Polaf 129 0023
Polaf 129 0023
Polaf 129 0023
du gouvernement de transition
Jason Stearns, Traduction Raphaël Botiveau
Dans Politique africaine 2013/1 (N° 129), pages 23 à 48
Éditions Karthala
ISSN 0244-7827
ISBN 9782811109196
DOI 10.3917/polaf.129.0023
© Karthala | Téléchargé le 11/02/2024 sur www.cairn.info (IP: 212.195.33.117)
Jason Stearns
1. D. Kalinaki, « We Have Had Two Decades of War in Congo, How About we Try Some Love ? »,
The Daily Monitor, 2 août 2012.
2. Les entretiens ont été réalisés de mars à décembre 2012, aux Nord et Sud-Kivu, dans le cadre du
Projet Usalama, initiative de recherche du Rift Valley Institute sur les groupes armés dans l’Est
du Congo.
Politique africaine
25 Repenser la crise au Kivu
3. Une évaluation des durées des guerres civiles dans 52 pays place la moyenne à sept ans. P. Collier,
A. Hoeffler et M. Söderbom, « On the Duration of Civil War », Journal of Peace Research, vol. 41, n° 3,
mai 2004, p. 253-273.
4. Internal Displacement Monitoring Centre, « Democratic Republic of The Congo : IDPs Need
Further Assistance in Context of Continued Attacks and Insecurity », <www.internal-displacement.
org/countries/drcongo>, consulté le 9 mars 2013.
5. D. Tull, « A Reconfiguration of Political Order ? The State of the State in North Kivu », African Affairs,
vol. 102, n° 408, 2003, p. 429-446 ; T. Raeymaekers, The Power of Protection : Governance and Transborder
Trade on the Congo-Ugandan Border, thèse de doctorat en science politique, Université de Gand, 2007 ;
T. Raeymaekers, « Why History Repeats Itself in the Eastern Congo », e-International Relations, 20
décembre 2012, <www.e-ir.info/2012/12/20/why-history-repeats-itself-in-eastern-dr-congo/>, con-
sulté le 8 février 2013 ; P. Englebert, « Why Congo Persists : Sovereignty, Globalization, and the Violent
Reproduction of a Weak State », Queen Elisabeth House Working Paper, n° 95, février 2003.
le Dossier
26 République démocratique du Congo : terrains disputés
6. M. Ross, « The Political Economy of the Resource Curse », World Politics, vol. 51, n° 2, janvier 1999,
p. 297-322 ; J. Weinstein, « Africa’s Revolutionary Deficit », Foreign Policy, mai-juin 2007, p. 74-75.
7. P. Collier et A. Hoeffler, « Resource Rents, Governance, and Conflict », Journal of Conflict Resolution,
vol. 49, n° 4, août 2005, p. 625-633.
8. Rapport intérimaire du Groupe d’experts sur la République démocratique du Congo, document du Conseil
de sécurité S/2008/772, 12 décembre 2008 ; Rapport final du Groupe d’experts sur la République démo-
cratique du Congo, document du Conseil de sécurité S/2012/843, 15 novembre 2012.
9. A. Tegera et D. Johnson, « Rules for Sale : Formal and Informal Cross-Border Trade in Eastern
DRC », Goma, Pole Institute, mai 2007.
10. S. Autesserre, The Trouble with the Congo : Local Violence and the Failure of International Peacebuilding,
Cambridge, Cambridge University Press, 2010 ; M. Mamdani, « The Invention of the Indigene :
Congo Explained », The London Review of Books, vol. 33, n° 2, janvier 2011, p. 31-33.
11. S. Autesserre, « The Trouble With the Congo : How Local Disputes Fuel Regional Conflict »,
Foreign Affairs, mai-juin 2008, p. 95.
Politique africaine
27 Repenser la crise au Kivu
12. P. Richards et K. Vlassenroot, « Les guerres africaines de type fleuve Mano », Politique africaine,
n° 88, décembre 2002, p. 13-26.
