Sopk

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Dr

Jocelyn Bérubé, M. D.
Dr
Gilles Côté, M. D.

Mars 2017

Le syndrome
des ovaires
polykystiques

1
Le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) est beaucoup plus qu’un problème
d’infertilité. C’est un trouble endocrinien et métabolique très fréquent touchant 6 à
8 % des femmes en âge de procréer et constituant la principale cause d’infertilité.
L'étiologie est inconnue, mais une production exagérée d’androgène dès la
naissance est l’anomalie principale. Les femmes atteintes, même non obèses,
présentent une résistance à l’insuline avec un hyperinsulinisme.

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Table des matières

Indices cliniques 4

Critères diagnostiques 4

Anamnèse 5

Examen clinique 6

Diagnostic différentiel de l’aménorrhée et


de l’hyperandrogénisme 6

Principe de base de prise en charge du SOPK 8

Traitement de l’hyperandrogénisme 9

Risque de maladies cardiovasculaires 9

Hyperplasie endométriale 12

Infertilité 13

Troubles de l’humeur 13

3
L’excès d’insuline inhibe la synthèse de la protéine liant les hormones sexuelles (SHBG) et
stimule directement la production de testostérone. La testostérone étant liée à la SHBG, le
taux de testostérone libre devient plus élevé. La testostérone élevée, avec parfois un taux
plus haut de LH, entraîne une maturation folliculaire aberrante.

1 Indices cliniques
• Cycles anovulatoires (plus de 45 jours d’intervalle ou plus de 8 menstruations/année),
ou aménorrhée ;
• Infertilité, sans autre explication notable ;
• Signe d’hyperandrogénisme : hirsutisme ou acné ;
• Obésité : > 50 % des femmes présentent un IMC > 30 mais le SOPK peut survenir chez
les femmes minces.

2 Critères diagnostiques
Critères de Rotterdam (2003)

• Oligoménorrhée ou aménorrhée (< 8 cycles/an) ;


• Hyperandrogénisme clinique (hirsutisme, acné, alopécie) ou biochimique (augmentation
des androgènes) ;
• Au moins un ovaire polykystique à l’échographie (12 follicules ou plus de 2 à 9 mm de
diamètre par ovaire ou augmentation du volume ovarien de plus de 10 ml (0,5 x longueur
x largeur x épaisseur).
Chez les adolescentes, les évidences cliniques ou biologiques d’hyperandrogénicité doivent
êtres présents. En effet, les irrégularités menstruelles ainsi que les apparences d’ovaires
polykystiques à l’échographie sont extrêmement fréquentes.

On doit exclure les autres causes d’hyperandrogénisme et d’anovulation.

3 Anamnèse
Le tableau clinique débute dès la naissance avec une progression lente des symp-
tômes. Le SOPK est associé à un petit poids à la naissance et à une pubarche précoce.
L'obésité est souvent présente à l'adolescence, ainsi que les signes d'hyperandrogénécité.

4
Antécédents menstruels

• L’oligo-aménorrhée débute souvent dans la période pubertaire et le début de la ménar-


che peut être retardé.
• Le cycle peut être sous forme d’oligoménorrhée (moins de 8 menstruations par année)
ou d’aménorrhée (pas de menstruations pendant trois mois ou plus).
• Les cycles menstruels sont habituellement anovulatoires, amenant des saignements
abondants par épisode et un risque augmenté d’hyperplasie endométriale.

Hyperandrogénisme (sans virilisation)

• Hirsutisme, acné et parfois une alopécie frontale.


• En cas de signes de virilisation importante comme une hypertrophie clitoridienne, un
changement de la voix (voix plus grave) ou une masculinisation de la musculature, on
doit exclure une tumeur ovarienne ou surrénalienne sécrétant des androgènes.

Résistance à l’insuline

Antécédents personnels et familiaux de diabète, diabète gestationnel, hypertension ou dys-


lipidémie.

Revue des systèmes

Symptômes : hypothyroïdie, hyperprolactinémie ou Cushing.

4 Examen clinique
• Indice de masse corporelle (poids en kg/taille en m2) ;
• Obésité androïde (tour de taille > 88 cm) ;
• Tension artérielle ;
• Hirsutisme, acné, alopécie, sans signe de virilisation ;
• Acanthosis nigricans (cou, aisselle, aine) ;
• Signaux d’alarme : apparition tardive et progression rapide des signes de galactorrhée,
goitre, vergetures pourpres, signes de virilisation, myopathie proximale, amincissement
de la peau.

