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UNIV. t)'F
rOKOKTO
ubMiy
(W v 1 \
DE L'AMOUR
CHEZ LES MÊMES ÉDITEURS
ŒUVRES COMPLÈTES
DE
CHRONIQUES ITALIENNES 1 —
correspondance inédite — précédée d'une Introduction de
Prosper Mérimée, ornée d'un beau portrait 2 —
HISTOIRE DE LA PEINTURE EN ITALIE i —
MÉLANGES D'ART ET DE LITTÉRATURE i —
MÉMOIRE D'UN TOURISTE 2 —
NOUVELLES INÉDITES i —
PROMENADES DANS ROME 2 —
RACINE! ET SHAKSPEARE i —
romans et nouvelles précédés d'une Notice sur Stendhal. 1 —
ROME, NAPLE3 ET FLORENCE i —
LE ROUGE ET LE NOIR 1 —
VIE DE ROSSINI * i —
VIE DE HATDN, DE MOZART ET DE MÉTASTASE 1 —
DE L'AMOUR i —
CHRONIQUES ET NOUVELLES i —
L'AMOUR
DE STENDHAL
(HENRY BEYLE)
V V
PARIS
CALMANN LÉVY, ÉDITEUR
ANCIENNE MAISON MICHEL LÉVY FRERES
3, RUE AUBER, 3
1891
Droits de reproduction et de traduction réservés
m
wi
PRÉFACE
préface, une introduction, tout cela pour être clair; et, mal-
venances, qui s'accroît tous les jours, plus encore par IVf-
fet de la crai-nte du ridicule qu'à cause de la pur
mœurs, a fait du mot qui sert de titre à cet outrage BM
parole qu'on évite de prononcer toute seule, et qui peut
• liai 1826.
n ŒUVRES DE STENDHAL.
mais l'austérité scientifique
du langage me met, je pense, a
1 abri de tout reproche
à cet égard.
Je connais un ou
deux secrétaires de légation
qui, à'irur
retour pourront me rendre ce service.
Jusque-là que pour-
rais-je dire aux
gens qui nient les faits que
je raconte^
prier de ne pas m'écouter.
On peut reprocher de
légalisme à la forme que j'ai adop-
tée On permet à un voyageur de
dire « J'étais à
:
New-York
de h je
m'embarquai pour l'Amérique
du sud, je remontai
jusqu a Santa-Fé-de-Bogota.
Les cousins et les
moustiques
^ désolèrent pendant la route,
et je fus privé,
pendant
trois jours, de l'usage
de l'œil droit. »
On n'accuse pointce voyageur d'aimer
à parler de soi-
on pardonne tous ces je et tous ces
lui
moi, parce que c'esi
la manière la plus
claire et la plus intéressante
de raconter
ce qu il a vu.
aux sourds ni des yeux aux aveugles. Ainsi les gens à ar-
gent et à grosse joie, qui ont gagné sent mille francs dans
Tannée qui a précédé le moment où ils ouvrent ce livre,
n'est point ainsi que perdent leur temps les gens qui payent
deux mille ouvriers à la fin de chaque semaine ; leur esprit
n
la connaissance du grec moderne, ce dont est
il si fier, qu<
déjà il aspire à l'arabe. Je prie d
doise ;
je ne puis la tracer moi-même. Cette impossibilité est
gner.
L'amour est comme ce qu'on appelle au ciel la voie lactée,
dont chacune est souvent une nébuleuse. Les livres ont noté
quatre ou cinq cents des petits sentiments successifs et si
1
On me dit : a Otez ce morceau, rien de plus vrai; mais gare les in-
dustriels ; ils vont crier à l'aristocrate. » — En 1817, je n'ai pas craint les
procureurs généraux ;
pourquoi aurais-je peur des millionnaires en 1826?
Les vaisseaux fournis au pacha d'Egypte m'onC ouvert les yeux sur leur
compte, et je ne crains qua ce que j'estime.
DE L'A M* „
les Lettres de mademoiselle d
'ont été écrits en France, pays où la pi -notir
toute sa hauteur.
ché à le rendre plus clair. Après l'avoir lu, n'en parlez ja-
livre aura leur h'iine. Parmi tant de gens d'esprit que j'ai
pis et cent fois tant pis pour ce grand poète. De nus jours,
le génie a des ménagements pour des êtres auxquels il ne
Toute cette préface n'est faite que pour crier que ce livre-
de quelque sottise.
Avez-vous été dans votre vie six mois malneureun
amour? dirais-je à quelqu'un qui voudrait lire ce \\\
» Mai 1834.
X71 ŒUVRES DE STENDHAL.
d'esprit qu'à l'ordinaire à la dernière saison des eaux d'Aix,
jouer gros jeu dans des cercles où les femmes ne sont point
xxu ŒUVRES DE STENDHAL,
admises. Le sang-froid mortel qui semble présider aux rela-
tions des jeunes gens avec les femmes de vingt-cinq ans, que
L'AMOUR
LIVRE PREMIER
CILÏPITRE PREMIER.
DE L AMOUR.
1
2 ŒUVRES DE STENDHAL.
pré'-exfe, et sous peine de manquer d'usage, de bon ton, de dé-
licatesse, etc. Un homme bien né sait d'avance tous les procé-
dés qu'il doit avoir et rencontrer dans les diverses phases de
cet amour; ri;n n'y étant passion et imprévu, il a souvent plus
de délicatesse que l'amour véritable, car il a toujours beaucoup
d'esprit; c'est une froide et jolie miniature comparée à un ta-
ia l'tii.
« ŒUVRES DE STENDHAL.
Au reste, au lieu de distinguer quatre amours différents, on
peut fort bien admettre huit ou dix nuances. Il y a peut-être
autant de façons de sentir parmi les hommes que de façons de
voir ; mais ces différences dans la nomenclature ne changent
rien aux raisonnements qui suivent. Tous les amours qu'on
peut voir ici-bas naissent, vivent et meurent, ou s'élèvent à
l'immortalité, suivant les mêmes lois 1
.
CHAPITRE II.
DE LA NAISSANCE DE L'AMOUR.
1° L'admiration.
nous aime.
1
Ce livre est traduit librement d'un manuscrit italien de M. Lisio Vis-
tonti, jeune homme de la plus haute distinction, qui vient de mourir ù
avec elle et la voir sans cesse vous aimant ferai! prei que bénir
la douleur; cl vous parlez du bras ea^sé de voir ami p >ur ne
veau est employée à suivre le daim qui fuit dons la forêt, et avec
la chair duquel il doit réparer ses forces au plus vite, sous peine
6° Le doute naît
l'attention profonde.
7° Second" cristallisation.
Elle m'aime.
A chaque quart d'heure ae ta mm qui suit la naissance dea
ncr.
C'est l'évidence de cette vérité, c'est ce chemin but l'extrême
•
;,!f An destin du fcénos •'.
<U sa «««tresse, est un raowremeil de
p» un nombre infini de 1
2° Elle m'aime ;
CHAPITRE III.
DE L ESFEr.ASCE
sance de l'amour.
L'espérance peut ensuite manquer au bout de deux ou trois
jour-,, l'amour n'en est pas moins né.
Avec un caractère décidé, téméraire, impétueux, et une ima-
gination développée par les malheurs de la vie,
b m-
coup plus soutenue, ebez les gens froids, fl gmaliques, pru
11 en est de même des gens
Ce qui assure la durée de l'amour lalli-
toutes le^ minutes, tournée en habitude par plu icurs mois d'a-
mour, pouvoir seulement soutenir la pensée de cesser d';
Plus un caractère est fort, moins il est sujet à l'inconstant
2 U LUe est ornée de perfections qui n'en sont pas poui m\.
La perfection de certains charmes dont lui parle un ancien
phes d'avoir pris l>. mot idéologie : mon intention n'est certaincm
ftosso. Ces idées aperçues dans une soirée le font rêver toute
une nuit.
Une repartie imprévue qui nie fait voir plus clairement une
1j terre, sans l'emploi de ce mot qu'il fallait sans cesse remplacer par
une périphrase l'on longue, la description que je donne de ce qui se
passe dans la cœur de l'homme amoureux devenait obs-
tète et dans le
cure, lourde, ennuyeuse, même pour moi qui suis l'auteur qu'aurait-ce :
apercevoir toutes les beautés, tous les genres de perfection dans la femme
que nous commençons à aimer, mais encore plusieurs ellipses trop har-
dies. Il n'y a qu'à prendre un crayon et écrire entre les lignes les cinq ou
six mois qui manquent.
1
Toutes *es actions eurent d'abord à mes yeax cet air céleste qui sur-
iç-clnmp fait d'un homme un être à part, le différencie de mus les au-
tres. Je croyais lire dans ses yeax celle sotf d'un bonheur plus sublime,
cette m bucolie non avouée qui aspire à quelque chose de mieux que ce
Ï.'E L'AMOUR. H
pie plaisir de sepromener seule avec ton tenant à minuit.
un bois écarté, me donne aussi à rêver loule une nuit '.
11 dira que ma maîtresse esl une prude; je dirai q
est uuc fille.
CHAPITRE IV.
1° |.' admiration :
2° Qu
5° L'e !
e ;
4° L
Slill nrompl
For whicli we wish lo live or
CHAPITRE V.
L'homme n'est pas libre de ne pas l'aire ce qui lui fait plus de
l
plaisir que toutes les autres actions possibles .
CHAPITRE VI.
i:au de saltzeol'iu.
gination que vous êtes sûr que telle perfection e\i>te chez la
femme que vous aimez. Après l'intimité, les craintes sans cesse
renaissantes sont apaisées par des solutions plus réélis. Ai si,
voyez, vous sentez évidemment que vous n'y auriez aucun plai-
sir. Voilà l'en- ur d'optique qui produi! la coup de pistolet.
m recommence de haïr.
Si toute crovap.ee où il y a de Yahsurde ou du non -'lé montré
tend i ujours à mettre à la tète du parii les gens les plus ab-
•
CILU ITRE VII
I XES.
:
Cette seconde cristallisation manque chez les Unîmes lucile», qui son'
bien loin de toutes ces idées romariesqnts.
16 ŒUVRES DE STENDHAL.
Une femme croit de reine s'être faite esclave. Cet état de
lame et de l'esprit est aidé par l'ivresse nerveuse que font naî-
tre des plaisirs d'autant plus sensibles qu'ils sont pins rares.
Enfin une femme, devant son métier à broder, ouvrage insipide et
qui n'occupe *;uc les mains, songe à son amant, tandis que ce-
lui-ci, galopant dans la plaine avec son escadron, est mis aux
arrêts s'il fait faire un faux mouvement.
Je croirais donc que la seconde cristallisation est beaucoup
plus forte chez les femmes parce que la crainte est plus vive .
riiion des défauts de l'objet aimé doit donc êlre plus rapide.
Les femmes préfèrent les émotions à la raison , c'est tout sim-
lent de vous faire aimer Dès que les femmes entreprennent des
raisonnements généraux, elles font de l'amour sans s'en aperce-
voir. Dans les choses de détail, elles se piquent d'être plus sé-
vères et plus exactes que les hommes. La moitié du petit com-
merce est confiée aux femmes, qui s'en acquittent mieux que
DE L'AMOUH. |-
leurs maris. C'est une maxime connue que, si l'on parle d'adai
res avec elles, on ne saurait avoir irop de gravité.
CHAPITRE VIII.
elle ne pourra, donc plus aimer avec le même feu que dans la
tablit dans ce pauvre cœur agité une lutte terrible entre l'a-
danger, est mille fois plus brillante et plus solide que la cristal-
gaieté et bonheur.
« Donc l'amour doit être moins gai et plus passionné '. »
mn'? »
veux, mais le
ie : Sois belle m tu peux, sage si tu s -, il
est allée deux fois avec lui au spectacle, deux fois elle s'est
CHAPITRE IX.
Je fais tous les efforts possibles pour être sec. Je veux impo-
ser silence à mon cœur, qui croit avoir beaucoup à dire. Je
CHAPITRE X.
l
ivr l'anecdote suivante .
niser un objet aimable, qu'il soit pris dans la foi$l dc.^ Ardennes
ou au bal de Coulon, il faut d'abord qu'il lui semble parfait,
1
Those w.io remarked in the cou t this young lioro a dis-
to an open si
rire sur une plante trop avilie. En amour, notre vanité dédaigne
une victoire trop facile; et, dans tous les geim :
, 1 homme n'est
CHAPITRE XI.
er janvier 1820.)
Ujs o et de Lisio, le 1
fois le d'amabilité de
genre Del Rosso et lui permette de la dé-
ployer.
24 ŒUVRES DE STENDHAL.
Del Rosso entend par amour apparemment iamour physique,
etLisio l'amour-passion. Rien de plus évident qu'ils ne doivent
pas être d'accord sur le moi beauté 1 .
i ndividus,
La cristallisation formée dans la tête de chaque homme doit
CHAPITRE XII.
SUITE DE Là CRISTALLISATION.
pleine et entière d'un désir. Vous la voulez tendre, elle est ten-
pour laquelle l'amour est la plus forte des passions. Dans les au-
1
Ma beauté, promesse d'un caractère utile à mon âme, est au-dessu»
sirs; c'est donc celle des passions où les (Itïsirs violents ont les
plus grandes jouissances.
11 y a des conditions générales de bonheur qui étendent lmr
empire sur tontes les satisfactions de désirs particuliers*
1° Elle semble votre propriété, car c'est vous ^eul qui pouvei
Fa rendre heureuse.
2° Elle est juge de voire mérite. Cette condition était fort im
:
1
II y a une cause physique, un commencement de folie, uue affluence
du sang au cerveau, un désordre dans les nerfs et dans le centre céré-
bral. Voir le courage éphémère des cerfs et la couleur des pensées d'un
toprano. En 1922, la physiologie nous donnera la description de la
stant après vous vous apercevez qu"< n effet il était noir, et vous
ie trouvez encore concluant en faveur de votre amour.
C'est al rs qu'um âme en proie aux incertitudes mortelles
sent vivent :.i le b; soin d'un ami ; m lis p iuf uu amant il n'est
plus ù';!ii)i. Oii savait cela à la cour. Voilà la source du
genre d'indiscrétion qu'une femme délicate puisse pardonner.
IU1A1 i . UE
n
ration tendre (n 2) : Quel plaisir de lui donner des baisers, etc.
>
De là la possibilité >
;
t, et de D'ahix IShakspeare),
DE L'AMOUR. 27
seivir sans nulle crainte, aussitôt que l'on s'aperçoit que la cristallisation
a commencé.
28 ŒUVRES DE STENDHAL.
gination, ils empêchent, dans l'amour espérant, les cristallisa-
vie, qui ne fournissent que des images tristes, se jette tout en-
CHAPITRE XIV.
plaisirs ne peuvent pas être usés par des rappels à volonté, qu'ils
se renouvellent avec tant de foi ce, dès que quelque objet vient
• Les parfums
> Voir la note 1 Je la page-li.
' Nessun maggior dolore
Clic ricordarsi de) ; ni o felicc
Relia miseria.
1
L
30 ŒUVRES DE STENDHAL.
prend mieux la musique, ou qu'il rappelle la sensation du pre-
mier jour.
Uuant aux nouvelles vues qu'un roman suggère pour la con-
naissance du cœur humain, je me rappelle fort bien les an-
CHAPITRE XV.
plus contrariée, des mora :nt où l'on croit !ou! à coup ne plus
aimer; c'est comme une source d'eau donc.' au milieu de la
Donheur, il esl nécessaire que l'homme qui cherche à exciter oeite fièvre
CHAPITRE XVI.