13. Cette « persuasion relationnelle » a été développée par D. McAdam, S. Tarrow, et C. Tilly,
Dynamics of Contention, Cambridge, Cambridge University Press, 2001.
le Dossier
28 République démocratique du Congo : terrains disputés
15. International Crisis Group, The Congo’s Transition is Failing, Africa Report, n°°91, 2005.
16. S. Autesserre, The Trouble With the Congo…, op. cit., p. 163.
17. Elle suggère aussi qu’une nouvelle loi sur la citoyenneté a poussé la communauté hutu à aban-
donner son alliance avec les Tutsi, marginalisant ces derniers. S’il est vrai que la communauté
hutu, emmenée par le gouverneur du Nord-Kivu, Eugène Serufuli, a fait passer son allégeance de
Kigali à Kinshasa, ce fait n’était pas lié à la loi sur la citoyenneté qui était aussi désavantageuse
pour les deux groupes.
18. J. Stearns, « Laurent Nkunda and the National Congress for the Defense of the People (CNDP) »,
in S. Marysse et F. Reyntjens (dir.), L’Afrique des Grands Lacs : Annuaire 2007-2008, Paris, L’Harmattan,
2008, p. 245-268.
le Dossier
30 République démocratique du Congo : terrains disputés
Rwanda a été décisif dans sa décision initiale de faire défection, bien que
certains insistent sur le fait que Nkunda agissait souvent de manière autonome
et était régulièrement en désaccord avec ses alliés à Kigali 19. « L’ordre est venu
de Kigali ; ils avaient besoin d’un plan B au cas où la transition n’aurait pas
fonctionné », déclara un de ces officiers 20. « Nous recevions tous des appels
de Kigali », ajouta un autre, « ils nous disaient que si nous nous rendions à
Kinshasa nous en reviendrions dans des cercueils » 21.
L’establishment sécuritaire rwandais joua donc un rôle clé en s’assurant de
la défection de Nkunda et en coordonnant celle d’autres officiers, puis en les
conseillant et en leur fournissant une aide sporadique. Le Rwanda autorisa
le recrutement de soldats par le CNDP au Rwanda et y participa sans doute,
convoyant aussi des armes lors de son offensive sur Bukavu en juin 2004, et
aidant ce même CNDP à prendre le contrôle de la base militaire de Rumangabo
en octobre 2008, bien que son implication fut moins notable dans les étapes
initiales du mouvement, en 2003 et 2004 22.
La négligence de l’État congolais joua aussi dans cette dynamique. « J’ai passé
six mois dans un camp de l’armée à Kinshasa », se souvient un ancien colonel
du CNDP à propos de la transition, « sans salaire ou quiconque pour s’occuper
de ma famille à Goma. J’ai alors décidé de rentrer chez moi et rejoint Nkunda » 23.
Un autre officier nous expliqua qu’il était basé à Kindu en 2004 quand l’un de
ses co-officiers l’accusa de complicité avec Nkunda, avec lequel il n’avait
pourtant eu aucun contact auparavant24.
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19. Tous les entretiens ont été conduits dans la confidentialité et les noms conservés l’ont été, sauf
mention contraire, par consentement mutuel. Entretien avec un ancien colonel du CNDP, Goma,
30 août 2012 ; entretien avec un ancien lieutenant-colonel du CNDP, Goma, 21 août 2012 ; entretien
avec un ancien major du CNDP, Goma, 22 août 2012 ; entretien avec un ancien dirigeant civil du
CNDP, Kinshasa, 13 avril 2012 ; entretien avec un ancien agent des Renseignements rwandais,
Rwanda, août 2012. Ces entretiens ont été réalisés par l’auteur pour le Projet Usalama de l’Institut
de la Vallée du Rift, voir J. Stearns, From CNDP to M23 : The Evolution of An Armed Movement in
Eastern Congo, Londres, Rift Valley Institute, 2012.
20. Entretien avec un ancien lieutenant-colonel du CNDP, Goma, 26 août 2012.
21. Entretien avec un ancien major du CNDP, Goma, 31 août 2012.
22. Rapport du Groupe d’experts des Nations unies, document du Conseil de sécurité S/2004/551,
15 juillet 2004, p. 22-25 ; Rapport intérimaire du Groupe d’experts…, op. cit. ; entretien avec un ancien
colonel du CNDP, Goma, 31 août 2012 ; entretien avec un ancien colonel du CNDP, Goma,
30 août 2012 ; entretien avec un ancien major du CNDP, Goma, 30 octobre 2012.
