pourquoi te mot d'M/M lui
est applique.
Pour ta mente raison, je devrai considrer comme frres
on sours tous les enfants des femmes que je considre
comme mres, c'est--dire les enfants des surs, des tantes
et des nices et des petites-nicesde ma mre. C'est enecti-
venient ce qu'on constate. Toutes ces personnes sont confon-
dues sous )a metne dnomination (<Y<f<' ou <~<t~' selon le
sexe
tJne dernire originalit de cette nomenclature s'explique
de )a mme manire. Il n'y existe pas de mot spcial qui cor-
responde l'ide do t'otMUt c'est a dire que ce rapport de

it) )tt. j<t)))MM< <))< oy (At Mtfox e/ OAt)< p. ~H ''t suiv.


parent ne pnratt pas y tre distingu (tes autres. Or ce serait
une consquence ncessaire du mariage collectif tel qu'il se
pratique chez tes Omahas. Ru effet, comme j'ai pour onclesles
(rres de mu mre et pour tantes les surs de mon pre. je
ne puis avoir pour cousins que les enfants des uns et des
autres. Mais les filles du frre de ma mre sont, par dfini-
tion, les nices de ma mre; partant, d'aprs ce qui a t
dit plus haut, elles sont mes mres !)) et non mes cou-
sines. Quant aux fils du frre de ma mre, puisqu'ils sont tes P
frres des prcdentes, c'est--dire de personnes que j'appelle
mres, ils sont. non mes cousins, mais mes oncles M~t).
Enfin, les enfants do la sur de mon pre me traiteront de
mre si je suis femme, puisque je suis nice de leur mre,
et, si je suis homme, puisque mes soeurs sont leurs mres, je
serai leur oncle et ils seront, selon leur sexe, ou mes neveux
ou mes nices ~('t'). Le terme de cousins est donc sans <

emploi.
M. Kohter passe en revue toutes les formes possibles de

'?
parente et montre qu'elles sont toutes dduites de la mme
prmisse. Nous ne pouvons reproduire ici la suite de ses
dductions nous nous en tiendrons aux prcdentesqui sont
les plus caractristiques. Mais si la nature du mariage rend
ainsi compte de la terminologie, n'est-ce pas que cette-ci
rpond aux diffrentes relations de consanguinit?
Les observations faites chez les Choetas confirment curieu-
sement les prcdentes. Citez ces peuples, la filiation se fait
en ligne maternelle. Or, on retrouve chez eux toutes les par*
ticutarits qui viennent d'tre releves citez les Omahas, accf
ffffc f~cHfc, ~ot~c/M', gu'c~M y M~ t'cttfCM<'f<f. Chez les <

Omahas, je donne le nom de mres, non seulement a ma mre


et ses surs, mais encore ses tantes et ses nices en ligne
agnatique. Chez les Choetas, c'est le nom de pre qui reoit
cette extension il sert dsigner, outre le pre et ses frres,
leurs oncles et leurs neveux en ligne utrine, et toute la
nomenclatureest modifie dans le mme sens. Cette inversion
est la consquencelogique de l'inversion signale dans le sys-
tme de filiation. En effet, ma mre, dans ce cas, peut trs
bien pouser le neveu utrin de son mari, c'est--dire le fils
de ta MBur de ce dernier. Car ce neveu est, par hypothse, du
totem que portent et sa mre et le frre de sa mre, son oncle
utrin, puisque le totem se transmet par les femmes. Et puis-
que cet oncle est dj le mari de ma mre, il en rsulte que
le neveu lui aussi appartieut un ctun dont les hommes sont,
de droit, les poux de ma mre. Pat' consquent il est uu mari
pour ma mre et, pour moi, un pre. On ferait le mme rai-
sonnement pour l'oncto de mou pre. Au contraire, la nice
do ma mre ne peut pas s'unira mon pre ni, par suite, tre
considre comme ma mre. Car cette nice, fille du frre de
ma mre, appartient au ctan de sa mre; ce cian, par dfini-
tion, n'est pas celui de sou pre, ni. par consquent celui de
ma mre. Elle est donc d'un autre clan que celui avec lequel
mon pre est alli sexuellement.

tit. Quoique, prises !a lettre, ta plupart des conclu-


sions de l'auteur ne nous semblent pas acceptables, nous con-
sidrons son tude comme une importante contribution ta
sociologie de la {amiti. Les lments de sun travail et cer-
tains des rsultats auxquels il est arriv nous paraissent
devoir tre conservs, et peut-tre facilitent-ils l'entente sur
les points contests.
Tout d'abord, le rapport tabli entre le totmisme et la
famille primitive est, croyons-nous, incontestable et it est de
nature jeter une trs vive lumire sur rvolution domes-
tique. A l'origine. la religion du totem est certainement le
centre et le loyer de la vie famitiate on ne peut pas com-
prendre l'une sans l'autre. Si mme il est un reproche qu'on
peut adressera M. Koliler, c'est de n'avoir pas tir de ce prin-
cipe toutes les consquencesqu'il implique. Nous aurons
revenir sur ce point.
Mais pour ce qui est du mariage collectif, nous ne voyons
pas comment on peut le dduire du totmisme et les faits
nouveaux exposs par l'auteur ne nous paraissent aucune-
ment avoir la valeur dcisive qu'il teurattribue. Toute t'tu'gu-
mentation de M. Kohter suppose que les nomenclatures
expriment des liens de saug, hypothse dont il cruit trouver
la confirmation dfinitive dans les systmesqu'it tudie. C'est
parce que le mot d'M/M, par exemple, signifie, selon lui, le
rapport de filiation qui uuit une mre a ses enfants, qu'il en
conclut que t'entant voit dans toutes les femmes qu'il nomme
ainsi des pouses de son pre d'o il suit que celui ci a une
cottectivit de femmes appartenant une mme famille. Et
comme le mme raisonnement peut se rpter de toutes les
personnes dsignes par le mot que t'on convient do traduire
par pres, il eu rsulte, semble-t-it, qu' cette coUectivitt'
de femmes ''orn'spoud mie coiteetivite d'poux, c'f'st-i't-dire
que le maria~eatieu entre {froupes.Mais At.Kuhtern'a pas
rpondu a t'objeetiou qui a et< dj faite Ator~an comment
{'enfant peut-il croire qu'il a plusieurs mros?A ta rigueur.
on pourrait encore comprendre que l'incertitude de ta pater-
nit, due a de semblables unions, put dftertniner ie tout (te
p<' a s'appliquer d'une manire indistincte et confuse tout
un groupe d'individus parmi tesqm'is se trouve )non pre
veritattte. Mais lu maternit n'est pas expose a la metnf
quivoque d'o vient qu'ette puisse tre galement con'ue
comme cottective'?'
Suivant notre autour, ta sente ide que !e mariage a lieu
entre groupes et non entre individus aurait sufti a produire
ce rsultat Parce qu'un ensemt'te dtermine d'hoaunes est
coHectivemcnt uni a un ensembie detcnnim' de femmes,
t'entant regarderait indistinctement conxne ses pres tous les
membres du pronier {troupe, comme ses mres tous ceux du
second. Maisconunent ne voit-on pas qu'une telle maternit
n'a rien de commun avec le tien de saur 'tae ce motdt'si~ne? `'
Car ce tien ne peut s'tablir qu'entre des personnes dfinies.
Si je me sais descendu de telle femme, je ne puis concevoir
que je soutienne ta mme relation avec d'autres, non plus
qu'avec le groupe forme par leur runion. Sans doute, le mot
dont je tne sers exprime mes rapports avec ce groupe et ta
manire dont je les entends mais il est imp"ssibte qae ce
soient des rapports de consanguinit. Si donc ces expressions
n'ont rien de commun avec aucune ideededcscendance.ettes
ne sauraient tre expliques par ta nature du mariage ni, par
consquent, servir il prouver que le mariage, alors, a telle ou
telle fomte.
Les faits mmes rapportes par M. Kohter auraient dtt
t'avertir qu iis ne sauraient avoir ta signification qn'i) leur
donne. Toute sa thorie du systme employ par les Umahas
repose sur l'extension du terme t)<~<, qu'it traduit par mre.
t)r, que veut dire au juste ce mot? Pour le comprendre, cons-
truisons le schma de ia famitie a taquctte appartient ma
mre sous un tel reprime. Comme ta miatiou juridique est
unilatrale et qu'ctte se fait exclusivementen ligne paternette,
la famille de ma mre ne comprend que des descendants

't!y'')')'.)~.t:t~)'iti))'''t"u))M'nK'ftt'.tt)t''n)'t<!M''))'thtla
dit'fit-M)~.
f.t- Mf<('M<t<! <'< pcf ttt~ft~M. Ktte pn'sentera donc t'uspoet sui-
vant:
tj'j~'dujn'n'tnu)))~r.;t't.<t'r''r~.t.()r'n)s.
t Tattt<t!H)~dt'))mm~t'.
t ~t;uih'tt'h')))tt))"tf~<t/t~fftA~.
I:mle`duIrmau~ maha innhrr.
).))~fi!s.).rn)'<[it!r.<.ta)~<h'
lil,.
<j)'t'<~)'t))a)t)''r''). )!t!ttt<<i'.
7~ftAn.
).ut'fU').<'ur.tit)<tttt".)t~t~
//tftAtt.
t.rur.fi)".U'H!fU)<))!<<'h'tn~tth''t'
Ato~tt.
t.cnt'sHts.L''U)~(!)!ni~<'t".t)'))irrt~<)r))t;tt)!~r<
~'tf'C[".ttt'ft'tHt)K'~tMftAf<'=!tn'j/f.

On voit que le mot d'<f</< s'applique iaditet'emment il


toutes les femmes du Rroupe doot tait partie ma tnf't'c. depuis
les plus ges jusqu'aux plus jeuttes. Le sens de ce terme se
trouve p:u' ce)a memedetet'ntiue. Il desigttc toutes les fonmes
de ta famnie (ou du ctau' ou mon p6rc a contracta uturiage.
Sans doute, on peut av()it'que)({ue ma) comprendre cou)-
tnentuneutetne expression pcuteouveuira tant de personnes
ditlerentes. Atais ce qui est t'ertain, c'est <;u*e)ie ne saurait
eveiHer dans les esprits aucune ide de descettdunce, au sens
ordinaire du mot. Car un homme ne peul pas srieusement
considrer son arrire-cousine comme su nX're, mOnc vir-
tuette. Ce vocahuiaire duit donc exprimer tout autre chose
[jue des rapports de consanguinit proprement dits.
ferait voir de mme quf, chez les Choctas. le mot qu'on tra-
On
duit par pre s'apptiqne indistinctement a tous )cs hommes
du cian nnqnei mon pre appartient et duot je ne fais pas
partie, puisque chez ce peuple la ntiation se fait en ii~ne
matct'neHe.
Cela pose, faut-ii couciure de ce qui prcde ([ne les nomcn-
ciatures de Morgan et de Uorsey ne nous apprennent rien sur
l'organisation primitive de la famitie? Il s'en faut. U'aiMrd.
en fait, il est certain que toutes les personnes qui se dsignent
par ces diilerents termes sont un, ce qui revient au mme. se
considrent comme de mme san~. Puis, dj les faits
rapportes autrefois par Morgan ne paraissent gucre pouvoir
s'interpn'ter autrement. portent trop videmment )a
Us
marque et de la loi d'exogamio et du mode de filiation adopte
par chaque socit, pour tre etra))j{<'rs a toute ide de
parente. Mais ce qui tranche, croyons-nous, la question,
c'est ta comparaison institue par M. Kohter outre te systme
des Omahas. et celui des Choctas et c'est la ce qui fait le
grand iatrot de sou tude. En effet, chez les premiers, o la
fttiation est agnatiquo. it y a un terme d'une extension
extrme, c'est celui qut dsigne les femmes du ctan dont fait
partie ma mre. Chez les seconds, dont la filiation se tait on
ligne maternelle, on retrouve une expression dont l'indter-
mination n'est pas moindre, mais il dsigne les hommes
du ctan o est u mon pre. Les traits caractristiques du
vocabulaire changent doue suivant que ia parent agnatique
prime l'autre ou est prime par elle puisqu'il varie avec
l'organisation de ia purent, c'est videmment qu'ilen dpend
et qu'il t'exprime.
Mais alors n'aboutissons-nous pas une antinomie en
admettant, d'une part, que ces tableaux ne figurent aucune-
ment des liens de sang, et que, pourtant, ils traduisent des
relations de parente ? Xuttement. It sufnt d'admettre, ce qui
est l'videuce mme pour quicouque est au courant de l'vo-
lutiou familiale, que parent et consanguinit sont choses
trs diffrentes. La consanguinit n'est pas lit condition sulli-
sante de lu pareate, puisque, aujourd'hui encore, t'entant
naturel non reconnu n'est pas, au sens social du mot, le
parent de ses ascendants it n'a, avec eux, aucun tien de
famille. t)e mme, a Rome, l'enfant ne devenait pas membre
de lu famitte o il tait ne, par le seul fait de sa naissance il
fallait de ptusque ieperute reut comme tel par une crmo-
nie approprie, et, par l'mancipation, il pouvait galement
mettre fin toute parente, quoique ta consanguinit subsistt
intgralement au su et au vu do tout le monde. Elle n'est pas
davantage ta condition ncessaire de la parent, puisque
l'adopt est le parent de l'adoptant et des parents de ce der-
nier et pourtant, entre eux et lui, it n'y a pas de sang com-
mun. Enfin, l mme o il y a concordance, la parent ne
varie pas toujours comme la consanguinit Rome, elle est
beaucoup plus troite entre les agnats et l'enfant qu'entre
cetui ci et ses parents maternels, et c'est l'inverse sous le
rgime de la famitte maternelle. Cependant, les tiens phy-
siques soat les mmes de part et d'autre.
C'est que, en efet, la parente est essentiellement constitue
e
par des obligations juridiques et moratcs, que la socit
impose certains individus. Ces individus appartiennent
des groupes dont les membres sout, en gnrai, issus d'une
commune origine ou se regardent comme tels. Mais si cette
condition est gnrate, elle M'est pus absolue ni ncessaire, et
surtout ces obligations ne se graduent ni Mo se classent exacte-
ment comme les rotations de consanguinit. Bien des consi.
dration'), trangres & toute ide de descendance, peuvent
dtenninet' in socit dans la manire dont elle rpartit, entre
les diffrents membres du groupe familial, les droits et les
obligations domestiques. Telle particularit de ta structure
sociale, telle croyance religieuse peuvent faire en sorte que
l'enfant soit, ici, plus troitement rapproche, l, plus teigne
de sa mre que de son pre, ml plus intimement la vie de
l'un qu' celle do l'autre; par suite, il ne sera pas parent de
l'un et de l'autre au mme degr. En uu mot, la parent varie
suivant la faon dont est organise la famitte, suivant qu'elle
compte plus on moins de membres, suivant la place qui est
taite chacun, etc., etc. Or, cette organisation dpend avant
tout do ncessits sociales et, par consquent, ne soutient
qu'un rapport trs tche avec le fait tout physique de la des-
cendance.
Cette distinction faite, les nomenclatures de parents
deviennent explicables et instructives. Ce qu'elles nous
apprennent, c'est que, l'origine ou, pour parler plus exacte-
ment, l'poque lointaine dont elles nous ont conserve le
souvenir, la parent tait presque compltement indpen-
dante de la consanguinit. Du moins, jamais cette indpen-
dance n'a t aussi grande. Nous y voyons, en enet, classs
sous le mme titre et, par consquent, mis au mmo rang,
des individus qui soutiennent avec celui qui leur adresse la
parole des rapports de consanguinit trs diffrents, par
exemple, mon pre et ses frres, ma mre et ses smurs ou
mme tous les membres fminins de sa famille. Inversement.
je distingue radicalement des personnes de mme sexe, qui
ont avec moi exactement les mmes liens de sang par
exemple, les surs de ma mre que j'assimile ma mre, les
surs de mon pre que je traite tout autrement.
C'est d'ailleurs ce qu'implique le principetrs juste duquel
est parti M. Kohter, a savoir que la famille primitive a pour
base te totmisme. En effet, s'il en est ainsi, pour tre membre
d'une famille, il faut et il suffit qu'on ait en soi quelquechose
de t'tre totmique, c'est--dire de l'objet divinis qui sert au
groupe d'emblme collectif. Mais si cette participation peut
rsulter de la gnration, elle peut tre obtenue de bien
.<
d'autres manires, par le tatouage, par toutes les formes de
la communion atimentaire, de )a communion sangtante, etc.
t)e tu vient la targc pratKtue de l'adoption dans les socits
infrieures. Mme. et elle sente, lit naissance ne suffit pas
t~o/fft'f~a faire de t'cufant un membre intgrant de la socit
domestique; il faut que des crmonies religieuses s'y sura-
jouteut. L'ide de consanguinit est donc tout (ait au second
pian. Par const'queut. il est tout nature) que l'organisation
de lu parente exprime tout autre chose que des relations
gnatogiques.
Nous disions que, peut-tre, l'entente pouvait se faire sur
cette conception. H nous semble, en euet, que les thories
contraires s'y acheminent comme d'eUes-memes. h'une part,
tout ce qu'il y a d'essentiel dans le systme de Morgan est
retenu dans notre interprtation;car nous maintenonsque les
nomenclatures de parents tiennent a ta constitution de la
famille primitive. L'hypothse d'un mariage collectif n'a
jamais t qu'une ~M<a /'<<o, destine rendre represen-
tabies ces tranges coutumes: mais il est impossible de
meconnaitro toutes les difficults qu'elle soulev'. Si donc
on peut conserver aux dcouvertes de Morgan toute leur
importance sans recourir il ''ette invraisemblableconception,
le mieux n'est-i) pas de s'en passer? D'un autre ct,
Westermarck, cho de Starhe, tout en rejetant ta thse de
Morgan, admet que les termes des nomenclatures corres-
pondent il une paremc sociale qu'il oppose ta parent
naturelle. Mais toute parente est sociale car elle consiste
essentieiiement en relations juridiques et morates, sanc-
tionues par ia socit. Elle est un lieu social ou elle
n'est rien. Si \estcrmarck a fait cette distinction, c'est
que, p"ur lui, comme pour le sens commun, la vritable
parent se confond avec ta consanguinitet ne hit que l'ex-
primer. Mais du moment o t'en a (ait cesser cette confusion,
il ne peut plus y avoir qu'une parent, c'est celle qui est

')
~t; Il vnti <)t)'<)n tr~uv' ')'-< '~t.mph- <)'' ttmria~ (-oX~-tif! ))Mu.!
'j)ti m' r'<')t))')''nt !m')<x')t<t)t M <;)' Mu<){)m ).t K'))d<'< )()))M'))~t)t
iunsi. Ce <)tt'<jn voit. t's) un t~t'uMjx' ')'' M'n'< ''))')U!mt Mto' h'nmM'. u
nn )!)'!n))t; dt! 't-m' ~'uni~ant a un ))')t)t))~ ntitis th))t un tftm))))' )'))fu<
t.) t'-tt"r))~' <)')~))<Ht<t's t'')<nn.mt un ttt'~M)M'nn?-.<t i<h)'h't't))it~f)''f)')<H)~'<.
C' t)!<u'ia! f'<')hv(ij. <)m funt im'uttt~tahtt's. tt'ttnt ricM <)c comttttm
nvr tit pt'ttti~'<)it~ t't un ))'* h'~ cun~t~tc 't'it Utt ttxxot.'Ht i'L'hth<t)K'ttt
).in)<v<t<- t'<v"h))i"n f.uot)m)'
~i Ot'f/tMf << tMt'ty< )). 'Ki.
reconnue comme telle par la socit. Or c'est & elle que se
rapportent les tableaux que nous devons a Atorgan.
Il est vrai que. sous )a famille qui nous est ainsi revetee,
ces auteurs croient en distinguer une autre; mais nous verrons
propos de l'ouvrage suivant que les groupements qu'ils
appellent ainsi ne mritent pas ce nom.

CROSSE Has~T). Die Formen der Famttie und dte For-


me der Wirthsohaft. (/,<</M)WM <f< /t<t/~t' < <<'< /f~'M<'s
J<' f(tt't<f<<<' ~wtfw~'' t''ribourg-eu-)h'isgau, J.-C.-B.
Alottr. ~M p. in 8".
Cet ouvrage est conu dans un tout autre esprit que le pr'
cdent. Tandis que M. Koincrs'attachttitsurtout detertnincr
quel aete le puintde dpart de t'evoiution famitiaie, At. drosse
laisse systemati({uetnentdecte tous les problmes que peut
soulever le devenir de la socit domestique. Jt estime, sans
d'aiiteurs prouver autrement son opinion qu'en attnuant
l'checde ta tentative <ie Morgan, quei'heure n'est pas encore
venue d nhorder ces questions. H se propose donc uniquement
de dcrire les dinerents types de famille que l'on peut cons-
tituer par l'observation directe, en les rattachant leurs con-
ditions concomitantes, mais sans chercher aucunement a tes
enchatner les uns aux autres suivant un rapport chronologique
et causal. H iaisse entendre, d'ailleurs, que, son sens, les
vritables causes des institutions se trouvent beaucoup moins
dans le passe, c'est--dire dans les institutions similaires qui
ont prcd, que dans le pt'escnt, c'est--dire dans t'etat du
milieu social dont elles font elles-mmes partie et dunt elles
dpendent. Kt comme, de tous les facteurs sociaux, c'est ie
facteur econonique qui lui parait le plus important, il prend
les diffrentes formes do l'activit industrielle comme points
de repre pour distinguer les formes correspondantes de l'or-
gaoisation familiale. Ainsi s'explique le titre du livre.

1. Tout l'ouvrage est domin par quelques dfinitions


fotidaiiienliiies qu'it est ncessaire de rsumer. L'auteur dis-
tingue trois sortes de famitte ta famille .ft'<o jtfM.fM. tctto
qu'elle existe l'heure actuette dans les grandes socits euro-
pennes lit famille /<o M';t.of elle ctnn f'/' -St~f). n dfinit
ta prentiere ta cotnmunante forntt'e par nu homme et une
femme, qu'unit un tien matrim~niat durat'te etexctusif, pt par
MO t/X!fKK~t:)')t.m!)t~'K. t8'n
les enfants ns de ce mariage. La famille au sens targe com-
,n.i
prend, outre
.,ulu., les
L,n parents .,11.un.t.
'Ion Mn, et 1.1.
leurs enfants, les femmes des (!ts et
teurs enfants, les femmes des petits-iitsct leurs enfants. C'est
la premire. teoduo toute la suite des gnrationsissues du
couple initia). Quant au ctun, c'est l'ensemblede tous ceux
qui se reconnaissentcomme unis par des relations de consan-
guinit. Toutes ces formules sont rapidement nonces au
dbut de l'ouvrage, comme si elles taient videntes par elles-
mmes. Hn ralit, et!os laissentchapper une partie des faits
qu'eUes devraientexprimer. Quelle est dans cette classification
la place de la ~<<'~t slave, de la Jot~n)t<ty de Sumner-
Maine? Ce n'est pas simplement une famille <? .'K.fM: car
elle comprend des branches cottatrates. Uira-t-on que c'est
un clan ? Mais, justement chez les Slaves, le ctanse distingue
trs nettement de la Zadruga c'est le tra~tro. Et il en est de
mme dans t'Inde. en Germanie, etc. Nous verrons plus loin
les consquences de cette confusiou.
Pour ce qui est des diffrentes sortes d'organisationconomi-
que, fauteur s'eu tient ta distinction traditionnelle: peuples
chasseurs, peuples pasteurs, peuples agriculteurs. ti se con-
tente d'introduire dans le premier et dans le troisime groupe
deux sous-divisions et de distinguer chez les chasseurset chez
les agriculteurs deux stades, l'un infrieurett'autresuprieur.
Les peuples chasseurs du premier stade (jp '~c~t J<<'r)
diffrent de ceux du second en ce que, citez ces derniers, l'art
de la citasse est pl us dvelopp et dispose d'instruments plus
perfectionns; ce qui permet ia civilisation de prendre un
peu plus d'essor. On retrouve une diffrence analogue entre
les deux sortes do socits agricoles. On obtient ainsi cinq
types sociaux caractriss par la nature de l'industrie. L'au-
teur, toutefois, n'entend pas dire que ces lignes de dmarca-
tion soient tranches; on passe d'autant plus facilement d'un
type l'autre par une gradation continue qu'il n'y a pas de
peuple qui soit exclusivementchasseur ou pasteur, etc. Mais
c'est toujours telle ou tette forme conomique qui est prpon-
drante. Enfin, it faut ajouter que, conformment son prin-
cipe, M. Grosse ne prsente pas cette srie comme reprsen-
tant l'ordre do rvolution conomique. Il laisse la question
en dehors de sa recherche et se demande simplement quels
sont les types familiaux qui correspondent aux types sociaux
ainsi constitus.
Les peuples qui pratiquent la forme infrieurede la chasse
sont, par exemple, les Boschimans en Afrique, les Wedda
Ceytan, les tiabitants de ta Terre-de-Feu, les Hsquimaux en
Amrique et, surtout, les ditlrentes tribus australiennes. Ce
sont des nomades qui errent par petites troupes sur d'assez
vastes surfaces de territoire. H ne s'y trouve aucune trace do
division du travail ni aucun pouvoir centrai. Chaque division
jouit d'une autonomie a peu prs pomptpte. La nature de la
famille rsulte de cet tat de ta technique conomique. Dans
de pareilles conditions d'instabilit, de grands groupes fami-
liaux ne sauraient se maintenir. C'est pourquoi ce qu'on ren-
contre, c'est )a fami))o~n'c~ww!t<, comprenant l'homme, la
femme et tes enfants. S'appuyant surtout sur le tmoignage
de Curr, Grosse rejette donc compltement tes thoriesd'aprs
lesquelles ou trouverait chez ces peupiades, sous le nom de
mariage collectif, une promiscuit plus ou moins dveloppe.
Partout, en Austratie notamment, on trouve l'homme uni A
une ou a plusieurs femmes dtermines, (jnraiement mme,
ia monogamie est ia rgle. La femme est si peu commune
qu'elle est la proprit de son mari celui-ci peut lit frapper,
la vendre son gr. !t n'a pas un pouvoir moins tendu sur
ses enfants. Par consquent, quoi qu'on en ait dit, ia famille
n'y a point la mre pour centre; elle n'est pas maternetie.
Mais au dota do cette famille restreinte que M. Grosse ne
craint pas d'appeler patriarcale, il y a le clan forme par )a
runion de plusieurs famities particulires, issues d'une mme
origine. L'organisation du clan donne lieu deux remarques:
1 elle est inconsistante; les relations entre les familles qui !e
forment sont rares et taches; 2" tantt les clans se recrutent
compltementpar voie de filiation agnatique. tantt, et c'est
le cas le plus gnera), quoique i'eufant vive dans le ctan de
son pre, il porte le nom (ou totem) du clan o est ne sa mre.
C'est sur ce dernier fait qu'on s'est appuy pour soutenir que
la famille, en Australie, avait t primitivement utrine. Mais,
d'aprs notre auteur, c'est donner un usage tout extrieur
une importance qu'il n'a pas. Dans notre Europe actuelle,
t'entant porte le nom de son pre. non celui de sa mre.
Cette pratique n'implique pourtant aucune primaut de la
parent agnatique sur l'autre. Pourquoi la coutume austra.
lienne aurait-elle plus de signification? De quelque manire
qu'on dnomme l'enfant en Australie, c'est chez le pre, dans
le clan du pre, sous l'autorit paternelle qu'il vit. Cela seul
importe. Reste, cependant, expliquer comment l'enfant
porte le totem de sa mre, si c'est le pre qui est le centre de
la famille, Reprenant une ide de Curr, l'auteur ne voit dans
cette rglementation qu'un artifice destin empcher
certaines relations incestueuses, spcialement abhorres.
Comme t'entant est uni sa mre par des liens physiques ptus
immdiatsqu' son pre, ces socits, qui ont l'horreur des
mariages entre procites, se seraient appliques particuti.
rement a prvenir les unions entre parents utrins. La socit
totmique se serait organise dans ce but; elle aurait donc
compris tous les parents entre lesquels le commerce sexuel
est plus expressment prohib, c'est--dire les parents par les
femmes et eux seuls. Mais elle n'aurait pas d'autre porte.
Les peuples chasseurs du stade le plus eteve (<<' /tOf/tf/'CK
J~<) ne dinerent des prcdentsqu'en ce que leur citasse est
plus productive, soit cause dsarmes qu'ils emploient, soit
cause de l'abondance naturelle du gibier. C'est surtout dans
l'Amrique du Nord, tout le long de la cte ouest, que ce type
social est le plus largement reprc'sente. En Asie, on en trouve
au nord-ouest, dans le Kamtshatka, par exemple. Par suite
de cette aisance plus grande, ils forment des socits beau.
coup plus considrables qui comptent parfois jusqu'
tOOOO ttes. En mme temps, ils deviennent moins nomades,
ils ont des maisons et de vritables villages. De i rsultent
les quelques particularits nouvelles que prsente, citez ces
peuptes. la socit domestique. La seule notable consisterait
dans une plus grande consistance du <:)an, qui se fixe sur le
sol d'une manire dfinie. On trouve de vastes maisons qui
hbergent MU et 300 membres d'une mmetamitte, et entre les
dinrentes maisons de ce genre qui forment un village il
parait bien exister aussi des liens de parent. Quant l'orga-
nisation, elle est la mme qu'en Australie, et, comme it avait
dj fait pour les tribus australiennes, l'auteur qualifie ces
clans de paternels (p. 86), quoique l'enfant hrite du totem de
la mre. Cette erreur tient toujours la mme cause, savoir
a l'extrme indtermination o reste la notion du clan. Sans
doute, il arrive souvent que le mari emmne sa femme chez
lui que les enfants, par consquent, naissent sur le territoire
occup par le pre. Mais c'est le totem, et non le territoire
occup, qui fixe le clan des individus; l'enfant peut habiter
chez son pre et appartenir au clan de sa mre. Du reste, de
t'aveu de l'auteur, c'est souvent le mari qui vient vivre tiez
la femme o il occupe une situation assez infrieure (p. TI et
?)). Dans ces conditions, ou ne s'explique pas que M. Grosse
quatttte de patriarcale cette organisation familiale et dise
que l'homme en est le chef*. H ajoute, il est vrai, < qu'il doit,
parfois, renoncer ses droits pour des raisons conomiques
(p. 8) La constitution patriarcale de la famille est, paratt-ii,
bien peu solide pour dvier aussi facilement do sa nature.
La distance est grande entre ces socits et les peuples pas-
teurs (Kirghis, Mongots. Thibtains. Arabes, etc.). L'levage
est entre les mains dos hommes dont l'importance sociale se
trouve ainsi sensiblement accrue. Elle augmente encore par ce
fait que ces tribus sont souvent en guerre les unes contre les
autres car les vertus militaires ne peuvent acqurir plus de
prix sans que la prpondrance masculine s'accuse. De tout
cela viennent les rares nouveauts que prsente la famille.
Comme, pour lever des bestiaux, il n'est pas ncessaired'tre
trs nombreux, les familles particulires sont isoles les unes
des autres. Le clan ne prend quelque consistancequ'en temps
de guerre. Quant la famille ~'<ffo seMM, par suite de l'auto-
rite plus graude des hommes, le caractre patriarcal en devient
encore plus marqu. L'homme achte la femme par un con-
trat rgulier et, par consquent, il en est propritaire. Le
pouvoir paternel n'est pas moins absolu. H est vrai que
l'auteur a quelque mal expliquer certaines pratiques, diffi-
cilemont conciliables avec un esprit patriarcat aussi invtr.
Chez les Arabes, citez les Cafres, la famille de la femme inter-
vient souvent dans les relations entre poux et limite singu-
lirement la puissance maritale (p. 113;. H y a surtout l'insti-
tution du mariage Mota, tudie par Smith chez les anciens
Arabes Sous ce rgime matrimonial, la femme reste chez
ses parents et les enfants appartiennent la famille de leur
mre. M. Grosse dit, il est vrai, que ce genre d'union n'est
qu'un moyen pour les femmes riches de maintenir leur ind-
pendance. C'est possible mais il y a des femmes riches
aujourd'hui comme autrefois, et pourtant notre droit n'admet
plus de semblables combinaisons. Pour qu'il les tolrt chez
les anciens Arabes, il fallait pourtant que l'autorit maritale
et paternelle y fut moins absolue qu'on ne dit. On est gale-
ment tonn de ne pas trouver dans ce chapitre une tude
plus approfondie sur la formalit du rapt et sursesorigines. tt
est vrai que, suivant M. Grosse, jamais le rapt n'aurait cons-

(1) ~<tMA)p axd Jtfat'Wa~e) M<j; <tf<t&<a.


titu une formalit igaie du mariage. Cette assertion surpre-
naute aurait eu besoin d'tre prouve.
Les peuples agriculteurs du degr infrieur no sont pas
ncessairement descendus des prcdents et ne sont pas d'une
civilisation suprieure. Us ressortissent une autre brauche
de t'vututiouhumaine. Mais ce que l'agriculture apporte avec
elle par la force des choses, c'est )a vie sdentaire qui permet
aux grands groupements de prendre plus de stabitit en se
fixant sur le sot. Il en rsulte que le etan se constitue trs
fortement il devient lit socit domestique proprement dite
et absorbe dans son sein lit famille particulirequi perd son
individualit. C'est ce que l'auteurtablit en passant en revue
les peuples (le la Maiuisie, certaines socits miansieuMset
surtout les tribus indiennes de l'Amrique. Malheureusement,
l'indcisionavec taqueiteestetnpioycemotdecianM'.St~
jette un grand troubte sur cette dmonstration. On ne sait
jamais si, par ce terme, l'auteur dsigne le cian proprement
dit ou simplement la ~~M)<<y. Ou plutt, il est vident
qu'il prend t'un pour l'autre et rciproquement car il donne
indiffremment ce seul et mme nom et des groupes de
parents qui soutiennent les uus avec les autres des relations
de consanguinit dfinies, pourvu qu'ils comprennent ptu-
sieurs branches cotiatrates, et fi des villages qui sont forms
par lu runion de plusieurs groupes de ce genre. Il semble
mme que ses exemples soient beaucoup plus dmonstratifs
quand ils se rapportent au premier ordre de faits qu'au
second, et ia vritable nouveaut qui caractrise ce type
parait plutt tre !a constitution de groupes familiaux compo-
ss ~o<M<M)<<), qu'un renforcementde lu vie propreaucian.
Ce qu'ont de particulier ces agrgats, de quelque manire
qu'on les appeife, c'est que tantt ils se composent exclusive-
ment d'agnuts, tantt ils ne comprennent que des parents ut-
rins. Suivant Fauteur, ces deux varits seraient on nombre
peu prs egat. tt semble bien pourtant que ia seconde soit plus
frquente d'aprs un caicui de Fraxer, elle s'observerait en
Amrique trois fois sur quatre Toujours est-II que, cette fois,
<:e n'est plus seulement le nom qui se transmet par les
femmes. Toute l'organisation de la famille repose ici sur le
principe de la filiatiou utrine; l'auteur ne le conteste pas. Il
explique ce changement par la plus grande aptitude qu'il

()) yo/fm~M, p. 70.


attribue & la femme pour les travaux agricoles et par ht plus
graudeautorit sociale qu'elle acquerrait ainsi. Mats si telle
tait lu cause de cette organisation, cuite ci devrait tre ~n-
rate partout on la civilisation est agricote. D'o vient, cepen-
dant, que. dans un nombre retpectabte de cas, t'entant suive
ta condition du pre, et ceia parfois dans des socits parentes
et voisines de tribus o ta (iiiatiou Inverse est eo usa~e ? i)e
plus, si c'tait Ja supriorit conomique de la femme qui
dterminait cet arrangement domestique, on devrait voir la
femme, (ruuo manire gnrale, exercer une vritable supr-
matie daus tafamiite et la socit. La filiation utrine devrait
aller de pair avec le matriarcat. Or c'est un des mrites de
cet ouvrage d'avoir bien fait voir que le matriarcat n'est
qu'une rnret trs exceptionneiie il ne s'observe que citez un
nombre intime de peuples. Si ou laisse de ct ces excep.
tiens, partout ou t'entant suit ia mre, lit femme est vis--vis
des parents mates de sa propre (amiti dans t'tatde subordi-
nation et d'infriorit o elle se trouve ailleurs vis--vis de
son mari et des parents de son mari. C'est son oncle mater-
uet, ce sont ses frres en ligne maternetie qui gouvernent, ce
n'est pas elle. Eu un mot, lu situation respective des deux
sexes eu gnral ue parait pas diirer de ce qu'elle est
ailleurs ce qui est particulier ce type do famille, c'est lu
situation respective du mari par rapport a ia femme. Htie ne
saurait doue s'expliquer par te rote de la femme dans ta vie
conomique.
Nous arrivons enfin au dernier stade, aux agriculteurs de
l'ordre suprieur, c'cst-a-dire aux peuples o l'agriculture
est complte par d'autres fonctions industrielles, tout en
restant ta forme principale de l'activit conomique. Nous
serons bref sur cette partie de t'ouvra~e dont IR rdaction
parait un peu prcipite. Kon seulement les informations
sont moins nombreuses que daus te reste du livre, mais elles
sont moins critiques et assez confuses. L'auteur parte a la
fois de toute sorte de peuples divers, <!recs, itomains, Slaves,
Germains, tudous, Chinois, Japonais, alors que le caractre
trs complexe que prend lit famille a cette phase de i'votu-
tionsociaie et ncessit, pour chacun d'eux, une tude
laborieuse et tendue. Ce n'est pas en quelques pages que
l'on peut dcrire et expliquer mtne la sente (amiite romaine.
Aussi la description est-elle pte et indcise. M. Grosse
remarque d'abord que, dans toutes ces socits, on trouve des
traces du clan, la yfH.<, le -);, etc. Mais ici encore la eon-
fusion, tant de fois signale, s'accuse de nouveau et de la
manire iu plus nette. La /</f~ slave est formellement
assimile & ht alors qu'ette est tout autre chose, ainsi que
nous l'avons dit. Le pendant de la ~est le ~-~<<'o. Mai!) ai.
dans tous ces pays, le ctun a laiss des traces, partout aussi
il est eu dcadence et il tend do plus en plus a s'etacer
mesure qu'on avance dans l'histoire. Comment M. Grosse n'a-
t-il pas aperu que, si cette rgression est vraie du ~'af~co.
elle est fausse de la ~'t~ qui, il y a moins d'un sicle,
tait encore Hrissante chez les Slaves du sud
Ce qui prend lit place de ces grands groupements, c'est la
famille ~o <f<'Hi!, que nous n'avons pas encore observe
jusqu'ici. Le modle le plus partait en est donn par la
famille romaine o tous les descendants M MMf'M/M <'< pcr
m<MCM<(M vivent en commun
sous l'autorit du plus ancien
ascendant mate. M. Grosse croit retrouver e~atement cette
mme organisationen Grce, dans t'tude et la Cermanie. Il y
aurait fort a dire sur ces rapprochements.La famille tait en
Germanietout autrement constitue qu' Rome. Le nts adulte
pouvait, volont, s'cmanciper de son pre en quittant la
maison patcrnette t'ideutit de la MKtMet du MtKK~Mm, qui
a t par!ois soutenue, est tout fait inexacte; la parent
agnatique et ta parente utrine taient citez les Cermains sur
le mOno plan, etc. Dans t'tnde et en Grce, le fils qui se
mariait cessait do vivre avec son pre et ullait allumer un
foyer spcial c'tait ta 1'1!gle dans le premier de ces deux
pays, le cas le plus frquent Athnes. Pour faire rentrer ces
deux sortes de famille dans la mme (ot-mute que la famille
romaine, il faudrait donc. tout au moins, modifier la dfini-
tion de la famitte <<o'M.<. Dans les dtails de ta description,
on relve 'gaiement plusieurs unirmations contestables. C'est
ainsi que, suivant fauteur, t'asservissement de la femme
crotrait avec te pouvoir paternel. Rome, o la puissance du
pre atteint son maximum d'intensit, est aussi, de toutes ces
socits, celle o la femme est le plus compltement l'gaie
de sou mari.
C'est de ce type familial que serait sortie notre famille
actuelle.

H.
Il ne saurait tre question de meconnattro l'intrt de
ce livre, srieusement inform, l'on
et o retrouve cette pen-
se prise do etart et souvent ingnieuse qui distinguait
dj le prcdent ouvrage (le M. Grosse, Die ~M/<~e </<'<'
~MMf'. Mats nous faisons les plus expresses rserves et sur
la mthode employe et sur les conclusions gnrtes qu'il
croit avoir tablies. De vritables erreurs ont d'ailleurs t
commises.
La mthode qu'a suivie l'auteur n'est peut-tre pas impra-
ticable ni mme sans avantages; mais c'est condition qu'on
se borne a un travail de pure description. H n'est pas impos-
sible de dterminer diurents types de famille par le groupe-
ment mthodique des ressemblances et des dinreuces et
sans se proccuperde savoirquels liens gnalogiques ii peut
y avoir entre eux. Mais des qu'il s'agit d'explication, lu
mthode gntique, celle qui, pour rendre compte des faits,
commence par marquer leur place dans ta suite du devenir,
s'impose au sociologue. Car une institution est toujours, en
partie, le produit du pass. Chaque peuple trouve en naissant,
pour ainsrdire, un certain nombre de pratiques et de coutumes
tablies, de croyances toutes faites qu'il hrite de ses devan-
ciers. M tes transforme de manire a les mettre en harmonie
avec ses conditions d'existence mais il no les cre pas de
toutes pices. Par consquent, pour pouvoir comprendre
pourquoi elles ont pris telle ou telle forme par suite des
changements qu'il leur a fait subir, il faut savoir dans quel
tat il les a trouves. Les conditions concomitantes peuvent
expliquer comment it a t amen laborer nouveau la
matire qu'il a reue; mais elles ne sauraient rien nous
apprendre sur la contexture de cette matire, qui pourtant
ne peut pas ne pas auectcr les produits de cette laboration.
Pour ne citer qu'un exemple, il nous parait impossible de
rien entendre aux origines de la famille actuelle si t'en ne
sait qu'elle drive directement de la famille germanique et
non de la famille romaine. Car celle-ci, enferme dans le
cadre troit de l'organisation agnatique la plus uniiatrate
qui ait jamais exist, ne pouvait pas en sortir d'ette mme et
en fait, elle n'en est pas sortie compltement, quelque euort
qu'elle ait fait pour s'en auranchir progressivement.
Aussi presque toutes les explications proposes par l'auteur
sont'cttes bien peu satisfaisantes. Nous n'avons pas a nous
prononcer ici, d'une manire gnrale, sur la thse du mat-

(i) FriboMfg-en-Bt'i~a". J.-C..B. Mohr.


riatisme conomique laquelle su rfre tnanifostement l'au.
teur elle est traite dans uue autre partie de notre .UtMt~t,
Mais, dans le cas spcial de ta famille, sou insutUsance est
particutif'rement clatante. Le mme type de (iunitte se re.
trouve, uu moins dans ses traits essentiels, sous des rgimes
conomiques bien diirents. Les Todas, les Ttnbtains, les
Juifs sont des peuples pasteurs les Matais sont classes parmi
lesagricutteurs. Or les uns et les autres pratiftueat la potyat).
drie fraterneile o plusieurs frres pouse)!), une femme
eu
commun; ce qui implique que les branches c<)Uat'rates
vh'enteuseinMe (voyez p. i4~ et t )7). Les Slaves et les Homains
sont desagricutteurs; les prouiers s'en sont tenus u ta j'o<M(.
/am~ les seconds t'ont trs vite dpasse. La fumille juive
de t poque pastorate semble tre assez voisine de la (amit)e
putriarcale romaine, alors que la distance entre les deux
civilisations conomiques est considrable, etc.. etc. On a pu
voir, d'aitteurs, combien les raisons conouxques, attnues
par fauteur, sont insuffisantes expliquer la filiation utrine
UHitHtende.
Mais cequi est surtout grave, c'est que fauteur a compl-
tement mconnu la nature propre du clan, comme socit
domestique.
Le ctan est tout autre chose qu'un a~re~at de fumilles
cottaterales, de frres et de surs qui cohubitent ensemble
et avec leurs descendants, i) prcseuto, comme nous l'avons
dit, les deux caractres distinctifs suivants: 1~ I) est forme
d'individusqui sont ou se considrent comme tant eu gne-
ra! consanguins les uns des autres, mais qui ignorent abso-
lument quels liens deiinis les unissent les uns aux autres.
La croyance en leur consanguinit vient seulement de ce
qu'ils penseut tous avoir un mme anctre, de nature tou-
jour:; mythique. Puisqu'il n'y a pas et ne peut pas y avoir
d'arbre gnalogique du ctan, le signe auquel ils recon-
naissent leur parente, c'est qu'its portent un monte totem. Au
premier abord, ce fait a fair bien superficiel mais c'est
ignorer ce qu'tait le totem pour les socits infrieures. C'est
le signe auquel les parents se distinguent des trangers,
celui qui dtermine le milieu dans tequot chacun doit ou ne
doit pas contracter mariage il s'imprime dans l'/)f<M<M des
individus qui s'ellorceut de l'imiter par le tatouage, par la

(f)\'t~)'i!j))M~h)mt.)<70.
dispositionde la cheveiurp, etc. Mais surtout, c'est le centre de
la vie religieuse; le totem est le Dieu et toutes les divinits
particulire!! sont d'abord conues par rapport lui. Et
comme ia religion s'tend alors tout, on conoit quelle
importance avait la socit totmique, savoir le clan. Et
pourtant c'tait une famiite, puisqu'il constituait un groupe
partiel, qui ne se confondait pas avec la socit politique
(celle-ci comprend toujours plusieurs clans). et qu'il tait
form d'individus qui se regardaient comme de mme sang.
11 est vident qu'un tel
groupe ne ressemble ni a ia famille
patriarcale des Romains, ni la /</n~<t slave.
Cela pose, toute une srie de rectitieations devient nces-
saire aux thses de l'auteur. U n'est plus possible de consid-
rer comme une formalit sans importance le fait que, en
Australie, l'enfant porte le totem de sa mero et appartient, au
moins dans ia gnralit des cas, au c)an maternel. Ce n'est
pas simplement un nom qu'il reoit ainsi, c'est une religion
c'est un ensemble de croyances et de pratiques qui retient sa
vie. Mites avaient ses yeux encore plus de gravit que n'en
eurent plus tard pour les Homains les MCf'a '/<'M/<7'M qui
n'en furent, pourtant, que ia transformation.Par consquent,
en tout tat de cause, il y avait ds lors une sorte de famille
qui reposait sur de tout autres principes que lit famille par-
ticulire puisqu'elle n'avait pas pour base le mariage, et qui
pourtant avait une grande vitalit.
11 y a plus c'tait alors la famille proprement dite. Il faut,

en effet, s'entendre sur le sens des mots, c'est--dire classer


convenablement les choses. Une communaut de fait entre
des consanguins qui se sont arrangs pour vivre ensemble,
mais sans qu'aucun d'eux soit tenu il des obligations dter-
mines envers les autres et d'o chacun peut se retirer
volont, ne constitue pas une famiiie. Autrement. il faudrait
donner ce nom au groupe form par un homme et une femme
qui, sans tre maris, cohabitent rgulirement ensemble et
avec leurs enfants non reconnus. Pour qu'il y ait famiiio. il
n'est pas ncessaire qu'il y ait cohabitation et il n'est pas
suffisant qu'il y ait consanguinit. Mais il faut do plus, comme
nous l'avons dj dit, qu'il y ait des droits et des devoirs,
sanctionns par la socit, et qui unissent les membres dont
la famille est compose. Eu d'autres termes, la famille n'existe
qu'autant qu'elle est une institution sociale, la fois juri-
dique et morale, place sous la sauvegarde de la collectivit
ambiante. En limitant ainsi le sens du mot, nous no le res.
treignons pas abusivement car, a moins de vouloir confondre
les contraires, on ne peut runir sous un mme vocable
deux ordres de faits qui contrastent aussi nergiquement
entre eux qu'un agr(;!)t fie fait, sans liens de droit, dsap-
prouv mme le plus souvent par la loi et par L'opinion, et
une socit rgulire dont tous les membres sont tics juridi-
quement et moralement les uns aux autres. D'un autre ct,
quand on entreprend de faire l'histoire de ta famille humaine.
c'est de ta famine comme institution sociale qu'on entend s'oc-
cuper. C'est donc cette dernire que le mot doit tre rserv.
Cette distinction faite, les faits si confus que t'en rapporte
propos des socits australiennes s'clairent singulire-
ment. Les principaux droits et obligations domestiques sont
alors, et sont mme encore dans des socits plus avances,
les suivants 1" le devoir de venger les offenses faites un
parent vendetta); 2" le droit de chaque parent sur le patri-
moine familial 3" le droit de porter un certain nom 4" le
devoir de participer un certain culte. Or, tous ces droits et
ces devoirs sont attachs au ctnn et & lui seul tous les por-
teurs d'un mme totem jouissent galement des premiers et
sout tenus galement aux seconds. Lectan est donc la {amiti
par excellence. Sans doute, il renferme des groupes de con-
sanguins moinstendus; i'homme, sa femme et teurs enfants
tendent naturettemcota s'isoler et (aire bande a part. Mais
entre les membres de ces groupes, il n'existe pas de liens
juridiques. Ce n'est pas le fait d'appartenir tel de ces agrgats
et non tel autre qui dtermine la nature des personnes aux-
quelles on doit la vendetta, le nom que l'on porte, la religion
que l'on pratique. De mme. comme, tant que la tribu n'a
pas dpass l'age de la chasse et de la pche, toute la proprit
foncireest la chose du clan, ces socits plus restreintes n'ont
meubtes
pas de patrimoine. Chacun possde bien les objets,
dont il se sert, mais c'est titre personnel; il eu (ait ce qu'il
veut. Le seul rapport o l'on pourrait souponner un carac-
tre juridique consiste dans la dpendance o les enfants
sont vis--vis du pre, qui peut les tuer ou les vendre
volont. Mais si la socit ne proteste pas quand il agit ainsi,
elle ne lui garantit aucun droit. Si t'entant se sauve, le ctau
n'intervient pas. C'est affaire au pro de s'arranger, avec ou
sans l'assistance de ses amis. Ce n'est donc pas un droit,
parler exactement. On peut comparer ce pouvoir paternel
celui que l'opinion, aujourd'hui, reconnait l'occasion au
pcre naturel sur ses enfants naturels qu'il a levs. Pourtant,
le groupe qu'il forme avec eux ne forme pas actuellementune
famille, au sens juridique du mot. It en est de mme de ces
petites associations qu'on observe dans les clans australiens.
Ce sont des associations de fait. non de droit Elles dpen-
dent du gr des particuliers, se tonnent comme elles veulent,
sanstre tenues des'astreindreaaucuHenorme prataide. Elles
ne constituent donc pas uHe institution sociale. On peut y
voir des germes pour l'avenir mais ce no sont en tout cas
que des germes. C'est en dehors d'elles que se trouve alors
i'<HJ)<<f)<<<OM</OM)Mf~Mf.
!)e ce point de vue, l'volution de )a famille reprend, la
fois, sa complexit et son unit. Elle est d'une extrme sim-
piicit telle que )a conoit M. Crusse au dbut comme la
fin, il trouve galement la famille particulire,dirige par ie
pre et le mari. Les changements qui se seraient produits
chemin faisant, se rduiraient a de simples nuances; ceux,
plus importants, dont Il est obiif;. a et i, de constater
l'existence, font plutt l'effet, dans le tahleau qu'il nous
retrace, d'anomalies locales ou passagres. Il en est tout
autrement si le point do dpart est le cian; car alors, c'est
par de laborieuses et complexes transformations que, peu
peu, du sein du cian, confus et inorganis, ont merg des
familles de plus en plus restreintes, arbres gnalogiques
dnnis et d'une organisation de plus en plus savante. Mais, eu
mme temps, le dveloppementde la famille apparat pins un.
Car on ne comprend pas bien, dans le systme do M. Grosse,
comment le cian, inconsistant dans le principe, se consolide
pour un temps trs court au milieu de son volution, pour
s'efacer ousuito nouveau. La vrit c'est que, depuis l'ori-
gine, il rgresse sans interruption. A mesure qu'il se tixe sur
te soi. le totem perd son caractre primitif; il nnit par ne
plus devenir qu'un emblme collectif, un nom particulire-
ment vnr. Le clan devient village c'est--dire que sa
nature de socit domestiquen'est piusgure qu'un souvenir.
Ce qui progresse rellement au cours de cette rgression, ce
sont les familles du type de i:) Zadruga, soit avec (iiiation
utrine, soit avec filiation agnatique, et que M. Grosse a
indment confondues avec le clan. Il est vrai que, en mme
temps, l'organisation politique devient plus stable et plus
ferme mais, justement, cet affermissementvient do ce que le
clan, morcel eu famittes moins tendues quoique vastes
encore, a cess d'tre ce qu'il tait l'origine.
Mais si importante que uous paraisse tre cette erreur, il
s'en faut que ce livre soit sans rsidu objectif. Parmi los
rsultats auxquels aboutit Fauteur, il en est d'importants qui
peuvent, croyons-nous, tre regardes comme acquis ce sont
les suivants
I" L'hypothse de ta promiscuit obligatoire, telle que
t'avaient imagine Hacttofen, Giraud-Teuiou. Morgan, etc.,
uous sonbte dfinitivement rfute. Prcisment parce que
M.Grosseno uie pas comme Starcke et \Vestermarck ia ralit
de ht famille utrine, son argumentation sur ce point n'en a
que plus d'autorit.
ii a bien dmontr qu'il ne faiiait pas confondre la
famille avec filiation utrine et le matriarcat, entendant par
ce dernier mot une organisation la fois famiiiaie et sociale
ou ia femme jouirait d'une vritable suprmatie. Sans nier
l'existence de tout cas de matriarcat, il en a fait trs juste-
meut une auomaiie et une exception. D'o il suit qu'on n'a
pas rfut ia ~nraiit et l'importance de )a (amii)e mater-
neite, quand ou a fait voir que le matriarcat tait une raret.
3" ft a bien tabli que, metne dans ia (amiiie maternciie, il
n'y avait pas absence de toutes relations entre le pre et
l'enfant. Si celui-ci dpend plus immdiatement de sa mre
et des parents de sa mre, il ne laisse pas de soutenir avec
son pre des rapports dfinis, quoique moins nettement
rglements. D'o ii suit, entre autres consquences, que ce
n'est pas l'incertitude de la paternit qui a dtermine le
modedf filiation.
4' Enfin, en utilisant tes travaux de Cunow, il a fait voir
que le cian peut s'accommoder de ia filiation agnatique,
puisque nous rencontrons le cian agnatique dans les socits
les plus infrieures que nous connaissions a ct du clan
utrin. Toutefois, ii y aurait lieu do rechercher si, comme
nous t'avons montr plus haut', le clan, en cessant d'tre
utrin, ne perd pas certaines de ses proprits caractris-
tiques. Le totmisme semble bien n'y tre plus qu'une survi-
vance. Mais la question n'existait pas pour M. Crosse, parce
qu'il a mconnu le rapport si troit du clan et du totem.

\)'x ~3.
LEtST. Alt-AriaoheaJusoivite.(~'o<<civil pt'<M~<<<M
~f)~('<t <~<'M; ~'partie.) toa. Flcher, 18Hu, 4i4 p.
ia-8".
Par une srie do travaux, conduits avec persvrance,
M. Leist a entrepris de dterminer le droit primitif des dift-
reutes socits aryennes, tt a commenc par comparer cet
gard les Grecs et les Italiens, et ainsi est n le livre qui a
pour titre: f;<w<'o-<<a<<~)<' ~Mf~t'/tft". Puis, il a t'ap-
proche t'tudc de ta (~rco et de l'Italie. Partant de cette ide
que les rgies juridiques, communes a tous tes peuples de
race aryeune, dcvaieot tre auterieurcs & !eur dispersion, i]
a cru pouvoir atteindre, l'aide de comparaisous mtho-
diques, cette forme initiale du droit europeeu. Tel est l'objet
de sou .t~tnA'c/tM./tH~'M~MM Nous M'avons pas besoin de
faire remarquer tout ce qu'il y a de douteux daus un sem-
blable postulat. Mais il n'est pas ncessaire de le discuter
pour examiner les conclusions de l'ouvrage qui va tre ana-
lyse. D'o que vienne ce fond commun, il existe, il a partout
les mmes caractres distinctifs et il reprsente une phase
dtermine de t'histoire de ces socits. !) correspond
l'poque o elles n'taient pas encore constitues i'etttt de
cits ou de nations, mais formaient de vastes agrgats de
claus, saus contours dfinis, et rgis par ta coutume reli-
gieuse c'est. en enet, le trait caractristique de ce droit loin-
tain qu'il n'est pas crit et qu'il est sacr. H n'mane pas de
l'tat, mais des dieux. Peu peu, sur cette base premire, on
voit s'lever un droit nouveau, uvre de la cit et destin
servir les intrts de ta cit c'est le droit civiL Dans t')~.
~nitt'/tM jus <';<(', M. Leist se propose de retracer cette
gense, au moins ses dbuts. C'est surtout Morne qu'il a en
vue mais pour bien dgager ce qu'a de particulier l'volution
du droit romain, il met sans cesse en regard des changements
que l'esprit romain a fait subir au droit originel, les trans-
formations qui se sont produites parattetement chez les
peuples de la mmo race.
Dans la premire partie de l'ouvrage, parue en 1892, Fau-
teur s'tait born faire voir quelle forme spciale le vieux
droit religieux avait revtue Home. C'est seulement dans la

(t) h'-oa. Fis<))f.r, t8M.


(:*) /&/ i8)f9.
seconde partie, dont nous allons nous occuper, qu'est vrai-
ment abord le problme qui vient d'tre nonce. Cette
seconde partie comprend eUe.meme doux tivres l'un traite
du droit domestique, l'autre de la procdure. C'est le premier
seulement que nous aiions anaiyser.
Le MXf/'M~f (p. HJO-iKu). D'aprs l'auteur, ie mariage,
dans le droit primitif des peuples aryens, comportait trois
phases dont on retrouve d'ailleurs les traces jusqu' une
poque trs avance. 11 y avait d'abord les fianantes, ]a
jtpOMOM des Latins. i'<Y'< des Grecs; puis, la tradition de la
femme entre les mains du mari (~'<M<b, o~t;) enfin, t'iutro-
duction de la femme dans son nouveau foyer, crmonie qui
tait accompagne de simulacres de violences (</<'</t<f~'o il,
doHtxm n)f'!< T:');~). De ces trois sortes de pratiques, les
deux premires sont les consquences logiques du mariage
par achat. La .spoHSM, c'est l'entente conclue, entre les parents
de la femme et le mari ou ses parents, sur les conditions de
la vente ia ~'<<<'o, c'est la prise de possession par le mari
anirmant les droits qui rsultent de l'accord antrieurement
tabli entre les parties. Quant la fMc/<o, c'est un reste de
l'antique mariage par rapt qui se maintint et survcut ses
causes premires parce que, ~rce au caractre public et
mme bruyant de la crmonie, c'tait un moyen commode
d'tablir <wf<M< p~jxh le moment prcis o commenait le
mariage. M. Leist explique qu'elle ait t utilise sous cette
forme par ce fait que, chez les peuples aryens, l'emploi de
l'criture ne s'est vulgaris que tardivement. Les crmonies
dclaratives du mariage ne pouvaientdonc tre qu'orales, d'o
la ncessit de leur donner un ciat qui les fixt le plus pro-
fondment possible dans le plus grand nombre de mmoires
possible. Aussi le caractre oral est-il rest un des traits
distinctifs du mariage uryen. tandis que, chez les Smites
o l'criture a l pratique beaucoup plus tt, c'est un acte
crit qui est devenu trs vite la formalit matrimoniale
essentielle (lettre de mariage, lettre de divorce).
Mais il n'y avait l aucune organisation dnnie. Ces trois
oprations ne constituaient pas des actes de droit, drivs de
certains concepts juridiques ce n'taient que les principales
et ordinaires dmarches par lesquelles, en fait, on fondait
d'ordinaire un foyer nouveau. Ou n'avait mme pas alors la
moindre ide du mariage, tel que nous le concevons aujour-
d'hui, c'est--dire comme un acte dont ta valeur et les ettots
dpendent exclusivement de son rapport de conformitou de
non-conformit avec une rgle prtablie. 11 M'y avait pas,
dit Leist, do mots dans ces difirentes langues pour exprimer
une telle ide (p. 108). Le grand changement introduit dans
ces coutumes par le droit civil, quand Il se constitua, fut
prcisment d'riger l'une des formahts usites en critre
exclusif de la relation matrimoniale. On prouva le besoin
de marquer un moment prcisa partir duquel commencerait
le mariage ce moment fut mis hors de pair parmi tous les
autres et il dut son importance, non sa nature intrinsque,
son rle effectif dans la constitution de la nouveiio famiiie,
mais simplement ce qu'on convint de lui attribuer cette
vertu. Or, la ~<'</)'<to tait un souvenir do l'ancien mariage
par rapt qui, de plus en plus, mesure qu'on prenait davan.
tage l'habitude de voir dans i'pouse une gaie et une com-
pagne, perdait toute raison d'tre et toute signification. Les
pratiques qui s'y rattachaient devinrent donc de plus en
plus de simples usages crmonieis. Au contraire, celles qui
correspondaient au mariage par achat devinrent prpond-
rantes. C'est partir du moment o l'on put considrer
l'accord comme dfinitif entre les parties, que le mariage fut
regard comme conclu. Suivant les peuples, c'est ou la
i!poM4')o ou la <f<Mfto que fut attach cet effet. Le premier
systme est celui des Grecs, le second celui des Romains. La
~f/Mcft'o ne se maintint avec ses anciens caractres que dans
la mesure o le vieux droit religieux persista sous le droit
civil.
/.M famille. La famille chez les anciens Aryens est une
communaut qui comprend les parents, tes enfants, les
esclaves, les animaux domestiques. Le chef en est le pre.
Mais le pre a des droits trs diflrents sur les esclaves et
sur les animaux d'une part, sur les personnes libres de
l'autre. Sur les premiers, ii a des droits de propritaire, sur
les seconds, il n'a que l'autorit qui appartient i'adminis'
trateur de la chose commune (ou<jK<;). Tel est le sens de la
po~<M des Latins; c'est le pouvoir en vertu duquel ia famitie
est gouverne. Mais ce gouvernementest monarchique toutes
les personnes libres, malgr la diversit de leur situation, y
sont galement soumises.
Or, cet gard, le droit civil dtermina Rome, mais
Rome seulement, une profonde transformation.Les membres
libres de la famille y tombrent au niveau des esclaves et des
choses; ils devinrent l'objet d'un droit ret. Eu (irocf, ils
n'taient que des sujets ;M-<xj!y'm) u Home, ils turent des
dpendances du pre f.<). Du moins, si les mu:urs conser-
vrent beaucoup des anciennes coutumes, le droit propre-
ment dit s'en spara radicalement. C'est de cette situation
particulire du pre que drivent toutes les autres particula-
rits de in tannHe romaine, notamment celles qui concernent
le droit successoral. Lu o le pre n'est que l'administrateur
des biens de la communaut, il ne peut pas en disposer libre-
ment, ni de son vivant ni aprs. Au contraire, s'il est per-
sonneiiement propritaire du patrimoine familial, le droit
de l'aliner, d'exhrder ses enfants devient tout nature).
Quant l'explication que donne M. Leist de co caructt're
original de la famille romaine, elle est des plus simples. C'est
que les romains ont occup le Latium en conqurants le sol
fut donc partage entre eux f<n'~)), et le chef de chaque com-
munaut familiale en reut une part. Ils constiturent ainsi
une aristocratie et comme ils taient tous des pa~-M, la
classe qu'ils formrent prit le nom de p<t<<'. Mais. comme
toutes les armes, ils taient pauvres en femmes; ils durent
donc aller en chercher dans les familles des peuples soumis.
Ces femmes se trouvrent naturellement vis--vis de leurs
maris dans une situation d'infriorit et de dpendance, voi-
sine de celle occupe par les esclaves et la mme subor-
dination s'tendit aux enfants ns de ces femmes. Telle
aurait t l'origine principale de la pa~'M potMf<M, telle que
ta conurent les juristes romains.
~.M o~utc.'x/x <c~ <'<('<<. De la famille est spontanment
sortie, par voie d'extension spontane, la {/eMf{ des Romains,
la phratrie ou la curie, enfin la tribu. Ces diffrents groupes,
tout en tant institus en vue de la guerre et tout en ayant,
pour cette raison, un caractre militaire, avaient avant tout
pour base la consanguinit et la parent. Seulement, ta parent
tait d'autant plus tche et plus indtermine que le cercle
de l'association tait plus tendu c'est pourquoi elle tait a
son minimum dans la tribu. Chez tesanciens Aryens, l'orga-
nisation sociale n'atlait pas plus loin. Les tribus diffrentes
vivaient cte cote, sans avoir entre elles de liens durables,
sauf quand la ncessit de lutter contre un ennemi commun
les obligeait se confdrer. Tant que les.socits restrent
dans cet tat, le droit, de son ct, resta ce qu'il tait primiti-
vement.
Mas, peu peu, sous l'influence de diOrentes causes dont
la principale fut sans doute I;) guerre, les rapports eutrem
tribus voisines devinrent plus rguiiers;tesconf6dration&
prirent un caractre plus stable. Eu un mot, des socits nou-
velles prirent naissance qui comprirent daus tour sein,
eu
qualit d'lments, plusieurs des socits antrieures; et les.
pouvoirs nouveaux qui turent ainsi constitus et surajouts.
ceux qui dirigeaient les tribus isoles, devinrent la source
d'institutionsjuridiques nouvelles. Cette transformation n'est
pas spciale aux socits aryennes; il n'est pas de peuple qui
ne se soit form de cette manire. Mais voici ce que ce chan-
gementeut de particulier chez les Aryens c'est que tes anciens
cadres sociaux ne furent pas absorbs par la nouvelle organi-
sation. Ils se maintinrent plus ou moins intgralement, tandis
qu'ailleurs, on Egypte par exemple, ils disparurent compl-
tement. A Home, en Grce, en Germanie, la socit resta
divise en tribus, phratries, curies, etc., ou en groupes simi-
laires. Or ces groupes n'taient que des familles agrandies,
organises sur le modle mme de la famille. U en rsulta qu&
l'tat reproduisit le mme modle, que la constitution poli-
tique fut un rouet de la constitution domestique.
Yoita ce qui explique les caractres nouveaux du droit qui
apparatt alors. Le pre de famille, chez les Aryens, n'est pas
un tre sacr, investi d'une autorit religieuse qui l'lve infi-
niment au-dessus des autres membres. Ce n'est que le repr-
sentant de la communaut. Ce n'est pas un dieu, mais sim-
plement un matre respect; encore ne peut-il pas prendre
de rsolution importante sans le concours de la famille qu'il
dirige. Il devait donc en tre de mme des chefs de l'tat nais-
sant. Et en effet. partout, on trouve leur puissance limite par
celle d'une aristocratie plus ou moins tendue ou mme du
peuple entier. Nulle part ils n'ont ce caractre sacro-saint
que les monarchies orientales prtent leurs rois. Par suite,
les pouvoirs nouveaux qui apparurent ce moment ne pou-
vaient manquer d'tre taques, ainsi que le droit qu'ils insti.
turent. Ce droit, c'est le droit civil.
Ainsi le droit civil ne serait pas n, par voie de dveloppe-
ment, du droit coutumier et religieux. Mais il driverait de
sources diirentes et chacun d'eux aurait ses organes sp-
ciaux. Le droit archaque avait pour terrain la tribu avec ses
divisions en phratries, ~eM<M, familles le droit civil serait
produit par la coalescence de plusieurs tribus en socits plus
vastes et il manerait des nouvelles forces sociales qui se
seraient dgages de cette coalescence. Ces deux formes de la
vie collective se prsentent mme partout a t'etat d'antago-
nisme. Aussi en est-it do mme des deux sortes de droit qui
y correspondent. Le droit ci vit (~M;' n'est pas ie prolongement
du droit religieux (/<); mais le premier s'est superpos au
second, l'a fait peu peu rgresser, et finalement t'a presque
totalement recouvert; car te droit nouveau ne s'appliqua pas
seulement aux relations nouvelles dtermines par le nou-
vel tat des choses, mais it s'tendit aux anciennes, refoulant
de plus en plus le droit qui les rglait depuis des sicles.
C'est surtout Rome que l'antithse entre ces deux concep-
tions juridiques est manifeste, puisque, l'ancienne organi-
sation de la parent, si directement fonde dans la nature de
la famille, s'en substitua une autre, totalement difrente, et
qui fut tout entire cre par l'tat, c'est-a dire par ia cite et
pour les besoins de la cit.
Telles sont les conclusions de ce livre; ettes sont videm-
ment d'un esprit original qui a cherch se frayer dans
l'histoire du droit une voie qui lui ft personnelle. Nous ne
croyons pas cependant qu'il y en ait beaucoup qui puissent
tre directement utilises par la sociologie. L'auteur aborde
ces problmes dans un esprit trop formaliste il est trop
enclin voir dans le droit une ralit en soi, qui ne sort pas
des entrailles de la socit, mais la domine, et qu'un abtme
sparedcsautres manifestai ions de la vie collective, pourqu'il
lui soit possible d'apercevoir les causes qui en ont dtermin
t'votution. Onavu de quel simplisme taient ses explications.
Mais comme il a pass sa vie dans l'intimit du droit romain,
il a, des caractresdistinctifs du droit en gnrt et du droit
romain en particulier, une sensation trs vive, parfois trs
juste, et qu'il s'euorce, sans mme craindre assez les rpti-
tions et les longueurs, de communiquer ses lecteurs.

A. MOttKT. La condition des faux en Egypte, dans la


famille, dans la socit, dans la vie d'outre-tombe (~Mt<f;
dM ~'wtM <'<a/<]t Mt'M~/e ~~t'CMMe cl a~f)'eMM<
t. XtX). Paris, !!oui)to)).

L'auteur montre comment, en Egypte, les tap~ofts Modaux furent


le type des rapports famitiaux et potitxjm's dans ce monde et dans
l'autre.
ACtMOY!C(Vontv.~). -Ueborstoht desserMachenErbrechte,
im H!nbllok sauf eine Reform desselben( ~~M'f </ </M/< xr.
<'<M~~ w)'&c, co t'Mt f/'M))f n'/bfMe (t y ~'of~ffre).

tn /u'&w/<
der M<M7M<)'MM/<'M t'ffft'Mt~MM~ /'f'!r t'f~/eft'/fMtf/f 7?<'<)<'t'<t-
M<'Aa/TKH<~ r'~<t''~<tH/?/fA<'<<897,<tf/t<'t7MM9, p.i"0-t3S.

Le t<j{is)ateur scrtx* a entrepris en )8H de codifier le droit domes-


tique est t'adaptant aux couditiuns nom't'ttcs de la vie sociah'. Ma)!-
il <-st {Kuti d'un pt'incipcfuux; il a ('t~id~ cototnc deux fot'tnf.
de fan)i))<' 'Mhsohttnent distHK'tcs ):t ~K/)'~< et j'Mw<, t't~ cette
distin':tiua est devenue ht bit-e (tu droit suct'MMrat <!<<))))) par cctt)'
)c(tii!)!)ti"n. Ut-, est rea)itt\ ce!! df'ux s'o'tfs de famine !:ont dt- tn~tn'-
nature. t/mo' et t'autn* t'eposent sur )'; cotntnunistne domestique.
Elles <nn'<'t'ent seulement f'n <'t''ndue. Ut ~(/<'M~ comprend tous
tes cottateraux mme )es j)))t.< etui(<nes. autant qu'ifs peuvent cuhabi-
<er<'nsen)t))e; ta fatnittt: /HOAMMM est faite unxjuftnent du pre, de
lu mt're f't des enfants. Mais dans lu seconde pas plus (jne (tnxs ta
pretttiete, te pre n'est le prupt ietuire de ta chose cuttunuue. )t n'<'n
peut disposer sans le consententeut de ses tits. tt n'en ['st pas nt~nte
t'admini'.tratetn' de droit; il peut tre dpose de ses functiuttt et
remplace. C'est d'ja ce qu'aot etahti Mot:isic dans son tratait I)e
/ /f'M<' <?<; inokosna </f / /ffM<7/e rM/'~ <tM &'rAo( et /M
CMH/M (Paris, i88~). l'our avoir tneconnu cette identit fondatnen-
tate, un a institue deux droits successorauxditTerents et dont t'appti-
cation, par suite, doune tMissance a d'inextricahtes ennttits. t.e seul
moyen d<' tes fait-t' cesser est de mettre la )et;istation est harmonie
avec l'tat des cttoses.
it y a tit'u de remarquer lu mthode suivie dans cet article, t.es
refbttnes pratiques proposes par fauteur ue sont pas dduites dia-
)ectiquc)n<'nt tte principe:! juridiques, mais d'une tude objective
def! mH'urs et des coutumes populaires.

MH-EH (EKXKsT). Die HauakommuNion derSadsIavem (/. wm-


MMtMM~ </OMM~t<t' f/<M ~ft'M f/K .S'M<<). Metne tCCUeit, i80'T,
i'&f/t<)M~,p. <90.aS2.
L'auteur fait un historique rapide de ta XadrutM, dans tes diff-
rents pays slaves du Sud, en insistant surtout sur la lgislation la
plus rcente. Ce qui ressort de cet expose, c'est que le tepistateur.
aprs avoir essaye de tutter contre la Xadruga, semhte y avoir
renonce prottt'cssivement. On a reconnu il t'expericnee que ta des-
truction de cette vicitte organisation famitia)e aurait, chcz ces
peuples, de dsastreux effets pour t'agricutture. C'est ce qui est sur-
tout vident de ta Croatie et de ta Stavonie.
L'auteur signale (p. 205 et 2)3) t'existence de Xadrugas nobles qui
aujourd'hui sont soumises & un rgime juridique spcial, mais
itutf'fuis ne M' distinguaient )):).< (tes autf's. ).a fottnntiun de cette
uo)'t''s':).')u)u!nt'n')t)t!ntcp:)saud<'):'tthtxv)'')'tdux\))'it'<:tf'.
L'tude df ce syst'm'' f~'d!)), ainsi ()t[c d'- ft'hti <)u't')) )"'ut ''xcoce
ot)';)')'pt- chM )<'< Sttm'~ du ~ot'd, nid~t'Mt t.h)~uHft'en)ent & t'iutctti-
~t)t;edf'taf'd!)iit~t)('t:idL'ntuk'.

)\.LKMAtUACH
t'Ut'M.tft.XKMMU

o. MEYNIAL. Le mariage aprs tes invasions. (~o)t-


re<~ /<fpc /)t'oW~)* de droit /)'<!MyM (~(t~ft', 1896,
n" 4 et 6; 18U7, n 2.)
L'auteur se propose de rechercher comment s'est constitu
le droit matrimonial du moyen ge.
Ce droit s'est form sous une triple influence la loi
romaine telle qu'elle apparat la fin de l'Empire, les lois
barbares, l'glise. C'est le premier de ces apports que M. Mey-
niat entreprend de dterminer dans les trois articles ci-
dessus indiqus et qui no reprsentent que la premire partie
de son tude.
Les /brMM <~< Mxu'Mj/c. Quoique, eu apparence, l'institu-
tion matrimoniale soit reste dans la Rome du Bas-Empire
ce qu'elle tait la fin de la Rpublique, en ralit, une
profonde transformation s'est produite. Dans le principe,
comme Leist nous l'a montr plus haut, les ~tMf<f oxp~'a'
comprenaienttrois phases tes fianailles, simple prliminaire
qui ne participe pas encore a ta nature ni aux effets du
mariage, la ~'<~<fto, la (Mefto ce sont ces deux dernires
crmonies qui constituaient vraiment tes justes noces. Or,
peu peu, elles tombrent en dsutude. ties n'avaient
d'importance que parce qu'elles taient solidaires du culte
des anctres: elles disparurent avec lui. Ettes survcurent
sans doute pendant longtemps, mais l'tat d'usages dpour-
vus de toute utilit juridique. Le fait gnrateur du mariage
devint, non la formalit rituelle, mais le consentement des
parties. Or, ce consentement rsulte de la cohabitation volon-
taire et prolonge par suite, la cohabitation, si elle ne fut
jamais la condition ncessairedu mariage ())Kp(MKOHcoHCM-
&<<tM, setl consensus /o<'t<), en devint la condition suffisante, en
tant qu'elle tait symptomatique du coMCMtM. Mais alors les
justes noces devinrent, ce point de vue, Indistinctesdu con-
cubinat, qui n'est lui aussi qu'une cohabitation consentie. Au
dbut, il est vrai, la concubine se distinguait de l'pouse non
seulement par l'absence de formalits matrimoniales, mais
encore parce qu'elle tait et ne pouvait tre qu'une personne
de condition infrieure. Mais le jour o l'on put prendre
pour concubines celles qu'on prenait pour femmes et inverse-
ment, cette distinction mmo disparut.
Une seule diffrence subsista ce furent les fianantes. C'est
pourquoi, d'acte extrieurau mariage qu'ellestaientd'abord,
les fianantes en devinrent de plus en plus l'lmentessentiel.
Tout un travail se fit dont le rsultat fut de les lever la
dignit du mariage proprement dit. Toutes les rgles qui
s'appliquaient au mariage furent tendues aux fianailles.
Elles impliqurent mmes conditions d'ge, de consente-
ment elles furent soumises aux mmes prohibitions, engen-
drrent les mmes obligations, etc. Ce fut un mariage terme,
mais dont le terme seul fut laiss au libre choix des parties.
Comme les fianaillesjouent galement un rle prpondrant
dans le mariage germanique, ou voit que, de lui-mme, le
mariage romain tendait se rapprocher de ce dernier ce
rapprochement spontan devait natureiiemeutfaciliter leur
fusion.

Les co~t'ft'w! (< Htanagw. Primitivement,le droit de con-


sentir au mariage est un attribut exclusif de la puissance
paternelle; d'o il suit qu'une personne <! y<'M n'avait
besoin d'aucun consentement. H est vrai que les femmes,
mme quand eites n'taient plus soumises l'autorit d'un
pa~f<m<<KM, subissaient encore la tutelle des agnuts. Mais
on ignore si cotte tutelle confrait le droit de consentir au
mariage en tout cas, elle disparut sous Claude. Mais sous le
Bas-Empire, ou constate un retour l'ancienne lgislation
la femme, mme ~t ~'<'M, est de nouveau soumise un cou-
trle plus troit; seulement les personnes qui l'exercent ne
sont plus les mmes. Ceux que l'ancien droit excluait sont
maintenant appels cette charge d'abord la mre, puis les
propt'K~Mt.Quoique cette expression ne soit nulle part dfinie,
il est trs probable qu'elle dsignait les cognats aussi bien
que les agnats, peut-tre mme les voisins et les membres de
la mme classe sociale. Enfin, quand il y a dsaccord entre la
femme et sa mre et les p<'op<M~, c'est l'empereur ou le
t
juge, son dtcgu, qui tranche le diffrend et choisit poux.
Le pouvoir impriat prit ainsi pied dans ta famille et on
alla jusqu' lui reconnattre le droit de suppler au consente-
ment non seulement des parents, mais des poux, et d'imposer
le mariage. Ces faits prouvent qu'il se produisit alors une
concentration nouvelle de lit famille, c'est une des {ormes que
prit le rveil de l'esprit corporatif qu'o constate a cette
mme poque. L'un et l'autre sont dus ce que tes individus,
pour n'tre pas crass, sont obligs de se grouper et de
former des groupes aussi forts que possible. Mais on voit que
cotte concentrationdu groupe domestique se fit sur des bases
trs diffrentes de celles qu'it avait autrefois.
Une autre nouveaut, non moins importante, c'est t'avne-
ment du <'oM~M&MWt<M)(union de deux esclaves ou avec uu ou
une esclave; au nombre des unionsregutiresetrgtementes.
Primitivement, la toi ne s'en occupait pas; Hue produisait
pas d'eflet ~gat, n'engendrait pas de parent proprement
dite. Peu peu, au moins dans certains cas, il prend le
caractre d'un mariage, infrieur sans doute, mais reconnu.
Ainsi, ea mme temps que le concubinat se rapproche des
justes noces, le MK~M/w/ttXMt se rapproche du concubinat. On
verra que ces unions incertaines se rencontrent frquemment
ta priode barbare, et qu'elles y ont joue un rio impor-
tant.

tM f'W.'i dit m(u't'<jt('.