: Ti'i.iiuii, 25 févri
Mai -
à N iples, l'année dernière, que la ni:::. 'que
1
Copie . j mrn il d I
1
Othello et h Vestale, ballets de Vigano. exécutes par le Pailerini et
Mollinari,
DE L'AMOUR. 33
mour. Du air tendre et triste, pourvu qu'il ne soit pas trop dra-
L'amant qui est bien avec ce qu'il aime jouit avec transport
du fameux duelto à'Armida e Rinaldo de Rossini, qui peinl si
cet égard ;
je passerais pour fou auprès des gens du Nord.
CHAPITRE XVII.
Albéric rencontre dans une loge une femme plus belle que sa
la mort la lui ravit. Trois ans après, à Rome, admis dans la fa-
est fou.
1
La beauté n'est que ia promesse du bonheur Le bonheur d'un Grec
était différent du bonheur d'un Français de 1822. Voyez les yeux de la
ou moins helie; si l'on doute de son cœur, ou n'a pas le temps de songer
à sa figure.
DE L'AMOUR. .15
CHAPITRE XVIII.
iîgure seule d'un acteur comimie fait rire dès qu'il entre en
scène.
Une jeune fille qu'on menait aux Français pour la première
t'ois pouvait bien sentir quelque éloignement pour Lckain do-
rant la première scène; mais bientôt il la faisail pleurer ou fré-
de bonne loi des jeunes tilles. Llle leur plaisait peut-être aussi connue
excitant les transports des jeunes gens.
Madame de Sévigné (Lettre à sa Dlle : i
y et. .il encore augmenté; il y eut un Libéra oh tous les yeux étaient
de larmes, d
est beau ! »
CHAPITRE XIX.
Ton n'était attentif qu'à ce qui était beau d'une autre beauté 1
,
de la beauté d'expression.
1
C'est là l'avantage d'être à la mode. Faisant abstraction des défaut-
de la ligure déjà connus, el qui ne l'ont plus rien à l'imagination; on
mode, était grosse, et les dames portèrent bientôt des petits ventres à la
Viganà. Tar les mêmes raisons retournées, rien d'affreux comme une
mode surannée. Le mauvais goût, c'est de confondre la mode, qui
surannée II sera moins déplaisant dans deux cents ans, quand on aura
oublié mode. Les amants sont bien fous de songer à se bien roi
la
rien de choquant, que tous les soirs l'on regarde pendant deux
heures exprimant les sentiments les plus nobles, cl que l'on n<-
que toute la réalité qui l'entoure, quelque peu noble qu'elle soit
quelquefois, se recouvre à l'instant d'une teinte romanesque et
touchante.
<c Dans ma première jeunesse, enthousiaste de cette
nuycu.se tragédie française 1
,
quand j'avais le bonheur de souper
avec mademoiselle Olivier, à tous les instants, je me surprenais
lemenl je n'ai jamais bien su si, auprès d'elle, j'avais été amou-
reux d'une reine ou d'une jolie fille. »
CHAPITRE XX.
baron de Dotlmer. C'est par le mêujc artifice >]ue Feramcrz plait à Lalla-
CHAPITRE XXL
DE IA PREMIÈRE VUE
1
On voit bien que l'auteur n'est ni prince ni millionnaire. J'ai voulu
voler cet esprit-là au lecteur.
2 La liancée de Lammermoor, miss Ashton. Un ho^me qui a vécu
trouve dans sa mémoire une foule d'exemples d'amours, et n'a que
l'embarras du choix. Mais, s'il veut écrire, il ne sait plus sur quoi s'ap-
puyer. Les anecdotes des sociétés particulières dans lesquelles il a véca
sont ignorées du public, et un nombre de pages immense pour
il faudrait
les rapporter avec les nuances nécessaires. C'est pour cela que je cite
des romans comme généralement connus, mais je n'appuie point les
kièes que je soamets au lecteur sur des fictions aussi vides, et calculées
ta plupart plutôt pour l'effet pittoresque que pour la vérité
DE L'AMOUR. 41
salon dont je trouvai la perte ouverte; j'y entrai, et, quand j'i n
Tout ce qui e.-t cérémonie, par son essence d'être une chose
affectée et prévue d'avance, dans laquelle il s'agit de se com-
porter dune manière convenable, paralyse l'imagination et ne la
laisse éveillée que pour ce qui est contraire au but de la céré-
ses trois premiers maris, avec lesquels elle est très-bien. Voilà
plaisant, c'est que Rome est F un ù\s pay où l'on voit le plus de
divon
L'amour aime, à la première vue, une physionomie qui
CHAPITRE XXII.
DE L EKGOUEMEYI.
attendre.
Avant que la sensation, qui est la eonséqw ;
-
des ob, ive jusqu'à elles, cil - I
CIIAPITIl
DES COLTS DK FO
* Traduit .
DE L'AMOUR. ..;,
que j'ai bien aimé llerman : eh bien, il nie fut si cher au bout
d'un quart d'heure, que dcpui> il n'a pas pu me le devenir da-
vantage. Je voyais tous ses défauts, el je les lui pardonnais tous,
pourvu qu'il m'aimât. .
« Peu après que j'eus dansé avec lui, le roi s'en alla; lier-
moi-même.
« Je pus partir enfin. A peine enfermée àdoub'.; tour dans
ment qui lit la nouvelle du jour, car au bout d'un m lis ou <it ux
3.
46 ŒUVRES DE ST&NDHÀL.
un grand air de bonté, et vivait avec des filles; du reste, à peine
jets. Je doute fort que l'air Caton ait jamais occasionné de coup
de foudre.
Ce qui les rend si rares, c'est que, si le cœur qui aime ainsi
de coup de foudre.
Une femme rendue méfiante par les malheurs n'est pas sus-
ceptible de celte révolution de l'âme.
rée. Elle est Gère devoir enfin trouvé un de ces grands mouve-
ments d. l'àrae après lesquels courait son imagination. Le len-
demain, elle ne sait plus où se cacher, et surtout comment évi-
tait lous les ,-ignes de? la passion la plus violente. Cela durait en-
core le lendemain; au bout de trois jours; Findorff ayant fait
odieux..
CHAPITRE XXIV.
les autres sans doute, l'on ne voit pas des orangers en pleine
déraisonne.
C'est que l'imagination, retirée violemment de rêveries déli
vère réalité.
L'âme tendre sait bien que. tr:Ka le combat qui va commen-
cer aussitôt que vous la verrez, la moindre négligence, le moin-
On dit donc d'un air senti une foule de choses qu'on ne sent
pas, et qu'on serait bien embarrassé de répéter; l'on s'obstine
à se refuser à sa présence pour être encore plus à cHe. Dans les
Voilà qui devrait bien marquer aux yeus des femmes la dif-
férence d -
iss'ou et de la galan! iidre
et d
Dans ces moments décisifs, l'une gagne autant que 1'.
l'àme prosaïque <:ût fait un grand pas. Dès qu'il s'agit des inté-
s'arrête ;
r la douleur delà
. fière de ce qui la rend vul ire, elle se moque de
l'àm •
tendre, qui, avec tout 1'
. n'a jamais l'ai-
1
Cet more.
DE L'AMOUR.
sant, en exprimerait avec simplicité le détail de ce qu'on
dans le moment; mai ; .
ter. L'effort qu'on se fait est si violent, qu'on a l'air froid. L'a-
tous les petits détails de sa vie de ces jouis passés. Enfin il sort;
ne jamais voir ce qu'il aime. C'est dans le genre, mais bien plus
noir, du duc de I olicastro, qui tous les six mois faisait cent
à pleurer.
D'après le trouble qui accompagne les discours des amanl . il
ments que dans les mots imprévus; alors c'est le cri du cœur.
Du reste, c'est de la physionomie de l'ensemble des choses dites
que l'on peut tirer des induction-. Il faut se rappeler qu'assez
CHAPITRE XXV.
LA PRESENTATION.
« Vosra, 1807.
DE L'AMOUR. 55
femmes par le cœur; c'est pour cela qu'elles sont plus sensibles.
On grand travail oliligé et dans le métier que nous avons fait
toute la vie, console, et pour elles rien ne peut les consoler que
la distraction.
CHAPITRE :
DE LA PUDEL'îl
loi, ûlle de la
chose apprise. C'est peut-être la seule
i
» am-
voyages de Boiifraiimlle, d Cook, etc.
I
•
Voir le,-
•
donne.
oraux, semble se muser au moment où elle se
bB ŒUVRES DE STEiNDÏIAL.
l'anatomie comparée que nous devons demander les plus importantes ré-
Tclalions sur'nous-inèmes.
1 Fait voir son amour d'une façon nouvehe.
DE L'AMOUR. 57
son mari; et, ce qui est plus grave, elle croit blesser la pudeur
si elle montre quelque* enjouement devant tout autre que ce
mari l
. C'est peut-être à cause d'une attention si délicate que
les Anglais, gens d'esprit, laissent voir tant d'ennui de leur
bonheur domestique. A eux la faute, pourquoi tant d'orgueil 2
7
Qui pourra douter, m'eût-il dit, que je ne sois ici par vos or-
l
dres . »
(tons 1
,
qui ne peuvent pas exister chez les hommes, et souvent
délicatesses ucn fondées dans la nature; toutes i
peut-être j
telle femme aimable montre dé la f oid. i r
ont raison. Ne pas aimer quand ou a reçu du ciel une âme faite
1 La pudeur est une des sources du goût pour la parure; pur tel ajus-
tement une femme se promet plus ou moins. C'est ce qui fait que la pa-
rure est déplacée dans 1a vieillesse.
vous dit : <x Mon cher ami, dès que vous me plairez, je vous le
dirai, et je serai plus aise que vous, car j'ai beaucoup d'estime
pour vous. »
Vive satisfaction de Constance , s'écriant après la victoire de
pour parler plus juste, n'exigent pas que les contes qu'on leur
fait soient assez gazés, et ne perdent leurs voiles qu'à mesure
3
du degré d'ivresse et de folie
1
Note de la page 58.
* Voir re ton de la société à Genève, surtout rians les familles du haut;
utilité d'une cour pour corriger par le ridicule la tendance à la pruderie;
Duclos faisant des contes à madame de Rochefort : « En vérité, vous nous
croyez trop honnêtes femmes. » Rien n'est ennuyeux au monde comme
la pudeur non sincère.
3 Eli! mon cher Fronsac, il y a vingt bouteilles de Champagne enhv
Je conte que tu nous commences et ce que nous disons à celte heure
DE L'A II OUI*,. 01
5" Et aux femmes des plaisirs plus enivrants ; comme ils font
vaincre une habitude puissante, ils jettent plus de trouble dans
les expose à se laisser un peu mener par leurs amies qui n'on
L i
\
62 ŒUVRES DE STENDHAL.
paslemême manque 1 à se reprocher. Elles donnent de l'attention
à la grâce céleste.
Si quelquefois leur familiarité ressemble à de !a tendresse*
c'est que ces âmes angéliques sont coquettes sans le savoir. Par
paresse d'interrompre leur rêverie, pour s'éviter la peine de
parler, et de trouver quelque chose d'agréable et de poli, et qui
qu'à demi : être franche serait pour elles comme sortir sans
différence que donne une plus grande fortune, une plus grande culture
de l'esprit, l'habitude de plus hautes pensées, et par dessus fout, e»
malheureusement, un orgueil plus irritable.
Telle parole qui irrite une princesse ne choque pas le moins du monde
une bergère des Alpes. Mais, une fois en colère, la princesse et la bm-
gère ont les mêmes mouvements de passion.)
RESUME.
L'erreur commune est d'en agir avec les tommes comme avec
des espèces d'hommes plus géuéreux, plus mobiles, el surtout
avec lesquels il n'y a pas de rivalité possible. L'on oubl
CHAPITRE XXVII.
DES REGARDS.
ginale de faire des récits, par des mots entrecoupés qui disent
tout et rien. Il fait tout entendre; mais libre à qui que i
lent aux femmes, je dis même les plus honnêtes. Celte fripon-
nerie est une repré^aille cruelle, mais juste, de la tyrannu
hommes.
64 ŒUVRES DE STENDHAL.
CHAPITRE XXVIII.
DE L'or.CUEIL FÉMININ.
Les femmes entendent parler toute leur vie, par les hommes,
d'objels prétendus importants, de gros gains d'argent, de succès
pour son amant, et se brouillera à jamais avec lui pour une que-
relle d'orgueil, à propos d'une porte ouverte ou fermée. C'est là
leur point d'honneur. Napoléon s'est bien perdu pour ne pas cé-
der un village.
J'ai vu uue querelle de cette espèce durer plus d'un an. Une
femme très-distinguée sacrifiait tout son bonheur plutôt que de
mettre son amant dans le cas de pouvoir former le moindre
doute sur la magnanimité de son orgueil. Le raccommodement
fut l'effet du hasard, et chez mon amie, d'un moment de fai-
Serait-ce que plus une femme jouit avec transport, dans le cou-
Deh quando
! tu sarai tornato al mondo,
S rna mi
:
fè : disfec-emi ma rem ma;
Saisi colui, clic inannellata pria,
crime de son mari aux amis qu'elle avait lai-sé.-> sur la terre.
Nello délia Pietra obtint la main de madonna Pia, Tunique
héritière des Tolomei, la famille la plus riche et la plus noble
1
Iléias! quand tu seras de retour au monde des vivants, daigne aussi
m'accorder un souvenir. Je suis la Tin; Sienne me donna la vie : je trou-
vai la mort dins nos marenimes Celui qui en m'épousant m'avait donné
ion anneau sait mon histoire.
68 ŒUVRES DE STEiNDÎIAL.
l'histoire de sa mort.
Celle constance dans la vengeance de l'orgueil ne se voit
guère, je crois, que dans les pays du Midi.
Eu Piémont, je me suis trouvé l'involontaire témoin d'un fait
bes, qui sont belles même dans !e sein de la raorf , elle avait an
grand nez aquilin dont je n'onblierai jamais le contour noble et
tendre. Je quittai ce lieu funeste; cinq ans après, un détache-
ment de mon régiment accompagnant l'empereur à son couron-
nement comme roi d'Italie, je me fis conter toute l'histoire.
DE L'AMOUR. 69
'"*,
J'appris que le mari jaloux, le coralc avait trouvé un matin,
accrochée au lit de sa femme, une montre anglaise appartenant
à un jeune homme de la peine ville qu'ils habitaient. Ce jour
même il la conduit dans le château ruiné, au milieu des bois
de la Sesia. Comme Nello délia Pietra, il ne prononça jamais
ane seule parole. Si elle lui faisait quelque prière, il lui présen-
tait froidement et eu silence la montre anglaise qu'il avait tou-
jours sur lui. 11 passa ainsi près de trois ans bcul avec elle. Elle
Si, auprès des femmes à orgueil féminin, l'on prend les inju-
res avec grâce, ce qui e^st facile à cause de l'habitude de la vie
faut souvent avoir une querelle avec son voisin pour l'éviter
avec sa maîtresse.
Miss Corncl, célèbre actrice «r z.w.œcs, voit un jour entrer
chez elle à l'improvisie le riche colonel qui lui était ulile. Elle
se trouvait avec un petit amant qui ne lui était qu'agréable.