23. Entretien avec un ancien colonel du CNDP, Goma, 31 août 2012.
24. Entretien avec un ancien colonel du CNDP, Bukavu, 20 août 2012.
Politique africaine
31 Repenser la crise au Kivu
82e et 83e brigades. Ces officiers n’étaient pas assez haut gradés pour qu’on
leur réserve des postes particuliers dans la nouvelle armée nationale intégrée
et il fut assez facile à Nkunda et aux représentants rwandais de les faire pencher
en leur faveur en leur promettant une situation. La peur a aussi joué un rôle
(bien que de nombreux officiers tutsi aient aussi rejoint l’armée nationale).
Les souvenirs de 1998 étaient encore frais quand, après le lancement de la
rébellion du RCD, des centaines de soldats tutsi furent rassemblés dans les
camps de l’armée à travers le pays avant d’y être massacrés 25.
Ces officiers partageaient autant des expériences communes qu’une pro
fonde méfiance envers Kinshasa. La plupart d’entre eux étaient des Congolais
hutu ou tutsi, ils avaient rejoint le Front patriotique rwandais quand il n’était
encore qu’un mouvement de guérilla (1990-1994), et ils avaient combattu
dans les rébellions successives qui furent soutenues par le Rwanda au
Congo. Le rôle important joué par ces officiers et celui des officiers de l’armée
dans presque toutes les récentes rébellions au Congo depuis 2003, suggère
que l’émergence d’une vaste classe d’officiers militaires, dans le giron d’une
armée dotée de peu de discipline formelle, en a fait un groupe de base pour
les rébellions.
Qu’en est-il des versions divergentes sur l’émergence du CNDP ? La prin
cipale est probablement celle de Nkunda lui-même, qui affirme que le CNDP
est issu d’une révolte populaire contre les injustices du gouvernement, et a
été créé en réponse aux craintes de persécution contre les Tutsi. On retrouve
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25. Bureau du Haut-Commissaire des Nations unies pour les droits de l’homme, « Report of the
Mapping Exercise Documenting the Most Serious Violations of Human Rights and International
Humanitarian Law Committed Within the Territory of the Democratic Republic of the Congo
Between March 1993 and June 2003 », juin 2010, p. 152-162.
26. S. Autesserre, The Trouble With the Congo…, op. cit. ; S. A. Scott, Laurent Nkunda et la rébellion du
Kivu : au cœur de la guerre congolaise, Paris, Karthala, 2009.
le Dossier
32 République démocratique du Congo : terrains disputés
Parmi les 18 anciens haut gradés du CNDP interrogés dans le cadre de cette
recherche, tous ont expliqué que les relations entre le CNDP et le Rwanda
étaient souvent instables, alors que de nombreux officiers congolais tutsi
nourrissaient du ressentiment pour le traitement passé qui leur avait été
infligé par l’armée rwandaise. Néanmoins, dans leur grande majorité (quinze),
ils s’accordèrent sur le soutien rwandais au CNDP bien qu’ils exprimèrent
aussi des divergences sur le degré d’indépendance du groupe. Plus des deux
tiers expliquèrent que le CNDP n’aurait pas pu voir le jour et persister sans
le soutien rwandais.
Le rôle d’une autre élite, celle de Goma – les franges affairistes et les
opérateurs politiques qui avaient fait carrière dans le RCD – est plus ambiguë.
Durant la transition, sa sécurité personnelle et ses intérêts financiers furent
menacés. Les souvenirs de persécution sont profonds dans la commu-
nauté. Presque tous les Tutsi du Nord-Kivu ont fui la campagne congolaise
en 1994 suite à l’afflux de réfugiés hutu et des milliers d’entre eux furent tués.
La transition menaçait donc non seulement les bases de leur pouvoir mais
aussi – au moins dans la perception de bon nombre d’entre eux – leur survie
même.