Le grand changement qui s'est pro-
duit cet gard, c'est que le mariage tend de plus en plus
devenir une institution spciale, distincte de la famille et
lui servant de base.
A l'origine, Rome, la clef de vote de la famille n'est pas
le mariage, mais la p~'< /~M~<s. Le mariage n'a pas
ncessairement pour effet de fonder une famille nouvelle,
mais simplement do faire entrer dans la famille du mari
un membre nouveau. Par lui-mme, le mari n'est rien ou
presque rien c'est le ;M<M'/m<<Mqui est tout. Ce n'est pas
son mari que la femme est soumise, mais au ~M~<!m<<t<M
de son mari. C'est seulement comme patfr/w<<M do sa
femme que l'poux peut chtier t'inudetite conjugale, etc.
Le pouvoir marital n'est qu'un aspect du pouvoir paternel.
Mais mesure que le second dcline, on voit te premier s'en
dgager et se constituer part et plus fortement, Le mari a des
droits en tant que mari, notamment celui de punir l'adultre
ou d'eu poursuivre la rpression. Le coup!e conjugal, d'abord
perdu dans la masse famitiaio, s'en dtache, devient un
groupe ~t<t ~<'Mm~ qui a sa physionomie propre et sa rgle-
mentation spciale. C'est surtout au point de vue pcuniaire
que cette transformation est sensible. Originellement, la dot
de la femme entrait dans te patrimoine du ~MfM'/<~t~M du
mari, et, s'il y avait restitution, eitone pouvait tre provoque
que par le pM<M'/u))))<ta< do l'pouse et eUe avait lieu son
pt'oHt. Peu peu les choses changent. La dot entre dans le
pf<'M<<Mt du mari, puis elle est detare compltement ind-
pendante du patrimoine familial. En mme temps, le con-
sentement de la femme devient ncessaire pour qu'il y ait
restitution et toutes sortes de mesures conservatoires sont
institues pour conserver au fonds dotal sou caractre propre.
tt se constitua ainsi, en dehors du patrimoine familial de
t'upoux et de celui do l'pouse, un patrimoine conjugal que
l'usage de la </OK<to M<<' MX~'fM vint encore grossir. Ainsi
la socit matrimoniale se trouva fonde sur une base co-
nomique qui n'tait qu' elle.
Sous l'influence de ce nouveau contre d'action, l'ancien
groupement familial se transforma. Au noyau form par les
deux poux et ainsi isol se rattachrent tout naturellement
les enfants. Trs vite ou leur reconnut des droits spciaux
sur ce patrimoine conjugal, et par consquent ils soutinrent
ds lors avec leurs parents des relations inconnues jusque-l,
puisqu'ellestaient indpendantes de toute pa<Wa potMhM. En
un mot, sous l'ancienne famille, fonde tout entire sur cette
autorit ' ~CM~'M du p(tf<'<<M)t~M, il s'en formait peu peu
une autre, toute nouvelle, qui reposait sur te mariage et les
liens de consanguinitauxquels il donne naissance.
Ici s'arrte, au moment o nous crivons, cette intressante
tude. Dans la suite, que l'autour promet, it mettra en regard
de cet tat de la lgislation romaine les dispositions corres-
pondantes des lois barbares.

KARLFR!EDER!CHS.PamMienstufen und Eheformen


(Types famille c</brmM (Tem'<r<~e). ~<'t'cAt'~ fiir cer-
S~tcAeM~e /(ecA~<CMM<Mc~a/ t. Xt, p. 458 et suiv., t897.

L'objet de cet article est de montrer qu'un mme type de


famille peut trs bien s'accommoderde formes matrimoniales
diSrentes. Les faits abondent. Dans la X<<<'tt~a slave, telle
qu'elle existait il y a peu de temps encore, la monogamietait
rigoureuse. Au Thibet, ou retrouve la mme organisation
domestique, mais le mariage est collectif tous les frres
pousent une mme femme. Sous le rgime de la famille
maternelle, on voit trs bien un groupe de smurs pouser un
groupe de frres, ou pouser un seul et mme homme (sorte
de polygynie d'un genre particulier), ou chacune pouser un
mari dinrent, etc., etc.
Mais la proposition, pour tre exacte, a besoin d'tre res-
treinte elle n'est vraie que de cette partie de ta rgtetnenta-
tion du mariage qui concerne le nombre des poux qui
entrent sous )a raison conjugale. Jusqu'au temps o ia mono-
gamie devient lgalement obligatoire, co mode de ia socit
matrimoniale n'est pas dtermine les parties le fixent leur
gr, suivant les circonstances. Tout au plus, y a't-ii des cou-
tumes gncrHtement suivies dans un mme pays, prcisment
parce que les conditions d'existence sont gnratomeut les
mmes pour tous. Et encore trouve-t-ouparfoisdes diffrences
trs tranches. Par suite, les combinaisons les plus diverses
peuvent avoir lieu, alors que pourtant le type de la famille est
le mme. Mais il n'en est pas de mme des formalits du
mariage, elles sont beaucoup moins variables. On ne trouve
pas le mariage par achat avant un certain moment do t'evo.
tution et on no le trouve plus qu*a l'tat de survivance des
que cette phase de l'histoireest dpasse.
Mme ainsi dcthnitee, la loi est importante, Il s'en dgage
plusieurs consquences
t La famille ne peut tre dfinie par la nature de la socit
<~U}ugate; il faut donc renoncer distinguer des familles
potyandriqucs, potygyniques, etc. C est ailleurs que doivent
tre recherches les traits caractristiques de la famille.
3" Un coroltaire de ce qui prcde est que le mariage n'ex-
plique pas lit famille, puisqu'une mme famille comporte des
sortes de mariage trs ditrcntes. On ne doit donc pas plus
expliquer ta filiation utrine ou les nomenclatures de Morgan
par t'hypothese du mariage collectif, que la filiation agnatiquo
par les conditions dans lesquelles ont lieu les justes noces et
la prsomption qu'elles fondent.
3" Plus gnralement, on voit combien est errone cette opi-
nion de sens commun qui faitdu mariage la base de la famille,
puisque celle-ci n'est que si faiblementaffecte par les usages
matrimoniaux.
QARUi-'t (C.-A.). Ricerohe auertt aai nuztalt ne! medio
evo in Sicitttt,
coo documenti indit (/<<'fA<'t'cAM /M
xt'
.M~M KUpN)~'t< moyett tiye fM Sicile, <!t'<'C des <<OCMM<
!M<'</<~). Paterme, chez Atborto Reber, 1897. t03 p., grand
iu-8".
La Sicile est l'un des pays d'Europe o le plus de races et
de civilisations diffrentes se sont trouves en prsence. Les
Grecs, les Latins, les Juifs, trs nombreux pendant le moyen
ge, les Arabes, les Normands s'y sont coudoys un moment
donn. De ce mlange est rsult une civilisation composite.
Chacun de ces peuples a marque de son empreinte le droit
sicilien, qui par suite est trs diffrent de celui qui tait en
usage dans la pninsule. H a une physionomie qui lui est
propre. C'est ce que M. Garun a voulu tablir pour ce qui
concerne les usages nuptiaux.
Ce qu'il a de particulier cet gard, c'est d'abord que les
pratiques cermoniettes ne furent nulle part aussi nom-
breuses, prcisment parce que les Siciliens empruntrent un
peu tout le monde. Le mariage complet se composait au
xtv* sicle de trois couches de formalits superposes. Il y
avait, en premier lieu, les anciennes (ianaiites (N;)OHM~a)
auxquelles l'Eglised'Orient avaitdonne un caractre reUgieux;
puis, une dmarche par laquelle les poux allaient l'glise
rendre grces Dieu et recevoir la bndiction du prtre
enfin, entre ces deux usages s'en intercala un troisime,
apport sans doute par les peuples d'origine germanique.
C'est une transformationde ta crmonie par laquelle t'poux
acqurait le Mtt~'ttm sur sa femme. Et ces trois formalits
taient ncessaires la validit du mariage.
Non seulement elles taient nombreuses, mais elles se fai-
saient avec un luxe de ftes et de parures dont on ne trouve
aucun exemple en Occident. Festins, reprsentations th-
trales, promenades aux flambeaux se succdaient pendant
plusieurs jours. Cette somptuosit devint tellement exagre
que les rois normands essayrent de la refrner, comme le
prouvent un trs grand nombre de lois somptuaires dans
toutes tes villes de t'tte. On trouve dans plusieurs fueros
d'Espagne les mmes prohibitions; d'o it suit que les cr.
monies nuptiales y avaient le mme caractre. Cet clat
exceptionnel ne serait-il pas une importation arabe ?
Emt. SCHULENBURG. Die Spurea des Braatptmhes,
Brttutka.ufes und aenlicher VerhMitnisae in den
fa.nzooaischen Epen des Mittelalters (~-CM dit
m<~<' p(' /'~, (/M M M~0 ~<' c/<f<t f( (/e p<'~M an-
<0<yM (/(t <M t~O~f'PS /;t{'<!M('< du MOt/t'M <~f). /<'<f-
"f/t/ifr<<'<'c/)tw/<' /<<'<<~'fMt')Mc/t~ t. Xn,p.i~-t4u
eHUt-MC.

Dans les pomes piques du moyen ~ge, un chevalier eutve


trs souvent, par force ou par ruse, la femme qu'il ttitne; or,
on considre que cet enlvementconstitue, au profitdu ravis-
seur, uu veritabto droit pouser la personne enleve. Dans
d'autres cas, ie chevalier est oblige, pour mriter la main
d'une jeune tttte. de se soumettre de vritables preuve: de
tmoigner de sa bravoure par quelque haut fait ou tttme de
rendre un service signal aux parents de sa bien-aimce..
M. Sct)u!enhurs voit dans le premier de ces usages un reste
du mariage par rapt, et, dans le second, une survivance du
mariage par achat.
Si, par ces mots, mariage par achat, mariage par rapt, un
entend le rapt symbolique et l'achat rgulier de ia fiance,
tels qu'ils sont pratiqus chez des peuples relativement avan-
cs (Slaves, Grecs, Hbreux, t:, le rapprochementest arbi-
traire. Ces deux crmonies sont en effet des procdures
dfinies, ayant une signification juridique dtermine. Elles
accompagnent la transformation de la famille mitterneiie en
famille aquatique et elles en rsultent; elles sont destines
permettre au mari d'incorporer dans sa famille natale les
enfants na!trede son mariage. H n'y a donc rien de commun
entre ces institutions rgulires et ces coups de force et
d'adresse, tant en honneur au moyen tige. La tolrance dont
ils jouissaient alors tmoigne simplement que la socit tait
en train de s'organiser; par suite, beaucoup de faits chap-
paient la rglementation collective, encore dbite et incon.
sistante, et beaucoup de situations se dnouaient par la vio-
lence, qui par consquent jouait un grand rote. C'est ce qui
arrive, sous dos formes diverses, toutes les fois que les forces
sociales n'ont pas encore atteint un suffisant tat d'quilibre
ou l'ont perdu. A cet gard, les usages dont nous venons de
parler ne sont pas sans analogie avec certains faits que t'en a
constats dans les socits tout fait infrieures, comme les
tribus australiennes, et qui ont t galement confondus
tort avec io mariage par rapt ou par achat. Chex ces peuples,
ii arrive ou que le jeuno homme enivola femme sans le con-
sentement des parents, ou qu'il achet ce consentement. Mais
il n'y a point l d'oprations juridiquesdestines produire
certains effets do droit. Un homme prend une femme de force,
ou, pourviter une vendetta,dsintresse les parents; ce sont
des arrangements privs, plus ou moins frquents. mais sans
valeur etsans sanction sociale. Il n'y a rien dans tout cela qui
affecte !a structure de la famille. L'analogie avec ce qu'on
observe au moyeu ge est assez frappante et olle pourrait
s'expliquer par ce fait que ces deux sortes de socits taient,
Mta~ ~)<ft)</<.<. dans un tat correspondant d'inorganisa-
lion, chronique dans un cas, provisoire dans l'autre. ii n'y a
pasia de survivance. Seulement, les socits suprieuresqui
dbutent passent par des phases o elles rappellent certains
traits des socits infrieures, avec cette diffrence qu'elles no
s'y arrtent pas.

Uutt'c les travaux jH'cc~dcnts, ou tt'uuvcta des )'cn"pignf'ments


it))pt't'(!U)t':d:u)!! )'< ouvrages ci-t!t'suu! qui ont ~t' :ma)ys~'s ;))us
))ttUt sous lit t'u)'t'i<)U<* ~Ct-t'H~t'f fC~t'ftMf

MA<tY ti. KtX<.St.HY. Travels in West Africa (v. p. 180).

t.. SCOTT nOHEHTSUX. The K~Crs of the Himdu Rush


(v. p. i8~).

J. Kt."n~C. Tagbuoh oimer Rise in nner Arabien (v. p. )89).


C. HAttX. Kaukastsohe Relsen und Studien (v. p. t90;.
))E)txuA)tu STERX. Zwisohen Kaspi und Pontus p. tM).
Tous les uuY)'af!('s tuentiom~i sous lit ru!)rit)u': ~'u/<e <~mM<)'~tM
(p. i90 a p. 2t0j.

A. HUJ.HXHAMtT. Vedische Opter und Zauber h. p. 230J.

V.LAPtSK
t'm'M.UmKMtM.

L. GUKTMER. Die Idee der Wiedervergeltungin der


Geschichte und Philosophie des St)'a.&'oehtes. ~<tt
BM~'~~Mt'L'HtPPrM<~<0)'MC/<~ Jtt(tC<C~~MMa' <<~<!<<'M.
IH* Abth., i" Maeifto. (A'~c <<<' fc~a~~ t/oMo f/tM~v
</!M H p/7o~/c </u (/<-o<f ~)~. Contribution & t'idstoire
gnrate du dveloppement de ce droit. Troisime partie,
premire section.) riangen, 1895, chez Hiasing ~'xxxvnt.
CS8 p.).

Quoique cet ouvrage date de 1895, nous croyons uti)c de le


mentionner et d'en indiquer les tendances gnrtes, parce
qu'il doit avoir une suite que nous aurons prsenter nos
lecteurs quand elle aura paru.
Par reprsailles (t)''f/cn'<<ft(M~ l'auteur n'entend pas
seulement le talion proprement dit. Si nous comprenons bien
sa pense, il dsigne par ce mot toutes les modalits et tous
tes caractresde la peine qui ne sont que le reflet et ta repro-
duction automatique des modalits et des caractres corres-
pondants du crime auquet elle est attache. En tant qu'eue
est destine amliorer le coupable ou & intimider les imi-
tateurs possibles, il n'y a aucune raison pour qu'elle res-
semble de prs ou do loiu l'acto qu'elle rprime. Si l'on
veut qu'elle russisse neutraliserles penchants malfaisants,
soit chez le criminel lui-mme, soit chez les sujets prdis-
poss suivre son exemple, c'est d'aprs le temprament du
criminel et non d'aprs ta nature du crime qu'elle doit tre
construite. Or ii se trouve que trs souvent elle est consti-
tue de manire n'tre qu'une rptition totato ou partielle
du mat inflig ta victime. A des degrs divers, tous les
peuples ont admis qu'il y a entre le crime et la rpression
une sorte de parent. Ce sont ces particularits de la peine
que Gunther attribue l'ide de reprsaittes, c'est--dire au
besoin de rendre le mal pour le mal. A cet gard, les repr-
sailles ne se confondentpas avec le talion, quoique le talion
en soit la forme principale. Il n'y a en eltet talion que quand
ta peine est la reproduction exacte et matrielle du crime
(it pour (Bit. dent pour dent). Or, elle peut n'en tre qu'une
image symbolique, elle peut soutenir avec lui des rapports de
grandeur sans lui ressembler qualitativement, )a ressem-
blance peut se rduire une analogie, etc., etc.
Cette tendance driver la peine du crime n'existe nulle
part t'tat de puret partout la peine prsente des pro-
prits qui viennent d'une autre origine. Jamais elle n'a eu
pour unique objet de satisfaire des besoius vindicatifs on lui
a toujours assign d'autres fins et on t'a conue en cons'
quence. Mais ce courant n'en existe pas moins; puisqu'il
dpend do causes qui lui sont spciales, il u son individualit,
et par consq uent il peut tre isol des autres et considr
part. C'est ce que s'est propos de faire M. Gunther. !t a
entrepris de retracer t'votutioM de ce courant depuis les
origines jusqu'aux temps actuels.
Les deux premires parties de l'ouvrage, publies l'une
en ~889 et l'autre en 189t, nous prsentaient un dveloppe-
ment do l'ide de reprsailles chex les peuples civiliss de
l'antiquit et dans les socits germaniques jusqu'au milieu
du xvm" sicle. Dans la troisime partie, dont la premire
section va nous occuper, l'auteur poursuit son tude jus-
qu'aux peuples contemporains. Ce qui se dgage de cette -A
exposition, c'est que la notion do la peine-reprsaittestend
s'effacer devant d'autres conceptions, sans que pourtant elle
ait entirementdisparu. Elle marque encore de son empreinte
de nombreuses dispositions lgislatives. L'auteur y rapporte
d'abord toutes les prescriptions en vertu desquelles les
auteurs de violences, mortelles ou non, sont totalement ou
partiellement absous quand l'acte incrimin a t dtermin
par une provocation pralable. C'est on ellet une conscra-
tion dernire du droit de reprsaiiics, et Gunther confirme
cette interprtation par ce fait que, chez les peuples les moins
avancs d'Europe (Montngro, Espagne), l'absolution, en
pareil cas, est beaucoup plus complte qu'ailleurs. La per-
sistance de la peine de mort serait galement une survivance
de l'ancienne rgle d'aprs laquelle le sang appelle le sang.
Les autres traces du mme principe que M. Gunther relve
dans le droit contemporain sont les suivantes les dispositions
en vertu desquelles le faux tmoin ou le juge prvaricateur
sont condamns une peine, ou gale,ou tout au moins pro.
portionnelle celle qui a ou qui aurait pu atteindre l'inno-
cent celles qui mesurent la peine prononce contre ceux qui
font vader un prisonnier, ou le librent illgalement, d'aprs
la peine mme qu'il tait en train de purger. Enfin, dans un
grand nombre de cas, il y a un enort de la toi pour faire en
sorte que le chtiment ressemble au crime. Ainsi les crimes
qui dnotent de bas sentiments sont punis de peioes humi-
liantes (un accoutrement fminin impos aux taches, le fouet,
le pilori) les dlits dus la cupidit par des peines pcu-
niaires, etc., etc. Plus gnralement, il n'y a pas de code
europen qui n'admette que la gravit de la rpression doit
tre en rapport avec celle du crime, c'est--dire qu'il doit y
avoir un lien quantitatif entre ces deux termes.
On peut justement reprocher cet ouvrage le caractre
trop idologique de la mthode'qui y est suivie, et par suite
la trop grande indtermination des notions, mme fondamen.
tales, qui y sont employes. M. Gunther pose comme claire
l'ide de reprsailles et n'en donne nulle part de 'dfinition
prcise. Elle aurait pourtant grand besoin d'tre prcise.
S'agit.ii de reprsailies individuelles ou de reprsailles col-
lectives ? Des unes et des autres, sans doute. Mais elles sont
trs difrentes, et par leurs causes, et par leur nature, et par
l'eflet qu'elles ont eu sur rvolution du droit. Elles ne peu-
vent donc tre confonduessous une mmo rubrique. Toujours
pour la mme raison, c'est--dire parce qu'une telle notion
lui semble etmentaire, il lui parait bien facile de discerner
ce qui, dans les divers systmes rpressifs, peut tre impute
cet esprit de reprsailles. En ralit, une teUe dissociation
ne peut tre obtenue qu' l'aide d'observations,de comparai-
sons, d'oprations trs compliques.Un peu d'introspectionet
de diatectique ne 8ui!it pas pour faire la part de chacun des
facteurs d'o rsulte la peine. Aussi la maniredont il fait fu
partage est-elle souvent trs contestable. Ii considre comme
une vidence que la rgle du talion en vertu de laquelle la
peine est la copie exacte du crime, n'a pas d'autre origine.
Cependant, par eux-mmes, les sentiments vindicatifs ne se
contentent pas aussi facilement ils tendent, au contraire, a
obtenir une rparation suprieure l'ofense. lis rclament
la mort pour unesimple injure; ce n'est donc pas leur influence
seule qui peut expliquer l'homognit des deux actes. De
m~me, il est fort douteux que la persistance de la peine de
mort s'explique comme le voudrait l'auteur. Ds l'origine, elle
existe pour les attentats religieux, et dans ce cas elle n'a
aucune ressemblance avec les dlits qu'elle rprime. Pour-
quoi sa persistance ne viendrait-elle pas de ce que les crimes
de sang nous font aujourd'hui la mme impression que les
crimes contre les dieux faisaient nos pres 2?
Mais quoique fondes que puissenttre ces critiques, ii reste
que la peine est en partie fonction du crime, et non pas seule-
ment du criminel, comme le voudrait l'cole italienne la
relation qui unit la grandeur de l'une la grandeur de
l'autre en est peut-tre la meilleure preuve. Et puisque ce
caractre de la peine se retrouve, plus ou moins masqu,
AXAU' t..t t'MXjt 3M
toutes les poquess de l'histoire,
('histoire, on doit croire qu'il lui est
essentiel et qu'elleo ne peut le perdre totalement sans cesser
d'tre ette-nteme. C'est ce qui fait que l'ouvrage de M. Cun-
ther est une utile contribution la sociologie pnute. tt est
d'aiiteurs trs soigneusement inform et t'eu y trouvera une
multitude de renseignements sur la lgislation pnale des
diffrents peuples depuis l'antiquit jusqu' nos jours.

J. KOttLER. Studien aus dem Str~~ocht. D&s Str&-


R'ocht doritfttientsohenStatuten vom iS-i6 Iahrhun-
dert (~<)M/M f/c(<<'o<tp~t<!<./.F~'o<f /~Mf<M.<fa~t< italiens
</ xu" (tu xvf ~c/c). Mannheitn, 1898.1897; 09 p., in-8";
chez Beastteimer.
Ce travail, non encore termine, a paru en cinq livraisons
successives dont la dernire est de ~7. t) a pour objet d'ex-
poser le dveloppement du droit pnal dans les cits itaiiennes
du xn" au xv)" sicle, c'est--dire de la priode o le droit
municipal est son apoge jusqu'au moment on l'action des
juristes devient prpondrante. Toutefois, l'tude ne porte pas
sur toutes les villes d'Jtaiie; l'auteur a laiss de cot ritatie
infrieure et la Sicile parce que le droit pnat ne s'y est pas
constitu sous ies mmes influences. Dans te Kord, c'est l'dit
des Lombards et ledroit romain qui ont t le point de dpart
de i'votution juridique; or ce queAf. Kohter a voulu recher-
cher, c'est ce qui est rsult de cette double influence, d'au-
tant plus que le droit qui en est sorti a fortement auect les
lgislations modernes sur la mme matire.
L'ouvrage est divis en deux parties, l'une gurate (p. 1 a
3~, qui traite des peines et des conditions de la respousabi-
lit en gnrt; l'autre spciale, qui passe en revue les difl-
rents crimes et dlits.
H est impossible de rsumer un pareil livre. qui est avant
tout un recueil de matriaux.L'auteur a dpouill avec le plus
grand soin les nombreux codes en usage dans les diffrentes
villes de l'Italie septentrionale, en a class mthodiquement
les dispositions par ordre de matires et les a mises en regard
des prescriptionscorrespondantes que contenaient soit i'dit,
soit le droit romain. Mais il s'est content de grouper les faits
sans chercher gnraliser. Peut-tre s'est-il rserv pour la
dernirepartie de l'ouvrage, q ui est annonce com me prochai ne
Quand elle aura paru, nous aurons l'occasion d'y revenir.
tt y a pourtant une conclusion garaio qui se dgage ds Ii
prsent de cette recherche. C'est que le droit pnal des cits
italiennes est, a l'origine, beaucoup plus doux que le droit
romain; les peines sont surtout pcuniaires, rarement corpo.
relles, et, dans ce dernier cas, elles peuvent trs souvent tre
rachetes prix d'argent. Peu peu, les choses changent. Le
systme rpressif devient plus impitoyable. Le dernier sup.
ptice est d'un emploi de plus en plus frquent; la possibilit
du rachat est subordonne des conditions de plus en plus
troites. Enfin, entre !e xv et texvfsicte, ta igistation pnale
devient d'une barbarie qui surprend, tant donn ce qu'elle
tait dans le principe.
M. Kohier attribue ce changement une double
cause
l'action puissante du droit romain, avec son indiirence pour
les intrts individuels, et la rudesse de murs que doter.
minrent, dans les socits italiennes, des sicles de guerres
extrieureset de luttes intestines. Mais, sans vouloir nier l'im-
portance de ces deux causes, H nous paratt douteux qu'elles
suffisent expliquer une telle transformation morale. Jamais
l'enseignementdes juristes ne saurait tre assez efficace pour
modifier aussi profondment un systme pnal; car celui-ci
exprime !'tat de la conscience publique dans ce qu'elle a de
plus fondamental, et la dialectique juridique ne saurait chan-
ger ainsi les sentiments moraux des peuples. Elle n'agit que
sur les parties lesplus leves et, partant, les plus superficielles
de l'esprit national. Quant aux guerres, mme civiles, il n'est
pas dmontr qu'elles aient sur le droit pnal t'ettet qu'on
leur attribue. Le droit des Germains parait avoir t relative-
ment doux, et pourtant l'tat de guerre y tait chronique.
Le fait signal par M. Kohter nous parait avoir une porte
plus gnrale. Steinmetz, dans un livre dont nous allons avoir
l'occasion de parler, a bien tabli que, dans les socits trs
primitives, les crimes commis par les nationaux eux-mmes,
et non par des trangers, sont traits avec une indulgence
relative. Le groupe n'intervient pas toujours ou n'intervient
qu'avec modration. La discipline collective a quelque chose
de paternel. Du Boys a galement remarqu que notre droit
pnal tait relativement doux pendant tes premiers sicles
de notre histoire; il ne s'est aggrav que plus tard. L'obser-
vation de Kohter ne viendrait-elle pas simplement connrmer
les prcdentes et ne s'exptiquerait-ette pas de la m6me
manire ? Pour que le droit pnal soit rigoureux, il tant,
Hembte.t-it, que la socit ait atteint un certain degr de
con-
centration et d'organisation, que l'organe gouvernemental
suit constitu. L'tat inorganis, te nivellement dmocratique
qui caractrise, soit les peuples infrieurs, soit morne les
socits plus avances au dbut de tourvotution, se concilie
difftciiement avec une rpression trop impitoyable. Voil
comment it se fait que l'adoucissement des peines, que l'on
signale aujourd'hui dans toutes les grandes nations
euro-
pennes. peut s'observer galement t'poque o elles taient
seulement en train de se former.
En dehors de cette conclusion goraio,
on trouvera dans
ce livre plus d'un fait instructit. Dans un grand nombre de
villes, it existait des associations formes par libres
contrats
et destines soit poursuivre la <'<w/~ pour le compte des
associs qui se trouvaient lss, soit payer
pour eux le prix
de la composition, si au contraire ils s'taient exposs
lgitime vengeance; exemple, ajout beaucoup d'autres,une de
la spontanit avec laquelle des groupes sociaux
se forment
en cas de besoin pour se substituera ta famille, quand cette ci
est oblige de dlaisser certaines des fonctions qu'elle
plissait antrieurement?. 21). Une particularitplus curieuserem-
encore est l'trange disposition que l'on retrouve dans plu-
sieurs statuts et en vertu de laquelle, quand
un crime avait
plusieurs auteurs, la peine principale n'atteignait qu'un
tain nombre de coupables; les autres taient, d'office, consi-cer.
drs comme simples complices et punis moins svrement
!p. MS). Parfois, un seul tait frapp. Non moins remarquable
est le principe, trs gnrai, d'aprs lequel, dans la dtermi.
nation des peines pcuniaires, la situation de fortune des
damns devait tre prise en considration (p. 28?< L'amende con-
tait-ptus forte pour le rtcbe que pour te pauvre. Pour ta mme
raison, les peines taient plus svres, souvent du double,
pour l'homme que pour la femme, pour le M</M ou I't'~)'~t'r
que pour le popx~, etc. Nous ne citons ces faits qu'a titre
d'exemples et parce qu'ils nous semblent de nature intres-
ser plusparticulirementtes sociologues.

MARCEL MAUSS. La Religion et tes Origines du droit


pnal. Deux articles parus dans la ~ecxe de <7/M<o<n' </M
7~t'oM, 1897, a"' t et 2.
Ces deux articles consistent en une tude critique du livre
de Steinmetz ~AHo/o~Mf/<e Sft/'M j;t' <'<'xff ~M~ct'f~xo~
der ~(t'a/e (Etudes ethnographiquessur le dveloppement pri-
mitif de la peine; L'auteur se propose de dgager ce ({uo la
sociologie peut et doit retenir des doctrines de Steinmetx, eu
mme temps qu'il montre, dans uue discussion trs docu-
mente, sur queis points elles ont besoin d'tre rectifies
pour prendre un caractre proprement sociologique. A l'un
et a l'autre titre ce travail mrite d'tre analyse.
L'apport de Steimnetx a ta sociologiepnale est double.
En premier lieu, il a tabli, avec un vritable luxe de
preuves, le caractre mcanique, < inintentionuel de la
peine primitive, autant du moins qu'elle n'a pas dpasse la
phase de la vendetta, tt n'y a alors aucune relation logique
entre le (ait qui allume les sentiments de vengeance et la
nature de l'objet sur lequel ces sentiments se satisfont. La
peine est une dcharge passionnelle dont le premier venu
est la victime, sans qu'il y ait rien dans le patient (lui le
rende particulirement responsable de l'acte incrimine (V.
pour les faits le chapitre de Steinmetz intitule /~e co~
MH~'tc/tMp ~<e/', l, p. :M8 et suiv.). Elle ne se discipline
que plus tard. Daus le principe, elle est sans but.
Mais un service beaucoup plus important, rendu par Stoin-
metz la sociologie pnale, est d'avoir dmontre les origines
religieuses de la vendetta et des peines qui en sont drives.
II a fait voir en ellet qu'il y avait un rapport troit entre la
vengeance prive et leculte des morts. Pour apaiser l'esprit du
dfunt, il faut une victime autrement, l'amo invenge se
vengerait elle-mme et ses colres seraient terribles pour ses
anciens compagnons. Le fait qui parait Steiameti: justifier
d'une manire dcisive cette interprtation, c'est que, trs
souvent la victime expiatoire est, au su et au vu de tout le
monde, compltement trangre la mort qui dtermine ces
reprsaiHes\~on seulement ce n'est pas le coupable, mais
ce n'est pas un de ses parents. On part en expdition et le
premier individu que l'on rencontre sert de patient (v. 1.1,
p. 334 et suiv.). Il y a mme des cas nombreuxo il y a ven-
detta sans que la mort soit due un acte criminel. Parfois.
c'est le coupable lui-mmequi s'en va chercher au dehors les
victimesncessaires et qui les immole.
Ces deux propositions l'absence de finalit de la peine

<)) S vu). Lcyde et Leipzig, 9~.


primttn-e et son caractre religieux paraissent M. Mauss

dfinitivement tabiies. Maii). sur des points essentiels, ia
thorie de Steinmetz lui semble gravement inexacte.
Suivant Steinmetx, la peine, tout ayant des origines
en reii-
~euses, s'expliquerait par des mobiles purement individuels.
Il pose en principe que le sauvage est cruel, vindicatif.
Il en
conclut que les vivants, prtant aux morts les sentiments dont
ils sont eux-mmes anims, sont naturellement enclins
croire que la victime d'un meurtre ressent avant
tout une
grande soif de vengeance. Cette colre, ils la com-oiveut
i image de celle qu'ils prouvent, c'est--dire eommeindter.a
mine dans son objet. De mme que, quand ils
sont irrites.
ils se soulagent aux dpens du premier objet qui leur
tombe
sous la main. ils admettent que le dfunt, pour satisfaire
ressentiment, peut parfaitements'en prendre a des innocents, son
et par suite a ses anciens compagnons, par ceia seul qu'ils
sont plus immdiatement sa porte. Mais, inversement.
cette ~diffrence dans te choix de ta victime permetd'chapper
au danger par voie de substitution.Tout ce qu'il faut, c'est
quelqu'un soit tu, peu importe qui. Telle serait la que
la f<'M('~a. source do
Mais. objecte M. Mauss, le mort
ne doit pas tre moins
irrit quand le coup mortel lui a t port
membre du ctan. que s'il a t frapp par un parent, un
par un tranger. Or, il
rsulte d un trs grand nombre d'observations
dans Je
premier cas, le coupable n'est pas poursuivi que, Trs souvent
ou le laisse en paix. La vendetta est tout entire tourne?
iextneur; elle ne s'applique pas il l'intrieur du vers
fam ha! Smith a mmo groupe
pu dfinir le clan arabe un groupe
o il n'y a pas de vengeance de sang Pourquoi la colre
du
dfunt dsarmerait-eite quand le meurtre, tant commis
un proche, a un caractre particulirement atroce? Ou
par
voit pas non plus comment, dans la thorie de n..
Steinmetz,
onpentoxpiiquert'usagesigeneraidet'anthropophagieritueiie
des parents. H est trs frquent
que les parents, au cours d'un
banquet reiigieux. mangent les restes de celui qui n'est plus.
Une pareille crmonie a videmment
une tout autre cause
que la peur de la malignit du mort. Elle vient, au contraire
d un besoin de rester uni
avec lui, de retenir dans ie clan
toutes les vertus qui sont en lui. C'est qu'en enct
tout le clan
~) V. Sk'itxuet~ toi-tM)'))))', t). ).'i3.)7(i.
est considr comme un seul corps, comme une seule et
mme chair chacun des membres qu'il comprend contient
une parcelle de l'esprit qui anime le groupe et fait sa vitalit.
Par suite, toute mort est pour la collectivit une cause
d'allaibiissement, dont on prvient tes enots pardiversmoyens
L'un d'eux consiste a rester quand mme en communion avec
le dcd par del le tombeau, et cela grce nu repas mystique
dont nous venons de parler ou quelque autre pratique
magique qui tend au mme but par des voies diffrentes, Un
autre procd consistea aHuiblir dans la mme mesure et de
la mmo manire quelque clan voisin de faon ce que
l'quilibre relatif des groupes limitrophes ne soit pas modifi.
C'est ce rsultat que produit la vendetta. Celle-ci a donc,
avant tout, pour cause, non ta peur individuelle du u rve*
nant et les sentiments individuels qu'on lui attribue,
mais, le sentiment collectif du clan, l'attachement il la com*
munaute, la fois familiale et religieuse, qu'il forme. Sans
doute, c'est parce que te cian, l'tre collectif, a un carac-
tre religieux aux yeux de tous ses membres, qu'ils sont
tenus de ne pas le laisser diminuer. Mais ce caractre reli-
gieux est du, non a des prjugs particuliers et il des consi-
drations prives, mais au sentiment de solidarit qui unit
tous les associes et les dtermine Il mettre bien au-dessus de
leurs lins personneites tout ce qui concerne la coiteetivit.
Voita pourquoi ta vendetta n'est pas seulement un procd
d'hygine religieuse, utile qui veut carter un danger inqui.
tant c'est un devoir strict. Voil aussi ce qui explique com-
ment la vengeance prive a progressivement dcru & mesure
que le ctan perdait sa cohsion primitive et sa suprmatie
morale.
Mais une autre erreur de M. Steinmetx est d'avoir considr
la vengeance du sang comme la forme premire de tout le
systme pnal, comme la source d'en toutes les autres peines
seraient drives, Il n'a pu arriver it cette conception qu'en
ngligeant une masse imposante de faits. Des les socits les
plus primitives, ct des rgles qui menacent le meurtrier
de la vengeance familiale, il y a une multitude de dfenses
religieuses, sanctionnes par la peine de mort. Tout ce qui
soutient un rapport un peu intime avec le culte, homme,
animal ou chose, est sacr, ou, pour employer l'expression
usite, ~o('. A tout objet tabou il est interdit de toucher et
la violation de l'une quelconque de ces interdictions est sv-
remeut punie c'est le cas de la femme qui eutre dans un
lieu saint, du profane qui regarde t'tre qui reprsente la
divinit, du fidle qui trouble nue tte, qui sort eu public en
temps prohib, etc., etc. Ces crimes ne tsent aucuu individu
par consquent, la rprobation et la rpression n'eu est pas
dtermine par les seutimeuts qui sout la base de la ven'~
geauce prive. Mais ta cause est doit tre recherche dans
l'institution religieuse du (&OM. D'aprs les croyances primi-
tives, tout objet tabou recle une force terrible qui se com-
munique contagieusement quiconque y touche indment.
Le violateur d'un tabou est donc un tre dangereux, une
menace pour ceux qui l'entourent par consquent,il importe
de l'loigner, ou de le supprimer,ou de le rendre inoffensif
c'est quoi tend toute une catgorie de peines. Le systme
pnal dcoulerait donc d'une double source la vendetta et le
sentiment de solidarit religieuse qui en est l'me, d'une
part; de l'autre, les interdictions rituelles qui rsultent des
pratiques et des croyances relatives au tabou.
Telle est la conclusion de ces deux articles. L'auteur a bien
voulu la prsenter comme inspire par nos thories sur la
peine et la religion ettes viennent en effet confirmer ce que
nous avons dit ailleurs sur les origines religieuses de la
peine Mais l'originalit de cette tude ne reste pas moins
considrante. Nous avions bien pu tablir le caractre reli-
gieux des peines primitives d'une manire gnrale; mais
nous nous en tions tenu ta. M. Mauss a su dmler dans le
tabou l'institution religieuse d'o drive cette religiosit du
droit paat et nous croyons l'ide fconde.
if est un point toutefois sur lequel des rserves nous
semblent ncessaires. Nous croyons prouv que la vengeance
du sang dpend essentiottement de sentiments religieux
rotatifs la nature du sang et que ces sentiments ont un
caractre collectif. Mais il nous parait diticite d'admettre
qu'elle ait pour objet de compenser la perte subie par la
substance spirituelle du clan. D'abord, une perte similaire,
impose l'un seulement des clans voisins, ne saurait rta-
blir t'quitibre, et par consquent ne constitue pas une com-
pensation. On pourrait rpoudro, il est vrai, que la colre
dchane est aveugle et no calcule pas avec tant de rnexion
les effets utiles de ses emportements. Mais il est un ordre de

(t) V. ~tt'Mion du <<-aMt< Mefay. ~<tM)<)), not<u))ttMnt p. M ot suiv.


faits qui est plus inconciliable encore avec cotte iuterpreta-
tiot). ti arrive parfois que ta victime expiatoire, en cas de
mort naturelle, est prise dans le etan tui-meme. L'expiation,
sans doute, ne va pas alors jusqu' la mort mais elle con-
siste trs souvent en mutilations ou en coups distribus tel
ou tel des parents survivants. S'il ne s'agissait que de rpare)'
la blessure faite t'amo du groupe, une telle pratique serait
absurde. Nous croyons donc que cette expiieutiou religieuse
de la vendetta, vraie en principe, doit tre pousso dans
un
autre sens. Si le sang rpandu, en vertu de sa nature reli-
gieuse, constitue uu danger pour toute la collectivit, ce n'est
pas seulement parce qu'il eu t'esutte pour elle un appauvris-
sement ce doit tre pour une autre cause qu'il y aurait lieu
de rechercher.
Quoi qu'it en soitde ce point, t'anatysedesouvragesqui pr-
cdent montre que lit thorie de la peine ne reste pas station-
naire. Les explications simplistes dont on s'tait si longtemps
content sont de plus en plus dlaisses. Ou u la sensation
qu'en se trouve eu face de phnomnes trs complexes dont
los sentiments trs sitnpies, qu'atteint lu conscience itnme.
dtMe, ne sauraient rendre cotnpte; on comprend qu'ils
dpendent de forces inconnues et obscures, dont la nature ne
peut tre dtermine qu' l'aide de procdes dtourns et labo-
rieux. C'est de cette ide que procdent les consciencieuses
recherches dont nous venons d'exposer les rsultats'. L'en-
tente que nous avons constate entre dos auteurs qui, maigre
la divergence de leurs points de vue, s'accordent pour voit-
dans la peine un rite religieux, est particulirement siguifica-
tive. Nous voila loin du temps o l'on croyait pouvoir expli-
quer la peine en la comparant aux mouvements rflexes par
lesquels l'animal ragit contre les causes de destruction qui
menacent son existence.

')!Ci)"t)!i''n')T.t)ttH))<'i)).<[)in'p!n'('<'tn~<th'Sft)tit))t'nt.)'<)m't'ant'<)''
LMn'')-. Die SrAMM/'ut-xx'tf Nf tw~~ic/tM~tMonacAn-M))<~ <~Mta/ftc/)ft'
~()<MHy. tj-itfzij.t. ttUtj H-))~ Hirsd)f<ht).
tt. t <'(.AXtSATt()!< SOf:)Af.K
)'tH'M.f)m)iMt:tM.

BADE~-POWELL (B.-IL). Th Indian VIMa~e Commu-


ntty(/. fHmMtMMf<<'rt<~f <~<K<! ~K</<'). Loudres, Long-
mans, Green et C' i8HC, xvt-450 p., in-8".
Quoique cet ouvrage touche A la question de la proprit
foncire, comme il est surtout riche en renseignements sur
l'organisation sociale de t'tnde, nous avons cru prefrabt&
de Je ranger sous celte rubrique.
Depuis Sumner ~taine, on a pris l'habitude de considrer la
communaut de village comme le type de ia communohin-
doue. Or, d'aprs M. Baden-Powe)!, il est des villuges, entrs
grand nombre, qui sont organiss sur une tout autre base.
Les caractres principaux de la communautde village sont
les suivants )" Le village n'est pas toujourscuttiv en
com-
mun c'est mme le cas le plus rare. Mais lit part de citacun,
au lieu d'tre dtermine par les rsultats conomiques d~
chaque exploitation {amitiate, est fixe par des rgles gne.
raies et hnpersonneiies, consacres par ta tradition. Parfois !e
partage est priodique. ~ Les terrains en triche sont ta pro-
prit communede tous tes habitants quand tes circonstances
obligent les diviser, c'est toujours d'aprs un principe dfini.
Gnratement, le lot do chacun est proportionnel au lot de
terre arable qu'il exploite. 3" Les indignes ont un droit de
premption sur la part de leurs congnres, de prh''rence
aax trangers. 4 La commune est administre par un con-
seil lu de propritaires, le p<Hf/!~<f. 5" Enfin, le corps
des propritaires se considre comme investi d'uue sorte de
droit seigneurial sur le sol. Cette particularit, sur laquelle
l'auteur insiste beaucoup, est assez vidente quand les pro.
pritaires se servent de tenanciers pour cultiver le sol. Mais.
ils n'auraient pas de leurs droits une autre conception, quand
ils sont eux-mmes agriculteurs. Ils revendiqueraient alors
lis terre non en qualit de cultivateurs, mais
en vertu d'un
titre suprieur.
Mais cette organisation, loin d'tre gnrate, n'est rpandue
que dans le Panjab, les provinces du Nord-Ouest, dans
FOudb et le Bihar elle se rencontre encore, mais t'tat
sporadique, dans ta partie occidentale de t'inde suprieure,
3CU L'AXX~:SOt:)f)).0(!WK.<897

dans le Dakhan
Dakhao et dans certaines rgions du Sud. Partout
aitteurs, ou observe une forme de viitage qui est trs di)!e-
rente de la prcdente et que fauteur appel ~yf<<K'f~-<. H la
dfinit ainsi 1 Les terres sout divises et les domaines sont
exploites indpendamment les uns des autres. Aucune trace
de culture commune. ~ Les terres en friches qui entourent
les terres arahies ne sont pas une proprit commune. En
principe, elles n'taient l'objet d'aucune appropriation et les
habitants en disposaient suivant leurs besoins. Plus tard,
l'autorisation du Maja ou du chef de la commune fut exige.
3 Enfin, le village est administr par un chef hrditaire.
C'est peut-tre par ce trait qu'il se distingue le mieux des
communauts de village de Sumner Maine; car ce dernier
considre lui-mme le caractre lectif du pHMf/<t/< comme
la proprit distinctive de l'organisation qu'il dcrit.
Ces deux types distingus, quelle est leur relation histo-
rique ? Trs souvent on a fait du village communautaire la
forme primitive dont l'autre serait drive. Celle-ci serait
simplement due ce que ta proprit, d'abord collective,
est devenue progressivement prive. L'auteur s'eteve contre
cette opinion. Si elle tait fonde, on devrait trouver la com-
munaut de vittage.d'autant plus dveloppe que la popula-
tion appartient des races ptus primitives; or ii n'en est rien.
Trois grandes races ont prcde les Aryens, dont on peut
encore trouver des traces tresapparentes aujourd'hui ce sont
les Thibetains, les Dravidieus et tes Kotarions. Or, dans les
pays o leur influence a t le plus marque, c'est la forme
7<a~<f<'< que l'on trouve. Le communismefamilial, la~'oM-
/m<~ de Sumner Maine, ne parait mme pas y avoir jamais
exist (p. tM). Enfin, mme tes Aryens primitifs ne semblent
pas avoir connu la communautf de vitiago; it n'en est pas
question dans les lois de Manou (p. ~u4). U'o il suit que, si
elle est d'origine aryenne, les Aryens ne t'ont pourtant pas
apporte avec eux dans l'Inde; elle doit douc rsulter du fait
de l'occupation. On s'explique dj de cette manire le carac-
tre seigneurial du droit que ces sortes de propritairess'at-
tribuent sur le sot. lis te possedentenqualit de conqurants.
Mais d'o viennent les autres caractres ? D'o vient l'es-
prit communautaire et dmocratique de ces villages? Une
seule et mme rponse ne peut pas tre faite cette question;
car ce type n'est pas rduit un seul genre, mais il comprend
des espces diurentesqu'il y a lieu de distinguer.
Parfois, le village a eu pour origine un clan ou un frag-
ment de clan tout constitu qui s'est tabti dans un pays par
droit de conqute. Tantt, les conqurants se sont assujetti
un village existant dont les propritaires ont t rduits
l'tat de tenanciers; tantt ils ont occup un sol vierge qu'ils
ont eux-mmes dfriche. Mais. dans un cas comme dans
t'autre, ils ont forme par leur union uu village nouveau toute
la diuronce, c'est que, ici, il s'est surajout uue commune
plus ancienne qu'il a utilise, tandis qu'ailleurs il a du
tre cr de toutes pices. Mais, quelle que soit la manire
dont il ait pris naissance, comme il se produisait dans des
conditions nouvelles, il devait aussi s'organiser d'aprs des
principes inconnus de la population indigne. Les nouveaux
venus n'exercrentpas le droit de propritqu'ils s'arrogeaient
sur le sol comme avaient fait jusque-l les tribus praryonnos,
et c'est ainsi que le ~x~-t'f~f se substitua au village ~/<t(-
<(W<.
Deux causes auraient dtermin ce changement. C'est
d'abord l'intensit particulirequ'acquit chez les Aryens, au
cours de la conqute, le sentiment de solidarit qui unissait
entre eux les membres de chaque tribu et, secondairement,
les membres du ctan, subdivision de la tribu. Quand celle-ci
occupait un territoire, comme elle avait fortementconscience
do son unit, elle le considrait comme la chose indivise du
groupe, et par suite, quand elle en dlguait une partie l'un
de ses clans, ce dernier, de son cot, s'en regardait comme
propritaire au mme titre et de la mme faon, tt tait donc
pos en principe que chaque membre de cet agrgat restreint
avait un droit gat sur le sol. De l, partage; de l, toute sorte
de prcautions pour prvenir toute ingalit, notamment l'al-
totement priodique. De l aussi l'habitude de traiter les
affaires en commun, la pratique de ta responsabilit collec-
tive, en un mot tous les caractres par tesquets on dfinit le
vittagecommunautaire; expression d'uilleurs inexacte, car il
n'y a eu aucun moment o l'exploitation ait t, proprement
parler, faite en commun. En second lieu, une institution sp-
ciate, )a~'otM/m<c'est--dire le communisme familial, qui,
toujours d'aprs l'auteur, ne se montrerait qu' une poque
tardive dans l'histoire de l'Inde, a contribu produire !o
mme rsultat en renforantencore ces ides gatitaires et en
permettant au sentiment de solidarit domestique de rester
vif et actif dans un cercle tendu; ce qui empcha le groupe
fondateur du village de se dissocier en groupes indpen-
dants. Quant aux causes qui auraient produit ces deux parti-
cularits do ta civilisation aryenne,M. Baden-Powett croit tes
trouver dans )a ncessit ou se trouvaient les Aryens de se
tenir truitement unis pour tutter contre les races hostitesqui
les entouraient.
Les choses ne se seraient pas passes autrement toutes les
fois que le village a t fonde, non
par un clan ou une por-
tion do ctau constitue, mais par une famille particulire, qui.
tabtie sur un point, aurait, par voie d'essaimage, occupe
peu
peu tes terres environnantes. Mais il y a une forme do~m'Mf.
rt~f qui aurait eu de tout autres origines. Une fois que
les rois furent considres comme les propritaires minents
du territoire, il arriva qu'ils dlgurent des bnficiaires
qu'its voulaient rcompenser, tours droits sur tt
ou tel vil-
lage dans d'autres cas, ce furent tours officiers, prposes
l'administrationdes villages, qui usurprent d'eux-mmes
droits lorsque la dcadence du pouvoir monarchique leurces en
fournit t..s moyens. Le droit de proprit quasi fodal
que les
uns et tes antres acquirent ainsi se transmit naturottementa
tours hritiers: et comme ceux-ci restaient dans l'indivision
en vertu du principe de ta ~t')t<<tM)t<)/, it en rsulta qu'au
bout d'un certain temps des groupes assez tendus
se trouv-
rfnt tre cottectivemeut propritaires do diffrents vittages.
C'est mme presque exclusivementdans ce cas
que t'en peut,
sans abus de mots. parler de proprit collective; car il y eut
reettemcnt exploitation eu commun, au moins par l'interm*
diaire de tenanciers.
Le principal mrite de cet ouvrage se trouve dans l'effort
fait par l'auteur pour arriver a une classification des diu-
rents types de villages hindous. On y trouvera en outre d'utiles
renseignements sur l'ethnographie de l'Inde. M. Baden-Powett
s'est surtout servi pour son travail de documents de premier
ordre; ce sont les rapports de cotonisation. Seulement ils
ne
sont pas toujours faciles utiliser; car ils manquent nuturel-
lement de critique historique. Or les conclusions qu'il
en a
tiressontdes pi us contestables; la dmonstration surtaquelle
il a tabli sa thse nous parait assez faible.
Et d'abord, on est assez tonne de voir confondus dans
une
mmo classe les villages constitution dmocratique, dont
tous les membres sont gaux, et ceux qui sont organiss fo.
datrent, c'est--dire o un groupe plus ou moins tendu
exerce sur le reste de lu population un droit de suxeratuete,
quece droit ait t acquis par conqute, ou par unedtgatio)
du pouvoirsouverain, ou par usurpation.Pourjustiftet'ce rap-
prochement, l'auteur prtend que, mmo dans le premier cas,
les copropritaires qui cultivent le sol ont sur lui un droit
seigneurial, un droit suprieur. Mais du montent qu'il n'y a
pas de tenants, pas de vassaux, on ue voit pas ou quoi ce
caractre seigneurial peut consister.
Mais ce qui parait surtout bien peu prouv, c'est la Otiation
admise entre les deux sortes de vittage. Toute la thorie
repose sur cette hypothse que les tribus aryennes avaient
un plus vif sentiment de teur solidarit que les tribus ana-
ryeunes mais l'appui de cette supposition on ne cite
aucun (ait. Tout au contraire, il ressort de l'expos mme de
fauteur que, dans les races primitives de l'Inde, ta tribu tait
beaucoup moins centralise qu'elle ne le fut plus tard c))ox
les vainqueurs. Or c'est un fait historique que ta centralisa-
tion monarchique a pour etet t'anaibtissementde t'organisa-
tiou tribate et des sentiments qui font l'unit du ctan.
Les affirmations relatives ta formation de ta ~<Mf-/f<Ht)'~
sont encore moins bien tablies. L'auteur recounait lui mme
que citez les Xars. qui sont de race dravidienne, le commu-
nisme familial existe; la famille se recrute, il est vrai, par
voie de filiation utrine, mais elle n'en est pas moins commu-
nautaire (p. t78). f) n'est pas douteux, d'autre part, que la
mme institution ne se trouve dj dans les lois de Manou.
Toute l'histoire compare du droit proteste d'uilleurs contre
une telle conjecture. Jamais on n'a vu la~M/Mt'~ uattfe
d'une iamitte plus restreinte. Tout prouve qu'elle est bien
antrieure. Si donc elle est solidaire du~tff~c, celui.ci
n'est pas de date aussi rcente qu'on te croit. Il est' vrai que
l'auteur admet comme vidente l'origine patriarcato do la
famille; mais cette thorie est difucitementsouteuaMe aujour-
d'hui; en tout cas, aprs tant de recherches qui la rendent
au moins suspecte, elle ne peut plus tre pose comme un
axiome.

JOBBDUVAL. 'La Commune annamite (in A'OMr~e


MfCKf /tH<oryxt' (<e droit /)'H{'M et <attjjw, octobre et
dcembre 1896).
Ces deux articles rsument les travaux les plus rcents
sur l'organisation de la commune dans l'empire d'Au
uam
('rac~'M ~t~'~- (/c <H c~n)n)t<tt<' <tM<MM)<< Elle cons-
titue une unit religieuse, politique, administrative et judi-
ciaire.
Chaque commune forme une association religieuse place
sous lu protection d'un ou de plusieurs gnies. Cette solidarit
religieuse s'atteste dans des ttes rituelles, accompagnes de
banquets en commun. Ces banquets out
en mme temps
une signification politique ceux qui y participent affirment
ainsi leur qualit de membres de la mme comtnuuaut.
C'est videmment un reste de ces repas solennels et mystiques
par lesquels les membres des socits primitives tablissaient
ou renouvelaient priodiquement les liens qui les unissaient
les uns aux autres et leurs dieux.
Hu second lieu, tout en tant subordonne t'cmpire d'An-
nam, la commune forme un petit tat qui Il sa vie propre.
C'est elle (lui doit collectivementl'impt, etettepeuttibrement
frapper ses membres d'impts focaux. Quoique,
eu principe,
l'empereur ait le pouvoir lgislatif, elle peut tablir
pour elle
des rgies juridiques spciales. Enfin, ce sont les notablesqui
exercent le pouvoir judiciaire, et s'il y a appel, il est port
devant le chef du canton, qui, touten servant d'intermdiaire
entre la commune et i'Ktat, n'appartient pas cependant au
mandarinat.
Cette communaut est tellement troite qu'elle s'ouvre trs
difficilement des tments trangers. C'est par la filiation
qu'on en devient membre. !) n'est pas moins difficile d'en
sortir; celui qui quitte sa commune sans autorisation est
regard comme dserteur.
0~<tM<~<oK<M~w (/c / coMmMoc. Elle comprend trois
classes les notables, les simples contribuables, euHn ceux
qui, pour cause d'indigence, ne figurent pas sur les registres
d'impts. A cot de cette division en ctasses, il en est
une en
hameaux (f/ffwj. Le t/w est simplement une commune plus
petite, confdre avec d'autres. Mais cette organisation
ne
()) CM omnt):<-s ;,<!)tt )'. Oty. /< cuwMtttMe a<fa<Kt~ au ttHJMtt.
J'ori~ i89t. )- Luf). Le <tHt)a<M. ~</<-M<- /'<M~))tM/tWtpe<t.
~Kf MCt'a/f lies /<MMaM<M. t'aris. tK)!.

A. Lande; La commune
<!Mt(am)~. Satftcn. t8)j0. Syb~tre. ~MafM <f~HHaM e< le peuple
aM))<!N)t<<.t'Nft<. ttNtM.
repose pas, comme en Chine et eu Germanie,sur une division
dcimale de la population en divines et en centaines. Le
nombre des familles ou des tonneaux qui forment une com-
mune est indtermin.
!i y a aussi une division en ctans ~t'K/t). Pont partie du
mme ~A tous ceux qui portent le mme nom patronymique;
or, il n'y a pas plus de quarante noms patronymiques dans
toute l'tendue de i'empiro, d'aprs ce que suppose un obser-
vateur. Il est vrai que l'importance sociale du ~M/t est bien
diminue cependant elle M'a pas disparu on ne peut entrer
dans une commune qu' condition de porter ou de prendre
un des noms patronymiques qui y sont eu usage.
Les orgaues de la commune sont les suivants )" L'assem-
ble gnraie, qui comprend tous ceux qui sont inscrits sur
les registresd'impts. Htte joue un rle passif et ne fait qu'en-
registrer les dcisionsqui lui sont soumises. 2 Le conseil des
notables c'est lui qui tient le vritablepouvoir. L'auteur croit
reconnattre certains signes que t'age y donnait autrefois
une influence importante, mais qui a peu prs cess d'tre
retie. Les notables se divisent en deux groupes, les uns qui
dlibrent et les autres qui sont des agents excutifs. 3 Enfin,
au-dessus des chefs de la commune, il y a le chef du canton,
qui n'estaucunementunfonctionnaire d'tat, mais reprsente
auprs des mandarins les intrts de la population communale.

/.a ~'o/)nW /bK<n'. Le village annamite n'est pas pro-


pritaire de son territoire tout entier. Les documentsattestent
l'existence de la proprit prive aussi loin qu'ils permettent
de remonter. Mais cette proprit a un caractre familial. En
eiet ! La partie du patrimoine consacre l'entretien du
culte des anctres, appele ~xo~tm), est inalinable. 2" La
vente des autres biens, meubles ou non, n'est pas dfinitive
eu principe. Ii faut que, en outre, l'acte porte la mention
Pour vendre dfinitivement 3 En l'absence de cette
clause, le vendeur et ses hritiers peuvent, pendant trente
ans, racheter la chose vendue.
Le domaine communal prsente plusieurs particularits
remarquables. Il comprend t les biens affects au service
public, c'est--dire les pagodes et tout ce qui en dpend; ils
sont inalinables 2" des biens achets par la commune avec
ses fonds disponibles et qu'elle possde comme ferait un
simple particulier 3" enfin, des biens vraiment communs. Ils
sout de deux sortes les uns ;<-fit~-f/'M) consistent en rixieres;
tes autres (<wt~/<d! sont occupes par les habitations, leurs
dpendances et tes cultures autres que le riz. Un auteur,
M. Ory, croit que, l'origine, les
uns et les autres taient
cultives par les habitants A tour de rote, comme le sont
encore
les biens des pagodes. Mais actuellement ils sont priodi-
quemeut partags. Le partage ne se fait pas en parties gales.
Les contribuables sont diviss eu quatre groupes hirarchiss
et chaque groupe reoit en proportion de sa place dans la
hirarchie. H y a plus les membres d'un mme
groupe ne `
sont pas traits galement, Car eux aussi sont hirarchises
entre eux et ce sont les premiers inscrits qui choisissent lea
premiers leurs lots dans la part totale affecte au
groupe. On
voit par ce qui prcde que l'Annamite btit sa maison, l'autel
des anctres sur des terres communales (fM~oj qui,
par
suite, n'appartiennent pas a la famitte.
Une autre proprit dont l'organisation est fort originate
i
est celle des neuves, Ils sont exploites par des communes de
pcheurs entre tes~uettes le roi a partage les diffrents
cours
d'eau etqui en ont ta pleine proprit. Ces pcheurs vivent
ne
que dans leurs barques et n'out pas le droit d'habiter terre.
C'est la commune iluviate ainsi constitue qui possde. On
<
ne distingue plus ici la proprit prive et la proprit corn.
munale !p. fut)..
Dans tous ces cas, les traces de proprit collective sont
assez marques. L'auteur recherche brivement comment ta
proprit prive s'est constitue sur le fonds commullal, Mais
ses conclusions sont assez hsitantes.
L
MAXtMK KOVALEWSKY. Le systme du ottMt dans le
pays de Galles. fu M('r)' t<('nMt~H<e <fe MCtofomc.
marstSU?.
Courte tude propos du livre de Frdric Seebohm, T/tc
Tribal ~<'M< in )<'h' (Londres, ~89S' L'objet de cet
ouvrage
est de montrer que l'organisation sociale comme l'organisa-
tion conomique des anciens Gats repose sur une base
essen-
tietiement familirtle. Mais, suivant Seebohm, la famille, chez
les Celtes, aurait t individuelle ce ne serait pas
une com-
munautfamitiate dans le genre de la Zadruga. M. Kovatewsity
conteste cette proposition qui lui parait contraire tous les
enseignementsdu droit compar.
Vtt. ).KDH(UT))Ht')t")'tUt!:)f:
t'trM.E.t.Mt.
RV1LLOUT. La proprit en droit gyptien.
Paris, Leroux, t897.

Nous devons signaler l'ouvrage considrabte de M. Revit.


lout sur iu proprit, ses dmembrements, )a possession et
leur transmissionen droit gyptien compar aux autres droits
de l'antiquit Nous ne voulons d'ailleurs que )o siguater
il est impossible on enet de tirer des conclusions sociolo-
giques de thories conjecturtes, quelque intressante)!
d'ailleurs qu'elles puissent tre. Sans vouloir insister sur
certains partis pris et mme sur certains prjuges qui don-
nent parfois au savant travail l'allure d'uuo uvre du pol-
mique passionne, je demande seulement il dire quelques
mots du point de vue auquel fauteur s'est plac pour appr-
cier les institutions qu'il dcrit, io droit dont il est vrai de
dire avec tui mme qu'il en a cre la science. M. ttvittout
procde notamment par voie. de comparaison et d'opposition
entre les principes des lgislateurs de l'Egypte et ceux des
lgislateurs de Home; ta diffrence lui parait tre essentiel.
lement d'ordre mora); le Romain est l'homme de la justice,
l'gyptien est l'homme de t'quit,
ou, encore, le Homain est
l'homme du fait, l'gyptien est l'homme du droit. Pour rendre
dans toute sa force la pense de l'auteur, it faut dire au vrai
le droit gyptien seul est un droit tout a~ fait mora). Un lei
procd critique parat d'un emploi particulirement dan-
gereux quand on prtend le faire servir la connaissance
d'un droit que nous ignorons. Peut-tre eut-it t prfrable
de chercher simplement,en s'appuyant sur les textes, quelles
institutions juridiques taient possibles, quelles procdures
pouvaient fonctionner. Par exempte, M. R. oppose l'acqui-
sition de la proprit Rome et en Egypte Home, on
acquiert les choses par occupation; en Egypte, par succes-
sion telle est la thorie fondamentale de ce livre. H aurait
t ncessaire de montrer quelle tait la dinrenco pratique
qui correspondait cette prtendue diffrence thorique
est-ce qu' Rome un individu triomphait dnnitivement
dans la revendication en dmontrant qu'il avait acquis une
chose? Est-ce que, au contraire, il fallait en Hgypte, pour
prouver son droit. remonter d'auteur en auteur jusqu'au pro-
pritaire primitif? Solutions a la tois illogiques et hmppti-
cables.

JlEiffUt;)) CUMOW. Die


Verfaseung des Inka.
Bozl&le
reichs. Etne Untersuchung des Attperuantachen
Agrarkommunismus((~'<?HMa~'OH .wft't<<c <'<'Mtp<<' </M
/n<'<. /<ff/<M'fAf <!<- c'.r ('on<M<KM<.<w<'{/rat'<'c </ /V/'nx j.
Stuttgart, Dietx, !??.
Cet ouvrage est la coufirmation et le dveloppement de
thories indiques par l'auteur dans ttHe tude parue dans le
.t~u/. ~Jaht'K. C~. t. XHt-XUV. ~' .4<~frtMMMf/<~
M)tt<J/r~('HOM<'M<!C~t/~H.)
JI semble certaiu que dcji't h)))!;)p))ips avant la domination
des Incas fsans doute
~)U ans avant l'invasion espHguote),
le Prou a connu une civilisation relativement leve. Les
populations n'y avaient point en gnera) une organisation
d'ensemble; toutefois, partout on y trouvait des ~roupetneuts
de races auxquels correspondaientdes divisions territoriales.
Bartoiome de las Casas ((/<* ~t MM<<~)w.<! ~<'M/<'<t (H ~'r) nous
les montre dirigs par des chets qui les protgeaientcomme
des parents, qu'ils respectaient comme des enfants. Chaque
district, chaque < Puebto avait son existence propre, ses
m(Burs, ses lois. Les groupes avaient peu de rapports outre
eux. sauf lorsque les liens de race qui les unissaient taient
troits. Pour la succession au pouvoir, le chef dsignait celui
de ses fils qui lui semblait le plus capable, dfaut son frre
ou un parent, dfaut une autre personne prouve. Parfois
aussi le chef tait choisi l'lection. Un tout cas la royaut
n'tait point hrditaire en droit. La base est la communaut <
de village, qui le plus souvent tait en mme temps une
communaut de race (.tt~ho ou centaine (Far/MMt). Trs
souvent le Ayttu ne comprenait qu'une communaut de
village; souvent aussi, dans les rgions montagneusesil en
comprenait plusieurs. Habituellement plusieurs centaines
formaient un groupe commun (pt'tMt'</M< .-<)/M), ayant notam-
ment un cutte commun. Plusieurs groupes d cette sorte for-
maient une race, une nation (HM<.t<'u))a), dont l'unit semble
d'aUteurs n'avoir du se manifester qu'en cas de guerre.
Suit!*tudede!'AyHu. I) comprend presque toujours une
Si
communaut de viiiage possdant en propre une partie du
territoire de lit race nue centaine s'tait tablie en
plusieurs viiiagesou si du viiiagoprincipats'taientdtaehs
de petits villages, ceux-ci M'avaient point. de marcite iode.
pendante. Chaque village avait ij) jouissance d'une partie de la
terre arable de la tnarche le reste n'tait point partage.
H y avait d'autre part de vritables vii)es, comme Cuxco et
CHxamarca. o plusieurs Rentes taient tablies ensembie;i
chacune avait son quartier ceiut de murs, et chaque quartier
avait ses champs; tnaisia prairie et lit brousse restaient indi.
vises entre tous.
Ainsi l'ensemble de lit population n'tait point unifi, ni
mme organise, d'o ia faible rsistance aux incas.
Quand ceux-ci eurent conquis le pays, l'ancienne division
en races, phratries et marches fut renverse en principe.
modifie seulement dans ta mesure o ics tncas avaient int.
rt a une transformation. Les races devinrent les Hunus
groupes de dix mille;, les pitratries les iiuarangas (gruunes
de miiie les centaines restrent ce qu'eiles utaient aupara-
vant. Kxceptionaeiiement des races peu denses furent con-
fondues en un seul Hunu. Quand une race avait un chef.
cciui-cifut en principe maintenu si au contraire elle n'avait
point de dirigeant, les jncas choisissaient dans l'aristocratie
un maitre; toujours ils le prenaient dans une famille du
groupe auquel il devait commander.
Eu gnera), ies Incas faisaient d'une race deux groupes
i'un < Hantansnyu l'autre iturinsuyou le chef (curaca)
de ce dernier tait sous ia dpendance de celui du premier.
Le successeur du curaca tait habitueih'tnentun frre ut-
rin ou un fils, sauf approbation des reprsentants des Incas.
Au contraire, le chef du Huaranga tait lu par les chefs des
centaines qui )u composaient, et parmi eux.
La marca ou centaine resta en principe ce (ju'eiio tait, sauf
certaines portions de terres que prirent les Incas et sous
rserve de prestations diverses il eux dues. Cette portion du
sol enleve aux autochtones fut partage entre les conqu-
rauts, le reste consacr la religion.
Cette division en races, phratries, marches, fauteur la
compare notamment la division romaine en tribus, curies,
gentcs ii fait remarquer que vraisembiabtement lit division
par dix et multiplesde dix n'tait chezeux, commeau Prou,
qu'approximative; si cette hypothse est fonde, it y a l une
srieuse rponse & la thorie d'aprs laquelle lu gens compre-
naut un nombre variable d'individus ne pouvait constituer
une unit politique cette thorie suppose en eflet que cette
unit politique aurait t ncessairement invariable (Cf.
Mommsen, 7(ffw/'<<H<t'/<f< ]). ~6-SM).
A la tte d'un groupe de quatre races, quelquefois seule-
ment de trois, quelquefois auss! de cinq, selon les limites
gographiques du territoire, tes Incas plaaient un chef
~Tucricue) qui avait en tous points la haute direction on
peut comparer ces Tucricuc aux rsidents anglais dans les
Indes; leur fonction consistait essentiellement maintenir
l'indigne en tat de dpendance.
Au-dessus tait le gouverneur de province, Capac ou
Capac Apu tout le Prou tait divis en quatre pro.
vinces.
Les derniers chapitres sont consacrs a l'lude particuii<-re
de ia marche des tucas. L'auteur prend pour type la ;marcho
des rgions de culture. La marche, c'tait l'tablissement
d'une centaine en un territoire dtermine. Si toute la centaine
s'iustaitait dans un seul village, le chef de centaine (Pachac-
curaca) tait en mme temps chef du village(Llactacamayoc)
et chef de la marche marca camayoc). Si, au contraire, la
centaine s'tait installe en plusieurs villages, chaque village
avait son chef, subordonn d'aiieursau chef de centaine.
Dans te territoire de la marche, chaque village prenait
une certaine partie qu'il cultivait (Ltactapacha plus souvent
characa), le reste tait proprit commune du AyHu. Les
charac:)s taient aunueiiement partags en champs (tupu)
que t'ou attribuait aux habitants conformment certaines
rgles coutumires. L'tendue du tupu parait avoir t trs
variabie, suivant les rgions. Au reste, les characastrs proba-
blement n'taient point partags d'aprs le nombre des habi-
tants. mais plutt d'aprs celui des chefs de famille; c'tait
seulement quand les enfants formaient leur tour un m-
nage indpendautqu'iis avaientdroit au partage. Les chefs de
groupe avaient une part bien plus considrable que les autres
habitants ainsi )e lot d'un Hunucuracatait dix douze fois
plus important, celui d'un Pachaccuraca trois quatre fois.
Le chef de village avait ta direction de la culture. Dans les
districts du nord (chinchasuyu) tout le travail se faisait
habituetiemcnt en commun, par groupes de dix (chuucas)
sous la direction d'un chet (chunca eamayoc) qui avait & la
tois la charge de )a direction des travaux et de la surveillance
de lit moralit du groupe. Hommes, femmes, enfants partici-
paient a !a tache, chacun selon ses aptitudes d'aiiteurs, la
rcotte n'tait point l'objet d'un partage spcial, chacun pr.
nant ce qu'avait produit la terre a iui attribue.
Pour avoir droit un lot, it fallait tre n dans la marcha
et y tmbiter tait dfendu tout acte de disposition sur le lot
tait puni le fait do quitter une marche sans autorisation du
chef et de se mettre sous la protection du chef d'une autre
marotte.
Le terrain a btir laiss chaque chef de famille tait
comme sa proprit toutefois ce bien n'tait foint dans t&
commerce. Droits hrditaires sur cette part (Hacienda) dans,
lu province nord elle allait au fils prfre, et celui-ci avait
alors la charge des autres enfants; dfaut, un frre ou
une autre personne dsigne. L'pouse lie pouvait hriter
elle appartenait presque toujours en ellet un autre Ayttu.
Quand son mari mourait, cite devenait la femme d'un frre
de celui-ci ou elle restait chez le fils qui avait hrite le (tts
tait alors le mattre de sa mre elle ne pouvait d'ailleurs
point retourner dans son propre Ayttu, tant devenue par
achat la proprit de son mari.
Pour la succession d'un chef de centaine, elle advenait
celui qui succdait la fonction ceiui-ci avait le devoir de
protger les fils du dfunt.
Dans tes rgions montagneuses it n'y avait, il ne pouvait
en fait y avoir que des Haciendas.
Dans certains districts taient des troupeaux appartenant
au village et dont les chefs de famille se partageaient les
produits.
La fort, la brousse taient toujours la proprit commune
d'une marche, sauf droit de prfrence chaque village
quant l'usage de la partie lui contigu. Les rgles a ce
sujet taient plus ou moins prcises, suivant que ta fort tait
plus ou moins riche relativement aux besoins des divers
villages.
EnftnM. C.examine les obligations auxquelles les marches
taient tenues envers les conqurants incas. Le vainqueur,
toutes ies fois qu'il s'tait empar d'une rgion, avait com-
menc par faire d'une portion ia part tributaire qui devait
tre cultive son profit; le travail n'tait pointaccompti par
chaque Hatunruna individuellement, mais en mme temps
aux poques convenables par l'ensemble des habitant)!
capables d'y collaborer. D'ailleurs, bien que ia rcolte fat pour
les Incas ou tours prtres), tes habitants ne s'en considraient
pas moins comme propritaires du so), si bien qu'aprs la
domination des tucas les indignes continuaient t'( exercersur
le sol leurs droits dans les mmes conditions qu'ils tes exer-
aient auparavant.
Dans les districts o l'levage tait chose importante, le
tribut se payait en tamas les tncas en prenaient une partie
dont ta plus grande portion tait pour eux, la moindre pour
le culte.
Les habitants taient en outre soumis il des corves reta'
tives notamment au travail des mines et du service de guerre,
le tout proportionne l'importance de la population; d'o
des recensements pendant lesquels des marches s'efforaient
de dissimuler leur importance numrique.
On soutient que ces recensementsavaient aussi pour but
la cration, selon les circonstances, de nouvelles centaines.
L'auteur montre les contradictions dans lesquelles sont tom-
bs ceux qui dfendent une telle opinion )'et't'eur fouda-
mentale consiste chercher .dans les diffrents groupes un
nombre de membres absolument gal celui deschitres par
lesquels on les dsigne ce nombre est en ralit celui des
membres du groupe a l'poque de son tablissement.
Certaines rgions avaient fi fournir un certain nombre de
jeunes hommes (Yanacnna; pour le service des divers chefs
et fonctionnaires publics des Incas; les yanacunas perdaient
leurs droits originaires ils taient sous la protection directe
des tm'as ils avaient d'aittenrs une situation sociale sup-
rieure celle de la population libre. Le tribut consistaitaussi
parfois en nties de huit a douze ans, destines soit il tre
sacrifies aux dieux, soit devenir les concubines des Incas
on ne tenait aucun compte, quant ce dernier tribut, de la
proportionnalit.
Indpendammentde ces obligations, chaque marche con-
servait ses droits et son organisation les chefs avaient
notamment, comme auparavant, les pouvoirs de justiciers.
En dfinitive, on ne trouve pas dans cette socit une vri-
table organisation politique, mais un agrgat d'lments
indpendants qui ne se trouvaient associs que par une
influence trangre, sans d'ailleurs que cette association fut
jamais soumise il des rgles bien prcises.
MAURER (Luc. vo~). Einleitung zur geschiohte der
Mark-, Hof., Dort- und Stadt-Verfasaung und der
Otfenttiohen Gew&K (~)~o(/M<'<<oM Il <tf~<t'e <~ la
mfn't'/ff, etc.). dition, i89u.