Oerlé.
solitude de l'âme.
mer. « J'aime mieux le voir en société que seul avec moi. s Une femme
du plus grand génie ne ferait pas mieux, c'est qu'elle ose être parfaite-
ment naturelle et qu'elle n'est gênée pur aucune théorie. « Je suis plus
heureuse actrice que femme d'un pair. » Grande âme que je dois me con-
server amie pour mon instruction. ,
soupçon, et qu'il faut avoir éprouvées pour y croire, car l'on est
rieurs.
CHAPITRE XXIX.
by affection or duty.
Ivanhoe, tome III, pige 220.
car la peur n'est jamais dans le danger, elle est dans nous.
Ce n'est pas que je prétende déprécier le courage des fem-
mes : j'en ai vu, dans l'occasion, de supérieures aux hommes
les plus braves. Il faut seulement qu'elles aient un homme à
aimer; comme elles ne sentent plus que par lui, le danger di-
J'ai trouvé aussi chez des femmes qui n'aimaient pas l'intrépi-
plus admirable qui puisse exister sur la terre. Toutes les autres
des forces dans cette habitude des sacrifices que la pudeur fait
contracter.
Un malheur des femmes, c'est que les preuves de ce courage
restent toujours secrètes et soient presque indivulgables.
m'a tout dit : c'est une belle àme; mais que les pages que l'on
vient délire sont froides auprès de ce qu'il me disait!
nova rougir aussi. Elle trouve bien l'art de soustraire ses yeux
noirs et sombres à l'observation des gens dont sa délicatesse de
femme redoute la pénétration; mais j'ai vu cette nuit, à cer-
- août 1818
CHAPITRE XXX
times, et c'est pour tuer le seul bonheur qui leur reste, c'est
les unes après les autres, leur persuade gravement que si «lies
immense bonheur qui lui reste, pour paraître, avec une robe
dune éclatante blancheur, devant un gros bu!or déjuge qu'on
sait aveugle depuis cent ans, et qui crie à lue-tête : « Elle est vê-
tue de noir. »
CHAPITRE XXXI.
froid, est venu passer deux heures avec moi. « Vous devriez re-
de fait qu'il n'a jamais rien craint au point d'y penser deux
jours. Au lieu de cette insouciance, depuis deux ans, il cher-
chait à chaque minute à avoir du courage ;
jusque-là il n'a-
la femme qu'il aimait que deux fois par mois, nous l'avons
vu ivre de joie passer les nuits à lui parler, parce qu'il en
avait été reçu avec celle candeur noble qu'il adorait en elle.
***
Il tenais qu madame et lui avaient d f ux aines hors de
devait à un accueil qui lui semblait moins froid était bien infé-
rieur en intensité au malheur que lui donnait une réception sé-
**'
vère '. Madame manquait quelquefois de franchise avec lui :
voilà les deux seules objections que je n'aie jamais osé lui faire.
'
C'est une chose que j'ai souvent cru voir dans l'amolli que celte
disposition à tirer plus de malheur des choses malheureuses '{uc de bon-
au nombre des hommes les plus fermes et les plus spirituels que
j'aie connus.
J'ai cru voir qu'après ces visites sévères, il r 'était tranquille
mour.
« Ce n'est qu'alors qu'il dépouille tous les enfantillages de la
plus recueilli ,
plus mystérieux ,
plus éternellement un dans
son objet, que la cristallisation de l'amour. Alors les seules
er
1 Mordaunt Merton, I vol. du Pirate.
82 ŒUVRES DE STENDHAL.
lant à un vieux savant. Je ne pouvais sans rougir entendre
nommer la porte près de laquelle habile l'amie de Léonore.
« Même les rigueurs de la femme qu'on aime ont des grâ
ces infinies., et que l'on ne trouve pas dans lef moments les
plus flatteurs auprès des autres femmes. C'est ainsi que les
grandes ombres des tableaux du Corrége, loin d'être, comme
chez les autres peintres des passages peu agréables ,
mais ,
1
Puisque j'ai nommé le Corrége, je dirai qu'on trouve dans une tête
d'ange ébauchée, à la tribune de la galerie de Florence, le regard de
l'amour heureux; et à Parme, dans la Madone couronnée par Jésus, les
yeux baissés de l'amour.
Corne what sorrow can,
It cannot countervail the exchange of joy
DE L'AMOUR. 83
L'ULTIMO DI.
àxacheontica-
A ELVIRA.
Vc li tu dove il rio
Lambendo un mirlova
Là del riposo mio
La pietra surgerà.
Il passero amoroso,
E il nobile usignuol
Enlio quel mirto ombro&e
Rac'coglieranno il vol.
Appoggia il bian o
Gu quella bruna pi
Le torlorc verrai ,
Il nido intrecieran.
S ogr.i anno, il di cbe
M'osasli tu infedel,
Faro la su discendere
La foLore del ciel.
Te linv.bn I
i.
84 ŒUVRES CE STENDHAL.
sieurs nobles habitudes, et qu'à cet égard du moins il se jugeail
correctement : s'il eût vécu, et que les circonstances 1 eussent
un peu servi, il eût fait parler de lui. Peut-être aussi qu'à force
de simplicité, son mérite eût passé invisible sur celte terre.
lasso
Quanti dolci pensier, quanto desio,
Mené coslui al doloroso passot
Dame.
CIIÀPITUE XXXII.
OE I. INTIMITE.
Or pegno di dolor,
Torno a posarti in petto,
Qitest' nppasbito fior.
Corne li fu rapito,
C'îme fu reso a te.
S. P.vr.AEL.
* Pauvre malheureux! combien de doux pensers et quel désir, constant
le conduisirent à sa d°-nière neure. Sa ligure était belle et douce, sa che-
velure blonde, seulement une noble cicatrice venait couper un de se»
sourcils.
DE L'AMOUR. 83
avec trouble : il voit qu'il est aimé. En parcourant avec elle les
licate poux les plus belles fleurs, un moment qui peut eue fatal
1
Vie dt Haydn.
«20 septembre 1811
8 A la première querelle, madame Ivcrnetta donna son conpé au p îuvre
Bariac. Djri c était véritablement amoureux, ce congé le désespéra; mais
son ami tiuiilaume Balaon, <lunt nous écrivons la vie, lui lut d'un yrand
secours, cl lit si bien qu'il apaisa la sévère Ivcrnctta. La pan se lit, et la
8G ŒUVRES DE STENDHAL.
On ne saurait trop louer le nature?. C'est la seule coquetterie
permise dans une chose aussi sérieuse que l'amour à la Wer-
ther, où l'on ne sait pas où l'on va et, en même temps, par un ;
il vaut mieux se taire que de dire hors de temps des choses trop
tendres ; ce qui était placé , il y a dix secondes, ne l'est plus
du tout, et fait tache en ce moment. Toutes les fois que je man-
quais à celte règle 2 et que je disais une chose qui m'était venue
,
pour essayer de jeter quelque variété dans la forme de cet essai. Il n'a
sirs que l'on donne à ce qu'on aime, qui met cette passion si
ment ?
folie.
CHAPITRE XXXIII.
CHANTRE XXXIV.
DES CONFIDENCES.
si ce que vous dites est vrai, que vous avez d<^. plaisirs mille fois
Une femme peut trouver une amie perfide, elle peut trouver
passion ,
passion qu'on a l'insolence de sentir pour une autre
qu'elle, tandis que son amant s'endort à tes côtés.
C'est le seul cas où la haine produise bonheur; c'est qu'elle
* Veni* , W19.
92 ŒUVRES DE STENDHAL.
réussir donne du charme à cette occupation. La jalousie pour
l'amie prend masque de .<i la haine pour l'amant; autrement
comment pourrait-on haïr à la fureur un homme qu'on n'a ja
mais vu? On n'a garde de s'avouer l'envie, car il faudrait da> •
traînées déjà par l'instinct 1 qui leur dit que c'est <i la grande
affaire de leur vie, et qu'elles ne sauraient trop tôt s'en occu-
per.
le hasard.
Ce qu'il y a peut-être de plus sage, c'est de se faire soi-même
son propre confident. Ecrivez ce soir, sous des noms emprun-
tés, mais avec tous les détails caractéristiques, le dialogue que
vous venez d'avoir avec votre amie et la difficulté qui vous
3
voyez la fin des dîners d'hommes. Ce sont les sonnets de Baffo
que l'on récite et qui font un plaisir infini, parce que chacun
prend au pied de la lettre les louanges et les transports de son
vivacité qui laisse à mille lieues Horace, I'roperce, la Fontaine et tous les
94 ŒUVRES DE STENDHAL.
voisin, qui bien souvent ne veut que paraître gai ou poli. Les
CHAPITRE XXXV.
DE LA JALOUSIE.
attachante.
A l'instant où naît la jalousie, la même habitude de l'âme
* Yoilà une folie de l'amour; cette perfection que vous voyez n'en est
pas une pour lui.
DE L'AMOUR. 95
le rival e^i fameux par ses beaux chevaux, qui lui font faire dix
faire peur.
dire, à mon grand regret, que, si par hasard vous n'avez pas la
justice d'aliendre que votre tour soit venu, il faut que l'un de
nous meure. »
Votre rival est très-probablement un homme non passionné,
et peut-être un homme très-prudent, qui, une fois qu'il sera
convaincu de votre résolution, s'empressera de vous céder la
Je suis entré dans quelques détails, p;trcv que, daus ces- mo-
ments de jalousie, on perd la tète le plus souvent ; des conseils
écrits depuis longtemps font bien, et, ! ssentiel étant de feindre
du calme, il est à propos de prendre le ton dans un écrit philo-
sophique.
Comme l'on n'a de pouvoir sur vous qu'en vous ôtant ou vous
faisant espérer des choses dont la seule passion fait tout le prix,
1
Comme dans le Curieux impertinent, nouvelle de Cervantes.
* Des dagatelles légère* comme l'air semblent à un jaloux des preuves
•ussifortes que celles que l'on puise dans les promesses du suint Évangile.
G
98 ŒUVRES DE STENDHAL.
« and deeds of honour and virtue are inspired by iheir majestiC
« influence. » {The Bride of Lammermoor, i, 193.)
« J'ai passé hier trois heures avec la femme que j'aime, et avec
un rival qu'elle veut me faire croire bien traité. Sans doute il y a
eu des moments d'amertume en observant ses beaux yeux fixés
sur lui, et, en sortant de chez elle, des transports vifs de l'extrême
malheur à l'espérance. Mais que de choses neuves! que de pen-
sées vives !que de raisonnements rapides ! et malgré le bonheur
apparent du rival, avec quel orgueil et quelles délices mon amour
se sentait au-dessus du sien! Je me disais : Ces joues-là pâli-
raient de la plus vile peur au moindre des sacrifices que mon
amour ferait en se jouant, que dis-je, avec bonheur; par exemple,
mettre la main au chapeau pour tirer l'un de ces deux billets :
moqué. »
de cette writc, qu'il suffit de courir le monde pour voir que tout
est variable. Parmi les Ricaras, c'est un grand sujet d'offense,
si, sans le consentement de son mari ou de son frère, une femme
accorde ses faveurs. Mais, du reste, les frères cl les mari
très-contents d'avoir l'occasion de faire cette petite pohie
leurs amis.
CHAPITRE XXXVI.
SUITE DE LA JALOUSIE.
tude.
Elle vous quitte, parce qu'elle est trop sûre de vous. Vous
avez tue la crainte, et les petits doutes de l'amour heureux ne
peuvent plus naître; inquiétez-la, et surtout gardez-vous da
l'absurdité des protestations.
Dans le long temps que vous avez vécu auprès d'elle, vous
aurez sans doute découvert quelle est la femme de la ville ou
de la société qu'elle jalouse et qu'elle craint le plus. Faites la
cour à cette femme; mais, bien loin d'afficher voire cour, cher-
mais le même 2
. L'amour -passion a ses phases durant lesquelles,
académie nie r.ippelle que les libres Américains attachent le plus grand
prix à voir de belles armoiries peintes aux panneaux de leurs voitures:
ce qui les afflige, c'est que par le peu d'instruction de leurs peintres de
carrosse, il y a souvent des fautes de blason.
1 On compare la branche d'arbre garnie de diamants à la branche
d'srbre effeuillée, et les contrastes rendent les souvenirs plus vifs.
et c'est plutôt la femme qui aime avec transport. Quel que soii
l'amour senti par l'un de? deux amants, dès qu'il est jaloux, il
connaître. La jalousie peut plaire aux femmes qui onl delà G< rté,
Ligonier), qui faisait aussi l'amour avec son laquais. ! \và signait si
A.
102 ŒUVRES DE STENDHAL.
Une des conséquences du principe de la cristallisation, c'est
André Chénier.
lui dit-elle, que vous ne m'aimez plus; vous croyez plus ce que
vous voyez que ce que je vous dis. »
CHAPITRE XXXVII.
ROXASE.
elfes risquent infiniment plus que nous, elles ont plus sacrifié
sin ;. cela lui fait un mal du diable, mais peut fort bien s'arran-
ger, — ou bien je fais le geste de lui donner un soufflet.
CHAPITRE XXXVIII.
raisonnable.
Portugal, le Piémont).
Les provinciaux, en France, se font un modèle ridicule de ce
qué est bien loin de là, il veut que son ennemi vive et surtout
soit témoin de son triomphe.
L'homme piqué verrait avec peine son rival renoncer à la
ne s'agit que de la victoire. C'est ce que l'on voit bien dans les
» Gomme ils se font la police les uos sur les autres, par envie, pour ce
qui regarde l'amour, il y a moins d'amour en province et plus de liber-
tinage. L'Italie est plus heureuse.
DE L'AMOUR. 107
tablit une pique d'amour-propre entre la. jeune fille et son père.
On interdit au jeune homme l'entrée de la maison. On ne con-
duit plus Dona Diana à la- campagne et presque plus à l'église;
solée; aimait-elle par pique? ou est-ce une grande âme qui dé-
ainsi dire, avec les circonstances les plus flatteuses et les plus
son; et elle a été jusqu'à trois mois de suite sans lui donner
de sujets de plainte. Il avait établi une pique d'amour-propre
choquante, sousbeaucoup de rapports, entre sa maîtresse <•;
sa
fille.
Urammont.
1 Voir les confessions d'un homme singulier (conte, de mistress Cpi«V
2
Lettres de madame du Deffant, Mémoires de Lauzun.
7
HO ŒUVRES DE STENDHAL.
La maîtresse la plus négligée, dès qu'elle nous fait voir qu'elle
6
Volney, tableau des États-Uais d'Amérique, page 49i — 496,
DK L'AMOUR- 111
sa vie '. Ton! cela sérail incroyable chez les nations civil.
CHAPITRE XXXIX.
de l'amour a querelle».
11 y eu a de deux espèces :
cher.
Immédiatement après l'amour-passion et payé de retour, en-
tre gens de la même portée, il faut placer, pour la durée, l'a-
aime le mieux.
Il y a une fausse espèce d'amour à querelles. J'ai |
ris dans
une lettre d'une femme d'infiniment d'esprit le chapitre 53 :
premier des |
laisirs. Il me semble que l'amour seul peut I emporter, el
l'amour est une maladie heureuse qu'on ne peut se procuicr tomme un
ministère.
:
aillant, mais force frères et sœurs qui n'en avaient pas davan-
II. et madame de Pons, dame d'aiour de madame la du-
de Berri, étaient de leurs parents et de la même pro-
paré des plus riches dentelles, des plus riches habits, muni d'ar-
gent, de boucles, de joyaux; il se faisait désirer, se plaisait à
DE L'AMOUR. Il",
dont elle était jalouse ; et du mal à des gens qui lui plaisaient,
ob.-curs avec lui et avec des gens sans aveu, elle avec qui mil a
REMEDES A L AMOUR.