Le soutien des membres de cette communauté au CNDP est évident, bien
que selon d’anciens membres du CNDP, seuls quelques-uns donnèrent de
l’argent au début. La majorité des donations a été faite une fois le groupe formé
en 2006, décroissant à nouveau à mesure que le CNDP devenait capable de
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27. Entretien avec un ancien colonel du CNDP, Goma, 31 août 2012 ; entretien avec un ancien colonel
du CNDP, Goma, 30 août 2012 ; entretien avec un ancien dirigeant civil du CNDP, Kinshasa,
13 avril 2012 et entretien avec un ancien major du CNDP, Goma, 31 août 2012.
28. Entretien avec Frank Bwambale Kakolele, ancien chef d’état major du CNDP, Kinshasa,
juillet 2008.
Politique africaine
33 Repenser la crise au Kivu
donné de l’argent au CNDP pour ne pas les avoir sur le dos mais ils ne le
soutiennent pas vraiment », indiquait un homme d’affaires de Goma29.
Même le soutien de la communauté tutsi congolaise, dans laquelle Nkunda
était largement populaire, demeurait secondaire par rapport au soutien du
Rwanda, et le contredisait parfois. « Nous n’avons plus de communauté tutsi
cohérente », a argumenté l’un des colonels interrogés, « elle a été éclatée par
les guerres et la domination du Rwanda » 30. Un autre commandant fut encore
plus direct : « la communauté tutsi congolaise nous soutenait mais ce n’était
pas comme si n’importe qui pouvait nous donner des ordres ou nous dire
quoi faire » 31. Cette absence de base cohérente et les preuves de la main lourde
de Kigali s’accentuèrent quand le CNDP fut intégré à l’armée congolaise
en 2009 après la signature d’un accord de paix entre le Rwanda et le Congo.
Les troupes rwandaises ordonnèrent à Nkunda de franchir la frontière,
l’arrêtèrent et enjoignirent les commandants restants du CNDP de rejoindre
l’armée congolaise 32. Lorsque certains des soutiens de Nkunda firent pression
sur le gouvernement rwandais ils furent tués, notamment Denis Ntare
Semadwinga, l’un des anciens les plus respectés dans la communauté.
Le CNDP était né d’une division nationale créée par le processus de paix,
une scission qui conduisit les dirigeants politiques et militaires de Goma et
Kigali à créer un groupe armé pour leur servir de levier sur le gouvernement
de Kinshasa et protéger leurs intérêts. Ce faisant, ils s’appuyèrent sur des
réseaux principalement constitués d’officiers militaires tutsi soudés par
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L’élan qui poussa le CNDP venait clairement des élites locales et régionales.
Mais tous les groupes armés ne sont pas si étroitement intégrés aux couches
supérieures des affaires et de la politique. La Pareco offre l’exemple d’un
groupe armé doté de racines locales, milice décentralisée dans la zone mon
tagneuse de Masisi en 1993, puis transformée au fur et à mesure que les
structures sociales changeaient et que les groupes armés s’intégraient de plus
29. Entretien avec un homme d’affaires proche du CNDP, Goma, 18 août 2012.
30. Entretien avec un ancien colonel du CNDP, Goma, 31 août 2012.
31. Entretien avec un ancien major du CNDP, Goma, 31 août 2012.
32. Cette décision s’explique à la fois par la pression exercée par les bailleurs de fonds sur le Rwanda
et par les tensions intensifiées entre Kigali et Nkunda.
le Dossier
34 République démocratique du Congo : terrains disputés
33. P.-J. Laurent et A. Mafikiri Tsongo, Mouvements de populations, cohabitations ethniques, transfor-
mations agraires et foncières dans le Kivu montagneux. Repères historiques et mise en perspective théorique.