C'est une t'eprodttctioo pure et simple de t'ouvmge de von


Manrer tel qu'il a t pubti en ~M:t. Toutefois, une prface
de M. Cunow le complte et le corrige sur certains points.
J'examinerai plus particulirement tes ides sur lesquelles
M. Cunow attire notre attention, aprs avoir rappel ce que
contient dans son ensemble ce livre depuis longtemps clas-
sique et toujoursactuel.
L'auteur y traite esseutieiiementde la proprit primitive
chex tes Germains et accessoirement de leur organisation
sociale puis il recherche comment, partir des invasions,
teur proprit et leur organisation sociale se sont transfor-
mes. Mais cette seconde partie de sou tude est beuucoup
moins compite et aussi moins personnelle que la premire.
Ce que fauteur voulait crire, ce qu'aujourd'hui nous vo-
tons lire dans son ouvrage, c'est la forme d'appropriation du
sol chez tes Germains. Pour Maurer, cette appropriation fut
partout collective mme une poque ou tes populations
germaniques vivaient est partie des produits de ta terre, le
sol tait possd en commun et la socit, alors, tait une
socit de marches avec communaut de terres Sans doute,
chacun des membres de cette marche ou plutt chacun des
associs avait eu propre une maison et un enclos. Mais sur la
terre arable il n'avuit qu'un droit d'usage qu'il exerait, on
commun avec tous ses coassocis. Ce n'est qu'cxceptionuette-
ment que l'on aurait pu trouver soit un village sans terres
communes, soit des tablissements isols et indpendants.
Dans le village germanique (Xachbarschaft, villa, etc.) les
hommes libres (Ceschtechter, ingenui) ont donc en propre
un domaine (attod. eigers, prop)'ium,.ete.; plus tard Erbe,
hereditas, sors, terra satica, terra vcrnacuta). Chacun rece-
vait un espace ega), qu'il devait enclore. Et c'est t'eusemhte
de ces terrains btis et clos qui forme le village. Ce village,
Maurer le dcrit euceinte carre ou oblongue, cltures et
portes.
Point do village sans r'etdmark, qui comprend la fo.rt, le
mont, tes terres arables. Point non plus de Fctdmark sans
vUtage. Ainsi vittcttnit par tre synonyme de marca. Toute-
fois, chaque village n'avait point sou t'etdmark propre. Si le
.groupe qui s'tait tabli sur uu territoire tait peu consid.
rabte, il s'installait eu un seul vittage jusqu' ce que l'acerois-
sement de population obliget une partie A s'tablir en un
autre endroit de la marche, ir y fonder un autre village dpen-
dant du premier (Fitiatdorf. Si, au contraire, le groupe pri.
.mitif tait important, il s'tabtissait de suite en plusieurs
villages, tout en ayant une marche commune. Ainsi les
:Suves et Snoues avaient )00 pagi et une seule marche.
La terre arabio tait partage egatonent entre les associs
il y avait gatite eu quatitf et eu quantit. Chaque tendue de
:terre d'gale importance tait l'objet d'un partage spcial.
La marche do village comprenait donc habituettetnent trots
(parties le village, les terres divises, les forts et champs
indivis. Ainsi chaque associ avait f son euctos; ~ des
champs divis; 3* lu jouissance indivise des biens communs.
Primitivement la part do biens divis et indivis tait une
dpendance de t'cnctos. Ce n'est que trs tard que cette part
put tre aline indpendamment. D'ua autre ct, la quatite
mme d'associ tait une consquence de l'acquisition d'un
bien. Le droit de cit n'tait qu'un eMct du droit de jouissance
commune.
L'auteur nous montrecette situation modinedjt'poque
franque, mais surtout au moyen ge, par l'tablissement de
communauts serves ou mixtes ct des communauts
libres. Si la communauttait serve, le droit'du paysan tait
une sorte d'usufruit, la proprit restant au seigneur, au pro.
tec~eur. Si la communaut tait mixte le paysan pouvait
cependant avoir un droit de proprit.
Par contre, le droit de cit, le droit de bourgeoisie se dga-
gea peu peu du droit de proprit.
Enfin Maurer indique, mais indique seulement, commont le
principe de souverainets'est de son cot dgag de l'exercice
des droits des associes.
Ce qu'il y a de particulirement intressant dans l'ouvrage
de Maurer c'est sa thorie sur l'origine et l'importance de l'or-
ganisation des marches gentibuscognationibusque*. Avant
lui, cette organisationest considrecomme tant t'cBnvre, au
moyen ge, de la runion aceidenteUe de domaines indpen-
dants pour lui, elle est ta forme premire d'tablissement (cf.
en sens contraire Sternegg. Dahn). D'ailleurs, il faut reeon-
aa:tre que M. n'a pas nettement vu comment s'taient for-
ms ces premiers tablissements, qu'il 'a pas tourne vu que)
ta!t ie problme de teur formation. Que sont ces gentes, ces
cognattones, est une question qu'il n'examine point, qu'il ne
se pose point vraiment. La difficult ne pouvait eu effet tre
rsolue ni mme entrevue au moyen de documents et d'ides
rotatifs au droit des choses, et no menant qu'indirectement
au droit des personnes. Ce aot les recherches postrieures
sur l'origine de )a famille et de la tribu qui ont montr com-
ment ia question se posait et comment elle pouvait tre
rsolue, et la connaissance de la marche pouvait d'autant
moins t'y mener que le terme mmo de marche n'a pas con-
serv son sens ethnique originaire de territoire propre un
groupe et a pris ds le tx" sicle le sens gographique d'unit
territoriale.
Pour les mmes motifs il n'a pas bien examin non plus si
au groupement social correspondait une organisation mili-
taire, si par exemple aux gentes, aux phratries, au groupe
total ne correspondraientpoint les Iluudertscbaft, Tausend-
schaft. Xehntauseadscttaft ~cf. Lamprecht, /)cf<~c/<. ~-c/t.,
t. t, p. )4~).
Mme en ce qui concerne l'organisation du village primitif
au point de vue ret, le systmede M. est trs discut. Certes,
on admet trs gnralementque personne n'avait sur te champ
undroit de proprit. Toute terre tait propritd'une collecti-
vit. Mais on discute vivement sur le mode de partage provi-
soire de cette terre. Maurer, et avec lui Itosclrer, Sybel, Lam-
precht admettent en s'appuyant sur les textes de Csar <M.
~N., tV, t, et Vt, ~) qu'il y avait chaque anne un nouveau
partage du territoire. Itansen (~c/fft/if /Mf rlie ~Mwmtf
.~<M~M')'M<'H~a/'f.t. XXXtV; .t~'aW<)<!<M'MC/t<h/<f<HtMK~M,
t. 1) objecte t'impossibititpratique d'un tel systme d'aprs
lui, ta jouissance du territoire d'une marche appartenait tantt
un groupe tantt un autre, mais la proprit en tait com-
mune tout un peuple ou toute une portion d'un peuple.
t)ans ce systme, tes divisions territoriales taient immuables;
c'taient tes groupes possdants qui, conformment un ordre
traditionnel, se remplaaient mutuellement. D'ailleurs, ces
mutationspriodiques ne s'opraient qu'entre groupes appar-
tenant a un mme Cau. (Ho ce sens Lamprecht, ~ffwAf
t.Mc/ttcA~, t. p. ~8.) Sans examiner ce qu'il y a de proht-
matique dans cette thorie qui suppose une communaut de
groupes primitifs en Germanie, M. Cunow se contente de la
rfuter par le texte de Csar (Vt, }n paee nuttus et eom.
munis ma~istratus, sed principes regiouum atque pagorum
inter sues jus dieunt controversiasque minuunt Invoquant
un argument d'analogie tire de l'organisation des Slaves aux
x~ et xn' siectes, il montre la communaut de village prati.
quant tu culture extensive, se transportant priodiquement
tout entire sur un territoire partag entre tous, tandis que
in terre arabte pn'cedemmcnt occupe restait. jusqu' ce
qu'elle fut nouveau terre de culture, simpte terre de
pture.
Nous ne pouvons omettre en terminant de rappeier la cri-
tique faite par )-'uste) de Cotantes sur le principe mefne do
ces (ii)It'rents systmes, a savoir la proprit cu\'is:tKee eu
droit ~'i-tnanique prunitit connue attribue a lit collectivit,
comne refuse d'une faon ~exeraie il l'individu. C'est en
vertu de conceptions a priori, soutient i'iuustre auteur, que
j'ou en trouve la preuve dans les textes trs nombreux rap-
portes pur Maurer et pat'ticuiierefnent dans les textes de Csar
et Tacite. Fustet reconnatt d'ailleurs (lue cette proprit
appartient moins l'individu qu'a )a famine Sans mme
examiner si cette concession n'est point en opposition avec la
thse de Fustel, il y aurait a rechercher si lit manire dont il
interprte les textes principaux qu'on lui oppose n'est point la
coniirnMtion de la doctrine adverse et si ta difficult ne porte
point avant tout sur une question de tet-minotogie. Il nous dit
par exempte /o/~wM </M on~M la ~f<~)'M /b)(c)~'f',
p. 7) Csar ne montre nutiement une mart~euossenschaft
qui serait une association de paysans cultivant en commun
le sol dont ils seraient propritaires en commun, suivant ta
thorie de Maurer; il montre, ce qui est fort difterent. les
chefs de canton disposant arbitrairement d'un sol dont ils
paraissent ~tre seuts propritaires, et transportant chaque
anne a et lit sur ce sol les famiites et tes groupes d hommes. t
Kt il en conclut que ces familles. ces groupes n'ont point un
droit de coproprit. Mais cette conclusion est ette la ue~a.
tion du systme de Maurer' Le rapport entre tes chefs et tes
associs de la marche, entre les reprsentants du pouvoir et
les membres du groupe, n'est-ii point le mme dans l'une et
l'autre doctrine? Ce qu'il appelle avec hsitation ta proprit
des chefs, it resterait seulement voir si elle n'est point une
consquence de teur pouvoir, de leur souverainet, s'il n'y
avait point alors citez les chefs et citez les associs confusion
entre les droits publics et tes droits privs, si le sentiment du
droit individus), sans lequel il n'y uni proprit ni copro-
prit, existait des tors.

BATTACHA.
Bull' ordinamento delta, proprit, foa-
di&ria. neU' Ita.tt& meridionale sotto i normanni e gli
suavi net aut rapporti oolle instttuztoni poMtiohe
'Or~(tM!M~M f/<' / /<t~<-Mt'<~(C~~(' <( /<(t<i'c ~OXX les A'or-
Mt<tH(~). i'atermo, Hebet', i89(;.
L'ouvrage fait suite aux travaux de l'auteur sur ta proprit
en Sicile sous les Musulmans '.ht~o~' ~<r/'<' </< C/)tt'<
an.Yt,fasc.t)t,p.)83.
!/ttuteur n'admet poiut, contrairetnent l'opinion ~nrate,
que !ttt}!f;i''ro ait procd la division tripartie du sot.
Hu~giero se contenta de donner aux soldats et & t't~tise des
terres en fiefs, sauf a se rserver la suzerainet.
Les Normands ne surent pus assez se mettro eu garde contre
te pouvoir. soiUafque, suitecctusiastique.tjui s'tahtissnitainsi
eu fuce de t'f:t:tt. L'auteur tudie notamment, dans le ~w
/'<'<h/<f<r)M. le sort des domaines concdes
nu diocse de
Syracuse, au monastre de Saint-Jean, etc., surtout t'arche-
veche de Monreate. JI est particulirementintressant d'exa-
miner l'histoire du fief de Hruccato. En t Cuittaume t"'
donne ce fief t'archeveque de 1'aterme. La question se pose
de savoir si, en rclamant de ce fief < Broceatum feudum,
scilicet sex mititum le roi lui impose un service ~nerricr
nouveau, ou s'il se contente de recevoirdu vassut tes services
que ce fief devait traditionnettement. Ku d'autres termes, y
a-t-il ta une obligation de la terre ou une obligation particu-
lirement impose au feudataire?(Cf. Luigi Audrich, .t/'c/xt-tn
CtMn'f/f'fo,t8')ti, p. :)'')!
De mme il examine, au moyen des documents rapportant
donations de Ru~icro, ta questiou de savoir si la juridie-
tion spciale est ou non une consquence de t'immunite. Ou
peut se demander si une tude plus ample de droit compare
ne serait point ncessaire pour trancher une question a pro.
pos de luquelle ou ne sait souvent si tel documentpose un prin-
cipe ou tablit au contraire une exception.
Suit l'tude de ta condition des communes eu Lombardie
l'auteur nous montre tes communes luttant contre ta monar-
chie; eu Sicite.au contraire, ou le pouvoircentrat est puissant
et les protge, les citadins dfendent lit monarchie contre tes
grands feudataires.
Au-dessous des bourgeois et des citadins, le paysan ici
c'est tvotution lente qui va de la servitude romaine a la
libert moderne. Aux xn" et xm" sicles, leur condition
va
de la situation de cultivateurs libres celle de serfs de ta
glbe. tt y avait deux sortes de vilains non libres les
taient vilains de dpendance personnelle, les autres uns de
dpendance retie et ces derniers pouvaient possder
titre tibre des biens en dehors de leur seigneurie. M~me un
parmi les hommes libres, des distinctions taient faire:
ceux appartenant des races guerrires avaient en fait une
condition politique suprieure; les autres formaient
une
classe intermdiaireentre honuues vraiment libres et vilains,
les rustici.
Ayant ainsi tudi rapidement les classes sociales Sicile,
Fauteur tablit un parallle entre les services publics en
d'alors
et ceux d'aujourd'hui, prfrant ceux-ta qui taient moins
pesants et se rsolvaientd'habitude en prestations en nature.
tt faut attendre, pour apprcier les mthodes d'observation
et de critique de ce travail, des plus nourris, lit publication de
la seconde et dernire partie de l'ouvrage, dont
nous n'avons
encore qu'un fragment.

ARfsTfM BATTAUUA. L'evotaziono sociale in rap-


porto alla proprieta fondtaria. in Sioitia. (/.Wco~/~
<oc<<< </atM ' ~<M'/<! f<'c ~'o~-<tW/bHCt~'e<' ~'<<<').
Paterme. Reber.
L'auteur prconise pour la Sicile une certaine socialisation
du sol. H invoque des arguments tirs du droit, do l'histoire,
d'observations minutieuses sur i'etat actuel
en Sicile, les
hommes, tes choses, les institutions, enfin, des principes de
l'conomie politique.
Aprs des gnralits sur le mouvement socialiste, B. donne
un tableau d'ensemble de l'tat de la proprit en Sicile La
Sicile a 2.4UO.OOU hectares dont 34~.236 sont soumis
a la
culture intensive, t.393.395 comprennent des terres arables,
M)6. !n9 des pturages, S4.W sont improductifs
ou btis. La
moyenne de la rcolte tant de sementi, le propritaire
prend 8 satma, 9 tumuto une satma 2 hectolitres 7S litres
dcilitre;
=
un tumuto == titres 2 dcilitres); le fermier.
sctma, M tumuto. Do plus, l'impt foncier, qui atteint de
33 p. iOO du revenu net, retombe en dfinitive sur lui.
En fait, toujours le passif de l'agriculteur, mme rduit son
minimum, dpasse l'actif. Pourtant les insulaires ont une
moralit qui semble plus grande que celle des hommes du
continent sur 100 condamns, les rcidivistes du continent
reprsentent H.I4 p. ~)0; en Sicile, au plus, C,74 p. 100;
et d'autre part, sur )<M condamns du continent ~8, t4 p. Mo
appartiennent a ta population paysanne; en Sieiie, ~4,9p. 100
seulement; or, les habitants des campagnes y sont plus des
deux tiers de la population totale.
Dans les enqutes agricoles, les administrateurs demandent
notamment l'augmentation des salaires, le partage des biens
communaux, la diminution de l'impt foncier, le crdit
agricole.
Ce qu'il faut essentieiiement,c'est modifier ou supprimer
les rapports entre celui qui produit et celui qui possde. Mais
le peut-ou? La proprit est-elle sacre et inviolable? Non
l'tat en prend une partie au moyen des droits de succession,
qui, en quelquesgnrations,ont toutabsorb la contribution
foncire prend la moiti du produit moyen. On dunit la pro-
prit le droit de jouir et de disposer de la chose de la faon
la ptus absolue mais pour ta proprit mobilire, elle dpend
dela possession; pourla proprit immobilire, ta loi dpouille
le propritaire par la prescription de dix ou par cel le de trente
ans. En (ait, l'histoire des valeurs mobilires montre qu'il
n'existe plus de fortune remontant au moyen ge depuis le
xnf sicle, la richesse a diminu de 96 p. iM) par la dpr-
ciation de ta monnaie, de 7S p. 100 par la diminution du pou-
voir d'achat de l'argent, de 6 p. 100 par l'abaissement du
taux de l'intrt.
Il eut t bon que fauteur montrt avec plus de rigueur le
lien entre l'argument qu'il invoque et ce qu'il entend dmon-
trer. C'est se donner beau jeu que de chercher si lu proprit
est un droit sacr, inviolable. !i fallait dmontrerqu'elle n'est
point un droit individuel or l'histoire des richesses ne nous
renseigne que sur ces richesses et nullement sur le lien juri-
dique qui existe entre elles et les individus; les droits do l'tat
sur les proprits ne sont pas plus la ngation du droit du
propritaire que ses droits sur le citoyen lui-mme ne sont la
ngation de leur personnalit; enfin, que la proprit soit
acquise par la possession ou par la prescription, peu importe;
elle M'en est pas moins eutre les mains de celui qui
pos-
sde la proprit, tt fallnit montrer aussi qu'il n'y avait point
contradiction a argumenter dans le mme sens dos avantages
du propritaire, o l'auteur voit un privilge injuste, et des
vicissitudes des fortunes, de leur importance toujours
moindre, de leur disparition fatale par l'effet des lois juri-
diques et des lois conomiques. L'auteur n'a pas assez distiu.
gu a notre gr le droit de proprit et son objet d'une part.
le sort de la proprit et celui des propritaires d'autre part,
le point de vue juridique et le point de vue conotniqu' te
point de vue individuel et le point de vue social. Surtout les
arguments de droit qu'il invoque ne sauraient est tout cas
prouver le besoin d'une meilleure rpartition des richesses;
par l'analyse d'une institution, on ne peut que voir ce qu'elle
est. on ne peut en dduire ce que j'en voudrait qu'elle fut.
Quand bien mme il aurait prouv que ta proprit est
un
droit de nature sociaie. il n'aurait point par ta dmontr
qu'elle doit tre, dans une certaine mesure, un droit collectif.
Hien plus intressant f't plus prcis est l'argument qu'il tire
tout simplement de l'histoire eu Sicile du droit de proprit,
nous montrant ta lutte qui dure depuis le moyen ge entre le
souverain, les grands feudataires et les gens de la gtbe. Pri-
mitivement. le baron n'a que lis gnrdedu fief, au nom du roi
mais peu a peu les barons, profitant de la faiblesse du pouvoir,
tentent de convertir leur droit en un droit de proprit. En
vain parfois les rois dclarent qu'ils ont le domaine direct,
finissant cependant par reconnatre le domaine utile aux
barons. En vain. ils font confectionner des registres de biens
domaniaux les usurpations ne cessent point les barons font
disparatre les registres; ils font commerce du fief maigre la
dfense royale; ils se font reconnatre sur lui un certain droit
de succession. Mien plus, si un feudataire meurt sans hritiers
lgitimes, les voisins s'emparent du fief, saut demander
une investiture dont ils finissent mme par se passer. Enfin,
Frdric d'Aragon autorise t'atinatiou du fief. D'ailleurs, les
populations qui habitaient sur les terres (odaies avaient, soit
en vertu de droits anciens, soit par concessions, le droit de
prendre ce qui tait indispensable a teur conservation, d'oc-
cuper l'espace de terre ncessaire pour construire, do faire
pattre leurs troupeaux, d'ensemencer un lopin do sol, etc. Et
les prestations personnelles qu'ils payaient au baron, ils les
payaient eu principe comme serts attache:; la gtebe.
Aprs avoir rapport dans ses urandes phases cette lutte
fodate, l'auteur insiste particutierementsur ta constitution
du~Bjtfittct!8!2;t)arette.orKanisa!ionot)~arcbiqueremp)ace
le systme fodal, lu terre dont le domaine direct appartenait
auparavant t'r:tat (ut ta propret absolue des possesseurs
actuels. M. H. voit dans cette constitution un empitement
des barons, en principesimples dlgus du roi, sur les droits
du souvo'ain, d'une part, en tant qu'ils s'arrogent le
domaine <)irt'ct, et des habitants, d'autre part, en tant qu'ils
se comportent it leur ~ard eu propritaires. On peut se
demander cependant si cette constitution n'tablit point sim-
plement sauf applications abusives une sparation,
conforme aux ides modernes, entre ia proprit et ta
souve.
rainete. De ce que les droits payes par les paysans n'taient
point perus par les barons en tant que propritaires, il
ne
rsulte point strictement que t'Htat avait la proprit du sol,
que les habitants en avaient l'usage. Ce sont M des concepts
qu'il est hardi d'appliquer l'organisation (eodateota terre.
bien plus que l'individu, est l'unit sociale, oit l'homme
dpend du sot, bien loin que le sol dpende de lui.
Le chapitre tu est consacre t'cvohttion de la proprit
et ta nationalisationdu sol Aprs des considrations gn-
rules sur ta proprit collective en\isaf;<'e comme conforme
au droit naturel, et la proprit individuetie ayant pour base
la violence, l'uuteur examine l'volution de la proprit
en
Sicite. Le droit romain n'y avait point dforme ta nutiou de
proprit. L'aiteu, proprit de lit maison, du jardin, du
verger, y est d'origine trs ancienne; i'atteu famitiat y vient
sans doute des Cretois, l'alleu individuel de colonies ath-
niennes. A cte, t'ager puMicus que t'tat auermait,
ager
regalis pour lequel on payait une prestation fixe, a~erdecu.
manis pour lequel on payait ta dme. S:<ns doute les droits de
l'individu furent en partie absorbs par les exactions des Ho-
mains et des Byzantins, puis par les abus de lit fodalit, mais
les droits essentiels aux besoins de ta vie restrent toujours
respects. C'est le systme moderne de ta proprit indivi-
duelle qui les a compltement sacrifis; ce systme est t'a'uvre
de la t-'rance rvolutionnaire, qui confisque le sol pour des
raisons d'ordre politique et en fait commerce pour des raisons
d'ordre fiscal. Ce chapitre est la mise en uvre thorique
trop sommaire notre gr, et dont tes affirmations parfois
tonnent, des faits exposs au chapitre prcdent.
Nous ne pouvons reproduire, encore moins contrler, les
ebinres et les faits avec lesquels M. B. examine en Sicile,
d'abord d'une faon gufrute, puis plus particulirement t
dans un territoire de Sicile, l'tat de la population et de
l'agriculture. Il en rsulte que le mal n'est point dans lu
nature terre fconde, population saine, mais dans la loi,

accordant une part des produits du travail a une minorit de
parasites. Cette part, on tu! donne aujourd'hui comme base le
droit de proprit immobiiire. Examinons un des principaux
contrats au moyen desquels elle s'obtient, )a mexzadria. C'est
l'ancien colonat partiaire en Sicile ii a toujours t une
socit dans laquelle le massariote fournit les animaux de
culture et les semences, et le mezxadro son travail. S'ii y a un
bnfice, on en fait deux parts gaies. La part de produits
appartenanta l'intermdiaire, i) ne l'a point comme propri-
taire, mais comme associe ceeiesttraditionnei. M. H. insiste
sur ce point pour nous, la question au point de vue social
est beaucoup moins de savoir si en droit il y a socit ou
louage que de rechercher si, en fait, le mezzadro est et dans
quelle mesureil est la merci du massariote, de celui qui, en
dfinitive, et quelle que soit ta nature juridique du contrat,
permet cetui-ta de cultiver le sot. Aussi trouvons-nousbeau-
coup plus intressantes les pages dans tesquettes fauteur
nous montre ce que devrait tre en ralit le produit. It se
partage normalement entre l'tat, le propritaire, le fermier,
le mexiHtdro. Soit un produit de 6 satmes. Le fermier en
prend H. Mais des trois autres on dfalque te prix do la
semence, l'intrt des sommes avances, etc., etc. En fait, tou'
joursundficitpourtemezzadro.L'auteur, pour prciser, prend
pour exemple un territoire compos de onze anciens fiefs;i
tendue ~.S(!0 satmes produit net 77.300 lires; valeur
environ 1 million et demi. Ce bien a t pay sous le rgime
fodal 300.000 tires; t'ahotition de la fodalit a fait que le
droit d'usufruit qu'y avait le bnficiaire a t transform en
un droit de proprit. Supposons qu'il n'y ait sur ce domaine
qu'un fermier; son passif peut tre apprci t20.0u0 lires
environ. La moiti des ~.SCU saimes, ':80 salmes seulement,
peuvent tre ensemencs. En fait, on eu sme 2GO environ
chaque anne, produit moyen do ~0 = I6S.7?<0 lires. Mais la
moiti, en principe, est pour le mezzadro reste 82.87H lires
avec un passif de t30.0M). L'auteur montre ensuite que les
produits des terres pture ne sauraient combler le dficit.
Sans insister sur ces calculs et celui dont nous donnons
le rsum n'est qu'un exemple notons seulement que l'au-
teur avait diminu d'une certaine part la moiti revenant au
meMadro lorsqu'il apprciait le sort de celui-ci, et qu'il omet,
pour des raisons que nous n'avons point discuter, de le
(aire lorsqu'il apprcie ensuite le sort du massariote.
Quoi qu'il en soit, fauteur croit pouvoir conclure que l'on
ne peut prendre une part quelconque du revenu du sol sans
atlamcr la population.
La faute, en Sicile, est d'avoir bris lgalement l'volution
en changeant le droit du baron, en transformant en aiteu la
terre sociale. Il est vrai que la loi du H dcembre 1841 recon-
nuit lu proprit des communistes sur une partie du tief. Mais
cite est dfectueuse, particulirement en ce qu'elle pose le
principe de la proprit absolue de la terre aux communistes;
en fait, le pauvre vend sa part il faut que la loi lui impose
une prvoyance qu'il n'a pas; en outre, t'emphytoso des
biens communaux n'a donn aucun rsultat satisfaisant les
enchres (ont monter l'excs le cens; son taux ajout au
poids de l'impt foncier ne peut ctre support par le cultiva-
teur qui puise la terre et l'abandonne.
Le tort essentiel est d'avoir attribu la terre, particulire-
ment :'t celle culture extensive, une valeur commerciale. Par
tu tous les droits psent sur ta chose et indirectement sur le
cultivateur. En Sicile, les salaires vont en diminuant dans
les premires annes du xvf sicle, une journe de travail
I.
valait 0 i. HMS. Le bl valait alors 88 parquiutai mtrique.
Aujourd'hui, avec le btSt tires environ, on voit des salaires
de i.M, 2 lires, 1 i. SO, etc. Examinant le budget d'une
famille de cultivateurs, l'auteur conclut que le travail des
adultes suHit strictement la conservation de la famillo, a
t'amortissement du travail Oit est donc la prtendue
rente du sol? Si l'on suppose des terres plus fcondes, alors
le prix ncessaire u la vie est plus tev. Sans doute on
peut admettre que, par les progrs de la culture, le produit
moyen augmentera, mais cette augmentation ne sera point
due la terre elle'mme,mais aux procds, aux engrais qui
constituent uu capital indpendant.
L'auteur, reprenant alors le point de vue historique et juri-
dique, attaque particulirement le contrat d'emphytose;c'est
une conception contraire l'esprit de la fodalit tout le
territoiretait possd eu fait par tous; les rapports de vas-
salitt n'taient eu principe que des rapports de contribution.
Le titre au nom duquel tait tenu k' fief tait un titre ree),
non personne). jusqu' la eoustitutiou de )M~. Or celui qui
n'est pas wattrc ubsolu ne peut tablir sur une terre
un.rap-
port emphyteutique. M. B. exatniuedans un aperu intres-
saut les diffrentes conceptions que )'on s'est faites de ce
contrat. A notre avis, ces discussions ne sont utiles au point
de vue focioiogique qu'en tant qu'eites nous montrent lu
faon dont, a une certaine poque, une socit, ou tel groupe
sociut se reprsente t'organisation qu'ette a ou qu'ette dsire-
rait avoir.

VU).UtVKKS
t'ar~)M.Mjnss.))mt:Kt;tH<'t).KVY.

Jcuus JOLLY. Recht und Sitte tEinschtiesstich der


eintteimisciten Litteratur) in Gruodriss der Indo-Arts-
chen Philologie (~ro)f et m't'<! <~c <t<fc). Strasbourg,
Trubner, )8')6, tC" p., gr. in-tt".
Bien que le rsume de M. J. soit presque exclusivement
destin aux indianistes de profession et qu'it se prsente
avec toutes les difticuttes d'un traite intimetneut technique,
plein d'abrcviations et de termes sanscrits, les sujets tudies
sont si peu <'dHircis et si importants en m<hne temps. le tra-
vail de M. J. est tellement magistra), que nous sommes heu-
reux de pouvoir en donner ici une analyse.
Ceux qui n'ont pas une certaine connaissance de la littra-
ture brahmaniquene pourront rettementutitiser cette par.
tie du livre, profondment neuve, que fauteur consacre a
l'tude des sources du droit hindou. H y a ta une seriation
remarquable des textes, des dissertations de beiieet sobre phi-
lologie pour tablir la filiation des diffrents codes, dcom-
poser leurs origines. Mais la classificationgnrale est acces-
sibte au grand publie trois couches dinerentes apparaissent:
)" les sutra ;dhannasutras guides de la loi) qui se ratta.
chent immdiatement a la littrature vdique et font partie
de la ruti (rtivtation) 2" tes castra (dharmaastras ensei-
gnements de la toi; qui font partie seulement de la .M'~t
(tradition), en tte desquels vient le Manava dharmaastra
K) (lois de Manou), le plus ancien et le plus illustre (du
\'n" sictedc notre re). Les ditronts textes suut non seuto-
ment distingus par leurs priodes respectives, mais sont
eux-mmes rpartis entre un grand nombre d'coles vdiques
(caktta) ayant chacune une tradition trs difrento des
autres; 3' les commentaires faits sur ces castras, pendant le

moyen Age. et les compilations modernes. On voit de suite
l'importance d'un pareil expose Maine, les Anglais, tout le
droit compar leur suite ont commis l'erreur de considrer
les lois de Manuu comme le code mmo de i'tnde, et certaines
adaptations sans valeur comme le droit braixnanique. Ur,
uueshnpteuomeuctature des textes remet lesclioses en ptace;
les Manavadharmacastra ne sont qute code retravaiiic d'une
cole, pendant le haut tucycn a~e; ii ne retrace qu'une partie,
un moment, uu aspect du droit indou. La tache se complique
donc pour qui veut faire du droit compare. Mais te travail
n'est pas dcourageant; maigre les profondes diuf ronces
entre les lieux, les temps, les coles, les textes, te fond m~me
du droit est suffisamment uniforme. Un second renseigne-
ment rsulte encore des recherches de M. J. Les textes juri-
dit{ues indous sont les codes des Hrahmanes, ce ne sont pas
les lois de )a population entire. J'exagre certes, mais des-
sein les ksatriyas y sont bien l'objet d'un corps de rgies,
mais tout io reste de la population, Yaiyas, <dra, dclasses,
n'est considre que par rapport aux castes aristocratiques
(dvijas: deux fois ues). Les textes sanscrits, les lois de Manou
en particulier, ne nous donnent le tableau que de la vie du
brahntitnc, un peu do celle du ksatriya, et des renseigne-
meuts pars sur les autres castes.
Ceci fait, A!. J. Il reparti son tude en trois grandes divi-
sions droit familial et successoral, droit reei ctobti;;a-
tions, droit criminel, procdure. L'as dernire partie
concerne les murs et usages. Signaions-ia de suite ici cite
intresse plutt i'historien des mmurs ou do la religion que to
juriste. La tecturo n'eu est pas moins indispensable, parce que.
dans les recueils indous, les prceptes moraux (ducation,
politesse), les commandements religieux (sacrifices, sacre-
ments, impuret, interdictions alimentaires) sont aussi inti-
mement mcts que possible aux rgles juridiques. Les textes
comme les choses ont en de tout temps cet aspect, et ce qui
frappe le plus te sociologue dans t tude des socits in-
doues, c'est la pntration extrme des institutions sociales
les unes par tes autres. Pour ce qui regarde les tribunaux,
leur organisation, les pouvoirs judiciuires, ta procdure, la
preuve (cinquime partie;, remarquons, a un extrme, le
caractre religieux et aristocratique de la juridiction royate,
l'autre le caractre familial du tribunat du pacayat (con-
seil des cinq anciens du vitla~e). M. J. nous montre aussi
quelles gradations complexes les sparent. Le droit iudou
n'est pas plus simple comme (ouctioauemeut (}ue comme
fond.
l'our arriver faire de sou tude sur l'organisation de la
famille iudoue un chapitre remarquable, il a suffi a M. J. de
suivre les textes et dotes classer avec la plus grande rigueur.
La famille collective repose sur la communaut d'habitation,
de repas, de culte, de proprit p. Chacun de ces termes
est a retenir 1" connue tendue, elle comprend thorique-
ment, a partir d'un individu, trois gnrations d'ascendants
et trois du descendants: l'adoption e'-t possible; il existe un
trs {!raud nofnbre do filiations juridiques; la proprit
hmnobUiere est cullective, lu proprit mobilire (salaire)
est indi\'idueite. mais la famille est soiidairetnent respun-
sable des dettes (tu) H" il y a un chef de famiiie et t'atue
succde au pre dans ses droits. Ou devru iuuer M. J.
d'avoir rattache, avec h's textes et le boti sens, le droit
successorat a l'organisation de lu famitie. La proprit des
immeubles est indivise, celle d<'s meubles est sujette a par-
tage parle pre, mais sni vaut des proportions rigoureusement
detenninees par la lui d'aprs le rau~que tes nts occupent,
au point de vue de t'a~e, de la pucete, de la caste, ou de la
fonction sociale (S~. ici. outre le groupe ainsi hu'me par te
pre et les enfants, apparaissent deux sortes de tiens fami-
liaux t" le ciau t);otra) outre les membres duquel il y a
successibitite absolue )X<); i!" la (amiite collective dont nous
venons de parler les hritiers, les dayadah ont aussi ce droit
imprescriptible de succession ce sont tous ceux qui parti-
cipent au tneme sacrifice tuneraire, qui mangent ensemble
le gteau sapindah.. En d'autres termes ta fannite comprend
trois zones concentriques clan a descendance paternelle.
famille a~ua~que indivise, famille patriarcate. M. J. nie
qu'il y ait dans le droit indou aucun reste d'une filiatiou
maternelle (p. M;. It a certainetneat raison en ce qui concerne
la famille proprement dite, qui, eu ellel, exclut toute parent
parles femmes. Mais, sans excepter que le fils suit presque
toujours l'tat de sa mrc, nous trouvons (p. ~) mentionn
au rang des fils, secondaires il est vrai, un pOtrikaputra, fils
de )!) sur ttritiro. et (p. 86) il est parte de l'hritage
de
t'onetc muterne) (bandhu). Ce sont des traces, je crois. sufH.
sants d'une ancienne descendance en ligne fminine,
La socit matrimonialea ta forme ordinaire aux
familles
patriat-cates ta femme est unie au mari
par un sacre-
ment religieux, indissoluble ou a peu prs, mme
d'adultr elle lui est tie nx'mc au dcta do lit vie. en doit cas
et
rester veuve ( 20). Le sacrifice de la veuve provient de l,
institution de dveloppement trs rcent. et pendant long-
temps spciale aux castes t-oyaies. Ce qui. ajuutonste, o~t
tout fait rgulier, te sacrifice de ia veuve tant le ptus
vent rserve la tombe du chef.
sou.
Le ivirat existe 'p. -TO-'t)
et fonctionne normatement. La poty~mie est permise, le
concubiuane aussi, surtout en cas desteriiit. La situation
de la femme tait certninement plus etevee a t'uri~ine
nu'au-
jourd'itui. Pour te tnaria~, i) fatiait observer t" des
ditions d'ge; a l'origine l'initiation du jeune honnne con-
etaH
t-cquisG c'est postrieurement s'est dveloppe lit- cou-
que
tume du mariage d'enfants; les prohibitions: la fomne
doit tre vierge, d'ou exclusion des veuves de m~mc
d'un autre ctan. d'oit stricteexosamie (p. t9-(M qui s'est caste,
res-
treinte actuettemeut a ta famiite agnatiquo; 3-' les formes du
mariage f Xi) prsentent runis tes diffrents stades de
l'volution mariage par rapt. par achat,
par tibre et simple
choix, par crmonie (requis
pour les brahmanes). M. J. a
russi & localiser ces coutumes et a montrer quelles
struc.
tures sociales elles correspon()ent.
Le droit iudou connat comme, probablement,
tout droit,
la dtstiuction outre les meubles et les immeubles. Pour les
biens fonciers, ta proprit est soigneusement
spare de la
possession. La prescription existe, sauf contre les mineurs,
et il y a une thorie de ta preuve en matire de proprit
( ~6) ce qui est d'autant pins remarquable
qu'it ne peut
tre question ici d'une influence occidentale, la plupart des
plus anciens textes fsutras) remontant a des dates antrieures
a Alexandre. Reste la question de la proprit collective
M. J. y rpond de la faon que je crois la ptus juste
et la plus
sense, en distinguant les lieux et les espces. La pture,
en effet, est partout exerce sur des communaux; au con-
traire, depuis une trs haute antiquit, il
y a eu proprit
familiale des lots de culture, comme le tmoigne la teg:s!a.
tiondu bornage; H n'y a d'exception que pour le Pendjab oit
l'exploitation du sul de la commune est faite pin' tous, eu vue
de l'impt et d'une repartition des bnfices. Les soi-disant
droits de retrait ou de premption de !a commune, eu eus de
venter un h'anucr, M. J. tes rattache non pas it une commu-
naut primitive, mais bien a l'isolement juridique du village.
Les rgies de droit qui refissent les biens menbtes sont
multiples l'ublisation, la donation, le ~a~ ta socit, les
dommages intrts, la location et vente, ont t connus par
les indous; les contrats, leur (orme solennelle, leur rdac-
tion (p. :!45) semblent au moins contemporains de t'introdue.
tion de l'criture dans ics Indes (nu" sicle avant J.-C. envi-
ron,. Depuis, un vritable droit commercials'est constitu. On
voit quelte matire innnimfnt ricito (le faits spcifiques ic
droit illduu ottrirait des tudes de droit compare.
Le droit criminel est reste foncirement religieux. Les textes
traitent autant et plus des pchs et expiations que des dlits
et des peiues. Il y ptas. la notion mme de la faute est pro-
a
fondment imprgne de ce curacture :M), et la hirarchie
mme des crimes est domine par le principe religieux !M'.
Dans ta plupart des cas, c'est d'une pnitence <)u'it s'unit plu-
tt que d'amendes et de chtiments: te fm'taa~e intime des
peines spirituelle'; et des peitu's puhli'jues, l'importance extra-
ordinaire que l'histoire et lit tt~ende ajoutent aux premires,
sont caractristiques (le la fonctiou morale des rendions hin-
doues. )'n fait remarquable est u signaler c'est un principe
trs vieux du droit indou que celui de la prnp"rtionnatitc de
la peine a l'intention du coupable si les Hrahmanes y sont
parvenus bien avant les socits europennes, ne serait-ce pas
cause de leur confusion fondamentate entre la loi religieuse
et la loi sociale, entre le pche et ta transgression (les rgles
publiques Sauf les plus K''avcs des crimes religieux, les
dlits, civiis et publics, sont punis par le roi de prison ou de
coups les fonctions du roi suut d'ailleurs essentiellement de
dire ta justice, de protger les murs et les proprits.
~ous n'avons (ait qu'une sche nomenclature des questions
traites par M. Jott; Le livre doit '~trc Ut attentivement. C'est
la plus importante des tudes d'ensemble faites sur le droit
indou la confiance doit s'attacher aux vues gnrtescomme
aux vuesdedetait. Quelque dimcito qu'en soit l'abord, c'est
ce livre qu'il faudra se rfrer.
MAMEt. MAUSS.
KOut.HH. Die Reohte der UrvUter NordamerUtas. (/,f
f~ft </(' ~CM/</M /'t'tM<7</i( (/f
<M''r<f/<' </ A'u~.) lu ~ct/M'A.
tw~h''w~' /<<'t-/<hft't'Mf/t<eA(f/ )8M' p. 3:i4-UC.
).es socits tudies dans ce tf'avai! sont tes tribus indiennes
situes au nord de Mexico, y cumpris h"' Kstjuint.'tux. Toutefois ces
derniers eoustitueut un tit'uu)~' cti))n')!r:[j')ti')tn' & j'aW ft d'mt k'~
U't'A'S !<m)( d't'i)< ~j!!tt'X!Ut.
Xuus )n' ))uuvu)ts )jn'imti')m't- h's ~)j''ts tmit'
Ou trum't'tit d:U)s
<'<( urUch' de ttcs n!i)t"! t't'tt.')<'ij:tn'tu<'nts .<Hr j'ttt~nistttiott suciaic
df t'es soci~s (ut~aui'-atiu)) i't hi~' fiuttiiiittc) &nt' )fUt' droit
j
itttcruaUuuat ()). 3M~ <m' )'t'i'c!:n'H}(' .m'le. t)'.M~'s t'ctatih il

)'i))tj'"sitiu)tdtt t)um, i't t'inUmtiun dM.j'-mx'ns (p. :<:0-
;.m'
t''s sociutt''s iit'ct't't's (p. !n:i .~tn' )< t)'t;h"i t)ui cunccrtH'nt tf sann

ti)t't)sh'u<t'.)'4 stn t''fH!tnu~<[37S-8U ;)':n)(.'pUon :<Ut-
k- deuil iM3-U9M.; ))' druit de {froft-h'-t' (399405; t.- droit
p~out ft ):< pt'm'edu)' (H)5-H6;.

J. Kom.Hi(. Zum Reohte der Australmeger. Nouer Bettrag.


(.Vottt'C/e t'UO~'t&Mff'HX ~)'U<7 t~'f! .<~)'M ~.<~'<'<.) M')nc
OK

itccuci), t~, )). ~t~ (-t.<uh-.


Shn)' addition A un'' <tnd'' du t))~)))'* autctt)' su)' 1~ n)<?mc suj''t
t't pMruu d:ms je nn'tm' XfCUt'i), t. \t), )). 32) et suiv.

V. TAMASStA. n M Dharna M in Germania ed imGrecia?


(/~<' < /~ffw< f<t7<ff'.</f''<t (t'ef'mf</f)'f Wf/t (x'e *;<(:/ .Sc<f-
<</<'(' (tel ~t'n'~ iM~, 2 )MS. p. '!0.-t suif.

l.e < tJhat')):[ est n't indou, en vertu duquc) )<' ocancicr,
usHm;
'lui v~'ut se f'ai)'<' payr d'un d~'tntctu' ')u! t't'tusf, vi''n) s'at.s'-oi)' sur
te !)'ui) ~f la toaisot) uccupt'-)' par c~ d<'rt)i''r t-t y n'st'' :') .jrtx'r jus-
qu' <:)' ()u'i) uit n'emur' M cn''an~ lu )t)urt dut-))'' eu t'~nu'T.
C't uu'' nn'uac<- de ' hti~r tftuurir si i'~n n'est )':[.< tctuhuur.
Stunn'')' M:m)< a n'trott\~ ):< tut'ttt'' coutuutc (taus t'un<;it'u druit i)
)at)duis de (a tn:)ui''r<' lu jdus ith'tjutcstatdt' ).i"t :t cru t-n dt'-ruu-
vrir des trac'), tuais trf-s douteuse' daus te dr"it af).K)'saxut)
Y. T.naassia.dans j'articte ci-de.<su- se detounde si )a Ut~tuc insti-
tution a existe eu (tenuatiie et eu <!re<'e.
).os ))t'euves tju'ite)) duuue puur lu <!ermauit' nuus jMtraisseut trs
suj''tte.'j a cautio)). Mais ceties qui ecm'ernent ta t.reee sf~ot [dus
dOnoustratives et )dt)S intressantes. L'auteur si~nate d'.d'urd <)U~
les t.) ecs avaieut de )a Yi<i une conceptiuu jn'esfjtte aus-i mejancu-
)i())te 'juc tf's tuduus. Les suicidtM taient fretjuents chez eux. Mais

()) toc/Mf'ft! UM /Acm)' /tM/<'y e/M/~M<<OM, t!!TS, )).


~-.ttWKAft'y'M~K/tMm, )'. 47u, aute
<'c qui est ptusn'tnar'juabtc, c'est tjucfesmcidt'j't'oj't'L'nK.'utiudou,
H<')ui!;u[tunt<)ui<tt<~i<.)Ufwctttim)'tit)tn'ddns)n))t-ntit)m'du
m)urnu,t't-tdit'tc.snicidt.'p!U'j'n<)ru)ut)t!y:t<t~a)'~t:tt
d')ns)ituti'mMciu)'Au)u-t!)t'ntj)[)urtc()u<'h'ssuicid';sd''c<'
~fnr<nmt'ut')~<))~c)u)L')tK'ttt~tudit'-sp:u')L'tn<d<)Ctns~)'t'es<)Ut
!tV!m't)td'tt'm'iu't('tt"n))~'t'd''jt)[u'.<))cct'ftit's)!uut'<}m'ia))t~t't
fUt'utttU.Huti)),t'tLtt!tt~)K.'))uust'a)))"jt'k'UMCit-.t)uit-u)'j'<')~'tte
U'<)')'u''ttp'induu.Att:tx.'t);"n',t(ui avait L't)''))<nd!H)ttu))t;tt'u)~s
connu')L'rut)S';ith'ru)'diuait't'd''t't''tic)'s, .-if Yitab;tudut)ttCt't)tt'')iti~
[)inc'd';rn)L')-u))''tui-t)m't:t<k'ittMsct'ut\'<')jnn'.tt)~utututo)'!idt'
~e)ais!-ertt)"U)'it'd'')'a)tn~.2.
L'htt~n''td''c<;tt'))ati')UPMt<)U'<;Hc<t'<ft'rc~vidt')nttK'ntuuu''
y)!u')Ufuui~<c()nttMtAC)ttt'j)articu)i''t'i~t;u(.'ntdf!!titu<idt'tuuk'
~[actiutt.ut')!))'))L'cttduttc.<y)ut'tunmti'ju<'d'nncvttfU)tt''[utdu
dt'uitcuntt'a'tUf).

Ht'SAKUV. - Dlits et contrats, '.Uud(; d'hi~tuitc jutidi~u'


Mu.scun.)MO,tvui.itt-8".
Xuu.s ne cunttMis.sun-; cet otnf':n.()Uf )'!<)-une !tn:dy.fj)!u'm'dan-
la .\H('<'</<' /<~t'<' /s<o<'<M<' << (~t'ut< umis ttt t.'utKtusiun nous eu
parait hup))n)!<jt-)unt)-)n'U)'n')t-p:t-!sit:t)M)t''<U'<)pr<'sruut<'ut',)<'
t\'p)'du';unt)'Mtp)'in))tifn'MurHiteh''ui)<u)n)':)th'nn<'),co))onc)u
sti~u)!t'ion.niit'<jntr:ttt'<'),t'<))tune)t't!tt''t.'L~)dus:u)ci('nm'dfs
ob)i~!<Uun.s<t(:itM<tnitesu)t<'d'de)itsfth'(!)us.tnci<nd<con-
t)~t!i'tc<-hu<)Ut!!cfu)'tu''ctun't':tttt<'H)'dnd'tit('t~:tvicti)t)''
puut')'t~H)')it')it['ftix,j)t~t't'nit'L't\')-nj;<t))';t't'))')<'t't'i))d''nt)ut'?.'
a
~f-droit t'u)th'Mctu'')dt''t-i\'t'):)itdt)n<dttdtt')t)'~u<t),et)du';sp)''t;i:tit'-
M<'t)t,d)'ht))M!'tit'dct;('dt'uit<)tnounct't')t'tM~'im"i<titfsprh'<e!
peines qui Mntt'))c.<-)))~nx.un ~ucct'dan''de ):[Y<'ndeU!t~tntnia)'
E.Ut.'ttKUEM.

CAttLO LESSU~A. Doveri sooiaU de! diritto giudiziario


ci~Ue (/.M </<'<'m'M &M'fMMj' (/ ~'u<'< ~'M</f't'f'('<'<' c'f7.; Turiu,
UuccH,tM7.
t.'imt'-Ut'<'Mt))i)K~!mpuintt)''yut'h~ts)!ttift<pt')))t.'ipa)pi')nstitu-
Uon.jutti'')!ti)'cs''t )))'o''<'dura)<'s, )'cch);t'ch:mt avant tuut si elles pro-
H't!f))t MV<'c efficacit le droit <Jccft)x<tttiunt!)t['t:uJprcontre des
p';ts'j!t)t)t;t)<)))tits<t<)"'))d<'ntt''cotK))))itjm'm<'nt. X'.)tt!;)tt'r'')')'o-
duitou.s point )';s id~cs 'jtt'.m'c bfaucuttp de force et d'h:t)'itet<?il pru-
sente ''c snot des opinions, ce ne ~ht '{uc des npinions. Xous
aurions voutu, et cette (rurrc attachante en iM-l'ireie dsir, que

())))!. tO.i!
We </e 7'<<t-M<, ch. XVM.
M. ).Mso))n (~tudiiU les h)'!)itutinn'idont il s'occupe par rapport & h)
'.()ci~(t''j)<t))t')!)U<'))'t)<'s)f)))''t)()))))<'nt,untit)dt<'ctt<o<;it!tMa
tt'avt'rs ces in'!titutio))s, t'o'h't'chtU connm'nt tt'H'ta npit et t'~a~it on
t)r't)':('d<'<'t')tt's-t'i.Sit'on't))()i'<it))j')<')n''t)tt'f.'<)n''titutiot)s<')t
<'Uc!i-m~)t)(" on risque fort tic it'sappt'~L'ict'aumoyen d'ides qui )H'
<u))tt)ucth'spt''Uti<u)Stt<')))'iu<'ip''t'Ut)Ut'd'ir!U!:ons([('st'ntHn<'nt.
~ussi ))!<')) M. )..<t-t-itw)tnutti<)u''n)t't)tdaMC('((''ht'oct)U)'umo))-
(rcr'tueiaproc~thn't'peut(''()'<'Ut) (')'j';td\tud''pourle st";i')]ujj[uc.

Ht.RYY.
(j)LA'nU)':MHSKC't'tO~
:'

SOCIOLOGIE CHiMINLLK
)'arM.(:M()'i)(tCt)Attt'

AYHOTtSSKMHXT

Si ta sociologie est en gnral l'tude des modifications que


le groupe fait prouver a ses membres et si, de la vie du
groupe rsultent des rgies de conduite imposes aux indi-
vidus, ces rentes peuvent tre tudies scientifiquement de
deux faons. On peut chercher comment elles se sont formes
et modifies, en suivre !a filiation depuis les socits les plus
simples jusqu'aux plus composes on peut aussi chercher
comment ces rgies agissent efectivement sur lu conduite
individuelle, dans quelle mesure elles sont obeies ou trans-
gresses, queite rsistance elles rencontrent de la part des
habitudes, des sentiments, des croyances de l'individu, Lit
proniere tude est t'onice de la sociologie gntique,la seconde
est celui de ]a sociologiecriminette.
Cette science est un intertm'diaironcessaire entre la soclo-
logie geuetiquc et la sociologieapplique. Tout d'abord, grce
a elle, ta prvision sociologique cesse d'tre une sorte de
divination ou plutt une vague intuition des formes sociales
futures. C'est ta connaissance des troubles profonds dont un
etatsoeia) est immdiatement menace. Mais iiya plus ta socio-
togie applique ne peut avoir que des prtentions modestes:
elle ne saurait tre l'art de dtruire et de refaire l'ordre
social sur ut) pian rationne), mais seulement l'art de prvenir
des maux et de remdiera des troubles qui ont pu surgir dans
lu vie d'un groupedetermim'.Or ta sociologiecriminelle tudie
sinon ces troubles en eux-mt'mcs, au moins les symptmes
quilesdecetent.
La sociologie crimiaeiie se divise l'heure actuelle en deux
branches, dont chacune correspond un moyen d'investiga-
tion spcial. L'une de ces branches est lu statistique morale,
application de la mthode comparative u l'tude des varia-
tions, du taux sociat des crimes soit dans le m~me groupe
humain, soit dans des groupes dinercnts. L'autre est )'an-
thrupologio ct'itninetteou t'etudc des criminels etdcs milieux
oit ils surgissent,tude qui s'edorcc de dcouvrir un tien cau-
sal entre tes infractions et Ftt soilde l'organisme individue)
ou de la conscience individuelle, soit de la conscience collec-
tive ou de l'organisationconomique.
Comme on doit s'y attendre, ia statistique morale et l'au-
thropotogio criminelle ont, jusqu' une date trs rcente, vcu
dans un tat d'isolement. Nanmoins il est ais de voir u
quei point elles se compltent.
Sans le concours de la statistique morale, l'anthropologie
criminelte serait une tude biologique ou psychologique
dpourvue d'intrt social. Mais l'tude du taux suciat des
crimes appuye sur ta comparaison de ta criminalit mascu'
line a celle des femmes, de la criminalit des enfants u celle
des adultes, de l'homicide au suicide, revte l'existence de
facteurs sociaux gnrateurs du criminel, facleurs qui
chapperaient au pur aulhropologiste et dont !a rvlation
t'oblige s'occuper des milieux sociaux non moins que de
l'organisationindividuelle ou du climat.
Ku revanche, le pur statisticien voyant le crime et l'accrois-
sement du taux des crimes perdre tout caractre accidentel
est expos soit a y voir un fait normal et invitable, soit u
recourir un critre subjectif pour les distinguer des faits
anormaux. L'anthropologie crimineHe en rattachant te crime
ta conduite d'un homme anormal fournit au contraire un
critre scientifique de cette distinction. La constance des
crimes et surtout leur accroissement revtent donc quoique
dissolution sociale partielle ou genemte sans taquette tes
milieux o se trouve l'homme criminel n'existent pas.
Actuellement, le premier de ces dangers est pour t'avenir
de la sociologie criminelle beaucoup plus redoutable tlue
l'autre. On n'a gure song a classer te crime au nombre dt's
faits sociaux normaux. M. Durkhcim a attiro)'' le caractre
normal du couple form par le crime et la peine, ce qui est
tout diffrent. Autre chose, parler, comme a fait Lombroso,
des bienfaits du crime, autre chose, soutenir qu'une socit
o se produisent des infractions aux rgles sociales n'est pas
pour cela anormale, si ces infractions sont rprimes, tandis
qu'une socit sans relies pnates serait par l mme une
socit indtermine.
Au contraire, l'anthropologie, telle que Lombroso s'est
eforcde h) constituer, risquait d'isoler le problme crimino-
logique et le probteme sociologique. Si le criminel est uu
type anatomique, la sociotogie n'a pas comptence pour ftu'
dier. Mais la thorie lombrosieune, purement ddnetive sous
une apparence de fidlit la mthode exprimentate, issue
visiblement de trois sources .ta phrnologie de Gall modifie
par Comte, ta thorie darwinienne do ta variabilit des types,
enuu ta doctrine de Maudstey atHrmaut l'existenced'une zone
mitoyenne entre le fou et t'homme normal) a vu peu peu
ses prmisses t'abandonner. L'ide que le dveloppement des
sentiments altruistes dpend de la conformation du cerveau
tait dj bien peu scientifique. L'cole tombrosienne a du
renoncer dfinir le cerveau et le crne du criminel. L'ide
qu'un type est chose instable, que les caractresdu typesont
exceptionnellement ralises chez les individus est une con-
clusion dduite bien tmrairement du darwinisme, bienetoi-
gnee en tout cas de l'esprit du transformisme contemporain,
et cependant l'cole tombrosienne ne pourrait justifier l'exis-
tence d'un type criminel sans t'invoquer. Emin, rapprocher
le fou moral et l'homme primitif sans autre preuve quetafai*
blesse relative du pouvoir d'arrt chez celui-ci tait un dfi
toute espce de mthode. Aussi l'assimilation du criminel
moderne a t'homme prhistorique, au sauvage, u l'enfant
et la femme a-t-elle reu de l'observation des dmentis si
muttiptis et si nergiques qu'une sorte de dsarroi se mani-
feste aujourd'hui daus les rangs de l'cole italienne. Une
transformation dont tes principaux auteurs sont Ferrero.
Sighele, Ciraoto-ttamnett,Florian, Cavaglieri, Ferriani, etc.,
est sous nos yeux en voie de se produire.
Dans les lignes qui vont suivre, nous tudierons la tendance
qui porte ta statistique et l'anthropologie criminetto l'une
vers l'autre. Xous la verrous concider avec la spcification
des problmes et des tudes.
!.STAT)S'r)~t.'H Mt))<A).K

A. ~<OMt<f/<
At-'GMTR BOSCO. L'Omicidio negli Stati Untti d'Ame-
rioa. (/oM<(-<(/e a.f A'/M~-L'MM.) Extrait du ~M~c<:M
/Hf<'fHa7<bH< (le ~/Yt<~t<c, t. X. Home, Hertero, 1897,
T2 pages.

L'auteur s'est propos decomptterctde confirmer par une


tude de l'homicide aux tats-Unis les conclusions de
l'ouvrage bien connu d'Knrico Fcrri La tacite ici tait
par-
ticu~retneutdifueite.Lcsgouvememeatsdes ditMreats tats
de t'Uuiou ne pubHeut pas de comptes rendus comme ou le
fait en Europe. La tfgistation peuaie, qui est celle de
l'Angleterre tfgretneut modifie, n'est pas exactonent ta
mme dans tous les tats. M. Bosco s'est appuy sur le
recensement des prisons fait en juin )890 et sur do nom-
breuses tudes locales.
Le )'juin t8!K) les prisons des dinerents tats et territoires
de t'L'nioa contenaient 7.S5) dtenus pour homicide, soit
7 p. iUU des dtenus de toute espce. On
ne seioigue pas trop
de la re!)Ht6 en valuant 7.0u0 le nombre des homicides
annuels. Le taux est donc de )3 par KM).OM) habitants H
est donc plus lev aux tats-t'nis que chez les uations
europennes tes plus prouves, t'ttatie, i'Espaguo et la
Hongrie. L'ttatie qui marche en tcte ne compte que ))omi-
cides par 00.000 habitants.
t
~!ais l'Union amricaine prsente en reaiit6 trois socits
distinctes, ruNp dans les tats de t'Hst, )a deuxime dans les
tats du Sud, la troisime dans les tats et les territoires de
l'Ouest. Dans la premire subsistent les traditions dos fonda-
teurs de l'Union. L'homicide n'y est pas plus frquent qu'en
Europe i) dcrot au Massachusets. Dans les tats du Sud, le
taux du meurtre est trs lev grce la prsence de ta race
noire. Les tats de l'Ouest nous offrent le tableau d'une
socit en formation, socit forme d'emigrants europens
et chinois et o l'autorit politique et judiciaire est trs
faiblement constitue.

(1) L'OtoichtM) nell' Antmputogia crixtiMh'. Cun Allante antropolo


?.
<!)t:o-!i()tti<(i);u. Turit), BucM Mre!
Dans les tats atlantiques du Nord, qui comprennent les
vieilles colonies de la ~ouvette-Angteterre, il y avait en i8M)
six prisonniers homicidns pour tUu.OOt) habitants. Co chiure
tait deux fuis plus fort dans les tats atlantiques du Sud
il monte enfin fi :? pour ttJO.OOO tiabitants dans les tats de
l'Ouest.
Plus que t'Murope, les tats-L'nis prsentent l'union du
progrs conomique et de ta rgression morale. Ils soutirent
de la criminaiite de deux phases sociales distinctes, de la
criminatit astucieuse des socits trs civilises et de la
criminatite sanglante des socits primitives.
L'tiuteui- note avec finesse le rapport de la rgression
morale et de l'immigration. L'immigr a rompu les liens de
famille, abandonne la tradition nationaie. Toujours a la
recherche d'uu travail rmunrateur, il lie russit que diffi-
cilement contracter du nouvelles habitudes morales. Hieu
d'tonnant si les homif'ides sont ptus communs parmi les
immigres que parmi ies Amricains d'origine. On compte
)') dtenus pour homicide sur iOO.UOO habitants de cette
dernire catgorie, alors qu'il y en a )4 sur lOu.OM) de la
premire.
Avec ia rgression morate concide une rgression juri-
dique dont le lynchage est ia consquence. Ce mode de
dfense contre le crime survit partout a ses conditions
d'apparition et devient iui-meme un crime. Tandis que la
lgislation accorde aux accuss des garanties presque exces-
sives, la vengeance populaire retahtit une procdure som-
maire et souvent fait prcder l'excution de tortures
prcaiabtes. La repartitio)) du iynchitge n'est d'ailleurs nuttc-
ment ia mme que celle de l'homicide. < Des ~i7 lynchages
nots dans ia statistique de 18~0, aucun ne fut commis dans
les Htats atlantiques du Xord; le plus grand nombre ~4)
appartient aux tats mridionaux: le reste aux tats du
Ceutre (i:~ et de i'Ouest (i t.. Le tynchage est donc un pi-
sode de la lutte entre ta race blanche et lit race noire.
Bien que M. tbsco partage tes vues gnrtes de l'cole
italienne et qu'il admette la distinction du crimiuet-ne et du
crimine) d'occasion, sa grande conscience scientifique l'amne
il attribuer l'homicide amricain presque exclusivementaux
facteurs sociaux. Sans doute la participation frquente des
ngres il cette forme du crime confirme ses yeux les vues
de Ferri. Toutefois il reconnait que mme parmi eux les
facteurs conomiques concourent, avec ta race, la situation
des ueKt'es uyant constamment empire depuis l'mancipa-
tion.
On peut esprer que les t~tats de l't.'nion perfectionneront
tour statistique f'rimitx'tte; en attendant, il tait difficile de
tirer meilleur parti que ne t'i) fait M. Hosco des renseigne-
ments qui lui taient oterts.

H. /.<* ~M/fff/c.

HMn.): mjRKtIHIM. Le suicide. M'/f </<' <M';<~(f.


) vol. itt-X' de la ~f~tM/'tf < ;tf7'M'<' cf~)<7<)~oru)f,
pages. t'aris, Flix .Ucau, 1897.
M. i)urkhei)n reciterche pour quelles causes le taux du sui-
cide varie d'une socit n une autre et d'un moment du ta vie
d'une socit6 a un antre moment. II est amne conclure il
l'existence de fort'cs coHecth'es assez reeiies. assez puis-
santes pour ithonr l'instinct de eouservittion personneUechez
UM certait) nombre d'individus. C'est ainsi qu'une simple
monographie faite mthodiquement lui permet de proposer
une solution au problme qui partage tes socioto~ues it
l'heure actuelle et peut se formntcr ainsi Le fait social
consistc-t-it dans l'action pins ou moins intense et varie des
individus les uns sur les autres ou dans l'action du groupe
sur l'individu ?
Le taux social des suicides varie d'un peuple a un autre.
C'est l un fait inconteste. Comment l'expliquer Tiendra-
t-on compte des motifs individuels qu'enregistrent les
bureaux de statistique? Impossible puisque, lu o croit le
uomk)'e des suicides, ia contribution de chaque motif reste
d'anne en anne proportionnellement la mme. Admettra-
t-on l'action croissante d'une /b<' sM<f/f'/ Ce ne pourrait
tre qu'une monojnanie. Or la monomanie suppose des facu)-;
ts mentales indpendantes. H faut donc chercher des causes;
gnrtes et l'on est amen choisir entre les causes phy-
siques, les causes biologiques et les causes sociales. L'auteur
de la monographiela plus clbre, Morsetli, invoque les pre-
mires qu'il ramue deux, la race et le climat. M. Durkheim
s'attache dmontrerdans la premire partie de son travail
que le taux des suicides ne varie pas rgulirement comme
le facteur ethnique ni comme la temprature. D'o il suit que,
ou bien U faut t'noncer tt en rendre compte, ou il faut
l'expliquer par des causes sociales.
Mais ou sait que la dfinition des facteurs sociaux partage
les sociologues, notamment eu France. Les uns n'admettent
en dernire analyse que i'innuenf'e de l'individu sur l'indi.
j vidu et ramnent avec Tarde cette influence a l'imitation.
.) Les autres reconnaissent une action rellement exerce par
le groupe sur l'individu, action directrice ou coercitive,
mdiate ou immdiate.
M. Ourhheim soumet un examen approfondi lu thorie
sociotogique de l'imitation ~)iv. I, ch. n-). i) s'attache d'abord
ia distinguer dp plusieurs autres faits avec lesqueis ou
l'a confondue, savoir )* la tendance des membres "m
groupe a penser t'unisson; 2" le besoin qui pousse nn it.di-
vidu & se mettre en harmonie avec la socit dont il fait partie.
Agir par crainte ou respect (te l'opinion, ce n'est nuHement
agir par imitation. L'imitation c'est la reproduction automa-
t tique d'un acte. < t) y a imitation quand uu acte a pour ant-
cdent immt'diat la reprsentation d'un acte som))tHb!e.
antrieurement accompli par autrui, sans que, entre cette
reprsentation et t'executiou. s'intcrcaie aucune opration
intellectuelle,expHcitc ou implicite, portant sur les caractres
intrinsques de i'hnitation p. t)~!
Sans doute il y aurait beaucoup :') dire sur cette dnnition
restrictive; les thoriciens de l'imitation, Bche: Bagehot.
Tarde, ont seulement entendu dsigner le fait trs simple
grce auquel l'honxne est mr<a~ des sa premire enfance
et soumis spontanment l'autorit du groupe. Toutefois il
tait bon d'obliger cette cole :'t devenir moins uaitaterate et
la crititjuo de notre auteur y servira sans aucun doute.
L'imitation ainsi dfinie, M. Durkheim se refuse & admettre
qu'ette rende compte le moins du monde du taux social des
s sides. Si cette influence existe, c'est surtout dans ta rpar-
tition gographique des suicides qu'elle doit tre sensible.
"C'est donc la carte qu'il faut consulter, mais il faut t'inter-
roger vfc mthode. Par exemple, est-il vrai que le suicide
se tran~nette des villes aux campagnes, des grandes villes
aux petites, et qu'en France il rayonne de la capitale aux
dpartements? Cette opinion a eu pour elle l'autorit desstatis-
ticiens de premierordre. < Cnerry disait que si l'on part d'uu
point quelconque de la priphrie du pays (Marseille except)
en se dirigeant vers la capitale, on voit les suicides se mul-
tiplier de plus en ptus mesure qu'on s'en rapproche, mais
si ta carte par dpartements pouvait donner une apparence
de raison cette interprtation, la carte par arrondissements
lui te tout fondement. H se trouve en effet que ta Seine a un
taux de suicides moindre que tous les arrondissements cir-
couvoisius. Htte eu compte seulement 471 par million d'habi-
tants, taudis que Couiommicrs en a Sut); Versaittes, 3)4;
Melun, 5t8; Meaux, 8~; Corbeii, SM); Pontoise, Stit; Pro-
vins, S6~. Mme les arrondissements cinunpenois dpassent
de beaucoup ceux qui touchent te plus ia Seine ttcimsa Il
~Ut suicides; Epernay, !i~; Arcis-sur-Ant'e, !!M; Cttateau-
Thierry, 62H. DejH dans son tude sur le Stu'ftWf ft< .S'f'<t)e.c<-
.)/am< ie docteur Leroy signalait avec tonnement ce fait que
l'arrondissement de Meaux comptait relativement ptus de
suicides que ia Seine (p. H3).*
Uref, ie suicide, tuin de se disposer ptus ou moins excen-
triqnement autour de certains tbyers & partir desquets il irait
eu se dgradant progressivement, se prsente an contraire
par grandes masses it peu prs homognes (mais a peu prs
seulement; et dpourvues de tout nuyau centrt. Une telle
configuration n'a donc rien qui dt'cete t'influence do l'imita-
tion. Jamais un pays que des conditions particulires prdis.
posent spcialement au suicide n'impose, par le seul prestige
de l'exemple, son penchant aux pays voisins, si ces mmes
conditions ou d'autres semhiabtes ne s'y trouvent pas au
mme degr.. 'p. t~-)~).
Mais sufUt-ii de conclure que le taux social des suicides
curie avec l'action du groupe sur l'individu? Xo (aut-ii pas
cunuattre la nature de cette action N'y a-t-it pas des classes
diffrentes de suicides" t'robiemc impossible u lucider Les
statisticiens ont etabti que dans toute l'Europe, les militaires
se suicident ptus que tes civits, les protestants plus que les
catholiques et tes chrtiens plus que les isralites, les divorcs
et les clibataires plus que les ~poux, les poux sans enfants
plus que les pres et tes mres de nombreuses familles. X'est-
on pas en droit de chercher si le suicide du militaire est de
m~me nature que celui du protestant, le suicide du divorc
de mme nature que celui de t'pouse sans enfants?
M. Durkheim, daus une tude publie en 1888 par !a /<<')')'
p/t<<<Mop/t~*, avait cru pouvoir formuler une loi empirique
c'est que, en France au moins, le suicideest en raison inverse
de la densit familiale. Le recensement de t891 lui fournit
uue confirmation clatante do cette tt. La carte de la nata-
lit et ta carte du suicide se correspondent en ce sens qu'
une natalit faible correspond uu taux lev des morts volon-
taires.
liuseiiield, tudiant te suicide dans les armes europennes.
avait montre une inversion singulire du suicide militaire et
du suicide civil. Le coefficient d'a~ravation du suicide mili-
taire est d'autant plus faibte que t'arme se recrute dans une
population plus incline au suicide. M. Durkheim est conduit
par un examen nouveau des donnes statistiques & confirmer
ce n'suttat.
Chacun sait avec quelle rigueur de preuves Hertitton il
tabli ta correspondanceuniverselle du suicide et du divorce.
Mais les populations ou le divorce est frquent, ht Suisse
protestante, l'Allemagne, ie Danemark, ont presque toujours
une forte natalit.
Le suicide du divorce est donc d'autre nature que celui de
l'poux sans enfants le suicide de l'un et de l'autre difJere
du suicide tnititaire.
Mais ceci peut tre gnralise.
A quelle cause attribuer te suicide du tniiitaire? Au de~oU
du service? au ciibat? etc. Ces explications superneieites
tombent devant un (ait c'est que la contribution des ofliciers
et des sous-otticiersest plus grande que celle des soldats, celle
des vieux sulduts ptus grande ([ue celle des jeunes, celle des
armes d'otite plus grande que celle de ta ligne. Le suicide est
doue ici une consquence de l'esprit militaire qui porte les
hommes a tenir peu de compte de l'individu et do la vie indi-
viduelle. Mais la morale militaire est une survivance; elle
ressemble u celle des socits primitives, caracteriso aussi
par l'ctfacementde l'individu devant te sroupe. U faut doue
chercher si le suicide n'est pas frquent dans les socits de
ce ~enre. Or, nombre de tribus sauvages imposent leurs
vieittards la mort volontaire; il en tait de mme chez les
Ibres et les Germains d'un autre cte, l'Inde est la patrie
d'un suicide rituel, frquent surtout dans la secte ja'miste.
Dans un cas la tribu exige dans son intrt le sacrifice de
membres impuissants la servir dans l'autre, la conscience
religieuse est assez forte pour annuler l'instinct de conserva-
tion. Appelons altruisme l'absorption de l'individu par le
groupe et nous constatons l'existence d'un .'t'f a~'(.~<
N'en resulte-t-il pas que l'on peut faire un seul groupe des
suicides qui accompagnent la faible intgration de ta famille
et la (aibte intgration de t't~gtisc? Si t'epoux sans enfants se
suicide plus frquemment <tue le pre, et le protestant plus
que le cnlholique, n'est-ce pas parce que t'ego'fsme. te cuite
exagr du moi, tc~/y./fV~H~ pousse t'extrOne prt'vaut cttez
eux sur t'attruistne? L'auteur n'hsite pas M le penser. La
preuve avance par lui est que l'intgration sociale sous
toutes les formes prserve du suicide, tandis que l'accroisse-
ment du taux des morts volontaires concide partout avec la
prsence des symptmes qui attestent le dectin do ta tradi-
tion. Les rvolutions ont un ellet singulier loin de faire
prendre la vie en dgot, elles repriment ta tendance nu sui-
cide et d'autant plus qu'elles sout ptus intenses et plus
durables. Un t'a observ en France eu t8:-iu, en ~8~8 et m~me
en 18'n et eu 't8!M), annes de grandes crises politiques; on
t'a observ egatentont en Attemagne et en Danemark en t8t8.
La vie publique envahit alors davantage le champ de ta cons-
cience iodividuette, la vie du parti est au maximum et la vie
de l'individu s'identifie H cette du parti. Dans un m~me t~tat
o toutes choses sont exactement comparables, en A-ttemagne,
dans ta Suisse allemande et romaude, en Autriche, les pro-
testants se tuent partout plus que les catholiques quoique le
protestantisme ne condamne pas moins le suicide que son
rival. Mais il y a une glise protestante beaucoup plus tradi-
tionuatiste et plus fortement intgre que les autres, c'est
l'anglicanisme. Le taux du suicide n'y est pas plus lev que
dans beaucoup de pays catholiques, presque moiti moins
lev qu'en France. X'est-ce pas une preuve que la tendance
au suicide est rprime par une tradition organise ? En voici
une autre preuve le suicide croit universellement comme la
tendance a) instruction instruction primaire et suicide sont
partout deux termes corrlatifs. Les populations protestantes
frquententbeaucoup ptm "cole que les populations catho-
liques et on sait quelle propension plus forte elles ont au
suicide. L'Italie contemporaine nous montre partout le
nombre des morts vot~ taires en progression l o celui des
illettrs est en diminution. Le savoir inspire t-it donc l'hor-
reur de la vie? Heponse bien superficielle! La vrit est que
le got de l'instruction ne prend de force que ta o ta tradi-
tion religieuse s'unaibtit. Ne trouvant plus hors do lui une
rgle suffisante, l'individu doit chercher s'en taire une. La
science seule le lui permet.
Voici donc un type goste cOt d'un type altruiste, un
courant <!)(')Ww/('M'' propre aux socits suprieures, bien dis-
tinct de celui qui s'observe chez les sauvages, car il ne peut
apparattre sans que l'autre soit dj trs ailaib! Cette dua-
Ht des types sumt-eHe rendre compte de toutes les
varits? Le suicide de l'poux divorc est-il un suicide
goste? Sans doute il rsulte d'un afaibiissemeut de la vie
sociale. H faut toutefois faire intervenir un nouveau facteur,
le drglement, r<!NOM<t'. Le suicide du divorc doit tre rap-
proch de celui du failli, de celui de l'industriel, patron ou
ouvrier, prouv par une crise, bref du suicide qui procde
de causes conomiques. Le rapprochement peut sembler bien
artificiel. L'auteur le justifie t'aide d'une conception pro-
fonde du rle des institutions sociales, conception, fort clas-
sique eu somme. Toute institution, toute rgle sociale est
utile parce qu'clle nous prserve du drglement des dsirs. 1
Elle nous afiranehit en nous disciplinant. Le dsir sexuel et
Je dsir des richesses peuvent s'tendre i'inuni ds que rien t

ne les contraint. Le mariage rgle t'uu, d'autant mieux que


la rgle conjugnie est plus inflexible, mieux sanctionne par
les murs et t'opiniou. Le dsir des richesses est rgt par
la hirarchie des fonctions, seton laquelle un certain degr
de bien-tre est attribu a une certaine forme de travail. Le
divorce, qui, d'ailleurs, est un effet, non une cause, et fanran-
chissement total des forces conomiques dtruisent cette
doubte discipline. L'incertitude, l'impuissance des seules
forces individuellesH eontenirdes passions que tout surexcite
dterminent un mcontentementqui accroit les chances de <
suicide. A t'anomie conjugale et conomique rpond donc
un troisime courant suieidogne assex dinrent du courant
goste.
D'aitteurs ta socit peut agir sur l'individu de trois faons )
iette attire elle
ses sentiments, c'est l'altruisme elle dter-
mine une rpulsion du sentiment personne), c'est l'gosme;
enfin elle discipline plus ou moins ses penchants en ajoutant
l'inhibition individuette une inhibition collective infiniment
plus forte. Les trois types de suicides rpondent ces trois
modes de l'action sociale.
En rsulte t-it que le suicide soit un fait normal ? qu'il y
ait, comme l'estime Ferri, un droit de l'individu renoncer
la vie?
M. Durttheim distingue entre l'existence du suicide et l'ac-
croisement du taux des suicides. L'altruisme, le cutte de la
personnalit, enfin la lutte des hommes do progrs contre les
rgtes traditionnettes et a la suite de cette lutte une certaine
anomie sont choses normales; il n'est pas de morale sociale
qui ne les suppose. Donc, de (aibtes courants suicidognes ne
peuvent manquer d'exister dans t'tat social le plus rgulier.
Le suicide en effet peut se rattacher par une srie d'anneaux
aux motifs d'action les plus touabtes, le dvouement la
patrie, la piti, )o sentiment de t'honneur. tt n'en faut pas/
conclure que le suicide soit un droit de l'homme sur lui
mme. Autre chose t'gosmo, autre chose le cuite do ia per-t
sonnalit, culte qui s'adresse !a nature humaine abstraite-
ment considre.
Bien qu'il y ait en gnerai une inversion du suicide et de
t'homicide, il ne faut donc pas se hter do voir dans te suicide
un fait bienfaisant. 1)'ailleurs il y a une classe de suicides
dont l'accroissementest parattete celui de l'homicide, c'est
le suicide auomique. < L'anomie en effet donne naissance
un tat d'exaspration et de lassitude irrite qui peut, selon
les circonstances, se tourner contre le sujet lui-mme ou
contre autrui. Voil pourquoi, aujourd'hui, un certain
paratitisme entre le dveloppement de t'homicide et celui
du suicide se rencontre surtout dans les grands centres et
dans les rgions de civilisation intense. C'est que l'anomie y
est l'tat aigu (p. 408
Est-il vrai que l'aggravation du taux des suicides soit la
ranon de la civilisation? L'auteur nous donne une raison
srieuse de ne pas le croire. A Rome, au moment o l'em-
pire atteignit son apoge, on vit galement se produire une
vritable hcatombe de morts volontaires. On aurait donc pu
soutenir alors, comme maintenant,que c'tait le prix du dve-
loppement intellectuel auquel on tait parvenu et que c'est
une loi des peuples cultives de fournir au suicide un plus
grand nombre de victimes. Mais la suite de l'histoire a montr
combien une telle induction et t peu fonde car cette
pidmie de suicides ne dura qu'un temps tandis que la cul-
ture romaine a survcu (p. 42t).
Quel remde appliquer au mal ? H faut considrer que l'ag-
gravation est due, moins au progrs qu'aux conditions, peut-
tre anormales, dans lesquelles il s'effectue de nos jours.
Inutile de songer au rtablissement des peines on usage au

moyen ge, bien que l'opinion soit prte & accepter que qui-
conque se soustrait a ses devoirs soit trappe dans ses droits
correspondants. C'est le courant suicido~ene qu'it faut endi-
guer. Se confiera-t-on a lu puissance de l'ducation ? !.e plus
souvent on lui attribue une efficacit qu'elle ne saurait avoir.
Elle n'est que t'imite et te renct de lit socit. Elle l'imite
et la reproduit en raccourci; elle ne la cre pas. L'ducation
est saine quand les peu pies sont eux-mmes a Ftt de
sant mais eUe se corrompt avec eux sans pouvoir se modi-
fier d'etto-m~me. Si le miiicu mora! est vicie, comme )es
mattrcs eux-m'~mes y vivent, ils ne peuvent pas n'en pas tre
pntres. Comment alors imprimeraient-iis ceux qu'ils for-
ment une orientation difereute lie celle qu'ils ont reue''.
Chaque gnration nouvelle est leve pur sa devancire, il
faut donc que celle-ci s'amende pour amendercelle qui la suit.
On tourne dans un cercle ~p. 4~).
Le suicide altruiste va disparaissant, mme de t'arme; le
suicide goste et le suicide anomique deviennent plus fr-
quents. Kux seuts appettent un remde. Il n'y en a qu'un c'est
de mieux rattacher l'individu a la socit. Mais taquette ?
Sera-ce :'t t'r~tiso ? Mais ii faudrait demander te rtablisse-
ment des retirions les ptus archaques, tettesque le judasme.
Sera-ce it la socit politique f Mais tt~tat est aussi impuis-
sant qu'il est envahissant.
restent le groupe professiounct et ta famille. It faudrait
restaurer, non !a corporation de t'ancien rgime, mais une
corporation coextensiye a ta nation ette-meme. it faut aussi
limiter la facult de divorcer tout en mancipant la femme,
c'est--dire en lui ouvrant de nouvettes sphres d'activit.
L'auteur termine en montrant quelle porte sociotogique
peut avoir une monographie du suicide; ajoutons la con-
dition qu'elle soit faite par un sociologue tel que lui.
Ce iivre est donc un de ceux qui justifiant toutes les esp-
rances que les spectateurs ectaires de la grande crise que
nous traversons fondent sur la science sociale. Les partis (et
parfois aussi les individus) se servent de la science sociale,
mais e!ie n'en sert aucun. M. Uurkhehn le prouve. Socialistes,
conomistes sont par lui renvoys dos dos avec un brevet
d'incomptence. Que reste-t-il de la thse de l'antagonisme
des classes, considr comme une loi fondamentale de la
structure sociale s'il est prouv que le rgime de la concur-
rence ittimite porte atteinte au bonheur et l'existence de
la classe capitaliste plus encore qu' ceux du prottariat Or
cette thse n'est-elle pas, et plus que jamais, le fond du socia-
lisme dit scientifique ? Mais comment cetebrer, avec tes vieux
ftdetes de l'cole de Manchester, l'mancipation des forces
conomiques si l'ou voit it quel point ces forces dechatuees
peuvent <Ut'e homicides, il quel point la chasse a ta richesse
engendre le dgot de l'existence?
Nanmoins. peut-tre M. tJurkiteim a-t-it compromis une
ttiorie fconde en la poussant il l'extrme et en la rendant
exclusive. Il existe des forces collectives et ta frquence dos
suicides exprime, soit ta pre~euce, soit plus souvent l'absence
de ces forces. Mais pourquoi parterde f0!wt -<M'~M!/
L'ide nous semble plus coutestuble.encore que l'expression.
(jardons-tMus des metapttores soctotogiqnes: Celle de t'orga-
nistno social nous a (ait assez de mat et je frmis l'ide do
l'abus que certains pourraient faire des courants gnrateurs
de faits sociaux. J'admets volontiers que le suicide religieux
et militaire puisse tre d a une impulsion collective au sacri-
lice (lui dans de certaines conditions serait dvie, mais com-
ment et pourquoi t'anaibtissement de la vie sociale s'expri-
merait-it par ia cration d'un courant collectif assez fort pour
abolir chez certains l'instinct de conservation? K'est-it pas
plus vraisemblable d'admettre que cet instinct s'est identifie
avec les conditions d'existence des groupes sociaux et que,
celles-ci venant manquer, l'instinct de conservation person-
neite se trouve a son tour allaibli, d'autant plus qu'il est phy-
siotogiquement plus (aibie.-
Au lieu d'expliquer les varits du suicide par diffrents
courants suicido~nes.j'inclinerais les rattachera des types
psychologiques. Pour employer la nomenclature de M. Hibot,
le suicide militaire semble tre un sensitif, comme l'est si
souveut l'homicide; le suicide goste est un apathique le
suicide anomiqae, un instable. C'est ta sans doute une simple
vue de l'esprit; elle a l'avantage de laisser une question
ouverte.
Le courant suicidogene limin et le facteur individuel
rtabli, t'ieu n'empche d'accorder les deux points de vue si
(ecoudsdontona fait sans grande raison commetesdeux termes
d'une antithse, j'entends l'action individuelle et l'action col-
lective. J'y vois deux facteurs do toute vie sociale et ne russis
pas comprendre ce que l'explication sociologique gagne en
clart et eu force ce que t'un des deux soit nie. L'imitation
(qui d'ailleurs n'est pas ta seule forme de l'action qu'un indi*
vidu exerce sur un autre) n'est pas l'unique cause des varia-
tions du taux social des suicides, bref le suicide u'est pus une
mode, bieu qu'il soit quetquefois uue coututno. M. Durkheim a
mis vigoureusemeutce point eu lumire. ~eamnoius uut Me se
suicide s'il n'est imitateur uu plus haut degr que t'homme
moyeu, car l'imitation est un rftexe psychique dont i'inteu-
site rpond il la faiblesse de la volont.
Aiious plus loin. SI le suicide primitif, altruiste, n'avait
pas exist et si la socit ne recevait pus de son pass uu
hritage de survivances, vraisembiabiemeutle suicide goste
n'existerait pas. Or le suicide uuorniquo ne parait gure se
dvelopper que dans des miiieux qui ont connu le suicide
goste. Pourquoi Fegosme et t'anotnie ne ruveitieraient-its
pas l'instinct de conservation? Pourquoi cet instinct, s'il
n'avait t affaibli par la constitution morale des premires
socits ne suffimit-ii pas contenir tes drglements du sen-
timent personnei. do i'amour de la proprit et de l'iustinct
sexuel, sentiments qui sont beaucoup plus faibles? Cr par
les exigences de la vie sauvage, le suicide est devenu ptus
tard un moyen de prolonger i'extase religieuse les groupes
militaires est ont hrite et l'ont inocul ia socit civile; it
est devenu l'usage des instables et des neurasthniques uu
moyen de rsoudre les difficults de l'existence.
Remarquons-ie, ces critiques ae peuvent aiaibiir en rien
la porte pratique de t'ouvre de M. Durkheint. Il a prouv
que ht sociologie pouvait aborder les probietnes les plus genc-
raux par l metne qu'elle tudiait metitodiquement un fait
dtermine, 11 a prouve aussi que la statistique morale permet
l'analyse des soutrancesde la socit et eu rvle les dsordres
qui sait ia lire. La sociologie que la pliilosophie gnrale
tend trop absorber, au moins en France, avait besoin de
cette forte leon.