1
Le danger de Henri Mort on, clans la Clyde.
Nous l'avons répété sans cesse, l'amour d'un homme qui aime
L'ami guérisseur doit avoir devant les yeux qu<\ s'il se pré-
vices les plus évidents et les infidélités les plus atroces. C'est
1
Uniquement pour abréger, et en demandant pardon du mot non
"* de Duclos. Voir
* Madame Dornal et Serigny, Confessions du comte
note de la page 50; mort du général Abdhallah, à Bologne.
la
» J'ai pleuré presque tous les jours. (Précieuses paroles du 10 juin.)
1
1Î8 ŒUVRES DE STENDHAL.
les plus aimables, que j'ai le plus aimé ma pauvre maîtresse,
Romagne K
J'épiais, sur la pendule superbe du brillant salon où j'étais
exile, l'heure où elle sort à pied, et parla pluie, pour aller voir
on amie. C'est en cherchant à l'oublier que j'ai vu que les
* SoivbU.
DE L'AMOUR. U9
les hommes d'en agir ainsi dans leur monde. Mai-, aupi
Lé-more, je trouvais un monde où tout était céleste, temli
car tout est signe en amour; par exemple, elle ne vous donne
pas le bras pour monter à sa loge ; cette niaiserie, prise au tra-
plus en un mot elle sera digne de nos respects, plus grand sera
le danger qu'elle court.
Il est toujours périlleux pour une jeune personne de souffrir
CHAPITRE XL.
Le nerveux, ou Voltaire;
1
L'athlétique, ou Milon de Crotone .
1
Les souliers sans rubans du ministre Roland ; « Ah! monsieur, tout
est perdu, » répond Dumourier. A la séance royale, le président de l'as-
semblée croise les jambes.
DE L'AMOUR. 123
CHAPITRE XLI.
DE LA FRANCE.
froid philosophe.
italiennes.
quitte, et n'en est que plus content de lui en disant à ses amis
avec quelle supériorité de manières, avec quel piquant de pro-
cédés il l'a plantée là.
l
savais .
1
Historique. Plusieurs, quoique fort curieux, sont chnquiVd'apprcn-
dre des nouvelles : ils redoutent de paraître inférieurs à celui qui les
leur conte.
1
Mémoires de M. Réalier-Dumas. La Corse, qui, par sa population,
ment par pusillanimité qu'on les voit à vingt ans fuir la vue
d'une jeune fille qu'ils ont trouvée jolie. Quand ils se rappellent
êîre que la mort peu de chose dans ce moment aux Français, tant
parait
lisation l'a arrangé et paré, s'allie fort bien avec la plus en-
gement. Murât et Ney sont les hommes le- plu- brave- que j'ai
-
transes continuelles Voir les Lettres de madame d- l.
a pré-
CHAPITRE XLIÎ
SUITE DE LA FRANCE.
1
Les écrivains les plus graves croient, en Angleterre, se donner un
air cavalier en citant des mots français qui. la plupart, n'ont jamais été
français que dans les grammaires anghieee. Voir les rédacteurs de l'E-
ditiburyh-Review ; voir les Mémoires de la comtesse de Lichtnau, mal-
tresse de l'avant-dernier roi de Prusse.
DE L'AMOUR. 129
coup plus utile que i'honneur vrai aux plaisirs de notre vanité.
On voit des gens très-bien reçus dans le monde avec de l'hon-
se laisservoir admirant 1
, c'est-à-dire inférieur, non-s< ulemenl
d'être troublé dans des plaisirs vivi ment sentis met-une admi-
y a plu*-: avanl
veut de la considération ne pense qu'à autrui; il
qu'en
1789, la sûrelé individuelle ne se trouvait en France
lui
ÎS
" poussa l'indiscrétion au point de traiter le pauvre robin de voleur,
avec beaucoup de dignité, et n'en sortit que pour aller déposer sa plainte
cbez un commissaire. Le redoutable corps dont il a l'honneur d'être
membre n'a jamais voulu consentir qu'il s'en désistât. L'ali'aire vient
a-t-on dit, car on ne peut douter de son talent pour emporter les places
de haute lutte. » Supposez un philosophe obscur au lieu de maître Per-
not. Utilité du duel.
Grimm, troisième partie, tome II, page 102.
Voir plus loin, page 496, une lettre assez raisonnable de Beaumarchais,
qui refuse une loge grillée qu'un de ses amis lui demandait pour Figaro.
Tant qu'on a cru que cette réponse s'adressait àNm duc, la fermentation
a été grande, et l'on parlait de punitions graves On n'a plus fait qu'en
bien ces habitudes, qui, à la vérité, perdent tous les jouis «le
leur force, mais dont les Français ont encore pour un siècle, fa-
CHAPITRE XLIII.
DE L ITALIE.
De plus, l'Italie est un pays où l'utile, qui fut la vertu des ré-
vilement qu'il peut: Le roi mon maitre (voir les mémoires de Noaillcs, de
Torcy et de tous les ambassadeurs de Louis XIV); c'est tout simple :
par ce tour de phrase, il proclame le rang qu'il occupe parmi les sujets.
leurs est aux mains delà société; c'est tout simple, la société ne
donnant presque point de plaisirs à un peuple qui n'a pas le
cha, elle n'a que peu d'autorité. Les ennuyés blàmeni bien les
gier dans l'ironie. Plusieurs jeunes gens ont pris un autre parti,
CHAPITRE XLIY.
* 50 septembre 1S19*
DE L'AMOUR,
en te le plongeant dans la poitrine : Ma il ie
al rte.
en un an d;; séjour les femmes de tous les aoti - pays lui de-
viennent insupportables.
11 voit les Françaises avec leurs petites - >im.i-
cherches le bonheur. »
très-peu vécu.
• Heu ! ma'.e num
Jam Icncr issuevit mu
I IT.
136 ŒUVRES DE STENDHAL.
jusqu'à la lie le malheur de la voir préfe'rer un rival. Ils sont là
pour contrecarrer cet amant fortuné. Rien ne leur échappe, et
tout le monde voit que rien ne leur échappe ; mais ils n'en con-
tinuent pas moins, en dépit de tout sentiment d'honneur, à
vexer la femme, son amant et eux-mêmes, et personne ne les
hlàme, far ils font ce qui leur fait plaisir. Un soir, l'amant,
d'aller à lui et. de leur conter leurs griefs, ils répandent sourde-
ment dans le public des bruits défavorables à ce pauvre étran-
ger. En France, l'opinion forcerait ces gens à prouver leur dire
CHAPITRE XLV
DE i/ANClETl ;
RE.
8.
138 ŒUVRES DE STENDHAL.
tôt à charge. De là, pour les hommes, la nécessité de s'enivre
l
tristement chaque soir , au lieu de passer, comme en Italie
saire font quatre ou cinq lieues tous les jours, comme silhomme
était créé et mis au monde pour trotter. Ils usent ainsi le
fluide nerveux par les jambes et non par le cœur. Après quoi
ils osent bien parler de délicatesse féminine, et mépriser i'L's
pagne et l'Italie.
•
maladive de sa vanité. Le Français, étant aimable a\<
de tous les moments, dit tout à ce qu'il aime. C'est une habi-
tude; sans cela il manquerait d'aisance, et il sait que sans ai:
il n'y a point de grâce.
C'est avec peine et la larme à l'œil que j'ai osé é< i ire tout < e
un roi, pourquoi dirais-je d'un pays autre cliose que cequi m'en
semble, et qui of course peut i b unie ,
uniquement
parce que ce pays a donné naissance à la femme la plm i
leur vie mollement couchées sur des divans fort bas, elles en-
tendent parler d'amour ou de musique six heures de la journée.
Le soir, au théâtre, cachées dans leur loge pendant quatre heu-
res, elles entendent parler de musique ou d'amour.
Donc, outre le climat, la constitution de la vie est aussi favo-
CHAPITRE XLVI.
SUITE DE L ANGLETERRE.
Depuis deux >ièeles, l'Irlande est à p< u près au- i mal g<
impossible.
142 ŒUVRES DE STENDHAL.
il y a peu en Sicile de ce mal moral appelé loi et gouverne-
ment 1 .
Ce sont les gens âges et les prêtres qui font et font exécuter
les lois, cela paraît bien à l'espèce de jalousie comique avec la-
quelle la volupté est poursuivie dans les îles britanniques. Le
1
J'appelle mal moral, en 1822, tout gouvernement qui n'a pas les
des ^airs avec les sommes qu'eux et leurs familles reçoivent de l'Etat. Par
le savent tous les deux. Dès lors, ni le lord ni le paysan n'ont plus assez de
loisirpour songer à l'amour: ils aiguisent leurs armes, l'un en public et
avec orgueil, l'autre en secret et avec rage.(L'Yeomanry et les Whiteboys.)
3 Plunkell Craig, Vie de Curran.
DE L'AMOUR.
La sociélé est infiuimenl plus avancée en I
<
de Weruer ou de
Je ne dirai rien du terrible dimanche écossais, auprès duq il
Citizen. Mais ce sont les aristocrates qui, par tout pays, achè-
tent et jugent un journal littéraire et la littérature; et depuis
quatre ans, ceux d'Angleterre ont fait alliance avec les évo-
1
Le même fait en Amérique. En Ecosse, étalage des titres.
De. LAMOi.n
CHAPITRE KLV11
DE l'eSUo.NE.
'
jourd'hui !
lagues.
huitième.
L'Espagne m'est bien utile pour une comparaison : le seul
l
a le général no importa .
CHAPITRE XLVIII.
'
Voir les charmantes Lettres de M. Pecchio. L'Italie est pleine Lt,
DE L'AMOUR. |fj
chienne. Chez elle, l'amour est un culte, et, quand elle a'alta-
7 juin 1809.
vie à fureter tous les coins de Vienne. C'est à qui sera le plus
Taux de la garde, les princes mêmes, sont allés perdre leur temps
lui faire les av< u\ le> plus scabreux. Elle le soigna avec uu dé-
que davantage.
« On sent qu'étranger et vainqueur, et toute la haute société
terre.
pays avaient fait leur choix. Mais ce choix était constant; et j'ai
1
Voir les Mémoires de la margrave de BareiUh, et Vingt ans de séjo*s
mité. 11 me semble voir qu'ils oni héritéde leur moyeu âge, o< d
bonne foi. C'est pour cela que, tous les dix ans, il- ont un nou-
de la patrie.
les
L'on n'a pas plutôt fait cinq cents lieues en Allemagne qu<
dislingue dans ce peuple désuni et morcelé, un fond d'enthou-
siasme doux cl tendre plutôt qu'ardent et impoli
nous verrons le moyen âge sortir brillant de lumière à dos veux, et noua
fuimerons.
» Titre d'un des romans d'Au-u te la Funtaine. La Vie piuibie, juin.
\Û2 ŒUVRES DE STENDHAL.
Je vois une nouvelle preuve de cette disposition commune aux
Allemands dans le code autrichien, qui exige l'aveu du cou-
pable pour la punition de presque tous les crimes. Ce code, cal-
culé pour un peuple où les crimes sont rares, elpluibi un accès
de folie chez un être faible que la suite d'un intérêt courageux,
raisonné, et en guerre constante avec la société, est précisé-
ment le contraire de ce qu'il faut à l'Italie, où l'on cherche à
l'implanter ; mais c'est une erreur d'honnêtes gens.
J'ai vu les juges allemands en Italie se désespérer des sen-
tences de mort, ou l'équivalent, les fers durs, qu'ils étaient obli»
CHAPITRE XLIX.
Ce soir j'ai trouvé dans une loge un homme qui avait quel-
que chose à solliciter auprès d'un magistrat de cinquante ans.
Sa première demande a été : « Quelle est sa maîtresse? CM au-
vicina adesso? » Ici toutes ces affaires sont de la dernière publi-
cité, elles ont leurs lois, il y a la manière approuvée de se
conduire, qui est basée sur la justice, sans presque rien de con-
ventionnel , autrement on est un porco.
« Qu'y a-t-il de nouveau? » demandait hier un de mes amis,
arrivant de Volterre. Après un mot de gémissement énergique
sur Napoléon et les Anglais, on ajoute avec le ton du plus vif inîé-
grand trait des mœurs Allemandes, c'est le far nienle de l'Italie», c'est
comptant de loin les regards que son infidèle lame a son BUC-
cesseur. Il est très-ehanigé, et dans II' dernier désespoir; c'e t
étiolés par les mille pet-Us soins de la vanité y trouvent des plai-
des moments d'ivrc>-e, que la passion la pins ép( rdue n'a jamais
1
amenés sous le méridien de Pari.-, .
mais au '
mes distingués p r l'< -prit: 1
ï
la furia francese ; c'est pour cela qu'un Français des plus vul-
gaires, pour peu qu'il ne soit pas un fat spirituel à la Déma-
sure, paraît toujours un être supérieur à une Italienne. (L'amant
5° Personne ne lit ;
des gens qui sont convenus de n'imprimer jamais que dans une
langue commune, celle qu'on parle à Rome. Rien n'est absurde
comme une comédie dont la scène est à Milan et dont les per-
qui se distingue.
G° Le patriotisme d'ontich
Cet orgueil qui non hercher Feslhne de
toyens, et à faire c ews, expulsé de toute n
prise, vers l'an 1550, pari
Ire bébéu r
éirai:
d dit : D-iiostro
bliques, est pour eux un vieux tour de passe-passe qui les fait
Alors on les voit pâlir. C'est une des formes de l'extrême sensi-
bilité, mais ce n'est pas une de ses formes aimables ;
par con-
séquent, c'est une de celles que j'admets le plus volontiers en
preuve de son existence.
J'ai voulu voir l'amour éternel, et après bien des difficultés
dit, depuis (ivnle-quatre ans. Elle est encore belle, mai- il \ .>
ris ne doit rien à Bologne. Sans s'en do h ter, ces pauvres gens
répètent encore leur catéchisme de trois sous.
12 juillet 1821. — A Bologne il n'y a point d'odieux dans la
pays-ci (Xaples).
Molti averne,
Un goderne
E cambiar spesso.
fojage de Shylock.
DE L'AMOUR. m
CHAPITliE L.
L AMOUR àl
31.
Les jeunes gens des deux sexes, lorsque l'hiver est venu,, qui
comme en Russie est la saison gaie du pays, courent ensemble
en traîneaux sur la neige le jour et la nuit, ils font des courses
occupent tou." res instants La religion chrétienne, interprétée par les jé-
CHAPITRE LI.
veur de la nouveauté.
162 ŒUVRES DE STENDHAL.
Après avoir baisé la main d'une femme, on s'avançait de grade
notions que nous tirons des ballades des troubadours sont va-
gues et peu précises. On a trouvé jusqu'à uu contrai de mariage
en vers. Après la conquête eu 1528, pour cause d'hérésie, les
1822.
Tant de publicité et d'officiel dans l'amour semblent au pre-
mier aspect ne pas s'accorder avec la vraie passion. Si la dame
disait à son servant « Allez pour l'amour de moi visiter la
:
tombe
de canne au plafond
DE L'AMOUR. 163
force était tout, amis voyons le se: e le §hk faible moins tyran-
nisé qu'il ne légalement auj> uni les pau-
'
l'est IS
renses.