Rapport intermédiaire de recherche pour le CIUF et l’AGCD, Louvain-la-Neuve, Université catholique
de Louvain, Institut d’études du développement, 1996 ; K. Vlassenroot et C. Huggins, « Land,
Migration and Conflict in Eastern DRC », in C. Huggins et J. Clover (dir.), From the Ground Up Land
Rights Conflict and Peace in SubSaharan Africa, Pretoria, Institute for Security Studies, 2005, p. 115-
194 ; B. Mararo, « Land, Power, and Ethnic Conflict in Masisi 1940s-1994 », The International Journal
of African Historical Studies, vol. 30, n° 3, 1997, p. 503-537.
Politique africaine
35 Repenser la crise au Kivu
34. Entretien avec Robert Seninga, ancien dirigeant politique de milice au Masisi, Goma, 12 mai 2012 ;
entretien avec un ancien commandant de milice au Masisi, Goma, 11 mai 2012 ; entretien avec un
ancien commandant de milice au Masisi, Goma, 15 mai 2012.
le Dossier
36 République démocratique du Congo : terrains disputés
leurs armes dans les combats de 1993, furent intégrés de pair avec une majorité
de miliciens hutu et on leur accorda des postes influents dans le RCD 35.
L’apogée de ce nouveau consortium de leaders militaro-politico-affairistes
arriva sous le règne d’Eugène Serufuli, gouverneur hutu du Nord-Kivu entre
2001 à 2006. À partir de la fin 1998, des responsables sécuritaires rwandais
et congolais commencèrent à évoquer des formes nouvelles de mobilisation.
Ils conclurent une alliance de chefs hutu et tutsi qui œuvreraient à la récon
ciliation entre les deux communautés et rapatrieraient des réfugiés rwandais
dont plusieurs dizaines de milliers peuplaient encore les forêts du Kivu. Des
slogans populaires comme bene mugab’umwe (« fils d’un même père ») et ubumwe
(« unité ») illustraient cette approche conciliatoire.
Ce même groupe de décideurs créa une association, Tous pour la paix et
le développement (TPD), en octobre 1998. TPD aida Serufuli et ses associés
en politique et en affaires à consolider leur pouvoir à Goma, tout en restant
une organisation populaire. Elle aida à rapatrier des Hutu réfugiés au Rwanda
et mit en place des projets de développement avant de finir par armer sa
propre milice, la Local Defence Force 36. De façon parlante, cette initiative
semble moins résulter d’une volonté du gouvernement rwandais que d’une
proposition faite à Kigali – et donc au leadership du RCD – par des officiers
de rang intermédiaire des renseignements rwandais et des politiciens congo
lais 37. Ce consortium fut encore renforcé par une série d’entreprises commer
ciales initiées par des proches de Serufuli, dont certains bénéficiaient d’un
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35. Entretien avec Robert Seninga, ancien dirigeant politique de milice au Masisi, Goma, 13 mai 2012.
Pourtant, certains commandants hutu continuèrent à s’opposer au Rwanda, dont un grand nombre
sous les ordres de Hassan Mugabo et Bigembe Turinkinko.
36. B. Mararo, « Le TPD à Goma (Nord Kivu) : mythes et réalités », in S. Marysse et F. Reyntjens
(dir.), L’Afrique des Grands Lacs. Annuaire 2003–2004, Paris, L’Harmattan, 2004, p. 136-166.
37. Entretien avec un ancien responsable sécuritaire rwandais, Rwanda, août 2012 ; entretien avec
un ancien proche d’Eugène Serufuli, Goma, 29 août 2012.
Politique africaine
37 Repenser la crise au Kivu
41. Entretien avec un ancien colonel Pareco, Goma, 30 mai 2012 ; entretien avec un ancien major
Pareco, Goma, 24 mai 2012.
42. Entretien avec un ancien colonel Pareco, Goma, 27 mai 2012.
43. Entretien avec un ancien proche d’Eugène Serufuli, Goma, 29 août 2012 ; entretien avec un chef
politique hutu, Goma, 12 mai 2012.
Politique africaine
39 Repenser la crise au Kivu
44. Entretien avec Félicien Miganda, chef des Mai-Mai Mongol, une autre milice hutu du Masisi,
Goma, 28 mai 2012.