5
5 Diagnostic différentiel de l’aménorrhée et
de l’hyperandrogénisme
Il faut exclure les autres affections causant l’hyperandrogénisme et l’aménorrhée.

Le bilan de base recommandé devrait inclure une prolactine, une TSH, une FSH et une LH
pour éliminer une maladie ovarienne primaire et un bêta-HCG pour s’assurer de l’absence
de grossesse. Un rapport FSH/LH > 2 aide à confirmer le diagnostic clinique de SOPK.

Pathologie Symptômes Tests

Hyper- Galactorrhée, troubles visuels, Prolactine sérique


prolactinémie céphalées. (AM)

Trouble
Exercice excessif, trouble alimentaire,
hypothalamo- LH et FSH ↓, E2 ↓
perte de poids.
hypophysaire

Insuffisance Symptômes de ménopause,


FSH ↑, E2 ↓
ovarienne précoce antécédents familiaux.

Forme partielle (fréquente) :


hyperandrogénisme progressif depuis
la puberté sans virilisme. Peut tout à 17- OH -
Hyperplasie des fait ressembler au SOPK. Progestérone ↑
surrénales
Forme complète (très rare) : ambiguïté (tôt le matin)
des organes génitaux externes dès la
naissance.

Apparition rapide d’acné et


Tumeur ovarienne d’hirsutisme, raucité de la voix, Testostérone ↑↑
clitoromégalie.

Tumeur Mêmes éléments que pour la tumeur


DHEAS ↑↑
surrénalienne ovarienne.

6
Obésité tronculaire, faciès lunaire, Test de suppression
Syndrome de pléthore, faiblesse musculaire à la dexaméthasone
Cushing proximale, peau amincie, vergetures 1 mg HS ou cortiso-
pourpres. lurie de 24 hrs

Rechercher des causes rares d’hirsutisme et d’hyperandrogénisme en présence de :


• début brusque typiquement en moins d’un an ou une augmentation rapide de l’hirsu-
tisme ;
• début des symptômes dans la trentaine ou plus tard plutôt qu’à la puberté, sans prise
de poids au préalable ;
• signes de virilisation incluant une clitoromégalie, une augmentation de la masse muscu-
laire ou une raucité de la voix.

6 Principes de base de prise en charge du SOPK


• La perte de poids et l'exercice physique doivent être au centre de la prise en charge.
• Les contraceptifs oraux combinés sont la première ligne de traitement des troubles
menstruels, de l’acné et de l’hirsutisme.
• Dans le SOPK, le clomiphène et le létrozole ainsi que la perte de poids sont les traite-
ments initiaux de l’infertilité.
• La metformine est efficace pour gérer le syndrôme métabolique et les anomalies gluci-
diques chez les femmes qui ne peuvent pas améliorer suffisamment leurs habitudes de
vie et perdre du poids.

7 Traitement de l’hyperandrogénisme
• Pour l’hirsutisme, on suggère initialement un traitement local d’électrolyse ou laser, car
le traitement médical agit sur les poils en formation et n’a pas d’influence sur les follicules
pileux déjà arrivés à maturité.
• L’effet d’une perte de poids ou d’un traitement sensibilisateur à l’insuline (metformine) sur
les manifestations d’hyperandrogénisme est peu marqué à court terme.
• Une préparation contraceptive avec un progestatif ayant un effet antiandrogé-
nique, tel que la drospirénone ou l’acétate de cyprotérone, sera de préférence utilisée
car elle agit plus rapidement et contrôle le cycle menstruel en même temps.

7
-- Le traitement entraîne une diminution très importante de l’acné après six mois. Ce
traitement procure également une atténuation modérée de l’hirsutisme après douze
mois chez la majorité des patientes avec un effet maximal après dix-huit mois. Tou-
tefois, tous les COC peuvent être utilisés et améliorent à long terme l'hyperandro-
génisme.

• Un traitement anti-androgène peut être utilisé après six mois si la réponse cosmétique
est sous-optimale. Il peut être débuté d’emblée si l’hirsutisme est sévère, ainsi que chez
les femmes qui ne veulent pas de contraception orale ou chez qui un contraceptif oral
est contre-indiqué (ou non toléré).

-- L’acétate de cyprotérone est un anti-androgène souvent prescrit. On utilise une dose


de 12,5 à 50 mg/jour selon la réponse clinique et le suivi des symptômes. Les effets
secondaires parpfois signalés sont une baisse de libido et un possible changement
de l'humeur.