Un amant qui. après <Xn ans d'intimité, abandonnai! M pau-
faisait arracher un ongle, et qu'il lui fil présenter cet ongle par
cérémonie, qui fut fort longue, daigna lui pardonner; il fut ré-
reuse Provence.
ils s'y agitent d'une manière hideuse, ils y tiennent la place des
jeunes femmes qui la remplissaient de leurs grâces il n'y a qu'un
instant.
CIIAPlTRi; LU.
faii que Ton va lire eu! lieu vers l'an 1 I80j el 1 lii-ioin- fui
1
vers 1250 ; l'anecdote est assurément fort connu
nuance des mœurs est <lan^ le style. Je supplie qu'
nielle de traduire mot à mot et sans chercher aucunement l'élé-
tes dans son texte; il • trop loué et trop peu connu les troubjJour».
168 ŒUVRES DE STENDHAL.
lire : « Or ç.i, dis-moi, Guillaume, si une femme te faisait sem*
* blant d'amour, oserais-tu bien l'aimer? » Guillaume, qui s'en
était aperçu, lui répondit tout franchement : « Oui, bien ferais-
« je, madame, pourvu seulement que le semblant fût vérité.
' Faire.
U inventait les airs al les paroles.
DE L'AMOUR. lG:i
* \
ar moi trompé, ei qe<' vo pensers no seroni pas vain ai
é! ii allé à l'ép mer, et tel qui le savait ajouta ii".'i! et ,i; en tel
l.
1"
170 ŒUVRES DE STENDHAL.
« demanderai. — Soigneur, axitant qu'il vous plaira me de*
« mander, dit Guillaume, autant vous dirai-je la vérité. » Et
monseigneur Raymond demande : « Guillaume, si Dieu et la
« bien chanter; mais je veux savoir s'il vous plaît qui est votre
a clame. — seigneur, au nom de Dieu, dit, Guillaume, \
Ah 1 z
« Que na joie,
« Que je ne lui en aie menli volontiers.
a Car I »cti me,
a Mai -c d'enfant,
« El i
ivrir son cœur à un outre homme,
a A moins qu'il ne puisse le servir et l'aider.
mo;)d lui dil : « Je veux que nous allions à son châ au, i .r |
gressc, et après dîner ils parurent avec tous l< • boum urs d'un
1
En, manière'de parler parmi les Proveii'/iux, que nous tra-luiso»*
par le airt
172 ŒUVRES DE STENDHAL.
noble congé et vinrent à Roussiilon. Et aussitôt que Raymond le
par elle sut bien que Guillaume n'avait pas tort. Et pour cela
elle lui dit et commanda qu'il fit une chanson par laquelle i!
« La douce pensée
« Qu'amour souvent me donne. »
seigneur Guillaume. Elle lui répondit et dit que le cœur avait été
laume y avait laissé. Et Raymond lui courut sus avjc une épée.
Elle se prit à fuir, se jeta d'un balcon en bas et se cassa la lête.
ment mise à mort. Ils lui firenl la guerre à feu el à sang. Le i"i
CHAPITRE LUI.
leur , la soli ude et un beau climat oui f.ii' naine la plus noble
11 fallait pour que l'amour parût loul ce qu'il peut dire dans
diatement ce crime.
La générosité est si sacrée ch< z ce peupl< qu'il e-t permis «le
et la vie s'écouh toute, pour ainsi dire, dan une ohtude pas-
parlé de sa maîli
ble u
de 11 ; r i i
•
froides pendant lesquelles il brûl i
I
hies des m crui ont fait la musiq
ns.
d'amour.
Ces livres si curieux soi
i
Mœurs deConslantinople. La seule minière .1.; tuer l'amour-i
blit bientôt une lutte entre les pères et les amants; bientôt ue
fut par des cdes d'amour que l'amant dévoila sa passion à la jeune
iille sévèrement surveillée par ses frères ou son père, à côté de
laquelle il faisait la promenade sacrée. Les habitudes généreu-
ses et sentimentales de ce peuple existaient déjà dans le camp;
mais il me semble que la galanterie arabe est née autour de la
1
II y a un fort s^rand nombre de manuscrits arabes à Taris Ceux de»
DE L'AMOUR. 171
FRAGMENTS
-
LE DIVAN DE L'Ail
le lil- >
dit Djamil, que |;euse s -iu d'un homme qui n'a jamais bu de
vin, qui :" fait de gain illicite, qui n'a jamais donné
paradis; mais quel est-il, cet homme que m di- — est moi, : '
misme, dit alors Ben Sohail, et d*aill< ors il y a vingt ans que tu
donc bien vrai, comme on le dit de vous, que vous êtes de tous
les hommes ceux qui avez le cœur le plus tendre en amour? —
Oui, par Dieu î cela est vrai, répondit Àrouà, et j'ai connu dans
ma tribu trente jeunes gens que la mort a enlevés, et qui n'a-
'
Cet Arouà-Ben-llezam était de la tribu de Azn dont il vient d'être
fait mention. Il est célèbre comme poêle, et plus célèbre encore comme
un des nombreux martyrs de l'amour que les Arabes comptent pane,
eux.
DE L'A M OU H. 170
gleb une fille chrétienne fort riche qui aimait un jeune musul-
man. Elle lui offrit sa fortune el 'oui ce qu'elle avait de pré-
pour lui faire une figure du jeune homme qu\ lie aimait. L'aiiisk:
lit cette figure, el, quand la jeune fille l'eut, elle la plaça
elle courut aussitôt vers Om-el-Bonain pour lui donner des nou-
velles de Oueddah. « Prends garde à ce que tu dis : s'écria celle-
elle le garda caché dans un coffre. Elle l'en faisait sortir poui
être avec lui quand elle se croyait en sûreté ; et, quand il ar-
le coffre.
tu mens! lui
toi soit séparée, que toute nouvelle de toi soit ensev< lie. Si I on
Il
1S2 ŒUVRES DE STENDHAL.
CHAPITRE LIW
par habitude moutonne. » Rien ne fait plus d'effet sur les sots
i
Je regrette de ne pas trouver dans le manuscrit italien la citation
de la source officielle de ce lait; je désire que l'on puisse le démentir.
DIS L'A MO UU. 133
objections :
la jeune famille.
2° Comme mères, elles donnent aux enfantsmâles, aux jeunes
tyrans futurs, la première éducation, celle qui forme le
plutôt que par telle autre, ce qui est toujours une affaire faite à
res, celles dont surtout dépend notre bonheur, parce qu'en l'ab-
00 toujours tenté
d'égalité. Comme ils accordent par force, est
server.
184 ŒUVRES DE STENDHAL.
i° Enfin, eu amour, à celte époque qui, dans les pays du
midi, comprend souvent douze ou quinze années, et les plus
sés: l'homme qui peut tout ne goûte qu'un seul genre d'avis,
pour passer la vie avec elle, une servante à une femme sa-
vante.
Plantez un jeune arbre au milieu d'une épaisse forêt, privé
d'air et de soleil par ses voisins, ses feuilles seront étiolées, il
femmes ont l'esprit plus vif et les hommes plus de solidité, que
les femmes ont plus de délicatesse dans les idées, et les hommes
plus de force d'attention. Un badaud de Paris qui se promenait
DE L'AMOUR. 185
yeux ouverts; elles voient tout, mais sont trop ignorantes pour
voir bien. Une femme de trente ans, en France, n'a pas les con-
aux Tuileries, et s'il était aussi bien avec le pouvoir qui règle
l'univers qu'avec celui qui règne dans l'État, il demanderait
au ciel d'accorder aux femmes, pour leur bien, huit ou dix heu-
res de sommeil de plus. Dans la situation actuelle de la société,
le loisir, qui pour l'homme est la source de tout bonheur et de
toute richesse, non-seulement n'est pas un avantage pour les
CHAPITRE LV.
vail, huit sous par jour. Tour trois cents journées, cela l'ait
sait d'un officier qui devient trop aimable, qu'il perdra l'art de
monter à cheval ; on oublie qu'il se cassera le bras la première
fois qu'il prendra celte liberté.
sons cela aux sottes, comme nous laissons aux sots la gloire de
gieux.
Que votre amie ail pass*', la matinée, pendant que vous étiez
vais goût.
de ses amis des jeunes filles de douze : « C'est auprès d'elles que
je passerai ma vie dans dix ans d'ici. » Qu'on juge de ses excla-
d'utile.
mes, une femme instruite, si elle a acquis des idées sans per-
hoin»
dre les grâces de son sexe, est sûre de trouver parmi les
considération allant
mes les plus distingués de son siècle une
presque jusqu'à l'enthousiasme.
11
190 ŒUVRES DE STENDHAL.
Les femmes deviendraient les rivales et non les compagnes de
l'homme. — Oui, aussitôt que par un édit vous aurez sup*
primé l'amour. En attendant cette belle loi, l'amour redoublera
vité de rame.)
Une femme qui a quatre enfants et dix mille livres de' rente
habitu( 1.
sans songer à rien imprimer; lire un bon livre est pour eux
un des plus grands plaisirs. Au bout de dix ans, ils se trouvent
donnent tous les jours en pratiquant leur état. Mais quelles res-
sources ont leurs femmes pour acquérir des qualités estima-
bles et nécessaires? Cachées dans la solitude de leur ménage, le
dant six ans, pour bien jouer de la harpe; pour bien peindre
privilégiés. J'espère aussi que les maris qui liront ce chapitre aèrent
moin- despotes pendant trois jours.
i<J4 ŒUVRES DE STENDHAL.
la miniature ou l'aquarelle, il faut la moitié de ce temps. La
plupart des jeunes filles n'arrivent pas même à une médiocrité
supportable; de là le proverbe si vrai: Qui dit amateur dit igno-
rant
Et supposons une jeune fille avec quelque talent ; trois ans
arres qu'elle est mariée, elle ne prend pas sa harpe ou ses pin-
ceaux une fois par mois : ces objets de tant de travail lui sont
devenus ennuyeux, à moins que le hasard ne lui ait donné
l'âme d'un artiste, chose toujours fort rare et qui rend peu
propre aux soins domestiques.
C'est ainsi que sous un vain prétexte de décence, l'on n'ap-
prend rien aux jeunes filles qui puisse les guider dans les cir-
constances qu'elles rencontreront dans la vie; on fait plus, on
leur cache, on leur nie ces circonstances afin d'ajouter à leur
force: 1° l'effet de la surprise, 2° l'effet de la défiance rejetée
sur toute l'éducation comme ayant été menteuse -. Je soutiens
CHAPITRE LVI.
de procureur fondé par le contrat social que pour les choses que je ne
puis pas faire moi-même.
Pourquoi un Français ne payerait-il pas son p"*" comme son bou-
langer? Si ncus avons de bon pain à Paris, c'est que l'Etat ne s'est pas
sante l
, et rien ne me prouve que mon bottier n'ait pas l'âme
est l'allié intime de mon é ? Donc, à moins d'un Luther, il n'y aura
tion nécessaire à une jeune miss anglaise ne lui eût fait une né-
cessité, lorsqu'elle débuta, de transporter la chaire dans le
roman * ?
trouve un bon cœur qui partage ses peines, mais toujours il est
d'un esprit qui a besoin d'un tel régime pour saisir les objets.
1
Sous le rapport des arts, c'est là le grand défaut d'un gouvernement
raisonnable, et aussi le seul éloge raisonnable de la monarebic à la Louis
XIV. Voir la stérilité littéraire de l'Amérique. Tas une seule romance
comme celles de Robert Burns ou des Espagnols du treizième siècle*.
* Voir les admirables romances des Grecs modernes, filles des Lspn-nols et
des Danois du treizième siècle, et encore mieux ies poésies arabes du septième
siècle.
198 ŒUVRES DE STENDHAL.
tuelle, laisse son partenaire isolé dans les dangers de la vie, et
qu'elle est, celte éducation, je dis qu'il vaut mieux la donner aux
jeunes filles que de. leur montrer uniquement à faire de la mu-
sique, des aquarelles, et de la broderie.
fants, c'est que, quelque bornés que soient les professeurs, les
vingt-cinq mille livres de rente, mais vous êtes quatre enfants; donc il fau-
mère leur dit qu'amour et amant sont des mots vides de sens.
i0 ŒUVnES DE STENDHAL.
CHAPITRE LVI »
TU MARIAGE.
1 Anzi certainente. ColP amoïe uno non Irova gusto a bevere acqi:a
sltra clic quelta di questo fonte predilctto. Resta naturale allora la feJsltà.
Coll matrimonio scnza amore, in men di due anni l'acqua di questo
fonte diventa aman. Esîste sempre rcro in natura il bisogno d'acqua.
I costumi fanno superare la natura, ma solamente quando si puo vin-
ccrla in un instante : la moglie indiana cbe si abruccia (21 octobre 4821)
dopo la morte del vecthio marito cbe odiiva, la ragazza europea cbe
trucida barbaramente il tenero bambino al quale testé diede vita. Senza
l'altis-imo muro dell monistero le monacbe anderebbero via.
2
Même les minuties, tout chez nous est comique en ce qui concerne
l'éducation des femmes. Par exemple, en 1820, sous le règne de ces
mêmes nobles qui ont proscrit le divorce, le ministère envoie à la ville
de Lnon un buste et une statue de Gibrielle d'Estrées. La statue sera
placée sur la place publique, apparemment pour répandre parmi les
buste du maréchal Serrurier, brave homme qui n'était pas galint, et qui
déplus avait grossièrement commencé sa carrière par le métier de sim-
DE L'A.MO UT,. 201
Mais les jeunes filles se marient avec plaisir. — C'est que, dans
le système contraint de 1 éducation actuelle, l'esclavage qu'elles
subissent dans la maison de leur mère est d'un intolérable en-
Les jeunes femmes qui ont beaucoup d'amants n'ont que faire
divorce et qui >e fera honnir par des femmes qui ont eu cia
quinte hommes.
CHAPITRE LUI
DE CE QU OS APPELLE VLT.TU.
Joanna, Alphonsi quinti Lusitaniae régis filia, tanta divini amoris flamma
prœventa fuit, ut ab ipsa pueritia rcrum caduearum pertœsa, solo cce-
CHAPITRE LVIII.
rée : « Vous n'avez denc plus d'estime du tout pour notre sexe?
« Je crois pour votre honneur que vous plaisantez. »
«Dans un voyage auBrocken avec celte vraimenl belle femme,
la partie.
reçu.
« Il y a quelques années qu'une femme de ce pays, dans un
retour de religion, dit à son mari, homme de la cour de Bruns-
wick, qu'elle l'avait trompé six ans de suite. Ce mari, aussi sot
que sa femme, alla conter le propos au duc ; le galant fut obligé
de donner sa démission de lous ses emplois et de quitter le pays
dans les vingt quatre heures, sur la menace du duc de faire agir
les lois »
<x Ici les maris ne sont pas trompés, il est vrai , mais quelles
femmes, grands dieux! des statues, des niasses à pr ;,ie organi-
:
cible à être caressées par leurs enfants. Peu à peu elles perdent
12
206 ŒUVRES DE STENDHAL.
toutes leurs idées. C'est comme à Philadelphie. Des jeunes filles
moins d'un an, les plus ennuyeuses des femmes. Pour en finii
ia suisses
nêtres.
en avait point qui eût plus de kilter ou veilleurs (qui eût plus
déjeunes gens qui allassent' passer la nuit avec elle).
page 245.