45. Entretien avec un ancien colonel Pareco, Lubero, 13 octobre 2012 ; entretien avec un ancien chef
politique Pareco, Goma, 29 mai 2012 ; entretien avec un ancien commandant de milice hutu rallié
à cette nouvelle rébellion, Goma, 13 mai 2012 , entretien avec un ancien commandant de milice au
Masisi, Goma, 15 mai 2012, et entretien avec un ancien colonel Pareco, Kinshasa, 14 avril 2012.
le Dossier
40 République démocratique du Congo : terrains disputés
Il serait faux de croire que tous les groupes armés du Kivu sont les simples
instruments des machinations d’une élite et d’officiers désabusés en quête de
rentes et de postes dans l’armée nationale.
Il n’y a pas qu’un modèle de mobilisation et la création des Raia Mutomboki
(« citoyens indignés », RM) entre 2005 et 2012, offre un bon exemple d’un
groupe qui puise dans des préoccupations locales, très peu lié à des élites
polit iques et aux liens limités avec d’anciens officiers de l’armée. C’est un
exemple extrême de décentralisation d’un groupe armé populaire.
Les RM sont d’abord apparus en 2005 dans le territoire de Shabunda. Par
opposition aux autres groupes créés par des officiers ou des politiciens
mécontents, aucun de leurs fondateurs n’appartenait ou n’était lié à des élites
nationales. Néanmoins, l’apparition de ces groupes fut déclenchée par des
développements politiques nationaux. La transition, qui avait débuté en 2003,
apporta avec elle l’intégration dans l’armée et la démobilisation, poussant
bien des groupes Mai-Mai d’autodéfense de Shabunda hors de la zone et
laissant un vide sécuritaire. Les rebelles rwandais des Forces démocratiques
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46. Human Rights Watch, « DR Congo : Peace Accord Fails to End Killing of Civilians », juillet 2008,
<www.hrw.org/news/2008/07/17/dr-congo-peace-accord-fails-end-killing-civilians>, consulté
le 11 février 2013.
47. Entretien avec un chef local de Shabunda, Bukavu, 10 décembre 2012.
48. Rapport confidentiel des Nations unies sur Raia Mutomboki, 17 mai 2012, en possession de
l’auteur.
Politique africaine
41 Repenser la crise au Kivu
« les ennemis les plus efficaces des FDLR au Sud-Kivu sont les Raia Mutomboki. Il déclara
qu’ils avaient entravé les efforts déployés par son bataillon pour aller vers le Nord et
Ekingi afin d’apporter un soutien aux forces FDLR du Nord-Kivu, en tuant 33 membres
de la population civile des FDLR dans la zone d’Ekingi la semaine dernière 49 ».
49. Interview With Lieutenant Colonel Idrissa Bizimana, 13 mars 2011, rapport confidentiel des Nations
unies en possession de l’auteur. Ces exactions ont été confirmées par une enquête des Nations
unies : voir Bureau du Haut-Commissaire des Nations unies pour les droits de l’homme, « Report
of the United Nations Joint Human Rights Office on Human Rights Violations Perpetrated by
Armed Groups During Attacks on Villages in Ufamandu I and II, Nyamaboko I and II and Kibabi
Groupements, Masisi Territory, North Kivu Province Between April and September 2012 »,
14 novembre 2012, <www.ohchr.org/Documents/Countries/ZR/UNJHRO_HRVMasisi_en.pdf>,
consulté le 11 février 2013.
50. Dans la société rega l’autorité traditionnelle se trouve entre les mains des chefs de clans et de
villages, bien que pendant la période coloniale des entités coutumières plus larges avec de nouveaux
chefs aient aussi vu le jour.
51. Weekly Threat Assessements, rapports confidentiels des Nations unies, en possession de
l’auteur.
le Dossier
42 République démocratique du Congo : terrains disputés
54. Entretien avec un chef local de Chambucha, Walikale, Chambucha, 6 décembre 2012 ; entretien
avec un commandant RM, Kigulube, 15 décembre 2012 ; entretien avec un dirigeant politique RM,
Bukavu, 12 décembre 2012 ; entretien avec un chef local de Hombo-Nord, Walikale, Hombo-Nord,
7 décembre 2012 ; entretien avec un leader de la société civile de Hombo-Sud, Kalehe, Hombo-Sud,
6 décembre 2012 ; entretien avec un commandant RM, Walikale, Chambucha, 7 décembre 2012.