C. /m)jy~/t'<M.
A. NtCEFOM). La mecc&nlca. della migrMione e la
crimina.tita (~.f m<MH)t' </<; r~M/f/raftOH et la ('t-<M<fH<<~
in St'xo/ p<M)~'('<t, 7 anne, n" 7, fvrier 1897.
Le mmoire de Xiceforo comprend deux parties, l'une est
une thorie de la lutte des classes propos de rmigration,
l'autre justifie en quelques pages le titre de l'article. La pre-
miere est au-dessous de lu critique scientifique c'est une
(euvro de parti dont nous n'avons pus & parler. Dans la se-
conde l'auteur montre t" qu'a une population clairseme,
comme elle l'est en Sardaigne, ou Sicile et dans ta campagne
romaine correspond le brigandage qu' une population
agglomre, surabondaute n'pondront non seulement une
forte mortalit infantiie, mais encore de nombreux attentats
commis sans violence contre ta proprit.
En Italie s'observe uue inversion des poursuites judiciaires
et de l'migration. < La courbe de t'cmigration est eu raison
inverse de la courbe des faits dnonces uux juridictions p-
nales. En t880, t'emi(;ration descend t33 pour tOO.MMbabi.
tants, et nous voyons le nombre dos dlits dnonces crottre
jusqu' tO~.Ni pour 100.000 habitants: en 1881 t'emigration
monte M t4<! et les dlits descendent 0~9,48; eu t8M i'emi.
gration monte 238, tes dlits descendent t)15.37; en 1883
t'6migration donne 238, les dlits tombent 897,1~ en i884
t'emigration descend 2(JU, les dlits toutefois, au lieu de
remonter, descendent aussi 862.62; en t885 immigration
atteint ~6~, les dciits tombent 8)7,68.. Etc.
La poUtique traditionnelle qui est une politique de classes
a pour fin la formation d'une population surabondante.A
l'avenir, on devra tendre & un quilibre entre la population
et les salaires, quilibre du a une natalit modre et une
emigration bien conduite.

H. ).XTtnU))'<H.Ot:)H ':)t))t)Xt:t.t.K
A. Le crime f( ~M races.
CORRE. L'ethnographie criminelle d'aprs les obser-
vations et les statistiques judiciaires recueiUies
dans tes colonies framftises, ) vo). iu 8, 5~1 pages.
Paris, Reiuwtttd.
D'aprs l'hypothse tombrosienne, le criminel reproduit
les caractres biologiques et psychologiques des anctres de
t'homme actuel, animaux ou hotnmes prhistoriques. C'est
donc dans les races intrieures qu'on devrait l'observer le
plus souvent. Aussi l'cole italienne cousidro-t-eHe la race
comme un facteur important de la criminalit homicide.
On sait que Ferd explique la frquence ingale de t'honu-
cide dans les divers pays d'Europe par une dinrenee d'apti-
tude des Lutins, des Slaves et des Cermaias a la criminalit
sanglante. Au contraire, en France, l'cole de Lyou rejette
tout facteur qui n'est pi's proprement social. Le docteur A.
Corre a pens qu'une tude de la criminatit dans tcsdiverses
colouies franaises, que su qualit de mdecin de la marine
lui a permis d'tudier toutes, iuaugurerait une mthode apte
prparer )a synthse do ces thories exclusives. Quoique
ce livre date de 18!~ et sorte par M mme du cadre qui nous
est impose, nous n'hsitons pas le faire figurer ici & cause
du nombre et de l'importance des lments qu'il introduit
dans ta discussion.
Les colonies franaises, mente si on nglige l'Algrie et la
Tunisie, comprennent des chantillons des principales races
humaines. Mlansiens et Canaques de la Nouvette-Catdonie,
Kegrcs du Uahotuey et du S<'n'a), reuhts et Toukoutors du
Soudan, Baatous du Congo, Matais de Mada~sear, Dravi-
diens de i'fnde, Cambodgiens, Laotiens, Annamites. Tonki-
nois et Chinois de Hudc-Chine, aucun des degrs de t'echeUe
anthropnio~ique ne fuit dfaut. Il en est ainsi des civitisa-
tions. Ptusieurseotonies, les Antitiesetia Meunion, prolou-
geut la civilisation de la metropoie en Asie, ce sont les
vieilles eiviiisations, celle de ia Otine, renetee par celle de
t'Anuam, celle de t'tnde, en (jjueique sorte momifie au Cam-
bodge. Au Sene~ai et au Soudan, la culture musulmane se
montre ente sur la barbarie noire; enfin, au Congo et daus
la \nuvettc-C:)tedonie, on a sous tes yeux les divers degrs
de t'ctat sauvage.
t'ne t':tude consciencieuse de ta criminalit dans ces divers
milieux permet donc de dcouvrir lit solution du problme
pos par t'anthmpntogie evotutionnistc. Les divers degrs de
la criminalit (criminaiite vioteate et criminalit astucieuse.
ollenses aux personnes et otteuses aux proprits, associa-
tions de nmtfaitenrs et criminalit individuelle)rpondent-its
des stades sociuux dinerents? xpriment-its au contraire
des troubles plus ou moins profonds qui accompagneraient
l'evotution sociale'! Jusqu'ici, grce l'ascendant de l'cule
italienne, ta premire solution a seule t discute, car cette
cole est loin, comme parat le penser M. Corre, de nier le
dterminisme social du crime. Ferri a maintes fois exprim
sur ce point la pense de tous ses collaborateurs, mais te
dterminisme social tel qu'il le conoit n'est pas autre chose
qu'un milieu conomique voluant de la concurrence brutale
la concurrence attnue. M. Corre nous conduit au coutrau'e
& voir dans la criminalit sanglante l'indice
non d'un milieu
social infrieur, mais d'une civilisation profondment
trouble.
L'auteur tudie d'abord les colonies dont la civilisation et
la constitution sociale sont restes trangres celles de la
mtropole; il les examine en suivant un ordre purement go-
graphique (Afrique occidentale, Madagascar et Iles adja-
centes. Indo-Chine, Tahiti et Xouvelle-Caledoniei il tudie
ensuite les colonies assimiles, c'est--dire les Antilles et ta
Nouvelle-Caldonie.
On comprend que nous ne saurions le suivre pas pas. tl
nous sutUra de dire que ces ditrentcs tudes sont claires,
nourries de faits et de donnes statistiques prcieuses, qu'elles

et
sont faites avec une relle impartialit scientifique, d'autant
plus remarquable que l'auteur a visiblement des passions
politiques ardentes dout l'expression fait parfois rup-
tion. Nous devons signaler l'JMtret trs vif des chapitres v
%t vt consacres au Tonkin.
Mais nous avons hte de dgager les rsultats gnraux de
l'uvre.
On peut les ramener a cinq propositions
Il Les races infrieures a celles qui peuplent l'Europe n'ont
pas une aptitude plus grande la criminalit sanglante.
Parmi elles, les plus basses intellectuellement ne sont pas les
plus homicides par exemple, les races civilises de l'indo ont
des peuchunts criminels beaucoup plus dvelopps que les
races noires de l'Afrique et de la Nouvelle-Caldonie.
Ce ne sont pas les dispositions spontanes de la race,
mais bien la lutte des races, fait politique, qui rendent
compte du taux lev de la criminalit au Tonkin et dans les
colonies assimiles.
8 L'volution de la criminalit prsente dans toutes les
colonies franaises, quelque race qu'elles appartiennent,
les mmes caractres que parmi les populations europennes.
C'est partout et toujours la substitutionde la criminalit astu-
cieuse la criminalit sanglante, de l'attentat individuel
l'attentat collectif, du petit dtit multiplie au grand crime
relativement rare.
4"L'exemple et l'action de l'Europen activent t'voluttoa
criminelle des populations indignes sans apporter celles-ci
la moindre amliorationmonde. Militaires, missionnaires, et
fonctionnaires rivalisent d'inHuenco nfaste. Mien mieux,
le Franais emprunte aux populations conquises, notamment
& leurs classes gouvernantes, leurs vices, leurs crimes spci-
fiques et les inocule ia mtropole.
X" L'importance du climat est beaucoup plus grande que
celle de la race. La race colonisante est d'ordinaire mai
adapte au climat de lu colonie, car tandis que ia colonisa-
tiou se fait du Kord au Midi, l'adaptation des races humaines
a des milieux physiques diffrents se fait normalement du
Midi au Xord. Toutefois il n'eu faut pas conclure queia
chaleur dtermine le crime. Loin de l c'est ta saison frache
qui, dans ies colonies franaises, surexcite l'activit sociale et
avec elle la frquence des dlits.
Si ces diverses propositions taient dmontres, les vues
qui ont prvalu jusqu'ici dans l'anthropologie crimineiie
devraient tre considrablement modifies, ou, pour mieux
dire, cette science devrait se fondre dans la sociologie. Kxa-
minons donc les preuves apportes par M. Corre.
1" Une grande ville peupled'hommesde race jaune devrait.
si la thorie de Lomhroso et de Ferri tait conforme aux faits,
donner annuellement un nombre de crimes, notamment un
nombre d'homicides,suprieur celui que fournit une ville
europenne galement peuple. Hano compte ~UO.OuO habi-
tants:, qui sont presque exclusivement Annamites, Chinois ou
Minh-Maongsmtis d'Annamites et de Chinois,. Cette ville est
depuis douze ans soumise ladomination franaise. Or, com-
ment nn magistrat franais, io procureurAssaud, on apprcie-
t-ii ia criminalit? M. Corre a pu se procurer ce document
confidentiel, aussi prcieux pour i'ethnoKt'aphie qu'humiliant
pour les prtentions et l'or};ueii des conqurants. < L'Anna-
mite possede-t-it rellement, au point de vue criminel, ce-
degr de perversitatteint par les nations europennes?Je no
le pense pas. C'est peine si, depuis quatre ans que je suis
procureur de la Rpublique ftano, j'ai eu connaissance de
deux ou trois assassinats en matire indigne commis dans
le primtre de la ville et de sa banlieue. Quant aux crimes
contre les proprits, aux vols qualifis, ils se produisent
habituellement l'approche du Tt; et quand on relve
Hano!, cette poque, cinq ou six vols audacieux et prsen-
tant les caractres d'une certaine perversit chez leurs
auteurs, c'est un gros vnement dont parlent les touilles
locales. On recommence alors le chapitre des rcriminations
contre los indignes. Or il est indiscutable que, < si la popu-
lation de la vitte do Hanoi comprenait 2UO.OOU Huropeens la
ptaco des indignes, il faudrait immdiatement rorganiser
ta force publique et en quintupler t'e)!ectif. Mture ceta, tes
assassinats, les vols avec enruction, les infanticides, etc., mar-
cheraient tout' train et te personnel du parquet pourrait sans
inconvnient tre triple si l'ou voulait qu'il suM a ta
besogne (p. 37S, 87G). x
Des grandes races qui peuplent les colonies franaises lit
race noire africaine est lu plus basse; la race induue est au
contraire cette qui se tient le plus prs des populations euro-
pennes. Or la statistique criminelle de l'Afrique occidentale
peuple eu trs grande majorit deXe~res, donne une crimi-
nalit peu eteve. La criminalit gnrale est assex faible.
Ktte ne semble pas s'accroitre dans ta mme proportion que
la population. Dans ta priode tMM-tSC) avec une population
dj dense, puisque, pour Saint-Louis et ses faubourgs seuls,
elle comprend 2t.000 habitants et, pour Gerce avec ses dpen-
dances, )8.000 habitants, il y a Moins de 10 affaires d'assises
en moyenne par an et le chiffre des accuss n'atteint pas )4.
A une priode plus rapproche, avec une population de ptus
de 90.~00 habitants pour les communes de plein exercice et
tes territoires d'administration directe de la Sngambie, la
criminalit a un peu monte il y a de H a ? affaires d'as-
sises et de a 24 accuss. Mais i) vient aboutir a la cour de
Suint-Louis des affaires de tout t'ensembte de nos tablisse-
ments de la cte occidentate, c'est-a-dirc ressortissant a un
cbitro de populationconsidrable. De ce simpto aperu il y
a tirer une conclusion bien en rapport avec le temprament
semi-ngatif et apathique du noir; ses impulsivits, parfois
d'ectat violent, sont en {;e')erat peu intenses; c'est l'Africain
qui imprime sa note priucipule a la statistique judiciaire en
raison de sa prpondrance numrique et t'en voit combien
le taux de la criminalit reste mdiocre dans la rgion o il
domine ~p. i27).
Quel contraste avec le sombre portrait que la criminologie
doit tracer de t'tndou < Nulle race n'onro un plus haut
point la marque dcgcnerative et l'estampille criminette. Le
champ de la conscience s'est citez l'Indou peu peu rtrci
sous l'obligation de se soumettre, sans rflexion, aux devoirs
les plus extravagants et les plus contradictoires, les plus
opposes parfois aux instincts de ta nature; il a cess d'entre-
voir les notions de lit moratitc saine force de les confondre
avec tours contraires et, dans le complet abandon a su sen-
suatit, it M achve de perdre son nergie. Chex lui tout est
passion et toute passion est d'une intensit anormate, rpond
sans contrepoids, sans proportionnatit aux mobiles qui lu
sotiicitent vers l'acte. Comme t'gosme et l'auti-attruisme
restent la dominante chez l'individu, dans chaque caste, chex
tes catgories vis-a-vis les unes des autres, les sentiments les
plus susceptibles de produirf tes impulsivits criminelles sont
en veil pertnaoeat, t'esprit de vindicte, ia julousie sexuelle,
ia haine. la convuitise et ta cupidit. Ces impulsivits font
explosion a propos des circonstances les plus futiles et avec
des violences parfois formidahies. Kiies dnotent frequent-
tnent, sinon i'aHiance avec des tats d'alination caractrises.
1
du moins avec des tats provoques similaires (ivresse haschi-
chienne ou toujours immanents et analogues (fanatisme et
superstition). Les mmes facteurs qui donnent naissance )a
criminalit en d'autres races et eu d'autres tniiicux sont aussi t
dans i'fnde le point de dpart de t'attentt, mais tel de~rt-
qui ne suffirait pas ailleurs a produire celui-ci, ils le font
clater citez t'Iadou (p. !?.. ,
Selon Corre tout cotoaisateur est un parasite et jamais il
n'y a colonisation sans lutte entre les races, fi en rsulte que
la race victorieuse impute crime a la race vaincue de
simples actes de dfense sociale, soit nationale soit indivi-
duelle. Ce que nos famiiies coloniales appellent des assas-
sinats sont trop frequemtaent des actes de rsistance un
envahissement, des tueries de vraio guerre o l'embuscade
prpare est pour les faibles un moyen de compeuser les (
avantages des forts, ou bien des vendettas individuelles, jus-
tinees aux yeux du sociologue indpendant et logique par
l'arbitraire odieux de quelques fonctionnaires <p. Ht"
Dans les colonies assimiles, la lutte des races innue plus
visiblement encore sur lu criminalit. Le Xe~re, excit par le
1]
muiatre, est en tat d'hostilit perpetueile contre le blanc, II
n'est pas de priode lectoraie qui n'amen son cortge d'in-
cendies et d'agressions.Locooiie indou, trait souventcomme
un vritable esclave, victime de contrats drisoires, apporte
dans la vengeance la fougue de sa race. Le banditisme et
la piraterie citez les Annamites confinent au patriotisme et
la Metitc aux traditions nationales. Notre chouannerie eu
donnerait une image nssox exacte. Quette erreur ce serait
d'attribuer aux penchants de ta race des actes qui sout dus
aux deptorabies conditions d'existence (jue lui fait l'invasion
trangre
S" Kn Kurope.et) i''ranpe))ota)nme))t. ta criminatitt'avoine
du crime relativement rare au dctit frquent, det'om'nse aux
pnrsonnesat'attentt aux biens, des attentats commis pardes
associations aux attentats individuets. Si l'on tudie les
colonies assimiles .(tuadetoupe, Martiniqm'. Ht'union,.on y
constate une volutionscmhtabio quoique moins rapide. L'au-
teur ta suit pas il pas dans te cours du siecie et montre quitte
s'aeceierc sous i'Hmpire et ia troisime itepubtique. nonobs-

tant te re~ne des politiciens de t'ecote (te Sctuiitctter. Dans
t'iude, cotonie o la population, en partie assimile, garde en
grande majorit ses anciennes t'outumes, il y a neannx'ins
substition du dfit au crime et de t'attentt individuel n t'at-
tentt cottectif. Hn t833. il y a pour une population de
)(!7.3u habitants :M aitaires correctionnettes et 38 atTaires
criminelles; soit un crime pour 4 4t: habitants et un dciit
pour 7jm. < Mais l'action judiciaire est encore mat dessine
sous ses formes nouvelles: les fonctionnaires enquteurs ue
pntrent que trs imparfaitement dans les murs et tes
habitudesdumiiieu. Bien des manquements doivent demeurer
ignores. Si nous sautons a ia dernire statistique, celle de
i8W), nous observons des changements considerabies. La
population est de ~2.'Mc habitants, dont ~<).?<<K) lodous et
Europens, creoies ou mixtes. Les aftaires crimineties
sont au nombre de 3?), soit unnsurS.fHi)habitants; diminution
qu'it ne faut pas acccptt'r comme une preuve d'amendement
absoiu.caretteestptusque compense par t'augmeutation du
dfit cng'fobant une partie des crimes correctiouoaiises. Mais
il est remarquer que, sur les 63 accuses, 8 seulement figu-
rent sous la rubrique .Yf'< 't. < mhMx' o'< '<H.< '' ftM~v
M<oHt('/<'f!t)rnt'<tous tes autres sauf un d'origine inconnue)
sont dectares d'origine asiatique,c'est--dire fndous n'appar-
tenant pas a nos possessions par la naissance ou le domicile
fixe. Pour le deiit je n'ai point des rcievs d'eusembte, mais
seulement la statistique du tribuna) eorrcetionne!de Pondi-
chry, celui dont )o ressort est )<: plus important. La ville et
ses dpendances oui H.830 iutbitants; !e ct'iftre des aftaires
correctionneiicsestdeSUl, soit un detit pour )07 habitants,
proportion norme, double de la deiictuosite mtropotitaine
(en France, un dlit pour ~00 habitants). Mais sur S63 pr-
venus de ces dlits jugs Poudichry, il n'y a plus que
t'8 trangers; tes autres, au nombre de 40S, sont des individus
ns dans lu colonie. Le dlit doue reste bien intrinsque
(P. BtH-~tUj.
Dans l'Inde, tesassociationsdemalfaiteurssont nombreuses
et les femmes y prenneut une grande part. Toutefois c'est
plutt dans t'Indo-Chine que l'ou peut tudier exprimenta-
lement ia substitution de l'attentat individuel t'attentt col-
tectif. Il suffit de comparer ta Hasse-Cochinchine, soumise
depuis longtemps l'influence franaise, au Tonkiu conquis
hier. Les faits de piraterie et de brigandage qui s'observent
au Tonkiu,ont dsol tu Cochinehine dans les premiers temps.
L'auteur tudie minutieusement ta piraterie tonkinoise et
les associations qui l'exercent. Nulle autre partie de son
uvre n'est d'un aussi grand intrt pour ta sociologie crimi-
nelle.
La piraterie a toujours t la forme de banditisme propre
i'Indo-Chine annamitequi y avait t initie par les Matais et
les Chinois. Elle a disparu a peu prs de ta Cochinchine.
< Mais au Tonkin
elle bat son plein. Les tjandes, composes
d'Annamites et de Chinois, souvent trs fortes, tiennent la
campagne dans les massifs montagneux, proximit des
<;uurs d'eau, ou, plus rduites, toujours prtes se disloquer
et se reconstituer selon les circonstances, elles stationnent
aux embouchures, circulent sur leurs barques au travers des
arroyos des dettas. Leur force est moins dans le nombre de
leurs contingents actifs que daus celui de leurs auxiliaires
latents, intresss par la cupidit ou la crainte. Le pirate a
pour complices ou associs les gens des villages et quelquefois
la population de cantons entiers; les autorits locales ne sont
pas les dernires a leur fournir ce dont elles ont besoin, vivres,
munitions, renseignements de toute sorte (p. 321). Cesasso.
dations font videmment penser celles de Naples et de la
Sicile, Toutefois M. Corrc. qui ailleurs a si profondment
tudi la criminalit de la Bretagne, prfre comparer la
piraterie tonkinoise ta chouannerie. Celle-ci en voluant
prsenta, ou le sait, deux formes, l'une politique, l'autre
professionnelle. De mme au Tonkin it y a deux sortes de
piraterie, la piraterie politique et la piraterie professionnelle.
La premire est l'uvre de patriotes annamites plusou moins
encourages par la Chine; elle a surtout svi dans les premiers
temps de la conqute, lit seconde est exerce par une camorra
internationale o les Kuropens ne sont pas rares. Chez les
chouans, a ct do !a raison politique, il y avait la raison
conotnique; la haine contre les bleus se doublait de rancunes
depuis longtempsaccumules coutre le Ose et, au souvenirdes
durets des agents des fermes du tabac et du sel mme aprs
le changement des conditions opres par ia Rpublique,
les fureurs dchanes croyaient frapper juste en n'accordant
aucune piti tout ce qui tait d'tiquette administrative.
Les premiers chouans turent des contrebandiers;plus tard ils
se recrutrent de nombreux paysans chasses de leur foyer
paria famine ou par de maladroites perscutions; plus tard
enfin de dserteurs, de rfractaires,de criminels profession-
nets et l'objectif politique fit place l'objectif des cupidits
Individuelles satisfaire. De mente au Tontdn. Ii est ind-
niable que le roi df'-trn a conserve des fidles, mais il est non
moins certain due le monopole do t'opium a suscit bien des
mcontentements et a donne naissancea une contrebandetrs
active; des famines que nos autorits n'avaient su ni prvenir
ni pallier, des exactions qu'elles n'avaient pas davantage emp-
ches ont multipli le chiure des misreuxet des irrites. Toutes
ces circonstances ont eu leur inttuence sur la formation des
bandes qui, d'emble rsolues a l'exploitation du milieu par le
crime ou d'abord politiques ou indiffrentes,ensuite, a mesure
de l'limination des patriotes et de la pntration des suspects,
plus ou moins pillardes et aventurires, ont en outre ren-
contre un puissant moyen d'action dans l'organisation dos
socits secrtes (p. H~-3~5). J
On le voit, la colonisation violente d'un pays suffit elle
seule M y stimuler la criminalit la plus sanglante et la plus
antisociale. Les pirates professionnels du Tonkin pillent
main arme les villages ouverts, dtroussent et assassinent
les voyageurs et les marchands, enlvent des personnes
riches pour en tirer des ranons par la menace des tortures,
ainsi que des femmes et des enfants qu'ils vont vendre en
Chine. Les caractres des associations criminelles de la Sicile
et de Naples sont ici rpts et accentues.
4 Nanmoins la colonisation est rpute vulgairementapte
rpandre la civilisation chez les populations restes un
stade infrieur, t.'est qu'on ngligetrois grands faits, la nature
du colon, )'it))I~!nce qu'exerce sur lui le milieu colonial, la
raction des 'tons sur !a socit mtropolitaine. Mission-
nuire, militaire ou fonctionnaire, le coton, dj tnat adapte
la civilisation de son pays, ignore et mprise la civilisation
de t'indique et tes conditions de son dveloppement. t) n'a
nulle ide, nut souci des perturbations qu'il cause ta soci6t~
o il entre, l'ar exempte, il ira dtruire les tombeauxconsacres
par les Annamites leurs anctres, sans s'inquiter de
t'appui que ce culte apporte ta moralit de l'indigne.
Homme de culture infrieure, il prendra en Afrique les
superstitions du Ngre, en Cochinchine les murs dpraves
de l'Asiatique. Fonctionnaire, il se laissera donner par le
mandarin des teons d'improbite. Encore, s'il taissait sa
rgression morate dans ta colonie quand il lit quitte! Mais
hetas, i) t'emporte en Europe. Qui oserait refuse)' une large
part (t'influence a de pareils lments, mtes en plus ou
moins j;rand nombre aux etemeuts non dplaces de nos cam-
pagnes et de nos viites, dans t'emorescence si caractrise de
crimes et de vices traduite par nos murs depuis prs de
vingt ans? tt y a tout fin moins relever une concidence
entre la transformation de cettes-ci et l'extension de notre
domaine colonial tp. tti.
!)' Hn somme, il n'y a dans la gense du crime aucune
influence attribuer a ta race si on entend par ta une consti-
tution anatomique et physiologique; carautre chose ta race,
autre chose la lutte des races. Xous avons dit qu'en revanche
Corre accorde une n'eito innuence au milieu physique. Le
colon est toujours mat adapte au milieu, car il migr du
Kord vers le Midi aiors que les lois de t'aduptation t'astrein-
draient a un mouvement en sens inverse. I) prsente donc un
tat nerveux maladif. Mais tandis que la chaleur t'abat, la
saison (raiche le surexcite. La courbe de la criminalit est
en rapport avec les minima thermiques. Or it a t reconnu
que la saison fratche n'agit ainsi sur ta criminalit que grce
a l'intermdiaire des faits conomiques. Ici encore les exp)i-
cationsde t'ecote italienne sont en dfaut.
Bref, nonobstant une trop grande propension aux allusions
politiques, cet cueil redoutable de ta sociologie criminette,
t'muvt'e de Corre est une des ptus nourries et des pius
mthodiquement conduites que cette science ait produites
depuis son origine. La vraie conclusion serait, non pas un
procs de la civilisation, a ta Rousseau, comme celui par
lequel fauteur termine, mais la ngation de toute relation
dfinie entre les stades sociaux ou ethniques et la criminalit.
La gnn'it des formes de tu cdmioatite ne revte pas autre
chose que Fittteusite des troubles qui uccompagneut une
evotuUon sociute.

F~RH HRO. La. morateprtmitiva e t'atavismodetdeMtto


(/. J/o<Y~<' p~'tMtttrf f<~rtw<' </ <~<< in ~r<'f)'o (~
7~ic/)/~-<t<s'F'M;FpfM<'f .4M~'opo~< ct'<m<M<~< srie !f,
fasc. l, H, )?))).
Ou parte trop souvent en France de i'ecote italienne de
criminologie cantate d'une sorte de secte fennec et absorbe
tout entire dans )a personnaiite de ses fondateurs. Ou croit
en avoir uni avec elle quand on a rfut les thses prin-
cipales de Lombroso auxquelles les mieux informes joignent
quelques vues d'Hnrico Ferri. C'est l une erreur qui cause
maint jugement superftciei. Issue du darwinisme et de la pbre-
noiogie comtiste, t'ecoic italienne volue sans ,cesse sous lu
double influence de la psychoio~io experimentaie et do la
soeiotogie gntique; elle compte parmi ses partisans des
esprits d'une entire libert qui n'aecepteut que sous bn-
fice d'inventaire t'herita~e des matres. En premire ligne, il
faut citer Guj~ietmo Ferrero. Collaborateur de Lombroso
dans ta compositiott de la Y-'<'M<nt<' ct'fMntf~f, H a crit, on le
sait, les meilleures pages de cet ouvrage. Le mt'moire que
que nous attons analyser, et qui est un resumede la prentire
partie d'un livre sur le /'<'o~'(~ M~'! eo voie do publication,
va nous ie montrer soumettant un nouvel examen ia thse
capitale de Lombroso, l'atavisme du criminei-n.
I) estime que < Lombroso et Ferri ont conu l'atavisme
du dlit d'une faon trop extrieure, tropmaterieHc. Ils ont
voulu dmontrer que t'homicide. le vol et en gt'nerat les atten-
tats les plus graves sont des pttenomenes rt'~nticrs de la vie
primitivede i'i<umuuiteet que tes sauvages taent et voient avec
i'indifto'encc qu'ils apportent dans ieurs actions habitueUes.
A cette titt'orie beaucoup ont rpondu en opposant des docu-
ments qui prouvent que, chez maint peuple sauvage, tes dlits,
et spcialement le vol et l'homicide, sont trs rares, qu'ils
sont mme plus rares citez les populations tout fait inf-
rieures que chez celles qui commencent se civiliser. Le dlit
devrait donc tre considr comme un premier fruit vnneux
de l'arbre de ia civilisation, thorie qui, ne considrer que
la reprsentation extrieure de la vie sauvage, a pour soi des
arguments peut-tre plus nombreux que lu thorie adverse r
(p. 34).
A une comme a t'autre. Ferrero oppose lit ~~<''</f /'<f<-
f'ff't)~'M/. L'atavisme du dlinquant consiste (tans
r;jtM!c ~('
sou esprit d'insubordination contre lu loi du travail et son
impulsivit. L'etort de Ferrero est de montrer i" que
t'imputsivit est insparable du dfaut d'aptitude M un trayait
rgulier; que i'votution sociale et psycitoiogique do
l'espce humaine a consist dans la formation de l'aptitude
j autravait et ia diminution de i'itnpuisivite.
i Les caractres qui distinguent do t'homme civilis le sau-
vage ou leLat'bare sont i'hnputsh'ite, l'inertie et i'exeitabiiite
physico-psycitique H est tire d'uu tat ordinaire d'assoupis-
sement p!)r les besoins d'une violente excitation muscutaire.
Kn preuve on peut donner tes dauses vertigineuses auxquelles
se tivrent presque toutes les races infrieures. Tacite avait
note ces caractres chez les Germains il n'est pas une obser-
vation moderne qui ne tes retrouve citez les sauvages.
Or i'impnisivite et ia tnoraJite s'exenjent; ta tnoratiten'a
) d'abord t que la modration de t'imputsivite avant de four-
j nirdes motifs d'action & la conduite.
t'ne nature impuisive n'est pas ncessairementmalfaisante
aussi tongtentpsqn'ctte n'est pas excite par des motifs hai-
neux. C'est pourquoi on a vante si fnciiemeat ta bont des
sauvages. Hn reaiite, les sauvages se montrent bons seulement
parce qu'its vivent dans des conditions o les excitations au
mai sont rare~et faibles.
Le travail exige le contrle de soi-mme. L'inaptitude
un travait regutier et l'impulsivit sont donc deux phno-
mnes psychotoniques connexes. Le primitif peut aimer des
travaux violents, mais de courte dure il repousse la besogne
re~uticre et la rptition de t'euort.
0<t peut distinguer ce point de vue les occupations
humaines en quatreclusses i" la chasse, ta pche, lit guerre;
2 t'agricutture; !<" les mtiers exercs par un individu ind-
pendant 4 les mtiers exercs sous la surveillance d'autrui
et selon une rgle rigoureusementfixe.
Les branches suprieures do l'espce humaine prsente
rsultent d'une slection qu'on aurait grand tort d'attribuer
aux gouvernements. Les gouvernementsaetuets se montrent
impuissants rprimer un graud nombre de criminels. Que
penserdesgouvernementsdu passe qui disposaient de moyens
d'action si faibies? Lu slection u t t'ceuvredu travail. Les
races incapables do s'adapter au travail ont du prir, quet
que fut d'aitteurs teur courage militaire. Les races amri-
caines ont pri; ta race ngre, capable tout au moins d'exer-
cer les travaux qui exigent la dpense rapide d'une grande
somme de forces musculaires, a pu survivre.
La slection du travait a laiss des rebelles et des irrduc-
tibles. L'horreurdu travail estia clef de tapsycitotogie crimi-
neitc; on en a la preuve si t'on compare tesct'imiueisd'ttabi-
tude aux criminelsd'occasion. Le malfaiteurn'a pas l'aversion
de t'etiort musculaire, car sans un tel enort ii ne pourrait
perptuer le crime il a l'aversion de ia discipline et de la
rgularit initrentes au travail agricole et industrie).
Ou voit quel sera l'intrt du livre de Ferrero. t~a socioto'
gie criminelle et la sociologie gntique seront rattaches
l'une a l'autre par un iicn moins artificiel que la tix'orie de
l'atavisme. Nanmoins lu formule del'f(<M<H'' <'f/<')<t
resterait t'qui\'o<)t)e si l'auteur ne t'identifiait pas purement
et simplement la loi de rgression dont AL ttiuot, dans sa
ps\'eho)o;!ie des sentitnents, a montre toute la porte. L'apti-
tude au travaii n'est pas organique; elle doit se reformera
chaque gnration certaines conditions sociates et domes-
tiques, aides parfois par ta dgnrescence,font obstacle sa
formation chez t'entant; de ta le vagnbond et le mendiant r
d'abord, le criminel ensuite, Ici pas d'atavisme fatal; rien'
qu'une bonne hygine sociale ne puisse prvenir.

H. FcfeM p<tf<<'<'M/<cr<! '/)< rr<M<


(A)tt'. SOXC. pt'nfexsiuM. M)')"!)tt('j

HXOt-'RRtANt. MiNoremni-Delinquenti.)'<'p.t<-
fo<w/< <<'MHt< (/.f.t f/f'/t'H~MNM~ <)<t<w< Ktude de psyctto-
togiecrimiuetiej,1 vol. in-S", ?}7t. Mitan,Max Knntorowicz,
i895.

La criminalit infantile et juvnile ottre la criminologie


un de ses problmes les ptus attachants: elle apporte une
contribution croissante ta criminatitcgnrale et cependant
la nature de t'entant n'a pas change. Comment rsoudre cette
aigme? Koartons la solution trange donne par M. A. Cuii-
lot. Tout s'expliquerait par l'institution de la neutralit reli-
gieuse dans lescotcs! Si cette solution flatte un part poli-
tique puissant, elleest peu digne de ta discussion scieutiftque.
Eu France, si ta criminalit des mineurs a mont de 1881 :')
!8Ut de~aHu.!)~ettoetait passe de !?;) a )St)t sous
titi rgime sectaire oppos de 2~ M :?!M de t8H it )8~i.
la progressionavait t beaucoup ptus rapide encore, de t4.'?8)
~S.~iO. Cette extension est gnrale en Huropc, bien que
t'orf;auisation seoiaire y varie avec les pays.
L'cole t'xobrosienne troncheta~uestiou en se jouant. Ette
voit dans i'ettfant) image de l'humanit primitive dont tecritni
net-n est par atavismele prolongement. L'nigme serait donc
que t'entant restt tranger ta criminalit. Mais, si peu s-
rieuse flue soit la thorie scotaire.p) te nous semble encore moins
dcevante tjuecelte-ci. Voici deux images de t'itumanite pri-
mitive et sauvage, i'enfant et le ~t'and criminet. Oritse trouve
qu'au-dessous de seize ans les mineurs, au moins jusqu' une
date rcente, n'ont nsurc sur les statistiquescriminelles que
pour des quantits ne~ii~eahtes! Et fou viendra expliquer
cet accroissement du nombre des dlits commis par les jeunes
geus de seixe vingt et un ans par une analogie generate,
mais tardivemeut manifeste, entre la constitution de i'enfant
et celle du malfaiteur ou du sauvage! De telles explications
sont faites pour encoura~ef tequictismequisouritl'ide que
les mthodes scientifiques pourraient <I'ctairer ce tnbreux
domaine
Lino Ferriani, procureur royat Corne, n'est pas du
nombre des esprits que satisfont soit les explicationsverbales
tires des prjuges d'glise, soit les thories prconues. Il
cousuite plutt son exprience que les thses soutenues par
les criminalistes ses compatriotes. H a en commun avec
Lombroso et Ferri certaines vnes; il tudie les MNX'M~MtH-
</w<Hh! et non tes dlits des mineurs. Par l il prend raug
dans t'anthropotogiR criminctte. Comme Lombroso il estime
que t'entant, mempnornta), a beaucoup des traits du matfai-
teur comme t-'erri it est partisan des <<MMM/A- /(/ ~'t'of;
on peut mme dire que son livre est un des meilleurs plai-
doyers en faveur de cette gnreuse et fconde doctrine. Mais
en mme temps il dlaisse t'etude des caractres anatomiques
et des stigmates pour celle des milieux sociaux il emprunte
beaucoup t'ecote de Lyon et peut tre considr comme un
des continuateurs de Hitux qui, un des premiers en France, a
commenc apporter quelque prcision en cette matire.
Magistrat, Ferriaui va au but par la voie ta plus directe. Le
but, c'est ta cration d'un systme d'institutions pu)))iques et
prives, destines :') prserver t'ttatic de ta muitipticatiou des
jeunes maifaiteurs. Il en rsulte que le jirobieme thorique
est quelque peu passe sous silence. On ne saurait ccjtendant
t'eiudcr. Le propres de ia criminalit des adolescents pro-
vieut-it de ce qu'aujourd'hui, pur suite d'uu ataibtissemeut
de t'education, les pcMchauts sauvages de t'eufant sont man-
cipes ? Vient-it au contraire de ce que t'enfaut est soumis trop
jeune aux excitations d'une civilisation vieillie et tnatadive? Y
Kst-cc.ic fruit d'un infantitisme tardif ou d'une s't)i)ite pr-
coce'' L'enfant, insutUsumment compritne, tnauifeste-t-it su
vraie nature? H'it.-ii dresse au dlit n)u)gre ia rsistance de su
nature L'volutionnisme unitatend opte pour la premire
solution, mais ta seconde n'est nu)!etnent contraire aux lois
Knt'ratesdG t'evotutiou humaine.
En tisant les pages do Ferriani, on reste eu suspens. L'en-
faut a des penchants malfaisants; il est paresseux, ruse.
cruel, menteur, destructeur, impudique un milieu corrompu,
une famiite dgrade par la misre met profit ses disposi-
tions voiia le jeune malfaiteur forme. La solution est ing-
nieuse, te~ante, mais elle M'entratuc pas lit conviction. Le
fils d'une famille dgrade ue devient ])as un matfaiteut', "u
mmo simpiement un mendiant, sans uu certain dressage, et
ce dressage suppose qu'o a dans une certaine mesure fait
violence ses penchants. Nous ne nous trouvons pas en pr-
sence de t'absonce d'ducation, mais d'une ducation dvie.
Laisss eux-mmes, les penchants de l'adolescettt te con-
duiraient au viot et au meurtre impulsif, bref a des crimes
<[ue la statistique enregistre de moins en moins. lis ne le con-
duiraient pas cette criminatite astucieuse et voluptueuse,
ces petits dlits muitipHesqui fatiguent ia rpression.
Toutefois rien n'empche qu'il existe deux types de erimi-
uatite juvnile, rpondant t'un a l'absence d'ducation. l'autre
une ducation pervertie, types plus ou moins dvelopps,
chacun soton les pays et l'tat social.
Cette lucune signale, lacune qui n'est que l'hsitation
devant une dimcutte des plus graves, nous avons hte de
mettre en relief les mrites du livre, c'est--dire de rsumer
tes observations et les inductions qu'it contient. Ferriani,
aprs avoir carte les fictions potiques qui ceignent, comme
d'une couronne ta tte de l'enfant, tudie successivement les
facteurs de ta dtinquence, ses formes principales, puis la
condition de l'enfant avantet aprs tu condamnation. Il pitsse
seulement alors a t'tude des rformes qu'appetient et te
rKime prventif et le rgime rpressif.
( Les (acteurs de la dtinquence sont !a nature mme de
t'entant le milieu corrompu o il votue, quoi viendra
j s'ajouterette n'aime rpressif tui-mme,euteudons t'ensembte
des leons de l'acadmie et de ta prison.
L'entant n'est point t'tre innocent que nous peignent tes
potes, lu famille n'est pas non plus en bien des cas te milieu
idvttique o tes mauvaises tendances summeittent pendant
que les bonnes mrissent. On peut avec Flix Voisin distin-

guer quatre classes d'enfants les pauvres d'esprit, les nor-
maux, les extraordinaires, destines fournir tes grands
hommes et tes grands sclrats, et enfin les alines. Or. t'eu-
faut normal tui-mOne, au moins dans ses premires annes.
a, comme l'a indique Lombroso, les principaux caractres du
criminet-n et du fou morat. Hn gnerai, il prfre le mat,
ou pour mieux dire la rebettion au bien, & la docilit parce
qu'il y trouve un surcrot d'motions, et que sa vanit est par
l mieux satisfaite. Il se ptait a faire des dupes, car la ruse est
compagne de ta faiblesse. C'est a lit ruse qu'il emploie d'abord
toute sou intetti~euee et t'entant le plus leut a t'etude se
montrera vif. eveitte, prompt a concevoir si on lui propose
quelque bon tour jouer. U se pluit a motcster autrui l'es-
prit de bravade est frquentchci: jui enfin il est unh'ersette.
ment eoetin au vo). Honc t'eufaut le plus normatentent cons-
t titue peut devenir un malfaiteur si une mauvaise ducation
vient se~renersurta nature.
Mais dans quetmitieu vit et grandit le jeune malfaiteur?
On sait que .Raux a observa au quartier correctionnet de
Lyon ?!) jeunes dtenus et constata que 3~! appartenaient it
des famittes cosmopolites prives soit du pure et de in mre,
soit de t'un ou de t'autre, et que, des t<M autres, un K~'ud
nombre avait t .loigne du foyer p!)r,ta ntisere et les mau-
vois traitements, que 4~ fois le pre ou ta mre avaient sul)i
des condamnations et que t87 enfants appartenaient des
(amitis de mauvaise rputation. t-'erriania applique la mme
mthode en largissant le champ des observations, tt a tudie
ifM) mineursdlinquants dont ?) avaient de huitdix ans,
24't de dix & douze ans, 3!it) de douze quatorze ans, 4f!3 de
quatorze a seize ans, 5')4de seize vingt ans. Xeuf avaient t
condamnes pour assassinats ou tentatives, ~3 pour meurtre,
!(? pour blessures graves, 4) pour svices, 38 pour attentats
aux murs, tiU pour outrais et rbeitiou, 141 pour \'ot.
42 pour fraudes, ) H pour port d'armes prohibes; t .'JUt taient
rcidivistes. Or, 70t appartenaient des famiiies de mauvaise
rputation, iC!) des (amittes de rputation incertaine,
H3 uvaient vcu dans un milieu entirement dprav;
8{)u avaient reu de mauvais exemples, ?7 taient <its de
condamnes. Les indications de haux sont donc ampiemeut
confirmes. Le miiieu, beaucoup mieux que i'innit des dis- n
positions, explique la criminalit juvnile. La famille y est
dsagrge, mais t'autorit paterneite qui y survit devient
plutt uefastc. t/ehfant n'est pas laiss sans ducation et
Hvr ses instjacts ii est duqu.pour le vol ou ta prostitu-
tion et subit, pour ceta un vritaMo dressage, it est surtout
)ev dans t'~orreur du travait et de bonne heure n'a d'autre
idat que la vie du cabaret.
Les jeunes diiuquants se laissent ramener en gnrt it
deux grands-types, le type prdateur et le type sanguinaire.
Sur les H'uU m~tfaiteurs (;u'H a observs Ferriaui comptait
).)M vuif'urs et 3111 receleurs. L'accroissement considrante
des vois est du presque exclusivement aux jeunes gens.
Cette tendance se constitue gnratement chez eux a ia
priode de ia pubert, mais la gourmandise en tait l'origine.
Trs souvent aussi les mauvais traitements inHigs par les
parents y excitent. Trs frquemment le jeune voieur devient
rcidiviste. Hauxavnittrouvparmi ies jeunes dtenus deLyon
I!) p. )00 de voleurs rcidivistes et ~0 p. tUU de vagabonds;.
Ferriani observe lu rcidive )!< fois sur i()0 eu moyenne.
Les crimes de sang lui ont donn ?!(! sujets. Ce chiure si
tev le porte penser que, sous i'iuttuencc de t'itrdit. de
t'imitation, des boissous aieooiiques ou des passions juv-
niles, !'cn(ant des classes dgrades est pres<)ue ds sa nais-
sance port a se faire justice a iuhn'~nc le couteau ia main.
Toutefois i'imptuosit n'est ()u'apparentc. eiiedcto presque
toujours t'idc d'une vengeance depuis longtemps caresse et
bien souvent l'instinct sanguinaire ne se spare pour ainsi
dire pas de la cupidit.
Or, que fait i'tat social pour remdier a lu criminatit
juvnile ? It a cr t'coie, t'audicoce et ia prison. L'cote.
t'erriani n'est pas de ceux qui la ddaignent, mais il n'y voit
pas l'orgaac ducatif qui pourrait faire contrepoids a t'in-
uuence de ia tamiUe. 11 lui reproche en termes un peu vagues
de ne pas dvelopper t'idea). Il rdite avec une certaine com-
ptaisancctesattaqucsde Jutes Simon contre t'atheisme officie),
comme si le sentiment religieux s'enseignait du haut d'une
chaire, comme si t'indinvrence religieuse de t'eeote n'hait pt)s
la consquenceextrme et hx'vitabte de celle de la socit
Nanmoins, to rfgitue prventif n'existe p:)s. (Juant au
rgime rpressif, il est pire que le mal. <ht le magistrat, rend
le jeune detinquant. sa famitie, comme s'it voulait qu'elle
put en perfeetionaer l'ducation criminette, ou bien il ren-
voie passer quelque temps dans une .prison ou le contact de
malfaiteurs pius exprimentes et plus endurcis a'-hfvera de
lui donner le pli professionne).
Cependant les remdes existent. Ferriani. aprs avoir
ouvert une enqute auprs d'un certain nombre de socio-
togues et de philosophes italiens et trangers, conclut a la
reatite du pouvoir de t'fdueution, mais il ne s'agit pas ici de
l'ducation domestique, car dans la classe d'o sortent les
jeunes dlinquants, ta famille est incapable d'du<)uer cttc
est rduite tout attendre de t'cote. Or, l'ducateur de l'en-
faut normal est incapable d'duquer l'enfant anormat. H faut
donc sparer les enfants anormaux des autres, et voici l'au-
teur oecupC nous tracer le plan d'une cole de ce }:e))rc. 11
y aura au plus tS-lves parctasse le maitre ne sera soumis
aucun programme impratif t'entant sera autant que pos-
sible retenu t'~cotc et soustrait a faction du milieu domes-
tique. On combinera troitement l'Instruction proprement
dite avec le travail manuel on n'hsitera pas faire appel
l'enseignement evangetique.Une telle eco)e, vr:ti dire, n'aura
quelque succs que si l'on a d'abord modifie l'assiette cono-
mique de ta socit.
Aprs le n'aime prventif il convient d'tudier le rgime
rpressif. U ne saurait tre question en effet d'y renoncer
entirement. L'auteur suit ici fidlement les vues d'Knrico
Ferri. 11 carte d'abord le problme acadmique du ~.vntf-
mcttf. La possibilit de la rcidive est la seule question
considrer quand oa est contraint il frapper un enfant d'une
peine. H tranche ensuite.ta question des courtes peines esti-
mant que la mthode exprimentale prononce contre leur
emploi. Le systme actuel est ainsi jug par son fruit habitue),
la rcidive. Que lui, substituera.t-on?La colonie agricole, o,
selon le vmu de Ferri, le condamne sera gard aussi long-
temps que sa libration pourra tre dangereuse pour lui-
mme et la socit. Encore, lorsqu'il sort, doit-il trouver
l'appui de socits de patronage, socits nomttreuses en
Angleterre et en France, a peu prs inconnues eu ttatie?
Ce livre sera-t-it utile 7 L'auteur.se pose non sans amer-
tume cette question au moment o il prend cong du lecteur.
Entend- par ta que de longues annes se plisseront avant
qute tgjstateuraccueitte les rformes qu'i) propose? \ous
le craignons, car de tels problmes n'ont rien de commun
avec les intrts tectoraux. Maiss'agit-ii d'une contribution
a la sociologie criminette.sciencequi un jour modifiera l'opi-
nion publique? ators le doute n'est pas possible, l-'erriani a
su traiter une matire rehutaute et douloureuse en unissant
t'toquence fi )a mthode il a su unir et combiner les raisons
de la science et les raisons du cur magistrat, ii
su juger
avec indpendance le systme pcna) dont il est te serviteur;
eu donnant a ia socit contemporaine un K~'e avertisse-
ment. il a su se prserver des passions rtrogrades. Qui
nierait t'utitit du livre qu'itacrit?

DOUCLAS MOHtSO~. Juvenile Offeadera 7<')<Kf).


un pages. Londres, !ist)er
t'<'<M't')<f~j, t vot. iu-8", L'n\vin,
8!J(;.

M. Dougtas Morison tudie ta criminutit juvnite et infan-


ile a ta lumire des institutions spciales cres par t'Angte-
terre pour la conbattre, uous voulons parler des coles
J, industriettes et des coles de rforme. Son tude, rapproche
de celles qui ont t faites en France et en Italie, prsente
ainsi les caractres d'une application approche de la
mthode exprimentale. Ferriani, dans le livre dont nous
venons de rendre compte, parait estimer que les rformes
auglaises sont suffisantes arrter les dlits des jeunes;
Morison tudie t'accroissement du taux de ces diits dans un
milieu social o ces institutions ont t appliques. L'un de
ces ouvrages rectifie donc l'autre en le compltant.
Ds le dbut, fauteur identifie, non sans raison notre
avis, le problme de la rcidive et celui do la criminalit
juvnile. Simplifiant les classifications habituelles, il ne
reconuait que deux types de malfaiteurs, le malfaiteur
d'habitude et le malfaiteur d'occasion. La distance qui
spare un de ces types de l'autre est trs rarement franchie
a t'age mr elle l'est au contraire trs facilement pendant
t'enfance ou t'adotesceuce. Les socits ne reussit'ont doue a
arrter tu rcidive, ce qui est l'objet mme du droit poa), r
qu' ta condition d'carter t'entant de ta carrire criminette./
Doivent-ettes compter sur un systme rpressif C'est ce que
t'examen des jeunes malfaiteurs peut sent apprendre.
Le livre de Morison est trs metttodiquement divise en
deux parties consacres. ia proniere aux conditions du crime
juvnile, ta seconde au traitement de cette ntaiadie. Cet)e-ci
est crite surtuut au [mint de vue de ta te~istution anglaise.
ceHe-t interesse i'untttt'opotogie critHineUe tout entire.
L'auteur tudie successivement i'extcusioH du ct-hne juve-
uiie, sa distributiut), tes rapports qu'il soutietttavec t'age et
te sexe, entia les cunditious pitysiques. meutates, faniitiittes
et conomique!, des jeunes malfaiteurs. H crit avec la plus
i:raude ctarte et sait tre cotnptet sans pn'iixite ni contusion.
La criminaiite infaxtite est partout en voie d'accroissement.
ti n'y a aucun doute pour ta France et ta Het~ue.Hn ttoitande,
les dlits commis panni tesenfants au-dessousde seize ans ont
doubt depuis Yin~t ans en Attema~ne, tandis que (tans les
dix dernires annes l'accroissement de ta population a t
de adi a HO p. ))"), celui du crime juvnile a (''te de ~) p. HJf)
en Russie, en Honin'ie, eu Autrictte, eu Hatie, les dctits des
jeunes croisi-t'nt aussi ptus rapidement que ia population. H
en est de mme aux Htats-Unis d'aprs les renseignements
incomplets que t'en peut se procurer.
Le mouvement gnerai de la criminalit et celui de ia cri-
minatitc juvnile sont solidaires les crimes des jeunes se
distribuent comme ceux des aduttos ils sont trs nombreux
ta ou ta criminatitc etie-tneme <'st trs forte. Les jeunes ~eus
commettent uue forte proportion d'honucides ) ou le taux
de i'homicide est tui-metne eieve, comme il arrive dans
t'Europe meridionaie. Ceci conduit Morison carter en
quelque sorte d'embtt'e, peu prs sans examen, t ide d'une
analogie entre les dispositions de t'entant et cettes du crimi-
net-ne et a admettre plutt une corruption de ta jeune gn-
ration par t'ancienne, au moins dans les grandes cites.
L'aceroissementde la criminalit juvnile est ainsi considre
comme un (ait socia!, non comme la tnuuifestation d'une
ncessit physiologique.
La distribution de ta criminalit juvnile repond-ette a
celle du pauprisme? Au premier abord on serait tente de le
prsumer, mais t'observation de t'An~teterre repondrait
ngativement. Morison va jusqu' admettre une inversion. Le
pauprisme s'observe surtout dans tesdistricts ruraux. Or c'est
l que le caractre iudivduet est le moins vicif, ta cupidit
la moins excite; c'est t& que le malfaiteur a le moins de
chance d'chapper & ta justice. A quel fait social rpondrait
donc tacruninatite juvnile? L'auteur n'hsite pas fpondre
que c'est a ta concentration des entreprises industriettes.
Mais cette vue sommaire ne suffirait pas et ne tiendrait
pas lieu d'une tude analytique des conditions au milieu
desquellesapparaissent les jeunes malfaiteurs. Or une mine
trs riche est offerte l'observateur par les diverses coles
que lu lui anglaise a cres pour remdier autitut que
possible it l'emprisonnement des enfants et des adolescents,
savoir les coles industriettes et les coles de reforme.
Une premire donne, c'est ln primaut du sexe masculin.
dans le jeune ge connue dans t'age adulte. Xon seulement
les garons commettent plus do dlits que les (ittM, mais ils
en commettent de plus graves presque tous les attentats
aux personnes leur sont attribuantes. Constatatioft singuli-
rement embarrassante pour ta thse tombrosie.tnet Car si t:)
femme, cette <ru)(f</< cet tre <H/<u)f<7f si voisin du sau-
vage primitif ne limite s:) contribution au crime que pour ta
donner si ta prostitution, comment observer que t'exccs de ta
criminalit masculine puisse tre observe ds l'enfance et
bien avant t a};e ou la prostitution est possible ?
L'Age exerce aussi sou influence et il importe de distinguer
t'entant et t'adotesceut. Morison admet une certaine anuto~ie
entt't' te caractre de t'enfuntet celui de tboanne primitif;
t'entant mat survcittc est port a prendre got ta vie
errante, a devenir un vagabond et parfois aussi un petit
voleur. Mais ce n'est pas cet a~e qu'i) commettra des
attentats de quelque gravit, mais quand ses facuitus auront
une puissauce voisine de celle de l'adulte. (~'est alors qu it
deviendra un criminel d'habitude, adaptera ses facults
t'exercico d'une carrire antisociale qu'il sera ensuite inca-
pable d'abandonner. On voit quelle part mesurfe l'auteur fait
a l'atavisme. L'enfant ne devient pas criminel parcM qu'it a
les tendances impulsives et les penchants destrucleurs de
t'animai il ne s'carte pas du crime a mesure qu'il sf
rapproche du niveau montt de t'adutte; en d'autres termes,
ses penchants criminels ne drivent pas de t'iafaatitisme. Le
contraire est vrai.
Ht) rsutte-t-it que t'entant soit un tre norma) qui choi-
sisse, sous t'empire d'une sorte de vocation, ta profession de
matfaiteur ? L'ouvrage de Morisoa est tout entier consacr a
dtruire une tette opinion. Si t'en carte les fantaisies nnthro-
potogiques, il reste un certain nombre de conditions dfinies.
propres a rendre compte de la gense du jeune dtinquant.
Parmi ces conditions, tes uues sont individuelles, les
autres proprement sociales, soit domestiques, soit couo-
miques. Encore, tout bien considre, tes premiresdpendent-
elles des secondes, car si, au point de vue physique et
tnentat, les jeunes nMtfaiteurs sont des d'~eneres, la dc~ette-
rescence dont ils souffrent, est avant tout t'etet du milieu.
Morison constate en premier lieu ta mortatite tevee des
eteves des coles industrieties ou des coles de refortne. Dans
la premire elle s'lve si 9 p. 1000, si l'on tient compte de
toutes les donnes, tandis que dans t'cnscmbte de la nation,
le taux mortuaire de la population enfantine de tnme ge
n'excde pas 3,7 p. ) .ft'JO. Dans ces coles la tait te moyenne est
d'un quart intrieure celle des autres enfants; te poids moyen
donne lieu a une remarque semhtabte. \VMrner. qui a exar-
min les eniants des deux sexes dans tes coles industriettos
de Loudres. en trouve S9t soit ? p. tOU) qui prsentent des
dfauts physiques plus ou moins graves. L'observation des
coles de reforme confirme ce resuttat. Si nous rflchissons
que les jeunes malfaiteursappartiennent presque sans excep-
tion it une classe qui doit vivre du trayait de ses hras,
nous voyous comment t'infriorit de vigueur physique peut
les rendre impropres exercer un mtier d'une faon conti.
nue.
Les aptitudes mentnles ont tel point teurs conditions dans
le bon tat des organes et des fonctions que t'en pourrait,
sans de grandes chances d'erreur, dduire des observations
prcdentes t'infriorit meutate des jeunes dlinquants.
L'observation directe tmoignerait dans le mme sens. Il est
a peine besoin de dire qu'il ne s'agit pas soutement de t'apU-
tude acqurir des connaissances,mais encore des sentiments
sociaux et du contrle personnel, t'arrni les jeunes
gens qui
peuplent les coles industrielles et les coles de rforme,
30 p. tCO ont perdu en bas ge un de leurs parents sinon
tous tes deux, 3~ p. avaient t ngligs ou abandonns
par leurs parents qui assez souvent taient eux-mmes en
prison. Les autres plus favoriss en apparence avaient aao-
moins vcu dans des milieux vicieux o aucune ducation
n'existe. Aussi sont ce les sentiments surtout qui citez ces
infortuns sont dfectueux. Beaucoup paraissent n'avoir
jamais ressenti t'innuenee bienfaisante des anections de
(amitte. Toutefois it ne faudrait pas se luiter de leur attri-
buer une intettigcuce au niveau de la moyenne. La formule
psychologique du jeune dlinquant, d'aprs Munson, serait
eetie'ci < une iuteitigonce faiblement dveloppe combine
avec la grossiret (btantness) des sentiments et l'instabilit
do la votontf
La genf'se du jeune criminel est explique en grande partie 1

par le milieu domestique. Sauf des exceptions ngligeables,


ou il u'u pas de parents, ou it a des parents vicieux. A la pre-
mire catgorie appartiennent les orphelins et les enfants
naturels. Chose (dite pour tonner, t'orpheUn est beaucoup
plus exposf que l'illgitime, t';u Angleterre, les naissances
naturelles sont surtout frquentes daus les campagnes or.
nous t'avons dj dit, c'est surtout dans los grandes villes que
se forment les jeunes malfaiteurs. Les naissances naturelles
tendent vers te minimum dans les comtes ou ta population
a ta ptus grande densit et atteignent le maximum ta o
la deusitc est la plus faible, La marche de ta criminaHte,
adulte ou juveuite, est inverse. Eu revanche, la contribution
des orphelins aux dlits est considrable. t)e 188i iX!)t le
nombre des enfants conftesauxeeotes industrielles et qui, au
moment de teur entre, n'avaient ni pre ni mre montait
4~ p. 000. Les orphelins de pre ou de mre sout naturelle-
ment beaucoup ptus nombreux. La condition des uns et des
autres n'est pas la mme. L'enfaut qui a perdu sa mre est
souvent abandonne par sou pre il est moralement negtigH,
mais, ces cas exceptes, ses besoins matrielsont chance d'tre
satisfaits; de plus, il se sent somnis uue autorite, tandisque
t'orphetin de pre sounre souvent d'une misre plus profonde,
se rsout & vivre a ses propres risques et devient vagabond.
Quant aux enfants de la seconde catgorie, le nombre etevc
de poursuites diriges contre eux par les autorites scolaires
prouve assez combien ils sont ngliges.
Les facteurs conomiques viennent se joindre aux prc-
dents pour leur faire produire tours ellets tes ptus nuisibles.
Le jeune homme que nous vcnous do dcrire n'aurait qu'une
chance d'chapper a ta carrire du dlit ce serait d'tre
<}t)gag6 assex t6t dans une profession rgulire et bien remu-
nre. Or sa famille, quand il en a une, est trop pauvre pour
lui faire apprendre un mtier. La population des prisons est
compose pour une forte proportion de~<'M''t<(< <o6ot'<'r, d'ou-
vriers sans spciatit. vous & des travaux durs, mdiocrement
pays et iatennitteuts. Le travail ne se prsente donc au
jeuue dlinquant que sous sa furme h plus rebutante il est
astreint des chmages qui mettent obstacle il ta formation
des habitudes laborieuses. Ds tors. il tombe nnatement entre
les mains d'uu criminel de profession qui le dresse a une
forme d'activitsouvent tropeo harmonie avec ses penchants
et lesexemplesqu'it a reus.
La deuxime partie du livre est consacre tl un examen
comparatif des deux systmes que l'on peut opposer la cri-
minalit juvnile, le rpressif et te prventif. Le rgime anglais,
si admire sur te continent, trouve en Angleterre desdtracteurs
qui prconisent le retour langueur. M.Munsun n'a aucune
peine fi montrer l'impuissance prouve du rgime rpressif.
La loi pnale tente de faire cbee aux mobiles criminels, mais
ne les empche pas de uattre. Au contraire, le rgime pr.
ventif a donn des rsultats hautement satisfaisants. La moi-
ti des jeunes ~enscontK's aux ecotes industriettes ne donne
lieu aucun reproche pendant tes trois annes qui suivent
la sortie de t'ecute. U'aiDeurs fauteur est visiblement partisan
des reformes sociales qui retveraienUa situation des popula-
tions ouvrires et remdieraient aux maux que cause l'ex-
treme concentration des industries.
H tait dinicite, notre avis, de faire une tude criminoto-
Kique plus mthodique, plus complte et plus lumineuse. Si
on laisse de cote les conclusions pratiques. d'aitteurs fort
importantes, le rsultat de cette tude est de faire une dis-
tinction comptete entre la criminalit infantile actuelle et le
prtendu infantilisme criminel dfini par t'cote tombro-
~ienne. Le jeune criminel n'est pas un sauvage, c'est un dchet
de la civilisation.

< C!HAOLO HAMXETT. Delitti femminiU a Napolt


Studio di sociologia criminale (M~f /t'Mt/M<t!< .Y~cs,
A'<t~< .OfMh;/' <-<-)M<'< ) vot. grand iu-X", ~8~ pages.
Miian, MaxKantorowiez,t897.
On sait que la contribution des femmes la criminalit est
faibleen Italie, ptus faible encore qu'eu France mais Naples
fait exception ta rgle commune. Lacriminaiit fminine y
est benuconp plus forte que dans les outres grandes villes,
notamment Venise, home et Paiermeo)') cependant elle est
bien au-dessus de lu moyenne. 11 y avait donc grand intrt
consacrer une tude propre ce curieux phnomne crinu-
uolugique, ainsi que t'a fait (:. Ciraolo Mamnett. C'est ainsi
que t'ou peut (Mire de ta sociologie crimineite une vritable
science experimentaie.
La civilisation a subi li Xaptes. si t'on compare cette ville
au reste de i'itaiie, un vritable arrt de dveloppement. La
densit de la population y est extrme; S25.000 habitants y
vivent sur une superficie de ?8t) hectare. Les quartiers de
Porto, Pt'ndinoet Mercuto qui comptent en tout )S).Ot)0 habi-
tants n'occupent qu'un kitometre carre, ce qui donne de (! &
M mtres par habitant, lundis qu'a Londres chaque Individu
a
3tt ntres carre:; sa disposition. t)e l deux consctjucaces
iapt'etnireestt'inteusitedetuttepour ta vie. la deuxime est
l'absorption de la vie personnettc par la vie cotteetive. La
lutte pour l'existence svit, non entre i'hummeet les choses.
mais entre les hommes. L'intonsitH de )a vie cotiectiveiocate
emp~ctie ia formation du caractre individuel, en sorte que la
socintitc y est tout t'oppose de l'altruisme et de la moralit.
La vie de (amiti subsiste it peine en ce milieu social: la femme
du peuple n'a ~ueredo foyer ;t'existence se patsepoureite dans
les rues et les carrefours. Loin de nourrir la femme, l'homme
vit souvent de son travai);ette est dot~astreintea exercer
des sa jeunesse une foule de petits commerces et de petits
mtiers qui mettent sa moralit en pri) elle y prend de
bonne heure le ton, les manires et les sentiments de
t'homme.
Ces causes ne sont pas les seute& et le principal mrite de
t'autenr est, a notre sens, d'avoir tenu }!rand compte des don.
nes historiques, donm'esquc les ant!)ropoio;;istesordinaires
traitent avec un si parfait ddain. Ces facteurs historico-sociaux
sont au nombredcdcux, i'inttuenceespa);noieetie t'Aie de la
camorra. Encore pourrait-on les rduire un sont, car la
camorra a t importe d'Espagne dans t'fmcien royaume des
Denx-Sicites. Les Xapotitaines ont tesquatitesdesHspa~notes.
mais elles en ont aussi la fougue, les passions explosives, le
temprament voicanique: de l une conception propre de t'a-
mour qui leur (ait un devoir d'aider en lotit t'homme qu'elles
aiment, de subir avec une rsignation i))imit les mauvais
traitementsqu'il leur innige, mais df chtier frocement l'lu-
tideiit.
Lu camorra profite de ces dispositions. Appartenir & un
eamorristc est pour la femme (tes bas-fond'') de Xaples un titre
d'houuem'. Cette trange association. qui sortes Bourbons
exerait au profit de ses membres les attributions protectrices
de l'tat et dout l'action persistante entretient citez les ~:)po-
litaius le scepticisme politique eu leur inspirantdes l'enfance
un mpris tranquille des pouvoirs publics. cette association
trouve ainsi chez une foule de femmes pauvres des instru-
ments d'une singulire efficacit en m~ne temps qu'elle les
peuetre, elles et leurs enfants, de son esprit untisociai.
Les Ht'andes forces morales et politiques, !a religion et le
gouvernement, sont ici sans action. Peu de villes nanmoins
poussent aussi loin que Xapies t'iiitoiertmce religieuse; )('
culte y est associe a tous les actes de l'existence, mais pur ia
mme il devient improprea symbo)isertavietnoraie. Urace
t'actiondu rgime espagnolsuivi du rgi me bourbonien, iare)i-
giou est'devenue plus qu'aUteurs un rit.uaiistneoutciet et un
manteau dont toute passion peut s'habiller. Quant au gou-
vernement, les Napolitains se sont accoutums y voir, sous
les Espagnols, nn agent de l'tranger et, sous les Bourbons,
une secte partiale et oppressive, toujours prte recourir,
pourse maintenir, au servicedes hommes les plus suspects ou
les plusodieux.
Les crimes des Xapoiitaines sont surtout pussionneis
directement ou indirectement l'atnour en inspire le plus
grand nombre tantt la jalousie on ta vengeance tes arme
tantt le culte vou un malfaiteur les porte il lui prter
main-forte. Ajoutez ic cela leur humeur bataiiieuse et que-
relleuse, entretenue par le sjour assidu dans ia rue et la
{reuHCMce des rixes. Toutefois on se tromperait fort en
attribuant a ces femmes l'horreur du vol; volontiers elles
deviennent receleuses pour le service de leurs amants, sur-
tout s'ils appartiennent ia camorra.
Ciraolo Hamnett a su crire cette tude en ce style ia fois
chaud et color, vif et pittoresque, qui ne nuit en rien l'au-
torit du savant. Son oeuvre donnera rcnecbir aux lecteurs
trop prompts accepter les vues exposes par Lombroso dans
la FfMtMc (TtwtMe~f. Si la femme commet Naples a peu prs
autant d'homicidesque l'homme, ce n'est pas par <Msc<)M<<('
c'est par passion ce n'est pas sous l'intluence des caractres
sexuels secondaires, c'est sous l'action de conditions sociales
bien dtermines. Ajoutons que
ces dernires ne sont pas
purement conomiques. Kaptes pourrait avoir uue population
de densit e~ato sans que Jes ttommes abandonnassent
temnx's une grande partie des travaux et surtout
aux
sans clue la
f<!Mton'<f s'y fut implante. L'auteur f) montre quelle action le
pass politique d'un peuple peut exercer sur sa criminalit
actuciia.

GA!nuHLTAHt)E. La ortmiNalit professionnelle (Rap-


port prsente au congrs de (ieneve), dans les .c/ijpM

tentbre i8HO.

<tf<</)/'fj/<o/<~' t-)'<M<HcM< )i" anne, n" (io, i5 sen-

La lecture de ce mmoire est une ohHf;ation


pour quicon-
que s'intresse aux progrs de ia sociologie criminelle. L'au-
teur de tant d'muvres attrayantes ou profondes a tnontr ici
autant de prcision dans l'analyse d'un problme particulier
qu'aiiteurs ii a fait preuve d'ampteurdaus ta synthse.
On sait avec quelle lourdeur et quefieetroitesso de
vue les
statisticiens ordinaires ont traite de la ct-i)nina)itc profession.
netie il ne s'agit pour eux que d'valuer numriquement ta
part de chaque profession a la criminalit gcnCrate. M. Tarde
montreque cette tude est d'un mdiocre intrt si l'on con-
sidre que,au fur et a mesure de l'assimilation dmocratique
des socits, la profondeur de l'empreinte professionnelle
sur
l'individu va s'affaiblissant au profit de l'empreinte sociale il
proprement parler et politique, sinon nationale Lacrimi-
naHte professionnelle peut tre entendue dans
un tout autre
sens et designer le nombre de dctits spciaux et caraetris.
tiques d'infractions sa morale propre que chaque profession
fait clore Ici, il y a matire une veritaMe tude socioto-
gique.
A vrai dire, il s'en faut que la statistique morale
nous ren-
seigne egaiement sur la criminatitc de toutes les professions.
Les infractions des prtres, des militaires, lui chappent; il
n'en est pas (le mme du dlit commercial par excellence, la
banqueroute, ni du dlit des notaires, l'abus de confiance.
Le mouvoneat de ia criminatite professionnelle ainsi
entendue est-il autonome ou depend-ii des variations de ia
socit dont ta profession n'est qu'une fonction, des <eo)t.
~OMCM .MOH/M,pour parler comme M. Tarde ? L'auteur inctine
franchement ver~i h) seconde solution. Hn preuve. il tudie les
conditions dft'itcf'roissement si anormal des abus de con-
fiance citez tes notaires. Les notaires franaisont tongtemps
t cits avec raison comme une corporation remarquabte
pour son impeccabitit. Depuis, trois circonstances se sont
produites t" le prix des tudes s'est partout tev le rende-
)nM)tt des onice!t a plutt baiss; ces itommes de ptus en
plus besogneux ont eu davantage tu tentation et la (acuit
d'oprer des dtournements de fonds. Le prix des tudes s'est
tev parce que lu diffusion de t'enseignemcnt a rendu le
notariat act'essibte a ptus de jeunes gens le revenu des
ollices a baisse parce clue ta mme cause a rendu le ministre
<tes Notaires moins utiic enfin le paysan a plus pargne et
s'est prcipite avec une confiance moutonnire cttex le
notaire sou voisin Ce sont donc des circonstances sociales
qui ont altr ta moralit d'une profession et amne ta mul-
tiplication d'une classe de detits prcdemmentrares.
De l'tude de ~t. Tarde il rsulte donc qu'un groupe profes-
sionnel prouv par une crise devient, qu'on nous passe ce
terme, un t~ ~'<tM~o' La crise est d'autant pius grave
queia moralit professionneite du groupe est plus ebrantee.
plus voisine do son entire dissolution. Elle peut consister
encore eu un t'onfUt entre la moralit propre a ta corporation
et les exigences de la morate sociale, quand la grande
socit est interessce la non-rptition d'uu acte qui, trs
rpandu dans ta petite socit profossionnetted'o i) mane
mouitta~e des vins, fraude commerciale et falsifications de
divers genres y est absous parles murs de ce milieu spcial
Mais, des deux cas, te plus grave est videmment te premier.
11 nons semble que M. Tarde a apporte une contribution
prcieuse l'tude de ta multiplication des detits. tt a soin do
nous faire remarquer que, si t'iodividuatitc de la corporation
a disparu, il subsiste des groupes tendus de professions
similaires entre lesquelles se rpartissent les membres d'une
socit contemporaine, avec une chance bien faibte pour cha-
cun d'eux d'en jamais sortir. C'est le groupe des professions
intellectuelles, le groupe des travailleurs agricoles, celui des
travailleurs industriels. Or c'est le troisime qui apporte ta
criminalit ta contribution ia plus forte. Le dlit se distribue
sur la carte de France exactement comme l'industrie. Toute-
fois, laissons de ct ici bucoliques et gor~iques puisqu'en
beaucoup de pays trangers le villageois a ta patmedu crime.
Mais lit profession rurale, assujettieA des rgles fixes imposes
par ta nature extrieure, a chappe a l'instabilit gnrale. Il
n'eu est pas ainsi des professions industrieiies exerces g6n6-
ratement par les groupes urbains. La dissolution des corpo.
rations a t le moindre coup qui ait t port ieur constitu-
tion moraie: depuis cet vnement si diversement apprcie,
ta srie des ttonnementsde )a science appiiquee, unie ia
concurrence illimite, t'anonie conomique,pour employer
un terme citer M. i)urk))oim, ont cmpech toute recons-
titution de ia moralit professionneiie. Or, il est vraisem-
biabie que si l'un soumettait citaque corporation i'extunen
dont le notariat a t'te l'objet de ia part de M. Tarde, ou decou.
vrirait des faits de mme ordre. Tout au moins vernut-on
sans doute ia dissolution de la conscience professionnelle
activer lit dsintgrationde la famille et par suite rendreplus
prcaire l'ducation. M. Tarde aura rendu un service do plus
lu sociologie critnineiies'iitu-iteved'eciairerce ct obscur
de la gense du dlit.

Docteur L)':(:it.N.. Consquences sooiales de FaJ-


coolisme des ascendants au point de vue de la
darnresoenoe et de la criminalit. Extrait des
comptes rendus du iV congres international d'antbropo-
logie criminelle. Session de Ceneve, 18!M;.
L'aptre bie)t connu de lit lutte contre l'alcoolisme France
en
s'est propos d'eciairer l'obscur problme des rapports de
t'aicootisme et de lit criminaiite, probieme (lui met
aux prises
les statisticiens et les critninaiistes de t'itaiie et ceux de ia
France, de i'Aiiemague, de l'Angleterre et des i~tats-Unis. :i
fournit ou, du moins, prpare ia solution de lu difficult
en
nous montrant dans i'aicooiisme la cause d'une rgression
Kenerate de la race, rgression dont l'accroissementde la cri-
minalit, grande ou petite, est un symptme.
Le mmoire que M. Legraiu a prsente au congrs de
Genve est t'abrge d'un ouvrage beaucoup pius tendu qu'il
avait publi en )8W; sous le titre /M/t'nw('Mf<'Mt-M<(-<-<
M~coo~Mwf'. Moret avait montr que t'aicooiismeentraine l'ex-
tinction d'une famille en quatre gnrations, mais non
sans
avoir provoque ta quatrime gnration l'apparition des

()) i t'otuM' in-8, S5S pt~jes. Piir< tn-)-s"-i Cttrn'. <;ditcu)-, t89S.
meurtriers et des suicids. Les travaux de M. Legraiu le con-
duiseut a cooOrmer ces donnes et en tirer une vritable
toi. < J'ai suivi, nous dit-il, quatre gnrations de buveurs
dans ~t!) fumiiteset les rsultats de mes statistiques sont suf-
fisamment dmonstratifs pour que je tes reproduire ici.
Ds la premire gnration, 108 familles comptent dj
des dgt'ncrs 'notamment dsquitihmtion simptc. (!3{ois;
dbilit meutidc, 88fois; folie morale et impulsions dange-
reuses <H fuis Eu outre, beaucoup d'enfants disparaissentdes
le premit'r ge pour cause de chtivit' native (6 sur8 dans un
cas, J sur )C dans un autre; les six restant sont dsqui-
libres, faibies d'esprit, piteptiques). Dans3!) (amitis je note
les convulsions, dansS~t'pitepsie, dans tut'hystrie, dans H
la tnnit);ite: t0t< (amittessur ~tS, soit sur comptent des
atcoo!iques(}uid'')irent pourta plupart. En fin, chitre norme,
'itt){ famittes comptent des atines.
<
?
A la seconde gnration, observations me donnent les
rsultats suivants 34 familles comptent des dgnres graves
(imbciles et idiots), familles ont des tous moraux. Les
naissances avant terme, la mortalit prcoce et la misre phy-
sioiogiquc tont une vMtaMe hcatombe d'enfants, d'autant
plus qu'ici l'ivrognerie du pre et de ta mre devient com-
mune :M) fois). Lesconvutsious se rencontrent dans 4~ tamines.
l'pilepsie dans 40. Dans tous les cas, sauf S, l'ivrognerie est
signale ta folle existe dans ? familles t ta plupartdes autres
ne comptent encore que des enfants.) u
A la troisime gnration, observations me donnent un
total de tf enfants; tous sont arrires, 2 sont atteints de folie
morale, 4 de convulsions, d'epitepsic, d'hystrie. ) de
mningite, de scrofule.
Si j'additionne maintenant toutes les suites (soit 8t4)
comprises dans ces ~)3 familles, voici ce que je trouve
4~0 p. )00 sont devenus aicootiques; <!,') p. WO sont
dgnres; t~tO p. )00 sont fous moraux; ~JO p. !0"ont
eu des convulsions; i/5'' est devenu hystrique ou cpiieptique
et t!) p. tt") out vers dans la folie. En outre, 174 ont disparu
presque avant de vivre. Si l'on y ajoute 1)3 cas de tubercu-
lose ou de misre physiologique vous la mort, on atteint lu
proportion de !H,(iO p. t"0, soit la moiti reprsentant to
dchet social brut par hrdo-atcootismo.
JI y a donc un hrdo-atcootiquc. L'auteur pense qu' < it
ralise mieux que personne le tableau synthtique auquel
on a appos l'tiquette de criminel n C'est cet ix'rdo-
alcoolique que l'on retrouve bien souvent dans le eriminoi
prcoce. < Dans mon passage de 5 annes a lit colonie de Vau-
eluse o j'ai trait plus de tillO jeunes dgnres. j'ai vu inter-
venir le crime dans un tiers des cas et j'ai pu tablir que tous
mes dlinquants taient issus du parents alcoolises. 1
il nous semble toutefois que l'auteur vu trop loin lorsqu'il
crit qu'il est permis d'affirmer que la disparition de l'alcoo-
lisme des ascendants quivaudrait ta fermeture de la plu-
part des prisons Lit consommation moyenne de l'alcool est
Il fois moindre eu Italie qu'en France (0,SO i- contre 4,~t)
or, ia criminalit guerate y est plus considrable l'homicide
six foisptus frquent (M! contre ~S pourl.OOU.O(K) d'habitants).
L'auteur nous apprend tui-meme qu'en Norvge, do <S43
)87U, on voit ia consommation d'alcool par < tte diminuer de
') litres :'t 3,'). Dans le merne temps le chifre des coudamua-
tions s'abaisse de 34!) pour ~.ut)0 habitants )8U, tandis que
lit populationcrott de t.305.000 ~.UfH.OOO. tt nous permet
de mesurer ainsi, en un milieu donn, la contribution relle
de l'ulcoolisme u la criminalit. La criminalit s'est abaisse
seulement d'un quart tandis que ia consommationde l'alcool
diminuait de plus de moiti.
Nous estimons que la lutte contre le crime ne doit pas
revtir une forme unique, que le soin des enfants ngligs et
abandonnes, ta protection du travail des femmes, la reforme
du rgime pnitentiaire sont choses aussi importantes que.la
lutte contre l'alcoolisme. Toutefoisfaire diminuer la crimina-
lit gnrale d'un quart en faisant disparaitre. ou peu prs,
une habitude contraire a l'hygine et it l'pargne est un but
sduisant. On conoit que l'auteur y convie loquemment et
l'tat et l'initiative prive.