-- La spironolactone à une dose de 50 mg id. (maximum 200 mg id.) est un bon choix
de traitement. Les effets secondaires les plus souvent signalés sont : les troubles
digestifs, l’insomnie, la fatigue et les maux de tête. La kaliémie devrait être surveillée
si la patiente prend des IECA, des ARA et/ou un supplément potassique.

-- Ces deux médicaments peuvent être ajoutés à un COC. Si utilisés seuls, une con-
traception efficace doit être utilisée car ils présentent un risque de tératogénicité.

8 Risque de maladies cardiovasculaires


La résistance à l’insuline très marquée, même en l’absence d’obésité, constitue l’un
des aspects longtemps négligés chez ces patientes. L’obésité abdominale (bien que de
30 à 50 % des patientes soient minces) vient amplifier le phénomène.

• Cette résistance à l’insuline entraîne une intolérance au glucose chez environ 30 % des
femmes affectées par ce syndrome et un risque de diabète sept fois plus élevé que dans
la population générale.
• La résistance à l’insuline est également associée à un risque plus élevé d’HTA et peut
provoquer ou accentuer une hyperlipidémie.
• Il est possible, mais non prouvé, que ces facteurs de risque soient associés à une inci-
dence élevée de maladies cardiovasculaires à long terme.
• Il y a une forte association avec l’apnée du sommeil, indépendamment du poids (dépis-
tage au questionnaire d’Epworth).
• La fréquence des examens de dépistage tiendra compte du degré d’obésité, des résul-
tats du 1er examen de dépistage et des antécédents familiaux de diabète et de maladies
cardiovasculaires.

8
Le maintien ou l’acquisition de saines habitudes de vie (alimentation, exercice,
absence de tabagisme) doivent être au centre de la prise en charge.
Une perte de poids de 5 à 10 % peut amener un retour à des cycles normaux, améliorer
les paramètres métaboliques et faire régresser les signes d’hyperandrogénisme.

Évaluer pour le syndrome métabolique toutes les femmes ayant le SOPK.


La moitié des femmes atteintes ont un poids normal et peuvent avoir peu de perturba-
tions de la tension artérielle et du bilan métabolique (glycémique et lipidique) mais elles
présentent quand même une résistance à l'insuline.

Dépistage du diabète

• La Nurses’s Health Study a démontré qu’un cycle menstruel > 40 jours doublait
presque le risque de diabète chez les femmes ayant un indice de masse corporelle (IMC)
< 25 ou entre 25 et 29 et l’augmentait de 3,9 fois chez celles ayant un IMC > 30.
• Dépistage du diabète : glycémie à jeun et test de tolérance au glucose (L’HbA1c n’est
pas le test de choix dans cette condition) :
-- Si tests normaux : dépistage à nouveau au moins à tous les 3 à 5 ans ;
-- Si tests anormaux : prise en charge et surveillance ;
-- Si un diagnostic d’intolérance au glucose ou de diabète est posé, le traitement non
pharmacologique sera renforcé. Un traitement pharmacologique seul ou avec le
contraceptif oral sera aussi recommandé pour traiter à la fois le SOPK et les troubles
métaboliques associés. Le premier choix est la metformine.

Hyperlipidémie

Si une hyperlipidémie est liée au SOPK, elle se caractérise surtout par une augmen-
tation des taux de triglycérides et une baisse du C-HDL.

• Une hyperlipidémie très importante indique un défaut génétique accentué par l’in-
sulinorésistance.
• Si grossesse envisagée : seules les résines sont sécuritaires, mais elles sont peu utili-
sées (contre-indiquées si hypertriglycéridémie).
• Si médication indiquée : statine pour une hypercholestérolémie, ou fibrate si hypertri-
glycéridémie très sévère (> 10 mmol/L) amenant un risque de pancréatite. L’acide nico-
tinique est efficace mais peut accentuer l’insulino-résistance (augmentation de la glycé-
mie) et est souvent mal toléré (flushing).

9
• En général, les anovulants ne sont pas contre-indiqués. Dans les faits, les CO augmen-
tent le C-HDL de ces patientes, mais peuvent aussi augmenter les triglycérides.
• Les LDL sont plus petites et plus denses, comme chez les patients diabétiques.
• Si bilan lipidique anormal : la 1re intervention sera la diète associée à l’activité physique.
Une perte de poids est souhaitable dans la majorité des cas.
• Si hypertriglycéridémie importante (> 5 mmol/L), si une contraception est nécessaire, les
stérilets au cuivre ou avec lévonorgestrel ainsi que le Depo-Provera® sont d’excellents
choix, car ils n’augmentent pas les triglycérides contrairement aux contraceptifs oraux
avec oestrogènes.