55. Entretien avec Mutima Mabenga Muba, chef d’état major RM, Katatwa, 8 décembre 2012.
le Dossier
44 République démocratique du Congo : terrains disputés
56. Entretien avec un officier des renseignements militaires congolais, Bukavu, 7 décembre 2012.
57. Entretien avec un officier des renseignements militaires congolais, Bukavu, 7 décembre 2012 ;
entretien avec un chef local de Chambucha, Walikale, Chambucha, 6 décembre 2012 ; entretien
avec un chef local de Hombo-Nord, Walikale, Hombo-Nord, 7 décembre 2012 ; entretien avec un
leader de la société civile de Hombo-Sud, Kalehe, Hombo-Sud, 6 décembre 2012 ; entretien avec
un commandant RM, Walikale, Chambucha, 7 décembre 2012 ; entretien avec un chef local de
Kigulube, Kigulube, 13 décembre 2012 ; entretien avec un commandant RM à Lubila, Evary,
16 décembre 2012 ; entretien avec un commandant RM à Kigulube, Kigulube, 15 décembre 2012 ;
entretien avec un dirigeant de la société civile de Kigulube, Kigulube, 15 décembre 2012 ; entretien
avec un chef local de Kigulube, Kigulube, 15 décembre 2012 ; entretien avec un responsable des
renseignements congolais, Bukavu, 8 décembre 2012.
Politique africaine
45 Repenser la crise au Kivu
d’étain et de tantale et les élites locales de Goma ne sont pas plus gourmandes
qu’ailleurs. Ce qui est singulier à Goma et dans les milieux ruraux qui
entourent la ville, c’est la convergence des intérêts économiques et des réseaux
militaires, tous attachés ensemble par de forts liens ethniques. Ce point
rappelle l’argument d’Arnim Langer sur la mobilisation violente en Côte
d’Ivoire, qui trouve ses origines dans le chevauchement des inégalités dans
l’élite et la population générale 58.
Ce n’est pas seulement une brèche entre les élites de Goma et Kinshasa qui
a fourni cette impulsion ; les divisions au sein des élites locales ont également
eu un impact décisif. Si la communauté d’expression kinyarwanda était restée
unie et avait complètement contrôlé les réseaux politiques et sociaux autour
de Goma, elle se serait sentie moins menacée par Kinshasa. Néanmoins, en
lui donnant l’impression qu’elle était assiégée de l’intérieur tout comme de
l’extérieur, le gouvernement transitionnel l’a radicalisée encore un peu plus.
Dans la province, la logique démocratique de la transition a favorisé la com
munauté nande, qui bénéficie d’une majorité claire dans la province et dont
les cercles d’affaires très soudés étaient en bonne position pour gagner du
terrain si les réseaux clientélistes mis en place sous l’occupation rwandaise
s’étaient érodés. La défection des principaux dirigeants hutu du projet de
Nkunda en 2005-2006 a encore accentué ce sentiment d’anxiété parmi ses
sympathisants.
Le CNDP a ensuite formé le centre d’un cycle d’escalade conduisant à la
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58. A. Langer, « Horizontal Inequalities and Violent Group Mobilization in Côte d’Ivoire », Human
development Report, Oxford Development Studies, n° 32, 2005.
59. K. Vlassenroot et T. Raeymaerkers, « Kivus’ Intractable Security Conundrum », African Affairs,
vol. 108, n° 432, 2009, p. 475-484.
Politique africaine
47 Repenser la crise au Kivu
60. Pour plus de détails sur cette dynamique, voir J. Stearns, From CNDP to M23…, op. cit.
le Dossier
48 République démocratique du Congo : terrains disputés
Jason Stearns
Yale University
Projet Usalama, Rift Valley Institute
Abstract
Rethinking the Kivus crisis: Armed Mobilization and the Logic of the Transitional
Government
Various theories have been put forward for the persistence of conflict in the eastern
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