C. /on)(M ~c:/<t <' fM/t.


Kut.[:!)M FLOMlAX et Gono CAVAGUHR!. 1 Vagabond!
(tes fa~ott'f.), t. t, t vol. gr. in-S", 5~ pages. Turin,
Bocca frres, m!t7.

Le vagabondage est une forme de passage entre l'activit


dlictueuse et l'activit normale. En iui'mme le vagabond
est inutile, mais non malfaisant toutefois il rompt avec la
vie sociale rgulire et c'est par le vagabondage que l'enfant
et le jeune homme s'initient M h) carrire criminel. De plus,
ainsi qu'<))';ttingent'a montre depuis longtemps,c'est eu mut-
tipHant les vagabonds et les mendiants que les crises indus-
tnftieset tes disettes contribuent it t'accrui~sement de la cri
minaiitc. On avait donc les plu's grandes misons de soumettre
ce fait a une tude mthodique en combinant l'investigation
statistique eU'anthropoiogieo'imineHe.Xanmoins te livre de
MM. Fiorian et Cavagiieri est peut-tre ta premire tude a )a
(oisspeciate et synthetitjue qui y ait t consacre; ils n'en
ont encore publi que le pronier volume, consacre ptutot au
vagaboudagoqu'aux vagabonds le second examinera le pro-
btetne proprement anthropologique. Tel qu'ii est, ce livre
constitue naumoins un ensetnbte il prsente une unit assez
rare dans les uvres crites en coUaborution. M. r'tonau a
trait de l'volution et de ia rgression du vagabondage.
M. Cavagtieri u tudie de prfrence les moyens destinas it le
prvenir et il a )''te conduit par lit a une vritable thorie
soeioiojtique de l'assistance.
L'ide (ondamentide. dominant !e livre entier, est ta distinc-
tion d'uu vagabondage normal, physiotogique et d'un vaga-
bondage criminel, antisocial. Le vagabondage est normal
quand il concourt l'activit de in production, anormal quand
il !a contrarie. Cette distinction resuite la fois de l'volution
du vagabondage et de ta comparaison des moyens qui y ont
t opposs par les diverses socits modernes aux diuerents
moments de leur devetoppement.
Les tmoignagesde ta paJethnutogie, confirms par ceux de
l'ethnographie compare, etaMissent que les petites hordes
qui vivent de pche et de chasse sont perpetucUemeoterrantes;
elles nous prsentent le spcimen parfait du vagabondage
normal. A bien des gards, il en est encore ainsi des tribus
pastorales, mais au stade agricole, notamment aprs )a cons-
titution de la proprit foncire, ta persistance des disposi-
tions a ta vie errante contrarie les exigences de la production.
Le vagabondage criminel apparait; on peut mme dire que
ce stade conomique est caractrise par )a lutte entre )'esc!a-
vage et le vagabondage, represontt' par t'csctave ou le serf
fugitif. La constitution de ta petite industrie corporative n'ap-
porte cet tat de choses aucune modincation apprcctabtc, car
l'apprenti et le compagnon sont enchanes & la corporation
peu prs comme le serf la g!bp.
Tout change avec l'apparition de la grande industrie on
voit alors reapparattre, & ct du vagabondage matfaisant, un
vagabondage aussi normat que celui des temps primitifs. Lit
grande Industrie a besoin d'une arme de rserve le cit~mage
le lui fournit l'existence de l'ouvrier sans travail est partout
un organe quasi ncessaire de in grande entreprise. Mais
cette ncessit douloureuse n'est ni discerne ni surtout
accepte ds l'apparition de lu grande industrie. H y a une
phase de transition qu'on peut observer dans la Russie
moderne, qui a caractrise la socit anglaise dans les trois
sicles postrieurs ia reforme, ia France et i'Aiiemage peu-
dant ie xvn" et surtout le xvnf siecte. On ne sait pas encore
distinguer l'ouvrier a ia recherche d'un travaii du mendiant
et du demi-brigand, bref du vagabondparasite. Lu vrit, que
l'auteur n'a peut-tre pas assez mise en relief, est que ia pro-
prit foncire, encore demi (odaie, conserve ses anciennes
prtentions confisquer il son prolit les bras du travailleur,
comme le prouve encore aujourd'hui t'exempte de la socit
prussienne. en sorte que la liquidation totale du rgime
fcodai est ia condition d'un nouveau vagabondage normal.
Ainsi le vagabond est dans une premire phase le chasseur
ou ie pasteur nomade, dans une seconde l'esclave ou le sert
fugitif; dans une troisime, qui dure encore, c'est, selon les
cas, tantt un parasite social, tantt un ouvrier atteint par ies
rigueurs du chmage.
C'est dans ia priode de formation de la grande industrie
que le vagabondage antisocial a prsente te maximum d'in-
tensit par exemple, eu France, d'aprs Necket'0.ut)u vaga-
bonds furent misentutd'an'estationdansiaseuieanne H~.
Mais bientt les hommes de ia Rvolution franaise viennent
dfinir la seule attitude que puisse prendre une socit co-
nomie capitaliste ils veulent la fois ia rpression du vaga-
boud oisif et mendiant qui doit tre contraint au travail et
l'institution de secours eu faveur de ceux qui se trouvent
incapables soit de travailler, soit de trouver du travail.
Si maintenant, laissant l'histoire, nous faisons une tude
de ta tjdsiation rpressive applique au vagabondage par tes
socits europennes, nous dcouvrons une uniformit reite
dissimule par de nombreusesdiffrencesde dotait. Or l'unit
des conditions conomiques peut seule t'expliquer. Ou a
assur l'ouvrier la complte libert de circulation dont il a
besoin commeorgane de lu grande industrie on s'est attach
le distinguer du mendiant et du malfaiteurerrant, l'aider,
non le punit'. Lit Russie fait exception cite exige, sous des
peines svres, un passeport de celui qui se trouve eu dehors
du lieu o il est domicilia; c'est que ht grande iudustrio y est
encore dans la phase de formation c'est que les habitudes
cres par le servage n'y sont pas encore efaeces c'est enfin
qu'elle doit ragir contre les dispositions d'une partie des
races qui )a peuplent iv la vie errante.
A mesure qu'a reparu un vagabondage nonnat ti aux con-
ditions de l'industrie, les socits ont associ et l'on peut
mmo dire substitue un rgime prventif au rgime rpressif.
L'histoire de l'assistance publique confirme celle du vaga-
bondage. Une distinction doit tre faite entre les socitsqui
ont subi t'iunueuce de )a rforme et les autres. Les premires
ont de bonne heure cr une assistance publique, obligatoire
et lgale, mme en faveur des aduites. Hhex les autres, qui
sont la France, les nations de l'Europe mridionale et lu
Russie, les traditions de l'glise chrtienne se sont perptues
et c'est & faction prive qu'a t conn le soin d'assister les
gens sans travail. Nanmoins il convient de remarquer que
la bienfaisance secourt plus de personnes en Franco qu'en
Angleterre. 'Notons eu passant que l'auteur sembte ignorer ia
rcente lgislation franaise sur l'assistance mdicale obli-
gatoire.)
Cavagtieri s'attache montrer par une tude gntique
assez prcise et assurment nouvctte que les institutions de
bienfaisance organises soit par t'~giise, soit par t'Ktat, soit
par les associations prives, ne sont nullement des iiiiialies-
tations spontanes d'un altruisme dont les racines plonge
raient dans le monde animai, mais bien des correctifs ap-
ports aux ingalits d'origine conomique. JI proteste contre
l'opinion traditionnettequi en attribue tout le mrite au chris-
tianisme, car ces institutions ou d'autres analogues ont pr-
exist t'ere chrtienne et ont grandi d'abord avec ta pro-
prit fodaie, puis avec l'conomie capitaliste, tt faut
conserver des bras a l'agriculture et il l'industrie et par
suite soustraire des victimes la dtresse. Cet ottice incombe
d'abord aux grands propritaires fodaux, puis a la classe
qui possde les capitaux. Selon les moments et les rgions,
on prend comme agent de distribution soit ) Kgtise, soit une
administration publique.
La conclusion est que le vagabondage, distingu de la
mendicit, tend sortir peu peu de la classe des faits
punissables, tandis que ta socit tente par dineronts moyens
i)

de prendre it sa charge les travailleurserrants.


H serait injuste (te signaler dans l'tude d'un premier vo.
lume des lacunes que les auteurs auront sans doute souc! de
combler. Le mrite n'tait pas mdiocre, non scutoHeut de
dfricher cette matire, mais encore d'arriver une vue syn-
thtique. Visiblement MM. Fioriaa et Cava~ieri se sont
laisss inspirer par la doctrine du dterminisme cono-
mique mais ils u'ont pas t, comme tant d'autres de leurs
compatriotes, domins par elles au point d'y plier arbitraire-
ment les faits, ti leur reste tudier le vagabondage anurmat
et criminel, les relations qu'il soutient avec le parasitisme,
les tendances rgressives qu'it paratt tnanifestet'. Kux aussi
ils se prparent il rompre avec l'hypothse tombrosienne, car
un pur lomhrosipn n'eat pas manqu de nous montrer dans
les vagabonds sinon des sauvages, au moins des reprsen-
i tants de la phase pastorale et de faire du vagabondage un cas
d'atavisme.

Scipio StUHELE. La delinquenza settarta.)~<~< ~<


<oc<<~t(t (~ Cn'MM<<~ </(')! Mf~M. Contribution sociolo-
gique..fvoi.in.8,~ p. Miian, Trves frres, t8!)7.

Ce livre atteste un effort intressant dont le but est do


rattacher, par l'intermdiaire de la psychotogie eottecttve,
rauthroputogio crinuuettc il la sociologie. Sighete estime
avec raison que le dlinquant ne doit pas tre tudie seule-
meut dacs les prisous. U existe une crimioaiite Meute
taqueite participent largement les itautes classes, c'est ta cri-
m!uatite des partts. Le parti M'est que la secte traustorntce.
Or la secte u une psyehotogiequi lui est propre, la psychoto-
g!e de la foule modifie par faction du temps et le rote d'un
chef qui, s'it exerce une domination absolue sur ses coreli-
~ionnaircs, est tui-ntOne entieremeut asservi a une ide fixe.
La moratite de )a secte diffre radicalement de ia moralit
prive et d'autant plus que l'extension de la secte est plus
grande. Elle est une condition de la conservation de l'orga-
uisme collectif constitue par la secte. it en rsulte que le dlit
sectaire a son utilit. S'i) froisse la moratitc prive, il assure
la dure de la secte; or celle-ci est un agent de destruction
ou d'innovation ncessaire !a vie sociale.
La fouie est l'origine de l'Utat, mais par l'intermdiaire
de la secte, de ta profession et de ia classe. La foule et tu
secte, si ou )es compare l'tat dveloppe et civilise, restau-
l'eut un type social et primitif, mais ))ar la m~me elles d-
truisent des formes sociales et politiques vieillies et rendent
t
possible avnementde formes nouveHes.
Nous ne songeons pas a nier le talent dont l'auteur a fait
preuve. 11 est d'ailleurs intressant de voir un iombrosien
seutir aussi profondment l'iusunisance du point de vue du
mattre.
Toutefois la lecture de son livre nous laisse des doutes.
L'muvre se ramen il deux propositions tnaiuisment cunci-
liaMes; ia premire est qu'il y a des dlits chappant aux
classifications puuates et aux poursuites hontes, les dlits
des partis; ia seconde est que ces dlits ne sont tels que
compars aux exigences de lu )nor:t)e prive, car en eux-
mmes, ce sont des manifestations d'une morale propre, inf-
rieure en qualit la morale prive, mais toutefois utile et
lgitime, la morale sectaire. Mais ds lors pourquoi parler
d'une criminalit sectaire?<!

Ltso FE)Uti\Xt. DeUnquenti sc&ltrt e fortumatt..Sh<-


f/M ~< ~<M/m/M ('Mt<MCt~ e MfM/f (C'<M< <M~t<H<<f /M/-
/<~<7ff<' CM <<(!(' Htude de psychologie criminelle et
socinie). i vol. iu-8", 8') pages. Cotne. Omarini e Lon-
gatti, 18!)7.

Le fondateur de ia statistique morale, Qutelet, a fait


observer qu'elle n'enregistre qu'une partie de lu crimittaiite.
mais qu'entre la criminalit enregistre et la criminaiitc
ucculte il existe une relation constante. Cette hypothse.
ncessaire au statisticien, appelle videtntnent l'examen.
Toutefois, comment aborder l'tude du problme de ia cri-
minalit oceuite? Les donnes n'en cenappent-eiies pas par
leur nature mme toute espce d'analyse ? Lino t-'erriani ne
i'a point pens, t! y a des faits que ia ici laisse impunis, mais
qui sont pourtant trs semblables a ceux qu'elle frappe ils
rvlent donc l'existence d'une ou plusieurs classes de mal-
faiteurs caractrisespur la prudence et l'habilet. Dmontrer
l'existence de ces malfaiteurs, analyser leurs caractres, eu
chercher l'origine dans !e milieu social est l'objet du prsent
volume.
On peut distinguer cinq classes parmi les dlinquants qui
se soustraient & l'action de )a justice punissante 1" les
inconnu: les malfaiteursconnus, mais totrs et par suite
encourags & cause do rabaissementdes murs M'ceux que
t'insunisaoce des indices empche de poursuivre; 4" ceux
qui sont acquittes eu raison de leur prudence ou do icur
bonne chance S" ceux il qui teur astuce ou l'habilet de leur
dfenseur vite une condamnation proportionneUe la gra-
vit du dlit commis.
Ferriani estime que l'impunit des dlinquants croit avec
le caractre Intellectuel que revt ta criminalit: or l'impu-
nit est par elle-mme une cause de ia muttiptication des
dlits, Ici fauteur se spare de ta doctrine des substituts de
la peine a laquelle il avait cependant lev un monument
remarqttabtcen crivant ies .M/tt<w/)Ht fM/Hf/MfnN.
L'impunit de grandes catgories de malfaiteurs suppose
un certain ('tt de la socit et des caractres, une complicit
sociale dont il faut tudier les causes. La cause gnraio est
ta substitution des formes intellectuelles de in concurrence
vitale aux formes violentes mais cote d'elle il faut dis-
tinguer i" une complicit due la boute mat comprise
~ une autre complicit due une insensibilit partieiie aux
dlits; 3 l'absence d'ducation politique qui porte tant
d'hommes u prendre parti partout et toujours contre les
tout
agents de l'autorit; 4" l'indiffrence de ta personne:')
mal qui ne ta touche pas directement S' les habitudes pro-
fessionneites grce auxquelles un boucher est comme pr-
par au meurtre, un crivain public au faux en criture.
Ferriani consacre ensuite ta plus grande partie du volume
l'tude des formes de la criminalit occulte. A vrai dire,
toutes les classes de faits punissables y contribuent, les
dlits contre t'honneur, contre la proprit, contre ta per.
sonne. Partout fauteur s'attache justifier sa thse gcneratejJ
t'existence d'une correspondance entre la criminalit impu-
nie et les tuttes intettectuettes. L'tude du parasitisme lui
permet de tenter une synthse hardie de ces divers points de
vue. Il note (faits ta socit contemporaine la prsence d'une
camorra des parasites, et il cherche fixer les traits des
principaux personnages qui constituent t'aMtiation, le faux
pauvre, parasite de la charit, le spculateur dlictueux, le
manufacturierqui transgresse sciemment les lois protectrices
du travail des enfants, le propritaire d'horribles tauieres
uuatifteesmaisousd'ouvriers.t'entn'prenourd'industriestnsa-
lubres, enfin t'ioceudiairepur escroquerie. L'auteur sait faire
rentrer ces agents de l'exploitation humaine, si diucrents
qu'ils soient les uns des autres, dans une seule classe; it nous
montre les lieus qui les associent et les portent tous :'< chercher
l'aisance ou h richesse dans l'exercice d'un travail Hctif.
Ce livre est loin d'tre inutile t'antttropoiogie criminelle,
quoique ta mthode en soit peu rigoureuse. La marche
ascendante du detit est clue, aux yeux de fauteur, & t'indut-
'j geuee de la socit pour des formes de conduite fort scm-
b)ab)es son activit commune et moyenne. Lu criminatit
t OHicieHemeut dfluie se retrouve ainsi rattache a t activit
normale et pertnet d'eu reconuattre les troubles profonds.
Toutefois l'auteur n'est-il pas pessimiste t'cxecs? Hst-ii
vrai que l'lvaliou moyenue de l'intelligence profite a
ce
point aux pires membres de la socit La vrit He serait.
elle pas que )a justice et la policeont t bien plus exerces
a lutter contre les formes brutales et anciennesdu crime que
contre les formes astucieuses et rcentes' Xe serait-elle pas
aussi que ia peiue, ta coercition agit beaucoup plus efficace.
ment sur le graud criminel que sur le petit dlinquant en
raison mme de i'iutettsite qu'on peut alors lui confrer 7
La consquence n'est-elle pas qu'il faut recouriraujourd'hui
'aux substituts de la peine?

D. /<
RAFAKL SALILLAS. E delinouente eap&nol. El len.
guaje f/c Cr<wtM<'< c.~</Ho/Sfw ~H~/o, i vol. iu.8",
~43 pages. Madrid. Victoriano Suarez, I8Hu.

L'usage ordinaire d'une langue spciale, t'argot, est un des


caractres qui distinguent le plus le malfaiteur d habitude,
non seulement de l'homme uot'mat, mais du criminel d'occa-
sion. Ou conoit donc que t'antbropoiogic crimitiette sou-
mette l'argot a une enqute mthodique. La nature de cette
tangue peut donner lieu a deux hypothses opposes. L'une y
voit un retour aux tangues des races infrieures; l'autre, une
tangue professionnette, partant, une simple variation mor-
bide de la langue nationale. La premire thse est celle de
l'cole lombrosienne M. Satittas apporte a l'appui de ta
secoude une grande abondance de preuves.
L'argot des criminels espagnols n'est nullement une
langue sauvage; plus pauvre que h langue normale, H cor.
respond toutefois nu mme stade linguistique, C'est une
langue proft'ssionnette qui exprime, nou pus )'tat mentat
des personnes qui ta partent, mais t'nctivit des associations
constitues par elles. Elle tond & un double but r~-(''M~t'
vivement les actes (tes associs et les ~.m~x< a ta socit
rgutiero. Dissimulation et reprsentation, telle est donc ta
formule de t'argot espagnol.
L'auteur a soumis a une tude minutieuse la ~f/w~M/a.
langue des associations criminelles proprement espagnoles et
le (.'<n ~<<, langue des gitanos. t) s'est attac)) nous
donner un dictionnaire complet de l'une et de t'autre. H
constate ce curieux phnomne; c'est que, grce la vie des
prisuos, le Cft/o a rempiac la ~'Mtn<, non sans lui
emprunter beaucoup de tours et de ioeutions.
On le voit, Finterprtation de l'argot divise les anthropo-
logistes, comme font les autres donnes de t'observation
apptique aux criminels, H nous SMnbte toutefois qu'une
synthse des deux doctrines est ici possiMe, sinon aise.
L'argot des malfaiteurs indo-europens reste une tangue
iado europenne; il ne revt pas, aux yeux des linguistes, les
caractres (les langues parles par les races noires ou jaunes
l'opinion tombrosienne cet gard ne soutient pas t'examen.
Toutefois l'argot est l'expression d'une~octivi t d'ordre inf.
rieur, exerce par un groupe parasite~H prsente donc les
caractres d'une rgression et serait impropre a l'expression
d'ides ou de sentiments sociaux normaux. Il correspond
donc, en une certaine mesure, l'infriorit psychologique
de ceux qui le parlent. Dans tous les cas, ta rotation de l'argot
et de la vie chminctto montre que )e tangage n'est pas un
fait extrieur lu socit, comme le pensent les sociologues
conomistes, mais un lment social de premire impor-
tance.

~tCr'OHO. n gergo net norma.U, net dgnrt! e


net crimina.U (/~N< c/x'j <M nwmaM.f, les f/~te~
pt ~McnMX'Hfk), 1 vol. grand in-8", )8u pages, ~urin, Bocca
frres,-t8t)7.
L'argot, selon Xiceforo, est un moyen de dfense; il atteste
ta tutte d'uu groupe humain contre la socit ou une partie
de la socit. Ce phnomne prsente trois degrs le pr.
mier est une modification de l'ordre des lettres le second
est marqu par ta prdominancede mtaphores gnratement
hideuses le troisiOne prsente un nouveau systme do
phrases compltes. Ou t'eut observer ces divers moments do
t'tude de l'argot chex )e coupte amoureux. chez ta prostitue
et te <fM<), dans le peuple et enfin ehex les criminets. L'argot
des ouvriers est un cas particulier du phnomne de ta tutte
des classes. Au contraire, l'argot des matfaiteurs a pour cause
une lutte soutenue contre la socit tout entire. )t doit donc
tre beaucoup plus dveloppe aussi ta complexit en est-
elle porte au maximum dans le jargon des associationsde
mutfaiteurs. tels que les camorristes. les ttabitants des
carrires d'Amrique de la ViHette, les gyptiens et les
Hottmieus.
Quetques-unsunt voulu voit'dans t'arRot une langue nou-
vetteeu voie de formation. Xiceturos'eteve ttautement contre
cette opinion. L'argot doit s'adapter au milieu social (lui
l'emploie, et ne survit qu'A cette condition; )oin d'tre le
Kenne de lu tangue que parieront les hommes de t'avenir,
c'est un cas de rgression. L'argot rappeUe tes tangues des
sauvages c'est ta mme prdominance des formes concrtes,
le mme usage des mtaphores. Cette explication trouve dans
le systme d'criture qui accompagne cette langue une cou-
tirmation. Les malfaiteurs qui partent ar~ut se servent, pour
crire, de hierog)yphes et de symbotes ainsi que les popula-
tions primitives.
Ou le voit, l'auteur perfectionne et complte Ja thorie de
Lombroso sans ta modifier substuutietiement. La mthode
qu'il applique est gntique en apparence, dductive au
fond. Si le criminel est un sauvage, l'argot doit tre un
retour la tangue des sauvages, telle est la formule que l'ou
pose avant t'examen des faits. Mais pour vriner cette thse
il faudrait tablir que l'argot est cr par des associations de
crinucets-na et non, comme le soutient SaiiHas, par des
groupes professionnels. La preuve tire des hiroglyphes
n'est gure convaincante. Les peuples qui, comme les Hgyp-
tiens, les Chatdeenset les Chinois, ont cr le systme idogra-
phique n'taient rien moins que des sauvages, tdentiner t'tat
sauvage et les stades primitifs de la civilisation, lesquels
attestent des formes mentales trs leves, est commode,
mais c'est en abusant ainsi de !' peu prs que l'cole !om-
brosienne s'est si profondment discrdite et a pu tre
accuse pm' Vh'chow de faire une caricature de ia science.

H. ~MM~OM ~-M.
PERHEttU et StGHKLK. CromMhe criminali itatitme
if'/<roM/('.t c<ttM<M ~~'<'M<tM:. Mitan, Trves frres.
tHUC.

Dans ce volume, dont lu lecture est attrayante et mme


eutratuante, les auteurs tudient la crimiuutit itaiit'nne
l'occasion de plusieurs procs rcents dam i'un desquels
t-'errero a figur comme prvenu Ces procs ont pour objet
des faits politiquesaussi bien que des crimes de droit coin-
mun. MM. Ferrero et Si~'eie out fart d'en faire une sorte
de tableau de la vie morate de t'ttatie, nue tude de la com-
plicit de t'Htat italien. C'est, par exemple, le tabteau du
brigaudaRC, toujours vivace en Sicile et surtout eu Sardaigne.
o t'autoritc traite avec lui comme avec une force sociale, o
l'opinion populaire l'entoure d'une assex chaude sympathie
c'est le rcit d'une attaque nocturne dirige le 13 novem-
bre <894 pur une bande de cent brigands contre la maison
d'un riche propritaire sarde du bourg de Tortoli, une lgcnde
du moyen ~e transporte eu pleine vie actuelle; ce sont les
funraittesd'un camorriste qui, retire des afuires criminelles,
meurt entour de ia vnration publique c'est un crime
d'amour commis par uu pompier napolitain et qui, sans
qu'on voie Lieu qucts traits )e distinguent de cent autres du
mme genre, meut jusqu'au dlire la mobile population de
Naptes; ce sont les atroces et iniques applications faites du
domicile forc de prtendus rvotntionnaires c'est le
procs d'une socit secrte rsumant tes aspirations confuses
du socialisme italien, sa foi nave en Marx dont, comme
t'avoue t'errero, les mieux informs connaissaient la pense
pour avoir lu le titre de son livre.
Cette (cuvrc confirme eu style pittoresque l'enseignement
que donnent les svres statistiques de Uodio. Elle nous
montre l'Italie soutirant la fois de la criminalit violente,
dont te brigandage sarde est la plus grave manifestation, et
de ta crimiuatitastucieuseet voluptueuse, rpute compagne
i)~ H!.)-i) )))'oi<t (k' t))n.' ';u'it !fij<)t d'um' jXtUMuitc in.jtit' put' lu jtuti-
t)<(ur Y?
de la civilisation la plus ratHne. Elle nous apprend aussi
que le sentiment de la solidarit morale est en atie insut!t.
samment dvelopp, sinon on He verrait pas diriger contre
les rvolutionnaires et les socialistes tous les ellorts d'une
magistrature parfois complice du I~rigandage. Le bizarre
socialisme de i'ttatieest a lui seul un indice de ce dfaut de
solidarit, car, l'Inverse de ta Frauco, de t'Attemagne, des
Pays-Bas et de t'Angteterre, c'est surtout l o ii n'y a pas de
proltariat industriel, c'est dans les rgions arrires de
t'mitie, de ia Calabre, de ta Sicile que ce socialisme est
dvelopp. H u'n pas russi & s'itnptanter dans la grande
ville iudttstrieitede Miian c'est que les classes cultives ont
couscicucc de leurs devoirs, tundis qu'aiiteurs elles ne
songeut qu' exploiter les ressources prcaires de l'tat.

EfRt FRRtU. Les criminets da.ns l'art et la littra-


ture. traduit de t'itutien par Eugeue Laurent, t vot. iu-t~
de la N<M<~<' </f ~</o)fo;)/c <'<jH/<'mpo<'fft<Paris, Flix
Aican, ~t):.
Taudis que les criminalistes de t'ecote classique tudiaient
les diverses catgories du crime eu t'attribuant un homme
moyen, les artistes et les crivains, devanant ta tche de la
science tudiaient le criminel et recueillaient des observations
prcieuses ordinairement fausses par des vues subjectives.
Telle est l'ide generate que Ferri dveloppe dans ce petit
volume avec l'abondance et la etarte si apprciesdes lecteurs
de ses uiuvres principales.
Les arts plastiques ont peint incidemment le criminet-'n.
Les donnes do l'art sont toutefois negiigeabtes en compa-
raison de celles de ta littrature. Les dramaturges et les
romanciers donnent au criminel la premire place. Sans
doute ils ngligent les microbes de la criminalit, ces petits
dlinquants dont chaque pays civilis compte des centaines
de milliers. C'est presque exclusivement l'homicide qui les
intresse. Des cinq grands types criminels reconnus par
l'cole italienne et qui sont le criminel-n, le criminel alin,
le criminel d'habitude, le criminel d'occasion et le criminel
par passion, la plupart n'ont peint que le dernier. Gnrale-
ment its ignorent la psychologie criminelle et attribuent au
dlinquant les motions, les raisonnements et les remords de
l'homme normal.
Le gnie de Shakespeare l'a prserv de cette erreur.
Macbeth. Hamtet, Othetio (pourquoi Ferri ne cite-t-il pas
Rici)ard Ht?) sont les reprsentants immortets, le premier
du crimiuet.u, le deuxime du criminel atin. te troisime
du meurtrier par passion; Shakespeare va jusqu' Mous mon-
trer Macbeth sujet & t'piiepsie psychique, ots'it peint dans
iady Maebeti) ia femme criminoiie, it ta fait, avant Lom-
broso, plus insensible et plus froidement rsolue que u'est
l'homme.
Parmi les romanciers modernes Dosto!evsky rivalise avec
Shakespeare pour la profondeur des analyses, la prcision
des observationscontenues dans les Snaff <)' f~ h MtMMOM <<<~
morts et la vrit enrayante du type incarn dans l'tudiant
Raskotnikoi.
L'authropoiogie criminelle et ta psychiatriecontemporaine
inspirent certaines uvres d'Emile Zota, de Bourget et de
Gabriel d'Annunzio. Le Jacques Lantier de la /?<<' /)<(!<?<'
prtend reprsenter le criminel.n, mais Lombroso n'a pas
trouv le portrait ressemblant. Zola n'a d'ailleurs rien com-
pris aux lois de l'atavisme. De ia psychologie crhniaette
Bourget ignore les premires lignes, rellement infrieur en
cela Gabriel d'Annuaxio qui a su nous peindre le criminel.
n sous les habits de l'homme du monde.
Aujourd'hui le criminel relve de la mthode scientifique,
non de l'analyse tinraire. La littrature a une tacite plus
noble. < L'art n'a que trop glorifi les criminels il faut qu'il
tourne dornavant sa lumire radieuse vers la multitude
des malheureux. Dj t'en peut voir poindre i'aube do cette
volution. L'art qui, grce la Cw <fc <'ot!c<<' rm, de
M" Beecher'Stowe et uux CoM~ de Tourguenet, a donn
une impulsion dcisive la conscience collective contre l'a-
bomination de l'esclavage domestique en Amrique et en
Russie, l'art qui, par les .'?<Mt'<'<)<~ </e ~< mat~K )Ho<-<<!
de Dostoevsky, a provoqu l'indignation du monde civilis
contre les infamies do l'esclavage politique, l'art donnera
la socit future, prvue par ceux qui tudient anxieux
t'votution sociale, la force d'un sentiment coitoctif pour
combattre l'esclavage conomique, ia source et la base de
tous les autres (p. H8). <
U' DALLEMAnXH. Stigmates ana.tomiquea de la cri-
minalit. t vut. iu.K". paris, Masson et CMuthier.Vinars,
!tt96. Stigmates biologiques et soctooefiques de la

criminalit.vot. in-8". Thoriea de la criminalit.
1 vol. iu-8".

Les trois petits votumes publis par M. Dnttemagne com-


posent en riditc une seule uvre. C'est uue vue d'ensemble,
une tude critique gnrate de t'authropotogie criminette,
une synthse des rsultats qu'elle a douus. L'auteur n'a
pas l'esprit uttitaterat, mais s'il accepte, accueille et coudtio
toutes les vues vraiment scientifiques, il laisse les morts
enterrer leurs morts, je veux dire qu'il laisse entiet-oneut de
cte ta doctrine ctasstque. Son souci est de s'c)ever au-dessus
des querelles violentes qui ont cciate au Couvres de Cenve
entre les deux coles scientifiques, dont t'une cherche
les racines du crime dans t'orgauisme individuel, pendant
que l'autre n'aperoit que des causes sociales et expUque par
un tnitieusociid modifiante les nombreuxstigmates prsentes
par la tnajoritc des criminels.
Les conclusions du premier volume, consacr a l'ana-
tomie dncrhnine), sont surtout ngatives. L'auteur est conduit
par une tude du squelette, des viscres, des organes des
sens, des tguments, des membres et du poids, il une double
conclusiou; ta premire est qu'it n'y a pus de type criminel,
la seconde est que les tares de ta dgnrescence,les stig-
mates anatomiques s'observent pius frquemment ehe~ les
criminels que chez les hommes normaux.
DaHemagne s'appuie surtout sur les donnes du grand
ouvrage de Haer, /.<* ('<'<)<Mf< au point de CMC <n~/u'o~)'.
Ce livre, qui date peine de quatre ans, est ancien si t'en a
gard l'influeuce qu'il a exerce. Pour ta premire fois,
t'ecoteitatienue tait combattue sur le champ mme qu'elle
avait choisi elle se voyait opposer nneampte collection de
faits authropotogiques,recueillis avec prcision dans les pri-
sons de t'Attemagne. L'ouvre de Baer est reste peu connue
en France, et Dattemagne a bien mrit du pubtic en en fai-
sant passer les principaux rsultats dans son livre.
Quel est pour t'anatomiste le problme de l'anthropologie
criminelle? C'est de savoir si la structuredu crim iuet prsente
les caractres principaux, soit des races actuettes les plus
basses, soit des races prhistoriques; c'est encore de savoir si
le criminel partage certains caractres avec les espces inf.
rieures a t'ttomme. Selon i'coie italienne, H aurait souvent
te pied prhensiie comme les singes; ta longueur de ses bras
serait suprieure & sa taille, comme il arrive chez beaucoup
de races sauvages o les bras sont ptus longs que les jambes:
il serait prognathe ainsi que les races noires et beaucoup de
crnes prhistoriques; les sutures du crne prsenteraient
des synostoses plus tt qu'il n'arrive citez les hommes nor-
maux t'ossiiteation s'y ferait d'avant en arrire comme
chez les races infrieures; enfin la capacit du crne serait,
dans 40 p. tOO des cas, intrieure a ta moyenne. Le cerveau
prsenterait des auomaties, telles que le ddoublement do la
premire circonvolution frontale, et metne certains caractres
communs aux mammifres infrieurs. Daiiemague montre
que, sur tous ces points, les observations (aitesdans tes diff-

et
rents pays donnent des rsultats contradictoires, fi s'attache
surtout prouver que. te crime tant une manifestation intel-
tectuctie. le type criminel, s'ii existe, dpend avant tout de la
structure de la capacit crnienne. Or il conclut
1 avec Ladame qu'il n'existe aucune anomalie constante
dans la capacit crnienne des criminels *,etque quelques
cas isots de types anormaux dans les sries extrmes ne
constituent pas une vraie atypie. Le volume du crne ne
diffre pas du tout dans ta trs grande majorit de celui des
non-criminets. Jamais on ne pourra conclure & la non.cri-
minaiit d'aprs la grosseur du volume de la tte, encore
moins distinguer par ta des catgories spciales de dlin-
quants a 'p. St): avec Debierro < que le cerveau des cri-
minets ne prsente aucun type pnrticutier, aucun caractre
spcifique et les frquentes anomalies atavistiques que veut
y voir Lombroso, lorsqu'elles existent, n'ont aucun carac.
tre de cause eitet

H. L'tude dos stigmates biologiques et sociotogiques est


ptus fconde en n'-suttats que i'tudeaaatomique. Ou voit se
dessiner non plus un type zoologique, mais un type tnorat et
social, manifeste moins par les traits du visage et l'allure du
corps que par la conduite, par la taon de ragir sur la
socit.
H suftit l'individu, nous dil l'auteur, de se
conserver et
de se reproduire.Les stigmates anatomiques et physiologiques
affectent ces deux conditions. Mais les animaux se conservent
et se reproduisent sans former la plupart du temps des
groupes sociaux tendus, La conservation et le progrs des
socits ont donc des couditions propres. L'absence de quel-
qu'une de ces conditions constitue le stigmate sociologique, it
se ramen a !<~fff'oH, laquelle est totale ou partielle.
L'inadaptation partielle est relative a la race, ta nation,
la famille, l'individu l'inadaptation individuelle a elle-
memp deux tonnes extrmes, la mconnaissance de la len-
teur de i'vutution et le misouisme.La gravite de lu conduite
criminelle rpond aux diffrentsdegrs de l'inadaptation.
Les inadapts ne sont point tous des criminels, mais tous
les critninets sont des inadapts,depuis le voteur homicide jus-
qu'au criminel politique qui sacrifie sa vie a ses convictions.
Les stigmates sociologiques Me se prsentent que l ou exis-
tent des stigmates biologiques, parmi lesquels il taut compter
les stigmates psychotoniques.
Les stigmates biotogi<)ues proprement dits sont l'analgsie,
la disvutaerabititequi t'accompagne et enfin le dfaut d'inhi-
bition. L'auteur estime comme t'eeote italienne que le cri-
minet a une sensibilit moins dveloppe que l'homme nor-
mal, en d'autres termes qu'il est accessible a des classes
d'motions moins nombreuses,en revanche que cette sensibi-
lit incomplte est plus irritable, ptus impulsive, moins aise
mattriser.
Les stigmates proprement psychologiques sont avant tout
l'aversion du travail et l'imprvoyance, puis le dfaut d'atten-
tion, la faiblesse de l'invention, la faiblesse des sentiments de
famille, l'absence de sens moral.
L'auteur, vu la brivet de son uvre, n'a pas cherch
montrer la dpendance des stigmates sociologiques l'gard
des stigmates psychologiques et de ceux-ci a t'gard de la
classe infrieure mais le lecteur quelque peu habitu la
psychologie y supplera aisment. On sait quels liens troits
unissent l'attention l'inhibition, le travail a l'attention,
l'adaptation sociale au travail.
La lecture de ce livre contribuera beaucoup la diffusion
de l'anthropologie criminelle transforme en une simple
applicationde la psychologie exprimentaleet de la sociologie
compare l'tude des criminels.

IM. Eedestroisime volume du savant belge est consacr


doctrines professes par les anthropologisteset
noe revue
les sociologues sur les criminels. L'auteur prtre l'ordre
logique l'ordre historique. 11 tudie tes titories qui, dans lu
gense du crime, accordent laprduminanceaulucteurindi-
viduel (Lombroso, Benedikt, (!!trofalo),cetlesqui t'attribuent)
au facteur social (Tarde, Lacassagne et l'cole do Lyon,
Orchausky, Haer, Naecke et la nouvelle cole attemande).
celles eudn qut teuteut une syuthese des vues opposes (ex.
la thorie de la dgnrescence, celle de t'infuutitismo, enfin
la thorie a la fois anthropologique et conomique d'Enrico
Ferri). Cependant les variations sont tudies historique-
ment.
Sans aucun doute il y a quelque rapport entre l'ordre
logique et l'ordre historique. 11 faut que les antithses se
soient d'abord heurtes, pour qu'une synthse puisse tret
tente. Nanmoins ces coles qui ont toutes une conception!
commune, la notion du dterminisme scientiRque, participent,
toutes aussi aux metnes ides directrices toutes admettent te
dterminismepsycho-physiologiquedes actes humains, toutes
admettent la solidarit sociale et la possibilit de l'tudier
scientifiquement sur ce point Lomhroso et Marofato ont
toujours pens comme Tarde et Lacassagne, et, comme
E. Ferri le rappelait dans un article rcent sur le Congrs de
Genve, il est faux que i'ecote italienne ait jamais contest
soit le rle du milieu physique, soit celui du milieu cono-
mique. Seulement l'cole italienne a pris pour point de dpart
le darwinisme; cite y a vu non une simple hypothse, mais
une vrit dmontre, c'est pourquoi elle a identifi sans hsi-
tation le criminet-ne l'homme prhistorique et au sauvage
actuel. L sont sa note propre et sa prilleuse originalit.
Ajoutons que les quelques lignes consacres par Datte-
magne aux travaux de Baer, de Naecke et de Koch ne peuvent
gure donner une ide de t'importaace prise par t'coto atte-
mande, et de l'influence exerce depuis quelquesannes sur
la psychiatrie criminelle par ses reprsentants.
Ces rserves faites, l'ouvrage de Dallemagne prsente une
srie de notices claires, suffisamment compltes et aptes
initier rapidement le lecteur aux discussions et aux travaux
de l'anthropologiecrimineUe. S'il passe ainsi cette science en
revue, c'est d'ailleurs pour en mieux indiquer les lacunes et
en mieux formuler le problme fondamental.
Elle dbuta par une thorie du type criminel fond sur des
caractres anatomiques. Ce type tait prsent comme un cas
d'atavisme, comme la rapparition d'une varit des races
infrieures au sein de la socit civilise. Mais )a critique
obligea Lombroso modifier ses vues, abandonner i'ide
d'un type anthropologique opposable celui des races nor-
males. it manqueau typctombrosien lu persistance, lu rgu-
larit, l'hrdit, comme le rappelait l'opinion de Virchow*
)p. 4~. A ct du criminet-n, Lombroso a donc ptac te
fou morat, t'piteptique. le criminel d'occasion, le criminet
par passion. L'uvre de Lombroso tait ne t avec plusieurs
tares originelles anthropologiques. Htte versait dans l'erreur
des classiques qui avaient rig le crime en entit juridique.
Puis, aprs avoir englob la collectivit des erintinets sous
une seule rubrique, ettc commit ta faute de paratre tudier
et caractriser exclusivement le criminel t'aide d'uae srie
d'attributs, les attributs anatomiques. Elle conclut impru-
demment u l'existenced'un type criminel auquel eite s'effora
de ramener toute t'arme des dlinquants. (p. i7).
t! est impossible la critique de ratifier ce jugement. Lom-
broso a t, avec Comte et Marx, la personnalit ia plus hau-
taine de la science contemporaine. Qui lui fait une objection,
mme une objection de fait, devient indigne d'tre discut.
Debierre et Naicke foMt-its sur les crnes des malfaiteurs ou
des fous moraux des observations contraires aux siennes?`l
Debierreet Xa~cke deviennentaussitt des hommes au-dessous
de la moyenne'. Virchow appelle l'anthropologie criminelle
une caricature de tu science Virchow est donc convaincude
H!<A'oH<w', c'est--direde dmence snile. Lombroso n'a rien
concd ses adversaires. Ses variations apparentes sont des
consquences de sa thorie du type, thorie dont I)altemagne
cite prcisment ta formule. Le passage insensible d'un
caractre a un autre se manifeste dans tous les tres orga-
niques il se manifeste mme d'une espce l'autre; plus
forte raison en est-il ainsi dans le champ anthropologique o
la varit individuelle, croissant en raison directe du perfec-
tionnement et de la civilisation, semble effacer le type com-
plet. On doit accueillir le type avec la mme rserve qu'on ID
met apprcier les moyennes dans la statistique.

tt) < Sa n'bhe !nMt))f fd inftfxnn tnsiente <))'))' <t)tt'xi!!t <:mttittn~'ht )<U!)V<t
!<cu')):t se noi -<:n<h'ssi)nua t'u!!))in<)''n'. prendt'ndot'' sul 'fio. o)h' jnn-fM
obbieziotti ''hf. ri t)tu"t'ut)o notttitt) motto al ttisotta ')';))!< tttt'di)). (-otua
NM't-tfe.Mt')uuv)-i'r.)h'))i':rn', Xakar)'wi!):i.. ~Lttttthfo-o. i.<ct)'t-M.erie~,
voi. Il. p. 9t.)
Aussi le problme a.t-i) t pour Lombroso de dcouvrir
les anneaux qui relieraient le criminei'n l'homme normal.
Parmi les auteurs des crimes privs, i) u d'abord dcouvert
l'pileptique, le fou moral, puis les criminels d'habitude,
d'occasion et de passion. C'tait trop peu lu criminalit poli-
tique lui a revoie d'autres anneaux il en demande mainte-
nant a la criminalit occulte.
S'il n'existe pas de type criminel, s'il est impossible gale-
ment d'identifier, comme l'a fuit Benedikt, le crimine) et le
neurasthnique, faut-il se rallier soit aux vues de Tarde, soit
A celles do Lacassagne, faire du criminel un produit social et
conclure que < ies socits ont toujours les criminels qu'elles
mritent? L'auteur constate la prpondrance de ce point
de vue dans lu plupart des pays d'Europe, mais il ne peut s'y
rallier, vu que les stigmates de dgnrescencesont beaucoup
plus nombreux chex les dlinquants que chez les hommes
normaux.
Il admire )a synthse expose dans la S<!CM<of/<f f<'t'M<Hf~<'
d'Enrico t-'erri et y voit t'expose le plus scientifique et le plus
mthodique des opinions de l'cole positiviste (p. i93).
Le crime serait l'ellet do conditions anthropologiques,
physiques et sociales. Le facteur individuel seul permet d'ex-
pliquer pourquoi dans un mme milieu et dans les mmes
conditionsde misre, d'ignorance,d'ducation nulle ou vicie,
sur 1UU individus M) resteront honntes, S prfrent le suicide
au crime, 8 autres se font mendiants. !< deviennent alins et
~S enfin dlinquants. Chaque ordre de causes intervient diff-
remment dans chaque catgorie de dlits. Les causes sociales,
qui prvalent dans la gense des vols, ont beaucoup moins
d'influence sur celle des viols ou des meurtres.
Toutefois Dallemagne ne peut se rallier aux vues de Ferri.
La gnralit de cette thorie, t tout en !a soustrayant aux
objections et aux contestations, ia soustrait galement au
domaine de la criminalit; car tout acte est ia fois rsultante
de l'organisme et du milieu, et le crime, en restant dans la
rgle commune, ne s'cn trouve pas plus expliqu pour cela
Cette critique n'aurait quelque force que si les organismes
et les milieux ne comportaient aucune diffrence, aucune
variation
Quelle marche faut-il doue suivre? L'auteur rappelle que
les besoins constituent les lments toujours actifs qui cons-
tituent la trame de notre vie nutritive, gnsique et psy-
chique Mais les besoins sont modifies et spcialiss sous
t'influence de rvolution individuette et du milieu < l'en-
semble de ces modincations traduit l'adaptation ou i'inadap-
tation sous toutes ses (ormes inadaptation que permettent
d'tudier les stigmates sociologiques.
Les dviations morbides du besoin peuvent servir de base
a une tiologie fonctionnelle du crime Elles permettent
d'on dterminer le vritable facteur biologique.
De la rsulte uu programme d'anthropologiecriminellefor-
mul trs clairement en ces termes
Envisager i'voiutiou individuelle et l'volution sociale
comme subordonues trois ordres de facteurs que, faute de
dnominations mieux appropries; nous appelons nutritifs,
gnsiques, intellectuels. Hamener tout acte normal, iudivi-
duel ou social l'action plus ou moins directe de l'un de ces
trois facteurs ou de lu rsultante do plusieurs d'entre eux.
Rechercher dans les actes pathologiques sociaux les dvia-
tions morbides ou tout au moins anormales de l'un ou de
plusieurs de ces facteurs. Comprendre dans ces dviations
tout d'abord les effets de la non-satisfaction pure et simple
des besoins, ensuite la non-satistactioud'un besoin dtermin
auquel des circonstances particulires ont imprim un carac-
tre qui peut le rapprocher ou l'loigner considrablementdu
besoin normal, physiologique. Enfin, rechercher dans les
tats dgnrs ou dsquilibrs ta filiation des anomalies
successives subies par l'un de nos facteurs ou de plusieurs
d'entre eux, anomalies dont !a rsultante finale constitue ou
engendre les tats de dgnrescence ou de dsquitibre-
ment.
'Ut')f:MHSECTtO!<
SOCIOLOGIE CONOMIQUE

t. THXofUHSCO~OMtOUKS
!'iH')).t''MX';0)sSt]t)A!H).

~M~MC~'OM.
It ne serait pas possibte, ni du reste convenable dessein
au
de ce livre, de passer eu revue ici toute la trs abondante
littrature conomique actuelle. Pour toutes les tudes toch-
niques sur des questions spciales, telles qu'eu ce moment le
mtattisme montaire ou le protectionnisme ou t'agrarisme,
pour tous les travaux plus concrets qui concernent la tgis.
lation conomique, projets, rsultats, critiques, pour toutes
les nombreuses recherches de faits, statistiques, monogra-
phies, etc., accumulation mthodique de matriaux
pour la
science de demain, on no peut que renvoyer aux publications
appropries. Mais les probimes gnraux de l'conomie, la
porte d'ensemble, la mthode, intressent la science sociale
tout entire et ont peut-tre beaucoup& tirer d'elle. Pour tre
surtout spculatif, cet ordre de travaux n'en est pas moins fi
tort condamn par certains, laiss do ct par beaucoup
d'autres les tudes plus concrtes ou plus spciales, la simple
observation mme, impliquent, qu'elles le veuillent ou non,
une solution au moins provisoire ces problmes, ti est lgi.
timo, en marchant,de se demander o t'en va; et, de fait,
on
va toujours quelque part, pourvu que t'en marche.
Quel est l'tat prsent de la thorie ou des thories de la
valeur? Qu'y a-t-it d'acquis, qu'y a.t.ii a rechercher encore
et peut-tre indfiniment, touchant la nature et touchant la
mesure de la valeur?9
Eu quel sens et dans quelle mesure la science conomique
actuelle peut-elle fouder dos systmespratiques tels que sont
les systmes socialistes '?
Quelle conception de principe est essentielle a tu science
conomique en tant que science soeiate? Kst-ette ta science
primitive et tondamentate,lu vie conomique <'taut ie substrat
et tu condition de toute ta vie sociate, ou est-elle dpendante
de la science sociale gnrale, ou mme en quel sens et il
quelles conditions est-elle une science sociale '?1
Telles sont les questionsque nous donneut occasion de poser
un certain nombre d'ouvrages rcents'.

A. /. <'~)' c< la M)<'sKt'<'</<'la M/cur.

La legge del Valore seconde la dot-


Dott'" BKHARUI.
trina deMa UtHitA Limite (~(t loi </c < r~t' w~M lit </o<
-'<~ <'~7;'<t-' /(t<). Uutogna, Gartigiititil
ngti, ~8:)5, in-8" e
Ml p. stratto dai numeri di settembre ed ottobre i89S dei
<t')<'MM/<' f/Cjy~ A'COOOMt.<<<

On a beaucoup crit, en ces dernires annes, sur ta thorie


de ta valeur'. Ce mouvement d'tudes est du saus doute

ili Xuus avon). D'-nni i-uos )a t'ttbri'jM'' ~'fM mt rrt'tMin t)~tnhn' ')'"u-
YtTi):< ')"i "H!' sunt parvL'aus et 'lui n~ Mtt~'ht'ut pas ttUt );t'undt'!<
<jm.~tins j)rA-t''<)t'nt<<.
f~~ AjX)' )t's uuvntt! i"tt')aot<'Htam <h' )tt'n)!<'r. Cf'MM(A'!<M t'u/
M'<f/.tcA/~i)fMt'e. f!<T)

t.. \Y<)t'tM. t't'')ntM' po~~t~Mf /'<ft'< t87t.
Md. t!<8U. StKtttcy Jt'vu)))!, T!t<)t- o)' ))t))iU<-tU c<'ot)"")\. )8Tt
X''unmm). n'<'t'/M'/<M/W<7 ~f'Mnt/tf'yft/r'* <)'m< h' /fHf/t('/t do Mch't)-

))''t'ft: Le n)~mt'.<?)'Mnf//<f'?f</<'<' ('oMi!K''~t<<M/MfA<'<Ti)ttitW)t. t)!8U;
.) peut '-it'-r Putxtiti!. )t'f<'f. /'r<-KM</ .tW't'<. )ttM).
/;A'/ n~ t'a/Mf, Xt'w Knxhmdt't'. juli )M!!t.
(:))H')f. t'A~Mu.
Yo)))'t)t<)r~. /M/emu / ca~o
;v/H<u </< ~nM/M:<f<n~. )tnh<j<tn'. )S!H.
t)'f)-<M. \Vi'')t. )))<h'r. )SSt.

f~' tn't))'
Von Wic~er, t'f~t'MM~ </<
~f MH<a;<cAe n'f~/f. Winn.
BntUtoftHt'r, ))t(!H. L'' ))h''Mh-. 'Ac /A<< o/' )'/< Atnuds of Uff tmtt'ri-
ciui At'inh'nn-. )!im. t)u)nn-)t.t\tt-t'k.<t)'K<)f/:t?f/<' </<*<' 77'nf des tf't't't-
A<t~<(-/'K ~aff-f-)''(-)-/<<.JahH.. t'.nat.);. u. Stat. X. t- )!')..
Xtt) )K8K.
Lt* tttUm'. Ad. U')' thut!: ) ~f(M<r~'<<'<-4t'/)t/M- .S<MhM't.<.tm.c/f/'<en.
W'<t))'u''tc/tff t'out U'fr/.X~'it"')).). <). ~<!)<)H)t~' StM~tswisit.'tt~t.'ttiift.
XXt) lid.. tS!t)i. t!ar)))''r. t.'etf<'</' Mft/'e .\ft'f/m<)'cM<tM))'<t<'MK</f<'<'<-
B<'t'a<'<!Xt<'Aft;;HMH 'ff r'')'!H-ttt<'(<<'Mftt tt'<')'(&<'a'ir<. Xt'itich. f. )t. )tt'i!. St.
Wis<. Ktiitt. !!)')t!t))in)t. H'<'<'/'Mf't<' M. H'fr~/Mft:. Jtthrb. f. txtt. <h.)<.
u. Stttt. X. t- X\'). )t.t. t8!t!i. Wick!.)-)../)/<f<~< y f<W)oMfca<.S<-t<'n<-e

t. ~fotfMb of //<<* <)'
o~ )''<f< <!)!!. Lot'ift. ta /mr<H del <'<<'<'
Mf~(~<wmMfM<<t//f<M<. An'hhi" ~iuh'ti' XXV))t. Le m~th' ~0 .S<M'~M

aMf<t'Mt', ttimi t'Kcunootia [tutitit'~ tmttth~ia. CX. Gt-iuiMtti, X<<)'<a M-<-
fM M<a /f0ff<t </<< t'u~~ in ///fa. Mihm't. tS89. Mot~aotui. <'<tM/f<-
<<<(/" nM.t<<)rt'M<<fMa /)f'f'M fM t'f<to<'<' <)<~f <tc''<f)'< )<'t/tM<. Mihn". ))<!<*).
t-'htow. ~<t<d!t attt' ttfn ~'e)''f'/t-< X''it'-<;h. f. <). );<'M)ote Stautsw)!
l'apparition, peu prs simultane et d'ailleurs indpendante
en trois pays', d'une ingnieuse et sduisantedoctrine qui
se dit nouvellel et se prtendit dHaitive, la doctrine appeiee
de i'~<<<' <tM< ou encore de )'<<<<? /<M<t/f ou de t'xtt~f'
m~tK<<
Depuis l'origine de la rflexion cononique, io principe de
la valeur oscillait outre le besoin humain, cause et tin de t'co.
nomie, et t'etort pour satisfaire ce besoin, moyen de t'co-
nomie. Le besoin tant mesure par t'utitit ou proprit do le
satisfait-e, il tait tacite do voir que la gradation de la vateur
ne rpondait pas la gradation de l'utilit d'o une correc-

~ttO. Lehr. U'f)' <;ffM:utW M. ~ffto. Jttto-)). f. tmt. <h'k. u. Stat.. X)X.
<)!)?. Kmuu)-i!\tt!.ki, ~ff H'fff (M der Mo<tWmH'-f/ Wion. itjt!)).
Sttjtin". /.a ~<'<a (M m/uff e /M <c~f fM m'Mf'MM Nt<u, <!iurn. dngti
Efonontisti. tH!). .\U!<j)i(i- u. t<i))'n. rtt<t'.M<-AM~fM<?&<-)- (lie r/tMff
<<M <'<'eM<-<t,[.cij)Ht{. Uum-k'-t- u. Hum)!)nt. ))!?. Xuckerktind). &' MeeWt
f/M PtVMM Ktt< tf~OMt/ft-ft- M<'t'actfttcA<<~MM~ <<<'<' ~C/ft'C/tf/tt'/tt'M ~t)/<0<cAf
/K'/ </?;- /.{-An', U'ij)i!ic. Omtt'kt'r u. nutn)))')). i88't.
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WetH<;t!t')-u Y<M) M<tf);, Knit' !hiit))<' u. Wimt'r). t~tta. ))<!)().
~te Ma~MC/tf H'ft'tfofif M<ft< die Mcot'tf t'um Hf-Mt:MM<;M. Jattrt) f. nat. ))it'ti!t't.
()<-k. u. Ktitt. X. f. )).). XX. t8!)0. ).))). X'' Mo~w/tt-o H'f< M.
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d.' HO)t<n.H;t\\Mrk. Utid.. X. t'. tht. XXt t't a f. ttd tU.
Ytt~-ttti.
(M t'a/u)- Hotna. )mu. Atf.o.it!. ~< ~<'o<-<f<Mfa<t-<'n<'<<-f<N)tt'ot'))/et'MO,
<to<-t
Torint). iSttU. Smart..t tM~'M/t-<;oM lhe MMt-~ u/' M<f. t~tndon.
MactoiUao, Xi'J).
<X9S.
f~' tu.~m.S<Mf/fft) t't.-onomtM. )~n<)"M, Mat.'ttti)))t<t,
<:):n-)f. !<? M~t'tn~ )ffM~o'(/ ~ r<f~f. Ya)'i M'-wh-w.
Fieh'ir. ~f<M?ma<'< t'MCM/~o/t'oMjt <M ~f t/t~t.t/ /' m/M<- nov.
t8U2.
Ht/ /<tw<M.

Trat))!tt<'Uut~of tht: <:<jtttt<tit-ttt A'-adtitoy. ju)i )!t9~. T&KK't. ~.o <fo''<
MottOMtCM <<<ff'a~o</(/ttw/M:fMK, Hmtttt. t8'a. Wi<-ks.')).
~th<< und cM/e n'tfA tien KfMOM ..Y<'<~aMAct<nMMfA<'M r/tfut-tfM.
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)h-tthti, M )'<<))'<' e ~ f!t<n a)-f&tt:;o))f ai tfoi !!f)-)tM)en<<).
Mari. )8iM. Xatt'aki. /.f< </ffo<'<f <<<' /<; ra/fMf <t;tt jimguf rm~ Ka<an.
i893. Mu' \'<tm-,
Ht-ttnutttit's. Aprit tK'J.
.Ma<'j/<Mft< <f/t<y aM</ t'/M(, Qu!trt''rh Jouraid "f
h<' tucott'. JusMaf) <A<'ot'y oy fM/Mt. AtUtnt): u)
atm-fit-an Aoutt-nty. n"v. tttUS.
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.; At)..)tta):n.-
UuMen, !i()ttt v);tt)c)tn'ttt eit<t cuttmM' d< pn~ura-ut-
tion tire de l'ide de raret. Mais les choses avaient-elles
vraiment une valeurindpendante du fuit de l'homme ? ~tait-
ce pas ce que t'homme ajoutait aux choses qui en faisait tout le
mrite? ~'tait-ii pas ptusoxactdoue, la notiond'etort rduite
& celle de travail, de rendre compte de la valeur par !o tra-
vail? N'tait-ce pas la production qui rglait les conditions
de t'change plus encore que la consommation? Peut-tre
alors la solution tait-elle d'expliquer diHrennnent lit valeur
d'usageetta valeur d'citauge, clectisme facile, adopt souvent
en somme par l'cole, mais peu soutenable rigoureusement.
De toutes faons, la science devait etie traiter des besoins,
des efforts coacrets et particuliers, et non plutt du besoin et
de t'eibrt? C'tait une tendance lgitime que de rechercher
une notion avant tout objective. U semblait qu'une notion
psychologique, comme tait le besoin ou i'euort, ne pouvait
tre considre objectivement. L'utilit restait trs voisine du
besoin, et n'tait-etie pas, aprs tout, affaire d'apprciation ?
Le travaii au coutraire n'otrait-it pas l'avantage de pouvoir
tre dfini extrieurement ta psychologie,indpendamment
de l'apprciation subjective de l'effort, grce la rduction
de tous les travaux un travail dit normal 'ou socialement
ncessaire), et a la mesure de ce dernier par le temps? H
y avait enfin ce danger que la mthode d'analyse, forcement
suivie en ces recherett~s, pouvait, a t'iusu mme de ceux qui
t'employaient, conduire a ce que f/<'rf ('<* ta valeur, plutt
qu' co qu'elle (liait. Fort de la thorie dduite, on pouvait
prononcer de la fausset ou do ta vrit dos estimations
actuelles. Ainsi i'enort des tendances conservatricestait de
se couvrir, et celui des tendances rformatrices tait de se
fonder par une doctrine de la valeur aussi solide et cons-
quente que possible.
Sur ces quatre points essentiels, nature du principe de la
valeur, unit ou duatit, objectivisme ou subjectivisme.
porte dogmatique et pratique, la thorie nouvelle' bientt
appele thorie de t'ccote autrichienne) prenait position.
Elle fut d'abord un retour trs net au principe de t'utitit,
mais avec une addition, selon elle, dcisive. Les besoins de
l'homme ne sont pas indfinis a satisfaire; une chose utile,

0)
'<*< f)tt M<t'We)'&K<t
d'')''x' <
"n tf)ttv)'ra <)'< ''x))<)!s t')~)))t't)t)Uti'.< t'h<-]: ttohot-thtwt')'):.art.
(h<
.S/Mn/M'M.tMMf/M/YfM, )t)Ht) t'tt f)'Ut)':Ui.< OtUf
a))nh'itttf)ns <<NtM )!t <')'<' <A'coMM)M'~o<<<yf,tS'4; <'t ct~'t
0). <!)()< ~'tMc</)M<<<-)tHM(tepe<</t~Me.U'c'). t'ttft! )))'?.
c'est--dire propre satisfairedes besoins de l'homine, peut se
trouver eu quantit telle que, ces besoins intgralement
satisfaits, elle ne soit point puise (t'eau la rivire) la
chose n'a alors aucune valeur (ce qui est en trop n'a mme
rigoureusementpas d'utiiit); mais elle en prend une, dos que
!a quantit eu tant, pour une cause nu pour une autre,
limite (une provision d'eau dans le dsert), ne permet pas
ta satisfaction intgrale du ou dos besoins correspondants, et
qu'alors l'homme, apprciant la qualit relative des besoins
ou le degr de la satisfaction, renonce progressivement aux
satisfactions les moins importantes ainsi la chose utile en
quantit limite a une valeur qui est mesure par l'intensit
du dernier besoin satisfait ou du dernier degr de besoin
satisfait. Ou s'expliquait d'ailleurs que le travail ait t pris
pour le principe de la valeur io travail tant pnible, les
produits du travail sont eu quantit limite, et ils sont d'or-
dinaire utiles. H n'y avait qu'un principe de la valeur,
t'utitit(au sens prcis qu'on a dit); et la valeur objective
dans t'change se fondait uniquement, en dernire analyse,
sur la valeur subjective dans l'usage. La doctrine tait
ainsi en mme temps une francit reintroduction du facteur
psychologique, mieux encore du facteur psychologique indi-
viduel et concret on partait des besoins (et non pas mme
~t< besoin) de t'homme isol ou suppose tel, et de la satisfac-
tion de ces besoins; et c'est par drivation et complication
qu'on expliquuit les phnomnes muitiptcs observes dans
l'conomie sociale. Mais, a moins d'un moyen de donner,
ces estimations atlectives o s'arrtait t'analyse, une com-
mune mesure, ou seulement une normate, toute valeur ne
devenait-elle pas relative et arbitraire ? Et que fonder l-dessus
que d'artiticiet dans le prsent comme dans t'avenir?
M. Berardi, dans sou tude, fait surtout une critique de
dtail, et nanmoins il s'adresse la doctrine de l'utilit-
limite, et non tel ou tel de ses auteurs il y a ds lors cet
inconvnient que, souvent les dtails diffrant, sur les points
dlicats, d'uu auteur l'autre, la critique peut manquer ou
de justesse gnrale d'application, ou de cohrence. On peut
regretter que l'auteur, avec la connaissance qu'il a des textes,
n'ait pas commenc par dgager des variations individuoites
l'essentiel de la doctrine autrichienne, pour le soumettre
ensuite un examen appropri.
La rforme terminologique de la nouvelle cole, d'abord, ne
paratt pas heureuse M. Berardi elle ne fait qu'apporter de
ta confusion dans un gt'oupede notions claires et acceptesde
tous les ('conomiiites'. La prtendue vateur d'cimnge objec-
tive n'est pas autre chose que le prix, et ta valeur d'change
subjective est une simple extension de lu valeur d'usage. U y
aurait avantage reprendre, au seus classique, les notions de
valeur d'usage, de valeur de cot ou cot, et do valeur
d'change ou de mrite. H faut maintenant distinguer
soigneusement l'tude de la cause de lu valeur et celle de la
mesure de la valeur. La cause de ta valeur, suivant t'ecote
autrichienne, est ta limitation quantitative des biens. C'est ta
une triple erreur. Ce n'est pas la limitation des biens qui
cause )a vateur, mais le fait qu'Ils sont appropries. La limita-
tion est, en tant que la vanit de t'honuneest satisfaite dpos-
sder des choses rares, un motif, entre d'autres, d'utilit; et
cela, Turgot t'avait dj vu. Enfin c'est confondre ta cause et
la mesure de la vateur t'or vaut plus que le fer parcc qu'il
est en moins grande quantit, mais pourquoi l'or et le fer
valent-ils quoique chose'? La valeur est mesure, dit
l'cole nouvelle, par l'intensit du dernier besoin satisfait, ou
du dernier degr de besoin satisfait c'est la toi de saturation
ou encore d'utilit dcroissante (la raison est est etet que le
besoiu diminue mesure qu'il se satisfait, et passe enfin la
timite zro), it serait exagr de soutenir directement t'in-
verse, c'est--dire que c'est ta vateur qui mesure t'utitit-
limite. Mais il faut remarquer que la thorie a confondu
dcroissance de satisfaction ou de jouissance avec dcrois-
sance d'utilit t'utiiit proprement dite reste constante. Mais
surtout il y a un postulat cach la doctrine c'est que l'uti-
tite-timiteestsuprieure encore au cot de production, sinon
la valeur d'une chose serait infrieure son cot de produc-
tion, ce (lui ne peut tre un tat normal. Ainsi l'utilit-limite
est suppose concider avec le cout-timite; mais cottesuppo-
sition est arbitraire
Arrivant enfin t'change, la doc-
trine autrichienneexplique la fixation du prix par ta thorie
du f<M~f'-<<Ht<' 'on part de l'hypothse d'un vendeur et d'un
acheteur eu prsence pour que l'change soit possible, il
faut que le vendeur estime subjectivement l'objet moins haut

<t! )h'mn)i. Op. c)< p. 5<'t G.


A/ p. it-tf.
M.. p. t-N.
que ne t'estime l'acheteur, le prix sera compris entre ces
deux estimations; puis on complique t'hypothese de plus eu
ptus pour arriver au cas d'une srie d'acheteurs At, A,, A:
At. A:).aux estimations subjectives dcroissantes, en pr-
sence d'une srie de vendeurs H,, H,, M,, lis, M, aux esti.
mations subjectives croissautes le prix sera compris entre
une limite suprieure forme par l'estimation du dernier
acheteur admis t'6chant;e. A~ par exemple, et par celle du
premier vendeur oxctu, B,. et une limite infrieure forme par
l'estimationdu dernier vendeur admis lu vente, i,, et celle
du premier acheteur exclu,AI; c'est ta le coupte.timite). Mais
d'abord, cette thorie ne fixe que deux limites maxima et
minima, et ne nous dit nullement en quel point determiut',
entre les deux, se fixera le prix. ni pourquoi en ce point.
Elle suppose, de plus, que les valuations personnelles sont
connues de tous les intresses, ce (lui ne se produit jamais
en fait. Matin on donne comme fixant les limites du prix
le dernier acheteur admis ou le premier vendeur exclu mais
ils n'acquirent cette qualit que par ta fixation du prix
n'est-ce point l un cercle Les influences sur le prix recou.
nues par la nouvelle cole se ramnent en somme & t'ofre
et ta demande. M. Berardi n'a pas de peine critiquer la
prtendue loi, si elle prtend exprimer un rapport de pro-
portion inverse. Mais autrement, que signifie-t-ette sinon
que le prix se fixe dans la zone o t'onrc gaie ta demande?
La cause de ta diversit des prix est donc autre que l'offre
et la demande L'ecote autrichienne avait encore ta
tche de fonder la vateur des biens productifs, ou des choses
qui ne servent pus directement satisfaire nos besoins. La
thorie devient de plus en plus complique et on ne peut ici
ta suivre dans le dtait; le dessein en est de montrer que la
dtermination de la vateur provient toujours en dfinitive de
futilit limite du produit dernier d'usage immdiat tte pro-
</t<t<Httff) et d'tablir, contre la doctrine du cot de produc-
tion, que le cot est dtermin par ta valeur, au lieu de la
dterminer; et pourtant nos auteurs s'efforcent de ne pas
condamner intgralement cette doctrine, de prouver que cela
revient au mme, et enfin ils admettent des cas o s'applique
la loi du cot. Mais ces tentatives n'ont pas do raison, s'il est
vrai que t'utitit-timite, le couple-limite, le produit-limite

~j Xt'tunt). 0~. <-<< {). 39-M.


mesurent respectivement la vateur des biens immdiats, le
prix dans t'change, la valeur des biens de production. Ces
tentatives sont vaines, si elles prtendent concilier t'incon-
ciliable, la thorie de l'utilit et la thorie du cot, le plaisir
et lu douleur
Est.it besoin de dire que ces critiques de M. Merardi, et
d'autres encore, moins importantes ou moins nettes, n'out pas
toutes ta mme valeur Les meilleures vont se retrouver
aitteurs et d'autre part il en manque peut-tre, et des plus
dcisives.

LEO vos BUCtt. Intensittat der Arbeit, Wert und Preia


der Waren (L'eber die Elemente der potitiseben Oekono-
mie, Erster Theit~. (/f('H~~ ~ ~'r<<, rf<w w ~<'<'j- lies
Mrf~<w/MM. Elments d'conomie'politique, )"' partie.)
Leipzig, Duncker und liumblot, t896. t vol. in-8", i4U p.
En prsence des imperfections de la nouvelle thorie, ne
couviendrait-il pas de revenir cette qu'elle a prtendu rem-
placer, la thorie do la valeur fonde sur le trayait ? C'est
sans doute ce qu'a pens M. von Buch qui t'a reprise ou l'avait
laisse Marx. Marx lui avait rendu le grand service de le
dbarrasser d'un cercle les produits du travail tiraient leur
valeur de cots de travail ou frais de production, lesquels
taient estims eux-mmes en produits de travail Marx avait
retir le travail du circuit de t'change pour y mettre seule-
ment la force de travail, marchandise d'ailleurs unique de
son espce, capable de reproduire l'usage une valeur sup-
rieure sa valeur d'change. La thorie marxiste marquait
de plus un puissant effort vers l'objectivation do la valeur:
non seulement ce travail qui, incorpor dans les choses, en
faisait la valeur, n'tait pas le travail dpens en fait et par
les individus, maistait te travail socialement ncessairedans
un tat de civilisation donn; c'tait encore un travail moyen
ou normal oti les travaux diffrencis taient ramens et qui
ds lors ne se mesurait plus que par le temps. C'est pr-
cisment sur cette rduction des travaux diffrencis au
travail simple que Marx s'est insuHtsamment expliqu; et le
point est pourtant essentiel. Il cstdiHtcite de soutenir que les
travaux divers ne comportent pas des diffrences de qualit

()) Berafti. Op. << )).M-7S.


il y a ta des tors un passage d'une diitrenctatton qualitative
itune diftrenciation quantitativequi demande li tre clairci.
Si t'en ne tonde ici une mthode d'estimation
ta qualit, i'vatuatiou de tous Je!} travaux eu
eu quantit de
temps de travail
simple n'est plus qu'une apprciation arbitraire
et relative,
et du coup l'objectivit c!)orchee disparait. Le titre de t'ou-
vrage de M. von Buch pouvait laisser penser qu'il s'attaquait
a ce problme on est du.
La notion d'intensit de travail, dont il part ds le dbut
est
en efot purement quantitative. Le travail humain tant la
traasfortnationde l'nergie potentielle do l'organisme
vail mcanique, riuteasit se mesure en tra.
par la quautite de travail
mcanique fom-M: dans l'unit do temps Et c'est
sans doute
un euort d'objectivation que de ramener le travail humain au
travail mcanique, et encore que de se demandersi la physto-
logie peut dterminer la quantit de travail
normal'. Mais
le plus intressant et t de
nous montrer que la diversit
des travaux se ramne des degrs d'une intonsitainsi
dfinie,
et que 1 lment psychologique de tout travail humain
ainsi tre nglig au profit de i'iment physique". peut
M. von
Buch ne s'est pas donn cette tacite: tel qu'il
est, travail
revient simpiement changer l'ordre de grandeurson lequel
par
sera mesur le travaU, suppos iui.mme une grandeur a
mettre au lieu du temps la force mcanique,
les deux; mais de prouver que le travail humain ou & combiner
trane comme une grandeur, et quelle condition, il peut tre
n'est pas
question.
C'est peut-tre mettre plus de porte mthodique
dans
recherche que l'auteur n'a prtendu. L'objet vritable docette
tude parattetre d'tablir, comme une vrit trop longtemps son
mconnue, que l'intensit du travail varie raison directe
de
la part de l'ouvriersur ta valeur produite,onet en raison inverse
de la dure de la journe de travail La limite de l'intensit
du travail (optimum) serait donc atteinte
l'ouvrier ellt le produit intgrt de son travail et
la
condition que
que la dure
'<) Vun Buch. Op. <-<< p. 2't/M)M<m.n.;Mnitt.tdf la valeur,
)(.pt<

,t
?) M..)). 4e~MM!!fM.

lucl
r~u'
(.t) &. qui

aucun degr.
.tu))c..)M.t i.t.)i.ja< ..).~ MM

(t) Von Buett, 0~. eM.,


..ivi)i~i.s.
rduit est h. travail soci.) .i,ph.ui. suiv.nt )..< eM
l'unit &ht..a.)t..

qui ~M'~
~n~il

p. 96-99.
de la journe fut normale (c'est--dire vraisemblablement de
8 heures). Cette loi est-elle, dans la pensccde l'auteur, fonde
deductivemeut ou induutivement ? Ceta u'est pas trs clair
pour )u seconde proposition. l'hygine nous apprend que ta
timitation du temps de travail est la condition d'uue bonne
sant et par consquent d'une force maxima pour la pre-
mire, on peut dire que te bien-tre du travailleur est la cou-
ditiond'un bon travail. Mais l'auteur s'efforcede prouver (lue
les faits concordent avec ta thorie. I! croit pouvoir mesurer
t'tntensit du travail par !a quantit du produit (quand les
conditions techniquessont egatesd'aitteurs). et ta part de l'ou-
vrier sur la valeur produite, par ie rapport du salaire aux prix
des marchandises vendues; ta dure de ta journe tant connue
d'autre part. it vrifie, principalement avec les statistiques des
industries du lit en Angleterre, en France, en Amrique, en
AHemagnc, si les rapports des ehittres reets se rapprochent
des rapports calculs mathmatiquement',tt serait superflu
de montrercumbicn cette mthode est peu rigoureuse et con-
tient de chances d'erreur, et qu'eu tout cas l'observation est
trop troite pour fonder une gnratisation.
Quant la correction au marxisme, elle est plus apparente
que relle; lorsque chez Marx t'attongen'ent de ta journe de
trayait augmentait ta plus-value, il tait entendu que le tra-
vail lie variait pas d'intensit et une variation d'intensit
~quantitative) pouvait toujours s'exprimer en variation de
temps du travai) simpte". La loi de M. voit Buch signifie seu.
lement en somme qu'en fait, actuellement, les pays o les
salaires sont les plus eieves et la journe de travail la plus

~) \'<)t) ttMc)!. ~/). <-f7. p.TU.


M.. p. t~o-t:)'
.:<! M. Vf'n tttf'h <t'' ti''))t p:t!' uu fut))))))' suftistmt <)'* )M ttx~ttu' <)M
)~ jfh~.Yah)'- t'-httiYt-.
Cn'- tnnr'' <'rit)~U!- tint)' it M)tr\ ptit-aft jo'M
t~nth' La fun't' ')'' )ra\ai) h'' '.am'.nt rtn' un'' nt.t)'h!m')!t' j)Kn'"
!))t'<;tf< t)'t
(lue la ))h)\i.<ion <'n wn't'xi'' j)oh'ttti<')!t' t)'* o'~tt'<!t'f<i"H. u"t)tg
t't)')t'' t'fxmx~ Kn ))))-(')' tth''r!mi~')' Lit tMtxtonoitthfX <)''< Mti<m')))< fn
fun~' ')'' tnniii) 1-,t fait ')'' )'r!tntti.<n)' <)<!)n' ht htti' <t<' )r!H'<tit tu'
))ro\'i''))t j'fts 'h' )'~ntuit.< )tt) traviti). Mais. H
ti)'))<' d'u<t~' ~du tn'L'muu)~' ttan< m< tv~<'t'v~tt'
t'tf
rn))tp)< )'<wr;<i'' poh')).
!.<'mit ))![" hutt j))U!- Utm
tt))U'<)!m')i~Kt)"")) )'iu)h' <t)'x"t.
le tf'~Mi) huxoun ))' <'ttn:'i.-tf
j.ttH<U!' 'jH'it ')"t)~'r it Ut)!' fon' n.ttMr''tt'' <u')t)th)nc. t'hiti')m' uu hioto.
)ti';)H'. t'"<'t')isi<m <)f ~'<'):rc<'r ~M.. )). M nott'L
(t; ~t. vn )tu'')t j).u')<- tt'tn s<-ui'')t)t'"t <)n safoif'. t)M)< de ta jxn-t ~ur
)<' jtfmhtiL ')'' tt'initi) ti'tt'oattt u )'"uvri''< M<n'' )'ti)wti~n <!<: <'t'tt<' )t)H't

'-ahitf ittt'
p~mtt <'ut))')'U')' '') il 't
f')r) tt'hoii'~iht'' ')<)<' ))t v~nution abso)))'' 'tu
<)'ab')t'<t t'ouvrx'r 'mtattt '') p)tt!! 'jm* lu \nt'ia)iot) n.'tNthM.
courte sont en mme temps les pays de la productivit la plus
grande mais comme ni les influences sur ta productivit
autres que celle de l'intensit du trayait, ni les causes de
variation d'intensit du travail, autres que l'lvation do la
rmunration et )a dure du travail journalier, ne sont suui.
samment timines, ce rapport de concomitance apparat
comme contingent et ne sutnt pas fonder un rapport de
causalit. En tout cas )a thorie de ia valeur n'en est pas
sen-
siblement modifie dans l'esprit, sinon dans la lettre, et le
dfaut de la doctrine marxiste reste entier.
Voir Sorel, ~< f/o'n/'t'c MwjMfc (/<- lit )'a~'~, Journal des
conomistes, IMH. Loria, /. (<w'<(t Mat-~<<M </t'< M/of-c.
Riforrna sociate, mars )897.

Dr JmtAx~Ks WEUXICKH. Derot~ective Wercund Prts.