Hypertension artérielle

• Si ne répond pas à l’intervention sans médication, choisir un médicament n’aggra-


vant pas la résistance à l’insuline.
• Les bêtabloquants surtout, mais aussi les diurétiques, ne constituent pas un 1er choix,
car ils peuvent accentuer la résistance à l’insuline chez des personnes prédisposées.
• Les IECA et les ARA apparaissent comme un choix intéressant, car ils ont été associés
à une baisse de l’incidence du diabète à long terme dans plusieurs études importantes
et même à une baisse de la testostérone dans les études non contrôlées.

Bien que la résistance à l’insuline favorise l’HTA, si une HTA survient,


elle arrive en général tardivement.

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9 Hyperplasie endométriale
L’exposition prolongée à des oestrogènes non compensée par des progestatifs aug-
mente de façon significative le risque d’hyperplasie endométriale et de cancer de
l’endomètre.

• Les COC amènent une protection endométriale. Ils améliorent de façon importante
les saignements utérins dysfonctionnelles et préviennent le cancer de l’endomètre,
en plus de l’effet contraceptif et de la suppression androgénique.

• Si des cycles ovulatoires sont rétablis avec la prise d’un sensibilisateur à l’insuline, tel
que la metformine, l’endomètre sera protégé. Les règles doivent survenir aux moins aux
trois mois.

• On peut aussi déclencher des menstruations avec un progestatif (10 mg de Provera®


ou 200 mg de Prometrium® pendant 7 à 14 jours) au moins quatre fois par année afin
d’éviter l’hyperplasie endométriale. Ce traitement n’a bien sûr pas d’effet contraceptif ni
antiandrogénique.

• Les stérilets avec lévonorgestrel et le Depo-Provera®


peuvent prévenir l’hyperplasie, mais ils peuvent mal-
heureusement accentuer les symptômes d’hyperan-
drogénisme.

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10 Infertilité
• Pour les femmes avec un surplus de poids qui désirent avoir une grossesse, on
recommande une perte de poids et une augmentation de l’exercice.
• Si elles sont incapables de perdre du poids ou qu’une perte de poids n’amène pas
de cycle ovulatoire, l’induction ovulatoire avec le clomiphène ou le létrozole (Femara®)
est recommandée.

Les deux médications peuvent être utilisées en première intention. Toutefois, il y a moins
d'effets secondaires avec le létrozole et ce dernier serait plus efficace chez les femmes
obèses (IMC > 30).

La metformine peut être associée aux inducteurs de l'ovulation, en particulier chez les
femmes obèses et plus âgées.

11 Troubles de l’humeur
Il y a de plus en plus d’évidences que le SOPK est associé à une incidence élevée de
dépression et de troubles anxieux, à une diminution de la qualité de vie, à de l'apnée du
sommeil et à des troubles de l’alimentation (boulimie), en comparaison avec les personnes
présentant le même IMC. Il devrait donc y avoir un dépistage de ces problèmes de santé
chez ces femmes.

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Références

-- Legro, RS et al. Diagnosis and treatment of polycystic ovary syndrome: An endocrine


society clinical practice guidelines. J Clin Endocrinol Metab, decembre 2013, 98 (120
4565-4592.

-- Legro et al. Letrozole versus clomiphene for infertility in the polycystic ovary syndrome.
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-- Croteau, Myriam et Bérubé, Jocelyn. Diagnostic et traitement des ovaires polykystiques.


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-- L. Barbieri, Robert et A. Ehrmann, David. Diagnosis of polycystic ovary syndrome in


adults, 2012 Uptodate.

-- L. Barbieri, Robert et A. Ehrmann, David. Treatment of polycystic ovary syndrome in


adults, 2012 Uptodate.

-- L. Barbieri, Robert et A. Ehrmann, David. Clinical manifestations of polycystic ovary syn-


drome in adults, 2012 Uptodate.

-- Morin-Papunen, Laure, S. Rantala, Anni, Unkila-Kallio, Leila et al. Metformin Improves


Pregnancy and Live-Birth Rates in Women with Polycystic Ovary Syndrome (PCOS) :
A Multicenter, Double-Blind, Placebo-Controlled Randomized Trial. J Clin Endocrinol
Metab, May 2012, 97(5).

Auteurs :
Jocelyn Bérubé, M.D., clinique de planning, CSSS de Rimouski-Neigette.
Gilles Côté, MD, omnipraticien, CISSS du Bas-Saint-Laurent.

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