208 ŒUVRES DE STENDHAL.
beauté frappante. Enfin, se faisant courage, il osa lui demander
s'il ne pourrait pas veiller avec elle. « Non, répondit la jeune
« fille, je couche avec ma cousine; mais je viendrai moi-même
« chez vous. » Qu'on juge du trouble que causa cette réponse.
On soupe, l'étranger se lève, la jeune fille prend le (lambeau et
le suit dans sa chambre ; il croi* toucher au bonheur. « Non,
« lui dit-elle avec candeur; il faut d'abord que je demande
« permission à maman. » La foudre l'eût moins atterré. Elle
« qui était déjà au lit, tu consens que Trineli passe la nuit avec
« M. le colonel? — De bon cœur, répond le père; je crois qu'à
lit, elle eut déjeuné avec lui, elle coupe un petit morceau de
son broustplelz (pièce de velours qui couvre le sein). « Tiens,
d'approuver.
Je voudrais, si j'étais législateur, qu'on prît en France, comme
en Allemagne, l'usage des soirées dansantes. Trois fois par se-
maine, les jeunes filles iraient avec leurs mères à un bal com-
mencé à sept heures, finissant à minuit, et exigeant pour tous
Je suis heureux de pouvoir dire avec les paroles d'un autre des fait?
frais un violon cl des verres d'eau. Dans une pièce voisine, les
mères, peut-être un peu jalouses de l'heureuse éducation de
leursfilles, joueraient au boston dans une troisième, les pères •
rait aux jeunes femmes : « Vous avez choisi votre mari; soyez-lui
c ïïe hâve a System of scxual moral ly, underwhich lltoi.s mrls of wo-
men beconie rr.ercenary proslitutes wliom virtuous women are tnught
toscorn, while virluous men retain tlie privdcgeof frequenting thos*' »ery
r
women, withoul ît's being regarded as nj thing more than a venial
olïence. »
12.
.
cet objet une vérité, quelque triviale et palpable qu'elle soit; cela est
qu'en étant acheté par les gens riches, lesquels regardent les évêques
3t la Bible comme l'unique sauvegarde de leurs belles livrées.
1 Madame de'Séviçné écrivait à sa fille, le 23 décembre 1671 •
que dans celles des autres, et qu'il s'y emploierait avec succès. Le roi se
mit à rire, et dit: YtUarceaux, nous sommes trop virjx, vous et moi,
pour attaquer des demoiselles de quinze ans. Et comme un galant homme
se moqua de lui et conta ce discours chez les dames. (Tome II, page 540.
Mémoires de Lauzun, de Bezenval, de madame d'fcq.inay, etc., etc
Je supplie qu'on ne me condamne pas tout à fait sans relire ces mé-
moires.
DE L'AMOUR. 211
CHAPITRE LIX.
Parmi les jeunes gens, lorsque, l'on s'est bien moqué d'un
pauvre amoureux et qu'il a quitté le salon, ordinairement la
amusant, etc.
à la vieillesse.
qu'on met à les avoir exactement le même intérêt qu'à une par-
tie de billard. Comme la sociéié connaît aux amoureux un grand
intérêt dans la vie, quelque esprit qu'ils aient, ils prêtent le
cès des hommes plats auprès des femmes distinguées. Cependant l'amour
même hauteur que l'homme prosaïque, objet de leur mépris, qui cher-
che dans l'amour, l'amour et la vanité. Elles, elles veulent l'amour et
DE I/AMOUR. 213
» Voir une pige d'André Chénier, Œuvres, page 570; ou bi^n ouvrir
les yeux dans le monde, ce qui est plus dillieile. a En généi il, ceui
que nous appelons patriciens sont plus éloignés que 1<^ aulws h .mines
de rien aimer, s dit l'empereur Marc-Aurèle. (Pensées, page 50.)
214 ŒUVRES DE STENDHAL.
une âme, l'on ne se donne pas un rôle supérieur. J.-.l. Rous-
seau el le duc de Richelieu auraient eu beau faire, malgré tout
leur esprit, ils n'auraient pu changer de carrière auprès des
femmes. Je croirais volontiers que le duc n'a jamais eu de mo-
ments comme ceux que Rousseau trouva dans le parc de la
Chevrette, auprès de madame d'Iloudetot à Venise, en écou- ;
que don Juan se voit une réputation superbe parmi les hommes,
et pourra peut-être encore plaire aune femme tendre en lui
semblent synonymes d'amour faible. Mais tout cela est une in-
premier des bonheurs, après l'amour, que parce que l'on croit être en
état de commander la sympathie.
4 aux yeux du spectateur le sentiment de la vertu à culé
Si l'on peint
entre deux sentiments. La vertu dans les romans n'est bonne qu'à
sacri-
sions font sentir la vie dans notre propre cœur et éloignent la mé-
fiance de celui des autres, don Juan, plein de sensations et de
bonheur apparent, s'applaudit de ne songer qu'à soi, tandis
qu'il voit les autres hommes sacrifier au devoir ; il croit avoir
que les autres femmes eussent cinq doigts à la main comme ellc^ ce duc
d'Orléans, Gaston, frère de Louis XIII, trouvant si simple que ses favori»
allassent à l'échafaud pour lui faire plaisir. Voyez, en 1820, ces messieurs
mettre en avant une loi d'élection qui peut ramener les Robespierre en
Fiance, etc., etc.; voyez Naples en 1799. (Je laisse cette note écrite en
1820. Liste des grands seigneurs de 1778 avec des notes sur leur mora-
lité, données par le général Laclos, vue à Naples, chez le marquis Berio;
manuscrit de plus de trois cents pages bien scandaleux.)
DE L'AMOUR. «*17
dès lors il est réduit pour toute jouissance à faire seutir son
pouvoir, et à faire ouvertement le mal pour le mal. C'est aussi
le dernier degré du malheur habituel ; aucun poète n'a osé en
présenter l'image fidèle, ce tableau ressemblant ferait horreur.
Mais on peut espérer qu'un homme supérieur détournera ses
pas de celte route fatale, -car il y a une contradiction au fond
du caractère de don Juan. Je lui ai supposé beaucoup d'esj ri',
13
218 ŒUVRES DE STENDHAL.
de lettres ', dit (267) : « Le plaisir de l'amour est animer, a
l'on est plus heureux par la passion que l'on a que par celle
veillé par des objets divers et mettant sans cesse en doute votre
talent.
extérieurs, qui n'ont de prix pour lui que parleur degré d'uti-
elle était avec moi? que lui dir..is-je de cette vue de Casa-Lcc-
chio ?» 11 lui parle, il écoute ses réponses, il rit des plaisanteries
quelle lui fait. À cent lieues d'elle et sous le poids de sa colère,
nécessaire pour le rôle de don Juan. Ils ;.e veulent pas voir que
dée dix.
Si je ne mets pas toujours, c'est qu'on dit que la vieillesse,
moi, je n'en crois rien. Voire maîtresse, devenue votre amie in-
C'est une fleur qui. après avoir été rose le malin, dans la saison
crainte.
tion aux vieux libertins blasés qui crèvent d'ennui et dont l'a-
malheur.»
222 ŒUVRES DE STENDHAL.
CHAPITRE LX.
m tur.
flexion.
4° Ou à moins d'un amour dévoué et excessif de la part de 1
vespect extrême.
tendre, el
Cette crainte-là, suite d'une passion fort
toire.
Pour peu que vous ayez de passion pour une femme, ou que
votre imagination ne soit pas épuisée, si elle a la maladresse de
d'imagination.
'..'..
Rupture, homme excessivement nerveux, artiste et tête
DE LAMOUR.
étroite, me contait à Messine que, oon-seulemehl toutes les
sa timidité.
Le sanguin ne peut connaître tout au plus qu'une
fiasco moral : c'est lor.-qu il reçoit un rendez-vous de M< ssaline,
tout exprès.
t3. .
226 ŒUVRES DE STENDHAL.
Souvent, en se fatiguant auprès d'une autre femme, ces pau-
vres mélancoliques parviennent à éteindre un peu leur imagi-
nation et par là à jouer un moins triste rôle auprès de la femme
objet de leur passion.
blement n'a pas dit vrai, nous avions tous fait fiasco la pre-
mière fois avec nos maîtresses les plus célèbres. 11 est vrai que
peut-être aucun de nous n'a connu ce que Delfante appelle
Y amour-passion.
L'idée que ce malheur est extrêmement commun doit dimi-
nuer le danger.
J'ai connu un beau lieutenant de hussards, de vingt-trois ans,
J'ai réuni sous ce titre, que j'aurais voulu rendre encore plus
1ère.
II
Iïï
ÏV
plaisirs et toutes les peines que peuvent donner toutes les au-
VI
VII
L'amour tel qu'il est dans la haute société, c'est l'amour des
combats, c'est l'amour du jeu.
vin
publie juge suprême de leur vie; je dis même les plus distin-
sant le contraire.
Brescin, 1819.
cule, car rien de plus froid que no- poésies; s'il y a quelque
chaleur en France depuis cinquante ans, c'est assurémenl
la prose.
Mais enfin la contessina L. se servait du mot prosaïque, et
j'aime à récrire.
La défini! ion est dans Don Quichotte et dans le Contraste
parfait du maître
'«'•-
et de l'ecuyer. Le maître, grand et paie : I
XI
res de la vie
XII
XIII
i; -.
une 23
joie, par amour, devant ses filles de douze à quinze ans. Rap-
pelez-vous que dans ces climats heureux, beaucoup de femmes
sont très-bien jusqu'à quarante- cinq au?, et la ,
ma
i à dix-huit.
XV
XVI
près Pintimité.
XVII
XVIII
XIX
XX
XXI
XXII
XXIII
XXIV
cest de s'y accoutumer. Mais, une fois ce caractère saisi par une
saïque.
XXV
XXM
Les vers fuient inventés pour aider la mémoire. Tins tard on
234 ŒUVRES DE STENDHAL.
les conserva pour augmenter le plaisir par la vue de la difficulté
xxvn
XXVIII
XXIX
XXX
Elle pourrait dire : « Mon caractère jure pour moi, voyez les
XXXI
XXX1Ï
XXXIII
de S*'*.
XXXIV
NATCHEL.
férence que lui donne Clara, une jeune veuve amie de Mélanie.
Je crois qu'il va l'épouser ;. Mélanie le voit et souffre i
qu'un cœur fier et rempli malgré lui d'une passion violente p< m
changer un peu set manières mais
souffrir. Elle n'aurait qu'à ;
230 ŒUVRES DE STENDHAL.
clic regarde comme une bassesse qui aurait des conséquences
durant toute sa vie de s'écarter un instant du naturel
XXXV
p i
sion.
XXXVI
XXX vu
XXXVIÎÎ
XXXIX
XL
1 Pour l'état actuel des mœurs anglaises, voir la Vie de 31. BeallU,
écrite par un ami intime. On sera édifié de l'humilité profond
M. Beallie recevant dix guinées d'une vieille marquise pour calomnier
Hume. L'aristocratie tremblante s'appuie sur des évêques à '200,000
ser en toute sûreté, à Boston, une jeune fille seule avec un bel
XLI
En France, les hommes qui ont perdu leur femme sont tristes;
XLII
XLI1I
XLIY
XLV ,
peu féminine.
DE L'A 51 OU H.
XLVI
XLVU
XLVIII
XLIX
Ll
LU
ORGUEIL FÉMININ.
que j'ai vu à n'en pas douter. Voilà donc une conviction qu'il
LUI
Liv
Modène, 1820.
des bouc mots, j'ai été plaisant en parlant à Cl***, cela pourrai!
nie faire remarquer. »
LV
LVI
LVII
Le mari d'une jeune femme qui est adorée par son amanl
quelle traite mal. et auquel elle permet à peine de lui baiser la
main, n'a tout au plus que le plaisir physique le plus gro ier,
t<
242 ŒUVRES DE STENDHAL.
LVIII
voit tous les objets extérieurs, mais ils ne font que l'enflammer,
elle les assimile à sa propre substance, et les tourne sur-le-
champ au profit de la passion.
LIX
LX
trouve plus une parole à lui dire; c'est bien là, en effet, un livre
que l'on quitte.
LX1
n'a pas six mille francs de rente, et pui> n'y plus penser: !.<
LX1I
. LXIII
jeune fdle qui passe d'un air si simple et à laquelle son peu de
LXIV
LXV
1
A l'Avi Maria.
DE L'AMOUR, \!43
LXVI
LXVII
LXVÏII
LXIX
14.
246 ŒUVRES DE STENDHAL,
sant bonheur du Pouvoir, celui que les minisires et rois foni
semblant de mépriser. Ce bonheur a aussi sa cristallisation, qui
demande une imagination plus froide et plus raisonnable. Voyez
un homme qui vient d'être nommé ministre, depuis un quart
d'heure, par Napoléon.
LXX
LXXI
Rien de plus faux que la maxime : « Nul n'est héros pour son
valet de chambre, » ou plutôt rien de plus vrai dans le sens
LXXII
W.
LXXIII
LXXIV
LXXV
LXXVI
LXXYIP
LXXVI1I
LXXIX
LXXX
LXXXI
LXXX11
LXXXllI
des hommes.
LXXXIV
LXXXV
LXXXVI
Compiègne.
LXXXVII
Wilna, 1812.
LXXXVI11
lette, une grande bonté, nui génie, de l'attention pour une cen-
taine de petites choses chaque jour, l'incapacité de s'occuper
plus de trois jours d'un même événement ;
joli contraste avec la
sévérité puritaine, la cruauté biblique, la probité stricte, l'a-
mour-propre timide et souffrant, le cant universel; et cepen^
LXXXIX
XC
XCI
vétius.
XCII
XC1II
l'amour antique.
rd, de
Colardeau, sont des peintures bien imparfaites et bien vagues
si on les compare à quelques lettres de la Nouvelle-IIél
,
i
« Le brillant génie d'Ovide , l'imagination riche de PrO]
l'âme sensible de Tibulle, leur inspirèrent sans doute des vers
de nuances différentes, mais ils aimèrent de la même manière
des femmes à peu près de la même espèce. Us désirent, ils
de la femme que vous aimez, vous vous trouvez disposé à Ciirc toul ce
qu'il y a de beau au monde.
* Guinguené, Histoire littéraire de l'Italie, vol. II, page 490.
IS
£54 ŒUVRES DE STENDHAL.
triomphent, ils ont des rivaux heureux, ils sont jaloux, ils se
brouillent et se raccommodent ; il sont infidèles à leur tour, on
leur pardonne, ot ils retrouvent un bonheur qui bientôt est trou
blé par le retour des mêmes chances.