CrundteRung einer reaten Wert- und Preistheorie. (t
fa/f)-o~'<'<'t'<' f( <t'pn~. Fondement d'une thorie positive
de la valeur et du prix.) !eua, Gustav Fischer, )89t!, ) vol.
ia-''J)6p.
Ou distmgue courammeut. tes theunes subjectives et les thm).
ries objectives de la valeur, et l'on n'a pas tort. Mais il faudrait
savoir ce que l'on veut dire. Qualifie-t.on la thorie autri-
chienne do subjective, parce qu'elle foade lu valeur sur le
besoin ressenti et lu satistactiou prouve, et lu thorie
marxiste d'objective, parce qu'elle l'explique par le travail
incorpore en quelque sorte dans les choses? it est ais de
montrer que le travail ne peut pas plus tre spar de t'enort
et de la peiuo, que, de l'avis commun, l'utilit ne l'est du
besoin et de la jouissance. Si subjectif veut dire en somme
psychologique,et objectif, qui no l'est pas, il n'y a pas de
thorie de la valeur qui au moins implicitement, et par la
racine, ne soit subjective en ce sens. Mais, au point do vue
de la connaissance, phnomne objectif signifie uniquement
phnomne soumis des lois, phnomnequi n'est pas arbi-
traire, qui n'est pas individuel, et phnomne subjectif le
contraire. Assurment nous ne connaissons ou ne croyons
connatre comme phnomnes subjectifs que les phnomnes
psychologiques, et il demande tre montr que, contraire-
ment aux apparences, il y a des phnomnes psychologiques
objectifs cotte confusion do notions n'en est pas moins ittc-
gitime et mauvaise. Toute thorie de la valeur, au moins jus-
qu'ici, et autant qu'on peut le concevoir, est psychologique
mais les unes rendront compte de ta valeur par les apprcia-
tions ou estimations soit du la satisfactiondu besoin, soit de
la peine de i'cHbrt. individuelles et arbitraires; d'autres
prtendront q'ue ces apprciations ou estimations sont, au
moins pour une part, soustraites & l'arbitraire personnel, et
s'imposent aux individus. Lit thorie autrichienne ne nie pas
que, dans notre tat do civilisation complique, dans notre
socit soumise depuis longtemps au rgime de t'change.
nous ne recevions ies valuations toutes faites et ne les
employions mme contre notre gr personnel mais elle
est rigoureusementsubjective eu considrant que ces valeurs
socialement tablies ne sont que le rsultat d'une combinai.
son et complication d'estimations individuelles et arbitraires
passes. La question de la vateur objective ou subjective est
donc excellemment pose par M. Wornicke en ces termes
< Entre
les valeurs individuellesd'uue part et, d'autre part, la
valeur sociale et le prix (<<<*r fo~'<'WwA/)<<c/<f )<<*<'< MM</
~VM), y a-t-it opposition ou rapport d'influence rciproque*?
La valeur subjective, individuelle, est-elle la valeur originaire
dont la valeur sociale est drive comme une rsultante
d'estimations particulires ? ou bien est-il a penser que la
valeur objective sociale (et le prix) est la valeur f fnot-t
laquelle se rapporte n po-t'oW, en la modifiant, ta vateur
individuelle subjective' ? M. Wernicke prtend constituer
une thorie objective de la valeur, en prenant comme position
que l'ensemble est un donn a pnon' par rapport aux indi-
vidus, qu'il existe vraiment, non comme une simple fiction,
mais comme une puissance rcetie extrieure aux individus,
et se trouve avec eux en influence rciproque'.
M. Wernicke veut donc montrer que la valeur et le prix
dpendent de facteurs s'imposant aux individus comme
donns dans la socit en tant que telle, et de facteurs gale-
ment objectifs, des conditions de la production. H se place
d'abord au point de vue de la consommationet de la rpar-
tition. La psychologie sociale peut dresser une liste gra-
due des besoins de l'homme en socit, et distinguer deux
caractres des besoins qui sont en raison inverse l'un de
de l'autre, l'urgence (/)nK~t'<'Mf~)et l'importance (<rt<
(h Wt't-ni'ti' (~. '< )'.
(~ A/ )'.
<ff< L'tude de la production montrera que les moyens de
satisfaire nos besoins'sont en quantit limite. et d'autre part
la qualit en est en raison inverse do la quantit. Ces moyons
do satisfaction ne sont pas laisss~ notre arbitraire, du moins
pas entirement, Ils sont mesurs et limits par ie revenu de
chacun (A'tMA'OMtMtCM',qui dans notre socit est exprim en
monnaie. L'emploi do ce revenu est en grande partie soustrait
notre arbitraire individuel pur les conditions sociales,
usage, habitude, mode, etc. et i) l'est d'autant plus que
notre revenu est plus faible les revenus limits ia satis-
faction des besoins matriels (nourriture, vtements, loge-
ment.) n'ont presque aucune indpendance d'emploi. Aux
classes de revenus correspondent des moyens de satisfaction
proportionns, qui s'tendent plus ou moins do besoins'.
Au point de vue de la production, la loi fondamentale est que
les moyens de satisfaction sont en quantit d'autant plus
limite que les besoins satisfaire sont plus icvs. II semble
que l'utilit ue corresponde pas a la raret mais il n'en est
rien, si l'on fait dpendre de l'importancedes besoins le degr
de l'utilit. Ou montre aussi qu'il la raret correspond pro-
portion la difficult d'acquisition, et la difficult d'acqui-
sitiou correspond exactement le travail. Nous subissons ces
conditions de la production de biens, elles nous sont donnes
et ne dpendent pas de notre arbitraire. Il ne dpend pas
plus de notre arbitraire de nous soustraire dans une socit
dtermine au rgime conomique d'ensemble, l'attribution
qu'il implique, division du travail, etc. Tout cela est ce que
l'auteur appelle l'ensemble des chances naturelles en y com-
prenant la technique*. 1.
La valeur objective et le prix dpendent de ces facteurs,
t'tat donn des moyens de satisfaction, et l'tat donn des
chances naturelles, do la technique et du degr de civilisa.
tion. Pour un bien considr, elle sera dtermine parce que
peut y consacrer de son revenu la dernire classe capable de
l'acheter (classe de l'acheteur-limite, ~-<'K~/f~<<M~,cela
combin avec la ncessit normale de couvrir, des frais
(t) Wfnm'kc. Op. <'< jt.):i-tT.
~) 0 (tit)tt-i)x d'' tmun'r t'n fnint.'uii! uxf tttutu'-tion. A lu M~ t.MdM
<-)t'ott)))t<KJ<<)<- Net/Ht-~ au M-t)!. <tc t'uutt'Ut- )t<-t- M)ttfi!it die Suttox'-
<t<'r !h'M''tttf!unftsntittt!t.. (~. <-< tx. ((.tout) puf <t
~3) M.. p. S6.3t.
(~ M.. )). 34-tt
do production, le plus cher producteur'. M. Wernicke
insiste assez longuement sur cette adaptation & sa doc-
trine de lu thorie des frais de production. Les frais sont
en rapport d~thu avec l'utilit du produit. Les frais de
capital se laissent rduire en travail, au temps de travaH de
reproduction. Le travail qualifi, exerce, le travaH intettec-
tuet mme sont rductibles au travait manuet ()e travail
exerc est gat au salaire plus les frais d'instruction). La
raret est quivalente au salaire du travail ordinaire, plus le
salaire du travail exerc spcial, plus les frais d'un travail de
reproduction conu, parfois impossible'. Ainsi t'importance
des besoins, ta qualit des travaux, la raret des biens, lu
grandeur des frais sont en proportion directe entre elles On
voit que tous ces facteurs sont objectifs La thcurie sub-
jective de la valeur n'est pourtant pas sans utilit elle
explique les estimations de valeurs faites subjectivement
dans t'economie isotee; et elle explique les fixations de prix
individueites fondes plus ou moius sur le prix objectif, etc.
Mais ces variations individuelles s'annulent en masse, et
n'ont ainsi pas d'importance pour l'conomie sociale.
Le principal mrite du travait de M. Wernicke est peut-
tre d'avoir bien pose le problme. tt n'est point surprenant
que ta solution ne soit pas du premier coup tou. fait heu-
reuse. Ce qui s'y trouve de plus remarquable, bien qu'insuni-
samment mis en lumire, est, semble-t-il, d'avoir fait
dpendre ta valeur non plus seulement de la production, ni
de la consommation, ni des deux a la fois, mais encore et
surtout peut-tre de la rpartition. La thorie du travail ou
de la production oublie qu'on ne produit que pour quelqu'un.
La thorie de t'utitit ou de la consommation nglige, pour
l'tude de ta satisfaction des besoins, celle des moyens de les
satisfaire; on a bientt fait de dire qu'ils sont en quantit
limite il faudrait voir que, dans notre socit au moins,
cette limitationprovient souvent du rgime de la repartition
ptus que du lait de ta nature ou des conditions de la produc-
tion. Toute demande n'agit pas sur le marche conomique,

0; W.-rnirft. (~.t- t:i.t7. <'t :.)-T.t.


(j; M.. [). :<7-!t~.
(3) M., )). et )). t)!i.
(~ L'anteur fuit t'ut-on- Hn'' th'ri'' ')'' lu t'ah'ut' ''n n)u))))<m! vt du )<ri![.
t)<H)!! t'! <)<;tai) <)'* ta'jUt'Hf il est inutih' <)')ttn'r.
mais seulement ta demande admissible t'chau~o, c'est--
dire cette qui peut payer il se peut que des besoins superfi-
ciels soient satisfaits il Rrandsfrai)!, quand. cot. des besoins
essontiets ne le sont mme pus au moindre prix Ln valeur
des choses dpend non seulement de l'apprciationsubjective
des individus, mais de lit part de revenu disponible de ceux
qui t'apprcient. Le rgime de repartition conomiqne tant
videmment un {acteur social, c'est ta une raison de plus
pour tudier socialement ie problme de lu valeur. Mais,
cela mis part. les grosses dittcuits du sujet lie sont-elles
pas tournes un peu trop tacitement' Si ta valeur dpend en
dernire analyse soit d'une apprciation de besoins, soit d'une
estimation d'cforts, le dinicite est de .fonder ou de justifier
objectivement une comparaison et une gradation des besoins
ou des efforts, c'est--dire uneopration essentiellement qua-
litative. M. Wernicko se donne tout simplement ta notion
do qualit objective en question, torsqu'it srie les besoins
suivant leur importance ()r<cA~f)<)autrement que suivant
leur urgence (~to<y<<'<<t<'), seule notion objective non arbi-
traire en cette matire les besoins impoptants sont ceux,
dit-il. qui cunccrneut le dcvctoppementdes individus et de
la communaut l'gard de ta civilisation et de la puissance
Mais qui en juge ainsi? L'auteur reconnatt plus loin
que
pour les pauvres gens ce sont les besoins matriels ou pres-
sants qui sont en mme temps les besoins importants.
L'apprciation donne est-elle donc le fait seulement d'une
classe sociute dtermine, peut-tre mme seulement de cer-
tains individus? It manque ici t't'tude de psychologie collec-
tivo ou sociale qui seule pourrait fonder une thorie sociule
et, par m, objective des besoins.
Les moyens de satisfac-
tion, dit M. Wernicke, sont d'autant plus rares que les besoins
sont ptuseteves ou importants, car c'est une loi fondamentale
(un fait naturel, dit ailleurs fauteur; que les biens sont eu
quantit d'autant plus faible qu'ils sont moins grossiers, plus
beaux ou plus nobles. D on vient encore cette notion de qua-
lit, sinon de l'apprciation des hommes? Et c'est une ques-
tion de savoir si cette concidence de l'estimation et de la
raret lie tient pas simplement a ce que la raret est une cause

(t) Voit' )')'i!))n'ion if'rrA' t't n)!f)Ut'<')t!.<' d'tttn' j))'t~ anuh))!))'' thnit
Attdtur, Ot-tf/MM f/H MCt'f~Mmc <t'/a< fM .t/~m~ttc, jf. ~:tt)-X!t.
t~! WctttK'k)'. Op. cil., )). )<i.
d'estimation (par l'intermdiaire de l'intrt personnel ou de
la vanit des hommes).- La raret correspond a l'utilit, dit
encore M. Wernicke, pourvu qu'on tienne compte de degrs
d'utilit selon la dignit des besoins l'or est ainsi pins utile
que le fer, si t'en considre que le besoin d'or est plus ramn
que celui de fer. C'est ta simplement transporter dans la
catgorie de l'utilit la notion de qualit Introduite dans la
catgorie du besoin. En est ou plus avanc ? Toute la tho-
rie du cot est encore sujette ta mme critique. Toute
thorie de la valeur est, au moins par le fondement, psycho-
logique si l'on veut qu'elle soit objective, il faut lu faire
dpendre d'un facteur psychologique objectif. Un facteur
~c/M~!(/<(t'.Mfit~, s'it en est de tels (distincts des facteurs
individuels. s'imposant comme donns chez les individus)
remplirait cette condition. Mais qui nous le dfinira.'.1

RUDOLF STOLZMANN. Die Soziale Kategorie in der


).
VoUMWirtacha.ftsIehre. Grundtegeuder und Kritiseher
Tbeit (/. <<<yo/<' sociale </a~M / ~<''/<ff f/f /'(w~m<c M-
c~< 1"' partie Principes et critique~. Berlin, t'uttkamer
u. Muhtbrecht, t896,1 1 vol. in-8", vtt)-4~ p.
Il faut distinguer, estime M. Stotzmann, de la catgorie
purement conomique ta catgorie sociale A une
poque donne, de l'tat donn des ressources natnrettes,
des forces de travail et du dveloppement technique dpen-
dent la quantit et la qualit qui peuvent tre produites des
biens capables de satisfaire les besoins humains c'est ta le
domaine des conditions purement conomiques. Mais toute
conomie collective est de plus soumise des influences d'un
autre ordre qui tiennent au fait de la vie en commun, du tra-
vail en commun, aux conditions historiques du dveloppe-
ment social, t'tat juridique et politique. Ces conditions
sociales sont, comme procdantdu fait de l'homme, variables
de leur nature, au lieu que les lments strictement cono-
miques sont relativementconstants; elles doivent donc tre
l'objet d'une tude spciale, puisqu'elles contiennent en elles
toute la possibilit des rformes. La vritable mthode de
l'conomie nationale doit tenir un compte gal de la catgo-
rie purement conomique et de la catgorie sociale elle se
garde par l d'une part de tomber dans l'utopie, d'autre part
d'oublier que la production n'est pas une fin en elle-mme,
et que le souci de l'homme et de la ttistactionde ses besoins
doit rester le principal.1.
M. Stotzmann a entrepris de montrer l'importance et la
(conditc de cette introduction de ta catgorie sociate dons !a
science coxonique. Avec ce premier volume, ii veut traiter,
dans cet esprit, du concept fondamental de l'conomie: de
ta valeur. Mais tes trois quarts de cette mutre trs com-
pacte et peu dgage sont remplis par un historique long et
tratnant, qui passe en revue les diverses thories de ta valeur
sous trois grands types thorie du cot du travail avec
Adam Smith, Ricardo, Stuart Mitt et les thoriciens socia-
listes qui se rattachent eux. HodbertusetMarx thcorie qui
combine )a valeur d'usage et tu valeur de cot, ayant son
origine citez les physiocratesetsedveioppantavecJ.-B. Say,
Hennann, Scttaeffte et Knies (ce dernier tient une grande
place dans t'expose); thorie enfin de t'utiUt-timite, rappor-
te en grand dtail, d'abord d'aprs Menger, puis d'aprs
Buhm-Bawerket von \Yieser. tt est clair que ce u'est pas
ici le lieu de reprendre et de suivre avec M. Stotxmann tout
cet historiquede la question, mais il faut noterque l'exposi.
tion des diverses doctrines, quoique consciencieuse et tmoi-
gnant d'une rudition estimable, est peu claire, peu uette, et
en somme peu utilisable. Elle est accrue souvent et surchar-
ge des thories du capital, de l'intrt, du crdit, de la
monnaie, sans doute trs voisines de la thorie de ta valeur,
mais qui gagnent & eu ~tre distingues par t'analyse seient-
fique. Enfin la critique est frquemment mte et confondue
d'une manire gnante avec l'expos.
La quatrime partie, intitule ~)<Mmw<'n/<M)tt<n~ '/M' posi-
f<r<'K ~c&Ht.Mf, est encore, en dpit du titre, plus critique
que dogmatique, ou plus ngative que positive pour une
bonne part. La thorie propre a l'auteur demeure assez con-
fuse au moins dans l'exposition qui nous en est donne. Les
points les plus nets et les plus intressants sont ceux o elle
s'oppose la thorieautrichienne.Elle lui reproche en somme
principalementde demeurer dans l'conomie individuelle, et
d'tre insuffisante et mal (onde dans J'conomie sociale.
Est-ettemme exacte dans l'conomie individuelle?Person-
nettement, nous continuonsde graduer les besoins au-dessus
mme du besoin correspondant t'utitit-timite nous attri-

0) St'tktuann. Op. c~ )). 8.


huons doue an-dessus de i'utitite-limite des valeurs que l'utl.
iite-limite n'explique pas. Htcnnn n'y a-t-il pas interversion de
la cause et de l'eltet? Ce n'est point parce que l'utitite-tinnte
est grande ou petite que chaque bien do lu provision et ht
provision cn)if)-e ont une valeur grande ou petite, mais c'est
parce que ia provision est, en tout et dans ses parties, evalueu
haut ou bas seton des lois que )a thorie de l'utilit-limite ne
fonde pas), que l'emploi eu est tendu jusque ta satistac-
tion do besoins plus ou moins importants'. Mais il y a
mieux cette thorie prtendue d'conomie isole implique
dans son fondement la socit. On pourrait soutenir que
l'estimation de iu valeur par l'utilite-titnite suppose que l'in-
dividu se place en pense, sans peut-tre s'en rendre un
compte exact, dans l'hypothse de t'change possible. Mais
voiciquiestptus direct c'est la limitation des ohjetsqui u
induit les hommes a se les approprier, dit la thorie autri.
chienne: it est aussi selon
M.Stotxmann, qu'un bien,
parce qu'il est approprie, est rare. en ce seosqu'it est devenu
un bien conomique, un bien que t'en mnage, que l'on n'uti-
lise ptus sans devoir une compensation au possesseur Ne
pourrait-on ajouter qu'en somme, en avouant que dans notre
socit, avec les rapports trs compliques de l'change, l'in-
dividu reoit le plus souvent une estimation toute faite, un
prix courant ta thorie autrichienne cesse d'expliquer, an
moment un il serait le plus ncessaire de le faire ce sont les
phnomnes observes, en fait, dans notre socit dont il s'agit
de rendre compte (et leur complexit augmente lu difficult,
mais aussi l'intrt de lu tache;, et non pas les phnomnes
qui se passeraient ou qui ont du se passer dans une conomie
plus simple. Ou bien, si l'conomie complexe et sociale qui
est sous nos yeux s'explique en dernire analyse par l'cono-
mie simpte et isole, c'est sur ce passage ou cette drivation
qu'il faudrait insister, si t'on ne veut pas que ceta reste une
simple supposition commode.
Le livre prsent de M. Stotxmann n'est qu'une premire
partie, on peut esprer que de l'fBUvre acheve apparatra
plus nette ta ralisation de l'heureuse intention qui t'a
inspire. Ce n'est pas en vain que se rencontre la fois

<h St!))i!))t)mt). < <-< )). SCT.~S.


~t /< p. SM-M.
~t! (:). ttahot-Bawt-k. M<tM</K-'<t'f. < y/<M'. Art. U'cWA. ht Hm'.
chez plusieurs thoriciens la proccupation d'tudier et de
dfinir, dans l'conomie, ce qu' dfaut de meilleur terme on
peut appeler le facteur social. Ceta marque peut-tre un
arrt dans ce retour au subjectivisme qu'avait provoqu un
objectivisme exagr ou factice. Mais ou semble en rester
encore des ttonnements. On trouvera cependant dans le
livre de M. Stnmm)cr, analyse plus lolu, un puissant enort
pour dterminer une science conomiqueproprement sociale.

MAunicn BOUncUiX. La mesure de la valeur et la


monnaie, Paris, Larose. ~96. 1 vol. in-8, 27G p.
M. Bourguin n'entend traiter ici sous le nom de vateur
sans qualificatif que de la vateur d'change, laquelle est
d'atUeursdans notre socit ta vateur par excellence'.tt
importe d'abord de rappeler ta notion scientifique de la
mesure. < Mesurer, c'est dterminer la valeur numrique
d'une quantit concrte, en tabtissant le nombre d'units de
mmo nature que cette quantit renferme On distingue,
pour les quantits d'ordre physique, ta mesure relative qui
est < ta mesure d'une quantit au moyen d'une quantit de
mme espce arbitrairement choisie comme unit et mat-
rieitetnent ratisfe pour servir d'taton la soute qui puisse
tre Hpptique aux grandeurs primitives, longueur, temps,
force ou poids dans le systme mtrique, masse dans le sys-
tme C. (. S. et la mesure absolue qui est ta mesure d'une
quantit au moyeu d'une unit de mme espce, mais non
incorpore, conue idalement comme pouvant tre cons-
truite, suivant une rgle mathmatique, au moyen d'units
d'espces dinrcntes qui, elles, sont matriettement repr-
sentes, et qui s'applique aux grandeurs drives, surface,
vitesse, masse dans le systme mtrique, force dans le sys-
tme G. G. S. (cette mesure n'est d'aitteurs pas, a rigoureu-
sement partor. absolue, puisqu'elle rsulte de mesures rela-
tives, faites au moyen d'talons soumis a des variations
possibles ').
La thorie marxiste de la valeur est un effort pour faire de
la valeur une grandeur susceptible & ia fois d'une mesure

0) Mout-xuit). M/). <'< p. 3.


~)'/< ),.
(:~ Y< )). !i.').
relative et d'une mesure absolue, ou du moins, selon M. Bour-
guin, ou peut logiquementt'interprterainsi. Lit valeur, on te
sait, est mesure par le travnit socialement ncessaire incor-
pore dans les choses. C'est une mesure relative de tt) valeur
que la mesure fournie par l'estimation des bteus eu monnaie
(mesure d'une valeur donne d'un bien dtermin, c'ost-a-
dire de ta quantit de travail ncessaire la production do
ce bien au moyen d'une unit de mme espce incorpore
dans un talon matriel, savoir de ta quantit de travail n-
cessaire la production de l'unit de monnaie). Et une mesure
absolue nous est donne par l'estimation des valeurs au
moyen d'une unit de valeur idale, conue comme constitue
t'aide d'une unit d'espce dinrente, de l'unit de travail,
c'est--dire l'heure de travail simple moyen (il ne faut pas
oublier en euet que, pour Marx, le travail qui constitue les
valeurs n'a par lui-mme pas de valeur; ta force de trayait
seule est une vateur). tt y a, entre cette mesure absolue de la
valeur et ta mesure absolue de ta force en dynes, cette dine-
rence que les quantits A mesurer, sommes de travait nces*
saire & la production d'une marchandise dans un milieu
<tonn, et t'unit de mesure, heure de travail simple moyen
dans un tat de civilisation donn, sont non des quan-
tits concrtes, facilement saisissables, mais des quantits
abstraites et difficilement dterminabtes; mais cela est sans
importance an point de vue thorique, tt est a remarquer
que l'unit de valeur n'est pas rigoureusement absolue, puis'
qu'elle dpend de l'uuit de temps, qui n'est pas thorique-
ment invariable, et surtout du travail simple moyen dpens
pendant l'unit du temps, travail qui, de l'aveu de Marx, varie
avec les temps et les pays mais il ou est de mme, au moins
thoriquement, pour toute mesure absolue de grandeurs d'
rives (mme si le travail humain pouvait tre intgralement
exprim en force mcanique et t'tment psychologique ainsi
nglig, la mesure de la vateur, bien que M. Bourguin ne
le dise pas, mais suivant les principes poss par lui, ne
serait pas encore, en thorie, rigoureusement absolue 1).
L'auteurn'entreprend pas ici la critiquede la thoriemnrxiste,
laquelle. estime-t-il, va manifestementcontre les faits, et passe
d'autres conceptions.
D'autres tentatives, en enet, ont t faites pour considrer

~t) t~urptin. Op. <:<< )). it-)'.t.


la valeur comme une proprit intrinsque des choses et
susceptible de mesure. La thorie de ta valeur fonde sur
le cot de production eu est une. Mais les embarras o elle
tombe proviennent de ce que, par une confusion iuextricable,
en considrant ia valeur du produit, eiio se place au point
de vue individuel des producteurs et des changistes, et qu'en
considrant les facteurs de la production, elle se place au
point de vue social et vise le sacrifice social (ait pour ta pro-
duction. Ou bien, si elle entend simplement que le cot de
production est leprix do la valeur des choses employes la
production, il n'est tui.meme qu'une valeur dont il faut
rendre compte. Le problme est recut indfiniment
On a, rcemment et plus ingnieusement, ramen lu valeur
d'change la .valeur d'usage et l'utilit. Mais la valeur
d'usage u'est qu'un rapport nous valuons l'utilit finale
par comparaison avec les utilits Hutes d'autres biens; nous
valuons l'intensit d'un dsirou d'un besoin parcomparaison
seulement. Maintenant, si l'utilit peut tre dite une qua-
lit intrinsque des choses (en ce sens qu'elle est concevable
sans comparaison ncessaire), en revanche elle ne saurait, en
elle-mme, fonder la mesure de la valeur et la raison en est
que l'utilit n'est pas une grandeur susceptible d'une mesure
mathmatique. Et si l'on remonte au facteur psychologique,
au besoin ou au dsir, comment mesurer un tat d'amo?
Poser ia question, c'est la rsoudre M. Walras part, dans
ses calculs, de l'intensit du dernier besoin satisfait comme
d'une grandeur apprciable, mais en postulant ce qui est en
question. < Je suppose, dit-il, qu'il existe un talon de mesure
de l'intensit des besoins ou de l'utilit intensive. Ds
lors, soient deux axes de coordonnes Dira-t on que la
mesure des valeurs dans t'change nous donne justement la
mesure de t'inteusit du dsir, ou du degr d'utilit (ce qui
du reste ne rsout plus le problme) ? H (aut au moins dire
que la valeur d'change traduit et mesure l'intensit d'un
dsir cottectif or ce dsir collectif est une abstraction, une
moyenne de dsirs individuels incommensurables entre eux,
et l'on ne voit pas comment des chinres peuvent le repr-
senter mme indirectement
(t) Bouquin. Op. t' p. 27-9!).
ti) M., p. 30-33. Mcf.v'ti & Watru! ~meMh <<'c<)No)'/)o<</)'/M<' pM<f,
l. TU et t0).
(:)) M.. p. M.
4f8 )/AXX~E 'tfK:H)).)M)<jL'H. <??

Ainsi les thories chouent successivement faire ft de ta


vatttf une proprit
valeur nroDt'iM intrinsque
!utritis6oue des
(les choses. C'est
C'a qu'elle
n'est en eNet qu' un
rapport d'ctmngo, uu rapport d'galit
dans t'change avec uue autre marctmudisodo quantit dter-
mine*. Et M. Boturguioeo tire que lit vateur n'est ni une gran-
deur primitive ui une grandeur drive, qu'elle n'est pas une
Il
graudeur. Et en voici la raison n'y a pas / ('<~c<' d'une
marchandise comme il y a la tM~uaur ou le poids d'un corps:
il y a seulement la valeur d'une m&Mhandiso par rapport a
t'or ou it l'argent, par rapport au bl, au travail et aux diver-
ses autres marchandises il y a donc, pour une marchandise,
non pas sa valeur eu gnrt, mais autant de valeurs particu-
lires qu'il y a de marchandisesdiffrentes susceptibles d'tre
mises en rapport d'change avec elle It n'y a donc pas,
proprement parler, de mesure de la valeur. Et cela ne tient
pas ce que la monnaie a une valeur variable, car tout talon
matriel est variable. Il n'y a pas d'talon de ta valeur, parce
que ta valeur n'est pas une grandeur. It n'y a qu'un talon
montaire '.te frauc dans les lois franaises a toujours t
denui comme l'unit des monnaies Dire qu'un hectolitre
de bl vaut vingt francs n'est pas mesurer une certaine pro-
prit commune aux deux marchandises,ia valeur, c'est cons-
tater simplement cette circonstance de fait que t'hcetoiitre
de bl s'change courummeutcontre ~0 pices de monnaie de
5 grammes d'argent c'est--dire mesurer l'quivalent
considr dans sa valeur propre, comme quantit physique
Mn (ait, ta mesure de la monnaie remplit le mme ofice
qu'une mesure de la valeur, mais ta thorie rigoureuse doit
faire la distinction. Rien n'empcherait de prendre, pour
jouer ce mme rote, une unit de mesure d'une marchandise
immatrielle, comme serait le travail humain, mais la nature
intime de cette mesure n'eu serait pas change. Ce qui n'est
pas possible, c'est d'admettre une mesure tout idate de la
valeur, c'est--dire au moyeu d'une unit simplement conue
par l'esprit. Nous sommes cet gard le jouet d'une illusion
psychologique manier sous le nom de franc des choses
aussi diftrentesque des espces en or et en argent, dota mon-
uaiedebittonetdesbittetsdebanque,nous prenons l'habitude
de tenir le franc pour une notion abstraite. Mais une unit

~t) )t!')n-f;uin. f)/). c)< p. N~.


M.. )<. HS.M.
de mesure qui. mme dans la pense, ne s'incorporerait nulle
purt, n'aurait pas de sens pour nous. Et la mme raison fait
que < ta monnaie n'est pas le symbole d'une valeur invariable
nxe par !e testateur Nanmoins. pourctaircircompt-
tentent la nature et le rle de la monnaie. M. Bourguin
entreprend une longue tude de )a monnaie dans sa fonction
d'talon des prix, eu atteignant le problme du monom-
tallisme et du bimtallisme, recherche technique, docu-
mente, bien conduite, o pourtant nous n'avons pas le
suivre ici.
U faut iouer Bourguin d'avoir apport dans le problme
M.
de la valeur ta notion scientifique et rigoureuse de la mesure,
et d'avoir montre par sou ingnieuse thorie qu'au pis aller,
c'est--dire si ta valeur n'tait dcidment pas proprement
mesurable, comme n'tant pas une grandeur, la mesure de la
monnaie pouvait pratiquement y suppler, et qu'ainsi la
science conomique n'tait pas, comme on aurait pu le
craindre, toute compromise par cette conclusion. Mais ta rai-
son donne pour que la valeur ne puisse tre une grandeur.
savoir qu'elle u'est pas une proprit intrinsquedes choses,
mais uu rapport, ne parait pas dcisive. Toute grandeur est
mesurable, on thorie au moins, et un rapport n'est-il pas une
grandeur M. Bourguin ne nous a-t pas rappei lui-mme
que dans le systme C.C.S. la masse tait dfinie comme
tant, pour un corps domn', le rapport constant de lu force
l'acclration qu'elle imprime au corps ? Nierait-it donc
que la masse fut une grandeur? Ht puis, qu'est-ce qu'une pro-
prit intrinsque des choses 7 O peut-on arrter, dans le
monde extrieur que nous connaissons, ce (lui est relatif
nous et ce qui est absolument ? La chaleur, la force, la rsis-
tance, l'tendue mme sont-elles, indpendamment de nous, ce
qu'elles nous apparaissent ? Non, ce n'est point ) pourquoi
la question se pose de savoir si la valeur est vraiment mesu-
rable, e'est--dire si elle est une grandeur. Si la valeur se
ramne en dfinitive des lments psychologiques, les ph-
nomnes psychologiques tant essentietiement des phno-
mnes de qualit pure, comment leur imposer la catgorie de
la quantit pour on faire des grandeurs ? Comment transfor-
mer t'htrogne en homogne? L est le problme. On a vu
que pour M. Bourguin ce problme-l n'existait pas Croit-

0) ttf)t)rt{Utn. (~. < (). 8.


on possible de mesure un tat d'me ? Poser la question,
c'est ia rsoudre. Il est vrai que les tentatives fuites jus-
qu'ici out choue la psycbophysiquedeFechneretdo ses suc.
cesseurs a fait au fond ce que M. Bout'guin a reproch avec
pntration M. Watras elle est parvenue a mesurer le ph.
nomne psychologique, parce qu'elle l'avait suppos mesura-
ble, ce qui est prcisment toute la question. Mais qui rpon-
dra qu'un mode d'abstraction heureux ne puisse russir a
saisir le phnomne sous le rapportde la quantit, sans eu tais.
ser par ta mme chapper tout le caractristique,d'autant que
les phnomnes d'ordre psychologique dont il s'agit ici sont
dj, en uu sens, objectifs, tant sociaux plus qu'individuels?
Si au contraire le problme est insoluble, serait-il possible
de dmontrer cette impossibilit dfinitivement ? De toutes
faons, ce restera un mrite d'avoir pos le problme dans
ses termes derniers. La thorie propre de M. Bourguin nous
aura montr par avance qu'au cas mme o la solution serait
ngative, la science conomique ne serait pas dsespre.

D' vos EHRENFELS. System der Werttheo.


CnRtSTtAN
rie. 1 Band. AUgemelme Werttheorie, Psychologie des
Begehrens (S~w<* </c < ~on'f </<* r<f~ vol.
-1~
7'/)<fc<j~H<~<'</<'la c<<'r. Psychologiet/ </t''r). Leipzig,
0. R. Heistand, t897, vot. in-8", xxnt~77 p.
M. v. Ehrenfets annonce trois volumes le premie)', seul
paru, est, comme le titre l'indique, consacr une thorie
gnrale et psychologique, le second doit traiter des faits de
valeur thiques, et le troisime tudier les faits et problmes
de la valeur thiques-conomiques,et soumettre la thorie
purement conomique de la valeur un examen logique et
psychologique. La partie qui nous intresse ici, on le voit,
reste encore paratre. II suffira doue d'indiquer brive-
ment, pour le moment, le point de dpart de la recherche.
M. v. Ebrenfets pense que la notion de valeur ne doit pas
tre renferme et rtrcie dans l'conomie, qu'elle concerne
titre gal la psychologie et l'thique, et qu'il y a lieu donc de
construire un systme de la valeur. H convient de commencer
par une thorie gnrale de la valeur, et par la psychologie
du plaisir et du dsir o elle repose. L'auteur commence par
s'attacher tablir que nous ne dsirons pas les choses parce
qu'elles ont de la valeur, mais qu'elles ont de la valeur parce
que nous les dsirons; combat telles doctrines qui cherchent
a rendre compte du dsir tui-mmeen le rduisanta un autre
phnomne, et. rserve telles autres qui essaient de fonder une
vuteur absolue !a valeur rotative, admise par tous, doit tre
tudie d'abord: si elle explique tout, il n'y aura pas besoin
d'une valeur ahsoiue. En ce sens, )a valeur n'est que ta
< dsirabiiit
Elle n'est pas une proprit ni une facult des choses, elle
est une relation entre un objet et un sujet, exprimant que ce
sujet dsire l'objet. Dtermination des notions spciales et des
notions drives (vateur temporaire, valeur normaie, valeur
individuelle, etc., estimation, valuation, etc.), division et
classification des valeurs en immdiates et mdiates, distinc-
tion des valeurs propreset des valeurs d'effet,etc., mesure des
vateurs (chapitre inspir de la thorie autrichienne., tude
rapide des valeurscollectives, des erreursde valeur, etc.: telles
sont les matires de la premire partie. Une deuxime partie
du travail estconsacroaia recherche des loisdes changements
de valeur; une troisime l'analyse du dsir. H ne reste

qu'a attendre l'emploi qui sera {aitda ces prliminairespsycho-
logiques dans ta thorie ultrieure de la valeur conomique.

Sur cette question de la valeur nous ont t connus trop


tard pour tre examins

GOTTL. Der Wertgedanke, ein verhlltes Dogma der


Natiootttkonomie. Kritisctte Studien zur Selbstbesin-
nung des Forschers im Bereicite der sogenannten Wortteitre.
lena, Fischer,'t89'T,gr. iu'8, '?6p.(.s7~<'<M..S<Md<Mj?/~M-.)

L!TWtN!SZYN. Arbeit und Gewinn auf Grund einer


neuern Wert-andPreistheorie. i. Stirn. Krakau. Veriag
der Buchduckerei der cxas 18H6, gr. in-8, Ct p.

WHtTTICK. Value and a invariable unit of value (an


important discovoryin conomies), Phiiadeiphia,\hitUek,
~897, in.8- ~38 p.

TAYLOR. Vatnes positive and relative. PhHade!phia.


American Academy o(po)it. and soc. Science, Itt'n (a" t9i).
Voir aussi:
CROCtNt. L'elemento Mggettivo nella teoria del va-
lore. Gioruale degti Ecouomisti, 't897, avril.

B. A'oct(~MH~ et science <'fonOMt'~t<f.


<:ASTON RMUARU. Le socialisme et la science sociale,
Paris, Akan. (B~hut~xc df p~toxo~xe cott<M(pon<t))f),
1897, < vot. in- 2(M) p.
Ce petit livre est sans doute exotriquo,comme t'indiquent
ta prsence dedetaits pu rementanecdotiquesou biographiques,
et le tour peu technique tant des exposs que des critiques.
L'auteur s'est d'abord attache it dfinir le socialisme ou
plutt ce que, dans son livre, il entend par socialisme. Car ce
lui reste une opinion personnelle que de laisser Jtors du
socialisme Saint-Simon et Fourier entre autres, ainsi qu'on
l'a dj remarqu'; que de ne reeonuaitre d'intrt Rodber-
tus et Lassatie que comme prcurseurs de Marx~, et do
ngliger par consquent le socialisme d'Etat, ce qui, surtout
depuis t'uvre de M. And!er\ parait inexact et injuste; que
de ne trouver la doctrine socialiste depuis Marx que des
modifications insignifiantes 1 (en exceptant seulement Loria),
ce qui est mconnatre d'une part le mouvement des partis
socialistes en Allemtigiie, eu France et en Angleterre, lesquels
sortent de plus en plus de l'orthodoxie marxiste, et d'autre
part (puisque M. Richard dectare chercher la doctrine socia-
liste chez les thoriciens plus que dans les dclarations des
partis) les (puvres thoriques considrables d'un Otto Encrx,
d'un Theodor ttertzka. d'un Sidney \ebb d'o se dgage un
socialisme fort distinct du marxisme. Et sans doute < socia-
lisme doit prendre un sens large pour comprendre des doc-
trines aussi diverses aussi est-il bon de caractriser par
une pithte la forme du socialisme laquelle on s'attache

))) nm-tfht-ittt. ?-(-. p/.i/ )t<H <8')7.


<!t Rit'htMt. 0~). << ).. M.
Ch. An')k'r. Les ot-tf/xx'.t </ ~o<</MMt<' <7a/ m .t</fMa'/Mf. t'ari~,
Ah'tt)*. ttim.
(t) Op. f't/ Il. M.
!!)) t!st <'<* !)U')< a)t))t'nc pa) t',i!. tt's vnrimtittn~ du iofiati.ttx: <'t <'t'
<)')nt ot) lui fuit un tt'f '"unnc un'' t!:N\'ft' <)<' pctxuf humain)' pouvait
!-)
jaottus )''tn.' <!)< <'t ')''<h)itivct)t''t)t <tti't'?' xatx ft)' ftt)'))'?'' jt)tt't&t<n':um
de !!t)'ntiM ut dt- mo~.
en l'espce c'est le socialisme marxiste dont M. Hichard fait
un examen.
M. Hichard tient avec raison la thorie du capital pour
essentielle au marxisme. Le capital a son origine dans te sur-
travait. On sait que Marx cite quelque part 1 l'exemple, o
le surtravail est manifeste, du paysan des provinces danu-
biennes travaillant trois jours pour lui et trois jours pour )&
seigneur, pour l'opposer au cas do notre ouvrier industriel
dont le surtravail est dissimule dans la journe de travail
mme. M. Richard attribue une grande importance cette
comparaison du rgime de l'entreprise avec te servage, et se
donne la peine de prouver que du serf l'ouvrier moderne il
y Il eu progrs en indpendance personnelle, ce qui est si
peu ni par le marxisme que la libert politique, entranant
le droit de disposer de sa force rie travai), est, avec le fait de

du proltariat moderne, et que la


ne disposer que d'elle, la dfinition mme donne par Marx

rgime de l'entreprise au rgime de la corporation


substitution du
est ins-
parable d'un dveloppementsocial trs gnrt ce que
le marxisme non seulement n'a jamais contest, mais mme a
soutenu des premiers, et a expliqu, comme les autres trans.
formations passes et comme la transformationannonce,
sa manire, c'est--dire par sa philosophie gnrale de l'his-
toire, le matrialismeconomique.
M. Hichard voit avec justesse que le fondement de la tho-
rie du capital, de lu plus-vttluo et du surtravail est la thorie
de la valeur, et il oppose ta thorie marxiste '< deux points
fondamentaux mis hors de doute par les conomistes' que
la valeur d'un produit dpend de l'tendue de ses dbouchs
et du nombre des producteurs qui se disputent ces dbou-
chs, et que la valeur de tout produit dpend de la valeur des
produits que doivent consommer ceux qui l'laborent.
Pour le premier point, la loi de l'offre et de la demande

indique que le prix se fixe lorsque t'ouro couvre exactement
la demande, mais pourquoi diverses marchandisesplaces
dans ce cas ont-elles pourtant des prix diffrents? Cette loi
elle seule n'en peut rendre compte. La chaleur fait varier la
longueur des corps: la chaleur n'explique pas cependant que

U) MaM. P<M A'~f/< X,


Ri'tmni. O/t. ci/ p. XM.
? M.. p.t.
les corps aient une longueur. Pour le second point, une cole
importante et rcente, on )':) vu, soutient que le cot de pro-
duction se rgle sur la valeur, bieu loin que la valeur so
rgle sur le cot de production.
Le marxisme (poursuit M. Hichard) qui trouve normal le
cercle d'change M A M (Marchandise monnaie mar.
ehandise et anormal le cercle A M A' de la socitactuelle
o A' est plus grand que A, condamnedonc l'pargne, et veut
la consommationimmdiate de tous les biens. Mais d'abord,
dans le marxisme, rien ne peut tre qualifi proprement de
normal ou d'anormal ce qui est devait tre et si le circuit
A M A' est destin disparatre, ce n'est pas qu'il soit
anormal ou btamabte, c'est que le mode prsent de production
doit amener ncessairement un tat social nouveau. Et ensuite
la notion d'pargne est ambigu veut-on dire la retenue et
mise en rserve d'une part de gain personnel, c'est--dire
t'pargne provenant de l'abstinence? Elle n'est ni approuve
ni condamne par le marxisme, n'tant pas en question': le
capital dont s'occupe exclusivement le marxisme est celui
qui provient non pas de t'abstinencc du capitaliste, explica-
tion juge insuffisante, mais d'une plus-value dont il a
cherch l'origine et dont l'tat social annonc et prvu rser-
vera le bnfice la collectivit au lieu de le voir appro-
pri par quelques individus. Et le marxisme n'a jamais
tendu la suppression du capital, entendu comme l'ensemble
des moyens de production, ni par suite lu consommation
immdiate exclusive, ce qui serait en effet un retour la bar-
barie il a simplement dit que ce capital ne serait plus objet
d'appropriation individuelle.
La doctrine marxiste n'a pas seulement expliqu d'o
venait te capitalisme, elle a dit encore ce qu'il deviendrait, ce
qu'il engendrerait. C'est donc sur la prvision des tats
sociaux futurs que M. Richard t'examine en second lieu. t
fait remarquer que l'volution du rgime capitaliste dcrite
par Marx s'applique l'Angleterre,mais non la France
Mais c'est contester l'observation faite sur la socit actuelle,

(i) Rictutfd. Op. cil., p. liM.)~S.


~~M.)<it-)t)uitinv)~)u<-)t))tt)t)ui:.t~j)urt:n('tu)')V<-hant!t'M)t)ii
ttjathjui n't'st tt'aucunc m~nM-t-o un~ auturitf pour )'intcrpn!ta(iuM du
tMKfJti~M)'
(3) Rictmrd. Op. cil., p. t30.m.
et non la thse gnrale du matrialisme historique.
M. Richard trouveeodfautia sociologie ethnographique dont
Engels avait tir argument. De plus, a considrer le systme
en tui-meme, c'est & ta physiologie, notamment la phyeio-
logie crlo'ale qu'il faudra surtout faire appel pouf consti-
tuer une thorie positive de l'histoire' Or l'histoire, si on
la subordonne a la physiologie, est le tableau du dveloppe-
ment de la coopration, ou elle n'est rien On voit que
M. Richard n'a pas attaque le matrialisme conomique
franchemeut, en sou principe philosophique, et lie lui a pas
fait l'honneur d'une discussion approfondie, comme l'a fait
M. Stamtnter'.
Dans ta loi d'accumulation du capital, M. Richard trouve
plusieurs contradictions dont )a principale est !)! suivante
Point d'uccumulation de capitaux si ta force de travail n'est
pas l'objet d'un commerce libre; point d'accumulation, non
plus, si l'ouvrier qui lu vend n'est pas tenu de ta cder au
plus bus prix Libert~d'unepart,contrainte d'autre part,
la contradictionserait manifeste en ellet, s'ii y avait i autre
chose qu'une amphibologie du mot libert. M. Richard nous
la signaie tui-mme plus de confondre ta
loin Cessons
libert des personnes et des conventions avec la libre concur-
rence". N'est-ce point de la libre concurrence qu'ii s'agit
uniquement dans la premire de nos propositions prten-
dues inconciliables, et uniquement de la libert des conven-
tions dans !a seconde?
L'auteur dciare en terminant que la libert des contrats
et du travail est le but a atteindre: que la libert n'exige pas
i'efacementdu rle de l'tat; qu'il est partisan de l'attnua-
tion de la concurrence". H admet que < la concurrence cono-
mique peut n'tre plus qu'un ressort secondaire de notre acti-
vit; la doit tendre 1 volution sociale et l'fduei)lion de l'hu-
manit. car l'anranchissementet le relvement de la personne
humaine sont ce prix' Beaucoup de socialistes pour-

.t! Ktohtt-d. (~.cM.. )'. tM.


M.. )<. t:t8.
(:;) \ir
.-i..)MM))!i)'a)))tty~ ()'' n'M<c/)o~ MM<FMe<<< .te M. R. Stumuter.
(4, Mi'-tmr'i. Op. e~ p. 115.
(S) Ici.. )'. '9S.
(6) )'. i<M.~e.
/(< p. i97.
raient concilier leur socialisme avec ces propositions, et mme
le fonder sur elles. II ressort dune que le socialisme M'est pas
incompatible avec lu science sociale dont nous devons croire
que ce sont, d'aprs M. Hichard, les conclusions. Au demeu-
rant, sou livre a ct crit avec un louable effort d'impartialit
scientifique. U'uu critique insu)u9ammet)t informe, lorsqu'il
est exempt de parti pris, on peut appeler M lui-mme. mieux
informe. Tout socialisme tant une doctrine complte d'un
objet dont l'tude scientifique est seulement commence,
aucun ne peut tre )a science soeiaie ette'mme ou doit
simplement demander chacun de ces systmes d'tre au
courant de )a science de son temps. La marxisme, vieux de
plus de trente ans, est donc vraisembtatjtemont aujourd'hui
eriticitble au nom de la science prsente; mais les arguments
de M. Ricitard ne sootpeut-otrepas les meilleurs. A supposer
~a critique dcisive, c'est une forme du socialisme qui serait
atteinte, et non le socialisme, toujours renaissant sous des
formes nouvelles, tant qu'un fait, celui de la misre, sera
constaut, etqu'uuL sentiment, ta volont avant tout do la sup-
primer, agira chez quelques hmnmes.

TaEOBOR HKKTZKA. Die Probleme der menachMchen


Wirtaoha.ft. I. Band /~M ~ot~'M) </<'<' ~~r. A't':<'-
~MKj/ (/.M pf~~MM </f /VMMOM;<' AMte,
ProM~tc (/fs ~'tM. ~<w/t'(<o)tj. Beriin, Fard.
vol. te
1.
Dummier,
1897, 1 vol. in-8", tv-HCS p.

On ne fait pour le moment, ici, que signaler quel intrt


et quelle importance prsentera lit nouvelle uvre de
M. Theodor ttertzka, si i'on en juge par la premire partie
qui nous est donne. Mais, pour l'examen, il convient d'en
attendre les deuxime et troisime parties annonces, afin de
saisir, avant tout, dans son uuit)5 et son intgrit, le systme
de l'auteur de ~'M<f<M<
Le problme essentiel de la science- conomique n'a pas
encore t dfini avec prcision. Si cette science est ne avec
les temps modernes aprs tre reste inconnue de l'antiquit
<*t du moyen ge, c'est qu'une question nouvelle et surpre-
nante ds l'abord s'est pose avec eux. Jusque-l la richesse
avait vari comme les facults et moyens de la produire.
Avec t'age moderne, au contraire, ceux-ci ont cr beaucoup
plus vite que celle-l. C'est pour rsoudre cette difficult que
le mereantttisme crut dcouvrir <[ue la richesse dpendait
seulement de l'abondance en mtaux prcieux, que le physio.
cratisme soutint que toute richf'sse venait do la terre, que
l'conomie classique s'puisa en etorts sur la thorie de la
valeur, distinguant valeur d'usage et valeur d'change, spa-
rant valeur et richesse, et les opposant parfois l'une
l'autre'. M. Hertzka reprend son tour la thorie de tn
valeur. La valeur est essentiellement la proprit que possde
une chose matrielle ou immatrielle de satisfaire le besoin
humain (/<- besoin, et non ~M besoins, la valeur a pour
condition la possibilit 'de t'change). Valeur et richesse ne
s'opposent pas, mais indiquent le mme rapport des choses
t'homme. La valeur est forme par le travail, mais ce qui
produit uue chose ne doit pas tre confondu avec ce qui lu
constitue. Les thories de la mesure de ta valeur, de la fur-
mule de ia valeur, do la valeur du travail montrent que la
valeur varie avec les forces productives. Or, en fait, dans
nos socits modernes, la richesse n'a pas cr proportionnel-
lement a l'accroissement considrable des forces productives.
C'est que ta richesse ne dpend pas seulement de la produc-
tion, mais de la consommation. L'accroissement de la
richesse dpend de l'accroissement du besoin. Or, le besoin
est retenu dans des limites trs troitement dtermines par
l'ordre social en vigueur qui retient la masse des hommes
le produit de leur travail et c'est ainsi que la consomma-
tion de fait (non pas la consommation possible) a cess
de correspondre la production. La surproduction n'est
Stammler.
pas absolue, mais relative, comme le dira M.
tt ressort de l que la
misre sociale est non la cons-
quence, mais la cause de l'impuissance produire l'abon-
dance pour tous les hommes' Sur ce rsultat s'arrte
le premier volume. Voici ce que l'auteur annonce des deux
autres
Le second est consacr prouver que cet ordre social en
vigueur, cause du prsent problme, bien loin d'tre immua-
blement fond dans l'intime nature de l'homme et de la
socit humaine, n'est que le rsultat d'une phase de t'voiu-
tion humaine s'accomplissant; et cette phase appartient

<<) Hcrt!!)f!t. Op.c<<p. )-M.


~2) M.. 1). 41.
t9) M., t\
principalement nu pass, car l'ordre social
en vigueur est
opposition irrductible avec les conditions actuelles en de
l'existence de notre race. C'est pourquoi
nous nous trouvons
dj eu fait au milieu de cette volution sociale qui doit
autre l'humanit au seul ordre social correspondant con.

conditions d'existence changes, l'ordre de la libert etses
de
la justice sociale.
Le troisime volume exposera nettement les fondements
de ce nouvel ordre et prouvera qu'il
ne s'carte aucun
point des principes que l'ordre bourgeois rgnant enreconnatt
pour siens, bien qu'il ne les mette pas on pratique, et mon-
trera les voies par o l'humanit moderne
se dirige vers
cette fin,
On reconnatdans ce programme les traits caractristiques
du socialisme de M. Hertzka, mais la nouvelle
<Buvro aura
sans doute une porte systmatique et doctrinale que
n'avaient pas au mme degr les prcdentes.

C. L'ne conception HOt't'C<j'<' f('<-OMOm' sociale,

D~ RUDOLF STAMMLEtt. Wirtsohaft und Recht na.oh


der material1stischen Gesohichtsaurassua~ etne
8oz!a!phnosophisohe Unterauohna~. (A't'oHomtc poli-
~</)<t' et /)<-0<f <<t~\<
MM~~OK Mt<!
</f l'his-
~u'f. J?f'fA<'<-cA<- <~ p/t<f .w<'~<) Leipzig, Veit und
Comp., ~896,1 voi. in-8', vttt-608 p.
Il est difOciie de faire
entendre, en quelques pages, tout ce
que renferme, tant explicitement que virtueiiemont, ce livre
plein d'ides, uvre d'une pense vigoureuse, effort
remar-
quable de philosophie scientinque. Les sciences sociales
comme l'conomie et le droit ont besoin d'une unit de prin-
cipe qui les fonde le droit compar ni l'conomie gnraie,
la philosophie du droit ni celle de l'conomie remplissent
ne
cet office, car toutes ces disciplines supposent !a socit
humaine, et qu'elle est soumise des lois or c'est prcis-
ment cette f;M<m<M<~< etie-mme de la vie sociale
humaine qu'il s'agit d'tablir et de dfinir. C'est un problme
de critique de la connaissance (M'~MM~HM~McAc ~tt~Ac).
Le contenu particulier de la science sociale est indiffrent
cette recherche ce qui en est l'objet propre, c'est la forme
mme de gnralit ou de ncessit dont est susceptible
ce
contenu, et qui doit tre l'unit de principe des conditions
de la connaissance scientifique sociale 1.
Un seui systme s'est jusqu'ici affirm qui rpondit cette
question, et bien que beaucoup ne s'y soient point rattis,
aucun autre systme n'y il t expressment appose. C'est ta
conception matrialiste de l'histoire ou, plus exactement, te
matrialisme conomique. Les lois particulires qui valent
sous des conditions empiriques donnes, reposent sur cette
loi fondamentale, valable pour toute vie sociale, unit for-
melle donc de toute la science sociale, que l'existence sociale
tout entire dpend ncessairement de l'conomie sociale'.
' L'auteur expose donc avec prcision et impartialit les
principesdu matrialisme social et le fondement thoriquedu
socialisme appel scientifique qui repose sur lui il met en
lumire le vritable sens et la porte de la doctrine contre ies
erreurs de comprhension et par suite de critique trop fr-
quentes. Le socialisme marxiste ne f/CMtatx~ pas un autre
ordre social qui serait ptus:<~< il en a~H<< un qui est
M<'CMjm<n', en vertu de l'conomie de la socit actuelle,
laquelle, en conflit avec le droit encore en vigueur, produira
ncessairementun droit nouveau pour lui correspondre on
ne peut qu'unechose, aider l'enfantementqu'on prvoit.
H y a deux manires de critiquer ce socialisme on peut con-
tester que son observation de la socit actuelle soit exacte.
qu'il y ait concentration du capital, qu'il y ait conflit entre
l'conomie nouvelle et le droit tahii c'est atteindre non le
principe, mais l'application notre socit donne de ce prin-
cipe. On peut au contraire s'attaquer au principe mme,
ce rapport de dpendance causaio entre l'conomie et la
vie sociale, ou (car la question s'y rduit essentiellemeut)
entre l'conomie et le droit. Mais ici encore, o doit por-
ter la critique? On oppose par exemple certains faits, les
croisades, la Rvolution franaise, ou des vnements intel-
lectuels, politiques, ont, semble-t-il, caus des changements
dans l'conomie mais supposer que le choix de ces faits
soit heureux, le matrialisme conomique n'est nullement
une gnralisation des faits", il est la condition fermette de
(t) Statnmtcr. Qp. ct/ )). <-M. ~)'t)M<Mny.
?) M.. p. 2Mt.
(3) Coa< de ses ))<trti~n< ()Mi font pn~fnt'' <))n!ii t'ottt <).)m' othiMi ftos
qu<t sen'i. Voit' Luritt..4oatM </eM propriel c<!pf<ff/M<<ca. et t'ouvra~'
!n'ti~M<')ttu<bas de Mettu:!).
la possibilit de lois des phnomnes sociaux, et il soutient
uniquement et p'<o<'t ({n'en remontant la chaiue des causes
complexes des phnomnes sociaux, on arrive toujours au
substrat de la vie sociale. & i't'couomie sociute. -Ce principe
est-il donc iudispellsahle iu constitution d'une science
sociale comme science Voiia on est la question. Mais on
s'aperoit que le matriaiisme conomique n'a jamais dfini
avec pn'cision ni vie soeiate ))i conomie sociale. C'est ce
soin qu'ii faut d'abord prendre'. 1.
A t'analyse de la notion de socit humaine, on trouve que
la caractristiqueen est l'existence d'une rgle extrieure de
la vie eu comnum (.~?M~ /<'M M/ (t'<r<t'p/< ~<'r<~t'~f.<
~MMMtMfttMt'H ton ~fM<'' Cette rgle n'est
pas la
toi impose par un Htat on peut concevoir des socits sans
droit proprement dit et sans H)at; dans nos socits cette
rgle, outre le droit, comprend la coutume, les murs, etc.,
tout ce que l'on peut runir (par opposition au droit,
rgie d'obligation) sous ie nom de rgles conventionnettes.
Les deux ont ce caractre commun d'tre satisfaites par i'ob-
servation tout extrieure ;eu quoi elles se distinguent de ia
rgle morale). Cette rgie Il d'aitieurs non pas une priorit
de fait, mais une priorit logique sur la vie en commun
qu'elle rgie. Sans rgle extrieure il peut y avoir juxtapo-
sition physique des individus, mais non socit. Do cette
rgle de nature double, juridique et conventionnelle,if fait
que nous ne connaissons historiquement aucune socit ou
se soit rencontre seulement ia seconde l'exclusion de la
premire, va permettre, pour simplifier les analyses subs-
quentes, de ne considrer qu'un lment, ia rgle juridique,
laquelle serait la /w-w<' de ia vie sociale. A cette forme

(<) S[atttt)t'f. <~). cil. ~t- KcA..S/an~ t'M~e. ti. ~7.8!


S) M. S!)m)t)tt<'r nf <)i.<tHtf!t"' )'a< Xtuios d. <-it)'j 'tt))))<)M fort t)in'?n'nt!i
du tx'tt~riat t. Vie !ia)t- .~t tri <.)))).' .t .tist<Mt-<- de )')<on)tMt-
)!i'))< Mx-m) !:i){nit!)' <- ''xt.'ri.-utv<tt''))t n'K)'' ' Un'' ).)x''<)i<-)ttion df
t-M )<?))))<-)' t:t'M< '"ft<;t-i<'urct)t)'t)t )\'t:tt? ('onfornh~ucxt u un<! toi t-iiUnn-
t
nt')h' t-.)t)f<)t-tm!)n('nt UM'! 'tt-ftani~ti'tn nttint)e)))' <-t ~ftititm' d'' )'hu-
tntmit'- tr't ')'
)t-!H.'nt 'jut-~i'~n !:t'i)t)<' 3. (.')* !.ens us.)! <-<tnfu<
tn)ti!. d'~tn' t)~ Mtjut'nt orximi.~ttittn sofiah' s'upjKMt- u~tmisa-
Uon ii)<cnt)t".t't) t-<'<)u't.)tt' Mtt-uttfur)tt<'itutt)))<tnt-it<i<)und.t'ts'it<tjMM)'
()ir<'<-tc<t))'nt <)'<tut")'it' au )i''u <)))'' )'<mtn' t-t)U!-i!it<' & tt)<ir i)K)i)wtt-tt)t')tt.
tnMtitt)-t)t.'ut, ft) tiu~-ittmt un t'Mrcit't' fpontattc <)f!! tntttjiJM ittdhidMeb.
t. Sm-ia) )!'o))pos<' & potithjUM S.. Knt'ittt e~t ''))))))oyc pour
t<M fftpportit <)<: natutt) cu)n'ctttiunMt;)to catro I).'s individus par uppositiua
aux mpport!!Jufi(tiquM.
il y a une HMft~f. Ou pourrait croire que cette matire est la
nature Itumaiue avec ses proprits, tHnis c'est l l'objet do
sciences naturelles et nou d'uue science soeiaie ou bieu
qu'elio est l'appropriation de ia nature nos fins, mais c'est
l, pris en soi, l'objet d'une technologie, valable pour
i'hommo suppos isol comme pour t'ttommo vivant eu
socit. H n'y a i quelque chose de proprement social
qu'autant qu'il s'y trouve collaboration, action en commun
sous des rgles extrieures. La matire de la vie sociale est
donc l'action eu commun des hommes teudant la satisfac-
tion de leurs besoins ((/M ox/' /Mu<)M~f/t'<p~)(n~ gerich-
Mc wf<tM'/i<t'<' ~)MMtMt<'K!t'M<'M).
Et il u'y a pas dis-
tinguer entre besoins suprieurs et besoins infrieurs ou
matcrieis dont s'occuperaitseulement l'conomie outre que
la distinction ne peut tre absolue, elle n'intresse nullement
l'conomie sociale qui tudie proprement la runion, ta con).
binaison des activits humaines pour la satisfaction des
besoins et non ces activits ou ces besoins eux-mmes. Autre
chose est connatre les lois physiques suivant lesquelles
roulent les ds, et autre chose savoir les rgles du jeu
Le droit est la forme dont l'conomie est la matire, Il y a
possibilit d'tudier la forme part en tant que forme, et
c'est la science technique du droit. Mais il n'y a pas de droit
naturel, au sens qu'un contenu pourrait tre assign au droit
a priori. Il faudrait trouver dans la nature humaine un fac-
teur de causalit mcanique pour ainsi dire, alors qu'elle est
simplement un mode gnrai selon lequel les hommes se
posent un but et poursuivent une fin. Il y a un droit naturel
avec contenu changeant on entendra par l ces propositions
juridiques qui, sous des conditions empiriques donnes,
renferment le droit thoriquement juste. Quel est le principe
d'unit fondamental qui rend conformes des lois, c'est--dire
objectivementjustes, les volonts sociales? Tout ce travail a
prcisment pour but d'y atteindre
Si la forme peut tre tudie sans la matire, l'inverse n'est
pas possible la matire conomique ne peut tre tudie par
la science que sous la condition toujours d'une rgle juri-
dique (ou conventionnel te). La raison en est que, du moment
o on ne tient plus compte de rgleextrieure dtermine, la

ft) Stttmmtcr. Op. cil., S'" BtU'h. t)f)' G<Mtt)~ < So:)aftfMt<'<Mf/t<t/'<.
t2) /(< p. t6HM.
matire donne cesse d'tre sociale, ou d'tre considre du
point de vue social. Le troc entre deux sauvages suppose une
rgle juridique fondant t'appmpriation et ht translation de
proprit que cette rgle soit exprime dans un droit positif
ou sous-entendue, il n'importe pas ici. Que reste t-ii de n'im'
porte quelle thorie de la valeur, si i'ou retire ht condition,
sous-entendue dans tous les raisonnements, d'une appropria-
tion individuelle des bieus ou de certains biens et ia possibi-
lit d'un change garanti seion certaines rgies? Un peut
mettre au dn de citer une notion ou une proposition cono-
mique, concernant la vie sociale des hommes en tant que
telle, qui n'ait pour condition l'existence d'une rgle ext-
rieure dtermine de ta vie commune
tt y a sans doute une conomie isole, et non sociale; mais
elle se rsout en science de la nature et en technologie; elle
tudie les choses, leurs proprits, et les procds avanta-
geux pour les approprier a nos besoins. Mais cette conomie
natnrette-technique n'a rien de commun avec l'conomie
sociale il n'y a pas une science conomique gnrale qui
aurait deux branches. L'conomiste doit assurment runir
en sa personne les deux comptences; mais les disciplines
sont distinctes. La division du travail, en tant qu'elle permet
uuo conomie de temps, un accroissement d'adresse, etc., ne
relve que de la technologie: elle n'entre dans le domaine de
t'conomie sociale qu'en tant qu'ette implique ou constitue
un mode d'action en conrmun, extrieurement rgie, une
espce dtermine de vie sociate, socialement oraonne.
L'introduction de la machine vapeur n'est qu'un progrs de
technique le machinisme n'intresse l'conomie sociale que
parce que, les machines cotant cher et les fortunes tant
ingates, l'ordre juridique existant fonde l'appropriation par
quetques-uns de l'avantage rsultant du progrs technique,
et rend les autres socialementdpendant, dans leur action, de
ces quelques propritaires des moyens de production dsor-
mais indispensables. 11 est impossibte de considrer une cat'
gorie proprement conomique en dehors de toute hypothse
d'une vie sociale et d'un certain ordre sociat donne
Ds lors qu'appellera-t-on phnomne conomique? tt
s'agit toujours ici, on le voit, d'une excution concrte d'une

(t) Stanoxh'r. Op. << p. 20t.


(2j M., ttt-itMipah.'ttM-nt iM-tM. )M-i!M. MMNi.
vie sociale soumise la condition d'une rgle dtermine.
Les systmes juridiques historiquement constitus laissent
aux hommes qui y sont soumis, cot d'ordres directs, de
simples possibilits de rapports. Ils dterminent la faon de
se lier, si l'on veut se lier, et les consquences, lorsqu'on l'a
voulu; mais ils ne tient pasdirectement.ce sont les individus
qui, de teur initiative, ont se lier sous les conditions poses.
C'est le cas pour tout ce qui concerne la satisfaction de nos
besoins, nourriture, etc. En ce sens, la vie sociale est i'en-
sembio des rapports privs soumis une rgle qui s'tabiis.
sent entre les hommes. Toute ralisation concrte de vie
sociale, pour autant qu'elle ne provient pas d'une influence
centrale directe, s'accomplit par la formation de rapports
juridiques entre les particuliers. Un de ces rapports ne suffit
pas constituer un phnomne conomique il on faut un
groupe d'analogues plus ou moins considrable. On dira donc
qu'il y a phnomne conomique quand il se produit un
ensemble de rapports juridiques semblables (Ktn <ptotto.
mMcAM ~Aft'HOMMt A<')M< o'nf ~<<'AAMf<t<'A<' jtfaMCttftwA~-
ttM~ rot) ~fc~wA<f<<K<Mp') ainsi une prise bail ne
constitueraitpas elle seule un phnomneconomique, mais
ce sont des phnomnes conomiques que le fermage, le
mtayage dans notre socit o cette sorte de rapport juri-
dique est trs frquente. De ) une classificationdes phno-

mnes conomiques d'aprs les rapports juridiques qu'ils
impliquent, double classification analytique, qui considre
ces rapports en eux-mmes synthtique, qui les considre
dans leur runion selon les personnes, sujets de ces droits.
Il y a des phnomnes conomiques ngatifs constitus
par l'omission ou la violation en masse de certains rapports
juridiques (chmage, surproduction, prostitution, etc.)
Les termes du problme initial vont maintenant tre poss
ainsi qu'il convient. Comment se produisent les phnomnes
conomiques ? Deux cas sont possibles suivant que t'tat du
droit reste le mme ou varie. Si le droit ne change pas, les
modifications conomiques ne portent que sur la quantit
mais encore sous quelle cause ? Les progrs de la technique
ont une inituence, mais indirecte seulement elle n'a lieu
')) St)m)))''r. Op. ct< p.Mt.Cf.p. NM: ~Mtcmttt/K'M~xwx'tM'jnn~
'<tt'/)M)'~tf/<' J)faMfMf<'tfAf<MM))~ft) M:ta< ~M'fj~tft' ~f:)f/)MM9M Mt)<f<'
~tMf/fftt.
(i!) Id.. p. S6M8t.
que par l'intermdiaire de l'action humaine. Et il y a en
second lieu l'influence de l'homme; et en ratit c'est la
seule directe. Ces phnomnes ont Us lieu selon des lois,
ncessairement ? La question revient rechercher une con-
naissance exacte des raisons empiriques de l'action humaine,
tablir une causante des actes humains considrs. Lesditu-
cutts de cette tche sont grandes, on no peut gure fonder
positivement que des observations particulires, tt est donc
impossible de parler ici de cause et d'effet au sens rigoureux
des sciences de ta nature il vaut mieux parier seulement de
tendances (7'f~<'M:pH), en entendant ainsi la connaissance
d'un dveloppement uniforme des phnomnes sociaux tel
qu'un vnement correspondant peut tre attendu*. l,
Le cas o le droit change, et non seulement le phnomne
conomique, pose le problme essentiel. De quelle manire
les changements du droit sont-ils soumis des lois? En quels
sens sont-iis ncessaires? Comment fonder, comment appr-
cier la lgitimit objective de ces changements ?
ne provient pas de
Le droit
causes autres que des causes sociales. 11
n'y a pas dualisme dans la vie sociale, le droit et l'conomie
ne procdent pas de causes distinctes; la forme et la matire
detaviesociatenesauraienttreindpendantest'unedet'autre.
H n'y a pas lieu non plus d'invoquer une cause premire,
commune et suprieure aux deux, un t'o~e< Il convient
de soutenir le monisme de la vie sociale, non seulement on ce
sens que l'objet de la science sociale est un, mais en celui
encore que tous les mouvements de la socit humaine sont
conus dans une seule et mme (<<w/j~M<~i-<'<f. Les ph-
nomnes sociaux produits, dans un tat de socit donn,
par les rapports juridiques donnent naissance, en se dve-
loppant et se compliquant, des poses, dsirs, efforts qui
tendent une transformation du droit, ncessaire pour mettre
la forme en harmonie avec la matire, tt n'y a pas de classe
de phnomnes ayant le privilge de causer les transforma-
tions sociales, comme Marx le prtendait pour les ptino-
mnesde la production. Logiquement un modede production
donn est compatible avec plusieurs modes de consommation
diffrents. Historiquement la cause de la crise moderne est
moins en ce qu'un mode de production nouveau s'est tabli,
qu'en ce qu'un mode de consommation et de rpartition

<t) Stammh'r. 0~. <-{< p. 9~.30!i.


ancien s'est conserv. La surproduction est seulement rela-
tive, c'est--dire tient ce que le rgime de rpartition de
l'tat social antrieur est tel que beaucoup ont des besoins et
n'ont pas d'argent. Les hommes se sont assembls afin do
produire, dit Marx cola est incomplet tes hommes se sont
assembles afin de produire ~ottr f/)'<M'Mft
Le conflit est donc entre ht matire d'nn tat social donn
et ht forme qui dure encore d'un tat social antrieur. Est-il
vrai, comme le prtend le matrialisme conomique, que n-
cessairement ta matire s'accommodera la forme? Est-ce
un strict rapport de causalit qu'on veut poser? tt est clair

que ta forme sociale ne saurait avoir pour cause la techno'
togio qui n'est mme pas sociale; il s'agit donc do l'action
commune sociale pour ta satisfaction des besoins le rapport
alors n'est pas de causalit. Dit-on que ta dfense de lu patrie
est la cause des armements et prparatifs, et non pas que
ceux-ci sont les moyens pour cette fin ? Le droit est destin a
rgler un modo donn d'activit sociale; te droit est donc le
moyen et la vie sociale ta fin. Le droit n'est qu'un moyen
pour le but de la production. !t y a conflit social quand le
droit tabli est en opposition avec la fin mme du droit'.
Quelle est cette fin ?
Une tleotogie sociale est ncessaire. Une fin individuelle,
tant toujours subjective, une fin empirique, tant toujours
contingente, ne peuvent fournir le principe objectif et obliga-
toire du droit, l'unit rgulatrice de toute la vie sociale. La (in
sociale doit tre proprement sociale et a priori. Aucun con.
tenu matriel ne peut lui tre assign. Le droit est un moyen
pour des fins humaines le droit est la condition de lu mora-
lite le droit est un moyen ncessaire pour que la vie sociale
soit conforme une loi. La fin sociale est donc purement for-
melle: c'est la libert. Une socit d'hommes de libre volont.
voil le but dernier, inconditionn de la vie sociale (/)*
<t<'mctMc/~t /re< M'o<'M</<'r ~<'<!c/)ftt). Vouloir librement,
c'est, affranchi de toute condition empirique, poser et choisir

j S)M.Ht)w. Op. '-f<. p. M!i.3M.


t~ Voir av'f t)U<')te
<!Ct)t)')mi()U< ))') tW' < Mt'nt'-tnttion )'<tutcnr montre quo to nmt<'ri)t)!n)c
i"t''n''ttif la tinttiM 'httti! )'<M'('uoch'
t<K'nt du ta iiot'Mt'' futu)'< )))tt)t''Mt (-hoxir ''otn' h'nfttMt <it la m'-tt' sinon
pourun'! rai~'M do thuHtMt L<t ~ociathttU'm dus biens Ni jtnxhti)')). itmt!'
pt'itH' <)'' )))ort j)t)Ut' )t' pt'oMtNt'tttt qui <'))tpt'c)~' <(UH nous ne cono.'ntiuttt
f't'Uo Htort. sinun une raison d'* tintttit'! t
de telles fins, qu'elles tendent au but dernier absolu; libre
volont veut dire position d'une fin objectivement valable.
Une socit d'itommes libres est donc une socit dans
laquelle chacun fait siennes les nos objectivementjustes des
autres. Voii eu quel sens ou peut opposer au matrialisme
social un idalisme social'.
Un idai ralis ne serait plus UH idal la question sociale
est donc insoluble. Ou ne peut qu'approcherindfiniment de
la soiutiou. Mais il no s'agit pas de dpenser noa efforts
atteindre un tat Idal absolu, il s'agit seulement de les cou.
sacrer a obtenirune vie sociale objectivementjuste, c'est--dire
un tat social qui, sous ses conditions concrtes particutieres,
possde la proprit formelle d'tre conforme une loi. Et
cette possibilit est l qui peut se raliser, pourvu que nous
voulious bonnes penses apportent bonnes actions C~'
t.'f~H~'H //nM~fK ~<' y/M~'M C'est sur cette formule d'intet.
lectualisme optimiste que s'achve le livre.
L'ouvrage considrable de M. Stammler ne parait pas avoir
besoin de commentaire, la pense y ayaut revtu ds l'abord
sa plnitude d'expression et se recommandaut d'eiic-meme
par sa valeur. !i n'est gure plus besoin de critique. Ce
livre contient en somme au moins trois uvres harmonises
en une seule une discussion du matrialisme conomique,
une conception de la science conomique, une mtaphysique
sociale. La discussion du matcrialisme vaut d'abord par la
force qu'une exposition la fois impartiale et pntrante a
donne la doctrine vise, puis par l'excellente position de
t'exameu auquel eUe est soumise il s'agit de vriner un rap.
port tabli entre la vie conomique et ta vie sociale; ne faut-
il pas dfinir pralablement avec prcision < vie cono-
mique et vie sociale "? Or, c'est justement ce seul travail
de dfinition qui, une fois fait, se trouve avoir rendu insoute.
nable le systme considr.
La mtaphysique sociale,
comme toute mtaphysique, ne serait critique que par la
construction ou au moins par la supposition implicite d'une
autre mtaphysique.Ce u'est pas ici le lieu d'entreprendre un
pareil travail. H serait intressant d'autre part de rattacher
historiquement ses origines philosophiques et surtout aUe-

dj StM<tt))t)w. Op. cil. Viet~cs Duels, So:)<t~ MM~it. F6Hftf!i Bach.


J~ M<'<'A< dea ~<<<M.
t!) M., p. 040.
mandes cette conception caractristique de la libert et de ta
flu humaine, individuelle et socinto. Pour ta conception de
la science conomique, elle aurait besoin d'abord, sembto-t-H.
d'tre dgage de cette opposition un peu scolastique et ver.
bule de la (arme et de ta matire. Et ensuite, pourquoi
NI. Stummter a.t-it, mme pour le temps seul de l'analyse,
restreiutla re~te sociale extrieure, dont dpend l'conomie,
a la simple rgle juridique''L'fpithetede < conventionnottes
qu'i! applique aux rgies de la seconde catgorie, coutume,
murs, etc., prte croire qu'elles sont plus arbitraires,
moins imposesaux individus, moinssocialesen un mot, que
la re~te juridique, ce qui est une pure ittusion. ti serait int-
ressant de rechercher comment l'conomie dpend de ce
second ordre de rgle sociale. Le concept de < social avait
t assei! soigneusement etabore pour mriter de n'tre pas
dissocie au cours de t'etude. Mais tu voie ouverte est fconde.
C'est la distinction, si remarquablement institue, entre ce
qui ressortit, dans le complexus conomique, a la pure tech-
nologie, et ce qui y appartient t'cconomic, c'est la dfinition
du phnomne conomique en fonction de facteurs sociaux,
qu'il faudra reprendre et approfondir, si l'on veut constituer
une science conomique qui soit proprement une scienc
sociale.

D. J~'rfM.
A\v. Y~cE'fxo MHD.t'S). La funztone eoonomioa meUa vita
politica, con )'t''ft))'i<n'' di H.\mcu
t''KHKt(Z. /b))e<<oH A'MMMt'~Me
f/Mt la t't'e )wM<Mf'. ttoma. Eonamin Locscitt'r and C", <895,
t sol. )n-8", \)t)-tM ;).

Cet oun'a)! )(')M't')x) )a tt~otonstt.tti'm.d~it't tentt', ttutnntt~'ia-


tistuc ~C['no)ni()uc pat' h's fitits. La fonction de nutrition est ta

tKvptoppemt'nt putiUqtK; t't est


tttttctiun iottispet~attie et fondanu'tttato df la vit- ur~Uttqm'. Tout tt!
(-onditiont)~ pin' t't'vohttion ~co-
m'miquG. L'auteur passe <-)) tt'vne )'))istt<it'<' dM notre Khinsation
uccidcotatt', en s'f'))m'<;ant de prouver qu'il et) a <!tc ainsi a t'ori-
~ine .pt'opri'te cotntuun'* do ta tt'rrt', p. XO, etc.), dans l'antiquit,
au moyen aj<e (ta nohteMC fonde uniquentent au dbut sur lu fur-
tune, p. 38), dans les temps modernes (la ttevotution franaise s'ex-
pti'juant par une transformation de la proprit foncier' connsca-
tion des biens nationaux et suppression du domaine minent de
i't~tat, p. SO). Aujourd'ttUi, da))!; ta potitique contemporaine, tout
'taMit ta prpondrancedu facteur conomique la lgislation faite
MU pw<ttd'')ach)t'pt'da))t<'<'tdiri~<'i)nt')'it)()wtn'<-d'-)!th)))))'*
i'auqm'd.UtS t(~('U))S<'i)st!()))Y(')'))t')tt'-t)t!tU\.<'tr.,t'tc.
))))<'f.Htt d('m-
pa.<!tH<'))dt't-d''s[)us.<(-.<di)~<)ntt-s,d'')')-:tut,d<-sn''fur)))<<tui.
<aht''s:))'~i;)'t'<'M))td'f))'<-)Ut''m('s,)Ku'h'dt:YL')t)p))t'n)('utnK';t"
!!tnrt.'d<')\u))<!)))i<
aYuitt)Ut')('t)MYund)'M.M)')h)'-in'it.inutc~u<'t-t'Mux ))m)th".
dut)ti)st-rt'chutK':M:u'x,tp)usdm'ch')))t-tt))).Lut'i!)tduntt'<uvn'
<tqua)ith''t'qm'tqm'p:))t.p.t7,d'<i)))pt''t'i~.<!th)t't;.t.im)'mt'itit
ptuttpt'hht<))u!)ui,intn)oius('npt'ish')):ia<tus!)t)t't'-con!
ntt')U('d<)u)i))):u)<'(".t:t.sMv:)~U)',)')))'))\'st)))us<.t)'i(;t<')tt<'ut<o))s-
titu'p:tr)t')))"dfdcpt'<dm')iunik')~t!i)))t'd'')aj)t'u))ri<t<f'd<~its"u-
v<')tt'tt't'cu))si(h''n'')dtttt'(.))tt)tt' untn~dcdt'x'-pnttitiuttqu''
'-t)t))t)X'Ut) )ttudcdt'j')'<'d)trti~u.j';tpuis't'tc'f-st ttons ~)':n'<'))))<)))<'
)'t's<tb)t'.quid'![i)tt'm-sn'')-Hh-)'st'p:)ss<'u)t')))''tttt'tM.M'')tt).<i),)''
tnatt~-)!t)isnH'~ct'n"tuit)u<'d<ifn'utoit's''f()ndt')'))isto)'iqm')tt(.'tit.
('x)~)')m''n)!t)t')))''))t)'om'ainsi di)'c''f))t se nt))))(')h')M-dt's.ustf'
fWt'Sob.')VMtiut)Sd<'M.StUM))ttct'.

L.-).. DUC)' Money and its rotations to Prioee, )'<-i))p .tn


iMtjuit'yH)totht'cau')))('<)!Ut'c)m'nt,Mnd('(f<t-ti.oft-)Ktn~[".in
tieutit'ut pticc!- (/. Mw<M(f<'<'f<<t ra~M~j! nt'ff' /M p<'ft). t.undo)).
Swan Suum'ni.cht.'in:md H". t.unttun, Kfw-Yutk,Charles !'ic)'i)'))<'t'<
Sous, <MG, i yot. i)t-t2, o-XOO p.
C<;IhTe!)t;t'Mit!ttU)))'r).'ch''td''ta)~utK'dutiYt'<'d<'M.th)t))'f!ui)t
<)U'una,)))ushimt.iaissf)'d<'cU'<f.stHY)'<'d<;)':u~'ns't)itvau\.
dont t'honn')<'t~ et ia tn~thodc .<ci(-))tiO')u''S!t<t n'ounu''}., qu'i) cot)-
Ytp))dt'i)it d'<tudift')a qucstiu)) :.) c<m)))!t-Xt' t-) si d'attucdc ta tn"tt-
nMit'ctd(')av!t)iutiundt's)!)t.M.))uUtt:ttin~'t'st!ttta<')))''j)at)i('n)it'
t'etnf))titd~'t''ttnit)t'tAttMY('tSt)"trf)ti~ttt't'<cn))Otni<)n<'))')'(t)<'dt'
)'~ta)M)n)0))~tait''f't)n')Uf'sHfmf)nmt't:t))isn)~.C'<t)('t)t't)h)(')))('
)')u'!g~))''ndd'')nv!u'iati<')td<')'f')~cm)')t'd(".pt'ix<)UfM.ti';f)t
Il
<-SMy~ d'h)<'i(tt't' histo(i')Uf))x'))t. ).f pn'tnic)' soin ttevait t'h'c d'-
re<'))Ctchc)' connncnt t'n pumuit tncsuMr h' chnnt:f'n)f'))t r')
d<
pt'ix. M. t'tirt' t'xiunh)'' tt's dit~rcnts systOncs propost' cxpo!!t; <-)
c)itn)U'' )h)ta)))))h't)t t''s d)Yf')': tttudcs d'/w</<f Mt<M&<')'f; dont ou H
voulu se !,<'t'y)t'h.t:t''t"!ttU)''))()))<)('et utih't~udfdomcthud''
statistique, fuis itf[udi)')Mt't!tx<'ttes ('ons~tjm'UK'sdaosI'fcouu-
)nie~)n~:d''<'tp:u'ticu)it'n' <)MY:tt'iMtiu))s des prix (ch. ))).))II
pxutnit)'' i-uct-ci.i.ivt-nx'nt )')ev<t)it)n des j'tix qui a suivi ta decou-
vet-tc de t'Ant'iq~ '<')<. )))~ )'!thai.-s(-nMt)t d< p) ix im cuuM de i:t
prcmit'rc piutic du xt\' '.it''c)t' (ch. ni r~i<'Ynt:on des pt-ix qui ))
suivi )a d~'ouvHrtf d''s ntincs d'ot fn C:t)ifm'nie et. en Austrati'-

~)Y.)))us)t<mt)).t8M.
(% Y. plus h)mt p. ~TU.
(ch. v);)'n))aiss('mentdf.< prix (;ni s'est produit''n'esvinpt der-
ni''res annes (cit. Yt~.L'autetu-s'attend, dans t)nf tnatien* aussi
''()ntrov(')'ee,a))epa<'t!at:t)er)'asse))ti)nentd''tm)sse):)ecteut')t)ai!!
i)pretend!t~)'eapp)i(n)ea))epa'!a\'an<('rd'assc)-ti"t)strop'-oj)tes-
tatdes, a prsenter des opiniuns fondes sur t'ettute attentive des
faitsetFexamensrieux des thories antrieure". f)n peut tui rend t'f
cette justice <m'ii a suivi ce )!rt't:ra)))tt)e.)ts'e-!ta))ste))ude previ.
siens tmraires touchant t'incertain avenir. Xatitoite sa tAche A
retudpet)')ti!.toiredespfi)ft'ipa)esvti(t)io)t'.depfix'{U(o)ftcu)icu
danscesder)ner.ssiee)es;i)asus'ena':tp~itt!'retnepase))
!.orti),n)eriteuuin'est))as commun.

< )tLMH).)X. ProMmos d'conomie politique et de statis-


tique (Cot)ection d'auteurs tranger-! t'ontcmjwrahts.t'aris.ttui!-
)autni)te)t:iM6.tvot.in-8",vHt-3S9)!.
On a <')<oi.si, pour les traduire en )'rat)';ais et tes reuoir sous <<-
titre, tes articiesJUttes tes p)ttS))ro)'resaiute)-e'<)'t''put!)i('fran'
''aisdansIes/<f</t'/f/t(/~M/!tf?~fde)<Utnetiu,recUt'itdese-travam
tes ptus importants. <;e sont des morceaux dj anciens (tonti)su)-
th'!Kt<')'appf')('t'ici )< titres: U)))<!tion d'une )<u!-<'cia)c.)XG'?.th
ta tttit')n(''j"'u)')t')'?),<.SK:).<U'u(iti~M<'t'tja ))Mr:tf'<X74:
!)*' i'u)))'-t d'; la i.tuti~tiqm'. <M3; ~uti~t) t't dun'c d'un'' );))'

t'utif~n: S)tt')<< th~orh'sdc Matthus; Vittc t't Ca)n)':tt!))'Cu)-
ton' oturith' t't cutturc intt')!ctu<'))< <876: De t'))at'itudc, i8'!9:
t)<'t:tSUt'j)Upu)!diu)),tttttt.

).~o.\ \VA).)t;\S. tudes d'conomie sociale (y'Ac''t'f/t'/ f~-


t)'<t'u </t' / t't'c/fMf ~t'//< LauMtXK', F. )<<'Uj;c, <'t Paris.

F. t'ichux, i8t'6, < vul. i)t.8", u))-t04 {'.
M.L<!onW!)h'asat<'))onc~a('xj)"!'t',dan!.(h'ttxtt'ait<st)tti
auraifnt con'L'Sjx'ndu aux /m)<)! <fCfMOMft'<m/f7<~'' ~Wt'f <etud''
(les lois ))!ttm't')tfs df ta vatt'urd'~chaujjft'tde )'<< imn~c, uuttK'urIr
d'; la ticht'Sitc sociaft'), les deux autres parts d'' ~a duct))))'' ct'utttt-
Mitjue ~tst)cia)c:)'ctud<; des eonditious tes jttnsfavurahh'sd'')'.) ,!)-)-
L'utture,dt')'indui.tt'it',dm't'tn)nt')<'f,ducr~dit,uut))r<:))n'd'')i))')'
ductinn de )a m'hos'(t'f' t)u'i) apjx'Ht' /cM<uM'/~f'/f'tM ff/~<h~tff'c
''t iYtudc dM t))<'it)t'tu''s cf)))ditiu))s d)')a prop))')' t't d'' )'i)))pt. ou
t))f'<')ic d'' )a n'-partiti)) lu richesse (''<' (ju'i) appt'tte /f-oMnwx'
d<'
ifuct'a/f). !'uur supph'p)' autant <)ue poM))')'' il tt's trait'
il r'~mit.
'')) les <o)up(ctant et tesordoxuant, de. tudes, m~muires, t'tt:
dt\i)')
)!ub)i~s. ot) il a abordt? tes points principauxdu sujet, et y donne h'
titt'C d't<M <f'MKOm< ~0<t'<fye ~t/t~t'f et d'~M<< <<'ft'OMOMtf
<ocf~f. Ce Yutume-ci est le prenuer publi; comme faut) <; contien-
dra en outre un rsume de )'eu!ie)n)))e de la ductritx', il contieut
de t'attend)' pour une tude conndete de )'u'UY)c de M. Wa)ras.
). prsent votume contient une thorie ~enO'atc dj socit fconr':
profMseentM7.<;8,p.23-t':)).un<-U)'texpos(''desa)net))ode,)ne-
thodedecon('itiationd'')asyttttt<se(p.i'203),ecritent868;un''
tt)eot'iedeta)n'oprit'')'sous):tforn)e:u)KtytiqueettMatheM)atique
(/<'w<'tf<~<<t!<96),p.2M-246.qui)'etieatatt)eoriet!et)erMtede
tttso<'it''te<)utt)'oriedet'idea)so).-iat.tat))eori''de)areati'.atio()do
t'idt''at.<oti:ttou thorie dupri.t des terres et de )em'rachat par t'J~tat
n)athf'u).'tti')ue)))ent conduit''<p.2CT-:<5U);etennt)diverses tudes
sur )a thorie de ('impt dj pub)it'cs:u)teur~. M. Wa)r:t3 reim-
pri)ne(''t;a)etnentuHtt'av:ti)sur)).-)L.<!osse))Je
prcurseur )ot)(;ten)ps
tnecunnude)'econontiepo)it)t[ue)nathe)))i)tiquc.
t)))Jo)nx-\K)!r;rt~tCKH. System der nationalen SohutzpoUtik
naoh Aussen. Xationute Hntuk' (iasht'~uut~'t'f :ttn'h (tf)tt'idu-),
Kutuniitt-, \iin'tmns-. ).)')<[-, m)d At'hfih'r-Schutit-putitik.Kin Hfmd-
huch fiirdi)')'hi)dt'k'n :t)t''t' Stiind'' '.S~wt<'f/<w~'<<t' t<c~)'
<<!f/t'c )t<<&M<tfe t'mttt'c <f<'<!<~<*< tL-uu, (:. t-'i.sctK't, t8MC, in-8".
\-SM['.
Le .<yst)''t)x' d<' J\L'u)f' <tt' Mant'tx'stt't' ou dM lu tibn* <:oncm')'<')tc<
tfM('ti('ttuti)''ai:un)i<'m'a)")utit':)it!t)'~)it)tit)!ttiuuuU!'t)'t':t''(;-
mfttt<tt"if!u)'s,t!U)t''))tt')'"findh'idU!i';u\'nttvt''sHt!(ts.i(I'
t't".trit't!uns<'td<'s)i)nit'n'y~tai<t)t:t)'pot'[w.i/ns<'n))')<'()<"i
t))''sut'td'm'drc divers par tt')!))tt':))t'suu)'h:ttprut<):iftr:n':tit
ttMtim)!d<-untn')act'u'mT('nct'~tt'i)nt:<n'<'stc't't)u'')).Wf'f'ttic)i:('
!t))j)'')i)'ia))u)iti'tm'd<')u'utMti<L'n)t!tti<)n!t)''cu))H')'ctri))))!C)'.ti!
t'm)~s<'d:)U!icftin<'d(')t)''ttn')t'sj)t't-)inMcu)ti\~Mt)ucuur.mt
d''Sf)t)t)))'<'<'ux)'t''ji!t)''t)tt')t');.<d't'attus.tou.<d'Hct)miit~,qu't')ft'cu)u-
j'ot')' it tt'!ti)< d'ai!urd (tf <-)' ~)tti constitue tu ))o)iti<))n' co)M))frciu)''
))r<))'rt'n)t'ttt dite d< droits protpt'tfurs, historiqu' fo))d''m<'))t,
tnudc~, D'-suttat~; df's tt'itit'~ d'' t;"ttUUt'r<;< t't'i)iin< tarits cuuvutt-
tiou)n')!i, '')uu!i'' df tu natiott lu j')us iin'<'tis< ctausc de recijtMci~
des pritxes il r<portation de I');tab)issctnt')ne))t de purts francs;
des tt;msj)orts, navigations, chemins de fi'r de ('institution dM
confuiat~. ~'t'st une autre form'' d'* )a po)iti<nt<' de protection ttatio-
naie 'jue lu pu)iti<)uecu)uniah'. C'en est. une autre encore ))uf lu
j'otitiqu'; muxetaire et tinancirre nx'm'ntetttttistneet himetititisme,
''redit, han<)n)'. change. Toutes cf's (juestinns sont donc passes en
revue par M. Wernicke. tt cftnsacrc une e'ude spefiate au pt'ohtemc
si impotant dans ta ))f)titi<jue actuette de ta protection asticote
mtu'che des ))t's. droits sur tes ce)'t'!d''s, pt'ojK'sitionsdes U):r!trien'
Enfin i) expose la question des ouv< it'rs trangers.
t)n voit que le livre de M. Weruiettc est t'ien un nmuuet" de
potiti'(u<* protectrice. L'expose est tait',))prsente avant tuut des
faits etde:t donnes, et lie procde j)i<s d'un parti pris dogmatiquetrop
frquent est ces matires qui intressent ta politique contemporaine.
L'information statistique est soigne, et, pour uue part, rsulte (!c
r<'ch<')'cht'!<(n'i);in!t)<'s. ).'))<'ttib))<)~t':)[)t)i<' utitf'st itjout'a j'omra~c.
).tt')<'U)'fr!U)r!H!<tt'UttY<')'i(S!tt)'tddUt')))'* )'mt''d''M. \r-
nn:t<t't'tsum'<'))tfiut''<tU)")i))~d''t'u''t"t''h)'!)f't'')!t~"iit)')UM''t
tte)'tn(t(''ch')'!t'))Ut.')))nt)'h'tpou)-t-t')it)<jMU't'in<uj))j)u)'t'')'-.
't'a)))')icatiu))~n't'!t)<C'estt'im;~HM)tit;ntim~'hu))t<'d''tuutt)'av!u)
(t't?c"notni('itatit'na)t't'otn;)'('(<

H.t.KS CtU'L't'HMHNTSt'HOFESStttXXRLS

f'MM.At~rtMtt.HACO.

ALFRED DOREN. Entwlcklung und Organisation der


Florentiner Znfte im d3. und 14. Iahrhundert. (/~r<
~ppfnx'n~ et <(;tt<Mf<Mt ~M cw/M~t~'onx '/<' FhrfMrc.)
Leipzig, Dunckert et ttumbtot, t )4 p. in'S" (dans la collec-
tion de G. Schmoller, Staats-uud sociahnsseuschftttUcho
Forschuugea).

Pour !a priode antrieure au xm" sicle les matriaux


ncessaires cette tude font dfaut. Cela est regretter,
car les origines nous chappent pour les corporations floren-
tiues. comme pour tant d'autres associations semblables des
villes du moyen ge mais en somme le xur* et le xn"' siecte
ayant t pour la grande cit toscane des poques de splen-
deur et de richesse, la connaissance des institutions de ce
temps surtout importe pour l'histoire conomique et sociale.
L'organisation sociale de ta cit ttorentine est tablie sur
l'existence de diurents mtiers ou corporations; chaque
citoyen devait appartenir un art les nobles durent se
faire recevoir dans l'une des corporations.
M. t)oren divise les corporations florentines en deux cat-
gories t" celles des f/fKf! (/e w~ffrs et pro/cMt'om ~rf~M et
celles des <M~<M~'<M tM'f<<M. Dans les premires, tes juges et
notaires, les boulangers, les marchands de lgumes et d'huile,
les charpentiers et menuisiers, les fabricants de clefs, les
teinturiers et fabricants de boucliers, les fabricants de, lances
et harnais, les forgerons et serruriers, les marchands de vin
et aubergistes, les fripiers, marchands de toile et tailleurs, les
mdecins apothicaires et merciers

(t) Un'Mt point fjUMtion dus t'hanfMUM et bMtUif)' dont le r<~e fut
<-at<ita) u~ bttM'tuicr devint ptas tard le p)m<:t:.
Au point de vue social, ce qui caractrise ces premires
corporations, c'est que les hommes qui en font partie sont
d'une condition conomiqueet sociale il peu prs sembtabto.
Au point de vue de leur dvetoppement, ce qui les carnct-
rise aussi, c'est le dmembrement de ces professions en un
plus ~rand nombre, au fur et mesure de rvolution gnrale
et de la division du travail.
M. Doren cousucre ensuite une longue tude aux corps de
mtiers des industries textiles. La proportion plus tendue de
ce dvetoppemeot correspond bien a l'importance que ces
industries eurent rellement dans t'conomie sociale do !a
medivaie Fiorenec. D'abord les acqnin'nt une
i-'torentins
notorit europenne comme uppreteurs et marchands de
draps ils achetaient <'n France, et principalementdans les
cits manufacturires mridionates. des draps jj;rossift's ({u'iis
remettaient sur le mtier, retoucitaieut et retrempaient puis
ils fabriqurentdes draps eux-mmeset fournirent t'Europe
les plus ete~ants et les plus ricttes; quelques villes de
Ftandre seules rivatisaient pour lu beaut de leurs produits.
Au xm' sicle, le commerce uorentin est ceietM'e par ta vente
des draps franais apprtes 'art de Caiimata) et par !a vente
des draps indignes (f'.< /H' Au xm" siectc la confection
des ctotes de soie fait la richesse de la vittc.
Ces industries textiles travaittent pour l'exportation, et
elles ont socialement amen la formation d'une opulente
classe de ~n'/w/.< et d'un p~'M('M< or~''< une lutte
sociale s'est ensuivie te rsultat a t, aprs de longues
rsistances, une tendance des corporations a l'organisation
dmocratique
L'intrt de l'tude n'est point uniquement celui de la
connaissance de la structure sociile de Ftorence les mtiers
avaient aussi un rle politique la constitution donnait le
pouvoir a vingt et une corporations.

J'ai puhti~ <))U)!< la HcfMf ~< .Sot'to/t (t)i'J7) un )trti<'t<' .ur )M tutt':
<)''<<')a'<Si'SM))'')!U)'ht')m)tb'n.<)hj')U)nunt~<'t)tt)t)~'t)(t'<)tt'tisim.<
tt":tih-<s')~!th'ntt))''tt)t<).<)t)t<t')):u)')'tav!n''ntt)t)'n<'<)ut-<mtt)<-tt<
.i~')'<)!t)utt')!)~tmi'~t!'t't!<itt)t'.J')H'iti.sf.ix!t)!<)M'mtt'ttt'h'))tnt))-
prut-J't)))'nt<tuituf.tit-nh-)''<htU'h't')tt.<('.<!)ttiunt<.t)r~it)!H)~ )<
')''<)': ~<'utst!<t')i"t' 't')"y'ttK);M')"<'t)'"<
tniv~ittcut
t'ttmdt'e!i, ttt':tn!M df dt'a~i<:M (jui itt~nM-
puur t': KUttttm;r<;<:
tiunut.
HKHMAN VAS utiKUNDEN. Les Gildes marchandes
dans les Pays-Bas au moyen ge. Gand, t89)t, Ctemm,
!26 p, itt-8". (Reue!! des travaux publis par la Facult de
Pttitosophie et Lettres.

L'excellente monographie de M. Van der Liuden nous per-


met de saisir comment la bourgeoisie marchande des Pays-
Bas au moyen ge s'est constitut'o en classe organisepour ht
iutto conomique et pour )a domination politique.
Les Pays-t!as ont t au moyen ge un grand centre de
grande industrie, je veux dire d'industrie qui occasionnait
ua grand mouvement commercial tant par l'achat des
matirespremires a l'tranger, que par ia vente, aux grandes
foires de l'Europe du moyen ge, des produits manufactures,
ces beaux draps que les Flamands avaient tisss. Trafiquant
pour l'achat des laines et ia vente des draps, les marchands-
sont devenus une puissance.
Mais l'origine ces marchandsont du se protger les uns
les autres, au cours de leurs voyages, ils se sont runis, ont
forme des associations. Peut-tre d'aitieurs ces associa-
tions comprirent-eites ds l'abord les fabricants, ta ctass&
industrielle aussi bien que la classe marchande. Mais,
petit petit, les associations acquirent des monopoles et des
privilges et elles songrent liminer de leur sein t'etement
plbien, ou mieux les riches cartrent tes travaiiteurs.
En thse gencrate ont peut affirmer que toutes les grandes
villes iudustrieties des Pay-Bas au moyen ge eurent leurs
associations, jatouses de dominer le marotte toeat mais ta
Flandre et le Brabant au cours des sicles modifirent en
sens divers leurs systmes d'associations.
En t''iandre les villes associrent leurs (.<MM marchandes
eu une union generaie, la Hanse de Londres, qui accapara le
commerce avec t'Angtetorrc progressivement ta Hanse de
Londres deviut l'association des riches marchands des grandes
cits flamandes elle runit tous les lments du patriciat
commercia! elle reprsenta tous les intrts de la caste,
carta les industriels et, grco a l'appui qu'elle trouvait dau&
les coHi'<b aristocratiques desviites, elle dominait )o pays de
Flandre, et rglementait le travail des industrielssuivant ses
propres intrts les Gildes marchandes locales disparurent
alors; elles n'avaient plus de raison d'tre.
Dans les villes du Brabant, le patriciat urbain -non com-
merant, ne se fondit pas avant le xtV sicle avec la Gilde;
dans les diffrentes cits, les Gildes subsistrent ct des
conseils de ville, endehorsd'eux. Les marchands ne dominant
pas les villes, ils ne purent confondre leurs intrts poli-
tiqueset commerciaux avec ceux des villes voisines. D'ailieurs
leurs intrts n'en taient pas moins confondus avec ceux des
conseils de ville et )a ciasse patricienne trouvait son instru-
ment de domination et dans ces rouages politiques et dans
ces rouages conomiques les Hitdes se firent reconnattredes
droits par les conseils elles se firent concder une comp-
tence judiciaire et une comptence administrative sur lu
classe industrielle, les drapiers principalement.
En rsume, ies Citdes des Pays-Has furent des syndicats
d'intrts commerciaux ces syndicats do marchands tendi-
rent progressivementfi i'exptnitationde ia classe iudustrietie.
Aussi les industriels, fuuluns, drapiers, teinturiers, etc.,
reagirent-iis coutre les Ci ides, voulurent en forcer t'entre
pour participer t'adtninistration conomiquede ta cite ce
fut l'origine du mouvement dmocratique.
A ia fin du moyen a)!c la prosprit des Gitdes diminua, tu
o elles avaient subsistt' ()uaud la prosprit conomique
flchit. Xecs au moment de lit sptendeur conomique, ces
associations disparurentavec elle.

TtKXM: MAHTtX SAIXT-Lt~X. Histoire des corpot'&.


tions de mtiers depuis leur origine jusqu' leur
suppression en 1791, suivie d'une tude sur t volution
de l'ide corporative au \tx si~eie et sur les syndicats pro-
fessionnels. Paris, tM~. ehexCuittaumin. 6f!<! p. in-
C'est un livre trs gros. trs compact. n comprend plusieurs
sections dont les titres sont prometteurs: L Origine des cor-
porations. H. La Corporation au xm' siecte. itt. Les cor-
porations de )<?:! i4ui. IV. Histoire des corporations de
1461 i6iu. V. tHstoirc de i(i!0 a i7i! \'t. Histoire de
)7i5 leur abolition dfinitive. VH. ~tude sur rvolution
de l'ide eorporative au xm" siecie. I,e prsent et t'avenir.
Ce livre, qui contient nombre de conceptionssurannes,est
d'autre part insuffisamment inform en vain sur ta question
des origines chercheriez-vousdes renvois aux ouvrages de
Liebeuam~MrCMfAtcA~ Mn~ O~Mt'M/MM ~M /<tfMM<'M t'cn'tK-
)fMf!!s, de Waltzing, les Co<'po<-(<otM p~'o/e~oHM~ cA~ les
/!oMHt<M, ou mme, les Cu~M~'ottit t'OMMtttM cf /'t c~<rWou
bien, pour les associations gern)aui({ues, quelque allusiou
que ce soit aux L'~MfAH~'<t ~'' ~'McAt<)' </<*<' A'M/'M)tt.<-
!</<'w f/M ~<~f/~< de Uoren. t)e la premire partie du livre
ou ne saurait tirer grand profit.
L'tude sur le xm"sicle tait faite depuis longtemps. Crace
aux travaux des Depping, des Pagaie: etc., ou n'aeu ici qu'
rsumer de bons ouvrages qui depuis longtemps sont publis
et ont aliment la littrature historique.
L'histoire des corporations parisiennes serait bien intres-
sante si ou pouvait suivre leurs vicissitudes mais ici Fon
est utie un peu vite et, s'it est capital de savoir daus quelle
mesure les mouvements populaires de la Ligue ou de ta
Froude ont t favoriss par les mtiers, cela est loin d'tre
fix, et tout rudit scrupuleuxdemandera ici uu supplment
de preuves.
Je remarque d'autre part que la politique des rois concer-
nant les corporations a etu l'objet de plusieurschapitres, que
les corporations parisiennes principalement ont t tudies.
Mais les provinces ont t pour ainsi dire laisses dans
l'ombre et je ne tiens pas pour sutusantes les quelques pages
qui leur sont consacres.
A ces rserves j'en ajouterai d'autres. M. Martin Saint-
Lon a voulu, (lit-il, crire t'histoired'uno institution qui a t
pendant prfs de sept sicles ie type essentiel de t'organisa-
tion du trayait Je ne saurais souscrire a cette proposi-
tion le travail industriel au moyen ge et dans des temps
moderaesnes'est point entirement faitdans les villes, on pour-
rait mcmedire qnec'est dans tes campagnes qu'a lieu en grande
partie cette transformation des matires premires en objets
d'usage qui constitue le travail industrie) et les campagnes
ont chapp jusqu' ta fin l'organisation corporative. Les
campagnes tissaient, faisaient de ta dentelle: les campagnes

taient les centres de l'industrie metatturgique. La corpo-
ration urbaine est tout autant une organisation do marchands
qued'industriets ta corporation groupait les boutiques et les
choppes.
La Rvolution a balay les corporationsque Turgot n'avait
pu que supprimer temporairement;ce systme a pour toujours
disparu. Les conditions conomiquesont chang des ides
nouvelles out surgi; l'ancienne corporation est morte ja-
mais quandon l'a supprime, sa dcrepitudetaitnotoire; les
procs que les dinerents groupes corporatifs s'intentaient
deceiaiettt l'un des vices les pius graves du systme & la fin
de l'ancien rgime, cette organisation idyllique n'avait
su
concilier les intrts des patrons et ceux de leurs ouvriers.
qui de leur ct6 formaient des societ<s secrtes et sentaient
combien iisutaient peu de chose dans la corporation. Aujour-
d'hui l'ide des groupements professionueis a fait fortune
ou
a crie que c'tait un retom' au passe ou ne saurait, partant
ainsi, dnoter avec plus de candeur une doubtc ignorance de
l'histoire des corporations et de t7.</o'<' </M .~)<t-~; entre
les deux types d'ot'~nisatiootout diflere ia corporation avait
pour fin Je monopole, l'accaparement par quetques-uns du
marche ioca), pour base )a regietnentatiou du truvuii. Bien
que les groupements professionnels contemporains soient

souvent toin de satisfaire a l'ide de concorde sociate, ils sont
cependant autres que les corporations;ils groupent les indi-
vidus dans un but dtermine, mais l'adhsion est libre, le
nombre des adhrents n'est pus Hmite. ti suffit de signaier
ce double caractre pour opposer deux organisationssociaies
du passe et du prsent qu'un tenterait vainement de con-
fondre. C'est par une sorte de contrat que l'on entre dans les
groupes modernes, et t'exempte de ia socit industrielte
anglaise contemporaine permet presque de penser que les
ciasses opposes par des intrts arriveront egaiement
r<'g!er leurs relations par voie de contrats et de conventions
t'utre les groupements ouvriers et patronaux, et par l'inter-
mdiaire de leurs reprsentantsrespectifs.

?At;t. ROt'StERS. Le Trade-Unionisme en Angle-


DE
terre Bibtiotheque du Muse social '). Paris, Cotin, 1897,
35Cp.rn.t8.
Ce n'est pas l'histoire de la formation des associations
ouvnresangtaises,ce n'est pasuon ptus i'examen de toutes les
associations professionneites britanniques que i'on trouvera
dans ce livre, mais un MM<;Mjtr<~j'/< les (/<'<)/M/b<'m<<
~f pr<'Mt)<')~ /M ~'OK~fm~~ OMP/'t'C/t .!<'f(t/ /M ~<~t'K/M
(H<<tM/<W.<M~t'~M ils a/KfMt.
A quelle cause rattacher ce puissant mout'entent d'associa-

nt
F')y.
f:~ th-r'-
~It (:n pu)))!'?
livr,-M.<t 11\
e~1 Imillil:
av)' In
Ht-ury <-t Wi)h'*)))).
ht <))))t))ur.tU"n~lu ~ur,
cnllulurealiml
dM
f~' .~tfe ;<-ta< <). ~ubtif ctt
<)';
Carhottnt').
MM. da Cai-liellitit-1.
uutr' un t!)')6.
'teux t'irctthito:. t)" 4 ft T. ~crif A. <ur les anioMif ant;)'
tion qui caractrise aujourd'hui tes tendances des groupes

ouvriers, conscients de leurs intrts ? Alors que ta corpo-
ration ancienne est morte et que sa dcrpitude favorise les
attaques des adversaires d'une institution incompntibte avec
la libert, conue suivant l'esprit desorthodoxesde t'econo-
mie politique, voici qu'en Angleterre, le pays o ces doctrines
furent surtout puissantes et populaires le groupement l'em-
porte sur t'individuaiismeet l'isolement.
Ce phnomne social est intressant alors qu'au moyen
ge les associations curpuratives sembtentavoirt organises
par les marchandset pour les marchands (v. M/ ), il l'poque
contemporaine, c'est dans te monde de l'industrie et dans la
classe des ouvriers que ta tendance est gnrale. L'Angleterre
Il donne l'exemple de l'organisation; ta France a ses syndi-
cats, t'Attemagnc ses f<fv~r<'M)M<' et ses ~'fr~ta/f~t tous
les pays de civilisationiudustriette tendent vers une semblable
organisation.
Nous trouverons exposes dans le livre do M. de Honsiers
quelques-unes des causes du mouvement trade-uniouiste,
ainsi que les modes de ces manifestationsde groupement.
La ncessite du groupement syndical rsulte pour l'ouvrier des
formes nouvettes de l'industrie le machinisme a pour con-
squence Ics grandes usines, Ics grandes agglomration!;
ouvrires. Les ouvriersreunis semblent mieux comprendre
leurs iaterets; peut-tre (mais ceci nos autours ne le disent
pasj que le rapprochement et la similitude de condition de
nombreuses famines leur donnent une sorte de conscience
de classe, comme disent les socialistes allemands. De toutes
les faons le machinisme rend vainc la lutte individuctte
pour l'amlioration de la conditioa conomique de t'ouvrier;
les units sont impuissantes et ne comptent plus. Pour
valoir quelque chose; il faut s'unir. D'autre part, les cou-
ditions du commerce ont change. Jadis, l'abri de solides
tnuraittesdouanires, les commerants rivalisaient on chaque
pays comme on un champ clos on faisait supprimer la con-
currence trangre par l'intervention gouvernementale.Au-
(t) hut tt'initnjUt'r M')!, t ox'n ~'n~, que )f h)ac)<hti!.t)' o'~ point

x" '<
U
!:t'u) <'t)h.ttm' )< ):f<m))t'tn''t)t!< ) if)'ttt.<t)i'' tt.ottt'rne f'f'Mt' fur lu huai))'
h' j'hts ~'UY':nt )'< ")'h)!.tnf~ fot'))M')t''n )'.t\'sdt* hottit
K'tt'!i.t.A-t)in; s'' ptt'M'nt ''t hn'!t)ii''))t t!j<phi')u<'tx'!t)t. Tout '-<'<
tUmi~'M uni.< <'n ))''u ')'' vin' ~nt ptu!' j))ti!t!m)< 'jn'its n!' )<: s';Micnt <i.
au )"tu) )tU!isi ttutttbn-UX, teUM mi))C< taient trf'~ ~juijjnwt h;~ UtM~ des
<tUtn:<.
jourd'hui les barrires sont renverses, ou presque, dans lu
plupart des pays; le mouvement commercial entratne dans
une gnrate concurrence toutes les nations tous les pro-
ducteurs doivent produire aux mmes prix; ils tendent
a faire travailler leurs ouvriers aux mmes conditions ils
crent chez les ouvriers des difreuts pays une similitude
de situation qui les amne se grouper pour lutter contre
les patrons.
M.deRousiers. qui indique nettementcet tat deschoses,
et qui lgitime ta forme trade-uniouiste, semble pencher
bien moins en faveur de l'entente internationale des travail-
leurs; les opinions personnelles pour ou contre n'importent
d'ailleurs gure, mais ce qui tait important marquer, c'est
que la tendance des ouvriers au groupement, l'intrieur
de chaque pays, a pour corollaire le groupement interna-
tional des ouvriers de mmes industries, et ce nouveau ph-
nomne social gnral est d'une porte extraordinairement
grave c'est un des mouvements gncraux les plus puissants
et les plus gros de consquences que puisse enregistrer
l'histoire.
Le phnomne indiqu, les
causes dites, on a marqu
comment ce besoin d'organisation ouvrire, partout ressenti,
s'est manifest suivant chaque genre de mtier. L'on montre
ainsi que, < suivant que les ouvriers sont groups en usines
ou disperss en petits ateliers, qu'ils surveillent une machine-
outil ou qu'ils travaitteut la main; qu'ils fabriquent un pro.
duit de consommation courante bu un produit de luxe, un
produit transportabte ou non transportabte. jtx/Mnf ~)M
/<< M /f/t-/MM< (< <'<M7/M<~<oM </M <MM<<, les intrts
professionnels que les unions reprsentent varieront dans
leur nature, ncessiteront plus ou moins le groupement
des ouvriers. La question ouvrire change notablement
d'aspect suivant les conditions d'outillage et les dbouchs
de chaque industrie (p. 3~. Et c'est pour ces raisons
que
l'on a tudi des mtiers de types difrents reprsents
par
leurs unions unions d'ouvriers du btiment, d'ouvriers agri-
coles, de dockers, unions dans l'industrie minire, dans les
constructions navales, mcaniciens, unions dans l'industrie
textile.
MAX HHtSCH. Die BntwicMan? der Abettefberuisve-
reine in Grosabrit~amien und DentscMtmd. 7)~ft'h/~f-
MtfOt <<M f/t'MM~M ~<'0/f'MMHH('h(/efraff~t't<MfM/iM~/f<<'n'<'
ff ('H .)/<<'M<H~M('. Bertiu, Hermann Hattr's Buehhandtuttg,
)896, 76 p. iu.8'
Depuis longtemps le nom do M. Max Hirsch est inspa-
rable do toutes les questious concernant le mouvement syn-
dical en AUetnagne. At. Max Hirsch est un des promoteurs eu
pays allemand du groupement des ouvriers la faon des
trade-uuionistes.Alors que le socialisme se repandoit en AHe.
magne sous l'actiou do la propagande iussulienne et tnarxiste,
M. Max Hirsch a rv de pousser les ouvriers de son pays
relever leur condition,comme t'avaient faitceux d'Anf~sterre,
en se coalisant pour l'augmentation des salaires, ta dimi-
nution d"s heures de travail, en se groupant pour se soute-
uir de l les associations permanentes.
Aujourd'hui le mouvement syndicat atiemand est remar-
quable par son organisation, par le nombre des adhrents
mais ce ne sont pas seulement les hommes du < parti du pro.
grs qui ont organis des associations professionnelles le
parti dmocrate socialiste s'appuie lui aussi sur des groupe-
ments syndicaux et les socialistes chrtiens ont eu recours
de semblables unions. On ne nous a pas encore dit
la dinerence d'organisation de ces divers syndicats ouvriers
dont les principeset les fins sont si dim''rents.
Dans sa trs courte brochure f7S p.), M. Hirsch nopeutque
tracer une esquissedu mouvementdans les doux pays, encore
iusiste't'it sur t'Attemagne plus que sur t'Angi<!terre pour
laquelle le livre des Webbnous fournit toute documentation
suffisante, et en Allemagne c'est naturellementsur les syndi-
cats forms sous sou inspiration qu'il nous donne des rensei-
gnements. On distinguera t la lutte des groupes ouvriers
contre les entrepreneurs pour t'amliort ion delour condition:
~l'organisationdes groupes en tantqu'ils fournissent aux tra-
vaitteursdes caisses de retraites, de secours aux invalides, des
bibliothques, en tant qu'ils permettent de crer des coop-
ratives de production ou de consommation.
H).)U.<H'nt)(Kt)UTft.\Y\)t.
)'<U-M.mEHTA)tt.t<AtU.

a. LTOL'RXEAL'. L'volution de l'esclavage, dans


les diveraos races humaines. Paris, )8~, Vigot, M8 p.
in-8".
M. Ltourneau n'a point voulu tudier la condition juri-
dique des esclaves, mais it a prtendu fournir une contribu-
tion il l'histoire du travai). Cette intention est nettement
exprime t)e manire ou d'autre, avec plus ou moins de
brutaUte, la somme du labeur ncessaire au maintien des
socits a presque toujours t impose une fraction seule-
ment des populations, c'est-a-direaeteservitc.
Cet ouvrage est conu d'aprs la mthode ordinaire de
Fauteur le phnomne social de t't'sctavage est tudie dans
les diffrentes races humaines: on a mme pouss l'investiga-
tion jusque dans la srie animale, chez les fourmis o l'ou
aperoit la division eUa spcialisa tiundesfonctionssociates.
D'ailleurs l'esclavage no se rencontre lits chez tous les
peuples les Fue~iens, les ttottentots, la plupart des Ksqui.
maux et des Peaux.Rouges, les Australiens l'ignorent.
5t. Ltourneau dt'ctare que. pour que ride de l'esclavage

vienne aux hommes, certaines conditionssont ncessaires et
elles peuvent se rsumer en une sente, ta possibilit de tirer
de l'esclave un parti avantageux. Si l'on examine le
mode de recrutementde l'esclavage, on s'apcroitquct'homtne
devient esciave comme prisonnier de guerre (certaines races
auraient mis en rserve les captifs comme viande de bou-
cherie a manger pt us tard~on devient esclave encore, comme
enfant de personnes serves, par dchance suivant l'insolva-
bi)it6 du dbiteur. Je ne saurais suivre l'analyse de l'ou.
vrage chapitre par chapitre. Pour qui sait les exigences de ta
critique historique, il paratt diniciie de croire qu'en peu de
pages on puisse rsumer l'histoire d'une institution trsre-
pandue et qui mriterait tant de monographies de dtail
rigoureuses et documentes de faon critique. L'auteur
d'autre part semble,en de certains passages, hsitant, lorsqu'il
compare, la condition des esclaves, et celle des femmes
dans certaines civilisations infrieures qui leur imposent la
part la plus forte du labeur social et celle des prot-
taires dans ta socit actuelle. Mais il ne saurait y avoir
de doute ni le prottariat, ni l'asservissement des femmes
no peuvent rentrer dans une tude sur l'esclavage et, si on
avait )imin ces deux sortes de dveloppements, on aurait
fort aiteg le tivre:qu'ii y ait dans ces deux derniers cas
comme dans celui de j'esciavage uue forme des abus que
commettent les forts sur les faibles, c'est ce qui est indniable.
mais o)) ne traitait point ici de l'histoire gnrale de l'exploi-
tation humaine. Je nie demande encore pourquoi une
tude sur l'esclavage dans l'Europe historique et dans
les colonies europennes dei'ancien rgime n'a point t faite.
Pourquoi le servage du moyen ge n'u-t-ii pas t tudie
On ne peut tout dire, il est vrai, mais pourquoi de prfrence
alors choisir les peuplades mal tudies et les priodes obs-
cures encore de l'volution historique?

TnoHOLD HOGEHS. Histoire du travail et des salaires


en Angleterre depuis la fin du xnr sicle. Traduction
avec notes par Castelot. Paris, 1897.
Xous sommes habitus considrer t'Angieterre comme
un pays essentiellementindustriel et commerant c'est on
etet le caractre actuel le plus frappant de l'activit cono-
mique de !a nation anglaise. Mais ce pays a jadis consacre
ses labeurs principalement a l'exploitation agricole du sol
aussi bien est-ce normalement ta phase premire du dve-
loppement conomique.
M. Thorold Rogers, qui l'un des premiers en Angleterre a
mis en honneur l'histoire conomique, a donn dj une
grande //<~o'f </f <'<t~ <t'~t<n' <'< f/M ~n.r; mais l'ouvrage que
M. Castclot a traduit rcemment pour le public franais,
ouvrage paru il y a quelques annes dj, a permis l'uuteur
de rsumer ses recherches personneiies et de les combiner
avec les donnes des travaux de Young, Kden, Porter.
Ce livre et celui de Asliley permettent aujourd'hui de
suivre rvolution conomique de l'Angleterre; M. Thorotd
Rogers a t plus particulirement port dvelopper la
phase agricole.
La vie urbaine au xm* sicle n'attire point principalement
l'attention de l'historien conomiste, mais bien la vie rurale i
les campagnes sont composes de manoirs ou viiages dont
ta population comprend, socialement, un seigneur (qui
possde un domaine; et qui exerce une srie de droits sur les
paysans. it y a des francs tenanciers et des serfs; progressi-
vement les prestations eu nature furent remplaces pur des
redevances en espces et les tenanciers devinrent des Co-
~A<M<'<'<! ou tenanciers suivant )a coutume. Dans les villages
du xur'siecte, tous vivent de t'agricutture; ou tisse aussi la
grosse toile et les lainages grossiers pour les usages domes-
tiques. Les seigneurs, eo dehors des revenus des terres cdes
iv des tenanciers, bufficient, de ceux de leur domaine propre
qu'ils fout valoir directemeut.L'Augteterro dans cette priode
du moyen ge cultivait le froment; chaque domaine consa-
crait cette culture une superficie en rapport avec la rcolte
que le paysan devait attribuera sa nourriture. Mais t'<I')evage
tait une source importante de revenus agrh'otes les mou-
tons principaiementse pressaient eu nombreux troupeaux
leurs toisons alimentaient l'industrie drapiere de la trs in-
dustrielle Flandre et eu partie cellede Florence les droits
prefeves l'exportation permettaient aux rois d'Angleterre
de mettre des armes nombreuses sur pied.
Au xtV siecie la condition des travailleurss'amliore d'une
faon inattendue ia suite d'un flau la peste noire qui
desotait le continent svit aussi en Angleterre; un tiers de la
population disparut. < La peste avait <te surtout meurtrire
pour les hommes dans )a force de t'~ge et elle eut pour cons-
quence inunediate ta rarfaction de la main-d'uvre, un
rencht'ns.sement extrme des salaires et une grande dini-
cutte rentrer les recottes, surtout celles des grands pro-
pritaires chez qui les prestations serviles avaient t en
temps ordinaire insuftisantes.
Le Parlement intervint pour obliger par les lois les tra-
vailleurs demeurs maltres du champ de bataille travailler
pour un salaire infrieur celui qu'ils exigeaient de l
te clbre statut des laboureurs qui resta en vigueur jus-
qu' l'poque d'Elisabeth en vain la loi tarifait-elle le
travail et y contraignait-elle tous les valides la loi ne fut
pas respecte les travailleurs au xv sicle obtinrent des
salaires qui, en proportion des prix des objets de consomma-
tion, restrent les plus levs que l'on ait connus d'aprs
M. Th. Rogers, dansl'histoire des travailleurs anglais; en t38t
les artisans et les travaitteurs ruraux avaient organis une
formidable insurrection temporairement vaincus, ils res-
trent pendant un sicle environ en une situation excellente.
D'aprs M. Thoroid Hngers, trois causes entranrent ult-
rieuronent h) pauprisationdes classes ouvrires J'altration
des monnaies, )a confiscationdes fonds dos socits de secours
mutuels de l'poque, ftnntetnent les mesures prises par Etisa-
beth Nu) ne pourra exercer un mtier manuel si ce n'est
aprs un apprentissage d'une dure de sept ans faveur appa'
rente, (;f)r les juges de poixtmetnbres de l'otigarettie poss-
dante) tarifent les salaires des ouvriers des corps de mtiers
aussi bien que ceux des travaitteurs agricoles.
Les derniers clulpitres du livre sont consacres a l'tude dos
transformationsde l'exploitation agricole au xvnr sicle et
au relvement d'une partie de ia classe ouvrire, ({race au
trade.uuionistne; on dsirerait que les manifestations de l'ae-
tivit industrielle des An~iais aient t marques dans la
priode de l'histoire moderne, maist'autenru'afait qu'emeurer
le sujet; c'est aitieurs qu'il faudra chercher des renseigne-
ments sur cette put'iode de l'histoire dutravai), et i'on s'iu-
formera sansdifncuttes.

SCtH'LXE (.AVHRXn'X. La grande industrie, son rle


conomique et social tudie dans l'industrie coton-
niere. Traduit par Georges Cuerouit. Paris, Guillaumin,
~9<3iCp., in-8".
L'tude que nous prsente M. Sc))uii:e-G:h'ernitz est une
monographie ori~inate: ta thse soutenue par fauteur, bien
qu'elle paraisse paradoxale si on t'applique d'autres indus-
tries qu'a l'industrie cotonnire anglaise, a ce mrite qu'elle
nous oblige il soumettre une critique scvere les tieux com-
muns dont les tivresd'conomie sociale exposent tes abondants
dveloppements.
La question que se pose M. Sch. G. est ta suivante: < t)ans
quelle mesure le progrs conomique est-il tic au progrs des
classes ouvrires? On sait la rpunse que les socialistes ont
faite il cette question, en n'employant d'ailleurs pour leur
argumentationque les documents fournis par les conomistes.
D'aprs eux. la prosprit industrielle d'une rgion n'avait
aucun rapport avec le bien-tre des etasses ouvrires. Pour
ainsi dire. ta consquence du dveloppement de ta grande
industrie tait ta dchance progressive de ta classe des tra-
vailleurs.
M. Scttutxe-t.iivernitz rpond & son tour que te progrs
conomique, le perfectionnement de ta tectmique d'une
industrie, ta prosprit de cette industrie dans une contre
ont pour consquence t'etevation du bien-tre de ta ctasse des
travailleurs. Kt pour arriver a sa dmonstration, it prend
conxne exempte l'industrie cotonuire eu Augteterre C'est,
dit-il. ta piusam'iennegrande industrie; elle s'est dveloppe
au xvm'sifcte en dehors des entraves que )a regiemcntMtion
ne au moyen :~e imposf li )'industt'ie drapire elle a imm-
diatement passe u une technique perfectionne avec )e!:
Arkwri;;ht. etc. E))e u groupe autourde ses centres d'activit
des !ttf)?)ot))et'a!)<Jt!s enortnes d'ouvrier, part))) iesqueUes on a
pu tudier tes phnomnes les plus voyants de h) vie econo-
mique et soeiatc. On a d'abord eu une priode de crise durant
h)quc)te h's doctrinessociatistesout tr.)uvedesadc])test)armi
les ouvriers, mais plus tard tes machines, devenues trs per-
fectionnes,ont exise un personne! spcial iesproduits furent
tahtis a des prix triomphatementinfrieurs n ceux des autres
centres manufacturiers,en raison des achats trs favorabiesde
la matire premire, en raison de t'etabUssetuent des tissus a
bon marche, grce a l'immense production. Le monde est a)ors
devenu tributaire de l'industrie cotonuiere an~taise. si supc-
rieure toutes les similaires du continent et des autres pays,
et les ouvriers de cette industrie out pu faire accroitre leurs
salaires dansics marges d'un bnfice, dj trs considrable,

ralise par les patrons. M. Schutxe-Gaverttitx Montre ators
dans un tableau intressant t'etat morat et conomique de tH
etasse des ouvriers cotonniers anglais.
Si i'on oppose a M. Sch.*< que dans certains centres de
production eotonnire autres que ceux de t'Angteterre ta con-
dition de t'uuvrier est encore mauvaise aujourd'hui, notre
auteur rpond que ces centres d'industrie sont encore intrieu-
rement munis d'instruments de travail et que les conditions
d'achat de ta matire premire sont mauvaises. L'industrie
allemande de ta soie, suprieurement outittee, a permis aux
travailleursattemands de )a soie d'atteindre a une coudition
qu'ignorentencore tours camaradesd'Angleterre. Or on peut
juger, par les progrs techniques d'une industrie et Icstode
de son devetoppemeut, du sort des ouvriers qui s'y rattachent.
Mais te grand argutnenttiredudveloppementde t'industrie
anglaise du coton se rfute tacitement; on ne saurait certes
nier l'amlioration progressive du sort des travailleurs de
l'industrie cotonuire anglaise. Mais t'attribuera-t'on seule-
ment au progrs de )a technique, aux multiples conditions
favorables a i'tabiisscment d'une marchandise cre pour
lutter victorieusementavec tous les produits similaires des
industries ett'anget'cs concurrentes? ~00 certes; il ne faut
point ouMier ici ie deveioppenteut du trade.uuiottisme c'est
aux rsultats de la coalition ouvrire qu'il faut attribuer
encore, pour une forte part, les progrs de l'aristocratie des
ouvriers cotonniers anglais. toi ja coalition a eu d'heureux
rsultats parce que les industriels pouvaient amliorer la
situation de leurs multiplescollaborateurs en maintenant la
leur un niveau trs cieve. Dans grand nombre d'industries
mal outilles la classe patronale, en ellet, ne rsiste la con-
currence qu'en payant mal les travailleurs de ses usines et
manufactures. On dira donc que le progrs de !a grande
industrie est une cause ncessaire pour l'amlioration de la
classe ouvrire, mais ce n'est point une cause suffisante.

n.t.'HVOU'TU'X <MMEM):tA).E
PtuM.AhmAU).

Cn. LHTOUnXHAL'. L'volution du commerce dans les


diverses races humaines. Paris, Vigot, i897, ?) p.,
iu.S".
M. Ltourneau tudie les M~tM(/ ('M~tcy-cf chez les Fue-
t;tens, les Australiens, les Veddahs de Ccytan, les Esquimaux.
La premire partie du livre est cousacrcc au commerce chez
les races noires, la deuxime partie aux races jauues. Ou ne
nous avertit pas du passage des races jauues aux races Man-
ches, et, sans coupure, sans distinctiontypographique, ou nous
amne aux peri-gyptiens, l'Ethiopie, t'gypte, aux Arabes,
Juifs ou nous conduit en Msopotamie, en Phenicie, dans
l'Asie aryenne, eu Crece, Rome, dans l'Europe barbare et
mdivale.
Ce livre est abondant en renseignemcuts intressants; it
est crit dans un esprit librt et l'auteur a voulu se dbarras-
ser des prjugs frquents tiez les gens de science au sujet
du commerce; it n'a pas non plus verse dans les loges que
certains conomistes accordent gnralement au mercanti-
lisme.
A signaler que des rserves nombreuses sont faire sur la
documentation.
Pourquoi citer ici M. Sutty-Prudhomme 'p. ~Onne (ait
plus aujourd'ttui du citations comme cettes-ci (p. tSt Cook
(/'f'fM'f<- t-~f~f;.
Cook. <~(/. /<.<ft). 0)) ne cite plus
Prescott pour le Prou, lorsqu'on a Markbam (~<m')/ n/'
~, tM' et Middcttdorf tUM et IS't~. t-:n j'esume,
M. Ltourneau a fait un tivrc qu'it faudra tire, mais en le
tisant il faudra toujours te coutroter et te eompteter.

At-HXAXt'H Beitreege zur Geschiohte der


vx HitAXU't'.
fif&nzcBstsohen HandetspoUtik von Colbert bis zur
Cegenwa.rt. Coutrihution l'histoire de la putitiqne com-
mf'rdah' franr-itiseduCothert a nos jours. Leipzig, Dunckert
etHmnhtot, )8i'o.
Suivant quels principes et t'n faveur de quet': intrts un
Htat re~te t-it ses retutions comtnerciates
avec t'etran~er?Ce
livre pertoet d'examiner cette question en ce ([u! concerne la
politique cfunnK'rciate de ta France du xvn' siecte nos jours.
H faut tenir compte de deux facteurs qui interviennent
danst'etahorationd'une politique conunerciatc les doctrines
prdominantes de t'efonomie politique et tes rclamations
des producteurs ou des consotnntatetu's. Ce qui rend de plus
en plus compiexe cette question, cest a t'heure actuette te
conflit des doctrines, le contnt des rclamations. )" des pro-
ducteurs ~"des consotnmateurs: ~'des commerants. Toutes
les doctriaes. toutes tes rectamations se font entendre: i) n'en
a pas toujours t ainsi.
La doctrine des hommes d'tat de l'ancien rgime tait te
protectionnisme consommateurset producteurs taient con-
sid''r<s comme protts. :)u point dp vue as'co)e. par tes
reniements sur ta circulation des grains; les droits d'outre
sur les objets manufactures protgeaient les manufactures.
usines et fabriques l'industrie tait mise a t'ahri de la cnu-
currence ctran~ere; les industries trangres dont h' pays
tait tributaire taient acclimates. L'argent et t'or ne sor-
taient point, ainsi, du royaume.
Apres ta propagande des conomistes du xvm' siecte en
faveur de ta libert, la politique eommerciatc de la France
changea brusquement en t780; la porte ctait ouverte ux pro.
duits manufactures de l'tranger.
Cette politique nouvelle, dicte par des principes nouveaux
d'conomie politique, amena une premire manifestation des
producteurs franais; les manufacturiers eu tat d'infriorit
vis-a-vis de l'Angleterre poussrent des clameurs de regret i
les pays agricoles et particulirement viticoles qui acquraient
de nouveaux dbouches, les ports de commerce, les commer-
ants qui trouvaient une activit nouvelle furent dans ta
joio.
Tcties furent les premires ractions sociates d'un traite de
commerce conu en dciturs de ta doctrine protectionniste
pure..
De fUM )8M), ta politique commerciale est de nouveau
redevenue protectionniste! il est aise d'en saisir les raisons
!a lutte de ta Hevoiution et de l'Empire contre l'Angleterre a
et6 aussi une lutte conomique; la France, pour triumpttcr,
a essay de supprimer de l'Europe les marchandises anglaises,
tente de substituer les siennes sur le marche; sous ta ttes-
tauration, les grands industriels ont continu a se faire pro-
lger par le gouvernement, grce au rgime censitaire qui leur
permettait, de pincer leurs intrts en premire ligne. Or il
s'est trouv que les intrts des propritairesfonciers taient
les mmes.
Aprs t848. tes ides dmocratiquestrouvent leur corollaire,
sur le terrain conomique, dans te iibre change qui s'appuie
sur t'interet des consommateurs. Le gouvernement autori-
taire de Xapoieon Itt, acquis ces ides nouveites. a rompu en
d85(i avec l'ancienne politique commerciale de ta iU'votution,
de t'Hmpire, de lit Restaurationet de ta monarchie de Juittet.
A soixante-dixans de distance les mmes plaintes et les mornes
ovations se firent entendre mcontentement des industriels,
jote des commerants et des viticulteurs.
Sous la troisime Jlpublique, les partis conomiques se
sont reformes et ont tente do ramener ta France a ta politique
de ta Hestauratiou Les industriels ne sont certes pas en
gnrt outiites pour rsister la concurrence de l'Angle-
terre, de t'Aitemagne, etc. C'est une question de savoir s'ils
ne veulent point acqurir cet outillage ou s its ne le peuvent
pas.
M est difficile de dgager les rgions de France naturelle-
ment protectionnistes, celles aussi qui sont naturettonent
libre-changistes.Dans le dpartement du Nord les produc-
teurs de bl, comme ailleurs, sont protectionnistes les indus-
triels, admirablement outills ici, sont libre-changistes.
Les rgions industrieites mal outHtce!; rcctatncnt ta protec-
tion les dpartements viticoles du Ilidi ont t iihre-echan-
gistes et changeut d'opiuiou eu prsence de l'accroissement
de la production vinicole trangre. I! parat vident que
tout pays superieuretneut outill demande Je rgime de ta
plus grande )ihe)t6; ce rgime est aussi rclame par les
grandes agglomrations urbaines, o les groupes des con-
sommateursperoivent plus nettement leurs intrts, en tant
que consommateurs.
S)X)t-:M)':SHC'm)X

DIVERS
Par MM. Mn-'t-'AXC. UCHKHKtM. t'AL'C't:')' M PAttUOt

h'A?<'rn)t"t'"SO):)(').'W:)K
IF

11 a pu sembler parfois que l'anthropologie tondait


rendre inutile la sociologie. En essayant d'expliquer les ph-
nomnes historiques par la seule vertu des races, elle parais.
sait traiter les faits sociaux comme des epiphuomnes sans
vie propre et sans action spcifique. De telles tendances
taient bien faites pour veiller la dfiance des sociologues.
Mais i'.ttix~ M<'<o<o<t<ca, avant tout, pour devoir de pr-
senter a ses lecteurs un tableau complet de tous les courants
qui se font jour dans les diffrents domaines de la sociologie.
U'alilleurs, on ne sait jamais par avance quels rsultats
peuvent se dgager d'un mouvement scientifique. Trs sou-
vent, alors qu'il manque ce qui tait primitivement son but
principal et sa raison d'tre apparente, il produit, au con-
traire, sur des points secondaires des consquences impor-
tantes et qui durent. Pour toutes ces raisons, nous devions
faire une place aux recherches de t'anthroposociotogie, et,
pour que notre expos ft aussi (idte que possible, nous
nous sommes adresses pour ce travail un partisan de
l'cole qui a bien voulu nous accorder sa collaboration.
E. D.

G. M LAPOLGE. Les slections sociales. Paris, Fon-


temoing, 1896. Corrlations anancires de l'indice
ophalique, dan8ta/<cre t<coMOM!Mpo~y<Mars 18t)7.
Ossuaire de Gurande, dans le /~<<< de la Socit
scientiuque et mdicale de l'Ouest, trimestre )MM. 4"
L'indice cphalique des conscrits du canton de
Rennes, t895-t8;)t!, dans le mente /~<~t)t, 2" trimestre
)8Mi.

C'est en )~87, dans la /<ffc (<ht//t~oh'/', que l'ide


fondamentale de t'Authroposociotoj~ie a t expose pour la
premire fois. Dans un article sur la dpoputation de la
France, un savant encore peu couuu, M. G. de Lapouge,
expliquait la diminution de ta natalit par la moindre fcon-
dit des mtis entre eux, les populationsactuelles n'tant pas
des races pures, m'tis composes de mtis issus du mtan~e
de races anthropotogiquementdittrentes. Cette tttorie ne
sembla pas d'abord trs solide et l'on objecta que, dans d'autres
pays que la France, ta mme cause agissait aussi, sans nro-
duire cependant les mmes enets; mais elle couduisit son
auteur a toute une thorie des races, dont il devait faire la
base de ses recherches et de ses ouvrages ultrieurs.
Cette thorie est en rsume la suivante les populations
actuelles de l'Europe ne reprsentent pas des races pures. En
dpit des expressions courantes, il n'y a pas de race germa-
nique, de race stave, latine chaque peuple se compose en
ralit d'tmeuts difrents combines et mtan~es pendant
le cours des sicles, et le rang d'un peuple dans la civilisation
est en raison directe de la quantit d'lments anthropotogi-
quement suprieurs qu'il contient. Or cestmentssuprieurs
sont reprsents en Europe par la race dsigne sous le nonl
conventionnel de race aryenne, qui des pays du Nord s'est
rpandue A travers le monde, et dont les traits caractris-
tiques sont la haute taille, le teint clair, les yeux bleus, les
cheveux htoods et !a doHchocphatie

(tt t) )' s''rit ]M~ inuti)'h'tini)'i''i')U(')!j))< ))')')''< ))nt)))f<j)h)):jM'


L'indh'c rf)))mth)m' t"-t ta htt'jt'ur ntiniotit <tu <'t'uh' utu)ti))tirt' j)!n' )t)t) et
<)it'if-M' )Ktt' f)t )t)))f"M'' )')HYi))f!i du rr.iftc. (;f fjUutit'Ht <'N)'i'tff );' t'irant
t'ntrc 70 t't ~tni<"t).
L<;s tt;nn'< d'!ti!-h')'hat' ''t hrnchyct'pha)'' ~"nt ouptoy)~
<Mt''<t au ~n~ !t)~<!)t). t!U)h'!t uu 'n< n'tMtif. <) h' :tut''Mrs ne .<'<ht pa~
<)*)t<'f)'<) .<ur )a titnit'' <)ui i'~pat'c la hrtK'hvc~phatM* de )it dutk'h'x'ujttmtic.
)htn< ta suit'' ')'' ''<'t arth'h'. n~u.< appt'ton~ dofirhufvjtha)'"h'i j'"ptt)Mtins
d"ft) t'indict' <t iof~tn'm' M )!0; t)m<'))\c~j)))ah"t't))~<)')ttt)'in'tn'L't'iit
iiM))~)n;ur t't K); )w.<<tti')')t)t)cs, <')'))< dont t'indi' <t <'M)r'' XO c) 85. Au
tit'u df t))t's)tti'))hat< ')<) dit m)'i d")i';))f)id< 'xt ))nn')to)d< ~ton '(u':
<'i)tf)i<'f w) )<)))!< );<'< df XO ou <)<;)!
<)')
//<"MO t'Mt'o/MftM. lu nu'); htothh'. <)))))ch'"v)))m! ')<: hnut'; tttittf.
Suivante. deLapouge, l'histoire uous montre qu'en
Europe les races blondes ont toujours t tes races domina.
tries. Dans ia suite des sicles, elles se sont mtes aux
autres races, brunes et brachycphales; les caractcres phy-
siques se sont croiss, et aujourd'hui qu'il ue reste plus que
des mtis, les individus appels jouer dans la socit les
rles les plus importants sont ceux qui. par leur constitution
physique et psychique, se rapprochent le plus de 'a~race des
matres d'autrefois.
Dans d'autres articles, intituls .s'c'<<'t'f<n/~ -soo't~M et
~t'Mf~o~t' prtttf les ~oMtmfx M. de Lapouge tablit que, dans
un mme peuple, la proportion de sang aryen varie suivant
les poques, et qu'au cours de l'histoire ia plupart des
grands hommes ont appartenu au type dolichocphale biond.
ou un type mtisse qui ne s'en cartait, pas beaucoup.
C'tait la pt'Mniero fois que la thorie uuthruposociolo-
gique tait formule avec nettet et prcision. Cependant
M. de Lapouge avait eu en France un prcurseur, Cobineau.
Celui-ci, dans un livre intitul ~<' <'w/<<~(~ <'<'<'< AuMM,
paru en i85S, rimprime en i884, expliquait la grandeur ou
la dcadencedes peuples par la prsence ou l'usure des i-
ments de race suprieure. Pour les anthroposociutogues, il est
l'homme do gnie de ia science nouvelle, celui qui eut le pre-
mier l'intuition des lois qui aiiaieut se dmontrer bientt par
des faits exprims en chiHres. Kncnet, M. de Lapout;e tablit.
en comparant des craftes de ~eutitsitomtoes et de paysans de
Montpetiicr datant du xvu sicle, (lue les crnes de
seigneurs avaient un indice cphaii'tUG de 14 et tes crnes de
p)6bions un indice de 78, c'est--dire que les premiers taient
plus dolichocphales que les seconds. C'tait la premire fois
que la supriorit de la race dolichocphale tait constate
par des chiffres
Le problme une fois signat, les matriaux s'accumulrent
et les vrifications arrivrent a la fois de l-'raucc et d'Ailc-
mague.

~MM~U~wn~p~
MoMO .~)t't)(M. la t'a' brun' hM<'hy'~))hM)' !)'- taUtc ('tu'i petite. ?)<

~thn)H')!t't~M<-tM.t)'At)!<hi..i').tt;M..f<<'M.i''Tu'uu)'Au.
v'-rftfmt! ~V<'f/<f<<-K'-M. t'- :<!))n')ihtitt.r.\))<t)~)U.
~)~~h~~w<
~) Yoh't!. ')'' ).!)))')U~< t:)'m' t)t't<ntit..))')tt<ttt)'.<''t t-t'MM' ptty'-tn~.
dfM )'.<M/Aw/w/u.'. )8!t. :)n-:m.
En mme temps que 0. Ammon, dont nous signalons ptus
loin les travaux, et mme un peu avant lui, M de Lapouge
dcouvrait et formulait ta toi de lu plus grande dotichoc.
phatie des urbains, nomme aujourd'hui ~< f/tntmo/f, et
qu'on pourrait, aussi bieil appeler loi lie (;. </<- /.<Mw/f. j)
signalait en mme temps ce fait assez curieux que les indi.
vidus qui sont atts s'tablir hors de leur dpartement
d'origine sont plus dotichocpates que les individus demeu-
res dans leur dpartement mme, d'o il s'ensuit que
t'tment dotichocpate tant t'tmeut migrateur, on peut
lui attribuer un plus grand esprit d'initiative et plus d'acti.
vit dans la recherche d'un plus grand bien-tre, d'une vie
plus targe. Le brachycphate reste attache au sol qui l'a vu
nattre le dolichocphale s'en dtache plus facilement pour
altra la recherche d'un sort meilleur.
M. C. de Lapouge a runi et dvelopp ses thories sur
t'anthroposociotogie dans sou cours libre tTniversite de
Montpellier en 1888 et t88U. Ce cours est devenu l'ouvrage
intitul les .A'c~MM~on'ft/t'j:, paru eu t89U. Le titre du livre
en rsume l'esprit et l'objet.
Toute rvolution sociale, d'aprs M. < de Lapouge, est
domine par la slection, c'est--dire par uue sorte de
triage qui met en vidence et favorise certains lments
anthropologiques plutt que certains autres. < Les evne.
ments historiques provoquent des mouvements de slection
et la slection son tour amne des vnementshistoriques.
Les faits sociaux s'expliquent par la lutte d'lments anthro-
pologiques diurents. et l'histoire entire n'est qu'un < pro.
cessus d'volution biologique Mais M. de Lapouge dis-
tingue la stection naturelle des slections sociales. Par le
fait que l'homme vit en socit, la slection prend un aspect
particulier, elle devient une slection MM-M/c. La slection
naturelle assure gnralement le triomphe du plus fort et du
mieux dou; la slection sociale assure trop souvent le
triomphe des mdiocres et des faibles, et produit J'limina-
tion des lments suprieurs, des <'t<~M~M. Tandis que la
slection naturelle est progressive, les slections sociales sont,
pour M. de Lapouge, lamentablement rgressives. Qu'etles
soient d'ordre politique, militaire, religieux, conomique.
elles gnent les supriorits naturelles au lieu de les aider
triompher dans la lutte, et avec les progrs de la civilisation,
elles s'exercent dans un seus de plus en plus pjoratif.
Considrons par exemple la slection militaire. celle qui
s'accomplit pur l'effet de la guerre. Aux temps anciens, ou
aujourd'hui chez les sauvages, elle favorise la survivance du
plus fort. Chez tescivitiss, olle puise rapidement les nations
qui s'y livrent. Depuis cent ans, les guerres europennes ont
cot la vie )3.(MO.(MO d'hommes, d'aprs une statistique,
20.UOO.OOU d'aprs une autre. Et malheureusementta guerre
reste fatale et ncessaire entre des nations dont la fusion en
tats-Uttis d'Europe semble pour longtemps impossilile.
Chaque nation, pour subsister, a besoin d'craser ta nation
voisine. Mais la slection militaire, telle qu'elle s'exerce
aujourd'hui, n'lev mme pas le niveau de la race victo-
rieuse. Chaque anne, les conseils de revision prlvent sur
une population les meilleurs sujets les refuss restent au
pays, se marient plus tt et transmettent leur inaptitude phy-
sique a une nombreuse postrit tes meilleurs, pris par le
service, rentrent dans ta vie civile aprs trois ans de caserne,
souvent atteints des maladies syphilitiques ou initis au mal-
thusianisme. Les lments suprieurs sont donc strilises
dans une forte proportion.
La slection politiqueest une des plus nuisibles etto tend
liminer les indpendants, les nergiques, a favoriser les
simplement habites, les fourbes et les menteurs. C'est elle
qui a fait prir par t'exit. par t'chafaud, par h' prison, par la
guerre civile, un grand nombre d'hommes suprieurs, au
moyen ge, sous l'ancien rgime, sous la Rvolution et dans
les temps modernes. Au point de vue des rsultats, l'analogie
est saisissante entre les luttes de partis et les guerres de
nations de toute faon, elles aboutissent a t'thniuation des
lments suprieurs.
La slection religieuse a contribu non moins activement
cette limination par te clibat sacerdotal ou par les pers-
cutions. C'est une loi gnrale que les perscuts sont sup-
rieurs aux perscuteurs. La rvocation de t'cdit de Nantes,
par exemple, a enlev a la France nombre de familles d'lite,
dont les descendants se sont illustrs & l'tranger. Le clibat
ecclsiastique, d'autre part, strilise, pour le plus grand dom-
mage de l'espce, bon nombre d'lments relativement sup-
rieurs. Knf!n tes mensurations rvlent que la bracbycephalie
est intense dans les rgions o la slection religieuse a svi.
La slection morale, comme la slection religieuse
laquelle elle se rattache, agit aussi dans un sens pjoratif. Ce
ne sont pas en effet les grandes qualits, mais tes moyennes et
les mdiocres qui sont favorises dans ta lutte lu mdioerit'!
est trop souvent une garantie de succs, et il ne fait pas tou-
jours bon d'tre trop intgre ou trop scrupuleux dans ses
faons d'agir.
La slectiou tgatc, qui seule fait expressmentintervenir
l'ide d'utilit sociale et seuto s'exerce d'une faon cous-
cieute, est aussi justementla seule qui perde actuellementdu
terrain. On oublie beaucoup trop qu'it importe avant tout de
supprimer les dlinquants et t'en s'attarde bien a tort aux
ides de relvement et de rgnration.
Mais, d'aprs M. de Lapou~e, lt plus dsastreuse des setec-
tions sociales, celle dont les cnets s'aggravent tous les jours,
c'est ta slection conomique, celle qui se traduit par les
besoins de luxe et de jouissance toujours croissants, par ta
strilisation des lments urbains, celle qui provoque le
dpeuplement et ta dgnrescence des campagnes, et t'eti-
tnination de l'aristocratie intellectuelle.
Les mensurations fournissent ici des donuces prcises. Les
urbains sont ptusdotichocephates que les ruraux il y
eu slection. Les campagnes s'appauvrissent sans cesse. au
donc

profit des villes, en cimuent:; suprieurs, et les villes absor-


bent et dtruisent en deux ou trois gnrations les tments
suprieurs dotichocpbates, bionds ou bruns, qu'elles ont
attirs.
La slection urbaine est le plus ~rand danger qui menace
la civilisation future. Les meitteurs sont attirs dans tes
t
villes, urbanisme dtruit tout ce qui nous a t laiss de
meilleur par de ton~s sicles de slections dsastreuses. Ainsi
prit le monde hettnique, ainsi prira la civilisation tout
entire, si t'homme ne veut pas diriger ta force de l'hrdit.
dont la science pourrait faire sortir le satut et lu vie, et en
appliquer les fois a ia formation d'une humanit suprieure.
Mais ici, si les possibilits scientifiquessont trs tendues.
les applications pratiques restent trs vagues et mal explo-
res. Cependantdes tentatives se produisent et se produiront
encore. Des associations se sont fondes, eu Amrique notam-
ment, pour empcher ta propagation des individus mat dous
et favoriser la multiplication des eugniques, tt faudrait
familiariser les masses avec les ides et les phnomnes d'h-
rdit, d'volution et de slection, et dterminer un mouve-
ment d'opinion contraire au mariage des individus tars, et
confort))'; aux veritubies devoirs de chacun envers t'espce.
Mais (tevaut des problmes aussi num'eaux et aussi peu
tudies, sur des donnes uussi values, il est hnpfMsibte de
pt'optK'tiser ce <)ni se fer!). L'aveHir seul (H)'!) que) parti t'ttu-
n)Mt)it'' pourra tirer des lois ncquises de t'anthroposocioto~ie.
science trop jeune encore d'aiiteurs pour fortnuierdes n)Htn-
tpn:)nt des t'etes de conduite absoiues et dfinitives.

Il
f). AMMOX. Die Gesohiohte einer Idee, in ~<~t'/<~
< /<'t<ffy, !890, t, )M;-t')7. Die GeseM.
(<f-H<K-/x'<)
acha-ftsordnnng und ihre naUtrUchen Grundiagen.
/</'/tt' .s'ojM/t?t~<y/f, ~ dition augmente.
tenu, Fiscttcr, )??.
M. 0. Attonon, de Kartsfuite, a rOsmne )')nstoire de i'an-
throposocio)<)}!ic en !;6u6rat et dM ses dcouvertes en particu-
lier, dans ta s6rie d'artictes iutitutes //<~o('n' f<'M<' Mf, et
qup nous citons en t6te de ce paragraphe.
Kn t8Xti, des recherches anthropoio~iftups furent entre-
prises sur les conscrits du ~rand-duch de Bade, par une
socit sHvantc de Kartsruhe. i) s'agissait primitivement de
deternxuer les caractres physiquesdeta poputatimi du duch
et d'en tirer des conclusions pur'inx'nt anthropot't~tues.
MaiM ces recherches amenrent un situant de Kartst'uhe,
M. 0. Atnnton, a des constatationsd'ordre bien difh'reut, qui
dpassaient en importance celles ([ue Fon cherchait, et qui
faisaient p<'m''t)'er j'anthropoiogieduxstc dotnaiuedc !a soeio-
togie.
Hu ehthorant les donnes anthropotos'ques recueillies.
0. Annnon <'onstata qu'entre la poputution urbaine et )a
popuiation t'uraie, il existe des di)!eronces constantes au
point de vue (te ht cotent' de )!) peau, des yeux, des cheveux,
et au poiut de vue surtout des fortnes de lu tetf. Ces dine-
reuces se prsentrent dans le mme rapport, pour tes quatre
vittesott avaient eu lieu les recherches, Mannhcim, ttci-
detberg, u Kartst'utte et Lorraeh.
Dans ces quatre vittes, ta population nrhainc renfermait
ptnsdedo)ict)occp))ates,avec un indice intrieur a 8t), taudis
que ta population rurate renfermait plus de bracttycephates
avec un indice suprieur 8!i. Le mme phnomne tait
constate en France & tu mme poque par M. Ci. de Lapouge,
(lui n'avait pas connaissance des travaux d'Ammon.et, bien
avant M. de Lapouge, par M. Durand de Crus il a t cons-
tate depuis (tans toutes les villes de France o on en a essuy
la vrification: ittoseravraisembinbiement partout o
t'o<~ A'<f~;M'H)f se trouve eu prsence de .t~M, t'<o
<M;)istaseu)entent.
Lit plus grande dotictiocphatie des urbains tant un fait
bien tabii, il restait t'expliquer. Tout d'abord, on carta

urbaine, soit
l'hypothse d'une intlueuce dotiehocptmtisantc de ia vie
d'excitations iutellectuelles plus vives
et plus frquentes, soit d'une frquentation plus protouge
des coies. En effet, des mensurations effectues sur les
mmes sujets diffrentes dates ont dmontr que l'indic
varie peu de douze viugt ans, et ne varie plus aprs vingt
ans, sauf de rares exceptions.
Une solution pius vraisemblable du probime pos, c'est
qu'il existe une relation entre certaine (orme du cerveau et
le {tout pour la vie urbaine et l'aptitude a s'y maintenir. Les
dolichocphales seraient donc attirs vers les villes en vertu
de leurs aptitudes et de leurs tendances psychiques, et ta vie
urbaine e!ie-m)ne exercerait une slection qui dtruirait ou
iiminet'aitiesttnentsbraehycephates.
Cette explication de la plus ~f'Hnde doiichocephatie des
urbains, et la loi de dissociation par dplacement qui en
dcoule, concordent d'ailleurs merveitte avec une thorie de
Hansen snr les courants de Rputation, thorie expose
dans un livre paru a Munie)) en i88'<. La campagne fournit
un excdentde natalit beaucoup de ruraux en consquence
sont obfigs d'aiiergagnerleur vie a la vitfe. A ia vifie, ia plu-
part sont timins, eux ou leur postrit, par la misre ou la
dgnrescence. L'n petit nombre seulement 'lvent jusqu'
la classe bourgeoise ou cultive. Ces favorises sont, d'aprs
Ammon, les plus dolichocphales et la loi de plus grande
dotichocphatiedes urbains constate et lormule l'aptitude plus
grande de l'lment dolichocphale a vivre dans les villes et
ayrussir'. t.

f~ thn~'tt. ' </tW'~<'r'<'M<'t'MK'/&<<u/<'. Munit'h. t.iHdnM)')', fiKi'.L


~<Mt')'~f.nt.tt)".t'hitrn')))t)t!-)'tmyM(t).'Uv.i)))))))rttinttt'-<).t)Htt<'n'
.Yn/A<)M~f.'. ).t)), Fi~'h.-t-, ))!?.
t)es faits que nous venons de rsumer, Amtnon a tir toute
une sociologie et toute une thorie politique, qu'it <t exposes
(tans sou livre <f .m<'M< f/'p~ tft ~(M~ M~//v//M. Le
titre indique les tendances de l'auteur. Un politique c'est un
conservateur, mais un conservateur qui prtend appuyer ses
thories sur les donnufs de lit science euutempuraine. Parti
exactement des mmes faits anthropologiques que M. U. de
Lapoufte, it arrive a des conclusions toutes diffrentes. Pour
M. de Lapouge, les stectionsMrM~ agissent, a t'encontrede
ia slection Mft<M<'<c, dans un sens pjoratif et sont des
f!eaux acharnes aprs l'humanit. Pour 0. Amtnot), slections
sociales et sciection Hatureite se confondent. L'ordre social
est un mccanistne merveitteux de prcision et de complexit,
dans lequel ia slection naturelles'exerce par des institutions
varies, adaptes leurs buts divers, et qui servent a porter
chaque individu au poste auquel it est le plus apte. Ces insti-
tutions sont principalement. i les concours et examens
divers les classes sociales. Les concours arrtent t'en-
tre de chaque carrire les incapables ou du moins les emp-
chent de s'lever; ils aident au contraire a s'lever les indivi-
dus heureusement dous qui sont ta vraie richesse d'un pays,
qui doivent tre appels aux premires places dans le corps
socia). non pas pour la satisfaction de leur ambition, mais
pour le bien de tous, en vertu des lois de ta division du tra-
vail et de l'ingalit des hommes. Quaut aux classes sociales,
elles sont par excellcnce l'instrument de la seteetion natu-
rettc grce u l'existence des classes, les individus qui ont
russi dans ta lutte pour la vie se marient dans leur classe et
ont plus de chances de transmettre leurs quatitcs a leurs
enfants grce a l'existence des classes, ces enfantssont isotes
des enfants de la classe infrieure ils reoivent une duca-
tion plus soigne, une nourriture meilleure; il sont ainsi
places dans les conditions les plus favorables au complet
panouissement de leurs qualits physiques et psychiques,
et s'ils sont reettemeut dous, ils parviennent aux situations
les plus leves. Si par hasard lit slection s'est exerce &
faux, si les sujets n'taient pas suffisamment dous, ds la
seconde gnration, ils retombent dans les situations infe
rieures ou disparaissent compltement.
Les classes sociides sont douc un instrument de slection
non rgressive, mais minemment progressive. Telle est
l'opinion d'O. Ammoa. Mais ces classes ne doivent pas tre
des castes fermes par des barrires infranc))!ssabtes. Les
classes suprieures, et) etct, doivent, ponr ne pus disparatre
rapidemen), se rencuveio' sans cesse par le continrent des
individus, heureusementdoues, issus des classes infrieures.
Car les classes suprieures s'puisent bien plus vite, par suite
du travail intetiectue) plus intense, par suite des conditions
spcialesde la vie urbaine, par suite enfin de leur strilit
relalive, voulue ou non voulue.
Pour combler les vides qui se produisent dans les classes
suprieures, il faut que lit socit possde eu rserve un
nombre suffisant d'individus dans des conditions d'existence
saines et simples, qui aient un grand nombre d'enfants et
leur transmettentieurs aptitudes latentes ces individus sont
les paysans.
L'laboration et ta mise au point des individus en voie de
dissociation ont lieu dans les villes, saus que les intresss
s'en doutent.
Les immigrants, leur arrive dans ta ville, sont employs
dans tes situations infrieures, mais ils reoivent plus d'ex-
citations intellectuelles et une nourriture meilleure. Des
qualits psychiques jusqu'alors latentes se revtent cilez les
uns: chez d'autres, le bou et le mauvais se font quilibre;
obex d'autres enfin, les mauvais instincts se donnent iibre
carrire. Dans t'espace de deux ou trois gnrations, la ditle-
renciation des classes est un fait accompli aprs des cri-
btages rptes, testements suprieurs sont ports aux situa-
tions suprieures, tandis que les otements infrieurs, les
individus manques, s'enfoncentct descendentde plus en illus
jusqu' leur limination finate, soit par le jeu des lois natu-
rettcs, soit parceiui des lois de ta justice humaine.
Enfin, pour que les classes sociales subsistent et se main-
tiennent, il tant dans les classes rurates une surnatalit qui
compense ia surmortalit des classes snpcrieures. Tandis
que les ruraux se multiplient jusqu'aux limites du possible,
les classes suprieures s'aneantissentpar te fait memede leur
succs dans la lutte pour l'existence.
Tel est, d'aprs Ammon. l'ordre social, non par cration
d'un ~nie suprieur ou d'une assembtee dlibrante, mais
'ouvre desiliecies acctunutes, progressivementlabore, dve-
loppe et perfectionne par les innombrables ~'nerations qui
y ont travaiite inconsciemment;uvre admirable, maisd'ait-
leurs non immuable de mme qu'elle a t contiuuettemcnt
perfectionne dans !e pass, elle doit t'tre encore dans l'ave-
ntr, et il reste de Ja place pour )'activit6des rformateurs.Par
suite de la transformation incessante des conditions d'exis-
tence, des reformes sont invitables et indispensables mais
encore hmt-it qu'elles reposent sur des thories scientifiques
exactes et non sur des prjuges non vurif!6s, sur des aspira.
tions vaguement sentimentales ou sur des mensonges de
politiciens.