« Corinne est mariée. La première leçon que lui donne Ovide
est pour lui apprendre par quelle adresse elle doit tromper son
mari ;
quels signes ils doivent se faire devant lui et devant le
'accuse d'aimer une jeune esclave. Il lui jure qu'il n'en est
rien, et il écrit à celte esclave; et tout ce qui avait fâché Co-
rinne était vrai. Comment l'a-t-elle pu savoir? Quels indices les
ont trahis? Il demande à la jeune esclave un nouveau rendez-
nier. Des qu'il est heureux, il est jaloux. Cinthie aime trop la
dre : elle part avec un militaire; elle va suivre les camps, ell
•
les muses;
dat et reste, avec le poète. 11 remercie Apollon et
il
que
par l'absence. Loin de Cinthie, il ne s'occupe
d'elli
nouvelles. La mort ne
infidélités passées lui en font craindre de
256 ŒUVRES DE STENDHAL.
l'effraye pas, il ne craint que de perdre Cinthie; qu'il soit
sera son amant, son époux; jamais il n'aimera que Cinthie. Ils
hir, elle le rend la risée de ses rivaux ; mais une maladie vient
la saisir, elle meurt. Elle lui reproche ses infidélités, ses capri-
même chaîne. Corinne et Cinlhie oui toutes les femmes pour ri-
lés sont l'une après l'autre les objets de son amour et de ses
vers. Délie est la première, la plus célèbre et aussi la plu- ai-
lie, trompé comme lui'; il lui révèle toutes le, rus<*< dont elle
Si ce nu-ri ne - il
se sert pour attirer et pour voir ses amants.
la lui confie x.urabicn les écarter et ga-
pas la garder, qu'il : il
elle n'aime que l'or, et se soucie peu des vers et des dons da
génie. Némésis est une femme avare qui se donne au plus of-
deux autres à les chercher ou à les faire naître chez ses maîtres-
ses : leurs grâces, leur beauté, sont tout ce qui 1 enflamme ;
elle à lous les autres; elle cultive le chant, la poésie ; irais, pour
tous ces talents, qui étaient souvent ceux îles courtisa™ s 'd'un
n'vin est pas moins, dans sa pas-ion pour elle, maîtrise par une
XCIII BIS.
de 17G0 1
; une suite de hasard- heureux avait réuni ap]
ment, dans ce petit espace, et les institutions politiques et les
XCIV
XGV
logique, du gouvernement.
XCVI
Mais on v lit. »
Varsovie, villes qui sont loin de marquer par leur tristesse; Les
classes ouvrières y ont moins de sécurité et y boivent tout aussi
peu de vin qu'en Angleterre ; elles sont beaucoup plus mal vê-
tues.
xcvn
XCVIII
peine âgée de vingt ans, qui vit là fort retirée avec son mari.
Espagnol aussi et officier en demi- solde. Cet officier fut obligé,
XCIX
Ci
madame d'Épinay.
264 ŒUVRES DE STENDHAL.
j'ai estimé grande duperie et perdement de temps en l'homme
de bonne foi de s'arrêter à parler avec lesdils académiciens. »
(OEuvres badines de Guy Allard de Voiron.)
Cil
Français du dix-neuvième.
CI1I i
CIV
cv
CVI
CVII
Sans les nuances, avoir une femme qu'on adore ne sérail pas
un bonheur et même serait impo.-sible.
L. 7 octobre.
CVI II
qu'ils se sont interdit, sans croire aux récompense.-' qui les dé-
DlBBBOT.
(MX
CX
Rien de plus indulgent, parce que rien n'est plus heureux, auf.
la vertu de honne foi; mais mistress llutchinson elle-même man-
que d'indulgence.
GXJ
CXIÏ
CXII1
S'il était une époque où, d'après les théories rolgalres, appe
fées raisonnables par les hommes communs, la |»ri-« »n pûl être
supportable, ce serait celle où, après une détention de plusieurs
années, un pauvre prisonnier n'es! plusséparéque par un mois
ou deux du moment «jui doit le meure en liberté. Mais la cris-
CXIV
thing but Klopstock; 1 saw him ihe ne\l diy, and lie followiup
and we yvctc very seriously friends. Bul ibe fourlfa da? be de*
it was what I feltfor him ; we had not seen one anolher enough
to love (as if love must bave more time than friendship). Tins
loved. But we were obliged to part again, and wait two years
for our wedding. My mother would not let marry me a stranger.
I could marry then without lier consent, as by the dealh of
my fatber my fortune depended not on lier ; but Ihis was a
horrible idea for me and
; thank heaven that I hâve prevailed
by prayers ! At this time knowing Klopstock, she loves him as
her lifely son, and lhanks god that she lias not persisted. Wc
married and I am the happiest wife im ihe world. In some fevv
CXV
CXVI
CXVII
CX VI II
CXIX
pour éloigner le bonheur. Celte éducation faii les tètes les ptui
270 ŒUVRES DE STENDHAL,
inconséquentes. Madame deR..., qui craignait la mort, vient de
CXX
CXX1
RÊVERIE MÉTArnYSIQ0B.
que de sensations, le goût universel de tous l<^ êtres qui ont vie
est d'être avertis qu'ils vivent par 1rs sensations tes pkrs f
« gloire. »
n'est qu'u ic
enfants, des amis aimables et en quantité, ce
là
pour les passions sent d'abord que cette vie heureuse Yennuie,
et peut-être aussi qu'elle ne lui donne que des idées communes.
« Je voudrais, vous disait C..., n'avoir jamais connu la fièvre
« s'il est aussi sauvé par le hasard, ne peut tout au plus se sou-
« venir avec plaisir de cet instant qu'à cause de la circonstance
« qu'il a été sauvé, et non pour les trésors de générosité qu'il
crois que le mépris seul peut guérir de cette passion; non pas
un mépris trop fort, ce serait un supplice, mais, par ei
pour vous autres hommes, voir l'objet que vous ad irei aimer
un homme grossier et prosaïque, ou vous sacrifl r aux
sances du luxe aimable ei délicat qu'elle trouve uni .
GXXII
CXXIII
gant.)
GXXIV
cxxv
qu'ils adorent, parce qu'ils ne sont pas d'accord avec les eu-
GXXVI
GXXVII
élé violée par un homme qu'elle adore, «pie les fougues d'oi
vise sa famille et celle delà femme qu'il aime. Ces famille- sont
« dieux !
sa mort seule pourrait lui rendre le repos, s'il en était pour les
CXXM11
•
CXX1X
mente pas son amour pour la mort, elle peut songer à se ca< her
cxxx
(amieizia pour
le mot d'amour, toujours amieizia et awicinar
awicinar pour faire la cour avec sucecs).
amour et
16
Î78 ŒUVRES DE STENDHAL.
CXXXI
CXXX11
CXXXIII
CXXXIV
l'autre. »
%
CXW'V
labrois, cl, parmi les plus civilisés, le^ Bressans, les Piémonlais,
les Corses.
Puccini.
CXXXV1
Je ris de voir des gens d< bonne foi ne pouvoir jamais eue
280 ŒUVRES DE STENDHAL.
d'accord, se dire naturellement de grosses injures et en penser
davantage. Vivre, c'est sentir la vie; c'est avoir des sensations
fortes. Comme pour chaque individu le taux de cette force
change, ce qui est pénible pour un homme comme trop fort est
précisément ce qu'il faut à un autre pour que l'intérêt com-
mence. Par exemple, la sensation d'être épargné par le canon
quand on est au feu, la sensation de s'enfoncer en Russie à la
CXXXVII
CXXXYIII
CXXXIX
CXL
des peines, car l'amant quitte, pour rêver à son aise,- les
Maupertuif.
16.
282 ŒUVRES VV STENDHAL.
Les peines de l'âme sont diminuées parla durée; « que de
veuves véritablement fâchées se consolent, par ie temps! » ili-
leur.
successivement;
*" A revoir tous les avantages dont on allait être privé.
qu'on va se donner.
Il y a une exception singulière il faut voir m cet : 1 il
mais prochaine
la plus : par exemple, d'une mattress qi
profaner ce
après un moment, elle s'éloigne parla crainte de
qu'elle adore.
entièrement parcouru sa carrière, il est
Lorsque le plaisir a
d'avoir.
à le cueillir sqnt fatigués, et l'i
Les organes qui servent
présente» les images qui
nation n'a plus autant de propension à
CXLI
que, n'est point la même chez îes deux sexes. Au contraire des
hommes, presq e toutes les femmes sont au moins susceptibles
ou ridicule.
CXLI1
gueil fou.
Venise 1810.
CXLIII
DU GENRE ROMANTIQUE.
peints par des peintres qui n'y croient pas beaucoup, admirés
et jugés par des gens qui n'y croient pas, et enfin payés par des
gens qui n'y croient pas.
On cherche après cela te pourquoi de la décadence de l'arf
DE L'AMOUR.
We croyant pas en ce qu'il dit, l'artiste rraint toujours d
CXLIV
L'un des plu? grands poètes, selon moi, qui aic.it paru dans
ces derniers temps, c'est Robert Burûs, paysan écossais m irl de
misère. Il avait soixante-dix louis d'appointements comme d ma-
nier, pour lui, sa femme et quatre enfants. Il faut convenir que
le tyran Napoléon é.lait plus généreux envers son ennemi Ché-
assez de place pour conter ses amours avec Mary Cam] bel! el
he had formed but a very inadi quate idea. » (Londres, I" nu-
CXLV
fabrique elle-même.
CXLV1
CXLVII
en 1809. J'ai passé dans les rangs avec le colonel, et fait faire
nombre d'années.
On n'en trouve pas trace en 1740. Voir de Drosses. Les offi-
1 V<irs 1580, les Espagnols, hors de chez eux, n'étaient que des agents
énergiques de despotisme, ou des joueurs de guitare sous les fenêtres
des belles Italiennes. Les Espagnols passaient alors en Italie comme au»
jourd'hui l'on vient à Paris; du reste, ils ne mettaient leur orgueil qu'à
faire triompher le roi, leur maître. Ils ont perdu l'Italie, et l'ont perdue
en l'avilissant. En 1G2G, le grand poète Calderon était ofticier à Milan.
s
Voir la Vie de saint Charles Borrome'e, qui changea Milan et l'avilit.
11 fit déserter les salles d'armes et aller au chapelet. Merveilles tue Cas-
tigiione, 1553.
J)C L'AMOUR.
honneur peu connu sous les chaumières que le soldai de 'T'.Hi
nables et tri>
;
> vertueux pour être bien brillants. O.i seul qu'il y
a loin des suidais de 9G gagnant vingt batailles eu un an, -ri
n'ayant souvent ni souliers ni lu.biis, aux brillants régiments
de Fontcnoy, disant poliment aux Anglais et le chapeau ba> :
CXLV111
CXLIX
déshonorée.
CL
CLl
n'est rien. Ce qui est une infamie dans la rue de Belle-Chasse esi
CLII
CL11I
CL1V
CLV
CLVI
1530, qu'elle pèse sur le jardiu du monde, que les pauvres au-
17
990 ŒUVRES DE STENDHAL,
teurs italiens n'ont pas encore eu le courage d'inventer le roman
3e leur pays. A cause de la règle du naturel, rien de plus sim-
ple pourtant : il faut oser copier franchement ce qui crève les
CLVII
CLVII]
vois le pourquoi.
CLIX
CLX
rares exception».
CLX1
fortes.
CLXI1
m'écrit :
CLXIIJ
ceux qui étaient avec lui crurent qu'il fût mort, mais tant firent
qu'ils le conduisirent à Tripoli, dans une hôtellerie, comme un
homme mort. On le Gt savoir à la comtesse, et elle vint à son
CL\'IY
of il ail (lie d.iy long, lill al li oght death in some monihs space
concluded liis langhuishement. lhis story \n.i- rerj true. i
CLXY
vres. Outre ce qu'il avait po voir en courant l<- monde, cel es-
célèbres. S'il
CLXVI
cherchant à me cacher tant bien que mal, tant qu'il y eut quel-
que espoir de succès pour la bonne cause. Enfin, les dangers
de sortir par Calais. Mais mon portrait avait été si fort répandu,
dix-huit mois auparavant, que je fus reconnu à la dernière
poste : cependant on me laissa passer. J'arrivai à une auberge
à Calais, où, comme vous pouvez penser, je ne dormis guère,
et fort heureusement pour moi, car vers les quatre heures du
matin j'entendis très-distinctement prononcer mon ncm. Pen-
dant que je me lève et m'habille à la hâte, je distinguo fort bien,
s II y avait un p qui bol qui sortait du poil par une mer fort
j'entends de <
ris du côté de la mer, comme m 1 ou m'appelait.
Je vois s'approcher un petit bateau. « Ail monsieur,
« venez, on vous attend.» Je passe machinalement dans le bateau.
lait-il?
'
CLXVII
LE PÈRE ET LE I
gne de its;.
iE PÈr.E (ministre de la )
aussi. »
CLXVII1
GLXIX
tires de Buratti.
CLXX
sée ouverte. Depuis onze jour-, tous les soirs, l ofûi ier francaù
passait deux beurcs, caché bous le lit de la malade. Je
ajouter le reste.
une Française.
APPENDIX
Soit sur des cas particuliers que les amants leur soumet-
l
taient .
« Dermissende, dame de P
a Bërlrane, dame d'Urgon;
« Mabille, dame d'Y*
« La comtesse de Dye;
« Roslangue, dame de Pierrefeu,
« Berlrane, dune de Signe ;
« Jausserande de Claustral, s
Kostradamus, page 2!
DE L'Ail*
rapporte que le code d'amour avait été publié par une unir
composée d'un grand nombre de dam b< ralii re.
l'amour.
II
(Il
IV
amant.
VI
Vil
On prescrit à l'un d
VIII
IX
XI
en mariage.
vW4 (Et VUES DE STENDHAL.
XII
qu'il aime.
Xhi
Amour divulgué est rarement de durée.
XIV
XV
Toute personne qui aime pâlit à l'aspect de ce qu'elle aime.
XVI
XVII
XVIII
XIX
L'amour qui s'éteint tombe rapidement, et rarement se ra-
nime.
XX
L'amoureux es! toujours craintif.
XXI
l'aria jalousie véritable l'affection d'amour croît toujours.
DE L'AMOUR. BOB
XXII
Du soupçon et de la jalousie nui en dérive i
-l'amour.
XXIII
Moins dort et moins mauge celui qu'assiège pen 6e d'à-
inour.
XXIV
Toute action du. l'amant se termine par penser à ce qu'il
aime.
XXV
L'amour véritable ne trouve rien de bien que ce qn i!
XXVI
L'amour ne peut rien refuser à l'amour.
XXVII
L'amant ne peut se rassasier de la jouissance de ce qu'il
aime.
XXVIII
XXIX
L'habitude trop excessive des plaisirs i n i
è. ne la a i
de l'amour.
XXX
Une personne qui aime est occupée par I image de ce qu'elle
XXXI
Rten n'empêche qu'une femme ne soit aimée par deux hom-
mes, et un homme par deux femmes *.
1
I. Causa eonjugii ab amore non est excusatio recta.
II. Qui non celai amare non potest.
III. Nemo duplici potest amore ligari.
XXV. Verus amans nibil bealum crédit, nisi quod cogitât amanti
placere.
XXVI. Amor nibil posset ainori denegare.
delinetur.
XXXI. Unam feminam nibil prohibet a iiu< i
muiieribus unum.
F-.i. J03.
1
« Utrum inter conjusatos amor possit hnbere Ion,
c Dicimus enini et stabilito lenore finn '"'t
duosjugales suas extemlerc vires, nam am mtea tibi il
•
deneimre.....
a Hoc igitur nostrum judicium, cum nimia moil" i
Ce jugement
« Causa conjugii non est ab an
est conforme à la prem •
Pol
•
NOTICE
ANDRÉ LE CHAPELAIN
réprobations amoris.
Ce titre est suivi de la table des chapitres.
Ensuite on lit ce second titre :
*
1° Quid sit amor et undè dicatur
2° Quis sit effectus amoris.
juatur, ûniatur.
5° De notilia mutui amoris, et quid uuus amanlium agere de-
beat, altero fidem fallenie.
du baiser.
Le nrusiènte ams k jouissance des embrassements les plus intime*
que, pour elle, elle allait descendre et nous laissait toute li-
berté.
DE L'AMOUR. .il.;
était folle de plaisir de desci ndre dans une mine et de l'idée que
bientôt nous nous trouverions à cinq cents pieds sous terre. Ma-
dame Gberardi, uniquement occupée de la beauté de> pu i
i
18
314 ŒUVRES DE STENDHAL.
A ce moment, madame Gherardi jouait avec le joli rameau
couvert de diamants mobiles, que les mineurs venaient de lui
qu'elles sont.
— Eh bien ! que voulez-vous conclure de là ? dit madame
Gherardi.
— Que ce rameau représente fidèlement la Ghita, telle que l'i-
saient être dix mille, à cause de- cristaux de sel qui Ses i
taient de tous cotés : <r Ah! ceci est fort joli, dit-elle an
Bavarois, je cristalli-e •
salle, j
DE L'AMOUR. "i:
faits. Quand nous fûmes las de fixer noire attention mit des
nuances presque imperceptibles, et qui, au fond, n'étaient
fredi. Dès le commencement de son réV it, ell i eut le fflalbi ui <l<
18.
318 ŒUVRES DE STENDHAL.
triste. » Nous nous récriâmes aussitôt :« Comment, l'amour, ce
sans pour cela être arrivé à Rome, et cependant l'on n'est plus
à Bologue. — Dans cette belle comparaison, dis-je, Bologne re-
présente apparemment l'indifférence et Rome Yamour parfait.
— Quand nous sommes à Bologne, reprit madame Gherardi,
commencé. »
< 2 5
1. L'admiratio
prendre.
Madame Gherardi continua : « rendant
ments de Pâme, on manières d'i tre, que I
que voici ce qui lui est arrivé. Après s'être exagéré le bonheur
que pourrait lui donner le caractère annoncé par la ligure ra-
phaélesque, les belles épaules, les beaux bras, en un mot les
formes dignes de Canova de la belle marchesina Florenza, il a
tes les idées bizarres qui lui passent par la tête. A Rome :
à Bo-
DE L'A MO UI\.
cette autorité limitée qu'uni' femme de P.iri- exer<
salon. A la lettre, elle e>t toute-puissante mit les bornai
l'approchent, et dont toujours le bonheur, du moins pendant l.
peut pas être si sûr d'être aimé delà Florenza; il ne sait pas
ERNESTINE
LA NAISSANCE DE L'AMOCR
A\ NT
du château.
Ce fut par un événement aussi simple que commet
malheurs d'irnestine de S... L qu'elle habitait
ans que le maître et les gens étaient vieux, tout s'y faisait tou-
jours à la même heure; jamais la conversation ne commençait
que pour blâmer tout ce qui se fait et s'attrister des choses les
plus simples. Un soir de printemps, le jour allait finir, Ernesline
1'.»
5*26 ŒUVRES DE STENDIIaL.
jours, Emestine n'aurait pas eu l'idée de mentir. Elle se rap-
tête, et, les joues rouges comme le feu, sans oser y toucher, elle
ht sur le petit morceau de papier :
fermer la grille du petit pont, ce bruit qui lui ôtait tout espoir
est abattue, pâle; son oncle s'en aperçoit; il fou mettre les
DE L'AMI
contemporain deCharlemagne. « Ce grand emper< ur \
sou geste, bientôt elle n'en doute plus. Elle s'étonne d'avoir pu
elle le suit, mais elle est heureuse. Elle tient sa rose blanche
dans son petit mouchoir de batiste, et la batiste est si fine, que
tout le temps que dare encore la promenade, elle peut aperce-
voir la couleur de la rose à travers le tissu léger. Elle tient
litude profonde.
2ure des sentiments qui régnaient dans son cœur. Si elle eût pn
tesse. »
petit bois ; elle se trouve prés de l'arbre fatal ; elle lit sur le pe-
tit fragment de papier caché dans le bouquet :
n'avait pas même de croix. Il lisait, et, en tenant son livre d'heu-
res d'une certaine manière, il ne cessa presque pas un instant
d'avoir les yeux sur elle. C'est dire que, pendant tout le ser-
garde de trouver. Mais le relard amené par cette pelile ruse fut
DE L'àllOUR.
l'allée de platanes, le long du lac. La grill
regard, elle voit des yeux d'un bleu sombre BOyél de pleur>.
« Dans ce moment, dit-elle, je ne pui> avoir cet air
ton impérieux qui te va fort bien, dit en riant son bon grand
oncle. » Au mot d'impérieux, les larmes inondèrent les yeux
d'Ernestine, au point qu'il lui fut impossible de les cacher ; elle
dans sa petite chambre; elle prit ses bouquets dans son mou-
choir et, sans lire ses petits billets, se mit à baiser ces bou-
seul ;
je craignais qu'on ne lût dans mes yeux l'amour dont je
brûle pour vous. » — Elle i-elul trois fois ces mots : l'amour
dont je orûle pour vous, puis elle se leva pour aller voir à ?a
i
lu au
lie écriture anglaise de son inconnu était un i h
détails.
19
534 ŒUVRES DE STENDHAL.
Pendant cette nuit, elle se décida de plus en plus sur cette
vérité : il est impossible d'aimer un homme qui n'a pas quarante
bête et fat de nos amis, MM. tels et tels, quand ils viennent
pendant une heure elle chercha dans ses armoires une robe, un
chapeau, une ceinture, qui composèrent un ensemble si origi-
-
petites chaînes portant le dé, l
l"-r-
avait pas quinze jours. Ce qui lui (il i
ainsi les goûts d'une bonne ménagère car ; c'est ce que veulent
dire ces ciseaux, cet étui, ce dé, que l'on porte sans cesse avec
soi ; et la bonne ménagère ne pense pas que ce bijou coûte
chaque année 1 intérêt de son prix. » Elle se mit à calculer sé-
rieusement et trouva que ce bijou coûtait près de cinquante
francs par an.
Cette belle réflexion d'économie domestique, qu'Ernesline de-
vait à l'éducation très-forte qu'elle avait reçue d'un conspira-
DL L'AMOUR. 33/
mal à la tête affreux lui servit de prétexte pour tenir son mou-
choir sur ses yeux. La voiture arriva. Plus livrée à elle-même,
une fois qu'elle y fut placée, on ne saurait décrire la dou-
leur déchirante qui pénétra son âme pendant le temps qu'il
piano, qu'elle avait fort négligé depuis deux m >i- Bile repril la
grfssait à vue d'oeil. Comme elle eut, par hasard, un petit rlmme,
au-si, el .-11.
delà poitrine. Ernestine. le crut
les seuls mo:u:-:itsp- s- -blés qu'elle i
d'autre
Pendant tout un long mois, elle u- ut sefl
écriture anglaise.
Elle s'était promis de ne jamais regarder la pelouse au delà
du lac; dans le salon, jamais elle ne levait les yeux sur les
reste. Deux heures plus tard, quand elle repassa, après la leçon,
comme s'il était mort; il la frappa. « S'il était mort, il n'y aurait
'•'
de son oncle; elle était mise avec beaucoup
tahle présentait la collection à peu près
342 ŒUVRES DE STENDHAL.
et des maires des environs, pins cinq ou six fats de province,
parlant d'eux et de leurs exploits à la guerre, à la chasse et
même en amour, et surtout de l'ancienneté de leur race. Jamais
Us n'eurent le chagrin de faire moins d'effet sur l'héritière du
château. L'extrême pâleur d'Ernestine, jointe à la beauté de ses
traits, allait jusqu'à lui donner l'air du dédain. Les fats qui cher-
parole. Pour elle, elle était bien loin de rabaisser sa pensée jus-
qu'à eux.
Tout le commencement du dîner se passa sans qu'elle vît rien
d'extrordinaire; elle commençait à respirer lorsque, vers la fin
d'un paysan déjà d'un âge mûr, qui paraissait être le valet d'un
maire venu des rives du Drac. Elle éprouva ce mouvement sin-
gulier dans la poitrine que lui avait déjà causé le mot du curé;
cependant elle n'était sûre de rien. Ce paysan ne ressemblait
point à Philippe. Elle osa le regarderune seconde fois ; elle n'eut
Douche d'un tel homme, lui demanda qui avait dit ce mot sin
'
lui-même r B
grand chêne, il allait let -
espéra. resta d
ble, il songea à aimer, car il
ut: l'intérêt ? »
que les yeux d'Ernesline regardaient bien plus haut que la foule
chêne et le lac.
montré de la a oe trouvant pa
deux idées : « A-t-elle i
servé l'air triste ou si la joie brillait dans ses yeux. Que devait-il
d'autres. »
tout pen-
Thilippe quitta d'un air très-froid son réduit, et alla,
chercher son cheval, qu'il avait laissé chez un paysan à une
sif,
de madame Dayssio. En en
mobile, étonnée, glacée, il n'aimait plus.
Le lendemain, Philippe se trouva bien
cravate. Il n'avait d
était fait pour augmenter ses inquiétudes. Celle fi nime fut lon-
avant de la connaître
350 ŒUVRES DU STENDHAL.
Ernestme fut presque au Comble du bonheur. Le jour suivant,
elle revint au pied du grand chêne, mais bien escortée par la
présenta plusieurs fois sur ses pas, et fui reçu de manière à lui
faire penser que, par ses entreprises, il avait irrité l'orgueil de
II est impossible qu'en relisant ceci il ne vous revienne pas une quan-
tité de petits faits, autrement dits nuances. Ajoutez-les à gauche sur la
page blanche. y a une bonne foi qui touche dans ce récit que j'avais
Il
Tempête.
•24 décembre 1825.
DE L'A M OIT,
1er vmowT'Vanité le pciit calcul de vanité dr la jeune Irai
•20.
354 ŒUVRES DE STENDHAL.
d'instinct, elle joue avec infiniment d'expression, et à la pre-
mière vue, les partitions les plus difficiles. Avec celte espèce
chez elle.
comme il n'y avait rien de plus commode pour lui que sa femme
entre un compte de contre-maître à relire et
et de mauvais goût.
Je croi- que j'aurais eu l'i Ié<
ête. Elle augmentait ainsi les désirs de son mari; et quand elle
(kignait lui permettre il payait tous les mémoires de ta-
sa société.
« Donner de meilleurs dîners.
piano.
« Passer pour avoir plus d'esprit qu'elles. »
Elle avait été élevée par une mère athée, et dans une société
de philosophes athées. Elle avait été tout juste une fois à l'église,
Staël lui tombèrent entre les mains : ceci fait époque, et prouve
nombre dans la tête. Le soir elle choisissait dans son salon les
hommesjeunes et un peu bêtes, et, sans leur dire gare, elle leur
répétait très-proprement sa leçon du matin.
d'avoir pou r amant. Comme c'est le plus froid de tous, c'est ce-
lui dont la passion me fera le plus d'honneur. »
mari.
Comme c'était un homme de mœurs excessivement sévères,
comme il n'était nullement amoureux de Félicie, il la
surtout
voyait telle qu'elle était, fort laide. D'ailleurs, on ne lui kvaitpas
dit en partant à quoi on le destinait. Le mari, que ces airs en«
promener.
Quand il rentra, elle se fâcha contre lui : elle lui dit qu'il
son hôtel.
La mère, comme une bête, crut cela, et oie Ql -
elle qui le dit : elle s'en est vantée à deux personnes de ma con-
naissance, et sans doute aussi à d'autres que je ne connais pas.
La déclaration ci-dessus ressemble beaucoup à ce qu'elle me
dit : j'ai conservé le souvenir de ses expressions. Peu de jours
après, je vis une des personnes qui avaient reçu la même con-
fidence. Je la priai de chercher à s'en rappeler les termes ; elle
pense plus à rien depuis vingt ans.) Elle commanda chea on très-
habile coutelier un poignard à lame de damas, qu'elle lit appor-
viendrez plus. »
2 ,
562 ŒUVRES DE STENDHAL.
Weilberg était un brave homme; il eut piiié de la vieille
mère qui venait le prier ainsi, et il consentit à se prêter à celle
ennuyeuse comédie, pour éviter l'esclandre que la mère crai-
gnait.
savoir à tous les assistants qu'il était son amant, sans qu'il pût
le comprendre.
Tous les amis de la maison étaient dans le secret de la comé-
die; mais les connaissances n'y étaient pas encore. Il fut de
l'avais prédit.
gina de faire preuve d'amour à Gustave devant moi, et" die af-
fecta avec lui les privautés de gens qui vivent dans la plus par-
h, la messe. »
1
Nous restâmes à prendre le thé Le domestique- n'entrant
plus, elle s'approcha très-près du feu. « J'ai bien froid, » dit-elle;
plus. Aussi bien, comme j'avais dit à Gustave qu'elle n'avait au-
cune altération dans le pouls ni dans la respiration, il avait
ajouté : « C'est bien singulier qu'avec cela elle ait une syo-
OR L'AMOUR. 335
cope! » Félicie, poussée h bout, revint peu à peu à elle; elle -o.
faire une fantaisie, qui ne me prit pas, elle se fui lai- é faire,
qu'après huit mois qu'il cessa d'y aller lotit à fait Pendant
huit mois, elle u'a cessé de le représentera tons comme son
amant, alors même qu'on ne le voyait presque pins Jamais i lu z
elle.
des amis nous prêtèrent leur loge tout entière, et efle arrangea
partir de ce jour elle changea de ton, et, après avoir parié peu-
< il.
S66 ŒUVRES DE STENDHAL.
En même temps, il me revint aux oreilles que je passais pour
DE L'A M
lier; c'est que c'est une chose dé agréable pour die qoede
faire son métier de femme, et qu il lui importail f<»n |
Go.%
FIN.
TABLE
Préface
Deuxième préface.
Troisième préface.
LIVRE PREMIER.
Cbapitbe 1. De l'amour 1
— IL De la naissance de l'amour 4
— 111. Del'espérjnce K
_ IV H
_ V • . H
— VI. Le rameau de Salzbourg Il
— ix
i«-«Jiiiû; don -1
X. Exemples de la
— XI
— XII. Suite de la cristallisa/icr M
HO. Do premier pas, da grand mo •
— XIV
_ XV.
-I
_ XVI.
— XVII La beauté détrônée p# l'amour H
3
_ ŒUVRES DE STENDHAL.
— XVIII 3
XIX. Suite des exceptions à la beauté 36
~ XX 39
— XXI. De la première vus. o ............ . 40
— XXII. De l'engouement. 43
— XXÏII. Des coups de foudre 44
— XXIV. Voyage dans un pays inconnu 47
XXV. La présentation 53
— XXVI. De la pudeur. . . - 33
— XXVII. Des regards C3
— XXVIII. De l'orgueil féminin 04
— XXIX. Du courage des femmes 71
— XXX. Spectacle singulier et triste 75
— XXXI. Extrait du journal de Salviati 76
— XXXII. De l'intimité. . , 84
— XXXIII 90
— XXXIV. Des confidences. 90
— XXXV. De la jalousie 94
— XXXVI. Suite de la jalousie 99
~ XXXVII. Roxane 102
— XXXVIII. De la pique d'amour-propre 105
— XXXIX. De l'amour à querelles 111
— XXXIX bis. Remèdes à l'amour 116
— XXXIX ter 119
LIVRE SECOND.
FRAGMENTS DIVERS
Amours de Tibulle et de Properce. ...
Lettre anglaise de h femme de Klopstock -' 1
APPENDIX.
Le rameau de Salzbourg
Ernestine ou la naissance de l'amour «23
. -
''
v m
\
/<
Beyle, Marie Henri
21 De l'amour
BA9
1891