Ht

Xaus rsumerons ici t'a))i(k'ment '{Ufhjucs ouvrages, on artictcs


retatit' & t'antttt'oposuciutope,ft <tui retevent des thories de t~pouge
t'td'Atumou.

t.tYL AmtropometrifunUitMe.Homa,i8M
Cet ouvrage mo-
nu)nen)at est une statistique aut))ropoio):iqm'com)))ete dci'ttatie,
portaut sur 300.000 soldats. !t a t pubjie par le ministre de ta
guerre d'ttaHe.
Il 'tabtit que. dans l'Italie du Xord, la loi des indices urbains 8M
v~tittt' M)tun<' en t'taMC<; ou o) ;U)t')uat!u<' tes urbains sont plus
dotichuccphatcsque Ja poputation environnante Mitan il 8~,8 les
t'nvixms dt' Mitan, 8t,3; FIomm-f, 8t~ environs de Florence, 83,! i
<'te. Mai~ dans le sud de ntidic, les urbains, j))us do)it;hoc<?pha)ex
il est Yt~i qu<' h's urhains du Xord, suu) moius doHchocephatM
que les ruraux envirunnauts, moins doiichocephates,mais non
t)mch)'ce))tta)c' Ainsi Messine, 'f! province, 78,8 Bari, 82,4 pro-
vince, 80,7,-etc.
A prcnut're vu)', il y u ta t-ontradictiun avec les lois d'Ammon et de
Lapoupe. tt n'en est rien cependant. D'abord doiichocephaticet bra-
ehy~phatie n'ont pas ''n ''net le scnsahsotu et magique qu'on serait
tent~ de )eur attribuer d'abord. Les fuis de Lapou~e et d'Anunon ne
sont vataMes que pour h's re~iou-. o )<- do)ieho<:t''{)tm)c aryen.
Et'<~M!tM, se trouve en ptesence du brachycephate, /MM. Il
''st tout nature) que d'autres rapports anthropologiques se prsentent
<)ans une re){io)) ou dontitK'nt d'autres etemcnts de population, tels
qu'ici dans !'ftat! du sud, r'emcnt mditerranen. La race medifet'-
raneenne est d'aiHeurs, elle aus: dotichoc~pttate,mais )a dotichoce-
pha!ie la elle seu)e ne sij;nine pas ncessairement supriorit,et cer-
taines rac~s excessivementdotichocephates,tettes que les degrs, ne

(<) Voir unf ant)\ !'e trs cantptt'te )h' cet f)uvmf;c dun< un ar)ic)e de
Chef <'it), J~M/ </e /<t .~<M'<f/f f<f ~<M~<'</f /'af~, decetttbM <if90.
semblent pas aptes a s')ever beaucoup au-dMsu!: de ht barbarie. Ht
peut-tre y aurait-it une hiO-arcttie sociale du do!ic))nc~phafearyen
au bra<'hyc<pha)c et de eehn-ci uu do)ichoce]))ta)e m~dito'raneeu.
Mais, en deftnith'e, tes resuttats de t.ivi ne contredisent donc pfs tt's
lois de t.apou(:G et d'Anxnon e))es tnontt't'nt seutetxt'nt un autr'
aspect et une appticatiou din'cn'ate des lois de sek'ction.

OLOHtZ. Distribuoion geograRca del indice cefalico en


Bapama. Maddd, Mya, i89t.

BEt)t)OE. Sur l'histoire de l'indice ophatique dans les lies


Britanniques. (/tM</<r., tS9t. Ct3.S'29, CS8.6~3.) Tite M<-M M/'
~H'<a~). London, TrufbHer, 1895.
Ka Kspaptie, les tcavaux d'Otuiii! ont tuotttt'M <[uc lu puputatiuu
prsente )a tn~me cotoposition aotht'uj'uJt'~ifjUf que celle de ritaiit'
du sud. Htt An~h'tfn'e ~~fttom'ut la population para!) t'cmat'tjuaMc-
ment homogne et {a'csque t'))tictcm''nt doHe))(n'<'pha)t'. X) <'n
Espa{tnf ni <'n An~tetPtt'M ou ne constate h) cocjfisk'Mcc des ~t<?-
nx'nt'i anthropotofi'iqucs, /i'tft'<~(t'M et /t/<M<M.' il est doue
tout natur'') qm- ces <'t')<ion! ainsi que ntatic du sud, lie i.t' prttent
pas la v~t'incation des lui, dt; t.ap"Ut!K et d'Ammon qui pt'esuppo-
seut t'xprcss~ment la pn~t'ncc simuttance de ces ~nx'nts (tans um'
rgion. Et parce que ce. <t~n)''nts tu* coexistent pas partout, ces
lois n'en sont pas moins des lois scicntinqtH' Kncs <ta)dissent que,
si tel antcdent est dutnn' tn~)an~ de dotictxtc~phatt's nryens ft
de b)'nchyc<?p))aiM, i) s't'xsuit'ra d<'s phenotn~aes dt;t);t'tnint?s, dissu-
ciation des cment!! antht'ujtoto~iqu' conceatration dt's dt)nt;))"c~.
phah'x dans les villes, formittion th'.< ctasscs, et bifu d'autres Mns
doute qui t'csteMt & tudier et a <tMt'ouvor.

D' Il. COU.KtNO?<, mdecin-major il l'Ecote suprieure de gut'rrc


de Paris. L'Anthropologie du sud-ouest de la Franoe, dans
.Mmot'Mf! de /f< &<c'M <h<</u'o/M~t'e f/e /~a<'M, t. l, 3 serif,
1893-95. Carte de l'indice cphalique en Franoe, dans
/ht))a<M</e C<'o~<'~/t<f de Ytda)-).nb)a<:))c, janvier i896.
Ce qui fuit l'intrt des ouvrages du D' Couignon, c'est qu'i) n''
s'occupait primitivement que d':n)thropoiof;ie pure. C'est sous la
pression de i'evidence <{u'i) a accorttC son adhsion il qm'iquf's-um's
des tueories de i'antht-opusocioto~ie,devant )<'s<}u<'))'i il tait rest~
d'abord prudemment sceptique. H Il not~tntttent veritie par lui-
mme l'exactitude de lit loi d'' la concentration des dotichodef.dans
les villes, et en a fait ressortit' etcquMnnx'nt toute )'i)n))()rtiu)'t;a la
in de son mmoire sur )'ant))('opo!o(jit' du Sud-Ouest de ln Franc*
pa~fs t26 et <S'?. < L'importance de ce fait, dit-il, est sans ega)e.
Cette loi nous dcnxMitt'c en c<!ct, pfut-cfrc pounuMs-nou~ Jc prou'r.
<)uet'ct)ue)Mu.snppG)on!tA))"trc<'pf)<tuet)'o)t)d~<M<~M~
C/<MM!M, 'est M)t f"))d, sous U))C futtUC !t"S) httttt''t)dne que d<'tt)ttf.
)u~(}u'u))t')utt''d<')'acM.C'<di'.uns-it',)ahttt)')'nt)'pt''shtn-
<')ty('~phuh's('t)<'sdf')ich<'c~p))!)!<,<ux-(-i,t:<'))!!Ai'csp)'it))m'u-
tt'ut', (tv'ntut'eux cf. sous um' fur)))'' diverst', aussi tcmuaut!) de Mu~
jt)Ut'<t)Ut'tVtait'))ttfUt's)ai))tMi))'m''tn's<))tt<')))psdest<)i)<t'atio))).
hiuhin't's. cf-ux.ta, )nu''x p)'t'-d''<-t"i.cu)'s, (jui phts) puioibtes '-t )iM pa<
d''s)i)<!))i"n <m !'n) t-n tant tju'uf:)icn)tf'tn't, rcjn'~t'nh'nt dans notn'
(;o))'tivit'? t')"'it fro))o))' t't t'f)t!))i, nxtis e"t)St't'VMt'Mt'.0
t.tt c~t'h' </<* < t'/t'cf <'<~t/t<t'~Mf CM /Mncf Mt h' t'sum~ de tmvtmx
''))<id~)'ni))''<<'t<tctn''t)surttti<'nsf<!i[f'<!pf)ut'tapht)Mtt't))tu'r!tuteu)
hti-n)~)c.)/)nnn''ns)tt'dusuj~faitt)u'')('!in'-)tuttat<!)-Mtt'ntt't'ovi-
suin"ip<jur()ue(qt)<d'~M)'t''n)('))t!i,n'!ms).'d)t)])'titnofnb)'<'d'indi- i-
vidus nn'tt'iUt't'-s. C'est n~mutt~itts un tritVttit de ):t plus hitute impt.
am:(! et 'tui iiCM uu point de d<p!u't {"'ut' de umn'cUc!! )'cch<'r':hc!

CHAt.L'ME.U'. Influence de la taille humaine sur la forma.Hoa


des classes sociales, (.t'ucw. <8M. Les races et les popu-
lations suisses. ~KrMf~</f~<t'~<~Kc<t)<)'Mf,XXX)!, 4.
Chutmncau dans ces deux opU!ut< "<' r<tt!ic aux vttf's de Utpougc
ctd'tnmt)tt.L('<ypt'du)it;))<JC(~'h(tt('ht('))ddt'i)autctai))c!!t'pt'
st'tttt' du)t< t'))!)')u<* p)'ofMsion tt'uutHntjdus Mf)UR)nnt<'nt que ta pt'c-
ft'ssiun t'xit: p)us d'aptitude"! intt')h'ctut:)h" )) existe ut)e hit't'Mt'chh'
scciatf ni!n-<tUfe pin- )a t:ti))e.

C. Ct.OSSOX. Dissooiationby displaeement,a phase of social


seleotion. (<<M<'<e~ y<'K~)o< H/'A'roMoMtt'Mde Bui'tuu, X, 180.
Becont progress of social anthropology. ~<<n)< /* po/<'<'<t/
/fOMOMy d<' Otici~ )V, 4tU. La dissociation par dplace-
ment. /<<'f. t'o~'M. </e ~n<')'u/. df t'<ui! )V, $H. Ethnie Strati-
aoation and displaeoment. Cooffer~ JoM~Mot of ~fOHOMtM df
Mo.<to)),X!,UZ-tC8.
M. Closson, disctpiodp t.npnupp. a fX))o'i<! (htns ces <u'tic)es la toi
d'' t-apou)! <'t d'n)t))f'n, ou loi d'' c(U)c''ntMtiuades dotichnc~phatt'it
d:)))'' )<'s vincs, t')) i)i<ti)nt sut'cf fnit <p)e)Md'))i<:)toct?pha)es repn'-
~nteut )'<?)t?<nc)tt le plus )Mobi!f et te ptu'i cntrcprcHant de ta race.
Ot)):S. Gense des grands hommes. fm')!, Wettet-, t8C6.

t'Jt-).YY. Les Aryens. Pti: Mussun, t89J.

!U)').HY. Ethnie innueMes in vital sUtistios. tn ~NM<'<t'M


~<<t'~t'('f<Mmt'M/MM,<8M, )S-:0.
Huf)u on trouto u pouf )<'s ouv)'a!('s ptus anciens mx' biidiographio
ptus comptt'tc ditns les .W<'f<<o)M Mc'M de M. 'te Lapone.
Quant aux con"equenc('s pratiqm's a tirer d" ces tttenrics. des
discussions in'!pi)'t'-esd'ai)h'Ut'pMt'des principes trf'sditterentsout
paru dan.< les travaux fuivant!
L.Ct.ALX. -Du SelectiomBiBme optimiste au Seleotionniame
pessimiste. /<ft'e <oc<'<M~f,juith't t8!'7.
C. UOHiLH. Anthropologie et dmocratie, ~'c Hx'~Ay-
<f~Mf f<t/c morale, juillet, i897.

j. KOVtCOW. L'avenir de la race blanohe. C~~Mf </ ~fMt.


m~MC cott~m~ofot'n. Paris, Atcan, i897.
M. XovicutY, le titre de t'uuvt'agc )'itnii()Ut', s'appHque & n''fut<;t tf
pe~sinnsm'' fontoupoMUt, et, s'-hm sou ('xpt'<'ssiu)), & te <-uu)tu'ttr<'
& lu froide Mt i)ttp:t)'t)utc ctitiquc des ctutt't's, des fttits, dfs \t't'i-

t);$ acquises it ht scieuce (p. <0). Il y cependant, dans le tivn'


<te M. ~ovicoK' soutcnt plus d'ftMntMtMns put'e.< e) ~itnpiM <jm- <.)<
fhi)!'<'es et dfaite.
C'esl uux livres n et ttt ttuc l'auteur s'aHaque aux thories antht'o-
potugiqm"; de ditHt't'ats auteucs etdt' M. de Lapuuj~cn jtarticuin't',
saos (ju'i) pat-aisse toujum's avoir ptcim'ntpnt contprish'UM principes
ptjcsrfsuMatsobtenus.
t'at' exemple, ?:){;)' 70, M. ~uvicow ~ct'it *![ n'y a jamais t'u. pt
il n'y am'o jt<miti.< de typ)' )ix'\ jMts phx <')) .~ng)<'t'')')c (ju'nittt'm-s.
Xous rpondrons simp)em<'n)tpn't'indi<'c'))))!tnqued<sAurais est
unifot'n)'!tnent 78 d'un bout a i'autr'' du pays, et qu' CH point de
vue au moins, la population est h'))no(;<'n< c'pst-a-dire ))\(~ E))
Franct', t'indice ct?pha)i<)uc varie de 78 88 selon les r~ons, ce qui
indi~Ut.' noc poptdation compose d'etcmfuts hien di<erents. Voit'
ta-dessnsJ. Heddoc, MM('M<'H &')<nfn, )ja~t; 231, pour les indices des
Anglais, et CoUignon, (.'t'/c </f <~t</t't'e c~/t/<9Me e<t /<'<tcf, pour
les indices des Franais!.
t'ap' T). < t~a fut'nK' du crne, ta dotichoecphatie, In HMMticepha-
lie et la britchyct'phuti'' 'ont pas rcsoht )<; pruhif'me (de rinc~ante
dpi= races humaines), t'arnu les iodi<i<tus pnssedaftt tes metnc-!
indices cephaUques, un a trouve des itn))Mci)es ft des tateutshuts
)i{!net. Evidemment, mais d'abord ce n'est pn-isut't'indicfcepha-
ti'}ue s''n) 'tue les at)t)))oposocio)o}!ucsetahtissent ieuri) thories
cnsuitf quand ils font intervenir t'indice emphatique dans leurs con.
sidrations, ils n'oprent pas sur tel ou tel individu, mais sur des
)!roupf's aussi nombreux que possible d'individus appartenant a In
metne rgion. & ta mme condition sociale. Et si, pour un individu
isote, it est impossible d'affirmer sa suprioritou son infrioritpar
le seul examen de son indice ccphatique, it en est tout autrement
pour tes groupes. C'est ainsi qu'un auteur plutt prudent et scep-
tique, )'- t~Cottignou en estycou arcconna!tre,avee les restrictions
d'aith'urs o~cM'MUt'C! )'inf''t'iorit< iutcHert<tt')te de lu racu hmchy-
<;<!ph:))t'Y)!U-vi!id<t')H-('U)'u))<t't)t~'sdo)it:hO('t''))h!t)')' s
Ui'-n))!. 't'!n))t'uts <)ttf si )'<')( v~ut [!"rtt'r uu jux<'ment sur )'ftnUu'
))t)<nt-n')t'ttit',)t)K'suff)t]'n')<')!!A)))''t'"Ut)<')<))n't')<<co))<.<)U''n<'f')!
p)')tH<)UC!!qn'ou('nfuttin't'.K)lM!.onb)''))tY!H'if'raY''ch"'tf)np~-
)())))''nt''i't(tiYi'h)<')s.:M.d''U'p<n'<H))!ts)nontr'auMi
fri)))c!~c)m'))tp<'ss.i)nist<'f)))<*M.f'.Anunt)t)()[)tm)ist<'?)'<'st't)')'St'nt
)'!Htt))t'o('o';ocif)i(tf{if' !t <)mi( ))ft) )')')< s<'f))'')tK't)t A <!<' .it))p)<'s procs
df t''ttdu))<-f!<, ))):tt!i & un ~~rn'ttx cxatn<'n ttcs fait: des chifft't's. df"'
statistiquesqu'elle ajusqu'ifi ra'i!it'mbh''s.
O.Mrtu~

U.t.AS(H:t(H!~<K.\t')nH
RATZL (Ftt) ). Der Staat und sein Boden geogra-
EnKMt:u
phisch beobftchtet.
~cnx'nt.) Leipzig, Hirxet,
(/f ~8{)6,
ff MM sol ~fM~t'A ~'o~)'pht-
)~7 p. in-4".
Ratzel, notamment dans son
On sait les etorts faits par M.
.4H~fropo(/(~'ap/epour lever la gographie au rang d'une
science vraiment explicative qui aurait pour objet, nou de
dcrire simplement l'aspect superficiel de la terre, mais do
dterminer la manire dont la configuration du sot atlecte la
vie humaine en gnra). Dans le prsent ouvrage, c'est le
rle du facteur gographique dans l'organisation et le dve-
loppement des socits que l'auteur se propose spcialement
d'tudier.
On a bien des fois compar ta socit un organisme. La
comparaison ne se justifie que si l'on a soin d'ajouter que
c'est un organisme d'un genre spcia) c'est un organisme
imparfait. En euet, la caractristique des tres vivants les
plus hautement organiss, c'est la radicale diflrenciation des
parties dont ils sont composs et l'troite subordination qui
en rsulte. Les lments vitaux, cellules, tissus, organes, ne
vivent pas pour eux, mais pour le tout auquel ils appar-
tiennent. Ils sont rivs une place et une fonction dtermi-
nes. Au contraire, t'tment social, savoir l'individu, est
un tout qui peut se suture soi-mmeet, par suite, quelle que
soit sa dpendancevis--vis de la socit, il garde toujoursune

()! ))' CoOiK't'M'</)//)<'<~t</M.?t<'<M~'M"<dang .WMte'M </f /a


Sef~M <~M<A<-o~o~,<'<' f/e ~)'t<f. t. ). ' 'ri' p. M.
large autonomie. H se meut librement d'une partie du pays &
l'autre. chatte de (onctions ennu, quelle que soit la diversit
des rles qu'ils remplissent, tous les hommes qui forment le
groupe resteut des hommes et, eu ce sens, sont semblables.
La spcialit des tac))es dout ils sout ctiargs n'entame
pas
l'identit (ondamentate de leurnuture. La cohsionsociale ne
saurait donc avoir les mmes causes que l'unit des orga-
nismes elle ne peut pas tre due l'interdpendancemutuelle
des parties dinerencies, mais elle vient principalement du
support commun sur lequel voluent tous ces individus sem-
blables et qui les relie les uns aux autres (p. t7).
Les liens sociaux qui ont leurs sources dans le territoire
sont de deux sortes.
H en est de purement physiques. Le territoire rapproche
matrietiement les membres d'une mme socit de ta vient
la tendance a en faire ta base de l'organisation politique. C'est
cette tendance qui dtermine les peuples infrieurs se grou-
per ttu centre du pays autour de lu demeure de teur chef, et
c'est ta mme cause qui explique l'organisation de la cit,
avec la concentration qu'elle implique, chex les Grecs comme
chez les Smites,
Mais il est des liens moraux qui drivent du sot. Ce qui
fuit l'unit d'un peuple, c'est en grande partie l'habitude de
ta vie commune, ta communaut du travail et des intrts
conomiques, le besoin de se dfendre en commun coutre
les ennemis du dehors. Or cette communaut d'existence
n'unit pas seulement les individus les uns aux autres, mais
aussi la terre qu'ils habitent. En etet, les fruits du travail
dpendent du territoire, de son tendue et de ses proprits;
pour satisfaire aux ncessits de la dfense, on trace des fron-
tires, on lev dos forteresses qui ont pour objet de prot-
ger le sol et qui en font partie intgrante (p. )8). ft n'est gure
d'ides ou de sentiments collectifs qui ne soient affects par
la mmo cause. Suivant que le domaine social est plus grand
ou plus restreint, les socits out un sens trs diffrent de
l'espace qui est ncessaire il leur dveloppementpolitique.
Plus elles se meuvent sur de vastes emplacements, plus elles
prouvent le besoin de vastes horizons. C'est ce qui fait
l'humeur conqurante des nomades (p. 12).
Le territoire n'est donc pas simplement le lieu des phno-
mnes sociaux c'en est un facteur puissamment actif. Une
socit n'est pas pensable sans une partie de la terre qui s'y
rapporte. Ce n'est pas assez de dire que le sol appartient fI
i'tat it on fait partie, il en est une condition essentielle.
Voita pourquoi < nous voyons, au cours do l'histoire, toutes
les torces sociales s'emparer du sot et ne former des tats qu'a
cette condition. Professions et socits, commerce et religion
puisent cette source de puissancepolitique et de dure. C'est
encore ce mme sentiment qui se traduit dans les aspirations
nationalistes de ce sicle. Quand on dit Les Allemands sen-
taient le besoin de crer une forme politique qui s'appliqut
toute la communautallemande, on entend qu'ils aspiraient
une continuit et uue dlimitation territoriale qui assurt
cette communaut un sol qui lui fut personnci (p. i9).
Mais ie sol n'est pas seulement lit base solide sur laquelle
reposent les tats en dpit de son immobilit, c'est un des
moteurs du progrs; l'autour n'est pas loin de penser que c'oa
est le moteur principal.
En effet, le territoire, avons-nous dit, contribue former
la conscience de chaque peuple. Mais cette conscience, un&
fois forme, ragit sur le territoire o elle a ses racines, elle
s'efforce de se l'assimiler, do l'organiser au mieux des fins
qu'elle poursuit. Si, pour une raison quelconque, it lui
rsiste, s'il n'est pus en harmonie avec elle, elle ira chercher
au det de ses limites actueitesdo quoi se satisfaire.Ainsi dea
pays distincts, mais qui forment un tout gographiquement
un, une !te par exemple, acquirent plus ou moins vite le
sentiment de cette unit naturelle et prouvent alors te besoin
de mettre leurs territoires en harmonie avec elle. Ils tendent
donc ne pas rester enferms dans leurs bornes prsentes,
mais & s'unifier territorialement, soit par voie pacifique soit
autrement. De mme, un pays trop dense tond s'annexer
d'autres pays sur lesquels it puisse dverser son excdent
de population un pays de ctes, comme la Datmatie. tend!
vers les rgions intrieuresqui le compltent, etc. En un mot,
dos tats nouveaux et plus vastes se constituent dont la for~
mation tait prdtermine par la nature ette-mme. Il y a
donc dans la configuration mme du sol un principe de mou-
vement. Il semble mme que, d'aprs M. Ratzel, ces raisons
gographiquesexpliquentcomment, d'une manire gnrale,
les dimensions des socits vont toujours en s'accroissant
mesure qu'on avance dans l'histoire, sans qu'il soit possible
de marquer un terme ce ~'oce~tM. Eu effet, il admet l'ide
de Ritter d'aprs laquelle toutes les parties de la terre s'im-
phquent mutuellement. parce qu'elles appartionnoot & un
mme tout dont elles dpendent couima il dpend d'elle3.
La situation de Saint-Ptersbourg ou de ])rontheim n'est
ce
qu'elle est que parce que les autres parties de l'Europe sont
ce qu'elles sont ~p. Hn\ En somme, tous les pays du monde
font un seul et mme systme solidaire et ta seule unit
gographique vraiment et pleinement naturette est celle que
forme le globe tuut cHtier. Si donc les territoires qui s'appei.
lent les uns les autres sont comme ncessits & se runir, ou
conoit que les peuples s'efforcent toujours de dpasser leurs
frontires pour atteindre un plus haut degr d'unit.
C'est cette discordanceentre les limites naturettes(entendez
rationnelles) et les limites effectives des peuples qui est la
source du progrs. En effet, les nations ne peuvent s'tendre
sur do plus larges espaces sans se differencierdavantage.Cette
diffrenciation vient ette-n~me, pour ta plus grande part, de
causes territoriales.
t')':tat
fidle son principe. M. ltatzel nie
que puisse entamer ta nature individuelle assez profon-
dement pour que tes individus puissent devenir aussi distincts
les uns des autres que les cettutes d'un organisme. Suivant
lui. tes diuerences qu'ils prsentent ne sauraient ~trceonstitu
tionneties; elles doivent donc tenir surtout des causes
externes, c'est.u dire gographiques. < Le facteur qui est ici
au premier plan, c'est l'opposition des provinces priph.
riqm's et des n'gions centrales, des ctes et de l'intrieur des
terres, des ptaines et des montagnes, etc. (p. u8j. De la
diffrenciation qui se produit ainsi rsulte, par le mme
procd et dans ta mcme mesure, la division du trayait, la
fusion des organes similaires, la concentration des fonctions
solidaires, etc., en un mot. tous les caractres des socits
suprieures.
En mme temps que l'espace social devient plus tendu, le
rapport entre les socits et leurs territoires devient plus
troit. La terre est, de plus en plus, un facteur vital de ta vie
collective. Dans les peuplades infrieures, elle compte pour
peu; c'est ce qui fait qu'on lit vend ators avec une telle aisance
et pour si peu de chose. Une tribu nomade ne tient gure au
sol sur lequel elle se meut aussi en change.t-ette facilement.
Commence-t-elle se fixer ? seuls, les lieux o se trouvent
concentrs les organes politiques du pays ont de la valeur.
Plus on s'teigne de ce point central, plus l'intrt que le sol
a aux yeux de )a cottectivite va en dcroissant. A la limite,
c'est--dire )a priphrie extrme, il est nul. C'est pourquoi
une socit rudimentaire n'prouve aucun besoin de fixer ses
frontires, mais les laisse flotter, indtermines. Il en est tout
autrement chez les peuples cultivs. Un flau peut entever cent
mille hommes une nation europenne sans qu'elle soit pro-
fondment branto; elle ne peut perdre cent kilomtres
carrs sans tre atteinte dans sa vitalit, et c'est de iaque vient
notre extrme susceptibilit pour tout ce qui concerne le
domaine national. Pour nous, ii n'est pas de point du terri-
toire qui n'ait sa signification et son prix. Aussi quel soinnos
socits mettont-eiies u fixer avec prcision leurs bornes res-
pectives Enfin, tandis que jadis ii est arriv tout un peuple
d'tre transport d'un pays a un autre, aujourd'hui, unie!
transfert, mme pour une seule province, est radicHiement
impossible. Les peuples tiennent la terre par tant de liens
qu'ils n'en peuvent tre arraches sans prir.
La cause de ce changement, c'est que la socit, en mme
temps qu'elle se rpand sur do plus vastes territoires, les
pntre plus profondment. Parce qu'elle y incorpore plus de
travail, elle y met plus d'eiie-mme et s'y enracine davan'
tage. Pius ou vit, en ejlet, plus la surface du sol est trous-
forme par l'activit sociale, et, s'il en est ainsi, c'est que
l'initiative de l'individu devient toujours plus grande. Au lieu
d'tre retenu troitement sur un point, autour du chef ou
dans sa sphre d'action immdiate, il devient plus libre de ses
mouvements par suite de cette libert plus grande, la popu-
lation, au lieu de rester masse au centre, se disperse, occupe
un plus grand nombre do points qu'elle fconde de son travail
et qui prennent ainsi un prix social. Sous i'inituence de !a
mme cause, ies.nergies individuelles sont surexcites par
cela seul qu'elles peuvent se dvelopper plus librement et le
travail est plus intense. Hu rsum, de mme que, en prin-
cipe, c'est l'autonomie de l'individu, jamais aboiie, qui fait
l'importance sociale du territoire, mesure que cette auto-
nomie devient plus grande, le rle social de i'imeat terri-
torial devient aussi plus considrable.
Si l'on peut regretter que les ides exposes dans cet
ouvrage n'aient pas toujours toute ta dtermination qui serait
ncessaire, on ne peut mconnatre qu'eiips provoquentuti-
lement la rflexion. Sans doute, les principes gnraux sur
tesqueisest appuye ia thorie sont des plus contestables. Les
socits ne sont pas faites d'individus autonomes, sans autre
lien entre eux que le sol sur lequel ils vivent. La division du
travail social et la spcialisation des fonctions qui et) rsulte
n'ont pas des effets simptoment superticiets et il y a quelque
chose de trop ingnieux A en rduire il ce point l'influence
pour pouvoir mieux mettre eu relief celle du territoire. Mais
t'idt'e gurate n'en reste pas moins. H tait opportun de
rappeler aux sociologues l'importance trop ngtige du fac-
teur territorial. S'il ne semble pas avoir d'action immdiate
sur les faits de l'ordre juridique et morat, il pourrait bien
affecter directement certaines reprsentations cottectives; par
exemple, la manire dont les peuples se reprsentent l'univers
n'est peut-tre pas sans rapport avec la nature de leur habi-
tat: En tout cas, la structure gnrale dessocitsan dpend;i
t'tendue des segments sociaux, leur degr de coatescence
varient ncessairement suivant que ie pays est montagneux
ou tout en plaines, selon ta fcondit du terrain, etc. Enfin,
puisque ce sontdes besoins territoriaux qui ont, de tout temps,
pouss les socits s'tendre et qui ont. par consquent, t
le principal moteur du mouvement historique, i) parait diM-
cile de nierqu'it y ait dans le territoire quelques causes qui
incitent l'humanit au mouvement. Reste savoir si lu nature
de ces causes a t suffisamment analyse par fauteur. Sa
pense sur ce point nous a paru particulirement enveloppe.
On trouvera galement dans le dtait nombre de
vues qui
mritent d'tre retenues. Teite est notamment la loi d'aprs
laquelle il se produit entre les socits et le sol un rapproche-
ment de plus eu plus intime mesure qu'on avance dans
l'histoire. Toutefois, une distinction est ici ncessaire; elle
ressort, d'ailleurs, des considrations mmes prsentes par
M. Hatzet. Ce n'est pasdu soi, en tant que tel, que les socits
deviennent ainsi sotidaires; ce n'est pas par ses caractres
physiques qu'il dtermine ce plus grand attachement. Si eties
y tiennent, c'est qu'elles lui ont surajout une autre nature;
c'est que, on y incorporant les produits d'un travait de plus
en plus intense, elles en ont fait un phnomne social de
premire importance, un rouage essentiel de la vie collective.
Elles no peuvent plus se passer de lui, parce qu'elles ont mis
trop d'ettes-mmes en lui. Mais, ainsi entendu, il cesse d'tre
un fait purement gographique et peut, beaucoup plus juste-
ment, 6tre rattach il t'ordre moral, juridique, conomique.
Or, dans le cours de l'ouvrage, ce double aspect du territoire
n'est pas suffisammentdistingu et de l Natt parfois quetque
confusion. C'est ainsi que, ou un autre sens, on pourrait dire
tout aussi bien que les socits deviennent de plus en ptus
indpendantes du sol; car une technique ptus devetoppeoteur
permet de te transformer suivant leurs besoins tandis que,
dans te principe, elles en subissaient ta !o! au lieu de lui
imposer la leur.

MfXDHLKF)-
Th inauenoe
(//?M<'Kt'f <~f tMt'~CK
of gographie emvironnememt.
~f~t~Mf), in /<MffM < </tf <4Me<-t'<'
Ceo~M~Ax-f~ ;St''<y, vul. X\)X, n" t.
).'a))t).'))t'~)t)<)i<' )'i)))!u''th' du fiteteut' t!~of:t-ap))!((uus)u' )'m'~iu)i-
Mtion sociatc de ''et'toinfs (t'ihus indit'not's de i'A)n'hif)tt<' du Xord,
ttutamtncnt sm- tcut' systf-too t))yUn)tuj:iquc, ttt diiih'ibuticn d'' f:)
['uputMtiut), r!u\-)ntt'ctt))'c, etc.

f- t)K M.UtTO.\X)' Vie des peuples du Haut NU. HxpHeation


<)<- trois c.'n'k's itnttx'cpo-ogt-aj'hKtUMS. (;U)<t~ </<! ~t'a~/tt'f,
tM6 et tM')
Apcticattun mx' vacation parti<;u)K't'Mdes id';c:. de RatMt, auquel
t'auteor sf t'~fct'f fxpres~tOfnt.

Ht. QCESTtO~S <)t: )));Mf)),)<AP)))R

t'B. S. NtTTt. La population et le systme social. Edi-


tion franaise, in.8<, 376 pages. Paris, Ctard et Brire
(BiM. Sociologique Internationale), 1897.

Nitti n'abordo directementle problme de la population


M.
que dans la seconde partie de son livre (p. 114-2(!7). Dans la
premire (p. 9-H8), i! tudie les causes historiques des prin.
cipales doctrines sur la population. 11 se propose de montrer
< que la thorie n'est qu'un reflet de la ralit et que < tes
thories les plus abstraites se sont ressenties du milieu qui
les a vu nattre Par suite, aucune des doctrines dmogra-
phiques n'exprime objectivement lu vritable loi do la popu-
lation. Toutes sont troitement fondes sur t'tat momentan
des phnomnesdmographiques au tempset dans te pays o
elles apparaissent. Toutes sont influences par des prjugs
sociaux et ne sont, en somme, qu'un effort pour dfendre des
privilges de classe ou les attaquer. < Et le critique impartial
est frapp d'tonnementen s'apercevant que les mmes argu-
monts sont employs selon les poques il soutenir des causes
diffrentes.. Si, avant Matthus, l'optimisme est presque
gnral et l'abondance de lu population considre ordinai-
retnent comme un signe de prosprit, c'est que l'imperfec-
tion des connaissances gographiques faisait considrer
l'espace rserve l'humanit connue sans bornes; que la pr-
occupation principale du souverain tait d'avoir lu puissance
militaire, qui demande de nombreux soldats; et que, la sta-
tistique tant a peine ne et les communicationsdimcites, les
souvenuns les plus claires ne russissaient pas tablir une
proportion mme approximative entre les hommes et les
subsistances. Le pessimisme malthusien est expliqu par la
situation conomique et politique de l'Angleterre l'poque
de la nvolutiun et par tes prjuges sociaux de ta classe
laquelle appartenait Malthus. M. Nitti montre longuement
que l'M; ~</ <<' ~tc-~f (/<' la ~f~M~fw); fut une muvre de

conomique et
politique conservatrice, qui satisfit t'individuatisme efirne

ta l'excs numrique de la ctasse


ouvrire taient prsents comme le rsultat de son impr-
voyance, et l'indiffrence des riches ainsi que io maintien do
i~
des classes dirigeantes, en lui offrant une doctrine do fatalit

l'organisation capitaliste taient justifies. Apres Malthns


toutes les doctrines de la population out pour but de dfendre
ou d'attaquer la sienne. Selon que la population d'un pays
augmente considrablementou reste stationnaire, selon aussi
que les conomistes sont conservateurs et prennent les int-
rts de ta classe possdante, ou rformateurs et s'attachent
aux intrts des proltaires, ils sont malthusiens ou no le sont
pas. Dans t'Attemagne menace d'hypordmie, les tendances
malthusiennes ont gnralement prvalu. Seuls les socialistes,
et Marx en particulier, attaquent Malthus encore quelques-
uns d'entre eux subissent-ils son influence. En Angleterre, le
malthusianisme rgne presque sans conteste jusqu'en 1878,
et jusqu' cette poque la population s'accrot rapidement.
Depuis t878, le taux de la natalit s'abaisse et aussitt une
raction antimatthusienno se produit. En Franco enfin, o,
depuis ~840, la dpopulation devient menaante, malgr
l'opinitret avec laquelle les conomistes s'attachent aux
traditions orthodoxes, les thories de Maltitus sont d'abord
timidement modifies, puis violemment attaques et renies
par ceux mmes qui les avaient professes.
La critique de Malthus est la proccupation constante de
M. Nitti, et rien ne fera mieux comprendre son point de vue
propre que l'indication des principaux reproches qu'il fuit
Mattbus. La grande erreur de Malthus, c'est d'avoir cru que
la loi do la population tait une loi naturelle immuable.
rglant d'une manire ncessaire et universelle Je rapport de
la population aux subsistances, quelle que soit d'ailleurs
l'expression numrique do ce rapport. Or ta production des
subsistances d'une part, la ralit, la mortalit, la longvit
d'autre part, sont essentiellement des phnomnes sociaux,
et quand mme une loi naturelledu rapport do la population
aux subsistances pourrait tre formule, elle n'exprimerait
jamais qu'un rapport possible, toutidai, abstraction faite de
toutes les conditions sociales qui sont prpondrantes. Le
taux do la natalit u'est pas le m'hue dans toutes les socits,
ni dans tous les rangs de ta socit il dpend de conditions
sociales qu'on peut dterminer. Le taux de la production
dpend de l'tat de la technique industrielle, des conditions
du travail, de l'organisation conomique, etc. Enfin la quan-
tit des subsistances ncessaires chaque individu dpend
aussi de causes sociales le terme subsistances est un mot
indnni. Ce sont des facteurs sociaux qui font varier l'infini
le standard of tife On ne pourra donc formuler la loi de
la population qu'aprs avoir dtermin comment l'organisa-
tion sociale agit sur la natalit, sur la production, sur les
besoins. Par suite, te pessimisme dfinitif de Malthus est
absurde Il vient de cette illusion que !a lutte de l'amour et
de la faim est une ncessit naturelle qui se ralise dans tout
tat social donn; il repose sur ce prjug que l'organisation
sociale est immuable et doit ne pas changer. Par suite aussi,
le moral restraint, seut remde propos par Malthus, est
inapplicableet vain. Le taux de la natalit ne dpend pas des
volonts individuelles c'est un phnomne social qui dpend
de lois sociologiques. Pour agir sur lui, Il est ncessaire et il
sufnt d'agir sur les causes qui le conditionnant.
Antithse la doctrine de Matthus, la thorie de M. Nitti
est la synthse de thories adverses qu'il expose et recueille
au courant de son tude historique. Ce sont celles de Spencer,
de Marx et d'Achille Loria, de Guillard, d'Arsne Dumont.
Avec Spencer, M. Nitti admet que l'abondance de la popula-
tion dans le pass, stimulant le progrs, dtermine une indi-
vidualisation plus parfaite et limite en mme temps la fcon-
dit. Les forces prservatrices de chaque groupe animal sont
doubles, savoir l'aptitude de chaque individu s'adapter et
se conserver, et l'aptitude a reproduire d'autres individus
semblables & iui. < La gense constitue un procossus de dsin.
tegration et par consquent un processus contraire il celui de
l'intgration (individuelle). Donc, si nous runissons sous le
nom d'individualisation tous les actes qui compltent et sou-
tiennent la vie de l'individu et sous celui de gense tous ceux
qui servent & la formation ou au dveloppement d'individus
nouveaux, nous voyons que l'individualisation et la gense
sont ncessairementantagonistes. Cet antagonisme s'observe
dans toutes les espces animales. Mais, pour les socits
humaines, la thorie de Spencer est incomplte. Sa ici biolo-
gique n'agitqu'a travers le systme social, qui !a contrarie ou
ta favorise. Dans la socit, comme dans tout organisme, la
dinrenciation progressive et le perfectionnementdes parties
ne sont possibles que si ces parties deviennent en mme temps
plus troitement solidaires. On peut donc auirmer < qu'un
maximum d'individualisation ne sera possible que dans un
maximum de socialisation et que par le dveloppement
complet de la solidaritconomiqueet de ia solidarit morale.
Or le rgime capitaliste est essentiellement oppos a toute
solidarit conomique, et c'est pourquoi, ainsi que l'ont
dmontr Marx et Achiite Loria ie mode capitaliste de dis-
tribution des richesses dtermine ncessairement une trs
forte natatit dans la classe ouvrire et chez tes pauvres.
Comme ils tablissent aussi que ce mme rgime limite la
production, il devient ctair que le rapport de la population
aux subsistancesindiqu par Maithus est principalement le
produit d'un facteur conomique, le tnode de distribution des
richesses. C'est pour prouver cette thse que M. Nitti tudie
longuement les rapports de ta natalit et de la richesse et
recherche les motifsconomiqueset psychologiquesqui pous-
sent les pauvres a prolifrer abondamment. Acceptant lu
thorie de la capillarit sociale de M. Arsne Dumont, il
montre les individus faisant tous des efforts pour s'lever sur
i'chette sociale, pour amliorer leur condition conomique.
Mais, seuls, ceux qui possdent dj, les petits propritaires,
peuvent esprer s'tevcr ies proltaires sont condamns a

(tjUMtt'"UY''rft)c.<it)'<')''M.L<)t'itt.!im'<'u!<uj''t.t'<u))<M;s))a lui
mf'nx' ')axs fon livre vu), ift-it'. finit,
/'<'o~M)<MMft<<M.rt'{tH/<*mp<M'a)'M't
(imr'tt'mrX-n'.tM'r).
rester des salaris. De l l'extrme prudence des premiers,
qui procrentpeu pour viterla dpense et te partage de leurs
biens, et l'imprvoyance des seconds qui n'ont rien perdre
et esprent au contraire tirer prolit du travail des enfants.
La natalit est donc d'autant plus forte que la capittarit
sociale est plus faible, et comme la capillarit sociale n'agit
que dans la mesure ou l'individu peut prtendre amliorer
sa condition, it faut faire de t'orgauisatioa politique un des
facteurs de la loi de la population conditions gales, les
socits qui ont un rgime absotu, des classes ou des castes
fermes ont une natalit bien plus considrable que les
socits dmocratiques.
L'influence des facteurs moraux, moeurs, systmes de
morale, religions. est tudie par M. Kitti comme l'in-
fluence des facteurs conomique et politique, mMis d'une
manire beaucoup moins prcise. !t se contente, en somme,
de montrer qu'il y a des rapports entre la manire dont
varient les ides morales et celle dont varie la natalit. Le
manque de solidarit morale, l'individualisme cgotsto et le
pessimisme lui apparaissent comme des causes qui arrtent
la natalit et menacent certains pays do dpopulation.
En tenant compte de tous ces facteurs, M. Nitti formule
cette loi qui lui para!t scientifiquement inattaquable dans
toute socit o t'individuatit sera fortement dveloppe et
o le progrs de lit socialisation ne dtruira pas toute activit
Individuelle, dans toute socit o la richesse sera largement
subdivise et o les causes sociales d'ingalit seront limi-
nes grce une forme leve de coopration, la natalit
tendra s'quilibrer avec les subsistances et les variations
rythmiques de l'volution dmographique n'auront plus rien
d'enrayant pour l'humanit. a.
Le livre do M. Nitti est rempli de renseignements histori-
ques et bibliographiques. Comme on l'a vu, il tudie le pro.
bteme de ta population et critique les thories antrieures
un point de vue vraiment sociotogique. Cependant on y trouve
des propositions tranges dans la bouche d'un sociologue
L'homme primitif, lisons-nous (p. 243), n'tait ni retenu ni
gn par aucun lien social, il n'avait de devoirs u remplir ni
vis-a-vis do la famille, ni vis--vis de l'association. II tait un
tre absolument individualiste ou encore (p. iMt < le but
de <OM<~ les religions est de diriger t'ame vers une fin loin-
taine, le salut individuel Mais le plus grand dfaut <!e t'ou-
vrago est do manquer de prcision scientifique. reste une
synthse un peu confuse des ~ot'<M sur la population et n'eta
blit pas rigoureusement une loi inductive de la poputatioc
fonde sur une revue gnrale des faits connus. On a vu
combien )a formule Mnatc, dans laquelle t'aoteur s'exprimt
au futur, ressemble peu a Fenouce d'une loi scientifique.
Comme dans tout l'ouvrage, le probtemo pratique est cou
fondu avec le probieme sociologique. Il aurait fattu tablir
d'abord quelles sout les causes qui fout varier le chiffre de la
poputation et se demander ensuite quel taux d'accroissement
pouvait, dans une socit donne, un moment donne, tre
considr comme normal. Dans tout le cours de l'ouvrage,
c'est tantt t'accroissonent de la poputatioa, tantt ht dpo-
pulation qui est considre comme un danger et nous n'appre-
nons pas quoi se reconnatt une volution dmographique
qui n'a < rien d'etTrayant pour nnunantt6

OTTO SEECK. Die Statistik in der alten Gesohichte.


(La M<<~<<~Me <<<! f/<M<o<rp aMCi'cMKC.)
Junus BLOCH. Zur Bevlkerungsgesohiohte in J<!At'.
~c~fr ~' ~oHH/cf'JkoMOMx'c M~ S~~M~'A-, 3", Fotge, XIU,
Baud, p. ICI et 321, fvrier et mars !897. Icna, Fischer.
M. Seeck a engag une polmique avec M. Beloch au sujet
de l'application do la statistique a l'histoire ancienne. Il con-
teste que ta connaissanceque nous avons de t'antiquite puisse
nous permettreautre chose qu'une statistique conjecturale',
et il proteste coutre le creditqu'on accorde a cette prtendue
science depuis le livre de Betoch' dont tes conclusions, dit-il,
< menacent de devenir canoniques*. !t se propose donc de
montrer une bonne fois aux conomistes combiextesrsultats
obteuus sont peu certains et mme peu vraisembtabtes.
Ce que Seeck reproche surtout Beioeh, c'est l'arbitraire
et ia hardiesse excessive dans la critique et le rejet des textes.
L'histoire,dit-H, ne peut s'appuyer que sur les tmoignages
transmis. Ces tmoignages peuvent tre sans valeur et il faut

(t) ~M/ef-M< Bet<n!~e :<- ~ettiM'M))~/fA)'t. Lt'ijtzig, Dunker, t.


Die Bft'"Wft't<M.f/ der })'<ee/tM/<<Mh'tAeM U'eM. <8!)< L'auteur annonce
un<i iiffoHtb' j'artit. Cf. )':s aHh'tcs <)o Kttuttn) MMyfr tinr la t'o~M~a-
<foMaH~e ~tan~ )~at)</M)H<'<ef'AMt'//e)'S<tthM!me<M<'Aa/'<M, Il, p. tt3;
sur le livre <)'' Bt-toch (in /<t/t<-&Ne/t?< <)!MS. tX, p. 723;. Se<'<:){ triti'jUf
aussi t)'t! stttti~itjUM do Mans ))e)bru);k. Do' M~efmaHf~t MaM und
Staal. ft'reussMche Jtthrbddu'r, <)?<. p. tTS.)
alors les rejeter. Mais on ne doit le faire que pour des raisons
imprieuses, car quand on a rejet les tmoignages il ne reste
rien et nous sommes rduits l'ignorance. L'historien
moderne peut dmeier dans l'histoire de l'antiquit des rap.
ports de cause efet qu'ont mconnus les anciens. Il peut
donc redresser leur interprtation des faits, mais il doit leur
emprunter les faits eux-mmes, et il ne peut contester un
fait rapport par l'un d'eux qu'on s'appuyant sur te tmoi.
gnage d'un autre. Applique la question de la population,
cette mthode rigoureusement philosophique nous fournit des
donnes pauvres et fragmentaires, mais solides et qui seules
mritent confiance'. C'est prcisment cette mthode pure-
ment phiiotogique et forcment conservatrice que rejette
Betoch. On no peut, suivant lui, se contenter des donnes
statistiques que nous ont transmises les textes. H faut les
rapprocher les unes des autres et en tirer une statistique
gnrale do la population do l'antiquit, en Grce et Rome.
Car on ne peut se soustraire a l'obligation de se faire une
opinion sur la grandeuret te mouvement de la population dans
J'antiquit. Que peut ctro l'histoire de la guerre si l'on ignore
la force des armes? Comment parler de la situation cono-
mique d'Athnes au temps de PericJs, tant qu'on ne sait pas
si la ville comptait 10.000 habitants ou en comptait t .O00.(j00.
Et qui objecte que ces deux chiffres sont absurdes, montre
seulement qu'il s'est fait, inconsciemment et
sans mthode,
une opinion vague sur la population athnienne. Or une
opinion sur la population, quelque confuse qu'elle soit, ne
peut tre exprime qu'en chiitres. C'est se teurrer soi-mme
que de croire chapper a cette ncessit. Toute opinion sur la
population doit s'exprimer par deux chiffres donnant le
maximum et le minimum possibles, et d'autant plus rappro-
chs que les chances d'erreur sont mieux limines. 'Les
rsultats ainsi obtenus sont videmment approximatifs, mais
Infiniment plus prcis que les opinions incertaines dissimu-
les sous les mots.
< D'une manire gnrale, dit Beloch, je n'ai jamais eu
l'ide de prsenter les chiures que je donne dans mon livre
comme absolumentexacts. Mon but principal tait de donner

Il) Sccck tfnvuie & son )h)f <:M<'AtfA/edes (~/<M-~<M~ der <M~hM)
tV<-. et & P<)t))tt)ann. Die <f&<t-t-et-MHf/ <~)' ott~es Ct-oMM<<- (Pr~.
fchrinen der Jabtowiski'Mhen (iMeUschaft, XXtV).
la recherche une base solide, en tablissant les chiffres
minima vraisembhtbtes. Ses valuations sont, d'une ma-
nire gnrale, intrieures aux vatuationa traditionnelles,
notamment eu ce qui concerne Je nombre des esclaves eu
Grce et a Home, lu poputntion tutato de lu Grce au V et
au tY sicle, et celle do ia Home impriale. Cetoch los consi-
dre connue tes rsultats conomiquesles plus importants de
sou travail. Pour les obtenir, il ne croit pas devoir se cou-
tenter, commo Seeck, des tmoignageshistoriques.Les donnes
numriquessout, plus que tous les autres textes, exposes aux
injures du temps, et ni la grammaire ni le contexte ne
permettentde rtablir les vmies leons. En outre pende gens,
mme aujourd'hui, out te sens du ce que signifient les chiltres;
les valuations personnelles des historiens n'ont qu'une hubtc
valeur et veulent tre contrles. Cr ce contrle ne peut se
faire que par d'abondantes comparaisons, tt ne faut pas,
comme te fait Seeck, tudier deux ou trois passages distincts
et montrer que, pour chacun d'eux, une autre opinion que
celle de Beioch peut tre dfendue. Il faut, eu usant de !a
totalit des matriaux runis pour ta premire fois parMoch.
construire comme lui un systme total et bien tic de ia popu.
lation antique. Alors on pourra, on rapprochant les cons-
quences qui dcoulent d'affirmations parses dans les histo-
riens, contrler les aMnnations eites-tMemeset les rejeter s'il
y a iieu. Si l'lie d'gine avait disparu, et que nous n'eussions,
sur l'tat conomique de ia Grce, que le tmoignage
d'Athne, nous serions forcs d'admettre avec lui qu'il yavait
gine 47U.OOO esclaves. Au contraire notre connaissance de
t'He et du rapport de la population servite lu population
libre nous permet de rejeter ce chiure comme absurde.
Il faut aussi, selou Beloch, arriver donner aux chiffres un
sens concret et se reprsenter ctuirentcnt les tats histo-
riques. Les philologues s'attachent aux mots et non aux
choses. Ils prouveront, d'aprs les textes, que Rome avait
plusieurs millions d'habitants, et ne s'apercevront pas que ce
ehinre, tant donne la superficie de la ville, est absolument
inacceptable. La population d'un pays donn, dans un temps
donn, est le produit des facteurs conomiques et historiques
et nous pourrions la connaitre uniquement par te calcul si
nous avions une pleine connaissance de ces facteurs. Nous no
t'avons videmment pas. Nous partons donc d'une srie de
donnes positives, mais nous en savons assez sur les diu-
rents tats conomiques de l'antiquit pour combler les
lacunes de la tradition. D'ailleurs, )MffM K<xfM(< nous
agissons exactementde la mmo manire pour les autres par.
ties de l'histoire antique. Et ta statistique historique a sur les
autres parties ce double avantage, d'abord que les phnu
mnes dmographiques varient suivant des lois plus rgu
lires et plus simples que tes autres phnomnes, et en outre
qu'ils chappent & l'influence obscure des facteurs psycholo-
giques que l'histoire ne peut liminer.
On trouvera dans les deux articles d'o se dgagent ces
ides gnrtes, d'intressantesdiscussions sur la population
d'Egypte d'aprs Uiodoreetd'aprsJosphe,suria pcpuiatiou
totale de ta pninsule grecque, surle chinre et la composition
de ia population athnienne au v. sicle d'aprs Thucydide,
sur la densit de la population Rome l'poque impriale.
sur le nombre des esclaves par rapport ta population totale.
Les nombres relatifs lu population que nous transmettent
les textes ne s'appliquent ordinairement qu'aux hommes
faits, susceptibles do payer l'impt et de porter les armes. 11
est donc ncessaire de les multiplier par un certain coefficient
pour obtenir le chinre de lu population totale. Beloch pro-
pose et dfend le coefficient! qui suppose l'galit numrique
(tes sexes, et le nombre des garons au-dessous de dix-sept
ans gal la moiti du nombre des hommes faits, soit il !?
p. MO de la population masculine totale.
Pour les esclaves, Betoch pense avoir ruin l'ancien dogme
fond sur les textes d'Athne, qui considrait la population
serviiecomme formant plus de la moiti de la population totale.
Il dmontrequ'il ne peut pas, beaucoup prs, y avoir eu
Athnes 400.000 esclaves au temps de Dmtrius do Phalre;
que le nombre des esclaves domestiques en Grce tait trs
faible, et qu'il existait seulement de grandes masses d'es-
claves dans les villes industrielles;qu'a Rome, ville indus
trielle sans importance, le nombre des esclaves ue peut avoir
dpass a l'poque impriale 200.000 ou 300.000, et qu'il fut
trs probablement beaucoup moindre.
Pour la population totale de Home au t'~ sicle, Beloch
donne t .000.000 d'habitants comme le chifre le plus lev
qu'on puisse admettre. Il justifie ce chiffre par des raisonne-
ments trs ingnieux sur la densit possible de la population
dans tes quartiers pauvres. Tous ces chiffres, donns seule-
ment comme vraisemblables, prsentent au point de vue
eociotogique un intrt beaucoup plus vit que la critique
toute ngative de Seeck.
I~ft FAucoNXKT.

LEt<)t)J!~.HKM).:t.~)~:j'()t'H.A'f)')X
i)' JACQ. BERTILLON. De la dpopulation de la France
et des remdes & y apporter. Broc))., Ber~er-Levrautt,
Xancy,;t896. Le problme de la dpopulation. Broch.,
Armand Colin, Paris, )8U7.

M. DAGAPt. Un aspect de la dpopulation (V~cw


Mtf~/tf/Mc et de H)ora<< mars 1897).
D. PAROD. A propos de la dpopulation (/&< mai
)8;n).
D' J. BEUTILLOX. La puriculture (~frMc <fA~<~)c, avrit
~97). Alliance nationale pour l'accroissementde
la population franaise, programmes et statuts, exercice
)89().
H. LEVASSEUR. La dpopulation de la France (/h-r.
~o~t~Mp ~pW<'M!e~<)'<-< )0 octobre Ht'n).

P. LEROY-HEAULtEU. La question de la population et


la civilisation dmocratique (/<<'ct' </M /)<'t< Ilondes,
tS octobre '!?').
Sans que les nombreux articles parus cette anne sur
)a depoputatiou aient chaogc la position de ht question,
et bien qu'ils soient presque tous, comme il tait naturel,
orients vers ta pratique, ils auront contribu sans doute
mettre mieux en lumire et ia nature scientifique du problme
et l'espce de sotutions qu'il comporte. Ainsi M. Bertillon,
dans ses articles et ses brochures si documents, reconnatt que
tous ceux qui ont voulu en donner des explications sim-
plistes, soit mdicales, soit conomiques, se sont tromps; et,
en accordant que le degr des croyances religieuses peut
exercer quelque influence sur le chitre de la population, Il
est bien prs d'accorder que les phnomnes dmographiques
tiennent un tat social tout entier. Pour lui cependant
il y a une cause infiniment plus Importante que les autres et
plus ou moins contingente, qui faitdotadpoputation un mai
essentiellementfranais, et qu'il s'est donn la tacbe de corn'
battre eu fondant t'~MHc<' )tf<<<OH<!<c pour <'f'<;<'o)'M<'M)fn~ ~f
~Mpx~t'Mi /t'n~<Mp c'est < )a proccupation de la fortune
conserver < partout o cette proccupation disparat. )a
natalit prend un essor considrable (exemples frappants
de ta petite commune de Fort-Mardick et du Canada); plus
elle est vivo et plus le taux de la natalit est faibte (compa-
raison des dpartements les plus riches au point de vue agri-
-cote et des plus pauvres; comparaison des divers arrondis-
sements de Paris); et si c'est en Franco qu'elle nuit le plus
l'accroissementde !a population, c'est que la France est plus
qu'aucun autre un pays de petits propritaires. Aussi ne fau<
drait-it pas que le nombre des enfants fut une < ruine pour
les familles et sans rechuner une refonte compltedu Code
civil, M. Hertitiot) demande l'urgence pour un p)an de
rforme fiscale relativement )nnder6 ii pose en principe que
le fait d'lever un enfant doit ~tro considre comme une
des formes de l'impt, et que, pour que cet impt soit
acquitt par une famille, ii faut qu'elle lve au moins trois
enfants, les deux premiers ne faisant que remplacer les
parents, et le calcul des probabiiits montrant que, sur trois,
il y en aura au moins un qui mourra avant de s'tre repro-
duit De l l'ide d'tablir comme une cheUe fiscale pro-
gressive pour les familles ayant moins de trois enfants,
rgressive pour celles ayant plus de trois enfants.
Deux objections s'imposent l'examen de cette tbese, si
large qu'en soit la part de vrit d'abord, en faisant de la
proccupation de fortune ia cause capitale de la dpopulation,
l'auteur ne peut plus expliquer, et que le mme phnomne
ne se produise pas d'une manire identique dans tous les
pays rgis par le Code Napolon et soumis au mme rgime
de proprit et d'hritage, et qu'il paraisse se dessiner, bien
qu' des degrs divers, dans tous tes pays d'Europe. Sans
compter que, ne se demandant pas comment, quelles con-
ditions et dans quel milieu une telle cause peut amener un
pareil etet, il en arrive fonder les lois dmographiques sur
la seule statistique, et ainsi a tes concevoir la fois comme
tout empiriques ou inintelligibles en soi, et comme rigides et
absolues.
C'est le sentiment de ces difficults qui semble avoir motiv
deux rponses toutes rcentes et assez vives de ton.
(te M. Levasseur n'onre pas, vrai dire, un grand intrt
Celle

scientifique d'abord parce qu'il y reuvoie trop souvent


ses dmonstrationsantrieures, mais surtout parce qu'il porte
la question sur le terrain, non seulement pratique, mais
mme politique. C'est aux remdes de M. Bertillon qu'il en
veut; et, aprs avoir t'appel que le taux de la natalit
n'tait pas plus iev en France au sicle dernier que de nos
jours, il prend la dfense des droits de l'individu "qu'attein-
drait tout essai lgislatif pour dcharger les familles nom-
breuses ou surtaxer les clibataires, et dnonce les dangers
de toute mesure qui, par ses tendances socialistes, pousserait
4 c Immigration des capitaux mobiliers I) reproche son
adversaire de ne pas admettre la rsignation < On me
<lira Vous tes des impuissants qui abandonnez le malade
~a nature. Je me permets de rpondre que c'est quelquefois le
'parti que prennent de bons mdecins et qu'il y a des malades
qui gurissentainsi.
D'une porte plus haute est l'tude de M. Leroy-Reautieu
aprs un intressant historique de ia question depuis Malthus,
Fauteur essaie d'tablir que les causes de la dpopulation
<ontplus profondes et plus gnrales encore que ne le suppose
M. Bertillon. !)e ce que le taux de la natalit dcrot partout
en Europe depuis un quart de sicie, sauf en Russie et dans
les tats mridionaux, et surtout en Angleterre et aux
tats Unis, il conclut qu'il faut l'attribuer au mouvement qui
entrane tout notre monde occidental a la dcadence des
ides religieuses,a la conception nouvelle de la famille, au
fminisme, l'instruction gnralise. & t'effort des classes
pour s'lever dans la hirarchie sociale, au retard dans le
mariage et l'ge plus avanc des poux. En d'autres termes,
la vraie cause, c'est que, dans tous les rangs de la popula-
tion aujourd'hui ou dsire ardemment que, d'une gnration
a l'autre, la famille s'lve sur l'chette sociale en d'autres
termes encore, c'esUedvGtoppementdel'esprit dmocratique.
D'o il suit que toutes les mesures lgales ne pourront tre
que des palliatifs, et qu'un relvement de la natalit ne
saurait venir que de l'action nergique de causes morales
modifiant notre conception de la famille Nous ne repro-
cherons cette tude (d'ailleurs un peu dinuse) qu'une certaine
allure de polmique et comme un soupon de parti pris poli-
tique le terme de dmocratien'est-il pas quivoque en effet?
H'a-t'it pas t'air ()o .endre un rgime particutter, et plus ou
moins contingent, responsable d'un phnomne, qu'on peut
combattre sans doute, mais qui n'en est pas moins lia suite
naturelle d'un mouvement ncessaire et (atat. ()n progrs

mtne <)e lit prvoyftttce et <)e ta civitisotion? II n'en reste
pas moins que le caractreavant tout moral et l'extrme com-
plexit de la question apparaissent ici plus nettement que
partout ailleurs
C'est aussi ce qu'a contribu a mettre en plein ro!iet,
croyons nous. une polmique souleve dans ia 7<('<'(' (~ xt~-
phf/jttf/Mf <'f ~<' MM)Y<<f. Mat satisfait par toutes les expticntions
actuelles du problme, un conomiste de l'cole positive et
matenaHsto, M. !)agan, leur reproche toutes de s'arrctet'
des raisons morales, c'est--dire, car pour lui les deux choses
n'en font qu'une, non scientifiques. Tant qu'on n'aurn pas
considr le phnomne conomique de la dpopulation
comme t'enet tout fatal d'uue cause strictement conomique
etie-mtne, c'cst-a-dire mcanique, on n'aura pas {ait uvre
srieuse. Pour c!aircir)a question, it sutUra d'aiiteurs, selon
M. Dagat), de ne pas chercher une loi fixe et unique de la
dpopulation, une loi s'appliquant a toutes tes classes, mais
de reconnattrequ'il peut y avoir autant de lois diverses qu'il y
a de milieux sociaux diftrents. Se fondant sur des statis-
tiques anglaises rcentes, il croit mme pouvoir {ormuter
cette loi pourla classe ouvrire: < L'apparition do t'industrie
des manufactures accroit le nombre des travailleurs par
suite, toute famille nombreuseaugmente ses chances de bien-
tre, et ta population augmente; paraissent au contraire les
machines, et la diminution de la main-d'muvre, le nombre
plus grand des ouvriers inemploys, ta substitution dans les
ateliers des femmes aux hommes ont pour rsultat forc la
diminution de ta natalit et ta dpopulation. !t en rsulte
que toute tentative pour arrter ce mouvement fatal est vaine
et chimrique. Ainsi, si les thories de la dpopulation
paraissent souvent errones ou superficielles, c'est parce
qu'elles sont mal poses, tt en sera toujours ainsi tant que
les dmographes continueront d'envisager le problme du
point de vue abstrait de la nation (?). Pour le momeut, tes
groupes sociaux demeurent le critre vrai.
On a essay, en rpondant& M. I)agan, de mettre en lumire
te vice de sa mthode et l'arbitraire de ses conclusions.
L'conome politique ou la dmographie, sciences complexes,
loin de vouloir s'isoler de toute autre, doivent emprunter
sans cesse leurs cxptieatious aux sciences ptus simples
qu'eUos supposent avant ettes. Un tait coaomiquo ne peut
jamais eu enet rsulter directement d'une cause conomique
celle-ci ne peut agir que par des iutermdiaires, ou mca.
niques ou psychotoniques. C'est ce que Stuart-Miii reconnais-
sait dj iorsqu'it crivait Quelle que soit l'action que
d'autres causes puissent exercer sur les phnomnes sociaux,
elles ne l'exercent que par l'intermdiaire do lois psychoto-
niques. On ne pourra dterminer d'une faon dmoustra-
tive les raisons de la dpopulation qu'en cherchant les facteurs
psychologiques immdiats qui peuvent y pousser et l'on
reconnatra alors qu'elle suppose le concours de plus d'une
condition < Les causes conomiques n'agissent qu'en tant
qu'elles fournissent aux hommesdes motifs de se dterminer
en tel sens ou en tel autre. De ce point de vue, la dpo-
pulatiou apparat comme supposant trois conditions au moins,
dont l'absence d'une seule peut empcher le phnomnede
se produire t" comme elle implique ia subordinationd'un
instiuct naturel des considrations d'ordre intellectuel,
il faut que l'ide en soit fournie par l'imitation des hautes
classes. elles-mmes ia fois corrompues et rflchies et
cette ide, pour tre comprise et adopte, exige encore et la
facilite des communications, et un minimum de rflexion,
en un mot une civilisation assez avance il faut encore
une raison d'adopter cette ide et de s'imposer cette
rflexion, et cette raison pourru tre de nature trs diverse
suivant les classes ou les lieux pauvret, apprhension
goste des soins qu'exigentles enfants, peur de dmembrer
le bien patrimonial. etc.; M" il faut enfin que fassent dfaut
le!: raisons contraires, quemanquentpar exempletescroyauces
morales ou religieuses, ou peut-tre aussi les mesures lgis-
latives encourageant la procration. !) suit de la que
M. DaganetM. Hertitton peuvent avoir raison la fois; mais
que ni la pauvret ni l'intrt ou les vices de la lgislation
ne pourraient agir dans ce sens si. la corruption des murs
et l'absence d'uue discipline morale ne leur laissaient le
champ libre.
Malgr des divergences partielles, la mme conclusion se
trouve ainsi sous la plume de M. Bertillon et de M. Levasseur
ou de M. Leroy-Beaulieu; et c'est elle encore qui rsulte de
l'examen critique des ides de M. Dagan la dpopulation a des
causes essentielle ment humaines, c'est.-dlre morales, et l'on
peut des maintenant considrer ce point comme acquis. Et
c'est chose acquise aussi, croyons-Hous. et qui ressort de la
diversit mme des solutions proposes, qu'un mouvement
dmographique de cet ordre tient tout uu tat social,
qu'on ne saurait le considrer comme l'effet direct d'une
cause simple. Ce qui revient a dire encore que les statistiques
ne peuvent tre pour le sociologue, conune du reste l'obser-
vation pour tout savant, qu'un point d'appui, et plus tard
une pierre de touche pour ses analyses, ses hypothses, ses
inductions ou ses dductions, tous mots qut ne dsignent que
des aspects d'un mme processus intellectuel, celui par
lequel ou comprend, on explique et ou dmontre.
J). PAMO!.
TAHLE DES MATIERES

t'ttt'MCK. PRMtH PARTIE

MMOIRES ORIGINAUX

LoproMM)onde<'<noe<teetM<of~fnes.p:u'E.DL-K)msM.. t
~U.Comment<es~o''mesMCM<MMm~nt<ennen<,tm)-G.StMn)!t. t
T!<

DUXtME PARTIE

ANALYSESET NOTICES BIBLIOGRAPHIQUES

t'HHMH~KE SHCTt)!.

tn(ti[M)a<'tt"n. SocMtogM gn~Mte, pat- M. Boctj~.


Ht

<}.

P.
tontmircs.
TAnt'K.
1. SOCtOMGtB C)))MSO['))tUUE

L'Opposition antvtMeHe. K~sai 't'uno th<?ri'' des

BtttfM. Die PhUe<ep)'iederCeMMchte ta Sociologie


)us<)p))i''()t't')))!!tu)rt't)upu)atde\'Ut'i!'M'mtuxiqaK)
~t Phi.
<)*'
<S3
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FutiC): MttKST.MO. La Bet~XM BMMe
Vtcitts. La Mience eedate d'apte* tM principee de Le Hty t~
nMo~'iR. .tSeeMegte &Mg. par Comte.
ST~oT.Mtt.t.. L< tegiqM dM BctenMt <ocMe* (tr<n)u<-tionBctot). tSS
t~ '<~

)). socMMOE mnf.ontttL'E

Nevteow. CoMetence et vttMM tMtttet <i!"

Mete~eetMeic~e.
U)!Mo. MAssAM <'t YAXNERVtLBE. L'EvetatiM regMe<!ve ea
03
m~
StXMtt..
cenMpto de erganhmo eootat (t.
<'ej)td'urt!ttni.<mfsm'iM)'
StXT.tttAM*DE P.tRKt'Ks. Et

t)t. SOCtOLOfitH f'SYC)tOLO(i)uU)-: n' St'tOF~t'


GtBt))fos. Tha pr!ae!pte< of Soeicto~y <t'rinei))c< de iiut'tuto~t'
Supertority and Subordination (Sup~t'iot-ih' et suhonti-
(_Bnu6t.e.Qa'9Bt-MquettSoctetogte?.
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UrottdfMut, Uuddtin, Wuudthttrpp,
AMqaa. Jottniiton.Wouk',Connoh,

Atte <eptent)'iona!e.
Moheft~un,

t'rict)~. Oeamte. Stci)))Mi':h,

Stfnivnctii. Wint))! Stt'Min. St'rofhfw~k!,


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Urutie

Stiudtt.
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Sarvivtoeet de* religions primitives chM les civiliss. )':MtiH(t.
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189
189

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M7
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Riddor
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209
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Bud~tjttt-fiett.
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NOTtOm MYBtM&S SLH Ui~ <t(tA\t')~ )tHt.tGtUSS EX ti~t.ttA)

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Manjuart, )tat'aMk. Friedtu'nd<'r. Manuno.
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Bthlk
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GrandtQxe der wt<Ben<oha!t!ichen und tMhntechea
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!Ba!i<:i! d'un'' '?t))it)Uf i't'icMtHttjUt; et
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Socit et mentJe
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BMi<t.<
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H. &Tt;t))!S OMECTtYtBSCK LE!! MUiUHS (par M.

\')M);At:M. NttotMBtJterund Kutto)'vet)[e)'(t'KM)))<'<ptnnitihet


s_ peMptM
Hx.oexMiiu. Reeht and Sitte et dee veMcMedenenwiftachatt.
lichen MtNMtnten (t~)! )t)'a~ <'( )<' droit xm ttitKtThtc~ nhttsM
')e)'t'<'u)t)))OHt'('u))t))ui<jU'). M5
UMM).- ta Morale prttiea degli aaticM MMtfeaoUMt.tuh- pMti'juu
df!'<tHci<'n'tMt)):it'tt)))!!). 30~
t'~t.tTMMKt!. Ethooor(tph:e Nordeet.Atf!)M<.DieCehtt~ Cuttur
derC<tM)tH,t'tf.[L)tcuHut't!)uum<dt'iUatMk!)!<t<). 30!)

)t). LA t'AMUlt! (jar M. )h-m)t)tM).

etc.
KoMt.M. lur Ot~eMhiehte der Ehe. Totemitmttt. Orappeaehe,
mutterMeht (Cuntdhutiuf) A )')))<h)iM pt'hoitiv du m)H-i<txe 3U);
(ioss(;. D~rwmender FMaUteuaddteFormea dtrWirKchttt
(Lt'K fufmf< (t)i );t fftfttiHf c) )t..< t'm'ou'ft )k' )'ttrti\-it<! ~Kunt~tti'jm').
atU
.LM!fr. Att.AtiMhM Jet eMte. Attttu.ifung (t)t-it eh-it uriHtittf

iwrbo).
tMnS les 6U<;it'tt.!< MfycMH<) 333
la
MuttKT. La condition des
socit,
MtttUt en Egypte, dans la famille, daae
ActMovtc. CebaMicbt dee MrMaohen EfbMchtt 'Atw)~M <))) th~U
S3g
)!u<'re<orat tgM
Mtnsft. Die HaaMMaatun~n der Sfidslaven (La
'tuomittujue fhc!! tc'.< StttVM du Sud cM)ttou)Mutt-
x~

eh:
)V. t.KMmOtt<pMM.))t<.M.t).).

~u
tMMmt..emar!<tee<p)rtttetlnvM:OM.
t'ttttifMtOM. ramUieMtntta and Bhetennen (Ty[M'< de fmnUte
ft fu)Htt'!i de ttt<tt'Mffe) 3t3
~Atttff. Meo-che tagU uai nMMt ne! mdia ev in Sicitit
(L.<)t);MMM~MU.'[')t')ttSM)t'nu))tuyctt&)~ !)t!,
'ScHot.tiOtt'ao. Die Spnren des BrMtMMtee, ''<< (TtaM'it du tut-
j rt<tgc [))n' t-t~t. ~M

V.
'J
U t'tXE ()w M. thMM.t.).

'iusTHM.-DietdMdar WiedtrvergBttune!n der Se<eh:c!tte.).


(L'Mt''Md't:):piati'M)d)in<)')ti.<tuin'.t')t-.). a~
~.Sttt.M. Studien dam Stfatreeth,
tM (Htudcii etc. de <)ruit p<?))o); 3St
M*m. dreit pAnat
La reMa~e et tM oftgiMe du 3:a

\). [.'Ot<(!.tXhMTtO:< SOC)A). !)Ktf M. tXM.t.x,.

't'vittagcdamt'fnA').
B~MM-t'owm.t.. Th Indien VUttge Cemmmtity(Ls c<MuMontmt<!

MMmUe.
Jom~HuvAt.. La Mmmane
3S9
3)Kt
~KoYAU~'Mf.
le~aMmeda ctMt dans le paya de GaUee. 3tt6
V)t.-LECKO)TP<'ROWUT6()MM.)-t.'tt).

~ypUen.
t'ffuu.
Mnt.Lour.-taproprMM en droit :'6T
Cu~ Die Mtiate VerttMMng dee n)tare:chet Bine Unterau.
chxng dM attperaaniMhen aBrarkommunbmMe (t.~ coHttnu.
nwfttttruire dauit'titKien ~tt
MAt'MX. Etntettung sur CMehichte der Mark-Hot-Dertund Stadt
VerttMung ''t' (ft)tfudm'tiu)i t'histuiM d'; t(t'rMM-hp. ()u vittaf~,
de ta ville, <!(<) ~:<
BATTAau*. L'ordinamento dette pt~prieta fcnd~Wa neM' ttatta
!<<'t'M'unds,tc.).
moridionale, ete. (La pn'prMt'' funcicM dans t'tttttie tn'mtiona)c
sous )(.
BATr*o).M.

Sicih').
[/evetM!one looiale in rapporto alla proprieta ton-
diaria in SieiUa (L'Hvu)utiun <u<ia)c
prprK'(<i fun''i''t'<; t'M
d~n<: '!e!, M)t))ur~ ave la

V))). MVKKS (pu HM. MMM. )hM' '-t E. Un).


Juu.Y. Recht und Sitte im OrandriM der tndhchen. Philologie. :K'4

Koat-M. Rechte der UrvoettMrNerdAtatriJfae. KoHLM. Reehte


der Auetretneger. TAMAM~. H Dharna in Germania ed in
Orecia. -UwsAKov. DAUteet oontMtB. LEseoxA.Doveri sociali. :M7

QL'A't'Rt~ME SECTtOX. SocMo~e criminelle (pat' M. HtcM.utH).

\AvcrtiMCtt)'nt.
). LA STA'nSTtUC MOKALH

Boscu. t.'0mtc:dte neati SM Ututt. (L'hotuicu~-auxKttHs-L'ni!'). 395


cetmMHM.jhajmipM~- 3vi
'T<~MMM?I.~meeaotea dea mieraziene et ta criminaMta (L"
t))<'cMis))tt!dc)'etnig'i)imteU<t<'t-int)Mtit)'.).t'M

n.

A.
~<
).'A!)T)tKOPOLOC)ECR)MtXE).).E

te C<'<Mt< et les ~afM.

CoMttB. L'Ethnegraphit cr!m:neUe t07


FMMHo. La Morale primitiva
e mo- t'ataTiome del deMtte (La
Mepfin)itivc<'t)'atavift!ne<'nd';tit). H7
Ktj)h').
)).t'f<c~<')'!t/~'<<M<'<'<f/frff')<

t')!tt!t)A!t). MtnorenniDe)taqMoM.Ut'Hn')Mant<)))it)''utA) tt!)


MoM!tOx.Jnv9nUeOffM<terB(Jcun)'t'rimi[n')<). 4M
CtMot.o t~'t'iKTT. DeMtU feminili a Nopoli (tM)i~ t.-t.tini)~ &

A)tt)< Criminalit pMtM'!enae!i9. t30

detact'imtnaMM.
M3
LKUttAtx.
Consquencessociales de MeMMMM au point de vue
M&

<o)'M)M~t'm<m<j'M</('/<7.

t'MBtAs et CtVAut.ts<t. t
Vag~boedi (L'-s vm;'t)'t!') t3T
StuM):).)!. LtdettnqMNMMttMia (Ltt t'ritniMtit'' ')' scctt's; tti
f'~xMAft. DetinqMeatt<eattr! e fortuatti (La <Ti<))i)ta)it'? w'u]t<). 4M

t).t'M<'jjf<'<.

){t)u)ct!tonf)in){")t'').
Stu).As. Et deUncuenteetpanot. El tenguage (Le crixtiot') t'i.ptt-
,X)Ct!)'o)to.U(;er9o.<t<(t/ttr)<)).
44~
4t&

H. (<HM<tOM f~tO't'f*.
h'~MtttiMo ft Kx.MEt.E. Croatche o'tmtaaHtttMane ((;htf)tti<j<n'~ <-)i-
Ht))))'))?!) itu)icnt)t's) <tT
Ff:KM. Lea Criminels dans l'art 4M
)tAHKit.tG!:E.
SttjtmttM anttomtquet de la criminalit 4M
SUgmttM biologiques et tecteto~Mee. 4M
TMorte* de la M-tmtMtitt 450

C~QUtME SKCT!OX. Sociologie conomique.

~tntrodttetion. ). TOJtOKtE~ f:a)XOMtU):ESont M. S.).


<S7

A. Mt~K)' el / M)M< </<* la t'a<e<\

BxMM). La legge dtt Vatere Meendo la dottriM detta UtUtta


Mmite (t~ loi <)f ) tntcu)- ~t'ho) la <)o<-tr!ne de t'uU)itf titoitc).. <S8
V. Buct). !nteMitMtder Arbeit. Wert und Pr!* der WarM (ht-
(eniiitM du <mvni). \'a)ettr et jx-ix <h'a ))Mf<:))an')hci<) 4M

)ava)t!Ufet<)uj)ri![).
YtXKtCKE. Der objective Wert und Pfeia (t/c)'-tnt'nt objectif de
M7
Vtt)''ur).
STo~MAf). -DteeMiate Rteltn derVothBwtrttchattttehre (La
<:dt~){0)'i)'.<neiith't)!itt<tu''<it'tn't;dt't't~'()m)t)tk')'t)))M'ti\'t').tM
Bomons. -Lametnredetavateurettamcantie. t?n
KutESt'Et.s. System der Wertthoorie (Sy';tt')t)t' df h th~uri'' 'h* ht
Mu

tt. .Su<;</M<'< .W'Mf<' t'CUMOMtf'/M.

KtcnAM. Le socialisme et la acienee


i))!)nx);A. Die Probleme der menBchtchen
WirtMhttt
Bcctab. tttS

)))'ntc<<)''i')ttt)tnit.')uunuim'). t"'u. ([~~


t8)i

< t'/tf cut)<'f/</f0 /<u<'<c '/<* /('ftf<atMt<'m('fn<f.

historitjUt').
ST~MLEH.
ohichttaMtfaMMng
WtrtMhaft und Reoht nach der mateHtMtUechenGeB-
~n'n)))'' <'t '))'")) tt'MjWs )'' )t)at''ntt)i'!tn''
it)8

t). ~f'tf<
La funaione economica nella vtta poUtico
Mt!t.t.M). ton' tiun
'omm)i<)m'dttM.)<i\'ifp'<)ith)U' ~La
W7

Hmtcux.
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Problme d'conomie politique et de statistique
t'K(
4U9
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M9
WMMtti)!. SyBtem der nationalen SchutitpoUtittnach aMBen
~y.<K'))'<t<'ftttmnti<)M''j)t'tc<'ttunni!'t''). KM

t). ).!M 'JKOt't'KMKXTS)')<OF)iSStO~E).S(t.<u.))..A.Mtuttt).).


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